societe augustin barruel 25

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S 0 C 1 E T E I/ CENTRE D'ETUDES ET DE RECHERCHES SUR LA PENETRATION ET LE DEVELOPPEMENT AUGUSTIN DE LA REVOLUTION DANS LE CHRlSTlANISME BARRUE L I/ Courrier : 62, Rue Sala 69002 LYON UN MUSULMAN INCONNU: RENE GUENON LA REVOLUTION SEXUELLE - 5 GNOSE ET LITTERATURE CONTEMPORAINE GNOSE ET ISLAM - 1 CRETINEAU-JOLY L'AMI DES PAPES ET DE LA VERITE QUELQUES LIVRES DANS LA PRESSE: IN MEMORIAM JEAN VAQUIE SOMMAIRE No 25

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  • S 0 C 1 E T E I/ CENTRE D'ETUDES ET DE RECHERCHES SUR LA PENETRATION ET LE DEVELOPPEMENT

    AUGUSTIN DE LA REVOLUTION DANS LE CHRlSTlANISME BARRUE L I/ Courrier : 62, Rue Sala 69002 LYON

    UN MUSULMAN INCONNU: RENE GUENON

    LA REVOLUTION SEXUELLE - 5

    GNOSE ET LITTERATURE CONTEMPORAINE

    GNOSE ET ISLAM - 1

    CRETINEAU-JOLY L'AMI DES PAPES ET DE LA VERITE

    QUELQUES LIVRES

    DANS LA PRESSE: IN MEMORIAM JEAN VAQUIE

    SOMMAIRE No 25

  • SOMMAIRE NO 13 SOMMAIRE NO 7

    Itinraires vers un *sotrisme chrtien. Ni dialogue. ni polmique

    La .Nouvelle Droite- et ses fondements doctrinaux

    La subversion de l'ide de cration dans la gnose barlienne

    Introduction historique l'tude de l'cumnisme - 1 3 L'Antimaconnisme au XIXe siecle 22 Les sources protestantes 27 La faiblesse des meilleurs, force de la rvolution 4 1

    Contribution b I'tude de l'hermtisme 44 L'Abb Emmanuel Barbier In memoriam : 2e Editson 53

    Quelques prcisions L'Abb Emmanuel BARBIER : In memoriam

    A propos de Mthode Les divers plans de I'Etude

    Des nuances ncessaires

    Aux racines philosophies de la crise contemporaine

    La crise de I'Eglise et ses origine

    A propos de la Contre-Eglise et des difficults poses par son tude

    En feuilletant les livres

    Introduction historique I'tude de l'cumnisme - 6

    SOMMAIRE N O 14 SOMMAIRE No 8 SOMMAIRE No 2

    A la dcouvene de I'lslam

    Les dveloppements de la biopolitique en France depuis 1945 Rudolf STEINER. de la thosophie I'anthroposophie

    De l'me humaine - 1 Un itinraire Borellien ?

    Aux sources du recentrage aprs le Concile Vatican II

    L'affaire des Esseniens 3

    2 L'Abb PROYART Emule et contemporain de BARRUEL 14

    3 1890/1940 : cinquante ans de lutte antimaconnique 2 1

    1 1 Contribution b l'tude de l'hermtisme 2 32

    l4 Introduction historique A I'tude de l'cumnisme 46

    20 24

    Pour rester en bonne compagnie de Barbier Barruel

    Le Pere Barruel et l'action des Loges au XVllle sicle

    Quand un nouveau converti dcouvre le Sillon

    L'Abb Barbier face aux astuces du catholicisme libral

    La pntration maconnique dans la Socit Chrtienne

    Le brlant problme de la .Traditionn

    Premiers jalons pour une histoire de la Rvolution Liturg~que SOMMAIRE No 15

    SOMMAIRE N O 9 Les piges du symbolisme le cas de Jean HANI

    A la dcouverte de I'lslam - II SOMMAIRE N O 3 La Gnose -Traditionnaliste" du Professeur BORELLA 3 Une nouvelle attaque contre la foi :

    3 l'Omission du Filioque 25 Descartes et la foi catholique 40 Introduction historique b I'tude

    23 de I'E~cumnisme 53

    L'initiation aux petits rnysteres dans I'anthroposophie de RudoM STEINER

    De IOme humalne - II Les forces antagonistes au Liban

    Tmoignages sur les origines de la de la rvolution liturgique - Ze Edition

    Christianisme et Rvolution Premires approches

    Le Gnral Franco et la Rvolution de 1976 La gnose. tumeur au sein de I'Eglise

    Le Pre Jandel. futur Maitre Gnral de l'Ordre des Freres Prcheurs a-t-il chass le diable d'une loge lyonnaise ? Le Priple Augustinien et ses consquences intellectuelles 40

    SOMMAIRE No 10 SOMMAIRE ND 16

    Un musulman inconnu. Ren GUENON 3 Une lettre de Monsieur BORELLA 23

    Dveloppements actuels de la gnose

    A la dcouverte de I'lslam III

    La crise de la philosophte chrt~enne en France au XXe siecle

    La christologie de Rudolf STEINER

    La christologie sur les origines du Centre de Pastorale Liturgique 2' Edition

    SOMMAIRE N O 4

    Petite chronologie cartsienne 27 Les luttes de l'Abb Barbier

    Les esseniens taient-ils les bionites ? 31 Les conditions gnrales du Pouvoir et de la Religion Dmoniaques L'impact de la lutte antimaonnique

    'O d'avant 1940 45 En feuilletant les livres 26

    Introduction historique I'tude de De la vraie philosophie comme prliminaire l'cumnisme - 4 45 la Rvlation

    Le spiritualisme subversif : Tmoignage sur les origines Colloque des 24.25.26 aot 1982 57 de la Rvolution Liturgique 41 Rponse Monsieur BORELLA 60

    SOMMAIRE No 17

    SOMMAIRE No 5 Un prtre parle

    L'hritage de I'Abb Lefbvre

    A propos de deux journalistes

    Le Jansnisme, de l'hrsie la troisime voie

    Le no-platonisme et la raction anti-chrtienne des premiers sicles

    Les ractions des pouvoirs publics devant la prolifration des sectes

    A l'occasion du centenaire de l'encyclique Aerterni Patris

    SOMMAIRE No 1 1 3

    Protestantisme et libralisme

    En feuslletant les livres

    La gnose d'hier b aujourd'hui

    Le drame du ralliement : 1 3 l9 Ren GUENON et le Sacr-Cur 18 22 Introduction historique 3 l'tude 31 de I'cummnisme - 5 24

    Un pige curnniste : le puseyisme 33 34 Christianisme et Rvolution

    Ze Edition 45

    Prcurseurs oublis

    Apercu sommaire de la doctrine de l'hyl4morphisme

    A la dcouverte de I'lslam - IV

    SOMMAIRE No 6

    La vie et les uvres de I'Abb Augustin Barruel SOMMAIRE No 12 SOMMAIRE No 18 Un franc-tireur muscl, Joseph Sarto

    Le Cardinal PIE. un vque des temps modernes

    Gnose el Humanisme - 1 3 Note Bibliographiques 19 L'Islam Religion sous le vent de la polilique - 1 21 Le myhe du Graal 41 Le briilant problbme de la tradilion 2% Edition 51

    Gnose et Gnosticisme en France l 4 au XXe sicle 3 20 Le drame du ralliement - 2 14

    Une rsurgence de la Gnose au 30 XXe sicle : le borellisme 30

    L'cumnisme en question 45

    La gnose aujourd'hui

    Tmoignage sur les origines du Centre de Pastorale Liturgique A propos de la contre-glnse et des difficults poses par son tude Ze Edition

  • Un musulman inconnu: Ren Gunon

    Depuis bientt 15 ans les thmes de 1'Esot- risme Chrtien ont t voques dans un grand nom- bre d'articles de ce Bulletin, que ce soit de faon directe ou indirecte. En voici laliste :

    1 - A propos de la Contre &lise et des mcul- ts poses par son tude (repris dans le N 6). 2 - Le brlant problme de la Tradition - (repris dansN 18). 3 -Lagnose tumeur au sein de I'Eglise. 5 - Lagnose d'hier aujourd'hui. 6 - Lagnoseaujourd'hui 9 - Lagnose traditionaliste du Pr. Borella. 1 O - Un musulman inconnu, Ren Gunon. 10 - Le spiritualisme subversif. 10 - Correspondance avec le Pr. Borelia. 1 1 - Ren Gunon et le Sacr-Coeur. 12 - Gnose et gnosticisme en France au XXe sicle. 12 - Une rsurgence de la gnose au XXe sicle : le Borellisme. 13 - Itinraires vers un sotrisme chrtien. 13 - La subversion de la notion de cration dans lagnose borellienne. 14 -Un "Itinraire" Borellien? 15 - Les piges du symbolisme : le cas de Jean Hani. 16 - Dveloppementsactuels de la gnose. 17 -L'Hritage de l'Abb Lefibre. 17 -Un prtre parle. 181 19 -Gnose et Humanisme. 20121 - Gnose et Romantisme 24 - Gnose et classicisme

    Celies de ces tudes rdiges par M. Etienne Couvert ont t reprises dans deux ouvrages publis par les Eitions de Chir : "De la Gnose I'Oecum- nisrne" - "LaGnose contre IaFoi". Que l'on peut com- mander : Diffusion de la Pense Franaise - Chir en Montreuil- 86190Vouill.

    Aprs le N Spcial sur 1'Ekole Moderne de ISE- sotrisme Chrtien (N 22/23, toujours disponible au prix de 100 Francs), il nous a paru intressant de reproduire ci-dessous l'article consacr a Ren Gunon et son priple doctrinal, vritable modle du genre. Cette tude publie voici onze ans dans le bulletin N 10 a sans doute chapp UII grand nombre

    de nos abonns actuels, qui pourront donc en prendre connaissance avec grand profit et en retirer un clai- rage indispensable pour les dveloppements de la pntrationgnostique contemporaine.

    LES l3TAF'ES DE SAVE

    Ren Gunon, n a Blois le 15 nwembre 1886, fut baptis sous les noms de Ren, Jean, Marie, J e seph. Ses parents taient originaires de Blois o son pre tait architecte. D'une sant dlicate, Ren eut une frquentation scolaire intermittente : il fut nan- moins un lve brillant remportant un accessit de phy- sique au Concours Gnral ainsi qu'un prix d'une socit scientifique de Blois ; il fit ensuite la classe de Mathlmentaire Blois, puis en 1904, il vint Paris pour prparer une licence de Mathmatiques au "Col- lge Rollin".

    Et voil que deux ans plus tard, c'est--dire en 1906, il renonce apomuivre ses tudes universitaires ; ds lors il va s'orienter vers renseignement priv et devenir professeur d'cole libre. Pourquoi ce tour- nant, raisons de sant, ou bien attrait pour des tudes extra-universitaires ?

    C'est probablement cette seconde explication qui est la bonne, car c'est a partir de cette poque que Gunon se met frquenter les milieux intellectuels qui sont passionns par ce que l'on nomme "la con- naissance" c'est--dire les nespiritualistes, les th- osophes, les occultistes, les spirites, les orientalistes, etc.

    Jusqu' son dpart de Blois, Ren Gunon avait surtout volu daus un miljeu "catholique". Ses b i e graphes ne relatent aucune hostilit manifeste du jeune homme ce milieu et cette influence "bien- pensante". Us notent cependant vers 14- 15 ans une altercation avec un de ses professeurs : a la suite d'une longue discussion de plusieurs heures, le jeune Ren s'alita avec une forte fivre, et son pre dut le changer d'cole. Mais dans l'ensemble on ne trouve pas de rvolte contre sa religion maternelle jusqu'a son arri- ve Paris.

  • Cette absence d'hostilit, cette absence de com- bativitb, il la conservera toujours et elle constituera mme un des points essentiels de sa doctrine. Il n'attaquera pas le catholicisme violemment, il le con- servera en bloc, moyennent des rserves et des am- nagements : il se contentera de l'englober dans un systme plus vaste dont le catholicisme sera seule- ment un cas particulier. Sa grande formule tactique : se superposer sans s'opposer.

