simulation par dynamique moléculaire de l'extraction d ...msm/pdf/n.muzet.pdf · charges,...

294
UNIVERSITE LOUIS PASTEUR STRASBOURG THESE Présentée pour obtenir le grade de Docteur de l'Université Louis Pasteur de Strasbourg Disciplines : Sciences Spécialité : Chimie Informatique et Théorique par Nicolas MUZET Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d'ions par des calixarènes. Importance des phénomènes interfaciaux Année 1999 Thèse n° Commission d'Examen constituée par : Pr. M. Burgard Rapporteur Interne Pr. M. Karplus Examinateur Dr. R. Lavery Rapporteur Externe Pr. P. Turq Rapporteur Externe Pr. G. Wipff Directeur de Thèse

Upload: doandan

Post on 15-Sep-2018

221 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

UNIVERSITE LOUIS PASTEUR

STRASBOURG

THESEPrésentée pour obtenir le grade de Docteurde l'Université Louis Pasteur de Strasbourg

Disciplines : SciencesSpécialité : Chimie Informatique et Théorique

par

Nicolas MUZET

SSiimmuullaatt iioonn ppaarr DDyynnaammiiqquuee MM oollééccuullaaii rr ee ddeell '' eexxttrr aacctt iioonn dd'' iioonnss ppaarr ddeess ccaall iixxaarr èènneess..

II mmppoorr ttaannccee ddeess pphhéénnoommèènneess iinntteerr ffaacciiaauuxx

Année 1999 Thèse n°

Commission d'Examen constituée par :

Pr. M. Burgard Rapporteur InternePr. M. Karplus ExaminateurDr. R. Lavery Rapporteur ExternePr. P. Turq Rapporteur ExternePr. G. Wipff Directeur de Thèse

Page 2: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Je tiens tout d'abord à remercier très vivement le Pr. Georges Wipff qui m'a accueilli dansson laboratoire dès mon stage de troisième année de l'EHICS, pour mon DEA et pour ces troisannées de thèse. Je le remercie pour m'avoir conseillé, guidé et donné le goût de la recherche.

J'exprime également toute ma gratitude au Pr. M. Burgard , au Pr. M. Karplus , au Dr R.Lavery et au Pr. P. Turq d'avoir participer à mon jury de thèse et d'avoir jugé ce travail.

Au sein du laboratoire MSM, je tiens à remercier tout d'abord Alexandre Sacha Varnek quia guidé mes premiers pas dans le monde de la modélisation moléculaire et m'a permis de

continuellement progresser grâce à ses critiques constructives.

Je remercie particulièrement Etienne Engler sans qui une grande partie de ce travail n'auraitpas trouvé corps, dont les conseils ont été souvent plus que précieux. Enfin en plus d'un ami,

c'est un "membre essentiel du laboratoire qui pallie les insuffisances chroniques desutilisateurs (dont je suis) pour les outils informatiques qu'il a développés".

Mes remerciements vont ensuite à Pierre Jost pour les nombreuses discussions "chimiques",à Tatiana Volkova, Christian Boehme, Frédéric Berny, Marc Baaden qui ont partagé avecmoi quelque unes de ces trois années et tout particulièrement à Rachel Schurhammer dont

les nombreux coups de main et gâteaux me furent très précieux…

Enfin, je tiens à remercier les ex-thésards et ex-post-doc du laboratoire, en particulierLaurent Troxler , Philippe Guilbaud et Alain Porquet, avec qui j'ai beaucoup échangé et

pas seulement en chimie théorique!

Ces remerciements ne seraient pas complets si je n'y incluais pas les membres du laboratoirede Chimie Quantique, et en particulier Alain Dedieu et Thierry Visentin , pour tous les

conseils hautement quantiques qu'ils m'ont donné…

Page 3: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

A Valérie

A Julien et Jérémie

A mes Parents

A Sébastien, à Muriel et Frank

A ma Familleet à tous ceux qui me sont chers.

Page 4: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Résumé

Nous avons étudié par dynamique moléculaire le comportement à l’interface eau-chloroformede calix[4]arènes impliqués dans l’extraction sélective de cations alcalins et alcalino-terreux.

Dans une première partie, nous avons déterminé le profil d'énergie libre de transfert d'uncomplexe calix[4]arène-couronne6.Cs+Pic- à travers l'interface eau-chloroforme. Il apparaît que cecomplexe ne peut pas diffuser spontanément dans la phase organique et reste adsorbé à l'interface.Nous avons ensuite simulé la démixtion d'un mélange homogène d'eau et de chloroforme contenant cecomplexe, des ligands libres et des sels généralement utilisés dans les expériences d'extraction. Cescalculs confirment que les calixarènes, libres ou complexés, sont très tensio-actifs. Afin de déterminersi la concentration de ces espèces à l'interface pouvait aider à l'extraction, nous avons simulé desmonocouches et des bicouches de calixarènes. Les molécules en seconde couche peuvent en effetmigrer dans le chloroforme. Enfin, la sélectivité de complexation simulée par des calculs d'énergielibre, montre que le calix[4]arène-couronne6 préfère Cs+ à Na+ à l'interface eau-chloroforme.

Dans une seconde partie, nous avons étudié différents types de calix[4]arènes-amide qui sontsélectifs envers les cations alcalino-terreux. Ces calculs ont apporté une description microscopique desphénomènes observés dans les expériences de complexation, d'extraction liquide-liquide et de RMN.

Enfin, nous avons comparé des modèles de chloroforme empiriques, par dynamiquemoléculaire et mécanique quantique. Les tests sur les dimères H2O-CHCl3, sur les solutionseau/chloroforme et à l'interface, ne montrent pas de différence marquée entre les modèles, ce quivalide les calculs précédents à l'interface.

Mots clés

Dynamique Moléculaire, ions radioactifs, contre-ions, ionophores, calixarène, extractionliquide-liquide, sélectivité, complexation, interface, chloroforme.

Page 5: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

We studied by molecular dynamics simulations at the water-chloroform interface, thebehavior of calix[4]arenes, involved in the assited alkali and alkaline-earth cations extractionprocesses.

In the fisrt part, we calculated the free energies changes for migration of a calix[4]arene-crown6.Cs+Pic- accross the water–chloroform interface. An energy minimum is found close tothe interface, the complex cannot diffuse to the organic phase and remains adsorbed. Then, wesimulated the demixing of neat binary water-chloroform solution containing the complex, freeligands, and salts used in extraction experiments. These calculations confirmed thatcalixarenes, free or complexed, behave as surfactants.In order to see whether highconcentrations of these species could help for the extraction, we simulated calixarenesmonolayers and bilayers. Indeed, molecules in the second layer can diffuse to chloroform.Finally, on the basis of free energy perturbations, we calculated a marked Cs+/Na+ recognitionby calix[4]arene-crown6 at the water-chloroform interface.

In the second part, we studied two calix[4]arenes-amide which binds selectively alkaline-earth cations. These calculations revealed microscopic behavior observed in complexation,liquid-liquid extraction and NMR experiments.

Finally, different chloroform models have been investigated using molecular dynamicsand quantum mechanics computer simulations. Tests made on the H2O-CHCl3 dimer, onwater/chloroform solutions and at the interface did not reveal marked differences betweenmodels, and validate our previous calculations at the interface.

Key words

Molecular dynamics, ionophores, calixarenes, radiactive ions, counter-ions, liquid-liquidextraction, complexation, selectivity, interface, chloroform.

Page 6: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

i

TABLE DES MATIERES

CHAPITRE 1: INTRODUCTION

1. Chimie des complexes et chimie supramoléculaire 12. Les calixarènes. 23. Extraction et nature de l'interface. 74. Les simulations de Dynamique Moléculaire 95. Objectif et plan de la thèse 116. Références 12

CHAPITRE 2: LA DYNAMIQUE MOLECULAIRE

1. Introduction 172. Mise en solution du soluté 18

2.1. Boîte de liquide pur 182.2. Interface liquide-liquide 202.3. Distance de troncature 20

2.3.1. Cut-off 202.3.2. Sommation d'Ewald 222.3.3. Champ de réaction 24

2.4. Périodicité 262.5. Solvants utilisés 27

2.5.1. Modèle de l'eau: H2O 272.5.2. Modèle du chloroforme: CHCl3 272.5.3. Modèles pour l'acétonitrile (CH3CN) et le méthanol (MeOH) 282.5.4. Charges, paramètres de Lennard-Jones et géométrie des modèles 28

3. Minimisation de l'énergie 294. Dynamique Moléculaire 31

4.1. Principe 314.2. Mise en œuvre : algorithme de Verlet 324.3. Contrôle de la température 334.4. Contrôle de la pression 344.5. Algorithme SHAKE 354.6. Dynamique sous contraintes: "BELLY" 36

5. Conditions initiales 366. Calcul de Variation d'Energie Libre 38

6.1. Principe 386.2. Application à la variation d'énergie libre de complexation ∆∆Gc 396.3. Application au calcul du Potentiel de Forces Moyennes 40

7. Analyse des résultats 417.1. Analyse infographique 417.2. Analyses géométriques et énergétiques 41

7.2.1. Surface de séparation de Gibbs 427.2.2. Tension de surface 43

7.3. Méthodes d'analyse spécifiquement développées pour nos travaux 437.3.1. Epaisseurs et rugosité de l'interface 447.3.2. Surface de la phase aqueuse à l'interface. 45

8. Références 47

Page 7: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

ii

CHAPITRE 3: LE CALIX [4]ARENE-COURONNE6 ET SES COMPLEXES A L'INTERFACE

1. Introduction 491.1. Sélectivité de complexation et d'extraction. 491.2. Profils d'énergie libre à l'interface. 51

2. Méthodes 552.1. Choix des charges. 552.2. Potentiels de Forces Moyennes: profil d'énergie libre. 56

2.2.1. Probabilité de présence dans des tranches de solvant. 562.2.2. Insertion de (petites) particules 572.2.3. Mise en œuvre du PFM. 572.2.4. Coordonnée de réaction 58

2.3. Sélectivité de complexation à l'interface. 593. Résultats 61

3.1. Profil d'énergie libre 613.1.1. Migration du côté chloroforme. 613.1.2. Migration dans l’eau. 643.1.3. Comparaison des PFMs avec des cut-off de 12 Å 6 et de 12 + 18 Å. 643.1.4. Comparaison des PFMs avec des échantillonnages différents. 66

3.2. Sélectivité Cs+ / Na+ à l’interface eau - chloroforme. 684. Discussion 73

4.1. Profil d'énergie libre. 734.1.1. Représentation physique du système 734.1.2. Minimum énergétique 73

4.2. Calculs de sélectivité à l'interface 754.2.1. Différence d'énergie libre de liaison ∆G4 754.2.2. Sélectivité de complexation à l'interface 764.2.3. Rôle du contre-ion. 77

5. Conclusion 786. Références du Chapitre 79

CHAPITRE 4: SIMULATIONS PAR DYNAMIQUE MOLECULAIRE DE LA DEMIXTION DE MELANGES

BINAIRES EAU / CHLOROFORME

1. Introduction 812. Méthodes 85

2.1. Les systèmes de solvants. 852.2. Conditions de simulations 862.3. Choix des charges 882.4. Indice de démixtion 88

3. Résultats 893.1. Simulation de démixtion A: mélange eau / chloroforme sans soluté. 893.2. Simulations de démixtion B à E: solutions binaires contenant des complexes

L1.M+Pic-. 913.2.1. Solution du calixarène-couronne6 libre L1: démixtion B. 913.2.2. Solutions de L1.Cs+Cl-: démixtions C à C". 933.2.3. Solutions de L1.Cs+Pic- et L1.Na+Pic-: démixtions D & E. 95

3.3. Simulations de démixtion F à H: solutions binaires contenant les sels(Cs+Pic-)4 et (Cs+NO3-)4. 98

3.3.1. Solutions de sels (Cs+Pic-)4 : démixtions F & G 983.3.2. Solution de sels (Cs+NO3

-)4 : démixtion H 102

Page 8: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

iii

3.4. Simulations de démixtion I et J: solution binaires contenant des mélangesde solutés - ligands libres, complexes et sels. 104

3.5. Mélanges eau-acétonitrile 1074. Discussion 111

4.1. Vitesse de démixtion. 1114.2. Les interactions solvant – solvant: forces motrices de la démixtion. 1144.3. Où sont les ions et les complexes après la séparation de phases ? Implications

pour le mécanisme d'extraction. 1164.4. Suggestion d'un mécanisme d'extraction ionique assistée. 1174.5. Méthodologie: modèles de chloroforme, électrostatique à longue distance. 118

4.5.1. Modèles de chloroforme 1184.5.2. Interactions à longue distance 121

5. Conclusion 1236. Références 124

CHAPITRE 5: COMPORTEMENT INTERFACIAL DE MONOCOUCHES ET BICOUCHES DE

CALIX [4]ARENES-COURONNE6 ET LEURS COMPLEXES

1. Introduction 1272. Méthodes 131

2.1. Equilibration des systèmes 1312.2. Conditions de simulations 1322.3. Calculs des aires moléculaires. 133

3. Résultats 1ère Partie : Concentration à l'Interface 1353.1. Simulation a : 9 ligands libres à l'interface + 9 sels Cs+Pic- dans l'eau. 1353.2. Simulation b : 9 complexes L1.Cs+Pic- à l'interface 1383.3. Simulation c : 9 complexes L1.Cs+Pic- inversés à l'interface 1403.4. Simulation d : 7 complexes L1.Cs+Pic- inversés à l'interface 1443.4. Simulations e: 9 complexes L1.Cs+Pic- inversés à l'interface + 1 coté eau

ou coté chloroforme 1463.6. Simulation f : 9 complexes L1.Cs+Cl- à l'interface 149

4. Résultats 2nde Partie : Saturation de l'Interface 1534.1. Simulation g: bicouche complexes et ligands libres + sels dans la

phase aqueuse 1534.1.1. Comportements de la bicouche de calixarènes 1534.1.2. Comportements des ions 156

4.2. Simulation h: monocouche de 15 ligands libres 1574.3. Simulation i: bicouche de 9 + 9 ligands libres 160

5. Discussion 1645.1. Interactions à longue distance 1645.2. Comportements des ligands libres et complexes à l'interface. 165

5.2.1. Distances à l'interface 1655.2.2. Aspects énergétiques du comportement interfacial 1675.2.3. Oscillation des complexes et des ligands à l'interface. 168

5.3. Extraction dans la phase organique et rôle des contre-ions 1735.4. Solvants à l'interface saturée. 174

6. Conclusion 1777. Références 179

Page 9: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

iv

CHAPITRE 6: LE CALIX [4]ARENE-TETRAAMIDE ET SES COMPLEXES IONIQUES

1. Introduction 1812. Méthodes 186

2.1. Choix des charges 1862.2. Structures de départ. 1872.3. Dynamique Moléculaire 188

3. Résultats 1903.1. Simulations des complexes L2.M2+ dans le vide, dans l'eau et dans l'acétonitrile 190

3.1.1. Structures simulées dans le vide 1903.1.2. Structures simulées dans l'eau 1913.1.3. Structures simulées dans l'acétonitrile. 1933.1.4. Comparaison structurales et énergétiques 194

3.2. Simulations des complexes L2.UO22+ dans l'eau et dans l'acétonitrile 197

3.3. Etude des liaisons hydrogène internes dans le ligand L3 1993.3.1. Phase gazeuse 2003.3.2. En solution 201

3.4. Comportement des complexes de L2 et L3 en solution et à l'interface. 2043.4.1. Simulations dans le chloroforme et dans le méthanol. 2043.4.2. Simulations à l'interface liquide/liquide: eau/chloroforme. 207

4. Discussion 2134.1. Réorientation des sites de coordination 2134.2. Importance de la conformation du ligand libre dans la phase organique. 2144.3. La question de la stabilité relative des complexes de L3. 2154.4. Le rôle des contre-ions 2154.5. Etudes des phénomènes interfaciaux. 216

5. Conclusion 2176. Références du chapitre 218

CHAPITRE 7: COMPARAISON DE DIFFERENTS MODELES DE CHLOROFORME

1. Introduction 2211.1. Définitions des modèles. 223

2. Chloroforme pur 2252.1. Introduction 2252.2. Méthode 2262.3. Résultats 227

2.3.1. Moment dipolaire 2272.3.2. Densités 2282.3.3. Enthalpie de vaporisation 2282.3.4. La structure moyenne du solvant 228

3. Dimère H2O/CHCl3 en phase gazeuse 2303.1. Introduction 2303.2. Méthode 230

3.2.1. Mécanique moléculaire 2303.2.2. Mécanique quantique 231

3.3. Résultats. 2313.3.1. Comparaisons géométriques pour le minimum "absolu". 2323.3.2. Interactions énergétiques 2333.3.3. Répartition des charges atomiques de Mulliken (MQ) 234

4. Solution d'eau dans le chloroforme et de chloroforme dans l'eau. 2364.1. Introduction 236

Page 10: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

v

4.2. Méthode 2374.2.1. Dynamique moléculaire 2374.2.2. Calculs d'énergie libre 238

4.3. Résultats 2394.3.1. Solution de 3 molécules d'eau dans le chloroforme 2394.3.2. Solution de 20 molécules d'eau dans le chloroforme 2444.3.3. Solution de 2 CHCl3 dans l'eau 2464.3.4. Variation d'énergie libre d'hydratation en fonction du modèle de chloroforme 247

5. Propriétés des interfaces eau-chloroforme selon les modèles. 2505.1. Introduction 2505.2. Méthode 251

5.2.1. Orientation des molécules de solvant 2515.2.2. Aire de l'interface 2515.2.3. Conditions de simulations 252

5.3. Résultats 2535.3.1. Densités 2535.3.2. Orientations des molécules de solvant 2555.3.3. Epaisseur d'interface 2585.3.4. Aires interfaciales 2625.3.5. Tensions de surface 2635.3.6. Energies d'interaction eau-chloroforme 263

6. Discussion 2656.1. Du dimère en phase gazeuse au soluté en solution. 2656.2. Comparaison des modèles de chloroforme 267

7. Conclusion 2698. Références 271

CHAPITRE 8: CONCLUSION GENERALE 273

Page 11: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

CHAPITRE 1

INTRODUCTION

Page 12: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 1

Introduction

1. Chimie des complexes et chimiesupramoléculaire

On appelle «complexe» tout édifice chimique formé par l’association de deux ou

plusieurs entités chimiques indépendantes, ions ou molécules.

La chimie supramoléculaire en fournit de nombreux exemples, en étudiant les

phénomènes d’association et de reconnaissance intermoléculaire ou en synthétisant des

molécules capables de complexer sélectivement des anions ou des cations. Les complexes

peuvent de plus, permettre le transport sélectif de cations à travers des membranes artificielles

ou biologiques.

L’intérêt suscité par la chimie des complexes provient de la grande diversité de leurs

applications qui ne cessent de se développer dans tous les domaines de la chimie, débordant

sur la physique, la métallurgie, la chimie bio-inorganique.

Certaines molécules insolubles dans l'eau peuvent capturer des ions et les extraire d'une

phase aqueuse vers une phase organique. Ces ionophores existent sous forme naturelle et sont

impliqués dans de très nombreux processus biologiques 1. La découverte de la valinomycine

2,3, ionophore naturel macrocyclique, a montré qu'une cavité préorganisée pouvait jouer le

rôle de récepteur, et par des interactions non-covalentes fortes fixer un ion en remplaçant

partiellement ou totalement sa(ses) première(s) couche(s) de solvatation 4.

Il est possible de synthétiser des ionophores «sur mesure» ayant des propriétés de

coordination sélective en fixant la dimension, la nature chimique et géométrique du

Page 13: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 2

macrocycle. De même, l’extérieur de l'ionophore, essentiellement hydrophobe, peut être

modifié de façon à faciliter la dissolution de sels dans les solvants organiques 5-9.

Les premiers résultats ont été la synthèse en 1967 par Pedersen et coll. des éthers-

couronnes 5, qui possèdent une cavité préorganisée circulaire bidimensionnelle et des

propriétés de complexation sélective vis-à-vis des cations alcalins et alcalino-terreux. Lehn et

coll. synthétisent en 1968 les premiers cryptands bicycliques 10, ionophores analogues des

éthers-couronne, mais dont la cavité est sphéroïdale tridimensionnelle. De même, Cram et

coll. ont synthétisé les sphérands 11-13, ionophores polymacrocycliques présentant une cavité

préorganisée pour la complexation. Tous ces travaux de chimie supramoléculaire ont été

récompensés par le Prix Nobel de Chimie dédié à J. M. Lehn, C. J. Pedersen et D. J. Cram en

1987 14.

O O

O O

N NO O

O O

O

O

O

O

CH3

H3C

H3C

CH3

CH3

CH3

O

CH3 OCH3

O CH3O

CH3O

H3C

OH3C

Figure 1: éthers-couronne 18-C-6 (gauche) – cryptands 222 (centre) – sphérand (droite)

2. Les calixarènes.

La recherche de nouvelles molécules capables d'extraire sélectivement les ions de la

phase aqueuse s'est poursuivie, et une nouvelle classe de composés macrocycliques a été

développée: les "calixarènes". Ce terme a été introduit par Gutsche et coll. en 1978 15, pour

décrire ces récepteurs polyphénoliques, dont la partie haute ressemble à une coupe, ou un

calice (Figure 2). Les calix[n]arènes possèdent généralement une partie hydrophobe,

composée de n groupements phényle (généralement n = 4 à 8), et d'une partie hydrophile,

formée pour les premiers calixarènes par des groupes OH (Figure 2).

Page 14: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 3

OHOHOH OH

R RRR

Partie haute

Partie basse

R

O4

R'

Figure 2: Calix[4]arène (gauche). La partie haute, hydrophobe, est constituée de cyclesaromatiques - la partie basse est constituée des groupes OH de coordination aux ions estgénéralement hydrophile. La fonctionnalisation se fait en remplaçant les 4 H de –OH par desgroupements R' (droite).

L'un des principaux attraits des calixarènes est leur faible coût de fabrication et leur

synthèse relativement aisée: des quantités de l'ordre du gramme peuvent être facilement

obtenues à l'échelle du laboratoire.

Ils peuvent adopter de nombreuses conformations. La modification du nombre de cycles

aromatiques dans la partie haute permet de moduler la flexibilité. Gutsche a décrit les

différentes conformations prises par les calixarènes tétramères, notés calix[4]arènes, et les a

dénommées "cône", "cône partiel", "1,2-alternée" et "1,3–alternée" (Figure 3), selon la

position des groupements OH par rapport au plan de la molécule 16. Ces conformations

peuvent en principe s'échanger par rotation autour des liaisons σ entre les groupes phenyle-

CH2-phenyle 17-19. Gutsche et coll. ont également décrit la synthèse des pentamères

(calix[5]arènes) aux octamères (calix[8]arènes)15.

cône cône partiel 1,3 – alternée 1,2 - alternée

Figure 3: Conformations du calix[4]arène

Page 15: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 4

Leur faible solubilité dans l'eau et leurs propriétés de complexation en font des récepteurs

de choix pour l'extraction liquide-liquide ou le transport d'ion. En effet, l'une des premières

études importantes a été effectuée sur les p-tert-butylcalix[4]arène (R = tertio-butyle) pour le

transport d'ions à travers une membrane liquide. A partir d'une phase source contenant des

hydroxydes de métaux (Na+, K+, Rb+ et Cs+), Izatt et coll. ont montré que le cation Cs+ était

transporté sélectivement à travers une membrane CH2Cl2/CCl4 contenant 0.001 M de p-tert-

butylcalix[4]arène 20. Le ligand est déprotoné par la phase source basique, et le cation est

transporté sans son contre-ion. Il faut noter que les cations alcalins sont souvent considérés

comme résistant à la complexation. Cations à configuration électronique externe de gaz

nobles: Li+, Na+, K

+, Rb+, Cs+, ils possèdent une faible polarisabilité, et forment des liaisons

de type ionique.

De nombreuses études ont porté sur la fonctionnalisation de ces calixarènes afin de

moduler leur sélectivité. Dans une expérience d'extraction liquide-liquide, Chang et Sho 21 ont

montré que le p-tert-butylcalix[4]arene-methyl-éther (c'est-à-dire que les 4 hydrogènes de

-OH ont été remplacés par un groupement méthyle) préférait le cation Na+ (fraction de cations

du sel M+Pic- extrait: Na+ 6.2%, K+ 3.8%, Li+/Rb+/Cs+/Ca2+/Ba2+ < 1%). La structure du

complexe avec le métal Na+ a été obtenue par diffraction-X 22. Le cation interagit avec les

quatre oxygènes des groupes méthoxy à une distance d'environ 2,3 Å, et légèrement au-dessus

du plan formé par ceux-ci. Le cône aromatique contient une molécule de solvant (toluène).

Ungaro et coll. ont été les pionniers dans la fonctionnalisation de la partie hydrophile des

calixarènes. En remplaçant l'hydrogène de –OH par un groupement ester (R' = -CH2COOBut),

ils ont obtenu un ligand qui extrait les sels de métaux alcalins-picrate du chloroforme dans

l'eau. Le p-tert-butylcalix[4]arène-ester est sélectif pour l'extraction de Na+, par rapport à Li+

(rapport des constantes de stabilité = 202), K+(113) et Cs+(103) 23. Cette forte sélectivité est

attribuée en partie à la préorganisation de la partie hydrophile. Le cation est en interaction

avec les huit oxygènes qui composent la cavité de complexation (voir la structure proposée

par les études RMN, Figure 4 – gauche)

Sur un calixarène-ester relativement proche (R' = -CH2COOR" avec R" = Me ou Et)

McKervey et coll. ont trouvé une sélectivité envers Na+ dans l'extraction de CH2Cl2 vers H2O

(Na+: 94,6%, K+: 49,1%, Cs+: 48,9%, Rb+: 23,6% et Li+: 15,0%) 24. Ces résultats ont été

retrouvés par Chang et Sho, qui ont montré que ce calix[4]arène-ester extrait également les

métaux alcalino-terreux, bien que plus faiblement 21. En remplaçant R' par le groupement

Page 16: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 5

amide (-CH2CON(H)Bun) sur le p-tert-butylcalix[4]arène, l'équipe de Chang a réussi à obtenir

des taux d'extraction satisfaisants pour les alcalino-terreux.

Arduini et coll. 25 ont, par la suite, mesuré les taux d'extraction dans des systèmes

CHCl3/H2O pour des p-tert-butylcalix[4]arène-tétraacétamide. Ceux-ci extraient beaucoup

plus fortement les cations alcalins que les calixarènes-éthers ou esters mais au prix d'une

sélectivité moindre (pour l'extraction Na+/M+ rapport des constantes d'équilibre d'extraction :

Li+ (146), Cs+(111) et K+ (68)). Ils complexent également les ions alcalino-terreux avec une

sélectivité pour Ca2+ et Sr2+ sur Ba2+ et Mg2+ 26-28. Le cristal du complexe du potassium a été

résolu par rayons-X avec une molécule de méthanol dans le cône aromatique (voir Figure 4 -

droite) 29.

Figure 4: structure proposée pour le complexe sélectif p-tert-butylcalix[4]arène-ester.Na+ (gauche)ref. 23. Structure RX du complexe p-tert-butylcalix[4]arène-tétraacétamide.K+ (droite) – ref. 29.

Pour tous ces calixarènes, les quatre sites de coordination (groupements –OR') possèdent

un certain degré de liberté conformationnelle, et se réorganisent autour du cation complexé.

Cependant, ils sont également exposés à la solvatation. En partant de ce principe, les équipes

de Reinhoudt 30 et d'Ungaro 31 ont synthétisé des calix[4]arènes pontés, qui possèdent une

préorganisation de la cavité de complexation et ainsi des propriétés de liaisons et d'extraction

différentes envers les métaux alcalins.

En 1983, les premiers éthers-couronnes insérés sur des calixarènes entre les branches 1 et

3 ont été synthétisés (Figure 5 - gauche) 32. Ce p-tert-butylcalix[4]arène-couronne5 transporte

Page 17: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 6

sélectivement K+, dans la conformation cône, d'une phase aqueuse basique (pH = 12-13) à

travers une membrane liquide (CH2Cl2) vers une phase acide (HCl 0,1 M).

En modifiant l'alkylation des autres groupes -OH, il est possible d'obtenir des

conformations cône partiel et 1,3-alternée 33. Pour des chaînes éthers-couronne ayant plus de

quatre oxygènes, une forte sélectivité Cs+ / Na+ a été observée 34 pour le conformère 1,3-

alterné. La structure aux rayons-X a été déterminée pour le complexe avec le cation Cs+

(Figure 5 - droite) 35,36. Ces résultats, ainsi qu'un bon taux d'extraction de ce cation (fraction

de cations du sel M+Pic- extrait de l'eau vers le dichlorométhane: Cs+ 64,5%, Rb+ 43,8% K+

13,8%, Na+ 2,4%), en ont fait une molécule prometteuse pour la purification des déchets

radioactifs contenant 135Cs+.

Les interactions du ligand avec le cation complexé se font par l'intermédiaire des

oxygènes de la chaîne éther, mais aussi avec les électrons π des cycles aromatiques en

position alternée. Cette structure, prédite par modélisation moléculaire 37, a également été

résolue par rayons-X pour un complexe de Cs+Picrate- (Figure 5 - droite) 35.

Figure 5: structure RX du diméthoxy-p-tert-butylcalix[4]arène-couronne5 et d'uncomplexe calix[4]arène-couronne6.Cs+Pic- (droite) – ref. 38.

Dans ce travail, nous nous intéresserons aux complexes de calix[4]arène-couronne6 et de

p-tert-butylcalix[4]arène-tétraacétamide et plus particulièrement au rôle de l'interface

eau-chloroforme dans les phénomènes d'extraction.

Page 18: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 7

3. Extraction et nature de l'interface.

L'extraction ou le transport des ions d'une phase à une autre sont des processus complexes

mal définis et encore incompris au niveau microscopique. Les expériences d'extraction

passent généralement par le mélange des solutions organique (contenant les ligands) et

aqueuse (contenant les sels d'ions à extraire). Puis, les phases se séparent par centrifugation ou

grâce aux forces gravitationnelles et de cohésion des solvants. Le mécanisme de capture de

l'ion et son transfert vers la phase organique sont mal connus et font l'objet de nombreuses

hypothèses. Il est clair que la région interfaciale entre les deux solvants joue un rôle

primordial 39-41. Ses propriétés chimiques et physiques influent probablement sur la réactivité

et la sélectivité des espèces qui s'y trouvent. Cependant, la nature même de cette interface est

inconnue: elle est souvent représentée comme la juxtaposition plate des deux solvants, ou

comme une phase mixte intermédiaire de mélange des deux liquides.

Expérimentalement, les premières études sur l'interface liquide-liquide ont été faites par

électrochimie. L'interface entre deux liquides non-miscibles, généralement l'eau et le nitro-

benzène, contenant des électrolytes (LiCl pour l'eau et tétrabutylammonium tétraphénylborate

pour le nitro-benzène), est soumise à un potentiel. Ainsi, une interface entre deux phases

ioniquement conductrices et non-miscibles est constituée. L'insertion de cations ou d'anions

dans l'un ou l'autre des liquides et la mesure des changements de potentiel, permettent

d'obtenir des informations comme l'énergie de transfert de Gibbs ou la cinétique des transferts

de charges 42,43. Par cette technique, différents groupes ont montré qu'il n'y avait pas de

contribution importante des moments dipolaires des molécules de solvants au niveau de

l'interface, et donc par conséquent pas d'orientation préférentielle 44,45. Certaines études ont

porté sur l'investigation électrochimique des réactions de complexation interfaciales ions-

ionophores. Ainsi, Koryta et coll. ont étudié des antibiotiques tels que la valinomycine ou la

nonactine et ont montré que les constantes de complexation pouvaient être déterminées à

partir des potentiels de transfert 46,47.

D'autres techniques ont été utilisées pour l'étude de l'interface. La diffusion des rayons-X,

reflétés sur une interface, permet de mesurer la profondeur de celle-ci 48. Braslau et coll. ont

ainsi déterminé que le profil de densité de la surface eau-air avait une épaisseur d'environ 3,24

±0,05 Å 49.

Page 19: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 8

La spectroscopie de génération du second harmonique (Second-Harmonic Generation -

SHG) et celle de la sommation de fréquences (Sum-Frequency Spectroscopie - SFS) peuvent

fournir des informations précises sur les interfaces liquide-liquide car les solutions massiques

ne génèrent pas les signaux de réponse comme les molécules adsorbées (principe de la

polarisabilité anisotrope de l'interface).

Par la SHG, il est possible de déterminer l'orientation des molécules en contact avec

l'interface. Ainsi, le signal SH d'un chromophore naphtalène à l'interface H2O-CCl4 permet de

suivre son orientation qui dépend de la forme de l'interface 50. Avec les récents progrès de la

SHG, il est possible de sonder les molécules surfactantes adsorbées possédant des têtes

aromatiques à l'interface eau-dichlorométhane 51. Le signal SH contient notamment les

contributions des moments dipolaire et quadripolaire des molécules de l'interface. L'étude de

la proportion de ces contributions permet de définir une orientation ordonnée interfaciale 52.

La SFS projette sur l'interface deux rayons lumineux aux fréquences différentes, dont l'un

dans l'infrarouge, et permet d'obtenir les fréquences de vibrations des molécules adsorbées.

Ainsi, la composition moléculaire à l'interface peut être analysée 53.

Enfin, les lasers de dernière génération pulsant à des fréquences de l'ordre de la

picoseconde ou de la femtoseconde, donnent une résolution de temps suffisante pour l'étude

cinétique des changements chimiques et physiques à l'interface 53.

Cependant, peu d'informations concernent les processus d'extraction liquide – liquide ou

le comportement de l'interface durant les transferts de solutés, et leurs résultats posent des

problèmes d'interprétation. Ainsi, Yoshida et Freiser 54 ont proposé que la complexation de

K+ par la valinomycine se fasse dans la phase aqueuse, et que les transferts de charges

observés dans les études électrochimiques, sont dus à la migration du complexe ainsi formé

dans la phase organique. Au contraire, les mesures de tension interfaciale montrent que les

ionophores dibenzo-18-C-6 sont adsorbés à l'interface, suggérant que la complexation de l'ion

K+ se fasse probablement dans la région de contact des solvants 55.

L'évolution conjointe des systèmes informatiques et des modèles théoriques permet

d'utiliser les simulations sur ordinateur pour essayer de mieux comprendre les phénomènes

microscopiques qui adviennent en solution ou à l'interface liquide-liquide, et qui sont encore

invisibles à l'instrumentation.

Page 20: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 9

4. Les simulations de Dynamique Moléculaire

La structure d’un composé en solution n’est pas nécessairement celle qu’il adopte dans

l’état solide, où le réseau cristallin maintient la molécule dans l’une de ses conformations.

Elle est alors essentiellement rigide, et seules des vibrations de faible amplitude des atomes

autour de leurs positions d’équilibre sont autorisées.

En solution, plusieurs facteurs sont susceptibles de modifier cet état de choses: l’ordre à

longue distance disparaît, mais surtout, la molécule n’étant plus emprisonnée dans la maille

cristalline, peut retrouver certains de ses degrés de liberté internes (déformations des angles

de liaison, rotations de groupes d’atomes les uns par rapport aux autres, etc.) et adopter une ou

plusieurs conformations, différentes de celle qui est observée dans le cristal. Il suffit alors que

la barrière d’énergie qui s’oppose au passage entre ces diverses formes structurales soit faible

pour que la molécule oscille rapidement de l’une à l’autre et prenne un caractère dynamique.

Cette dynamique constitue une composante importante de la connaissance des structures des

molécules et une base essentielle à la compréhension de leurs propriétés physiques et

spectrales, ainsi que de leur comportement réactionnel.

Les molécules en solution interagissent avec le solvant qui peut contribuer à modifier la

structure initiale. Les molécules de solvant peuvent se lier à l’atome métallique d’un

complexe de coordination ou se substituer à l’un ou l’autre de ses coordinats initiaux.

Les simulations sont un outil puissant pour comprendre les liens entre conformation,

coordination, solvatation et énergie. Enfin, elles permettent la prédiction des propriétés de

certaines molécules lorsque la synthèse ou les analyses sont coûteuses ou difficiles à réaliser

en laboratoire. Les calculs effectués à l'échelle de l'atome s'appliquent aussi bien à l'état

solide, à la phase gazeuse qu'au soluté en solution 56-59.

Les molécules de la chimie supramoléculaire sont, depuis les années 1980, des sujets

d'étude pour la chimie informatique. Par exemple, l'éther-couronne 18-C-6 et ses complexes

avec les cations alcalins et alcalino-terreux, ont été intensivement simulés par mécanique et

dynamique moléculaire 60-64.

De nombreuses études été effectuées au laboratoire MSM pour des calixarènes tels que le

p-tert-butylcalix[4]arène (Figure 2-gauche) 65-67, le p-tert-butylcalix[4]arène-tétra-acétamide

Page 21: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 10

(Figure 4-droite) 68, le calix[4]arène-couronne6 (Figure 5-droite) 69-71 ou encore le

calix[4]arène-bis-couronne6 72,73. Ces ligands et leurs complexes ont été simulés dans

différents solvants, tels que l'eau, le méthanol, l'acétonitrile ou encore le chloroforme, afin de

caractériser les propriétés de sélectivité liées aux conformations et aux structures en solution.

Nos travaux sont dans la continuité de ces simulations, et nous reviendrons plus en détails sur

certaines de ces études dans les différents chapitres de cette thèse.

Une approche simple pour étudier l'extraction liquide-liquide d'ions, assistée par des

ionophores, a été utilisée au laboratoire MSM, en partant directement de complexes formés ou

de ligands libres à l'interface eau-chloroforme. En effet, la capture de l'ion par le complexe est

un processus qui peut difficilement se produire aux échelles de temps qui nous sont

accessibles, principalement pour des raisons de barrières cinétiques et d'échantillonnage

conformationnel.

Les simulations de calixarènes à l'interface (le p-tert-butylcalix[4]arène, le p-tert-

butylcalix[4]arène-tétra-acétamide, le calix[4]arène-couronne6 et le calix[4]arène-bis-

couronne6) ont montrées que ces molécules amphiphiles restaient adsorbées à la surface de

contact entre les deux liquides 74. Les complexes des mêmes molécules restent également à

l'interface 37,70,66, alors qu'expérimentalement ils sont extraits dans la phase organique.

Les premières simulations d'agrégats moléculaires à l'interface, sur des complexes et des

ligands libres de 18-C-6 75, ou avec des molécules tensio-actives telles que le TBP 76,77 ont

montré qu'il pouvait y avoir migration de certaines molécules dans la phase organique.

M. Lauterbach a alors simulé les transferts à travers l'interface de calix[4]arènes-couronne6

libres et complexés ainsi que des sels de Cs+ 78,79. Il est apparu qu'il existait un minimum

d'énergie libre au niveau de l'interface, légèrement du coté chloroforme. Nous présenterons en

détails ces résultats dans le Chapitre 3.

L'objectif de notre travail est de poursuivre les investigations, par dynamique

moléculaire, sur la nature et le rôle de l'interface eau-chloroforme lors de l'extraction des

complexes. Pour quelles raisons les complexes et les ligands libres restent-ils à l'interface ? Et

dans quelles conditions est-il possible de les faire migrer dans la phase organique ? Quelle est

l'importance des modèles de solvant utilisés ? Enfin, quelle est l'influence sur les résultats du

traitement des interactions à longue distance ?

Page 22: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 11

5. Objectif et plan de la thèse

Le choix des calixarènes et des cations étudiés a été principalement dicté par des

considérations expérimentales, afin de contribuer aux recherches sur la purification et la

réduction du volume des déchets à haute radioactivité de l'industrie nucléaire 80-82.

Après l'introduction générale (Chapitre 1), les méthodes de dynamique moléculaire

utilisées sont brièvement présentées dans le Chapitre 2.

Les résultats de nos travaux seront séparés en trois grandes parties:

La première partie regroupe toutes les simulations sur les complexes de calix[4]-

couronne6 (noté L1) et ses complexes de Cs+Picrate- à l'interface.

Nous prolongerons l'étude initiée par M. Lauterbach sur le profil énergétique du

transfert du complexe L1.Cs+Pic- à travers l'interface liquide – liquide. Nous étudierons

également sa sélectivité Cs+ / Na+ à l'interface (Chapitre 3).

Puis nous simulerons la séparation des deux solvants initialement mélangés, afin de

mimer le processus impliqué dans les expériences d'extraction. Nous observerons

particulièrement le comportement des complexes de L1, mais aussi de sels CsPic, CsNO3 ou

CsCl (Chapitre 4).

Les conséquences de la saturation de l'interface par les complexes et ligands libres

seront ensuite abordées dans le Chapitre 5, afin de voir quelle en est l'influence sur l'extraction

vers la phase organique.

La seconde partie est consacrée à la comparaison des propriétés extractantes et

complexantes de deux calixarènes-tétraamide: le p-tert-butylcalix[4]arène-tétradiéthylamide

(noté L2, Figure 4-droite) et le p-tert-butylcalix[4]arène-diamide-diéthylamide (noté L3)

(Chapitre 7).

La troisième partie, plus méthodologique, consiste en la comparaison de différents

modèles de chloroforme par dynamique moléculaire et mécanique quantique, afin de voir si

l'un d'entre eux est le plus adapté à nos calculs à l'interface (Chapitre 8). Les propriétés des

interfaces eau-chloroforme y seront également étudiées en détail.

Page 23: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 12

6. Références

(1) H. Ringsdorf; B. Schlarb; J. Venzmer J. Angew. Chem. 1988, 100, 117.

(2) H. Brockmann; H. Geeren Justus Liebigs Ann. Chem. 1957, 603, 217.

(3) M. M. Shemyakin; N. A. Adanova; E. I. Vinogradova; M. Y. Feigina Tetrahedron Lett. 1963.

(4) D. J. Cram; J. M. Cram ; in Selectivity a Goal for Synthetic Efficiency; Bartman, W. and Trost,

B. M., Ed.; Verlag Chemie: Weinheim, 1984.

(5) C. J. Pedersen J. Am. Chem. Soc. 1967, 89, 2495.

(6) B. Dietrich; J. M. Lehn; J. P. Sauvage Tetrahedron Lett. 1969, 34, 2886.

(7) J. M. Lehn Struc. Bonding 1973, 16, 60-61.

(8) D. J. Cram; J. M. Cram Science 1974, 183, 803.

(9) J. M. Lehn Chemistry of Transport Processes - Design of Synthetic Carrier Molecules; in

Physical Chemistry of Transmembrane Motions; Spach, G., Ed.; Elsevier: Amsterdam, 1983.

(10) J. M. Lehn; J. P. Sauvage; B. Dietrich J. Am. Chem. Soc. 1970, 92, 2916-2918.

(11) D. J. Cram; K. T.; R. C. Helgeson; G. M. Lein J. Am. Chem. Soc. 1979, 101, 6752-6754.

(12) D. J. Cram; S. P. Ho J. Am. Chem. Soc. 1986, 108, 2998-3005.

(13) D. J. Cram; S. P. Ho; C. B. Knobler; E. Maverick; K. N. Trueblood J. Am. Chem. Soc. 1986,

108, 2998.

(14) J. M. Lehn Angew. Chem. Int. Ed. Engl. 1988, 27, 89-112.

(15) C. D. Gutsche; R. Muthukrishnan J. Org. Chem. 1978, 43, 4905.

(16) C. D. Gutsche Calixarenes; Royal Society of Chemistry: Cambridge, 1989.

(17) P. D. J. Grootenhuis; P. A. Kollman; L. C. Groenen; L. C. Reinhoudt; G. J. van Hummel; F.

Ugozzoli; G. D. Andreetti J. Am. Chem. Soc. 1990, 112, 4165.

(18) J. D. van Loon; L. C. Groenen; S. S. Wijmenga; W. Verboom; D. N. Reinhoudt J. Am. Chem.

Soc. 1991, 113, 2378-2384.

(19) S. Fischer; P. D. J. Grootenhuis; L. C. Groenen; W. P. van Hoorn; F. C. J. M. van Veggel; D.

N. Reinhoudt; M. Karplus J. Am. Chem. Soc. 1995, 117, 1611-1620.

(20) R. M. Izatt; J. D. Lamb; R. T. Hawkins; P. R. Brown; S. R. Izatt; J. J. Christensen J. Am.

Chem. Soc. 1983, 105, 1782.

(21) S.-K. Chang; I. Cho J. Chem. Soc., Perkin Trans. I 1986, 1, 211.

(22) S. G. Bott; A. W. Coleman; J. L. Atwood J. Am. Chem. Soc. 1986, 108, 1709.

(23) A. Arduini; A. Pochini; S. Reverberi; R. Ungaro; G. D. Andreetti; F. Ugozzoli Tetrahedron

1986, 42, 2089.

Page 24: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 13

(24) M. A. Mc Kervey; E. M. Seward; G. Ferguson; B. Ruhl; S. J. Harris J. Chem. Soc. Chem.

Comm. 1985, 388.

(25) A. Arduini; E. Ghidini; A. Ponchini; R. Ungaro; G. D. Andreetti; G. Calestani; F. Ugozzoli J.

Incl. Phenom. 1988, 6, 119-134.

(26) F. Arnaud-Neu; M.-J. Schwing-Weil; K. Ziat; S. Cremin; S. J. Harris; M. A. M. McKervey

New J. Chem. 1991, 15, 33-37.

(27) M. Ogata; F. Kiyoshi; S. Shinkai J. Am. Chem. Soc. 1994, 116, 4505-4506.

(28) F. Arnaud-Neu; G. Barrett; S. Fanni; D. Marrs; W. McGregor; M. A. McKervey; M.-J.

Schwing-Weill; V. Vetrogon; S. Wechsler J. Chem. Soc., Perkin Trans. 2 1995, 453-461.

(29) G. Calestani; F. Ugozzomi; A. Arduini; E. Ghidini; R. Ungaro J. Chem. Soc., Chem. Comm.

1987, 344.

(30) D. N. Reinhoudt; P. J. Dijkstra; P. J. A. in't Veld; K. E. Bugge; S. Harkema; R. Ungaro; F. G.

Ugozzoli, E. J. Am. Chem. Soc. 1987, 109-110, 4761.

(31) P. J. Dijkstra; A. J. Brunink; K. E. Bugge; D. N. Reinhoudt; S. U. Harkema, R.; F. Ugozzoli;

E. J. Ghidini J. Am. Chem. Soc 1989, 111, 7567-7575.

(32) C. Alfieri; E. Dradi; A. Pochini; R. Ungaro; G. D. Andreetti J. Chem. Soc., Chem. Comm.

1983, 1075-1076.

(33) E. Ghidini; F. Ugozzoli; R. Ungaro; S. Harkema; A. A. El-Fadl; D. N. Reinhoudt J. Am.

Chem. Soc. 1990, 112, 6979-6985.

(34) H. Yamamoto; S. Shinkai Chem. Lett. 1994, 1115-1118.

(35) R. Ungaro; A. Casnati; F. Ugozzoli; A. Pochini; J. F. Dozol; C. Hill; H. Rouquette Angew.

Chem. Int. Eng. 1994, 33, 1506-1509.

(36) A. Casnati; A. Pochini; R. Ungaro; F. Ugowwoli; F. Arnaud; S. Fanni; M. J. Schwing; R. J. M.

Egberink; F. Jong de; D. N. Reinhoudt J. Am. Chem. Soc. 1995, 117, 2767-2777.

(37) G. Wipff; M. Lauterbach Supramol. Chem. 1995, 6, 187-207.

(38) R. Ungaro; A. Arduini; A. Casnati; O. Ori; A. Pochini; F. Ugozzoli Complexation of Ions and

Neutral Molecules by Functionalized Calixarenes; in Computational Approaches in Supramolecular

Chemistry; Wipff, G., Ed.; Kluwer Academic Publishers: Dordrecht, 1994, pp 277.

(39) P. R. Danesi; R. Chiarizia; C. F. Coleman The Kinetics of Solvent Extraction; in Critical

Reviews in Analytical Chemistry; Campbell, B., Ed.; CRC Press.: Boca Raton, Florida, 1980, pp 1.

(40) P. R. Danesi Solvent Extraction Kinetics; in Principles and Practices of Solvent Extraction;

Rydberg, J., Musikas, C. and Choppin, G. R. M., Ed.; Dekker, M.: New York, 1992, pp 157-207.

(41) B. A. Moyer Basic Principles of Extraction and Liquid-Liquid Systems Employing Cronw

Ethers and Related Metal-Ion Receptors; in Comprehensive Supramolecular Chemistry, Molecular

Recognition: Receptor for Cationic Guests; Atwood, J. L., Davies, J. E. D., Mc Nicol, D. D., Vögtle,

F. and Lehn, J. M., Ed.; Pergamon: Elmsford, N. Y., 1996, pp 325-365.

(42) H. H. Girault; D. J. Schiffrin Electrochim. Acta 1986, 31, 1341.

Page 25: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 14

(43) P. Vanysek Electrochim. Acta 1995, 40, 2841-2847.

(44) M. Gros; S. Gromb; C. Gavach J. electroanal. Chem. 1978, 89, 29.

(45) Z. Samec; V. Marecek; D. Homolka J. electroanal. Chem. 1981, 126, 121.

(46) D. Homolka; L. Q. Hung; A. Hofmanova; M. W. Khalif; J. Koryta; V. Marecek; Z. Samec; S.

K. Sen; P. Vanysek; J. Weber; M. Brezina; M. Janda; I. Stibor Anal. Chem. 1980, 52, 1606.

(47) P. Vanysek; W. Ruth; J. Koryta J. electroanal. Chem. 1983, 148, 117.

(48) S. A. Rice Nature 1985, 316, 108.

(49) A. Braslau; M. Deutsch; P. S. Pershan; A. H. Weiss; J. Als-Nielsen; J. Bohr J. Phys. Rev. Lett.

1985, 54, 114.

(50) S. G. Grubbs; M. W. Kim; T. Raising; Y. R. Shen Langmuir 1988, 4, 452.

(51) D. A. Higgins; R. M. Corn J. Phys. Chem. 1993, 97, 489.

(52) J. C. Conboy; J. L. Daschbach; G. L. Richmond J. Phys. Chem. 1994, 98, 9688.

(53) K. B. Eisenthal Chem. Rev. 1996, 96, 1343-1360.

(54) Z. Yoshida; H. Freiser J. electronal. Chem. 1984, 179, 31-39.

(55) P. R. Danesi; R. Chiarizia; M. Pizzichini; A. Saltelli J. Inorg. Nucl. Chem. 1978, 40, 1119-

1123.

(56) M. P. Allen; D. J. Tiledesley Computer Simulation of Liquids; Clarendon Press: Oxford,

1987.

(57) G. Cicotti; D. Frenkel; I. R. Mc Donald Simulations of Liquids and Solids; North-Holland:

Amsterdam, 1987.

(58) W. F. van Gunsteren; P. K. Weiner Computer Simulation of Biomolecular Systems; Escom:

Leiden, 1989.

(59) K. B. Lipkowitz; D. B. Boyd Reviews in Computational Chemistry; VCH: New York, 1990.

(60) G. Wipff; P. Weiner; P. Kollman J. Am. Chem. Soc. 1982, 104, 3249-3258.

(61) P. A. Kollman; G. Wipff; U. C. Singh J. Am. Chem. Soc. 1985, 107, 2212.

(62) P. A. Kollman; P. D. J. Grootenhuis; M. A. Lopez Pure Appl. Chem. 1989, 61, 593.

(63) G. Wipff J. Coord. Chem. 1992, 27, 7.

(64) G. Wipff Computational Approaches in Supramolecular Chemistry; G. Wipff, Ed.; Kluwer

Academic Publishers: Dordrecht, 1994.

(65) A. Varnek; G. Wipff J. Phys. Chem. 1993, 97, 10 840.

(66) A. Varnek; C. Sirlin; G. Wipff Solvent and Dynamics Effects on the Structure of Alkali Cation

Complexes of the t-Butyl-calix[4]arene Anion: MD and FEP Computer Investigations on the Na+ /

Cs+ Binding Affinity; in Crystallography of Supramolecular Compounds; Tsoucaris, G., Atwood, J. L.

and Lipkowski, J., Ed.; Kluwer Academic Publishers: Dordrecht, 1996, pp 67-99.

(67) F. Fraternali; G. Wipff J. Incl. Phenom. 1997, 28, 63-78.

(68) P. Guilbaud; V. A.; G. Wipff J. Am. Chem. Soc. 1993, 115, 8298-8312.

Page 26: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 15

(69) M. Lauterbach; G. Wipff Supramol. Chem. 1995, 6, 187.

(70) M. Lauterbach; G. Wipff Liquid-Liquid Extraction of Alkali Cations by Calix[4]crown

Ionophores: Conformation and Solvent Dependent Na+ / Cs+ Binding Selectivity. A MD FEP Study in

Pure Chloroform and MD Simulations at the Water / Chloroform Interface.; in Physical

Supramolecular Chemistry; NATO ASI Series, E., L. and Kaifer A. Ed., Ed.; Kluwer Acad. Pub.:

Dordrecht, 1996, pp 65-102.

(71) M. Lauterbach; G. Wipff ; A. Mark; W. F. van Gunsteren Gazzeta Chimica Italiana 1997,

127, 699-708.

(72) A. Varnek; G. Wipff J. Comp. Chem. 1996, 17, 1520-1531.

(73) A. Varnek; G. Wipff J. Mol. Struc. Theochem 1996, 363, 67-85.

(74) G. Wipff; E. Engler; P. Guilbaud; M. Lauterbach; L. Troxler; A. Varnek New J. Chem. 1996,

20, 403-417.

(75) L. Troxler; G. Wipff Anal. Sci. 1998, 14, 43-56.

(76) P. Beudaert; V. Lamare; J.-F. Dozol; L. Troxler; G. Wipff Solv. Extrac. Ion Echan. 1998, 16,

597-618.

(77) M. Baaden; F. Berny; N. Muzet; L. Troxler; G. Wipff ACS Publication, sous presse 1999.

(78) M. Lauterbach "Simulation par Ordinateur de l'Extraction Liquide - Liquide des Cations

Alcalins par des Ionophores de Type Calixarène-Couronne et Valinomycine," Thèse, Université Louis

Pasteur,Strasbourg, 1997.

(79) M. Lauterbach; E. Engler; N. Muzet; L. Troxler; G. Wipff J. Phys. Chem. B 1998, 102, 245-

256.

(80) C. Hill; J. F. Dozol; V. Lamare; H. Rouquette; B. Tournois; J. Vicens; Z. Asfari; C. Bressot;

R. Ungaro; A. Casnati Nuclear Waste Treatments bu Means of Supported Liquid Membranes

Containing Calixcrown Compounds; in Calixarenes 50th Anniversary: Commemorative Issue; Vicens,

J., Asfari, Z. and Harrowfield, J., Ed.; Kluwer Academic Publishers: Dordrecht, 1995.

(81) Z. Asfari; C. Bressot; J. Vicens; C. Hill; J. F. Dozol; H. Rouquette; S. Eymard; V. Lamare; B.

Tournois Cesium Removal from Nuclear Waste Water by Supported Liquid Membranes Containing

Calix-bis-crown Compounds; in Chemical Separations with Liquid Membranes; Bartsch, E. and Way,

J. D., Ed.; American Chemical Society: Washington D. C., 1996, pp 376-390.

(82) M. J. Schwing-Weil; F. Arnaud-Neu F. Gazz. Chim. Ital. 1997, 127, 687-692.

Page 27: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 1 16

Page 28: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

CHAPITRE 2

LA DYNAMIQUE

MOLECULAIRE

Page 29: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 17

Dynamique Moléculaire

1. Introduction

La Dynamique Moléculaire simule, à partir des lois de la mécanique classique, les

trajectoires des atomes en phase cristalline, en solution ou en phase gazeuse 1-3. Elle donne

l'évolution d'un système dans l'espace conformationnel au cours du temps. Une résolution

numérique des équations classiques du mouvement est utilisée pour calculer l'énergie du

système le long de son parcours sur la surface de potentiel du système.

Ainsi, une molécule est considérée comme un ensemble d'atomes dont les interactions

mutuelles peuvent être décrites par une fonction d'énergie potentielle. C'est le "champ de

forces". Les atomes (représentés par des sphères), dans le cas des liaisons covalentes, sont

reliés par des ressorts. Les ions ne sont attachés par aucune liaison aux autres atomes. La

distribution des électrons, considérée comme implicite, est localisée sur les liaisons du

système et est représentée par la distribution de charges sur les atomes de chaque molécule.

Ces charges peuvent être calculées de façon à reproduire le moment dipolaire de la molécule

ou la surface de potentiel électrostatique obtenue par des calculs ab initio.

Nous avons effectué pour l'ensemble de notre travail des calculs de Dynamique

Moléculaire avec le logiciel AMBER dans ses versions 4.1 4 et 5.0 5. Il utilise une

représentation empirique de l'énergie potentielle U, avec des composantes conformationnelles

intramoléculaires (liaisons covalentes) et intermoléculaire (interactions non covalentes).

Page 30: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 18

L'énergie se décompose en contributions liées aux déformations harmoniques des

liaisons, des angles et des dièdres, et aux interactions "non liées" (électrostatiques et van der

Waals également appelées interactions en 1-6-12). Ces interactions entre atomes, séparés par

au moins trois liaisons ou qui se situent sur des molécules différentes, sont représentées par un

terme en rij-1 (interactions coulombiennes), et un potentiel de Lennard-Jones en -rij

-6 et rij-12

(interactions van der Waals). Le terme en -rij-6 représente la dispersion attractive de London

entre deux atomes et celui en rij-12 la répulsion due à l'exclusion de Pauli 6.

∑ ∑ ∑ ∑ −++−+−=liaisons angles dièdres n

neqeqr nVKrrKU ))cos(1()()( 22 γφθθθ

∑∑>

+

−+

j ji ij

ijij

ij

ijij

ij

ji

r

R

r

R

r

qq12*6*

2 εεε

Kr, Kθ et Vn sont les constantes de force associées respectivement aux longueurs des

liaisons, aux angles et au terme de torsion associé aux dièdres intramoléculaires;

req et θeq sont les valeurs à l'équilibre des longueurs et angles de liaisons; n représente la

multiplicité du dièdre φ et γ la phase des dièdres.

ijε et *ijR sont les paramètres de Lennard-Jones pour le calcul des interactions de van der

Waals entre les atomes i et j ( jiij εεε = et R ij

* = R i * + R j

* ), de charges qi et qj ;

ε caractérise la constante diélectrique du milieu.

2. Mise en solution du soluté

2.1. Boîte de liquide pur

La taille de la boîte et le nombre de molécules de solvant dépendent du soluté, de son

orientation dans la boîte, des distances minimales (suivant les trois axes x, y et z) entre le

soluté et les molécules de solvant, et des distances du soluté aux bords de la boîte.

Page 31: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 19

Boite de référence du solvant

Soluté

Boite de simulation

Con

caté

nation de

s 27b

oites de

réfé

rence

xz

y

Figure 1: mise en solution du système soluté. Les doubles flèches représentent unedistance légèrement supérieure au cut-off (voir § 2.3.1).

Le soluté est placé au centre d'un cube constitué d'une concaténation de 27 boîtes de

référence du solvant (eau, acétonitrile, chloroforme ou méthanol). Toutes les molécules de

solvant dont l'un des atomes est situé à moins de 2 Å du soluté, sont retirées.

Le système est ensuite réduit à une boîte dont les bords se trouvent, suivant les trois axes

x, y, z, à une certaine distance de troncature qui dépend de la taille du cut-off utilisé (voir §

2.3)

Page 32: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 20

2.2. Interface liquide-liquide

Nous avons construit la boîte de solvant contenant une interface à partir des boîtes d'eau

et de chloroforme. Elles ont été équilibrées séparément avant d'être assemblées (Figure 2).

Afin de ne pas avoir, en début de calcul, de superposition entre les molécules des deux

solvants sur la face commune, toutes les molécules du second solvant dont l'un des atomes est

situé à moins de 2 Å d'un atome du premier solvant, sont retirées.

Le soluté est placé au centre de la boîte de la même manière que pour les boîtes de

liquides purs.

z

x

y

Figure 2: boîte constituée de deux solvants avec une interface liquide-liquide au centre.

2.3. Distance de troncature

2.3.1. Cut-off

Le nombre de paires d'atomes à considérer (et donc le nombre d'interactions 1-6-12 à

calculer) augmente avec la taille du système étudié: ainsi, si le soluté est placé dans une boîte

d'eau d'environ 20 Å de côté, 0.2×105 paires d'atomes interviennent dans le calcul contre

4.4×106 pour une boîte d'eau de 30 Å de côté. Afin de limiter les temps de calcul, une distance

de troncature, ou cut-off, est introduite. Au-delà de cette distance, les interactions "non-liées"

(électrostatiques et van der Waals ou 1-6-12) sont ignorées. Le cut-off peut être défini par

paire d'atomes ou par résidu (groupe d'atomes).

Page 33: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 21

Nous avons utilisé une troncature définie par rapport aux résidus. Lors de sa construction,

le soluté peut être réparti en un ou plusieurs sous-ensembles: les résidus. Ils correspondent

généralement aux molécules ou lorsque cette molécule est constituée de plusieurs parties

similaires, à chacune de ces parties. Quand un résidu contient plusieurs atomes, l'espace

délimité par le cut-off est égal à l'union des sphères autour de chaque atome du résidu, d'où

l'importance du choix des résidus.

Si deux molécules/ions distincts sont placés dans un même résidu, les interactions entre-

eux seront toujours calculées, quelle que soit la distance les séparant. Donc, tant que les deux

entités sont proches l'une de l'autre, la différence entre un cut-off défini autour d'un seul résidu

ou de deux résidus est négligeable, mais elle ne l'est plus quand ils s'éloignent et que les

interactions restent importantes.

