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    UNE ANALYSE DE LA FLEXICURITDU MARCH DU TRAVAILAU MAROC

    PRPAR POUR LETF PAR MOHAMMED BOUGROUM ETAOMAR IBOURK, UNIVERSIT CADI AYYAD, MARRAKECH

    INTRODUCTION 3

    1. CARACTRISTIQUES DU MARCH DU TRAVAIL MAROCAIN 5

    1.1 Le contexte dmographique et social 5

    1.2 Lenqute sur lactivit, lemploi et le chmage 6

    1.3 La migration vers ltranger 10

    1.4 Lemploi formel et lemploi informel 10

    1.5 Les principaux dfis du march du travail 13

    1.6 Le march du travail et la flexibilit 14

    2. LA FLEXIBILIT DANS LE MARCH DU TRAVAIL 16

    2.1 La flexibilit dans le Code du travail 16

    2.2 Les diverses formes de flexibilit 17

    2.3 La mobilit dans le march du travail 20

    2.4 lments de synthse 20

    3. LA SCURIT DANS LE MARCH DU TRAVAIL 22

    3.1 La scurit demploi et les arrangements contractuels 22

    3.2 La scurit demployabilit 22

    3.3 La scurit du revenu 25

    3.4 La scurit combinatoire professionnelle et familiale 27

    3.5 Les autres mesures de scurit 27

    3.6 La protection des travailleurs du secteur informel 28

    3.7 lments de synthse 29

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    4. LDUCATION ET LA FORMATION TOUT AU LONG DE LA VIE ETLA FLEXICURIT 31

    4.1 Lducation et la formation tout au long de la vie 31

    4.2 Limpact de lducation et de la formation sur la flexicurit 33

    4.3 Lamlioration de lemployabilit 35

    4.4 La formation en cours demploi 35

    4.5 Lalphabtisation des adultes 39

    4.6 La validation des apprentissages antrieurs 40

    4.7 lments de synthse 42

    5. LE DIALOGUE SOCIAL EN VUE DE LA COHSION SOCIALE 43

    5.1 Le dialogue social au Maroc 43

    5.2 Les problmes de cohsion sociale 47

    5.3 lments de synthse 49

    6. CONCLUSIONS 51

    ACRONYMES 53

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    INTRODUCTIONDans les pays conomie librale, le paradigme de dveloppement a longtemps repos sur la primaut delconomique sur le social. Le social tait peru au mieux comme un corollaire naturel de lconomique et au pirecomme une menace minimiser pour ne pas compromettre lconomique. Le march du travail, lieu de cristallisation delconomique et du social, tait structur par la tension entre ces deux dimensions suite aux positions opposes despartenaires sociaux. Dune part, les entreprises mettaient en avant lexigence de comptitivit pour rclamer plus deflexibilit externe dans la gestion des ressources humaines. Dautre part, les travailleurs dfendaient la scurit demploicomme condition ncessaire lamlioration de la situation sociale. Les pouvoirs publics avaient la tche dlicate degarantir la paix sociale en grant de faon plus ou moins partisane un quilibre de circonstance entre les partenairessociaux.

    La mondialisation de lconomie et lapport des technologies de linformation et de la communication ont contribu faire voluer le paradigme de dveloppement en prenant en compte deux concepts cls, savoir la socit du savoir etle dveloppement humain durable. On prend du recul par rapport aux contingences de gestion sur le court terme pour

    laisser la place une planification stratgique sur le long terme. Maintenir la comptitivit conomique dans une socitdu savoir prenant en compte le dveloppement humain durable implique une attitude plus cooprative de la part despartenaires sociaux et la mise en place dun cadre de dveloppement de la part des pouvoirs publics.

    Dans ce nouveau paradigme, le march du travail sera structur non plus par la gestion de la tension entre lconomiqueet le social mais par la recherche de leur complmentarit, en prenant en compte simultanment les dimensions deflexibilit et de scurit. Lobjectif nest plus de privilgier une dimension au dtriment de lautre mais darriver unquilibre entre les deux dimensions.

    Cest l lide de base du concept de la flexicurit, qui se veut une nouvelle vision prnant la fois la flexibilit dans unmarch du travail scuris et la scurit dans un march du travail flexible.

    Lhypothse centrale est que, dans une socit du savoir, la comptitivit dune conomie ouverte se base sur ses

    capacits internes dadaptation. Le fait que le march du travail doive sadapter en permanence exige de la part despartenaires sociaux une logique intgrant droits et obligations. Dune part, les entreprises ont le droit de disposer de laflexibilit ncessaire, mais elles doivent aussi valoriser leurs ressources humaines par la formation et la prise en chargedes risques lis un march du travail flexible. Dautre part, les travailleurs ont le droit dtre assurs contre ces risques,mais ils doivent aussi envisager un apprentissage tout au long de la vie pour sadapter lvolution du monde du travail.

    Cette exigence dadaptabilit permanente conduit repenser les deux concepts de flexibilit et de scurit et sortir duschma unidimensionnel traditionnel o la flexibilit est rduite la flexibilit numrique externe et o la scurit estrduite la scurit demploi. Dans cette nouvelle vision, ces deux concepts sont multidimensionnels, avec quatredimensions non exclusives pour chacun. Pour les entreprises, la dimension de flexibilit numrique doit prendre encompte trois autres dimensions : la flexibilit numrique interne, la flexibilit fonctionnelle et la flexibilit des cots etsalaires. Pour les travailleurs, la dimension de scurit demploi doit prendre en compte trois autres dimensions : lascurit de lemployabilit, la scurit de revenu et la scurit combinatoire.

    De ce fait, le march du travail doit sortir dun schma restrictif gnrateur de tensions sociales et peu attractif pour lestravailleurs et les entreprises fort potentiel. Une combinaison dynamique et multimodale entre flexibilit et scurit estncessaire pour permettre dattirer et de retenir ces travailleurs et ces entreprises.

    Les pays scandinaves sont considrs comme des pays pionniers dans ce domaine. LUnion europenne a ensuiteadhr au concept de flexicurit et elle cherche en gnraliser lapplication dans sa politique demploi. Partant dupostulat quil ny a pas de modle unique de flexicurit, le but nest pas de dupliquer le modle dvelopp par les payspionniers mais que chaque pays membre identifie les besoins des partenaires sociaux et dveloppe son propre modlenational en mettant profit les expriences existantes.

    Lapplication du concept de flexicurit repose sur quatre piliers fondamentaux : (i) lorganisation du systme dducationet de formation sur le principe de lapprentissage tout au long de la vie ; (ii) la flexibilit des arrangements contractuels ;(iii) une assurance efficace contre les risques du march du travail ; et (iv) des politiques actives du march du travailfavorisant la mobilit. Ce dispositif se base sur la forte tradition de dialogue social existant dans les pays de lUnioneuropenne.

    La Fondation europenne pour la formation (ETF) cherche tudier la pertinence de ce concept dans les payspartenaires de lUnion europenne. Lobjectif principal est de sensibiliser les dcideurs politiques et les partenairessociaux et de dgager, au niveau de chaque pays, les grandes lignes dun plan daction permettant de lancer une

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    dynamique pour un modle national. Ce projet exprimental est men avec la participation de quatre pays partenaires delUnion europenne, le Maroc, la Turquie, lUkraine et le Kazakhstan, dont les profits sont trs diffrents. LETF metlaccent sur deux des quatre piliers du modle de flexicurit : (i) lapprentissage tout au long de la vie ; et (ii) les politiquesactives du march du travail.

    Le Maroc, pays en transition et premier partenaire de lUnion europenne bnficier du statut avanc, est un exempletrs intressant dans le cadre de ce projet. Le fait de devoir amliorer la comptitivit de son conomie pousse le pays sintresser au concept de flexicurit pour sa stratgie de dveloppement. Le Maroc traverse aussi une phase detransition. Les pouvoirs publics ont lanc des rformes socio-conomiques et une modernisation des institutions dansun march du travail domin par le secteur informel. La flexicurit offre donc une grille de lecture permettant dapporterun nouvel clairage sur la structure et le fonctionnement du march du travail.

    Cette tude se base sur deux axes principaux : (i) la pertinence du concept de flexicurit dans le march du travailmarocain ; et (ii) son applicabilit pour formuler des recommandations en matire de politique publique pour lemploi.Cinq domaines sont couverts : (i) le march du travail marocain ; (ii) la flexibilit ; (iii) la scurit ; (iv) lducation et laformation ; et (v) le dialogue social.

    4 UNE ANALYSE DE LA FLEXICURIT DU MARCH DU TRAVAIL AU MAROC

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    1. CARACTRISTIQUES DU MARCH

    DU TRAVAIL MAROCAIN1.1 LE CONTEXTE DMOGRAPHIQUE ET SOCIAL

    Le march du travail marocain se caractrise par une forte augmentation de loffre par rapport la demande. Les deuxdcennies qui ont suivi lindpendance du pays en 1956 ont t marques par une forte croissance dmographique,avec un taux de mortalit en baisse et un taux de natalit en hausse. Malgr un taux de natalit moins lev partir desannes 1970, la population marocaine a presque tripl en lespace de (50 ans, passant de 11 millions dhabitants en1960 plus de 30 millions dhabitants en 2004 (HCP, 2004).

    Cette volution dmographique se reflte dans la structure de la population par groupe dge (cf. TABLEAU 1.1). Cettestructure se caractrise par : (i) une proportion leve de jeunes ; (ii) un nombre accru de personnes en activit (de 15

    60 ans) ; et (iii) un nombre stable de personnes ges (plus de 60 ans). En dautres termes, le Maroc traverse une phasede baisse du taux de dpendance (nombre dinactifs par rapport au nombre dactifs). Cette phase de fentredmographique devrait durer jusquen 2015. Aprs cette date, la part des inactifs gs de plus de 60 ans devraitaugmenter au dtriment des jeunes de moins de 15 ans et des personnes ges de 15 60 ans.

    La population est galement peu qualifie. En 2008, 64% de la population ge de 15 ans et plus na aucun diplme. Letaux danalphabtisme est de 38,45% (statistiques de 2006) dans la population ge de 10 ans et plus. De ce fait, leMaroc occupe une place peu enviable (130e place sur 182 pays) dans le classement de lIndice de dveloppementhumain (PNUD, 2009).

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    TABLEAU 1.1 STRUCTURE DE LA POPULATION PAR GROUPE DGE

    ge 1994 2004

    Effectif % Effectif %

    Moins de 15 ans 9 636 000 37,03 9 260 622 31,20

    15-59 ans 14 542 000 55,89 18 010 389 60,68

    60 ans et plus 1 841 000 7,08 2 409 058 8,12

    Total 26 019 000 100,00 29 680 069 100,00

    Source : HCP, Recensements gnraux de la population et de lhabitat, 1994-2004

    TABLEAU 1.2 STRUCTURE DE LA POPULATION GE 15+ SELON LE DIPLME (EN %)

    Niveau du diplme %

    Sans diplme 64,5

    Diplme de niveau moyen 26,9

    Diplme de niveau suprieur 8,5

    Non dclar 0,1

    Total 100,0

    Source : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

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    Sur le plan social, les taux de pauvret et de vulnrabilit sont en baisse. Le taux de pauvret passe de 16,2% 9%entre 1998 et 2007. Le taux de vulnrabilit passe de 23,9% 17,5% la mme date. Mais les disparits restent fortes.Les revenus en milieu urbain sont 1,55 fois suprieurs aux revenus en milieu rural. 20% de la population (la plus riche)dispose de 52,6% des revenus. 20% de la population (la plus pauvre) ne dispose que de 5,4% des revenus (HCP,

    Indicateurs sociaux, 2008).

