sages-femmes : rien de bien neuf, il faut repartir sur des bonnes bases

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Droit Déontologie & Soin 14 (2014) 340–346 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com ScienceDirect Chronique Sages-femmes : rien de bien neuf, il faut repartir sur des bonnes bases Sylvia Dubois Sterling 23, rue des Belles-Feuilles, 75116 Paris, France Disponible sur Internet le 16 septembre 2014 Résumé Faisant suite à un large mouvement de protestation, la circulaire n o DGOS/RH4/2014/92 du 10 avril 2014 a été présentée comme la réponse du gouvernent à un mouvement revendicatif, général et profond. En réalité, il s’agit essentiellement d’un rappel du caractère médical de la profession de sage-femme, à droit constant. © 2014 Publié par Elsevier Masson SAS. Répondant à un large mouvement de protestation, la circulaire n o DGOS/RH4/2014/92 du 10 avril 2014 1 a été présentée comme la réponse du gouvernent à un mouvement revendicatif, général et profond. En fait, il s’agit essentiellement d’un rappel du caractère médical de la pro- fession de sage-femme, à droit constant 2 , alors que les demandes formées d’accès au statut de praticien hospitalier, qui ne concernerait que les sages-femmes du secteur privé, sont loin des possibilités réalistes. 1. Une profession médicale. . . au sens du CSP Le Code de la Santé Publique repose sur une distinction, dépassée mais peu contestée, entre « professions médicales » et « auxiliaires médicaux », et la profession de sage-femme a de longue date été répertoriée en tant que profession médicale, comme les médecins et les Adresse e-mail : [email protected] 1 Circulaire relative à la mise en œuvre des mesures prises en faveur de la reconnaissance des sages-femmes hospitalières et à l’application de certaines dispositions du décret n o 2013-841 du 20 septembre 2013 modifiant les dispositions relatives à la commission médicale d’établissement et aux transformations des établissements publics de santé et à la politique du médicament dans les établissements de santé. 2 Textes : http://dx.doi.org/10.1016/j.ddes.2014.07.009 1629-6583/© 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

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Droit Déontologie & Soin 14 (2014) 340–346

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

ScienceDirect

Chronique

Sages-femmes : rien de bien neuf, il faut repartir sur desbonnes bases

Sylvia Dubois Sterling23, rue des Belles-Feuilles, 75116 Paris, France

Disponible sur Internet le 16 septembre 2014

Résumé

Faisant suite à un large mouvement de protestation, la circulaire no DGOS/RH4/2014/92 du 10 avril 2014a été présentée comme la réponse du gouvernent à un mouvement revendicatif, général et profond. En réalité,il s’agit essentiellement d’un rappel du caractère médical de la profession de sage-femme, à droit constant.

© 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

Répondant à un large mouvement de protestation, la circulaire no DGOS/RH4/2014/92 du10 avril 20141 a été présentée comme la réponse du gouvernent à un mouvement revendicatif,général et profond. En fait, il s’agit essentiellement d’un rappel du caractère médical de la pro-fession de sage-femme, à droit constant2, alors que les demandes formées d’accès au statut depraticien hospitalier, qui ne concernerait que les sages-femmes du secteur privé, sont loin despossibilités réalistes.

1. Une profession médicale. . . au sens du CSP

Le Code de la Santé Publique repose sur une distinction, dépassée mais peu contestée,entre « professions médicales » et « auxiliaires médicaux », et la profession de sage-femme ade longue date été répertoriée en tant que profession médicale, comme les médecins et les

Adresse e-mail : [email protected] Circulaire relative à la mise en œuvre des mesures prises en faveur de la reconnaissance des sages-femmes hospitalières

et à l’application de certaines dispositions du décret no 2013-841 du 20 septembre 2013 modifiant les dispositions relativesà la commission médicale d’établissement et aux transformations des établissements publics de santé et à la politique dumédicament dans les établissements de santé.

2 Textes :

http://dx.doi.org/10.1016/j.ddes.2014.07.0091629-6583/© 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

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chirurgiens-dentistes. Il n’existe pas d’ambiguïté sur la nature juridique de la profession et lesactes que les sages-femmes sont autorisées à pratiquer, et qui sont définis par la loi3.

Si la base est le suivi de grossesse et à l’accouchement, l’exercice de la profession inclutla réalisation de consultations de contraception et de suivi gynécologique de prévention, sousréserve que la sage-femme adresse la femme à un médecin en cas de situation pathologique. Riende neuf donc, car c’est exactement ce que dit la loi, à savoir l’article L.4151-1 du Code de laSanté Publique. D’ailleurs, ce champ de compétence ne pourrait évoluer que par une modificationlégislative, qui n’est pas à l’ordre du jour.