Un autre aspect de l'importance du choix de cette distance de troncature concerne un

système constitué d'une boîte de solvant avec un soluté comprenant une molécule 1 de taille

proche de celle du cut-off et un ion 2, chacun dans un résidu différent (Figure 3). Tant que

l'ion se trouve à une distance inférieure au cut-off de l'un des atomes de la molécule,

l'ensemble des interactions entre 1 et 2 est calculé. Par contre, les molécules de solvant

(constituant chacune un résidu) proches de l'ion, mais à une distance supérieure au cut-off de

la molécule, n'interagiront qu'avec l'ion.

Molec. 1

Cut-offIon 2

S

SS

S’

S’

S"

S"

Figure 3: intersection de cut-off. Quelques molécules de solvant sont représentéespar la lettre S. Les molécules S ne sont prises en compte que par la molécule 1, lesS' par la molécule 1 et l'ion 2, et les S" que par l'ion 2.

Page 34: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 22

Lorsque l'ion sort du cut-off de la molécule, les interactions cessent brutalement. Ceci

peut causer des artefacts dans les mouvements et les conformations 7-9 ou dans les énergies

calculées 10-14. Il peut alors être nécessaire de considérer les interactions à longue distance

avec des méthodes telles que la sommation d'Ewald ou des techniques permettant d'éviter

cette interruption brutale, comme le champ de réaction.

2.3.2. Sommation d'Ewald

Les interactions charges-charges posent un problème d'évaluation, car leur rayon d'action

est généralement plus important que la taille de la boîte simulée. Ceci est d'autant plus vrai

que les systèmes simulés sont constitués de charges réparties dans la boîte (comme la

simulation d'un sel dilué).

La sommation d'Ewald a été conçue par P. Ewald 15 en 1921 pour étudier les énergies des

cristaux ioniques. Dans cette méthode, une particule interagit avec toutes les autres particules

de la boîte de simulation et toutes leurs images dans une matrice infinie de cellules

périodiques. La Figure 4 illustre comment est construite la matrice utilisée. A l'infini, sa

forme est supposée sphérique.

Figure 4: construction d'un système de cellules périodiques par la méthode d'Ewald.

Page 35: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 23

Le potentiel électrostatique est alors décrit par la formule:

∑∑∑= = +

=n

N

i

N

j ij

jiel

nr

qqU

1 1 0421

πε

où N est le nombre de particules dans chaque cellule, la distance à la boîte centrale est

n = nxL +nyL +nzL, avec L largeur de la cellule, et rij la distance entre les particules i et j,

qi, qj leurs charges.

La convergence de cette équation est relativement lente. Dans le cas de la méthode de la

sommation d'Ewald, la distribution de charges ρ(r) est un ensemble de points chargés qi

représentée par la fonction δ:

ρi(r) = qi δ(r-r i)

Autour de chaque point chargé qi est définie une distribution de charges gaussienne

isotrope de signe opposé (Figure 5):

223

irri

Gi eq −−

−= α

παρ

Espace réel

Espace réciproque

=

+

Figure 5: sommation d'Ewald – distribution des charges ponctuelles (haut)et distributions gaussiennes dans l'espace réel et l'espace réciproque.

Page 36: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 24

Nous considérons alors la distribution de charges:

)()()( rrr Gii

Si ρρρ +=

Le calcul de l'interaction électrostatique ES avec cette nouvelle distribution converge

alors plus rapidement grâce à l'introduction d'une fonction d'erreur erfc(x):

∫∞

−=x

y dyexerfc2

2

1)(

π

et ( )∑∑ ∑∞

=≠=

==

++

=0 1

)0(10 2

1

4

1

n

N

jii

N

nifj

ij

ij

jiS nrerfcnr

qqE α

πε

ES est donc approximé par une sommation finie.

Il faut ajouter une distribution de charges gaussienne ρiG afin de retrouver la distribution

d'origine ρi. L'interaction de ces distributions gaussiennes s'exprime comme une somme sur

l'ensemble du réseau réciproque, moins un terme d'auto-couplage:

∑ ∑∑∞

≠ ==

−=0 1

2

0

2

1

.

2

4

30

1

4

12

4

12

2

k

N

jj

N

j

rki

j

k

G qeqk

e

LE j α

ππεπ

πε

α &

&

avec ( )zyx lllL

k ,,2π= et lx, ly et lz entiers.

Nous pouvons approximer l'exponentielle par une somme finie. Le paramètre α est choisi de

manière à optimiser la convergence des calculs de ES et EG. En pratique, α est tel que ES soit

nulle à la distance du cut-off.

La méthode Particle Mesh Ewald que nous utilisons est un algorithme rapide en Nlog(N)

de la sommation d'Ewald 16,17.

2.3.3. Champ de réaction

Pour la méthode du champ de réaction, une sphère est établie autour du soluté, avec un

rayon R égal au cut-off. L'extérieur de la sphère est modélisé par un milieu homogène

polarisable avec une constante diélectrique ε2 (voir Figure 6).

La méthode du champ de réaction que nous utilisons est basée sur la résolution analytique

de l'équation linéarisée de Poisson-Boltzmann dans le cas d'une sphère, développée par van

Gunsteren et coll. 18.

Page 37: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 25

Pour obtenir l'énergie, il faut calculer le champ électrique généré au centre de la sphère

par les molécules qui s'y trouvent. Soit un atome i de charge qi situé à la distance ri du centre

(voir Figure 6). Pour résoudre l'équation de Poisson-Boltzmann, on introduit une charge

image hors de la sphère sur la même direction, à une distance di = R2 / ri. Le potentiel dans le

volume de la sphère créé par N charges à la distance ri est:

∑ ∑=

=

+

−+

−=Φ

N

inn

n

n ii

i

i

ii PB

d

r

RdrR

d

rr

qr

1 010

)(cos11

4)( γ

επε

où ε0 est la permittivité du vide, ε1 la constante diélectrique à l'intérieur de la sphère

(généralement = 1), Pn un polynôme de Legendre, Bn un coefficient dépendant de ε1 et de la

constante diélectrique à l'extérieur de la sphère ε2. Ce potentiel est continu à la frontière de la

sphère.

Le potentiel appliqué au point central de la sphère r → 0 est alors:

∑=

++=ΦN

i i

i

R

B

r

q

1

0

10

11

4)0(

επε

εs

ε2 ε1

qi

ri

di

R

Figure 6: représentation de la méthode du champ de réaction. Lamolécule au centre de la sphère de rayon R = cut-off, est entouréed'atomes de charge qi (cercles pleins) situés à ri. Des charges qi sontintroduites hors de la sphère à la distance di, (cercles vides) etparticipent au potentiel ΦΦ électrostatique au centre de la boîte.

Page 38: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 26

L'hypothèse principale de cette méthode est que les molécules placées au-delà du cut-off

peuvent être modélisées par un milieu diélectrique continu. Ceci n'est pas toujours le cas,

particulièrement pour les interfaces. Nous n'utiliserons donc cette méthode que pour des

simulations dans des boîtes de solvants purs.

2.4. Périodicité

Les conditions périodiques sont employées pour simuler l'aspect "infini" d'une solution

tout en limitant la taille du système à un nombre limité de particules. Cela consiste à effectuer

des calculs sur un ensemble de 27 boîtes d'eau identiques (A1 à A8 sur la Figure 7 en deux

dimensions seulement), images l'une de l'autre par translation de la boîte initiale (A) dans les

trois directions. Elles forment ainsi un parallélépipède de trois boîtes de côté. Chacune d'elle

est constituée du système défini par l'utilisateur. Quand une molécule 1 sort de la boîte

centrale A et qu'elle pénètre dans la boîte voisine A1, elle est remplacée par son image 15

provenant de la boîte A5 qui pénètre dans la boîte A (Figure 7). Ce processus s'applique à

toutes les boîtes images.

A2 A3

A5

A4

AA1

A8 A7 A6

1 1511

Figure 7: périodicité de la boîte suivant 2 dimensions. Lecut-off de la molécule 1 est représenté en pointillés.

Page 39: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 27

La périodicité permet donc aux molécules proches du bord de la boîte d'être

complètement entourées d'autres molécules de solvant. Elles interagiront donc avec les

molécules ou l'une de leurs images se trouvant dans la limite du cut-off (Figure 7). Pour que le

soluté ou une molécule de solvant n'interagisse avec aucune de ses propres images présentes

dans les boîtes voisines, il faut que les dimensions de la boîte de solvant soient suffisamment

grandes. Ainsi, la distance de troncature (cut-off) utilisée doit être inférieure à la moitié de la

plus petite des dimensions de la boîte.

Pour la périodicité des boîtes possédant une interface, différentes représentations ont déjà

été utilisées. Linse et Kessler et coll. ont appliqué la périodicité suivant les trois axes, y

compris l'axe z (voir Figure 2), perpendiculaire à l'interface 19-22 D'autres représentations avec

des boîtes rectangulaires et une périodicité uniquement suivant x et y ont été utilisées par

Benjamin et coll. 23. Des contraintes peuvent également être ajoutées aux bords de boîte aux

extrémités en z 24. Nous avons choisi d'utiliser la même représentation que Kessler et coll., la

plus simple quant à sa mise en œuvre. Compte tenu de la périodicité, les deux faces latérales

x × y de la boîte sont en contact et forment une deuxième interface. Nous avons donc choisi

une boîte suffisamment grande suivant l'axe z, afin que, compte tenu du cut-off, le soluté

n'interagisse pas avec cette deuxième interface.

2.5. Solvants utilisés

2.5.1. Modèle de l'eau: H 2O

Nous avons utilisé pour l'eau le modèle TIP3P 25. La molécule H2O est représentée en 3

points (deux H et un O) et est maintenue rigide par trois liaisons: deux liaisons O-H et une

pseudo-liaison H...H.

2.5.2. Modèle du chloroforme: CHCl 3

Pour le chloroforme (abréviation utilisée: clf) nous utilisons le modèle OPLS 26. Le

groupement CH est représenté par un atome unifié noté M, dont le rayon de van der Waals

Page 40: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 28

(R* = 2.133 Å) est plus large que celui d'un atome de carbone (R* ≈ 1.9 Å). Ceci permet de

réduire de 25 à 16 le nombre de paires d'interactions à calculer par dimère. Cependant, l'atome

M ne rend pas compte des faibles liaisons hydrogène que peut effectuer le chloroforme.

Le modèle OPLS est maintenu rigide par six liaisons: trois C-Cl et trois pseudo-liaisons

Cl...Cl.

Nous étudierons plusieurs autres modèles de chloroforme en 5 points dans le Chapitre 7.

2.5.3. Modèles pour l'acétonitrile (CH 3CN) et le méthanol (MeOH)

L'acétonitrile et le méthanol utilisés sont les modèles OPLS 26, comprenant également un

atome unifié pour remplacer le groupement CH3. La molécule d'acétonitrile est maintenue

linéaire et rigide.

2.5.4. Charges, paramètres de Lennard-Jones et géométrie des modèles

q (e) R* (Å) ε (kcal/mol) Distances & angles

Eau O-H H-O-H

H +0.417 0.000 0.000 0.96 Å 104.5 °

O -0.834 1.768 0.152

Clf M-Cl Cl-M-Cl

M +0.420 2.133 0.080 1.76 Å 111.3 °

Cl -0.140 1.947 0.300

Acétonitrile M-C C-N M-C-N

M +0.150 2.119 0.207 1.17 Å 1.46 Å 180.0 °

C +0.280 2.048 0.150

N -0.430 1.796 0.170

Méthanol O-H M-O M-O-H

O -0.700 1.723 0.170 0.95 Å 1.43 Å 108.5 °

H +0.435 0.000 0.000

M +0.265 2.119 0.207

Tableau 1: paramètres des solvants utilisés - charges, paramètres de Lennard-Jones pour lesinteractions en 6-12, distances et angles principaux de la molécule.

Page 41: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 29

3. Minimisation de l'énergie

Avant de démarrer une simulation de dynamique moléculaire, il est souhaitable de relaxer

la géométrie du système afin d'éviter que la simulation n'aboutisse à une trajectoire aberrante

si les forces initiales sont trop grandes. Ceci est effectué en coordonnées cartésiennes et

conduit au minimum local le plus proche sur "l'hypersurface" énergétique (Figure 8). Par

exemple, les minima atteints après minimisation (Af ou Bf) dépendent de la géométrie de

départ (A ou B). Ceci provient de la complexité des systèmes étudiés et de la multitude de

minima sur l'hypersurface d'énergie potentielle qui en résulte.

Départ A

Minimum A f

Minimum B f

Départ B

Coordonnée de réaction

Figure 8: hypersurface énergétique de dimension 2

Dans le logiciel AMBER, plusieurs méthodes de minimisation sont disponibles 27,28: La

méthode des gradients de plus grande pente ("steepest descent") ou celle des gradients

conjugués, ou encore une combinaison des deux. C'est cette dernière solution que nous

utilisons en commençant le calcul par la méthode "steepest descent" pour aller rapidement

vers un minimum local, puis en affinant le calcul par la méthode des gradients conjugués.

La méthode de plus grande pente 27 est une minimisation du premier ordre qui utilise la

dérivée de l'énergie potentielle U par rapport aux coordonnées. Il s'agit de descendre la pente

en incrémentant les coordonnées dans la direction de la force:

Fi = -gradi U s'appliquant sur chaque atome i.

A chaque itération k, le système (de N atomes) est décrit par un vecteur Xk (de dimension

3N). Une direction de descente est définie par le vecteur unitaire:

Page 42: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 30

Sk = gk / |gk| où (gk = -grad Uk)

et un pas d'incrémentation λ tels que:

Xk = Xk-1 + λSk.

Au premier pas, λ est choisi arbitrairement, puis il est augmenté ou diminué selon que le

potentiel Uk est plus petit ou non que Uk-1. Cette méthode permet de descendre rapidement

vers un minimum local, mais elle ne permet pas de converger. Sa principale utilisation tient en

l'élimination de fortes interactions souvent présentes dans les structures initiales. Pour affiner

le calcul nous avons ensuite utilisé la méthode des gradients conjugués 29. Ici, le gradient gk

calculé à chaque itération k, est conjugué au précédent par la relation:

Sk = -gk + bk.Sk-1

où bk = |gk|2 / |gk-1|

2 est le facteur entre les gradients courant et précédent.

La taille du pas est cette fois-ci déterminée en prenant en compte le gradient de l'itération

précédente. Ceci permet d'optimiser le pas, ce qui n'est pas le cas avec la méthode des

gradients de plus grande pente .

L'arrêt de la minimisation se fait sur un critère de convergence (RMS du gradient de U

inférieur à une valeur définie par l'utilisateur) ou d'un nombre maximal d'itérations.

Pour nos calculs, nous avons choisi 0,5 kcal.mol-1.Å-1 pour le premier critère et

généralement 500 à 1000 itérations, dont la moitié en utilisant la méthode de plus grande

pente, selon la complexité des systèmes. La présence du solvant augmente considérablement

le nombre de degrés de liberté du système (3N-6 pour N atomes, valeur à laquelle on soustrait

le nombre de contraintes appliquées au système – voit SHAKE § 4.5). La minimisation permet

d'aboutir à une configuration relaxée nécessaire à une bonne amorce de calcul de dynamique

moléculaire.

Page 43: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 31

4. Dynamique Moléculaire

4.1. Principe

Les simulations de dynamique moléculaire consistent à calculer les positions et les

vitesses d'un système d'atomes 30. L'algorithme permet de calculer l'accélération s'appliquant

sur chaque atome i à partir des équations de la mécanique classique de Newton:

Fi = mi × ai

et la force dérivant d'une fonction empirique de l'énergie potentielle:

ii r

UF

∂∂−= .

Ainsi, les nouvelles vitesses et coordonnées peuvent être calculées, donc les nouvelles

énergies cinétiques et potentielles.

La température est calculée à partir de l'équation de Clausius:

TNkB21== ∑ 2

iii

21

c vmE

où N est le nombre de degrés de liberté du système, kB la constante de Boltzmann, vi la vitesse

des atomes de masse mi, d'où la possibilité d'exprimer la température à partir de l'énergie

cinétique Ec:

B

c

Nk

tEtT

)(2)( =

Page 44: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 32

4.2. Mise en œuvre : algorithme de Verlet 31

Il existe différentes méthodes numériques pour calculer les positions et vitesses des

atomes. AMBER utilise une méthode du deuxième ordre: la méthode de Verlet.

Soit un système à N particules. Si vi est la vitesse moyenne de l'atome i sur l'intervalle de

temps [t,t+∆t], alors sa position ri à l'instant t+∆t est définie par:

ttttr iii ∆+=∆+ vr )()( (1)

L'accélération est exprimée en fonction de la force Fi s'appliquant sur la particule i, force

qui dérive elle-même de l'énergie potentielle :

)31(1

)( nir

U

mm

Fta

iii

ii �=−==

∂∂

(2)

Si l'intervalle de temps est suffisamment petit, la vitesse moyenne vi peut être considérée

comme très proche de la vitesse instantanée du milieu de cet intervalle vi(t+∆t/2). Celle-ci

peut être calculée à partir de la vitesse à l'instant t-∆t/2 et de l'accélération moyenne ia sur

l'intervalle de temps [t-∆t,t+∆t]:

tattvttv iii ∆+∆−=∆+ )2/()2/( (3)

En considérant cette accélération moyenne comme équivalente à l'accélération

instantanée ai(t), la vitesse s'exprime finalement comme:

ttattvttv iii ∆+∆−=∆+ )()2/()2/( (4)

Enfin, par combinaison avec l'équation (1), la nouvelle position est définie par:

ttttttr iii ∆∆−+=∆+ )2/()()( vr (5)

Page 45: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 33

Une des limitations les plus sérieuses des simulations de dynamique moléculaire est leur

coût en temps de calcul. Le choix de ∆t est déterminé par le fait que cette durée doit rester

petite devant la période de vibration la plus courte (en général les vibrations X-H), soit

10-15 s = 1 fs. Un mouvement ne peut en effet pas être représenté avec un pas d'intégration

supérieur à sa périodicité.

4.3. Contrôle de la température

L'intégration des équations de mécanique classique conserve l'énergie totale du système,

et si le volume de la boîte est maintenu constant, la simulation générera un ensemble

microcanonique (N,V,U). La température et la pression sont alors des grandeurs dérivées. En

pratique, il est appréciable de pouvoir gérer la température et la pression comme des valeurs

indépendantes que l'on peut choisir.

Le système peut être maintenu à température constante en le plaçant en équilibre avec un

bain thermique. Une méthode simple pour modéliser cet échange est la "méthode de faible

couplage" (weak coupling method 32), dans laquelle l'équation de mouvement des atomes est

modifiée afin d'avoir une relaxation du premier ordre de la température par rapport à la

température de référence T0:

( ) ( )T

tTT

dt

tdT

τ−

= 0

avec τT le temps de relaxation de la température

Ainsi, à chaque pas de dynamique toutes les vitesses des atomes sont ajustées par un

facteur de correction:

T

TTt τλ

2

11 0

−∆+=

Page 46: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 34

L'avantage de cette méthode est de permettre d'adapter le couplage en fonction du

système, en jouant sur le temps de relaxation τT 30. Celui-ci doit cependant être choisi

suffisamment petit de manière à maintenir la température moyenne à T0, tout en évitant de

perturber le système par un couplage trop fort.

L'ensemble de nos calculs a été réalisé, sauf exceptions précisées dans le texte, à

température constante T0 = 300 K. Nous avons fixé, pour l'ensemble de nos calculs, le temps

de relaxation τT à 0,4 ps.

4.4. Contrôle de la pression

La méthode utilisée pour maintenir le système à pression constante est basée sur le même

principe que pour la température, sauf que la correction est cette fois-ci appliquée sur la

position des atomes (par l'intermédiaire de la modification du volume de la boîte) plutôt que

sur les vitesses. La méthode de faible couplage est utilisée 32 en modifiant l'équation de

mouvement des atomes de manière à ce qu'il en résulte une relaxation du premier ordre de la

pression par rapport à la pression de référence P0:

( ) ( )p

tPPdt

tdPτ−= 0

avec τp le temps de relaxation de la pression.

La pression est calculée en fonction de l'énergie cinétique Ec et du viriel de forces:

[ ])()(21)2(

)(32

)( tFtrttEtV

tP ijji

ijcxyz

∑<

+∆−=

Vxyz étant le volume de la boîte, rij la distance entre les atomes i et j, et Fij la force

d'interaction de i sur j.

Ainsi, à pression constante P0, on applique une correction sur les coordonnées ri(t+∆t) et

donc sur les dimensions et le volume de la boîte à l'aide d'un facteur multiplicatif µ:

Page 47: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 35

31

0 11

∆−−= t

PP

tτµ

Comme pour la température, cette méthode permet d'adapter le couplage en fonction du

système, en jouant sur le temps de relaxation τp. En général, nous avons choisi pour la

pression un couplage de τp = 0,4 ps afin de perturber le moins possible le système, en

particulier aux bords de la boîte. L'ensemble des calculs à pression constante a été réalisé avec

P0 = 1 atm.

4.5. Algorithme SHAKE

En dynamique moléculaire, la borne supérieure du pas ∆t est la période d'oscillation

correspondant aux vibrations internes des plus hautes fréquences présentent au sein du

système. En limitant ces vibrations, souvent sans importance pour les mouvements globaux, il

est possible d'augmenter le pas d'intégration ∆t sans affecter le résultat de la DM. Nous avons

utilisé pour cela une des méthodes les plus courantes: SHAKE 33,34

Si l'on considère deux atomes i et j, la contrainte entre ces ceux-ci peut être exprimée par:

022 =− ijij dr

où r ij est le vecteur instantané entre les atomes i et j ( jiij rrr −= ) et ijd la distance inter-

atomique de référence de cette paire d'atomes.

Dans une simulation numérique, une telle égalité n'est généralement pas exacte. La

contrainte est considérée comme satisfaite quand l'inégalité suivante l'est:

ε<−

2

22

ij

ijij

d

dr

Page 48: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 36

où ε désigne l'écart toléré (typiquement ε = 0.0005).

SHAKE est une procédure itérative qui ajuste les positions d'une série de Nc paires

d'atomes soumis à une contrainte, après chaque pas d'intégration, de manière à satisfaire

toutes les contraintes simultanément. A chaque cycle de SHAKE, est appliquée

successivement une correction à chacune des Nc paires d'atomes i,j soumis à SHAKE. Un tel

cycle comprend donc autant de corrections qu'il y a de paires d'atomes soumises, soit Nc.

Nous avons appliqué SHAKE lors des simulations dans l'eau et sur toutes les liaisons

faisant intervenir un hydrogène, à savoir les liaisons C-H des solutés et les liaisons O-H et

H…H de l'eau, mais également sur les liaisons C-H, C-Cl et Cl…Cl du chloroforme ou les

liaisons internes de l'acétonitrile et du méthanol. Il s'agit des liaisons présentant les plus

hautes fréquences de vibration de nos systèmes. En ce qui concerne l'eau, SHAKE permet

également de rigidifier la molécule et d'équilibrer plus rapidement le solvant.

4.6. Dynamique sous contraintes: "BELLY"

Nous pouvons définir un groupe d'atomes comprenant tout ou partie de ceux présents

dans le système: soluté, solvant, soluté + solvant. Avec l'option BELLY, à chaque pas de

dynamique, les vitesses et déplacements des atomes de ce groupe contraint sont remis à zéro.

Ils sont donc maintenus immobiles pour toute la durée de la simulation.

5. Conditions initiales

Les conditions initiales définissent le système en début de dynamique. Elles comprennent

les coordonnées des atomes, leurs vecteurs vitesse et la température du système.

L'ensemble de coordonnées initiales est déterminé par l'arrangement du soluté et du

solvant. Celui du soluté peut provenir d'une structure résolue aux rayons-X ou construite par

Page 49: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 37

infographie. Dans les deux cas, la première fois, nous avons d'abord effectué une

minimisation du soluté dans le vide avant de l'introduire dans une boîte de solvant.

Si le soluté est composé de plusieurs espèces séparées par du solvant (paires d'ions,

complexes avec contre-ions, etc.), une dynamique moléculaire est effectuée avec l'option

BELLY d'AMBER appliquée au soluté, afin de laisser celui-ci fixe, pendant que s'équilibrent

autour les molécules de solvant. Selon la complexité du système, la simulation proprement

dite est initiée à partir de cet état, ou (si la réorganisation du solvant est relativement

importante et peut provoquer des problèmes de densité) une seconde dynamique

d'équilibration est effectuée à pression constante. Ainsi, le volume du système peut s'ajuster et

les densités se corriger.

Au début d'une dynamique moléculaire, on ne dispose pas des vitesses initiales. Elles

sont calculées à partir d'une distribution de Maxwell dépendant de la température initiale Ti.

A cela, s'ajoutent des données définissant les conditions de calcul : température

d'équilibre T0, conditions de pression ou volume constant, cut-off, pas d'intégration, SHAKE

et contraintes éventuelles.

Nous avons réalisé l'ensemble des calculs à température constante et à pression P

constante (simulations dans l'eau pure) ou à volume V constant (solvants organiques et

interfaces). Dans ce cas, la pression P et température T sont maintenues à des valeurs de

références, respectivement P0 et T0. Dans la table ci-dessous sont rapportés les paramètres que

nous avons généralement utilisés pour l'ensemble des calculs.

cut-off (Å) 12

Pas d'intégration ∆t (ps) 0.001

Température d'équilibre T0 (K) 300

Pression d'équilibre P0 (atm) 1

Tableau 2: paramètres de calculs.

Page 50: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 38

6. Calcul de Variation d'Energie Libre

6.1. Principe

Les méthodes de simulation qui permettent d'obtenir un échantillonnage de l'espace

conformationnel d'un système, peuvent être utilisées pour calculer des propriétés

thermodynamiques de celui-ci 35. L'énergie libre est directement accessible, fournissant une

mesure sur la stabilité d'un système.

La différence d'énergie libre entre deux systèmes A et B, représentés respectivement par

les Hamiltoniens HA et HB, peut être exprimée par:

A

ABAB RT

HHLnRTGGG

−−−=−=∆ exp.

avec R la constante des gaz parfaits et où A

désigne la moyenne sur un

échantillonnage du système représenté par l'Hamiltonien HA.

C'est l'équation de base de la méthode de Perturbation d'Energie Libre 36.

Si les systèmes A et B diffèrent de trop (HA-HB > RT), cette expression ne permet pas un

calcul correct de ∆G. La différence HA-HB doit être petite devant RT.

On peut définir un Hamiltonien hybride H(λ) est défini par:

H(λ) = λHB + (1-λ) HA

où λ est une variable discrète allant de 0 (H = HA) à 1 (H = HB).

∆G peut alors être exprimée par:

∑=

+ −−−=−=∆1

0

exp.λ λ

λδλλ

RT

HHLnRTGGG AB

Page 51: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 39

Le calcul de ∆G est ainsi fragmenté en "fenêtres" correspondant chacune à une valeur de

λ. Le pas δλ est défini suffisamment petit de manière à avoir une variation de Hλ petite devant

RT.

6.2. Application à la variation d'énergie libre de complexation ∆∆Gc

La reconnaissance moléculaire pour les complexes ligand-ion est mesurée par la

différence d'énergie libre ∆∆Gc = ∆G1-∆G2 relative à la complexation de deux cations M+1 et

M+2 par un même ligand en solution. Des progrès significatifs ont été apportés dans la

prédiction informatique de cette quantité thermodynamique. Etant donné qu'une simulation

directe du processus de complexation aboutit à des fluctuations statistiques plus grandes que

∆∆Gc, l'approche informatique consiste à utiliser le "chemin alchimique" qui mute le cation

M+1 en M+

2 d'abord libre puis complexé.

+∆+ →+ 11 .1 MRRM G

↓∆G3 ↓∆G4

+∆+ →+ 22 .2 MRRM G

Les variations d'énergie libre ∆G3 et ∆G4 correspondent respectivement à la mutation des

ions libres et des complexes en solution, qui contrairement au calcul direct de ∆G1 ou ∆G2,

peuvent être calculées avec une incertitude statistique faible. D'après le cycle

thermodynamique, ∆∆Gc peut également s'écrire

∆∆Gc = ∆G3-∆G4 37-39,30,40,41.

Il n'y a pas de détermination expérimentale directe de ∆G4, mais les valeurs de ∆G3

calculées peuvent être comparées directement aux variations d'énergie libre de solvatation

expérimentale.

En pratique, dans les calculs, on transforme progressivement le cation M+1 en M+

2 et

inversement. Pour cela les paramètres ε et R* de l'ion "hybride" sont exprimés en fonction de

ceux de M+1 et M+

2 avec λ qui varie par pas δλ:

Page 52: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 40

++ −+=21

)1(MM ελλεελ et **

21)1( ++ −+=

MMRRR λλλ

A l'aide de la technique de fenêtrage, nous avons effectué le calcul de la mutation en

solution du cation M+1 (libre ou complexé) en M+2. Pour chaque fenêtre (correspondant à une

valeur de λ) nous avons commencé par équilibrer le système, puis effectué l'échantillonnage.

La variation d'énergie libre ∆G correspond au cumul des moyennes des variations au cours de

l'échantillonnage:

∑∆=∆λ

λGG avecλ

λδλλλδλλλ RT

UULnRTGGG

−−−=−=∆ ++ exp.

A chaque pas de dynamique correspondant à λ, on calcule la variation ∆Gλ par rapport à

l'état précédent λ-δλ et l'état λ+δλ. Deux valeurs de ∆G sont ainsi calculées: l'une dans le

sens direct M+1 → M+2 et l'autre dans le sens indirect M+

1 ← M+2.

En théorie ces deux calculs sont équivalents et donc les deux valeurs de ∆G égales. En

pratique, elles diffèrent si l'échantillonnage correspondant à deux fenêtres consécutives

(λi+δλ et λi+1-δλ ) diffère. Cet écart va dépendre essentiellement du pas de variation δλ, donc

du nombre total de fenêtres et de la taille de chacune d'elles (du nombre d'échantillons

6.3. Application au calcul du Potentiel de Forces Moyennes

Il est possible de définir une variation d'énergie libre, non plus en fonction des paramètres

ε et R* d'un atome, mais en fonction d'une distance entre deux atomes ou un angle au sein du

soluté: c'est le Potentiel de Forces Moyennes (PFM) 41,35:

λ∂∂=U

F

Une contrainte peut être définie sur une distance d entre atomes, contrainte constante au

cours de chaque échantillonnage, d étant modifiée à chaque nouvelle fenêtre. Le pas de

déplacement δd est constant à chaque variation de λ. Un profil des variations d'énergie libre

est obtenu en fonction des variations de d.

Page 53: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 41

7. Analyse des résultats

La quantité d'informations issue d'une dynamique moléculaire peut devenir très

importante. L'analyse des résultats permet de connaître les trajectoires, les distances inter-

atomiques, les valeurs d'angles et de dièdres, les énergies d'interaction, les distributions

radiales...

7.1. Analyse infographique

La première étude du système est une observation visuelle des phénomènes, par

l'intermédiaire du logiciel MD-DRAW 42 développé au laboratoire. Elle permet une

information directe sur l'évolution globale du système et sur le choix des paramètres critiques

à mesurer par la suite.

La dynamique peut être visualisée pas à pas, avec le soluté ou sans le solvant. Un certain

nombre de mesures ponctuelles d'énergie ou de géométrie peuvent être effectuées directement

sur les atomes ou molécules représentées.

Toutes les images des systèmes moléculaires qui illustrent cette thèse ont été effectuées

sur MD-DRAW.

7.2. Analyses géométriques et énergétiques

Avec le module ANAL d'AMBER et le logiciel MDS développé au laboratoire, les

distances entre atomes, entre centres de masse de groupes d'atomes, les angles, les dièdres, ou

les distances à des plans, peuvent être mesurés au cours du temps, ainsi que leurs

moyennes/médianes et leurs fluctuations au cours du temps.

Il est également possible de déterminer les densités des systèmes, soit des solutés, soit des

solvants. Enfin, la distribution statistique du solvant autour d'un soluté peut être mesurée en

fonction de la distance à son centre de masse. Ces distributions sont appelées RDF, acronyme

anglais de fonction de distribution radiale (Radial Distribution Function).

Page 54: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 42

L'analyse des composantes énergétiques se fait par groupes d'atomes/molécules au cours

du temps. Il est également possible de calculer les composantes électrostatiques et de van der

Waals séparément.

Ces analyses ne donnent que les contributions à l'enthalpie du système. Elles ne

permettent pas de calculer l'entropie ni l'énergie libre.

7.2.1. Surface de séparation de Gibbs

La définition thermodynamique de l’interface a été souvent sujette à controverses. J. W.

Gibbs l’a considérée comme une surface de division sans épaisseur, une surface

mathématique, alors que J. D. van der Waals suppose une épaisseur faible mais finie.

Dans la région où les deux phases se rejoignent, la densité des liquides varie continûment.

En général, cette variation se fait sur une distance d très courte (quelques distances inter-

atomiques). On peut définir une surface qui divise le système en deux phases: sa position est

quelque peu arbitraire, mais les erreurs introduites sont faibles si la distance d est petite

devant la taille macroscopique des phases. Elle constitue un repère pour les analyses de

distances, de densités, etc...

Nous définirons dans toutes nos analyses, ainsi que pour les images instantanées, la

surface de séparation de Gibbs, comme étant la surface plane passant par l'intersection des

courbes de densité moyennes des deux solvants constituant l'interface (voir Figure 9).

Figure 9: courbes de densités des solvants à l'interface et définition de lasurface de séparation de Gibbs : trait vertical.

Page 55: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 43

7.2.2. Tension de surface

La région frontière entre les deux solvants est le lieu de phénomènes spécifiques dont

l’étude remonte au XIXe siècle, lorsque Laplace introduisit la notion de tension superficielle.

D'un point de vue microscopique, l’environnement d’un atome n’est pas le même au

voisinage de la surface et dans le liquide massique; la différence d’énergie d’interaction d’un

atome avec son environnement, dans ces deux situations, est à l’origine de la tension

interfaciale. Cette tension à l’interface dépend aussi de façon cruciale de sa constitution. Des

molécules adsorbées sur la surface réduisent la tension interfaciale.

On peut ainsi mesurer la pression de surface et obtenir une indication sur l’équation d’état

des couches adsorbées. Il faut noter cependant qu'il y a une augmentation de la tension si le

soluté est repoussé par l’interface.

A partir des trajectoires de dynamique moléculaire, la tension de surface est calculée à

partir de la formule de Kirkwood et Buff 43, généralisée aux molécules polyatomiques. La

distance entre deux molécules i et j est divisée en n tranches de largeur ∆z. Chaque tranche a

n

1 de la contribution totale de l'interaction i-j et les pressions tangentielles Pτ et normale PN à

l'interface sont calculées. La tension interfaciale découle de l'équation suivante:

[ ]dzzPzPN∫∞

∞−−= )()(

2

1 τσ

La division par 2 est due aux deux interfaces de la simulation.

Les calculs de tension de surface souffrent de grandes fluctuations, qui peuvent être de

l'ordre du double de la valeur calculée 44.

7.3. Méthodes d'analyse spécifiquement développées pour nostravaux

Pour l'étude de certains systèmes, nous ne disposions pas de procédure d'analyse adaptée.

Nous avons donc développé des programmes en langage C, ou de nouveaux modules du

logiciel MDS du laboratoire.

Page 56: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 44

La plupart de ces analyses seront expliquées dans les chapitres où elles sont utilisées.

Nous allons présenter ici le calcul des épaisseurs d'interface et la détermination de la surface

de l'eau.

7.3.1. Epaisseurs et rugosité de l'interface

Il y a en principe deux arrangements moléculaires extrêmes qui peuvent générer une

diminution graduelle de la concentration, perpendiculairement à l'interface.

(i) Le premier correspond, à l'échelle moléculaire, à une transition brusque d'une

phase à l'autre et à une interface ayant une certaine rugosité, que Linse 45 considère comme

étant due aux ondes capillaires (pour plus de détails sur la théorie des ondes capillaires, le

lecteur pourra se reporter aux références 46-48).

(ii) Le second arrangement suppose un changement graduel de la concentration des

deux espèces autour d'une interface plane, donc un mélange au niveau moléculaire.

Selon la méthode décrite par Linse 45, pour obtenir l'épaisseur de l'interface, le plan x × y

(voir Figure 2) est divisé en carrés de coté l, avec l variant de L (largeur de la boîte en x ou y)

à une valeur minimale de l'ordre de quelques Å 49. Dans chacun de ces carrés, l'épaisseur

interfaciale (el) est déterminée par:

el = (max(zl(CHCl3)) - min(zl(H2O))) (5)

où min(zl(H2O)) est la position selon l'axe z de l'atome de la molécule d'eau ayant le z

minimum, et max(zl(CHCl3)) la position selon l'axe z de l'atome de la molécule de

chloroforme ayant le z maximum (voir Figure 10). La valeur de l'épaisseur instantanée est la

moyenne sur tous les carrés d'analyse.

Ceci permet de définir de manière locale et globale l'épaisseur interfaciale.

Page 57: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 45

O H

H

H

Cl

C

ClCl

x ou y

ze

l = L

chloroforme eau

x

y

L

L/2

L/4

L/8

z

Ligne de séparationdes 2 liquides

Figure 10: méthode de calcul des épaisseurs d'interface – La surface x × y est divisée en carrés del ×× l de coté, avec l = L, L/2, L/4, L/8, L étant la largeur de la boîte (droite). Dans chacun de cescarrés, les valeurs en z de l'atome de H2O le plus à gauche et de l'atome de CHCl3 le plus à droitesont repérées (gauche) et l'épaisseur d'interface est calculée selon l'équation 5 ci-dessus.

Une valeur de el > 0 signifie qu'un atome de CHCl3 se situe au-delà d'un atome d'H2O

dans la phase aqueuse, donc qu'il y a formellement "mélange" des deux phases (voir Figure

10). Une valeur de el < 0 signifie que toutes les molécules d'eau sont séparées de toutes celles

du chloroforme.

Les épaisseurs seront successivement calculées et moyennées sur 1 carré (l = L ), 4 carrés

(l = L/2), 16 carrés (l = L/4) et 64 carrés (l = L/8). Les épaisseurs moyennes calculées sont

alors notées respectivement eL, eL/2, eL/4 et eL/8. Pour la théorie (i), nous attendons eL > eL/2 >

eL/4 > eL/8, alors que la théorie (ii) donnerait eL ≈ eL/2 ≈ eL/4 ≈ eL/8.

Ces calculs ne peuvent se faire qu'en l'absence de soluté. En effet, si des molécules sont

adsorbées à l'interface, le calcul de el est faussé et peut mener à des résultats aberrants.

7.3.2. Surface de la phase aqueuse à l'interface.

L'interface n'est pas plane, mais présente instantanément une certaine rugosité. Quand un

soluté y est adsorbé, nous avons vu que nous ne pouvons pas calculer son épaisseur par la

méthode décrite au paragraphe 7.3.1. Nous nous sommes donc intéressés à l'aspect de la

Page 58: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 46

surface de l'eau à l'interface liquide-liquide. Ceci nous permet d'obtenir une information

visuelle instantanée en fonction de la position du soluté.

Le plan x × y est divisé en n × n colonnes, avec n défini par l'utilisateur et doit être

supérieur à 1 Å. Dans chacune de ces colonnes, la position de l'atome de molécule qui est à

l'interface est définie par:

Pij = min(zij(H), zij(O))

où zij est la position en z d'un atome H ou O d'une molécule d'eau de la colonne ij .

La surface totale de l'eau est alors tracée avec un lissage de type b-spline (voir Figure 11).

2

4

6

8 2

4

6

8

1020

15

10

5

0

-5

-10

-15

-20

Z A

xis

Y AxisX Axis

Figure 11: surface de la phase aqueuse à l'interface. Le plan situé au-dessus de la courbe en 3 dimensions, représente la projection sur le planx×y de la profondeur (z) de la surface de l'eau.

Page 59: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 47

8. Références

(1) P. A. Kollman; Acc. Chem. Res. 1985, 18, 105.

(2) P. A. Kollman; Ann. Rev. Phys. Chem. 1987, 38, 303.

(3) W. F. van Gunsteren; Prot. Eng. 1988, 2, 5.

(4) D. Pearlman; D. Case; J. Cadwell; G. Seibel; U. Singh; P. Weiner; P. Kollman, "AMBER",

UC San Franscisco, 1995.

(5) W. D. Cornell; P. Cieplak; C. I. Bayly; I. R. Gould; K. M. Merz, Jr.; D. M. Ferguson; D. C.

Spellmeyer; T. Fox; J. W. Caldwell; P. A. Kollman; J. Am. Chem. Soc. 1995, 117, 9626-9630.

(6) S. J. Weiner; P. A. Kollman; D. A. Case; U. C. Singh; C. Ghio; G. Alagona; S. Profeta; P.

Weiner; J. Am. Chem. Soc. 1984, 106, 765.

(7) C. L. Brooks III; B. M. Pettit; M. Karplus; J. Chem. Phys. 1985, 83, 5897.

(8) P. E. Smith; B. M. Pettit; J. Chem. Phys. 1991, 95, 8430.

(9) H. Schreiber; O. Steinhauser; J. Mol. Biol. 1992, 228, 909.

(10) M. P. Allen; D. J. Tildesley, Computer Simulation of Liquids; Clarendon Press: Oxford, 1987.

(11) G. Hummer; L. R. Pratt; A. E. Garcia; G. J. Berne; S. W. Rick; J. Phys. Chem. B 1997, 101,

3017-3020.

(12) J. Åqvist; T. Hansson; J. Phys. Chem. B 1998, 102, 3387-3840.

(13) H. S. Ashbaugh; S. Sakane; R. H. Wood; J. Phys. Chem. B 1998, 102, 3844-3845.

(14) G. Hummer; L. R. Pratt; A. E. Garcia; S. Garde; J. Phys. Chem. B 1998, 102, 3841-3843.

(15) P. Ewald; Ann. Phys. 1921, 64, 253.

(16) T. Darden; D. York; L. Pedersen; J. Chem. Phys. 1993, 98, 10089-10092.

(17) U. Essmann; L. Perera; M. L. Berkowitz; T. Darden; H. Lee; L. G. Pedersen; J. Chem. Phys.

1995, 103, 5877-8593.

(18) I. G. Tironi; R. Sperb; P. E. Smith; W. F. van Gunsteren; J. Chem. Phys. 1995, 102, 5451-

5459.

(19) P. Linse; J. Am. Chem. Soc. 1993, 8793.

(20) W. Guba; R. Haessner; G. Breipohl; S. Henke; J. Knolle; V. Sandagada; H. Kessler; J. Am.

Chem. Soc. 1994, 116, 7532.

(21) W. Guba; H. Kessler; J. Phys. Chem. 1994, 98, 23.

(22) G. Wipff; E. Engler; P. Guilbaud; M. Lauterbach; L. Troxler; A. Varnek; New J. Chem. 1996,

20, 403-417.

(23) D. Michael; I. Benjamin; J. Phys. Chem. 1995, 99, 1530.

Page 60: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 2 48

(24) M. Lauterbach, "Simulation par Ordinateur de l'Extraction Liquide - Liquide des Cations

Alcalins par des Ionophores de Type Calixarène-Couronne et Valinomycine", Thèse, Université Louis

Pasteur,Strasbourg, 1997.

(25) W. L. Jorgensen; J. Chandrasekhar; J. D. Madura; J. Chem. Phys 1983, 79, 926-936.

(26) W. L. Jorgensen; J. M. Briggs; M. L. Contreras; J. Phys. Chem. 1990, 94, 1683-1686.

(27) S. L. S. Jacoby; J. S. Kowalik; J. T. Pizzo, Iterative Methods for Non-linear Optimization

Problems Englewood Cliffs, New Jersey, 1972.

(28) R. Fletcher, Practical Methods of Optimization. Volume 1: Unconstrained Optimization New

York, 1980.

(29) R. Fletcher; C. M. Reeves; Computer J. 1964, 7, 149.

(30) J. A. McCammon; S. C. Harvey, Dynamics of Proteins and Nucleic Acids Cambridge, 1987.

(31) L. Verlet; Phys. Rev. 1967, 159, 98.

(32) H. J. C. Berendsen; J. P. M. Postma; W. F. van Gunsteren; A. DiNola; J. R. Haak; J. Chem.

Phys. 1984, 81, 3684.

(33) J. P. Ryckaert; G. Ciccotti; H. J. C. Berendsen; J. Comput. Phys. 1977, 23, 327.

(34) W. F. van Gunsteren; H. J. C. Berendsen; J. Comput. Phys. 1977, 34, 1311.

(35) P. M. King, Free Energy via molecular simulation: a primer; in Computer Simulation of

Biomolecular Systems. Theoritical and Experimental Applications; van Gunsteren, W. F., Weiner, P.

K. and Wilkinson, J., Ed.; Escom: Leiden, 1993; Vol. 2, pp 267.

(36) P. A. Kollman; Chem. Rev. 1993, 93, 2395.

(37) M. Mezei; D. Beveridge; Ann. N.Y. Acad. Sci. 1986, 43, 40.

(38) P. A. Bash; U. C. Singh; F. K. Brown; E. Langridge; P. A. Kollman; Science 1987, 235, 574.

(39) P. A. Bash; U. C. Singh; R. Langridge; P. A. Kollman; Science 1987, 236, 564.

(40) W. L. Jorgensen; Acc. Chem. Res. 1989, 22, 184.

(41) T. P. Straatsma; J. A. McCammon; Annu. Rev. Phys. Chem. 1992, 43, 40.

(42) E. Engler; G. Wipff, "MD-DRAW a graphical representation of molecular trajectories",

Université Louis Pasteur, Strasbourg, 1992.

(43) C. A. Croxton, Statistical Mechanics of Liquid Surface; Wiley: Winchester, 1980.

(44) J. Miyazaki; J. A. Barker; G. M. Pound; J. Chem. Phys. 1976, 64, 3364.

(45) P. Linse; J. Chem. Phys. 1987, 56, 4177-4187.

(46) F. P. Buff; R. A. Lowett; F. H. J. Stillinger; Phys. Rev. Lett. 1965, 15, 621.

(47) R. Lowett; P. W. DeHaven; J. J. J. Vieceli; F. P. Buff; J. Chem. Phys. 1973, 58, 1880.

(48) H. W. Diehl; D. M. Kroll; H. Wagner; Phys. B 1980, 36, 329.

(49) J. S. Rowlinson; B. Widom, Molecular Theory of Capillarity; Oxford University: Oxford,

1982.

Page 61: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

PPRREEMMIIEERREE PPAARRTTIIEE

CHAPITRE 3

LE CALIX [4]ARENE-COURONNE6ET SES COMPLEXES A

L'INTERFACE

J. Phys. Chem. B, 1998, 102, 245-256.

J. Phys. Chem. B, 1998, 102, 10772-10788

Page 62: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 49

Le Calix[4]arène-couronne6 et ses

complexes à l'interface

1. Introduction

L'extraction sélective d'un ion par un ligand d'une phase aqueuse vers une phase organique

est le résultat de deux phénomènes. Tout d'abord, la capture ou complexation sélective de l'ion

par l'ionophore. Cette sélectivité dépend d'un certain nombre de paramètres, dont la nature et

la structure des sites de coordination du ligand vis-à-vis de l'ion. La seconde étape est

l'extraction du complexe ainsi formé vers la phase organique. Il est clair que l'interface entre

les deux solvants joue un rôle primordial dans ces processus.

Ces deux étapes peuvent être simulées, par le calcul des différences d'énergie libre pour la

complexation sélective, et par les Potentiels de Forces Moyennes pour la diffusion du

complexe vers la phase organique.

La plupart des données expérimentales, ne sont pas à un niveau de détails suffisant pour

une interprétation non-ambiguë du phénomène. C'est pourquoi, la majorité des informations

microscopiques dont nous disposons actuellement sur la nature de l'interface et les processus

de transfert a été obtenue par les moyens de la simulation informatique.

1.1. Sélectivité de complexation et d'extraction.

Les complexes du calix[4]arène-couronne6 (noté L1 - voir Figure 1) ont été intensivement

étudiés expérimentalement et par dynamique moléculaire. La modulation de la sélectivité

envers les cations alcalins a été prédite par des simulations sur des complexes de Na+ et Cs+

dans différentes conformations 1. Les calculs de dynamique moléculaire en phase aqueuse ont

Page 63: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 50

montré que Na+ décomplexe dans la forme 1,3-alternée et Cs+ fait de même dans la

conformation cône.

Sur la base de calculs de différences d'énergies libres dans l'eau, M. Lauterbach 1 a montré

que la conformation cône préfère Na+ (différence d'énergie libre de complexation Na+ → Cs+:

∆∆Gc = -4.7 kcal.mol-1), alors que la forme 1,3-alternée complexe sélectivement Cs+ (∆∆Gc =

+12.5 kcal.mol-1) et le cône-partiel ne montre pas de préférence particulière pour l'un ou

l'autre cation. Cette sélectivité est la conséquence des différences de solvatation, de position

des cations vis-à-vis des sites de coordination, ainsi que de la protection qu'offre le ligand vis-

à-vis de l'eau alentour.

Cette sélectivité Cs+/Na+ du conformère 1,3-alternée a été mesurée expérimentalement par

des constantes de complexation dans le méthanol 2: logβ = 4,2 pour Cs+, et logβ < 1 pour Na+

(spectrophotométrie absorption UV).

Figure 1: Conformères des complexes de L1 avec des ions métalliques.

M. Lauterbach a ensuite calculé la sélectivité d'extraction des complexes L1.M+Pic- 3,

∆∆Ge = ∆G3-eau - ∆G4-clf, par le cycle thermodynamique suivant:

+−

∆+− →+ clf

Gclfeau MRRM 11 .1

↓∆G3-eau ↓∆G4-clf

+−

∆+− →+ clf

Gclfeau MRRM 22 .2

Page 64: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 51

Ses résultats pour M+ = Na+, K+, Rb+, Cs+, sont conformes à ceux obtenus précédemment,

et aux observations expérimentales: Cs+ est extrait sélectivement par L1 en conformation 1,3-

alternée de l'eau vers le dichlorométhane 2. Enfin, les simulations ont montré que la

sélectivité d'extraction L1 envers le Cs+ était plus faible de l'eau vers une boite de

chloroforme humide, que vers le chloroforme pur 4. Tous ces résultats sont présentés sur la

Figure 2.

-12

-10

-8

-6

-4

-2

0

2

Na+

K+

Rb+

Cs+

−∆

Gc

C lf+ 3 eau

C lf+ 20 eau

C lf

Extraction

-10

0

10

20

Na+ K+ Rb+ Cs+

Co mplexation

Eau

Clf

Figure 2: Sélectivité d'extraction de M+Pic- par L1 de l'eau vers le chloroforme pur, vers lechloroforme en présence de 3 et 20 molécules d'eau (gauche) ref. 3. Sélectivité decomplexation M+ par L1 dans l'eau pure et dans le chloroforme (droite) ref. 1.

1.2. Profils d'énergie libre à l'interface.

Les simulations du ligand L1 libre à l'interface 5, des complexes L1.Cs+ 1 et L1.Cs+Pic- 3

ont montré que ces systèmes se comportent comme des surfactants, et restent à la frontière

entre les deux solvants tout au long des dynamiques, légèrement du côté chloroforme.

Afin de comprendre la raison thermodynamique de ces comportements, M. Lauterbach a

simulé par des calculs de Potentiels de Forces Moyennes (PFM – voir Figure 3 ainsi que

Chapitre 2 § 6.3) le passage à travers l'interface eau-chloroforme du ligand L1 libre, des

Page 65: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 52

complexes L1.Cs+ et L1.Cs+Pic-, et des sels Cs+Pic- et Cs+Cl- 6,7 afin d'obtenir les profils

d'énergie libre du passage à travers l'interface.

Figure 3: boite de simulations des Potentiels de Force Moyenne.Le soluté placé initialement à l'interface est tiré dans lechloroforme et l'eau vers les points DU1 et DU2 respectivement

Cette technique a été utilisée par d'autres groupes, comme Benjamin et coll. ou Pohorille

et coll., pour calculer les énergies libres de transfert d'ions, de paires d'ions ou de petites

molécules comme H2O aux interfaces eau – liquide 8-11, eau – gaz 12-16 ou eau – membranes

17-19.

Mais aucune simulation n'avait été effectuée dans le domaine de l'extraction liquide-

liquide, ni sur des molécules de la taille des calixarènes ou sur des complexes tels que

L1.Cs+Pic-. Les profils d'énergie libre, déterminés par M. Lauterbach 6,7 pour ces espèces,

sont représentés dans la Figure 4.

Tous les profils des systèmes contenant le ligand L1, libre ou sous forme de complexes,

présentent un minimum du côté chloroforme de l'interface. En l'absence de contre-ion Pic-, le

cation Cs+ décomplexe lors de la migration du côté de l'eau.

Dans le cas des sels, les ions Cs+ et Cl- se retrouvent immédiatement dans la phase

aqueuse, alors que l'anion Pic- préfère l'interface et se comporte comme un surfactant.

Page 66: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 53

Figure 4: Profils d'énergie libre de transfert à travers l'interface chloroforme (gauche) - eau(droite). Les traits pleins/pointillés correspondent aux valeurs cumulées en avant/arrière del'énergie libre. Courbes d'après M. Lauterbach 6

Page 67: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 54

Il apparaît, à la lumière de ces résultats que le ligand facilite le transfert des cations

métalliques à travers l'interface (Figure 4 iii & iv). De même, la capture du cation se fait

probablement à cette même interface (i & iv). Cependant, en raison de la durée des calculs

(effectués avant 1996 sur HP-735), les profils d'énergie libre n'ont pas pu être déterminés à

plus de 10 Å de l'interface. Il n'a pas été possible de conclure s'il existe une barrière de

potentiel après les 10 Å, ou si l'énergie libre continue d'augmenter, interdisant ainsi la

diffusion spontanée du complexe dans la phase organique.

Notre but a été d'approfondir et de compléter l'étude initiée par M. Lauterbach pour tenter

de comprendre le phénomène de l'extraction sélective du Cs+ par le ligand L1.

Nous avons organisé notre travail en deux parties, correspondant aux deux étapes

importantes de l'extraction sélective (la capture sélective du cation Cs+, puis la diffusion du

complexe L1.Cs+Pic- dans le solvant organique):

- dans un premier temps, nous avons étudié l'influence des interactions électrostatiques

à "longue distance" dans le PFM du complexe L1.Cs+Pic- à travers l'interface eau–

chloroforme. L'énergie électrostatique, calculée avec un cut-off plus grand, modifie-t-

elle le profil d'énergie libre ? Nous avons également étudié l'importance de

l'échantillonnage lors du calcul, et la distance de migration dans la phase organique est

plus grande.

- dans un second temps, nous avons déterminé la sélectivité du ligand L1 vis-à-vis du

couple Cs+/Na+ à l'interface, et nous avons comparé ces valeurs à celles obtenues dans

les solvants purs: eau et chloroforme.

Page 68: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 55

2. Méthodes

2.1. Choix des charges.

Dans le but d'obtenir des résultats comparables avec ceux des simulations précédentes,

nous avons conservé les charges de la référence 1. M. Lauterbach. a testé plusieurs séries de

charges pour le ligand en recalculant la sélectivité de complexation du calixarène L1 1 sans

trouver de différence qualitative dans le ∆∆G final.

Les charges et les types d'atomes utilisés sont reportés sur la Figure 5 (gauche et centre).

Les atomes Na+, K+, Rb+ et Cs+ sont décrits par les paramètres d'Åqvist 20. Ceux de l'anion

Pic- sont définis dans la référence 21 et sont représentés dans la Figure 5 (droite).

Les modèles de solvants sont TIP3P 22 pour l'eau et OPLS 23 pour le chloroforme.

CA

CACA

CA

CACA

HC

OS

CTHC HC

HC

CT

HC HC

HCHCCA

CACA

CA

CACA

OS

CT

CT

CT OS

CT

CT OS

-0.041

-0.052

0.136

-0.4000.200

0.200 -0.400

0.200

0.200-0.400

0.035

0.062

-0.012 0.002

0.036-0.400

0.170

0.010

CA

CACA

CA

CACA

OS

N N

N

OS

OS

OS

OS

OSOS

-0.421

0.530

-0.347

0.640

-0.415

0.055-0.300

0.677

Figure 5: Distribution de charges et types d'atomes AMBER pour les fragments du calix[4]arène-couronne6 L1 (gauche et centre) et pour l'anion Pic- (droite).

Page 69: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 56

2.2. Potentiels de Forces Moyennes: profil d'énergie libre.

En pratique, le calcul du Potentiel de Forces Moyennes peut se faire selon trois principales

méthodes.

Nous allons utiliser la méthode de la perturbation décrite dans le Chapitre 2 (voir § 6.3).

Nous présentons brièvement deux autres techniques que d'autres groupes ont utilisées pour les

calculs de PFM.

2.2.1. Probabilité de présence dans des tranches de solvant.

Cette technique divise la boite de simulation en tranches de quelques Å d'épaisseur dans

lesquelles le soluté est contraint de rester, par l'application un potentiel. Les probabilités sur la

position du soluté, l'énergie et la structure de la solvatation, sont calculées pendant une

période d'environ 0,5 à 2,5 ns dans chaque tranche. L'énergie libre est alors directement

obtenue selon la formule:

G = - β -1 ln P(z)

où β = 1/ kT

P(z) est la fonction de distribution de la probabilité de position du soluté selon z.

La différence d'énergie libre est définie par ∆G = G(z1) - G(z2), où z1 et z2 correspondent à

des tranches voisines, et ∆G correspond au transfert du soluté de l'une à l'autre.

Ce type de calcul a été appliqué aux ions, comme Cl-, ou de petites molécules comme

l'éthanol, à travers des interfaces eau – liquide 8-10,24,11, ou dans des systèmes eau – air 12-16.

Cette méthode n'a pas été utilisée ici pour des raisons de temps de calculs. En effet, les

solutés étudiés par M. Lauterbach sont considérablement plus grands, possèdent des temps de

relaxation plus longs que les molécules testées par cette méthode, et les durées à simuler pour

chaque tranche auraient été beaucoup trop longues à calculer.

Page 70: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 57

2.2.2. Insertion de (petites) particules

Développée par Widom 25, cette technique procède par l'insertion d'un soluté très petit,

telle une molécule "fantôme", dans la région étudiée sans en modifier sa configuration et

calcule l'énergie d'interaction avec toutes les autres molécules "réelles" Eins. Le potentiel

thermodynamique µins est défini après de multiples insertions selon:

∆µins = - RT ln <exp (- Eins(z)/kT)>

Lorsque l'espace est suffisamment échantillonné, l'énergie libre est calculée par:

∆G(z) = ∆µins + A

où A est une constante pour une température donnée.

Cette technique a, par exemple, été appliquée à la simulation du transport d'eau à travers

une membrane lipide 17. Elle a également été utilisée pour le calcul de l'énergie libre de

mélange dans des liquides de type Lennard-Jones 26. Elle est inexploitable avec des molécules

de la taille des calixarènes.

2.2.3. Mise en œuvre du PFM.

Contrairement à la technique de construction de l'interface présentée dans le Chapitre 2, il

n'y a pas dans nos calculs de PFM de périodicité selon l'axe z, c'est à dire dans la direction du

transfert à travers l'interface. En effet, les simulations de M. Lauterbach ont montré que lors

du déplacement du soluté dans l'un des solvants, le complexe entraînait l'autre solvant avec

lui. Ceci ne déplaçait donc que les tranches de liquide, le complexe restant continuellement

adsorbé à l'interface 6.

De ce fait, la boite de simulation ne présente des conditions périodiques que pour les axes

x et y . Aux extrémités z de la boite, les molécules qui en sortent sont soumises à une force de

rappel:

2)( eauzzkF −= pour l'eau ou 2)( clfzzkF −= pour le chloroforme.

La constante de rappel k = 10 kcal.mol-1.Å-2.

Afin de faire migrer le soluté de part et d'autre de l'interface, nous avons défini deux

atomes fictifs DU1 et DU2 (voir exemple Figure 3), situés à 30 et 20 Å de l'interface selon z,

respectivement côté chloroforme et côté eau. Les deux atomes fictifs sont maintenus sur place

par une force de rappel:

Page 71: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 58

20)( RRkFDU −= avec k = 100 kcal.mol-1.Å-2 .

Leurs coordonnées x et y sont identiques à celles du Cs+ du complexe. La structure initiale

du complexe L1.Cs+Pic- est celle du cristal 27. Sa position de départ est obtenue après une

dynamique moléculaire de 110 ps à l'interface à volume constant (10 ps soluté fixe, 100 ps

soluté + solvants libres).

2.2.4. Coordonnée de réaction

Afin d'obtenir le profil d'énergie libre selon z dans le chloroforme, à chaque pas de calcul,

la distance Cs-DU1 est réduite et celle Cs-DU2 est augmentée de ∆d = 0,05 Å (voir Figure 3).

Pour le côté eau, Cs-DU1 est augmentée et Cs-DU2 réduite. Ainsi, seul le cation est contraint.

Le ligand L1 qui le complexe et le contre-ion Pic- sont libres de leurs rotations et vibrations.

Les distances Cs-DU1 et Cs-DU2 sont les coordonnées de réaction respectivement dans le

chloroforme et dans l'eau. Pour une même simulation de PFM, elles varient d'environ 10 Å

pour λ variant de 0 à 1 (voir Chapitre 2 § 6). Pour obtenir le profil d'énergie libre complet, il a

fallu effectuer plusieurs simulations. Nous représenterons les différents graphiques en

fonction de λ si la courbe a été déterminée en une seule simulation, et en fonction du

déplacement en Å (équivalente au déplacement Cs-DU1 ou Cs-DU2 ) si le profil est

déterminé avec plusieurs simulations.

Pour chaque pas, 0,5 ps sont consacrées à l'équilibration du système, et 2,5 ps au calcul

des énergies de chaque configuration afin d'évaluer la différence d'énergie libre de

perturbation.

Afin de considérer les interactions à une distance plus longue que celle utilisée par M.

