saint t ’aquin -...

593
SAINT THOMAS D’AQUIN COMMENTAIRE SUR LE PROPHÈTE ISAÏE TRADUCTION DES MOINES DE LABBAYE NOTRE-DAME DE FONTGOMBAULT Introduction par le R. P. L. J. ELDERS, S. V. D.

Upload: dinhanh

Post on 18-Jan-2019

212 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

SAINTTHOMAS DA QUIN

COMMENTAIRESUR

LE PROPHTE ISAE

TRADUCTION DES MOINES

DE LABBAYE

NOTRE-DAME DE FONTGOMBAULT

Introductionpar le R. P. L. J. ELDERS, S. V. D.

.

Avertissement

Le texte de saint Thomas est extrmement dense et hirarchis. AQGHfaciliter la lecture et de matrialiser les diffrentes articulations de la pensede lauteur :

Nous avons complt certaines phrases trs elliptiques, citationsscripturaires ou commentaire de saint Thomas, en rajoutant entrecrochets ce qui permet de mieux comprendre le lien de la phraseavec le contexte.

Nous avons dvelopp la structure implicitement contenue dans letexte, en introduisant des parties, sections, articles, points, paragra-phes. Cette structure est rappele dans len-tte de chaque page.Comme le texte est beaucoup plus hirarchis que ces seuls cinq ni-veaux de division (il comporte jusqu dix-neuf niveaux, cf. notam-ment le ch. 3), nous avons continu dvelopper la structure enlindiquant dans la marge.

On trouvera la QGXYROXPHXQVFKpPDGHFHVQLYHDX[S 563), ainsiquune table (p. 565) qui prsente la structure gnrale de louvrage, en in-diquant les divisions descendant jusquau niveau dun chapitre.

Y

Introductionpar le R. P. L. J. ELDERS

Ces dernires annes, on a t tmoin de la publication de traductions fran-aises de plusieurs commentaires bibliques de saint Thomas. En effet, les sp-cialistes en thologie reconnaissent de plus en plus leur importance pour saisir lapense du Docteur commun, en particulier en ce qui concerne la vie morale, laspiritualit et la dimension ecclsiale de la vie chrtienne 1. Cest donc avec joieque nous saluons la parution en traduction franaise du Commentaire sur le Pro-phte Isae par les soins des moines de labbaye Notre-Dame de Fontgombault,et cela dautant plus que ce commentaire assez long a souvent t laiss de ctcomme une uvre de jeunesse, moins parfaite et de moindre importance.Dailleurs il est aussi, parmi les uvres de saint Thomas, particulirement rbar-batif au lecteur moderne par sa construction en une cascade de divisions et desubdivisions, par son style morcel et ses petites phrases un peu brusques. Silest vrai que la mthode de division du texte est employe dans tous les com-mentaires de saint Thomas, y compris ceux des uvres dAristote, et quil est ty-pique de lenseignement universitaire de lpoque, en lisant cette Expositio superIsaiam ad litteram on a parfois limpression que le texte lui-mme disparat sousces innombrables fragmentations. Nanmoins, le commentaire contient de vri-tables perles.

La lourde tche des moines de Fontgombault a, dune certaine faon, t fa-cilite par le fait quils avaient leur disposition lincomparable nouvelle ditioncritique du texte latin dans la Lonine, par les soins de H.-F. Dondaine et L. Reid,qui ont pu proWHUGHODWUDQVFULSWLRQGHODXWRJUDSKHSDUOHSre Gils 2. Rappe-lons les points les plus importants tablis par les diteurs. Le catalogue le plusancien des uvres de saint Thomas mentionne le Super Ysayam, comme un critde Thomas. Celui de Stans le mentionne aussi, et lautographe dune partie dutexte a t conserve 3. Vers la QGXXIIIe sicle un dominicain, Jacobin dAsti, atranscrit le commentaire crit de la main de Thomas, trs difFLOH lire. Sur sontexte reposent nos ditions modernes. Il ny a que Nicolas de Lyre pour avoirmis des doutes au sujet de lauthenticit thomasienne du texte, en raison du faitque lauteur considre que lenfant dont parle le chapitre 8 (v. 1-4), est le OVGXprophte. Nous reviendrons sur cette question plus loin.

Les diteurs ont tabli leur texte critique sur lautographe (qui donne le textedes chapitres 34 50), sur seize manuscrits et quelques fragments. Ils attirent

1. Nous signalons les traductions du R. P. J.-. Stroobant de Saint-loy sur les Psaumes, les p-

tres aux Romains, et 1 et 2 Corinthiens, accompagnes dexcellentes introductions et tables,dune superbe prsentation (ditions du Cerf). Mentionnons aussi le recueil Reading John withThomas Aquinas, publi par Michael Dauphinais et Matthew Levering, Washington DC, 2005 ;et Th. G. Weinady, Daniel A. Keating and John P. Yocum, Aquinas on Scripture. An Introduc-tion to his Biblical Commentaries, London-New York, 2005.

2. Tome XXVIII, Rome, 1974.3. Lautographe concerne les chapitres 34 50, v. 32, et contient environ un quart du texte.

Introduction Commentaire sur Isae

YL

lattention sur ce quon appelle des collations, notes brves la QGHFHUWDLQVchapitres, partir du chapitre 34 jusquau chapitre 48. Ces collations prsententdes explications du sens JXUpGHTXHOTXHVWHUPHVHWOLOOXVWUHQWSDUGHVFLWDWLRQVde la Bible. La Lonine accepte leur authenticit et les a fait imprimer en lettresplus petites la QGHVFKDSLWUHVUHVSHFWLIV1RWRQVWRXWHIRLVTXHHQSOXVGHFHVcollations, il y dans la plupart des chapitres du commentaire un grand nombre deremarques au sujet du sens spirituel de certain mots ou lments de phrases, no-tes qui commencent par un nota. Nous les signalerons et en expliquerons le but.

Une comparaison de lexpos sur les dons du Saint-Esprit au chapitre 11 avecun texte de saint Albert le Grand 4 fait penser, nous disent les diteurs, que le Su-per Isaiam est le premier ouvrage thologique de Thomas, quil aurait critquand il tait bachelier biblique. Les diteurs le qualiHQWGHWUDYDLOUDSLGHGXQjeune professeur aux abois pour prparer ses cours. Nanmoins nous y voyons legnie de Thomas. Quant aux sources utilises, mentionnons le commentaire desaint Jrme sur Isae, les Gloses, des textes de Hugues de Saint-Cher, etc. Onna pas pu dterminer lexemplaire de la Bible utilis par Thomas, mais celui-ci aconnu plus dune traduction latine 5. Le commentaire est un expos ad litteram etconsiste en de brves notes qui indiquent le sens littral du texte, mais compor-tent parfois plusieurs interprtations possibles, et le sens spirituel. Signalons uneparticularit : dans la plupart des commentaires bibliques de saint Thomas, lecontenu des chapitres est expos en plusieurs leons. Dans lExpositio, le com-mentaire suit le texte de chaque chapitre et a une longueur de trois neuf pagesdans ldition lonine. Il est plus bref propos des derniers chapitres.

LE PROLOGUELe prologue de saint Thomas son commentaire est dune grande richesse et

perfection quant son contenu doctrinal. Lpigraphe le texte biblique utilispour caractriser en quelques mots le contenu du livre qui sera comment estHa , : cris la vision, grave-la sur les tablettes, pour quon la lise facile-ment ; car cest une vision de ce qui est encore loin, et qui deviendra claire laQ 6. Guid par ce texte, Thomas donne des explications sur lauteur et sur le ca-ractre et la matire des prophties. Cest lEsprit-Saint qui dicte le texte, mais cemessage passe par le prophte, qui devient linstrument de lEsprit. Il est caract-ristique de ce texte (son modus, dit Thomas) quil est crit dans un langage clairet facilement comprhensible. Le prophte semble parler non pas de ce qui doitencore arriver, mais de qui sest dj ralis. On lit ses prophties facilementgrce lusage danalogies, lloquence des phrases et la beaut des mots.Par ces qualits, Isae surpasse les autres prophtes. Le terme tablettes dutexte voque les tablettes en pierre de la Loi donnes Mose ; il signiHHQVXLWHle cur humain endurci et enQOHFur ouvert.

4. Super Sent. III, d. 34, a. 1-5.5. Voir ch. 1, 11, 280 (Lonine).6. La dernire phrase traduit le texte de saint Thomas.

Commentaire sur Isae Introduction

YLL

Comme Habacuc dit que ce quil a vu est encore loin, largument principaldIsae est lapparition du Fils de Dieu 7. Or, celle-ci est triple : lapparition duChrist dans la chair (Tt , ), celle dans le cur de ceux qui croient en lui (Tt , -)et enQFHOOHGDQVODJORLUH(1 Jn , ). Si ce constat semble suggrer que de nom-breux textes du prophte ont un sens JXUpVDLQW7KRPDVSULYLOpJLHQpDQPRLQVle sens littral : ce que dit le prophte sapplique souvent, voire principalement son temps et au roi Cyrus, et seulement en deuxime lieu au Christ. Nanmoinsle principalement se justiH TXDQG RQ VH UDSSHOOH TXH SRXU 7KRPDVlensemble de lAncien Testament est ordonn au Christ.

cette introduction Thomas ajoute la prface dont Jrme a fait prcder sanouvelle version du texte hbreu 8. Il dit y avoir introduit des colons et des vir-gules et note quIsae est un auteur dune haute culture ; il ny a rien de vulgairedans son langage. Il faudrait mme le considrer comme un vangliste pluttque comme un prophte car il parle dvnements futurs comme sil en tait letmoin oculaire. Isae a crit ses prophties Jrusalem et en Jude, un momento les dix tribus navaient pas encore t envoyes en exil. Il parle des deuxroyaumes, tantt ensemble, tantt sparment. Certes, il se rfre son temps,mais il annonce le retour du peuple en Jude aprs la captivit babylonienne. Saproccupation prpondrante concerne toutefois la vocation des Gentils et la ve-nue du Christ.

UN APERU DU CONTENU DES CHAPITRESLexgse des matres mdivaux, et en particulier celle de saint Thomas, est

une exgse doctrinale qui met laccent sur le contenu thologique du texte etainsi devient souvent une leon de sacra doctrina. Nous le voyons dans le com-mentaire sur le premier verset, qui est le point de dpart dun petit trait sur laprophtie. Isae lui-mme parle de vision au verset 1 ; la prophtie sen distingueen tant que, dans une prophtie, cest plutt lobjet qui se prsente ou simposeau prophte, alors que dans la vision celui qui voit et peroit est actif. On peutvoir nimporte quelle chose prsente, mais le prophte, lui, voit ce qui est loi-gn, soit quil sagisse dvnements contingents futurs, soit quil sagisse dechoses qui se passent au loin 9. Il est propre aussi la prophtie de manifester enparoles ce qui est vu.

Les diffrents modes de la prophtie dpendent de la manire dont le pro-phte reoit cette connaissance : par les sens externes, par son imagination oudune manire purement intellectuelle. La notion de prophtie se ralise selondes degrs diffrents, mais, en son sens plnier, seulement par rception danslintelligence.

Selon Thomas, les prophties dIsae concernent surtout les deux tribus duroyaume du Sud. Il considre le texte comme un texte de consolation etdencouragement. Au verset 2, Thomas propose la division du texte, dont le but

7. 4, 94 : principaliter materia huius libri est apparitio Filii Dei. 8. La premire de lhbreu en latin.9. Une dQLWLRQFODVVLTXHGLW : prophetia est eorum qu procul sunt .

Introduction Commentaire sur Isae

YLLL

principal est de parler de la venue du Christ et de la vocation des Gentils. Celaamne Thomas diviser le contenu en une premire partie : la menace dune pu-nition divine (ch. 1 39) ; et en une deuxime partie (ch. 40 66), qui traite du r-confort que la misricorde divine apporte. Cette division est en gros conforme la distinction introduite par les exgtes modernes entre Isae et le deutro-Isae,quoique la perspective historique moderne soit absente du commentaire de Tho-mas, savoir celle qui envisage une rdaction avant lexil de Juda, et une autreaprs. La premire partie est divise en trois : a) les menaces contre les deux tri-bus (ch. 1-6) ; b) des menaces contre ceux qui les malmnent (ch. 6-31) ; c) la lib-ration des ennemis (ch. 32-39). La deuxime partie est divise par lui en deux : leschapitres 40-44, qui sont une invitation esprer ; les chapitres 45-66, o lapromesse saccomplit : la libration des maux, le salut dans labondance desbiens.

