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royaliste BI-MENSUEL ^ T DIRECTEUR POLITIQUE BERTRAf BERTRAND RENOUVIN FA UT-ÊL CRAÊNDR REAGAN ? 00 Z> < cc LU E > LU U_ ID in CM CM CM

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  • royaliste BI-MENSUEL ^ T DIRECTEUR POLITIQUE BERTRAf

    BERTRAND RENOUVIN

    FA UT-ÊL CRAÊNDR REAGAN ?

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    CM CM

  • LA PRESSE AU CRIBLE Suite et f in . Nous voici ainsi ar-

    rivés au terme de l'aventure «Sé-curi té et Liberté», dirigée de hau-te main par le garde des Sceaux.

    Saisi par les députés socialistes et communistes et par le groupe socialiste siégeant au Sénat, le Conseil const i tut ionnel ayant eu à examiner le texte de la «loi Peyrefitte» a, mis à part quatre articles (sur les cents qui consti-tuent le texte de cette loi), décla-ré celui-ci conforme à la Consti-tu t ion . M. Peyrefitte, le jour mê-me où était connu le verdict du Conseil, s'en déclarait «très satis-fai t» (Le Monde du 23 janvier).

    Des quatre annulations d'art i-cles auxquelles procéda le Conseil, seule la première suscita quelques commentaires dans une presse qui dans l'ensemble fai t preuve d'une grande résignation devant l 'at t i tu-de du Conseil Consti tut ionnel. La «principale annulation» porte sur le dél i t d'audience des avocats : «La commission mixte paritaire, explique le Matin de Paris, avait in extremis, introduit un article 66, qui stipulait que le président d'un tribunal pouvait, «lorsque l'atti-tude d'un avocat compromet la sé-rénité des débats» décider de l'écarter de la salle d'audience «pour une durée ne pouvant excé-der deux jours». Le critère choisi, celui de «sérénité» ouvrait la por-te à de regrettables excès. Notons cependant que M. Peyrefitte a annoncé dès le mercredi 21 janvier qu' i l déposerait au mois d'avri l un nouveau texte sur le délit d'audience, tenant compte de l 'annulat ion du Conseil. A sui-vre avec intérêt ...

    Les trois autres dispositions an-nulées (articles 92,94 et 100 ali-néa 2) sont en général qualifiées de «mineures» ou «relativement mineure». Elles concernent les dispositions prévues en faveur des victimes et la règle de la rétroacti-vité des lois pénales nouvelles plus douces que celles qu'elles rempla-cent.

    Alors que nous reste-t-il au-jourd 'hui ? Une loi qui octroie au pouvoir policier «un degré de puissance qu'il n'avait jamais connu depuis qu'existe la Républi-que (!)» (Le Monde du 1er jan-vier).

    Force est de constater qu'une nouvelle fois le pouvoir a profi-té d'une démobil isation de l'opi-nion publique, entretenue dans un climat d'insécurité et d ' incert i tu-de, que ce soit dans le domaine économique, le domaine social ou pol i t ique, face à l ' incurie de la droite et le peu de crédibi l i té de la gauche.

    l'idéologie de la "sécurité & i l

    «// est notoire (aussi) que le corps judiciaire était majoritaire-ment hostile à « Sécurité et Liber-té», notait Philippe Boucher dans Le Monde du 23 janvier. Le Syn-dicat de la magistrature ne dénon-çait-il pas ce qu' i l convient désor-mais d'appeler la «loi Peyrefitte» comme «la législation pénale la plus rétrograde depuis Vichy» ? Le Mouvement des Démocrates de Michel Jobert ne considère-t-il pas que la nouvelle loi «limitera désormais la liberté de circuler»? Ne regrette-il pas que les parle-mentaires -on pourrait maintenant ajouter : sénateurs et membres du Conseil Constitutionnel- qui ont voté la Loi «aient considéré la vio-lence et la peur dans la société avec d'aussi courtes vues, comme

    le leur demandait un gouverne-ment soucieux, pour son confor t d'imposer une démocratie recro-quevillée» ? (Le Monde du 23 dé-cembre). Certes. Et l 'opposit ion, toutes opinions confondues, fu t grande.

    Nombreux furent ceux qui mi-rent leurs derniers espoirs dans la décision que devait prendre le Conseil consti tut ionnel. Aussi, dur a été le choc. On parle de «recul», de «soucis d 'oppor tun i té pol i t i -que» (Le Matin de Paris).

    «La démocratie en sursis» ti-trai t Le Monde du 1er janvier. Les Français ont-ils bien saisi l ' impor-tance réelle de cette nouvelle loi ? S'il est permis de s'en référer à cette lettre d 'un lecteur du Monde on peut percevoir les accents de

    l'autre presse royaliste

    r o y a l i s t e » — nn iup r u n i v e r s i t é —

    CONTRE SAUNIER-SEITE

    AUTONOMIE DES LUTTES ETUDIANTES

    éditorial:

    BULLETIN - REPONSE A RETOURNER A ROYALISTE

    Nom : Prénom :

    Adresse :

    • c o m m a n d e le dernier numéro des Cahiers Royalistes (13 F) • commande le dernier numéro de Royaliste Université (3 F) • s'abonne aux Cahiers Royalistes pour 4 numéros (normal : 35 F;

    soutien : 50 F) • s'abonne à Royaliste-Université pour 5 numéros (normal : 10 F;

    soutien 30 F) règlement à l ' o rd re de « Royal is te», CCP 18 104 0 6 l\l Paris

    Total du versement :

    cette France qu'on dit profonde. Malheureusement seuls les contrô-les d' ident i té ont retenu l'atten-t ion de ce brave ci toyen, à la conscience tranquil le, ne sortant jamais sans papiers et pour qui seuls le «loubard», «l'agitateur pol i t ique venu en France pour y manigancer des complot» et «la minette fugueuse» feront l 'objet de la très légitime rigueur poli-cière. Aussi, comme tous les «gens normaux» (sic), ses congé-nères, il peut crier «Vive la poli-ce» (23 janvier).

    Le garde des Sceaux, et le gouvernement, ont parfaitement su exploiter cet état d'esprit, d'ail-leurs savamment maintenu. Voi là a peine quelques semaines un son-dage SOFRES publié dans le Journal du Dimanche du 4 janvier, révélait que 63% des Français étaient en faveur de la peine de mort , le pourcentage le plus éle-vé depuis novembre 1972, peu avant l 'exécution de Claude Buf-fet et Roger Bontemps.

    «Qu'importe aux partisans de la loi la nécessité d'une vérita-ble lutte contre la véritable cri-minalité, celle des milieux d'af-faires, dont la répression a consi-dérablement marqué le pas au cours du dernier septennat, celle des vols et des cambriolages, où l'absence de moyens et le manque de formation de la police judi-ciaire se traduisent par une baisse du taux d'élucidation de ces in-fractions. Qu'importe des prisons surpeuplées au delà des normes de sécurité...» (Me Jean-Paul Lé-vy, Le Quotidien de Paris).

    Qu' importe tou t cela en effet au président/candidat Giscard qui , en frappant un grand coup, s'assu-re en renforçant, au détr iment de la liberté, la sécurité - celle de son gouvernement présent, et qui sait, ainsi qu' i l l'espère, celle de son gouvernement prochain ?

    Jacques B L A N G Y

    royaliste a 17, rue des Petits-Champs, 75001 Paris. Téléphone : 297 42-57 C.C.P. Royal is te 18 104 06 N Paris

    • Changements d'adresse joindre la dernière bande d'abonnement et 4 F en timbres pour les frais

    " Les illustrations et les photos de ce numéro ont été fourmes par le groupe audiovisuel et sont la propriété du journal

    Directeur de la publication Yvan A U M O N T . Imprimé en France Diffusion -

    N.M.P.P. Numéro de commission paritaire 51 700.

    Royaliste 331 - page 2

  • NATION FRANÇAISE

    Un éminent philosophe a déclaré un jour : «l'agriculture, c'est le pétrole de la France». Fort de ce précepte, et à grands ren-forts de publicité, M. Giraud vient d'annoncer que les voitures fonctionneront bientôt à l'aide du pétrole vert, le «carburol». Voilà une excellente idée -surtout en période électorale- mais à condition qu'on ne se moque pas du monde.

    Le pompeux néologisme de «carburol» désigne un ensemble de produits de la famil le des al-cools ou des éthers. Ce peut être de l 'éthanol ou des mélanges acétano-butyliques, véritables dé-rivés agricoles (à partir du topi-nambour, de la betterave à sucre, de la canne à sucre ...), mais dont le pr ix de revient en France no-tamment , n'est pas du tout compét i t i f , surtout si l 'on veut maintenir le revenu des agri-culteurs. De plus, les terres agrico-les ne sont pas extensibles : si l 'on voulait faire rouler l'ensemble des voitures françaises avec de l 'alcool de betterave, il faudrait cultiver celle-ci sur 5 mil l ions d'hectares, c'est à dire mult ipl ier par 13 la surface des terres betteravières ! En outre, le bilan énergétique est négatif : l'énergie nécessaire à la product ion de l 'éthanol (culture, récolte, t ransformat ion ...) est su-périeure à celle que l 'éthanol peut lui-même dissiper.