Lauterbach, nous avons un double cut-off de 12 et 18 Å. A chaque cycle de calcul, toutes les

interactions non-liées entre résidus à moins de 12 Å sont calculées. A cette énergie, est

ajoutée celle des interactions entre résidus entre 12 et 18 Å, qui n'est mise à jour que toutes les

25 fs.

Nous n'avons pas, du fait de la non–périodicité en z, utilisé la sommation d'Ewald pour le

calcul des interactions à longue distance lors des simulations de PFM.

Page 72: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 59

Les caractéristiques des simulations sont indiquées dans le Tableau 1

Cut-off Taille de Boite Nbre Mol. Solv. Temps simulé

L1.Cs+Pic- 12 + 18 Å 48 × 48 × 83 Å3 714 clf / 3147 eau 900 a / 600 b ps

a simulations côté chloroforme.b simulation côté eau.

Tableau 1: conditions de simulations pour le calcul de PFM.

2.3. Sélectivité de complexation à l'interface.

La différence d'énergie libre de complexation par L1 pour les cations Na+, K+, Rb+ et Cs+

a également été calculée avec la méthode de la perturbation (voir Chapitre2 § 6.2). Dans ces

simulations, les paramètres de Lennard-Jones des cations mutés changent à chaque fenêtre.

Chacune de ces fenêtres est constituée de 2 ps d'équilibration et de 3 ps d'accumulation

des données thermodynamiques. Certaines mutations ont été effectuées directement de L1.Cs+

à L1.Na+, d'autres en passant par les intermédiaires L1.K+ et L1.Rb+, avec et sans contre-ion

Pic-. Pour ces mutations, une dynamique moléculaire de 25 ps est faite entre chaque étape.

Afin d'étudier l'importance de l'échantillonnage, certaines simulations ont été refaites avec des

fenêtres de plus longues durées (4 + 6 ps). L'étape L1.Na+ / L1.K+, avec ou sans contre-ions, a

également été simulée avec des fenêtres de 4 + 16 ps. Toutes ces durées sont récapitulées dans

le Tableau 2 avec les caractéristiques des simulations.

Les durées de simulation sont d'environ 3210 s CPU / 1 ps sur une HP 9000 pour le PFM et

580 s CPU / 1 ps sur SGI Origin 200 [2p] pour les mutations.

Page 73: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 60

Dynamique Cut-off Taille de Boite Nbre Solv. a Temps simulé b

L1.M+ 12 Å 38 × 38 × 61 Å3 311 / 1361 25 + 50 ps

L1.M+Pic- 12 Å 40 × 40 × 60 Å3 363 / 1564 25 + 50 ps

Mutations Etapes c Nbre Fen. (ps) ps / Fen. Total (ps)

L1.Na+ → L1.Cs+ - 51 2 + 3 255

L1.Cs+ → L1.Na+ K+ / Rb+ 3 × 21 4 + 6 630

➥ L1.K+ → L1.Na+ - 21 4 + 16 420

L1.Na+Pic- → L1.Cs+Pic- - 51 2 + 3 255

L1.Cs+Pic- → L1.Na+Pic- - 51 2 + 3 255

L1.Na+Pic- → L1.Cs+Pic- K+ / Rb+ 3 × 21 2 + 3 315

L1.Cs+Pic- → L1.Na+Pic- K+ / Rb+ 3 × 21 4 + 6 630

➥ L1.K+Pic- → L1.Na+Pic- - 21 4 + 16 420a nombre de molécule de clf / eau.b durée des simulations avant le début des mutations. Soluté fixe / soluté libre.c passage par les complexes L1.K+ et L1.Rb+ ou calcul direct.

Tableau 2: Sélectivité de complexation de L1 - conditions de simulations pour les systèmes L1.M+ etL1.M+Pic-. Durées de chaque fenêtre et durées totales des différentes simulations (ps).

Page 74: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 61

3. Résultats

3.1. Profil d'énergie libre

La position initiale du complexe est représentée sur la Figure 6, la courbe de l'énergie

libre en fonction de la coordonnée de réaction est reportée dans la Figure 7 et la comparaison

des deux PFMs (celui de M. Lauterbach avec un cut-off de 12 Å et celui-ci avec un double

cut-off de 12 + 18 Å) sur la Figure 9.

La position initiale du complexe est légèrement

différente de celle du calcul de PFM avec un cut-off de 12 Å.

Il se situe du côté chloroforme à l’interface (voir Figure 6).

Le contre-ion Pic- est à 9,4 Å du Cs+, c'est à dire dans sa

sphère d’interaction électrostatique, mais sans interaction

particulière avec le calixarène.

Figure 6: position initiale desPFMs vers l'eau (droite) et lechloroforme (gauche).

3.1.1. Migration du côté chloroforme.

Le minimum du profil d’énergie libre se situe à une distance Cs+-interface de 2,23 Å. Le

centre de masse de L1 est alors à 4.1 Å de l'interface. Lorsque le complexe est tiré au-delà

dans le chloroforme, des molécules d’eau restent en contact avec le cation. A 10 Å, un cône

d'eau suit le cation, alors qu’à 15 Å, distance limite de ce PFM, une molécule H2O est

directement coordinée au Cs+ et une chaîne de trois molécules d’eau fait le lien avec

l’interface par des liaisons hydrogène successives (Figure 7 & Figure 8).

Pendant toute la durée du calcul, le complexe est toujours en contact avec l’eau, l’anion

Pic- restant proche de l’interface. Il ne suit pas le complexe dans le chloroforme. La distance

finale Cs+/Pic- est de 12,5 Å.

Page 75: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 62

-10

0

10

20

30

40

∆G

Coordonnée de réaction (Å)

Chloroforme Eau

0-10-15 -5 +5 +10

L 1 - I tfC s - I t f

P ic - I t f

-1 5

-1 0

-5

0

5

1 0

Dis

tan

ce

s (

Å)

Figure 7: courbes d'énergie libre (kcal/mol) du complexe L1.Cs+Pic vers le chloroforme et versl'eau en fonction de la coordonnée de réaction (ici le déplacement vers DU1 ou vers DU2)(haut).Les lignes en traits pleins/pointillés correspondent aux valeurs de l'énergie libre cumulées enavant/arrière . Distances de Cs+, du centre de masse de L1 et du Pic- à l'interface Y=0 (bas). Acertains points critiques sont associées des images instantanées sur lesquelles ne figure que l'un desdeux solvants pour plus de clarté. Le trait vertical à 10 Å côté chloroforme correspond à la limite duPFM précédent.

Page 76: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 63

Initiale

-10 Å 10 Å

-15 Å

ClfClf EauEau

Figure 8: surface instantanée de l'eau à l'interface eau–chloroforme (voir Chapitre 2 § 7.3.2 pourla définition) pendant le PFM côté chloroforme (gauche) et côté eau (droite). Les valeurs dedistances en Å correspondent à la coordonnée de réaction (voir Figure 7). Structure initiale (haut -centre). L'échelle de couleur est identique pour toutes les surfaces.

Page 77: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 64

3.1.2. Migration dans l’eau.

Lors de la migration côté eau, le cation reste complexé par le ligand. Le contre-ion Pic-

ne suit pas le complexe et reste à l’interface. A 10 Å de l'interface, alors que L1 est immergé

dans la phase aqueuse, il est toujours en contact avec quelques molécules du solvant

organique par l'intermédiaire de sa partie hydrophobe, constituée des cycles aromatiques. Les

molécules d'eau ne parviennent pas à s'insérer entre le complexe et les molécules de

chloroforme de l'interface (Figure 8 - droite). Il n’y a pas de minimum d’énergie libre lors de

la migration côté eau.

3.1.3. Comparaison des PFMs avec des cut-off de 12 Å 6 et de 12 + 18 Å.

Le calcul du PFM avec un cut-off de 12 Å de M. Lauterbach sera référencé comme le

calcul (a) (Figure 4 (iii) 6), et celui effectué ici comme le calcul (b). Les deux PFMs ont une

distance initiale par rapport à l'interface légèrement différente, car le PFM (a) a été initié avec

une position Cs+-interface nulle, alors que dans le cas (b), la position de départ est la situation

finale d'une simulation de dynamique. Pour faciliter la comparaison, le PFM (b) a été recentré

de telle façon que l'origine des axes corresponde à une distance Cs+-interface (recalculée à

chaque fenêtre) égale à zéro. La différence avec la courbe d'origine (Figure 7) est peu

importante, car la position initiale du complexe est relativement proche de l'interface (voir

image instantanée - Figure 6). L'abscisse des courbes correspond approximativement à la

distance Cs+-interface, celle-ci étant relativement linéaire.

Il y a peu de différences entre les deux courbes des cas (a) et (b) (Figure 9). Côté eau, le

comportement est similaire. Le maximum d’énergie libre est à 20 kcal.mol–1. Côté

chloroforme, le minimum est relativement proche dans les deux cas, plus profond et plus bas

en énergie dans le cas (b) : -3,0 kcal.mol-1 pour une distance Cs+-interface de 2,23 Å pour (b)

contre -1,3 kcal.mol-1 à 1,7 Å pour (a). A environ 10 Å par contre, il y a presque 5 kcal.mol-1

de plus pour (b). Le prolongement du calcul à 15 Å fait croître l’énergie libre jusqu’à une

valeur de 27 kcal.mol-1.

Page 78: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 65

Il y a donc un effet des interactions électrostatiques sur le minimum du profil de l'énergie

libre, probablement dû au fait que le complexe est en plus forte interaction avec l'eau à 12+18

Å qu'à 12 Å de cut-off, et que celle-ci l'attire plus fortement vers l'interface.

0

20

40

-20

0

20

40

-20

∆G(kcal/mol)

0510 5Distance ( Å)

Chloroforme Eau

Figure 9: Comparaisons des résultats des deux PFMs recentrés pour lecomplexe L1.Cs+Pic- – (a) cut-off de 12 Å (haut) et (b) double cut-off de 12 +18 Å (bas). Courbes en fonction de la distance approximative Cs+-interface.Les lignes en traits pleins/pointillés correspondent aux valeurs cumulées enavant/arrière de l'énergie libre.

L’anion Pic- a un comportement différent dans ces deux PFMs. Si dans les deux cas, il

reste à l’interface lors de la migration dans le chloroforme, il ne suit pas le complexe dans

l’eau pour le calcul (b) contrairement au calcul (a). Dans cette dernière simulation, il fait de

l’empilement π avec les cycles aromatiques du calixarène 6. Pour (b) il reste à l’interface et se

Page 79: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 66

retrouve à une distance finale de 17,5 Å de L1.Cs+ (Figure 4). Là aussi, l'augmentation du cut-

off permet une plus grande liberté de mouvement au contre-ion, qui préfère s'adsorber à

l'interface.

3.1.4. Comparaison des PFMs avec des échantillonnages différents.

Dans ces calculs de PFM, nous avons utilisé une durée de 0,5 + 2,5 ps par fenêtre, soit 3

ps pour un déplacement de 0,05 Å. Le temps simulé pour le déplacement de 1 Å du Cs+ est

donc de 60 ps, ce qui, en considérant les observations que nous avons faites lors des

dynamiques moléculaires sur ces systèmes, est relativement lent. En effet, pour la simulation

à l'interface d'un complexe L1.Cs+Pic- placé à 11 Å dans le chloroforme, celui-ci revient

s'adsorber en 120 ps à l'interface 3. La vitesse de déplacement est dans ce cas de 10 ps pour 1

Å, soit six fois plus rapide que dans notre PFM.

E. Engler a recalculé le PFM dans les conditions suivantes: cut-off de 12 Å, déplacement

de 0,05 Å, durée de chaque fenêtre: 2.5 + 5 ps. Ainsi, le déplacement de 1 Å correspond à 150

ps de simulation (ces durées sont similaires à celles employées par Benjamin et coll. 13,8-10,24

et Pohorille et coll. 28 – voir § 2.2.1).

La position initiale du complexe, extraite à la fin d'une dynamique moléculaire de 300 ps,

est à une distance Cs+-interface de 2,7 Å dans le chloroforme. La courbe d'énergie libre est

représentée sur la Figure 11.

L'interface se déplaçant avec le complexe, il a été nécessaire d'effectuer trois simulations

pour atteindre un déplacement global du complexe de 30 Å sur toute la boite. Les courbes

recentrées sont représentées sur la Figure 11.

Page 80: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 67

- 2 0

- 1 0

0

1 0

2 0

3 0

4 0

5 0

C s < - > i t f ( Å )L 1 < - > i t f ( Å )P i c < - > i t f ( Å )∆∆

λ

G ( k c a l / m o l )G ( k c a l / m o l )

λ λ

Figure 10: courbe d'énergie libre et des distances du Cs+ et du L1 à l'interface en fonction de lacoordonnée de réaction λλ (3 simulations). La ligne verticale en pointillé représente le point derecentrage pour la comparaison des PFMs (voir Figure 11).

0

20

40

-20

∆G

0510 5Distance ( Å)

∆G

2.5 + 5 ps

0.5 + 2.5 ps

Chloroforme Eau40

20

0

Figure 11: PFMs recentrés comparés: 7 ps par fenêtre, cut-off 12 Å (haut) – 3 ps parfenêtre, cut-off 12+18 Å (bas). Courbes recentrées sur la distance Cs+-interface = 0.

Page 81: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 68

Il existe également un minimum du côté chloroforme, à une distance Cs+-interface de 3,1

Å. L'échantillonnage plus important ne change pas la tendance de la courbe d'énergie libre,

mais favorise le déplacement de l'interface qui suit le complexe.

Il apparaît un plateau après un distance d'environ 10 à 12 Å de l'interface côté

chloroforme. Ce plateau n'est pas une conséquence de l'échantillonnage plus grand, mais un

artefact dû au cut-off de 12 Å. Du côté de l'eau, l'anion Pic- reste comme dans le PFM (b) à

l'interface, et ne suit pas L1.Cs+. Cependant, probablement à cause de l'échantillonnage plus

grand, le cation décomplexe après 12 Å, comme dans le calcul du PFM pour L1.Cs+ de M.

Lauterbach (Figure 4 + ref. 6). Ceci prouve la faible affinité du complexe et de l'anion pour la

phase aqueuse, par rapport à l'interface.

Ainsi pour conclure, le complexe ne peut diffuser spontanément dans la phase organique

et un calcul avec un échantillonnage plus grand, bien qu'a priori plus satisfaisant ne modifie

pas les conclusions basées sur une simulation de plus courte durée.

3.2. Sélectivité Cs + / Na+ à l’interface eau - chloroforme.

Tous les résultats des mutations sont reportés dans le Tableau 3. Les structures du

complexe L1.Na+Pic- sont sur la Figure 12. Les différences d'énergie libre de complexation

sont représentées dans la Figure 13.

Les mutations en présence de Pic- calculées en 51 fenêtres, directement pour Cs+ ↔ Na+,

donnent des valeurs très proches de celles calculées par étapes, avec K+ et Rb+ comme cations

intermédiaires.

- Pour Cs+ → Na+ , ∆G4 = 14,8 ± 0,2 kcal.mol-1 en 1 étape de 255 ps et 15,6 ± 0,2

kcal.mol-1 en 3 étapes de 105 ps (voir Tableau 3).

- Pour Na+ → Cs+, ∆G4 = 17,3 ± 0,1 kcal.mol-1 en 1 étape de 255 ps et 16,9 ± 0,2

kcal.mol-1 en 3 étapes de 105 ps.

- Pour les étapes K+ ↔ Cs+ les valeurs de ∆G4 sont quasiment identiques en 1 ou en 3

étapes : 10,5 ± 0,1 et 10,1 ± 0,1 kcal.mol-1. Le contre-ion n’est pas en contact direct

Page 82: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 69

avec le complexe, mais reste à proximité. Les mutations effectuées sans l’anion Pic-

donnent une valeur de ∆G4 de 10,2 ± 0,1 kcal.mol-1 pour ces mêmes mutations.

Il n’y a donc pas d’effet de contre-ion sur la sélectivité du calixarène L1 pour les ions

K+, Rb+ et Cs+. Tous ces cations ont un mode de liaison au ligand similaire : proche du centre

de la couronne, le Pic- à l’interface, à proximité mais sans interaction directe avec le

complexe.

Calcul a Durée Na+ → Cs+ b Na+→K + K +→Rb+ Rb+→Cs+ Na+→Cs+

Na+/Cs+ (ref. 6) 3×11×(2+3)=165 ∆G3 17,6 5,1 7,7 30,4

L1.Na+/L1.Cs+1×51×(2+3)=255 ∆G4 23,7

∆∆G 6,7

L1.Cs+/L1.Na+3×21×(4+6)=630 ∆G4 11,8 3,9 6,3 22,0

∆∆G 5,6 1,2 1,4 8,4

➥ L1.K+/L1.Na+ 21×(4+16)=420 ∆G4 16,1 (3,9) c (6,3) c 26,3

∆∆G 1,5 (1,2) c (1,4) c 4,1

L1.Cs+Pic-/L1.Na+Pic- 1×51×(2+3)=255 ∆G4 14,8

∆∆G 15,6

L1.Na+Pic-/L1.Cs+Pic-1×51×(2+3)=255 ∆G4 17,3

∆∆G 13,1

L1.Na+Pic-/L1.Cs+Pic-3×21×(2+3)=315 ∆G4 6,4 3,9 6,6 16,9

∆∆G 11,2 1,2 1,1 13,5

L1.Cs+Pic-/L1.Na+Pic- 3×21×(4+6)=630 ∆G4 5,5 4,1 6,0 15,6

∆∆G 12,1 1,0 1,7 14,8

➥ L1.K+Pic-/L1.Na+Pic- 21×(4+16)=420 ∆G4 5,4 (4,1) c (6,0) c 15,0

∆∆G 12,2 (1,0) c (1,7) c 14,9

a Etat initial/final des mutations. Les ∆G sont, par contre, donnés dans le sens petit → grand cation.b Temps total de la mutation = nombre d’étapes × nombre de fenêtres × (picosecondes d’équilibration+ picosecondes de collection de données).c Ces valeurs sont celles des calculs K+ → Rb+ et Rb+ → Cs+ effectués en (4+6) ps.

Tableau 3 : Calculs d’énergie libre sur les complexes L1.M+/L1.M+Pic- à l’interfaceet M+ dans l’eau.

Page 83: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 70

L’étape K+ ↔ Na+ est plus critique. En effet, selon la durée de la mutation et son sens,

les résultats ne sont pas les mêmes (voir Tableau 3). En fait, le principal facteur responsable

de différences est la position du cation Na+ vis-à-vis des sites de complexation de la couronne.

Il peut être "endo", c'est à dire situé dans le bas de la couronne, à proximité des cycles

aromatiques, ou "exo", dans une situation plus proche de celle des autres cations (K+, Rb+ et

Cs+), au milieu, voir en haut de la couronne. Des molécules d'eau peuvent également être co-

complexées avec Na+.

La situation de départ des mutations de Na+ → K+ est celle tirée d'une dynamique de 75

ps à l'interface, où Na+ est situé au centre de la couronne. Dans les mutations L1.K+ →

L1.Na+, la position finale de Na+ n'est pas du tout similaire (cf. Figure 12).

L1.Na+

Fin de dynamique 75 ps Mutation 4 + 6 ps / fenêtre Mutation 4 + 16 ps / fenêtre

L1.Na+Pic-

Fin de dynamique 75 ps Mutation 4 + 6 ps / fenêtre Mutation 4 + 16 ps / fenêtre

Figure 12: positions du Na+ dans la couronne du ligand L1 après une de dynamique moléculaire de75 ps et en fin de mutation K+→Na+ en 210 et 420 ps. Vues orthogonales. Quelques molécules d'eausont représentées.

Pour les mutations K+ → Na+ en 10 ps par fenêtre, le cation est dans une position

"endo" très basse, avec une à deux molécules d'eau co-complexées. En particulier, en

Page 84: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 71

l'absence de contre-ion, Na+ se retrouve au milieu des cycles anisoles 1 et 3 (Figure 12 centre

haut). Le complexe n'est donc pas dans une position équilibrée conformationnellement.

Cela nous a conduit à recommencer la mutation K+ → Na+ avec un échantillonnage

plus conséquent, en 20 ps par fenêtre. Dans ce cas, la position du cation est similaire à celle

obtenue par dynamique moléculaire: cation en "exo" proche du centre de la couronne. En

l'absence d'anion, Na+ est légèrement décalé dans la couronne, avec une molécule d'eau co-

complexée entre les cycles aromatiques. Une dynamique moléculaire de 250 ps a été calculée

à partir de cette structure, et le cation Na+ reste inclusif dans une position centrée. Il n'y a pas

décomplexation, comme observé dans l'eau pur pour ce même complexe 1.

Les valeurs de ∆G4 pour ces mutations (4 + 16 ps / fenêtre) sont de 16,1 ± 0,5 et 5,4 ±

0,4 kcal.mol-1 respectivement sans et avec Pic-. Si la différence avec la mutation en 4 + 6 ps /

fenêtre en présence du contre-ion est relativement faible (0,1 kcal.mol-1), en l'absence de

l'anion, elle est de 4,3 kcal.mol-1 soit 25 % du ∆G4 (voir Figure 13). Dans nos simulations,

Na+ est complexé par le ligand L1 dans sa conformation 1,3-alternée, qui n'est pas adaptée à

ce cation. Expérimentalement, c'est en conformation cône que L1 extrait le sodium.

En tenant compte des énergies de déshydratation ∆G3 , la séquence de sélectivité de

L1 pour les ions alcalins est la suivante: Cs+ > Rb+ > K+ > Na+. Cette ordre est identique à

celui mesuré expérimentalement pour l'extraction de cette série par L1 de l'eau vers le

dichlorométhane 2.

Les valeurs de ∆∆G pour les étapes Cs+ ↔ Rb+ ↔ K+ sont très proches et ne

dépendent ni de l'échantillonnage, ni de la présence ou de l'absence de l'anion (Figure 13). Ces

valeurs de ∆∆G sont proches de celles mesurées expérimentalement, pour la complexation

dans le chloroforme saturé en eau, de l'analogue de L1 1,3-alterné-1,3-diisopropoxy (3.0

kcal.mol-1) 2.

Page 85: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 72

-15

-10

-5

0

5

Na+

K+

Rb+

Cs+

M utatio n san s P ic-

3 x 210 ps420 ps

−∆

∆G

-15

-10

-5

0

5M utation avec P ic

-

3 x 105 ps3 x 210 ps420 ps

Na+

K+

Rb+

Cs+

Figure 13 : Courbes de différences d’énergies libres de complexation en fonction des temps simuléspour les mutations des systèmes L1.M+ (gauche) et L1.M+Pic- à l'interface (droite) .

La sélectivité Cs+/Na+ que nous avons calculée à l'interface (Figure 13) suit la même

tendance que celle déterminée dans l'eau par M. Lauterbach (Figure 2 – droite). Il faut

cependant rappeler que les valeurs des références 3,4 ont été calculées en 21 fenêtres de 2 + 3

ps (soit 105 ps au total). Nous avons vu que l'échantillonnage, s'il ne change pas l'ordre de la

sélectivité, peut considérablement la modifier quantitativement.

La sélectivité à l'interface est, comme celle dans l'eau, inversée par rapport à celle

calculée dans le chloroforme (voir Figure 2 – droite). Ceci signifie que les forces

d'hydratation sont probablement dominantes dans les contributions énergétiques de la

complexation sélective de L1 à l'interface.

Page 86: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 73

4. Discussion

4.1. Profil d'énergie libre.

4.1.1. Représentation physique du système

En pratique les expériences d'extraction et de transport se font avec des solvants

mélangés ou agités. Dans les études électrochimiques, le champ électrique est une contrainte

externe imposée au système. Ces situations sont différentes de celle que nous avons simulée.

Mais le choix a été de d'obtenir des résultats comparables aux travaux de M. Lauterbach, où

tous les systèmes sont initiés à partir d'un état similaire et sous des contraintes similaires.

4.1.2. Minimum énergétique

Le profil d'énergie libre calculé en considérant des interactions électrostatiques à plus

longue distance (18 Å) confirme l'existence d'un minimum énergétique au voisinage de

l'interface, côté chloroforme. A 10 Å comme à 15 Å de l'interface, le complexe est en contact

avec des molécules d'eau qui font le lien entre le solvant aqueux de l'interface et le cation Cs+

(Figure 7 & Figure 8).

Nous avons effectué trois simulations de dynamique moléculaire pour le complexe

L1.Cs+Pic- à l'interface: (1) avec la correction électrostatique du champ de réaction 29 à plus

de 12 Å de cut-off (voir Chapitre 2 § 2.3.3); (2) avec un cut-off de 12 Å et la méthode de la

sommation d'Ewald telle qu'elle est implantée dans le logiciel AMBER 30 (voir Chapitre 2 §

2.3.2); (3) avec un double cut-off 12 + 18 Å. Dans les trois cas, pendant 300 ps de

dynamique, le complexe reste à l'interface, dans une position similaire à celle trouvée dans ce

calcul de PFM. Ainsi, la prise en compte des interactions électrostatiques, par trois méthodes

différentes, ne change pas le comportement général du complexe. Tous ces résultats

Page 87: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 74

(simulations de dynamique et PFMs) confirment donc que le complexe ne migre pas

spontanément dans la phase organique.

Le soluté ne va pas dans la phase aqueuse principalement à cause des forces de cohésion

de ce solvant. La tension de surface et l'énergie de cavitation de l'eau sont bien supérieures à

celles du chloroforme. Et les interactions que peut faire le soluté avec l'eau ne suffisent pas à

compenser le coût de cette énergie de cavitation. Le soluté parvient à créer une cavité plus

facilement dans le chloroforme. Cependant, le complexe ne migre pas davantage vers la phase

organique que dans l'eau. Le complexe reste en contact direct constant avec le solvant aqueux

par l'intermédiaire de molécules d'eau qui le suivent dans le chloroforme. Les oxygènes de

coordination de la couronne et surtout le cation complexé sont autant de sites potentiels pour

des interactions avec les molécules H2O.

Lors des expériences d'extraction liquide–liquide, le pourcentage d'eau dans la phase

organique augmente 31. Les mesures de K. Fischer et coll. sur la présence d'eau dans

différents solvants organiques, contenant des solutés organiques polaires, ont montré que la

capacité de faire des liaisons hydrogène du soluté jouait un rôle prédominant dans le "water

dragging effect" (molécules d'eau attirées dans le la phase organique). Il est donc normal que

le complexe entraîne avec lui des molécules d'eau lors du calcul du PFM. Cependant, la

distance maximale que nous avons simulée (15 Å) ne permet pas d'observer une rupture entre

les molécules d'eau hydratant le complexe dans le chloroforme et le solvant à l'interface.

L'existence de ce minimum énergétique est en accord avec les résultats expérimentaux

sur des systèmes extractants similaires. Le théorème d'adsorption de Gibbs 32 relie la tension

de surface σ à l'excès algébrique de la concentration interfaciale du soluté par rapport à celle

dans le liquide massique Ci.

1,,ln

1

CTii CRT ∂

∂−=Γ σ

où Γi l'excès de surface de l'espèce i, R la constante de gaz universelle, T la température

absolue, σ la tension interfaciale et Ci la concentration massique de l'espèce i.

Les mesures de la tension de surface de solutions contenant des molécules extractantes

telles que des acides alkylphosphorés et esters 33,34, éthers, éthers-couronne, ont montré que σ

Page 88: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 75

décroît lorsque Ci augmente, comme dans le cas des surfactants 35. Par conséquent, leur

concentration à l'interface devrait être plus forte que dans le liquide massique organique. De

même, les complexes Cu(NO3)2 ou Li(NO3) du TBP sont beaucoup plus tensio-actifs que le

TBP libre 36,37. Enfin, Danesi et coll. ont étudié la vitesse de transfert d'ions K+ de l'eau vers

le 1,2-dichlorométhane contenant des éthers-couronne dibenzo-18-C-6 (DBC) 38. Sur la base

de mesures de la tension interfaciale entre l'eau et le benzène, ils ont conclu que le DBC

forme une couche adsorbée à l'interface, lorsque sa concentration dépasse les

0.5 ×10-3 mol/L. Lorsque le DBC est dissous dans le benzène et qu'un sel inorganique est

présent dans la phase aqueuse, les complexes se forment à l'interface, où ils sont plus

concentrés que le DBC libre 39.

Tous ces résultats sont cohérents avec le minimum déterminé pour L1.Cs+Pic- à

l'interface, ainsi qu'avec le fait qu'il est plus prononcé pour le complexe que pour le ligand

libre L1 (voir Figure 4 - i ).

4.2. Calculs de sélectivité à l'interface

4.2.1. Différence d'énergie libre de liaison ∆G4

Conformément aux calculs effectués en phase gazeuse, en solution organique ou aqueuse

1, la différence d'énergie libre de liaison de L1 (∆G4) à l'interface est la suivante: Na+ > K+ >

Rb+ > Cs+. Cet ordre est le même que pour les interactions de ces ions alcalins avec l'eau en

phase gazeuse, dans les complexes des cryptands 222 ou des éthers-couronne 18-C-6 40. Le

cation Na+ interagit le mieux avec L1. Il est suffisamment petit pour prendre différentes

positions dans la couronne du ligand. En absence de contre-ion, il peut se trouver en "exo" ou

en "endo", avec des molécules d'eau co-complexées liées à deux oxygènes de coordination.

En présence du contre-ion Pic- il reste plus dans une position "exo", sans co-complexation de

molécule d'eau. Pic- semble contribuer à la stabilisation du complexe, par des interactions

avec le ligand, de type empilement π (Figure 12 bas droite). Dans tous les cas, Na+ interagit

mieux avec L1 que le Cs+. Le meilleur récepteur connu pour le Cs+ est le cryptand tricyclique

Page 89: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 76

SC24 comprenant une cavité préorganisée large et rigide. Ce ligand est également sélectif

Cs+/Na+ (logKs = 3,4 et 1,6 respectivement) 41.

0

5

10

15

20

25

30

Na+ K+ Rb+ Cs+

∆G

4Eau

VideClf

Itf

Figure 14: ∆∆G4 pour L1.M+Pic-. Valeurs pour l'eau, le vide et lechloroforme tirée de la ref. 6

Lorsque nous comparons les ∆G4 pour L1 envers les couples M+Pic- dans différents

solvants et dans le vide (Figure 14), il apparaît que l'énergie libre de liaison est quasiment

identique dans le vide et dans le chloroforme, mais elle est beaucoup plus forte dans l'eau qu'à

l'interface.

Ce résultat est probablement dû à la solvatation du cation, notamment dans l'eau, où une

molécule H2O peut se co-complexer avec Na+ dans la couronne, et ainsi stabiliser le

complexe. La solvatation du ligand joue également un rôle: L1 n'est pas soluble dans l'eau,

mais l'est dans le chloroforme.

4.2.2. Sélectivité de complexation à l'interface

La sélectivité de complexation résulte de la compétition entre la différence d'énergie libre

de liaison (∆G4) entre le ligand et le cation, et les effets de solvatation (∆G3). La contribution

la plus importante est probablement la désolvatation du cation avant sa capture. Plus celui-ci

Page 90: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 77

est petit, plus l'énergie nécessaire est grande (Na+ > K+ > Rb+ > Cs+). De plus, la différence

des énergies de solvatation du complexe et du ligand libre est relativement faible par rapport à

celle des ions dans l'eau.

La séquence de sélectivité que nous déterminons pour L1 (Cs+ > Rb+ > K+ > Na+) est

similaire à celle trouvée expérimentalement, pour l'extraction de l'eau vers le dichlorométhane

2. Quantitativement, ces valeurs ne peuvent pas être directement comparées, car L1 étant

conformationnellement mobile, Cs+ est extrait dans sa conformation 1,3-alternée, alors que

Na+ est extrait (faiblement) dans la conformation cône. Dans nos simulations, L1 reste 1,3-

alternée pour tous les complexes. Les analogues de L1, comme le 1,3-diisopropoxy-

calix[4]couronne6, bloqué dans la conformation 1,3-alternée, possède la même séquence de

sélectivité en extraction.

4.2.3. Rôle du contre-ion.

Les fortes différences d'énergies libres selon que les complexes ont ou n'ont pas de

contre-ion, révèlent l'importance de celui-ci. Pour les mutations dans le chloroforme, l'anion

Pic- module également la sélectivité de presque 10 kcal.mol-1 (∆∆GL1.M+ = -11,7 &

∆∆GL1.M+Pic- = -1,6 kcal.mol-1) 3.

Lors du calcul du ∆G3, Pic- ne contribue pas, car le couple cation/contre-ion est dissocié.

Pour les mutations avec ou sans contre-ion, le ∆G3 est identique. Pour les complexes, nous

avons montré que l'anion ne joue pas de rôle particulier pour les étapes L1.Cs+ ↔ L1.Rb+ ↔

L1.K+. Par contre, il influe sur les complexes L1.Na+ (∆∆G4-L1.Na+ > ∆∆G4-L1.Na+Pic-).

La sélectivité de complexation est calculée par ∆∆G = ∆G3 - ∆G4. Pour une même

mutation avec ou sans contre-ion, la sélectivité dépend donc directement des différences de

∆G4.

Page 91: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 78

5. Conclusion

Le ligand calix[4]arène-couronne6 L1 extrait sélectivement, dans sa conformation 1,3-

alternée, Cs+ de l'eau vers le chloroforme. Nous nous sommes intéressés dans ce chapitre à sa

sélectivité pour ce cation vis-à-vis des autres ions alcalins à l'interface, ainsi qu'au

comportement du complexe L1.Cs+Pic- de part et d'autre de l'interface eau–chloroforme lors

d'une "extraction simulée".

Intrinsèquement, Na+ interagit le mieux avec le ligand L1, mais lorsque nous considérons

les effets de solvant, Cs+ est complexé sélectivement. Ces résultats, à l'interface entre un

solvant aqueux et un solvant organique, sont similaires à ceux déjà calculés dans l'eau ou dans

le chloroforme saturé en eau.

Cependant, les calculs de Potentiels de Force Moyenne semblent montrer que l'extraction

ne peut pas se faire spontanément de l'interface, où le cation est probablement capturé, vers la

phase organique. L'hypothèse d'une diffusion lente vers le chloroforme semble exclue, le

soluté étant dans un puits de potentiel. La barrière énergétique à franchir est considérable: à

15 Å dans le chloroforme ∆G ≈ 25 kcal.mol-1.

En pratique, les expériences d'extraction se font à partir d'un mélange des phases

organique et aqueuse, qui contiennent respectivement les ligands et les sels. Pour les

expériences de transport, les phases liquides sont agitées en continu. Il semble donc pertinent

de considérer que l'extraction pourrait avoir lieu lors de mélanges de solvants, où l'interface

eau–chloroforme est différente de celle au repos, telle que nous venons de l'étudier.

Page 92: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 79

6. Références du Chapitre

(1) G. Wipff; M. Lauterbach; Supramol. Chem. 1995, 6, 187-207.

(2) A. Casnati; A. Pochini; R. Ungaro; F. Ugozzoli; F. Arnaud; S. Fanni; M. J. Schwing; R. J. M.

Egberink; F. Jong de; D. N. Reinhoudt; J. Am. Chem. Soc. 1995, 117, 2767-2777.

(3) M. Lauterbach; G. Wipff, Liquid-Liquid Extraction of Alkali Cations by Calix[4]crown

Ionophores: Conformation and Solvent Dependent Na+ / Cs+ Binding Selectivity. A MD FEP Study in

Pure Chloroform and MD Simulations at the Water / Chloroform Interface.; in Physical

Supramolecular Chemistry; NATO ASI Series, E., L. and Kaifer A. Ed., Ed.; Kluwer Academic Pub.:

Dordrecht, 1996, pp 65-102.

(4) M. Lauterbach; G. Wipff ; A. Mark; W. F. van Gunsteren; Gazzeta Chimica Italiana 1997,

127, 699-708.

(5) G. Wipff; E. Engler; P. Guilbaud; M. Lauterbach; L. Troxler; A. Varnek; New J. Chem. 1996,

20, 403-417.

(6) M. Lauterbach, "Simulation par Ordinateur de l'Extraction Liquide - Liquide des Cations

Alcalins par des Ionophores de Type Calixarène-Couronne et Valinomycine", Thèse, Université Louis

Pasteur,Strasbourg, 1997.

(7) M. Lauterbach; E. Engler; N. Muzet; L. Troxler; G. Wipff; J. Phys. Chem. B 1998, 102, 245-

256.

(8) I. Benjamin; J. Chem. Phys. 1992, 96, 577-585.

(9) I. Benjamin; Science 1993, 261, 1558-1560.

(10) K. Schweighofer; I. Benjamin; J. Phys. Chem. 1995, 99, 9974-9985.

(11) C. Chipot; M. A. Wilson; A. Pohorille; J. Phys. Chem. B 1997, 101, 782-791.

(12) M. A. Wilson; A. Pohorille; R. Pratt; Chem. Phys. 1989, 129, 209-212.

(13) I. Benjamin; J. Chem. Phys. 1991, 95, 3698-3709.

(14) A. Pohorille; I. Benjamin; J. Chem. Phys. 1991, 94, 5599-5605.

(15) M. A. Wilson; A. Pohorille; J. Chem. Phys. 1991, 95, 6005-6013.

(16) M. A. Wilson; A. Pohorille; J. Phys. Chem. B 1997, 101, 3130-3135.

(17) S.-J. Marrink; H. J. C. Berendsen; J. Phys. Chem. 1994, 98, 4155-4168.

(18) M. A. Wilson; A. Pohorille; J. Am. Chem. Soc. 1994, 116, 1490-1501.

(19) A. Pohorille; P. Cieplak; M. A. Wilson; Chem. Phys. 1996, 204, 337-345.

(20) J. Åqvist; J. Phys. Chem. 1990, 94, 8021-8024.

(21) L. Troxler; G. Wipff; J. Harrowfield; J. Phys. Chem. 1998, 102, 6821-6830.

Page 93: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 3 80

(22) W. L. Jorgensen; J. Chandrasekhar; J. D. Madura; J. Chem. Phys 1983, 79, 926-936.

(23) W. L. Jorgensen; J. M. Briggs; M. L. Contreras; J. Phys. Chem. 1990, 94, 1683-1686.

(24) I. Benjamin; Chem. Rev. 1996, 96, 1449-1475.

(25) B. Widom; J. Chem. Phys. 1963, 39, 2802-2812.

(26) D. Fincham; N. Quirke; D. J. Tildesley; J. Chem. Phys. 1986, 84, 4535-4546.

(27) R. Ungaro; A. Arduini; A. Casnati; O. Ori; A. Pochini; F. Ugozzoli, Complexation of Ions and

Neutral Molecules by Functionalized Calixarenes; in Computational Approaches in Supramolecular

Chemistry; Wipff, G., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1994, pp 277.

(28) C. Chipot; M. A. Wilson; A. Pohorille; J. Phys. Chem. 1997, 101, 782-791.

(29) I. G. Tironi; R. Sperb; P. E. Smith; W. F. van Gunsteren; J. Chem. Phys. 1995, 102, 5451-

5459.

(30) D. Pearlman; D. Case; J. Cadwell; G. Seibel; U. Singh; P. Weiner; P. Kollman, "AMBER",

UC San Franscisco, 1995.

(31) B. A. Moyer, Basic Principles of Extraction and Liquid-Liquid Systems Employing Cronw

Ethers and Related Metal-Ion Receptors; in Comprehensive Supramolecular Chemistry, Molecular

Recognition: Receptor for Cationic Guests; Atwood, J. L., Davies, J. E. D., McNicol, D. D., Vögtle, F.

and Lehn, J. M., Ed.; Pergamon: Elmsford, N. Y., 1996; Vol. 1, pp 325-365.

(32) A. W. Adamson, Physical Chemistry of Surfaces, 5th Ed.; Wiley: New York, 1990.

(33) G. F. Vandergrift; E. P. Horwitz; J. Inorg. Nucl. Chem. 1977, 39, 1425-1432.

(34) L. W. Lin; H. C. Chang; Y. Ku; J. Phys. Chem. 1996, 100, 16698-16684.

(35) J. Cross, Non-ionic Surfactants. Chemical Analysis; Dekker, M.: New York, 1987.

(36) M. Tomoaia; Z. Andrei; E. Chifu; Rev. Roum. Chim. 1973, 18, 1547.

(37) E. Chifu; Z. Andrei; M. Tomoaia; Anal. Chim. (Rome) 1974, 64, 869-871.

(38) P. R. Danesi; R. Chiarizia; M. Pizzichini; A. Saltelli; J. Inorg. Nucl. Chem. 1978, 40, 1119-

1123.

(39) A. N. Popov, Counterions and Adsorption of Ion-Exchange Extractants at the water/oil

Interface; in The Interface Structure and Electrochemical Processes at the Boundary Between two

Immiscible Liquids; Kazarinov, V. E., Ed.; Springer-Verlag: Berlin, 1987, pp 179-205.

(40) P. Kebarle; Ann. Rev. Phys. Chem. 1977, 28, 445.

(41) E. Graf; J.-M. Lehn; Helv. Chim. Acta 1981, 64, 1040.

Page 94: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

PPRREEMMIIEERREE PPAARRTTIIEE

CHAPITRE 4

SIMULATIONS PAR

DYNAMIQUE MOLECULAIRE

DE LA DEMIXTION DE

MELANGES BINAIRES

EAU / CHLOROFORME

J. Phys. Chem. B, 1998, 102 , 10772-10788

MD Simulations on Ions and Ionophores at a Liquid - Liquid Interface:from Adsorption to Recognition.

in "Current Challenges in Supramolecular Assemblies" NATO ARW Athens; 1998, G.Tsoucaris Ed.; Kluwer Acd. Pub., Dordrecht pp 221-248.

Page 95: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 81

Simulations par Dynamique Moléculaire de la

Démixtion de Mélanges Binaires

Eau / Chloroforme

1. Introduction

Les expériences d'extraction procèdent par le mélange d'un liquide organique contenant

les ionophores, avec de l'eau contenant les sels à extraire. Les molécules extractantes sont

généralement insolubles dans l'eau 1,2. Le mélange des deux solvants non-miscibles se fait par

agitation mécanique du système. Par la suite, la démixtion s'amorce, principalement due aux

forces gravitationnelles et aux différences de tension de surface des deux liquides.

L'instant de la capture de l'ion par l'ionophore est inconnu, ainsi que la manière dont le

complexe formé migre vers la phase organique. Le rôle de l'interface est considéré comme

primordial pour toutes ces étapes 3,4,2. Mais la nature même de la surface de contact des deux

solvants est mal définie, et les hypothèses vont d'un mélange quasiment parfait jusqu'aux

micro-émulsions des deux liquides.

L'étude des profils d'énergie libre des sels Cs+Pic-, du ligand L1 libre 5 et du complexe

L1.Cs+Pic- à une interface au repos (Chapitre 3) permet de supposer que la capture de l'ion par

l'ionophore se fait à l'interface et que le ligand est nécessaire pour le transfert de l'ion dans la

phase organique. Cependant, une fois le complexe formé, les simulations ne permettent pas de

conclure à une migration spontanée de celui-ci dans le chloroforme, où il est normalement

Page 96: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 82

extrait. Un puits de potentiel existe, proche de l'interface, du coté organique, où le complexe

est piégé.

Nous allons donc simuler différents solutés (L1 libre et complexé, sels…) en partant d'une

situation différente, où l'interface n'est pas au repos, mais où les deux solvants sont mélangés

de manière homogène.

Des mélanges de liquides ont été simulés par dynamique moléculaire et Monte Carlo. Les

premiers calculs ont été effectués sur des particules 6-8 ou des molécules 9-11 de Lennard-

Jones. Ce sont des simulations de "sphères" définies uniquement par leurs paramètres de van

der Waals pour calculer les interactions non–liées. Il n'y a pas de charge et donc pas

d'interaction électrostatique. La masse est généralement constante, mais différentes densités

peuvent être étudiées selon le nombre de particules simulées dans un volume donné 12. Les

molécules de Lennard-Jones sont des assemblages d'atomes du même nom. Selon les

paramètres, ils peuvent mimer des mélanges comme CO2/C2H6.

La plupart de ces études se sont attachées à étudier les propriétés thermodynamiques des

mélanges (pression, énergie libre de mélange) ainsi que la structure de la solution (par des

fonctions de distribution radiale). Fincham et coll. ont tracé l'azéotrope CO2/C2H6 à partir de

simulations de dynamique moléculaire, avec pour représenter ces gaz/liquides, des molécules

de type Lennard-Jones. 10.

Par la suite, les systèmes étudiés ont été plus complexes, mettant en jeu des solvants

comme l'eau, le méthanol, le chloroforme, représentés explicitement, par des paramètres de

van der Waals, et des charges électrostatiques. La plupart de ces simulations étudient des

mélanges de solvants miscibles, afin de mieux connaître la structure et les propriétés

microscopiques de ceux-ci (fraction molaire, structure, énergie libre de mélange). Ces

mélanges sont généralement très utilisés expérimentalement, comme CH3OH/CHCl3 qui

solubilise de très nombreuses molécules amphiphiles et lipophiles 13, mais aussi H2O/DMSO,

ce dernier étant l'un des solvants les plus utilisés en chimie organique 14. Les mélanges

chloroforme/acétone 15, chloroforme/acétonitrile 16, eau/méthanol 17 ou eau/1-octanol 18 ont

également été étudiés par dynamique moléculaire. Samios et Mittag ont simulé le mélange

CCl4/CS2 pour étudier les réponses à la spectroscopie infrarouge de cette solution, en partant

du principe que les signaux sont émis lorsque deux molécules non polaires sont en contact et

acquièrent un moment dipolaire induit.

Page 97: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 83

Enfin, quelques travaux ont considéré le mélange de deux liquides ou types de molécules

non-miscibles, comme eau/méthane, où les molécules CH4 se regroupent 19,20, ou CH4/CF4,

où la séparation de phases est étudiée en fonction de leur composition et de la température 21.

Leeuw et coll. ont simulé des mélanges de molécules de Lennard-Jones et de molécules de

Stockmayer possédant un moment dipolaire 22. Selon l'intensité de ce dernier, la séparation

des phases se produit. Le groupe de van Gunsteren a étudié la démixtion d'un mélange de

particules de Lennard-Jones de même masse 12. Ils ont déterminé que la vitesse de démixtion

suivait une loi exponentielle, caractéristique des phénomènes de premier ordre. De même,

l'ajout d'une troisième phase amphiphile ne semble pas affecter la vitesse de séparation des

phases, et cette espèce tend à se concentrer à l'interface 12.

Nous présentons dans ce chapitre une étude théorique de la démixtion de plusieurs

solutions binaires eau/chloroforme parfaitement mélangées. Ces solutions contiennent des

solutés typiques impliqués dans les processus d'extraction liquide–liquide: l'ionophore L1

libre et dans ses formes complexées sous la forme L1.M+ (M+ = Cs+, Na+). Les contre-ions

utilisés sont le picrate Pic-, anion lipophile, et le chlorure Cl- plus hydrophile (voir Chapitre 3

§ 1.2). Pic- est très utilisé dans les expériences d'extraction liquide–liquide à cause de ses

caractéristiques spectroscopiques. Nous avons également considéré L1.Na+Pic- comme soluté.

Na+ n'étant pas extrait par L1, il nous a paru important de voir si le complexe restait de type

inclusif lors de la démixtion. En effet, les simulations de ce complexe dans l'eau, en l'absence

de contre-ion Pic- mènent à une décomplexation de Na+ 5.

Dans les expériences d'extraction, la phase aqueuse contient les sels à extraire. Afin de

comprendre comment ceux-ci se comportent lors du mélange, une seconde série de

simulations a été effectuée avec les sels non-complexés: (Cs+Pic-)4 et (Cs+NO3-)4 dans des

concentrations quatre fois supérieures à celles utilisées pour les complexes L1.M+. L'anion

nitrate NO3- a été choisi car il est présent en forte concentration dans les solutions contenant

des déchets nucléaires, qui résultent de la dissolution des métaux radioactifs dans l'acide

nitrique.

La troisième série de simulations concerne des mélanges plus complexes et plus

"réalistes", proches de ceux impliqués dans les expériences d'extraction. Elles regroupent

simultanément plusieurs types de solutés: ligands L1 libres et complexés avec le Cs+, sels de

Cs+Pic- et Cs+NO3-.

Page 98: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 84

A titre de comparaison, nous avons simulé une dernière série de mélanges eau/acétonitrile

dans différentes proportions, sans soluté. Ces deux solvants sont miscibles à la différence de

l'eau et du chloroforme. Nous avons voulu étudier s'il y avait démixtion, et quelle était la

structure des mélanges des deux liquides.

Pour toutes ces simulations, nous observerons des vues microscopiques des processus de

démixtion avec un intérêt particulier pour la séparation des phases, la solvatation précise et la

localisation des solutés. A quelle vitesse se produit le phénomène ? Dépend-il de la nature du

soluté ? Le complexe L1.M+ se situera-t-il dans la phase organique où il est extrait ? Les sels

non-complexés M+X- resteront-ils dans la phase aqueuse où ils sont solubles ? En considérant

la question de la sélectivité; il est intéressant de comparer des complexes de cations que l'on

sait être extraits (Cs+) et d'autres hypothétiques qui ne le sont pas (Na+). Enfin, quel est le rôle

du contre-ion ? En particulier, Pic- favorise-t-il l'extraction du complexe?

Page 99: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 85

2. Méthodes

2.1. Les systèmes de solvants.

Les solutions biphasiques mélangées ont été préparées indépendamment pour chaque

système. La boîte initiale pour la démixtion a été construite par étapes. Deux boîtes de

solvants purs, d'environ 40 × 40 × 30 Å3 chacune, sont juxtaposées de la même manière que

pour les simulations de dynamique moléculaire à l'interface. Elles contiennent entre 300 et

370 molécules de chloroforme OPLS 23, et entre 1300 et 1600 molécules d'eau TIP3P 24.

L'acétonitrile utilisé est le modèle OPLS 23. Les détails sont donnés dans le Tableau 1 (voir §

2.2). Après l'immersion du soluté à l'interface, chaque système a été minimisé et simulé à 300

K et à volume constant (NVT) pendant 50 ps. Puis il a été équilibré à pression constante et

300 K (NPT) pendant 10 ps afin que les deux liquides aient, avant le mélange, leurs densités

théoriques: 1,0 pour l'eau et 1,47 pour le chloroforme.

La phase de mélange s'est faite en multipliant les charges des atomes de chloroforme par

4, afin d'augmenter les interactions électrostatiques entre les deux solvants. Une dynamique à

500 K et volume constant a alors été effectuée (entre 400 et 900 ps selon le système), jusqu'à

obtenir des courbes de densités satisfaisantes, comme sur la Figure 1: densité à peu près égale

à la moitié de la valeur du liquide massique, et régulière sur toute la boîte.

Z (Å) Z (Å)

Figure 1: courbes de densités selon l'axe z. Eau trait pointillé – chloroforme trait plein.Solvants mélangés (gauche) séparés (droite).

Page 100: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 86

Le système est alors minimisé afin de relaxer les solvants et les solutés après la

dynamique à très haute température.

Pour simuler la démixtion, à partir de cet état minimisé, la température est assignée à 300

K, les charges du chloroforme sont ramenées à leurs valeurs OPLS

(qc = 0,42 et qCl = -0,14). Chaque simulation, à volume constant, a été poussée jusqu'à

séparation totale des phases (entre 0.4 et 1 nanoseconde).

2.2. Conditions de simulations

Des tests méthodologiques supplémentaires ont été effectués, principalement sur la

représentation du solvant chloroforme. Nous avons multiplié par 1,3 les charges du modèle

OPLS pour la démixtion, afin de mimer un solvant plus polaire selon la procédure utilisée par

Kovacs 16 et coll. sur le chloroforme. Leurs paramètres sont ceux de Evans 25, mais ces

charges permettent d'obtenir un moment dipolaire du chloroforme de 1,40 D au lieu de 1,04 D

pour le modèle de Evans 25. Dans notre cas, le moment dipolaire de CHCl3 est, après

multiplication, de 1,39 D.

Nous avons également utilisé un modèle de chloroforme en cinq points avec et sans

polarisation explicite 26, pour des démixtions entre les deux solvants sans soluté.

Enfin, nous avons étudié l'influence des interactions électrostatiques à longue distance sur

la démixtion du sel (Cs+Pic-)4 avec la méthode de la sommation d'Ewald 27 telle qu'elle est

implantée dans le logiciel AMBER 4.1 (Chapitre 2 § 2.3.2). Cette simulation a été effectuée

avec le chloroforme OPLS.

Toutes les caractéristiques des simulations (systèmes, taille de boîte, nombre de

molécules de solvant, durée des simulations, cut-off ) sont indiquées dans le Tableau 1 ci-

dessous.

Page 101: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 87

Soluté Taille Boîte

(Å3)

Solvants a

Nclf + Neau

Cut-off(Å)

Temps dedémixtion

(ps)b

Durée dessimulations

(ps)

pas de soluté A 35×35×79 373+1645 12 400 700

L1 B 38×36×64 307+1504 12 350 525

L1.Cs+Cl- C 39×35×65 304+1504 12 400 450

L1.Cs+Cl- C' 39×35×65 307+1504 12 300 375

L1.Cs+Cl- C" 39×35×65 307+1504 12 350 450

L1.Cs+Pic- D 42×38×61 363+1564 12 400 675

L1.Cs+Pic- pol c 42×38×61 363+1564 12 550 670

L1.Na+Pic- E 42×38×61 363+1564 12 500 870

(Cs+Pic-)4 F 42×38×58 339+1534 12 350 1000

(Cs+Pic-)4 G 42×38×58 339+1534 12 375 675

(Cs+Pic-)4 Ewald d 42×38×58 339+1534 12 425 500

(Cs+NO3-)4 H 34×40×61 291+1452 12 425 600

Mélange 1 e I 39×43×74 446+1846 12 650 1000

Mélange 2 f J 39×43×74 446+1846 12 780 1000

pas de soluté g K 1 30×30×50 166+754 13.5 410 475

pas de soluté g K 2 30×30×50 166+754 13.5 375 475

pas de soluté g K 3 30×30×50 166+754 13.5 375 475a nombre de molécules d'eau et de chloroforme.b temps après lequel les phases sont complètement séparées.c simulation avec le modèle "polaire" du chloroforme 4 points.d simulation avec la technique de la sommation d'Ewald.e f 3 L1 + 5(Cs+Pic-) + 4(Cs+NO3

-). Voir le texte § 3.4 pour la définition.g simulations K1 à K2 avec trois modèles de chloroforme différents - voir le texte § 2.2

Tableau 1: conditions de simulations. Les systèmes sont notés de A à K. Cette dénomination serautilisée tout au long du chapitre.

Les temps de simulation sur Cray T3E [8p] sont approximativement de 160 s CPU / 1 ps

pour les démixtions A à H, et 380 s CPU / 1 ps pour les mélanges I et J.

Page 102: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 88

2.3. Choix des charges

Les charges et les paramètres des atomes de solutés sont les mêmes que ceux utilisés dans

le Chapitre 3. Les types d'atomes et les charges de l'anion NO3- sont les suivants 28: N 0,905 e,

O –0,635 e.

2.4. Indice de démixtion

Pour pouvoir suivre l'évolution des démixtions eau/chloroforme, nous avons défini un

"indice de démixtion" χdemix calculé à chaque pas de la dynamique de la manière suivante. La

boîte complète est divisée en n petites boîtes cubiques d'environ 10 Å de coté (n varie donc de

60 à 100). Dans chacune de ces boîtes ont été calculées la densité de l'eau deau,i et la densité du

chloroforme dclf,i ainsi que l'indice di tel que:

iclfieaui ddd ,,

111 +=

Afin d'éviter les effets de bord, ce calcul est recommencé dans une série de boîtes

cubiques identiques, décalées de 5 Å. L'indice de démixtion est alors obtenu par la moyenne

de toutes les boîtes des deux séries: χdemix = < di >, et normalisé afin que χdemix = 1,0 lorsque

le mélange est parfait et χdemix = 0,0 lorsque les phases sont complètement séparées (pas de

recouvrement).

Des courbes de fonctions exponentielles de la forme (régression exponentielle):

χ = (χ0 - χ∞) exp (-Ks t) + χ∞

peuvent être ajustées sur les courbes de χdemix ,

où Ks est un indice de la vitesse de démixtion.

(χ0 - χ∞).Ks est la vitesse initiale de démixtion.

χ0 et χ∞ les valeurs limites de l'indice respectivement en début et en fin de

démixtion.

Page 103: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 89

3. Résultats

Nous décrirons tout d'abord la démixtion d'un mélange des solvants eau / chloroforme

sans soluté (simulation A - section 3.1), puis les solutions contenant un soluté unique: le

ligand libre L1 ou le complexe L1.M+X- où M+ = Cs+ et Na+ et X- = Pic- et Cl- (simulations B

à E – section 3.2). Dans la section 3.3 sont reportées les démixtions des systèmes contenant

des sels de Cs+ non-complexés, avec comme contre-ions Pic- et NO3- (simulations F-H).

Enfin, les démixtions de mélanges eau/chloroforme contenant de multiples solutés L1,

L1.Cs+Pic-, Cs+Pic- et Cs+NO3- seront présentées dans la section 3.4.

Les résultats préliminaires des mélanges eau/acétonitrile sont présentés dans le

paragraphe 3.5.

3.1. Simulation de démixtion A: mélange eau / chloroforme sanssoluté.

Initialement, les deux solvants forment un mélange homogène. Leurs densités sont à peu

près égales à la moitié de leur valeur dans les liquides purs (Figure 2). Très rapidement,

lorsque la démixtion est initiée, de petites gouttes d'eau se forment. Après 250 ps, deux

régions à fortes concentrations se distinguent (Figure 2 – centre). Il faut préciser que du fait

des conditions périodiques dans les trois directions, le bas et le sommet de la boîte sont

adjacents, et ainsi les molécules de chloroforme sont regroupées en une bulle entourée d'eau.

Les bords de cette bulle ne sont pas nets, mais sont composés d'un mélange des deux solvants.

Après 400 ps, les deux phases sont complètement séparées en deux "tranches" d'eau

entourant une "tranche" de chloroforme. La densité de l'eau est quasiment constante à 1,0 et

celle du chloroforme est proche de 1,48 avec de fortes fluctuations, dues au petit nombre de

molécules MCl3 dans la tranche. L'interface a une épaisseur d'environ 7 Å. La phase

organique est sèche, aucune molécule d'eau ne s'y trouve, alors qu'une molécule de

chloroforme est restée dans la phase aqueuse (à z ≈ -27 Å - Figure 2 courbe de densité à 400

ps).

Page 104: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 90

0 ps

250 ps

400 ps

Figure 2: Simulation de la démixtion A. Mélange eau/chloroforme sans soluté. Images instantanéesselon l'axe z à 0, 250 et 400 ps, montrant l'eau seule (gauche), le chloroforme seul (centre). Lescourbes de densités (droite) sont représentées selon l'axe z. Eau - trait pointillé, chloroforme - traitplein

La formation d'une interface plane, plutôt que de sphérique, s'explique par la

minimisation de la surface interfaciale, car le système est soumis aux conditions périodiques.

Le fait que la phase organique ne contienne pas d'eau est conforme à la faible solubilité

de l'eau dans le chloroforme (soit 0.08 % en masse 29,30). Dans cette simulation, il devrait y

avoir au plus une molécule de H2O dans la tranche de chloroforme.

Page 105: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 91

3.2. Simulations de démixtion B à E: solutions binaires contenantdes complexes L1.M +Pic -.

Nous allons maintenant étudier l'influence sur la démixtion des solutés généralement

impliqués dans les expériences d'extraction.

Pour les simulations avec un unique soluté, les démixtions sont de 300 à 500 ps. Très

rapidement, des bulles de solvants se forment, la phase organique se regroupant autour des

cycles aromatiques hydrophobes du calixarène L1, et la phase aqueuse à proximité du cation

hydrophile M+ (voir Figure 3 à Figure 7). Dans tous les cas, les complexes restent inclusifs, et

le ligand conserve sa conformation 1,3-alternée. Les contre-ions ont des comportements

différents selon leur nature. La région interfaciale a une épaisseur de 5 à 7 Å, et aucune

molécule d'eau ne se retrouve dans le chloroforme.

Les simulations B à E (voir Tableau 1 pour les définitions) vont être détaillées ci-dessous

en trois parties distinctes, solution avec le ligand libre, puis selon le contre-ion utilisé.

3.2.1. Solution du calixarène-couronne6 libre L1: démixtion B .

Dès 50 ps de démixtion, les premières poches de chloroforme apparaissent, en particulier

autour des cycles aromatiques du ligand. De même l'eau se regroupe autour de la couronne du

calixarène qui contient les oxygènes de coordination.

A 100 ps, la poche de chloroforme la plus importante est celle située autour des cycles

aromatiques du calixarène. Cette poche va aller en s'élargissant.

A 310 ps, la séparation des deux phases est complète. La couronne du ligand L1 est

toujours en contact avec l'eau, les cycles aromatiques sont dans le chloroforme. La molécule

est parallèle à l'interface. Une molécule d'eau se trouve depuis les toutes premières

picoseconde dans la partie supérieure du calixarène, interagissant avec les oxygènes

phénoliques de cycles 1 et 3 alternés.

Quelques molécules de chloroforme restent dans la phase aqueuse, mais aucune molécule

d'eau, autre que celle liée au calixarène, ne se trouve dans le solvant organique.

Page 106: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 92

0 ps

50 ps

100 ps

150 ps

310 ps

Figure 3: Simulation de démixtion B contenant le ligand L1 à 0, 50, 100, 150, et 310 ps. Eau seuleà gauche, et chloroforme seul à droite.

Page 107: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 93

Conformément aux résultats des PFMs de M. Lauterbach 5 sur le ligand L1 à l'interface,

celui-ci se comporte comme un surfactant.

Le ligand a également une influence sur la démixtion, en aidant à la nucléation des

solvants dès le début de la démixtion. Cependant en première approximation, la vitesse de

séparation de phase ne semble pas être accélérée par la présence du soluté amphiphile.