Thomas illustre souvent ce quIsae crit au moyen de citations de la Bible.Le verset jai nourri des OVPDLV Lls se sont rvolts contre moi est com-ment par une srie de textes, et plac dans la bouche de Jsus : jai fait tant debonnes uvres parmi vous, pour laquelle dentre elles me perscutez-vous ? Lerejet de Yahv par les contemporains dIsae est aussi typique de lattitude descontemporains de Jsus.

Alors que le commentaire du premier chapitre est bien plus long, celui desautres chapitres ne dpasse pas de beaucoup la longueur du texte mme du pro-phte. Celui-ci prdit ce qui adviendra dans lavenir. Selon Thomas, il parle sp-ciTXHPHQWGX9HUEH LQFDUQp/HVFKDSLWUHV 3, 4 et 5 forment un bloc. Le pro-phte critique Isral, dabord pour ses pchs didoltrie, ensuite pour son injus-tice (ch. 3 et 4), et enQ SRXU VRQ PDXYDLV XVDJH GHV ELHQV WHUUHVWUHV (ch. 5). Lamontagne de Yahv est le Christ, la maison de Dieu lglise. Le prophte parlede lavenir ( il adviendra ) : pourquoi Dieu na-t-il pas offert le salut au dbutde lhistoire ? Il fallait que lhomme sy prpart et apprt lhumilit. Quand leprophte prdit la paix, la Glose interlinaire entend quil y a maintenant moinsde guerres quautrefois, mais selon Thomas, la paix que le Christ a apporte nesera atteinte que dans lavenir. Quand le verset dit : cessez de vous conHUHQlhomme , Thomas suit la Glose et comprend : cessez doffenser le Christ.

Aux chapitres 3 et 4, le prophte reproche Juda ses pchs contre le pro-chain et console ceux qui ont souffert. la Q GX FKDSLWUH 3, il soulve deuxquestions : est-il permis de participer aux jeux du thtre ? Les femmes peuvent-elles se maquiller ? On admire le bon sens de Thomas : le bien de lhomme estde vivre selon la raison ; lemploi modr dornements peut tre bon et louable.Au chapitre 4 (v. 2-5), nous avons affaire un pome messianique intercal. Enprenant sa distance des Gloses, Thomas lentend en premier lieu dIsral lors duretour de la captivit. Le chapitre 5 nous prsente le chant de la vigne. Dans unenote, Thomas indique les signiFDWLRQV SRVVLEOHV GX PRW vigne : la concupis-cence charnelle (Sodome) ; lme Gle ; lglise militante ; la patrie cleste. Auv. 11, le prophte blme les gens qui courent aprs les boissons fortes. Le com-mentaire mentionne cinq espces dalcoolisme et de gloutonnerie daprs saintGrgoire (Moralia , ), et indique quatre caractristiques du pch.

Commentaire sur Isae Introduction

L[

Au chapitre 6 commence le livre de lEmmanuel. Le texte souvre surloracle qui dcrit le Seigneur Yahv assis sur un trne. Peut-tre le prophteparle-t-il ici de ce quil a contempl en images 10. Dans ce texte, le sens littralest prcisment la signiFDWLRQVSLULWXHOOHTX,VDe a voulu communiquer. Assissur un trne pourrait signiHU ODPDMHVWp GLYLQH DFFRPSDJQpH SDU OHV DQJHVpuis lminence et limmutabilit divines. Thomas crit quil ne sest pas agidune vision de lessence divine, mais que le prophte a vu des ressemblances dela bont de Dieu 11. Selon Denys, personne ne reoit une rvlation de la part deDieu sinon par lintermdiaire des anges ; mais Thomas rduit le rle des anges,car Dieu peut nous illuminer intrieurement. galement daprs Denys, ce ntaitpas un sraphin qui a purip OHV Ovres du prophte, car, dans sa thologieinXHQFpH SDU OH QpRSODWRQLVPH OHV VpUDSKLQV QDEDQGRQQHQW SDV OH WU{QH GHDieu, mais Jrme ny voit pas de difFXOWp 12. propos du v. 10, rends cepeuple dur doreille , Thomas note que Dieu nendurcit pas le cur humain enfaisant que la volont de lhomme soit mauvaise, mais quil ne donne pas sagrce, parce que les hommes ne veulent pas se convertir. Tout de mme, la mis-ricorde divine prvaut toujours 13.

Au chapitre 7 (v. 3), il est question dune parole que Yahv adresse au pro-phte. Il sagit, dit Thomas, dune inspiration intrieure ou dun message parlintermdiaire dune crature 14. Dans le clbre passage du signe delEmmanuel, le roi Achaz est invit demander un signe Yahv. Selon plu-sieurs exgtes, le signe promis est la naissance prochaine du roi zchias, maisThomas dfend avec force arguments quil sagit bien du Fils de Dieu 15. Il voitpourtant les difFXOWpVVXUWRXWOHIDLWTXHOHVLJQHHWFHTXLHVWVLJQLpGRLYHQWtre tout proches, ce qui nest pas le cas pour la naissance du Christ. Il arrive,crit-il, que le signe soit postrieur ce qui est signip la QGXFRPPHQWDLUHsur ce chapitre, il revient sur le v. 14, et son nom sera Emmanuel . Le Christest avec nous de plusieurs faons : comme frre ; comme poux ; comme pas-teur ; comme sauveur et comme guide et chef.

Au chapitre 8 est annonce la destruction du royaume du Nord et sont prdi-tes des tribulations pour les tribus du Sud. Mais viendra une libration. proposde la naissance dun OVG,VDe, dont parle le texte, Thomas mentionne les argu-ments de ceux qui lentendent de la naissance du Christ, mais selon lui cest uneinterprtation tordue 16 , quoique la QGXFKDSLWUHLODGPHWWHTXRQSHXWOLUHle verset aussi dans ce sens JXUp/HWH[WHELHQFRQQX le peuple qui marchaitdans les tnbres a vu une grande lumire au chapitre 9, texte qui est cit dansla liturgie pour saluer larrive du Sauveur, concerne selon saint Thomas la si-tuation de la libration miraculeuse de Jrusalem ; mais le verset 5, un enfantnous est n , est interprt par lui comme signiDQW ODQDLVVDQFHGX&KULVW ,O 10. Expos. 47, 34 ss.11. Expos. 48, 127.12. Expos. 50, 3-8.13. Expos. 52, 41614. Expos. 55, 74.15. Expos. 57, 288.16. Expos. 61, 127.

Introduction Commentaire sur Isae

[

peut sappuyer sur des citations de la Bible et dauteurs chrtiens. Thomas critsimplement : hic describit salvatorem. On est surpris que le texte passe abrupte-ment dune rfrence des vnements contemporains une prdiction duChrist. Une belle note explique les sens de la phrase un OVQRXVHVWGRQQp .Le Christ nous est donn en frre ; en docteur ; en gardien ; en dfenseur ; enpasteur ; en exemple ; en nourriture pour notre voyage sur la terre ; en prix pournous racheter 17. Le chapitre 10 est une collection de prdictions de malheur.Thomas est conscient du caractre composite du texte et y lit des menaces contreles Assyriens.

Le chapitre 11 prsente dabord un pome messianique, lavnement du roijuste (v. 1-9), qui dcrit certains traits du Messie : il est de souche davidique ; il fe-ra rgner la justice et tablira la paix. Le texte se lit dans le contexte de lAncienTestament : un rejeton sort de la souche de Jess et, aprs la destruction des en-nemis dIsral, aura lieu luniFDWLRQGHVGHX[UR\DXPHV/HFKDSLWUHHVW LQWHr-prt de trois manires : Jrme et tous les Pres pensent que le texte parle dunefaon JXUpHGX&KULVW ; alors que quelques thologiens le rfrent, en un sensJXUp zchias ou Josias. Les Juifs y voient une prophtie messianique, pre-nant tout au sens littral ; mais cette explication est trs borne. La seconde esttire par les cheveux. La premire est la vraie et nous la suivrons 18. Le ver-set 2, sur lui repose lesprit de Yahv , offre Thomas loccasion de proposerun trait clair et complet des dons du Saint-Esprit. Le Saint-Esprit est le premierdon en qui tous les autres dons sont donns 19. Tout ce passage peut tre rfraussi aux rois justes qui ordonnaient la suppression des impies. La deuximepartie du chapitre dcrit, selon les exgtes modernes, le retour des exils. Lev. 12, il dressera un signal pour les nations , signiHUDLWDORUVOpGLWGXURL&y-rus, mais selon saint Thomas ce signal est aussi le signe de la croix ou de lun oulautre miracle 20. Sans y voir une difFXOWp7KRPDVSDVVHGXVHQVJXUpDXVHQVlittral et vice-versa. Thomas connat bien linterprtation littrale, mais ici ilprfre lexplication JXUpHODOLEpUDWLRQHIIHFWXpHSDUOH&KULVWFDUDLQVLOHSDs-sage saccorde mieux avec la section prcdente.

Comme la Bible de Jrusalem, Thomas voit aussi dans le chapitre 12 deuxhymnes daction de grce. En esprit, le prophte voyait dj les bienfaits queDieu allait donner. propos du v. 3, vous puiserez de leau de la part deDieu , il crit que sont ici signipHVODGRFWULQHODJUkFHHWODSXULFDWLRQSDUOHbaptme. Le chapitre 13, crit Thomas, parle de la ruine de Babylone. Le chapi-tre 14, par contre, dcrit le retour de lexil et se rattache aux chapitres 40 45 (lelivre de la consolation). Du v. 3 au v. 21, le texte est une satire contre un tyran,par exemple Sargon II ou Sennachrib, mais Thomas note quil peut tre expli-qu dans un sens mystique, comme se rfrant au diable, qui excute les peines

17. Expos. 69, 172 ss.18. Expos. 78, 14 : et ideo illam prosequentes, alias tangemus ex latere. 19. Expos. pp. 79-80.20. Expos. 82, 388 ss.

Commentaire sur Isae Introduction

[L

et attise les fautes des gens 21. Il est difFLOHGHYRLUEHDXFRXSGRUGUHGDQVFHchapitre. Thomas se limite de brefs commentaires.

Au chapitre 15 et dans la premire partie du chapitre 16, il sagit probable-ment dune lamentation sur le triste sort des Moabites, descendants de lan desOOHVGH/RW(Gn , ). Thomas entend lensemble du chapitre comme un avertis-sement svre et une prdiction de ce qui attend les Moabites : une punition leursera inLJpHSRXUODMRLHTXLOVRQWPDQLIHVWpH propos de la perte du royaumedIsral. Thomas donne le sens spirituel du mot nuit ( dans la nuit o Ar a travag ) : la nuit est obscure par la contamination qui rsulte du pch ; par lesfautes actuelles ; par lignorance des incroyants. Des citations bibliques attestentces interprtations. La nuit a ses horreurs, poursuit Thomas, comme le dsespoiret lafLFWLRQPDLVODQXLWVLJQLHDXVVLOHUHSRVHWODFRQWHPSODWLRQ/HVHQVGXpremier verset du chapitre 16 est incertain. Thomas mentionne une explicationlittrale force : le roi de Moab aurait extorqu lenvoi dagneaux au roi dIsral,quil doit maintenant restituer. Dans son sens spirituel, le texte signiH 5XWKcomme la roche du dsert, de laquelle le Christ allait natre. Le verset 5, letrne sera affermi dans la douceur , peut sexpliquer dzchias ou du Christ.Le Christ est signipSDUXQDJQHDXHQUDLVRQGHODSXUHWpGHVDYLHGHVDPDn-sutude dans ses souffrances, et du fait davoir expi nos pchs. Une fois sur lapiste dexplications JXUpHV7KRPDV DSSOLTXH OHPRW depuis la roche du d-sert la Vierge Marie : roche signiHOD fermet de la grce en elle, la fra-cheur de sa continence et labondance des fruits 22.