Art. L. 4151-1L’exercice de la profession de sage-femme comporte la pratique des actes nécessaires audiagnostic, à la surveillance de la grossesse et à la préparation psychoprophylactique àl’accouchement, ainsi qu’à la surveillance et à la pratique de l’accouchement et des soinspostnataux en ce qui concerne la mère et l’enfant, sous réserve des dispositions des articlesL. 4151-2 à L. 4151-4 et suivant les modalités fixées par le code de déontologie de laprofession, mentionné à l’article L. 4127-1.L’examen postnatal peut être pratiqué par une sage-femme si la grossesse a été normale etsi l’accouchement a été eutocique.L’exercice de la profession de sage-femme peut comporter également la réalisation deconsultations de contraception et de suivi gynécologique de prévention, sous réserve que lasage-femme adresse la femme à un médecin en cas de situation pathologique.Les sages-femmes sont autorisées à concourir aux activités d’assistance médicale à laprocréation, dans des conditions fixées par décret.

Dans ce cadre légal constant, les modalités ont été redéfinies par le décret no 2012-881 du17 juillet 2012 portant modification du code de déontologie des sages-femmes4, et ce texte estdevenu la référence.

Art. R. 4127-318.-I.Pour l’exercice des compétences qui lui sont dévolues par l’article L. 4151-1 :« 1o La sage-femme est autorisée à pratiquer l’ensemble des actes cliniques et techniquesnécessaires au suivi et à la surveillance des situations non pathologiques et au dépistage depathologie, concernant :« a) Les femmes à l’occasion du suivi gynécologique de prévention et de la réalisation deconsultations de contraception ;

– Code de la santé publique (articles L. 4111-1 à L. 4111-4, L. 4151-1 à L. 4151-4, L. 5134-1, L. 6146-1, L. 6146-7,R. 4127-307, R. 4127-318, R. 6144-1, R. 6144-3-2, R. 6144-6 ;– Décret no 89-611 du 1 septembre 1989 modifié portant statut particulier des sages-femmes de la fonction publiquehospitalière ;– Décret no 2013-841 du 20 septembre 2013 modifiant les dispositions relatives à la commission médicale d’établissementet aux transformations des établissements publics de santé et à la politique du médicament dans les établissements desanté.Ouvrages généraux :– Dorothée Dibie-Krajcman, Marguerite Merger-Pélier, Manuel juridique de la sage-femme, nouvelles compétences,nouvelles responsabilités, LEH Édition, 2012 ;– Carène Ponte, Marie-Agnès Poulain, Francoise Nguyen, 50 questions sur le métier de sage-femme, 2e édition, ElsevierMasson, Coll. Législation et exercice professionnel, 2011.

3 CSP, articles L. 4151-1 à L. 4151-4, L. 5134-1et R. 4127-318.4 Inclu dans le Code de la Santé publique à l’article R. 4127-318.-I.

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« b) Les femmes pendant la grossesse, l’accouchement et durant la période postnatale ;« c) Le fœtus ;« d) Le nouveau-né ;« 2o La sage-femme est notamment autorisée à pratiquer :« a) L’échographie gynéco-obstétricale ;« b) L’anesthésie locale au cours de l’accouchement ;« c) L’épisiotomie, la réfection de l’épisiotomie non compliquée et la restauration immédiatedes déchirures superficielles du périnée ;« d) La délivrance artificielle et la révision utérine ; en cas de besoin, la demande d’anesthésieauprès du médecin anesthésiste-réanimateur peut être faite par la sage-femme ;« e) La réanimation du nouveau-né dans l’attente du médecin ;« f) Le dépistage des troubles neuro-sensoriels du nouveau-né ;« g) L’insertion, le suivi et le retrait des dispositifs intra-utérins et des implants contraceptifs ;« h) La rééducation périnéo-sphinctérienne en cas de troubles consécutifs à un accouche-ment ;« i) Des actes d’acupuncture, sous réserve que la sage-femme possède un diplômed’acupuncture délivré par une université de médecine et figurant sur une liste arrêtée par lesministres chargés de la santé et de l’enseignement supérieur, ou un titre de formation équi-valent l’autorisant à pratiquer ces actes dans un État membre de la Communauté européenneou partie à l’accord sur l’Espace économique européen.« II. – La sage-femme est également autorisée, au cours du travail, à effectuer la demanded’analgésie loco-régionale auprès du médecin anesthésiste-réanimateur. La première injec-tion doit être réalisée par un médecin anesthésiste-réanimateur. La sage-femme peut, sousréserve que ce médecin puisse intervenir immédiatement, pratiquer les réinjections par lavoie du dispositif mis en place par le médecin anesthésiste-réanimateur et procéder au retraitde ce dispositif.« III. – Dans le cadre des dispositions de l’article L. 4151-3, la sage-femme est autorisée àréaliser les examens cliniques et techniques prescrits par un médecin en cas de pathologiematernelle ou fœtale identifiée. »