    A Paris, Ren Gunon habitait un appartement situ 51 rue St Louis en l'Ile dans un bel immeuble Louis XV au pass historique qui avait t occup par l'archevch de Paris vers 1840 et o Mgr Afi-e, tu sur les barricades en 1848, fut conduit. Gunon devait garder assez longtemps ce domicile, mme aprs son dpart de France.

    Aprs avoir abandonn ses tudes universitai- res, o d'ailleurs il ne semble pas avoir trs bien russi, il avait pris des postes de professeur dans diverses institutions libres enseignant tantt les mathmati- ques et la physique, tantt la philosophie. Sans avoir jamais t vraiment pauvre, il n'a pas non plus men "la grandevie ; il tait de temprament studieux et soli- taire et cette vie modeste lui convenait bien.

    Cette vie solitaire n'tait pourtant pas exempte de dmarches et de prises de contacts personnels. Mais surtout, pendant qu'il bnficiait de ses premiers contacts personnels avec les matres con- temporains de la science sotrique, il se nourrissait de livres.

    En 191 2 Gunon pouse une jeune file de Blois, Berthe Loury, originaire de Chinon ; le mariage eut lieu prs de Chinon dans la proprit de la nouvelle pouse, avec une dispense de Bans accorde par l'ar- chevque de Tours, le 1 1 Juillet 19 12. On est en droit de se demander si le marie tait toujours catholique ce moment-la, car cette anne 1912 est aussi celle de son initiation soufiste (sotrisme musulman) ; ce qui parat certain, c'est qu'il ne rvla jamais a sa femme son appartenance l'Islam.

    Le jeune mnage vint habiter Paris dans 1'Ile St Louis, tandis que Gunon continuait le professorat. Lorsque survint la guerre de 1914, lui qui avait t r- form lors du conseil de rvision en 1906, fut mainte- nu dans cette situation et ne fut pas mobilis ; il resta -

    donc dans l'enseignement libre o il occupa successi- vement divers postes.

    En 1915- 1916, il est supplant au Collge de St Germain.en Laye ; l'anne suivante 1917, il est Blois comme professeur de Philosophie ; puis en 1918, il est

    envoy a Stif en Algrie, et la fin de la guerre, il re- vint Blois. Et enfin Paris o il retrouve i'ne St Louis : c'est l qu'il va commencer rdiger ses premiers livres, car jusqu'alors il n'avait crit que des articles.

    Nous sommes en 1921. Sur le plan mondial, en Russie, c'est la NEP (nouvelle conomie politique) qui va empcher la dbcle des communistes et attirer les capitaux amricains. En Chine, c'est le moment des premires meutes communistes a Canton, et d'ailleurs la Chine est en plein Kuornintang, donc en plein modernisme. Le congrs communiste de Bakou vient de dcider i'extension de la Rvolution prolta- rienne aux Empires coloniaux.

    Et a Paris, Ren Gunon, "musulman inconnu", sort tranquillement son premier 1Me qui s'intitule : "Introduction gnrale l'tude des doctrines hin- doues", tandis que tout un public compos pour partie d'occultistes et pour partie de traditionalistes, de ractionnaires, d'anti-modernistes, de contempla- tifs, commence tre sduit par son aitude, son rou- lis et son vertige. Entre 1921, 1922 et 1923, Gunon publie les trois ouvrages qui constituent la phase prli- minaire prparatoire de sa manoeuvre doctrinale.

    On peut noter que 1921, c'est le beau temps de la SDN Genve, c'est l'poque ou l'Allemagne emploie sa diplomatie a merer le payement des rparations de guerre. 1922 est l'anne du premier trait germa- no-sovitique de Rapallo, c'est aussi l'anne de l'as- sassinat du ministre allemand Walter Rathenau par les nationalistes allemands. Et 1923 fut l'anne de l'occupation de la Ruhr par les troupes franaises.

    De 1924 1929, Gunon fut professeur de Phi- losophie au "Cours Saint Louis" o il d o ~ a aussi des leons particulires d'autres matires. C'tait l'ins- titution o sa nice faisait ses tudes.

    En 1928 il perdit sa femme Berthe Loury, puis quelques mois plus tard sa tante, Mme Duru, qui avait longtemps partag la vie du mnage ; sa nice dont il pouvait plus ds lors s'occuper fut confie d'autres personnes. Finalement, l'anne suivant il cessa d'en- seigner et se tourna vers un autre mode de subsis- tance.

    Car a cette poque, au milieu de l'anne 1929, Ren Gunon fit une rencontre importante pour son avenir : dans le bureau de la Librairie Chacornac, quai St Michel Paris, il rencontra une certaine Madame DINA qui tait amricaine et vewe d'un ingknieur gyptien. Madame DMA habitait Bat--Aube en hiver et Cruseilles en Haute-Savoie pendant l't.

  • En Septembre 1929, Gunon et Madame DINA partirent pour visiter l'Alsace pendant deux mois ; puis ils vinrent se reposer Cruseilles. C'est au cours de ce voyage que fut dcid l'arrangement suivant : Mme DINA rachterait aux diteurs parisiens les di- vers livres de Gunon pour les r&diter ensuite dans une nouvelle maison qui diterait aussi les livres postrieurs que Gunon se proposait d'crire.

    Ils cherchrent d'abord Grenoble une maison d'diteur apte a oprer cette concertation. Finale- ment Mme DINA envisagea la cration d'une librai- rie et d'une collection tendance 'Traditionaliste". Puis, tous deux s'embarqurent pour i'Egypte afm de recopier des textes de l'sotrisme soufiste destins cette librairie et cette collection.

    Gunon disait ses amis de Paris qu'il partait pour environ trois mois, mais, ces trois mois couls, Mme DINA revint seule Paris tandis que Gunon continua travailler en -te. Cette sparation mit fin au projet de librairie et de maison d'dition. Fina- lement aprs avoir remis de mois en mois son voyage de retour en France, il y renona tout-fait : il ne devait jamais revenir. Il s'installa au Caire sous le nom de SHEIK ABDEL WAHED YAHIA, Il s'islamisa compltement et finit par parler l'arabe sans accent. Il devait obtenir la nationalit gyptienne en 1947.

    Il continua toutefois d'crire en franais pour des diteurs parisiens et envoyer des articles la re- vue "Le Voile d'Isisw qui devint partir de 1933, "Les EtudesTraditionnelles".

    Gunon conserva son appartement de 1'Ile St Louis jusqu'en 1935, et des amis lui expdirent alors ses livres en caisses au Caire. En Egypte il logea d'abord a l'htel, puis il loua un appartement dans la maison d'un confiseur, situe prs de l'Universit isla- mique d'El Azhar. En juillet 1934, il pousa une jeune musulmane gypt ie~e et alla habiter chez son beau-pre ; mais l'arrive de ses caisses de livres ve- nant de Paris l'obligrent dmnager et a s'installer dans une autre maison en compagnie de sa femme, de son beau-pre et de sa belle-soeur, o il resta jusqu'en 1937, date laquelle son beau-pre mourut. Ce fut i'occasion d'un nouveau dpart et d'une installation dfinitive en dehors du Caire, dans une banlieue cal- me l'ouest de laville.

    C'est dans cette maison des faubourgs du Caire que Gunon mourut son tour le 7 Janvier 1951, a i'ge de soixante cinq ans.

    LA FORMATION LIVRESQUE

    Nous nommerons seulement ses quatre princi- paux inspirateurs : Matre ECKHART (Moyen-Age), St Yves dlALVEYDRE (Restauration), Fabre d'OLIVET(Resauration), Eliphas Levi (Second Em- pire).

    - MARE ECKHART - Thologien et philo sophe denland de la seconde moiti du XIUme si- cle. Arne fervente et exalte, il rigea ses ides en un ventable systme mystique. Un chapitre gnral des Dominicains le suspendit de ses fonctions de prieur de la province d'Allemagne. Son systme est un PANTHEISME MYSTIQUE plein d'une intense reli- giosit naturelie.

    Il n'y a qu'un seul ETRE, c'est DIEU. Les autres cratures ne sont pas vraiment des "tres" ; ce sont seulement de vaines ombres.

    Pour exister vraiment, il faut que les cratures fi- nies se dpouillent de leurs formes contingentes et qu'elles "entrent" en Dieu, qu'elles deviennent Dieu.

    Jusque Id, tout va peu prs bien. part une in- contestable exagration quant la vanit de l'existen- ce des tres crs ; car enfia, si leur existence est prcaire et transitoire et si elle demande tre confir- me la suite d'une preuve, i'existence de ces cratu- res a tout de mme un premier degr de raiitk : elles ont t tire du nant, donc elles ne sont dj plus du nant, elles ne sont plus de "vaines ombresn.

    Ce qui va tout compromettre dfiivement, c'est que le systme de Matre ECKHART est en m- me temps panthiste. II faut ds lors que ces vaines ombres que sont les cratures finies, pour se diviniser, se perdent dans le GRAND TOUT qui est Dieu. On voit tout de suite la parent de ce systme avec la mta- physiquedes religions de l'Inde.

    Ren Gunon fut extrmement impressionn par le systme de Matre ECKHART parce qu'il tait exprim l'aide d'une terminologie tout--fait chr- tienne. Or sa formation familiale avait tk chrtie~e. II continuait frquenter quelques ecclsiastiques. A aucun moment de sa carrire (et surtout pas ses dbuts) il ne manifesta l'ide de rompre avec sa reii- gion maternelle.

    Simplement il cherchera i'englober dans une synthse plus vaste au milieu de laquelle eiie pourrait conserver son homognit.

  • - L'orientaliste dont les livres exercrent une in- fluence sur Ren Gunon est FABRE D'OLIVET (1767-1825). C'est un auteur dramatique, un roman- cier, et surtout un iinguiste. Le dictionnaire biographi- que note que Fabre d'OLIVET' mle une certaine extravagance mystique ses dveloppements sur les Hiroglyphes, sur les langues orientales et sur les d - gories bibliques.

    Un de ses principaux ouvrages s'intitule : "De l'Etat Social de 1'Homrne" et il y parle de soumettre la socit humaine une souverainet thocratique. C'est prcisment une des ides que nous verrons re- venir chez Ren Gunon. Nous noterons en effet une tendance gunonie~e I'HEGEMONIE SACER- DOTALE ; Gunon donnera toujours la suprmatie I'AUTORITE SPIIUTUELLE sur le pouvoir tempo- rel. Cette notion dont il a eu la premire ide chez Fabre d'OLIVET, il la retrouvera dans le Brahrna- nisme.

    - SAINT YVES D'ALVEYDRE - est le troisi- me inspirateur. Ses ouvrages taient trs lus au temps de la jeunesse de R Gunon qui s'est imprgn de la substance contenue dans : "La Mission de i'Inde", "L'Archomtre", "La Mission des JUIFS", "La Mis- sion des Ouvriers", "LaMission des Rois", ''La Mis- sion des Franaisw o avec une richesse et une souplesse d'expression extraordinaires, St Yves d'Al- veydre propose et mme projette un remaniement g- nral des religions ala surface de laTerre.

    11 reprend l'ide trs ancienne, et trs maonni- que, d'une superreligion sotrique (c'esta-dire r- serve une lite) et complte, pour la masse du peuple, par un syncrtisme plus ou moins uniformis selon les possibilits locales.

    Cette super-religion serait naturellement la continuation de la vaste et immmoriale Tradition Universelle, qui se transmet d'ge en ge d'une manire sotrique comme le myclium d'un charnpi- gnon. Nous tenons l les principaux lments de ce qui va devenir la doctrine gunonienne et surtout sa distinction entre Esdrisme et Exotrisme. Seule- ment St Yves les expose avec l'appareil archologique de son temps et aprs des contacts avec l'Orient qui fiirent surtout livresques.

    - Le quatrime inspirateur livresque de Gunon - fut ELIPHAS LEVI, de son vrai nom Alphonse Louis

    CONSTANT, connu comme l'abb CONSTANT bien qu'il n'ai pas r q u le sacerdoce. Eliphas LEVI a influenc R Gunon par deux de ses livres : "La Clef des Grands Mystres" et "Dogme et rituel de Haute-Magie" parue en 1861 ; ces ouvrages taient encore en vogue en 1906 quand Gunon procdait au

    rassemblement de ses matriaux.