Le chapitre 17 contient un oracle antrieur 732, anne o Tglath-Phalasarsempara de Damas. Thomas en donne une lecture spiritualisante, tout axe sur lefait que les Syriens sont punis parce quils fournissaient Isral un motif de nepas se HU Dieu, mais la puissance humaine. Le chapitre 18 consiste en unoracle contre Kush, alors que le chapitre 19 parle de lgypte. Thomas donneune explication spirituelle du v. 1, Yahv mont sur un lger nuage vient engypte ; le nuage peut signiHUODFKDLUKXPDLQHDVVXPpHSDU-pVXV ; le sein dela Vierge ; un esprit dvot ; la chaire du juge. De lui proviennent, selon ces qua-tre signiFDWLRQV : la pluie des sacrements ; la nourriture de la consolation ;lclat de la prdication ; la tempte de la condamnation. Le nuage est lger enraison : de la dignit de Dieu ; de la pit de la Vierge ; de la rapidit delobissance ; de laisance de lexcution 23. partir du v. 16, Isae prdit laconversion de lgypte et sa fraternit avec Isral. Dieu appellera mme lesgyptiens son peuple. Sur le trs bref chapitre 20, il ny a rien noter. Le chapi-tre 21 parle de la chute de Babylone. Dans plusieurs endroits le texte latin utilispar Thomas est inintelligible. Thomas y voit une indication de lcriture sur laparoi pendant le dner, lors de la dernire nuit du roi de Babylone. propos duv. 11, veilleur, o en est la nuit ? , une note explique le sens spirituel ;lhomme doit veiller sur lui-mme aux jours de prosprit : ne pas rechercher les

21. Expos. 91, 159.22. Expos. 97, 78.23. Expos. 104, 37 ss.

Introduction Commentaire sur Isae

[LL

richesses ; ne pas y mettre sa conDQFH ; ne pas senorgueillir. Pendant la nuit deladversit, il veille sur lui-mme en considrant lexemple du Christ 24.

Selon Thomas, le chapitre 22 est un oracle adress ceux qui volent les biensdu peuple, en particulier les rois. Le chapitre 23, par contre, contient des oraclescontre Tyr et Sidon. Tyr sera conquise et rduite limpuissance, mais, aprs unelongue priode, la ville se reprendra. Le prophte se rfre une chanson au sujetde prostitues : prends ta cithare, parcours la ville, joue de ton mieux. Thomas endonne le sens spirituel : les cordes signiHQW OHV YHUWXV OLpHV HQWUH HOOHV ;lallgresse du chant, la douceur des bonnes uvres ; et parcourir la ville ,cest examiner sa conscience 25.

Les chapitres 24 27 annoncent le jugement en gnral. Quelques notes ma-nifestent le sens spirituel de formules comme les boissons fortes sont amres ,et il adviendra en ce jour-l que Yahv visitera (chtiera) : le pch est amer cause du remords et de la pnitence ; Dieu nous visite pour condamner, rpri-mander et pour consoler 26. Le chapitre 25 prsente une action de grces etdcrit le festin messianique, le ct consolant du jugement. Dieu prpare un fes-tin sur la montagne de Sion, parce que cest l que le Christ a souffert, et de sapassion tous les biens procdent. Il se peut aussi que le jugement dernier soitprononc sur cette montagne 27. Le festin (v. 6) a une signiFDWLRQ VSLULWXHOOH :a) le repas familier de lglise militante, marqu par trois choses : les lgumesamers signiHQWODGRXORXUHXVHSDVVLRQ(Ex , ) et rappellent la mort du Christcommmore dans le sacriFHHXFKDULVWLTXH ; mais le festin signiHDXVVLODGRu-ceur de lamour (Sg , ) ; b) le banquet de lme avec Dieu (le vin de lamour,le miel de la contemplation, le lait qui puriHHWQRXUULW ; c) le troisime festinest celui du ciel 28.

Le chapitre 26 contient un chant de victoire, une prire pour hter le juge-ment et un oracle qui donne la rponse de Yahv. Thomas y voit une rfrence auretour de la captivit, ou bien la victoire des Macchabes sur les Moabites, ou ce qui est arriv aprs la venue du Christ. Dans des notes, Thomas donne succes-sivement une explication JXUpHGHFHUWDLQVWHUPHV/D ville forte du v. 1 estle Christ, interprtation illustre par un grand nombre de citations scripturaires. Ouvrez les portes en mditant sur lenfer, la vie juste et la gloire cleste 29. Yahv, tu nous donnes la paix , cest--dire labondance des biens et la pro-tection contre les maux 30.

Le chapitre 27 ouvre sur lannonce dun chtiment, pour parler ensuite de lavigne de Yahv et terminer sur un oracle. Dans des notes Thomas explique que leserpent Lviathan est le diable 31. Yahv chtiera de son pe est expliquavec force de dtails. Les explications que Thomas fournit au chapitre 28 sont

24. Expos. 110, 171 ss.25. Expos. 116, 126 ss.26. Expos. 120, 174 ; 194.27. Expos. 121, 60.28. Expos. 122, 11 ss.29. Expos. 124, 137.30. Expos. 125, 158.31. Expos. 128, 119.

Commentaire sur Isae Introduction

[LLL

moralisantes. Le chapitre 29 dcrit le sige de Jrusalem en 701. Thomas y voitannonce la destruction de la ville par les Babyloniens, et ultrieurement par lesRomains. propos du v. 7, la horde des ennemis sera comme un songe , ilexplique quon dit que quelque chose est comme un songe cause dune duretrs brve ou de lobscurit de ce quon croit connatre, ou lattitude de lmeperverse qui se nourrit de rveries 32. Le verset 22, dsormais Jacob naura plusde honte , indique la conversion des Juifs la QGXPRQGH 33.

Le chapitre 30 est un avertissement contre lenvoi par zchias dune lga-tion au Pharaon (vers 702) pour demander son aide contre les Assyriens. MaisThomas ne connat pas bien cette chronologie. Il y voit un oracle contre les per-sonnes qui avaient critiqu Jrmie quand celui-ci sopposait un trait aveclgypte. Mais cela est arriv beaucoup plus tard. Dans des notes, Thomas donneun sens JXUpDXY 23, le pain succulent qui est la parole de Dieu, pain com-pact, abondant et nourrissant ; et au v. 27, le nom de Yahv arrive de loin :cest une annonce du jugement dernier, voire une rfrence lenfer. Le chapi-tre 31 met en garde galement contre des contacts avec lgypte, et dans le cha-pitre 32, Thomas lit lannonce dune libration 34. Il commente le v. 17, la jus-tice produira la paix (opus justiti pax), en le rfrant la paix des saints dansla patrie cleste, qui sera belle, parce que ni fausse, ni interrompue, mais pl-nire. propos du v. 20, vous smerez o il y a de leau , il propose une ana-logie un peu trange avec la doctrine du Christ, compare leau, parce quelleest abondante, parce quelle rafrachit, quelle emporte avec rapidit et sadapte tous 35.

Au chapitre 33, le prophte prdit la destruction des ennemis. Thomas ajoutequelques digressions propos de lun ou lautre terme. Le v. 13 dit : coutez,vous les plus lointains, ce que jai fait, apprenez, vous les plus proches, quelle estma force. Thomas y voit une description du bonheur de ceux qui habitent avecDieu et de leur bonnes dispositions , idoneitatem 36. Il commente aussi quel-ques termes comme richesses , diviti (v. 6) ; mon soufH HVW FRPPH XQfeu (v. 11) ; celui-l habitera l-haut (v. 16).

Le chapitre 34 prdit la QGeGRP5DWWDFKpHDX WH[WH LO\ DXQHcollatio,cest--dire une note qui dans le manuscrit se trouvait dans la marge du texte,mais qui a t ajoute la partie QDOH GX FKDSLWUH (OOH HVW WUs typique delexgse mdivale et donne les signiFDWLRQVVSLULWXHOOHVSDUIRLVVXUSUHQDQWHVdun mot. Elle ne se distingue gure des notes dj incorpores dans le texte,dont nous avons parl ci-dessus. Dans ce chapitre, le mot accedite est expliqu :lhomme sapproche de Dieu en recevant la grce, en contemplant la sagesse di-vine, en excutant le ministre ou la tche qui lui est impose, en cultivant laconDQFHHWHQSUDWLTXDQW ODFRQFRUGH$XFKDSLWUH 35, le prophte nous ditque le dsert et la terre aride HXULURQWFRPPHGHVOLV'DQVXQHFROODWLRQ7Ko-

32. Expos. 134, 67.33. Expos. 135, 164.34. Expos. 143, 30.35. Expos. 144, 128 ; 145, 142.36. Expos. 148, 136.

Introduction Commentaire sur Isae

[LY

mas explique que les saints sont compars aux lis par la hauteur de leur tige, ladouceur de leur parfum, la vigueur de leur sve ainsi que par le fait quils setiennent lis ensemble en groupes. Ces lis, le Christ les habille de vertus et dedons, il les rassemble pour la rcompense ternelle, il trouve en eux un repos decomplaisance : il est lui-mme un lis.

Les chapitres 36 39 sont une reprise de textes du deuxime livre des Rois.Au chapitre 37 (v. 4), Isae dit au roi zchias dadresser une prire Dieu. Dansune collation est explique lexpression faire monter une prire . Plusieurscitations de la Bible nous disent que faire monter se justiHSDUOpPLQHQFHGHla contemplation, la ferveur du sentiment, les larmes du repentir, le zle pourfaire du bien. Sont mentionnes ensuite les diffrentes situations dans lesquellesil faut recourir la prire. Au v. 29 on trouve la phrase je passerai mon anneau ta narine . Thomas relve diverses applications : il y a le mors de la discrtionhumaine, dans lusage des paroles ; celui du gouvernement divin, pour le salut dupeuple ; celui de lafLFWLRQWHPSRUHOOH ; celui de la damnation ternelle. Toutesces applications sont illustres par des citations de la Bible et constituent des si-tuations typiques dans la vie du peuple de Dieu.

Au chapitre 38, il est question de la maladie et la gurison dzchias. SelonThomas, Dieu aurait laiss le roi tomber malade cause de son ingratitude aprsune victoire. Dans un premier oracle, Isae annonce au roi quil va mourir, maisle moment ntait pas encore venu. Fausse prophtie ? Il faut comprendre queDieu navait dabord rvl au prophte que les causes naturelles, qui normale-ment devaient conduire le roi la mort. Quant la gurison du roi, annonce parun signe, Thomas, en sappuyant sur la Glose et une lettre de Denys 37, interprtele miracle de larrt du soleil dans sa course comme un vritable prolongementde la journe. Ensuite soit le soleil a d rattraper le temps perdu, ou bien tous lesautres corps clestes se sont accommods de cet arrt du soleil 38. Il y a deuxcollations. La premire est introduite par les mots in morte conGDP, qui expri-ment lattitude dzchias en face de la mort, savoir quil peut tre plein deconDQFH VLO QH VHVW SDV VRXLOOp SDU OH SpFKp VLO D SHUVpYpUp GDQVlaccomplissement de bonnes uvres et sil a eu un grand amour. La deuximecollation a comme point de dpart le v. 14, mes yeux se sont affaiblis, regar-der vers les cieux : les yeux qui slvent par larrogance, Dieu les abaisse ; lesyeux dsireux de tout connatre faiblissent sous le poids de la lumire ; les yeuxlevs par la contemplation sont abaisss par les limites de la connaissance 39. Lechapitre 39 est un trs bref chapitre sur la lgation babylonienne.