    L'autre type d'alcool, plus inté-ressant, est le méthanol qui peut être aussi bien tiré de certains ré-sidus végétaux (paille, taillis,...) que du bois, du charbon ou du gaz. En fai t , seules ces deux der-nières filières sont économique-ment viables et réalisables sur une grande échelle industrielle, ce qui écarte toute contr ibut ion agricole importante à l 'obtent ion de car-burol.

    UNE ECONOMIE DE BOUTS DE C H A N D E L L E

    Deux actions sont envisagées : la première, à court terme, est d'adjoindre jusqu'à 10% de car-burol au super. Le problème, c'est que, dès qu 'on dépasse un taux de 5%, l'alcool attaque certains élé-ments de la voiture (canalisations, réservoir) ou certains matériaux (plomb, zinc, caoutchouc). Donc, à moins de modif ier for tement le véhicule, il faut l imiter à 5% le taux de carburol.

    la consommation de la voiture, en même temps qu' i l en abaisse les performances. Ce qui fait que ajoindre 5% de carburol ne fait f inalement économiser que 2,5% de super. Comme les supercarbu-rants ne représentent que 14% de nos approvisionnements pétro-liers, on about i t en fait à une éco-nomie de 0,35% de pétrole (envi-ron 350.000 tonnes par an), ce qui ne va pas chercher très loin. Sachant en outre qu'on consom-me plus d'énergie pour fabriquer du carburol que du super, et que son prix de revient est sensible-

    ment plus élevé, on se demande f i-nalement ce qu'on va gagner dans l 'affaire. De toute façon, si l'idée de remplacer une partie -aussi in-f ime soit-elle- de pétrole par autre chose n'est pas mauvaise en soi, on se demande pourquoi on n'y a pas pensé depuis 1973.

    UN A V E N I R I N C E R T A I N

    La seconde action envisagée à long terme consiste à concevoir des véhicules fonct ionnant avec 50% de carburol. La technique est connue puisque, au Brésil, exis-tent déjà de telles voitures. Outre que le délai de lancement de nou-veaux modèles ne laisse entrevoir leur développement qu'à l 'hori-zon 90, on peut se poser la ques-t ion de savoir d 'où viendra l'al-cool, puisque l 'éthanol n'est dis-ponible qu'en quantités limitées et que Is fabrication de métha-nol nécessite la mise au point d'une infrastructure industrielle qui n'existe pas encore. De plus, les filières les plus rentables sont celles du méthanol dérivé du char-bon, ou du gaz naturel... impor-tés I

    En fai t , l 'affaire carburol se ré-sume surtout à une opération pu-blicitaire : tenter de se concilier les agriculteurs, les écologistes, les betteraviers et de se montrer déterminé à diminuer la facture pétrolière, tout en ne faisant pas grand chose. Bref, prévoir le troi-sième millénaire, mais avec les yeux surtout fixés sur avril 81.

    Christian CHABANNE

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    De plus, le carburol augmente

    facs : le Jeu du pouvoir

    Depuis le début de l'année uni-versitaire, Dijon, Besançon, Stras-bourg, Perpignan et Paris (Nanter-re) se sont révoltés, révoltés contre la réforme des habilita-tions, la loi Sauvage où les descen-tes du G.U.D.

    Ces luttes étudiantes ont quel-que chose d'original : elles se font sans les syndicats étudiants, qui tentent désespérément de les ré-cupérer. Ces syndicats, discrédi-tés par leurs luttes intestines et leur constante rivalité qui écœu-rent les étudiants. Fait plus grave, les syndicats ne cherchent pas à expliquer l'enjeu pol i t ique du pro-blème, car ils ne sont eux-mêmes, que les courroies de transmission de partis incapables de formuler des propositions constructives.

    Le scénario de ces luttes est en fait souvent le même : sans les syndicats on décrète la grève gé-nérale qui dure 8 ou 15 jours, parfois plus, on défile dans la rue, on informe comme on peut, on essaie de se faire recevoir par le rectorat qui laisse d'abord aller les choses (il est bon d'effrayer le Français moyen en cette période) puis fait ensuite des promesses évasives, et le mouvement se ter-mine de guerre lasse, pour recom-mencer ailleurs. De toute façon, cela inquiète l 'électorat, et permet à Giscard de gagner des voix.

    Quand, comme à Paris, les cho-ses sont t rop calmes (les étudiants se sentent peu concernés par les problèmes d'habi l i tat ion, ils n'au-ront pas à s'exiler), le GUD re-prend le slogan de Mme Saunier-Seïté : «chassons les rouges des universités» et fait une «descente» à Tolbiac ou à Nanterre. Il s'en suit un mouvement légitime de protestations étudiantes, que les syndicats tentent de récupérer, le gouvernement d'exploi ter.

    Pour Giscard le but est double. A long terme, instaurer en France une société élitiste et pour cela sé-lectionner impitoyablement les étudiants «intéressants» en aban-donnant les autres à leur sort. A court terme, se servir de l'agi-tat ion étudiante comme d 'un épouvantail. Malheureusement beaucoup d'étudiants refusent de voir ces aspects politiques et fon t , par là même, le jeu du pouvoir.

    Jean-Marie TISSIER

    (1) Sur l'ensemble de ces questions on pourra l ire le dernier numéro de «Royal iste-Universi té», f ranco 3 F.,

    Royaliste 331 - page 3

  • CHEMINS DU MONDE

    s o l i d a r i t é a v e c s o l i d a r i t é

    La Pologne reste présente à la «une» des journaux. La grève pour le «samedi libre», les négociations serrées entre Solidarité et le gouvernement, la perpétuelle bascule entre le dialogue et l'épreuve de force relancent quotidiennement l'intérêt pour la situation polonaise. Mais on peut déjà dégager quelques ensei-gnements fondamentaux.

    L'unanimité de nos discours fait i l lusion. Certes, personne ne souhaite une intervention mil itaire en Pologne. Ni les P.C. occiden-taux qui, depuis Budapest, Berlin, Prague et Kaboul, sont forcés de charger nommément le frère sovié-t ique du poids des erreurs, ou des crimes, qui ne doivent en aucun cas venir éclabousser ici ce qui leur reste d'idéologie.

    Ni les sociaux-démocrates et li-béraux au pouvoir, dont la tacti-que de col laboration économique avec l'Est pâtirait d'une crise in-ternationale, ce qui ébranlerait les fondements de leur règne.

    Ni, bien sûr, les «faucons», pour autant qu' i l y en ait actuelle-ment en Europe, qui nous savent incapables d'une riposte mil i taire et attendent du nouveau président américain un rééquilibrage rapide des forces en vue d 'un conf l i t qu'i ls jugent inévitable.

    ï ï NATION FRANÇAISE

    Ni enfin l'U.R.S.S., parce qu'une partie de l'armée polonaise résisterait, que plus de la moit ié des membres de son Parti Ouvrier sympathise avec le nouveau syn-dicat, enfin parce que des mouve-ments de grèves couvent en R.D.A., en Hongrie, en U.R.S.S. même, et qu'une opération mil i-taire en provoquerait sans doute l 'extension.

    Donc, pas d' intervent ion, di-sent-ils. Mais simultanément, à mesure que le mouvement polo-nais s'affermit et s'incarne, il nous apparaît sous son vrai jour. — A f f i rma t ion en acte de la libre association corporative, dans la plus pure et la plus ancienne tradi-t ion ouvrière, c'est-à-dire ni comme levier de subversion révo-lut ionnaire, ni comme «partenaire social» agréé par le gouvernement, mais comme agent principal et responsable de la vie de l'entrepri-se, tant pour la maîtrise des condi-

    t ions de travail que pour celle des objectifs de la product ion, qu'elle soît industrielle ou agricole. Ca-pacité à imposer des solutions, même auto-restrictives comme le rationnement alimentaire, et le choix des priorités comme le lo-gement social ou l 'équipement de la paysannerie privée. — Af f i rma t ion du droi t à la communicat ion sociale malgré le le monopole pratiqué du fait de la structure même de l 'état, et particulièrement au dro i t d'ex-pression religieux, syndical, cultu-rel. - A f f i rma t ion de l ' identi té natio-nale, de la vocation propre à la na-t ion au-dessus et au-delà du sys-tème polit ique- qu' i l n'est pas inu-t i le de mettre en cause en tant que «socialisme», parce que l 'objecti f est de le plier, de le mettre au ser-vice d'une éthique religieuse, so-ciale, historique correspondant à la Pologne.

    Donc, à mesure que le temps passe, et que s'accumulent les rai-sons raisonnantes de la non-inter-vention, les motifs qu ' i l y aurait pour mettre le holà augmentent. A quel point des deux courbes s'opérera la rupture ?

    Dans l ' intervalle, il ne nous suf-f i t pas, quant à nous, de faire des vœux pour que l'U.R.S.S. laisse faire, et que les Polonais, modé-rés par l'Eglise, n'en fassent pas t rop . Il nous importe de mesurer les ambitions de Solidarité pour en nourrir les nôtres.

    Ce que des partis prisonniers de la puissance ne peuvent envisager, ce que les dirigeants prisonniers du désordre établi qui leur rap-porte, refusent, ce que les otages des blocs et des systèmes ne conçoivent même pas.

    Etre concrètement, ici même, solidaires de Solidarité.

    Luc de GOUSTINE

    quand chone-poulenc licencie Rhône-Poulenc va envoyer 4000 personnes rejoindre les quel-

    que 1.600.000 chômeurs «officiels» que compte déjà notre pays. C'est le moment choisi par M. Ceyrac pour décerner un satisfecit à M. Barre.