3.2.2. Solutions de L1.Cs+Cl-: démixtions C à C".

Trois simulations indépendantes ont été effectuées pour ce complexe. Seules les positions

initiales de L1.Cs+ et du contre-ion Cl- varient de l'une à l'autre.

- Dans la simulation C, le Cl- est situé initialement à 10 Å du cation.

- Dans la simulation C', il se trouve à 23 Å de celui-ci (donc hors de la sphère du cut-off).

- Dans la simulation C", après 100 ps de mélange supplémentaires, la distance Cs+ - Cl- est

de 17 Å (Figure 4).

Les démixtions des trois systèmes sont relativement rapides, et mènent après environ 300

ps à des situations identiques pour le complexe L1.Cs+ : celui-ci est adsorbé à l'interface, la

couronne et le cation sont en contact avec la phase aqueuse, alors que les cycles hydrophobes

sont plongés dans la phase organique. Le complexe est perpendiculaire à l'interface,

contrairement au cas du ligand L1 libre, qui était parallèle. Il n'y a aucune molécule d'eau liée

aux oxygènes phénoliques des aromatiques alternés.

Cependant, en fin de simulation, dans les cas C et C', l'anion est en paire intime avec le

cation à l'interface (Figure 4 - bas), alors que dans la simulation C", il est capturé par la phase

aqueuse, entre 15 et 20 Å de L1.Cs+ (Figure 4 - C" à 300 ps). L'observation visuelle et

l'analyse énergétique suggèrent que la formation de la paire ne résulte pas de l'attraction

cation–anion, mais plutôt de la position initiale du Cl- et des mouvements des bulles d'eau où

il se trouve plus ou moins immergé. En effet, un "corridor d'eau" le rapproche du cation. Il est

alors suffisamment proche pour entrer en interaction avec le Cs+.

Lorsque l'anion est à 10 Å du Cs+ dans la simulation C', nous avons ré-initialisé les

vitesses du système afin de couper un éventuel élan du Cl-. Cependant, la paire L1.Cs+…Cl- se

forme. De plus, nous avons effectué une simulation du complexe L1.Cs+ à l'interface au

repos, où le chlorure se situe à 7 Å du cation dans l'eau . Il n'y a pas formation de Cs+…Cl-.

Page 108: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 94

C" - 0 ps

C" - 200 ps

C" - 300 ps

C' (& C) - 300 psFigure 4: simulation de démixtion (C") de la solution contenant le complexe L1.Cs+Cl- à 0, 200 et300 ps. Situation finale à 300 ps du même complexe dans le cas C' (bas). Eau seule à gauche –chloroforme seul à droite.

Page 109: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 95

Il semble donc que la formation de cette paire soit due à la solvatation encore incomplète

des ions dans les premières picosecondes de la démixtion. La barrière énergétique de

l'association de la paire, qui est principalement due aux énergies de désolvatation des ions,

peut être franchie. Ce résultat est comparable aux simulations de Assfeld et coll. sur les

réactions de type SN2, où il semble que certaines configurations non-équilibrées du solvant

peuvent permettre la réaction de formation de l'intermédiaire, sans barrière de potentiel 31.

3.2.3. Solutions de L1.Cs+Pic - et L1.Na+Pic - : démixtions D & E.

Le ligand L1 extrait sélectivement Cs+ par rapport à Na+ à l'interface (Chapitre 3). Afin

de voir si la démixtion pouvait avoir une influence sur l'extraction sélective, les deux

complexes ont été simulés dans les mêmes conditions. La structure initiale est identique, et les

deux démixtions ont été menées en parallèle.

Contrairement à Cl-, le contre-ion Pic- reste en contact constant avec l'eau et le

chloroforme tout au long de la séparation des phases (voir Figure 6 et Figure 7).

Après environ 400 ps, les complexes L1.Cs+ et L1.Na+ se retrouvent à l'interface,

légèrement du coté chloroforme, et Pic- est exactement entre les deux solvants. La position

finale des complexes est similaire à celle obtenue lors des simulations à l'interface au repos

32,33 et lors du PFM de l'eau vers le chloroforme (Chapitre 3). Ceci signifie que cet état

correspond bien à un équilibre thermodynamique du système.

Figure 5: positions finales des complexes L1.Cs+Pic- D (gauche) etL1.Na+Pic- E (droite) en fin de démixtion. Seule l'eau est représentée

Page 110: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 96

0 ps

50 ps

225 ps

400 ps

Figure 6: simulation de démixtion D contenant le complexe L1.Cs+Pic-. Eau seule à gauche –chloroforme seul à droite.

Page 111: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 97

0 ps

100 ps

325 ps

500 ps

Figure 7: simulation de démixtion E contenant le complexe L1.Na+Pic-. Eau seule à gauche –chloroforme seul à droite.

Page 112: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 98

L'anion Pic- a des comportements différents selon le complexe. Dans le cas D

(L1.Cs+Pic-), il perd le contact immédiatement après le début de la démixtion et n'est plus en

interaction, ni avec le cation ni avec le ligand. Il va s'adsorber en fin de simulation à la

seconde interface périodique (Figure 6). Dans le cas E (L1.Na+Pic-), Pic- reste en contact

constant avec le ligand L1, par des interactions de type π. Il se retrouve, à la fin de la

simulation, en face de l'un des cycles aromatiques avec lequel il interagit, mais reste tout de

même à l'interface eau–chloroforme (Figure 7). Alors que L1.Cs+ est perpendiculaire à

l'interface, L1.Na+Pic- y est parallèle. Il n'y a pas décomplexation de Na+ , l'anion semble de

nouveau jouer un rôle de stabilisation du complexe L1.Na+ (voir Chapitre 3 § 4.2.1).

Dans ces simulations, le complexe L1.M+ influence la démixtion en regroupant autour de

ses parties hydrophobes et hydrophiles, les molécules de solvant. L'anion amphiphile Pic- a

également ce rôle, particulièrement dans le cas où il est libre de se déplacer (L1.Cs+Pic- - D).

3.3. Simulations de démixtion F à H: solutions binaires contenantles sels (Cs +Pic -)4 et (Cs+NO3

-)4.

Lors des expériences d'extraction, le ligand libre est dans la phase organique et les sels à

extraire sont dans la phase aqueuse. Afin d'étudier le comportement de ces derniers lors de la

démixtion, nous avons simulé des sels (Cs+Pic-)4 et (Cs+NO3-)4 dans des mélanges

eau/chloroforme, avec un intérêt particulier pour la position des cations. Sont-ils proches de

l'interface où se fait probablement la complexation ? Quel est le rôle du contre-ion ?

3.3.1. Solutions de sels (Cs +Pic -)4 : démixtions F & G

Les sels de picrate sont utilisés pour les expériences d'extraction à cause de leurs

caractéristiques spectroscopiques utilisées pour le dosage des complexes extraits 34.

Pour le système contenant les sels (Cs+Pic-)4 deux simulations ont été effectuées, en

raison de la possibilité qu'ont les anions Pic- de faire des empilements π 35.

La première simulation (F) a été initiée avec les sels au centre de la boîte mélangée, les

deux paires de Pic- étant empilées (voir Figure 8) au voisinage des quatre Cs+. Cette

Page 113: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 99

configuration a été obtenue à partir d'un fragment de cristal de Cs+Pic- 36 immergé à l'interface

eau–chloroforme avant le mélange des deux solvants. Malgré la haute température (500 K) et

leur répulsion électrostatique, les anions sont restés empilés durant les 550 ps de mélange.

0 ps

150 ps

350 ps

Figure 8: simulation de démixtion F contenant le sel (Cs+Pic-)4 . Eau seule à gauche – chloroformeseul à droite.

Page 114: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 100

Dès que la démixtion s'amorce, les Cs+ sont progressivement entourés d'eau, et les deux

paires d'anions restent empilées. Après 300 ps, l'une de ces paires s'adsorbe à l'interface, alors

que la seconde reste dans la phase aqueuse, entourée de trois à quatre cations, en interaction

avec les oxygènes des Pic-. Cet arrangement va rester stable durant toute la simulation, qui a

été poussée à 1 ns (Figure 9 haut).

Les cations hydrophiles, entourant l'empilement hydraté, l'empêchent de rejoindre

l'interface où il pourrait s'adsorber. A partir de la configuration obtenue après 1 ns de

simulation (F), les cations ont été retirés, et spontanément le second empilement, qui était

dans l'eau, rejoint l'interface en 500 ps environ (Figure 9). Les deux paires se séparent, et les

quatre Pic- se répandent sur l'interface.

- 1 0

0

1 0

2 0

3 0

5 0 0 1 0 0 0 1 5 0 0

D i s t a n c e s à l ' i n t e r f a c e

T e m p s ( p s )

1000 ps Distance à l'interface (Å) 1500 ps

Figure 9: simulation F - distances des 4 Pic- à l'interface en fonction du temps (centre). Imageinstantanée à la fin de la simulation F (gauche) et à la fin de la simulation sans les cations Cs+

(retirés à 1000 ps) (droite). Seule l'eau est représentée.

Les anions Pic- ne sont pas tensio-actifs lorsqu'ils sont en paire et entourés de Cs+. Afin

de voir quel pouvait être le comportement de ces contre-ions non-empilés, une seconde boîte a

été construite contenant également les sels (Cs+Pic-)4 dans un mélange eau/chloroforme

(système G). Pour ne pas avoir d'empilement, les solutés ont été répartis aléatoirement dans la

boîte, en remplaçant les charges +1 des cations Cs+ par –1, pendant les 550 ps de la phase de

mélange à 500 K. Ainsi, les cations ne jouent plus leur rôle stabilisant vis-à-vis des paires de

Pic- empilées.

Page 115: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 101

0 ps

175 ps

375 ps

Figure 10: simulation de démixtion G contenant le sel (Cs+Pic-)4 . Eau seule à gauche –chloroforme seul à droite.

Page 116: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 102

La simulation de démixtion correspondante (G - Figure 10) montre que, dès l'initiation de

la séparation des phases, les cations se retrouvent entourés de molécules d'eau. Les anions Pic-

restent à la surface d'une bulle de chloroforme qui se créé progressivement au milieu de la

boîte (voir images instantanées à 175 ps - Figure 10). Après 375 ps, la séparation des phases

est arrivée à son terme, les cations sont dans la phase aqueuse, les anions adsorbés aux

interfaces.

L'analyse visuelle des trajectoires montre que la mobilité des ions est différente selon leur

nature: les cations Cs+ diffusent relativement rapidement dans la phase aqueuse, alors que les

anions Pic- sont retenus à l'interface, où leur mobilité est limitée.

Les simulations F et G ne convergent pas vers une situation similaire. Il faut noter que la

concentration du (Cs+Pic-)4 est d'environ 0,14 mol.L-1 vis-à-vis de la phase aqueuse, ce qui est

supérieur à sa solubilité dans l'eau (environ 10-3 mol.L-1 37). Ce qui se passe lors de la

dissolution de ce sel dans l'eau n'est pas connu, et nous ne pouvons pas déterminer laquelle

des simulations F ou G est la plus réaliste.

3.3.2. Solution de sels (Cs +NO3-)4 : démixtion H

Les cations et les anions étant dans cette simulation H, tous les deux fortement

hydrophiles, le résultat final est différent de ceux des sels Cs+Pic-. En effet, après 400 ps, les

NO3- et le Cs+ sont complètement immergés et dilués dans la phase aqueuse, à des distances

variant entre 7 et 12 Å de l'interface.

Page 117: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 103

0 ps

100 ps

450 ps

Figure 11: simulation de démixtion H contenant les sels (Cs+NO3-)4 . Eau seule à gauche –

chloroforme seul à droite.

Page 118: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 104

3.4. Simulations de démixtion I et J: solution binaires contenantdes mélanges de solutés - ligands libres, complexes et sels.

Nous avons étudié les démixtions avec des solutés impliqués dans les expériences

d'extraction séparément. Les ligands libres et les complexes restent à l'interface, les ions sont

soit dans l'eau, soit à l'interface, selon leur nature. Nous allons maintenant simuler des

mélanges plus "réalistes", où tous ces solutés sont en solution simultanément.

Dans les deux calculs I et J sont présents trois ligands L1, quatre paires Cs+NO3- et cinq

paires Cs+Pic-.

- Dans le mélange I, les trois ligands sont sous leur forme libre.

- Dans le mélange J, l'un d'entre eux complexe un cation Cs+.

Dès le début de la séparation des phases, les ions Cs+ et le NO3- se retrouvent dans la

phase aqueuse, alors que les espèces L1 libres, L1.Cs+ et Pic- restent en contact avec les deux

solvants, aux interfaces des micro-émulsions (voir Figure 12 & Figure 13).

Le complexe L1.Cs+ semble plus tensioactif que les ligands libres. Il s'adsorbe à

l'interface plus rapidement que les ligands libres L1, qui restent dans la phase organique

pendant plusieurs centaines de picosecondes (800 ps dans le cas J pour un calixarène libre -

Figure 13). Quelques molécules d'eau restent avec les ligands dans le chloroforme, en

interaction avec les oxygènes phénoliques des cycles alternés, ou avec les sites de

coordination de la couronne. Ces molécules sont, dans la plupart des cas, en contact avec un

chapelet de molécules H2O qui fait le lien avec l'interface, et qui attire le ligand vers celle-ci

(voir Figure 13 – 700 ps). Dans chaque simulation, il se trouve un ligand libre L1 qui se

retrouve à l'interface, ancré par les oxygènes phénoliques des cycles alternés (Figure 12 &

Figure 13).

Le nombre total de molécules tensio-actives (L1 et Pic-) est insuffisant pour saturer

l'interface.

Lors des deux simulations, aucune complexation spontanée ne se produit entre les ligands

libres et les cations Cs+. Il faut par contre noter, dans le cas I, la présence d'une paire Pic--Pic-,

dans un empilement similaire à ceux du calcul F. Cette paire est entourée de Cs+ et ses

déplacements permettent de rapprocher les cations de l'interface où pourrait avoir lieu la

complexation.

Page 119: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 105

0 ps

50 ps

200 ps

300 ps

500 ps

Figure 12: simulation I – 3 L1 libres + (Cs+Pic-)5 + (Cs+NO3-)4 .

Page 120: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 106

200 ps

470 ps

0 ps

1 ns

700 ps

Figure 13: simulation J – 2 L1 libres + L1.Cs+Pic- + (Cs+Pic-)4 + (Cs+NO3-)4

Page 121: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 107

La concentration des espèces ne change pas la situation finale du calcul par rapport aux

simulations précédentes. Les molécules tensio-actives sont adsorbées, et les ions hydrophiles

sont dans l'eau. Cependant, alors que L1 libre seul était en contact avec l'interface, tout au

long de la démixtion B, dans les simulations I et J, les ligands libres ont tendance à rester plus

longtemps dans la phase organique (jusqu'à 800 ps), et ils ne rejoignent l'interface que parce

qu'ils sont attirés par des chapelets de molécules d'eau. Il semble donc que la concentration ait

un effet sur le comportement des espèces.

3.5. Mélanges eau-acétonitrile

L'acétonitrile est soluble dans l'eau. Le mélange présente un azéotrope pour xace = 0.70 à

76.5 °C. La structure microscopique du mélange est encore inconnue, bien que l'on suppose

qu'elle soit composée de micro-hétérogénéités. Naberukhin et coll. ont proposé que le

mélange contienne des globules d'eau, où la structure des molécules H2O serait plus ordonnée

que dans l'eau pure 38, et que le reste de la solution soit un mélange désordonné

eau/acétonitrile. Laaksonen et coll. 39,40 ainsi que Marcus et coll. 41 ont également proposé, à

partir de données thermodynamiques, une structure composée de micro-hétérogénéités, mais

dans le sens de couches concentriques autour d'une molécule centrale.

De nombreuses mesures expérimentales ont essayé de définir cette structure au niveau

microscopique, par mesures thermodynamiques 42, ou mesures des coefficients de diffusion

43.

Nous présentons ici l'application de notre méthode de démixtion au mélange binaire

eau/acétonitrile. Laaksonen et coll. 40 ont simulé les mélanges de ces deux solvants aux

fractions molaires en acétonitrile de 0,11, 0,5 et 0,89. Nos résultats préliminaires sont donnés

ici pour les fractions 0,14, 0,25 et 0,39 pour lesquelles le mélange devrait être constitué de

micro-hétérogénéités d’acétonitrile dans l’eau. Ces simulations sont encore en cours, et la

phase d'analyse n'a pas encore été initiée. Nous présentons dans les figures ci-dessous, les

indices χdemix, les courbes de densité en fin de dynamique (50 dernières ps) et des images

instantanées caractéristiques des structures obtenues.

Ces simulations ont été effectuées dans l'ensemble N,V,T. Aucune équilibration de

densité n'a pu être faite comme pour les démixtions précédentes, car le mélange commence

Page 122: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 108

immédiatement, même 300 K. La Figure 14 montre l'aspect des courbes de densités des deux

liquides à la fin du mélange à 500 K.

0 10 20 30 40 50 60

MeC NH

2O

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0 10 20 30 40 50 60 70 80

H2O

MeC N

Z (Å ) 0 10 20 30 40 50 60

MeC NH

2O

Figure 14: mélanges eau-acétonitrile - courbes de densité à 0 ps pour les 3 systèmes : 0,14 (gauche),0,25 (centre) et 0,39 (droite) .

0

0.2

0.4

0.6

0.8

0 1000 2000 3000 4000

Xde

mix

Temps (ps)

0

0.2

0.4

0.6

0.8

0 10 20 30 40 50 60

MeC NH

2O

Z (Å)

χdemix Courbes de densités

3,6 nsFigure 15: simulation de la fraction molaire de MeCN = 0,14 - courbes de χdemix en fonction dutemps, de densités des liquides dans les 50 dernières ps et images instantanées de fin de simulations(solvants séparés: acétonitrile – gauche, eau – droite)

Page 123: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 109

0

0.2

0.4

0.6

0.8

0 1000 2000 3000 4000

Xde

mix

Temps (ps)

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 10 20 30 40 50 60 70 80

MeCNH

2O

Z (Å)

χdemix Courbes de densités

4.0 nsFigure 16: simulation de la fraction molaire de MeCN = 0.25 - courbes de χdemix en fonction dutemps, de densités des liquides dans les 50 dernières ps et images instantanées de fin de simulations(solvants séparés: acétonitrile – gauche, eau – droite)

Page 124: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 110

0

0.2

0.4

0.6

0.8

0 1000 2000 3000 4000

Xde

mix

Temps (ps)

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 10 20 30 40 50 60

H2O :

MeC N:

Z (Å)

χdemix Courbes de densités

3.8 nsFigure 17: simulation de la fraction molaire de MeCN = 0.39 - courbes de χdemix en fonction dutemps, de densités des liquides dans les 50 dernières ps et images instantanées de fin de simulations(solvants séparés: acétonitrile – gauche, eau – droite)

Dans la simulation à 0,14 de MeCN, l'acétonitrile occupe une cavité dans l'eau. Ce

volume contient quelques molécules H2O. Le reste des MeCN est mélangé dans la phase

aqueuse. Pour les deux autres simulations, des tranches de solvant sont relativement

distinctes. Chacun contient des molécules de l'autre. Il n'y a pas de séparation complète des

phases.

Des analyses plus poussées devront être effectuées pour essayer de caractériser ces

structures, et les comparer à celles déjà obtenues par simulations à d'autres fractions molaires

40.

Page 125: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 111

4. Discussion

Nous avons présenté les premiers calculs sur la séparation des phases d'un mélange

liquide-liquide binaire contenant des solutés. Ceux-ci, ions et complexes, sont utilisés

expérimentalement dans les processus d'extraction assistée de la phase aqueuse vers une phase

organique. Ces simulations fournissent des vues microscopiques sur des phénomènes

impliqués dans les toutes premières étapes de la reconnaissance des ions et de l'extraction.

La discussion portera tout d'abord sur les vitesses de démixtion et les forces motrices de

la séparation des liquides. Puis, à partir des résultats observés dans ces calculs, nous

proposerons un mécanisme pour la reconnaissance et l'extraction assistée d'ions.

4.1. Vitesse de démixtion.

Dans tous les cas (A à J), la démixtion mène à deux phases séparées par une interface

étroite. Bien que pour tous les systèmes, les solvants se séparent rapidement, il est intéressant

de caractériser les vitesses de démixtion afin de comprendre les rôles de la nature et de la

concentration du soluté. En effet, il est généralement considéré que l'ajout de sels ou de

surfactants dans un mélange accroît sa vitesse de séparation.

L'indice χdemix (voir paragraphe 2.4 pour sa définition) a été calculé pour les tous

systèmes, et quatre courbes en fonction du temps sont tracées dans la Figure 18: la solution

sans soluté (A), un complexe de L1 (D), un sel (G) et un mélange complexe de solutés (J).

Page 126: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 112

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 100 300 500 700

Pas de so lu té A

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 100 300 500 700

LC s+Pic

- D

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 200 400 600 800

(CsPic)4 G

Tim e (ps)

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 200 400 600 800 1000

M élan ge 2 J

T im e (ps )

Figure 18: Vitesses de démixtion de 4 systèmes sélectionnés. χχdemix est tracé en fonction du temps enps. Une courbe exponentielle est ajustée et superposée à celle de χχdemix.

Une fonction exponentielle de la forme:

χ = (χ0 - χ∞) exp (-Ks t) + χ∞

a été ajustée sur ces courbes et les valeurs de Ks, χ0 et χ∞ sont reportées dans Tableau 2.

Soluté pas de soluté

A

LCs+Pic-

D

(Cs+Pic-)4

G

Mélange 2

J

Ks 6,1×10-3 8,9×10-3 10,3×10-3 4,2×10-3 ± 5,10-5

χ0 0,973 0,915 0,916 0,799 ± 0,003

χ∞ 0,150 0,214 0,283 0,157 ± 0,001

Vit. initiale 4,5×10-3 6,3×10-3 6,5×10-3 2,7×10-3 ± 0,3.10-3

Tableau 2: paramètres des fonctions exponentielles superposées aux courbes de χχdemix etvitesses initiales de démixtion de la Figure 18. Dernière colonne : incertitudes.

Page 127: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 113

Dans tous les cas, après environ 500 ps, χdemix a atteint sa valeur asymptotique. La vitesse

initiale de démixtion, définie par Ks.(χ0 - χ∞) et les valeurs de Ks montrent que la séparation

des phases est plus lente dans le cas J (pour le mélange de plusieurs solutés, quelques

molécules d'eau vont rester dans le chloroforme, liées au ligand libre L1 alors que la

séparation des phases est achevée - voir Figure 13). La démixtion est plus rapide dans les

solutions contenant des sels (G) ou un complexe (D), que dans le cas des solvants seuls (A).

χ∞ correspond à la séparation des phases après démixtion complète. Les systèmes

contenant les sels (E = Cs+Pic-) ou le complexe seul L1.Cs+Pic- (D) gardent un taux de

mélange d'environ 10 % supérieur à celui sans soluté (A) ou celui du second mélange (J) (voir

sur la Figure 18 et dans le Tableau 2). La Figure 19 permet d'interpréter cette différence. Dans

le cas D, le complexe est placé vers le centre de l'interface. L'eau peut pénétrer tout autour de

lui dans le chloroforme (water fingers 44 - Figure 19 - gauche). Dans le cas J, au contraire, les

différents solutés qui sont sur cette surface (un calixarène L1 libre, un complexe L1.Cs+ et un

Pic-) couvrent une grande partie de l'interface et empêchent les protubérances d'eau de

s'étendre dans le chloroforme (Figure 19 – droite).

2

4

6

82

4

6

860

50

40

30

20

10

Z A

xis

Y Ax

is

X Axis

2

4

6

82

4

6

8

10

80

70

60

50

40

30

Z A

xis

Y Ax

is

X Axis

Figure 19: surface des molécules d'eau pour le système D: L1.Cs+Pic- (gauche) et J: mélange 2(droite). Le chloroforme est situé au-dessus de la surface. L'échelle est identique pour les deuxsurfaces.

Cependant, l'observation des courbes de la Figure 18 ne révèle pas de différence majeure

entre les systèmes. Il semble difficile d'interpréter ces résultats en terme d'hydrophilie /

Page 128: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 114

hydrophobie relative des solutés et en terme de concentrations. D'autre simulations, plus

systématiques, sont probablement nécessaires pour essayer de les interpréter.

Expérimentalement, nous ne disposons d'aucune information concernant la démixtion de

nos systèmes, ni de données cinétiques sur la séparation de phases à cette échelle de la

nanoseconde. Au niveau macroscopique, une fois les gouttes de solvants formées lors de la

séparation de phases, les effets de gravitation et de viscosités, négligeables à notre échelle de

simulation, deviennent dominants. Le volume et la forme du récipient déterminent également

la vitesse macroscopique de démixtion.

4.2. Les interactions solvant – solvant: forces motrices de ladémixtion.

La thermodynamique de séparation de phases a des composantes enthalpiques et

entropiques qui ne sont pas mesurables simplement par des simulations.

Nous avons cependant calculé les énergies d'interaction entre les différentes espèces qui

composent nos systèmes, en début (de 10 à 60 ps) et en fin de démixtion (50 dernières ps),

afin de voir quelles interactions favorisent le plus la séparation des phases. Nous avons donc

divisé nos systèmes en composantes, tels que L1, Cs+, X- (contre-ion) et solvants. Les

résultats obtenus sont dans le Tableau 3.

Lors de la démixtion, l'énergie totale du système devient plus attractive d'environ 500 à

700 kcal.mol-1. Les énergies qui mettent en jeu le soluté (soit cation/anion/ligand soit

soluté/solvant) sont beaucoup plus faibles que les énergies solvant/solvant : entre ∆E = -60 et

40 kcal.mol-1 pour les interactions soluté/soluté, ∆E = 1000 à 1500 kcal.mol-1 pour

eau/chloroforme, ∆E = -700 à -900 kcal.mol-1 pour chloroforme/chloroforme et ∆E = -800 à

-1200 kcal.mol-1 pour eau/eau.

La séparation des phases est un phénomène induit par les forces de cohésion des solvants,

et principalement celles de l'eau. La phase aqueuse a la plus forte tension de surface et a

tendance à s'agréger plus facilement. Ainsi, cette hypothèse conforte les résultats précédents

sur les vitesses de démixtion qui sont comparables pour tous les systèmes (paragraphe 4.1).

Ces observations sont similaires de celles de van Gunsteren et coll. sur les démixtions de

particules de Lennard-Jones A et B en présence d'une troisième espèce C amphiphile 12. De la

Page 129: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 115

même manière, ils ont constaté que C ne joue pas un rôle dans l'accélération de la démixtion,

contrairement à ce qu'ils attendaient.

Soluté L.Cs+.Pic- D Mélange de solutés 2a J

Début Fin ∆Ε Début Fin ∆Ε

L1/Cs+ -48 ± 3 -54 ± 3 -6 -45 ± 11 -43 ± 6 2

L1/Clf. -41 ± 5 -48 ± 4 -7 -87 ± 6 -155 ± 6 -68

L1/Eau. -16 ± 5 -4 ± 3 1 -144 ± 10 -50 ± 7 94

Cs+/X- -41 ± 4 0 ± 0 41 -611 ± 20 -654 ± 30 -43

Cs+/Clf. -5 ± 3 -5 ± 2 0 3 ± 8 0 ± 4 3

Cs+/Eau. -39 ± 7 -39 ± 7 0 -780 ± 39 -837 ± 44 -57

X-/Clf. -17 ± 4 -18 ± 4 -1 -86 ± 8 -102 ± 5 -16

X-/Eau. -84 ± 9 -92 ± 8 -8 -677 ± 25 -703 ± 33 -26

Eau./Clf. -1494 ± 156 -389 ± 16 1105 -1671 ± 207 -298 ± 16 1373

Eau./Eau. -13500 ± 158 -14537 ± 42 -1037 -15000 ± 184 -15830 ± 62 -830

Clf./Clf. -1641 ± 94 -2359 ± 17 -718 -2019 ± 147 -3141 ± 22 -1122

Totale -16789 ± 104 -17413 ± 38 -624 -20538 ± 120 -21092 ± 83 -554

Soluté (Cs+ Pic-)4 G sans soluté A

Début Fin ∆Ε Début Fin ∆Ε

4Cs+ / 4X- -111 ± 10 -170 ± 15 -59

4Cs+ / Clf. 1 ± 5 -0 ± 4 -1

4Cs+ / Eau. -432 ± 21 -427 ± 18 5

4X- / Clf. -85 ± 11 -94 ± 10 -9

4X- / Eau. -330 ± 26 -294 ± 18 36

Eau. / Clf. -1346 ± 188 -349 ± 13 997 -1655 ± 172 -292 ± 15 1363

Eau. / Eau. -12977 ± 225 -13828 ± 58 -851 -14221 ± 173 -15416 ± 46 -1195

Clf. / Clf. -1540 ± 109 -2228 ± 15 -688 -1629 ± 114 -2549 ± 17 -920

Totale -16680 ± 128 -17232 ± 56 -552 -17505 ± 116 -18257 + 46 -752a pour ce système, les valeurs reportées pour L1 correspondent au total des trois ligands, celles pourCs+ aux neuf cations, et celles pour X- aux cinq Pic- et quatre NO3

-.

Tableau 3: analyse des composantes énergétiques (kcal.mol-1) au début (10 à 60 ps) et à la fin (50dernières ps) des démixtions de 4 systèmes sélectionnés A-D-G-J. (± correspondent auxfluctuations).

Page 130: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 116

4.3. Où sont les ions et les complexes après la séparation dephases ? Implications pour le mécanisme d'extraction.

Selon leur caractère hydrophile, hydrophobe ou amphiphile, les solutés se retrouvent dans

différents environnements de solvant à la fin de la démixtion. Il faut noter qu'aucun de ces

solutés n'est complètement immergé dans la phase organique lorsque les phases sont séparées.

Notamment les ligands L1, solubles dans le chloroforme et non dans l'eau, ni les complexes

L1.Cs+Pic- qui, expérimentalement, sont extraits dans la phase organique.

En fait, ils restent adsorbés à l'interface comme les surfactants. Les groupements

hydrophobes sont immergés dans le chloroforme, et les groupements hydrophiles (cation,

oxygènes de coordination de la couronne, oxygènes phénoliques) sont solvatés par les

molécules d'eau de l'interface. Seuls les cations Cs+ non-complexés sont totalement dans la

phase aqueuse, comme prévu.

Le comportement des anions n'est pas le même selon leur nature. Dans une simulation

(C") Cl-, hydrophile, est entièrement immergé dans l'eau, alors que dans le système C, il est en

paire intime avec Cs+ à l'interface. Dans les tous premiers instants de la démixtion, la

concentration locale en eau autour des ions n'est peut être pas suffisante pour empêcher le

rapprochement Cl-…Cs+.

Dans les simulations de sels, les nitrates NO3- se retrouvent dans l'eau alors que les

picrates Pic- préfèrent l'interface, que le cation du sel soit libre ou complexé (L1.Cs+ et

L1.Na+). Ce comportement amphiphile peut avoir un rôle déterminant dans le mécanisme

d'extraction d'ion assistée (voir paragraphe 4.4), mais également pour les propriétés

électriques de l'interface 45.

La distribution des ions à la fin des démixtions suit le même ordre que celui déterminé

par F. Berny qui a effectué des simulations de solutions de sels M+X- plus concentrés (K+Cl-,

K+ClO4-, K+Pic-, NMe4

+Cl-, guanidinium+Cl-, nonyltriméthylammonium+Cl-) 46. Certains de

ces ions, tels que ClO4-, Pic-, NMe4

+ et le guanidinium+ se comportent comme des surfactants,

alors qu'ils n'en ont pas les composantes classiques (tête polaire hydrophile, chaîne

hydrophobe) 46.

Un autre phénomène intéressant concerne la tendance qu'ont certains ions chargés à

former des paires intimes, comme l'ont montré les simulations effectuées au laboratoire sur

Pic-…Pic- ou guanidinium+… guanidinium+, qui font de l'empilement π dans les solutions d'eau

35,46.

Page 131: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 117

4.4. Suggestion d'un mécanisme d'extraction ionique assistée.

Les résultats du Chapitre 3 avaient permis d'émettre l'hypothèse que la reconnaissance et

la complexation des ions par les ionophores pouvait se faire à l'interface entre les gouttes

d'eau et de solvant organique.

La très grande vitesse avec laquelle la séparation microscopique des phases se produit,

suggère que, même en partant dans le cas hypothétique d'un mélange parfaitement homogène,

les premières gouttes se forment à l'échelle de la nanoseconde. La capture du cation ne se fait

donc probablement pas dans un mélange homogène de solvants. Nos simulations montrent

que dès les premiers instants, jusqu'à la démixtion complète, les ionophores libres L1 restent à

la frontière entre l'eau et le chloroforme. Dans des solutions plus concentrées en calixarènes,

les ligands L1 devraient s'accumuler à l'interface, formant ainsi des assemblées allant des

agrégats à la monocouche 47,48,46. Les anions s'accumulent également à l'interface, où ils

peuvent attirer les cations 49, qui ont sinon tendance à être repoussés par elle 50. C'est un effet

de synergie fort probable que peuvent jouer certains contre-ions et autres molécules co–

extractantes en s'accumulant dans la région interfaciale.

Une caractéristique importante du mélange est sa concentration locale plus faible en eau

que la phase aqueuse massique. Le nombre réduit de molécules H2O présentes en début de

démixtion au voisinage proche des espèces, à cause de la dispersion du mélange, peut mener à

des structures de solvant non-équilibrées 31. Les molécules d'eau ne peuvent pas compléter les

premières couches de solvatation de certaines espèces. Ceci pourrait favoriser la

complexation, en réduisant les enthalpies de désolvatation nécessaires pour permettre la

capture de l'ion.

Une fois le complexe formé, se pose la question du départ vers la phase organique. En

effet, nous avons montré que le complexe est plus fortement lié à l'interface que le ligand

libre, principalement à cause de son caractère hydrophile accentué par la présence du cation.

Nous suggérons que le départ vers la phase organique puisse être facilité par la saturation de

l'interface (ce qui réduit la tension de surface, et limite fortement la présence de protubérances

d'eau). Cette saturation peut être causée par la forte concentration d'ionophores et d'ions, mais

également d'autres espèces telles que des surfactants, des ligands ou des molécules co–

complexantes.

Page 132: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 118

4.5. Méthodologie: modèles de chloroforme, électrostatique àlongue distance.

Les simulations décrites ici sont exploratoires, et, comme la plupart des calculs

théoriques effectués sur des ions et des complexes aux interfaces 51,44,52-54 ou dans des

systèmes mélangés 18,55-57, elles reposent sur un certain nombre d'approximations.

Tout d'abord, la représentation des solvants, et principalement l'énergie d'interaction

mutuelle. Elle a été calculée en utilisant des potentiels de Lennard-Jones en 1-6-12, calibrés

pour les liquides purs, et suivant les règles standard de combinaison pour les interactions de

van der Waals entre atomes différents. En principe, il serait plus adapté de prendre en compte

les effets de polarisation 58,59,26. Le modèle TIP3P, inclut une certaine auto-polarisation, mais

pourrait être trop polaire pour les interactions avec le chloroforme. Au contraire, la

polarisation des molécules de chloroforme par l'eau n'est pas prise en compte dans le modèle

OPLS que nous utilisons. Les propriétés diélectriques de l'eau au voisinage de l'interface

doivent également considérablement varier de celles du liquide massique 60.

Les vitesses très rapides de démixtion et le fait que le complexe ne soit pas extrait ne

sont-ils pas dus à une sous-évaluation des interactions eau–chloroforme ? Nous avons donc

effectué des simulations supplémentaires, avec des modèles de chloroforme plus polaires.

4.5.1. Modèles de chloroforme

La simulation D de la solution contenant le complexe L1.Cs+Pic- a été simulée en

utilisant le modèle OPLS du chloroforme dont les charges atomiques ont été multipliées par

1,3. Ceci afin d'augmenter le moment dipolaire de CHCl3 et d'obtenir des interactions eau ou

soluté–chloroforme plus fortes. La séparation des phases est dans ce cas légèrement plus lente

qu'avec le modèle "non-polaire", mais le complexe a une position finale similaire, et la phase

organique reste anhydre (voir Figure 20).

Page 133: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 119

550 ps

Figure 20: simulation du complexe L1.Cs+Pic- dans le chloroforme OPLS "polaire". Imageinstantanée après 550 ps. Eau seule à gauche, chloroforme seul à droite.

Une seconde série de calculs a été effectuée par E. Engler sur des démixtions de boîtes

eau/chloroforme sans soluté, avec trois modèles pour CHCl3: le modèle OPLS en quatre

points (simulation K1) que nous avons utilisé pour les autres démixtions; le modèle en cinq

points de Chang et coll. 26 d'abord sans polarisation (K2), puis avec polarisation explicite (K3)

26. Le nombre de molécules est identique pour K1, K2 et K3 et le cut-off utilisé est également

légèrement supérieur au nôtre (13.5 Å).

Les temps de calcul des systèmes avec polarisation explicite étant considérablement plus

longs, et comme les trois systèmes K devaient avoir un nombre de molécules identiques, la

taille de la boîte utilisée est inférieure à celle du système A (30×30×50 Å3 au lieu de

35×35×79 Å3- Tableau 1). Les vitesses de démixtion et les courbes de densités obtenues à la

fin de la séparation des phases sont représentées sur la Figure 21.

Les trois modèles ont un comportement similaire. La démixtion se termine en moins de

450 ps, les phases organiques étant anhydres, et les épaisseurs d'interface sont quasiment

identiques. Ces résultats valident donc nos simulations A à J effectuées avec le modèle OPLS

du chloroforme. Un certain nombre d'analyses complémentaires sur les interfaces utilisant ces

modèles en 5 points, le chloroforme OPLS avec les charges accrues, etc. seront effectuées

dans le Chapitre 7.

S'il y a peu de différences entre les systèmes A et K1 (comparer la Figure 21 – K1 et la

Figure 18 – A), les courbes de χdemix sont moins homogènes pour les simulations K1 à K3.

Cette différence peut s'expliquer par la taille des boîtes plus petites et l'application des

Page 134: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 120

conditions périodiques. L'indice χdemix est donc calculé sur des volumes cubiques

proportionnellement grands par rapport au volume total de la boîte.

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 100 200 300 400 500-0 .5

0

0.5

1

1.5

2

-20 -10 0 10 20

K1

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 100 200 300 400 500-0 .5

0

0.5

1

1.5

2

-20 -10 0 10 20

K2

0

0.2

0.4

0.6

0.8

1

0 100 200 300 400 500-0 .5

0

0.5

1

1.5

2

-20 -10 0 10 20

K3

Z

Temps (ps)

Figure 21: simulations de démixtion (K) des solutions binaires eau / chloroforme sans soluté.K1 avec le modèle en quatre points OPLS de chloroforme, K2 avec le modèle en cinq points etK3 avec le modèle en cinq points plus polarisation 26. Vitesses de démixtions χχdemix (gauche) etcourbes de densités (droite) en fin de démixtion.

Page 135: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 121

4.5.2. Interactions à longue distance

Les interactions à longue distance peuvent aussi modifier la dynamique et les propriétés

des systèmes 61,62. Afin d'en voir l'importance sur nos simulations, nous avons recalculé le

système G, contenant le sel (Cs+Pic-)4, en utilisant la technique de la sommation d'Ewald 27

pour la prise en compte des interactions à longue distance (Chapitre 2 § 2.3.2). La démixtion

est plus lente que pour le calcul G, et après 500 ps, la séparation des phases n'est pas encore

totale. Cependant, en raison du coût des simulations avec la sommation d'Ewald, nous avons

limité cette durée à 500 ps. Malgré cela, l'environnement des ions est très similaire à celui

observé dans le cas G: les Cs+ sont immergés dans l'eau, alors que les quatre Pic- se retrouvent

à la frontière entre les deux phases (voir Figure 22)

avec Ewald – 500 ps

sans Ewald (G) - 175 ps

Figure 22: simulations de démixtions d'une solution binaire eau/chloroforme contenant (Cs+Pic-)4.Calcul avec la sommation d'Ewald (haut) et sans la sommation d'Ewald (bas) cas G.

Page 136: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 122

Il faut noter que la méthode de la sommation d'Ewald suppose sur une périodicité dans

les trois dimensions, ce qui n'est pas le cas dans nos systèmes. Par contre, la version bi-

dimensionnelle d'Ewald , qui serait plus appropriée pour l'interface plane 63, devrait favoriser

la phase séparée par rapport à la phase mélangée et ainsi accélérer le processus.

Page 137: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 123

5. Conclusion

Lors des expériences d'extraction liquide–liquide assistée, une phase organique contenant

les ionophores est mise en contact d'une phase aqueuse où se trouvent dissous les ions à

extraire. Le système est vigoureusement mélangé et après la démixtion les deux phases sont

entièrement séparées; les complexes se trouvent alors dans la phase organique.

Nous avons présenté les premiers calculs décrivant la séparation de phases dans des

systèmes contenant des solutés impliqués dans les processus d'extraction liquide–liquide. Les

simulations ont révélé les comportements des différentes espèces et solvants lors des tous

premiers instants de la démixtion.

La démixtion à l'échelle de la centaine d'Ångstroms est extrêmement rapide (moins d'une

nanoseconde) et est principalement induite par les forces de cohésion des solvants, en

particulier celles de l'eau. La solvatation des différentes espèces y est moins importante que

dans les liquides non-mélangés. Les solutés qui ont présenté une forte activité interfaciale

dans les calculs de PFMs (Pic-, L1, L1.Cs+ - Chapitre 3) restent tout au long de la séparation

des phases au contact avec les deux solvants. Il est donc fort probable que la reconnaissance et

la capture des ions se font à la surface entre les deux liquides. Les solutés s'accumulent aux

interfaces, modifiant ainsi la structure et les propriétés de l'eau à celle-ci. Enfin, nous

suggérons que la diffusion des complexes vers le chloroforme soit due à la saturation de

l'interface lors de la démixtion. La surface de contact créée entre les deux solvants est

considérablement plus grande dans le système mélangé. Lorsque les deux phases sont

séparées, la surface de contact est alors fortement réduite et plus facilement saturée.

L'existence de monocouches de calixarènes 64-68 et autres ionophores 69-71, prouve

l'importance de la concentration des solutés à l'interface.

La prochaine étape de nos calculs va donc être la simulation de systèmes concentrés à

l'interface.

Page 138: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 124

6. Références du Chapitre

(1) K. E. Koenig; G. M. Lein; P. Stuckler; T. Kaneda; D. J. Cram; J. Am. Chem. Soc. 1979, 101,

3553.

(2) B. A. Moyer, Basic Principles of Extraction and Liquid-Liquid Systems Employing Cronw

Ethers and Related Metal-Ion Receptors; in Comprehensive Supramolecular Chemistry, Molecular

Recognition: Receptor for Cationic Guests; Atwood, J. L., Davies, J. E. D., McNicol, D. D., Vögtle, F.

and Lehn, J. M., Ed.; Pergamon: Elmsford, N. Y., 1996; Vol. 1, pp 325-365.

(3) P. R. Danesi; R. Chirizia; C. F. Coleman, The Kinetics of Solvent Extraction; in Critical

Reviews in Analytical Chemistry; Campbell , B., Ed.; CRC Press.: Boca Raton, Florida, 1980, pp 1.

(4) P. R. Danesi, Solvent Extraction Kinetics; in Principles and Practices of Solvent Extraction;

Rydberg, J., Musikas, C. and Choppin, G. R. M., Ed.; Dekker, M.: New York, 1992, pp 157-207.

(5) M. Lauterbach, "Simulation par Ordinateur de l'Extraction Liquide - Liquide des Cations

Alcalins par des Ionophores de Type Calixarène-Couronne et Valinomycine", Thèse, Université Louis

Pasteur,Strasbourg, 1997.

(6) I. R. McDonald; Mol. Phys. 1972, 24, 391-401.

(7) C. Hoheisel; K. Lucas; Mol. Phys. 1984, 53, 51-67.

(8) D. Möller; J. Oprzynski; A. Müller; J. Fischer; Mol. Phys. 1992, 75, 363-378.

(9) D. J. Tildesley; E. Enciso; P. Sevil la; Chem. Phys. Lett. 1983, 100, 508-514.

(10) D. Fincham; N. Quirke; D. J. Tildesley; J. Chem. Phys. 1986, 84, 4535-4546.

(11) D. Fincham; N. Quirke; D. J. Tildesley; J. Chem. Phys. 1987, 87, 6117-6119.

(12) W. Scott; F. Müller-Plathe; W. F. van Gunsteren; Mol. Phys. 1994, 82, 1049-1062.

(13) R. Gratias; H. Kessler; J. Phys. Chem. B 1998, 102, 2027-2031.

(14) I. I. Vaisman; M. L. Berkowitz; J. Am. Chem. Soc. 1992, 114, 7889-7896.

(15) V. A. Durov; I. Y. Shilov; J. Chem. Soc., Faraday Trans. 1996, 92, 3559-3563.

(16) H. Kovacs; J. Kowalewski; A. Laaksonen; J. Phys. Chem 1990, 94, 7378-7385.

(17) M. Matsumoto; Y. Takaoka; Y. Kataoka; J. Chem. Phys. 1993, 98, 1993.

(18) S. E. DeBolt; P. A. Kollman; J. Am. Chem. Soc. 1995, 117, 5316-5340.

(19) A. Wallqvist; J. Phys. Chem. 1991, 1991.

(20) A. Wallqvist; Chem. Phys. Lett. 1991, 182, 237-241.

(21) M. Schoen; C. Hoheisel; O. Beyer; Mol. Phys 1986, 58, 699-709.

(22) S. A. de Leeuw; B. Smit; C. P. Williams; J. Chem. Phys. 1990, 93, 2704-2714.

(23) W. L. Jorgensen; J. M. Briggs; M. L. Contreras; J. Phys. Chem. 1990, 94, 1683-1686.

(24) W. L. Jorgensen; J. Chandrasekhar; J. D. Madura; J. Chem. Phys 1983, 79, 926-936.

(25) M. W. Evans; J. Mol. Liq. 1983, 25, 211.

Page 139: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 125

(26) T. M. Chang; L. X. Dang; J. Phys. Chem. 1997, 101, 10518-10526.

(27) T. A. Darden; D. M. York; L. G. Pedersen; J. Chem. Phys. 1993, 98, 10089.

(28) J. M. Howel; A. M. Sapse; J. Chem. Phys. 1982, 86, 2345.

(29) J. J. Conti; D. F. Othmer; R. Gilmont; J. Chem. Eng. Dat. 1960, 5, 301.

(30) F. Eblinger; H. J. Schneider; J. Phys. Chem. 1996, 100, 5533-5537.

(31) X. Assfeld; J. Garapon; D. Rinaldi; M. F. Ruiz-Lopez; J. L. Rivail; J. Mol. Struc. Theochem

1996, 371, 107-116.

(32) G. Wipff; M. Lauterbach; Supramol. Chem. 1995, 6, 187-207.

(33) M. Lauterbach; G. Wipff, Liquid-Liquid Extraction of Alkali Cations by Calix[4]crown

Ionophores: Conformation and Solvent Dependent Na+ / Cs+ Binding Selectivity. A MD FEP Study in

Pure Chloroform and MD Simulations at the Water / Chloroform Interface.; in Physical

Supramolecular Chemistry; NATO ASI Series, E., L. and Kaifer A. Ed., Ed.; Kluwer Academic Pub.:

Dordrecht, 1996, pp 65-102.

(34) F. Arnaud-Neu; S. Barboso; F. Berny; A. Casnati; N. Muzet; A. Pinalli; R. Ungaro; M.-J.

Schwing-Weill; G. Wipff; J. Chem. Soc. Perkin Trans 2 1999, 1727-1738.

(35) L. Troxler; G. Wipff; J. Harrowfield; J. Phys. Chem. 1998, 102, 6821-6830.

(36) A. Schouten; J. A. Kanters; N. S. Poonia; Acta Cristallogr. C 1990, 46, 61-64.

(37) CRC Handbook of Chemistry and Physics; CRC Press.: Boca Raton: New York, 1998.

(38) Y. I. Naberukhin; V. A. Rogov; Rus. Chem. Rev. 1971, 40, 207.

(39) H. Kovacs; A. Laaksonen; J. Am. Chem. Soc. 1991, 113, 5596.

(40) D. L. Bergman; A. Laaksonen; Phys. Rev. E 1998, 58, 4706-4715.

(41) Y. Marcus; Y. Migron; J. Phys. Chem. B 1991, 95, 400.

(42) D. A. Armitage; M. J. Blandamer; M. J. Foster; N. J. Hidden; K. W. Morcom; M. C. R.

Symons; M. J. Wootten; J. Trans. Faraday Soc. 1968, 64, 1193.

(43) K. R. harris; P. J. Newitt; 103 1999.

(44) K. Schweighofer; I. Benjamin; J. Phys. Chem. 1995, 99, 9974-9985.

(45) H. H. Girault; D. J. Schiffrin, Electrochemistry of Liquid-Liquid Interfaces; in

Electroanalytical Chemistry; Brand, A. J., Ed.; Dekker, M.: New York, 1989, pp 1-141.

(46) F. Berny; N. Muzet; L. Troxler; G. Wipff, Simulations of Liquid-Liquid Interfaces: A Key

Border in Supramolecular Chemistry.; in Supramolecular Science: Where it is and Where it is going;

Ungaro R. and E., D., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1999, pp 95-125.

(47) F. Berny; N. Muzet; R. Schurhammer; L. Troxler; G. Wipff, Simulations of ions and

ionophores at a liquid-liquid interface: from adsorption to recognition.; in "Current Challenges in

Supramolecular Assemblies"; Tsoucaris, G., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1998, pp 221-

249.

(48) P. Beudaert; V. Lamare; J.-F. Dozol; L. Troxler; G. Wipff; Solv. Extr. Ion Exch. 1998, 16,

597-618.

Page 140: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 4 126

(49) A. N. Popov, Counterions and Adsorption of Ion-Exchange Extractants at the water/oil

Interface; in The Interface Structure and Electrochemical Processes at the Boundary Between two

Immiscible Liquids; Kazarinov, V. E., Ed.; Springer-Verlag: Berlin, 1987, pp 179-205.

(50) J. E. Randles; Discuss. Faraday Soc. 1957, 24, 194-199.

(51) G. A. Torrie; J. P. Valleau; J. Electoanal. Chem. 1986, 106, 69-79.

(52) I. Benjamin; Chem. Rev. 1996, 96, 1449-1475.

(53) M. A. Wilson; A. Pohorille; J. Am. Chem. Soc. 1996, 118, 6580-6587.

(54) I. Benjamin; J. Phys. Chem. B 1998, 102, 5145.

(55) A. R. van Buuren; S.-J. Marrink; H. J. C. Berendsen; Colloids and Surfaces 1995, 102, 143-

157.

(56) J. J. L. Cascales; J. G. L. Torre; S. J. Marrink; H. J. C. Berendsen; J. Chem. Phys. 1996, 104,

2713-2720.

(57) A. K. Laaksonen, O. G.; I. M. Svishchev; J. Phys. Chem. A 1997, 101, 5910-5918.

(58) T.-M. Chang; K. A. Peterson; L. X. Dang; J. Chem. Phys. 1995, 103, 7502-7513.

(59) W. L. Jorgensen; N. A. McDonald; M. Selmi; P. R. Rablen; J. Am. Chem. Soc. 1995, 117-,

11809-11810.

(60) V. P. Sokhan; D. J. Tildesley; Faraday Discuss. 1996, 104, 193-208.

(61) P. E. Smit; W. F. van Gunsteren, Methods for Evaluation of Long Range Electrostatic Forces

in Computations of Molecular Systems; in Computer Simulations of Biomolecular Systems; van

Gunsteren, W. F., Weiner, P. K. and Wilkinson, A. J., Ed.; ESCOM: Leiden, 1993, pp 182-212.

(62) B. A. Luty; M. E. Davis; I. G. Tironi; W. F. van Gunsteren; Molecular Simul. 1994, 14, 11-20.

(63) J. Hautman; M. L. Klein; Mol. Phys. 1992, 75, 379-395.

(64) Y. Ishikawa; T. Kunitake; T. Matsuda; T. Otsuka; S. Shinkai; J. Chem. Soc., Chem. Com.

1989, 736-737.

(65) L. Dei; A. Casnati; P. Lo Nostro; P. Baglioni; Langmuir 1995, 11, 1268-1272.

(66) M. Carlà; C. M. C. Gambi; P. Baglioni; J. Phys. Chem. B 1996, 100, 11067-11071.

(67) L. Dei; A. Casnati; P. Lo Nostro; A. Pochini; R. Ungaro; P. Baglioni; Langmuir 1996, 12,

1589-1593.

(68) P. Lo Nostro; A. Casnati; L. Bossoletti; L. Dei; P. Baglioni; Coll. Surf. A: Phys Eng. Asp.

1996, 116, 203-209.

(69) P. R. Danesi; R. Chiarizia; M. Pizzichini; A. Saltelli; J. Inorg. Nucl. Chem. 1978, 40, 1119-

1123.

(70) N. H. Sagert; W. Lee; M. J. Quinn; Can. J. Chem. 1979, 57.

(71) H. Rapaport; I. Kuzmenko; K. Kjaer; P. Howes; W. Bouwman; J. Als-Nielsen; L. Leiserowitz;

M. Lahav; J. Am. Chem. Soc. 1997, 119, 11211-11216.

Page 141: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

PPRREEMMIIEERREE PPAARRTTIIEE

CHAPITRE 5

COMPORTEMENT INTERFACIAL

DE MONOCOUCHES ET

BICOUCHES DE

CALIX [4]ARENES-COURONNE6ET LEURS COMPLEXES

Simulations of Liquid-Liquid Interfaces: A Key Border in Supramolecular Chemistry.in "Supramolecular Science: Where it is, and where it is going" NATO ARW Lerici; 1999,

R. Ungaro, E. Dalcanale Ed.; Kluwer Acd. Pub., Dordrecht pp 95-125.

Interfacial Features of Assisted Liquid-Liquid Extraction of Uranyl and Cesium Salts: AMolecular Dynamics Investigation.

in "Calixarenes for Ion Extraction"; ACS Publication, sous presse, 1999

Page 142: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 127

Comportement interfacial de monocouches et

bicouches de calix[4]arènes-couronne6 et

leurs complexes.

1. Introduction

Nous avons suggéré dans le chapitre précédent que l'extraction vers la phase organique

des complexes de calixarènes peut être due à une saturation de l'interface lors de la séparation

des phases. Au cours de la démixtion, la diminution considérable de la surface interfaciale sur

laquelle se sont concentrés les ligands libres, les complexes, et les autres molécules

amphiphiles, fait que certaines d'entre elles se retrouvent expulsées de l'interface vers la phase

organique, dont l'énergie de cavitation est généralement inférieure à celle de l'eau.

Nous allons donc augmenter la concentration à l'interface des calixarènes, et nous

intéresser au comportement interfacial de ces assemblées, ligands L1 libres ou complexés, et

des anions Pic-. Nous appellerons "monocouche" un ensemble de molécules placées sur

l'interface eau–chloroforme de manière à essayer de couvrir l'ensemble de la surface de

contact entre les deux liquides.

Expérimentalement, un certain nombre d'études se sont attachées à caractériser de telles

concentrations aux interfaces, utilisées pour l'extraction liquide-liquide ou le transport à

Page 143: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 128

travers de membranes. Des molécules comme le TBP (tri-n-buylphosphate) 1, les éthers-

couronnes 2,3, les acides phosphorylés 4 ou les cryptands 222 5 ont été étudiés aux interfaces

liquide-liquide. Les mesures des tensions de surface à différentes températures et à différentes

concentrations, les calculs d'énergies et d'enthalpies libres d'adsorption, permettent de

caractériser le comportement de ces espèces.

L'activité interfaciale est définie par l'équation d'adsorption de Gibbs:

..., 1ln

1

CTii CRT

∂−=Γ σ

où Γi est l'excès à la surface du composé i, R la constante universelle des gaz, T la

température absolue, σ la tension interfaciale, et Ci la concentration du composé i dans le

liquide massique

Danesi et coll. ont montré, à partir de la détermination de Γi, que les dibenzo-18-C-6 se

concentraient à l'interface eau-benzène et y formaient des complexes avec K+ 2. Vandergrift et

coll. 4 ont fait les constatations suivantes pour l'étude des acides phosphorylés:

- plus l'interaction de l'extractant avec la phase aqueuse est forte, plus l'activité

interfaciale Γi de cette molécule est grande.

- plus l'interaction de l'extractant avec la phase organique est forte, plus l'activité

interfaciale Γi de cette molécule est faible.

- plus la température est élevée, plus l'activité interfaciale Γi de l'extractant est faible.

- plus l'interaction de l'extractant avec les solvants est forte, moins la température

intervient sur l'activité interfaciale Γi .

Des méthodes spectroscopiques se sont développées, dont la diffraction-X à incidence

rasante, utilisée, par exemple, pour l'étude de la structure des complexes de valinomycine.K+

et de nonactine.K+ en monocouches à l'interface eau-air 6.

Des systèmes avec des calixarènes ont été étudiés par Kunitake et coll. 7 ainsi que par

Baglioni et coll. 8-10. Une solution de dichlorométhane contenant des calixarènes est projetée

sur une interface eau-air, les ionophores se retrouvent adsorbés.

La surface du système est mesurée lors de compressions discontinues de l'interface

(vitesse = 5 cm2.min-1). En divisant l'aire par le nombre de molécules présentes, ils définissent

la surface par molécule adsorbée.

Page 144: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 129

Figure 1: orientations perpendiculaires et parallèles du p-t-butylcalix[6]arène à l'interfaceeau-air. Figure reproduite de la ref. 8.

Kunitake et coll. 7 ont étudié les calix[n]arène-ester (n = 4, 6 ou 8) et ont utilisé la surface

moléculaire pour déterminer la sélectivité de complexation. Le calix[4]-ester possède une

surface de l'ordre de 116 Å2.molec-1. Lorsque le sel KCl est ajouté dans l'eau, la surface

moléculaire ne varie pas, par contre, lorsqu'il s'agit de NaCl, la surface par molécule passe à

plus de 250 Å2.mol-1: il y a donc complexation. Ces résultats sont conformes à la sélectivité

de ces molécules pour les ions alcalins (Li+ < Na+ > K+ > Rb+).

Baglioni et coll. ont effectué les mêmes types de mesures sur les calix[n]arènes (n = 6 ou

8) à l'interface eau-air 8-10. Ils suggèrent que la compression de la monocouche de ligands

libres provoque une réorientation des molécules adsorbées, d'une position parallèle à

l'interface à une position perpendiculaire (Figure 1). Lorsque des sels (KCl, NaCl, CsCl) sont

ajoutés à la phase aqueuse, les surfaces par molécule mesurées augmentent, particulièrement

pour Cs+, dont les complexes ne prennent alors plus de position perpendiculaire 8.

Les deux principales interprétations de ces augmentations de surfaces moléculaires sont,

d'une part, que le complexe n'a pas la même liberté conformationnelle que le ligand libre, et

d'autre part, que les forces répulsives électrostatiques des cations complexés empêchent les

molécules de se rapprocher lors de la compression de l'interface.

La dynamique moléculaire a permis l'étude de nombreux systèmes concentrés à l'interface.

En particulier, les membranes mimant des systèmes biologiques ont été considérablement

Page 145: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 130

étudiées, que ce soit par des modèles de Lennard-Jones 11,12, ou par des systèmes où les

atomes sont représentés de manière explicite 13-16.Un certain nombre de molécules utilisées

pour l'extraction liquide-liquide ont été simulées au laboratoire MSM à fortes concentrations

aux interfaces. Les TBP peuvent former des monocouches à l'interface eau-chloroforme 17,18,

tandis qu'un agrégat de molécules comme l'éther-couronne 18-C-6 initialement placé à

l'interface, se sépare entre molécules restant adsorbées et molécules ayant diffusées dans la

phase organique. 19.

Il n'y a pas à notre connaissance, de simulation sur les calixarènes concentrés à l'interface,

comme nous allons le faire dans ce chapitre.

Nous avons classé nos résultats en deux grandes parties: la première concerne l'étude des

calix[4]arène-couronne6 L1 et de ses complexes (L1.Cs+ avec Pic- ou Cl- comme contre-ion),

en observant en particulier le comportement de ces molécules lorsqu'elles sont concentrées à

l'interface. La structure de l'ensemble est-elle ordonnée ? Quelles sont les possibilités de

mouvement et de rotation ? Le comportement interfacial des molécules assemblées est-il

différent de celles isolées ? Y a-t-il saturation de l'interface par toutes ces molécules ? Les sels

dilués dans la phase aqueuse ont-ils une influence sur le comportement de molécules

adsorbées ? Enfin, l'extraction a-t-elle lieu pour certains des complexes ?

La seconde partie est consacrée à la saturation de l'interface par les ligands L1, en

monocouches ou bicouches, c'est-à-dire en deux couches parallèles à l'interface. Est-il

possible de couvrir totalement la surface de contact entre les deux solvants ? Quelles

interactions peuvent avoir les calixarènes de la seconde couche avec ceux de la première ou

avec l'eau ? Y a-t-il des échanges dynamiques entre les couches ?

Page 146: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 131

2. Méthodes

2.1. Equilibration des systèmes

L'augmentation du nombre de solutés à l'interface pose un problème de densité pour les

solvants. En effet, lors de la construction du système à simuler, une boîte de chloroforme est

juxtaposée à une boîte d'eau. Le soluté est placé au centre d'un parallélépipède et toutes les

molécules de solvants à moins de 2 Å sont retirées. Dans le cas des monocouches de

calixarènes L1 à l'interface, nous nous retrouvons dans une situation où il y a trop peu de

molécules d'eau et de chloroforme entre les solutés (voir Figure 2 – zone grisée). L'accès à

cette zone aux molécules de solvant est gêné par la densité des calixarènes. Cette

configuration reste après la minimisation de mécanique moléculaire qui précède la

dynamique.