Les chapitres 40 55 ne se situeraient pas au VIIIe sicle. Les oracles sontplutt rconfortants et ne profrent pas de menaces. Leur style est beau et le textedfend le monothisme et luniversalisme religieux. Lexgse moderne y voitluvre dun disciple anonyme dIsae de la QGH OH[LO6DLQW7KRPDVDQRWpquil sagit dune deuxime partie du livre et la divise en deux : les chapitres 40 44 invitent esprer le salut ; les chapitres 45 et suivants parlent de

37. Epist. VII ad Polycarpum.38. Expos. 163, 66.39. Expos. 165, 185 ss.

Commentaire sur Isae Introduction

[Y

laccomplissement des promesses divines. Il donne au chapitre 40 une QHH[SOi-cation thologique de la puissance cratrice de Dieu. propos du verset 13, qui a aid lesprit de Yahv ? , il carte lopinion de ceux qui disent que Dieuutilise des intermdiaires pour crer. Mais dans une collation, Thomas expliquequon collabore avec le Saint-Esprit par la prdication, en invitant les gens sapprocher de Dieu et en veillant ce que personne ne se soustraie de la grce.Le v. 31, les saints auront des ailes comme des aigles , signiHODKDXWHXUGHleur vol, la subtilit de leur odeur, llvation de leur conversation, la prompti-tude de leurs mouvements, leur renouveau spirituel, leur beaut et la sollicitudepour ceux qui leur ont t conpV7RXWHVFHV VLJQLFDWLRQV VRQW WLUpHVGHFLWa-tions bibliques 40.

partir du verset 21 du chapitre 41, Thomas analyse les arguments contre lesidoles : ceux-ci nont pas de connaissance, et nont pas de puissance. Ils ont tfabriqus. Il na pas vu que la dernire section (v. 25-29) est une prdiction de lavictoire de Cyrus. Il y a plusieurs collations : il savance paisible est appliquau Christ ; on prche lvangile m par la foi, par le zle et par la grandeur de larcompense ; je ferai jaillir des HXYHV est expliqu comme pouvant signiHUnos larmes, la puriFDWLRQGDQVOHEDSWme, la grce spirituelle, la sagesse divine(cf. Si , : cest elle qui fait abonder la sagesse comme les eaux du Phi-sn. ) et la joie intrieure.

Le chapitre 42 contient le premier chant du Serviteur. Thomas lit le textecomme se rfrant au Christ. Le chant montre lamour de Dieu qui promet etdonne son Fils. Le texte parle de la plnitude de la grce dunion hypostatique,indique par le verbe suscipiam eum 41 de la Vulgate, qui nous permet de lire unsens plus profond et plus riche dans ce texte. Le chant loue ensuite lquit desjugements du Serviteur, son autorit et sa mansutude, son impartialit, son pou-voir. Thomas a bien saisi la division du chapitre et la diffrence entre ses sec-tions, mais son valuation du but prcis dun passage diffre parfois de celle desditeurs modernes. Il y a deux collations : une premire propos du mot clamordu v. 2, il ne crie pas . Le texte exprime la mansutude du Christ. Ladeuxime concerne la phrase je tai dsign comme alliance du peuple et lu-mire des nations . Le Christ nous est donn en alliance pour nous donner lesalut et accomplir les promesses 42, pour nous montrer lamour divin et annoncerla QGHOD/RLDQFLHQQH 43.

Thomas divise le chapitre 43, qui traite de la libration dIsral, en trois par-ties : les versets 1 13 montrent lamour divin ; les versets 14 21 rappellent lesbiens que Dieu a donns dans le pass ; les versets 22 28 excluent que ce soiten raison des mrites dIsral que Dieu lui accorde ses faveurs. Thomas fait res-sortir que le texte met en relief le thme de la totale gratuit de llectiondIsral. Le commentaire sur le chapitre se termine par quatre collations sur lev. 2, si tu traverse le feu, tu ne ty brleras pas ; cest le feu des tentations

40. Expos. 171, 285 ss.41. La Bible de Jrusalem traduit : Voici mon serviteur que je soutiens. 42. Thomas renvoie Co , : toutes les promesses de Dieu trouvent leur oui en lui.43. Expos. 180, 206 ss.

Introduction Commentaire sur Isae

[YL

charnelles (Jb , : un feu qui dvore jusqu la perdition ), le feu de la tri-bulation temporelle, de la damnation ternelle et de lindignation divine ; maisles dissolus, les impatients, les orgueilleux et les impnitents vont tre consu-ms 44. Les eaux ne te submergeront pas : ce texte est une allusion ceuxqui sont engloutis par leur volupt ; Dieu en libre, ainsi que de la cupidit, deladversit et de la puissance de ce monde. Une srie dimpressionnantes cita-tions bibliques expliquent le bien-fond de ce commentaire et offrent de la ma-tire pour la mditation 45. Au verset 26, on est invit se rappeler lhistoire dusalut et les pchs des pres, mais Thomas se sert de ces mots pour veiller lesouvenir des bienfaits de Dieu : les grandes uvres quil a faites ; les souffrancesendures pour nous ; les prceptes quil a donns.

Le chapitre 44 parle des bndictions dIsral, du ridicule de lidoltrie, de lagloire du Dieu unique et de la force de Yahv. Quelques termes ont donn lieu la rdaction de collations : ce que dit le v. 3, je rpandrai mon esprit , se r-alise : a) pour les nophytes ou les dbutants, comme lannonce Ez , , dansle bain de la rgnration et par le privilge de ladoption ; b) pour les progres-sants, qui sont instruits, dont le cur est ranim et qui sont aids agir confor-mment la volont de Dieu ; c) pour les parfaits, qui reoivent le don delEsprit comme le bienfait de leur libration, comme lien de lunit et commegage de leur hritage 46. EnQ7KRPDVFRPPHQWH OHPRWsancti sunt, qui ne setrouve pas explicitement dans le texte. On pourrait dire que la vocation dIsralimplique que le peuple soit saint (v. 7). Ici, Thomas voque la prdestination etlinfusion de la grce. Il sagit ensuite de se laisser guider par lamour et de sesanctiHUSDUOHWUDYDLOTXRQDccomplit 47.

Au chapitre 45, le roi Cyrus entre en scne. Les paens se rallient Yahv, etluniversalisme de la foi au Dieu unique est afUPp7KRPDVYRLWGDQVFHWH[WHcinq arguments en faveur de la conversion des Gentils la foi au Dieu unique :a) la cration ; b) lamour manifest aux hommes, qui Dieu a conp OD WHUUH ;c) la vrit prche de faon manifeste ; d) lutilit des prceptes moraux ;e) lquit de ceux-ci. propos du v. 8, cieux ! rpandez comme une rose lavictoire, et que les nues la fassent pleuvoir (rorate cli desuper), Thomas noteque le sens spirituel de ce texte est une rfrence la naissance du Christ 48.

Au chapitre 46, le prophte dcrit en couleurs vives comment Cyrus a vaincules Babyloniens. Ceux-ci senfuyaient en emportant leur idoles. Par contre, cestDieu qui porte Isral. Une premire collation concerne le v. 1, on charge leursidoles sur des btes de somme qui seffondrent sous le fardeau : le pch fati-gue, explique Thomas, par leffort de sa prparation, sa difFLOH H[pFXWLRQ HWaussi cause de la honte quon ressent en se souvenant ce quon a fait, et de lafrustration quant ce quon en attendait. La deuxime collation interprte lessens spirituels possibles du v. 8, revenez votre cur .

44. Expos. 184, 170.45. Expos. 184, 189.46. Expos. 188, 150.47. Expos. 188, 160.48. Expos. 192, 203.

Commentaire sur Isae Introduction

[YLL

Alors que le chapitre 47 est une lamentation sur le sort de Babylone, le cha-pitre 48 montre que Dieu est le seul matre de lhistoire et que Cyrus est sonbien-aim. Le verset 10, je tai prouv au creuset du malheur , rappelle quele malheur et les preuves nous aident reconnatre nos pchs et pratiquer lesvertus. La pauvret donne la tranquillit du cur et nous aide chercher la dou-ceur de Dieu et lhritage cleste. Le v. 17, moi, Yahv, je tenseigne ce quitest salutaire , est comment ainsi : ce que Dieu rvle illumine lesprit,enDPPHQRWUHDPRXUQRXVPHXW faire des uvres justes, chercher la gloirecleste et aider les autres. Le problme de ce chapitre est de savoir jusqu quelpoint la JXUHGH&\UXVSUpJXUHOH&KULVW$XY 15, nous lisons en effet cestmoi qui lai fait venir et qui ai donn la russite ses desseins . Saint Jrme estrticent : Cyrus a t linstrument de Dieu pour la destruction des ennemisdIsral, mais il tait un idoltre 49 (In Isaiam ; PL , C ; ).

Le deuxime chant du Serviteur de Yahv se trouve au chapitre 49. SelonThomas, les premiers versets parlent de llection du peuple dIsral, mais ilmentionne que dautres y voient la voix de Cyrus et quon peut aussi les rfrerau Christ, dont la prdication tait un glaive deux tranchants 50. Quant aux ver-sets 5 et 6, je ferai de toi la lumire des nations pour que mon salut atteigne auxextrmits de la terre , Thomas note quils sappliquent au Christ, mais aussi Cyrus, quoique cela soit plutt tir par les cheveux 51. Un peu plus loin, proposdu v. 8, Thomas applique le texte tout dabord Cyrus, mais il ajoute que cela sedit galement du Christ, qui fut mpris dans sa passion, mais qui, plus tard, futador par les rois 52. tout prendre, saint Thomas semble lire ce chapitre surtoutdans le sens dune annonce de la libration dIsral et du retour de celui-ci, etbeaucoup moins comme se rfrant dabord au Christ. De mme, il semble pen-ser que le troisime chant du Serviteur, au chapitre 50 (v. 4-9), sapplique en pre-mier lieu Isae mme. Le prophte se donne en exemple et ne sest pas soustraitaux perscutions et aux outrages. Mme le verset 10, quiconque parmi vouscraint Yahv, quil coute la voix de son Serviteur , est rfr Isae ou unautre serviteur de Dieu 53. Le commentaire se termine sur trois notes. proposdu verset cest pour vos crimes que vous avez t vendus , Thomas note que, cause de sa superbe, lhomme va parfois trs loin pour obtenir ce qui est mau-vais, et peut mme compromettre son hritage cleste, comme les enfantsdIsral se sont tourns vers dautres dieux. Le v. 11, vous serez allongs dansvos douleurs , signiHTXHORUVTXHOHVSpFKHXUVPHXUHQWLOVVRXIIUHQWGHODSHUWHde leur vie corporelle, du remords quils ressentent et du dsespoir davoir perdula gloire cleste 54.

Linterprtation du chapitre 51 est difFLOH/HSURSKte y parle du salut desOVG$EUDKDPGXMXJHPHQWGLYLQGXQHSULre Dieu pour obtenir son secours,dune annonce du salut. Ensuite Jrusalem est invite se rveiller et prendre 49. Expos. 199, 103.50. Expos. 201, 30 : aliter exponitur de Christo. 51. Expos. 202, 60 : magis extorte .52. Expos. 202, 90.53. Expos. 206, 105 : vel cuiuscumque alterius .54. Expos. 207, 122.

Introduction Commentaire sur Isae

[YLLL

courage. Thomas explique que les Juifs en exil pouvaient facilement se dcoura-ger cause de leur petit nombre et de leur humble condition, mais que Yahv aralis des choses bien plus difFLOHVSRXU$EUDKDPHWTXLOH[pFXWHUDVHVSUo-messes. Dautre part, il est question aussi de Cyrus. Au v. 5, de moi vient laloi , est indiqu ldit de Cyrus relatif la libration dIsral. Au v. 5, je feraivenir soudain ma justice , le texte de la Vulgate a prope est iustus meus, etThomas crit que le juste est Cyrus ou le Christ 55. galement le v. 5, les lescomptent sur mon bras , se dit de Cyrus ou Darius.

Thomas cherche des connexions entre les chapitres et ainsi il voit les chapi-tres 50 52 sous laspect de lcartement des obstacles au retour dIsral de sonexil. Les obstacles sont son petit nombre et sa pauvret, loppression dont Isralsouffrait et le manque de moyens. Mais tout ce dont ils auront besoin leur seradonn gratuitement. Au chapitre 52 (v. 6) : ce jour-l, cest moi qui dis : Mevoici. ; le sens mystique du passage est la venue du Christ. Une note proposdu v. 1, revts tes vtements les plus magniTXHV , explique que son sens spi-rituel est que les saints se revtent de vertus. La couleur blanche signiHlhonntet et la bonne intention. Dgage-toi de tes liens (v. 2) veut dire quonse libre des proccupations de ce sicle, de lamour charnel, des mauvaises ac-tions et habitudes 56.