    Pris dans les di f f icul tés du sec-teur text i le, RP va fermer deux usines et réduire le personnel des autres établissements. En trois ans sa fil iale text i le a vu ses effec-t i fs «fondre» de 13.000 à 8.000 personnes; c'est à nouveau 4000 employés qui, notamment par le biais de la «retraite anticipée», voient leur emploi disparaître. A quoi est dû ce «dégraissage» (le mot est af f reux, sauf, peut-être, si l 'on pense à M. Barre) ?

    De l'aveu du PDG «l'accrois-sement des importat ions d'articles transformés (plus de 20%) et les importat ions de fibres et de fils en provenance des Etats-Unis» (1)

    ont conduit RP à prendre cette décision. Cette affaire constitue une i l lustration supplémentaire des ravages engendrés par le libéra-lisme et le «laisser faire, laisser passer». Elle est exemplaire à plus d 'un t i t re. La Communauté euro-péenne se révèle une fois de plus incapable de résoudre ce problème puisque les groupes britanniques ICI, néerlandais A K Z O et italien Montedison se trouvent dans la même situation. Par ailleurs, la très libérale Amérique, qui sait être la nation la plus protection-niste du monde lorsqu'i l s'agit de son marché intérieur, prof i te du laxisme de la C.E.E.

    Faut-il une fois de plus redire

    les méfaits de la «fortune anony-me et vagabonde» ? Faut-il répé-ter la logique fol le de ce système nous mène à la catastrophe ? N'aurait-i l pas fal lu protéger eff i-cacement pendant quelques an-nées ce secteur pour lui permettre de se reconvertir en évitant une pareille déroute ? Il semble que ces temps-ci on commence à comprendre dans certains mil ieux (notamment du côté de la CFDT) la nécessité d 'un protectionnisme l imité mais sérieux.

    En revanche, M. Ceyrac illustre à merveille un certain patronat de dro i t divin auquel la «crise» n'a rien appris, mais qui entend ne rien oublier de ses privilèges. A commencer par celui de distribuer des satisfecit; le 21 janvier il dé-clarait au Monde : «Il serait équi-table de reconnaître le rôle à mon avis capital qu'a joué R. Barre au

    cours de ces 4 dernières années». Capital, certes ! Pourtant quelques lueurs de bon sens traversent l'es-pri t de ce patron éclairé : «/a fai-blesse du dollar en 1979 et au dé-but 1980 a permis aux industriels américains du secteur textile de pénétrer le marché français avec une redoutable efficacité. » Mais pour lui «/a véritable réponse, c'est l'effort de productivité»... avec 4000 chômeurs de plus ! Il n'imagine pas qu'une action inter-nationale menée par la France (et soutenue par d'autres nations elles aussi concernées) puisse chercher à modif ier «l 'ordre» actuel des choses, et compléter un protec-t ionnisme l imité mais efficace.

    Jamais la collusion entre un pouvoir qui est l 'émanation du ca-pitalisme financier et un patronat rétrograde et aveugle ne sera appa-rue plus clairement.

    A. SOLARI

    Royaliste 331 - page 4

  • phllIppe de suint-robert

    "retrouver un dialogue avec la libye i l

    Royaliste : Pourquoi la France qui vient de subir un sérieux re-vers diplomatique par la victoire des légions islamiques et la fusion de la Libye avec le Tchad a-t-elle laissé le champ libre au colonel Kadhafi ?

    "Phil ippe de Saint Robert : Le problème du Tchad est très anté-rieur à l'arrivée au pouvoir du co-lonel Kadhafi en Libye il y a dix ans. Et par conséquent, il ne faut pas voir cette question à la seule lumière de l ' intervention libyenne. Mais il faudrait par ailleurs exa-miner la pol i t ique de la Libye à la lumière des nombreuses erreurs commises à son égard par la diplomatie giscardienne depuis 1974. Il y a le problème de l 'Af r ique noire en général, et de la pol i t ique de la France dans cette région du monde, et celui du Tchad en particulier, qui n'est pas un pays comme les autres, mais au contraire fait de bric et de broc et dont vous savez qu ' i l n'a jamais constitué, que ce soit avant ou après l' indépendance, une entité nationale évidente.

    Pour ce qui est de la poli t ique française en Afr ique Noire, Geor-ges Pompidou avait compris qu ' i l fal lait que la France n'apparaisse pas comme continuant sous une autre forme une quelconque poli-t ique coloniale et il était conscient qu ' i l fal lait tourner la page colo-niale. Pour lui les intérêts français devaient se débrouil ler en Afr ique, mais la pol i t ique de l 'Etat devait être autre que celle de ces intérêts. Ce qui ne pouvait résoudre le pro-blème du Tchad, celui-ci étant spécifique. En 1969, il y avait eu la révolut ion libyenne qui avait renversé une vieille dynastie alié-née aux puissances anglo-saxon-nes, et Georges Pompidou avait parfaitement vu qu' i l y avait là une chance particulière de coo-pération qui s 'offrai t à la France. Pourquoi ? Parce que cette révolu-t ion s'était faite contre la présence mil i taire anglo-saxonne en même temps qu'avec l 'appui d 'un Islam rejetant le matérialisme incarné par l 'Union Soviétique. La France paraissait alors dans une posit ion appropriée pour o f f r i r à la Libye une troisième voie lui permettant de prendre du champ par rapport aux puissances anglo-saxonnes sans pour cela que ce nouveau gouvernement arabe ne prenne le chemin de Moscou. Aussi, le Pré-sident Pompidou avait-il mis en œuvre une grande pol i t ique de coopération avec la Libye, qui a parfaitement fonct ionné de 1969 à 1974, pol i t ique de coopération

    dont le plus spectaculaire effet fu t la vente d'environ soixante-dix Mi-rages français, mais qui compor-tai t en réalité beaucoup d'autres aspects d'aide, d'assistance et de coopération, même dans les do-maines culturels ou médicaux, ce dont on parlait moins car cela ne permettait pas de faire les man-chettes des journaux. Et le Pré-sident Pompidou m'avait d i t qu ' i l avait l ' in tent ion de poursuivre cet-te pol i t ique, quels que soient les cris des uns comme des autres. Et puis, en 1974, Giscard v int , croyant tout savoir mieux que tou t le monde. Et il a très rapide-ment changé la polit ique arabe de la France tout en affectant de la continuer. J'ouvre une parenthèse: il y a à l'arrière-plan le problème" palestinien et celui du Proche-Orient : Pompidou avait immé-diatement compris que la polit i-que de Sadate conduirait ce der-nier à lâcher les Palestiniens, à servir les intérêts américains au Proche-Orient, et à retourner sa veste. Il m'avait d i t très clairement que lui, il ne comptait pas cau-t ionner cette pol i t ique, qu ' i l ne voulait pas que «la France cau-t ionne, selon ses propres termes, la capitulat ion égyptienne». Par conséquent sa poli t ique libyenne était l'expression de sa prise de

    conscience de ce que le monde arabe allait se diviser, comme c'est en effet arrivé à Camp David, et de ce que la France ne devait pas être du côté ceux qui capitulent. Giscard, qui ne connaissait rien à la réalité pol i t ique du Proche Orient et qui n'avait pris que des positions hostiles dans le passé à la poli t ique extérieure tant du Général de Gaulle que de Georges Pompidou, s'est crû extrêmement malin en opérant un rapproche-ment, à ce moment-là, avec le Président Sadate, et ce bien évi-demment aux dépens du régime l ibyen qui était déjà mal avec Sadate. Et il apparut à nos gou-vernants qu ' i l était plus judicieux d'être bien avec l 'Egypte qui ap-paraissait comme un pays puis-sant, bien que fo r t pauvre, qu'avec cette pauvre petite Libye qui sem-blait mineure sur l 'échiquier inter-national, au Proche-Orient comme en Afr ique, et dont on ne voyait pas les immenses ressources et l'immense ambit ion. Alors l 'effet n'a pas manqué de suivre : peu à peu la Libye, ayant perdu le sou-t ien de la coopération française, prend le chemin de Moscou et l 'on a commencé à s'en plaindre et à trouver des justif ications à notre att i tude dans des faits qui étaient précisément la conséquence même

    de notre abandon de la Libye. Et de 1974 à 1979 les relations

    franco-libyennes n'ont pas cessé de se dégrader. Et la Libye a en-trepris au Tchad en particulier et en Afr ique francophone en géné-ral, une pol i t ique beaucoup plus agressive à notre endroit que si nous avions continué notre coopé-ration avec elle. Du temps de Georges Pompidou, les affaires du Tchad se traitaient entre Paris et Tr ipol i et nous avions recours à la diplomatie libyenne pour arranger les problèmes que nous posait le Tchad. Alors qu'aujourd 'hui , ce qui est rompu étant rompu, nous nous trouvons dans une position délicate qui remet en cause toutes nos amitiés africaines. La France s'est retirée du Tchad, sans d'ail-leurs que la Libye y soit pour rien, simplement parce que le Tchad nous le demandait; mais la consé-quence a été que la Libye a été tentée de remplir le vide laissé par notre départ. Mais je ne crois pas que cette ambit ion libyenne ait un grand avenir, car elle va se heurter d'une part aux mêmes problèmes que nous avons connus nous-mê-mes et n'avons pas sû résoudre, et d'autre part à l 'opposit ion de tou-te l 'Af r ique noire.