    Les pouvoirs publics doivent prendre en compte laugmentation des jeunes de moins de 15 ans et des personnes enge dactivit pour amliorer laccs aux services de base (ducation, sant, logement) et lemploi.

    1.2 LENQUTE SUR LACTIVIT, LEMPLOI ET LE CHMAGE

    Selon lenqute nationale sur lactivit, lemploi et le chmage 1, le taux dactivit est relativement faible. La populationactive slve 11,27 millions de personnes, soit un taux dactivit de 50,6%2(HCP, 2008). Ce taux dactivit varie selonle milieu gographique, lge, le genre et le niveau de diplme (cf. TABLEAUX 1.3-1.4), avec les caractristiquessuivantes : (i) il est plus lev en milieu rural, avec une diffrence de 14 points par rapport au milieu urbain ; (ii) il est pluslev pour les hommes (75,9%) que pour les femmes (26,6%) ; (iii) il est plus lev pour la tranche dge 35-44 ans ; et(iv) il est plus lev pour les diplms de lenseignement suprieur (66,8%).

    6 UNE ANALYSE DE LA FLEXICURIT DU MARCH DU TRAVAIL AU MAROC

    TABLEAU 1.3 TAUX DACTIVIT SELON LE DIPLME, LE GENRE ET LE MILIEU GOGRAPHIQUE (EN %)

    H Hommes ; F Femmes ; Ens EnsembleSource : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

    Niveau du diplme Milieu urbain Milieu rural Total

    H F Ens H F Ens H F Ens

    Sans diplme 77,7 12,4 39,9 87,5 38,7 60,4 83,0 26,0 50,8

    Diplme de niveau moyen 63,0 18,9 43,2 64,2 20,1 51,0 63,3 19,1 45,1

    Diplme de niveau suprieur 75,9 55,3 67,0 71,8 39,1 63,5 75,6 54,7 66,8

    Total 71,6 19,3 44,7 82,0 37,0 59,0 75,9 26,6 50,6

    TABLEAU 1.4 TAUX DACTIVIT DE LA POPULATION GE 15+ PAR TRANCHE DGE (EN %)

    Tranche dge Hommes Femmes

    15-24 ans 56,5 21,3

    25-34 ans 95,0 32,3

    35-44 ans 96,1 32,0

    45-59 ans 87,6 30,3

    60 ans et plus 38,8 12,4

    Total 75,9 26,6

    Source : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

    1 Lenqute nationale sur lactivit, lemploi et le chmage est ralise annuellement par le Haut commissariat au Plan (HCP) auprs dun chantillon reprsentatif de60 000 mnages.

    2 Sauf mention contraire, toutes les statistiques proviennent de lenqute nationale sur lactivit, lemploi et le chmage publie par le Haut commissariat au Plan (HCP) en2008.

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    La population active ayant un emploi slve 10,19 millions de personnes, soit un taux demploi de 45,8%. Le tauxdemploi varie lui aussi en fonction du milieu gographique, du genre, de lge et du niveau de diplme. Lemploi estgalement caractris par plusieurs facteurs (cf. TABLEAUX 1.5-1.7) : (i) la prdominance du secteur agricole, quignre plus de 40% des emplois ; (ii) la prdominance de formes demploi non salariales, avec un actif sur deux

    exerant en tant que travailleur indpendant, aide familiale ou apprenti ; (iii) la prdominance de lemploi informel(78,2%) dans les trs petites entreprises ; et (iv) la prdominance demplois non qualifis, avec deux catgoriesprofessionnelles (ouvriers et manuvres agricoles, manuvres non agricoles) totalisant 43% de lemploi total (HCP,2008).

    1. CARACTRISTIQUES DU MARCH DU TRAVAIL MAROCAIN 7

    TABLEAU 1.5 STRUCTURE DE LEMPLOI SELON LE SECTEUR DACTIVIT PAR MILIEU GOGRAPHIQUEET PAR GENRE (EN %)

    H Hommes ; F Femmes ; Ens EnsembleSource : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

    Secteurdactivit

    Milieu urbain Milieu rural Total

    H F Ens H F Ens H F Ens

    Agriculture, fort et pche 5,2 6,4 5,5 67,3 91,5 75,2 34,2 59,2 41,0

    Industrie et artisanat 18,2 30,9 21,0 4,9 5,6 5,1 12,0 15,2 13,0

    BTP 14,0 0,5 11,0 9,8 0,0 6,6 12,0 0,2 8,9

    Services 62,4 61,9 62,0 17,9 2,8 12,9 41,6 25,2 37,0

    Activits mal dsignes 0,2 0,4 0,2 0,2 0,0 0,1 0,2 0,2 0,2

    Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

    TABLEAU 1.6 STRUCTURE DE LEMPLOI SELON LA SITUATION PROFESSIONNELLE PAR MILIEUGOGRAPHIQUE ET PAR GENRE (EN %)

    H Hommes ; F Femmes ; Ens EnsembleSource : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

    Situationprofessionnelle

    Milieu urbain Milieu rural Total

    H F Ens H F Ens H F Ens

    Salari 62,0 78,7 65,4 30,9 6,7 22,9 47,5 34,0 43,9

    Indpendant 25,7 12,7 23,0 39,8 18,1 32,7 32,2 16,0 27,9

    Employeur 5,0 1,9 4,3 1,1 0,1 0,8 3,2 0,8 2,5

    Aide familiale 3,7 5,0 4,0 26,0 74,6 41,9 14,1 48,2 23,3Apprenti 1,2 0,9 1,1 0,6 0,1 0,5 0,9 0,4 0,8

    Associ ou cooprant 2,4 0,6 2,0 1,5 0,4 1,1 2,0 0,5 1,6

    Autre statut 0,1 0,2 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1 0,1

    Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

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    La population active au chmage slve 1,08 million de personnes sur une population active de 11,27 millions depersonnes, soit un taux de chmage de 9,6%. Ce taux varie selon le genre, lge, le milieu gographique et le niveau dediplme. Le chmage prsente un certain nombre de caractristiques (cf. TABLEAUX 1.8-1.9et GRAPHIQUES 1.1-1.2).

    Il sagit dun phnomne urbain (14,7%), avec un pourcentage plus de trois fois suprieur au milieu rural (4%). Les disparits lies au genre diffrent selon le milieu gographique. En milieu urbain, le chmage touche 20,3% des

    femmes et 13% des hommes. En milieu rural, le chmage touche 5,1% des hommes et 1,8% des femmes. Les disparits lies au diplme concernent le niveau et la nature du diplme. Le chmage touche davantage les

    diplms (15 25%) que les non diplms (moins de 5%), lexception des laurats des grandes coles (3 4%).Les diplms de lenseignement suprieur sont les plus touchs par le chmage de longue dure (83,2%) et lechmage de primo-insertion (80,6%).

    Les disparits lies lge jouent en dfaveur des jeunes en insertion professionnelle, avec un taux de chmage des15-20 ans (18,3%) deux fois plus lev que le taux national (9,6%).

    8 UNE ANALYSE DE LA FLEXICURIT DU MARCH DU TRAVAIL AU MAROC

    TABLEAU 1.7 STRUCTURE DE LEMPLOI SELON LA TAILLE DE LENTREPRISE ET LE GENRE (EN %)

    Source : HCP, Enqute sur lemploi, 2007-08

    Taille

    de lentreprise

    2007 2008

    Hommes Femmes Ensemble Hommes Femmes Ensemble

    1-9 personnes 78,3 78,7 78,4 78,1 78,3 78,2

    10-49 personnes 5,8 5,4 5,7 8,9 9,1 8,9

    50-199 personnes 2,2 2,5 2,3 3,0 3,2 3,1

    200 personnes et plus 3,3 3,7 3,4 8,3 8,0 8,2

    Indtermine 9,5 9,1 9,4

    Non dclare 1,0 0,6 0,9 1,6 1,3 1,6

    Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

    GRAPHIQUE 1.1 TAUX DE CHMAGE PAR MILIEU DE RSIDENCE ET GENRE

    Source : HCP, Enqute sur lemploi, 2007-08

    Masculin Fminin Ensemble

    Urbain Rural National

    13,0

    20,3

    14,7

    5,1

    1,8

    4,0

    9,5 9,8 9,6

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    1. CARACTRISTIQUES DU MARCH DU TRAVAIL MAROCAIN 9

    GRAPHIQUE 1.2 TAUX DE CHMAGE SELON LE DIPLME OBTENU

    Source : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

    TABLEAU 1.8 PRINCIPAUX INDICATEURS DE CHMAGE SELON LE NIVEAU DU DIPLME

    Indicateur de chmage Sans diplme Niveau moyen Niveausuprieur

    Population active au chmage (en milliers) 344,0 487,0 247,0

    Femmes dans la population active au chmage (en %) 17,9 22,9 50,1Chmeurs nayant jamais travaill (en %) 32,4 57,1 80,6

    Chmeurs de longue dure (en %) 52,3 74,6 83,2

    Source : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

    TABLEAU 1.9 VOLUTION DU TAUX DE CHMAGE SELON LE GENRE, LGE ET LE MILIEUGOGRAPHIQUE (EN %)

    Taux de chmage 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008

    Au niveau national 12,5 11,3 11,4 10,8 11,1 9,7 9,8 9,6

    Par genre

    Hommes 12,5 11,1 11,1 10,7 11,0 9,7 9,8 9,5

    Femmes 12,5 12,1 12,2 11,1 11,3 9,7 9,8 9,8

    Selon lge

    15-24 ans 18,9 17,2 16,2 16,7 17,0 16,6 17,2 18,3

    25-34 ans 19,2 17,3 17,5 16,5 16,8 14,0 14,4 13,5

    Par milieu gographique

    Urbain 19,5 18,3 19,3 18,5 18,4 15,5 15,4 14,7

    Rural 4,5 3,9 3,4 3,1 3,6 3,7 3,8 4,0

    Source : HCP, Enqute sur lemploi, 2001-08

    0

    5

    10

    15

    20

    25

    30

    35

    FP-Sp

    cialisation

    Facult

    s

    accs

    libre

    FP-Te

    chniciens

    suprieurs

    Enseignement

    secon

    daire

    FP-Qualification

    Enseignement

    fondamental

    FP-Techniciens,

    cadresmoyens

    Sansdiplme

    Grand

    escoles

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    1.3 LA MIGRATION VERS LTRANGER

    Trois millions de Marocains rsident ltranger, soit 10% de la population totale 3. La migration est une variableimportante du march du travail puisque le Maroc exporte sa force de travail depuis la fin des annes 1950, dabord versla France, lAllemagne et les Pays-Bas jusquau milieu des annes 1970, puis vers les pays arabes et lAmrique du Nordsuite la crise conomique provoque par le premier choc ptrolier de 1973. La migration vers les pays europens sestpoursuivie cause du regroupement familial et du flux des tudiants. partir de la fin des annes 1980, les politiquesmigratoires restrictives adoptes par ces pays ont provoqu une migration clandestine de travailleurs non qualifis oupeu qualifis vers lEspagne et lItalie. La migration de travailleurs qualifis sest oriente vers des pays pratiquant unepolitique dimmigration slective, comme le Canada ou les tats-Unis.