    Ses ouvrages dveloppent, eux aussi, en la dsi- gnant sous le nom de : PHiLOSOPHIE OCCULTE, la notion de i'UNTE ESSENTIELLE DE TOUTES DES RELIGIONS'. Cette ide n'tait pas nouvelle, mais depuis quelques dizaines d'annes cette id& avait cd le pas dans les cercles intellectuels qui gra- vitent autour de la Franc-Maonnerie devant les NO- TIONS RATIONALISTES qui excluent toute ide de Religion. On ne parlait plus teliement de I'UNITE DES RELIGIONS parce que l'on n'avait plus besoin de religion.

    ELIPHAS LEVi est i'un de ceux qui ont renver- s la vapeur et qui ont remis l'accent sur le spiritualis- me. Voici un texte pris dans "Dogme et Rituel de la Haute-Magie" :

    "A travers le voile de toutes les allgorie hirarchi- ques et mystrieuses rpandues dans les anciens do- gmes, travers les tnbres et les preuves bizarres de toutes les anciennes institutions, sous le sceau de toutes les critures, dam les ruines de Ninive et de mbes, sous les pierres ronges des anciens temples, et sur la fa- ce noircie des sphinx de 1Assyrie ou & l8Egvpte, dans les peintures monstrueuses ou merveilleuses qui traduisent les croyances de lnde et les pages sacres des Wdas, dans les emblmes tmnges de nos vieux li- vres d blchimies, dans les crmonies de rceptionspra- tiques par toutes les socits mystrieuses ..,, on retrouve les trams d'une doctrine partout la mme et partout soigneusement cache. La PHILOSOPHIE OCCULTEsemble mirt la nourrice ou la marraine de toutes les religions, le levier secret de toutes les fores intellectuelles, la cl de toutes les obscurits divines, et la reine absolue de tous les ges o elle tait exclusive- ment rserve 1 ducation &s prtreset des rois".

    Rsumons les penseurs qui apportrent Ren Gunon ses premiers matriaux :

    - MMTRE ECKHART, qui l'influence par son panthisme mystique, et sa mthode de mditation pour atteindre le Dieu Immanent.

    - SAINT-YVES D'ALVEYDRE, qui lui appor- te son ide de super-religion swrique et de ratta- chement I'Orient.

    - FABRE D'OLIVET, avec son ide de Souve- rainet thocratique et de Suprmatie sacerdotale.

    - ELIPHAS LEVI, son ide de Philosophie oc- culte, et d'UNE essentielle des religions.

  • Un des biographes de Gunon, Jean Robin, dans un o u m e qui fait partie de nos sources "Ren Gunon Tmoin de la Tradition", met pourtant en doute l'influence que de telles lectures ont pu avoir sur la formation de Gunon. 11 soutient tout au long de son livre I'ide de la Mission Providentielle, mission non-humaine de Gunon. Dans une telle hypothse les lectures faites par Gunon n'auraient eu pour effet que de le tenir au courant de l'tat actuel de la ques- tion, mais non pas de lui avoir appris, positivement, quoi que ce soit.

    LEPERIPLE DANS LES SECIES EUROPEENNES

    Bien que trs port sur le travaii solitaire, et nous avons vu quelles taient ses quatre principales sources d'inspiration livresque, Ren Gunon ne ddaignait pas les contacts personnels. Et a partir de 1907, il prit de nombreux contacts avec des organisations qui vont lui faire parcourir un priple trs instmctif

    Il reut un jour dans son appartement parisien de l'Ile Saint Louis la visite de deux Messieursvenus le voir de la part d'"un groupe" assez restreint nomm : L'ECOLE HERMETIQUE. Il s'agit d'un groupe di- rig par le Docteur Philippe Encausse, dit Papus, qui l'avait fond en 1888. En 1907, le Mouvement fonctionne donc depuis une vingtaine d'annes. Les deux Messieurs sont Mrs PHANEG et BARLET, le principal tant PHANEG avec lequel Gunon va res- ter li pendant unelongue priode.

    Cette Ecole Hermtique est un groupe d'tudes sdriques qui a pris la forme d'une Petite Universit Libre dont le sige est situ au 13 de la rue Sguier Paris et o des cours sont donns par Papus, par Bar- let, par Phaneg et par Yvon Leloup (dit Sdir) qui s'occupe surtout du sens cach des Ecritures.

    Mais surtout cette Ecole Hermtique est 1'"anti- chambre" d'un ordre plus discret qui se donne le nom d'"ORDREMARTIN1STE et qui se dit le successeur rgulier de I'ORDRE des ELUS COHENS, fond au XWIrne sicle par Martinez Pasqually. Ren Gunon ne tarda pas a entrer dans cet Ordre Martinis- te o il reut le premier, puis le second et le troisime degr devenant ainsi "SUPERIEURMCONNU".

    Sur cette lance Gunon, qui est aussi avide de connatre que trs apte a assimiler, se fait recevoir en- core dans deux loges maonniques qu'il sait tre en re- lation d'amiti avec l'Ordre Martiniste de Papus. Ces deux loges sont : 1) la "Loge Symbolique" "Humani- dad" du Rite National Espagnol". 2) "Le Chapitre et Temple INN" du rite originel Swedenborgien. C'est

    dans ce chapitre swedenborgien qu'il reut le Cordon Noir de "Chevalier Kadosch" (le mot Kadosch signi- fiant Saint).

    A la mme poque il commena collaborer la re- vue "Le Voile d'Isisw. 11 prit peu peu de plus en plus d'importance au sein de sa rdaction et il lui resta extrmement fidle : on peut mme dire que c'est lui qui en fm la ligne doctrinale et il continua lui en- voyer des articles quand il rsida en Egypte. C'est cette revue qui changea de nom en 1933 pour devenir "Les Etudes Traditionnelles".

    Or ce fut prcisment cette revue "Le Voile d'I- sis" qui fut charge en 1908 de la partie administrative du "Congrs Maonnique et spiritualiste" organis Paris la "Saile des Socits Savantes". Ren Gunon fut tout natureliement dsign comme "Secrtaire du Congrs", et il sigea au Bureau. C'est aiasi qu'on le vit sur l'estrade dcor de son Cordon de Soie Noire de Chevalier Kadosch.

    Mais ce Congrs fut pour Gunon l'occasion d'un tournant important, disons mme dterminant, la suite d'un vnement imprvu. Certains confren- ciers tinrent au sujet de 1'"IDENTITE SPIRITUEL- LE, c'est--dire sur un point de la mystique initiatique particulirement dlicat et important, des raisonnements qui lui dplurent fort. Sans que l'on puisse connatre le dtail de la querelle on sait qu'il quitta le Congrs trs mcontent et qu'il commena ds lors a manifester son dsaccord quant l'ORIEN- TATION RATIONALISTE DE LA F.M. AC- TUELLE.

    Ce dsaccord est rest depuis l'un des lments fondamentaux de la Doctrine et de la Stratgie Gunonienne. La BIFURCATION "paramaonni- que" de Gunon que nous d o n s constater par la suite datede ce jour-l.

    C'est a ce Congrs de 1908 que Gunon rencon- tra un autre personnage important du monde sotri- que : FABRE DES ESSARTS, qu'il ne faut pas confondre avec Fabre d'Olivet, et qui tait beaucoup plus COMU sous son pseudonyme de SYNESIUS. 11 tait patriarche de I'Eglise Gnostique.

    Gunon demanda videmment au Patriarche Synesius d'tre admis dans cette Eglise, ce qui fut fait ; il devint mme l'anne suivant, en 1909, vque gnostique sous le nom de Palingenius (du grco-latin "Palingenius", n de nouveau, ou re-n). C'est dsor- mais sous ce pseudonyme de Palingnius qu'il crira entre 1909 et 1912 un grand nombre d'articles dans la revue "La Gnose".

  • Si nous rsumons la situation, nous constatons qu'entre 1906 et 1909, soit entre savingtime et sa vin- gt-troisime anne, Gunon a avanc a pas de gant dans la carrire maonnique et sotrique : auditeur a 1'Ecole Hermktique de Papus, membre de l'Ordre Maribiste avec le grade de Suprieur inconnu, aff"ili la loge Humanidad, membre du Chapitre sweden- borgien INRI avec la grade de Chevalier KADOSCH, rdacteur de la m e "Le Voile d'Isis, vque gnostique sous le pseudonyme de Palingenius, rdao teur a la revue ''La Gnose".

    Il reste que l'on peut se demander s'il se trouvait a l'aise dans ces differents groupements et la rponse serait qu'il tait moiti satisfait, pour les raisons sui- vantes. Il constate que toutes les doctrines qu'il en- tend exposer sont dissemblables au point qu'il est impossible de les coordonner pour en faire un unique et stable, selon l'ambition commune de tous cesrnilieux.

    Son premier reproche est donc celui-l ; on lui prsente des doctrines spirituastes dissemblables et inaptes constituer un corps de doctrine cohrent. Mais il leur fait aussi un second reproche beaucoup plus grave, plus profond, et c'est la sans doute le coup de gnie qui lui a permis de devenir le vrai matre de la subversion spiritualiste moderne pour cette seconde partie du 20me sicle.

    Il leur dit : "C'est 1 'esprit scientzj2que que vous a p pliquez aux phnomnes spirituels. Vous tes des Ob- servateurs de phnomnes, et vous leur appliquez la mthode exprimentale".

    Bien sr, il a constat chez ses amis de I'Ecole Hermtique, de l'Ordre Martiniste, etc, le souci de re- donner "aux forces de l'Espritw, leur primat, le souci de rompre avec le rationalisme de l'poque anti- clricale. Mais il constate aussi que ce spiritualisme est encore exprimental, scientifique, empirique, "phnomnal" : ces Messieurs recherchent "des pou- voirs". Or il a, lui, l'intuition que cette science des "for- ces spirituelles" qui est de l'ordre religieux, ne doit pas partir en bas pour s'lever ensuite par induction jus- qu'a des lois.

    il a l'intuition qu'il existe une trs ancienne science spirituelle, riche de postulats priori, une Tradition archaque, immuable, infkillible, que l'on a oublie et qu'il faut restaurer.

    On peut dire que la raction de Gunon en face du spiritualisme qui tait en usage a ce moment-l en France, marque l'entre en jeu d'une mentalit, et d'habitudes d'esprit nouvelles et authentiquement originales.

    Voil donc Renk Gunon en divergence et en discussion avec les organisations dont il fait partie et en particulier avec le personnage majestueux et haut en couleur de Papus. Il jugea le moment venu de re- grouper autour de lui les individualits assez libres d'esprit pour comprendre sa nouvelle position, (1 la fois spiritualiste, traditionnelle, mtaphysique, con- templative et intuitive.

    Pour faire ce choix d'individualits ii va puiser surtout dans le p e r s o ~ e l de l'Ecole Hermtique et dans l'Ordre Martiniste. L'affaire tait en prparation lorsque, au dbut de 1908, plusieurs des personnages intressants et dj pressentis, se trouvrent runis dans une chambre d'htel au 17 de la rue des Canet- tes, prs de St Sulpice, pour en discuter. Or voila qu'tant rassembls et cogitant, ils reurent certaines "Communications en Ecriture Directe", c'esta-dire que l'un d'eux se mit crire en criture automatique sous l'impulsion d'une "Entit". Et cette Eatit qui se manifestait ainsi enjoignit aux assistants de fonder un nouvel ordre, l'Ordre du Temple dont elle dsignait nommment Ren Gunon comme devant tre le chef et le Matre. 11 faut noter, dtail important, que Gunon n'assistait pas acette runion.

    La raction de Gunon devant cette proposi- tion, qiii lui fut aussitt rapporte, est tout--fait ca- ractristique de sa manire et mme de sa doctrine en formation. 11 accueillit cette proposition avec doute, mais il ne sut pas prciser s'il souponnait les assis- tants d'avoir t victimes de leur subconscient et de leur mtaphychisme, ou bien si l'entit appartenait ce qu'il nommera plus tard les "Forces Interm- diaires".