Le quatrime chant du Serviteur de Yahv est sans nul doute une prophtiesur le Christ. Le prophte prdit la libration des peuples de lesclavage du p-ch, accomplie par le Christ dans sa souffrance. La description des souffrancesdu Serviteur est continue au chapitre 53. Le bras de Yahv dont parle lepremier verset est le Christ, qui est le bras de Dieu pour rprimer les dmons,soutenir les faibles et dfendre les Gles 57. Le v. 2, comme un surgeon il agrandi, comme une racine , veut dire que le Christ a men une vie cache, quilcommunique la nourriture et supporte tout larbre. Thomas donne ensuite unecourte, mais excellente explication des diffrents aspects de la passion du Christ,de ses souffrances et de la rconciliation quil a accomplie 58.

Au chapitre 54, nous quittons le Serviteur pour nous tourner vers Jrusalem.Alors que le chapitre 53 parle du remde contre les pchs, au chapitre 54 estpropos le remde contre la situation misrable doppression. Lamour de Yahvprotgera Jrusalem. Trois notes commentent des expression du dbut du chapi-tre : crie de joie, strile ; largis lespace de ta tente : cela signiHpFULWThomas, quil faut rendre plus large notre cur pour un hte si grand et pour re-cevoir dinnombrables bienfaits ; mu dune immense piti, je te rassemble-rai : dans son amour ternel, Dieu nous comblera de dons 59. Au chapitre 55,crit Thomas, est propos un troisime remde contre la misre dans laquelle setrouvait Isral ; maintenant Dieu va pourvoir tous les besoins et carter la di-sette et la pauvret 60. Le v. 1 dit : vous qui tes altrs, venez vers leau. 55. Expos. 208, 39.56. Expos. 212, 91-106.57. Expos. 215, 19.58. Expos. 215, 136 ss.59. Expos. 219, 19.60. Expos. 221, 1.

Commentaire sur Isae Introduction

[L[

Leau signiHLFLODGRFWULQHGLYLQHTXLSXULHFHX[TXLVRQWFRQWDPLQpVGRQQHde la sant et dsaltre les assoiffs. Les mots vin et lait du mme versetsappliquent aussi la doctrine divine : elle nous stimule dabord, puis nousenDPPHHWHQQQRXVHQLYUHGHVHVFRQVRODWLRQV7KRPDVFRPSDUHODGRFWULQHdivine au lait cause de sa limpidit, de sa douceur et de sa digestibilit 61.

Avec le chapitre 56, nous entrons dans la troisime partie des prophtiesdIsae. Selon la plupart des exgtes, elle est composite : le chapitre 57 pourraittre antrieur lexil ; les chapitres 55, 58, 66 supposent que le retour a eu lieu ;les chapitres 63 65 seraient des textes apocalyptiques, alors que les chapitres 60 62 sapparenteraient aux chapitres 40 55. Saint Thomas, dont le commentairesur ces derniers chapitres du livre est assez bref, propose la division suivante :a) la prparation du salut (ch. 56-59) ; b) la promesse du salut (ch. 60-62) ; c) le salutconfr (ch. 63-65). Il commente le v. 5 du chapitre 56, je leur donnerai un nommeilleur : les lus ont un nom grce la prdestination divine ; ensuite causede leur adoption et grce au don de la grce ; enQJUkFHDXUHQRXYHDXGH OHXUesprit. Il faut aimer le nom de Yahv (v. 6), parce quil est grand et redoutable,saint et vnrable, et doux pour ceux qui mditent sur lui ; il est riche en misri-corde et nous exauce. Il est puissant pour le salut, mais cach et difFLOH connatre 62.

Le chapitre 57 souvre sur le verset le juste prit et personne ne prend lachose cur . Selon Saint Thomas, ce chapitre montre la diffrence entre ceuxqui obissent Dieu, et ceux qui se dtournent de lui et les idoltres. Les justessont perscuts, mais la paix leur est promise, alors que, pour les injustes, il ny apas despoir dchapper leur punition. Le chapitre 58 semble post-exilien, car ildfend une conception plutt intrieure du jene. Par contre, lobservation strictedu sabbat est exige. Thomas note que Dieu ne veut pas pour elles-mmeslafLFWLRQHWODSHLQHGHVKRPPHVPDLVODERQWpHQYHUVOHXUSURFKDLQ 63. Il y adeux notes. propos du v. 1, lve ta voix comme le cor , Thomas crit : lecor nous anime tre actif (le cor qui rsonnera la rsurrection), invite au com-bat, annonce le progrs quon a ralis ; le cor convoque aussi les membres dunconseil et nous invite la fte. Au v. 9, le prophte invite exclure le geste me-naant et le joug quon impose autrui. Thomas explique quil y a une chane dela servitude, de la prison, des chanes de liniquit et de la pauvret, mais ausside la pit, comme saint Paul dans ses chanes tait lambassadeur delvangile 64.

Le chapitre 59 serait un psaume tardif. Selon Thomas, il sagit l de la prpa-ration de ceux qui vont recevoir le salut. Le texte dcrit encore leur grande mi-sre, formule un acte de foi, lance une polmique contre leurs adversaires et faitconfession de leurs fautes. propos du v. 2, vos iniquits ont creus un abmeentre vous et Dieu , Thomas commente : le pch nous spare de notre prochainpar des dsaccords et des querelles, mais il nous spare aussi de nous-mmes par

61. Expos. 222, 94 ss.62. Expos. 224, 96 ss. ; 105 ss.63. Expos. 229, 51.64. Expos. 231, 133 ; 144.

Introduction Commentaire sur Isae

[[

une fausse orientation. Il nous spare de Dieu en nous dtournant de lui et de sonroyaume, car nous serons dshrits. EnQ LO QRXV VpSDUH GH ODVVHPEOpH GHVsaints. Le v. 8, ils ne frayent que des pistes tortueuses , a un sens spirituel :notre chemin est tordu cause du pch, de la misre et de la fraude. Le v. 19compare la rapidit et la force de lintervention de Yahv un torrent imptueux.Le Christ est ce torrent, par labondance des eaux les rivires de Dieu regor-gent de grces, par la ferveur de son amour et la rapidit de son interventionainsi que par son origine den haut : cest un HXYHGHYLHTXLMDLOOLWGXWU{QHGHDieu 65.

Un tableau de lclatante rsurrection de Jrusalem est propos au chapi-tre 60. Le prophte exprime son message de consolation au moyen du symbo-lisme de la lumire. Thomas semble situer le texte aprs le retour de lexil 66.Dans lensemble de ce chapitre, Thomas mentionne le sens mystique. Quant auv. 4, tous se rassemblent et viennent toi , il crit quon peut y lire aussi lerassemblement des diffrents peuples dans lunit de lglise. De la mme faonle v. 5, les trsors de la mer afXHURQWYHUVWRL , peut tre compris de lentredes peuples dans lglise. Thomas rfre le texte Mt . Il y a deux notes expli-catives : le v. 1, debout, rayonne, Jrusalem , dcrit lglise, illumine par lasainte doctrine et par le don dune comprhension spirituelle. Elle est illuminepar la grce, par la lumire de la gloire et par Dieu qui habite une lumire inac-cessible. Elle rayonne de joie. Au v. 8, le prophte demande : qui sont ceux-lqui volent comme un nuage, comme des colombes vers leur gte ? Thomas yvoit une indication symbolique des aptres : comme le nuage par la pluie quilrpand, les aptres rendent les hommes fertiles ; ils diffusent la lumire et ils sedplacent dans toutes les directions. Les colombes indiquent le repentir, la sim-plicit, la hauteur de la contemplation et la puret de la conscience 67.

Le chapitre 61 contient le clbre passage lu par Jsus dans le synagogue deNazareth. Thomas lapplique dabord au prophte et, en second lieu, au Christ.Le reste de son commentaire de ce chapitre insiste aussi sur le sens littral, touten proposant des applications au Christ. Le v. 1, Yahv ma oint , se dit duChrist qui a t oint par le Pre avec lhuile de la dignit sacerdotale et du pou-voir royal, ainsi que dune immense force, de joie et dallgresse. Le serviteurdvot oint le Christ avec ses larmes de componction, avec lhuile de sa dvotion,de ses bonnes intentions, de ses louanges et actions de grce 68. Au chapitre 62 leprophte nous parle encore du nouvel essor de Jrusalem. Thomas laisse ouvertela question de savoir si le prophte parle en premier lieu de Cyrus ou sil faut ap-pliquer ce texte au Christ. La Vulgate parle au v. 1 du sauveur, qui est en premierlieu Cyrus dans la gloire de son rgne, mais selon le sens spirituel il sagit duChrist 69. Le nom nouveau de Sion (v. 2) est lglise. Dans une note propos duv. 1, pour Sion je ne me tairai point , Thomas fait remarquer que les saints ne

65. Expos. 234, 162 ; 175 ; 186.66. Expos. 236, 108.67. Expos. 238, 221 ss.68. Expos. 240, 65 ss.69. Expos. 242, 9.

Commentaire sur Isae Introduction

[[L

se taisent pas cause de leur grand dsir de proclamer les merveilles de la bontdivine et cause de la vrit vidente de la foi, mais aussi en raison de la missionqui leur est impose et de la rcompense promise 70. Jusqu ce que sa justicejaillisse comme laurore : le Christ resplendit comme limage du Pre, il res-plendit aussi de la lumire des saints, de la plnitude de sa propre gloire et de larectitude de sa doctrine 71.

Le chapitre 63 est un pome apocalyptique sur la vengeance divine : qui estdonc celui qui arrive ddom, de Bosra en habits tachs de pourpre ? Thomasnote que tous les saints docteurs lisent dans ce texte une rfrence au Christ.dom signiHUDLW OHPRQGH%RVUD-pUXVDOHP Dans de beaux vtements : leChrist resplendit de la splendeur de sa divinit. Le pressoir (v. 3) signiHODFURL[do a coul le sang pour nous racheter. Mais Thomas ajoute que, dans leur en-semble, les versets 1 6 peuvent tre expliqus la lettre 72. Il a vu aussiquavec le v. 7 commence une nouvelle section, dcrite par la Bible de Jrusalemcomme un psaume. Au chapitre 64, dit Thomas, le prophte demande Dieudavoir piti, pour ensuite lui soumettre une ptition au chapitre 65. Au v. 4, ceque tu as prpar pour ceux qui taiment , il commente : Dieu prpare pour lessaints le lieu du repos ternel, le rgne dans une ternelle dignit, le banquet duciel et le DPEHDXGXQHOXPLre ternelle 73.

Les chapitres 65 et 66, dont Thomas met en relief la continuit, se dressentcontre lidoltrie et annoncent la sentence divine de la sparation des justes etdes mchants. Le saint docteur formule une prire la QGHVRQFRPPHQWDLUH : de ces peines puisse nous librer celui qui nous a aid commencer et termi-ner ce commentaire. On trouve en QDOHXQHQRWHGH-DFRELQG$VWL, de la pro-vince de Lombardie, mais qui lpoque rsidait Naples. Il dclare avoir trans-crit le texte de lExpositio en criture lisible et avoir ordonn les collations,qui se trouvaient en marge du texte.

Rsumons le rsultat de notre lecture du commentaire. Commenter les pro-phties dites dIsae est une tche des plus difFLOHV : la rdaction des diffrentesparties semble staler sur une priode de deux sicles. Sy ajoute le fait que plu-sieurs visions du prophte dcrivent aussi ce qui va arriver dans lavenir. EnQla Tradition a vu dans plusieurs de ces prophties une annonce du Christ, de sapassion et de sa gloire. La liturgie en a incorpor de nombreuses citations danslofFHHWOHVIRUPXODLUHVGHODPHVVH6DLQW-pU{PH va jusqu dire quici et l leprophte semble un tmoin oculaire de la passion du Christ. Or, nous avons vuque saint Thomas, tout en reconnaissant que certains textes sont lire dans unsens spirituel, cherche nanmoins valoriser autant que possible et en premierlieu le sens littral. Souvent dans son commentaire il donne les deux sens, ennotant, aprs avoir mentionn le sens littral, mystice autem. Quant lunit delensemble, Thomas interprte les vnements davant la chute du royaume duSud, de lexil et du retour comme se situant dans une sorte de prsent, quon

70. Expos. 243, 73.71. Expos. 243, 84.72. Expos. 245, 136 : posset autem exponi totum ad litteram. 73. Expos. 249, 92.

Introduction Commentaire sur Isae

[[LL

pourrait appeler un prsent prophtique. Le fait que la tradition a runilensemble des chapitres dans un seul recueil sous le nom dIsae, semble donnerune certaine justiFDWLRQ une interprtation qui, travers les vnements histo-riques, voit toujours le combat entre le bien et le mal, les nombreuses inGpOLWpVdIsral, les peines lui inLJpHVSDU

Prologue

PRAMBULEcris la vision et expose-la sur des tables, pour que celui qui la lira la par-

coure jusquau bout ; car cette vision est encore lointaine, et elle apparatra laQ (Ha , -). De ces paroles, on peut tirer trois choses touchant le livre du pro-phte Isae que nous avons entre les mains :

Lauteur ; La manire ; La matire.

