shopify iii le devoir au liban « pire que la guerre ......2020/08/13  · au coin d’une rue,...

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CULTURE Lumière sur les Lumière de Thierry Frémaux B 8 VOL CXI N O 182 / LE JEUDI 13 AOÛT 2020 / 1,52 $ + TAXES = 1,75 $ WWW.LEDEVOIR.COM Avis légaux.............B2 Édito.......................A6 Grille TV..................B7 Idées.......................A7 Météo.....................B6 Mots croisés...........B6 Sports.....................B6 Sudoku...................B6 INDEX ACTUALITÉS Les Premières Nations veulent leur propre plan de lutte contre le racisme | A 3 MAGDALINE BOUTROS LE DEVOIR Pire que pendant la guerre. C’est ce que les Beyrouthins répètent inlassa- blement pour faire comprendre à qui- conque vient de l’extérieur le trauma- tisme qu’ils ont vécu. « Pendant la guerre, on savait où se cacher. On avait encore de l’argent et de la nour- riture. Maintenant, on n’a plus rien », témoigne Maheba Ghossein, au bas d’un immeuble du quartier Achrafieh, dans l’est de Beyrouth. Partout, les résidents se rassem- blent autour des camions offrant de l’aide alimentaire. Ici, ce sont des roulés de pitas accompagnés d’un Pepsi qui sont distribués. Plus loin, ce sont des boîtes complètes remplies de victuailles qui sont tendues aux mains bien trop nombreuses. Au coin d’une rue, Elias Khadife et deux de ses amis, tous dans la vingtaine, offrent des bouteilles d’eau et des plats préparés aux passants. « Nous n’appartenons à aucune organisation. Nous voulons simplement aider ceux qui n’ont pas d’argent. » Quelques maisons plus loin, sous les auvents déchirés qui pendent des bal- cons, Georgette, souffrant de Parkin- son, tient fermement son crucifix dans sa main. « J’ai vécu la guerre civile et je vous assure, c’est pire ce qu’on vit en ce moment », murmure-t-elle sous le bruit de la télévision. De la détresse et de l’insécurité donc, alors que plus de 50 % des Liba- nais vivent sous le seuil de la pauvreté. Un sombre portrait sur lequel s’ajoute cette destruction à très grande échelle — d’une puissance sidérante, épeurante, mais bien réelle. Des kilomètres et des kilomètres de celle que l’on surnom- me la Paris de l’Orient à sont recons- truire, entièrement. Mercredi, le président Michel Aoun a fait savoir que le coût des dégâts dépassait les 15 milliards de dollars américains. VOIR PAGE A 8 : III LE DEVOIR AU LIBAN « Pire que la guerre » Partout, les résidents se rassemblent autour des camions d’aide humanitaire Abdu Barakat a tout perdu lors de l’explosion, mais « grâce à Dieu », ses enfants et sa conjointe s’en sont sortis indemnes, explique-t-il, les mains tremblantes. Lorsque ses fils entendent le moindre claquement, ils se jettent dans ses bras, traumatisés. RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR Une nouvelle maison d’édition pour les femmes racisées DOMINIC TARDIF COLLABORATEUR LE DEVOIR J’aimerais beaucoup ne pas avoir à lancer une maison d’édition comme celle-là », avoue Madioula Kébé-Ka- mara. Les derniers mois l’auront pourtant convaincue que pareil pro- jet était nécessaire. La résurgence en force du mou- vement Black Lives Matter, à la suite de la mort George Floyd, et la vague de dénonciations d’incon- duites sexuelles dans le milieu artistique québécois auront permis d’éclaircir de nombreux problèmes — de diversité, de juste rémunération du travail, de sé- curité pour les femmes — accablant le milieu litté- raire québécois. « Comme une première étape dans la construction du monde d’après », il fallait agir. Née à Paris de parents sénégalais, installée à Montréal depuis cinq ans, Madioula Kébé-Kamara lançait la semaine dernière une campagne de socio- financement afin d’aider à mettre sur pied Diverses Syllabes, une maison d’édition féministe intersec- tionnelle et queer qui publiera essentiellement de la fiction, mais aussi de la poésie, des essais et de la bande dessinée, à raison de trois titres par année. Objectif principal : offrir un porte-voix à celles qui peinent à se faire entendre au sein d’une litté- rature québécoise encore très blanche. Une sous- représentation tenant moins à la mauvaise foi des artisans du milieu du livre, pense Madioula Kébé- Kamara, qu’à une sorte de cercle vicieux. « Sou- vent, la politique éditoriale d’une maison se résu- me à quelque chose comme : “Regardez ce qu’il y a dans notre catalogue, et si vous vous y recon- naissez, envoyez-nous votre manuscrit.” » Elle ajoute : « Sur les dix livres dont on a le plus parlé l’an dernier, combien ont été écrits par des fem- mes racisées, ou par des personnes racisées issues des minorités de genre ? » VOIR PAGE A 5 : « Shopify absente des consultations à Québec L’entreprise liée à l’application fédérale de recherche de contacts a refusé l’invitation des députés MYLÈNE CRÊTE CORRESPONDANTE PARLEMENTAIRE À QUÉBEC LE DEVOIR Shopify est la grande absente des con- sultations sur les applications de recher- che de contacts qui se sont ouvertes mercredi à l’Assemblée nationale. Cette entreprise canadienne de commerce électronique, qui a participé au dévelop- pement de l’application fédérale pour lutter contre la pandémie de COVID- 19, avait été invitée en commission par- lementaire à répondre aux questions des députés préoccupés, entre autres, par la protection des données. « Il me semble ironique que Shopify ne soit pas présente, c’est comme si Uber n’était pas venue à une consulta- tion sur l’industrie du taxi », a affirmé d’entrée de jeu la députée libérale Marwah Rizqy. Le co-porte-parole de Québec soli- daire, Gabriel Nadeau-Dubois, a égale- ment déploré l’absence de Shopify. « On s’est heurtés à une fin de non-re- cevoir pour ce qui est d’inviter les indi- vidus liés à Shopify qui ont programmé cette application-là », a-t-il dit. L’entreprise a refusé l’invitation par- ce que l’application « appartient à et est exploitée par le Service numérique canadien », un organisme fédéral qui, comme son nom l’indique, est voué au développement des services numéri- ques au sein du gouvernement cana- dien.« Ils ont créé l’application à partir d’un code source ouvert, créé par un groupe de bénévoles de Shopify, a pré- cisé la porte-parole de l’entreprise, Re- becca Feigelsohn. Nous avons encou- ragé leur travail et nous croyons que l’application est bénéfique pour les Ca- nadiens, mais cela a été fait en dehors VOIR PAGE A 2 : C’est comme si Uber n’était pas venue à une consultation sur l’industrie du taxi MARWAH RIZQY »