    Royaliste : Quelle peut-être à l'heure présente la pol i t ique de la France en Afr ique ? Et vis-à-vis du Tchad ?

    Philippe de Saint Robert : Le rôle de la France n'est pas de sou-tenir, comme elle fait actuelle-ment, des régimes comme ceux de Bongo au Gabon, de Mobutu au Zaïre, ou celui qui a remplacé Bo-kassa en Centrafrique. Il y a eu depuis 1974 la pol i t ique des amitiés personnelles et des menus plaisirs. Notre seule stratégie pos-sible en Afr ique est d'empêcher la rivalité, dans cette région, entre les deux blocs, d'empêcher que l 'Afr ique ne soit livrée, comme l'est aujourd'hui le Proche-Orient, à leur double impérialisme. Alors qu'au contraire, Giscard et ce dès 1974, a tenté d'att irer les Etats-Unis en Afr ique, jusqu'à pratiquement les pousser à y faire des interventions armées. La di-plomatie française ne doi t pas être l'avant-garde de l'hégémonie américaine en Afr ique. En ce qui concerne la Libye il faut rétablir avec elle une pol i t ique de coopé-ration et de confiance, sans que cela signifie de notre part une quelconque faiblesse sur la ques-t ion du Tchad.

    Mais comme je l'ai d i t , il ne faut pas s'exagérer le danger que représente la Libye. Alors qu'au contraire de nombreux intérêts nous dictent de retrouver avec elle un dialogue.

    propos recueillis par Philippe Labarrière

    et Axel Tisserand

    Royaliste 331 - page 5

  • entretien avec richard reoch, chef du service He presse ti'amnesty International :

    militants des droits de l'Homme

    On parle de «nouveaux militants», ce sont des hommes et des femmes parfois décys par un combat politique mené antérieure-ment. Ils ont décidé d'œuvrer efficacement pour les droits de l 'homme, aujourd'hui, sans se soucier des idéologies. Ils militent à «S.O.S.-médecins» ou «Médecins sans frontière», luttent pour «un bateau pour le Vietnam» ou, plus modestement, travaillent avec «A.T.D.-Quart-Monde». Les militants d'«Amnesty Interna-tional», que nos vendeurs à la criée rencontrent sur les marchés, participent du même état d'esprit (refus d'entrer dans le débat idéologique, souci d'efficacité immédiate). Et le fait que leur association soit actuellement en butte aux critiques les plus vives d'une droite qui lui reproche ses imprudences (alors que d'autres lui reprocheraient plutôt d'être timorée) ne diminue en rien notre intérêt pour l'action de ces gens qui, à mains nues, prétendent faire reculer les dictatures et sauver des vies humai-nes, à «l'Est» comme à «l'Ouest».

    • Royaliste : Amnesty Interna-t ional s'occupe des prisonniers d 'opin ion. Mais en question d'ap-proche nous voudrions vous de-mander, Richard Reoch, ce que vous pensez des moyens de ré-pression plus insidieux, mais pro-bablement beaucoup plus effica-ces qu'emploient les gouverne-ments du bloc occidental, par leur contrôle des médias et celui des insti tut ions ?

    Richard Reoch : Amnesty a conscience de ce problème. Ce-pendant notre action se l imite aux trois cas suivants : 1/ l 'emprisonnement ou la déten-t ion d 'un prisonnier d 'opin ion. Un prisonnier d 'op in ion est quicon-que se retrouvant en prison à cause de ses convictions, de la couleur de sa peau, de ses origines ethniques, de son sexe, de sa religion ou de sa langue, pourvu qu ' i l n'ait pas préconisé l'usage de la violence ni eu recours à la vio-lence. Nous avons à l'heure actuel-le à traiter quelque 5.000 cas ré-pondant à l'une ou l 'autre de ces défini t ions. Pour cette catégorie de prisonniers, nous n'avons au-cune hésitation à faire pression sur les gouvernements concernés afin qu'i ls libèrent sans délai tout prisonnier d 'opin ion, quelle que soit la législation en vigueur. Ain-

    si, par exemple, bien qu' i l existe en U.R.S.S. une loi autorisant les poursuites judiciaires à rencontre de toute personne accusée d'acti-vités anti-soviétiques, nous consi-dérons quiconque faisant l 'objet de telles poursuites comme pri-sonnier d 'opin ion. 2/ l 'emprisonnement d 'un prison-nier pol i t ique. Pour définir ce qu'est un prisonnier pol i t ique, l 'on peut choisir l 'une des trois dé-marches suivantes : - On peut prendre en considé-rat ion les motivations de la per-sonne emprisonnée, quel que soit le crime dont elle est accusée. En d'autres termes il est possible de distinguer -ainsi qu' i l a été fait en Inde- entre motivations d'ordre public et motivations personnel-les, au sujet du même crime. - On peut tou t simplement pro-céder à l'examen de la législation en vigueur et conclure que l 'on est en présence d 'un type de législa-t ion de nature pol i t ique. Par conséquent quiconque est empri-sonné sous ce régime jur idique est un prisonnier pol i t ique.

    La troisième démarche consiste à évaluer les motivations que peu-vent avoir les autorités pour em-prisonner telle ou telle personne, ici encore quelle que soit la légis-lation en vigueur, qu'elle soit ou

    non de nature pol i t ique. Ainsi iorsque l'ancien président A l i Bhutto fu t pendu au Pakistan, après avoir été déclaré coupable d'avoir commis un meurtre, le fait que sa peine n'ait pas été com-muée représente une décision d'ordre pol i t ique.

    Nos efforts en faveur des pri-sonniers politiques sont d'ordre plus général qu'i ls ne sont lorsque nous avons à nous occuper de pri-sonniers d 'opinion. Nous ne de-mandons pas -comme nous le fai-sons pour les prisonniers d'opi-nion- la libération immédiate et sans condit ions de tous les pri-sonniers polit iques. Ce que nous réclamons, c'est que leur procès ait lieu dans des délais rapides et de façon équitable, en accord avec les règles internationales dans ce domaine.

    Malheureusement ceci est de-venu pour nous un énorme pro-blème, car un nombre croissant de pays ont maintenant recours à la détention préventive. Celle-ci per-met à la police de détenir une per-sonne pour, dans certains cas, une période quasi i l l imitée, et sans qu ' i l soit besoin de fournir un chef d ' inculpat ion quelconque, et sans garantie de procès ou de droi t à un avocat. Amnesty constate que ce phénomène a pris de l'am-pleur durant les 20 années qui se sont écoulées depuis sa fondat ion. A l'époque la répression en ma-tière pol i t ique tendait à suivre un schéma tradit ionnel, caractérisé par de grands procès et des peines de prison fixes. 3/ Enfin, nous intervenons dans le cas où des prisonniers sont tor tu-rés ou exécutés. Notre base de tra-vail est la Déclaration Universelle des Droits de l 'Homme, qui s'ap-plique également à tous les mem-bres de la grande famil le des peu-ples. Bien qu' i l soit de mode au-jourd 'hui d 'af f i rmer que les droits de l 'homme sont un luxe dans les pays en voie de développement, nous nous opposons à cette vue qui tend à institutionnaliser la po-l it ique d 'un progrès à deux vi-tesses, pol i t ique qui sous sa forme la plus crue est bien sûr l'apar-theid. Ceci tend effectivement à faire valoir dans le domaine des droits de l 'homme la ligne de par-tage Nord-Sud. Et c'est parce que nous refusons une telle at t i tude que nous jouissons d 'un grand cré-di t auprès des peuples du Tiers-Monde.

    • Royaliste : Quels sont les avan-tages dont a bénéficié Amnesty International depuis 1977, date où votre association s'est vue dé-cerner le Prix Nobel de la Paix ?

    Richard Reoch : En gros l 'on peut faire mention de trois avan-tages, dans des domaines variés. Un avantage à long terme, que l 'on peut qualif ier de philosophi-

    que. En décernant le Prix Nobel à Amnesty, le comité responsable a reconnu explici tement qu' i l exis-tait un lien entre la question de la paix et celle des droits de l 'hom-me, ce qui semble aller de soi en 1980, puisque cette année encore le Prix a été attr ibué à un mi l i tant faisant campagne pour le respect des droits de l 'homme : Esquivel. Cependant avant 1977, l 'on avait tendance à lier le Prix Nobel de la Paix aux efforts de ceux qui pré-conisaient le désarmement ou pro-posaient des solutions aux confl i ts armés. En 1977 il y a eu recon-naissance du fait qu'en œuvrant

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    pour les prisonniers victimes des persécutions polit iques, nous avions affermi les bases de la Jus-tice et donc de la Paix.

    Des avantages immédiats, c'est-à-dire non seulement la publ ic i té que nous avons alors reçue, mais surtout le fait qu 'Amnesty Inter-national en tant que source d' in-format ion et en tant qu'organisa-t ion a acquis une plus grande cré-dibi l i té auprès des journalistes.

    Des avantages aussi au niveau diplomatique, au niveau de nos re-lations avec les différents gouver-nements. Ceux-ci désormais ne peuvent plus nous claquer la porte au nez, ce qui serait aujourd'hui , du point de vue de la pol i t ique mondiale, inacceptable puisqu'i l

    Royaliste 331 - page 6

  • est établi que nous n'entrons pas en lice bardés de préjugés pol i t i -ques, notre préoccupation étant de défendre les droits de l 'homme ainsi qu'i ls ont été définis par les Nations Unies.