Concernant lauteurOn pose trois choses :

1 Lauteur ;2 Le ministre de lauteur ;3 Et lofFHGXPLQLVWUHRXVRQGRQ

1 Lauteur est montr dans lordre de celui qui parle ; aussi est-il dit au dbut : leSeigneur me rpondit et dit : cris la vision. En effet, lauteur de la sainte cri-ture est lEsprit Saint. Is , : maintenant le Seigneur ma envoy [avec sonEsprit]. P , : car ce nest pas par une volont humaine [quest jamais ve-nue une prophtie, cest pousss par lEsprit Saint que des hommes ont parl dela part de Dieu]. En effet, Co , : lEsprit rvle les mystres.

2 Le ministre est montr comme celui qui crit, car il est dit : cris ; or la languedu prophte tait linstrument du Saint-Esprit. Ps , : ma langue est comme lecalame dun scribe qui crit rapidement. Co , - : quest-ce quApollo ? Etquest-ce que Paul ? Les ministres de celui en qui vous avez cru.

3 Quant lofFHGXPLQLVWUHLOHVWPRQWUpGDQVFHSULYLOge quest la vision : il diten effet [cris] la vision. S , : car celui quon appelle aujourdhui prophte,on lappelait autrefois le voyant. Nb , : si quelquun est parmi vous prophtedu Seigneur, cest en vision que je lui apparatrai, ou dans son sommeil que je luiparlerai. Ainsi ce qui touche lauteur est clair.

La manireElle est indique dans ce qui suit, et expose. En effet, la manire de cette pro-

phtie est claire et manifeste. Aussi, comme il est dit dans le Prologue, [Isae] nesemble pas prophtiser pour ce qui concerne lavenir, mais plutt rapporterlhistoire de faits passs. ce sujet, on aborde trois choses :

I. Lexposition de la vision ;II. La raison de cette exposition : sur des tables ;

III. Et lutilit qui en rsulte : pour quil la parcoure jusquau bout.

Commentaire sur Isae Prologue

B.I LexpositionLe premier point est montr par ces paroles : expose-la. Or cette vue, ou cette

vision, est expose par lui de trois faons :1 Dabord par des comparaisons adaptes ;2 Puis par ce quexprime le discours ;3 EnQSDUODEHDXWpGHVPRWV

Et sous ces trois rapports, ce prophte dpasse les autres prophtes.1 Il emploie en effet des comparaisons belles et distingues, qui nous sont

dailleurs ncessaires, cause de la connaturalit de nos sens et de notre raison :il est en effet naturel notre raison de recevoir des choses sensibles, aussi per-oit-elle avec plus dacuit ce dont elle voit des images avec les sens. Aussi De-nys prouve-t-il, dans sa seconde ptre Tite (Epist. , ; PG , B), que lesJXUHVVHQVLEOHVVRQWQpFHVVDLUHVGDQVOeFULWXUH : chacun, entendant des parolesclaires, recompose en soi une certaine JXUH TXL OH FRQGXLW SDU OD PDLQ lintelligence thologique [ la contemplation divine]. Os , : je me suis faitconnatre par les uvres des prophtes.

2 Isae lemporte aussi sur les autres par ce quexprime son discours, en sorte quilsemble annoncer non une prophtie, mais lvangile, comme il est dit dans le Prologue casqu 1 . Aussi lui est-il dit (, ) : fais retentir ta voix, [toi qui an-nonces lvangile Jrusalem ; lve-la,] ne crains pas, dis aux cits de Jude :[Voici votre Dieu].

3 Il lemporte encore par la beaut de son langage, comme il convient un hommenoble et dune loquence distingue, comme il est dit au Prologue et en Pr , :la langue des sages orne la sagesse.

B.II La raison de cette expositionDans la suite, on aborde la raison de cette exposition, en disant : sur des ta-

bles. Il y a les tables de la Loi, il y a les tables dun cur de pierre, et il y a lestables dun cur de chair. Co , : vous tes notre ptre, crite non sur destables de pierre, mais sur les tables dun cur de chair mallable.

1 Les premires tables, celles de la Loi, furent crites par le doigt de Dieu, commeon le dit dans Ex . Et cest pourquoi cest une criture profonde et obscure, etpleine de nombreux mystres. Aussi fut-il ncessaire dcrire, outre ces tables,avec un doigt humain une parole prophtique claire pour lexpliquer. Is , :prends pour toi un grand livre, et cris dedans dune manire humaine.

2 Mais sur les secondes tables, cest--dire les curs de pierre, il fallut crireclairement pour dnoncer. Mt , - : Isae a bien prophtis de vous, disant :ce peuple mhonore des lvres, mais leur cur est loin de moi.

3 Mais sur les troisimes tables, les curs de chair, il fallut crire clairement pourinstruire. Ne , : marquez dans le livre de Dieu de faon distincte et claire pourquon comprenne. Et il poursuit : et ils comprirent quand on le leur lisait.

1. [N.d.T.] Prologus galeatus, clbre prologue de saint Jrme pour justiHUVDWUDGXFWLRQGHVOi-

vres bibliques sur lhbreu (les premiers sont les livres de Samuel) ; on peut traduire : prologuedfensif (PL , ). La rfrence donne par saint Thomas est dailleurs inexacte, cest unecitation de lEp. 53 de saint Jrme (PL , ).

Commentaire sur Isae Prologue

B.III Lutilit qui en rsulteQuant lutilit de cette exposition, elle est indique dans ce qui suit : pour

quil la parcoure jusquau bout. En effet, parcourir, cest parvenir rapidement la QHQFRXUDQW

Or il y a une triple Q : la QGHODORLODQGXSUpFHSWHHWODQGHODYLH1 Rm , : la QGHOD/RLFHVWOH&KULVWSRXUODMXVWLFHGHWRXWFUR\DQW.2 Tm , : la QGXSUpFHSWHFHVWODFKDULWp.3 La QGH ODYLH FHVW ODPRUWMt , : celui qui persvrera jusqu la Q

celui-l sera sauv.Il dit donc : pour que celui qui lit parcoure le texte jusquau bout, pour dire :

pour que celui qui lira aille jusquau bout en croyant au Christ sans tre embar-rass par le doute, quil aime celui en qui il croit, et quil persvre dans lamour.

La matireLa matire est aborde dans ce qui suit : parce que cette vision est encore

lointaine. La matire de ce livre est principalement lapparition du Fils de Dieu,aussi le lit-on dans lglise au temps de lAvent. Or il y a une triple apparition duFils de Dieu.

Selon la premire, il est apparu dans la chair, devenu homme. Tt , : la b-nignit et lhumanit de Dieu notre Sauveur est apparue. Selon la seconde, il estapparu quand il a t cru par le monde par la foi. Tt , - : la grce de Dieunotre Sauveur est apparue, nous instruisant. Selon la troisime, il apparatra dansla vision lors de la gloriFDWLRQ Jn , : nous savons que quand il apparatra,nous lui serons semblables. Et ces apparitions sont la matire de ce livre. Aussiest-il dit dans le Prologue que toute son application touche la venue du Christ etlappel des paens.

Mais certes, celui qui a t vu ainsi par la suite, tait encore lointain par rap-port au temps du prophte. Il tait en effet lointain, parce quil est le Trs-Hautpar lgalit dans la majest. Jb , - : chacun le regarde de loin. Il taitlointain aussi parce quil tait cach dans les desseins secrets du Pre. Ep , :quelle est la dispensation du mystre cach depuis des sicles en Dieu. Il taitlointain encore, parce diffr dans lattente des Pres. Hb , : cest dans lafoi que ceux-ci sont morts sans avoir reu les promesses, mais les contemplant deloin.

Mais il est sr que maintenant, ce qui tait loin est devenu proche, parce quele Trs-Haut sest fait tout-petit. Jn , : car le Verbe sest fait chair. Ce quitait cach est devenu public, car Le Fils unique qui est dans le sein du Pre, luila rvl (Jn , ). Ce qui tait diffr a commenc tre dj possd par lessaints dans la gloire. Mt , : venez, les bnis de mon Pre, recevez leroyaume qui vous a t prpar depuis le commencement du monde.

Ainsi donc, il pouvait dire : cette vision qui est encore lointaine apparatra la Q. En effet la premire apparition a eu lieu la QGHOD/RLGa , : quandfut arrive la plnitude du temps, Dieu a envoy son Fils n dune femme, nsous la Loi. La seconde apparition eut lieu avec la Q GH OLGROkWULH Is , :voici que le Seigneur montera sur un nuage lger, et fera son entre en gypte, ettoutes les idoles dgypte seront branles devant lui. Mais la troisime appari-

Commentaire sur Isae Prologue

tion aura lieu la Q GH WRXWH PLVre. Ap , : Dieu essuiera des yeux dessaints, et il ny aura plus ni plaintes, ni labeur, ni non plus nulle douleur, parceque les conditions premires auront disparu. Telles sont les ralits QDOHVGRQWon parle au sujet dIsae dans Si , - : avec un grand esprit, il vit les rali-ts ultimes, et il a consol pour toujours ceux qui pleuraient Sion ; et il a annon-c les choses futures et caches avant quelles narrivent.

Commentaire sur Isae Prologue

COMMENTAIRE DU PROLOGUE DE SAINT JRMEQue personne ne simagine 2, en voyant les livres des prophtes, prsents par versets

[dans ma version], quils se trouvent effectivement assujettis aux rgles de la posie dansloriginal hbreu, et quen cela ils soient semblables aux psaumes et aux livres de Salo-mon : mais comme dans les crits de Dmosthne et de Cicron on ne laisse pas de trouverdes membres de phrase et des incises frquentes, quoique que ces auteurs naient critquen prose, je me suis servi de mme dans ma traduction nouvelle dune nouvelle maniredcrire, pour soulager le lecteur.

Et dabord propos dIsae, il faut savoir quil est trs disert, et la politesse de son styleest digne partout de sa haute naissance ; de l vient quil a t assez difFLOHGHFRQVHUYHUdans une langue trangre toute la HXUGHVDGLFWLRQ(QVXLWHLOIDXWDMRXWHUHQFRUHTXRQne doit pas tant regarder Isae comme un prophte, que comme un vangliste. En effet, ila parl avec tant de clart des mystres de Jsus-Christ et de son glise, quen le lisant, onne le croirait pas tant annoncer des choses futures, que raconter des vnements passs ;cest ce qui me porte croire que les Septante nont vit de traduire certains endroits quepour drober aux paens la connaissance de nos mystres, pour ne pas donner les chosessaintes aux chiens, ni jeter des perles devant les pourceaux, et vous apercevrez aismentces choses caches en lisant la version que jai faite de ce livre.

Je nignore pas combien il est difFLOHGHQWHQGUHOHVSURSKtes ; je sais aussi quil nestpas facile de juger dune version, si lon nentend le texte original sur lequel elle est faite ;nous sommes dailleurs exposs aux morsures de lenvie, qui mprise tout ce quelle nepeut atteindre. Cest donc en connaissance de cause et avec prudence que je mets ma mainau feu ; jexige cependant des lecteurs prvenus que, puisque les Grecs ne font pointdifFXOWp GH VH VHUYLU GHV YHUVLRQV G$TXLOD, de Symmaque et de Thodotion, soit pourltude de leur doctrine, ou quils cherchent mieux entendre les Septante, en comparantensemble les versions des uns et des autres ; de mme ils veulent bien souffrir que jajoutemon travail celui de tant dauteurs clbres qui mont prcd, mais quils lisentdabord, et ne me blment quaprs, de peur que leur censure ne paraisse tre leffet deleur malignit et de leur ignorance, plutt que dun jugement solide et clair.