    Toujours est-il qu'il refusa d'obir a la sugges- tion de l'Entit de la rue des Canettes, et qu'il ne vou- lut pas prendre la tte de cet Ordre en formation dans les conditions proposes. De fait l'"Ordre du Temple" n'eut qu'une existence phmre, suffisamment lon- gue nanmoins pour brouiller Gunon avec Papus, fort mcontent qu'on lui souleva ses adhrents ; il s'en suivit une vritable rupture entre Gunon et la plupart des organisations qu'il avaitjusque-l Mquentes.

    Seule la revue ''Le Voile d'Isis" fit exception cette rupture gnrale et c'est grce aux articles qu'il y crivit dsormais rgulirement que Gunon adhra une troisime loge, le loge Thbah, qui relevait de la Grande Loge de France. Sans doute avait-il besoin de cette nouvelle exprience, son opinion sur la F.M. n'tant pas encore dfinitivement forme. car c'est l, la loge Thbah, que son jugement sur la vritable

  • valeur initiatique de la F.M. va prendre sa forme dfi- nitive. C'est dans cette loge qu'il pronona en 1913 une co&erence sur le sujet : "L'Enseignement initiatique", dont il reprendra la substance ensuite dansplusieursnurnros delarevue "Levoile d'IsisM.

    Pendant la guerre de 14-18 la loge Thbah fut mise en sommeil et, lorsque aprs laguerre elle fut r k - ninie, Gunon absorb par la rdaction de ses livres ne la frquenta plus, tout en y conservant des relations personnelles.

    L'ide de runir autour de lui un quipe d'amis fidles et de collaborateurs, le poursuit toujours ; l'es- sai infructueux de "l'Ordre du Temple" qu'il faudrait d'ailleurs pouvoir analyser, ne l'a pas dcourag. Et il franchit une nouvelle tape avec la fondation de la Revue "La Gnose", organe officiel de 1'Eglise Gnosti- que Universelle.

    Cette revue parut de 1909 1912, et c'est Ren Gunon qui en fut de loin le principal rdacteur ; c'est l qu'il va mettre au point sous forme d'articles spa- rs quelques-uns des lments de sa fture doctrine - car cette date il n'a pas encore publi de livre, le premier sortant seulement en 1921.

    On ne peut pas terminer ce panorama des revues auxquelles collaborait alors Gunon sans parler de la phis curieuse d'entre elles, la revue ' l a France anti- maonnique" dirig par Clarin de la Rive. H ! oui, Gunon-Palingenius, musulman, membre de trois l o ges, vque de I'Eglise gnostique, ancien membre de l'Ecole Hermtique, rdacteur au Voile d'Isis, la "Gnose" et d'autres, collaborait a la France Antima- onnique et sous un pseudonyme qui aurait du attirer l'attention, puisqu'il signait "Le Sphinx" !

    De juillet 1913 juillet 1914, il y publia une srie d'articles sur la F.M. o il dveloppait ses thmes fa- miliers.

    Quel est donc ce Clarin de la Rive ? II est de ceux qui ont pouss Lo Tax fh ses fameux aveux. Quant on voit l'orientation de sa revue soit-disant an- timaonnique, on est en droit de se demander de quel bois il se chauffait.

    SAPOSITiON AL'EGARD DELA F.M.

    Cette aventure nous ramne la nouvelle position de Gunon concernant la Franc-Maonnerie, car s'il a pu tromper autant de gens cette poque et par la sui- te c'est parce que sa pense tait suffisamment origi- nale pour tre mal comprise, chacun lisant travers ses propres lunettes ce qu'il dsirait y lire, certains anti-maons les premiers.

    Avant de nous tourner vers les influences orien- tales qui se sont finalement imposees Gunon, nous examinerons donc son opinion sur la F.M. telle que nous la trouvons formule dans un article des "Etudes Traditionnelles (nouveau nom de la revue " Voile d'I- sis aprs 1935) - Dans cet article paru longtemps aprs la guerre de 14-18, en juin 1937, Gunon dveloppe lesgrandes lignes de sa confrence de 19 13 laloge Thbah.

    Cette opinion peut se rsumer en deux proposi- tions:

    1 - JI estime que la F.M. transmet une initiation authentique quant la rgularit de la "chane" dont elle a la succession.

    2 - Mais il estime aussi que la F.M. a t le th- tre d'une dgnrescence dans l'ordre doctrinal, cette dgnrescence doctrinale a coincid avec la transformation de la Maonnerie OPERATIVE, c'estdire celle qui runissait de vritables Architec- tes de mtier au MoyenAge, en Maonnerie SPECU- LATIVE, c'est--dire celle qui a runit non plus des architectes mais des Idologues.

    A i'issue de cette priode de transformation, qui dbute avec l'Humanisme et qui se termine en 1717 avec les "Constitutions d'Andersonw, la F.M. avait adopt la PHILOSOPHIE MODERNE et abandon- n, sinon la lettre, du moins l'esprit de la TRADI- TION.

    Nanmoins Ren Gunon estime que i'incom- prhension mtaphysique des "Maons spculatifs modernes'' n'altre pas lavaleur propre des Rites dont la F.M. est encore DEPOSITAIRE ; il a f f " i e que la Filiation Initiatique n'est pas interrompue, et que par consquent l'INlTIATiON MACONNIQUE est tou- jours valable et transmet authentiquement l'IN- FLUENCE SPIRlTELLE dsirable.

    Nous venons de dire que la Dgnrescence Doctrinale de F.M. s'est produite pendant la priode coule entre la Renaissance et les Constitutions d'Anderson. Telle est du moins la premire opinion de Gunon, celle qu'il exprime dans sa fanieuse confrence la Loge Thbah en 1913 et qu'il a publi en 1937.

    Cette opinion rvlait dj chez lui une tournure d'esprit Pr-Humaniste, anti-humaniste, pour tout dire Moyengeuse et contemplative. Or cette tour- nure d'esprit pr-humaniste il l'a encore accentue beaucoup plus tard dans son Livre "Aperus sur l'hi- tiation", paru en 1945, en dclarant qu' son avis la Dgnrescence Doctrinale, c'esta-dire la perte de

  • l'ht&Iisme traditionnel, remontait une date plus ancienne et qu'il fallait la placer au XIVme sicle. l'poque oii les authentiques Rose-Croix quittrent l'Europe, coeurs par le rationalisme envahissant, pour se rfugier en Orient.

    Cette aflirmation de Gunon qui n'est taye par aucune preuve est intressante en ce qu'elle dne te une tournure d'esprit foncirement pr6-humaniste et montre que l'auteur n'hsitait pas envisager un rebrassage fondamental de la pense occidentale et prconiser de renouer avec la mentalit du Moyen- Age-

    L'kpisode de la loge Thbah a donc t une exp- rience complmentaire et dcisive. LI rompt avec la Mentalit de PROGRES pour se tourner vers une religiosit d'un style nettement rtrograde, d'un styie contemplatif.

    Naturellement, en manifestant ses dsillusions et ses critiques l'issue de ses "Expriences Maonni- ques", Gunon s'est attir quelques animosits per- sonnelles. Mais la F.M. ne lui a jamais manifest d'hostiiit systmatique, et cette absence d'hostilit est comprhensible quand on prend bien conscience de ce que Gunon maintenait tout de mme, malgr ses critiques "doctrinales", i'essentiel, savoir la rgu- larit et l'authenticit de la transmission initiatique.

    A l'issue de ce constat, on peut se demander, comme le fait i'un de ses biographes, Jean Robin, ce que Gunon tait venu faire dans les Loges : y est-il ve- nu pour s'instruire, ou pour inspecter?

    Jean Robin, un des plus enthousiastes disciples de Gunon, se pose la question et il y rpond en disant que Gunon avait frquent les Socits Initiatiques Europennes pour les inspecter et y sonder la rguiari- t et l'authenticit initiatique. Il ajoute que, en agissant ainsi, Gunon remplissait une "Fonction" mieux, une "Mission", et mme une mission d'origine providen- tielie, actionnqu'il tait parla Divinit ...

    LES INlTIATIONS ORENTALES

    En plus des contacts qu'il prenait dans les rni- lieux occultistes et maonniques, Ren Gunon s'tait mis, mais avec une discrtion tonnante, a se

    - reilseigner sur les "Doctrines Orientales".

    Dans un premier temps il contacta des ORIEN- TALISTES EUROPEENS, et ensuite des ORIEN- TAUX AUTHENTIQUES.

    Pa- les ORENTALISTES EUROPEENS les

    deux principaux sont : Lon CHAMPRENAUD et Albert de POWOURVILLE.

    - Lon CHAMPRENAUD (1870-1925) - Matre de confZLrences I'Ecole Hermktique de Papus quand Gunon frt sa connaissance, il tait galement *clacteur une revue intitule "L'initiation" et enfii secrtaire-adjoint de l'Ordre Martiniste. Mais le plus important est que Champrenaud s'cartaprogressive- ment de l'occultisme de Papus qui lui semblait s'enga- ger dans une impasse et il se tourna vers les DOCRINE ORIENTALES.

    Champrenaud crivit alors un ouvrage : "Mat- gio et les Socits Chinoises", suivi d'un *surn sur la Mtaphysique Taoste. Mais c'est finalement vers l'Islam qu'il se dirigea et il finit par entrer dans cette religion sous le nom de ABDUL-HAQQ, nom qui si- gnifie : serviteur de lavrit.

    - Albert de POUVOURVILLE ( 1862- 1939) - Officier puis Administrateur au Tonkin - De belle prestance et de comportement autoritaire, il quitta le Tonkin pour passer en Chine mridionale et se mit frquenter deux initis chinois : Tong-Sang N'Guyen et Duc-Luat, personnages importants du Taosme. Tant et si bien qu'il reut l'initiation Taoste sous le nom de MATGIOI nom qui sigrne "Oeil dulour". Revenu en France, Albert de Pouvourvie entra dans le mouvement occultiste ai il fit la connaissance de Champrenaud. II crivit alors sous le nom de Matgio deux ouvrages : "La voie Mtaphysique" et "La Voie Ratio~eile", qui firent sur Ren Gunon la plus p r e fonde impression (d'o les n3miniscences constantes que l'on trouve dans ses propres livres).

    Durant sa formation Gunon se trouvait donc en relations permanentes avec le musulman Abdul- Haqq (Lon Charnprenaud) et le Taoste Matgio (Al- bert de Pouvourville).

    Mais Charnprenaud et Pouvourvie n'taient encore que des ORIENTALISTES EUROPEENS. La curiosit de Gunon ne fut satisfliire que quand il eut pris contact avec de vritables ORIENTAUX Tous les biographes sont catgoriques sur ce point, en ce qui concerne la ralit de ces contacts orientaux, mais ils sont trs mystrieux quand il s'agit de donner des prcisions.

    Ce qui est certain c'est que Gunon apprit le Sanscrit et l'Arabe auprs d'orientaux habitant Paris, de mme qu'il se fit instruire dans les Trois Religions, Hindouiste, Taoste et Islamique, par des "Matres" des pays correspondaats et pratiquant effectivement ces Religions, mais habitant Paris.

  • Pour l'Hindouisme il eut un ou plutt plusieurs matres Hindous et en reut une initiation leve. C'est mme cette initiation (aux dires de Paul Chacor- nac) qui laissa en lui les traces les plus profondes et qui dtermina le PLAN de tout son systme, de toute sa construclion doctrinale.

    Pour le Taosme, dj bien instruit par Matgioi (Pouvomdlle) sur le plan thorique, Gunon reut aussi l'enseignement pratique d'un mdtre chinois r- sidant a Paris ; y eut-il l aussi une nouvelle initiation ? Ses biographes ne sont pas trs clairs sur ce point.

    Pour l'Islam, plus exactement pour le Soufisme qui est l'sotrisme islamique, l'initiation de Gunon est plus curieuse, car elle fut ralise par un peintre sudois ; lui-mme devenu musulman l'issu d'un priple peu ordinaire quivaut la peine d'tre relat.