    • Royaliste : Quels ont été les ef-fets du Prix Nobel de la Paix sur les structures d 'Amnesty Interna-t ional et sur son efficience ?

    Richard Reoch : Notre organi-sation a connu un phénomène de croissance, mais pas entièrement dû à l 'obtent ion du Nobel. Am-

    nesty compte aujourd'hui quelque 250.000 adhérents répartis dans 134 pays. Nous essayons de recru-ter des membres actifs puisque nous ne voulons pas dépendre de grosses donations. Bien sûr les 80.000 Livres Sterling du Prix Nobel ont été pour nous un toni-que. Nous les avons utilisés pour renforcer les sections formées ré-cemment dans certains pays du Tiers-Monde. Pourtant cette somme, la plus importante dona-t ion jamais reçue par Amnesty, ne représentait à l'époque qu'un dixième de notre budget, consti-tué uniquement des sommes ver-sées par nos adhérents. Nous avons, ces dernières années, grâce à notre bonne santé, pu organiser des campagnes de sensibilisation. L'année passée par exemple notre campagne a eu comme objectif d 'att i rer l 'at tent ion sur le sort des prisonniers d 'op in ion détenus en

    U.R.S.S., ceci juste avant les J.O. En 1979 -l'année de l'enfance-nous avons sonné l'alarme au sujet du sort des enfants victimes des violations des droits de l 'homme. Nous avons publié un rapport pour faire remarquer qu'aujour-d 'hu i , l'image conventionnelle du prisonnier pol i t ique - celle d 'un fa-natique auteur de troubles, cher-chant parfois même à aller en pri-son pour faire connaître sa cause-n'a plus cours. Un très grand nom-bre de gens ont la malchance de se trouver au mauvais endroit au mo-ment le moins opportun- pour cette «faute» ils ont à subir les plus atroces tortures. Nous avons cité des cas d'enfants torturés sous les yeux de leurs parents. Après notre campagne, en 1978, au su-jet des disparitions de prisonniers en Argentine, le gouvernement de ce pays versa un mi l l ion de dollars à une agence de publicité, afin de se refaire une image aux yeux de l 'opinion mondiale, et maintient depuis cette campagne sur le me «le cauchemar est terminé», un aveu intéressant qui prouve que ce «cauchemar» existait bien en Argentine.

    • Royaliste : Quels liens entre-t ient Amnesty International avec d'autres organisations similaires ?

    Richard Reoch : Amnesty est, il faut le rappeler, une organisa-t ion indépendante (NGO - non-governmental organisation). Toute «NGO» a ce qu'on appelle un dro i t de consultation aux Nations-Unies. Ainsi Amnesty bénéficie de ce dro i t auprès des Nations-Unies, de l'Unesco, du Conseil de l 'Euro-pe, et nous avons aussi ce que nous appelons relations de coopé-ration avec l'Organisation de l 'Uni té Afr icaine avec l'Organisa-t ion des Etats Américains. Ces liens off iciels ne signifient nulle-ment que nous sommes en état de dépendance vis-à-vis de ces organi-sations. Nous avons de cette façon la possibilité de leur fournir des renseignements, ce qui pour Amnesty International est extrê-mement important. Cela nous donne aussi le dro i t d ' informer le secrétaire des Nations Unies tou-tes les fois que l 'on attente aux droits de l 'homme dans un des pays membres et éventuellement de saisir la commission ad hoc.

    • Royaliste : Comment fonct ion-ne votre organisation ?

    Richard Reoch : C'est très sim-ple. Le cœur de notre organisation est notre unité de recherche, unité de 70 personnes. C'est à elles qu' incombe la tâche d'évaluer les renseignements que nous re-cevons. Nous n'avons pas de sour-ces privilégiées, nous travaillons en effet à partir de documents appar-tenant au domaine public et de rapports provenant de divers in-formateurs plus ou moins isolés.

    Une décision quant à l 'emploi éventuel des documents rassem-blés est prise, soit au sein même de notre unité de recherche, soit à un niveau supérieur, ceci dé-pendant de la nature des cas étu-diés. Toutes les données une fois rassemblées, nous avons le choix entre plusieurs démarches :

    - dans le cas d 'un prisonnier d 'op in ion nous préparons un dos-sier et nous l'envoyons à l 'un quelconque des 2400 groupes que nous avons dans le monde. Des lettres sont alors rédigées et en-voyées aux ambassadeurs des pays «coupables», demandant la libé-ration du prisonnier en question. Ce faisant on peut aussi organiser une campagne de publicité à l'échelon local.

    - lorsque nous nous trouvons en présence d 'un cas où les viola-t ions des droits de l 'homme sont l'expression d'une att i tude pro-fondément enracinée dans telle ou telle société, nous pouvons ou soumettre nos renseignements «en bloc» à la commission des droits de l 'homme des Nations Unies ou nous pouvons lancer une campa-gne pour sensibiliser l 'opin ion mondiale.

    - en outre si nous jugeons que nous sommes en possession de renseignements susceptibles d' in-téresser les médias, nous suivons une procédure formelle : nous pu-blions un rapport préparé pour la presse et nous avons cette règle de ne pas accorder d'exclusivité, mais de nous adresser à un éventail d'organes d ' in format ion aussi lar-ge que possible. • Royaliste : Quel rôle peut jouer Amnesty International en France?

    Richard Reoch : Tout d'abord il y a en France des prisonniers d 'opin ion. Ce sont les objecteurs de conscience. Nous avons là en vérité le cas le plus classique que l 'on puisse trouver du prisonnier d 'opin ion, puisqu'ils refusent de faire usage de la violence et d'ap-prendre à s'en servir. Un deu-xième point : nous avons eu ré-cemment à exprimer nos préoc-cupations aux sénateurs français, au sujet de la loi «Sécurité et Li-berté» qui vise à restreindre les ga-ranties accordées aux citoyens.

    Enfin nous faisons campagne auprès de gouvernement français afin que soit abolie la peine de mort dans tous les territoires qu ' i l administre. • Royaliste : Qu'a représenté à vos yeux la Conférence de Ma-drid ?

    Richard Reoch : La Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe était inter-gouverne-mentale, nous n'y avons envoyé qu 'un observateur. Nous avons eu un représentant à la conférence des N.G.O., à Madrid, qui a eu lieu en marge de la principale.

    On ne peut parler de Madrid sans mentionner Helsinki, dont l ' importance première réside pour nous dans cet e f for t fait alors pour codif ier les responsabilités au niveau international dans le do-maine aes droits de l 'homme; avoir ensemble 35 gouvernements qui admettent que la question des droits de l 'homme dans l 'un quelconque des pays signataires soit aussi la responsabilité des 34 autres est un progrès indéniable. Malheureusement -et ceci bien sûr est vrai pour Madrid- les signa-taires des accords éventuels étant des gouvernements, ils ont d'au-tres questions à traiter dans un laps de temps finalement t rop court.

    Nous avons toujours af f i rmé que le problème des droits de l 'homme n'a de chance d'être trai-té avec succès qu'à partir d'une discussion fondée exclusivement sur des faits précis et vérifiables et n'ayant comme seul but que de mettre f in à tou t abus dans ce do-maine et aux souffrances des vic-times.

    • Royaliste Estimez-vous qu'Helsinki ait été à l 'origine d'une nette améliorat ion dans le domaine des droits de l 'homme ?

    Richard Reoch : Non. Toute amélioration ou toute détériora-t ion que l 'on ait pu noter s'est dé-roulée en marge d'Helsinki , et a eu plus à voir avec la problémati-que propre aux pays où on a pu l'observer qu'avec les accords d'Helsinki. L 'abol i t ion de la peine de mort au Canada illustre ce fait : voulue par le gouvernement cana-dien au moment ou le cabinet était dans son ensemble pour la suppression de la peine de mor t .

    Ce qui est à retenir c'est que nous sommes au tout début d 'un long processus. Ce que nous cher-chons à faire ce n'est pas moins que de modif ier des attitudes profondément ancrées. Notre but est de définir de nouvelles normes et de les faire accepter par tous. Le domaine des droits de l 'homme inclut aussi le droi t qu'a tou t homme à un meilleur niveau dç vie, la question d'une meilleure distr ibut ion des richesses ... Ce n'est pas au niveau pol i t ique que l 'on résoudra ces questions, ainsi que le prouve la campagne qu'a menée Carter, qui s'est heurté très souvent aux réalités polit iques. C'est pour cette raison qu'en dernier ressort nous croyons que seule une approche pragmatique comme la nôtre -qui consiste à développer un contexte «droits de l 'homme» indépendant de toute analyse polit ique- aura des chan-ces de porter des frui ts.

    propos recueillis à Londres par Daniel S INGLETON

    Royaliste 331 - page 7

  • •"LIRE

    l'état-giscard

    L'approche des élections présidentielles multiplie les ouvrages consacrés à Valéry Giscard d'Estaing. Après la «Saga des Gis-card» qui décrit l'émergence d'une nouvelle dynastie bour-geoise, voici «La droite absolue» du radical de gauche Schwart-zenberg qui fait le bilan du septennat écoulé.

    et en mettant en coupe réglée le «quatrième pouvoir», la presse. La procédure du vote bloqué (couramment utilisée par Barre) et l'accaparement des présidences de commissions permanentes ont empêché l 'opposit ion de jouer un rôle quelconque. En 1979 sur les 121 projets de lois déposés par le gouvernement 69 ont été pro-mulgués. En revanche, sur 190 propositions de loi provenant des parlementaires, 10 seulement l 'ont été. La justice avec Peyrefitte et le Conseil de la magistrature a été

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  • — IDEES — a L'idéologie française : cette perversité sour-

    noise qui de droite à gauche traverse notre mé-moire pour nous vouer au culte obscur de l'ori-gine, à la haine de l'autre, à une xénophobie ra-ciste, Bernard-Henri Lévy a voulu la débusquer dans les textes et les attitudes politiques depuis près d'un siècle. Il a mené son analyse -nous l'avons constaté- avec l'implacabilité d'un juge d'instruction et d'un procureur. Au terme, le réquisitoire paraît accablant, sans appel. Et pourtant... c'est sa logique sans faille qui pour-rait céler sa plus grande faiblesse. B - H L . aurait pu se contenter de débusquer une tendance, une part obscure et redoutable qui périodique-ment s'affirme par quelque bassesse ou quelque crime. Il n'a pu résister à la tentation de décou-vrir un système, c'est à dire une totalité englo-bante et structurante, à laquelle rien n'échappe. C'est là où le bât blesse et nous mord le senti-ment de cruelles injustices.