    Depuis la fin des annes 1980, la situation sur le march du travail marocain sest sensiblement dgrade pour toutesles catgories de travailleurs, y compris dans le secteur public qui constituait la filire dinsertion par excellence desdiplms. Le projet dmigrer ltranger est donc devenu un vritable projet professionnel pour de nombreuxtravailleurs, hommes et femmes, quel que soit leur niveau dinstruction. De nouveaux migrants aux profils trs varissont attirs par une vie ltranger, y compris des travailleurs qualifis et expriments qui souhaitent partir en coupleou avec leur famille. Contrairement aux migrants des premires gnrations (ceux des annes 1960) qui prnaient une

    migration temporaire, les migrants des gnrations rcentes partent avec le projet de sinstaller dfinitivement ltranger.

    Au Maroc, la dimension socio-conomique de la migration est trs importante. Les transferts montaires des travailleursrsidant ltranger sont lune des trois principales sources de revenus du pays. Ces transferts sont indispensables aumaintien de lquilibre macro-conomique et un rquilibrage social. La migration est galement un moyen debrassage culturel qui influe sur lvolution des attitudes et des normes sociales.

    Vue sous langle du march du travail, la migration a jou depuis la fin des annes 1960 un rle central pour soulager lapression de loffre par rapport la demande. La proportion prise par la migration des travailleurs qualifis pose toutefoisle problme de la fuite des cerveaux. Dans une conomie ouverte, on ne peut totalement viter ce type de migration.Mais il importe de rendre le march du travail assez attractif pour que la migration de travailleurs qualifis reste dans desproportions raisonnables, et surtout quelle amne des bnfices pour le pays. Il ne sagit donc pas de stopper lamigration des travailleurs qualifis, mais de sassurer que les flux directs et indirects quelle gnre soient positifs pour

    le march du travail national.

    Lattrait des diplms et des travailleurs qualifis pour la migration montre que lattractivit du march du travail nestpas suffisante. Une migration massive entrane lappauvrissement du capital humain du pays et rend nullinvestissement en formation consenti par la collectivit.

    Par ailleurs, conscients du rle conomique et social de la migration, les pouvoirs publics ont adopt depuis le dbut desannes 1990 une politique volontariste visant renforcer les liens des Marocains rsidant ltranger avec leur paysdorigine, pour faire de la migration une source de transfert de savoir-faire et un facteur de dynamisation delinvestissement.

    1.4 LEMPLOI FORMEL ET LEMPLOI INFORMEL

    La segmentation du march du travail marocain fait consensus, mais il est difficile de trouver une ligne de partage entreles diffrents segments. La multiplicit de variables et limbrication de ces variables entre elles rend inoprants lesschmas dichotomiques simplistes, par exemple une opposition duale entre lemploi formel et lemploi informel. Donnerune dfinition de lemploi informel au Maroc implique dexpliciter les diffrents cas de figure auxquels cette dfinitionrenvoie. Cette dfinition doit uniquement prendre en compte les activits lgales et exclure les activits illgales commele trafic de drogue, le trafic darmes, la prostitution ou limmigration clandestine.

    Lemploi informel associ aux activits lgales inclut les cas de figure suivants :

    un emploi exerc en tant quoccupation principale dans une unit professionnelle du secteur informel, par exempleun salari non dclar dans une entreprise informelle du btiment ou des travaux publics (BTP) ou un vendeurambulant travaillant son compte ;

    un emploi exerc en tant quoccupation principale par un travailleur non dclar dans une unit de production

    partiellement formelle, par exemple un travailleur exerant dans une entreprise ne dclarant quune partie de sonpersonnel ;

    10 UNE ANALYSE DE LA FLEXICURIT DU MARCH DU TRAVAIL AU MAROC

    3 http://maghrebinfo.20minutes-blogs.fr/archive/2008/03/12/maroc-mutations-et-nombre-des-mre-a-travers-le-monde.html#more

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    un emploi exerc en tant quoccupation secondaire par un travailleur occupant par ailleurs une fonction principaledans une unit professionnelle partiellement ou totalement formelle, par exemple un fonctionnaire exerant uneactivit secondaire.

    Outre la nature de loccupation (principale ou secondaire) et la nature de lunit professionnelle daccueil (formelle,partiellement formelle, informelle), lemploi informel se caractrise par deux autres variables, savoir la situation dans laprofession et les conditions de travail. Un emploi informel peut tre un emploi rmunr (salari ou indpendant) ou nonrmunr (apprenti ou aide familiale). Contrairement aux strotypes, lemploi informel rmunr nimplique pastoujours une rmunration basse. Certains de ces emplois offrent une rmunration comparable sinon suprieure desemplois du secteur formel.

    Lemploi informel sexerce hors des dispositions du Code de travail, soit partiellement soit totalement. Il repose sur desmcanismes de coordination informelle, avec le rseau des relations interpersonnelles comme principal levier. Enlabsence dun arrangement contractuel formel, ce rseau permet de rduire les risques entre les partenaires de larelation de travail. La qualit du rseau dtermine le niveau dengagement des partenaires respecter les arrangementscontractuels pour le salaire et les conditions de travail. Le rseau fonctionne donc comme un outil de coordination sebasant sur les deux notions de confiance et de rputation.

    Deux approches peuvent tre utilises pour dterminer la taille de lemploi informel :

    lapproche indirecte, qui consiste utiliser les donnes de lEnqute sur lemploi auprs des mnages le critreutilis pour dfinir lemploi informel est laffiliation ou non un systme de couverture sociale ;

    lapproche directe, qui repose sur les rsultats denqutes ad hoc, dont la dernire est ldition 2007 de lEnqutenationale sur le secteur informel non agricole.

    La taille de lemploi informel : lapproche indirecte

    Lenqute nationale sur lactivit, lemploi et le chmage fournit des indications sur la taille de lemploi informel, assimildans ce cas lemploi non dclar4, en utilisant le critre daffiliation ou non un systme de couverture sociale. Plus dehuit actifs occups sur dix occupent des emplois informels (cf. TABLEAU 1.10). Pour les femmes, le taux daffiliationest de 41,7% en milieu urbain et 1,1% en milieu rural.

    1. CARACTRISTIQUES DU MARCH DU TRAVAIL MAROCAIN 11

    TABLEAU 1.10 POPULATION ACTIVE OCCUPE SELON LE GENRE, LE MILIEU GOGRAPHIQUE ET LACOUVERTURE SOCIALE (EN %)

    Source : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

    Affiliation Hommes Femmes Ensemble

    Milieu urbain Affilis 28,7 41,7 31,4

    Non affilis 71,1 58,0 68,4

    Non dclars 0,2 0,3 0,2

    Total 100,0 100,0 100,0

    Milieu rural Affilis 4,7 1,1 3,5

    Non affilis 95,2 98,9 96,5

    Non dclars 0,1 0,0 0,1

    Total 100,0 100,0 100,0

    Au niveau national Affilis 17,3 16,1 17,0

    Non affilis 82,5 83,8 82,9

    Non dclars 0,1 0,1 0,1

    Total 100,0 100,0 100,0

    4 Lestimation de lemploi informel selon lapproche indirecte inclut galement les travailleurs non dclars occups dans les entreprises oprant dans le secteur formel.

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    La rpartition de lemploi salari selon le type de contrat, le secteur demploi et le milieu gographique (cf.TABLEAU 1.11) permet de constater la prsence de lemploi informel dans tous les secteurs, y compris dans le secteur Administration et collectivits locales cens tre le cur de lemploi structur. Sur le plan national, la taille delemploi informel salari est de 71,4% tous secteurs confondus et varie beaucoup selon les secteurs, avec un

    pourcentage allant de 11,6% pour le secteur Administration et collectivits locales 99% pour le secteur Structures familiales . Ce pourcentages sont encore suprieurs en milieu rural pour tous les secteurs.

    12 UNE ANALYSE DE LA FLEXICURIT DU MARCH DU TRAVAIL AU MAROC

    TABLEAU 1.11 STRUCTURE DE LEMPLOI SALARI SELON LE TYPE DE CONTRAT, LE GROUPEDACTIVIT ET LE MILIEU GOGRAPHIQUE (EN %)

    Type de contrat Administrationet collectivits

    locales

    Entreprisespubliques et

    semi-publiques

    Entreprisesprives

    Structuresfamiliales

    Tous secteurs

    Milieu urbain

    CDD 5,1 6,8 4,4 0,1 4,5CDI 84,6 74,8 12,7 0,2 30,4

    Verbal 1,8 2,4 2,4 0,8 2,2

    Sans contrat 8,4 15,4 79,9 98,9 62,3

    Non dclar 0,1 0,5 0,7 0,0 0,5

    Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

    Part du secteur danslemploi salari

    22,5 2,9 71,3 2,8

    Milieu rural

    CDD 3,0 7,5 1,6 0,0 1,7

    CDI 72,6 29,5 3,3 0,0 7,9

    Verbal 2,6 0,0 1,2 0,9 1,4

    Sans contrat 21,4 63,1 93,6 99,1 88,7

    Non dclar 0,3 0,0 0,3 0,0 0,3

    Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

    Part du secteur danslemploi salari

    6,5 0,4 90,4 0,8

    National

    CDD 4,9 6,8 3,5 0,1 3,8

    CDI 83,4 72,7 9,7 0,2 24,4

    Verbal 1,9 2,3 2,0 0,8 2,0

    Sans contrat 9,7 17,7 84,2 99,0 69,4

    Non dclar 0,1 0,5 0,5 0,0 0,5

    Total 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

    Part du secteur danslemploi salari

    18,2 2,2 76,4 2,3

    CDD Contrat dure dtermine ; CDI Contrat dure indtermineSource : HCP, Enqute sur lemploi, 2008

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    La taille de lemploi informel : lapproche directe

    Pour valuer la taille de lemploi informel de manire directe, les pouvoirs publics ont charg le Haut commissariat auPlan de mener plusieurs enqutesad hoc. La plus importante a t lEnqute nationale sur le secteur informel non

    agricole, ralise en 1999/2000 et 2007/08. Les rsultats de cette enqute sont prsents ci-dessous.

    Le nombre dunits professionnelles informelles est pass de 1,23 million en 1999 1,55 million en 2007, soit unemoyenne annuelle de 40 000 nouvelles units en lespace de huit ans.

    Le volume total de lemploi est pass de 1,90 million demplois en 1999 2,22 millions demplois en 2007, soit unecration nette de 314 169 emplois au cours de cette priode.

    La part du secteur informel dans lemploi non agricole est passe de 39% en 1999 37,3% en 2007, avec unediminution de 1,7 point au cours de cette priode.

    Le secteur du commerce concentre lui seul plus de la moiti (53,2%) de lemploi informel non agricole, avec huitemplois informels sur dix.