    Le peintre John Gustaf AGUELI tait le fils d'un vtrinaire sudois ; ayant termin ses tudes se- condaires Stockholm il se mit peindre des paysa- ges sudois, puis exposa Paris en 1890 et se fit une petite notorit sous le pseudonyme de Ivan Aguli. Surtout il frquente la "Socit de Thosophie", les milieux anarchistes et la potesse socialiste Marie Huot ; il est alors emprisonn pour avoir donn asile une anarchiste recherche par la police et passe ainsi quelques mois en prison ; il en profite pour travailler et grce un incroyable don des langues il apprend l'Hbreu, l'Arabe et la Malais ; il lit galement la Bible. Fabre d'Olivet et Swedenborg.

    A sa libration de prison il part pour l'Egypte o il ralise des croquis puis il revient Paris et s'inscrit "L'Ecole des Langues Orientales" pour y parfaire ses connaissances. En 1897 il devint musulman ; fut-ce a Paris ou en Sude ? On ne sait. Ses biographes avouent ne pas pouvoir claircir le mystre. Sa nouvelle reli- gion ne l'empcha pas d'tudier le Bouddhisme et d'der aux Indes et a Ceylan. Au bout dequelques mois il revint en France et Paris il fit la connaissance d'un mdecin italien Enrico Insabato, anim du dsir de rapprocher l'Orient et l'Occident ; tous deux par- tent pour 1'Egypte en vue de travailler a la ralisation de ce vaste projet.

    C'est lors de ce second voyage en Egypte que Aguli rencontra et fiquenta un haut personnage de l'Islam, vers autant dans l'ordre Exotrique que dans l'ordre Esotrique, le Sheikh ELISH. Et ce grand per- sonnage initia Aguli, qui tait musulman, au SOU- FISME et il en fit mme son reprsentant pour l'Eure pe sous le nom de ABDUL-Hdi.

    C'est donc en qualit de Musulman-soufiste que Abdul-Hdi reprit le bateau pour la France :

    aprs Marseille et Genve il arriva Paris o il fit la connaissance de Gunon et de sa revue "La Gnose". Nous sommes en 1910. Tout de suite une troite colla- boration commena et Aguli crivit dans "La Gno- se".

    Tel est donc le personnage qui va donner en 1912 l'initiation soufiste Ren Gunon : il lui trans- met la "Barakaw de la part de son Matre le Sheikh He- lish d'-te et Gunon devint ainsi le Sheikh ABDEL WAHED YAHIA.

    Beaucoup plus que son initiateur Abdul-Hdi (Aguli), Gunon prit son Islamisme au srieux et, tout en vivant Paris, il en fit selon l'expression de ses biographes "Sa Voie Personnellew : l'Islam fut donc la religion exotrique qu'il dcida de pratiquer de prf- rence toutes d e s qu'il avait connues antrieure- ment, et notamment au catholicisme.

    On peut s'tonner de ce choix surtout quand on connat le prestjge dont l'hindouisme jouissait ses yeux ; comment l'expliquer ? Peut-tre par des consi- drations concrtes : en effet la pratique extrieure de l'observance hindouiste est matriellement compli- que et elle est normalement subordonne l'appar- tenance a une caste dans laquelle on ne peut entrer que par la naissance,, ce qui n'tait pas le cas de Gunon ; mais peut-tre avait-il d'autres raisons plus profondes lies la nature particulire de 'sotrisme islamique ...

    Bref voici Gunon musulman en 1912, et c'est dans cette reiigion qu'il mourra au Caire en 1951. Notons en passant que cette anne est aussi celle de son mariage a Blois avec Berthe Loury, mariage Ca- tholique nous l'avons vu. Gunon tait-il musulman le 11 Juillet 191 2 ? Nous n'en savons rien, et au reste cela n'a gure d'importance car un mois plus tt ou plus tard son choix tait fait in pectore. Ce qui est cer- tain c'est qu'il ne rvla jamais sa nouvelle reiigion sa femme, ce qui est vraiment le comble de l'sotrisme et tmoigne d'un don trs pouss pour le camouflage.

    Voil donc Gunon mari, et en possession de son bagage doctrinal. Il a ralis en peu de temps, cinq ou six ans peine, un vaste priples a travers les Soci- ts de Pense et les Congrgations initiatiques dont il a pu soupes la Rgularit initiatique et la Dgn- rescence doctrinale.

    A-t-il t initialement impulsionn pour oprer une semblable inspection ? Sans doute pas, mais ce qui w A t certain c'est que, en fin de priple, il a t rcupr par des Hindouistes Orientaux "Conscients et Organiss", et dsormais c'est l'hindouisme qui va

  • dominer dans son esprit, et ce sont toutes les habitu- des mentales de l'hindouisme qu'il va rpercuter dans son enseignement.

    Quel est exactement le statut de cette Symbiose, quels sont les termes du contrat entre Gunon, les Hindouistes et I'Hiadouisme ? Il est ce jour impossi- ble de le savoir ; mais le plus important pour nous, et cela est certaia, est de savoir que ds ce moment-l, autour de 191 0, Gunon se veut non pas seulement l'a- gent d'une liaison entre Orient et Occident, mais sur- tout l'agent d'une vritable pntration de l'occident par l'Orient : cette certitude clate a chaque instant et chaque ligne de ses divers ouvrages.

    L'OEUVRE ECRITE DE RENE GUENON

    Cette oeuvre se rpartit sur plusiers priodes qui marque une volution dans la pense et dans la p r e duction de Gunon : nous i'exposerons ici dans son ordre chronologique ;

    La premire priode est celle des Articles pu- blis dans diverses revues comme "Levoile d'Isisw de- venue "Les Etudes Traditio~elles", et "La Gnose", et elle s'tend de 1907 a 1914. L se trouve le stock qui se- ra utilis plus tard soit par Gunon lui-mme, soit par ses ouvrages posthumes.

    La priode parisienne comprend les .annes 1921 a 1929:

    1921 "Introduction gnrale a l'tude des doctri- nes hindoues" que nous avons dj cit plusieurs re- prises et qui exprima la base du systme.

    1922 "Le Thosophisrne", histoire d'une fausse religion, souligne les faiblesses de la premire grande entreprise de pntration orientale ne en 1875 dans le milieu anglais hindouisant, la "Socit Thosophi- que" de Mme Blavatsky.

    1923 "L'Erreur Spirite", copieux livre avec beau- coup de documents ; i'auteur y f& le procs du Spi- ritisme avec une argumentation trs voisine de celle qu'un catholique pourrait avoir: les spirites se mettent en rapport avec des INFTUENCES ERRANTES, nous dirions nous "les dmons". Nanmoins la m e - rence des expressions est significative.

    - II ne faut pas oublier que ces deux livres, "Le Th- osophisrne" et "L'Erreur Spirite" ont puissamment contribu a faire passer Gunon pour un homme d'or- dre, un anti-subversif, un traditionaliste, un national : c'&ait l le dbut d'une longue erreur soigneusement entretenue par tous ceux qui ont intrt nous faire prendre desvessies pour des lanternes.

    1924 "Orient et Occident" : II tudie les condi- tions d'un rapprochement possible et ineluctable en- tre l'Orient et l'occident ; pour cela l'occident doit a b a n d o ~ e r les ideologies du X'k?me sicle d'o sont venus tous les maux : rationalisme, technicite, Rvolution. Bien plus il doit abando~er le "Prjug classique", grco-latin, et cette mentalit du lgion- naire et du juriste romains qui a tout sclros.

    Et il doit au contraire retrouver les traditions profondes sousjacentes au Christianisme et incluses dans l'Hindouisme ; il faut que l'occident retrouve "les principes d'une mtaphysique" authentique ence re conserve en Orient.

    1925 "L'homme et son devenir selon le Vedenta" : c'est le dveloppement de "L'Introduction" et de "Orient et Occident".

    1926 "L'Esotrisme de Dante" - Gunon n'est pas le seul avoir crit sur ce sujet, ni mme le premier, car il y avait dj eu un "Dante Hrtique". Gunon lui ne dit pas que Dante est hrtique, au con- traire, et pour lui il est essentiel de faire remarquer que 1'Esotrisme se superpose la Religion sans s'y opposer. Et il Elicite aussi Dante d'tre Gibelin, c'est- a-dire partisan de l'Empereur contre le Pape. Jl dve- loppera bientt tout cela dans "Autorit spirituelle et Pouvoir Temporel".

    1927 "le Roi du Monde" r&dit en 1950, traite de la fameuse question de I'AGARTHA, "Centre Spi- rituel" o rsiderait le ROI du MONDE. Gunon n'est pas le premier a parler de ces notions, et St Yves d'Alveydre dans sa "Mission de l'Indew ainsi que Os- sendmsky dans "Btes, hommes et Dieux" avaient dj trait la question.

    Gunon en parle finalement en termesgnraux assez vagues : thorie des "Centres Spirituels", des "Centres Majeurs", Agartha, Thibet. Il semble nan- moins que cette divulgation entrana un dsaccord en- tre Gunon et ses informateurs hindous, et un arrt de leurs rapports.

    1927 "La Crise du Monde Moderne" reprend les thmes de "Orient et Occident". 11 expose d'abord la Thorie hindoue des "Cycles Cosmiques" et il estime que notre poque peut tre identifie la "dernire p- riode du cycle KALI-YUGAI' (Age Sombre) ; nous sommes donc la fin de l'un des grands cycles qui rgissent le dveloppement de l'humanit.

    M s il analyse les caractristiques de la Civilisa- tion Moderne ; priorit de l'action sur la connais- sance, "erreur profane" qui lacise la Science et la dvie en Technique.

    Il indique enfin le remde ce mal : constituer une ELlTE OCCIDENTALE ayant retrouv le sens

  • profond de la Tradition ; il ne s'agirait pas d'orient&- ser l'occident, mais de provoquer le "Rveil spontan de ses possibilits latentes". Comme on le voit les termes choisis sont msamment gnraux pour tre susceptibles de plusieurs interprtations et donc tromper ceux qui doivent l'tre.

    Car Gunon ajoute que I'Eglise Catholique est une des Organisations Traditionnelles qui subsiste en Occident et qu'il suffiirait de rendre la doctrine de I'Eglise le sens profond et cach qu'elle contient en el- le-mme mais qu'elle a nglig depuis le XVIme sicle. Ce travail d'approfondissement lui permettrait en outre de reprendre conscience de son unit avec "les autres formes tra.diomeUes".

    11 n'est pas besoin d'tre grand clerc pour voir pointer l'horizon l'Oecumnisme, non par syncr- tismemais par pluralit. Nanmoins ce livre "La Crise du Monde Moderne" acheva de faire passer Gunon pour i'un des matres penser de la Raction Nationa- le : on n 'da pas chercher plus loin que la critique du monde moderne, et l'on vit Lon Daudet, Jacques Bainville et Gonzague Truc en faire l'loge dans les milieux de l'Action Franaise.

    On aurait pourtant bien du voir aussi le pige destin nous dvier vers la Tradition paieme, sous couleur de nous faire retrouver un prtendu TRE- FOND de la tradition chrtienne. Les seuls ne pas tre dupes furent le jouimal "Gringoire" et &out la Revue Internationale des Socits Secretes (RISS) avec Charles Nicoulaud.

    1929 "Autorit Spirituelie et Pouvoir Temporel" - Inspir par la condamnation de l'Action Franaise par Rome le 20 dcembre 1926, il forme un tout avec les ouvrages prcdents. La thse de i'ouvrage est quYenOccident et dans 1'Eglise ces deux puissances sont spares, tandis qu'en Orient la tendance est la sacralisation duTempore1.

    Au dbut de i'anne 1930, Ren Gunon s'ins- talla au Caire pour ne plus revenir en Europe et son is- lamisation peut se rvler augraud jour; nanmoins la srie de livres qu'il produit dors ne traite pas de 1'1s- lam, mais de i'sotrisme chrtien et de l'hindouisme.

    1931 "Le Symbolisme de Ia Croix", compos au Caire, mais dit en France est en fait le dveloppe- ment d'un article publi en 191 1 dans la revue "La Gnose". L'ouvrage est ddicac en pleine premire page : "A la Mmoire vnre de ES-SEEIKH-AB- DER-RAHMAN ELISH EL-KEBIR (le serviteur du Dieu Grand) qui est due la premire ide de ce livre. Merc EL QAHlRAH 1329- 1349 H.".