Figure 2: boîte initiale après minimisation énergétique d'une monocouche de 9ligands L1 en 3 colonnes à l'interface eau–chloroforme. La zone grisée ne contientaucune molécule de solvant.

Dès que la dynamique commence , les molécules bougent, les solvants se réorganisent et

dans le liquide massique, ils n'ont plus la densité requise. Afin de corriger ce problème, nous

effectuons, après la minimisation, une dynamique à volume constant de 20 à 50 ps, où tout le

soluté est maintenu fixe par l'application de l'option BELLY d'AMBER (Chapitre 2 § 4.6).

Cela permet aux solvants de s'intercaler dans le vide de l'interface. Suit une dynamique de 10

Page 147: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 132

à 15 ps à pression constante afin que le système ajuste les tailles de boîtes et permette aux

solvants d'avoir les bonnes densités. Une fois celles-ci contrôlées, la dynamique proprement

dite peut commencer.

2.2. Conditions de simulations

Les systèmes simulés sont nommés a à h, et sont composés d'une monocouche (une seule

couche de ligands/complexes à l'interface) ou une bicouche (une couche à l'interface, une

seconde adjacente dans le chloroforme). Les conditions de simulation pour tous les systèmes

sont reportées dans le Tableau 1.

Soluté Cut-offÅ

Taille boîteÅ3

Mol. Solvantsclf / eau

Temps h

ps

9 L1 + 9 (Cs+Pic-) a a 12 47 × 45 × 67 488 / 2493 1100

9 L1.Cs+Pic- b 12 48 × 46 × 69 494 / 2252 1050

9 L1.Cs+Pic- inversés b c 12 47 × 45 × 69 485 / 2187 800

7 L1.Cs+Pic- inversés c d 12 46 × 44 × 75 528 / 2220 1100

9 L1.Cs+Pic- +1 L1.Cs+Pic- clf d e1 12 47 × 52 × 79 734 / 2673 1280

9 L1.Cs+Pic- +1 L1.Cs+Pic- eau e e2 12 47 × 52 × 80 572 / 3515 380

9 L1.Cs+Cl- f 12 46 × 45 × 69 473 / 2163 1325

9 L1.Cs+Pic- + 8 L1+ 5 (Cs+Pic-) f

g 12 48 × 46 × 95 636 / 3141 1630

15 L1 h 12 47 × 44 × 67 456 / 1913 1150

18 L1 g i 12 32 × 28 × 86 247 / 833 1900a L1 à l'interface, sels dans l'eau.b couronne + cation dirigés vers le chloroforme.c couronne + cation dirigés vers le chloroforme. Pic- 5 Å plus loin dans le chloroforme.d monocouche de 9 L1.Cs+Pic- + 1 L1.Cs+Pic- dans le chloroforme.e monocouche de 9 L1.Cs+Pic- + 1 L1.Cs+Pic- dans l'eau.f monocouche de 9 L1.Cs+Pic- + 8 L1 dans le chloroforme en seconde couche + 5(Cs+Pic-) dans l'eau.g monocouche de 9 L1 + seconde couche de 9 L1.h le temps indiqué comptabilise les dynamiques d'équilibration (voir § 2.1).

Tableau 1: conditions de simulations

Page 148: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 133

Les temps de simulation sont, en moyenne pour les monocouches de 960 s CPU / 1 ps sur

une SGI Origin 200[2p] (ou 230 s CPU / 1 ps sur SGI Origin 2000[8p]) et de 900 s CPU / 1 ps

sur SGI Origin 2000[8p] pour les bicouches.

2.3. Calculs des aires moléculaires.

Nous avons vu dans l'introduction que la surface par molécule est un indice utilisé par les

expérimentateurs pour définir l'existence de complexes, ou l'orientation des molécules.

Dans nos simulations, nous pouvons également déterminer la surface moyenne par

molécule. Elle est calculée de la manière suivante:

- toutes les molécules dont le centre de masse se trouve à l'interface ± 10 Å, sont

projetées sur le plan x × y . Le rayon des atomes correspond au rayon ionique 20 (voir

Figure 3) .

- la surface restant accessible aux solvants (en %) est déterminée comme étant le vide

laissé entre les molécules projetées. L'interface est saturée lorsque cette valeur est

minimale.

- la surface moléculaire des calixarènes est calculée en ne tenant plus compte des autres

molécules surfactantes (comme Pic-). La surface de la boîte x × y, occupée par les

ligands/complexes, est divisée par le nombre de calixarènes présents à l'interface, ce

qui donne le coefficient A exprimé en Ų/molécule.

Ces calculs sont effectués sur trois périodes de 5 ps, à 20 ps d'intervalle, dans les 100

dernières ps de la dynamique. Ces estimations n'ont été faites que sur un petit nombre de

systèmes caractéristiques (a, g, h et i), car elles sont, en grande partie, manuelles (traitement

d'image à l'aide de Photoshop™ ) et relativement longues à effectuer.

Page 149: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 134

Figure 3: exemple de projection sur le plan de l'interface des molécules comprises entre +10et -10 Å selon l'axe z (gauche). La surface d'accès aux solvants est la surface blanche. Lasurface moléculaire des calixarènes est calculée sans prendre compte les picrates (grisés).A droite: p-tert-butylcalix[6]arène comme dans la ref. 8. La surface calculée est de 165Å2/molec. Celle de la réf. 8 est de 260 Å2/molec. A titre de comparaison la surface du carrécontenant le calix[6] (droite) est de 260 Å2.

A titre de comparaison, nous avons calculé de la même manière la surface du p-tert-

butylcalix[6]arène dans sa conformation cône (utilisée par Baglioni et coll. 8). Nous obtenons

165,5 Ų/molec. pour l'orientation parallèle et 82,8 Ų/molec. pour l'orientation

perpendiculaire, soit dans les deux cas, exactement 100 Ų/molec. de moins que les valeurs

données dans la référence 8. Nous pouvons voir ce que 260 Ų représentent dans notre cas sur

la Figure 3 – droite: c'est la surface du carré contenant le calix[6]arène. Cette surface constitue

le proche voisinage de la molécule, sa couche de solvatation, le volume moyen où il peut se

mouvoir.

Page 150: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 135

3. Résultats 1 ère Partie : Concentration à l'Interface

Dans cette première partie, nous étudierons ce qui se passe lorsque nous augmentons la

concentration des complexes ou des ligands à l'interface. Y a-t-il formation de monocouches ?

L'interface est-elle saturée, c'est à dire la concentration maximale de solutés à l'interface est-

elle atteinte ? Enfin, est-ce que l'augmentation du nombre des complexes provoque

l'extraction dans la phase organique ?

Les résultats sont présentés sous forme de courbes d'énergies en fonction du temps et de

courbes de distances par rapport à l'interface. Celle-ci est toujours située en z = 0. Les valeurs

de z négatives indiquent que le soluté se trouve dans le chloroforme, les valeurs positives que

le soluté est dans l'eau. Les courbes sont lissées afin de les rendre plus lisibles. Les profils de

densités sont toujours calculés sur la totalité de la dynamique, hors équilibration, et ne sont

pas lissés.

3.1. Simulation a : 9 ligands libres à l'interface + 9 sels Cs +Pic -

dans l'eau.

Initialement, les 9 ligands libres sont placés à l'interface et les sels Cs+Pic- sont dans la

phase aqueuse, situés à l4 Å de l'interface (voir Figure 5 –en haut à gauche). Il faut rappeler

que la valeur de z = 0 pour l'interface est en fait la surface de séparation de Gibbs (Chapitre 2

§ 7.2.1). L'interface ayant une épaisseur de 5 à 7 Å en moyenne, les sels placés initialement à

14 Å dans l'eau sont en contact dans leur sphère de cut-off avec des molécules de

chloroforme.

Durant toute la simulation, les solutés restent dans une zone précise sans grande

fluctuation. Les Cs+ se placent au centre de la tranche d'eau (entre z = 7 et z = 36 Å). Les

calixarènes L1 sont ancrés à l'interface entre z = -8 et 0 Å (Figure 4) montrant ainsi qu'ils sont

bien dans un puits de potentiel 21 coté chloroforme. La distance moyenne à l'interface pour les

neuf ligands est de –3,9 Å.

Page 151: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 136

L'axe des ligands n'est jamais parallèle à l'interface: les calixarènes oscillent entre une

position perpendiculaire et une position intermédiaire entre 0 et 90° (angle à la normale du

plan avec axe C4 des 4 cycles aromatiques - Figure 4 - droite).

-10

-5

0

5

0 200 400 600 800 1000

Dis

tan

ces

(Å)

Temps (ps)

Eau

Chloroforme

0

20

40

60

80

100

0 200 400 600 800 1000

An

gle

(°)

Temps (ps)

parallèle

perpendiculaire

Figure 4: simulation a: 9 L1 + 9 Cs+Pic- - distances à l'interface (gauche) et angles des calixarènes(axe C4 des 4 aromatiques) par rapport à la normale au plan de l'interface (droite) en fonction dutemps pour les 9 ligands L1. Chaque courbe correspond à un calixarène. Les deux ligneshorizontales à droite correspondent aux positions parallèles ou perpendiculaires à l'interface.Rappel: les valeurs de z <0 signifient: dans le chloroforme. z > 0 signifie: dans l'eau.

Seuls les anions Pic- oscillent entre l'interface et l'eau massique. Après 1 nanoseconde,

deux empilements de type π impliquent respectivement deux et trois Pic- dans la phase

aqueuse (Figure 5). Comme observé dans les démixtions du Chapitre 4 et dans des

simulations effectuées par F. Berny sur des sels (Cs+Pic-)10 à l'interface 18, ces empilements

restent dans l'eau tant qu'ils sont entourés de cations Cs+. Seuls trois anions s'adsorbent dont

deux sur l'interface périodique.

Il ne se produit aucune complexation spontanée dans cette simulation. Cependant, il faut

remarquer que l'une des paires de Pic- se rapproche suffisamment de l'interface (voir Figure 6)

pour que l'un des Cs+ qui l'entoure se trouve à moins de 5 Å des oxygènes de coordination du

ligand L1. Les Pic- attirent ainsi des cations vers l'interface alors qu'ils en sont généralement

repoussés 22,21,23,24.

Page 152: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 137

chloroforme eau

0

1

2

3

-40 -20 0 20 40

L1

Cs+

Pic-

Z (Å)

C hloroform e Eau

Position initiale 0 ns Profils de densités des solutés

1 ns

Figure 5: simulation a: 9 L1 + 9 Cs+Pic-. Images instantanées à 0 ns et à 1 ns (eau à gauche etchloroforme à droite, séparés pour plus de clarté). Profils de densités des ligands libres L1, des Cs+

et Pic- en fonction de z (haut droite). Rappel: les profils de densités sont calculés sur l'ensemble dela simulation

0

20

40

60

80

0 200 400 600 800 1000

C s+

Temp s (ps)

Eau

Chloroform e

0

20

40

60

80

0 200 400 600 800 1000

Pic-

Temp s (ps)

Figure 6: simulation a: 9 L1 + 9 Cs+Pic- - distances à l'interface (z = 0) en fonctiondu temps pour les cations Cs+ et les anions Pic-.

Page 153: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 138

L'occupation de l'interface est loin d'être totale. Le solvant a accès à environ 60 % de

la surface (Figure 7). Seuls deux anions Pic- sont adsorbés à la même interface que les ligands

libres. Nous avons calculé que la surface interfaciale par calixarène est de 84,8 Ų/molec.

Figure 7: simulation a: 9 L1 + 9 Cs+Pic- - position initiale de face (gauche) – projection des rayonsioniques sur le plan x ×× y des molécules situées à l'interface à 1 ns de dynamique (droite).Surface d'accès du solvant: 60% . A = 85 Ų/molec. Voir § 2.3 pour les explications

3.2. Simulation b : 9 complexes L1.Cs +Pic - à l'interface

Dans ce système, 9 complexes sont placés initialement à l'interface, cations dans la

couronne coté eau et anions à l'interface (Figure 8). La position de chaque complexe est la

même que celle du L1.Cs+Pic- au début du PFM (Chapitre 3).

Durant toute la durée de la simulation, les complexes restent à l'interface dans une tranche

d'environ 17 Å d'épaisseur (voir Figure 8). Les Cs+ sont en moyenne à –1,5 Å de l'interface et

les centres de masse des calixarènes à –3,1 Å. A titre de comparaison, la distance du centre de

masse à l'interface de L1 au minimum du PFM (Chapitre 3) était de –4,1 Å. Il semble donc,

que malgré la concentration, il existe toujours un puits de potentiel à de l'interface.

Il ne se produit pas d'extraction vers la phase organique. La surface du plan x × y à

l'interface n'est occupée qu'à environ 42 % par les complexes et Pic-.

Page 154: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 139

chloroforme eau

0

0.5

1

1.5

2

2.5

-20 -10 0 10 20

L1

Cs+

Pic-

Z (Å)

EauC hloroform e

Position initiale 0 ns Profils de densités des solutés

1 ns

Figure 8: simulation b: 9 L1Cs+Pic- - Images instantanées à 0 ns et à 1 ns (eau à gauche etchloroforme à droite, séparés pour plus de clarté). Profils de densités des ligands L1, des Cs+ et Pic-

en fonction de z (haut droite). Rappel: les profils de densités sont calculés sur l'ensemble de lasimulation.

Une majorité de calixarènes est perpendiculaire à l'interface. Ceci est probablement dû au

fait qu'il se forme des séries d'empilements π successifs entre les calixarènes et les Pic-: un

cycle aromatique de L1 en interaction avec un Pic-, lui-même en interaction avec un cycle

aromatique d'un autre L1 (voir Figure 9 - droite). Cette configuration réduit la mobilité de

l'ensemble des molécules à l'interface.

Il n'y a pas de grande différence entre les monocouches de ligands libres (simulation a) et

de complexes à l'interface. Seule la distance moyenne pour les 9 L1 libres est plus longue de

Page 155: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 140

±1 Å par rapport aux complexes L1.Cs+Pic-. Ce résultat est conforme aux PFMs de M.

Lauterbach, le complexe étant plus tensio-actif que le ligand libre.

Figure 9: simulation b: 9 L1.Cs+Pic- - position initiale de face (gauche) – projection des rayonsioniques sur le plan x ×× y des molécules situées à l'interface à 1 ns de dynamique (droite).Surface d'accès du solvant estimée: 58% . A ≈ 84 Ų/molec.

3.3. Simulation c : 9 complexes L1.Cs +Pic - "inversés" à l'interface

Lors de la simulation b, il ne se produit pas d'extraction vers la phase aqueuse. L'attraction

du complexe L1.Cs+ à l'interface est principalement due aux interactions Cs+-eau, le cation

n'étant pas entièrement protégé du solvant aqueux par la couronne. Que peut-il se passer si le

complexe est dans une position inversée, où la couronne et le cation sont dirigés vers le

chloroforme, pas directement au contact de l'eau ? Dans ce cas, les complexes devraient donc

avoir des interactions beaucoup plus faibles avec la phase aqueuse.

Dans cette simulation c, les complexes ont initialement subi une rotation de 180° par

rapport au plan de l'interface et sont maintenant orientés vers le chloroforme (voir Figure 12 –

haut gauche). Si les Cs+ ne sont pas en contact direct avec la phase aqueuse lors de

l'équilibration du système, un certain nombre de molécules d'eau se sont insérées

profondément dans l'interface afin d'hydrater ces cations. Les Pic- sont placés initialement à

l'interface, légèrement du coté chloroforme.

Page 156: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 141

La plupart des complexes se retournent en moins de 250 ps et s'orientent couronne +

cation en direction de la phase aqueuse (Figure 10) comme dans la simulation b. Seul le

L1.Cs+Pic- n° 7 reste orienté dans sa direction initiale tout au long de la dynamique. Il

descend jusqu'à z = -9 Å dans le chloroforme (Figure 10 - droite), avant de finalement revenir

dans la zone où se situent les autres complexes (Figure 12 - 650 ps et 750 ps).

0

40

80

120

160

200

0 200 400 600 800

an

gle

(°)

Te mp s (ps)

i

i-10

-5

0

5

10

0 200 400 600 800

Dis

tan

ce

)

Temp s (ps)

C hloroform e

Eau

Figure 10: simulation c: 9L1.Cs+Pic- inversés - comportements des complexes à l'interface: anglesdes ligands par rapport à la normale à l'interface (gauche) et distance du centre de masse du ligandà l'interface (droite). Les symboles signifient: — ligand parallèle à l'interface. † ligandperpendiculaire à l'interface. Les courbes du ligand n° 7 sont repérées.

Le Pic- n°7 est le seul anion qui ne retourne pas à l'interface. Il perd le contact avec la phase

aqueuse dès les premières picosecondes et migre régulièrement dans le chloroforme (Figure

11)

- 2 5

- 2 0

- 1 5

- 1 0

- 5

0

5

1 0

0 2 0 0 4 0 0 6 0 0 8 0 0

Dis

tan

ce

)

T e m p s ( p s )

E a u

C h lo r o f o rm e

Figure 11: simulation c: 9L1.Cs+Pic- inversés - distances des centres de massedes Pic- à l'interface au cours du temps. Le Pic- n°7 ne rejoint pas l'interface.

Page 157: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 142

chloroforme eau

0

0.5

1

1.5

2

-20 -10 0 10 20

L1

Pic-

Cs+

Z (Å )

Ea uChloroform e

Position initiale 0 ps Profils de densités des solutés

650 ps

750 ps

Figure 12: simulation c: 9L1.Cs+Pic- inversés - Images instantanées à 0 ps, 650 ps et à 750 ps (eau àgauche et chloroforme à droite, séparés pour plus de clarté). Profils de densités des ligands libresL1, des Cs+ et Pic- en fonction de z sur toute la dynamique (haut droite)

Comme le montrent la Figure 12 et la Figure 13, le Pic- n°7 est en interaction avec le

cation du complexe. Ses oxygènes de coordination, désolvatés, interagissent avec le Cs+ à

Page 158: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 143

courte distance, ce qui empêche le complexe de retourner à l'interface. Le cation est de plus

coordiné à une molécule d'eau dans la couronne du L1.

Cependant, il n'y a pas extraction. Deux phénomènes vont permettre au complexe L1.Cs+

de revenir à l'interface après 750 ps de dynamique (Figure 12 - 750 ps & Figure 13).

D'une part, nous avons vu que les L1 libres dans toutes les démixtions de mélanges

"réalistes" revenaient à l'interface, même en position inversée, comme c'est le cas ici, à cause

des interactions du complexe avec l'eau. D'autre part l'un des cycles aromatiques du ligand

n°7 fait un empilement π avec un picrate (le n° 4) lui même en interaction avec un cycle

aromatique d'un second calixarène (le n° 5). Ce double empilement ne casse pas pendant plus

de 500 ps et empêche le complexe n°7 de véritablement quitter l'interface. Malgré l'adsorption

du L1.Cs+, le Pic- n°7 reste dans le chloroforme.

-25

-20

-15

-10

-5

0

5

0 200 400 600 800

L1.Cs+P ic

- n ° 7

P ic-

Cs+

L1

Dis

tan

ce

)

Temps (ps)

C hloroform e

Eau

i

Figure 13: simulation c: 9L1.Cs+Pic- inversés - Distances du centre de masse du ligand L1 n° 7, duPic- n° 7 et du cation Cs+ à l'interface au cours du temps (gauche). Image instantanée de cesmolécules à 550 ps (droite). L'un des cycles aromatiques du ligand n°7 fait un empilement ππ avecun picrate lui même en interaction avec un cycle aromatique d'un second calixarène (droite).

Page 159: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 144

- 6 0

- 4 0

- 2 0

0

2 0

5 0 0 5 5 0 6 0 0 6 5 0 7 0 0 7 5 0

kc

al/

mo

l

T e m p s ( p s )

L 1 C s + 7 - L 1 C s + 5

L 1 C s + - e a u

L 1 C s + 7 - P ic 4

L 1 C s + 7 - P ic 7

Figure 14: simulation c: 9L1.Cs+Pic- inversés - énergies d'interactions (kcal/mol)entre le complexe L1.Cs+ n° 7 avec le Pic- n° 7, le Pic- n° 4, le complexe n° 5 etl'eau. Courbes en fonction du temps.

Les énergies d'interactions totales des deux Pic- avec le complexe n°7 sont relativement

proches: -45 kcal.mol-1 pour le n° 4 qui le retient à l'interface (voir Figure ci-dessus courbe

L1.Cs+7-Pic4) et –55 kcal.mol-1 pour le n° 7 qui l'attire dans le chloroforme (courbe L1.Cs+7-

Pic7). L'eau fait ici la différence, avec une énergie d'environ –20 kcal.mol-1 qui attire le

complexe vers elle (courbe L1.Cs+-eau).

La situation finale de la dynamique est relativement proche de celle de la simulation b,

avec une interface non-saturée, dont l'accès au solvant est dans le même ordre de grandeur

que pour les autres simulations de 9 calixarènes à l'interface, soit environ 55 %.

Il apparaît donc que, malgré l'espace disponible, malgré les positions initiales différentes,

la structure moyenne finale est identique, et correspond probablement à un minimum

thermodynamique.

3.4. Simulation d : 7 complexes L1.Cs +Pic - inversés à l'interface

Dans le cas précédent, l'extraction semble ne pas s'être produite en raison des attractions

des autres solutés adsorbées à l'interface. Le système est-il trop concentré ? Que se serait-il

Page 160: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 145

passé si le Pic- n° 4 n'avait pas été là pour retenir le calixarène ? Pour répondre à cette

question, la simulation d est moins concentrée et débute avec 7 complexes à l'interface dont

les Pic- sont dans le chloroforme face au cations Cs+ (voir Figure 15).

chloroforme eau

-15

-10

-5

0

5

10

0 200 400 600 800 1000

Pic-

Dis

tan

ce

)

Temps (ps)

Eau

Chloroforme

Position initiale 0 ps Distances des Pic- à l'interface

950 ps

Figure 15: simulation c: 7 L1.Cs+Pic- - Images instantanées à 0 ps et à 950 ps (eau à gauche etchloroforme à droite, séparés pour plus de clarté). Distances à l'interface des centres de masse desPic- en fonction du temps (haut droite).

Très rapidement les calixarènes se retournent et les Pic- rejoignent l'interface. Il n'y a ni

extraction, ni attraction du type anion/cation comme précédemment. L'interface n'est pas

saturée, la surface d'accès au solvant est de l'ordre de 65 %.

Page 161: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 146

3.5. Simulations e: 9 complexes L1.Cs +Pic - inversés à l'interface +1 coté eau ou coté chloroforme

Dans les simulations précédentes, l'interface n'est pas saturée. Que se passe-t-il si un

dizième complexe est rajouté, soit dans l'eau, soit dans le chloroforme? Va-t-il revenir à la

surface s'adsorber ? Pour les deux simulations e1 et e2, la position des 9 calixarènes placés

initialement à l'interface est celle obtenue en fin de dynamique pour la simulation b (9

L1.Cs+Pic-).

- Pour le calcul e1, un complexe L1.Cs+Pic- est placé au départ dans le chloroforme à

une distance cation - interface de 13 Å.

- Pour le calcul e2, un complexe L1.Cs+Pic- est placé intialement à la même distance

coté eau.

Très rapidement les deux complexes amorcent un mouvement vers l'interface. La vitesse

du retour est différente selon les cas. Pour e2, le complexe initialement dans l'eau revient

rapidement (moins de 250 ps) à l'interface où il s'insert parallèlement à la surface (Figure 16 -

droite). Dans le cas e1, le retour est régulier mais beaucoup plus lent (plus de 1 ns). Il n'y a

pas, comme dans la simulation d (9 L1.Cs+Pic- inversés, § 3.3), d'attraction particulière entre

le Pic- et le cation. L'anion reste dans la phase organique et ne rejoint pas l'interface (Figure

16 – gauche à 1100 ps).

Ces résultats sont en accord avec ceux du PFM du Chapitre 3. En effet, l'énergie libre

augmente de part et d'autre du minimum situé à coté de l'interface. La pente de la courbe est

forte en allant vers l'eau, et dans la simulation e2, le complexe initialement dans la phase

aqueuse revient s'adsorber en moins de 250 ps. Coté chloroforme, l'énergie libre à 15 Å de

l'interface est du même ordre de grandeur qu'au maximum coté eau, mais la pente de la courbe

est plus douce. Le complexe n° 10 dans la simulation e1 prend plus d'une nanoseconde pour

revenir s'adsorber à l'interface.

Page 162: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 147

Coté chloroforme - e1 Coté eau - e2

Position initiale 0 ps Position initiale 0 ps

1100 ps 250 ps

-20

-15

-10

-5

0

5

0 400 800 1200

Dis

tan

ces

(Å)

Temps (ps)

-10

-5

0

5

10

15

0 50 100 150 200 250

Dis

tan

ces

(Å)

Temps (ps)

Figure 16: simulations e1 (gauche) et e2 (droite). Images instantanées des positions initiales (haut)et finales (milieu) pour les deux systèmes. Courbes des distances des centres de masse de tous lesligands L1 à l'interface. Le ligand n° 10 est dans les deux cas en trait plein.

Page 163: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 148

Lors de la simulation e1, la décomplexation d'un cation se produit vers 1 ns. Le Cs+ n° 8

s'échappe de la couronne du ligand et rejoint immédiatement la phase aqueuse. En fait, le

complexe initialement placé dans le chloroforme (n° 10), lorsqu'il se rapproche de l'interface,

entre en contact avec les molécules déjà présentes. Il va modifier leur agencement, et

provoquer des répulsions électrostatiques qui vont amener le départ du cation n° 8.

En effet, entre 700 et 800 ps, les complexes n° 8 et 10 sont côte-à-côte, l'un à l'interface, le

second juste en dessous dans le chloroforme. Le complexe n° 10 revient au contact de la

phase aqueuse aux environs de 900 ps. Dans le même temps, le ligand n° 8 amorce un

mouvement vers le chloroforme et ses interactions avec le cation diminuent (Figure 18). A 1

nanoseconde, le Cs+ n° 8 décomplexe (Figure 16 – gauche milieu & Figure 17).

0

1 0

2 0

3 0

0 2 0 0 4 0 0 6 0 0 8 0 0 1 0 0 0

C s - L 1 n ° 8

Dis

tan

ce

(Å)

T e m p s ( p s )

- 1 0

0

1 0

3 0

L 1 n ° 1 0 - I t fL 1 n ° 8 - I t f

Dis

tan

ce

)

Figure 17: simulation e1: 9L1.Cs+Pic- +1 dans clf. Distance à l'interface des ligands n° 8 et n° 10(haut). Distance du Cs+ n° 8 au centre de masse des oxygènes de coordination de son ligand (bas).La ligne pointillée verticale indique le moment de la décomplexation.

Les interactions électrostatiques entre cations complexés sont très répulsives (moyenne de

+40 kcal.mol-1 et maximum de +93 kcal.mol-1 – voir Figure 18). Il faut noter que dans ces

calculs, le cut-off est limité à 12 Å, et si les interactions à plus longue distance avaient été

prises en compte, la répulsion serait probablement encore plus forte.

Les Pic- contribuent à la stabilisation de l'ensemble en maintenant la neutralité dans la

région interfaciale. Baglioni et coll. 5 ont observé que des contre-ions (Cl-) se rapprochent

d'une surface de mercure où sont adsorbés des complexes de cryptands 222.Na+, afin de

maintenir l'électroneutralité du système.

Page 164: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 149

Il y a donc un équilibre entre l'énergie répulsive inter-complexes en raison des charges

positives des cations et l'énergie attractive due aux Pic-. Cependant, le complexe n° 10 qui

revient vers l'interface approche sans son anion. Il y a donc un déficit de charges négatives

dans la région interfaciale, et la répulsion inter-complexes s'accroît fortement. C'est

probablement la cause de la décomplexation du cation n° 8.

-60

-50

-40

-30

-20

-10

0

10

0 200 400 600 800 1000

L1 n° 8

En

erg

ies

(kc

al.

mo

l-1)

T emps (ps)

Cs+

Clf

8 L1

L1 n° 10

-200

-150

-100

-50

0

50

100

0 200 400 600 800 1000

C s+ n° 8

Temps (ps)

8 Cs+

Cs+ n° 10

Eau

P ic-

Figure 18: simulation e1 - énergies d'interaction au cours du temps pour le ligand L1 n° 8 (gauche)et le Cs+ n° 8 (droite). L'instant de la décomplexation (à ~ 1000 ps) est noté par une ligne pointilléeverticale. Pour L1 sont repérées les interactions avec son Cs+, les autres ligands, le ligand n° 10 et lechloroforme. Pour le cation, sont repérées les interactions avec les autres Cs+, le Cs+ n° 10, les Pic-

et l'eau.

3.6. Simulation f : 9 complexes L1.Cs +Cl- à l'interface

Baglioni et coll. 8,5,9,10 ainsi que Kunitake et coll. 7 suggèrent que la répulsion

électrostatique des cations complexés soit la principale composante des forces

intermoléculaires qui empêchent les molécules de se rapprocher lors de la compression de

l'interface. Dans la simulation précédente, la répulsion électrostatique entre les Cs+ complexés

est en partie responsable de la décomplexation d'un cation.

Page 165: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 150

Afin d'étudier l'importance que peut avoir la concentration de charges à l'interface, nous

avons simulé le système f, composé de neuf complexes L1.Cs+ avec Cl- comme contre-ions.

Le chlorure est un anion hydrophile et devrait donc migrer rapidement dans l'eau (voir

Chapitre 4 § 3.2.2, également 21,24).

Cl- L1

-10

0

10

20

30

40

50

0 400 800 1200

Dis

tan

ce

)

Tem ps (ps)

Chloroform e

Eau

-20

-15

-10

-5

0

5

0 400 800 1200

Tem ps (ps)

Chloroform e

Eau

Figure 19: simulation f: 9 L1.Cs+Cl- - distances Cl- - Interface (gauche) et L1 – Interface (droite)au cours du temps.

Dès le début de la dynamique, en moins de 200 ps, tous les Cl- ont quitté l'interface

(Figure 19) et se situent principalement dans une tranche d'eau comprise entre 15 et 35 Å de

la surface de séparation de Gibbs.

Il ne reste donc que les complexes L1.Cs+ à l'interface dont la charge totale est maintenant

positive +9. Vers 400 ps, l'un des complexe (n° 8), initialement orienté perpendiculairement à

l'interface, se repositionne parallèlement à celle-ci. A 700 ps, il effectue un retournement

complet de sorte que sa couronne + le cation sont dirigés vers le chloroforme. Le Cs+ est

hydraté par une molécule d'eau. A partir de là, ce complexe progresse régulièrement en

direction de la phase organique (voir Figure 20).

Page 166: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 151

chloroforme eau

0

0.5

1

1.5

2

-30 -20 -10 0 10 20 30

L1

Cs+

Cl-

z (Å)

Position initiale 0 ps Profils de densités des solutés

750 ps

1100 ps

Figure 20: simulation f: 9 L1.Cs+Cl- - Images instantanées à 0 ps, 750 ps et à 1100 ps (eau à gaucheet chloroforme à droite, séparés pour plus de clarté). Profils de densités des ligands libres L1, desCs+ et Cl- en fonction de z sur toute la dynamique (haut droite).

Page 167: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 152

Ce départ est la conséquence des fortes répulsions électrostatiques entre les complexes à

l'interface. La part due à l'électrostatique dans l'énergie d'interaction entre L1.Cs+ n° 8 et les

autres complexes atteint +25 kcal.mol-1 (Figure 21). Les contre-ions qui stabilisent le système

ne sont plus, pour la majorité d'entre eux, dans la sphère de cut-off des L1.Cs+, et donc ne

peuvent pas contribuer à la neutralisation de la région de l'interface. Les répulsions

électrostatiques cation-cation apparaissent donc comme un moteur pour la migration dans la

phase organique.

-20

-15

-10

-5

0

-10

0

10

20

30

40

0 200 400 600 800 1000 1200

Distance à l'interface

Electrostatique n° 8 -solutés

Dis

tan

ce

)E

ne

rgie

(kcal/m

ol)

Temps (ps)

Figure 21: simulation f: 9 L1.Cs+Cl- - Distance du centre de masse du complexen° 8 à l'interface et composante électrostatique de l'énergie d'interactioncomplexe n° 8 avec le reste du soluté. Courbes en fonction du temps.

Page 168: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 153

4. Résultats 2 nde Partie : Saturation de l'Interface

Dans cette seconde partie nous allons essayer de saturer l'interface eau–chloroforme en

augmentant davantage la concentration du soluté. Dans la première simulation, nous

étudierons la saturation pour une dynamque initiée avec une bicouche de complexes

L1.Cs+Pic- et de ligands libres. Puis, nous étudierons le comportement de quinze ligands

libres qui, sur la même surface sont initialement adsorbés à l'interface . Enfin, le dernier

système sera constitué d'une bicouche de 18 ligands libres placés initialement en rangs serrés.

Les choix de ses simulations seront justifiés dans les paragraphes ci-dessous.

4.1. Simulation g: bicouche complexes et ligands libres + selsdans la phase aqueuse

Neuf complexes L1.Cs+Pic- sont placés à l'interface eau–chloroforme de la même manière

que pour la simulation b (voir § 3.2). Huit ligands libres L1 sont positionnés dans le

chloroforme en seconde couche, à une distance de 13 Å de l'interface (voir image à 0 ps sur la

Figure 24 – haut gauche). Cette position initiale a été choisie car, à partir des résultats des

démixtions de systèmes "réalistes", nous avons vu que les ligands libres sont moins tensio-

actifs que les complexes. De plus la formation de L1.Cs+Pic- se fait probablement à

l'interface. Il nous a donc paru logique de placer les complexes à l'interface et les ligands

libres derrière. Les cinq sels (Cs+Pic-) sont au départ dans la phase aqueuse (Figure 24 – haut

gauche). L'objectif de ce calcul est de voir s'il va y avoir migration des ligands de la phase

organique ou de Pic- du sel de l'eau vers l'interface pour saturer celle-ci, et extraction d'un

complexe L1.Cs+Pic-. Les calculs précédents ont montré que pour une surface x × y similaire,

neufs complexes n'étaient pas suffisants pour couvrir complètement l'interface.

4.1.1. Comportements de la bicouche de calixarènes

Durant toute la durée de la dynamique, le comportement de la couche de complexes est

similaire à toutes celles simulées dans la première partie, et cela malgré la présence d'une

Page 169: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 154

seconde couche (voir Figure 22 pour la définition des deux couches). La première reste entre

z = 0 et -8 Å. Les centres de masse de ces ligands oscillent autour de leur position d'équilibre

à -2,9 Å de l'interface en moyenne pour les neuf L1.Cs+. La seconde couche se situe entre -12

et -22 Å (moyenne –15,9 Å).

- 3 0

- 2 0

- 1 0

0

1 0

0 4 0 0 8 0 0 1 2 0 0 1 6 0 0

Dis

tan

ce

)

T e m p s ( p s )

E a u

C h l o r o f o r m e

1ère couche

2nde couche

Figure 22: simulation g: bicouche - Distances des centres de masses des ligands L1 àl'interface en fonction du temps. Les ligands des complexes, initialement à l'interfacesont en traits pointillés. Les ligands libres sont en traits pleins.

Le taux d'occupation de l'interface est du même ordre de grandeur que dans les cas

précédents (≈ 55 % d'accès aux solvants). Malgré la présence de larges surfaces inoccupées,

seul un ligand libre initialement dans la phase organique vient s'insérer dans la première

couche. Il n'y reste que 600 ps, avant de retourner dans le chloroforme (Figure 22).

La superposition de la projection sur le plan x × y des deux couches de ligands montre que

les molécules de la seconde ne comblent pas les vides laissés par la première (Figure 23).

Il n'y a donc pas de saturation de l'interface que par la seule migration des ligands de la

phase organique vers l'interface.

Page 170: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 155

Figure 23: simulation g: bicouche - projection des rayons ioniques sur le plan x ×× y des moléculessituées à l'interface (gauche) à 1 ns de dynamique . Mise en évidence des molécules placées à ±15 Åde l'interface (droite). Celles adsorbées à l'interface sont en grisé.Surface d'accès du solvant: 54% . A = 85 Ų/moles. (gauche)

chloroforme eau0

0 . 5

1

1 . 5

2

2 . 5

-5 0 -2 5 0 2 5 5 0

L 1

C s +

P ic-

Z ( Å )

E a uC h lo r o fo r m e

Position initiale 0 ns Profils de densités des solutés

1,6 ns

Figure 24: simulation g: bicouche - Images instantanées à 0 ns et à 1,6 ns (eau et chloroformeséparés pour plus de clarté). Profils de densités des ligands libres L1, des Cs+ et Cl- en fonction de zsur toute la dynamique (haut droite)

Page 171: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 156

Les ligands libres de la seconde couche ont des comportements variés. Six d'entre eux

restent dans la zone comprise entre –12 et –22 Å, et les deux derniers entament, dès le début

de la simulation, une migration vers le chloroforme massique (voir Figure 22). Après 1,6 ns

de dynamique, ils se situent à environ 30 Å de l'interface (Figure 24). Il n'ont plus aucune

interaction avec le solvant aqueux: ni avec l'interface centrale ni avec la seconde interface

présente par périodicité en z. L'un d'entre eux a complexé une molécule d'H2O dans sa

couronne. Les deux ligands restent relativement proches l'un de l'autre tout au long de leur

migration (distance moyenne des centres de masse: 15 Å).

4.1.2. Comportements des ions

Les sels (Cs+Pic-) qui se trouvent dans la phase aqueuse ont un comportement similaire à

celui observé lors des précédentes simulations: les Pic- font des empilements π par deux ou

par trois et sont entourés des cations Cs+.

Pour les ions des complexes L1.Cs+Pic-, l'un des cations décomplexe et rejoint la phase

aqueuse. Dans le même temps, l'un des anions Pic-, initialement à l'interface, s'éloigne pour

aller dans l'eau. Ces deux phénomènes adviennent dans un intervalle de temps court, entre les

temps 350 et 450 ps. Ils coïncident avec l'approche du ligand libre n° 15 qui va s'intégrer à la

première couche pendant 600 ps avant de retourner dans la seconde (Figure 25). Là encore,

comme pour la simulation e1, les analyses de distances et d'énergies montrent que l'approche

du ligand libre n° 15 modifie les positions des molécules à l'interface. Le complexe L1.Cs+ n°

5 subi alors une très forte répulsion du complexe n° 8, ce qui conduit à la décomplexation du

Cs+ n° 5.

En effet, l'anion Pic- n° 4 est depuis le début de la simulation, en interaction attractive

avec le complexe n° 5. Le départ du cation et la répulsion du Pic- n° 6 voisin, poussé par le

ligand libre n° 15 qui s'insère à l'interface, forcent le Pic- n° 4 à rejoindre la phase aqueuse

moins de 100 ps après le Cs+ n° 5 .

Page 172: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 157

-20

-10

0

10

20

30

40

50

0 400 800 1200 1600

Dis

tan

ce

s (

Å)

Tem ps (ps)

P ic--Itf

Cs+-L1

L1 n°15-Itf

Figure 25: simulation g: bicouche - Distances Cs+ n° 5 à son ligand (trait pointillé), Pic-

à l'interface (trait plein) et ligand libre L1 à l'interface (trait alterné) au cours du temps.

La charge finale dans la région de l'interface est donc finalement neutralisée par le départ

des deux ions Cs+ n° 5 et Pic- n° 4. L'électroneutralité est respectée comme dans la simulation

e1 (9 L1.Cs+Pic- + 1 coté chloroforme).

4.2. Simulation h: monocouche de 15 ligands libres

Comme la présence de ligands libres en retrait par rapport à une couche de 9 complexes

ne conduit pas à la saturation de l'interface, nous avons augmenté la concentration en

calixarènes L1 libres (sans complexe). Il y a dans cette simulation 15 ligands libres à

l'interface pour la même surface x × y que dans le cas précédent.

De plus, les ligands étant faiblement tensio-actifs certains pourraient, à cause de la forte

concentration, être chassés de l'interface et diffuser dans la phase organique.

Page 173: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 158

- 1 0

- 5

0

5

1 0

0 2 0 0 4 0 0 6 0 0 8 0 0 1 0 0 0

Dis

tan

ce

s (

Å)

T e m p s ( p s )

E a u

C h l o r o f o r m e

Figure 26: simulation h: 15 L1 - distances des centres de masse desligands libres à l'interface au cours du temps.

Les 15 molécules L1 restent ancrées à l'interface. L'une d'entre elles (n° 9) se retrouve

poussée de quelques Å dans la phase aqueuse pendant plus de 300 picosecondes, à une

distance équivalente à celle utilisée pour calculer le PFM coté eau (voir Chapitre 3 et ref. 21).

Avant de quitter l'interface vers la phase aqueuse, l'énergie d'interaction totale du ligand

n° 9 avec l'ensemble des autres calixarènes est de -9 kcal/mol-1 (moyenne sur 50 ps). Pour

tous les quatorze autres ligands L1 de la couche, l'énergie d'interaction moyenne avec tous les

autres calixarènes est de -17 kcal.mol-1. Au retour du ligand n° 9 à l'interface, son énergie

d'interaction totale avec le reste du soluté passe à -27 kcal.mol-1.

Son retour à l'interface, dû à la faible affinité du ligand avec l'eau, se fait de telle manière

que son énergie d'interaction avec le reste du soluté soit similaire à celle des autres L1

adsorbés.

Ces énergies sont principalement dues aux interactions de van der Waals. La gène stérique

est donc suffisante pour pousser un calixarène dans la phase aqueuse. Son orientation y est

quasiment parallèle à l'interface, proche de celle observée dans le PFM du ligand libre à

l'interface 21, le ∆G calculé était alors d'environ 8 kcal.mol-1.

Page 174: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 159

chloroforme eau

0

1

2

3

4

-40 -20 0 20 40

Z (Å)

C hlo ro form e Eau

Position initiale 0 ns Profil de densité des L1

550 ps

1020 ps

Figure 27: simulation h: 15 L1 - Images instantanées à 0 ps, 550ps et à 1020 ps (eau à gauche etchloroforme à droite; séparés pour plus de clarté). Profils de densités des L1 en fonction de z (hautdroite)

Lorsque tous les calixarènes sont à l'interface, ils n'occupent pas toute la surface

disponible. En effet, le solvant a accès à 33 % et l'aire par L1 est de 86 ±2 Ų/molec. ce qui

Page 175: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 160

est dans la moyenne de tous les autres systèmes calculés précédemment (pour une surface

x × y similaire).

Figure 28: simulation h: 15 L1 - position initiale de face (gauche) – projection des rayons ioniquessur le plan x ×× y des molécules situées à l'interface à 1 ns de dynamique (droite).Surface d'accès du solvant: 33% . A = 86 Ų/molec.

Cependant, la valeur calculée pour l'accès au solvant prend en compte toute la surface

située entre les molécules. En se limitant à une aire où les molécules d'eau peuvent

raisonnablement s'insérer, il reste encore une large zone d'accès au solvant mais son

pourcentage passe de 33% à 14%.

4.3. Simulation i: bicouche de 9 + 9 ligands libres

Pour cette simulation, la concentration initiale est maximale pour la surface x × y.

Les calixarènes libres sont positionnés au départ en carré de 3 × 3 L1 sur deux couches.

La première à l'interface, la seconde dans le chloroforme, à d'environ 12 Å de la surface de

Gibbs. Contrairement au cas précédents, les calixarènes sont placés côte à côte en "rangs

serrés" (voir Figure 29). Le bord de boîte est à 1.5 Å du dernier calixarène.

Page 176: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 161

Figure 29: simulation i: bicouche de 9+9 L1 - position initiale des 18 calixarènes à l'interface. Vuesorthogonales.

Pendant toute la simulation, la saturation de l'interface est quasiment complète, le solvant

n'ayant accès qu'à moins de 20% de celle-ci (2% en surface restreinte – voir la définition

paragraphe précédent).

La superposition des deux couches montre que la seconde comble les espaces laissés par

la première. Il n'y a donc plus de contact direct entre les deux solvants (Figure 32). Seules

quelques molécules d'eau et de chloroforme sont en interaction dans cette "troisième phase"

constituée des calixarènes. Ces molécules de solvant proviennent, pour la plupart, de la phase

d'équilibration du système.

Du fait de l'encombrement à l'interface, il n'y a pas d'échange entre les L1 des deux

couches. Des ligands de la première sont poussés dans la phase aqueuse pour des périodes

supérieures à 800 ps, sans pour autant quitter l'interface. Ce phénomène a été observé dans le

système h (15 L1 à l'interface), mais pour des durées beaucoup plus courtes (< 300 ps).

La surface moyenne calculée pour les ligands à l'interface est d'environ 40 Å2. Cela

signifie qu'ils sont en grande partie superposés à ± 10 Å autour de l'interface.

Comme observé précédemment dans le système g, deux L1 de la seconde couche

s'enfoncent dans le chloroforme jusqu'à une profondeur d'environ -25 Å. Vers 1 ns, ils restent

à profondeur constante, et ne migrent pas davantage. Ils ne sont pas encore en contact avec la

seconde interface. Ils composent une troisième couche de ligands.

Page 177: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 162

chloroforme eau

0

0.5

1

1.5

2

-30 -20 -10 0 10 20 30

Z (Å)

Position initiale 0 ns Profil de densité des L1

0,5 ns

1,4 ns

Figure 30: simulation i: 9+9 L1 - Images instantanées à 0 ns, 0,5 ns et à 1,4 ns (eau à droite etchloroforme à gauche, séparés pour plus de clarté). Profils de densités des ligands libres L1 enfonction de z (haut droite)

Page 178: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 163

- 3 0

- 2 0

- 1 0

0

1 0

0 5 0 0 1 0 0 0 1 5 0 0

Dis

tan

ce

s (

Å)

T e m p s ( p s )

Figure 31: simulation i: 9+9 L1 - distances des centres de masse des ligands libres àl'interface au cours du temps

Figure 32: simulation i: 9+9 L1 - projection des rayons ioniques sur le plan x ×× y desmolécules situées à l'interface (gauche) à 1 ns de dynamique . Mise en évidence desmolécules placées à ±15 Å de l'interface (droite). Celles adsorbées à l'interface sont en grisé.Surface d'accès du solvant: 20% . A = 39 Ų/molec. (gauche)

Page 179: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 164

5. Discussion

5.1. Interactions à longue distance

Dans toutes ces simulations, les énergies ont été calculées sans prendre en compte les

interactions électrostatiques au-delà du cut-off. Cette approximation, due au limites des

moyens de calcul, peut aussi se justifier par le fait que la majorité de nos systèmes ne sont pas

fortement chargés, d'autant plus que les cations sont pour la plupart complexés et que les

contre-ions sont des anions "mous", à la charge délocalisée.

Dans certaines simulations, les effets électrostatiques semblent primordiaux, notamment

dans le cas f (9 L1.Cs+Cl-) où les chlorures Cl- quittent l'interface et s'hydratent.

Expérimentalement 5, au contraire, ces ions hydrophiles peuvent se rapprocher d'une interface

eau-mercure pour permettre l'électroneutralité du système composé de complexes 222.Na+. La

différence est-elle due à la truncation du cut-off dans notre système, ou à la nature même de

l'interface eau-mercure, fort différente de l'interface eau-chloroforme, qui généralement

repousse les ions 22,21,23,24.

Dans d'autres simulations, le fait de négliger les interactions à longue distance permet

indirectement de simuler un chloroforme massique plus "vaste", c'est-à-dire où les

ligands/complexes qui diffusent dans la phase organique ne voient aucune interface dans leur

cut-off. Leurs mouvements dans le chloroforme ne sont donc pas influencés par l'eau.

Dans les simulations de bicouches, les molécules situées dans le chloroforme ont une

interaction très restreinte avec l'eau, par la présence des molécules adsorbées à l'interface.

Page 180: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 165

5.2. Comportements des ligands libres et complexes à l'interface.

5.2.1. Distances à l'interface

Dans toutes les simulations, les calixarènes adsorbés ont un comportement globalement

similaire: ils restent ancrés à l'interface, et leur distance à celle-ci fluctue dans des zones

restreintes que nous avons appelée "couche".

Nous avons reporté, pour certains systèmes, les distances des centres de masse des

complexes/ligands et des Cs+ à l'interface dans le Tableau 2. Sont exclues de ce tableau, les

simulations où les ligands sont initialement inversés par rapport à l'interface et les simulations

où un dizième complexe est situé devant ou derrière la monocouche. En effet, dans ces

systèmes, les calixarènes se réorientent durant la dynamique et nos analyses portent sur des

monocouches équilibrées.

Pour les simulations de ligands libres à l'interface (h & i) les énergies d'interaction de

chacun des L1 avec les autres ligands et avec les solvants sont reportées dans le Tableau 3.

Pour les monocouches, les centres de masse des ligands sont compris entre –2,7 et –3,9 Å

de l'interface coté chloroforme. Pour les complexes, la moyenne de –2,9 ± 0,2 Å pour L1 et

-1,8 ± 0,9 Å pour les cations dans la couronne.

Ces valeurs sont relativement proches de celles calculées par M. Lauterbach pour le PFM

du complexe L1.Cs+Pic- à l'interface (cut-off = 12Å): L1-Itf ≈ - 2,7 Å et Cs+-Itf ≈ -0,9 Å.

Elles sont plus éloignées de nos résultats pour le PFM avec un double cut-off de 12 + 18 Å

(L1-Itf ≈ - 4,1 Å et Cs+-Itf ≈ -2,2 Å).

L'augmentation de la concentration semble diminuer la distance moyenne à l'interface.

Pour les couches de ligands libres: 9 L1 (a) → -3,9 Å, 15 L1 (h)→ -2,7 Å, 18 L1 (i) → -2,2

Å. Pour les complexes: 9 L1.Cs+Pic- (b) → -3,1 Å et 9 L1.Cs+Pic- + 8 L1 (g) → -2,8 Å.

Comme nous pourrons le voir sur le bas de Figure 40 page 176, la surface de séparation de

Page 181: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 166

Gibbs ne correspond plus vraiment à une interface réelle. Pour une concentration de soluté

adsorbé très élevée, la distance à l'interface caractérise plutôt la distance soluté-eau.

Le cas des 9 L1.Cs+Cl- (f ) est particulier, probablement à cause des fortes répulsions

électrostatiques qu'il subit.

Distances L1 - Interface

b 9 L1.Cs+Pic- Moy.

1ère couche -2,8 -3,3 -3,4 -2,9 -3,5 -3,1 -3,6 -3,8 -1,5 -3,1

f 9 L1.Cs+Cl-

1ère couche -4,2 -4,5 -5,3 -3,7 -3,9 -4,9 -4,0 (-9,1) -3,8 -2,7

g 9 L1.Cs+Pic- + 8 L1

1ère couche -2,9 -3,5 -2,6 -2,4 (-4,0) -2,5 -2,9 -2,9 -2,7 -2,8

2nde couche -16,9 -15,3 -16,9 -17,1 (-20,3) (-8,6) -13,5 (-21,9) -15,9

a 9 L1

1ère couche -4,8 -3,2 -4,3 -3,2 -4,4 -4,1 -4,5 -3,0 -3,5 -3,9

h 15 L1

1ère couche -4,1 -1,4 -2,3 -2,7 -2,9 -2,3 -2,6 -1,9 (-0,7)

-4,1 -2,8 -2,1 -2,4 -1,3 -4,2 -2,7

i 9 + 9 L1

1ère couche -0,7 -1,1 -3,2 (1,1) -3,0 (0,5) -2,6 -2,3 -0,4 -2,2

2nde couche -14,4 -16,6 (-23,9) -12,9 -10,4 -14,1 (-21,6) -14,8 -18,5-14,5

Distances Cs+ - Interface

b 9 L1.Cs+Pic-

-1,3 -1,2 -1,7 -1,3 -1,7 -1,7 -1,8 -2,2 -0,3 -1,5

f 9 L1.Cs+Cl-

-2,6 -2,9 -3,9 -1,9 -2,5 -3,2 -2,5 (-8,9) -2,1 -2,7

g 9 L1.Cs+Pic- + 8 L1

-1,3 -2,5 -1,1 -0,6 (13,0) -0,7 -1,1 -0,9 -0,9 -1,1

Tableau 2: Distances à l'interface (Å) des centres de masses des ligands libres/complexés desdifférentes couches, et des ions Cs+ complexés pour certaines simulations. Les calixarènes ouCs+ qui ont quitté l'interface lors de la simulation (notés entre parenthèses) sont exclus ducalcul de la moyenne sur l'ensemble de la dynamique.

Page 182: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 167

Les secondes couches (simulations avec des complexes g, avec des ligands libres i) sont

situées aux alentours de -15 Å dans le chloroforme, avec cependant de larges fluctuations.

5.2.2. Aspects énergétiques du comportement interfacial

Les énergies d'interactions de chaque L1 avec le reste du soluté (Esolu), de chaque L1 avec

l'eau (Eeau) et de chaque L1 avec le chloroforme (Eclf) pour les simulations h (15 L1) et i (9+9

L1) sont reportées dans le Tableau 3. Nous avons choisi ces systèmes, car ce sont les seuls à

avoir le même soluté sous forme de monocouche (h) et de bicouche (i). Nous pouvons ainsi

calculer l'importance de la concentration sur les énergies d'interaction.

15 L1 (h) 9 + 9 L1 (i)L1 n° Esolu Eclf

b Eeau c Esolu Eclf

b Eeau c

1 -24 -28 -29 -30 -18 -372 -17 -29 -41 -37 -15 -173 -35 -15 -40 -36 -20 -114 -15 -34 -31 -42 -12 -345 -20 -27 -35 -36 -18 -386 -28 -27 -39 -28 -7 -427 -31 -21 -36 -40 -10 -348 -15 -32 -35 -28 -11 -379 -30 -18 -42 -37 -5 -3910 -20 -24 -37 -30 -32 -1111 -21 -32 -33 -31 -31 -012 -18 -28 -38 -12 -50 -1213 -19 -28 -38 -22 -38 -1214 -26 -21 -33 -33 -25 -115 -27 -32 -28 -21 -40 -1816 -11 -50 -1217 -21 -40 -118 -22 -37 -0

Moy. -23 -26 -36 -29 -25 -201ère couche: -35 -13 -322nde couche: -22 -38 -7

a valeurs ± 15 kcal.mol-1

b valeurs ± 5 kcal.mol-1

c valeurs ± 10 kcal.mol-1

Tableau 3: énergies d'interaction (kcal.mol-1) de chacun des L1 avec le reste des ligands Esolu, avecl'eau Eeau et le chloroforme Eclf, les valeurs moyennes pour l'ensemble et par couches dans le cas dela bicouche, pour les deux système h (15 L1) et i (18 L1). Valeurs calculées sur les 100 dernières ps.

Page 183: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 168

Les énergies sont similaires pour tous les ligands dans leurs interactions avec les autres L1

libres (≈ -26 kcal.mol-1). Les énergies d'interaction avec les solvants sont également très

proches (≈ -26 (eau) et -36 (clf) kcal.mol-1). Les 15 L1 de la simulation h interagissent avec

l'eau comme les 9 L1 de la première couche de la bicouche (i) et avec le chloroforme comme

les 9 autres ligands de la seconde couche.

Dans les bicouches, la première couche fait donc écran vis-à-vis de l'eau pour la seconde

couche, qui elle-même fait écran vis-à-vis du chloroforme pour la première. Les énergies

d'interaction Eeau et Eclf sont beaucoup plus faibles lorsqu'il y a une barrière "physique" de

calixarènes. Cela explique probablement pourquoi des ligands libres L1, pourtant tensio-actifs

et dont le PFM montre un minimum de la courbe d'énergie libre proche de l'interface, peuvent

diffuser dans le chloroforme lorsqu'ils sont dans la seconde couche (simulation g: bicouche

complexes/ligands libres, et simulation i: 9 + 9 L1 libres).

5.2.3. Oscillation des complexes et des ligands à l'interface.

En observant le courbes de déplacement des centres de masse des calixarènes L1 à

l'interface, il est possible de distinguer un mouvement oscillatoire relativement régulier pour

certains d'entre eux. La décomposition en série de Fourier de la courbe de distance L1 – Itf

donne les principales fréquences de vibration de ces molécules dans le voisinage de

l'interface. En sélectionnant celles qui correspondent à des temps compris entre 300 et 700 ps,

nous avons pu reconstruire la tendance du mouvement oscillatoire de certains ligands ou

complexes.

Seuls quelques calixarènes oscillent de façon périodique. La plupart des L1 libres qui

oscillent de cette manière dans un même système sont voisins. Pour les L1 complexés, ce sont

les calixarènes qui ne sont pas en interaction π avec les Pic- ou en contact proche avec les

autres complexes. Tous les autres ligands L1 suivent des mouvements plus aléatoires (Figure

34).

Page 184: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 169

-12

-10

-8

-6

-4

-2

0

2

0 40 0 80 0 1200

Dis

tan

ce

)

T e mp s (ps)

-1

-0.5

0

0.5

1

0 0.0 5 0.1 0.1 5 0.2 0.2 5

am

plit

ud

e

F requence (THz)

- 7

- 6

- 5

- 4

- 3

- 2

0 4 0 0 8 0 0 1 2 0 0D

ista

nc

e (

Å)

T e m p s (p s )

-12

-10

-8

-6

-4

-2

0

2

0 400 800 1200

Dis

tan

ce

)

T e mp s (ps )

Courbe de distance Fréquences du mouvement

Courbes superposées Courbe reconstuite à partir des fréquences sélectionnées

Figure 33: décomposition et reconstruction de la courbe de la distance du centrede masse à l'interface (selon l'axe z) pour le calixarène n° 1 de la simulation a. Laposition de l'interface est calculée à chaque pas.

- 6

- 5

- 4

- 3

- 2

0 4 0 0 8 0 0 1 2 0 0

L 1 n ° 2L 1 n ° 4L 1 n ° 7

Dis

tan

ce

)

T e m p s ( p s )

Figure 34: mouvements oscillatoires irréguliers dans ladistance centre de masse de L1 – interface selon z.

Page 185: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 170

-7

-6

-5

-4

-3

-2

0 400 800 1200

L 1 n ° 1

Dis

tan

ce (

Å)

-5.5

-5

-4.5

-4

-3.5

-3

-2.5

0 40 0 80 0 12 00

L 1 n° 6

-4.5

-4

-3.5

-3

-2.5

-2

-1.5

0 200 400 600 80 0 1000

L1C s+ n ° 4

Dis

tan

ce (

Å)

-5.5

-5

-4.5

-4

-3.5

-3

-2.5

-2

0 20 0 40 0 60 0 800 1000

L1Cs+ n° 8

-4

-3

-2

-1

0 500 1000 1500

L1 .C s+ n ° 6

Dis

tan

ce (

Å)

-4.5

-4

-3.5

-3

-2.5

-2

-1.5

0 500 1000 1500

L1 .C s+ n ° 7

- 5

-4

-3

-2

-1

0

0 50 0 1 000 1 500

L 1.Cs+ n ° 9

-18

-16

-14

-12

0 500 1000 1500

L1 n° 1 1

Dis

tan

ce (

Å)

-4

-3

-2

-1

0 400 800 1200

L1 n° 13

Dis

tan

ce (

Å)

-3

-2.5

-2

-1.5

-1

-0.5

0

0.5

0 400 800 1200

L1 n° 14

- 7

-6

-5

-4

-3

-2

0 400 800 1200

L1 n ° 15

Temps (ps)

-4

-3.5

-3

-2.5

-2

-1.5

-1

0 325 650 975 1300

L 1 n ° 8

Dis

tan

ce (

Å)

Temps (ps)

-2

-1.5

-1

-0.5

0

0.5

1

0 325 650 975 1300

L 1 n ° 9

Temps (ps)

-16

-15

-14

-13

0 325 650 975 1300

L1 n° 1 0

Dis

tan

ce (

Å)

Temps (ps)

1ère couche 2nde couche

9 L1

9 L1

.Cs+ P

ic-

9 L1

.Cs+

Pic

- +8L

115

L1

18 L

1

Figure 35: courbes de distances reconstruites pour les calixarènes qui possèdent un mouvementoscillatoire. Classement par simulation et par couche.

Nous nous sommes particulièrement intéressés à la simulation a (9 L1 à l'interface, sels

dans l'eau).

Page 186: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 171

Les moyennes des courbes de distance à l'interface reconstruites (voir explication Figure

33) sont identiques à celles des courbes de distances originales: -4,8 Å pour L1 n° 1 et –4,1 Å

pour L1 n° 6.

Les énergies L1-solutés et L1-solvants calculées sur la même période montrent que les

interactions avec les autres solutés (Figure 36 – gauche) oscillent de la même manière.

Lorsque les interactions avec le solvant sont prises en compte, la régularité des oscillations

disparaît (Figure 36 – droite) .

-80

-60

-40

-20

0

20

0 400 800 1200

In teraction s L1-so lu tés

TotaleE lectros tatiquevan der W aa ls

Kca

l/mo

l

Temps (ps)

-250

-200

-150

-100

-50

0

0 400 800 1200

Inte raction to tale de L 1

TotaleE lectros tatiquevan der W aals

Temps (ps)

Figure 36: simulation a: 9 L1 - courbes reconstruites des énergies d'interactions de L1 n° 1 avec lereste du soluté (gauche) et l'ensemble du système (droite). Les composantes électrostatiques et devan de Waals sont également tracées. La plage de fréquences utilisées pour ces courbes est la mêmeque celle utilisée pour la distance de L1 à l'interface (voir Figure 33).

Nous nous sommes intéressé aux mouvements des molécules dans le plan de l'interface

tout au long de la dynamique, afin de voir s'il était possible de différencier les molécules qui

oscillent de manière régulière des autres.

La projection des coordonées x et y du centre de masse de L1 sur le plan de l'interface est

représentée sur la Figure 37. Aucune différence notable n'est constatée sur les déplacements

parallèles à l'interface. Si le ligand L1 n° 6 reste globalement stationaire, ce n'est pas le cas du

n° 1 (Figure 37 – gauche), alors que les deux ont des mouvements périodiques réguliers en z.