2. Les précisions de la circulaire de 2014

2.1. Les sages-femmes hospitalières

Elles ne relèvent ni du corps médical, ni de la direction des soins, mais de l’autorité hiérarchiquedu directeur de l’établissement dans le respect des règles déontologiques qui s’imposent à leurprofession et qui leur garantissent une indépendance professionnelle. Au sein des établissementspublics de santé, les sages-femmes doivent être rattachées pour la gestion de leur affectation etde leur carrière à la direction chargée de la gestion du personnel médical.

S’ajoute, et au même titre que les autres professions médicales de l’hôpital, les sages-femmesrelèvent de l’autorité fonctionnelle des chefs de pôle et/ou des responsables de structures internesoù elles sont affectées.

Dans ce cadre, elles bénéficient d’une large part d’autonomie, garantie par l’article L. 6146-7 duCode de la Santé Publique : « les sages-femmes sont responsables de l’organisation générale dessoins et des actes obstétricaux relevant de leurs compétences. Elles participent à leur évaluation

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et aux activités de recherche en collaboration avec les praticiens du pôle d’activité clinique oumédico-technique ».

2.2. Représentation à la Commission médicale d’établissement

Cette question a été réformée par le décret no 2013-841 du 20 septembre 2013, qui avaitpour objet de faire évoluer la gouvernance des établissements de santé. Leur représentation dessages-femmes est renforcée et la représentation des étudiants en maïeutique doit être organisée.Toutefois, ce texte est assez faible. Il prévoit que au 5o du I de l’article R. 6144-3 du Code de laSanté Publique relatif à la composition de la CME, les mots : « Un représentant élu des sages-femmes » sont remplacés par les mots : « Des représentants élus des sages-femmes ». On doit doncpasser du singulier au pluriel, mais il aurait été préférable que le texte soit plus précis.

2.3. Unités physiologiques

La circulaire se veut ici incitatrice, en soutenant ce projet qui ne repose pas sur une dispositionlégislative spécifique, mais la structure du projet médical d’établissement.

« En fonction du projet médical de l’établissement, et avec l’avis favorable des équipesconcernées, des unités fonctionnelles consacrées au suivi des grossesses à bas risque et des accou-chements eutociques peuvent être créées dans les établissements autorisés à l’activité de soins degynécologie obstétrique. L’organisation de ces unités physiologiques, rattachées à un pôle, doitrespecter, d’une part, le projet de naissance formulé, le cas échéant, par les couples et notammentle libre choix des femmes d’être suivies par une sage-femme ou un médecin et, d’autre part, lapossibilité pour les médecins concernés (gynécologues, anesthésistes, pédiatres. . .) d’intervenirà tout moment en cas de besoin ».

2.4. Cotation des actes

Le ministère rappelle que la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés(CNAMTS) mène actuellement des travaux avec les représentants de la profession de sage-femmequi conduiront à la possibilité pour les sages-femmes de coder les actes de la Classificationcommune des actes médicaux (CCAM) relevant de leur champ de compétences. Ces codes serontrecueillis dans le cadre du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI).

C’est initiative pertinente, qui donne une meilleure visibilité aux actes réalisés en propre parles sages-femmes, mais sans contrepartie financière.

2.5. Le plan de développement professionnel

Le plan de développement professionnel continu et de formation continue des sages-femmesest, de longue date, intégré au plan de développement professionnel continu relatif aux professionsmédicales, maïeutiques, odontologiques et pharmaceutiques et à ce titre présenté à la CME.

Aussi, il faut tout de même beaucoup d’optimisme à la circulaire ministérielle pour conclureque « l’ensemble de ces décisions représente des avancées fondamentales pour la profession », enconsacrant « la place des sages-femmes dans l’organisation médicale de l’établissement ».

L’Ordre des sages-femmes (CNOSF) s’est félicité de manière fort diplomatique de ce texte« qui met fin à des situations incohérentes auxquelles les sages-femmes sont confrontées ». Il nes’agit donc pas de modifier le droit, mais de rappeler les règles pour une meilleure application.