    A moins de prendre au sérieux le terme d'in-conscient (il écrit en effet «structurée comme un inconscient»), de le concevoir à la mode qu'il déteste, c'est à dire jungienne, et de pro-clamer d'autorité qu'une structure archétypale fait parler ou délirer Barrés, Maurras, Sorel, Pé-guy et Bernanos... il n'est pas possible de dé-noncer en toute rigueur de terme une idéologie commune à tous. Je suis prêt à le démontrer. La seule échappatoire est bien à partir d'un aspect, d'une tendance, d'une apparence de dénoncer un non-dit qui crierait malgré eux. Mais c'est du même coup gommer, par coup de force, le reste et sans doute l'essentiel d u n e pensée, leur gloire méritée et leur honneur.

    Pour expliquer cela plus clairement, je pren-drai l 'exemple de Charles Maurras. Le maître de l 'Action française est partout présent dans l'idéologie française, mais rigoureusement ja-mais dans l'expression de sa pensée essentielle, toujours allusivement. On voit bien pourquoi. Celle-ci contredit absolument presque comme une antithèse parfaite tous les motifs et les arê-tes vives de cette idéologie. Le racisme, le concept de race ? Maurras l'a toujours dénon-cé, singulièrement à travers Gobineau. Le vita-lisme, l'appel aux forces obscures ? Cet amant de la lumière et de la Raison les a toujours eues en horreur, Bergson lui-même qu'il connaissait d'ailleurs fort mal mais qu'il tenait en suspicion pour son anti-intellectualisme, lui qui restait au fond très thomiste ? Voilà, au moins du ren-fort pour toi, mon cher Bernard ! Il n'est pas jusqu'à sa théorie de la France que Maurras n'ait voulue en démenti formel à l'Idéologie française, comme une ouverture à l'universel, le refus de se replier sur une différence inessen-tielle à l'humanité !

    D'autre part, en ce qui concerne l'histoire, il faudrait tout de même prendre garde aux rac-courcis trop hatifs a fortiori s'ils blessent l'his-toire des idées qui est l 'objet du débat. B-H L. a le mérite de montrer que l'intérêt de la 1ère Ac-tion française pour la cause ouvrière et même socialiste n'est pas de pure forme. Mais cela ne l'excuse pas de passer sous silence les objections décisives de Maurras à Sorel, qui firent, de l'aveu du premier, échouer l'expérience du cer-cle Proudhon. Ces objections relatives à la guerre sociale sont en rapport direct avec le vitalisme et l'énergisme soreliens. Pourquoi avoir caché aussi que, malgré une certaine sympathie pour Mussolini, des réticences

    par gérard leclerc

    une idéologie française ?

    (suite et fin) fondamentales sont faites dès le départ à propos de la statolâtrie fasciste, de l'embriga-dement totalitaire de la jeunesse, à l'heure où un Daladier et un Churchill déclaraient qu'Ita-liens ils auraient été partisans du duce ! Pour-quoi, surtout avoir tu le plus fondamental, le motif d'un antigermanisme qu'il est trop facile de faire passer pour une rudimentaire xéno-phobie, alors qu'il dénonce la primauté d'un moi racial ?

    Je sais ce que Bernard-Henri Lévy répliquera à tout cela. L'Action française et Maurras ont en dépit de tout, affirmé un antisémistisme d'Etat qui a abouti au honteux statut de l'occu-pation et manifesté en maintes occasions une haine qui les a aveuglé au pire moment du nazis-me ! Sur ce point les meilleures réponses maur-rassiennes ne valent rien. L'épouvantable holau-causte aurait du produire chez les gens d'Action française un ébranlement décisif de l'âme et du cœur, pour comprendre enfin ce peuple juif dans son mystère. Trop souvent, la conversion ne s'est pas faite. On préfère ratiociner et ra-bâcher. Quelle misère ! Je sais bien que Maurras et les siens ont toujours eu la haine d'Hitler, qu'ils ont été confondus devant l'horreur du génocide. Pourquoi avoir alors prononcé des mots, rabaché des rancunes et manifesté de la frénésie au moment où ce crime irrémissible était perpétré ? Qu'on ne s'étonne pas que la blessure ne puisse jamais se refermer chez les fils des victimes, et qu'ils tentent de trouver des racines à la mesure de ce qui ressemble trop à un délire ... Et pourtant j'ose affirmer que c'était plutôt de l 'entêtement. Il était clair que l'antisémitisme d'Etat lorsqu'il entrait dans les faits était horrible. Simone Weil chassée de son enseignement parce que juive... qui effacera ja-mais cette honte au visage de la France ?

    C'est bien la preuve qu'il y eut dans le natio-nalisme français des ombres qu'il serait fou et même impie de ne pas reconnaître. Est-ce une raison pour le disqualifier définitivement ? Ce

    n'en est pas une, en tout cas, pour le rendre responsable de forfaits qui ne sont pas les siens. Ce n'est pas une raison pour régler en quelques lignes le compte d'un Charles Péguy ! Sur l'au-teur de Notre Jeunesse, j 'avoue ne pas comprendre l'acharnement de Bernard-Henri Lévy. Incompatibilité de tempérament, de sensibilité ? Sans doute. Mais quel déchaîne-ment ! Il est des amis et de fort proches qui ne se sentent aucune affinité paysanne, et aux-quels le chant des métiers, le goût de la belle ouvrage paraissent niaiseries et archaïsmes im-buvables. Mais de là à en faire le lieu de la po-lémique contre le fascisme ! De même, il doit être permis d'aimer la couleur du monde, l'in-finie beauté de la création sans être un suppôt du paganisme ! Tout de même, le cosmos, le monde végétal et animal font parti du socle de notre humanité qui ne se réduit pas pour au-tant au cosmique et au biologique.

    Que Péguy ait été poète de l'incarnation et de l'enracinement, je ne vois pas en quoi cela plaiderait contre son christianisme. Urs Von Balthasar qui est un théologien peu suspect de laxisme a pu faire entre l 'auteur du Mystère de la Charité de Jeanne d'Arc, parmi les douze grands génies qui ont donné forme à l'esthéti-que chrétienne. Je ne vois pas en quoi les quel-ques pages vengeresses de Bernard-Henri Lévy disqualifieraient le grand chapitre de La gloire et la Croix ! Je veux bien que la plume de Péguy ait dérapé une ou deux fois. Mais il n'y a aucune raison sérieuse de nier à sa race la beauté de l'arbre de Jessé ou la gloire de la lignée de David. Tout de même, cher Bernard, s'il y a un mystère juif irréductible à travers l'histoire, cela est du aussi à la génération humaine, à la transmission des pères et des mères aux fils et aux filles. Et ce mystère là qui est grand est trahi, bafoué, humilié par les sottises de Gobineau, de Rosenberg ou de la nouvelle droite ...

    Mais Péguy ! Et son bergsonisme... non, là non plus, je ne puis être d'accord. Sans être bergsonien, comment ne pas reconnaître son gé-nie philosophique qui provoquait l'admiration de Bergson lui-même, cela n'a rien à voir avec du vitalisme, mais signifiait par exemple le sau-vetage du temps proprement humain, et faisait éclater les sottises déterministes de l 'époque, en évoquant avant Husserl ce présent originaire qui est le centre et l'agent même et le point de pas-sée du temps, (cf la note conjointe sur M. Des-cartes). Mais je suis conscient qu'avec ce débat, comme avec celui qu'il faudrait engager sur l'ar-gent, se décide la tenue du grand procès engagé par Bloy, Péguy, Bernanos et quelques autres sur la modernité, le moderne qui avilit, l'argent qui est le sang du pauvre et devient objet de spéculation. Il y a, il est vrai, dans ces pages, l'analyse prophétique du nihilisme contempo-rain, qui consiste à ne pas croire ce que l'on croit !

    Non décidément, cher Bernard-Henri Lévy, je ne pense pas que la part d'ombre de cette tra-dition française disqualifie à jamais le procès qu'elle intente à notre civilisation. Mais de cela, il nous faudra rediscuter. Bientôt j'espère.

    Gérard LECLERC

    Bernard-Henri Lévy -L ' i déo log ie française Ed. Grasset. En vente au journal franco 67 F.