De même, rien ne permet de caractériser les mouvements des ligands dont les oscillations en z

sont aléatoires (n° 2 à 5 et n° 7 à 9, Figure 37 – droite).

Page 187: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 172

0

10

20

30

40

0 10 20 30 40

L1 n°1 & n°6

y

x

L1 n° 1

L1 n° 6

0

10

20

30

40

50

60

-10 0 10 20 30 40 50 60

Autres L 1

x

Figure 37: simulation a: 9 L1 – déplacements en x ×× y (Å) sur le plan de l'interface des ligands n°1et n°6 (gauche), et des autres ligands L1 (droite). Sur la courbe de droite, le carré en pointilléreprésente la surface réelle de la boîte (identique à celle de gauche). Pour plus de clarté, lestrajectoires des ligands qui sortent de la boîte n'ont pas été translatées par périodicité.

Il est interessant de comparer les mouvements en z avec ceux d'un complexe seul à

l'interface.

La Figure 38 représente la distance à l'interface pour un complexe L1.Cs+Pic- seul, ainsi

que la courbe reconstruite avec la plage de fréquences correspondant à 200 - 600 ps. La plage

300 - 700 ps, utilisée pour les calixarènes en monocouche, ne décrit pas correctement le

mouvement en z (c'est-à-dire que la courbe reconstruite, à partir de ces fréquences ne se

superpose pas à la courbe de distance d'origine).

- 1 0

- 8

- 6

- 4

- 2

0 1 0 0 2 0 0 3 0 0 4 0 0 5 0 0 6 0 0

Dis

tan

ce

)

T e m p s ( p s )

Figure 38: simulation d'un complexe L1.Cs+Pic- à l'interface. Courbes de la distance àl'interface selon l'axe z et courbe de distance reconstruite (voir explication Figure 33)

Page 188: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 173

Il y également un mouvement oscillatoire quasiment régulier. La période est plus courte

que dans le cas des calixarènes adsorbés en monocouche. Ceci est probablement dû à la

viscosité des empilements des L1 concentrés à l'interface.

Ce phénomène constaté sur ces monocouches reste à approfondir. En particulier, il

faudrait pouvoir étudier le mouvement des molécules de solvant sur l'interface par régions

correspondant aux zones où s'adsorbent les complexes/ligands libres qui oscillent de manière

régulière.

L'interprétation de ces mouvements n'est pas simple. D'autres simulations, sur des boîtes

de taille différentes et d'autres analyses seraient nécessaires pour élucider la nature des forces

conduisent à ces oscillations.

5.3. Extraction dans la phase organique et rôle des contre-ions

Sur tous les complexes simulés, seuls deux ont amorcé une diffusion dans le chloroforme.

Le complexe n°7 dans la monocouche de 9 L1.Cs+Pic- inversés à l'interface (cas c – voir §

3.3) et le complexe n° 8 dans la monocouche de 9 L1.Cs+Cl- (cas f – voir § 3.6).

Seul le second parvient réellement à se séparer de l'interface et à diffuser dans la phase

organique.

Nous avons vu que dans un certain nombre de simulations, et principalement dans celle

des 9 L1.Cs+Cl- (cas f ), les répulsions électrostatiques entre complexes jouent un rôle qui

peut être prépondérant pour décomplexer un cation ou faire partir un complexe vers le

chloroforme. Les contre-ions permettent d'équilibrer la charge électrique dans la région de

l'interface. Dans tous les cas, les Pic- restent adsorbés tant que les complexes sont à l'interface.

Lorsque l'un des cations décomplexe et migre dans l'eau, l'un des Pic- le suit (simulation g) ou

se trouve dans le chloroforme (cas e1).

D'autre part, dans la simulation c, le Pic- n° 7 attire le complexe dans la phase organique

(énergie d'interaction ≈ -55 kcal.mol-1), mais celui-ci est retenu à l'interface par ses

interactions avec l'eau et avec un autre contre-ion (énergie d'interaction ≈ -70 kcal.mol-1).

Page 189: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 174

Enfin, dans les bicouches de ligands et complexes à l'interface, il apparaît que les

molécules situées dans la seconde couche (coté chloroforme) sont en interaction très faible

avec l'eau (≈ -7 kcal.mol-1 au lieu de ≈ -30 kcal.mol-1 pour ceux de la première couche) à

cause de l'écran physique de la couche interfaciale.

Ces résultats suggèrent que l'extraction des complexes peut se faire si des contre-ions sont

situés dans la phase organique et que dans le même temps, les répulsions électrostatiques

permettent au complexe d'amorcer un départ de l'interface. Si de plus, ce complexe est situé

en seconde couche, il est probable qu'il migre spontanément à la suite du contre-ion vers la

phase organique.

Cette situation peut advenir si nous considérons l'hypothèse émise dans le chapitre

précédent: lors de la démixtion après le mélange des deux phases contenant les ligands et les

sels, la surface de contact entre les deux solvants est bien plus grande que celle du système

initial. Après la séparation des phases, cette surface de contact est fortement réduite, et les

espèces s'y accumulent et la saturent. Pour des ligands tels que les calix[4]arène-couronne6, la

saturation est rapidement atteinte, et empèche les molécules situées dans le chlroforme de

s'adsorber à l'interface (voir simulation g - § 4.1).

5.4. Solvants à l'interface saturée.

L'étude des propriétés de l'interface dans les conditions où nous l'avons simulée (fortes

concentrations de ligands/complexes, saturation… ) est relativement difficile. Nous avons

effectué des analyses des coefficients de diffusion, des temps de corrélation ou de fonctions

de distributions radiales, mais elles ne permettent pas d'obtenir des informations claires sur

l'état de l'interface.

Nous avons donc comparé les paramètres suivants: surface accessible au sovant, courbes

de densité et surface de l'eau à l'interface.

Lorsque le nombre de molécules augmente pour une même aire d'interfaciale, la surface

disponible au solvant se réduit (Figure 39) et les interactions directes entre l'eau et le

chloroforme diminuent. Il apparaît alors des protubérances d'eau qui s'insèrent entre les

Page 190: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 175

molécules adsorbées. Ces "doigts d'eau" se font de plus en plus étroits et rares avec

l'augmentation de la concentration (Figure 40).

1 0

2 0

3 0

4 0

5 0

6 0

7 0

8 0

9 0

1 2 3 4

C o nc e n tr a t io n re la tiv e (m o l.l-1 )

s u r fa c e m o lé c u la ire(Å ²/m o le c )

s u rfa c e d 'a c c è s a u s o lv a n t (% )

a g h

i

Figure 39: surface par molécule et pourcentage de l'interfaceaccessible aux solvants en fonction de la concentration totalerelative en L1 des systèmes: a = 1,0, g = 1,29, h = 1,71 et i = 3,71.

Par contre, la surface moléculaire est quasiment identique quel que soit le système. Les

ligands libres et complexés ont des surfaces de l'ordre de 85 Å2/molec. L1 possède une cavité

préorganisée et ne change pas véritablement de conformation avec la complexation. Le cas où

la saturation complète de l'interface est atteinte donne seul une aire moléculaire très basse,

principalement due aux enchevêtrements et superpositions des molécules.

En observant les courbes de densité, il faut noter que la forte concentration de ligands

libres ou complexés L1 dans les systèmes de bicouches (g et i – resp. 3ième et 4ième lignes de la

Figure 40) modifie peu la courbe de densité de l'eau. Celle-ci présente, dans tous les systèmes,

une pente très raide à l'interface. Du coté chloroforme par contre, là où se trouvent les

calixarènes, la densité croît plus progressivement, pour n'atteindre une valeur d'environ 1,48

qu'à plus de 20 Å de la surface de séparation de Gibbs (le cas i - Figure 40 – dernière ligne).

Celle-ci ne correspond d'ailleurs plus véritablement à sa définition et ne représente plus que la

limite de position de l'eau à l'interface.

Les 9+9 L1 en deux couches à l'interface créent une sorte de troisième phase liquide

imperméable qui sépare les deux solvants. Les ligands libres qui diffusent dans le

Page 191: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 176

chloroforme, le font pour la plupart avec une ou plusieurs molécules d'eau coordinées à leur

couronne.

2

4

6

8 2

4

6

810

30

20

10

0

-10

-20

-30

Z A

xis

Y AxisX Axis 0

0.5

1

1.5

2

0 10 20 30 40 50 60 70

De

nsi

Z (Å)

Clf Eau

2

4

6

8 2

4

6

810

30

20

10

0

-10

-20

-30

Z A

xis

Y AxisX Axis 0

0.5

1

1.5

2

0 10 20 30 40 50 60 70

de

ns

ité

Z (Å)

Clf Eau

0

0.5

1

1.5

2

0 20 40 60 80 100

De

nsi

Z (Å)

Clf Eau

0

0.5

1

1.5

2

0 20 40 60 80 100

De

nsi

Z (Å)

Clf Eau

24

6

8

102

4

6

830

20

10

0

-10

-20

-30

2

4

6

8 2

4

6

810

30

20

10

0

-10

-20

-30

Z A

xis

Y AxisX Axis

Ea

u/C

lf9

L1

.Cs+

Pic

-1

8 L1

9 L

1.C

s+P

ic- +

8L1

Figure 40: surfaces instantanées de molécules d'eau (gauche) et courbes de densités moyennes dessolvants sur les 100 dernière ps de la simulation (droite) pour certains systèmes. La première lignecorrespond à une simulation sur une boîte sans soluté.

Page 192: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 177

6. Conclusion

Nous avons présenté des simulations de ligands (calix[4]arène-couronne6 – L1) libres et

complexant Cs+, concentrés à l'interface. Le but de ces simulations était d'étudier l'influence

de la concentration à l'interface sur les processus d'extraction dans la phase organique et

d'observer l'organisation ordonnée des solutés à la surface de contact entre les deux liquides.

Nous avons vu dans les simulations précédentes (Chapitre 3 & 4 et refs. 25-27) , ainsi que

dans les PFMs (Chapitre 3 et ref. 21) que les ligands L1 libres ou complexés se comportent

comme des surfactants. Ils ne quittent pas l'interface et la rejoignent lorsqu'ils sont

initialement dans le chloroforme 21. Spontanément, L1 ne migre pas dans la phase organique.

En changeant l'environnement physique qui l'entoure, par l'augmentation de la

concentration, nous avons montré que le comportement de L1 change et que des diffusions

spontanées peuvent advenir.

Ces résultats sont proches de ceux obtenus par les simulations de P. Beudaert sur les TBP:

des calculs de dynamique moléculaire, initiés avec deux couches complètes de ces molécules,

montrent que des ligands libres migrent seuls ou avec quelques molécules d'eau, dans le

chloroforme. De même l'occupation finale de la surface n'est pas complète 17.

Pour les simulations de L. Troxler sur des agrégats d'éthers-couronnes 18-C-6, la situation

est différente: il y a migration dans le chloroforme de certains de ces ligands, même si

l'interface n'est presque pas occupée 19.

Nous avons vu que les principales forces qui font s'éloigner les complexes de l'interface

sont les répulsions électrostatiques et l'attraction de contre-ions se trouvant dans la phase

organique. Les interactions avec l'eau, par contre, retiennent les calixarènes à la surface de

contact. Lorsque le complexe ou le ligand sont protégés du solvant aqueux, ils peuvent migrer

dans le chloroforme massique.

La concentration d'espèces à l'interface permet de réunir ces conditions.

- La concentration de charges y est élevée en présence de complexes et les répulsions

électrostatiques sont considérables (jusqu'à +30 kcal/mol pour un complexe).

Page 193: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 178

- Lorsque la concentration est suffisante, la première couche, constituée de L1 et de

toute autre molécule tensio-active, protège de l'eau les calixarènes libres ou complexés

qui se situent dans le chloroforme.

La répartition à l'interface est relativement ordonnée. Les calculs de surfaces moléculaires

ont montré qu'en moyenne, l'orientation était identique quel que soit le système (≈ 86

Å2/molec.). L'interface n'a pas besoin d'être complètement saturée pour permettre la diffusion

de certaines molécules dans le chloroforme.

Ce chapitre conclut la première partie de notre travail sur l'étude des processus

d'extraction. Bien entendu, de nombreuses simulations (et expériences) restent à effectuer

pour essayer de définir encore plus précisément les phénomènes qui adviennent à l'interface

entre les deux liquides. Nous y reviendrons dans la Conclusion générale (Chapitre 8).

Dans la seconde partie, nous allons nous interesser à un autre type de calixarènes et à

l'importance de la nature et la conformation des sites de coordination sur les capacités de

complexation et d'extraction.

Page 194: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 179

7. Références

(1) N. H. Sagert; W. Lee; M. J. Quinn; Can. J. Chem. 1979, 57.

(2) P. R. Danesi; R. Chiarizia; M. Pizzichini; A. Saltelli; J. Inorg. Nucl. Chem. 1978, 40, 1119-

1123.

(3) G. F. Vandergrift; W. H. Delphin; J. inorg. nucl. Chem. 1980, 42, 1359-1361.

(4) G. F. Vandergrift; E. P. Horwitz; J. inorg. nucl. Chem. 1980, 42, 119-125.

(5) M. Carlà; C. M. C. Gambi; P. Baglioni; J. Phys. Chem. B 1996, 100, 11067-11071.

(6) H. Rapaport; I. Kuzmenko; K. Kjaer; P. Howes; W. Bouwman; J. Als-Nielsen; L. Leiserowitz;

M. Lahav; J. Am. Chem. Soc. 1997, 119, 11211-11216.

(7) Y. Ishikawa; T. Kunitake; T. Matsuda; T. Otsuka; S. Shinkai; J. Chem. Soc., Chem. Com.

1989, 736-737.

(8) L. Dei; A. Casnati; P. Lo Nostro; P. Baglioni; Langmuir 1995, 11, 1268-1272.

(9) L. Dei; A. Casnati; P. Lo Nostro; A. Pochini; R. Ungaro; P. Baglioni; Langmuir 1996, 12,

1589-1593.

(10) P. Lo Nostro; A. Casnati; L. Bossoletti; L. Dei; P. Baglioni; Coll. Surf. A: Phys Eng. Asp.

1996, 116, 203-209.

(11) J.-M. Drouffe; A. C. Maggs; S. Leibler; Science 1991, 254, 1353-1357.

(12) B. Roux; B. Prod'hom; M. Karplus; Biophys. J. 1995, 68, 876-892.

(13) E. Egberts; H. J. C. Berendsen; J. Chem. Phys. 1988, 89, 3718-3732.

(14) T. R. Stouch; Molec. Simul. 1993, 10, 335-362.

(15) T. Taga; K. Masuda; J. Comput. Chem. 1995, 16, 235-242.

(16) J. J. Lopez Cascales; H. J. C. Berendsen; J. Garcia de la Torre; J. Phys. Chem. 1996, 100,

8621-8627.

(17) P. Beudaert; V. Lamare; J.-F. Dozol; L. Troxler; G. Wipff; Solv. Extr. Ion Exch. 1998, 16,

597-618.

(18) M. Baaden; F. Berny; N. Muzet; L. Troxler; G. Wipff, Interfacial Features of Assisted Liquid-

Liquid Extraction of Uranyl and Cesium Salts: A Molecular Dynamics Investigation.; in Calixarenes

for Ion Extraction; ; ACS Publication, sous presse, 1999.

(19) L. Troxler; G. Wipff; Anal. Sci. 1998, 14, 43-56.

(20) M. Clark; R. D. Cramer III; N. van Opdenbosch; J. Comput. Chem. 1989, 10, 982-1012.

(21) M. Lauterbach, "Simulation par Ordinateur de l'Extraction Liquide - Liquide des Cations

Alcalins par des Ionophores de Type Calixarène-Couronne et Valinomycine", Thèse, Université Louis

Pasteur,Strasbourg, 1997.

Page 195: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 5 180

(22) J. E. Randles; Discuss. Faraday Soc. 1957, 24, 194-199.

(23) F. Berny; N. Muzet; R. Schurhammer; L. Troxler; G. Wipff, Simulations of ions and

ionophores at a liquid-liquid interface: from adsorption to recognition.; in "Current Challenges in

Supramolecular Assemblies"; Tsoucaris, G., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1998, pp 221-

249.

(24) F. Berny; N. Muzet; L. Troxler; G. Wipff, Simulations of Liquid-Liquid Interfaces: A Key

Border in Supramolecular Chemistry.; in Supramolecular Science: Where it is and Where it is going;

Ungaro, R. and Dalcanale, E., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1999, pp 95-125.

(25) M. Lauterbach; G. Wipff; Supramol. Chem. 1995, 6, 187.

(26) G. Wipff; M. Lauterbach; Supramol. Chem. 1995, 6, 187.

(27) G. Wipff; E. Engler; P. Guilbaud; M. Lauterbach; L. Troxler; A. Varnek; New J. Chem. 1996,

20, 403-417.

Page 196: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

SSEECCOONNDDEE PPAARRTTIIEE

CHAPITRE 6

LE CALIX [4]ARENE-TETRAAMIDE

ET SES COMPLEXES IONIQUES

J. Chem. Soc. Perkin Trans. 2, 1996, 1065

J. Chem. Soc. Perkin Trans 2 1999, 1727.

Page 197: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 181

Le Calix[4]arène-tétraamide et ses

complexes ioniques.

1. Introduction

La seconde famille de calix[4]arènes que nous allons étudier ne possède pas de cavité de

complexation préorganisée, comme dans le cas du calix[4]arène-couronne6 L1. Ces

calixarènes, substitués sur la partie basse par des amides, cétones ou esters adoptent une

conformation de type cône. Ils possèdent deux sites de complexation distincts: des oxygènes

carbonyles mobiles dans la partie basse hydrophile, et un cône apolaire, qui peut complexer

des molécules neutres.

O

ON

O

O

N

Cône phénoliquePartie supérieure

Partie inférieureamidique

O

O

N

O

O

N

Figure 1: calix[4]arène-tetradiéthylamide (ligand L2).

Page 198: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 182

Ces ionophores sont connus pour leur sélectivité, leurs propriétés d'extraction et de

complexation des cations alcalins, et principalement du sodium. De nombreux dérivés de ces

calix[4]arènes ont été étudiés, substitués sur la partie inférieure par des esters 1-7, des cétones

4-6, et des amides 8-10 (cf. également le Chapitre 1 § 2). Cette dernière famille présente une

forte sélectivité pour les cations alcalino-terreux (Ca2+ · Sr2+ CC Ba2+ C Mg2+) 9,10.

La cristallographie a permis de connaître la structure à l'état solide d'un seul complexe de

calix[4]arène-tétraamide L2.K+ 8. Des structures de complexes de lanthanides avec des

calixarènes mixtes, dont seuls deux -OH sont substitués par des groupements -OCONR2, ont

également été résolues 11,12. Dans tous les cas, le cation est encapsulé dans la pseudo-cavité

constituée des oxygènes carbonyles et des oxygènes éthers. Dans les complexes tétraamides,

le cation est complètement séparé du solvant et de ses contre-ions.

Des simulations ont été effectuées au laboratoire MSM sur les calixarènes-tetraamide

libres et leurs complexes avec les alcalins et les lanthanides 13,14. Elles ont mis en évidence

l'existence d'une compétition entre les molécules de solvant et le cation envers les sites de

coordination. Dans des solvants protiques, tel que l'eau, le complexe résulte d'un équilibre

entre des conformères où certains carbonyles sont plus ou moins convergents vers la cavité de

complexation, alors que les autres divergent vers le solvant.

Expérimentalement, de nombreuses études se sont attachées à montrer que la nature des

substituants, dans la partie supérieure et également dans la partie inférieure, jouait un rôle

important dans l'efficacité et la sélectivité de l'extraction et de la complexation des cations

6,15-17.

Dans ce chapitre, nous nous observerons par dynamique moléculaire, les propriétés de

complexation et d'extraction, liées à la structure des molécules extractantes. Les deux

calix[4]arènes-tetraamides étudiés sont: le ligand L2 (Figure 1), calix[4]arène-

tetradiéthylamide, et le ligand L3 (Figure 2), calix[4]arène-diamide-diéthylamide. Ces

ionophores ne différent que par deux branches amides opposées, qui sont de type tertiaire

pour L2 et primaire pour L3. La nature du groupement -NR2 influe sur les propriétés de

complexation et d'extraction du ligand, selon que l'amide soit primaire, secondaire ou tertiaire

(voir Tableau 1).

Page 199: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 183

O

O

N

O

O

NH2

O

O

N

O

O

N

L2 L32

2

Figure 2: ligands "à plat" L2 calix[4]arène-tétradiéthylamide (haut) et L3calix[4]arène-diamide-diéthylamide (bas).

Les données expérimentales ont été déterminées pour la série des alcalino-terreux (Mg2+,

Ca2+, Sr2+, Ba2+) envers lesquels le ligand L2 est sélectif:

- constantes de complexation log β mesurées par spectrophotométrie d'absorption UV 9

- pourcentages d'extraction %E de ces deux ligands mesurés par l'absorbance en

spectrophotométrie à 355 nm des sels de métal–picrate restant dans la phase aqueuse 18.

- constantes thermodynamiques déterminées par calorimétrie 10.

- conformations en solution étudiées par RMN 1H dans les solvants CDCl3 et CD3OD 18.

Tous les résultats pour les deux ligands L2 et L3 sont reportés dans le Tableau 1.

Les valeurs de log β reportées dans le Tableau 1 montrent que la sélectivité de L2 envers

les cations alcalino-terreux n'a pu être définie quantitativement pour Ca2+ et Sr2+.

Qualitativement, il semble que Ca2+ soit préféré.

Page 200: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 184

Ligands Mg2+ Ca2+ Sr2+ Ba2+

Pourcentage d'extraction (%E) a

L2 9 98 86 74

L3 2,0 5,6 3,2 2,6

Constante de stabilité (log β) b

L2 - ≥ 9 ≥ 9 7,2

L3 1,5 6,0 5,4 3,3

Paramètres thermodynamiques de complexation pour L2 (kJ/mol) b

- ∆G - ≥ 51,3 ≥ 51,3 36,4

- ∆H - 29 13,6 8,2

T∆S - ≥ 22,3 ≥ 37,7 28,2a pourcentage d'extraction des alcalino-terreux - picrate de H2O vers CH2Cl2 à 20°C.b complexes dans le méthanol à 25°C.

Tableau 1: propriétés comparées d'extraction et de complexation des cations alcalino-terreux parles ligands L2 et L3. Paramètres thermodynamiques de complexation pour L2. Données extraites dela ref. 18

Lors de mon DEA, j'ai calculé la sélectivité de L2 dans l'eau envers la série Mg2+, Ca2+,

Sr2+ et Ba2+. Bien que les complexes y soient insolubles, nous avions choisi l'eau car les

paramètres utilisés pour décrire les cations avaient été calibrés pour reproduire les énergies

libres d'hydratation de ceux-ci 19. Nous avons vérifié que celles que nous avons calculées,

étaient proches de celles déterminées dans le méthanol. Comme nous le verrons par la suite, la

conformation des complexes et la protection du cation vis-à-vis du solvant par le ligand

devrait être similaires dans l'eau et le méthanol.

A partir de calculs de différence d'énergies libres par la méthode de perturbation, nous

avons défini la séquence de sélectivité de L2 pour les alcalino-terreux: Ca2+ > Sr2+ > Ba2+ >

Mg2+. Ces résultats sont en accord avec l'expérience (Figure 3) et permettent d'évaluer

quantitativement la préférence vis-à-vis de Ca2+ par rapport aux autres cations.

Page 201: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 185

0

4

8

12

M g Ca Sr Ba

G (

kca

l/m

ol)

− ∆

2 + 2+ 2 + 2 +

Expérimentale

0

10

20

30

M g Ca Sr Ba2 + 2+ 2 + 2+

Calculée

G (

kca

l/m

ol)

− ∆

Figure 3: sélectivité de complexation expérimentale (gauche) et calculée (droite) duligand L2 envers les cations métalliques alcalino-terreux. Les traits en pointilléssignifient que les valeurs n'ont pas pu être mesurée avec précision.

D'autre part, les valeurs comparées entre log β et le taux d'extraction %E des deux

ligands L2 et L3 (voir Tableau 1) montrent qu'il y a un important effet des substituants alkyl /

H sur l'atome d'azote des groupements amides. Les complexes de L3 ont une constante de

stabilité plus faible et extraient considérablement moins bien que ceux de L2. La constante de

stabilité reflète la véritable capacité de liaison des ligands, les résultats d'extraction dépendant

de paramètres additionnels, tels que les effets de la solvatation des espèces, le coefficient de

partition, ou la cinétique des systèmes.

Enfin, les mesures de RMN ont mis en évidence des liaisons hydrogène internes,

impliquant les groupements NH2 des ligands L3 libres dans le chloroforme.

Notre objectif est d'étudier le comportement en solution de ces deux ionophores, libres et

sous forme de complexes de (SrPic2), afin de comprendre quels sont les facteurs qui influent

sur leurs propriétés. S'agit-il de la basicité des groupes carbonyles qui varie selon les

substituants sur l'azote ? Les liaisons hydrogène internes jouent–elles un rôle dans les faibles

capacités de complexation et d'extraction de L3 ? Existe-t-il d'autres facteurs à prendre en

compte ? Nous étudierons également l'influence de la structure du calixarène sur le

comportement interfacial. Le calixarène L3 possède des groupements NH2 susceptibles

d'effectuer des liaisons hydrogène avec l'eau. Cela va-t-il différencier son comportement à

l'interface vis-à-vis de L2 ?

Page 202: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 186

2. Méthodes

2.1. Choix des charges

Les charges du ligand L2 sont celles des précédentes études effectuées par Guilbaud et

coll. 13 sur ces molécules. Elles ont été calculées par la méthode MNDO 20 afin de reproduire

le potentiel électrostatique sur la surface de Connolly 21 d'un résidu de la molécule. Ce résidu

et les charges ainsi calculées sont représentés sur la Figure 4. Les charges de l'amide primaire

pour L3 sont ajustées à partir de celles calculées par Jorgensen et coll. pour la Glycine 22.

CA

CACA

CA

CACA

CT

CT

MeMe

HCHC

HC

CT

H

HC

OS

CT

CO

N

Et CT

CT

HC

HC

HCHC

HC

HC

-0.012

0.184

-0.600

0.327

0.353-0.500

-0.400

0.081

0.043

-0.052

0.24

0.002

-0.052

-0.041-0.013

-0.056

0.024

CA

CACA

CA

CACA

CT

CT

MeMe

HCHC

HC

CT

HC

HC

OS

CT

CTO

N

HC

0.184

-0.600

0.327

0.398-0.510

-0.570

0.002

-0.052-0.041

-0.013

-0.056

0.024

-0.012

0.260H H

Figure 4: types d'atomes AMBER et distribution des charges dans les fragmentsdiéthylamide L2 (gauche) et diamide L3 (droite).

Page 203: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 187

Les paramètres et charges de l'anion Pic- sont similaires à ceux utilisés précédemment 23.

Le cation Sr2+ est défini par les paramètres d'Åqvist 19. Les modèles de solvants utilisés sont

l'eau TIP3P 24 et les modèles OPLS du chloroforme, de l'acétonitrile et du méthanol 25.

2.2. Structures de départ.

La structure de départ de tous les complexes de L2 est celle obtenue par les rayons-X,

pour le complexe L2.K+ 8, où K+ est remplacé par le cation étudié. Les groupes carbonyles

sont tangents à la cavité où se situe le cation. Les quatre chaînes amides sont axiales, et le

cône a une symétrie C4v (voir Figure 5). Pour L3, le conformère initiale est identique, les

groupements –NEt2 étant remplacés par –NH2.

Oe

OcN

Oe

Oc

N

Oe

Oc

N

Oe

Oc

N

KSr

N

N

N

OO

O

O

OO O

N

N

N

OO

O

O

OO O

Oe

OcN

Oe

Oc

N

Oe

Oc

N

Oe

Oc

N

Figure 5: conformère du complexe L2.K+ obtenu par rayons-X (gauche) et conformère initial descomplexes de L2 (droite) avec les contre-ions picrates. Les différents type d'oxygènes "éthers" Oe et"carbonyles" Oc sont représentés.

Page 204: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 188

2.3. Dynamique Moléculaire

Les conditions de simulations (solvants et nombre de molécules, taille de boîtes, durée

des simulations) sont indiquées dans le Tableau 2.

Solvant Taille Boîtex × y × z (Å)

Nbre Mol.Solv.

Temps deSimul. (ps)

L2conv Mg2+ vide - - 50Ca2+ vide - - 50Sr2+ vide - - 50Ba2+ vide - - 50Mg2+ H2O 34 × 33 × 32 973 200Ca2+ H2O 33 × 32 × 32 904 200Sr2+ H2O 34 × 33 × 32 997 500Ba2+ H2O 34 × 32 × 31 942 200

L2div Mg2+ H2O 33 × 34 × 33 1014 200Ca2+ H2O 33 × 34 × 33 1014 200Sr2+ H2O 33 × 34 × 33 1014 500Ba2+ H2O 33 × 34 × 33 1014 200

L2conv Sr2+ MeCN 42 × 41 × 40 682 500L2div Mg2+ MeCN 41 × 42 × 41 705 200

Ca2+ MeCN 41 × 42× 41 705 200Sr2+ MeCN 41 × 42 ×41 705 500Ba2+ MeCN 41 × 42 × 41 705 200

L2conv UO2+ H2O 35 × 36 × 35 1399 200

L2div UO2+ H2O 35 × 36 × 35 1364 500

UO2+ MeCN 41 × 42 × 41 709 200

L2conv Sr – 2 Pic CHCl3 51 × 41 × 39 566 300Sr – 2 Pic Interface e/c 49 × 39 × 60 420 + 1830 a 1000

L3 libre - vide - - 2002Oc … H a CHCl3 40 × 38 × 37 394 5002Oe … H b CHCl3 42 × 39 × 39 432 500No O … H c CHCl3 41 × 40 × 37 410 5002Oc … a MeOH 40 × 38 × 38 789 5002Oe … H b MeOH 41 × 40 × 37 843 500No O … H c MeOH 41 × 40 × 37 821 500

L3conv Sr – 2 Pic MeOH 52 × 41 × 38 1107 300Sr – 2 Pic CHCl3 51 × 41 × 38 560 500Sr – 2 Pic Interface e/c 49 × 39 × 60 417+1829 a 1000

a nombre de molécules chloroforme + eau.Tableau 2: Conditions de simulations pour les différents systèmes étudiés.

Page 205: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 189

Les solutés ont été placés dans des boîtes de 400 à 1000 molécules de solvants, ou à

l'interface entre une boîte d'eau et une boîte de chloroforme. Les simulations dans l'eau ont été

effectuées à pression constante. Tous les autres calculs l'ont été à volume constant.

L'algorithme SHAKE est appliqué aux liaisons internes des solvants. Le cut-off utilisé est de

12 Å.

Les temps de simulation pour les systèmes sont, en moyenne, pour les complexes L2.M2+

dans l'eau et l'acétonitrile de 979 s CPU / 1 ps sur une HP 735, pour les complexes L2.M2+Pic-

et tous les complexes de L3 de 600 s CPU / 1 ps sur une HP 9000.

Page 206: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 190

3. Résultats

3.1. Simulations des complexes L2.M 2+ dans le vide, dans l'eau etdans l'acétonitrile

Dans cette section, nous allons décrire les complexes de L2 simulés dans le vide et dans

deux solvants: l'eau et l'acétonitrile. Pour chacun des cations, deux simulations ont été

effectuées à partir de conformères différenciés par la convergence de leurs sites de

coordination. Nous étudierons particulièrement les réorientations de ces sites, ainsi que leurs

interactions avec les cations complexés.

Les premiers conformères, appelés "convergents" (ou L2conv) ont les oxygènes carbonyles

(noté Oc) orientés vers l'intérieur de la cavité formée par les branches diéthylamide (voir

Figure 5). Ils sont plus ou moins tangentiels selon la taille du cation complexé.

Les seconds conformères, appelés "divergents" (ou L2div) ont les oxygènes carbonyles

orientés vers le solvant. Au départ le cation n'est donc en interaction directe qu'avec les

oxygènes éthers (notés Oe).

3.1.1. Structures simulées dans le vide

En phase gazeuse, tous les complexes adoptent rapidement une orientation convergente

des sites de coordination, que le conformère de départ soit L2conv ou L2div. Les cations sont

coordinés aux huit oxygènes de la cavité, légèrement plus proches des Oc que des Oe (∆ = 0,3

Å pour Sr2+ et Ca2+ et 0,4 Å pour Ba2+). Pour Mg2+, le cation, trop petit pour le ligand est très

proche des Oc (∆ = 1,0 Å).

Les dipôles des carbonyles pointent directement vers le centre de la cavité pour les petits

cations. Lorsque ceux-ci deviennent plus larges, les Oc adoptent une orientation tangentielle.

L'angle M2+…O=C passe de 121° (Mg2+) à 115° (Ba2+).

Les complexes sont en moyenne de symétrie C4V pour les parties inférieure et

supérieure. Cependant, lorsque la taille du cation augmente, la partie supérieure se relaxe, et

la distance entre les Oc opposés s'accroît de 3,79 Å (Mg2+) à 4,69 Å (Ba2+) et entre les Oe

Page 207: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 191

opposés de 3,91 Å (Mg2+) à 4,54 Å (Ba2+). Dans le même temps, la distance entre carbones

des t-butyle opposés de la partie haute passe de 9,33 Å (Mg2+) à 8,78 Å (Ba2+). Il y a donc un

couplage haut-bas dépendant de la taille du cation.

Ce couplage haut-bas est visible sur les courbes des angles entre aromatiques opposés

ωAC et ωBD (les courbes pour les différents solvants sont regroupées sur la Figure 9 - § 3.1.4):

les angles oscillent de quelques degrés de manière anti-corrélée. Ainsi, le cône n'est pas

exactement C4V mais sa moyenne dans le temps est de cette symétrie.

3.1.2. Structures simulées dans l'eau

Dans l'eau, la conformation des complexes dépend des cations et de l'orientation initiale

des sites de coordination (convergents ou divergents).

Lorsque les complexes sont au départ de type L2conv.M2+, les résultats sont similaires à la

phase gazeuse. Les structures typiques sont représentées sur la Figure 6.

Pour un cation donné, les distances M2+…Oc sont quasiment identiques et la symétrie du

complexe est C4V comme dans le vide. Seul Mg2+, trop petit pour le ligand, se situe plus

proche des oxygènes éthers Oe. Les Oc ne sont plus en interaction avec le cation et s'orientent

légèrement vers l'extérieur de manière à être mieux solvatés par l'eau. Les autres cations sont

presque à équidistance des huit sites de coordination.

A partir de la forme divergente (L2div), sur les mêmes échelles de temps simulées, les Oc

deviennent plus ou moins convergents selon le type de cation. Les distances M2+…Oc sont

tracées sur la Figure 7.

Dans le cas de Sr2+, trois des quatre Oc reviennent rapidement en position convergente,

en moins de 10 ps. Le dernier Oc se réoriente vers le cation aux alentours de 400 ps. A la fin

de la simulation, le complexe est identique à celui initié à partir de la conformation

convergente. Ceci indique que L2.Sr2+ est proche d'un équilibre thermodynamique.

Pour les autres cations, le temps de simulation a été limité à 200 ps, et aucune

convergence complète n'est observée. Selon la taille du cation, les réorientations des Oc sont

différentes. Pour Ba2+, un oxygène carbonyle se place de manière convergente en moins de 10

ps, alors que les trois autres restent divergents.

Page 208: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 192

Mg2+ - 200 ps

Ca2+ - 200 ps

Sr2+ - 500 ps

Ba2+ - 200 ps

Figure 6: complexes convergents L2conv.M2+ en fin de simulation avec quelques molécules d'eau.

Les oxygènes carbonyles (Oc) sont les seuls atomes du ligands représentés par des sphères. Vuesorthogonales

Page 209: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 193

Pour un cation plus petit, comme Ca2+, les réorientations sont successives, à 100 et 180

ps. Les deux derniers Oc restent à 4,6 Å du cation. La position de Mg2+ dans la cavité est

proche de celle observée dans le conformère convergent: entre les oxygènes éthers Oe. Les Oc

ne convergent pas, et se maintiennent entre 3,7 et 4,9 Å du cation.

2

3

4

5

6

7

0 100 200

L2d.M g 2+

Dis

t (Å

)

0 100 200

L2div.Ca2+

0 200 500

L2div.Sr2+

0 100 200

L2div.B a2+

2

3

4

5

6

7

0 100 200

Dis

t (Å

)

0 100 2000 200 5000 100 200

temps (ps)

Figure 7: complexes L2div.M2+ dans l'eau et l'acétonitrile - évolution temporelle des distances

M2+…Oc dans l'eau (haut) et dans l'acétonitrile (bas).

3.1.3. Structures simulées dans l'acétonitrile.

Dans l'acétonitrile, pour les simulations initiées avec L2div, la convergence des Oc est

beaucoup plus rapide que dans l'eau. Les courbes de distances M2+…Oc en fonction du temps

(Figure 7), montrent que dans la plupart cas, la convergence est effective en moins de 100 ps,

probablement parce que les oxygènes sont beaucoup moins bien solvatés par l'acétonitrile que

par l'eau. Une seule exception pour le complexe L2div.Mg2+, où la structure finale est très

proche de celle obtenue dans les simulations dans l'eau: le cation est entre les Oe (à moins de

2 Å), et les Oc sont entre 3,9 et 5,0 Å de Mg2+.

La simulation à partir du conformère convergent pour L2conv.Sr2+ est similaire à celles

obtenues dans l'eau et dans le vide. Les quatre Oc sont orientés vers la cavité tout au long de

la dynamique.

Page 210: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 194

Une molécule MeCN se trouve dans le cône constitué par les cycles aromatiques pour les

complexes de Sr2+ et Ba2+ (Figure 8). La présence de molécules de solvant dans le cône des

calix[4]arènes est un phénomène bien connu des cristallographes 8,26,27, et a déjà été constaté

au laboratoire MSM dans de nombreuses simulations 13,14,28-31.

Sr2+ - 500 ps

Ba2+ - 200 ps

Figure 8: complexes L2.Sr2+ et L2.Ba2+ dans l'acétonitrile en fin de dynamique. Les moléculesMeCN les plus proches du cation sont représentées. Vues orthogonales

3.1.4. Comparaison structurales et énergétiques

Peu de temps après que les simulations aient été terminées, Casnati et coll. 32 ont réussi à

déterminer la structure aux rayons-X du complexe L2.Sr2+(Pic-)2. Nous comparons dans le

Tableau 3 les paramètres structuraux principaux des complexes de L2conv étudiés par

dynamique moléculaire dans les trois milieux et les mêmes données extraites des résultats

cristallographiques.

Page 211: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 195

En étudiant en particulier les complexes L2.Sr2+, on note peu de différences significatives

entre ces paramètres structuraux. Quantitativement, les distances Sr2+…Oc mesurées en RX

sont légèrement plus grandes que celles dans l'eau ou en phase gazeuse. De même, les angles

entre aromatiques opposés, ou les distances entre les carbones centraux des groupements

t-butyle sont plus grands dans l'acétonitrile. Ceci est probablement dû à la présence d'une

molécule de ce solvant dans le cône du complexe L2.Sr2+.

L2conv Sr2+ Mg2+ Ca2+ Sr2+ Ba2+ UO22+ Sr2+ UO2

2+ Sr2+

vide H2O H2O H2O H2O H2O MeCN MeCN RX

M2+ ... OcA a 2,46 1,92 2,26 2,47 2,71 2,77 2,51 3,12 2,42

M2+ ... OcB a 2,48 4,07 2,25 2,47 2,68 2,82 2,52 3,14 2,48

M2+ ... OcC a 2,47 3,36 2,25 2,48 2,67 2,80 2,50 3,17 2,49

M2+ ... OcD a 2,47 3,98 2,26 2,48 2,69 2,82 2,51 3,28 2,53

M2+ ... Oe a 2,44 1,95 2,43 2,44 2,66 3,40 2,44 2,50 2,58

OcA ... OcC a 4,19 2,72 3,88 4,17 5,03 5,55 4,16 5,46 4,43

OcB ... OcD a 4,20 6,60 3,84 4,17 4,99 5,65 4,16 5,60 4,33

OeA ... OeC a 4,39 3,79 4,18 4,36 4,46 4,80 4,39 4,85 4,64

OeB ... OeD a 4,38 3,99 4,19 4,36 4,47 4,82 4,38 4,85 4,64

CtbA...CtbCb 8,92 10,26 9,05 8,89 8,80 8,57 9,04 8,58 9,23

CtbB...CtbDb 8,94 9,15 9,01 8,87 8,74 8,68 9,06 8,64 8,73

ωAC c 47 69 51 48 46 39 49 39 49

ωBD c 47 54 51 47 45 40 49 40 43

M2+ / OcA a 117 119 120 116 115 105 115 105 118

M2° / OcB a 115 84 121 116 111 103 115 102 117

M2° / OcC a 117 91 120 115 115 99 116 106 119

M2+ / OcD a 116 81 120 114 115 98 114 97 116

Les indices A, B, C, D correspondent aux 4 résidus de L2. A et C sont opposés ainsi que B et D.a distances moyennes (Å)b atomes C centraux des t-butyle.c angles entre cycles aromatiques opposés

Tableau 3: complexes L2conv.M2+ simulés dans le vide, l'acétonitrile et l'eau. Paramètres

structuraux moyens en fin de simulation et comparaison à la structure cristallographique résolueaux rayons-X

De même, les cycles aromatiques oscillent en opposition de phase dans les trois solvants,

mais avec des fluctuations beaucoup plus amples dans l'eau (Figure 9). Les moyennes sur

toute la durée des simulations sont proches pour les trois milieux: 47°, 47° et 49°. Les

Page 212: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 196

amplitudes réduites dans l'acétonitrile par rapport au solvant aqueux sont probablement dues à

la présence de la molécule MeCN dans le cône.

La légère asymétrie constatée pour la structure à l'état solide (49° et 43°) semble résulter

de perturbations causées par l'environnement cristallin. En effet, deux complexes dans

l'acétonitrile, ayant l'un, un cône "carré" et l'autre un cône "rectangulaire" (49° et 43°)

convergent après une minimisation de mécanique moléculaire vers une structure commune

symétrique.

43

48

53

0 25 50

Vide

An

gle

(°)

0 250 500

Eau

0 250 500

Acétonitrile

Figure 9: simulations du complexe L2conv.Sr2+ dans le vide, l'eau et l'acétonitrile - angles ωωAC et ωωBD

en fonction du temps.

Vide Eau Acétonitrile

Mg2+ Ca2+ Sr2+ Ba2+ Mg2+ Ca2+ Sr2+ Ba2+ Mg2+ Ca2+ Sr2+ Ba2+

M2+/L2a -487 -424 -367 -316 -488 -403 -367 -308 -342 -422 -364 -310

% phenb 33% 24% 21% 17% 34% 24% 21% 19% 56% 25% 21% 16%

M2+/Solc - - - - -196 -116 -114 -158 -190 -118 -91 -148

L2/Sold - - - - -54 -58 -53 -36 -56 -73 -80 -61

EL2 e 474 455 444 438 423 433 395 387 425 479 420 468a énergie d'interaction cation/ligandb contribution relative de la partie phénolique (cône + Oe) à M2+/L2.c énergie d'interaction cation/solvantd énergie d'interaction ligand/solvante énergie interne du ligand

Tableau 4: énergies moyennes (kcal.mol-1) des complexes L2conv.M2+ dans le vide, l'eau. Dans

l'acétonitrile, ce sont les complexes L2div.M2+ en fin de simulation lorsqu'ils sont convergents.

Les énergies d'interaction ligand/cation sont fortement attractives (Tableau 4) et varient

de la même manière dans l'eau et l'acétonitrile en fonction du cation (de Ba2+ à Ca2+,

Page 213: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 197

augmentation de 100 kcal.mol-1). Mg2+ ne suit pas dans cette tendance, car le ligand est

convergent dans l'eau et divergent dans l'acétonitrile.

La contribution de la partie phénolique (cône et Oe) est beaucoup moins forte que celle

de la partie amidique (Oc et diéthylamide), qui joue donc un rôle prépondérant dans la

complexation des cations.

Les calix[4]arènes non-substitués ne complexent pas les cations ni dans le méthanol, ni

dans l'acétonitrile. La partie phénolique joue principalement le rôle de support pour les

groupements carbonyles, plus impliqués dans la complexation. Les simulations dans les deux

solvants montrent que la contribution énergétique de la partie carbonyle + amide avec le

cation passe de Ca2+ à Ba2+ de 75 à 84 % dans l'acétonitrile et de 76 à 81 % dans l'eau. Ceci

est en accord avec les distances calculées ci-dessus: plus le cation devient gros, plus il est en

"contact" avec les carbonyles.

Les énergies d'interaction cation/solvant s'accroissent de Ca2+ à Ba2+, tendance opposée à

la solvatation des alcalino-terreux. Ceci signifie que les cations sont protégés du solvant par la

partie amidique, mais que l'ouverture constatée entre les sites de coordination, due à la taille

du cation (voir distances Oc…Oc Tableau 3) permet à des molécules d'eau d'approcher les

hôtes les plus gros. En effet, les fonctions de distribution radiale montrent qu'une molécule

H2O se situe à 2,8 Å de Ba2+, alors que pour Mg2+, Ca2+ et Sr2+, la première molécule de

solvant se trouve à 5 Å. Dans la conformation convergente, les cations les plus petits sont

complètement isolés du solvant. En particulier, Sr2+ l'est encore après 500 ps de simulation.

Enfin, les énergies d'interaction ligand/solvant sont toutes attractives. Les complexes de

Ba2+ ont les interactions avec le solvant les plus faibles, probablement par la présence de la

molécule H2O ou MeCN coordinée au cation qui est en interaction répulsive avec L2.

3.2. Simulations des complexes L2.UO 22+ dans l'eau et dans

l'acétonitrile

Le complexe L2.UO22+ a également été simulé dans l'eau et l'acétonitrile à partir des

conformations divergentes et convergentes du ligand. Initialement, UO22+ se situe dans l'axe

de symétrie C4 du calixarène.

Page 214: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 198

Après 200 ps dans les deux solvants, les conformères convergents le sont toujours. Dans

l'acétonitrile L2div.UO22+ évolue rapidement vers L2conv.UO2

2+, où le cation se trouve

profondément dans la cavité de complexation (Figure 10).

eau – 500 ps

acétonitrile – 200 ps

Figure 10: L2conv.UO22+ dans l'eau et dans l'acétonitrile en fin de simulation. Vues orthogonales

L'atome U est beaucoup plus proche des Oe (2,5 Å) que des Oc (3,2 Å). Dans ces

simulations, le cation UO22+ reste dans la même position.

Dans l'eau, les Oc divergents n'évoluent pas complètement vers une conformation

convergente malgré 500 ps de simulation. Deux Oc pointent en fin de dynamique vers le

cation, alors que les deux autres restent orientés vers le solvant.

L'une des principales différences entre les cations sphériques et UO22+ est la répulsion

électrostatique entre les Ouranyl et les Oc. Bien que la charge atomique de U soit de +2.5, donc

supérieur à celle de Sr2+, le cation UO22+ possède une interaction plus faible avec L2 (Tableau

Page 215: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 199

5). Ainsi la différence de l'énergie d'interaction M2+/L2 est dans l'eau et l'acétonitrile de

l'ordre de 140 kcal.mol-1.

De ce fait, l'affinité de L2 pour UO22+ devrait être beaucoup plus faible que pour les

cations alcalino-terreux.

eau acétonitrile

Sr2+ UO22+ Sr2+ UO2

2+

M2+/L2 a -367 -224 -364 -223

%Phen b 21% 27% 21% 26%

M2+/Sol c -114 -72 -91 -59

L2/Sol d -53 -71 -80 -83

EL2 e 395 409 420 447a énergie d'interaction cation/ligandb contribution relative de la partie phénolique (cône + Oe) à M2+/L2.c énergie d'interaction cation/solvantd énergie d'interaction ligand/solvante énergie interne du ligand

Tableau 5: L2conv.Sr2+ et L2conv.UO22+ dans l'eau et dans l'acétonitrile - énergies

moyennes (kcal.mol-1) des complexes.

3.3. Etude des liaisons hydrogène internes dans le ligand L3

Nous avons vu que les sites de coordination des calix[4]arènes-tétraamide sont

relativement mobiles et, dans les complexes, il peut y avoir des réorientations de manière à

favoriser l'interaction avec le cation ou le solvatation de ces sites de coordination. Lorsque le

ligand est libre, cette mobilité peut mener à différentes conformations avec, si la structure de

résidus amidique l'autorise, à des interactions internes. Comme l'indique le spectre RMN du

ligand L3 libre dans le chloroforme 18, il existe des liaisons hydrogène impliquant les

groupements NH2. Nous avons donc effectué une série de simulations de dynamique

moléculaire en phase gazeuse, dans le chloroforme et dans le méthanol, afin de déterminer les

structures possédant de telles liaisons et dans quelle mesure le solvant pouvait entrer en

compétition avec celles-ci.

Les critères retenus pour considérer une interaction O…H comme une liaison hydrogène

sont d'une part, une distance entre les deux atomes de l'ordre de 2 à 2,4 Å, et d'autre part, une

Page 216: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 200

condition stéréochimique, c'est-à-dire que les "paires libres" de l'atome O soient orientées vers

l'atome H. Enfin la stabilisation énergétique du conformère est également à considérer et à

comparer avec les différences de solvatation en présence et en l'absence d'une telle liaison H.

3.3.1. Phase gazeuse

La première simulation a été effectuée en phase gazeuse, afin d'observer les différentes

conformations prises par le ligand sans l'intervention extérieure d'un solvant. La Figure 11

montre le nombre d'interactions total N-H…Oéther , notées H…Oe, au cours du temps. Pendant

200 ps, les groupements NH2 sont à moins de 2,4 Å des oxygènes éthers des branches

diéthylamide. Dans 95 % de la simulation, lorsque deux liaisons H sont actives, les deux Oe

des branches opposées étant impliqués. Dans les 5% restants, les deux groupements NH2

interagissent avec le même Oe d'une seule branche diéthylamide.

0

1

2

3

0 50 100 150 200Tem ps

No

mb

re d

'inte

rac

tion

s O

... H

Figure 11: simulation de L3 en phase gazeuse - nombre de liaisons NH…Oe en fonction du tempspour le ligand L3 en phase gazeuse (gauche), structure majoritaire avec 2 interactions NH…Oe(droite)

Aucune interaction à cette distance ne se fait entre les NH2 et les oxygènes carbonyles

(notés Oc) des branches diéthylamide pendant les 200 ps de la simulation.

Les liaisons hydrogène n'impliquent donc que les atomes Oe des branches diéthylamide

et les conformations s'échangent au cours du temps. Cependant, une structure reste

Page 217: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 201

majoritaire, celle où les deux Oe sont en interaction avec des hydrogènes des groupements

NH2 (Figure 11 droite).

3.3.2. En solution

Afin d'étudier ce qu'il advenait de ces liaisons hydrogène en solution, des simulations ont

été effectuées dans les solvants utilisés en RMN (CHCl3 et MeOH). Trois conformations

différentes ont été utilisées au départ pour tester le rôle des conditions initiales. Ces

conformations sont:

(a) la conformation initiale des calculs en phase gazeuse comprenant deux interactions

initiales NH…Oc.

(b) une conformation impliquant deux liaisons NH…Oe, tirée de la dynamique en phase

gazeuse, où les deux Oe opposés sont impliqués.

(c) une conformation extraite de la dynamique du complexe L3conv.Sr2+ dans le méthanol, où

les Oc sont tangentiels à la cavité, les NH2 pointent vers l'extérieur de celle-ci, sans aucune

interaction O…HN initiale.

Les distances entre les Oe et Oc des branches NEt2 avec les 4 H des NH2 sont

représentées sur la Figure 12 pour la simulation L3 dans le chloroforme, cas (b).

2

3

4

5

6

7

8

9

0 100 200 300 400 500

2

3

4

5

6

7

8

9

0 100 200 300 400 500

1

2

3

4

5

6

7

0 1 0 0 2 0 0 3 0 0 4 0 0 5 0 01

2

3

4

5

6

7

0 1 0 0 2 0 0 3 0 0 4 0 0 5 0 0

Oc 1 Oc 2

Oe 1 Oe 2(ps)

(ps)

Dis

tanc

es O

...H

Dis

tanc

es O

...H

Figure 12: Simulation de L3 dans le chloroforme: cas (b) - distances (Å) des 4hydrogènes des groupes NH2 aux oxygènes Oc et Oe des branchesdiéthylamide. Courbes en fonction du temps (ps).

Page 218: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 202

Les nombres d'interactions O…HN au cours du temps, pour les deux types d'oxygènes,

sont représentés dans la Figure 13. Le Tableau 6 donne les pourcentages des différents types

d'interactions dans les deux solvants et la comparaison avec la simulation en phase gazeuse.

Ces interactions NH…O ne sont pas stables au cours du temps (voir Figure 12) et de fortes

fluctuations sont visibles. Malgré des simulations de longues durées (500 ps) aucune

convergence vers une structure unique stable n'a été constatée. Ceci suggère qu'il n'existe pas

de minimum d'énergie marqué pour des liaisons H internes à la molécule.

Pour le cas (a) les comportements dans le deux solvants n'ont rien de commun. Elles sont

inversées: une majorité d'interactions Oc…HN dans le méthanol, et une majorité d'interaction

Oe…HN dans le chloroforme. Dans le méthanol, l'une des branches diéthylamides est

entièrement tournée vers le solvant.

Dans le cas (b) une majorité des conformères possèdent des interactions Oe…HN, à plus

de 75% sur les deux branches opposées. Ce sont les seules simulations à avoir un

comportement commun dans les deux solvants. Il faut rappeler que la structure initiale de

cette simulation est extraite du conformère préférentiel de la dynamique en phase gazeuse. Il

semble que cette conformation soit la plus stable de toutes celles obtenues.

Dans le cas (c) enfin, dans le chloroforme, le ligand se bloque dans une conformation avec

deux interactions Oc…HN antiparallèles impliquant les deux branches diéthylamide. Dans le

méthanol par contre, les deux groupements NH2 sont très labiles, et forment plusieurs contact

avec les trois autres oxygènes carbonyles pour des durées excédant rarement 50 ps. Là encore,

pas de similitude dans les deux solvants.

Oc Oe0 H 1 H 2 H % a 3 H 0 H 1 H 2 H % a 3 H

Vide 100,0 0,0 0,0 - 0,0 0,0 8,0 92,0 100,0 0,0

CHCl3 (a) 77,5 12,7 9,8 7,1 0,0 14,6 29,1 56,3 0,0 0,0

CHCl3 (b) 58,0 42,0 0,0 - 0,0 0,0 34,3 65,6 76,6 0,1

CHCl3 (c) 0,0 0,0 100,0 100,0 0,0 100,0 0,0 0,0 - 0,0

MeOH (a) 2,5 41,6 55,9 0,0 0,0 29,1 70,9 0,0 - 0,0

MeOH (b) 18,6 81,4 0,0 - 0,0 0,0 53,1 46,9 85,1 0,0

MeOH (c) 50,2 34,6 15,2 100,0 0,0 23,4 39,4 37,2 61,0 0,0a dans le cas de 2 interactions O…H, pourcentage de liaisons impliquants 2 O différents.Tableau 6: simulations de L3 dans le vide, dans le chloroforme et dans le méthanol - pourcentagesd'existence de 1, 2, 3 ou aucune liaison NH…O , pour les Oc et Oe.

Page 219: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 203

Chloroforme Méthanol

Oc Oe Oc Oe

0

1

2

3(a)

0

1

2

3(a)

0

1

2

3(b)

0

1

2

3(b)

0

1

2

3

0 200 400

(c)

Temps0 200 400

Tem ps 0

1

2

3

0 200 400

(c)

Temps0 200 400

T emps

Figure 13: simulations de L3 dans le chloroforme et le méthanol - nombre d'interactionsOc…HN (1ère & 3ième colonnes) et Oe…HN (2nd et 4ième colonnes). Conformations de départ (a)première ligne, (b) seconde ligne, (c) troisième ligne.

Les interactions à courte distance impliquant les oxygènes carbonyles ne sont pas des

liaisons hydrogène, car les atomes C=Oc…HN y sont alignés, ce qui est beaucoup moins

stable que quand l'atome H pointe vers les paires libres de l'oxygène. En suivant ce critère,

seules les interactions Oe…H peuvent être considérées comme des liaisons hydrogène.

Energétiquement, les conformères présentant de telles liaisons devraient être plus

stables. En fait, les différences d'énergies entre deux conformères présentant ou non une

liaison hydrogène sont relativement faibles. Dans le chloroforme, une stabilisation

énergétique totale de l'ordre de 5 kcal.mol-1 est observée avec la création d'interactions de

type Oe…H, alors que dans le méthanol, cette effet est quasiment nul. Dans tous les cas,

l'énergie due au liaisons hydrogène internes est inférieure à la différence d'énergie de

solvatation des deux même conformères, qui est de l'ordre de 10 kcal.mol-1. Enfin le gain

énergétique des interactions de type Oc…H est très inférieur à ceux des autres structures.

Page 220: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 204

Concernant le reste de la molécule, le cône est quasiment C2v , les deux cycles opposés

portant les groupements CONEt2 étant parallèles et les deux autres orthogonaux (80 à 100

± 5°). Cette structure, qui reste fixe aux échelles de temps simulées, est conforme aux

résultats de l'étude RMN 1H de ces ligands dans les solvants CDCl3 et CD3OD 8,18. Du fait de

sa structure asymétrique, le cône ne contient aucune molécule de solvant.

3.4. Comportement des complexes de L2 et L3 en solution et àl'interface.

Les ligands L2 et L3 ont été simulés sous forme de complexes convergents de SrPic2 en

solution, dans le chloroforme et le méthanol, et à l'interface eau/chloroforme. Ces calculs ont

été entrepris afin d'étudier les différence de complexation du Sr2+ par ces deux ligands dans le

méthanol et d'extraction à l'interface eau/chloroforme. Par comparaison, nous avons simulé

les mêmes complexes à l'interface avec Eu3+.

3.4.1. Simulations dans le chloroforme et dans le méthanol.

Les simulations des complexes de SrPic2 dans le chloroforme et le méthanol aboutissent à

des structures similaires pour les deux ligands: le cation est au centre de la cavité de

coordination, situé à environ 2,5 Å des Oc et 2,4 Å des Oe (voir Tableau 7). Les valeurs

relatives aux oxygènes carbonyles sont proches de celles de la structure à l'état solide, et de

celles calculées dans les simulations dans l'eau et l'acétonitrile (voir § 3.1.2).

Sr2+ - Oc a Sr2+ - Oe b

L2 SrPic2 RX 2,50±0,01 2,58±0,01

L2 SrPic2 CHCl3 2,48 2,45 2,48 2,44 2,43 2,45 2,42 2,45

L2 SrPic2 MeOH 2,48 2,48 2,47 2,48 2,42 2,42 2,43 2,43

L3 SrPic2 CHCl3 2,49 2,43 2,49 2,44 2,44 2,45 2,43 2,43

L3 SrPic2 MeOH 2,47 2,48 2,47 2,48 2,43 2,42 2,42 2,43a distances ± 0,07 Å.b distances ± 0,06 Å

Tableau 7: simulations L2.SrPic2 et L3.SrPic2. dans le méthanol et le chloroforme - distances(Å) cations / 8 sites de coordination (4 Oc et 4 Oe) calculées sur les 100 dernières.

Comparaison avec la structure déterminée aux rayons-X 32.

Page 221: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 205

Si l'écartement des oxygènes éthers est constant dans les dynamiques, l'espace entre deux

oxygènes carbonyles est beaucoup plus variable d'un ligand à l'autre, et d'un solvant à l'autre.

Dans le cas des complexes de L3 la partie basse du calix[4]arène est très asymétrique dans le

chloroforme (3,98 Å et 4,40 Å entre Oc opposés).

Le cône des cycles aromatiques reste C4v tout au long des simulations, avec un angle

entre deux phényles opposés de l'ordre de 47°, valeur proche de celle de la structure à l'état

solide. Pour toutes les simulations dans le méthanol, une molécule de solvant se place très

rapidement dans le cône (généralement, en moins de 100 ps).

Les deux contre-ions ont un comportement différent selon le solvant pour le complexe L3.

- Initialement placés perpendiculairement au calixarène, comme dans la structure cristalline,

ils se rapprochent dans le chloroforme des groupements NH2, pour former des liaisons

hydrogène avec les H orientés vers le solvant (Figure 14). La structure moyenne du

complexe est alors de symétrie C2, comme observé en RMN.

- Dans le méthanol, les H des groupements amides primaires forment des liaisons

hydrogène avec le solvant, et les Pic- font des empilements π avec les groupements

phénoliques du cône (Figure 14). La symétrie totale du complexe est donc, en moyenne,

C2v, ce qui conforme avec les observations de RMN.

Pour tous les complexes L2.M2+, les Pic- restent dans le voisinage de la molécule et du

cation. Ce dernier étant isolé du solvant par les branches diéthylamides, il n'y a aucune

interaction directe possible entre les Pic- et le cation. Il n'y a pas non plus d'interaction entre

l'anion et le ligand comme observé pour L3, ni d'empilement π avec les cycles aromatiques.

Page 222: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 206

CHCl3

MeOH

Interface H2O / CHCl3Figure 14: complexes L3.SrPic2 - vues orthogonales instantanées (droite) et cumulées sur 250 ps(gauche), dans le chloroforme (haut), le méthanol (centre) et à l'interface eau / chloroforme (bas).

Page 223: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 207

Du point de vue de l'énergie interne aux complexes, il n'y a pas de différence majeure

entre les deux types de complexes dans le chloroforme ou le méthanol. Les valeurs entre les

groupes principaux reportées dans le Tableau 8, montrent que toutes les énergies

d'interactions sont très voisines.