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S’agissant de la possibilité de créer des unités physiologiques gérées par les sages-femmes,qui est connue comme une demande unanime de la profession, l’Ordre se montre préoccupé « devoir tous les prérequis nécessaires et s’inquiète de leur mise en œuvre effective », en soulignantque « des entités correspondant précisément à notre champ de compétences ne peuvent être quesous la responsabilité d’une sage-femme ».

En fait, c’est bien ce long travail d’application droit qui est en cause, et les résistances nemanquent pas de surprendre.

3. Le rappel. . . cruel. . . de la circulaire de 2002

Le collectif qui a conduit le mouvement de protestation5 est nettement critique : « la propositionn’est en fait qu’un titre et non un nouveau statut. En 2002, la circulaire rédigée par EdouardCouty6 précisait déjà le caractère médical des sages-femmes à l’hôpital et demandait aux chefsd’établissement de le respecter. Douze ans plus tard, une autre circulaire redit la même chose ».

De fait que disait déjà la circulaire de 2002 ? Ce qui disait la loi, et donc rien n’a changé. Lalecture du texte montre que l’évolution est millimétrique.

3.1. La profession

La circulaire exposait que la profession de sage-femme est inscrite dans le Code de la SantéPublique en tant que profession médicale : « Comme les médecins, les chirurgiens-dentistes et lespharmaciens, les sages-femmes relèvent d’un code de déontologie professionnelle et doiventjustifier d’une inscription à un conseil national de l’ordre. À ce titre, les établissements desanté veilleront à la mise en œuvre de l’obligation de formation continue prévue par le codede déontologie des sages-femmes7.

3.2. Une compétence définie par la loi

Les actes que les sages-femmes étaient autorisées à pratiquer résultaient du Code de la SantéPublique et du décret no 91-779 du 8 août 1991, qui devrait être prochainement modifié pourl’adapter aux évolutions médicales. L’article L. 4151-1 CSP définissait ainsi le cadre de la pro-fession de sage-femme : « La pratique des actes nécessaires au diagnostic, à la surveillance de lagrossesse et à la préparation psychoprophylactique à l’accouchement, ainsi qu’à la surveillance età la pratique de l’accouchement et des soins post-natals en ce qui concerne la mère et l’enfant ».Les sages-femmes participaient ainsi à la sécurité médicale de la mère et de l’enfant tout enassurant un environnement harmonieux de la naissance.

Dans ce cadre, comme le précisait l’article L. 6146-7 du CSP, les sages-femmes étaient respon-sables de l’organisation générale des soins et des actes obstétricaux relevant de leurs compétences.Elles participaient, en outre, avec le chef de service et les praticiens du service à l’évaluation desactivités, ainsi qu’à la mise en place dans l’établissement de la politique de périnatalité prévuespar les décrets du 9 octobre 1998, en liaison avec les sages-femmes territoriales et libérales.

5 ONSSF, CNSF, ANSFC, ANESF, CNEMa, CFTC santé sociaux.6 Circulaire DHOS/M/P no 2002-308 du 3 mai 2002 relative à l’exercice de la profession de sage-femme dans les

établissements de santé publics et privés.7 Déjà prévu par la circulaire DGS/SDO/OA no 38 du 29 juillet 1992.

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3.3. Le positionnent dans l’établissement

Ainsi que l’ensemble des personnels, les sages-femmes relevaient de l’autorité hiérarchiquedu directeur ou du responsable de l’établissement, dans le respect des règles déontologiques quis’imposent à leur profession.

En ce qui concerne les établissements publics ou participant au service public, comme lesautres professions médicales (médecins, pharmaciens, chirurgiens-dentistes), les sages-femmesavaient « vocation à être gérées par la direction des affaires médicales de l’établissement », quandil en existait une, et à défaut, elles relevaient directement de la direction des ressources humaines.En aucun cas, elles ne pouvaient relever de la direction des soins (pour les établissements publics)ou de la direction des soins infirmiers (pour les établissements participant au service public).

Les sages-femmes étaient placées sous l’autorité du chef de service ou de département danslequel elles exercaient, leur activité étant coordonnée par les sages-femmes cadres ou cadressupérieurs.

Les avancées sont millimétriques et les questions non résolues reviendront donc tôt ou tard dansl’actualité. Ceci étant, les perspectives d’évolution profonde des textes est en toute hypothèse peuréaliste, et c’est à droit constant que la profession doit penser son avenir, en puisant dans la forcedu cadre législative et déontologique actuel, et plus encore, dans la fonction de l’aide-soignante.Un récent rapport de l’OMS rappelle – s’il en était besoin – qu’est l’apport de la profession à lasanté publique.

Annexe

Investir dans la pratique de sage-femme peut sauver des millions de vies de femmes et denouveau-nés.