    La taille moyenne des units professionnelles informelles a lgrement baiss, passant de 1,5 personne par unit en1999 1,4 personne en 2007. Quelque 75% des units professionnelles informelles emploient une seule personne.

    LEnqute sur lemploi mene par le HCP en 2008 montre que lagriculture reprsente plus de 40% de lemploi total,

    dont une grande partie relve de lemploi informel. Si lon tient compte du poids de lemploi informel (37%) danslemploi total non agricole et de la prdominance de lemploi informel dans lemploi agricole, on peut raisonnablementconclure que lemploi informel reprsente au moins 70% de lemploi total.

    1.5 LES PRINCIPAUX DFIS DU MARCH DU TRAVAIL

    Comme indiqu plus haut, le march du travail marocain est segment. Quatre dualits font apparatre le march dutravail comme une juxtaposition de marchs catgoriels plutt que comme un march unifi.

    Dualit selon le milieu gographique

    Alors quil ne reprsente que 41% de la population en ge dactivit (ge de 15 ans et plus), le milieu rural gnre

    51,5% de lemploi total. Le taux dactivit y est de 59% (44,7% en milieu urbain). Les 15-24 ans reprsentent 32% de lapopulation en ge dactivit (25% en milieu urbain). 80% des travailleurs nont aucun diplme (49% en milieu urbain).58% des travailleurs occupent des emplois douvrier ou de manuvre (26% en milieu urbain). 22% seulement destravailleurs exercent en tant que salaris (65% en milieu urbain). Le secteur agricole domine, avec 75% des emplois.89% des personnes hors ge lgal dactivit (enfants de moins de 15 ans et personnes de plus de 60 ans) travaillent enmilieu rural (11% en milieu urbain). Le chmage est de 5,1% seulement (14,7% en milieu urbain). Le milieu rural gnredonc plus demplois, mais il sagit surtout demplois informels prcaires.

    Dualit selon le genre

    Les femmes sont sous-reprsentes dans la population active. Alors quelles forment plus de la moiti de la populationge de 15 ans et plus, les femmes ne reprsentent que 27% de la population active. 73% des femmes activesoccupes nont aucun diplme (64% pour les hommes). Prs de 50% des femmes sont aides familiales (16% pour leshommes). Plus de 60% des femmes exercent un emploi douvrier ou de manuvre. Avec un niveau de qualification

    moindre que celui des hommes, les femmes surtout confines des emplois prcaires, des emplois non salaris et desemplois non qualifis.

    Dualit selon le niveau dinstruction

    La population active comprend une majorit de travailleurs non instruits ou faiblement instruits et une minorit trsdiplme. 65% de la population active est sans diplme et 10% est titulaire dun diplme suprieur. 68% de la populationactive occupe nest pas diplme. Les emplois douvrier et de manuvre sont exercs 82% par des travailleurs nondiplms. Sils sont cantonns des emplois non qualifis et prcaires, ces travailleurs sans diplme ne reprsentent que32% de la population au chmage. loppos, les travailleurs diplms, surtout ceux qui sont titulaires dun diplmesuprieur, jouissent dun accs privilgi lemploi formel structur. Mais ils sont aussi souvent touchs par le chmagepuisquils reprsentent 80,6% des chmeurs de primo-insertion et 83,2% des chmeurs de longue dure.

    Dualit selon lgeLes jeunes sont une composante importante du march du travail puisque 40% de la population active a moins de 35ans. 39% de ces jeunes ont entre 15 et 24 ans et on note mme la prsence de jeunes de moins de 15 ans. Cetteentre dans la vie active un ge prcoce tmoigne du dysfonctionnement du systme ducatif qui nest pas assezdvelopp pour toucher tous les enfants dge scolaire et pas assez performant pour retenir les enfants scolariss. Ces

    1. CARACTRISTIQUES DU MARCH DU TRAVAIL MAROCAIN 13

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    jeunes ont surtout des emplois non qualifis (ouvrier et manuvre) ou des emplois dans le secteur non salari (apprentiet aide familiale). Prs de 70% des jeunes de 15 24 ans sont ouvriers ou manuvres. Les jeunes sont aussi fortementtouchs par le chmage. Plus de 40% des chmeurs ont moins de 25 ans. 70% de ces jeunes chmeurs sont auchmage depuis plus dun an et prs de 67% sont la recherche de leur premier emploi. Ces jeunes sont nombreux

    sappuyer sur le rseau familial en tant que principal moyen pour rechercher un emploi, plus que pour les autrestranches dge.

    la lumire de ces quatre dualits, deux dfis se posent pour le march du travail.

    Le premier dfi est dagir pour briser le schma travailleurs peu instruits emplois peu qualifis . Le faible niveaugnral de la population active et la prpondrance des emplois peu qualifis consolident lemploi informel, sa prcaritet sa vulnrabilit. Les femmes, les jeunes et les travailleurs ruraux sont particulirement concerns.

    Le deuxime dfi est dagir contre le gaspillage ou le manque--gagner constitu par le chmage des diplms dans uneconomie largement sous-encadre. Le march du travail a du mal absorber le flux des diplms pour trois raisons :(i) lincertitude quant la qualit des formations ; (ii) la faiblesse de la dynamique de cration demplois qualifis ; et(iii) linsuffisance des dispositifs de gestion permettant de passer de lcole lemploi, en quantit comme en qualit.

    1.6 LE MARCH DU TRAVAIL ET LA FLEXIBILIT

    Si lon adopte la flexicurit comme grille de lecture du march du travail segment, lexamen des diffrents segmentspermet de constater des configurations diverses, qui vont dune scurit totale base sur la garantie de lemploi vie une flexibilit maximale essentiellement base sur une flexibilit externe. Voici plusieurs observations sur les grandssecteurs du march du travail que sont : ladministration et les collectivits locales ; les entreprises publiques etsemi-publiques ; le secteur priv structur ; et le secteur priv non structur.

    Ladministration et les collectivits locales

    Ce secteur constitue le modle de rfrence de la scurit, savoir la scurit de lemploi induite par la garantie dunemploi vie. La grande majorit des emplois de ce secteur est rgie par le Code de la fonction publique, qui garantit

    lemploi vie et donne droit une protection sociale avec affiliation aux divers rgimes de scurit sociale (maladie,congs, retraite, etc.). Les arrangements contractuels sont trs encadrs, la fois par les dispositions du Code de lafonction publique et par les syndicats, ce qui ne laisse pratiquement aucune marge de ngociation directe entre letravailleur et lemployeur, qui est ltat. La carrire professionnelle et les conditions de travail (salaires et autres) sontstructures autour des deux variables cls que sont le diplme et lanciennet. Les possibilits de formation en coursdemploi existent mais restent peu nombreuses et daccs restreint.

    Ltude de ce secteur permet aussi de faire deux observations complmentaires. Dune part, on note lexistence dungroupe demplois minoritaire qui chappe ce modle dominant et dont le mode de mobilisation relve plutt dumodle oppos de flexibilit externe puisque plus de 10% des travailleurs de ce secteur sont embauchs sans aucuncontrat crit (cf. TABLEAU 1.11).

    Dautre part, on note chez certains fonctionnaires le dveloppement de pratiques dnaturant le modle dominant etremettant en cause ses fondements. Deux exemples illustrent ce propos. Le premier exemple concerne la pratique de

    la pluriactivit. Des fonctionnaires ont tendance sinvestir dans des activits secondaires indpendantes, comme lecommerce ou des activits salariales non dclares, tout en tant certains de conserver leur activit principale sans lacrainte dtre licencis. Ces activits secondaires ont un impact ngatif sur leur implication dans leur activit principale.Le deuxime exemple est la pratique de plus en plus rpandue chez certains fonctionnaires dutiliser leur positionprofessionnelle pour consolider leur rseau priv de relations interpersonnelles. Ils exercent le pouvoir que donne leurposition professionnelle de faon discrtionnaire dans une logique de donnant-donnant, plutt que de se conformer des procdures formelles. Les personnes pourvues dun capital social ont donc plus de poids que celles qui nen ontpas, dans une socit rticulaire justifiant cette pratique. Ces deux exemples montrent le risque dun emploi publiccapt par les intrts privs des travailleurs, avec lattrait que cela peut reprsenter pour certains travailleurs en phasede primo-insertion.

    Les entreprises publiques et semi-publiques

    Ce secteur reprsente un pourcentage moindre de lemploi total suite la politique de privatisation mene par lespouvoirs publics durant les deux dernires dcennies. Sa configuration est trs proche de celle du secteur prcdent.

    Le modle dominant reste celui de la scurit base sur une forte garantie de lemploi. Les arrangements contractuelssont encadrs par des rgimes spciaux donnant droit une protection sociale souvent plus gnreuse que celle de lafonction publique. Lexistence dorganismes trs actifs duvres sociales permet aux travailleurs de bnficier de

    14 UNE ANALYSE DE LA FLEXICURIT DU MARCH DU TRAVAIL AU MAROC

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    plusieurs avantages sociaux (loisirs, ducation des enfants, tarifs prfrentiels, etc.). Les possibilits de formation encours demploi sont plus nombreuses et plus institutionnalises en interne. Des opportunits de mobilit interneexistent au sein de lentreprise.

    Tout comme le secteur prcdent, ce secteur se caractrise par la juxtaposition dun modle dominant de scurit delemploi et dun modle minoritaire se rfrant la flexibilit externe. Quelque 17,7% des travailleurs sont embauchssans contrat de travail (cf. TABLEAU 1.11). Les pratiques lies une logique de rente sont toutefois moins frquenteset moins systmatiques que dans le secteur prcdent.

    Le secteur priv structur

    En thorie, ce secteur est cens tre encadr par les dispositions du nouveau Code du travail adopt en 2004. Dans lapratique, on a une situation htrogne qui dpend la fois de la taille de lentreprise et du secteur dactivit, et parfoismme du profil de lentrepreneur. Certains secteurs trs structurs comme les banques ou les assurances prsententdes modles proches du modle de rfrence de la scurit. Dautres secteurs moins structurs comme le textile oulartisanat, o dominent les petites et moyennes entreprises, prsentent des modles proches du modle de rfrencede la flexibilit externe.

    La diffrence essentielle de ce secteur par rapport aux deux secteurs prcdents se situe au niveau de la garantie delemploi dans les arrangements contractuels. Ceux-ci prvoient le licenciement mais, dans la pratique, les procdures delicenciement ne sont pas toujours en conformit avec les dispositions lgales puisque le risque de chmage nest paspris en compte.

    Except pour les grandes entreprises prives lies des multinationales, les entreprises marocaines nappliquent pastoutes les dispositions du Code du travail et/ou limitent le champ des dispositions appliques certaines catgories deleur personnel. De ce fait, les entreprises juxtaposent plusieurs modles de gestion des ressources humaines entermes de flexicurit. Dautres variables entrent galement en jeu, comme le diplme, lanciennet, la comptence et lanature du lien avec le(s) propritaire(s) de lentreprise.

    Le secteur priv non structur

    Ce secteur constitue le modle de rfrence pour une flexicurit base principalement sur la flexibilit externe. Unemploi dans ce secteur nest encadr par aucun contrat crit formel, et ne donne droit aucune protection sociale niaucun avantage social. Les possibilits de formation en cours demploi se limitent la formation sur le tas.