L2 CHCl 3 L2 MeOH L3 CHCl 3 L3 MeOH

Complexe/solv. -172 ± 5 -301 ± 14 -180 ± 10 -281 ±15

Sr2+ / solv. -8 ± 4 -102 ± 14 -10 ± 4 -101 ± 9

Sr2+ / L -369 ± 5 -370 ± 5 -362 ± 5 -362 ± 5

Sr2+ / 2 Pic- -174 ± 4 -150 ± 7 -174 ± 11 -160 ± 5

L / solv. -75 ± 4 -69 ± 6 -75 ± 4 -66 ±6

Tableau 8: simulations L2.SrPic2 et L3.SrPic2. dans le méthanol et le chloroforme -énergies d'interactions (kcal/mol) du complexe et de ses composantes avec lesolvant. Valeurs moyennes sur les 100 dernière ps de la simulation.

Il est à noter que les énergies d'interaction des complexes dans le méthanol s'abaissent

fortement lors de la pénétration d'une molécule de solvant dans le cône: l'énergie totale du

complexe passe de –264 à –281 kcal/mol, et l'énergie L/solvant de –39 à –66 kcal/mol. Cette

molécule de méthanol contribue donc à la stabilisation du complexe.

3.4.2. Simulations à l'interface liquide/liquide: eau/chloroforme.

Les différences de taux d'extraction des deux ligands ont posé la question du

comportement des deux complexes de SrPic2 à l'interface. Les solutés, complexes de Sr2+ et

de Eu3+; sont placés initialement parallèles à surface de séparation de Gibbs, solvatés de

manière égale par l'eau et le chloroforme. Très rapidement, en moins de 100 ps, les complexes

de L3 s'orientent perpendiculairement à l'interface, et restent ainsi pendant toute la simulation

(Figure 15). Cette réorientation s'accompagne d'une translation vers le milieux aqueux (voir

Figure 16).

Page 224: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 208

Le cation est situé un peu plus haut dans la cavité du calixarène par rapport aux

simulations dans les liquides purs: 2,50 Å pour la distance Oc…Sr2+ et 2,52 Å pour Oe…Sr2+

contre 2,47 et 2,44 Å respectivement pour les distances dans le chloroforme ou le méthanol.

Le cation se rapproche donc du sommet de la pseudo-cavité, et l'écartement entre les Oc

opposés passe à 4,65 Å. Du fait du faible encombrement stérique entre les branches CONH2,

une molécule d'eau vient se coordiner dès le début de la dynamique au cation à une distance

d'environ 2,60 Å (cette valeur correspond au rayon de la première couche de solvatation du

Sr2+ dans l'eau 19 ). Il en est de même pour L3.EuPic3.

-4

-2

0

2

4

L2.SrPic2

Dis

tan

ce

)

L2.Eu P ic3

-4

-2

0

2

4

L3.SrP ic2

L3.EuP ic3

0

20

40

60

80

0 100 300 500 700 900

An

gle

(°)

T emps (ps)

0 100 200 300 400 500

T em ps (p s)

0

20

40

60

80

0 100 300 500 700 900

T emps (ps)0 100 20

Figure 15: L2.SrPic2, L2.EuPic3, L3.SrPic2 et L3.EuPic3 à l'interface - distancesmasse des complexes (haut), angles des complexes par rapport à l'interface au

Les complexes de L2 oscillent entre une position "à plat" sur l'inte

position semi-perpendiculaire (≈ 50°, voir Figure 15) et restent la majeure

dans la phase organique. Pour L2.SrPic2, jusqu'à 800 ps, les distances entr

de l'ordre de 4,2 Å, et aucune molécule d'eau n'est coordinée au cation

800 ps, le complexe pénètre temporairement et plus profondément da

(Figure 15) et l'écartement entre Oc opposés passe à 4,6 Å. Une moléc

coordiner au cation à une distance de 2,60 Å, comme pour le compL

écartement des carbonyles et l'approche d'une molécule d'eau advien

L2.EuPic3, mais après 200 ps de dynamique seulement.

u

Chloroforme

Ea

0 300 400 500T em ps (p s)

des centres de cours du temps (bas).

rface (0°) et une

partie du temps

e Oc opposés sont

dans la cavité. Vers

ns la phase aqueuse

ule d'eau peut alors se

lexe 3.SrPic2. Cet

nent également pour

Page 225: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 209

Aucune molécule d'eau n'est présente dans les cônes des deux types de ligands, la partie

phénolique supérieure des calixarènes se situant dans la phase organique.

M – Oc a M – Oe b

L2 SrPic2 RX 2,50±0,01 2,58±0,01

L2 SrPic2 Itf 2,52 2,47 2,50 2,53 2,52 2,52 2,51 2,51

L3 SrPic2 Itf 2,49 2,51 2,50 2,50 2,52 2,53 2,53 2,52

L2 EuPic3 Itf 2,42 2,42 2,43 2,45 2,68 2,71 2,68 2,64

L3 EuPic3 Itf 2,50 2,52 2,49 2,51 2,52 2,51 2,53 5,52

Tableau 9: L2.SrPic2, L2.EuPic3, L3.SrPic2 et L3.EuPic3 à l'interface - distances (Å)cations/sites de coordination (Oc et Oe) calculées sur les 100 dernières ps dans lessimulations.

Chloroforme Eau Chloroforme Eau

Figure 16: Complexes L2.SrPic2 (gauche) et L3.SrPic2 (droite) à l'interface après 1 ns dedynamique. Seule l'eau est représentée.

Les anions Pic- n'interagissent ni avec le ligand, ni avec le cation dans aucun des cas.

Pour L2.SrPic2, ils restent dans le voisinage électrostatique du cation (comme le montrent les

énergies d'interactions Mn+/Pic- du Tableau 10). Les distances entre métal et anions sont

constantes à plus ou moins 0,7 Å. Ceux-ci suivent le complexe à travers l'interface.

Pour EuPic3, dans tous les cas, les anions restent à moins de 12 Å du cation complexé. Ils

n'ont aucun mouvement hors de la sphère du cut-off de celui-ci.

Page 226: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 210

L'étude des énergies d'interactions des principaux groupes des complexes met en

évidence la différence d'énergie d'hydratation des cations complexés (Tableau 10). Si la

plupart des interactions énergétiques inter et intramoléculaires sont proches, les énergies

Sr2+/eau passent de -72 kcal.mol-1 pour L2.SrPic2 à -133 kcal.mol-1 pour L3.SrPic2. La même

tendance est observée pour les complexes avec Eu3+, cependant légèrement atténuée (de -85 à

-128 kcal.mol-1).

Or, après 800 ps de dynamique pour L2.SrPic2 et 200 ps pour L3.EuPic3, les complexes

ont une molécule d'eau coordinée au cation à environ 2,6 Å (voir RDFs pour Sr2+ - Figure 17).

La différence d'énergie d'hydratation s'explique donc par la proximité d'autres molécules d'eau

en seconde couche de solvatation.

L2.SrPic2 L2.EuPic3 L3.SrPic2 L3.EuPic3

Complexe / eau -200 ± 10 -165 ± 10 -241 ± 11 -241 ± 9

M n+ / eau -72 ± 9 -85 ± 13 -133 ± 14 -128 ± 16

M n+ / L -371 ± 5 -337 ± 6 -347 ± 6 -345 ± 7

M n+ / Picn -149 ± 5 -142 ± 4 -151 ± 7 -138 ± 6

L / eau -25 ± 4 20 ± 5 0 ± 7 2 ± 7

L / clf -38 ± 4 -55 ± 3 -40 ± 3 -46 ± 3

Tableau 10: L2.SrPic2, L2.EuPic3, L3.SrPic2 et L3.EuPic3 à l'interface - énergies d'interactions(kcal/mol) des complexes et de leurs composantes avec le solvant. Valeurs moyennes sur les 100dernière ps de la simulation.

0

1

2

3

4

5

6

7

0

1

2

3

4

5

0 2 4 6 8 10

L2.SrP ic2

RDF Inté gra ti on

RD

F

Nb

re O

Rayon (Å)

0

1

2

3

4

5

6

7

0

1

2

3

4

5

0 2 4 6 8 10

L3.SrP ic2

RDF Inté gra ti on

RD

F

Nb

re O

Rayon (Å)

Figure 17: simulations à l'interface - fonctions de distributions radiales (RDF) des complexesL2.SrPic2 (gauche) et L3.SrPic2 (droite) pendant les 100 dernières ps de simulation. Lescourbes d'intégration ont leur axe à droite.

Page 227: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 211

Le cation dans le complexe L3.SrPic2 "voit" beaucoup plus de molécules du solvant

aqueux, du fait de la structure même des branches CONH2. Pour L3, le cation Sr2+ est situé à

moins de 3 Å de 1 à 4 molécules d'H2O, et ceci tout au long de la simulation (Figure 18).

Dans le cas de L2, seule une molécule d'eau, celle observée dans la RDF à 2,60 Å, est "vue"

par le cation tout au long de la nanoseconde de dynamique.

Dans le cas des complexes avec Eu3+, il y a une molécule d'eau dans un rayon de 2,7 Å

dès 200 ps pour L2 et L3, et à 5 Å, 4 molécules H2O sont "vues" par Eu3+ pour le complexe

avec L3 et 2 à 3 pour le complexe avec L2. Ces résultats sont en accord avec les énergies

d'interactions du Tableau 10, où Mn+/eau est d'environ 10 kcal.mol-1 plus basse pour L2.Eu3+

que pour L2.Sr2+.

0

0.5

1

1.5

2

0 200 400 600 800 1000

L2 .SrP ic2

Nb

re H

2O

Temps (ps)0 200 400 600 800 1000

L3.SrP ic2

Tem ps (ps )

0

1

2

3

4

0 200 400 600 800 1000

Nb

re H

2O

Temps (ps )

0 200 400 600 800 1000Temps (ps )

Figure 18: simulations à l'interface - nombre de molécules d'eau, au cours du temps, se trouvantdans un rayon de 2,7 Å (haut) et de 5,0 Å (bas) autour du cation, pour les complexes de L2 (gauche)et de L3 (droite).

Page 228: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 212

La différence d'attraction des complexes par l'eau est non seulement due aux caractères

hydrophobe de NEt2 et hydrophile de NH2, mais aussi à la forme de la pseudo-cavité, qui

modifie considérablement l'interaction du cation capturé avec le solvant aqueux. Il paraît clair,

à la lumière de ces résultats qu'un complexe de L3 est plus hydrophile et donc tensio-actif

qu'un le complexe de L2.

Page 229: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 213

4. Discussion

4.1. Réorientation des sites de coordination

Les simulations des complexes L2.M2+ dans l'eau et l'acétonitrile ont montré que le

ligand peut réorienter ses oxygènes de coordination vers le cation complexé. Dans ces deux

solvants, les conformères convergents devraient être en plus grand nombre. La principale

différence entre le solvant aqueux et le solvant organique est la vitesse de cette réorientation

de L2div à L2conv.

Les simulations des complexes L2.M+ avec les cations alcalins 13,14 ont montré que les

changements de conformation convergente/divergente étaient plus lents, et surtout qu'il

existait des conversions de L2conv vers L2div. Il n'y a pas avec les alcalino-terreux de perte

d'interaction M2+…Oc.

Le calix[4]arène libre n'a pas de cavité organisée dans la partie amidique permettant de

recevoir un cation. La répulsion entre ses sites de complexation (les huit oxygènes) empêche

une telle préorganisation. Les interactions avec le cation complexé doivent permettre de

dépasser la barrière énergétique nécessaire à la formation de la pseudo-cavité. Enfin, plus les

sites de complexation des branches amidiques sont solvatés, plus cette barrière de potentiel

sera élevée. J. M. Lehn et coll. 33 expliquent que l'enthalpie de complexation dépend des

changements dans les énergies de liaisons entre le cation et le ligand ou le solvant. Les

modifications de répulsion entre les sites de coordination, de solvatation du ligand et de sa

déformation stérique due à la présence du cation, participent également à ce terme. L'entropie

provient principalement des différences de solvatation du cation, du ligand et du complexe.

Les mesures expérimentales ont montré que la complexation dans le méthanol est un

phénomène entropique 10: T∆S > ∆H. Ces résultats sont en accord avec nos simulations, où le

cation est isolé du solvant dans la cavité. La complexation de M2+ libère donc des molécules

de solvant, ce qui accroît l'entropie du système.

Page 230: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 214

4.2. Importance de la conformation du ligand libre dans la phaseorganique.

La différence de complexation entre les deux ligands L2 et L3 est-elle en partie due à la

conformation du ligand libre en solution?

Les données de RMN caractérisent des liaisons hydrogène internes dans le ligand L3.

Nos simulations confirment la forte population de conformères présentant des interactions

entre des hydrogènes NH2 avec les oxygènes des branches CONEt2. Nos calculs montrent

également que la barrière énergétique nécessaire à la rupture de telles liaisons peut être

facilement dépassée par l'apport d'énergie dû aux seules interactions ligand – solvant. Dans

des conditions expérimentales d'extraction, la phase organique est saturée en eau. Ces

molécules de solvant peuvent faire des liaisons hydrogène avec les protons des groupements

NH2, et ainsi briser les liaisons internes de la molécule, ouvrant la voie à une complexation

potentielle.

Enfin, les conformations simulées, qui sont en concordance avec les résultats de RMN, ne

montrent aucune différence notable entre les molécules de L3 dans le chloroforme ou le

méthanol. La présence d'une molécule MeOH dans le cône des calix[4]arènes pourrait induire

une préorganisation des sites de coordinations 13, et faciliter la capture de l'ion. Mais ce

phénomène est identique pour L2 et L3, et ne peut donc expliquer la différence des

constantes de stabilité.

La flexibilité du ligand est importante pour permettre la préorganisation optimale de la

cavité en vue de la complexation d'un cation. Elle diminue les barrières énergétiques de la

complexation en fournissant des intermédiaires à la désolvatation de l'ion, et favorisant ainsi

la composante entropique du phénomène. Il est possible que les liaisons hydrogène internes

que peut faire le ligand L3, même labiles et très légèrement stabilisantes, puissent ralentir la

mise en place d'une cavité conforme pour la complexation d'un cation. Elles ajouteraient une

composante enthalpique de déformation de la molécule, que ne compensent pas complètement

les phénomènes entropiques.

Page 231: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 215

4.3. La question de la stabilité relative des complexes de L3.

Une seconde raison qui pourrait expliquer les différences entre les constantes de stabilité

log β de L2 et L3, pourrait être la différence de basicité des groupes de coordination

carbonyles, qui diminue avec le passage d'un amide tertiaire à primaire . Des calculs

quantiques ont été effectués par F. Berny au laboratoire, sur des amides CH3CONR2 tertiaires,

secondaires et primaires selon la nature de R. Les résultats vont dans le même sens que les

constantes de stabilité, c'est à dire que l'énergie d'interaction décroît de paire avec la basicité

du groupe C=O 18.

Cependant, ces calculs théoriques en phase gazeuse ne montrent que des propriétés

intrinsèques aux amides, et la position du cation complexé par L2 ou L3 ne correspond pas

exactement à la structure minimisée en mécanique quantique. L'attraction cation – ligand ne

dépend pas seulement de la nature des sites de coordination de la partie amidique. Elle dépend

également de leur orientation précise, de leur mobilité, de la taille du cation vis–à–vis de la

cavité.

Les plus faibles capacités de complexation et d'extraction de L3 comparé à L2 ne sont

donc pas seulement dues à la différence de basicité des carbonyles et des forces des liaisons

C=O…Sr2+.

4.4. Le rôle des contre-ions

Le contre-ion a-t-il un rôle dans l'extraction des complexes vers la phase organique ?

Divers contre-ions ont été utilisés expérimentalement avec les calixarènes, que ce soit en

complexation :Cl-, ClO4-, NO3

- 5,9 ou en extraction: Pic- 34,1,3,35,8,7.

De par la nature de la partie amidique, ils ne peuvent directement interagir avec le cation

complexé 2,8. Cependant, les structures à l'état solide montrent que ces anions restent en

contact avec le complexe, dans la sphère d'influence électrostatique du cation. Dans le

chloroforme, les Pic- font des liaisons hydrogène avec les H des groupements NH2. Pour les

simulations dans le méthanol, le solvant entre en compétition avec les anions, et aucune

interaction Pic-…H n'a pu être caractérisée. Il est donc fort probable que dans un milieux

Page 232: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 216

aqueux, des liaisons hydrogène se forment préférentiellement avec les molécules d'H2O plutôt

qu'avec les contre-ions. Ceci est d'ailleurs observé dans nos simulations à l'interface eau-

chloroforme.

4.5. Etudes des phénomènes interfaciaux.

Comme nous l'avons vu dans les chapitres précédents, la capture de l'ion par l'ionophore

se fait probablement à l'interface eau / liquide organique. De nombreuses simulations

effectuées au laboratoire MSM 28,36,37,23 ainsi que des études expérimentales 38,39 ont montré

la forte activité interfaciale des molécules de type calixarène.

Dans le cas du ligand L2, le cation est protégé du solvant par les quatre branches CONEt2

et, comme nous l'avons vu, il n'est en contact qu'avec un nombre très limité de molécules

d'eau dans un rayon inférieur à 5 Å. Par contre, le ligand L3 ne protège pas aussi bien le

cation complexé et celui-ci "voit" jusqu'à quatre fois plus de molécules d'eau dans ce même

proche voisinage. L'attraction eau – cation qui en résulte ne peut que retenir, ou du moins

ralentir le départ du complexe vers la phase organique. Bien que dans l'échelle de temps de

nos simulations cela ne se produise pas, il est probable que, à cause de cette forte attraction

eau – cation, des décomplexations puissent se faire plus facilement avec L3 qu'avec L2.

Comme nous le suggérons au Chapitre 5, les complexes saturent vraisemblablement

l'interface avant de migrer dans le chloroforme. Les simulations de complexes et ligands

libres des calix[4]arène-couronne6 L1 ont montré que les interactions avec l'eau empêchaient,

dans certains cas, la diffusion vers la phase organique. De par son caractère plus hydrophile

que L2, L3 pourrait rester ancré à l'interface et ne pas s'extraire dans la phase organique, au

contraire des complexes de L2. En modifiant l'équilibre entre lipophilie et hydrophilie du

ligand, les pourcentages d'extraction pourraient être modifiés.

Page 233: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 217

5. Conclusion

Ce travail est issu de la coopération entre expérience et théorie dans le but d'améliorer la

compréhension des propriétés de reconnaissance de cations par des récepteurs synthétiques et

pour concevoir de nouvelles classes d'ionophores.

Nos simulations des complexes L2.M2+ ont montré que les sites de coordination du ligand

peuvent se réorienter pour interagir au mieux avec le cation complexé. Cependant, la vitesse

de cette réorganisation dépend du solvant et de ses interactions avec les oxygènes de

coordination. Les résultats structuraux de nos simulations sont en accord avec les données

cristallographiques du complexe L2.SrPic2.

Nos calculs sur le ligand L3 libre en solution nous ont montré la dynamique de ses

liaisons internes. Ces résultats en solution au niveau microscopique et à l'échelle de la

picoseconde sont concordants avec les analyses de RMN. Le ligand L3 libre en solution, à

cause de ses liaisons hydrogène internes, n'est pas aussi flexible que le ligand L2. Alors que

ce dernier possède une pseudo-cavité mobile, L3 est plus rigide et offre un moins bon

environnement pour la complexation d'un cation.

Par ailleurs, les simulations des complexes de L2 et L3 nous ont montré que l'interaction

entre solvant et cation est beaucoup plus forte dans le cas des complexes de L3, surtout à

l'interface eau-chloroforme. A cela s'ajoute une force de liaison C=O…Sr2+ probablement plus

faible pour L3 que pour L2, à cause des différences de basicité des groupements carbonyles.

De plus, le ligand L3 lui-même, par l'intermédiaire de ses groupes NH2, fait des liaisons

hydrogène avec l'eau, ce qui augmente encore son hydrophilie. Il est clair que si les deux

types de complexes se retrouvent à l'interface, leur comportement sera fortement différent et

l'extraction de L3 probablement plus difficile.

Page 234: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 218

6. Références du chapitre

(1) M. A. Mc Kervey; E. M. Seward; G. Ferguson; B. Ruhl; S. J. Harris; J. Chem. Soc. Chem.

Comm. 1985, 388.

(2) A. Arduini; A. Pochini; S. Reverberi; R. Ungaro; G. D. Andreetti; F. Ugozzoli; Tetrahedron

1986, 42, 2089.

(3) S.-K. Chang; I. Cho; J. Chem. Soc., Perkin Trans. 1986, 1, 211.

(4) G. Ferguson; B. Kaitner; M. A. McKervey; E. M. Seward; J. Chem. Soc., Chem. Comm. 1987,

584.

(5) F. Arnaud-Neu; E. M. Collins; M. Deasy; G. Ferguson; S. J. Harris; B. Kaitner; A. J. Lough;

M. A. McKervey; E. Marques; B. L. Ruhl; M.-J. Schwing-Weill; E. M. Seward; J. Am. Chem. Soc.

1989, 111, 8681-8691.

(6) M.-J. Schwing; M. A. Mc Kervey, ; in Calixrene, a Versatile Class of Macrocyclic

Compounds; Vicens, J. and Böhmer, V., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1990, pp 149-172.

(7) M.-J. Schwing-Weill; F. Arnaud-Neu; M. A. Mc Kervey; J. Phys. Org. Chem. 1992, 5, 496-

501.

(8) A. Arduini; E. Ghidini; A. Ponchini; R. Ungaro; G. D. Andreetti; G. Calestani; F. Ugozzoli; J.

Incl. Phenom. 1988, 6, 119-134.

(9) F. Arnaud-Neu; M.-J. Schwing-Weil; K. Ziat; S. Cremin; S. J. Harris; M. A. M. McKervey;

New J. Chem. 1991, 15, 33-37.

(10) F. Arnaud-Neu; G. Barrett; S. Fanni; D. Marrs; W. McGregor; M. A. McKervey; M.-J.

Schwing-Weill; V. Vetrogon; S. Wechsler; J. Chem. Soc., Perkin Trans. 2 1995, 453-461.

(11) P. D. Beer; M. G. B. Drew; A. Grieve; M. I. Ogden; J. Chem. Soc., Dalton Trans. 1995, 3455.

(12) P. D. Beer; M. G. B. Drew; M. Kan; P. B. Leeson; M. I. Ogden; G. Williams; Inorg. Chem.

1996, 35, 2202-2211.

(13) P. Guilbaud; V. A.; G. Wipff; J. Am. Chem. Soc. 1993, 115, 8298-8312.

(14) A. Varnek; G. Wipff; J. Phys. Chem. 1993, 97, 10 840.

(15) R. Ungaro; A. Pochini, Calixarene-Based Cation Receptors and Carriers; in Calixarenes;

Vicens, J. and Böhmer, V., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1990, pp 149-172.

(16) G. D. Andreetti; F. Ugozzoli; A. Pochini; R. Ungaro, ; in Inclusion Compounds; Atwood, J.

L., Davies, J. E. and MacNicol, D. D., Ed.; Oxford University Press: Oxford, 1991; Vol. 4, pp 64-125.

(17) M. A. McKervey; M.-J. Schwing; F. Arnaud-Neu, ; in Comprehensive Supramolecular

Chemistry; Gokel, G. W., Ed.; Pergamon: Oxford, 1996; Vol. 1, pp 537-603.

(18) F. Arnaud-Neu; S. Barboso; F. Berny; A. Casnati; N. Muzet; A. Pinalli; R. Ungaro; M.-J.

Schwing-Weill; G. Wipff; J. Chem. Soc. Perkin Trans 2 1999.

Page 235: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 219

(19) J. Åqvist; J. Phys. Chem. 1990, 94, 8021-8024.

(20) Q. P. N. 589, "MOPAC-5", , 1990.

(21) M. A. Connolly; J. Appl. Crystallogr. 1983, 16, 548.

(22) W. L. Jorgensen; J. Tirado-Rives; J. Am. Chem. Soc. 1988, 110, 1657-1666.

(23) L. Troxler; G. Wipff; J. Harrowfield; J. Phys. Chem. 1998, 102, 6821-6830.

(24) W. L. Jorgensen; J. Chandrasekhar; J. D. Madura; J. Chem. Phys 1983, 79, 926-936.

(25) W. L. Jorgensen; J. M. Briggs; M. L. Contreras; J. Phys. Chem. 1990, 94, 1683-1686.

(26) G. A. Andreetti; F. Ugozzoli, ; in Calixarenes, a Versatile Class of Macrocyclic Compounds;

Vicens, J. and Böhmer, V., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1990, pp 87-123.

(27) A. F. D. de Namor; N. A. d. Sueros; M. A. McKervey; G. Barrett; F. Arnaud-Neu; M.-J.

Schwing-Weill; J. Chem. Soc., Chem. Comm. 1991, 1546.

(28) G. Wipff; M. Lauterbach; Supramol. Chem. 1995, 6, 187-207.

(29) M. Lauterbach; G. Wipff, Liquid-Liquid Extraction of Alkali Cations by Calix[4]crown

Ionophores: Conformation and Solvent Dependent Na+ / Cs+ Binding Selectivity. A MD FEP Study in

Pure Chloroform and MD Simulations at the Water / Chloroform Interface.; in Physical

Supramolecular Chemistry; NATO ASI Series, E., L. and Kaifer A. Ed., Ed.; Kluwer Academic Pub.:

Dordrecht, 1996, pp 65-102.

(30) A. Varnek; C. Sirlin; G. Wipff, Solvent and Dynamics Effects on the Structure of Alkali Cation

Complexes of the t-Butyl-calix[4]arene Anion: MD and FEP Computer Investigations on the Na+ /

Cs+ Binding Affinity; in Crystallography of Supramolecular Compounds; Tsoucaris, G., Atwood, J. L.

and Lipkowski, J., Ed.; Kluwer Academic Pub.: Dordrecht, 1996, pp 67-99.

(31) F. Fraternali; G. Wipff; J. Incl. Phenom. 1997, 28, 63-78.

(32) N. Muzet; G. Wipff; A. Casnati; L. Domiano; U. R.; F. Ugozzoli; J. Chem. Soc., Perkin Trans

2 1996, 1065-1075.

(33) E. Kauffman; J. M. Lehn; J. P. Sauvage; helv. Chim. Acta 1976, 59, 1099.

(34) S.-K. Chang; I. Cho; Chem. Lett. 1984, 477.

(35) G. Calestani; F. Ugozzoli; A. Arduini; E. Ghidini; R. Ungaro; J. Chem. Soc., Chem. Comm.

1987, 344.

(36) A. Varnek; L. Troxler; G. Wipff; Chem. Eur. J. 1997, 3, 552.

(37) M. Lauterbach; E. Engler; N. Muzet; L. Troxler; G. Wipff; J. Phys. Chem. B 1998, 102, 245-

256.

(38) Y. Ishikawa; T. Kunitake; T. Matsuda; T. Otsuka; S. Shinkai; J. Chem. Soc., Chem. Com.

1989, 736-737.

(39) L. Dei; A. Casnati; P. L. Nostro; A. Pochini; R. Ungaro; P. Baglioni; J. Chem. Soc., Chem.

Com. 1996, 12, 1589.

Page 236: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 6 220

Page 237: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

TTRROOIISSIIEEMMEE PPAARRTTIIEE

CHAPITRE 7

COMPARAISON DE DIFFERENTS

MODELES DE CHLOROFORME

Page 238: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 221

Comparaison de différents modèles de

chloroforme

1. Introduction

Toutes les simulations présentées précédemment utilisent le modèle OPLS du

chloroforme en 4 points de Jorgensen et coll. 1.

La représentation énergétique de ce solvant est basée sur des potentiels en 1-6-12 de

Lennard-Jones, ajustés sur le liquide pur et utilisant les règles de combinaison standard de

Berthelot-Lorentz sur les interactions de van des Waals entre atomes différents. Dans les

systèmes d'interface, comme dans le liquide pur, il faudrait en principe considérer la

polarisation des partenaires. Le modèle de l'eau que nous utilisons (TIP3P 2), qui prend

en compte une certaine auto-polarisation, est peut être trop polaire pour décrire

convenablement les interactions avec le chloroforme. A l'opposé, celui-ci ne prend pas en

compte la polarisation induite par l'eau. Enfin, les propriétés diélectriques des deux

solvants diffèrent probablement à l'interface par rapport aux liquides massiques.

Comme nous l'avons vu pour les ligands libres et les complexes de calixarènes à

l'interface, seuls ou sous forme de couches adsorbées; l'eau exerce une forte attraction sur

les molécules. Peut-être est-elle trop forte (eau trop "polaire") ou l'attraction du

chloroforme est-elle trop faible (modèle OPLS trop peu polaire)? Cette dernière question

a déjà été abordée par M. Lauterbach 3 qui a simulé un complexe L1.Cs+Pic- à l'interface

eau-chloroforme en utilisant le modèle OPLS, mais en multipliant les charges par 1,3 ,

comme nous l'avons fait dans le Chapitre 4. Lorsque le complexe est placé initialement à

l'interface, il y reste adsorbé après 350 ps, légèrement déplacé du coté chloroforme par

Page 239: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 222

rapport à la même simulation avec le modèle OPLS standard. Lorsqu'il est placé

initialement dans le chloroforme à 11 Å de l'interface (soit 1 Å de moins que le cut-off), il

diffuse dans la phase organique pour le modèle OPLS × 1,3, alors que dans la même

simulation avec le modèle OPLS, il revient à l'interface 3.

Rappelons que dans nos simulations de démixtion avec le modèle OPLS × 1,3 , nous

n'observons pas de diffusion du complexe L1.Cs+Pic- (Chapitre 4 § 4.5.1).

Comme nous avons constaté que les énergies interactions solvant/solvant constituent

la part prépondérante de l'énergie totale des systèmes simulés, nous avons décidé de nous

intéresser plus particulièrement aux interactions eau/chloroforme: dans quelle mesure,

l'utilisation d'un autre modèle de chloroforme (la polarisation explicitement prise en

compte ou simulée, la présence d'un groupe CH explicite au lieu de l'atome unifié du

modèle OPLS) pourrait modifier les phénomènes interfaciaux ?

Notre objectif dans ce chapitre est de comparer des modèles de chloroforme très

différents (en 4 ou 5 points/atomes - voir définitions § 1.1) dans leurs interactions avec

l'eau TIP3P et à l'interface liquide-liquide. Pour cela nous avons procédé à cinq types

d'analyses comparatives:

(1) étude du chloroforme pur, (2) dimères H2O-CHCl3 en phase gazeuse, (3) mélanges de

quelques molécules eau en solution dans le chloroforme et de quelques molécules de

chloroforme en solution dans l'eau, (4) calcul de la variation d'énergie libre d'hydratation

de CHCl3 dans l'eau TIP3P selon le modèle de chloroforme et (5) simulations des

interfaces eau-chloroforme.

Nous nous sommes particulièrement intéressés aux interactions du chloroforme avec

l'eau dans l'optique de valider les résultats des simulations à l'interface, obtenues jusqu'ici

avec le modèle OPLS standard.

Page 240: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 223

1.1. Définitions des modèles.

Les différents modèles étudiés sont les suivants:

- Le modèle OPLS de Jorgensen 1 (4p): ce modèle considère le groupement CH comme

un atome unifié, noté M, ce qui réduit de 25 à 16 les paires d'interactions à calculer

par dimère. Les charges et les paramètres de Lennard-Jones ont été calibrés de

manière à obtenir des résultats thermodynamiques (enthalpie de vaporisation,

température et pression) et structuraux (densité, RDFs) corrects pour le liquide pur.

La géométrie est celle des mesures expérimentales en phase gazeuse.

- le modèle OPLS précédent dont les charges atomiques ont été multipliées par 1,3 ,

selon la procédure adoptée par Kovacs 4 et coll. afin d'obtenir un moment dipolaire de

30% plus élevé: il est noté 4p13. C'est le modèle qui a été utilisé par M. Lauterbach

(voir ci-dessus 3) et pour l'une de nos démixtions (Chapitre 4 § 4.5.1).

- Le modèle de Kollman 5 en 5 points (5pK): la géométrie est tirée des paramètres du

champ de force AMBER 6, puis ajustée par calculs ab-initio MP2/6-31G* sur le

monomère. Les charges pour le modèle sont basées sur les études de Fox et Kollman

7 pour la paramétrisation des solvants organiques par la méthode RESP 8,9:

optimisation quantique dans une base 6-31G*, puis calcul du potentiel électrostatique

de la conformation minimale afin d'ajuster les charges. Les paramètres de van der

Waals sont ceux du champs de force AMBER 6, ajustés par calculs de dynamique

moléculaire et Monte Carlo sur le liquide pur pour retrouver les enthalpies de

vaporisation et les densités expérimentales.

- Le modèle de Chang 10 en 5 points (5pC): la géométrie a été définie à partir des

valeurs expérimentales 11. Les charges atomiques ont été calculées à partir du

potentiel électrostatique d'un calcul au niveau MP2 sur une géométrie optimisée au

niveau Hartree-Fock dans une base 6-31G*. Les charges atomiques ont ensuite été

ajustées de manière à reproduire le moment dipolaire expérimental. Les

polarisabilités des atomes (modèle 5pCp) sont extraites du travail d'Applequist et

Page 241: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 224

coll. et reproduisent correctement la polarisabilité expérimentale de la molécule 12.

Les paramètres de Lennard-Jones ont été ajustés par simulations de dynamique

moléculaire successives à 298 K, de manière à reproduire les propriétés dynamiques

et thermodynamiques du chloroforme pour le liquide pur et à l'interface

liquide/vapeur (enthalpie de vaporisation, densité, RDFs, coefficient de diffusion,

tension de surface). C'est le seul modèle en 5 points à avoir une charge négative sur

l'hydrogène, ce qui est chimiquement surprenant.

Ces trois modèles en cinq points devraient pouvoir mieux reproduire les interactions

de type liaison hydrogène entre molécules de chloroforme ou avec les molécules d'eau.

Tous ces modèles considèrent la molécule de chloroforme rigide et utilisent à cet

effet l'algorithme SHAKE pour contraindre les angles et les longueurs de liaisons

internes.

Les paramètres de van der Waals, les charges atomiques, et le moment dipolaire

pour les 4 types de chloroforme sont reportés dans le Tableau 1.

4p 4p13 5pC & 5pCp 5pKC-H Å - 1,100 1,100C-Cl Å 1,758 1,758 1,758Cl-C-Cl ° 111,3 111,3 111,3

qH e - - -0,054 0,248qC e 0,42 0,546 0,561 -0,278qCl e -0,14 -0,182 -0,169 0,010M D 1,07 1,39 1,00 1,23

R*H Å - 1,577 1,187

εH kcal/mol - 0,020 0,016

R*C Å 2,133 1,914 1,908

εC kcal/mol 0,080 0,137 0,109

R*Cl Å 1,947 1,936 1,948

εClkcal/mol 0,300 0,275 0,265

αH Å3 - 0,135 -

αCÅ3 - 0,878 -

αCl Å3 - 1,910 -

Tableau 1: modèles de chloroforme étudiés - structure, charges atomiques, momentdipolaire (M), paramètres de Lennard-Jones (R*,εε) et polarisabilités (αα)

Page 242: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 225

2. Chloroforme pur

2.1. Introduction

Evans présenta en 1983 un premier modèle de chloroforme en 5 points pour les

champs de force 13. Plusieurs modèles ont été définis par la suite dans la littérature. Ceux

de Dietz and Heinzinger 14,15 en 1984 et de Böhm et Ahlrichs en 1985 16. Notons

également le modèle de Kovacs, Kowalewski et Laaksonen en 1990 4, qui gardent les

paramètres de van der Waals du modèle d'Evans, mais en modifient les charges et enfin le

modèle de Jorgensen, Briggs et Contreras (1990) en quatre points 1 [4p]. Plus récemment

ont été présentés les modèles en 5 points de Chang et Dang (1997) 10 [5pC & 5pCp], et

de Wang et Kollman 5 [5pK] ou Fox et Kollman 7 (1998).

Tous ces modèles ont été développés de manière à reproduire au mieux, par

simulations Monte Carlo ou de dynamique moléculaire, certaines caractéristiques

expérimentales du liquide pur. Les modèles de Kovacs, Dietz et Jorgensen ont été

comparés par Tironi et Van Gunsteren 17 par dynamique moléculaire sur des boîtes de

chloroforme pur. Ils ont comparé, à partir des résultats de simulations effectuées dans les

mêmes conditions, les grandeurs thermodynamiques, structurales et dynamiques du

liquide, comme les densités, les RDFs, les coefficients de diffusion, etc.

L'objectif de cette partie n'est pas de comparer de manière exhaustive les liquides

purs comme l'ont fait Tironi et Van Gunsteren 17, mais d'étudier certaines de leurs

caractéristiques (densité, enthalpie de vaporisation, température et structure du solvant,

etc.) dans les mêmes conditions de simulation que celles que nous utilisons à l'interface.

Page 243: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 226

2.2. Méthode

Nous avons utilisé le logiciel AMBER 5.0 6 pour simuler des boîtes de chloroforme

pur pour chacun des modèles.

Toutes les boîtes sont constituées de 267 molécules de solvants. Le cut-off est de

13,5 Å. Les dynamiques sont d'une durée de 250 ps et ont été faites à pression constante.

L'algorithme SHAKE a été utilisé sur les liaisons C-H et M/C-Cl et la température est

maintenue à 300 K avec un temps de relaxation de 1 ps.

Pour l'analyse des résultats, la densité, l'enthalpie de vaporisation et la température

moyenne du système ont été calculées sur les 150 dernières ps de simulations.

Comme il n'y a pas pour le chloroforme d'interaction 1-4 interne et que l'algorithme

SHAKE est appliqué, l'enthalpie de vaporisation est calculée selon la formule

∆Hvap = -Eint + RT [ ∆(PV) = RT ]

avec Eint l'énergie interaction totale de la molécule avec le reste du système et est

égale à l'énergie potentielle totale de la boîte divisée par le nombre de molécules de

solvant.

Les fonctions de distribution radiale (RDF) ont été établies pour C…C (ou M…M) et

H…Cl, puis comparées entre les différents modèles.

Les conditions de simulations sont récapitulées dans le Tableau 2

Cut-off

(Å)

Taille de boîte

(Å3)

Nombre

clf.

Temps simulé

(ps)

4p 13,5 Å 33 × 33 × 33 267 250 ps

4p13 13,5 Å 33 × 33 × 33 267 250 ps

5pC 13,5 Å 33 × 33 × 33 267 250 ps

5pCp 13,5 Å 33 × 33 × 33 267 250 ps

5pK 13,5 Å 33 × 33 × 33 267 250 ps

Tableau 2: chloroforme pur - conditions de simulations

Page 244: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 227

2.3. Résultats

Les différents paramètres calculés pour les modèles sont reportés dans le Tableau 3:

les moments dipolaires (M), densités (ρ), les enthalpies de vaporisation (∆Hvap),

températures et pressions. Toutes ces valeurs sont comparées aux valeurs expérimentales

mesurées à 25 °C.

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK exp. a

M b Debye (1,07) (1,39) (1,00) 1,23 (1,23) 1,01

ρ g / cm3 1,488 ±

0,007

1,506 ±

0,007

1,454 ±

0,009

1,499 ±

0,009

1,466 ±

0,008

1,473

∆HvapKcal/mol 7,11 7,41 7,11 7,25 6,54 7,43

T K 298 ± 6 298 ± 6 299 ± 6 299 ± 6 298 ± 6 298

P Bar 1 ± 109 1 ± 105 3 ± 116 -11 ± 104 2 ± 100 1,0

a ref. 18.b seul le moment dipolaire du modèle 5pCp est véritablement calculé lors des simulations,pour les autres, il est fixe et dépend uniquement des charges atomiques.

Tableau 3: chloroforme pur - moments dipolaires, densités, enthalpies libres devaporisation, températures et pressions calculés.

2.3.1. Moment dipolaire

Le moment dipolaire expérimental de 1,01 D est mesuré en phase gazeuse 18. Böhme

et coll. ont calculé en simulant le chloroforme dans le chloroforme un moment dipolaire

de 1,23 D 16.

• Les moments dipolaires des modèles 4p et 5pC sans polarisation sont inférieurs à

cette valeur. Ceci est dû au fait que ces modèles négligent la forte polarisabilité des

atomes Cl (αCl = 1,91 Å3).

• Les charges atomiques du modèle 4p13 ayant été multipliées par 1,3 dans ce but,

on observe bien un moment dipolaire 30% supérieur à celui de 4p.

• Le 5pK a une répartition de charges donnant M = 1,23 D.

• Le modèle 5pC donne le moment dipolaire dont la valeur est la plus faible. Par

contre, ce même modèle avec la polarisation (5pCp) donne un moment de 1,231, dont

0,231 D induit.

Page 245: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 228

2.3.2. Densités

Pour la densité, les modèles peuvent se classer en 3 groupes:

- densité similaire à la valeur expérimentale: 4p, 5pK, ρ autour de 1,47

- densité légèrement supérieure à la valeur expérimentale: 4p13, 5pCp, ρ autour

de 1,50

- densité inférieure à la valeur expérimentale: 5pC

2.3.3. Enthalpie de vaporisation

Pour l'enthalpie de vaporisation ∆Hvap le modèle 5pK conduit à une valeur très en-

dessous du ∆Hvap expérimental. Pour le modèle 5pC, les résultats ne sont pas satisfaisants

et il apparaît de nouveau clairement que ce chloroforme est calibré pour être utilisé avec

la polarisation explicite.

2.3.4. La structure moyenne du solvant

Elle est caractérisée par les fonctions de distribution radiale (RDF) dans les boîtes de

liquide pur.

0

0.5

1

1.5

2

0 2 4 6 8 10 12 14

RD F C-C

4p4p135pC5pCp5pK

Rayon (Å)

0

0.5

1

1.5

0 2 4 6 8 10 12 14

RD F H-C l

5pC

5pCp

5pK

Rayon (Å)

Figure 1: chloroforme pur - Courbes des fonctions de distribution radiale pour les atomes C…C(ou M…M) pour tous les modèles et pour les atomes H…Cl pour les 3 modèles en 5 points

Page 246: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 229

Pour la distribution carbone-carbone, les cinq modèles ont à peu près la même valeur

maximum (environ égal à 1,7; valeur expérimentale: 2,2) à une distance proche (en

moyenne 5,4 Å - Tableau 4) de celles données par les expériences de diffraction-X (≈ 5

Å) 19. L'intégration au premier minimum donne une valeur de 10 à 12,5 voisins, et la

valeur expérimentale est de 11 20.

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK Exp.

1er max. (Å) 5,3 5,5 5,5 5,4 5,3 5,0 a

2nd max (Å) 9,8 10,7 11,2 9,9 9,9 -

nbr voisins 12 11 12,5 12,7 10 11 b

a ref. 19.b ref. 20

Tableau 4: chloroforme pur - valeurs des fonctions de distributionradiale C…C calculées et expérimentales.

Pour les fonctions H…Cl, les maxima sont beaucoup plus proches (de l'ordre de 3,5

Å) ce qui correspond environ à la somme des rayons de van der Waals du chlore et de

l'hydrogène.

La densité et l'énergie potentielle (par l'intermédiaire du ∆Hvap) sont proches de

l'expérience et la structure du solvant est similaire pour tous les types de chloroforme.

Cependant, il apparaît que l'utilisation du modèle de Chang 5PC mène dans

l'ensemble à des résultats peu satisfaisants, mais simulé avec la polarisation (5pCp), la

densité et le moment dipolaire calculés se rapprochent fortement des valeurs

expérimentales.

Le modèle 5pK ne permet pas d'obtenir une valeur d'enthalpie raisonnable avec les

procédures de calculs standards que nous utilisons, c'est à dire sans les corrections de van

de Waals à longue distance utilisées par Wang et Kollman 5. Nous avons donc réitéré ces

calculs pour 5pK avec un cut-off de 15 Å, qui d'après les auteurs, doit donner des

résultats similaires à ceux des calculs utilisant la correction de van der Waals 7,5.

L'amélioration est sensible pour la densité du 5pK qui passe de 1,466 à 1,475 ±

0,007 g/cm3, mais le ∆Hvap reste faible (à 6,63 kcal.mol-1 au lieu de 7,43 kcal.mol-1 exp.).

Page 247: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 230

3. Dimère H 2O/CHCl3 en phase gazeuse

3.1. Introduction

L'eau est très étudiée par chimie quantique 21-25, et principalement sa capacité à

former des dimères, de trimères ou des agrégats en phase gazeuse. Il n'y a pas à notre

connaissance d'études faites sur les dimères H2O/CHCl3.

Nous nous sommes intéressés dans cette partie à une molécule CHCl3 en interaction

avec une molécule d'eau en phase gazeuse. Ceci afin de voir quelles sont les différences

de configurations et d'énergies d'interaction pour les différents modèles. Ces calculs ont

donc été effectués par mécanique moléculaire (MM) à l'aide du logiciel AMBER, ainsi

que par minimisations de mécanique quantique (MQ).

Il est intéressant de voir quels sont les comportements des modèles utilisés en

dynamique par rapport à la valeur de "référence" obtenue par la mécanique quantique.

3.2. Méthode

3.2.1. Mécanique moléculaire

Deux configurations principales d'un dimère H2O/CHCl3 ont été minimisées dans le

vide, en mécanique moléculaire avec le logiciel AMBER 5,0:

- (1) CHCl3 donneur de proton à H2O par l'intermédiaire de l'atome H pour les

modèles en 5 points et de l'atome unifié M pour les modèles en 4 points.

- (2) CHCl3 accepteur de proton par l'intermédiaire des atomes Cl.

Page 248: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 231

3.2.2. Mécanique quantique

Tous ces calculs ont été effectués à l'aide du logiciel Gaussian 94 26. Les structures

extraites des minimisations de mécanique moléculaire des modèles en 5 points 5pC,

5pCp et 5pK ont été optimisées au niveau Hartree-Fock avec une base 6-31G*. Il n'a pas

été possible de minimiser par MQ une configuration où HO-H…Cl-CCl2H sont alignés

(configuration (2)). Les mêmes structures ont été optimisées au niveau MP2 en utilisant

une base plus complète: 6–311++G(2d,2p), ajoutant polarisation et orbitales diffuses,

utilisée dans la littérature pour étudier les interactions entre molécules de solvant, et plus

particulièrement dans l'étude des dimères/trimères de l'eau 22. Les résultats ont été

corrigés des erreurs de superposition de base (BSSE) 27.

3.3. Résultats.

La première structure étudiée est celle résultant d'une minimisation non-contrainte du

dimère. Dans tous les cas, on observe une convergence vers la configuration (1) où

l'oxygène O de l'eau pointe vers l'hydrogène H ou l'atome unifié M du chloroforme

(Figure 2).

Cl

Cl

Cl

O HH

ClCl Cl

H

O HH

Cl

Cl

Cl

O HH

H

Cl

ClCl

O

H

H

H

4p & 4p13 5pC & 5pCp 5pK Forme contrainte

Figure 2: dimères en phase gazeuse - structures après minimisation complète pour les 5modèles de chloroforme. Configuration (1)

Les structures finales des modèles en 5 points re-minimisées par mécanique

quantique mènent toutes à un minimum commun dont la structure est similaire à celles

obtenues par mécanique moléculaire: interaction entre H2-O…H-CCl3 (Figure 3).

Page 249: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 232

Figure 3: dimère en phase gazeuse - structure finale après minimisation Hartree-Fock

La configuration (2) est celle où les atomes HO-H…Cl-CCl2H sont alignés. Cette

structure n'étant pas un minimum énergétique, les calculs ont dus être effectués avec des

contraintes pour conserver cet axe linéaire. Les structures finales sont donc quasiment

identiques pour tous les modèles.

3.3.1. Comparaisons géométriques pour le minimum "absolu".

Les différentes structures obtenues pour la configuration (1) ont été comparées selon

les critères suivants: distances entre l'O de l'eau et les atomes du chloroforme les plus

proches (M= atome unifié, H dans les modèles en 5 points), les angles de l'axe C[M]…O

et H…O avec le plan de la molécule d'eau.

αβ

Plan H2O

Figure 4: dimères en phase gazeuse:définition des paramètres structuraux.

dist.O-C / O-H

AngleOHC

Angle/planα / β

4p 3,23 / - - 0,08 / -

4p13 3,18 / - - 0,10 / -

5pC 3,40 / 2,87 109,1 18,10 / 35,79

5pCp 3,36 / 2,84 108,9 7,98 / 26,01

5pK 3,43 / 2,32 179,7 0,03 / 0,02

MQ HF 3,22 / 2,20 157,9 43,94 / 36,75

MQ MP2 3,16 / 2,14 157,8 54,39 / 47,01

Tableau 5: dimères en phase gazeuse - structurescomparées des différents calculs MM, MQ.

Page 250: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 233

Ni les modèles en 4 points, ni le modèle 5pK n'ont une orientation coudée comme les

structures obtenues par minimisation quantique. L'axe O…C[M] est quasiment dans le

plan de la molécule d'eau, selon des interactions électrostatiques directes. Le modèle 5pC

conduit à un angle O…H-C plus proche du résultat du calcul quantique, mais avec un

angle β qui est de 18° au lieu d'environ 44° (MQ), ce qui signifie que l'axe de la molécule

de chloroforme est presque perpendiculaire au plan de la molécule d'eau (Figure 2 – 5pC

& 5pCp). Cette orientation s'explique par la charge négative sur l'H du CHCl3.

A titre de comparaison, l'angle de l'axe OH avec le plan H2O (ici α) pour une

liaison hydrogène entre deux molécules d'eau, calculé en MP2(full)/6-311G(2d,2p) est

d'environ 61° 28.

3.3.2. Interactions énergétiques

Sur toutes ces structures, les énergies d'interactions entre les molécules ont été

calculées et sont reportées dans le Tableau 6.

Première constatation: le minimum énergétique quantique est plus stable d'environ

2 kcal.mol-1 par rapport au meilleur des modèles en MM. Ensuite, les différences entre les

types de chloroforme en MM sont également considérables:

les énergies d'interaction sont proches de -2,5 kcal/mol pour 4P et 5pC et 5pCp, et de

-3,3 kcal/mol pour 4p13 et 5pK.

Dans tous les cas, sauf pour le modèle 5pC et 5pCp, c'est l'énergie électrostatique

qui domine les interactions. La structure coudée adoptée par les dimères avec le

chloroforme 5pC et 5pCp, favorise les interactions de type van der Waals qui

compensent des interactions électrostatiques plus faibles entre Oeau(-)…Hclf(-) et

Oeau(-)…Cclf(+).

Page 251: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 234

MM MQConfiguration (1) Configuration (2) Minimum

Totale vdW El Totale vdW El MP2 / HF

4p -2,72 -0,15 -2,57 -0,71 -0,22 -0,53 -

4p13 -3,49 0,02 -3,51 -0,88 -0,19 -0,73 -

5pC -2,34 -0,44 -1,90 -0,80 -0,19 -0,65 -4,68 / -4,47

5pCp -2,62 -0,36 -1,97 -1,28 -0,02 -0,96 -4,68 / -4,47

5pK -3,36 -0,02 -3,34 -0,37 -0,26 -0,15 -4,68 / -4,47

Tableau 6: dimères en phase gazeuse - énergies d'interaction (kcal/mol) calculées en MM etMQ pour les configurations (1) et (2). Composantes électrostatiques (El) et de van der Waals(vdW) pour les énergies d'interactions (kcal/mol) entre dimères par MM

Dans la configuration (2), l'énergie totale varie de -0,5 à -1,3 kcal.mol-1 selon la

valeur de la charge du chlore. L'énergie calculée pour 5pCp est la plus forte grâce à

l'apport de l'énergie de polarisation (environ 0,30 kcal/mol). Pour ce dernier, la différence

d'énergie par rapport aux autres modèles est plus grande que pour la configuration (1), car

le chlore, qui est l'atome le plus polarisable, n'était pas impliqué dans cette précédente

configuration.

3.3.3. Répartition des charges atomiques de Mulliken (MQ)

Les charges de Mulliken sur les atomes sont reportées dans le Tableau 7 avec les

moments dipolaires des molécules seules et en dimères (calculés à partir de ces charges et

de la position des atomes). Les valeurs expérimentales en phase gazeuse sont pour l'eau

de 1,85 D et pour le chloroforme 1,01 D.

Bien que les moments dipolaires du Tableau 7 ne correspondent pas aux valeurs

expérimentales ni à celles calculées par la matrice de densité (données entre parenthèses

dans le Tableau 7), les charges de Mulliken ont l'avantage d'être faciles à obtenir et de

fournir une estimation de la polarisation dans le dimère.

Page 252: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 235

Niveau Molécules Moléculesseules dimères

MP2 CHCl3 CHCl3-H2OC -0,004 C 0,138H 0,049 H 0,065Cl -0,015 Cl -0,080Cl -0,015 Cl -0,080Cl -0,015 Cl -0,066Moment dipolaire 0,369 (1,070) Moment dipolaire 0,941H2OH 0,232 H 0,239O -0,464 O -0,456H 0,232 H 0,239Moment dipolaire 1,310 (1,974) Moment dipolaire 1,557

HF CHCl3 CHCl3-H2OC -0,400 C -0,421H 0,299 H 0,357Cl 0,034 Cl 0,011Cl 0,034 Cl 0,021Cl 0,034 Cl 0,011Moment dipolaire 1,277 (1,353) Moment dipolaire 1,723H2OH 0,434 H 0,448O -0,869 O -0,877H 0,434 H 0,448Moment dipolaire 2,392 (2,198) Moment dipolaire 2,693

Tableau 7: dimères en phase gazeuse - charges atomiques de Mulliken et moment dipolairedes molécules H2O, CHCl3 et du dimère H2O / CHCl3 au niveau HF et MP2. Les momentsdipolaires entre parenthèses sont ceux calculés sur la matrice de densité lors du calcul MQ.

Première constatation: pour la molécule CHCl3 seule nous ne retrouvons pas, pour le

calcul au niveau MP2, de distribution de charges similaire aux modèles 5pC et 5pK:

C(-), Cl(-), H(+). Au niveau HF, par contre, les signes sont similaires à ceux utilisés par

Kollman et coll. pour le modèle 5pK: C(-), Cl(+), H(+).

La polarisation des molécules, d'après les charges de Mulliken, lors de la formation

du dimère est assez forte:

- niveau MP2: moment dipolaire CHCl3 +155 % H2O +19 %

- niveau HF: moment dipolaire CHCl3 +35 % H2O +13 %

La polarisation semble excessive dans le calcul MP2. Le moment dipolaire initial du

CHCl3 trop faible est un artefact de la détermination des charges de Mulliken. Dans le

deux cas, la polarisation de l'eau est d'environ 15%.

Page 253: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 236

4. Solution d'eau dans le chloroforme et dechloroforme dans l'eau.

4.1. Introduction

Afin d'étudier l'importance de l'humidité du chloroforme dans la sélectivité

d'extraction, M. Lauterbach 29 a simulé des complexes L1.M+Pic- dans des boîtes de

chloroforme OPLS contenant quelques molécules d'eau SPC 30. Elle également simulé 3

et 20 molécules d'eau SPC dans des boîtes de chloroforme. Dans le premier cas, il y a

échange entre un dimère et un trimère, tandis pour les 20 H2O se regroupent en deux

gouttelettes 29.

Nous avons re-simulé des systèmes similaires pour les cinq modèles de chloroforme.

La première série de calculs a été effectuée sur quelques molécules d'eau (3 et 20) dans

une boîte de chloroforme. La seconde série est constituée de simulations de deux

molécules de chloroforme dans une boîte d'eau.

Enfin, les différences d'énergies libres d'hydratation entre les modèles dans l'eau

TIP3P ont été calculées par la méthode de perturbation (voir théorie Chapitre 2 § 6)

Dans ces systèmes, la concentration de l'eau dans le chloroforme est légèrement

supérieure à la limite de solubilité qui est d'environ 0,08% en masse 31,32. Dans le cas

d'un soluté constitué de 3 molécules d'eau dans une boîte de chloroforme, nous sommes à

peu près à 0,11 % en masse.

Si la solubilité totale en eau dans le chloroforme est connue expérimentalement, la

composition en monomères, dimères et trimères de H2O reste une inconnue. Des calculs

de pressions de vapeurs et des données RMN permettent de supposer que des dimères et

trimères de molécules d'eau sont présents dans des solvants peu polaires et chlorés 33.

Shaw et coll. soutiennent, à partir d'études de RMN, qu'un modèle d'équilibre

monomères/dimères de molécules d'eau convient mieux à l'interprétation des données

expérimentales 34, alors que d'après Eblinger et coll., un modèle sous forme de trimères

Page 254: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 237

est beaucoup plus réaliste 35. Parallèlement, les calculs quantiques en phase gazeuse

montrent que le modèle du trimère est plus stable que le dimère 21,23.

Pour nos simulations de (H2O)20, nous sommes à 1,81 % en masse, donc largement

en excès d'eau. Ces molécules devraient rester groupées. Selon Christian et coll., dans les

solvants qui dissolvent moins de 0,5 % en mole d'eau (ce qui est le cas du chloroforme), à

forte concentration, quelle que soit l'agitation, les gouttelettes d'eau ne se dissocient pas

33.

Enfin, pour le soluté (CHCl3)2, nous sommes à une fraction molaire de 1,96×10-3

proche de la solubilité expérimentale (1,23×10-3) 36.

4.2. Méthode

4.2.1. Dynamique moléculaire

Les tailles des différentes boîtes pour les systèmes ont été ajustées de manière à

obtenir le même nombre de molécules de solvant, soit 412 clf pour (H2O)3, 492 clf pour

(H2O)20 et 1020 eau pour (CHCl3)2 et 1020 eau pour les mutations entre les modèles de

chloroforme.

Des analyses de populations de monomères, dimères et trimères de molécules d'eau

ont été effectuées afin d'étudier "l'hydrophibicité" relative des modèles de chloroforme.

Pour cela, nous avons calculé le temps que les 3 molécules d'eau soluté ont passé sous

forme d'un trimère, d'un dimère et de 3 monomères, à partir des distances H…O entre ces

molécules (valeur limite considérée pour une interaction comptabilisée: H…O ¶ 2,4 Å).

Ces valeurs rapportées à la durée totale de simulation, nous donnent les pourcentages

d'existence des trois états. Les durées de vie de ces états sont également calculées et

moyennées.

Les conditions de simulations sont récapitulées dans le Tableau 8

Page 255: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 238

Cut-off(Å)

Taille de boîte(Å3)

Nbre Solv.clf + eau

Temps simulé(ps)

3 H2O / clf 4p 15 Å 40 × 40× 35 412 1000 ps

3 H2O / clf 4p13 15 Å 40 × 40× 35 412 1000 ps

3 H2O / clf 5pC 15 Å 40 × 40× 35 412 1000 ps

3 H2O / clf 5PCp 15 Å 40 × 40× 35 412 1000 ps

3 H2O / clf 5pK 15 Å 40 × 40× 35 412 1000 ps

20 H2O / clf 4p 15 Å 40 × 40× 35 492 1000 ps

20 H2O / clf 4p13 15 Å 40 × 40× 35 492 1000 ps

20 H2O / clf 5pC 15 Å 40 × 40× 35 492 1000 ps

2 MCl3 (4p) / eau 12 Å 30 × 30 × 33 1020 500 ps

2 CHCl3 (5pC) / eau 12 Å 32 × 32 × 31 1020 500 ps

Tableau 8: mélanges H2O/CHCl3 - conditions de simulations.

4.2.2. Calculs d'énergie libre

Nous avons effectué des mutations sur une molécule de chloroforme d'un modèle à

un autre afin de comparer les énergies libres d'hydratation.

Afin d'éviter des perturbations trop fortes, nous avons muté séparément les

paramètres de van der Waals et les charges électrostatiques lorsque cela était nécessaire.

Pour ne pas avoir un trop grand nombre de calculs, nous avons procédé de la manière

suivante (Figure 5): le chloroforme 5pC de Chang et Dang est considéré comme le

modèle de départ. Nous avons muté celui-ci en 5pK et vice-versa. Le 4p a été muté en

4p13 , et vice-versa. Enfin, le 5pC a été muté en 4p. Pour cette dernière mutation, les

charges ont été mutées avant les paramètres de van der Waals, afin que l'hydrogène qui

disparaît ait une charge nulle.

4p13 ↔ 4p ← 5pC ↔ 5pK

MCl3 MCl3 CHCl3 CHCl3

Figure 5: mutations des modèles de chloroforme

Les conditions de simulations pour les mutations sont reportées dans le Tableau 9

Page 256: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 239

Durées (ps) a

van der Waals électrostatique Cut-off (Å) c Nbre H2O

4p13 → 4p - 51 × (3 + 5) 15 + CR 1020

4p13 ← 4p - 51 × (3 + 5) 15 + CR 1020

4p ← 5pC 51 × (3 + 5) 51 × (3 + 5) 15 + CR 1020

5pC → 5pK 51 × (3 + 5) 51 × (3 + 5) 15 + CR 1020

5pC ← 5pK b 51 × (3 + 5) 101 × (3 + 5) 15 + CR 1020

a durée totale = nombre de fenêtres × (ps d'équilibration + ps de stockage de données)b l'hystérésis était trop forte pour la mutation des charges en 51 fenêtres (voir plus bas § 4.3.4).c les mutations ont été effectuées avec un cut-off de 15 Å plus le champ de réaction (voirdéfinition Chapitre 2 § 2.3.3)

Tableau 9: mutations des modèles de chloroforme dans l'eau - conditions de simulations .

4.3. Résultats

4.3.1. Solution de 3 molécules d'eau dans le chloroforme

Energies d'interaction.

Les énergies d'interaction eau/chloroforme ont été calculées entre les trois molécules

de soluté et le solvant lorsque les 3 H2O sont séparées sous forme de monomères. Elles

sont reportées dans le Tableau 10.