    Voila donc le "Symbolisme de la Croix" plac sous i'gide du Croissant, or croissant peut s'interpr- ter comme : Saas Croix.. Le symbolisme catholique

    de la Croix est partout classique et clair : la branche verticale signifiant la paternit divine de NSiC de haut en bas, du ciel vers la terre, tandis que la branche horizontale reprsente la fraternit humaine de NS- JC, i'assemblage, la c r o i e tant l'union hypostati- que. Par ailleurs la partie visible de la croix est I'Eglise et reproduit la forme du corps physique de NSJC, elie en est i'ombre porte, le Corps Mystique, tandisque la partie cache qui est en terre est 1'Eglise des nonbapti- ss qui seront sauvs parle "baptme de dsir".

    1932 "Les tats multiples de 1'Etre" - Ce livre forme un ensemble avec deux autres livres parus pr- cdemment ': "l'Homme et sa destine selon le Vedenta" et "Le Symbolisme de la Croix". Gunon nous y explique que la Tradition Hindoue laquelle il se rfere sans cesse, et toujours avec beaucoup de f lou, . est formule par quatre recueils fondamentaux, les V- das, dont l'origine serait supra-individuelle et non- humaine.

    1945 "Le rgne de la Quantit" -C'est la suite de "La crise du Monde Moderne", caractris par une critique de la civilisation technicienne ; cet ouvrage a confirm Gunon dans sa situation de doctrinaire de la Raction.

    1945 "Aperus sur l'Initiation" - oU il expose les moyens de passer de la connaissance thorique, livresque, ce qu'il nomme la REALISATION SPI- RITUELLE. II dit que I'INlATION est ,h trans- mission d'une Influence spirituelie. L'initi se trouve ainsi dans un tat dnique ; puis il peut s'lever aux tats suprieurs de l'Etre et aboutir un tat appel iameremment Dlivrance ou Identitk Suprme. II renouvelle son affiiation selon laquelle la F.M. est la seule organisation occidentale qui ait une origine TRADITIONNELLE authentique, mais il ne faut pas oublier qu'il dit aussi cela de I'Eglise Catholique.

    1945 "Les Principes du Calcul Infrntsimal" - C'est un sujet qui lui est cher depuis longtemps et oii il revient sur la distinction entre l'Infini et l'Indfini.

    1946 "La Grande Triade" est son dernier livre - U. s'y rfere Ia Tradition Chinoise, par rminiscence du Taosme auquel il a t initi. La Grande Triade, Ciel, Homme, Terre, est une cosmologie ternaire. C'est aussi le nom d'une trs grande secte chinoise, comparable a1aF.M. en Europe.

    A cette liste il faut ajouter deux ouvrages posthu- mes :

    1952 "Iaitiation et Ralisation Spirituelie" - qui rsu- me des articles parus dans les "Etudes Traditionnel-

  • les" et qui est la suite de son ouvrage "Aperps sur l'Initiationv.

    1954 "Aperps sur l'sotrisme chrtien" -C'est galement un recueil d'articles parus dans la mme re- vue, et il constitue la suite de "I'Esotrisme de Dante".

    STRATEGIE ET TACTIQUE GUENONIEN- NES

    Entre 1910 et 1920 Gunon a lentement mri sa pense et il est devenu un vritable chef d'kole.

    ll a pass une rapide inspection des "congrga- tions initiatiques" et il a distingu I'Initiation rgulire, avec laquelle il accepte de collaborer moyennant de fortes rserves sur le plan doctrinal, des Pseudo et des Contre-Initiations.

    li a pris contact avec des Orientaux, s'est conver- ti l'Islam et s'est instruit dans les sotrismes hin- dous et chinois.

    Il a, d'autre part, dblay le terrain de deux ide logies de iype orientaliste qui gnaient la propagation de l'orientalisme Authentique.

    Il a ensuite instruit ses disciples, et il nous reste- rait ktudier sa doctrine telle qu'elle ressort de ses nombreux ouvrages. Mais auparavant il conyient de prendre contact avec la stratgie et la tactique guno- niemes, car cela est indispensable pour bien saisir le dveloppement de la doctrine.

    Cette Stratgie et cette tactique se dgagent de deux sources, les 1M-e~ et les faits, chaque source ayant ses limites et son intrt propres : sans concider exac- tement elles se recouvrent pourtant en large part, de sorte qu'en les conjuguant on arrive voire suffisamment clair dans les intentionsgunoniemes.

    STRATEGIE La STRATEGIE gunonienne est amplement

    dveloppe dans son premier grand ouvrage, "L'Intro- duction gnrale l'tude des dodrines hindoues", paruen 1921.

    - Dans cet ouvrage Gunon prconise la forma- tion d'une ELE OCCIDENTALE qui s'instruirait dans les disciples de la TRADITION ORIENTA LE. En vue.de quoi ?

    En vue de prparer le RITOUR DE L'OCCI- DENTVERS L'OFUENT, retour qui ne peut pas man-

    quer de se produire un jour. Dans quelies conditions peut-on imaginer que ce retour de l'Occident vers l'Orient se produise ?Guenon fait trois hypothses.

    lre Hypothse : Effondrement de l'occident par excs de matrialisme. Ji dit qu'il y a, au cours de l'Histoire, des civilisations brillantes qui ont disparu. L'hypothse d'un effondrement ne serait donc pas carter. 11voit la Barbarie s'installer en Occident, mais il ne dit paspar quel mcanisme, excs d'autorit ou anarchie. Dans cette hypothse le Mal ne relverait plus d'aucune thrapeutique.

    2me Hypothse : les Orientaux envahissent roccident pour le sauver de la decadence. Singulire hypothse sur le plan historique et politique, que l'on imagine Wicilement, mais qu'il faut admettre en th- orie pour suivre l'auteur. Dans cette hypothse Gunon songe amortir le Choc psychologique que reprsenterait cette invasion de I'Occident par des Orientaux, et pour cela il envisage et prconise, ds aujourd'hui et en prvision, la constitution d'un Noyau Intellectuel, d'une Eiite spirituelle, "imprimant une direction qui n'aurait d'ailleurs nuJlement besoin d'tre consciente pour la masse" (Introduction Etude Doct. Hindoues).

    Ce sera donc une ELE ESOTERIQUE, ca- che, se livrant une action COUVERTE, discrte, sec* dans le but de faire accepter aux Occidentaux l'Hgmonie Spiritueue des Congrgations initiati- ques Orientales quand viendra le moment de l'inva- sion.

    3me Hypothse : L'Occident organise spon- tanment son retour la Tradition Orientale, retour qui est fatal. Dans ce cas il faut aussi une Elite Spirituelle, un noyau intellectuel, pour prparer, pro- mouvoir, faciliter cette Orientalisation de roccident.

    Ecoutons seulement Guenon nous dire com- ment ilvoit la chose :

    "Le Moyen-Age nous ofie l'exemple d'un dveloppement traditionnel proprement Occidental. S?lya une Traition Occidentale c'est l qu'elle se trou- ve; cette Tmdition tait alors conue en mode religieux, mais nous ne voyons pas que l'Occident soit apte la recevoir autrement, aujourd'hui moins que jamah Il suBrnit que quelques esprits seulement eussent cons- cience de 1'WIT.E ESSENTIELLEde toutes les Doctri- nes Traditionnelles dans leur Plincipe". (Introduction Doct. Hindoues -p. 338)

    En clair cela veut dire : une Elite qui reprenne le CHRISTIANISME MEDIEVAL et qui le triture jus- qu' lui faire exprimer sa quintessence symbolique,

  • sdrique, mtaphysique, orientale. Car il ne s'agit pas pour Gunon de se lancer dans une Restauration religieuse pure et simple ; en effet "Cst de MmA- PHYSIQUE 'il sbgit essentiellement. Pour f 'ELIZE dont nous avons parl, la Tmdition n pas t conue sur le mode spc~j?quement religieux Ce qui doit jouer le premier rle, c'est la comprhension des questions de principe. Et cette comprhension implique l'assimila- tion des modes essentiels & la pense orientale; ce dont il s'agit peut tre pressenri dj par le peu que nous avons dit au sujet de la Ralisation Mtaphysique. Mais nous avons indiqu en mme temps les raisons pour lesquelles il ne nous tait pas possible d i insister davantage. Cesr l qu'il faut toujours se souvenir que suivant la formule extrme-orientale "celui qui sait D u n e doit entendw que NEUF". (Introduction Doct. Hindoues - p. 342).

    Tel sera donc, dans l'hypothse o l'occident dciderait d'organiser spontanment son Retour la Tradition Orientale, leTravail de I'Elitegunonienne.

    ii convient enfin de se demander pourquoi Gunon cherche rapprocher ainsi l'Orient et l'Occi- dent ? Lui-mme nous en donne deux raisons ; d'abord pour le bnfice rciproque de l'Orient et del'occident, mais aussi "pour certaines autres rai- sons qu'il ne nous est pas possible d'aborder et qui tiennent surtout au sens profond de ces lois cycliques dont nous nous sommes borns a men t io~er i'exis- tence". (Intr. Doct. Hindoues-p. 341).

    Dans son ouvrage "Introduction gnrale l'tu- de des docines Hindoues" Gunon nous renseigne ainsi sur sa stratgie doctrinale ; son oeuvre doctrinale est dictee par l'ide de raliser la symbiose "Orient- Occident", mais natureilement au profit d'une DI- RECTION ORIENTALE qui s'impose pour deux rai- sons : d'abord du fait de la supriorit des mthodes orientales de mditation, notamment de la supriori- t de la Voie Mtaphysique sur la Voie Mystique, en- suite du fait de la plus grande fidlit de l'Orient la "Grande Tradition Primordiale".

    TACTIQUE La TACTIQUE, les mucires de la pense et de

    l'action pour raliser l'ide stratgique, sont moins vidents au premier abord, mais au premier abord seulement : pour celui qu'une certaine pratique a rendu familier de l'histoire gunonienne la ligne suivie est au contraire trs certaine, et si elle n'est pas simple, elle est complexe comme la vie, nanmoins sa direc- tion est unique et assure.

    Au-del des livres, dont nous avons fait le compte dans un chapitre prcedent, c'est dans l'ac- tion guknonienne que nous d o n s chercher dsor- mais cette direction.

    Au pralable, il faudrait pouvoir tablir un point des plus controverss, celui de l'inspiration de Ren Gunon : c'est la une tche sur laquelle les dis- ciples eux-mmes sont en dsaccord.

    Deux thses sont en prksence :

    -Ou bien Gunon a t form par des initiateurs orientaux qui lui ont tout appris, et dans ce cas son oeuvre n'aurait t qu'une transmission adapte.

    - ou bien, par un travail personnel acharn, il au- rait ralis une compilation magistrale qu'il aurait es- say d'imposer l'esprit de ses contemporains com- me une doctrine la fois antique et originale.

    L'examen de cette question lui seul demande- rait un builetin entier, et il est trop tt pour que nous nous y engagions, ce qui ne signifie nullement que nousn'ayons pas d'opinion sur ce point.

    Toujours est-il que le dveloppement de l'action gunonieme manifeste une volution vidente, une volution en dents de scie, avec des avances et des re- tours en arrire. Simple apparence, ou realit ? Il ne nous appartient pas d'en dcider ici et nous nom en tiendrons la seule "manifestation".

    Ce constat d'volution n'est d'ailleurs pas une critique strile et il souligne le pragmatisme qui per- mettait Gunon de frayer avec les milieux les plus di- vers, voir les plus oppoks. Bien sr, il fallait pour y russir une certaine dose de duplicit, mais tout sot- riste en est, par d f ~ t i o n , largement pourvu : en effet lerelativisme inhrent a Ssotrisrne ramne toutes les positions l'unit et fonde en quelque sorte cette duplicit a usage externe.

    Pour simplifier les choses on peut distinguer quelques tages, plus ou moins chronologiques, dans cette volution.

    * La premire est celle de ses annes de forma- tion, en gros jusqu' la guerre de 19 14, o on le voit se mler aux milieux occuitistes situs la lisire de la Franc-Mao~erie, puis entrer en loge. On peut dire qu'il parcourt tout l'ventail subversif, du spiritdis- me au rationalisme, n'hsitant mme pas a devenir vque gnostique.