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  • CULTURELumière sur les Lumière de Thierry FrémauxB 8

    VOL CXI NO 182 / LE JEUDI 13 AOÛT 2020 / 1,52 $ + TAXES = 1,75 $WWW.LEDEVOIR.COM

    Avis légaux.............B2Édito.......................A6Grille TV..................B7Idées.......................A7Météo.....................B6Mots croisés...........B6Sports.....................B6Sudoku...................B6

    INDEX

    ACTUALITÉSLes Premières Nations veulent leur propre plan de lutte contre le racisme | A 3

    MAGDALINE BOUTROS

    LE DEVOIR

    Pire que pendant la guerre. C’est ce que les Beyrouthins répètent inlassa-blement pour faire comprendre à qui-conque vient de l’extérieur le trauma-tisme qu’ils ont vécu. « Pendant la guerre, on savait où se cacher. On avait encore de l’argent et de la nour-riture. Maintenant, on n’a plus rien », témoigne Maheba Ghossein, au bas d’un immeuble du quartier Achrafieh, dans l’est de Beyrouth.

    Partout, les résidents se rassem-blent autour des camions offrant de l’aide alimentaire. Ici, ce sont des

    roulés de pitas accompagnés d’un Pepsi qui sont distribués. Plus loin, ce sont des boîtes complètes remplies de victuailles qui sont tendues aux mains bien trop nombreuses.

    Au coin d’une rue, Elias Khadife et deux de ses amis, tous dans la vingtaine, offrent des bouteilles d’eau et des plats préparés aux passants. « Nous n’appartenons à aucune organisation. Nous voulons simplement aider ceux qui n’ont pas d’argent. »

    Quelques maisons plus loin, sous les auvents déchirés qui pendent des bal-cons, Georgette, souffrant de Parkin-son, tient fermement son crucifix dans sa main. « J’ai vécu la guerre civile et je vous assure, c’est pire ce qu’on vit

    en ce moment », murmure-t-elle sous le bruit de la télévision.

    De la détresse et de l’insécurité donc, alors que plus de 50 % des Liba-nais vivent sous le seuil de la pauvreté.Un sombre portrait sur lequel s’ajoute cette destruction à très grande échelle — d’une puissance sidérante, épeurante, mais bien réelle. Des kilomètres et des kilomètres de celle que l’on surnom-me la Paris de l’Orient à sont recons-truire, entièrement.