Rapport OMS, 3 juin 2014Un rapport publié par l’UNFPA, Fonds des Nations Unies pour la population, de concert avec

la Confédération internationale des sages-femmes (ICM), l’Organisation mondiale de la Santé(OMS) et leurs partenaires, révèle que 73 pays où leurs services sont le plus nécessaires disposentd’un nombre de sage-femmes extrêmement insuffisant. Le rapport recommande de nouvellesstratégies pour faire face à ces insuffisances et sauver des millions de vies de femmes et denouveau-nés.

Les 73 pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, supportent 96 % du fardeau mondial desdécès maternels, 91 % des cas de mortinatalité et 93 % des décès néonatals, mais ne disposentque de 42 % des sages-femmes, infirmières et médecins du monde entier.

Éducation et formationLe rapport exhorte les pays à investir dans l’éducation et la formation des sages-femmes

afin de contribuer à fermer les écarts frappants qui existent actuellement. Des investissementsdans l’éducation et la formation des sages-femmes conformément aux normes internationalesconvenues peuvent générer – comme le montre une étude menée au Bangladesh – un rendementde 1,600 % sur l’investissement.

« Les sages-femmes font d’énormes contributions à la santé des mères et des nouveau-nés ainsiqu’au bien-être de communautés entières. L’accès à des soins de santé de haute qualité est undroit humain fondamental. Un investissement accru dans la pratique de sage-femme constitue lemoyen capital de faire de ce droit une réalité pour les femmes partout dans le monde », a déclaréle Dr. Babatunde Osotimehin, Directeur exécutif de l’UNFPA.

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Les sages-femmes ont un rôle crucial à jouer dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pourle développement (OMD) 4 (Réduire la mortalité infantile) et 5 (Améliorer la santé maternelle).Quand elles ont été formées conformément aux normes internationales et dans le cadre d’unsystème de santé pleinement fonctionnel, elles peuvent dispenser environ 90 % des soins essentielsaux femmes et aux nouveau-nés et sont en mesure de réduire des deux tiers le nombre de décèsmaternels et néonatals.

Une grave pénurieMalgré un recul constant de la mortalité maternelle dans les 73 pays couverts par le rapport – elle

a baissé de 3 % par an depuis 1990 – et de la mortalité néonatale – elle a baissé de 1,9 % par andepuis 1990 –, ces pays ont besoin de faire davantage aujourd’hui pour remédier à la grave pénuriede soins de sages-femmes.

« Les sages-femmes occupent une place centrale dans la délivrance des soins attendus de leurpratique et dans la vie des femmes et des nouveau-nés. Le rapport précède la Série spéciale de TheLancet sur la pratique de sage-femme, qui avec le rapport fournira les données concrètes propresà guider tous les décideurs à la recherche des moyens de mettre fin aux décès évitables de mèreset de nouveau-nés », a déclaré la Présidente de l’ICM, Frances Day-Stirk.

Le rapport, présenté au 30e Congrès triennal de l’ICM, tenu à Prague (République tchèque),met en lumière les progrès accomplis depuis le premier rapport, publié en 2011, et les solutions auxobstacles définis dans quatre domaines clés : disponibilité, accessibilité, acceptabilité et qualitédes services de sage-femme.

Un certain nombre de pays les ont effectivement renforcés et en ont amélioré l’accès : près dela moitié (45 %) des 73 pays ont mis en vigueur des mesures propres à retenir les sages-femmesdans les zones écartées et 28 % élargissent le recrutement et le déploiement des sages-femmes,tandis que 20 % ont appliqué de nouveaux codes de pratique et que 71 % ont amélioré la collectede l’information qui permet aux pays de remédier aux pénuries et de mettre au point les normesd’éducation.

Des centaines de milliers de décès évitablesMalgré les progrès réalisés, les inégalités concernant par exemple le manque d’accès aux

services et la pauvreté se sont aggravées entre les pays et à l’intérieur des pays. Il n’y a pas encoreassez de sages-femmes ayant recu une éducation adéquate pour assurer la santé maternelle etnéonatale, ce qui contribue chaque année à des centaines de milliers de décès évitables.

Aujourd’hui, seulement 22 % des pays pourraient avoir assez de sages-femmes pour procéderaux interventions salvatrices qui répondraient aux besoins des femmes et des nouveau-nés, desorte que plus des trois quarts (78 %) des pays connaissent encore de graves pénuries en matièrede soins appropriés.

À mesure que la population augmente, le retard à combler sur le plan des ressources et del’infrastructure critiques augmente également, à moins que des mesures urgentes ne soient prises.