    A ce stade dj on distingue bien son regard cri-

  • tique et ses hsitations sur la meilleure voie, la plus ef- ficace : lorsque ses amis, ses premiers disciples, voulurent fonder un nouvel Ordre du Temple cene faire la synthse de tous les courants, il n'est pas trs emball, sentant bien que pareille initiative ne fera qu'ajouter un groupe de plus la multitude de tous ceux qui sont apparus depuis trente ans.

    Sans doute, et sur ce point il serait intressant d'avoir son tmoignage direct, a-t-il assez vite com- pris que ce milieu occultiste tait, par nature. un mon- de marginal qui ne pourrait jamais faire tche d'huile dans le grand public, d'autant plus qu'en ce temps l, il y a 70 ans, la dchristianisation n'tait pasaussi visible que de nos jours.

    * La deuxime tape: il est alors entr en rapport avec le milieu catholique et, non des moindres, celui des jeunes intellectuels de l'Institut catholique de Pa- ris, avec Maritain, celui de la premire priode avant son ralliement la Rvolution : milieu du renouveau philosophique et plus largement du renouveau doctri- nal.

    On comprend que Gunon, avec ses thses de critique du monde moderne et de rference constante la Tradition ait pu faire illusion des gens ignorant tout de ses sources, au point que certains de ces jeunes intellectuels catholiques ont eu beaucoup de mai s'en dfendre ; on peut mme se demander si certains s'en sont jamais dpris ..., mais de cela nous reparle- rons plus tard.

    * La troisime tape, qui se recoupe chronologi- quement avec la prcdente, est celte des rapports de Gunon avec les milieux antirnaonniques. Question diflicde traiter ds lors qu'on s'adresse des lecteurs qui ne sont pas forcment clairs sur ces matires.

    II suffit de dire que Gunon a su jouer trs adroi- tement du double visage maonnique, rationaliste et spiritualiste, et que dans ses rapports avec les anti-maons du temps, il a constamment cherch "noyer le poisson" en s'appuyant sur les divisions de ses interlocuteurs, divisions lies aux personnes et, plus profondment encore, aux doctrines.

    Car parmi les anti-maons de ce temps, l'oppo- sition tait nette entre ceux qui faisaient une critique

    .. purement rationaliste et politique de la F.M. et qui de ce fait se rendaient aveugles sur sa ralit profonde, et ceux qui, ayant une vision beaucoup plus large, savaient distinguer les divers visages de la Secte et les unir dans une mme synthse critique.

    L encore il s'en est fallu de peu que Gunon ne

    russisse se faire passer pour un aati-maon vrita- ble, et il semble bien que seule laguerre de 1914 l'ait empch de devenir directeur de la revue "La France Antimaonnique" ! Mais les analyses impitoyables de la RISS ont suffi ouvrir les yeux de ceux qui le vou- laient bien ; que certains aient pu tre tromps est une autre affaire.

    Coup des milieux intellectuels catholiques, grill auprs des antimaons vritables, Gunon avait porte galement ses efforts dans une autre direction, celle d'un certain mysticisme chrtien.

    Aussi scandaleuse qu'elle puisse paratre, on ne doit pas tre trop surpris de cette manoeuvre, car la mystique, par nature, se prte ces dtournements ; c'est d'ailleurs pour cette raison que l'Eglise, mre prvoyante et exprimente, a toujours t si pruden- te, disons mme mfiante, l'gard des manifesta- tions mystiques.

    En effet il s'est dvelopp entre les deux guerres, toujours dans le cadre du renouveau catholique, toute une recherche mystique centre autour du thme du Sacr-Coeur et trs oriente sur le symbolisme. C'est ce qui permit Gunon de s'y infiltrer au point de pouvoir publier de nombreux articles dans les revues de ce courant. La Hirarchie dut d'ailleurs intervenir pour mettre un terme ces initiatives trs contesta- bles.

    Lorsque, en 1930, Gunon dcide de partir en -te et finalement d'y rester il a fait le tour des pos- sibilits de diffusion de sa pense, et il s'est rendu compte que, hors du milieu de ses disciples directs, il n'a pas pu pntrer efficacement.

    Tout en restant ouvert d'autres voies ventuel- les, il se dcide dors emprunter une voie plus direc- te, la sienne depuis vingt ans, celle de l'orientalisme pratique ; nous disons bien pratique, car sur le plan thorique il y a longtemps que cela tait ralis.

    II est intressant de noter que ce n'est pas vers les mystiques extrmes-orientales qu'il se tourne et qu'il oriente ses disciples, comme on aurait pu le penser puisqu'il enseignait publiquement le Vdenta et les doctrines hindoues ; la voie mystique recommande c'est l'Islam, luimme tait d'ailleurs musulman depuis vingt ans et il partait s'tablir dans un pays mu- suiman au sein duquel il devait se fondre.

    Un des ses disciples Fristschof Schuon, un jeune alsacien de 25 ans, partit en Algrie se faire initier dans une confi-erie mystique musulmane, puis il revint fin 1933 et sernit initier son tour par dlgation une

  • centaine d'autres gunoniens, fondant des filiales en diverses villes de France et de Suisse. De son propre aveu, Gunon voyait dans cette direction la meieure formule, mais il entendait bien ne pas fermer d'autres voies.

    C'est ainsi qu'un autre de ses disciples, Marcel Claveiie (Jean Ryor) s'attacha plutt a fouiller dans la ligne de 1'Esotrisme Chrtien, tentant mme de re- vivifer une hypothtique Fraternit du Paraclet ; ce qui ne l'empchait pas de se faire initier galement a l'Islam ksotrique, sans trop y croire peut-tre.

    D'autre part les liens maonniques n'taient pas rompus, et dans le cadre du renouveau spiritualiste de la Franc-Maonnerie de I'aprsguem, une loge sp- ciale "La Grande Triade", regroupant uniquement des gunoniens, fut cre en 1947 dans le Cadre de la Grande Loge de France,avec la bndiction toute sp- ciale de Gunon lui-mme ; cette organisation est en- core l'oeuvre actuellement ...

    Cette diversit, dont nous n'avons d o ~ qu'une faible image, montre que, aprs le dpart du Matre au Proche-Orient, les disciples ont explor en parallle diverses voies entre lesquelles ne manquaient pas de nombreux ponts.

    Comment interprter ce pluralisme ? De deux faons complmentaires.

    1) Cette multiplicit des formes permet de satis- faire des tempraments differents tout en assurant l'u- nit de fond, qu'il s'agisse de l'Islam mystique, du Christianisme sotrique ou du Symbolisme maon- nique. U est par exemple certain qu'un bon nombre des premiers initis de Schuon n'ont pas pu supporter bien longtemps l'Islam et sont passs a d'autres voies sotriques.

    2) Ce pluralisme permet surtout de "travailler" des milieux divers, voir opposs, chacun pouvant p- ntrer la o ses autres fires en gunonisrne n'auraient pu le faire. C'est ainsi que Jeaa Ryor a pu pousser en milieu clrical ses recherches sur l'sotrisme chr- tien, dmarche que nous retrouvons aujourd'hui avec l'abb Stphane et Jean Borelia ...

    En effet il est certain que Gunon, et ses disci- ples aprs lui, n'ont jamais renonc a leur triple entre- prise : orientaliser l'occident, revivifier la Franc-Ma- onnerie et pervertir le Christianisme de l'inkrieur sous c d e u r de spiritualisme, tout cela au nom et sous le couvert de la lutte contre le matrialisme et le ratio nalisme.

    Comment ne pas voir que depuis quelques an- nes, sous l'inf luence de nombreux facteurs et grce a des complicits ecclsiastiques multiples, ils ont effectu beaucoup de chemin dans cette direction ? C'est ce qu'il nous restera a examiner dans les p r e chains numros.

    Le numro double 22/23

    LYEcole moderne de Zsotrisme chrtien

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  • La rvolution sexuelle - 5

    EUTHANASIE : La fin logique du Singe

    LE DERNIER COMPLOT

    Ce singe normalis que les Grands Prtres de la Science et du Progrs, dieux de la nouvelle religion t o talitaire, fabriquent peu peu, de manire douce et lu- dique, ressemble l'HomwBiologicus dont Jean Rostand avait prvu i'laboration. Le biologiste, triste mais ironique, faisait parler cet artefact :

    "Je suis n d'une semence slectionne et irradie par neutrons ; on a choisi mon sexe ; jhi t port par une mre qui n'tait pas la mienne ; au cours de mon dveloppement, jai reu des injections d'hormones et d2.D.N. ; jai bnfici dbn tmitement suractiv du cortex; aprs ma naissance, quelquesgrefles tissulaires sont venues favoriser mon volution intellectuelle, et, maintenant encore, chaque anne, jemesoumets une cure d'entretien pour maintenir mon esprit en bonne forme et mes instincts au tonus optimum. Je n ai pas lieu d'tre mcontent de mon corps, ni de mon sexe, ni de ma vie, MAIS, QUI SUIS-JE T'

    Jean Rostand s'tait refus le droit de continuer certaines expriences sur l'animal et se scandalisait l'ide que l'embryon humain puisse un jour en tre l'o bjet. Il n'avait pas imagin le pire.

    L'union de ceux que Mr. le Pfr. J. Lejeune dsi- gne comme "les nouveaux docteurs des nouvelles lois de la vie... (ayant) dlibrment amput la ralit qu 71s observent. .. en laissant dans Ibmbre cerfains fait con- crets scientifiguement tablie de peur que la lumire ne montre le chemin ..." et d'un pouvoir gnostique, matrialiste et libertaire dans le but de dtruire la na- ture de l'Homme, a presque men son terme la fabri- cation de leur contrefaon humaine, qui ne se posera, aucun moment de son existence, la question essen- tielle "Qui suis-je ?" -

    Animal docile, btement heureux, "tonnam- ment bien chtr" crivait Saint-Ekupry, soumis ds le berceau une trituration en profondeur par l'ducation rpublicaine, il Thira par perdre jusqu' l'instinct de conservation.

    "Dlire de transformation de la nature, le systme social fera de nous des ms nouveaux, prls nous im- moler ds lors que nous ne sommes plus utiles mais cou- tons la collectivit", annonait Mme Suzanne Labin, aprs la lecture du livre "L'Avenir de la Vie", oeuvre du trs proche conseier - ami de Mr. Mitterand, Jac- ques Attali.

    L'INTERRUPTION VOLONTAIRE LA VIE

    Comme l'avortement dit I.V.G. lgalis et rem- bours, limine la grossesseaccident du parcours sexuel, l'assassinat en douceur, dit I.V.G., fera dispa- ratre les accidents du parcours existentiel, les nou- veaux-ns indsirs, tous les malades, accidents, handicaps et personnes ges jugs traumatisants, perturbants, encombrants, irrcuprables, improduc- tifs, inutiles et dilapideurs, par leur d e , des fman- ces ncessaires l'entretien et au divertissement des "travailleurs".

    PRECISIONS EN FORME DE DEF'INITIONS.

    Il est possible de distinguer deux formes d'eutha- nasie, l'active et la passive.

    EUTHANASIE ACTIVE. C'est l'acte volontai- re par lequel, en douceur, est mis fin la vie des sujets tars, des malades et des blesss incurables, des vieillards ... soit pour leur viter de poursuivre une exis- tence juges, par les autres, sans intrt, soit pour leur pargner les souffrances inhrentes leur tat, soit pour leur viter les douleurs de l'agonie.

    Elle s'applique galement aux personnes sou- vent atteintes dans leur intgrit physique, mais refu- sant, au nom d'une fausse et orgueilleuse conception de la dignit humaine, toute diminution visible de leur aspect etlou de leurs activits.

    L'acte est commis avec l'intention premire de faire mourir la p e r s o ~ e vi se... C'est un assassinat w un suicide, celui-ci pouvant tre facilit par un tiers.