    Royaliste 331 - page 9

  • HISTOIRE

    françoîs f bâtisseur et mécène

    L'historiographie romantique a été particulièrement sévère -Michelet en tête- pour François 1er, accusé d'être un roi léger et débauché. Le livre de Jean Jacquart nuance singulièrement ce noir portrait.

    Jean Jacquart reconnaît certes qu'en pol i t ique étrangère le roi de France fu t souvent broui l lon. Ré-trospectivement le désir d'installer la France dans le Milanais, si contraire à la pol i t ique du pré carré que l 'historiographie d'Ac-t ion française a prêtée aux rois de France, apparaît comme parfaite-ment déraisonnable. Mais c'est oublier que l ' I tal ie a fasciné tous les souverains de l 'Europe à commencer par Charles Quint qui y a vu un terrain d'élection pour réaliser ses ambit ions.

    Jacquart porte un jugement mi-tigé sur la façon dont François 1er a lutté contre Charles Quint. Il rappelle tou t d'abord que celui-ci avait beau être le «prince aux dix-sept couronnes», il ne dispo-sait pas d 'un potentiel économi-que et humain supérieur à celui du roi de France, potentiel au demeurant di f f ic i le à mobiliser en raison de la dispersion géogra-phique des états de Charles Quint . Dans ces condit ions, que Fran-çois 1er ne l'ait pas emporté dans sa lutte contre le Habsbourg, est à mettre à son passif.

    Du moins, après les impruden-ces des premières années qui dé-bouchèrent sur Pavie et la captivi-té du roi, celui-ci devint-il plus posé. Il sut, entre autres, user des talents diplomatiques de sa mère, Louise de Savoie, et eut l'audace de s'allier, à la grande indignation de la chrétienté, avec Soliman le Magnifique.

    De même Jacquart retire au roi l'essentiel du mérite des temps heureux connus par la France sous son règne : il montre en effet que le règne de François 1er s'inscrit dans la phase ascendante d'un

    cycle à laquelle de 1560 à 1720-1730, va succéder une période de crise. Il reprend là l'analyse qu'Emmanuel Le Roy Ladurie a rendu classique dans «Les Paysans du Languedoc» et l'ouvrage de Jacquart se conclut par cette phrase «ce bouillonnement fé-cond, ce dynamisme puissant importent plus au destin national que les joies et les peines de François de Valois».

    Mais le corps du livre conduit à nuancer pour le moins ce juge-ment lapidaire. Il y a en effet trois points qui en tou t état de cause doivent être laissés à l 'actif du Roi-chevalier. D'abord, malgré les dépenses dues aux guerres et l ' im-pécuniosité chronique du Trésor, l 'augmentation des tailles n'a pas été supérieure à la progres-sion du revenu agricole.

    Ensuite François 1er est un des grands bâtisseurs de l 'Etat mo-derne. Ce roi voyageur ne se lais-se par enfermer dans le carcan doré d 'un quelconque Versailles. Il sillonne son royaume, désireux de se rendre compte des problè-mes sur le terrain. Mais dans le même temps il met en place cet Etat d'off ices que va être la Mo-narchie d 'Ancien Régime. Ces of-ficiers commencent à s'émanci-per du pouvoir royal dans la me-sure où les offices deviennent hé-réditaires. Le Parlement de Paris commence déjà à vouloir contrô-ler le roi. Mais celui-ci le rappelle à l 'ordre et il sait montrer, fût-ce par des moyens brutaux et mê-me injustes comme l'affaire Sem-blançay, qu ' i l est le seul maître. L'idée d'une unif icat ion jacobine de la France, malgré l 'édit de Vil-lers-Cotterets, reste cependant étrangère au monarque.

    Et surtout François 1er a été un merveilleux mécène qui a sti-mulé la Renaissance en France. Sa protect ion a évité à Rabelais pas mal d'ennuis ainsi d'ailleurs qu'aux évangélistes modérés avant que l'affaire «des placards» ne vienne durcir le conf l i t religieux en France. Et sans François 1er, jamais l'école de Fontainebleau, celle du Primatice et du Rosso,-n'aurait vu le jour acclimatant en France le style italianisant. Par ailleurs est-il utile de rappeler que s'il est un roi à qui s'applique le vers de Charles Péguy «la Loire est une reine et les rois l 'ont ai-mé» c'est bien François 1er. Blois, Chambord, Azay-le-Ri-deau entre autres sont là pour en témoigner. En matière scien-t i f ique François 1er témoigne de

    la même curiosité d'esprit. Si face à la Sorbonne décadente il n'a pas créé à proprement parler le Collège de France -ce sera l'œu-vre d'Henri II- du moins en a-t-il jeté les bases en fondant des chai-res autonomes d'abord d'hébreu et de grec, puis de mathématiques, de philosophie, de médecine.

    Par delà toutes ses lacunes, ses sautes d'humeur, son inconstan-ce de caractère, François 1er n'en a pas moins fait f ruct i f ier l 'hérita-ge qu' i l avait reçu des mains de Louis X I I .

    Arnaud FABRE

    Jean Jacquar t -François 1er- Ed. Fayard. En vente au jou rna l f ranco 8 3 F.

    d e m a n d e d e d o c u m e n t a t i o n Si ce numéro vous a intéressé, si vous désirez avoir plus de

    renseignements sur nos idées, nos activités, les livres et brochures que nous avons publiés, remplissez le bulletin ci-dessous sans enga-gement de votre part. Nom : Prénom : Année de naissance : Profession : Adresse :

    désire recevoir, sans engagement de ma part une documentation sur le mouvement royaliste. Bulletin à retourner :

    ROYALISTE, 17, rue des Petits-Champs, 75001 PARIS

    un des grands bâtisseurs de l 'E ta t moderne

    Royaliste 331 - page 10

  • m ACTION ROYALISTE

    réagir et vite... C'est avec beaucoup d'atten-

    t ion que le Comité Directeur de la N.A.R. a examiné les nouvelles dispositions prises il y a trois se-maines par le Conseil des ministres au sujet des élections présidentiel-les.

    Ces décisions, dont Bertrand Renouvin a pu écrire dans Le Quotidien de Paris du 23 janvier «qu'elles portaient atteinte à la li-berté d'expression et à l'esprit des institutions)), modif ient , en les ag-gravant, les di f f icul tés et les embû-ches que le gouvernement mult i-plie pour empêcher la présenta-t ion de candidats «hors système».

    Hors de toute légalité, le pou-voir a décidé que les signatures de parrainage seraient recueillies sur un formulaire imprimé par ses soins et expédié, à une date choi-sie par lui, aux élus. Ces derniers devront eux-mêmes retourner par la poste l ' impr imé rempli au Conseil consti tut ionnel. Le can-didat et ses représentants per-dent ainsi tout contrôle sur le processus, ne sachant ni si tous les maires ont bien reçu les for-mulaires, ni s'ils l 'ont signé, ni s'il l 'ont renvoyé, ni si l'envoi est bien arrivé au Conseil constitu-t ionnel...

    A un journaliste qui lui faisait remarquer que les candidats, avec ces nouvelles règles, ne pourraient plus savoir s'ils avaient atteint le nombre de signatures nécessaires, M. Bonnet a eu le f ront de répon-dre en riant «il le verront bien, en consultant au Journal Off iciel la liste des candidats retenus !»

    En fait , on assiste pratique-ment à la création, contrairement à l'esprit de la const i tut ion, d'une véritable élection primaire sur

    un corps électoral particulier ou le bul let in de vote est remplacé par l ' impr imé de parrainage.

    Face à cette situation nous allons être obligés de fourni r un pf for t supplémentaire. Nous avons à l'heure actuelle 406 promesses de signatures, il faudrait que nous en ayons au moins 800 pour être à l 'abri de toute surprise. Les moyens que nous avons mis en œuvre jusqu'à ce jour ne suff i ront pas pour cela, et il nous faut contacter la total i té des maires de France pour être sûr d'atteindre cet object i f . La Comité directeur a donc décidé de réaliser une do-cumentation spéciale qui sera en-voyée systématiquement à chacun des 40.000 parrains potentiels pour présenter et expliquer la can-didature de Bertrand Renouvin.

    Inuti le de préciser que ceci re-présente un investissement maté-riel et financier très important et hors de proport ion avec le budget que nous avions précédemment prévu. Il faut donc que nos lec-teurs réagissent très vite par leurs souscriptions et leurs dons. D'au-tant plus vite, que, en raison de l'urgence, nous avons engagé les dépenses sans attendre : la con-fection des étiquettes-adresses par ordinateur a déjà commencé.

    Parallèlement les visites et les coups de téléphone aux maires doivent continuer afin d'annon-cer l'arrivée de cette documen-tat ion (dans la deuxième quin-zaine de février) ou d'en appuyer l 'effet quand elle aura été reçue.

    Devant l ' importance de l'enjeu personne ne doi t manquer à son poste.

    Y van A U M O N T

    notez-le

    • PARIS - mercredis de la N.A.R Tous les mercredis, conférence débat à 20 h dans les locaux du journal, 17, rue des Petits-Champs (4e étage).

    Mercredi 4 février. Conférence-débat par Jean Ebstein-Langevin, avocat à la Cour, sur le thème «La police dans la cité».

    Mercredi 11 février. Conféren-ce de Gérard Leclerc : «Science et conscience».

    Mercredi 18 février. Conféren-ce-débat par Jérôme Bindé, jour-naliste, sur le thème «Quel avenir pour l ' I tal ie d 'aujourd 'hui ?».