    Les conditions de travail dpendent en grande partie de la situation dans la profession (salari, indpendant, aidefamiliale, apprenti), du secteur dactivit (agriculture, artisanat, etc.) et des caractristiques individuelles du travailleur(ge, genre, niveau dinstruction). La situation dune jeune aide familiale travaillant dans le secteur agricole esttotalement diffrente de celle dun artisan adulte ayant accumul une grande exprience dans une spcialit de pointecomme lartisanat dart.

    Le modle extrme de flexibilit externe peut tre illustr par deux exemples. Le premier exemple porte sur les boursesjournalires de travail (moukef). Les travailleurs sont embauchs la tche ou la journe sur la base dun accord verbal,avec possibilit de rupture immdiate de cet accord par lun des deux protagonistes, qui sont tous deux dans unelogique de maximisation trs court terme. Le deuxime exemple porte sur les emplois de domestique dans une

    famille. Les filles ou les femmes engages en tant que personnel domestique le sont sur la base dun accord verbal noncontraignant pour les deux parties. Il arrive toutefois que la relation contractuelle informelle puisse durer dans le tempssans tre formalise lorsque les deux partenaires nouent une relation de confiance directe ou par le biais dun tiers.

    Deux facteurs contribuent fragiliser la position des travailleurs et renforcer celle des employeurs. Le premier facteurest une offre trs suprieure la demande. Le deuxime facteur est le grand nombre de travailleurs pauvres occupantdes emplois mal ou non rmunrs. La contrainte de devoir trouver un emploi tout prix est tellement forte quils sontobligs daccepter les conditions de travail quon leur propose.

    La famille employant du personnel peut combler, au moins partiellement, linefficience des institutions modernes enminimisant les risques du march du travail. La famille procure par exemple des ressources comme le logement ou lanourriture et peut mme favoriser lducation et la formation du personnel, et donc indirectement leur mobilitprofessionnelle.

    Certaines institutions traditionnelles de pilotage sont propres des marchs lis des mtiers traditionnels, parexemple les mtiers de lartisanat. Par le pass, ces institutions coordonnaient ces marchs non seulement pour lecontrle des prix et le respect de la qualit mais galement pour la force de travail. La mise en place dinstitutionsmodernes a relgu ces institutions au second plan sans pour autant les faire disparatre Deux institutions traditionnelles(Mouhtassibet Lamine) jouent toujours un rle important dans les mtiers de lartisanat.

    1. CARACTRISTIQUES DU MARCH DU TRAVAIL MAROCAIN 15

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    2. LA FLEXIBILIT DANS LE MARCH

    DU TRAVAILOn peut distinguer quatre types de flexibilit dans le march du travail marocain : (i) la flexibilit numrique externe, quiconcerne la capacit des entreprises modifier facilement le nombre de leurs salaris ; (ii) la flexibilit numriqueinterne, qui concerne la capacit des entreprises modifier les heures de travail et autres modalits de travail dessalaris sans changer leur nombre ; (iii) la flexibilit fonctionnelle, qui concerne la capacit des entreprises redployerleurs salaris dans des emplois diffrents ; et enfin (iv) la flexibilit de cot (salaire), qui concerne ladaptation dessalaires aux conditions du march du travail.

    Lexistence de dispositions contractuelles flexibles est considre comme lun des lments cls du dbat sur laflexicurit. Un cadre lgislatif prvoyant et facilitant lutilisation des diffrents types de flexibilit dfinis ci-dessus estncessaire pour un bon fonctionnement du march du travail en faveur des entreprises et des travailleurs. Il fautcependant reconnatre que la mise en uvre effective du cadre lgislatif et de son champ dapplication sont tout aussiimportants pour son impact sur le fonctionnement du march du travail.

    Ce chapitre prsente le champ dapplication et les dispositions du Code du travail introduisant des aspects de flexibilit.Il discute ensuite des diffrents types de flexibilit dans le march du travail marocain en prenant en compte la structuredu march du travail et les pratiques dveloppes par les acteurs sur le terrain. Il prsente enfin des rflexions sur lamobilit dans le march du travail comme indicateur de flexibilit effective, quoique le manque de donnes statistiquessur la question nait pas permis de mesurer le degr de cette mobilit.

    2.1 LA FLEXIBILIT DANS LE CODE DU TRAVAIL

    Le champ dapplication du Code du travail

    Les dispositions du Code du travail sont censes sappliquer toutes les relations de travail rgies par un contrat (oral oucrit) entre un employeur et un salari. Cependant, certaines catgories de salaris (salaris des entreprises publiques etdes collectivits locales, marins, salaris des entreprises minires, journalistes professionnels, salaris de lindustriecinmatographique, concierges dimmeubles dhabitation) relvent de rgimes spciaux dont les dispositions sont plusavantageuses. Dans ce cas, les dispositions du contrat de travail viennent seulement complter ces dispositions.

    Par ailleurs, un contrat de travail nest pas ncessaire pour les employs de maison et les travailleurs embauchs pardes micro-entreprises. Une rglementation spciale est prvue pour ces deux catgories. Les emplois crs par lesmicro-entreprises sont soumis trois conditions : (i) lemployeur doit tre une personne physique ; (ii) le nombredemploys doit tre de cinq personnes au maximum ; et (iii) le revenu annuel de lemployeur ne doit pas dpasser cinqfois la tranche exonre de limpt gnral sur le revenu.

    Les dispositions du contrat de travail ne concernent que lemploi salari et ne sont applicables que pour lemploi salaridclar. Or lemploi salari reste minoritaire par rapport lemploi indpendant et lemploi non rmunr. En 2008,lemploi salari ne reprsentait que 43,9% de lemploi total (cf. TABLEAU 1.6), 76,4% des salaris travaillaient par lesentreprises du secteur priv, et 16% seulement de ces travailleurs avaient un emploi salari dclar avec un contrat detravail (HCP, 2008).

    La porte de la lgislation du travail reste donc limite cause de la prdominance de lemploi informel. cela sajoutele fait que les dispositions du Code du travail ne sont pas toujours respectes pour lemploi salari dclar dans lesecteur priv. Ceci est souvent fonction de la taille de lentreprise, de son secteur dactivit et du profil des dirigeants.

    La flexibilit dans le Code du travail

    En vigueur depuis 2004, le nouveau Code du travail cherche concilier la flexibilit requise par les employeurs et lascurit revendique par les syndicats. Les nouvelles dispositions concernent la dure du travail, le licenciement et lerecours aux contrats dure dtermine (CDD).

    En ce qui concerne la dure de travail, le Code du travail adopte les dispositions suivantes : (i) la rduction de la dure dutravail hebdomadaire de 48 44 heures sans rduction de salaire ; (ii) la possibilit dannualisation des heures de travailsans dpasser 10 heures de travail par jour, avec un temps annuel de travail de 2 228 heures pour le secteur nonagricole et de 2 496 heures pour le secteur agricole ; et (iii) la possibilit pour lentreprise de rduire temporairement son

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    effectif de 50% pour une dure de deux mois afin de faire face une conjoncture difficile, et si ncessaire pour uneeffectif de 50% pour une dure de deux mois afin de faire face une conjoncture difficile, et si ncessaire pour unedure de quatre mois avec laccord des dlgus du personnel.

    En ce qui concerne le licenciement, le Code du travail fixe les indemnits de licenciement et prvoit la possibilit de

    licenciement pour raisons conomiques. Les indemnits ne sont plus fixes de faon discrtionnaire par le juge maisfixes en fonction de lanciennet. Elles sont calcules par anne danciennet selon le barme suivant : (i) 96 heures desalaire pour les cinq premires annes ; (ii) 144 heures de salaire pour une priode danciennet allant de 6 10 ans ;(iii) 192 heures de salaire pour une priode danciennet allant de 11 15 ans ; et (iv) 240 heures de salaire pour unepriode danciennet dpassant les 15 ans. Le montant de lindemnit est calcul sur la base du salaire moyen perupendant les 52 semaines prcdant la date de licenciement. Les entreprises en difficult peuvent demander uneautorisation de licenciement pour raisons conomiques. Ces demandes sont instruites par lInspection du travail etdiscutes au sein dune commission provinciale prside par le wali ou le gouverneur.

    En ce qui concerne les arrangements contractuels, le Code du travail prvoit les contrats suivants :

    Contrat dure indtermine(CDI). Il sagit dun contrat de droit commun. Contrat dure dtermine(CDD). Les conditions de ce type de contrat sont fixes par le contrat de travail. Un CDD

    ne peut dpasser six mois pour le secteur agricole et un an pour les secteurs non agricoles. La dure cumule des

    CDD ne peut dpasser deux ans. Contrat de travail temporaire. Il sagit surtout dun contrat dintrim. Le salari dune agence dintrim est mis la

    disposition dune entreprise pour une mission particulire de trois mois maximum. Le salari na aucun lien juridiqueavec lentreprise. Le travail dintrim est une pratique relativement rcente dfinie dans larticle 477 du nouveauCode du travail. Il existe une quinzaine dagences dintrim ayant reu lautorisation dexercer de la part du ministrede lEmploi et de la Formation professionnelle. Les autres agences exercent sans autorisation (un projet est en courspour les inciter rgulariser leur situation).

    Contrat de travail temps partiel. Il sagit dun contrat de type CDI ou CDD dont la dure hebdomadaire estinfrieure la dure lgale de 44 heures par semaine. Ce type de contrat doit tre tabli par crit pour le diffrencierdun contrat temps complet.

    Contrat dapprentissage ou de stage de formation. Ce type de contrat est limit dans le temps et destin auxtravailleurs en formation, avec des dispositions fiscales particulires sous forme dexonration des charges pourlentreprise. Si lentreprise dcide de garder le travailleur au terme dun CDD, elle doit lui proposer un CDI. De lavis

    de plusieurs responsables interviews, cette disposition est un frein la flexibilit quantitative (ajustement deseffectifs).

    2.2 LES DIVERSES FORMES DE FLEXIBILIT

    La structure de lemploi offre tous les ingrdients ncessaires une forte flexibilisation de lemploi. Lemploi salarial nereprsente que 43,9% de lemploi total (cf. TABLEAU 1.6). Prs de 80% des emplois salaris nont aucun cadrecontractuel formel. Plus de 50% des travailleurs soit des travailleurs indpendants ou des aides familiaux. Le secteuragricole gnre plus de 40% des emplois. Prs de 80% des emplois sont le fait de petits collectifs de travail de moinsde 10 travailleurs. Lemploi dans le secteur public reprsente un peu plus de 20% de lemploi salari et moins de 10%de lemploi total.

    Les formes de flexibilit (flexibilit numrique externe, flexibilit numrique interne, flexibilit fonctionnelle, flexibilit de

    cot) varient en fonction des arrangements contractuels, qui peuvent tre classs en deux groupes.