Or Isae a prophtis Jrusalem et dans le reste de la Jude, avant la captivit des dixtribus. Ses prophties, qui regardent galement les tribus dIsral et de Juda, se trouventquelquefois mles ensemble, et dautre fois, elles sont spares ; et quoique de temps entemps il ait en vue des vnements prsents, et quil annonce le retour du peuple en Judeaprs la captivit de Babylone, cependant il parat tout occup prdire la vocation desGentils, et lavnement de Jsus-Christ.

Et puisque vous aimez avec tant dardeur ce Dieu fait homme, Paule et Eustochium,demandez-lui par vos prires quil me ddommage un jour, dans une vie plus heureuse, desoutrages que lenvie me fait essuyer dans celle-ci, et il sait lui-mme que je nai surmontles dgots et les difFXOWpVGH OKpEUHXTXHSRXUPHPHWWUHHQpWDWGHPScher les Juifsdinsulter davantage lglise, et de nous reprocher la fausset de nos critures.

Ce livre dIsae, Jrme le fait prcder dun prologue, dans lequel il fait troischoses :

Dabord il montre la manire de sexprimer ; Puis la manire de prophtiser : ensuite il faut ajouter encore ; EnQORUGUHGHODFRPSRVLWLRQ : or Isae a prophtis.

2. [N.d.T.] Texte de saint Jrme ; traduction de Le Maistre de Saci, modipHSDUIRLVTXDQGHOOH

sloigne trop de loriginal.

Commentaire sur Isae Prologue

La manire de sexprimerIl le dcrit du point de vue de la recherche de lexpression sous deux aspects,

I. Celui de lordre des mots,II. Et celui de llgance de ces mots : et dabord, propos dIsae.

A.I Lordre des motsPour le premier point, il fait trois choses :

1. Dabord il carte un style estim par certains, le style mtrique ;2. Puis il montre le style retenu par le prophte : mais comme dans les

crits de Dmosthne ;3. EnQLOPRQWUHTXLODLPLWpFHVW\OHGDQVVDWUDGXFWLRQ : je me suis servi

de mme.

$, Par versets, cest--dire en brves phrases ; prsents, cest--dire distingus ; setrouvent assujettis aux rgles de la posie (metrum). En grec, metrum veut diremesure, aussi on dit quest crit mtriquement un texte quand on y observe unecertaine mesure des pieds, des syllabes et des quantits, loi dont sont affranchisles prophtes.

Et quen cela ils soient semblables aux psaumes, cest--dire semblables eux, ou aux livres de Salomon, pour ce qui est de la QGHV3URYHUEHVHWGDQVOHCantique des cantiques.

$, Chez les orateurs, Dmosthne, le Grec, et Cicron, le Latin, trouver desmembres de phrase (cola) et des incises (comata) frquentes, quoique que cesauteurs naient crit quen prose : il y a trois parties distinctes dans les crits,lincise (coma), la section (colus) et la priode, par ressemblance avec le corpshumain, o se trouvent certaines distinctions dans les parties dun mme mem-bre, comme les articulations, des membres distincts, comme la main et le pied, etenQWRXW OHFRUSV la premire distinction correspond la division en comata,car le coma, cest la mme chose que lincise ou la division ; la seconde rpondla division en cola, car colon veut dire membre ; et au tout correspond la p-riode : en effet, priode veut dire circulation, de pri, cest--dire autour de, etodos, cest--dire voie. Or seule la ligne du cercle est complte, comme le prouvele Philosophe (De clo II, ; b ).

Ces distinctions se prennent donc de trois faons dans les textes crits.

$,D Dabord, selon Isidore (Etym. I, c. ; PL , A), dans les vers, il y a incise (coma)quand deux pieds succde une syllabe qui fait partie dun autre pied, car alors ilmanque un pied, comme dans ce texte : Gloire, louange et honneur. Il y a mem-bre (cola) quand on prend deux pieds qui ne sont pas suivis dune autre syllabe,ainsi : De doux chants. Et il y a priode, quand toute la phrase compose mtri-quement est acheve.

$,E Dune seconde faon, en prose, selon Isidore (Etym. I, c. ; PL , C) et Cicron,il y a incise (coma) quand on prononce des propos incomplets, coups de pause,comme en Is , : malheur au peuple pcheur, au peuple coupable dune graveiniquit, aux OVVFpOpUDWV ; cest ce quon appelle une sous-division. Il y a mem-bre (cola) quand on prononce des propos complets, bien que la phrase ne soit pasacheve, et on parle de division, comme ce passage du mme chapitre : ils ont

Commentaire sur Isae Prologue

abandonn le Seigneur, ils ont blasphm le Saint dIsral, ils sont retourns enarrire. Il y a priode, quand une phrase parfaite rsulte de plusieurs propos.

$,F Dune troisime faon, incise (coma) est prise par Raban au sens de chapitre(Expos. super Jerem. XV, c. ; PL , C-D), en commentant Jr , : nous avonsentendu parler de la superbe de Moab, quand il dit : dans le prcdent (coma), ila incit la pnitence, cest--dire dans le chapitre prcdent.

Mais ici, le mot est pris dans son second sens.

$, Une nouvelle [traduction], dite pour la premire fois par nous de lhbreu enlatin ; dune nouvelle manire, en conservant la manire de faire des Hbreux,par membres (cola) et incises (comata), ce qui ntait pas respect dans les autrestraductions.

A.II Llgance des motsEt dabord au sujet dIsae : il montre l la faon de sexprimer quant ce qui

touche llgance des mots, et ce sujet, il fait trois choses.1. Dabord il dQLWOHPRGH ;2. Ensuite il en donne la raison par la qualit de celui qui parle : digne de

sa haute naissance ;3. EnQLOHQFRQFOXWTXLOIDXWH[FXVHr les dfauts dans sa traduction

cause de ce mode : de l vient [quil a t assez difFLOH@.

$,, Disert, cest--dire quil apparat vers dans lloquence.

$,, Sa haute naissance, par sa famille, car il tait loncle maternel du roi de JudaManass, ou son proche parent, comme il est dit dans lHistoire (Pierre Comestor,Hist. scholastica, IV Reg. c. ; PL , B).

$,, De l vient : ce qui dans une langue est bien dit, ne semble pas beau traduit dansune autre langue ; et cest pourquoi la beaut de la traduction laissera dautantplus dsirer que lui-mme a utilis une langue plus belle que tous les autresprophtes. La HXU, cest--dire la douceur et lornement.

La manire de prophtiserEnsuite il faut ajouter encore. Ici, il montre que sa manire de prophtiser est

claire et vidente, et ce sujet il fait trois choses :I. Dabord, il montre la manire de prophtiser dont on a parl ;

II. Il dduit de cette manire la raison des dfauts de lancienne traductiondes Septante : cest ce qui me porte croire ;

III. Il carte la contradiction des envieux : je nignore pas [combien il estdifFLOHGHQWHQGUHOHVSURSKtes].

B.I Moins prophte [quvangliste], comme sil cachait la vrit sous une nigme ;[il a dtaill] les mystres, cest--dire les secrets, de mystim, qui veut dire se-cret ; comme lIncarnation, Is , : un Fils nous a t donn ; la Passion,Is , : il est conduit comme une brebis la boucherie, et comme un agneau ilse tait devant le tondeur ; et bien dautres encore.

Commentaire sur Isae Prologue

Avec tant de clart, cest--dire expressment. On ne le croirait pas [proph-tiser, mais plutt raconter les faits passs] : on pourrait le penser causer desfaits exprims, non quant la manire, car les choses passes peuvent mieuxsexprimer que les futures, et cest en cela que lvangliste dpasse le prophte.

B.II Ce qui me porte croire : jestime, selon une certaine conjecture ; ethnicis, cest--dire les paens, qui vient de ethnon, le peuple. Des perles. Mt , : ayanttrouv une perle prcieuse. Caches : occultes.

Aussi fait-il trois choses : dabord il montre le dfaut [de la traduction desSeptante] ; puis la raison de ce dfaut : pour ne pas donner les choses saintes[aux chiens] ; troisimement, il le prouve par son dition : en lisant la version.

Caches, cest--dire les sacrements.

B.III Je nignore pas. Ici, il repousse le jugement faux de ses contradicteurs, et cesujet, il fait trois choses :

1. Dabord il montre par les causes que leur jugement est faux ;2. Puis il les convainc par un exemple : jexige cependant ;3. EnQLOOHXUPRQWUHODIDoRQMXVWHGHSURFpGHU : quils lisent.

%,,, Quant au premier point, il fait trois choses :

%,,,D Dabord il montre la cause du jugement faux dans lintelligence, cestlignorance ;

%,,,E Puis dans laffection, cest lenvie : nous sommes dailleurs ;

%,,,F EnQ LO FRQFOXW SDU VD FRQVWDQFH SDUPL OHV FRQWUDGLFWLRQV : cest donc enconnaissance de cause.

Combien il est difFLOH. Ps , : il y a une eau tnbreuse dans les nua-ges du ciel. L-contre : il a dit plus haut que cest de manire limpide, cest--dire expressment, quIsae parle des mystres du Christ. Rponse : cest vraiquant certains faits principaux.

Par les morsures, cest--dire les critiques ; Je mets ma main au feu, cest--dire je mexpose un danger. Et il fait

allusion un proverbe courant, qui vient de ce que Scvola, mettant dans le feula main avec laquelle il avait tu Cillius, croyant tuer Sillas, dit alors : que p-risse la main qui a accompli ce crime.

Par ltude : cest--dire lexercice qui conduit la science.

Lordre de la compositionIl a prophtis. Ici, il indique lordre de la composition, et ce sujet il fait

trois choses : dabord il en traite en ce qui concerne le temps, la matire et lemode ensemble ;

Ensuite, il indique lintention [de lauteur] : et quoique de temps en temps ;EnQLOFRQFOXWSDUXQHGHPDQGHGHSULre : et puisque vous aimez.