Le type de chloroforme le plus polaire (4p13) a les énergies d'interaction les plus

importantes, soit en moyenne -6 kcal.mol-1. C'est évidemment l'énergie électrostatique

qui le différencie des autres modèles.

Le moment dipolaire total du chloroforme polarisé 5pCp est dans ce calcul de

1,234 D par résidu, soit très légèrement plus qu'en l'absence d'eau (§ 2.3).

Page 257: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 240

Energietotale

Energie H2O-CHCl3

aH2O-CHCl3

a

ElectroH2O-CHCl3

a

vdWPol b

4p -2763 ± 23 -4,18 / -4,74 / -4,66 -2,00 / -2,50 / -2,59 -2,18 / -2,24 / -2,07 -

4p13 -2850 ± 17 -5,63 / -6,11 / -6,47 -3,65 / -4,06 / -4,45 -2,03 / -1,98 / -2,05 -

5pC -2750 ± 18 -4,20 / -4,27 / -4,17 -1,94 / -2,13 / -1,98 -2,26 / -2,15 / -2,19 -

5pCp -2826 ± 25 -4,51 / -4,00 / -4,15 -2,45 / -2,05 / -2,11 -2,06 / -1,95 / -2,04 -44

5pK -2502 ± 18 -4,30 / -4,11 / -4,11 -2,19 / -2,12 / -1,96 -2,23 / -2,11 / -2,15 -

a par 1 molécule d'eau (kcal/mol).b énergie de polarisation totale du système.

Tableau 10: (H2O)3 dans le chloroforme - énergies d'interaction (kcal/mol) de chaquemolécules d'eau avec le chloroforme. Les valeurs sont données avec une fluctuationmoyenne de 0,8 kcal.mol-1 pour le van der Waals, 1,5 pour l'électrostatique, et 1,6 pourl'énergie d'interaction totale. Calculs sur les monomères pendant 100 ps.

Il peut être intéressant de comparer les énergies d'interaction moyennes H2O/CHCl3

ci-dessus avec celles des dimères précédemment étudiés (cf. Tableau 6).

Gaz Boîte chloroforme 15 Å

EH2O/CHCl3 Rapport à 4p EH2O/Clf Rapport à 4p

4p -2,72 100 % -4,53 100 %

4p13 -3,49 128 % -6,07 134 %

5pC -2,34 86 % -4,21 93 %

5pCp -2,62 96 % -4,22 93 %

5pK -3,36 123 % -4,17 92 %

6-31G* / HF -4,47 164 %

Tableau 11: comparaison des énergies d'interaction moyennes (kcal/mol) H2O/CHCl3entre dimères et boîtes de chloroforme contenant (H2O)3 .

Le rapport entre énergies pour les modèles de chloroforme sans polarisation montre

que la majorité de l'interaction des molécules d'eau soluté se fait dans une configuration

proche du minimum calculé pour les dimères en phase gazeuse. Nous avons vu que

l'interaction directe OH2O…H/MCHCl3 était beaucoup plus forte que celle faisant intervenir

HH2O…ClCHCl3. Afin de déterminer si les arrangements OH2O

…H/MCHCl3 existent en

solution, nous avons calculé les fonctions de distribution radiale.

Page 258: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 241

Structure du solvant autour de H2O

Les 3 molécules d'eau peuvent se regrouper sous forme d'un trimère, d'un dimère

avec un molécule seule, ou sous forme de trois monomères. C'est dans cette dernière

situation que les fonctions de distribution radiales OH2O…HCHCl3 ont été calculées de

manière à voir si le soluté pouvait faire des "liaisons hydrogène" avec le solvant.

Les courbes de RDF sont représentées sur la Figure 6 et les distances des premières

couches de solvatation sont dans le Tableau 12.

OH2O-M MCl3 OH2O-HCHCl3

0

0.5

1

1.5

2

1 2 3 4 5 6 7 8

4p - 4p 13

4p4p13

Rayon (Å)

0

0.5

1

1.5

2

1 2 3 4 5 6 7 8

5pC - 5pCp - 5pK

5pC5pCp5pK

Rayon (Å)

Figure 6: (H2O)3 dans le chloroforme - fonctions de distribution OH2O…H/M pour les modèles

en 4 points (gauche) et en 5 points (droite).

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK

1er max (Å) (3,62) / 4,88 (3,49) / 4,80 2,97 2,76 2,68

intégration (0,7) / 7,5 (0,9) / 7,7 1,5 1,7 1,5

2nd max (Å) - - 4,93 5,06 5,05

Tableau 12: (H2O)3 dans le chloroforme - maxima des courbes de RDF de la Figure 6 pour les5 modèles de chloroforme. Pour les modèles en 4 points, la valeur entre parenthèse correspondau "pseudo-pic" surtout visible pour 4p13 sur la Figure 6 – gauche.

Page 259: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 242

Il apparaît clairement que les hydrogènes des modèles en 5 points ont des

interactions avec les molécules d'eau soluté. Les distances O…H/M sont très proches de

celles déterminées en phase gazeuse (voir Tableau 5 page 232 - ∆ ≈ 0,2 Å), et suivent le

même ordre: 5pK < 5pCp < 5pC (respectivement 2,68, 2,76 et 2,97 Å). Les modèles en

4 points ont des interactions directes O…M beaucoup plus longues (4p 3,6 Å et 4p13 3,5

Å).

Les interactions qui correspondent au minimum en phase gazeuse existent donc

également en solution, et contribuent pour une part très importante à l'énergie

d'interaction entre H2O et CHCl3 (voir Tableau 11).

Taux de tri/dimérisation

Les populations de monomères, dimères et trimères peuvent être estimées dans ces

simulations, en comptabilisant le temps d'existence de chacun de ces états (voir §4.2.1).

Le terme "monomère" signifie qu'il n'y a ni dimère, ni trimère dans la boîte simulée.

Trimère Dimère 3 Monomères

% durée (ps) % durée (ps) % durée (ps)

4p 43,5 19,1 47,2 11,9 9,2 5,5

4p13 13,6 12,1 42,7 19,1 43,7 39,0

5pC 17,6 12,8 62,5 15,1 19,8 7,0

5pCp 0,0 0,0 39,5 19,7 60,4 30,2

5pK 0,0 0,0 67,7 17,6 32,3 8,4

Tableau 13: (H2O)3 dans le chloroforme - pourcentage et durées de vie moyennes destrimères, dimères et monomères d'eau dans les différentes boîtes de chloroforme.

Seules les simulations avec le chloroforme 4p possèdent une population importante

de trimères (H2O)3. Avec les deux modèles 5pCp et 5pK, il n'y en a aucun lors de la

simulation. Aucune tendance ne peut être dégagée de ces populations. En considérant les

durées de vie moyennes des trimères, dimères et monomères, il apparaît que les

chloroformes 4p13 et 5pCp favorisent les monomères. Mais là encore, l'écart n'est pas

réellement significatif par rapport aux autres modèles.

Page 260: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 243

Ces résultats sont différents de ceux obtenues en 600 ps pour (H2O)3 par M.

Lauterbach, où seuls les arrangements en dimère et trimère ont été constatés. Cependant

le modèle de l'eau était différent (SPC 30), le nombre de molécules de chloroforme (509),

ainsi que la durée de la simulation.

0

10

20

30

40

50

60

70

80

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK

%Trimères

%Dimères

%Monomères

05

1015202530354045

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK

Dur

ée d

e vi

e

Trimères (ps)

Dimères (ps)

Monomères (ps)

Figure 7: (H2O)3 dans le chloroforme - Comparaison des populations de trimères, dimères,monomères dans les 5 types de chloroforme: % de présence (haut), durée de vie moyennes(bas). Voir texte §4.2.1 pour les définitions.

En considérant l'équation de formation d'un dimère de molécules d'eau

2 H2O ↔ (H2O)2 K

où la constante de dimérisation ]²[

][

monomères

dimèresK = est le rapport des concentrations,

il est possible de calculer K (Tableau 14) en utilisant les populations de dimères et

monomères du Tableau 13.

Page 261: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 244

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK

K (L.mol-1) 0,56 0,02 0,16 0,01 0,06

Tableau 14: (H2O)3 dans le chloroforme - constantes de formation des dimères d'eau dans lechloroforme.

Masterton et coll. 32 ont déterminé une constante K = 0,57 L.mol-1, et Shaw et coll. 34

donnent une valeur K = 0,51 à 290 K et K = 0,40 L.mol-1 à 306 K, calculées par RMN.

L'utilisation du modèle OPLS 4p conduit donc à des résultats très proches de ces valeurs

expérimentales.

Cependant, les durées de simulations (1 ns) sont probablement trop courtes pour faire

apparaître des différences nettes entre les modèles. En effet il faut noter que certaines

durées de vie de monomères peuvent atteindre 200 ps. Les statistiques devraient donc être

effectuées sur des durées plus longues, de l'ordre de plusieurs nanosecondes.

4.3.2. Solution de 20 molécules d'eau dans le chloroforme

L'étape suivante a été d'étudier le comportement de 20 molécules d'eau dans une

boîte de 492 molécules de chloroforme. La gouttelette a, au départ, un volume de 15 × 19

× 12 Å3. Les énergies d'interactions H2O/CHCl3 sont reportées dans le Tableau 15, les

distances des molécules d'eau au centre de masse de la gouttelette sont représentées sur la

Figure 5.

Pour des raisons de temps, cette étude a été limitée aux trois modèles, 4p, 4p13 et

5pC.

Boîte H2O / chloroforme a H2O /totale totale élec. vdW H2O

b

4p -3297 ± 15 -38 / -1,9 -11 / -0,5 -27 / -1,4 -136

4p13 -3403 ± 15 -48 / -2,3 -20 / -1,0 -28 / -1,4 -135

5pC -3311 ± 16 -37 / -1,8 -9 / -0,4 -28 / -1,4 -145a énergies totales du groupe 20 H2O / ramenées à 1 molécule d'H2O.b énergie d'interaction totale du soluté 20 H2O

Tableau 15: (H2O)20 dans le chloroforme - énergies d'interaction (kcal/mol)soluté/solvant et énergie totale soluté/soluté

Page 262: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 245

Figure 8: (H2O)20 dans le chloroforme - distances entre toutes les molécules H2O et centre demasse global du soluté (H2O)20 , pour les modèles de chloroforme 4p (gauche), 4p13 (milieu) et5pC (droite).

Les 20 H2O restent sous forme d'une goutte d'eau tout au long de la simulation, ce

qui est conforme avec les observations de Christian et coll.33. La goutte ne garde pas une

structure statique, mais change de forme et d'orientation, de la sphère à une structure plus

aplatie et oblongue. Aucune molécule de chloroforme n'est présente à l'intérieur de cette

gouttelette. Dans la simulation avec le modèle 4p, une molécule d'eau se sépare pendant

850 ps du groupe des 20 H2O du départ. Dans la simulation avec le modèle 4p13, trois

molécules s'éloignent temporairement (pendant 100 à 250 ps) du groupe, dont deux sous

forme d'un dimère. La simulation avec le chloroforme 4p13 est la seule où une molécule

d'eau s'échange spontanément avec la gouttelette et le chloroforme en cours de

dynamique. Ceci est en accord avec les résultats obtenus sur les populations de

mono/di/trimères pour les (H2O)3 dans le chloroforme.

Il n'y a pas, comme dans les calculs de M. Lauterbach avec le modèle SPC de

l'eau 29, de formation de deux gouttelettes.

Page 263: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 246

4.3.3. Solution de 2 CHCl 3 dans l'eau

Seuls deux modèles ont été simulés: 4p et 5pC. Les résultats ne montrent pas de

différence de comportement: les deux molécules de chloroforme se dissocient

immédiatement et ont très peu d'interactions entre elles, comme le montre la Figure 9.

-2

-1.5

-1

-0.5

0

0 100 200 300 400 500 600

3 3k

ca

l/m

ol

Temps (ps)

Figure 9: (CHCl3)2 dans l'eau - Energie d'interaction totale(kcal/mol) au cours du temps entre deux molécules dechloroforme 5pC dans une boîte d'eau TIP3P.

Les valeurs énergies d'interactions eau/CHCl3 sont très proches (de l'ordre de -10

kcal/mol) quel que soit le modèle.

Système Energietotale

Energie tot.CHCl3- eau

CHCl3- eauélectro.

CHCl3- eauvdW

1 MCl3 4p -9861±202 -10,5 -1,5 -9,0

2 MCl3 4p -9852±32 -10,6 / -10,4 -1,5 / -1,5 -9,2 / -9,0

1 CHCl3 5pC -9856±127 -10,3 -1,2 -9,1

2 CHCl3 5pC -9784±147 -10,3 / -10,1 -1,2 / -1,3 -9,0 / -8,8

Tableau 16: (CHCl3)2 dans l'eau - comparaison des énergies d'interaction (kcal/mol)eau/CHCl3.

Page 264: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 247

Les fonctions de distribution radiale donnent des résultats relativement proches

pour les deux types de chloroforme: un pic à environ 4,7 Å pour Cl3HC…OH2, avec un

nombre de 28 et 27 molécules d'eau entourant CHCl3, resp. pour le 4p et le 5pC.

Le voisinage de l'atome H du CHCl3 5pC est de 4,8 OH2O, à environ 3,5 Å. Mais

l'interaction HCHCl3-OH2O est beaucoup moins nette que dans les simulations de (H2O)3

dans le chloroforme (comparer Figure 6 – droite page 241 et Figure 10 – droite). L'eau

entourant le chloroforme soluté favorise donc plutôt les interactions H2O/H2O plutôt que

H2O/CHCl3.

0

0.5

1

1.5

0 2 4 6 8 10 12 14

RDF C(M )-O

O PLS5 points C

Rayon (Å)

0

0.3

0.6

0.9

1.2

0 2 4 6 8 10 12 14

RDF H-O

Rayon (Å)

Figure 10: (CHCl3)2 dans l'eau - fonctions de distributions radialesC[M]CHCl3

…OH2O pour 4p et 5pC (gauche), et HCHCl3 …OH2O pour 5pC (droite).

4.3.4. Variation d'énergie libre d'hydratation en fonction du modèle dechloroforme

Les résultats des différentes mutations sont reportés dans le Tableau 17.

Seules les mutations entre les deux modèles en 5 points (5pC et 5pK ) ont nécessité

un échantillonnage plus grand lors de la transformation des charges atomiques (mutation

électrostatique). Il faut noter qu'il y a un échange complet des signes entre les atomes des

deux modèles: C: 0,561 ↔ -0,278 H: -0,054 ↔ 0,248 Cl: -0,169 ↔ 0,010

Page 265: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 248

De plus, l'hydrogène très faiblement chargé dans le modèle 5pC devient plus chargé

que le chlore dans le modèle 5pK. L'eau doit alors se réorganiser autour de la molécule

CHCl3 pendant la mutation pour solvater au mieux les atomes de CHCl3 qui changent de

signe. L'échantillonnage en 51 fenêtres est trop faible pour en rendre compte, et

l'hystérésis était trop forte pour les mutations électrostatiques ( > 0,1 kcal/mol).

Nous avons donc recommencé ces mutations de charges avec une perturbation plus

petite (101 fenêtres). Bien que l'hystérésis entre les énergies libres calculées pour chaque

mutation soit faible, il reste de fortes disparités entre les sens 5pC → 5pK (|∆G| = 0,32 ±

0,02 kcal/mol) et 5pC ← 5pK (|∆G| = 0,17 ± 0,02 kcal/mol).

Pour les mutations 4p ↔ 4p13 et 4p ↔ 5pC , les signes des charges atomiques ne

changent pas, et leurs valeurs restent dans le même ordre de grandeur. L'hystérésis est par

conséquent relativement faible pour ces calculs.

L'hydratation de CHCl3, selon les modèles, suit l'ordre suivant: 4p13 > 5pK ≈ 4p >

5pC (voir Figure 11). A titre de comparaison, nous avons ajouté sur la Figure 11, les

énergies d'interaction calculées pour les dimères H2O/CHCl3 en phase gazeuse, et pour

les 3 molécules d'eau soluté dans les boîtes de chloroforme. Il apparaît clairement que

l'ordre des hydratations (∆∆G) est similaire à ces valeurs d'énergies.

Etat ∆∆GInitial Final Aller - Retour Moyenne

4p 4p13 élect. -0,451 -0,448 -0,449 ± 0,003

4p13 4p élect. 0,435 0,434 0,435 ± 0,001

5pC 5pK élect. -0,361 -0,317

vdW 0,019 0,017 -0,32 ± 0,02

5pK 5pC élect. 0,329 0,371

vdW -0,170 -0,173 0,17 ± 0,02

5pC 4p élect. 0,006 0,004

vdW -0,223 -0,226 -0,219 ± 0,002

Tableau 17: mutations des modèles de chloroforme - valeurs de ∆∆∆∆G (kcal/mol) pour lechloroforme en solution dans l'eau TIP3P.

Page 266: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 249

4p13

4p

5pC

5pK-2.72

-3.49

-2.62

-3.36-4.53

-6.07

-4.21

-4.17h

ydra

tatio

n

+

-

Figure 11: représentation des différences d'énergies libres d'hydratation entre les différentsmodèles de chloroforme. Les valeurs en gras sont les énergies d'interaction (kcal/mol) desdimères H2O/CHCl3 en phase gazeuse (Tableau 6), les valeurs en italiques sont celles des(H2O)3 dans le chloroforme (Tableau 11 - droite)

Page 267: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 250

5. Propriétés des interfaces eau-chloroformeselon les modèles.

5.1. Introduction

Un certain nombre de simulations ont été menées pour l'étude des interfaces liquide-

liquide. Linse a simulé l'interface eau–benzène 37, et plus récemment Fernandes et coll.

l'interface eau–1,2-dichloéthane 38. Ils ont observé que, dans les deux cas, l'interface avait

une certaine épaisseur, non pas due au mélange microscopique des deux liquides dans

cette région, mais à des protubérances des solvants qu'ils attribuent à la théorie des ondes

capillaires.

Le laboratoire MSM a effectué les premières simulations sur les interfaces eau-

chloroforme 39, mais les caractéristiques des deux solvants qui la constituent n'ont jamais

été étudiées en détail comme nous allons le faire ici.

Nous avons simulé six boîtes d'interface eau-chloroforme. Les cinq premières

correspondent aux modèles 4p, 4p13, 5pC, 5pCp et 5pK avec l'eau TIP3P. La sixième

(H2Op+5pCp) a été effectuée en utilisant un modèle d'eau polarisable, développé par

Chang et Dang 10 pour une interface H2O-CCl4. Les paramètres de ce modèle sont définis

dans le paragraphe 5.2.3.

Nous allons donc comparer dans cette partie, les épaisseurs d'interface, les

orientations des molécules dans le liquide massique et à proximité de l'interface, l'aire

interfaciale, les tensions de surface et les énergies d'interactions pour les différents

modèles de chloroforme, et voir en particulier si la présence d'un atome d'hydrogène

explicite ou la polarisation ces propriétés.

Page 268: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 251

5.2. Méthode

Les interfaces eau-chloroforme sont comparées à partir de calculs de dynamique

moléculaire sur des boîtes d'environ 250 CHCl3 et 1000 H2O, d'une durée comprise entre

250 ps et 650 ps. Le cut-off est de 15 Å.

Les épaisseurs d'interface (Chapitre 2 § 7.3.1), les tensions de surface (Chapitre 2 §

7.2.2), les énergies d'interaction eau–chloroforme ainsi que l'orientation des molécules de

solvant et les aires interfaciales (voir ci-dessous) ont été comparées pour les différents

modèles.

5.2.1. Orientation des molécules de solvant

Nous avons utilisé la projection sur l'axe z du moment dipolaire pour déterminer

l'orientation des molécules d'eau et de chloroforme à l'interface et dans le liquide

massique.

La boîte de simulation est divisée en tranches de taille x × y × 4 Å3. Dans ces

volumes, à chaque pas, nous calculons la projection moyenne sur z des moments

dipolaires par molécule de solvant. Cette évaluation est faite sur les 100 dernières ps des

simulations.

Nous obtenons ainsi la composante en z du moment dipolaire moyen par tranche. Le

signe de celle-ci caractérise l'orientation de la majorité des molécules du volume. Un

moment dipolaire moyen nul signifie que les molécules n'ont pas d'orientation

préférentielle.

5.2.2. Aire de l'interface

Nous avons pu calculer l'évolution de l'aire de l'interface au cours du temps pour les

simulations des 5 modèles de chloroforme et la simulation avec l'eau polarisée

(H2Op+5pCp).

La surface x × y est divisée en petits carrés de 1 × 1 Å2, et dans chacun d'entre-eux,

nous recherchons la valeur en z du point correspondant à l'équidistance des deux

Page 269: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 252

molécules H2O et CHCl3 les plus proches. Les rayons de van der Waals R* sont pris en

compte dans ce calcul. Une fois tous les points déterminés, l'aire est calculée par

triangulation. Les valeurs de l'aire sont représentées en fonction du temps.

5.2.3. Conditions de simulations

Les paramètres de l'eau polarisable 10 (H2Op) sont les suivants :

R*O = 3,205, εO = 0,160, qO = -0,730, αO = 0,528,

R*H = 0,000, εH = 0,000, qH = 0,365, αH = 0,170

Le modèle de chloroforme utilisé pour cette interface est 5pCp. Il y a donc polarisation

sur l'ensemble des deux solvants.

Les conditions de simulations sont récapitulées dans le Tableau 18

Cut-off

(Å)

Taille de boîte

(Å3)

Nbre Solv.

clf + eau

Temps simulé

(ps)

TIP3P / 4p 15 32 × 32 × 63 239 + 1072 250 ps

TIP3P / 4p13 15 32 × 32 × 63 239 + 1072 650 ps

TIP3P / 5pC 15 32 × 32 × 63 237 + 1066 250 ps

TIP3P / 5pCp 15 32 × 32 × 63 237 + 1066 260 ps

TIP3P / 5pK 15 32 × 32 × 63 237 + 1066 300 ps

H2Opol/ 5pCp a 15 32 × 32 × 63 237 + 1066 300 ps

a les paramètres de l'eau polarisée sont tirés de la ref. 10

Tableau 18: interfaces eau-chloroforme - conditions de simulations

Page 270: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 253

5.3. Résultats

5.3.1. Densités

Les courbes de densités des différents systèmes sont représentées dans la Figure 12 et

possèdent toutes les caractéristiques suivantes:

- les deux solvants restent séparés. Aucune molécule de l'un des solvant ne

diffuse dans l'autre.

- il existe une partie centrale, autour de la surface de séparation de Gibbs où les

deux liquides se trouvent mélangés. Son épaisseur est environ de 5 à 10 Å.

- il a de fortes fluctuations de la densité du chloroforme dans le liquide

massique.

L'eau ne présente pas de telles fluctuations, qui sont probablement dues pour le

chloroforme à la taille et au faible nombre de molécules dans le liquide massique.

Les densités des solvants sont relativement proches de valeurs expérimentales, les

valeurs des liquides massiques pour les modèles sont reportées dans le Tableau 19.

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK H2Op-5pCp

Exp. a

ρρ(H2O)1,011

±0,009

1,006

±0,009

1,009

±0,011

1,015

±0,016

1,002

±0,014

0,993

±0,0101,00

ρρ(CHCl3)1,470

±0,086

1,500

±0,047

1,493

±0,073

1,445

±0,077

1,491

±0,080

1,518

±0,0861,473

a valeurs expérimentales déterminées à 25 °C

Tableau 19: interfaces eau-chloroforme - valeurs de densités (g.cm-3) pour les simulations àl'interface avec leurs fluctuations et valeurs expérimentales.

Page 271: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 254

0

0.5

1

1.5

24p

MC l3

H2O

0

0.5

1

1.5

24p13

MC l3

H2O

0

0.5

1

1.5

2

0 10 20 30 40 0 60 0

5pC

MC l3

H2O

0

0.5

1

1.5

25pCp

MC l3

H2O

0

0.5

1

1.5

2

0 10 20 30 40 50 60 70

5pK

Z (Å)

0

0.5

1

1.5

2

0 10 20 30 40 50 60 70

H2O p + 5pCp

Z (Å)

Figure 12: interfaces eau-chloroforme - courbes de densités des solvants: eau – trait gras,chloroforme - trait simple.

Page 272: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 255

La courbe de densité du chloroforme des modèles 4p13, 5pCp, et 5pK amorce une

diminution plus rapide que pour les autres. Ceci est probablement dû aux orientations

particulières des molécules CHCl3 à l'approche de l'interface.

5.3.2. Orientations des molécules de solvant

La superposition de toutes les courbes d'orientations des molécules est représentée

sur la Figure 13 et chacune des courbes est montrée séparément sur la Figure 14.

Le moment dipolaire utilisé pour ces calculs est le moment permanent de la

molécule. Il n'est pas possible de conserver les moments dipolaires induits par la

polarisation explicite. Cependant, l'intensité des pics à l'interface peut nous donner une

idée de l'ordre au niveau moléculaire.

- 0 . 4

- 0 . 2

0

0 . 2

0 . 4

0 . 6

0 1 0 2 0 3 0 4 0 5 0 6 0 7 0

Z ( Å )

C l f E a u

O H

H

Cl

MCl

Cl

H

Cl

C

ClCl

Figure 13: interfaces eau-chloroforme - superposition des courbes d'orientationsdes molécules de solvant selon l'axe z. L'orientation préférentielle des molécules àl'interface est représentée à coté des courbes

Page 273: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 256

-0.4

-0.2

0

0.2

0.4

0.64p

0 10 20 30 40 0 60 0

4p 13

5pC

-0.4

-0.2

0

0.2

0.4

0.65p Cp

5pK

-0.4

-0.2

0

0.2

0.4

0.6

0 10 20 30 40 50 60 70

Z (Å)

0 10 20 30 40 50 60 70

H2O p+5p Cp

Z (Å)

Figure 14: interfaces eau-chloroforme - courbes d'orientations des molécules de solvant selonl'axe z pour chacun des modèles. Eau: trait plein, carrés pleins – Clf: trait pointillé, carrésvides.

Page 274: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 257

Il faut noter que le moment dipolaire de l'eau TIP3P est de 2,1 D et celui obtenu pour

le chloroforme polarisable 5pCp est en moyenne de 1,29 D par résidu dans cette

simulation à l'interface. Les autres valeurs sont: 4p : 1,07 D, 4p13: 1,39 D, 5pC: 1,00 D

et 5pK: 1,23 D.

Les pics pour le chloroforme à l'interface, d'une valeur d'environ 0,5 D, indiquent

clairement qu'il y a une orientation préférentielle des molécules CHCl3 dans la région

interfaciale.

Pour l'eau par contre, le pic à l'interface est de l'ordre de 0,1 D au maximum

(généralement plutôt vers 0,05). Il y a donc une plus faible tendance à l'orientation pour

l'eau à proximité de l'interface.

Avec la polarisation (5pCp et 5pCp+H2Op) les pics sont les plus intenses, donc

l'orientation à l'interface plus marquée. Cependant, en calculant le rapport entre le

maximum du pic et le moment dipolaire du monomère isolé nous obtenons le

pourcentage suivant:

4p: 25% 4p13: 29%

5pC: 36% 5pCp: 44%

5pK: 25%

Ceci laisse penser que les modèles de Chang 5pC et 5pCp permettent d'obtenir

l'orientation la plus ordonnée à l'interface, puisque 36 à 44% des dipôles sont orientés

avec H vers l'eau. Dans les autres cas, seuls ¼ des molécules le sont.

Pour l'eau, en moyenne, moins de 5 % des molécules sont orientées avec l'oxygène

vers l'interface.

Ces pourcentages peuvent s'expliquer par la surface non-plane de l'interface. S'il y a

mélange ou des protubérances de solvant, l'orientation des molécules ne se fait pas

uniquement selon la perpendiculaire à la surface de séparation de Gibbs (axe z).

L'orientation ordonnée commence généralement entre 5 et 7 Å du début de la

décroissance de la densité du chloroforme (voir les courbes de densité page 254). Ce ne

sont donc pas que les molécules qui font partie de la zone interfaciale qui possèdent une

orientation privilégiée.

Enfin, selon le moment dipolaire global dans le liquide massique, deux catégories de

modèles de chloroforme peuvent être distinguées. Ceux dont la densité fluctue autour de

0,0 et le modèle 4p13 dont le moment dipolaire croît de manière régulière d'un coté à

Page 275: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 258

l'autre de la boîte. Les molécules de ce dernier possèdent donc une orientation

progressive dans tout le liquide massique.

5.3.3. Epaisseur d'interface

Les épaisseurs d'interface ont été calculées sur toute la durée de la dynamique pour

les 6 systèmes selon la méthode décrite au paragraphe 7.3.1 du Chapitre2.

Pour chaque découpage de l'interface en carrés de longueur l × l (l = L , L/2, L/4 L/8

avec L la largeur totale de la boîte en x,y,), les épaisseurs, calculées à chaque pas, sont

classées selon leur valeur par intervalles d'environ 1 Å. Les distributions de ces classes

sont représentées sur la Figure 15. Leurs maxima (valeurs d'épaisseurs d'interface les plus

probables) sont reportées dans le Tableau 20.

Il faut noter que les statistiques effectuées sur l'ensemble de la boîte (l = L , largeur

de la boîte) sont correctes pour les modèles en 4 points, mais ne sont pas fiables pour les

modèles en 5 points (distribution non-gaussienne, donc impossibilité de définir une

épaisseur d'interface la plus probable). Seules les courbes pour les valeurs L/2, L/4 et L/8

sont donc représentées pour 5pC, 5pCp, 5pK et H2Op+5pCp.

D'après l'équation de calcul de l'épaisseur d'interface (voir Chapitre 2 § 7.3.1), une

valeur de e positive implique que les liquides s'interpénètrent, tandis que e négatif signifie

qu'il existe une séparation entre les deux solvants. Les valeurs de el sont données dans le

Tableau 20.

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK H2Op

eL (Å) 11,9 11,9

eL/2 (Å) 6,8 7,4 8,4 9,1 9,1 9,3

eL/4 (Å) 2,4 2,7 2,9 3,4 3,5 3,8

eL/8 (Å) -2,8 -2,5 -2,6 -2,5 -2,4 -2,1

Tableau 20: interface eau-chloroforme - valeurs en abscisse du maximum de la probabilité desépaisseurs d'interfaces calculées sur toute la dynamique selon les modèles de chloroforme.

Page 276: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 259

0

50

100

150

200

-5 0 5 10 15

4p

LL/2L/4L/8

Den

sité

de

pro

ba

bili

0

50

100

150

200

250

-5 0 5 10 15

4p13

LL/2L/4L/8

0

50

100

150

200

250

-5 0 5 10 15

5pC

L/2L/4L/8

Den

sité

de

pro

ba

bili

0

50

100

150

200

-5 0 5 10 15

5pCp

L/2L/4L/8

0

50

100

150

200

250

300

-5 0 5 10 15

5pK

L/2L/4L/8

Den

sité

de

pro

ba

bili

Epaisseur Interfaciale

0

50

100

150

200

250

-5 0 5 10 15

H2O pol + 5pCp

L/2L/4L/8

Epaisseur Interfaciale

Figure 15: interface eau-chloroforme - densités de probabilité des épaisseurs d'interface pourl = L, L/2, L/4, L/8. L étant la longueur de la boîte.

Page 277: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 260

Les résultats présentés montrent que pour une étude de la totalité de la longueur de la

boîte L ou sur quatre carrés de L/2 de coté, l'interface apparaît comme le mélange des

deux solvants. Lorsque l'on diminue la taille du découpage de l'interface en carrés L/8 de

coté, il n'y a plus d'interpénétration, et l'épaisseur interfaciale est de l'ordre de 2 Å, c'est-

à-dire une distance entre atomes légèrement supérieure à la somme des rayons de van der

Waals.

En conclusion, l'interface est en fait constituée de deux solvants séparés au niveau

microscopique, et son épaisseur change sous l'effet de protubérances des solvants. Ces

résultats sont similaires à ceux de Linse sur l'interface eau-benzene 37 et ceux de

Fernandes pour eau-1,2-dichloroéthane 38.

Il apparaît donc que l'interface semble moins large pour les modèles de chloroforme

en 4 points (7 Å pour L/2 et 2,5 Å pour L/4) que pour les types chloroforme en 5 points

(9,1 Å pour L/2 et 3,5 Å pour L/4). Ces résultats apparaissent clairement sur les surfaces

de l'eau représentées sur la Figure 16.

La seule exception est le 5pC sans polarisation, qui a des épaisseurs (8 Å à L/2 et 3 Å

à L/4) intermédiaires entre les modèles en 5 points et les modèles en 4 points.

Les maxima du Tableau 20 ne sont que les valeurs d'épaisseurs d'interface les plus

probables. En comparant les courbes de distribution pour chaque l (L/2, L/4 et L/8), il faut

remarquer que celles-ci se superposent sur de larges intervalles, ce qui signifie que les

interfaces simulées avec les différents modèles ont épaisseurs globalement similaires.

Page 278: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 261

4p 4p13

5pC 5pCp

5pK 5pCp + H2OpFigure 16: interfaces eau-chloroforme - images instantanées de la surface de l'eau pour les 6systèmes en fin de dynamique.

Page 279: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 262

5.3.4. Aires interfaciales

Les aires interfaciales (définition § 5.2.2) sont représentées au cours du temps sur la

Figure 17. Les valeurs moyennes et la comparaison avec la surface x × y de la boîte sont

dans le Tableau 21.

L'évolution temporelle de l'aire interfaciale donne une information dynamique

globale sur le comportement de l'interface. Nous avons vu avec les calculs d'épaisseurs et

les images instantanées de la surface de l'eau, que la surface de contact entre les deux

solvants n'est pas plane, mais est constituée de pics de liquides.

L'aire réelle des systèmes est de l'ordre de 60% supérieure à la surface x × y de la

boîte de calcul (Figure 17 & Tableau 21). Il existe de larges fluctuations, qui peuvent

aller jusqu'à 7 % de l'aire totale. Dans l'ensemble, il n'y a pas de différence significative

entre les simulations des cinq modèles de chloroforme.

1200

1500

1800

2100

50 100 150 200 250

4p

Air

e (

Ų)

50 100 150 200 250 300

4p13

50 100 150 200 250

5pC

1200

1500

1800

2100

50 100 150 200 250

5pC p

Air

e (

Ų)

T em ps (ps)50 100 150 200 250 300

5pK

Tem ps (ps)50 100 150 200 250 300

H2O - 5pC p

Tem ps (ps)

Figure 17: interfaces eau-chloroforme - évolution de l'aire interfaciale au cours du temps pourles 6 simulations.

Page 280: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 263

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK H2Op-5pCp

Aire Moy. 1616 ± 91 1683 ± 117 1583 ± 116 1677 ± 97 1604 ± 116 1692 ± 122

x × y 1012 1012 1006 1006 1006 1006

Tableau 21: interfaces eau-chloroforme - aires (Å2) interfaciales moyennes et aires calculéesselon les tailles de boîtes x ×× y.

L'interface a donc un comportement dynamique sujet à de larges variations,

principalement dues à la création et la disparition de protubérances de solvant qui

s'interpénètrent.

5.3.5. Tensions de surface

Les tensions de surface de l'eau ont été calculées sur toute la durée des simulations, à

l'exception des 25 premières ps. Elles sont reportées dans le Tableau 22.

4p 4p13 5pC 5pCp 5pK H2Op exp.

σ (mN/m)25 ± 64 31 ± 66 36 ± 66 25 ± 68 39 ± 68 32 ± 74 27,7

Tableau 22: interfaces eau-chloroforme - tensions de surface calculées pour les simulations àl'interface pour tous les modèles de chloroforme.

Les valeurs calculées sont relativement proches de l'expérience, mais l'erreur est très

large. Elles sont données à titre indicatif. Peu de conclusions peuvent être tirées de ces

résultats.

5.3.6. Energies d'interaction eau-chloroforme

Les énergies d'interaction entre les deux solvants eau et chloroforme ont été calculées

sur les 150 dernières ps. Les valeurs sont reportées dans le Tableau 23.

Page 281: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 264

Eboîte EH2O-CHCl3 a EélH2O-CHCl3 EvdWH2O-CHCl3

4p -11862 ± 31 -246 ± 6 -45 ± 4 -201 ± 4

4p13 -11999 ± 35 -298 ± 16 -95 ± 10 -202 ± 8

5pC -11804 ± 39 -279 ± 10 -88 ± 9 -192 ± 9

5pCp -11734 ± 35 -248 ± 10 -53 ± 7 -195 ± 7

5pK -11724 ± 36 -250 ± 10 -59 ± 6 -191 ± 7

H2Op -11579 ± 37 -256 ± 10 -46 ± 6 -210 ± 7

a les énergies d'interaction totale ne comprennent pas l'énergie de polarisation

Tableau 23: interfaces eau-chloroforme - énergies (kcal/mol) totale du système, énergiesd'interaction eau-chloroforme et composantes électrostatiques et de van der Waals (kcal.mol-1).

Il a peu de différences entre les systèmes. Les énergies ont été calculées pour

l'ensemble du chloroforme vis-à-vis de l'ensemble de l'eau. Il faudrait pouvoir développer

une analyse permettant de les calculer par tranches de solvant dans la direction z

perpendiculaire à l'interface. Ainsi, les interactions de la région interfaciale pourraient

peut être nous aider à interpréter les différences d'épaisseurs constatées précédemment.

Les énergies de polarisation intermoléculaire totales sont reportées dans le Tableau

24.

Polarisation

du clf par l'eau

Polarisation

de l'eau par le clf

5pCp -25 ± 3 -

H2Op + 5pCp -19 ± 4 -6 ± 2

Tableau 24: interfaces eau-chloroforme - énergies de polarisationintermoléculaires chloroforme/eau pour les systèmes 5pCp et5pCp+H2Op (kcal/mol).

La part de l'énergie de polarisation est relativement faible dans ces simulations (10 %

de l'énergie d'interaction eau/chloroforme totale), de l'ordre des fluctuations des énergies

d'interactions entre les deux solvants.

Page 282: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 265

6. Discussion

Au moment où se termine la rédaction de ce chapitre, toutes les analyses sur les

interfaces eau-chloroforme n'ont pas encore été effectuées. La cause principale en est le

développement encore partiel des outils d'analyse. Des paramètres comme les coefficients

de diffusion selon la position sur l'axe z, le nombre de liaisons hydrogène effectuées à la

frontière entre H2O-H2O et H2O-CHCl3, ou le temps d'autocorrélation de l'oscillation de

l'interface sont de mesures qui restent à effectuer. Nous ne pouvons pas, par conséquent,

en présenter les résultats dans ce manuscrit.

6.1. Du dimère en phase gazeuse au soluté en solution.

Les différents calculs effectués sur les dimères en phase gazeuse et sur (H2O)3 dans

le chloroforme ont montré que la plus grande part de l'énergie H2O-chloroforme était due

aux interactions avec la première couche de solvatation. En effet, il apparaît que les

molécules H2O dans le chloroforme ont des interactions attractives avec les H[M] du

solvant (RDF de la Figure 6). En phase gazeuse, l'énergie OH2O…HCHCl3 est de l'ordre de

-2,6 à -3,3 kcal.mol-1 (Tableau 6). La seule autre configuration ayant une attraction

directe entre atomes, HH2O…ClCHCl3 est de l'ordre de -0,4 à -0,9 kcal.mol-1, soit en

moyenne 25% de l'interaction OH2O…HCHCl3 (modèles sans polarisation). Lorsqu'une

molécule d'eau est solvatée par le chloroforme, elle ne fait qu'une seule interaction

OH2O…HCHCl3, et la contribution des autres molécules de chloroforme est probablement

mineure.

Considérons qu'une molécule d'eau soit entourée d'environ 6 molécules de

chloroforme (voir exemple tiré d'une dynamique - Figure 18). Nous ne prendrons en

compte que les contributions des CHCl3 ayant des interactions OH2O…HCHCl3

et

HH2O…ClCHCl3 (×2) (traits pleins sur la figure), en supposant que les autres molécules de

chloroforme participent très faiblement à l'énergie totale.

Page 283: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 266

Figure 18: une molécule d'eau dans le chloroforme – représentation de la première couche desolvatation. Les Cl sont resp. à 3,0 et 3,1 Å des Heau, et la distance Oeau

…Hclf est de 2,4 Å.

Nous faisons la somme des énergies d'interaction en phase gazeuse pour

OH2O…HCHCl3 et 2 × HH2O

…ClCHCl3 (valeurs tirées du Tableau 6) et nous obtenons pour le

modèle 4p:

-2,72 + 2 × -0,71 = -4,14 kcal.mol-1.

Les autres résultats sont dans le Tableau 25 suivant:

Boîte chloroforme15 Å (§ 4.3.1)

Calcul à partir de la phasegazeuse (ci-dessus)

EH2O/CHCl3 Rapport à4p

EH2O/CHCl3 Rapport à4p

4p -4,53 100 % -4,14 100 %

4p13 -6,07 134 % -5,25 125 %

5pC -4,21 93 % -3,94 95 %

5pK -4,17 92 % -4,10 99 %

Tableau 25: énergies d'interactions (kcal/mol) pour (H2O)3 dansle chloroforme (colonnes centrales), et à partir des calculssimples définis dans le texte ci-dessus (deux dernières colonnes).

Il est clair que la contribution principale de l'énergie d'interaction de l'eau avec le

chloroforme se trouve dans la première couche de solvatation.

Page 284: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 267

Pour le modèle 5pCp avec polarisation, ces relations simples ne sont pas valides. En

effet, la polarisation du milieu est très différente en phase gazeuse pour un dimère et en

solution.

6.2. Comparaison des modèles de chloroforme

Il existe des différences ponctuelles selon le système et les simulations (phase

gazeuse, mélange, interface…), mais aucun modèle n'a des résultats considérablement

différents des autres.

Le modèle 4p13 conduit aux interactions les plus fortes avec l'eau, que ce soit en

phase gazeuse pour le dimère, pour les simulations de trois molécules d'eau soluté dans le

chloroforme ou en calculant les différences d'énergies libres d'hydratation. Cependant, à

l'interface les résultats structuraux ne sont pas considérablement différents de ceux du

modèle 4p: épaisseurs identiques et inférieures aux modèles en 5 points, aires

interfaciales similaires.

De même, les modèles 5pK et 5pCp diffèrent par leur répartition de charges et par la

polarisation explicite sur 5pCp. Cependant, les interactions des molécules de

chloroforme avec l'eau sont très proches et dans aucune des simulations des deux

modèles on observe de trimère d'eau. A l'interface les épaisseurs sont quasiment

identiques ainsi que les aires interfaciales.

Seul le modèle 5pC se distingue par l'interaction H2O/CHCl3 la plus faible, en phase

gazeuse, pour les mélanges d'eau dans le chloroforme, lors du calcul des différences

d'énergies libres d'hydratation. Les épaisseurs d'interface des simulations avec 5pC sont

intermédiaires entre les modèles en 4 points et les modèles 5pCp et 5pK. Il faut rappeler

que Chang, Dang, et Peterson 10 ont calibré les propriétés du liquide pur de leur modèle

en utilisant la polarisation sur le chloroforme, donc en utilisant 5pCp.

La prise en compte de la polarisation des molécules de chloroforme ne semble pas

donner des résultats très différents des autres modèles. Ainsi, les énergies d'interaction

des molécules d'eau soluté avec le chloroforme polarisé sont dans le même ordre de

grandeur, aux fluctuations près, que les autres modèles sans polarisation. De même, la

Page 285: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 268

structure du solvant, analysée par les RDFs, ne montre pas de différence notable avec les

autres type de chloroforme en 5 points.

A l'interface, les énergies d'interaction H2O/CHCl3 ne permettent pas non plus de

différencier ce modèle des autres. Seule l'orientation des molécules à l'interface dépend

de la polarisation des CHCl3. Pour les simulations avec 5pCp, les molécules de

chloroforme sont légèrement plus ordonnées que pour les autres modèles (44% contre

25% en moyenne), l'interface n'étant pas plus plane pour ce système.

L'eau ne polarise pas fortement le chloroforme. L'augmentation du moment dipolaire

est de l'ordre 0,29 D, en moyenne, pour les simulations à l'interface, alors que dans le

liquide pur elle est de 0,23 D.

Il faut cependant noter que dans toutes ses simulations, il n'y a pas de soluté

fortement chargé, ou avec une charge localisée comme un cation métallique. Dans ce cas,

il est probable que la polarisation explicite aurait une influence plus importante sur le

chloroforme au voisinage de l'ion. Les simulations de dynamique moléculaire effectuées

par Chang et Dang 40, sur des cations métalliques dans le chloroforme polarisé, ont mis

en évidence une forte orientation des molécules de solvant autour des ions et ils ont

caractérisé une première couche de solvatation bien définie.

Page 286: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 269

7. Conclusion

Dans le but de comparer cinq types de chloroforme pour simuler l'interface avec

l'eau, nous avons effectué un certain nombre de simulations. Les calculs et les analyses

ont été faits dans les mêmes conditions pour les cinq modèles.

Cependant, les différents tests montrent que tous les types de chloroforme ont des

caractéristiques très proches, en ce qui concerne l'interaction avec l'eau TIP3P.

Les analyses que nous avons effectuées ne nous permettent pas de différencier

véritablement les performances des modèles étudiés, ni d'en sélectionner/exclure un en

particulier pour les simulations à l'interface. Et cela, malgré les différences considérables

qui existent entre eux: atome unifié ou groupe CH explicite, charge de H négative ou

positive, moments dipolaires de 1,0 D à 1,4 D, polarisation explicite pour l'un d'eux.

L'utilisation de la polarisation ne semble pas constituer un apport notable qui pourrait

justifier l'augmentation considérable des temps de calcul.

Cela signifie que les résultats présentés dans le chapitres précédents devraient peu

être affectés par le choix du modèle de chloroforme. Les comportements devraient dans

l'ensemble être similaires. Il n'y a pas, par exemple, de modèle dont les simulations à

l'interface permettent d'obtenir un chloroforme massique humide, ce qui pourrait faciliter

l'extraction de solutés polaires.

Enfin, il est important de remarquer les similitudes entre les interfaces simulées eau-

chloroforme, eau-1,2-dichloroéthane 38, benzène-eau 37 et eau-carbone-tétrachlorure 41.

Dans aucun des cas, il n'y a de mélange entre les deux solvants au niveau moléculaire.

L'interface n'est pas plane et l'épaisseur, caractérisée par les courbes de densités, est due

en fait à des protubérances de solvant qui s'interpénètrent de manière dynamique.

Page 287: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 270

Il est clair cependant qu'à des échelles de temps correspondant aux vibrations des

molécules de solvant (quelques fs), on devrait observer des différences selon le modèle.

Nous ne les avons pas étudiées ici (solvants rigides et trajectoires sauvegardées toutes les

0,5 ps). Il est vraisemblable également que les propriétés dynamiques des molécules de

solvant (diffusion transversale par rapport à latérale, rotation moléculaire, etc.) soient

beaucoup plus dépendantes du modèle utilisé que ne le sont les propriétés générales de

l'interface.

Page 288: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 271

8. Références

(1) W. L. Jorgensen; J. M. Briggs; M. L. Contreras; J. Phys. Chem. 1990, 94, 1683-1686.

(2) W. L. Jorgensen; J. Chandrasekhar; J. D. Madura; J. Chem. Phys 1983, 79, 926-936.

(3) M. Lauterbach; G. Wipff, Liquid-Liquid Extraction of Alkali Cations by Calix[4]crown

Ionophores: Conformation and Solvent Dependent Na+ / Cs+ Binding Selectivity. A MD FEP

Study in Pure Chloroform and MD Simulations at the Water / Chloroform Interface.; in Physical

Supramolecular Chemistry; NATO ASI Series, E., L. and Kaifer A. Ed., Ed.; Kluwer Acad. Pub.:

Dordrecht, 1996, pp 65-102.

(4) H. Kovacs; J. Kowalewski; A. Laaksonen; J. Phys. Chem 1990, 94, 7378-7385.

(5) J. Wang; P. A. Kollman; J. Am. Chem. Soc. 1998, 120, 11106-11114.

(6) W. D. Cornell; P. Cieplak; C. I. Bayly; I. R. Gould; K. M. Merz, Jr.; D. M. Ferguson; D.

C. Spellmeyer; T. Fox; J. W. Caldwell; P. A. Kollman; J. Am. Chem. Soc. 1995, 117, 9626-9630.

(7) T. Fox; P. A. Kollman; J. Phys. Chem. B 1998, 102, 8070-8079.

(8) C. I. Bayly; P. Cieplak; W. D. Cornell; P. A. Kollman; J. Phys. Chem. 1993, 97, 10269-

10280.

(9) P. Cieplak; C. I. Bayly; W. D. Cornell; P. A. Kollman; J. Comput. Chem. 1995, 16, 1357-

1377.

(10) T. M. Chang; L. X. Dang; K. A. Peterson; J. Phys. Chem. B 1997, 101, 3413-3419.

(11) L. S. Bartell; L. O. Brockway; R. H. Schwendeman; J. Chem. Phys. 1955, 23, 1854.

(12) J. Applequist; J. R. Carl; K.-K. Fung; J. Am. Chem. Soc. 1972, 94, 2952.

(13) M. J. Evans; J. Molec. Liq. 1983, 25, 211.

(14) W. Dietz; K. Heinzinger; Ber. Bunsenges. Phys. Chem. 1984, 88, 543.

(15) W. Dietz; K. Heinzinger; Ber. Bunsenges. Phys. Chem. 1985, 89, 968.

(16) B. R. Böhm; R. Ahlrichs; Molec. Phys. 1985, 54, 1261.

(17) I. G. Tironi; W. F. van Gunsteren; 1994.

(18) CRC Handbook of Chemistry and Physics; CRC Press.: Boca Raton: New York, 1998.

(19) C. Hoheisel; M. D. Zeidler; Ber. Bunsenges. phys. Chem. 1979, 83, 23.

(20) H. Bertagnolli; Ber. Bunsenges. phys. Chem. 1981, 85, 644.

(21) D. J. Wales; J. Am. Chem. Soc. 1993, 115, 11180-11190.

(22) Y. B. Wang; F. M. Tao; Y. K. Pan; Theochem 1994, 309, 235-239.

(23) J. E. Fowler; H. F. Schaefer III; J. Am. Chem. Soc. 1995, 117, 446-452.

(24) J. K. Gregory; D. C. Clary; J. Chem. Phys. 1995, 103, 8924-8930.

Page 289: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 7 272

(25) G. Schenter; J. Chem. Phys. 1998, 108, 6222-6232.

(26) M. J. T. Frisch, G. W.; Schlegel,; P. M. W. J. H. B.; Gill, B. G.; Robb, M. A.;

Cheeseman, J. R.;; T. A. P. Keith, G. A.; Montgomery, J. A.; Raghavachari, K.; Al-; M. A.

Laham; V. G. Zakrzewski; J. V. Ortiz; J. B. Foresman; J. Cioslowski; B. B. Stefanov; A.

Nanayakkara; M. Challacombe; C. Y. Peng; P. Y. Ayala; W. Chen; M. W. Wong; J. L. Andres; E.

S. Replogle; R. Gomperts; R. L. Martin; D. J. Fox; J. S. Binkley; D. J. Defrees; J. Baker; J. P.

Stewart; M. Head-Gordon; C. Gonzalez; J. A. Pople, "Gaussian 94", Pittsburgh, 1995.

(27) S. F. Boys; F. Bernardi; Mol. Phys. 1970, 19, 553-566.

(28) M. J. Frisch; J. E. Del Bene; J. S. Binkley; H. F. Schaefer III; J. Chem. Phys. 1986, 84,

2279.

(29) M. Lauterbach; G. Wipff ; A. Mark; W. F. van Gusteren; Gazzeta Chimica Italiana 1997,

127, 699-708.

(30) H. J. C. Berendsen; J. P. Postma; W. F. van Gunsteren; J. Hermans, Intermolecular

forces. Interaction models fot water in relation to protein hydration; in Intermolecular Forces;

Pullman, B., Ed.; Reidel: Dordrecht, 1981, pp 331.

(31) J. J. Conti; D. F. Othmer; R. Gilmont; J. Chem. Eng. Dat. 1960, 5, 301.

(32) W. L. Masterton; M. C. Gendrano; J. Phys. Chem. 1966, 70, 2895-2898.

(33) S. D. Christian; A. A. Taha; B. W. Gash; Q. Rev. Chem. Soc. 1970, 24, 20.

(34) Y. H. L. Shaw; S. M. Wang; N. C. Li; J. Phys. Chem. 1973, 77, 236-238.

(35) F. Eblinger; H. J. Schneider; J. Phys. Chem. 1996, 100, 5533-5537.

(36) Y. Marcus, The Properties of Solvents; J. Wiley & sons: Chichester, 1998.

(37) P. Linse; J. Chem. Phys. 1987, 56, 4177-4187.

(38) P. A. Fernandes; M. N. D. S. Cordeiro; J. A. N. F. Gomes; Theochem 1999, 463, 151-156.

(39) G. Wipff; E. Engler; P. Guilbaud; M. Lauterbach; L. Troxler; A. Varnek; New J. Chem.

1996, 20, 403-417.

(40) T. M. Chang; L. X. Dang; J. Phys. Chem. 1997, 101, 10518-10526.

(41) A. A. Varnek; S. A. Goldberg, "Phase Transfert Catalysis: New Ideas and Methods",

1994, Moscou.

Page 290: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

CHAPITRE 8

CONCLUSION GENERALE

Page 291: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 8 273

Conclusion générale

Nous avons présenté des simulations de dynamique moléculaire dont le but était de

répondre à la question: quel est le rôle de l'interface dans les processus de complexation et

d'extraction liquide-liquide d'ions métalliques, assistée par des ionophores de types

calix[4]arènes. Et en particulier, quels sont les phénomènes qui adviennent au niveau

microscopique lors des processus d'extraction liquide-liquide. Cette technique est très

employée en chimie, métallurgie, pharmacologie, etc. Aucune information structurale n'est

disponible sur les étapes de complexation des ions, leur extraction dans la phase organique ou

sur le rôle des contre-ions. La rapidité du phénomène, dans le cas de l'extraction par agitation

mécanique, rend difficile toute mesure physique sur des états métastables ou instables.

Par des calculs de variations d'énergies libres, nous avons constaté que la sélectivité

Cs+/Na+ de L1 à l'interface est similaire à celle calculée dans l'eau. Les interactions du

complexe avec la phase aqueuse se font principalement par la partie basse hydrophile, et

l'influence de l'eau y est alors prépondérante. Il semble donc logique de retrouver

qualitativement les résultats calculés dans l'eau pure.

Pour simuler l'extraction liquide-liquide, nous avons recalculé dans un premier temps le

profil d'énergie libre du complexe L1.Cs+Pic- (L1 = calix[4]arène-couronne6) de chaque coté

de l'interface, et nous avons confirmé que la migration spontanée vers la phase organique était

impossible pour un tel système dans ces conditions. Le déplacement maximal de 15 Å dans ce

calcul n'est pas suffisant pour déterminer s'il existe une barrière de potentiel finie ni à quelle

distance elle peut se trouver de l'interface. Pour des déplacements plus longs du complexe, les

durées de simulation seraient considérables car il faudrait en plus d'augmenter la taille du

système, traiter les interactions à longue distance par des méthodes trop coûteuses en temps de

calcul.

Nous avons utilisé un moyen détourné afin de voir si le complexe pouvait être extrait

dans la phase organique à cette concentration, en le simulant avec des conditions initiales

Page 292: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 8 274

différentes, en partant d'un mélange homogène des deux liquides eau/chloroforme. Ces

simulations miment les toutes premières étapes de la séparation de phase lors d'un processus

d'extraction. Nous avons vu que toutes les molécules tensio-actives de nos systèmes se sont

finalement adsorbées à l'interface. En particulier, les complexes restent constamment au

contact de l'eau par leur partie hydrophile, et au contact du chloroforme par l'intermédiaire des

cycles aromatiques hydrophobes. Les démixtions sont des processus rapides, de l'ordre de la

nanoseconde à l'échelle simulée, c'est-à-dire pour des gouttes de solvant de l'ordre de 40 Å de

rayon. Elles sont principalement gouvernées par les forces de cohésion de l'eau et du

chloroforme. La présence d'un soluté, qu'il soit tensio-actif ou hydrophile, influe peu sur la

vitesse de séparation des phases.

A partir de ces résultats, il nous a paru clair que la concentration des molécules à

l'interface pouvait avoir un rôle dans le départ des complexes vers la phase organique. En

effet, lors du mélange, la surface de contact entre les deux solvants est beaucoup plus grande

que dans le système au repos. A la fin de la séparation des phases, toutes les molécules tensio-

actives ne peuvent pas s'adsorber à l'interface.

Nous avons donc simulé des monocouches de ligands et de complexes à différentes

concentrations sur des surfaces comparables, ainsi que des bicouches de calixarènes. Dans la

plupart des systèmes, les molécules initialement adsorbées à l'interface y sont restées. Les

attractions avec l'eau empêchent la diffusion dans le chloroforme. Les molécules situées dans

une seconde couche, dans la phase organique, n'ont plus qu'une interaction limitée avec la

phase aqueuse et peuvent alors migrer dans le chloroforme. L'interface n'a pas besoin d'être

saturée pour que les molécules placées en seconde couche diffusent pas dans la phase

organique. L'extraction semble donc dépendre fortement de l'interaction complexe-eau.

L'extraction liquide-liquide assistée par des ionophores est un processus complexe,

dépendant des interactions que peuvent faire les complexes avec les solvants, de la capacité

des molécules en solution à saturer l'interface, mais également d'un équilibre des charges dans

la région interfaciale. Les informations que nous donnons au niveau microscopique doivent

être une aide aux expérimentateurs pour leur permettre d'orienter la recherche et le

développement de nouveaux ionophores sélectifs.

Ainsi pour les calix[4]arènes-amide , expérimentalement L3 n'extrait pas Sr2+, alors que

L1 le fait. A partir de l'analyse des simulations, nous avons constaté l’existence de liaisons

hydrogène internes pour L3 libre, et que l'interaction Sr2+ / eau était presque deux fois plus

Page 293: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 8 275

forte pour le cation dans le complexe de L3 que dans le complexe de L2. Ces résultats

pourraient expliquer en partie les différences constatées entre ces deux calixarènes pour les

expériences de complexation et d’extraction.

Pour se rapprocher des conditions expérimentales, différentes améliorations pourraient

être apportées au modèle physique simulé. Les extractions liquide-liquide se déroulent

souvent en milieu acide ou basique. La modélisation du pH peut être simulée par la présence

de molécules H3O+ avec des ligands déprotonés. De même, un certain nombre de procédés

industriels ajoutent un diluant comme le TBP, capable de former une troisième phase. Il

pourrait être intéressant d'observer le rôle de telles molécules dans les systèmes que nous

avons simulés. Certaines de ces études sont en cours au laboratoire MSM.

Pour toutes les simulations, la représentation explicite des solvants est cruciale. Nous

avons voulu évaluer l'importance des modèles utilisés pour le chloroforme. Après plusieurs

séries de tests, nous n'avons pas constaté de différence majeure entre les modèles comparés

pour les simulations à l'interface.

Cependant, il faut prendre des précautions sur l'interprétation de l'ensemble de ces

résultats, les simulations pouvant dépendre fortement des conditions initiales, des protocoles

de calculs, du champ de force ou encore des interactions électrostatiques à longue distance.

Ce dernier point pourrait avoir un rôle non-négligeable, particulièrement pour les simulations

avec des ions en solution. Enfin, les problèmes de la truncature au cut-off ne doivent pas être

négligés, principalement pour les simulations dans l'eau et les calculs de variation d'énergie

libre. Un certain nombre de tests sont actuellement en cours au laboratoire MSM.

La puissance de calcul a fortement progressé entre mes toutes premières simulations et la

fin de ma dernière année de thèse. En 1994, 200 ps sur un système de 1100 atomes nécessitait

55 heures de calcul (HP 735), soit la durée d'une simulation de 200 ps sur 13600 atomes en

1999 (Origin 2000[8p]). La progression à venir des capacités des processeurs, et la

parallélisation permettent d'envisager des calculs sur des systèmes plus complexes et plus

réalistes, qui permettront de diminuer le nombre d'approximations que nous avons été obligés

de faire et de se rapprocher des conditions expérimentales.

Page 294: Simulation par Dynamique Moléculaire de l'extraction d ...msm/PDF/N.Muzet.pdf · Charges, paramètres de Lennard-Jones ... Application à la variation d'énergie libre de complexation

Chapitre 8 276

Lors de ma thèse, j'ai également effectué un certain nombre de calculs de chimie quantique

sur des complexes en phase gazeuse de pyridine substituée avec des ions lanthanides. Des

optimisations géométriques et des calculs d'énergies (aux niveaux HF, DFT et MP2) ont été

effectuées sur les ligands et complexés, en présence de contre-ions et dans différentes

stœchiométries. Ces résultats ont été comparés à d'autres calculs quantiques sur des ligands

étudiés au laboratoire 1-2.

Les résultats obtenus lors de cette thèse et dans le laboratoire MSM ont permis de mieux

comprendre ce qui peut se passer lors de l'extraction liquide-liquide, en suggérant de

nouvelles hypothèses. Ils ouvrent la voie à de nombreuses simulations de molécules

extractantes à l'interface et montrent également que la modélisation moléculaire est un outil à

part entière pour la compréhension et la prédiction de certains processus chimiques.

(1) Berny, F.; Muzet, N.; Troxler, L.; Dedieu, A.; Wipff, G.

"Interaction of M3+ Lanthanide Cations with Amide, Pyridine, and Phorsphoryl O=PPh3 Ligands: A

Quantum Mechanics Study" Inorg. Chem. 1999, 38, 1244-1252.

(2) Baaden, M.; Berny, F.; Boehme, C.; Muzet, N.; Schurhammer, R.; Wipff, G.

"Interaction of trivalent lanthanides cations with phosphoryl derivatives, amide, anisole, pyridine and

triazine ligands: a quantum mechanics study" J. Alloys Compounds 1999, sous presse.