    2.2.1 Les arrangements contractuels non salariaux

    Le premier groupe concerne les arrangements contractuels non salariaux et reprsente 57% de lemploi total. Ilregroupe surtout les travailleurs indpendants et les aides familiaux, lesquels reprsentent respectivement 27,9% et23,3% de lemploi total5. Ce groupe reprsente plus de 76% de lemploi total en milieu rural (34% en milieu urbain). Letravail indpendant est davantage exerc par les hommes et le travail daide familiale davantage exerc par les femmes.En milieu rural, prs de 74% des femmes en cours demploi sont des aides familiales. En milieu urbain, lemploi nonsalari concerne surtout le secteur du commerce et des services. En milieu rural, il concerne presque exclusivement lesecteur agricole. Les arrangements contractuels non salariaux ne sont gnralement pas formaliss par crit.

    Le contrat daide familiale, qui reprsente un emploi sur cinq, se base sur le rseau familial ou social. Ce contrat exclutdonc la flexibilit de cot et privilgie la flexibilit numrique interne et la flexibilit fonctionnelle, avec la possibilit duneflexibilit numrique externe. Le rseau familial et social la base de cette relation renforce les chances dun contratdurable. Laide familiale est en gnral un travailleur docile prt adapter son temps de travail (flexibilit numriqueinterne) et ses tches (flexibilit fonctionnelle) en fonction des besoins dicts par son patron puisquil est li ce dernier

    2. LA FLEXIBILIT DANS LE MARCH DU TRAVAIL 17

    5 Les employeurs (2,5%), les associs ou cooprants (1,6%) et les apprentis (0,8%) sont trois catgories numriquement marginales.

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    par des relations familiales ou sociales lui imposant lobissance. Ces mmes relations empchent le patron deprivilgier la rupture de contrat comme moyen dajustement. Le patron va plutt opter pour un temps de travail trsvariable qui peut voluer dune situation de sous-emploi (chmage dguis) une situation de sur-emploi etinversement.

    Les travailleurs indpendants reprsentent prs de 28% de lemploi total. Larrangement contractuel ne correspond pas un contrat stricto sensupuisquil ne concerne que le travailleur, et donc une seule des parties en prsence. Lobjectifdun travailleur indpendant est dassurer la scurit de son revenu, qui passe ncessairement par lexercice dunemploi, ce qui exclut la flexibilit numrique externe. Pour sadapter lvolution du march du travail, le travailleurindpendant ajuste son temps de travail (flexibilit numrique interne), son champ dintervention (flexibilit fonctionnelle)ou le prix de ses prestations (flexibilit de cot). Face une conjoncture difficile, un commerant ambulant peut accrotreson temps de travail, diversifier ses produits et services ou exercer un mtier secondaire. Il peut galement ajuster lesprix pour augmenter son chiffre daffaires. La mme remarque vaut pour un rparateur de tlviseurs ou une travailleuse domicile.

    2.2.2 Les relations salariales

    Le deuxime groupe darrangements contractuels concerne les relations salariales. Le trait commun de ce groupe estun arrangement contractuel conclu entre les deux parties dans le but dchanger des services contre une rmunrationou un salaire. Ce groupe concerne 43% de lemploi total. Le pourcentage de lemploi salarial est de 65,4% en milieuurbain, et de 22,9% seulement en milieu rural. Le milieu urbain comprend 78,7% de femmes salaries et 62%dhommes salaris. Le milieu rural comprend 30,9% dhommes salaris et seulement 6,7% de femmes salaries.

    Les arrangements contractuels sont trs divers pour ce groupe. On peut schmatiser leur structure par le croisementdes deux variables qui sont le secteur demploi (secteur priv ou secteur public) et la nature du contrat (contrat formelou absence de contrat). Lemploi salari est gnr 78,7% par le secteur priv. Il est domin par lemploi informel, quireprsente 70% de lemploi salari au niveau national, 62,3% en milieu urbain et 88,7% en milieu rural.

    Lemploi salari informel (sans contrat) concerne tous les secteurs demploi, avec un pourcentage qui varie de 9,7%dans les administrations et les collectivits locales 84,2% dans les entreprises prives. Les formes de flexibilit sont

    surtout une flexibilit numrique externe et, dans une moindre mesure, une flexibilit par le cot.

    Lemploi salari formel (avec contrat) concerne lui aussi tous les secteurs demploi, tout en dominant le secteur public etassimil. Les marges de flexibilit sont en thorie rduites si on les compare celles de lemploi salari informel. Lesformes de flexibilit dpendent du secteur demploi (cf. TABLEAU 2.1). Dans le secteur public par exemple, on ne peutpas envisager une flexibilit par le cot ou une flexibilit numrique interne puisque les salaires et la dure de travailsont fixs par les deux partenaires du contrat.

    La flexibilit numrique externe est une pratique en expansion dans lemploi salari aussi bien informel que formel, avecdes contrats de type CDD, le dveloppement de la sous-traitance et lexternalisation des services. La flexibilit internenumrique et la flexibilit par le cot restent des pratiques peu dveloppes ne concernant que lemploi salari formeldans le secteur priv. La flexibilit fonctionnelle est une pratique nouvelle qui se dveloppe surtout dans les entreprises(prives et publiques) ouverte aux techniques modernes de gestion.

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    Toutes les formes de flexibilit sont prsentes dans le march marocain, mais leur importance diffre selon les secteursdemploi.

    La flexibilit numrique externe est trs rpandue. Elle est surtout prsente dans lemploi salari, aussi bien public quepriv. Elle concerne les emplois informels (sans contrat) et les emplois temporaires (CDD et intrim), avec uneproportion qui va de 14,6% dans le secteur de ladministration et des collectivits locales 87,7% dans le secteursalari priv. La part du chmage pour cause de licenciement ou de fermeture de lentreprise est galement un

    indicateur de cette forme de flexibilit. Cette part tait de 31% en 2008.

    La flexibilit numrique interne est tout aussi rpandue. Elle concerne principalement lemploi non salari, et surtout lesaides familiaux et les travailleurs indpendants, deux catgories qui reprsentent 51,2% de lemploi total. La dure dutravail varie fortement selon les besoins de lemployeur. En milieu urbain, 52% des travailleurs travaillent plus de48 heures par semaine. La flexibilit numrique interne concerne aussi les emplois temps partiel, une pratique quireste encore peu dveloppe et qui concerne uniquement 7,6% de lemploi total. Cette pratique permet lentreprisedadapter le temps de travail en fonction des besoins, avec possibilit dannualisation de ce temps de travail.

    La flexibilit fonctionnelle est elle aussi prsente principalement dans lemploi non salari, et concerne surtout les aidesfamiliaux et les travailleurs indpendants. Elle reste peu dveloppe dans lemploi salari, sauf dans les grandesentreprises ouvertes aux techniques modernes de gestion. Cette forme de flexibilit concerne aussi la pluriactivit destravailleurs, qui se dveloppe dans le secteur public comme dans le secteur informel, et qui nest que partiellementcapte par le systme statistique national.

    La flexibilit de cot, moins rpandue, concerne principalement le secteur salari priv, et surtout les emplois nondclars du secteur priv. Le salaire est discut en fonction de la dure du travail, qui est elle-mme fonction de loffreet de la demande. Dans le secteur priv structur, le seuil minimal du salaire est dfini par le SMIG (salaire minimumdes activits non agricoles) et le SMAG (salaire minimum des activits agricoles).

    Le nouveau Code du travail ne prvoit aucune flexibilit salariale par rapport au salaire minimum lgal, qui est dfini sur la basedune rmunration horaire pour les activits non agricoles et sur la base dune rmunration journalire pour les activitsagricoles. Certains employeurs voient lobligation dun salaire minimum lgal comme un frein la flexibilit salariale.

    Le salaire est librement fix par un accord direct entre les parties ou par une convention collective de travail, sousrserve du respect des dispositions relatives au salaire minimum lgal dfinies dans larticle 345 du Code du travail.Larticle 346 mentionne qu est interdite toute discrimination relative au salaire entre les deux sexes pour un travail de

    valeur gale . Sil maintient la distinction entre le SMIG et le SMAG, le nouveau Code du travail supprime la dispositionautorisant le paiement dune fraction seulement du SMIG aux jeunes.

    Comme on vient de le voir, les trois principales formes de flexibilit (numrique externe, numrique interne,fonctionnelle) concernent surtout les emplois peu qualifis et contribuent renforcer la prcarit du march du travailmarocain.

    2. LA FLEXIBILIT DANS LE MARCH DU TRAVAIL 19

    TABLEAU 2.1 FORMES DE FLEXIBILIT SELON LES ARRANGEMENTS CONTRACTUELS

    NA Non applicableSource : Les auteurs de cette publication

    Arrangementcontractuel/forme deflexibilit

    Emploi

    non salari(57%)

    Emploi salari (43%)

    Sans contrat (71,2%) Avec contrat (28,8%)

    Aide familiale Travailleurindpendant

    Priv Public Priv Public

    Numriqueexterne

    Peurpandue

    NA Trsrpandue

    Trsrpandue

    Variable Peurpandue

    Numriqueinterne

    Trsrpandue

    Trsrpandue

    Peurpandue

    Peurpandue

    Peurpandue

    NA

    Fonctionnelle Trsrpandue

    Trsrpandue

    Peurpandue

    Peurpandue

    Peurpandue

    Peurpandue

    Cot NA Variable Variable NA Variable NA

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    2.3 LA MOBILIT DANS LE MARCH DU TRAVAIL

    LEnqute sur lemploi de 2008 dtermine les principales caractristiques de loffre et de la demande. Tout dabord,loffre excde la demande, comme illustr par un taux de chmage qui varie de 4,5% pour les travailleurs non diplms plus de 25% pour les diplms de lenseignement suprieur ou de lenseignement professionnel (cf.GRAPHIQUE 1.2). Le taux dactivit est infrieur 30% pour les femmes. On note aussi des catgories de travailleurshors ge lgal dactivit, savoir des enfants et des personnes ges de 60 ans et plus. 70% des travailleurs sont nondiplms et 10% seulement des travailleurs sont titulaires dun diplme suprieur.

    La demande est domine par les petites entreprises, qui oprent dans le secteur informel pour une grande majorit.Prs de huit personnes sur dix travaillent dans des entreprises de moins de dix travailleurs. 78% de lemploi totalconcerne lagriculture et les services, deux secteurs dactivit qui gnrent des emplois faible valeur ajoute.

    La demande selon le niveau de qualification prend en compte le diplme du travailleur, la profession et la situation dansla profession. Lemploi informel reprsente plus de 80% de lemploi total, avec des emplois le plus souvent prcaires.Quelque 82,9% de ces emplois ne donnent droit aucune couverture sociale. Plus de 50% sont des emplois daidefamiliale ou de travailleur indpendant. Lemploi formel regroupe les emplois qualifis, qui sont le plus souvent des

    emplois dcents, les plus priss tant les emplois du secteur public. En rsum, lemploi informel attire des travailleursnon diplms et lemploi formel attire des travailleurs trs diplms.

    Dans un march du travail segment, les travailleurs adoptent des positions diffrentes sur la place de lemploi informeldans leur trajectoire professionnelle, selon le niveau et la nature de leur diplme et la densit de leur capital social. Onpeut distinguer quatre profils de travailleurs.