    Mercredi, le président Michel Aoun a fait savoir que le coût des dégâts dépassait les 15 milliards de dollars américains.

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    III LE DEVOIR AU LIBAN

    « Pire que la guerre »Partout, les résidents se rassemblent autour des camions d’aide humanitaire

    Abdu Barakat a tout perdu lors de l’explosion, mais « grâce à Dieu », ses enfants et sa conjointe s’en sont sortis indemnes, explique-t-il, les mains tremblantes. Lorsque ses fils entendent le moindre claquement, ils se jettent dans ses bras, traumatisés. RENAUD PHILIPPE LE DEVOIR

    Une nouvelle maison d’édition pour les femmes raciséesDOMINIC TARDIFCOLLABORATEURLE DEVOIR

    J’aimerais beaucoup ne pas avoir à lancer une maison d’édition comme celle-là », avoue Madioula Kébé-Ka-mara. Les derniers mois l’auront pourtant convaincue que pareil pro-

    jet était nécessaire. La résurgence en force du mou-vement Black Lives Matter, à la suite de la mort George Floyd, et la vague de dénonciations d’incon-duites sexuelles dans le milieu artistique québécois auront permis d’éclaircir de nombreux problèmes —

    de diversité, de juste rémunération du travail, de sé-curité pour les femmes — accablant le milieu litté-raire québécois. « Comme une première étape dans la construction du monde d’après », il fallait agir.

    Née à Paris de parents sénégalais, installée à Montréal depuis cinq ans, Madioula Kébé-Kamara lançait la semaine dernière une campagne de socio-financement afin d’aider à mettre sur pied Diverses Syllabes, une maison d’édition féministe intersec-tionnelle et queer qui publiera essentiellement de la fiction, mais aussi de la poésie, des essais et de la bande dessinée, à raison de trois titres par année.

    Objectif principal : offrir un porte-voix à celles qui peinent à se faire entendre au sein d’une litté-

    rature québécoise encore très blanche. Une sous-représentation tenant moins à la mauvaise foi des artisans du milieu du livre, pense Madioula Kébé-Kamara, qu’à une sorte de cercle vicieux. « Sou-vent, la politique éditoriale d’une maison se résu-me à quelque chose comme : “Regardez ce qu’il y a dans notre catalogue, et si vous vous y recon-naissez, envoyez-nous votre manuscrit.” » Elle ajoute : « Sur les dix livres dont on a le plus parlé l’an dernier, combien ont été écrits par des fem-mes racisées, ou par des personnes racisées issues des minorités de genre ? »

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    «

    Shopify absente des consultations à QuébecL’entreprise liée à l’applicationfédérale de recherche de contactsa refusé l’invitation des députés

    MYLÈNE CRÊTECORRESPONDANTE PARLEMENTAIREÀ QUÉBECLE DEVOIR

    Shopify est la grande absente des con-sultations sur les applications de recher-che de contacts qui se sont ouvertes mercredi à l’Assemblée nationale. Cette entreprise canadienne de commerce électronique, qui a participé au dévelop-pement de l’application fédérale pour lutter contre la pandémie de COVID-19, avait été invitée en commission par-lementaire à répondre aux questions des députés préoccupés, entre autres, par la protection des données.

    « Il me semble ironique que Shopify ne soit pas présente, c’est comme si Uber n’était pas venue à une consulta-tion sur l’industrie du taxi », a affirmé d’entrée de jeu la députée libérale Marwah Rizqy.

    Le co-porte-parole de Québec soli-daire, Gabriel Nadeau-Dubois, a égale-ment déploré l’absence de Shopify. « On s’est heurtés à une fin de non-re-cevoir pour ce qui est d’inviter les indi-vidus liés à Shopify qui ont programmé cette application-là », a-t-il dit.

    L’entreprise a refusé l’invitation par-ce que l’application « appartient à et est exploitée par le Service numérique canadien », un organisme fédéral qui, comme son nom l’indique, est voué au développement des services numéri-ques au sein du gouvernement cana-dien.« Ils ont créé l’application à partir d’un code source ouvert, créé par un groupe de bénévoles de Shopify, a pré-cisé la porte-parole de l’entreprise, Re-becca Feigelsohn. Nous avons encou-ragé leur travail et nous croyons que l’application est bénéfique pour les Ca-nadiens, mais cela a été fait en dehors

    VOIR PAGE A 2 : ����������

    C’est comme si Uber n’était pas venue à une consultation sur l’industrie du taxiMARWAH RIZQY»

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