    Il n'y apas euthanasie, lorsque la mort survient la suite d'une dcision des mdecins et chirurgiens de

  • ne pas s'acharner thrapeutiquement sur un patient dont l'tat ne prsente depuis longtemps aucune am- lioration ; de l'arrt des moyens modernes de &mi- mation dans les cas de coma profond ou dpass, sous certaines conditions ; de l'utilisation massive des substances analgsiques destines l'attnuation des souffrances du patient en phase ultime de son af5ection.

    EUTHANASE PASSIVE.

    C'est l'absence d'am visant directement le su- jet. Il y a intention premire de laisser mourir le sujet, mais en s'abstenant de lui apporter les soins ncessaires sa survie ou sagurison.

    Elle tait, et est encore sans doute trs pratiqus dans les services hospitaliers d'accouchement et de pdiatrie. Le Pfr. Michel Salomon qui ft le premier responsable du Service de Pdiatrie de l'Hpital de la Tirnone Marseille, en a convenu avec tristesse et a lutt avec nergie contre cette pratique.

    Il a su en percevoir les principales motivations applicables aussi l'euthanasie active, et l'avorte- ment, en partie le plus souvent : piti, lassitude, dgot.. dsir de sauvegarder l'avenir des frres et soeurs, peur panique, crainte du dshonneur, gois- me, orgueil, ... avarice,etc.

    Sous couvert de Droits de l'Homme ... sans Dieu, ces pauvres raison sont devenues arguments pour les tenants de l'euthanasie dans leur campagne pour obtenir la lgalisation ou la dpnalisation du procd.

    MANOEUVRES ET PROPAGANDE

    Pour en faire accepter l'ide par l'opinion publi- que, il n'est question que d'Interruption volontaire la Vie (I.W.), le terme volontaire tant particulirement scurisant pour la grande majorit de la population qui est en b o ~ e sant.

    De plus, l'euthanasie ne serait applique qu'aux sujets en ayant fait la demande explicite, soit quand ils taient pleine forme, soit au cours de l'volution pa- thologique de leur tat physique, psychique ou intel- lectuel.

    Hlas, la dcision "volontaire", mis part le sui- cide franc, est et sera de plus en plus le fait du mdecin, de l'infirmier, du parents, de l'ami ... voire du reprsentant de 1'Et.t par le truchement de la Scurit Sociale, puisque ce sont les autres qui sont peu peu investis du droit de juger la valeur et/ou l'utilit de la

    vie du sujet concern et cela selon les critres dj mentionns ici.

    Une vritable stratgie est dveloppe pour faire entrer l'euthanasie dans les moeurs puis dans la loi.

    AU PLAN MONDIAL.

    L'offensive est conduite par les mmes groupes qui ont su imposer la grande majorit des Etats dits Chrtiens, la libert sexuelle, la contraception et l'avortement, etc.

    Les recommandations de ces organismes s'ins- pirent des directives du Club de Rome, courroie de transmission du Massachusetts Institue of Tech- nologie (M.I.T.). Le tnor europen le batave Sico Mansholt, a t vice-prsident de la Commission des Communautes Europennes.

    A quelques exceptions prs, les Prix Nobel cons- tituent les cerveaux pensants de toutes ces organisa- tions. Ce sont les Docteurs de la nowelle religion ... ! Ainsi, le Pfi. Minkmsky, la section fran@se du Plan- ning Familiale, des mdecins et politiciens se sont en- gags depuis longtemps dans ce combat avec l'appui niultiplicateur des mdia.

    Voici les points forts de la campagne : 1969. En mai, a lieu Grenoble, ce qui parat

    avoir t le premier Congrs des Mdecins pour l'Eu- thanasie.

    1970. En novembre, un sminaire runit l'insti- tut Pasteur de Paris, des mdecins et des lgistes. Les participants s ' f l i e n t prts faire mourir les enfants anormaux et les vieillards par pur altruisme.

    1972. Le suicide de l'orgueilleux Henry de Montherlant induit une campagne de presse en faveur du "droit mourirdans la dignit".

    En fin d'anne, le Dr Peyret, dput de la Vien- ne, se dit proche des concepts eugnistes du mouve- ment G.RE.C.E. (Groupe de Recherche et d'Etudes pour la Civilisation Europe~e) dont l'limination des tars, des inutiles, des poids morts (cume et lie de la socit). Le bon docteur sera le rapporteur de la loi Veil instaurant le massacre des innocents.

    1974. Les mdia font largement et favorablement cho la dclaration du PFr. Louis Rougier, doctrinai- re de la Nouvelle Droite (GRECE), proclamant que "le droit Iugnisme et l'euthanasie seront parmi lesgmn&sconqutes& 1 avenir".

    La mme anne a lieu la Sorbonne, un colle que mondial sur les nouveaux pouvoirs et les nou-

  • veauxdevoirs de la Science. Il est l'origine de la cons- titution par 17Etat, d'un Conseil National &Ethique.

    Eugne Ionesco signale dans "Le Monde" du 19 octobre suivant, qu'en ralit, dans ce colloque "il tait question du droit des mdecins et des biologistes dkposer de la vie et de la mort des gens. .. pour des rai- sons biologiques, eugniques. .. et mme pour des consi- drations morales et sociales", en laissant au seul mdecin le pouvoir d'apprcier "la chance de survie et la qualit de la lrie quYl envisage de prolonger ou d Zcourtef'.

    Dans ce mme journal, Mme Sirnone Veil a o cordait ce droit aux mdecins : "Prolonger une vie qui n n est plus une, c st peut-tre faire de l'humanisme 1 'envers".

    1975. Nouvelle campagne des mdia l'occa- sion de la parution du livre-confession du chirurgien cossais George P. Nair, reconnaissant avoir pratiqu l'euthanasie active. Un dbat tlvis eu lieu.

    Il en est de mme en Grande Bretagne avec la participation de la Prsidente de la Voluntary Eutha- nasia Society.

    La dcision de l'&lise Anglicane admettant que "certaines formes de suppression de la vie, lorsqulle sont destines abrt;,ger des soufiances, sont morale- mentjusti~es", rqoit unelarge diffusion.

    En Suisse, la suspension du Pfr. Hammerli de Zurich, pour fait d'euthanasie active, entrane la pro- testation du Corps mdical. Un sondage populaire, conscutif l'vnement, donne 60 % d'opinions favorables une telle pratique.

    1978. Radical de gauche et F.M. influent, le S- nateur Caillavet dpose un projet de loi demandant la lgalisation de certaines formes d'euthanasie.

    Prvenant les Franais du but ultime de sa dmarche qui n'aboutit pas, il crit dansle journal m- dical 'Tonus", du 4 mai : "il n stpas question d'eutha- nasie, il est question de la libert de sa mort. .. Cette tape est ncessaire, plus tard, dans dix ans, dans quin- ze ans "ONf'pourra faire quelque chose".

    Les ractions des mdia ont t favorables. Le "Nouvel Observateur" du 3 juillet, approuve la prope sition sous couvert du refus de la dchance humaine.

    Lucien Neuwirth, pre de la contraception en France, proclame la qualit de la mort composante importante de la qualit de lavie.

    GRECE et sa revue "Nouvelle Ecole" en sont partisans dans le but de protger la sant des gnra- tions futures.

    1979. Dans un article publi daas le N 29 du Bulletin international de Grontologie, Mlle Nicole Schwartz fait une constatation dfinitive :

    "Peu importe les dnkations indignes, l'ide est lance ... Tout le problme est de savoir desornais quelles formes particulires prendront les lois sur l'eu- thanasie."

    "Grossirement ON peut envisager trois hypothses, selon que l'euthanasie ... est laisse au seul choix individuel, passe sous contrle mdic al..., passe sous contrle tatique.

    "Mais, quelque soit l'hypothse retenue ... le point retenir (est) que la mort de l'individu devient compltement socialise."

    Cette spcialiste traduit bien la volont de l'in- teiiigentsia franaise. Pendant la mise au point dfini- tive de la loi IVWeiiPelletier-Roudy, soit de 1974 1982, cette revendication est mise sous le boisseau pour ne pas gner la radicalisation de l'avortement, partie importante du programme.

    1982. Publication d'un ouvrage intitul "Suicide, mode d'emploi", dannant tous les renseignement th- oriques et pratiques au lecteur dsireux de mettre frn ses jours ou d'aider un candidats ventuel. Les mdia lui font unebelle publicit.

    Des familles dont un membre avait suivi les ins- tructions du live, en attaquent les auteurs en justice.

    1983. L'motion gagne un certain nombre de dput. Au mis de juin, une proposition de loi, adop- te par le Snat, demande que 'l'incitation et l'aide au suicide soient rprimes".

    Le Garde des Sceaux, Roger Badinter, digne fils de 1789, refuse de la soumettre du verdict de l'Assem- ble, jugeant le projet htifet liberticide.

    Fondation de l'Association pour le Droit de Mourir dans la Dignit (A.D.M.D.). Elle regroupe ac- tuellement au moins dix mille membres. Eile se d o ~ e pour vocation officielle de "rassembler toutes personnes de mme conviction pour promouvoir le droit lgal et social de disposer librement de sa per- sonne, de son corps, et se sa vie..., de choisir librement et lgalement le moment de finir sa vie et le moyen d'y parvenir".

    Les membres sont porteurs d'un 'Testament biologique", dit "Dclaration pour le doit de mourir dignement", sans aucune valeur juridique ce jour.

    L'Association W s e une brochure de quarante pages intitule "Auto-dlivrance", dont les trois- quarts du prix de vente, alimentent un fond servant

  • Fmancer, en cas de poursuites intentees par les pro- ches d'un "dlivr", la dfense et les frais judiciaires. La brochure prsente "les moyens accessibles, aussi surs que possible, sans soufiance et sans violence phy sique ou mentales", pour se donner la mort et fournit tous les renseignements utiles.

    1985. Le Congrs mondial pour l'euthanasie, organise par IADMD se tient Nice, du 20 au 23 sep- tembre, sur le thme "Vivno sa vie, vivre sa mort". Participent aux dbats huit cents personnes venues de vingt sept pays.

    Pour multiplier l'impact poiiti~psychologi- que du congrs le "coup" du Manifeste a t refait.

    Dj en avril 1974, le Prix Nobel Mono, au- jourd'hui dlivr de l'existence, et Sicco Mansholt s'taient bruyamment joints un manifeste publi aux U.SA parl'influence "Humanist Society",tenante de l'eugnisme.

    De la mme manire, la veilie du Congrs, s'tale dans "Le Monde" un texte sign par cinq mde- cins reconnaissant avoir "diivr plusieurs malades.

    Paralllement, l'hebdomadaire 'Tonusn, dj ci- t, publie un sondage ralis par l'Institute Indice Me- dical, selon lequel 81 % des mdecins gnralistes euthanasiaient les malades en phase terminale.

    1987. L'Association pour la Prvention de l'Enfance Handicape (AP.E.H.) adresse des Parle- mentaires un texte qu'elle souhaite voir devenir projet de loi : "Un mdecin ne commettra ni crime, ni dlit en s abstenant d administrer un enfant de moins de trois jours les soins ncessaires sa vie, quand cet enfin tpr- sentera une infirmit ingurissable et telle qu'ON prvoit qu 'il ne pourra jamais avoir une vie digne detre vcuef1.

    Plus dure que le Dr. Crik, cette association a trouv ainsi une solution d'autant plus efficace que ce "ON, mdecin, gyncologue, accoucheur ou pdia- tre, informerait seul les parents et aurait toutes facili- ts pour les influences ... ou mme, pour anticiper..

    H. Caillavet, Pdt d'Honneur de l'Association, trouva simplement, que la demande tait prmature.

    Pour calmer l'motion du bon peuple, le Secr- taire d'Et& aux Droits de l'Homme sans Dieu, Mr. Malhuret, et le Ministre de la Sant, Mme Barzach rejetrent grands cris la proposition.

    Elle est pourtant d'une logique irrfutable pour les tenants d'une biothique abandonnant les plus dshrits et les plus faibles de ses patients. Le Dr

    Claude Sureau, membre de l'Acadmie des Sciences, l'a soulign en faisant remarquer que le fond du projet est "tout entier inclus dans la loi sur l'I.V.G. Si un droit de vie et de mort sans appel est reconnu la mre jus- qu' 12 semaines (mme 20 semaines), il est inco