    Les travailleurs pour lesquels lemploi informel est la seule opportunit daccs lemploi, avec des possibilits demobilit professionnelle limites lemploi informel. Ces travailleurs sont souvent peu instruits et issus de couchessociales pauvres, sans capital social utile pour le march du travail. Leurs trajectoires professionnelles sontdescendantes, ou au mieux stationnaires, parce que limites lemploi informel. Ces travailleurs terminent engnral leur vie professionnelle par de petits boulots, en tant par exemple vendeurs ambulants ou gardiens.

    Les travailleurs pour lesquels lemploi informel est une phase transitoire qui se termine lorsquils accdent lemploiformel. Ce passage peut tre volontaire et m par le dsir daccumuler une exprience professionnelle et daccder

    lautonomie financire. Mais il peut aussi sagir dun passage contraint d des conditions socio-conomiquesobligeant le travailleur trouver une occupation professionnelle. Cette phase transitoire peut tre plus ou moinslongue selon une recherche demploi plus ou moins active et selon le diplme et le capital social du travailleur.

    Les travailleurs pour lesquels lemploi informel nest ni obligatoire ni indispensable pour accder lemploi formel.Les caractristiques individuelles (la nature et le niveau du diplme) et sociales (un capital social dense) de cestravailleurs leur permettent de se positionner directement dans la file dattente permettant daccder lemploiformel. Un soutien familial est utile pendant cette phase dattente plus ou moins longue.

    Les travailleurs qui dveloppent des stratgies mixtes et qui cherchent tre prsents simultanment dans les deuxsecteurs. Un emploi informel ne sarrte donc pas avec laccs un emploi formel. Dans ce cas de figure, lemploiformel permet une scurit de revenu et une protection sociale tandis que lemploi informel permet un revenucomplmentaire.

    Lemploi informel prsente toutes les formes de flexibilit : flexibilit numrique externe, flexibilit salariale, flexibilit

    numrique interne, flexibilit fonctionnelle. Les acteurs institutionnels pouvant jouer un rle de modration sont absentsdu secteur informel. Les relations de travail sont donc fonction de la nature des rapports de force entre employeurs ettravailleurs, le plus souvent en faveur des employeurs. Lemploi informel se caractrise par une forte pression de loffre,une grande vulnrabilit conomique et le faible niveau dinstruction des travailleurs. Les employeurs peuvent doncimposer des modalits de flexibilit qui leur sont favorables, et mme une flexibilit multimodale dans le secteuragricole, le commerce et lartisanat. Les bourses journalires de travail (moukaf) sont un exemple caractrisant laflexibilit du march du travail marocain.

    2.4 LMENTS DE SYNTHSE

    Pour conclure ce chapitre, il y a lieu de se pencher sur la configuration des arrangements contractuels et sur lespratiques dveloppes par les acteurs en place.

    La configuration des arrangements contractuels reflte encore lopposition entre deux modles de rfrence. Lepremier modle est celui de la fonction publique, o la rigidit de larrangement contractuel limine presque toutepossibilit de flexibilit. Le deuxime modle est celui de lemploi informel, o labsence darrangement contractuelouvre la voie toutes les modalits de flexibilit. Entre ces deux modles, les marges de flexibilit varient en fonctiondes caractristiques des entreprises (structure, taille, secteur dactivit, profils des dirigeants, etc.) et des travailleurs

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    (ge, situation matrimoniale, diplme, genre, etc.). Des entreprises du secteur structur sintressent maintenant desmthodes modernes de management intgrant la flexibilit numrique interne et la flexibilit fonctionnelle, deux formesde flexibilit moins connues.

    Lexamen des pratiques des acteurs montre la volont des entreprises et des travailleurs de contourner les modles enplace. Les entreprises du secteur public contournent un modle rigide en mobilisant dautres travailleurs sur la basedarrangements contractuels ad hoc, savoir lexternalisation de services auprs dentreprises prives. Les travailleursdu secteur public, forts de la scurit dont ils jouissent dans leur emploi principal, sont de plus en plus nombreux dvelopper des activits secondaires, qui peuvent tre perues comme une forme informelle de flexibilit fonctionnelle.Ces stratgies de contournement ont conduit lhybridation du comportement des acteurs. Nombre dentreprisesjuxtaposent ou superposent des arrangements contractuels varis en termes de flexibilit. Nombre de travailleursadaptent leur comportement chacun des espaces de travail dans lesquels ils exercent une activit.

    Deux variables sont centrales dans un schma de mobilit convergente : le niveau de qualification des diplms et ladensit de leur rseau social. La prdominance de travailleurs peu instruits occupant des emplois peu qualifis dans lesecteur informel favorise la flexibilit numrique externe et la flexibilit par le cot. Ces conditions entravent la mobilitascendante, renforcent la mobilit latrale et conduisent galement la pauvret et la prcarit. Les travailleurs lesplus vulnrables sont les femmes, les enfants, les travailleurs gs et les travailleurs non qualifis.

    2. LA FLEXIBILIT DANS LE MARCH DU TRAVAIL 21

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    3. LA SCURIT DANS LE MARCH DU

    TRAVAILOn peut distinguer quatre types de scurit dans le march du travail marocain : (i) la scurit demploi, savoir lascurit du poste de travail occup ; (ii) la scurit demployabilit, savoir la possibilit de travailler pour plusieursemployeurs et de progresser vers de meilleurs emplois (mobilit ascensionnelle) ; (iii) la scurit de revenu, savoirlassurance dun revenu et de prestations permettant de garder un niveau de vie similaire en cas de perte ou dechangement demploi ; et (iv) la scurit combinatoire, savoir la possibilit de combiner un travail rmunr avec la viesociale et familiale.

    Ce chapitre sintresse surtout aux points suivants : (i) la scurit demploi selon les diffrents types darrangementscontractuels ; (ii) la scurit demployabilit assure par les mesures actives demploi et lactivit de lAgence nationalepour la promotion de lemploi et des comptences (Anapec) ; (iii) la scurit de revenu grce un salaire minimum, desavantages sociaux et des indemnits de maladie ; et (iv) la scurit combinatoire assure par des congs lgaux. Cechapitre examine aussi dautres mesures concernant la scurit des travailleurs, notamment certaines dispositions dunouveau Code de travail, les mesures daction sociale et le problme pos par les travailleurs du secteur informel, dontla scurit nest pas prise en compte par ltat.

    3.1 LA SCURIT DEMPLOI ET LES ARRANGEMENTSCONTRACTUELS

    Les arrangements contractuels offrent des niveaux diffrents de scurit demploi, qui vont de la garantie de lemploi vie labsence de tout engagement ferme sur la dure du travail en passant par des situations intermdiaires. Cesarrangements contractuels combinent diffremment lengagement sur la dure du contrat et les conditions de rupturedu contrat. On peut distinguer quatre types darrangements contractuels.

    Les CDI dans le secteur publicet particulirement dans la fonction publique. Ces contrats garantissent lemploi vieet donnent droit une couverture sociale. Mme sils ne concernent que 15% de lemploi salari, ces contratsrestent la rfrence, notamment pour les diplms qui font de laccs lemploi public lobjectif ultime de leur projetprofessionnel.

    Les CDI dans le secteur priv structur. Ces contrats offrent une bonne scurit demploi, avec possibilit derupture et des conditions prcises pour un licenciement individuel (montant des indemnits de licenciement) oucollectif (autorisation de la commission prside par le waliou le gouverneur). Ces contrats donnent droit unecouverture sociale, avec une scurit encore renforce par la prsence de syndicats. Ce type de contrat constitue unpeu plus de 10% de lemploi salari.

    Les CDD et les contrats de travail temporaire. Par nature, le niveau de scurit demploi est faible puisque la duredu contrat est limite dans le temps. Ces contrats, prsents dans tous les segments de lemploi, concernent prs de4% de lemploi salari.

    Les contrats de stage de formation. Le niveau de scurit demploi y est pratiquement nul. la diffrence des CDD,

    les conditions de rupture avant terme sont totalement la discrtion des contractants, qui peuvent tout momentmettre fin au contrat sans aucun engagement vis--vis de lautre partie. Ces contrats ne donnent droit aucunecouverture sociale. Ce type de contrat est utilis pour les programmes daide linsertion des jeunes diplmschmeurs mis en uvre par lAnapec. Numriquement, son impact reste limit.

    3.2 LA SCURIT DEMPLOYABILIT

    La scurit demployabilit vise renforcer les chances de retour lemploi chez les travailleurs dont linsertionprofessionnelle nest pas stabilise. Elle vise aussi viter aux travailleurs de sinstaller dans le chmage de longuedure cause de difficults dinsertion, avec risque dexclusion du march du travail. Pour ce faire, le bonfonctionnement des services publics demploi est essentiel, tout comme des politiques actives du march du travail(PAMT).

    Au Maroc, les PAMT ont t lances au dbut des annes 1990 pour freiner la dgradation de la situation des diplms.De plus en plus nombreux arriver sur le march du travail, ils ne pouvaient tous tre absorbs par le secteur public.Selon lEnqute sur lemploi de 2008, plus de huit chmeurs diplms sur dix taient au chmage depuis un an aumoins et seuls deux chmeurs sur dix avaient une exprience professionnelle.

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    Les PAMT leur permettent daccder lemploi structur en tant que salaris ou en tant que porteurs de projetsdauto-emploi. Le secteur formel est cens leur offrir des emplois dcents et plus productifs que le secteur informel. Onvalorise ainsi le capital humain des diplms en vitant le gaspillage des ressources associ au chmage et en favorisantleur insertion sociale. Lentreprise est elle aussi cense bnficier de leur insertion professionnelle, avec la possibilit

    dobtenir une main duvre jeune et qualifie un cot trs comptitif pour amliorer son quipe dencadrement et sacomptitivit.

    La conception des PAMT a volu dans le temps. Aprs avoir t une action ponctuelle de placement, les PAMT grentmaintenant de faon permanente la phase de transition de lcole vers lemploi priv et la mobilit professionnelle destravailleurs diplms.

    Les pouvoirs publics ont mis en place un oprateur public dintermdiation. Cet oprateur a dabord pris la forme deservices dconcentrs de ladministration centrale en charge de lemploi, dnomms CIOPE (Centre dinformation etdorientation pour lemploi). Cet oprateur est devenu ensuite une agence nationale, lAnapec (Agence nationale pour lapromotion de lemploi et des comptences). Une des tches de lAnapec est de faciliter linsertion et la reconversiondes jeunes diplms dans le secteur priv, avec trois programmes spcifiques relevant des PAMT.

    Le programme Idmaj(intgration). Ce programme cible les diplms en situation de primo-insertion. Il vise dbuter

    linsertion professionnelle des diplms par un contrat de stage de deux ans. Lentreprise daccueil bnficie duneprise en charge partielle du cot du travail sous la forme dune exonration de la cotisation sociale et dune flexibilitcontractuelle.

    Le programme Taehil(qualification). Ce programme cible les diplms en situation de reconversion professionnelleou de mobilit professionnelle. Il cherche amliorer leur employabilit par une formation complmentaire cibleutile sur le march du travail ou par une formation des mtiers dans des secteurs porteurs, comme loffshoring oule tourisme.

    Le programme Moukawalati(mon entreprise). Ce programme cible les diplms ayant des projets de crationdentreprise et donc dauto-emploi. Il procure dune part un soutien financier sous la forme dun prt bonifi etgaranti par ltat, dautre part un suivi et un conseil sur toutes les phases de montage dun projet donn.