Chapitre

Vision prophtique dIsae, OVG$PRVTXLODYXHau sujet de Juda et de Jrusalem autemps dOzias, de Joathan, dAchaz, et dzchias, rois de Juda. Cieux, coutez ; et toi,terre, prte loreille ; car cest le Seigneur qui a parl : Jai nourri des enfants, et je les ailevs ; et aprs cela ils mont mpris. Le buf connat celui qui il appartient, et lneltable de son matre ; mais Isral ne ma point connu, et mon peuple a t sans entende-ment. Malheur la nation pcheresse, au peuple charg diniquit, la race corrompue,aux enfants mchants et sclrats ! ils ont abandonn le Seigneur, ils ont blasphm le SaintdIsral, ils sont retourns en arrire. quoi servirait de vous frapper davantage, vous quiajoutez sans cesse pch sur pch ? Toute tte est languissante, et tout cur est abattu. Depuis la plante des pieds jusquau haut de la tte, il ny a rien de sain en lui : ce nestque blessure, que contusion, et quune plaie enDPPpHTXLQDSRLQWpWpEDQGpH qui lonna point appliqu de remde, et quon na point adoucie avec lhuile. Votre terre est d-serte, vos villes sont brles par le feu : les trangers dvorent votre pays devant vous, et ilsera dsol comme une terre ravage par ses ennemis. Et la OOH GH 6LRQ GHPHXUHUDcomme une loge de branchages dans une vigne, comme une cabane dans un champ deconcombres, et comme une ville livre au pillage. Si le Seigneur des armes ne nousavait rserv quelques-uns de notre race, nous aurions t comme Sodome, et nous serionsdevenus semblables Gomorrhe. coutez la parole du Seigneur, princes de Sodome ;prtez loreille la loi de notre Dieu, peuple de Gomorrhe. Quai-je affaire de cettemultitude de victimes que vous moffrez ? dit le Seigneur. Tout cela mest dgot. Jenaime point les holocaustes de vos bliers, ni la graisse de vos troupeaux, ni le sang desveaux, des agneaux, et des boucs. Lorsque vous venez devant moi pour entrer dans montemple, qui vous a demand que vous eussiez ces dons dans les mains ? Ne moffrezplus de sacriFHVLQXWLOHPHQW ; lencens mest en abomination. Je ne puis plus souffrir vosnouvelles lunes, vos sabbats, et vos autres ftes ; liniquit rgne dans vos assembles. Je hais vos solennits des premiers jours des mois, et toutes les autres ; elles me sontdevenues charge, je suis las de les souffrir. Lorsque vous tendrez vos mains vers moi,je dtournerai mes yeux de vous ; et lorsque vous multiplierez vos prires, je ne vouscouterai point, parce que vos mains sont pleines de sang. Lavez-vous, puriH]YRXV ;tez de devant mes yeux la perversit de vos penses ; cessez de faire le mal. Apprenez faire le bien ; examinez tout avant de juger, assistez lopprim, faites justice lorphelin,dfendez la veuve. Et puis venez, et soutenez votre cause contre moi, dit le Seigneur.Quand vos pchs seraient comme lcarlate, ils deviendront blancs comme la neige ; etquand ils seraient rouges comme le vermillon, ils seront blancs comme la laine la plusblanche. Si vous voulez mcouter, vous serez rassasis des biens de la terre. Que sivous ne le voulez pas, et si vous mirritez contre vous, lpe vous dvorera, car cest leSeigneur qui la prononc de sa bouche. Comment la cit Gle, pleine de droiture etdquit, est-elle devenue une prostitue ? La justice habitait en elle, et il ny a maintenantque des meurtriers. Ton argent sest chang en scorie, et ton vin a t ml deau. Tesprinces sont des inGles, ils sont les compagnons des voleurs. Ils aiment tous les prsents,ils ne cherchent que le gain et lintrt. Ils ne font point justice lorphelin, et la cause dela veuve na point daccs auprs deux. Cest pourquoi le Seigneur, le Dieu des armes,le Fort dIsral a dit : Hlas ! je me consolerai dans la perte de ceux qui me combattent : etje serai veng de mes ennemis. Jtendrai ma main sur toi, je te puriHUDLGHWRXWHWRQcume par le feu, jterai tout ltain qui est en toi. Et je rtablirai tes juges, comme ils

Commentaire sur Isae ,

ont t dabord, et tes conseillers comme ils taient autrefois ; et aprs cela tu seras appelela cit du juste, la ville Gle. Sion sera rachete par un juste jugement, et elle sera rta-blie par la justice. Les mchants et les sclrats priront tous ensemble, et ceux qui au-ront abandonn le Seigneur seront consums. Vous serez confondus par les idoles m-mes auxquelles vous avez sacrip ; et vous rougirez des jardins que vous aviez choisis pourvos sacrilges ; car vous deviendrez comme un chne dont toutes les feuilles tombent, etcomme un jardin qui est sans eau. Votre force sera comme de ltoupe sche, et votreouvrage comme une tincelle de feu ; et lun et lautre sembrasera, sans quil y ait per-sonne pour lteindre.

Vision dIsae, OVG$PRV (v. 1). Ce livre se divise en deux parties :Le prologue ;Et le livre lui-mme, qui commence par ces mots : coutez, cieux (v. 2).

Le prologue est donn comme un titre, pour prsenter louvrage qui suit. Il leprsente de quatre faons :

1 Par le genre de louvrage ;2 Par lauteur : Isae (v. 1) ;3 Par la matire : quil a vue (v. 1) ;4 Par lpoque : durant les jours (v. 1).

1 Le genre de louvrage est montr en ce quil dit vision, ce en quoi il diffre deslivres historiques, car cest une prophtie. Os , : moi, jai multipli les vi-sions. Et le texte continue : je me suis fait connatre par les uvres des proph-tes. Ici, il faut considrer trois choses :

0 Quel est le rapport de la vision avec la prophtie ;1 Les modes des visions prophtiques ;2 La diffrence entre la vision prophtique et les autres visions.

0 Il faut savoir, pour le premier point, que le mot prophtie peut avoir un doublesens, selon quil peut venir de phanos, qui veut dire apparition, ou de for, faris( je parle ).

Selon la premire tymologie, on appelle prophte celui qui a une apparitionde choses lointaines ; et en cela, la prophtie diffre de la vision selon le mode,car une apparition signiHXQHUHODWLRQGHFHTXLHVWYLVLEOH celui qui voit, alorsque cest le contraire pour la vision. De plus, la prophtie ajoute quelque chose la vision, car la vision concerne nimporte quelles ralits, alors que la prophtieporte sur ce qui est lointain. Or on dit quune chose est lointaine par rapport notre connaissance de deux faons, de faon absolue, et de faon relative.

Sont lointains de faon absolue les futurs contingents qui peuvent se raliserdune faon ou dune autre, dont on ne peut avoir de connaissance dtermine, nien eux-mmes, ni dans leurs causes, et cest sur eux que porte proprement laprophtie.

Sont lointaines de faon relative les choses dont la connaissance est sparede celui qui connat, comme certaines choses passes ou certaines choses pr-sentes ; leur sujet, il ny a pas prophtie proprement parler, mais par rapport ceux qui ne les connaissent pas.

Commentaire sur Isae ,

Mais selon la seconde tymologie, on appelle prophte celui qui parle de loin(procul fans). Et ainsi la prophtie ajoute la vision lacte dnoncer extrieure-ment, et la vision sera comme une matire par rapport la prophtie.

1 Pour le second point, il faut savoir que les modes des visions prophtiques sedistinguent selon les manifestations grces auxquelles on reoit la prescience desfuturs contingents. Ce peut tre ou une impression (species) faite dans le sens, eton parle de vision corporelle, car le sens reoit limage reprsentant les corpsquand ils sont prsents ; ou une impression reue dans limagination, et on parlede vision spirituelle, car cest en elle que se manifeste dabord lacte de la spiri-tualit et ce qui lui est propre, qui consiste connatre une chose abstraite de lamatire ; ou bien cest une impression qui se trouve seulement danslintelligence, et on parle de vision intellectuelle.

Et il faut savoir que la prophtie se vriHGDQVFHV WURLVPRGHVFRPPH OHtout potentiel en ses parties, dont la nature est de se trouver en un seul sujet selontoute la perfection de sa teneur, et de ne se trouver dans les autres quau titredune certaine participation et dun certain mode. Cest ce qui se passe pourlme, parce que toute sa vigueur est assure parfaitement dans lme rationnelle,et que lme sensible na pas la vigueur parfaite de lme, et encore moins lmevgtative. Cest pourquoi Grgoire (In Evang. hom. ; PL , A-B) dit que lesplantes ne vivent pas par un soufHDQLPDOPDLVSDU ODSXLVVDQFHYpJpWDOH'Hmme aussi, et la vision corporelle, et la vision spirituelle ou imaginaire tiennentquelque chose de la prophtie, mais elles ne peuvent tre dites vraiment des pro-phties, moins que ne sy ajoute une vision intellectuelle, en laquelle la notionde prophtie est entire. Dn , : on a besoin de lintelligence dans la vision ;aussi on a avant : et il, cest--dire Daniel, comprit la parole.

Or on parle de vision premirement et proprement pour la vision corporelle.Et comme toute notre connaissance vient des sens, parmi lesquels la vue est leplus important et par sa QHVVHHWSDUVRQFDUDFWre universel, parce quelle nousmontre plusieurs aspects diffrents des choses, le nom de vision a t transposaux autres connaissances intrieures.

2 Quant au troisime point, il faut savoir que toute vision intellectuelle nest pasune vision prophtique : il y a en effet une certaine vision pour laquelle sufWODlumire naturelle de lintelligence, comme la contemplation des ralits invisi-bles par les principes de la raison ; et cest dans cette contemplation que les phi-losophes plaaient le bonheur suprme de lhomme. Il y a encore une certainecontemplation laquelle lhomme est lev sufVDPPHQW SDU OD OXPLre de lafoi, comme celle des saints en marche vers le ciel. Il y a enQXQHFRQWHPSODWLRQdes bienheureux dans la patrie, laquelle lintellect est lev par la lumire degloire et voit Dieu par essence, en tant quobjet de la batitude ; et cela ne se r-alise pleinement et parfaitement que dans la patrie ; mais parfois quelquun estlev furtivement cette connaissance alors quil est encore dans cette vie mor-telle, comme cela se passa dans le ravissement de saint Paul : je connais unhomme dans le Christ, il y a quatorze ans, fut-ce avec son corps, je ne sais( Co , ) ; la Glose dit sur ce passage quil a eu une vision comme ceux qui ap-partiennent la troisime hirarchie. Mais aucune de ces visions nest une visionprophtique, car en ce qui la concerne, ni la lumire naturelle, ni la lumire de foi

Commentaire sur Isae ,

ne sufWPDLVOLQWHOOLJHQFHGXSURSKte y est leve par une lumire, qui est unegrce donne gratuitement (gratis dat), et cest le don de prophtie. Cependant,il ne parvient pas encore voir Dieu en tant quobjet de la batitude, mais en tantquil est la raison de ce qui touche le gouvernement des hommes dans le monde.De mme, toute vision corporelle ou imaginative nest pas appele prophtique,mais seulement celle qui a lieu par une impression spcialement destine par lavertu divine tre le signe dune chose future, que le voyant lui-mme ou un au-tre en reoive lintelligence.

2 Lauteur est indiqu quand il dit : dIsae, OVG$PRV. Et bien que cet Amos aitt prophte, puisque cest crit dans le titre de la prophtie, selon lusage desHbreux, ce nest pas lui pourtant qui fait partie des douze prophtes, parce queleurs deux noms scrivent en hbreu avec des lettres diffrentes.

3 La matire est prsente quand il dit : [Vision] quil a vue sur Juda et Jrusalem,car il sagit de ce qui concerne Juda et Jrusalem, en sorte que le mot sur (su-per) revient au sujet de (de) selon la traduction de Symmaque, ou contre (contra) selon la Septante. Juda est pris pour le territoire des deux tri-bus, et Jrusalem pour la mtropole de cette rgion ; ou Juda pour lhritage deJuda, et Jrusalem pour lhritage de Benjamin, car elle se trouvait dans cet h-ritage pour la majeure partie de la ville, qui tait sur la pente, bien que pour lesommet de la montagne, o tait la tour de David et le temple, elle appartint lamaison de Dieu, comme on peut le vriHUHQJos , -.

4 Aux jours. Ici, il fait connatre son ouvrage par sa date, et les quatre rois au tempsdesquels Isae a fait connatre cette prophtie sont numrs ; aussi certains divi-sent ce livre selon les rgnes sous lesquels il a reu rvlation. De la sorte, onplace dans la premire partie les visions du temps dOzias ; dans la seconde,celles du temps de Joathan : en lanne o est mort le roi Ozias (v. 1) ; dans latroisime, celles du temps dAchaz, o il est dit : lanne o est mort le roi Achaz(du ch. 7 la QGXFK 14) ; et de l jusqu la QOHVYLVLRQVGXWHPSVGe]pFKLDV

Mais on demandera pourquoi il ne fait pas mention des rois dIsral, commeOse fait mention dans son titre de Jroboam, OV GH -RDV DORUV TXLOV pWDLHQWcontemporains. Ce quoi il faut rpondre quIsae a prophtis contre les deuxtribus principalement, et cest pourquoi il ne mentionne dans le titre que leursrois, alors quOse a prophtis contre les deux dynasties.

De mme, on demandera pourquoi il ny a pas de mention de Manass, roi deJuda, sous lequel aussi le prophte a vcu, alors quil est clair quil na pas perdulesprit de prophtie. Il faut rpondre que tout ce qui a t crit dans ce livre,Isae la vu au temps des prophtes. Mais il ne convenait pas quune prophtiequi vise principalement la consolation se termint par une menace, ou que soitprche la consolation de Dieu du temps dun mauvais roi, qui provoquait la co-lre de Dieu. Jr , : je les livrerai la fureur de tous les royaumes de la terre.

coutez, cieux, et tends loreille, terre ! (v. 2) Ici commence lexpos de ce li-vre ; aussi on