    Les lecteurs de Royaliste sont conviés à ces réunions qui leur permettront de prendre contact avec les principaux rédacteurs du journal et les animateurs de nos activités à Paris. Vers 22 heures, à l'issue de la conférence, un re-pas f ro id est servi qui permet de poursuivre autour d 'un pot les conversation amorcées (participa-t ion aux frais du repas : 1 0 F).

    • VERSAILLES - Y V E L I N E S Le 19 février à 20 h45, réunion avec la présence de Bertrand Renouvin, sur le thème «A l'heu-re des présidentielles, que propo-sent les royalistes ?». La réunion aura lieu au Centre 8, 8 rue Porte du Bue à Versailles (près gare SNCF-Chantiers).

    Toute correspondance pour la Fédération des Yvelines est à adresser à NAR - B.P. 120 -78003

    Versailles cedex.

    • ANGERS - Toute la correspon-dance destinées à la section d 'An-gers doi t désormais être adressée au local : N.A.R., 4, rue Paul Bert 49000 Angers. La précé-dente adresse à la Boîte postale n'est plus valable.

    • C A L E N D R I E R DE B E R T R A N D R E N O U V I N

    Pour les semaines à venir voici les principaux déplacements pré-vus par Bertrand Renouvin. Tous les renseignements précis sur ces déplacements peuvent être obte-nus auprès de nos sections locales dont les adresses sont données ci-dessous.

    Orléans - 4 février - M. Lemai-gnen, 12, rue Eudoxe Marcille 45000 Orléans

    Lyon - 6 février - NAR - B.P.44 69397 Lyon Cedex 3

    St Etienne - 7 février -Le Puy - 7 février - Mme Gous-

    seau B.P. 134 - 42012 St Etienne Cedex

    Dol de Bretagne -10 et 11 fé-vrier. N.A.R. B.P. 2 5 3 6 -35025 Rennes Cedex

    Brive - Tulle 21 février. M. Vialard, 14, rue Al f red de Mus-set - 19100 Brive

    Nantes - 25 février - NAR B.P. 203 - 44007 Nantes Cedex.

    • SERVICE « L I B R A I R I E » Dans nos locaux (17, rue des Pe-tits-champs - Paris 1er - 4e étage) fonct ionne le «service librairie». Des centaines de titres sont là à votre disposit ion, aux même prix que dans n ' importe quelle librai-rie. Nous pouvons vous procurer -dans les 8 jours- tout livre actuel-lement disponible chez les édi-teurs. Nous diffusons également un certain nombre d'ouvrages en exclusivité. Ajoutons à cela «les soldats de plomb de la Vendée mi-litaire» et divers articles royalis-tes.

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    Royaliste 331 - page 11

  • EDITORIAL Faut-il craindre Reagan ? La gauche le

    dit , regrettant l'ancien président qui au-rait été, par delà ses hésitations et ses échecs, un défenseur de la cause des droits de l'homme. Au contraire, en Eu-rope et en Amérique latine, la droite sa-lue l'homme neuf qui saura restaurer la puissance des Etats-Unis. Mais peut-on appliquer ainsi nos schémas, toujours marqués par l'idéologie ? A trop écouter les discours électoraux, la politique amé-ricaine risque de nous échapper, dans la continuité essentielle de son projet.

    Car l'opposition entre Reagan le dur et Carter le tendre a toutes les chances de s'estomper dans les mois qui viennent, l'extrémisme supposé de premier se résorbant, comme l'humanisme du se-cond, dans un solide réalisme. Certes, dans les premières semaines de son man-dat, Jimmy Carter voulut considérer les droits de l'homme comme un «absolu». Face au rival soviétique comme à l'égard de ses protégés latino-américains, il t int à affirmer son souci en recevant Boukov-ski à la Maison-Blanche et en réduisant l'aide militaire à l'Argentine et à l'Uru-guay. Mais les belles paroles du message d'adieu de Carter, qui tentent de mani-fester la continuité de cette exigence po-litique et morale, ne peuvent faire ou-blier que la Maison Blanche a rapidement privilégié la défense des intérêts améri-cains (1) : en 1977, le Département d'Etat n'a-t-il pas demandé au Congrès de maintenir l'aide à l'Argentine, à l'Iran, au Pérou, à Haïti, tandis qu'en 1978 l'aide militaire à la Corée du Sud augmentait de 77% ? Sans doute Carter avait-il l ' intention de donner à l'impéria-lisme américain un fondement plus «moral», en encourageant, dans les pays soumis, des gouvernements plus «modé-rés». Mais le maintien de la domination américaine demeurait l'objectif prio-ritaire.

    QUEL CHANGEMENT?

    L'arrivée de Ronald Reagan ne devrait donc pas entraîner un changement fon-damental : la même politique impérialis-te sera poursuivie, mais cette fois avec bonne conscience et ouvertement. Le nouveau Président ne changera pas la face du monde : certes, la tendance est à la fermeté, à la recherche de plus de puissance. Mais les négociations sur les armements reprendront avec les Soviéti-ques, qui ont bien accueilli l'élection de Reagan. Mais la prudence commandera les relations avec l'Iran qui, chargé de tous les crimes, ne doit pas pour autant passer dans le camp adverse. Les dépen-ses d'armement seront augmentées, mais le principe en avait déjà été admis par

    par bertrand renouvin

    craindre reagan ?

    Carter pour l'exercice 1981-1982. Quant à la politique de Camp David, elle de-vrait être poursuivie, après les élections israéliennes. Ainsi, rien ne permet d'en-visager une modification brutale des équilibres mondiaux.

    Cela ne signifie pas, cependant, qu'i l faille regarder l'arrivée de Reagan au pouvoir avec sérénité. Même si l'extré-misme de la nouvelle équipe se transfor-me aujourd'hui en une simple, claire et ferme défense d'intérêts toujours iden-tiques, les Etats Unis risquent de peser encore plus lourdement sur les pays qui leur sont soumis. En Europe bien sûr, que Reagan voudrait reprendre en mains, en brandissant comme d'habitude la me-nace des chars russes. Mais aussi, et dès à présent, en Amérique latine. C'est là que le changement se fera le plus cruel-lement sentir. Sans chercher à mettre f in au régime des tortionnaires argentins et chiliens, Carter avait tnut de même lais-sé la révolution sandiniste s'accomplir, et favorisé, par exemple, une évolution libé-rale au Salvador.

    Politique timide, qui ne faisait guère reculer l'horreur : comment oublier les dix mille assassinats commis au Salva-dor en 1980, l'exécution, au Guatemala, de centaines de personnalités, et la poli-tique de répression ouvrière et d'élimi-nation physique appliquée en Bolivie ? Un espoir ténu demeurait cependant, qui est aujourd'hui détruit. La référence aux droits de l'homme est écartée, l'aide américaine à la junte salvadorienne a été rétablie dès le 13 janvier, le Nicaragua est menacé par les bandes somozistes : par-

    tout la subversion et la terreur sont à l'ordre du jour, pour que triomphe la pax americana.

    LE JEU DE LA FRANCE

    Et la France ? Comparé à celui des na-tions martyres d'Amérique latine, son sort paraît bien doux. Mais il importe qu'elle conserve sa pleine liberté, sans la-quelle notre pays ne pourrait avoir de projet diplomatique et de politique d'ai-de aux nations opprimés par les impéria-lismes. Il convient en effet de rappeler à ceux qui se réjouissent de l'élection de Reagan parce qu'ils en attendent une plus grande sécurité, que les Etats-Unis n'ont cessé d'être pour nous le principal danger. Au risque de choquer, il faut dire à nouveau que l'impérialisme soviétique, évidemment détestable, représente seule-ment une menace militaire, que notre force de dissuasion est en mesure d'écar-ter. En revanche, l'impérialisme améri-cain fait peser sur notre pays la menace d'une aliénation politique, économique et culturelle : — les Etats-Unis ont toujours conçu l'Al-liance atlantique sous leur direction ex-clusive et pour le service des intérêts américains en Europe et dans le monde. — l'emprise économique américaine n'a cessé de se renforcer dans notre pays, que ce soit pas le contrôle direct des en-treprises ou par l'effet de la stratégie perverse des multinationales. — la diffusion massive de la culture amé-ricaine et l ' imitation forcenée de ce pré-tendu moldèle conduit à une disparition progressive de notre identité.

    Une volonté de puissance est à l'œu-vre, violente en Amérique latine, insi-dieuse et facilement acceptée ici, mais partout destructrice de la liberté. Rien n'est plus urgent que de s'y opposer. Le général de Gaulle avait montré qu'une telle résistance était possible, en France et dans les nations opprimées. Il ne serait pas diff ici le de reprendre son projet. Mais celui-ci n'est plus aujourd'hui que le prétexte des mièvres discours présiden-tiels, et la campagne électorale ne nous dira rien des intentions d'une gauche toujours tentée par l'atlantisme. Fasci-née, mollement consentante ou oublieu-se de l'essentiel, la presque totalité de la classe politique consent à la colonisa-tion de son pays. C'est grave pour nous. Et c'est grave pour les peuples soumis à l'impérialisme, qui attendent autre chose de notre pays.

    Bertrand RENOUVIN

    ( 1 ) Vo i r Le Monde d ip lomat ique de novembre 80 (2) Cf l 'excel lent ouvrage de Jacques Thibau : La

    France colonisée.