    Ces trois programmes sont rservs aux diplms inscrits lAnapec en tant que demandeurs demploi. Le programmeMoukawalativient toutefois dtre ouvert tous les porteurs de projets quel que soit leur niveau de diplme.

    Les efforts des pouvoirs publics ont permis de mettre en place des services publics demploi et les doter de moyensfinanciers, matriels et humains. En tmoigne le triplement du budget de lAnapec en trois ans et le renforcement deses ressources humaines, tout comme le nombre de chmeurs ayant bnfici des programmes des PAMT (cf.TABLEAU 3.1). Le programme Taehila dbut en 2007. Le nombre de bnficiaires du programme Moukawalatipour2008 correspond en fait la priode 2006-08.

    3. LA SCURIT DANS LE MARCH DU TRAVAIL 23

    ENCADR 3.1 LANAPEC

    Linscription lAnapec lAgence nationale pour la promotion de lemploi et des comptences est ouverteuniquement aux diplms venant de lenseignement gnral (baccalaurat et plus) ou de lenseignementprofessionnel initial (technicien ou technicien suprieur).

    Depuis plusieurs annes, lAnapec recense les jeunes diplms au chmage au moment de leur inscription, alorsque les deux ditions de lEnqute sur lemploi (2004 et 2008) donnent le nombre de chmeurs uniquement pourlanne concerne. Une inscription lAnapec est requise pour bnficier des programmes des politiques activesdu march du travail. Cette inscription se fait sur la base des dclarations des jeunes demandeurs demploi. Lesservices demploi nont aucun moyen de vrifier lexactitude de ces dclarations ni de suivre les changements desituation professionnelle, puisquil nexiste pas de systme dindemnisation ou dassistance sociale pour leschmeurs. LAnapec na donc aucun moyen de mettre ensuite jour la situation professionnelle des chmeursdans sa base de donnes. Une fois inscrits, les jeunes ne sont pas obligs dinformer lAnapec sils trouvent unemploi. De ce fait, la dure dinscription lAnapec peut ne pas correspondre une dure effective de chmage.

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    Le cot par bnficiaire est de 270 euros pour le programme Idmaj, 910 euros pour le programme Taehilet 2 270 eurospour le programme Moukawalati. Le cot total moyen est de 663 euros (cf. TABLEAU 3.2).

    Leffort budgtaire consenti par les pouvoirs publics est consquent. Les dpenses consacres aux PAMT ont tmultiplies par trois entre 2006 et 2008 (cf. TABLEAU 3.3).

    Cette hausse sensible du budget consacr aux PAMT a permis lAnapec dlargir sa couverture gographique etdaugmenter ses effectifs. En 2004, lAnapec comptait 150 conseillers en emploi. En 2008, lAnapec comptait400 conseillers en emploi, 500 employs, 74 agences locales et rgionales et 300 guichets dauto-emploi. Lagencenationale comptait 47 000 inscrits en 2004 et 300 000 inscrits en 2008, un nombre qui a donc t multipli par six.Chaque conseiller demploi encadrait 310 clients en 2004 et 750 clients en 2008, ce qui a conduit une dtrioration dela qualit des conseils. Sur 300 000 inscrits lAnapec en 2008, seule la moiti a bnfici de lun des trois programmes

    entre 2006 et 2008. De plus, les inscrits lAnapec reprsentent moins de 30% de la population totale au chmage (cf.TABLEAU 3.4).

    24 UNE ANALYSE DE LA FLEXICURIT DU MARCH DU TRAVAIL AU MAROC

    TABLEAU 3.1 NOMBRE DE BNFICIAIRES DES PROGRAMMES DES PAMT

    Programmes des PAMT 2006 2007 2008

    Programme dinsertion Idmaj 32 880 41 060 47 036

    Programme de formation Taehil 9 502 11 601

    Programme de formation Moukawalati 6 200

    Source : Anapec

    TABLEAU 3.2 PRVISIONS POUR LES PROGRAMMES DES PAMT (EN DIRHAMS)

    Programmesdes PAMT

    Cot moyenunitaire

    2006 2007 2008 Total

    Programme Taehil 10 000 120 000 000 150 000 000 230 000 000 500 000 000

    Programme Idmaj 3 000 45 000 000 75 000 000 90 000 000 210 000 000

    Programme Moukawalati 25 000 75 000 000 250 000 000 425 000 000 750 000 000

    Total 7 300 240 000 000 475 000 000 745 000 000 1 460 000 000

    Source : Anapec

    TABLEAU 3.3 PART DES DPENSES DES PAMT EN % DU PIB

    Variable 2006 2007 2008

    Budget de lAnapec (en millions de dirhams) 240 475 745

    PIB (en millions de dirhams) 577 344 616 254 688 843

    Ratio entre le budget de lAnapec et le PIB (en %) 0,04 0,08 0,11

    Source : Chiffres du plan de dveloppement de lAnapec

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    Sur le terrain, laction de lAnapec est triple : (i) tendre ses services lensemble des chmeurs ; (ii) rpondre unedemande croissante suite un nombre de travailleurs en augmentation ; et (iii) stabiliser ses propres structures etrenforcer son efficacit par la formation continue de son personnel. Ce dernier point est dune importance capitale dansla mesure o les jeunes conseillers nont pas toujours le profil requis pour la lourde tche qui les attend.

    Lamlioration de la qualit des services de lAnapec est essentielle pour regagner une certaine crdibilit auprs de sespartenaires. Cette crdibilit a t srieusement mise mal par laffaire Ennajate, dans laquelle 30 000 inscrits delAnapec ont t abuss par une fausse promesse dembauche.

    Pour valuer limpact du dispositif mis en place, le ministre de lEmploi dveloppe un systme dinformation sur lespopulations cibles et les tablissements utilisateurs. Il assure un suivi des bnficiaires en recoupant les donnes surles bnficiaires de lAnapec avec les donnes sur les travailleurs inscrits la Caisse de scurit sociale. Il ralise aussides tudes de satisfaction. Une enqute a t lance en 2010 pour collecter des donnes statistiques sur lesbnficiaires des programmes des PAMT et sur les tablissements utilisateurs. Un groupe de bnficiaires doit tresuivi pendant trois ans pour complter ces informations.

    3.3 LA SCURIT DU REVENULa scurit du revenu est lie lexercice dun emploi. Le chmage, quil soit de primo-insertion ou de conversion, nedonne droit aucune indemnisation. Un projet dindemnisation pour perte demploi est toutefois en cours dtude pourles salaris victimes de la fermeture (totale ou partielle) ou restructuration de leur entreprise. Lindemnit est prvuepour une priode de six mois, avec prise en charge du salari pour une formation et la recherche dun nouvel emploi.Lindemnit est cumulable avec dautres indemnits prvues par la lgislation. Lligibilit lindemnisation pour pertedemploi est assortie de deux conditions : (i) tre affili la Caisse nationale de scurit sociale (CNSS) ; et (ii) justifier de1 080 jours dassurance, dont 216 jours de cotisations avant la perte demploi.

    La scurit du revenu concerne le salaire minimum, les avantages sociaux et les indemnits de maladie. Lesdispositions contractuelles sont valables uniquement pour lemploi formel.

    Le salaire minimum est fix par voie rglementaire, avec un rajustement rgulier qui fait lobjet de ngociations entre

    partenaires sociaux. Au 1er juillet 2009, le SMIG tait fix 10,64 dirhams de lheure (soit 1 euro de lheure) et le SMAG 55,12 dirhams par jour (soit 5 euros par jour). Le nouveau Code du travail a maintenu la distinction entre le SMIG et leSMAG mais il a supprim la disposition autorisant le paiement dune fraction seulement du SMIG aux travailleurs trsjeunes ou trs gs. Les dispositions sur le salaire minimum obligatoire ne sont pas toujours appliques, des degrsdivers, et dans tous les secteurs de lemploi formel.

    Les avantages sociaux associs lemploi donnent lieu des revenus indirects. Ils sont de trois types : (i) ceux qui sontlis la couverture sociale, par exemple la couverture mdicale, les allocations familiales et les congs pays ; (ii) lesavantages financiers ou en nature lis la nature du poste occup, par exemple les primes de responsabilits, leslogements de fonction et le transport ; et (iii) les avantages sociaux propres certains collectifs de travail, par exempleles centres de loisirs ou de vacances pour les enfants et le transport scolaire.

    Pour les catgories (ii) et (iii), louverture des droits nest pas automatique. Disposer ou non de ces avantages sociaux

    dpend de lorganisme employeur et du niveau de qualification du poste occup. Ces avantages sont souvent proposspar des collectifs de travail trs organiss, par exemple les ministres, les entreprises publiques et semi-publiques et lesgrandes entreprises du secteur priv, et ils sont rservs en priorit au personnel dencadrement. Pouvoir disposer deces avantages augmente lattractivit dun emploi donn.

    3. LA SCURIT DANS LE MARCH DU TRAVAIL 25

    TABLEAU 3.4 NOMBRE DINSCRITS LANAPEC PAR RAPPORT AU NOMBRE DE CHMEURS

    Variable 2004 2008

    Nombre dinscrits lAnapec (1) 47 000 300 000

    Nombre de chmeurs (2) 1 193 000 1 078 000

    Ratio entre (1) et (2) 0,04 0,278

    Source : Donnes de lAnapec et de lEnqute sur lemploi

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    En ce qui concerne la couverture sociale, le Maroc possde un systme dassurance sociale fragment couvrant lesrisques classiques (maladie, invalidit, dcs, vieillesse, accidents de travail, maternit, congs). Les travailleurs dusecteur priv structur et les travailleurs du secteur public relvent dorganismes diffrents.

    La couverture sociale dans le secteur priv est gre par la CNSS et concerne uniquement le secteur de lemploi privstructur (dclar). En thorie, les employeurs sont tenus dtre affilis la CNSS et dy immatriculer leurs employs. Letaux des cotisations comprend une part patronale et une part salariale (cf.TABLEAU 3.5). Mais le nombre destravailleurs affilis la CNSS ne dpassait pas les 2 millions en 2007, sur un total de plus de 9 millions de travailleurs dusecteur priv, soit un taux daffiliation infrieur 20%. titre indicatif, les prestations de la CNSS reprsentaient 1,8 %du PIB en 2007.

    26 UNE ANALYSE DE LA FLEXICURIT DU MARCH DU TRAVAIL AU MAROC

    TABLEAU 3.5 PART PATRONALE ET PART SALARIALE DANS LA CTISATION LA CNSS (EN %)

    Source : CNSS

    Branche de prestations Employeur Salari Total

    Prestations familiales par rapport la masse salariale relle 7,50 0,00 7,50

    Prestations sociales par rapport lamasse salariale plafonne 6 000 dirhams

    Total 8,60 4,29 12,89

    Court terme 0,67 0,33 1,00

    Long terme 7,93 3,96 11,89

    ENCADR 3.2 LE COIN FISCAL ET SOCIAL POUR LE TRAVAIL SALARI AU MAROC, EN FRANCE ET ENESPAGNE

    Les prlvements sur les salaires psent sur le cot global du travail. Ils ont un impact direct sur la comptitivitdes entreprises. Cet effet est mesur par lind