rohrbacher. dufour. histoire universelle de l'Église catholique. [1842-1849]. t01....

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8/7/2019 Rohrbacher. Dufour. Histoire universelle de l'Église Catholique. [1842-1849]. T01. histoireuniverse01rohr http://slidepdf.com/reader/full/rohrbacher-dufour-histoire-universelle-de-leglise-catholique-1842-1849 1/642 }^> ^^ *»H1^ y*-

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    HISTOIRE UNIVERSELLE

    L'GLISE CATHOLIQUETOME PREMIER.

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    PROPRIETE.

    CET OUVRAGE SE TROUVE AUSSI :Bksanon,

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    77HISTOIRE UNIVERSELLE

    L'GLISE CATHOLIQUEL'ABBE ROHRBACHER

    PRCDE D'DNE NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTERAIRE PAR CHARLES SAINTE-FOIAUGMENTE DE NOTES INDITES DE L'AUTEUR

    COLLIGES PAR A. MURCIER , ANCIEN LVE DE l'COLE DES CHARTESET SUIVIE d'un ATLAS GOGRAPHIQUE SPCIALEMENT DRESS POUR L'OUVRAGF

    PAR A. H. DUFOUR'Apx,Yi irvrwv urlv r, xa8Xi!CTi xat -yta 'ExxXy.afa.

    S. Epiphane , I. I, c. 5, Contre les hrsies.Ubi Petrus, ibi Ecclesia.

    s. Ambros., in psalm. 40, a. 30.

    3" DITIONTOME PREMIER.

    )^^^ ^/^ ^1-^^. 9/.PARIS,

    GAUME FRRES, LIBRAIRES -EDITEURS,HUE CASSETTE , 4.

    1857Droits de traduction et de reproductioQ rservs

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    NOTICEBIOGRAPHIQUE ET LITTRAIRE

    SUR

    L'ABB ROHRBACHERPAR

    CHARLiEi !SAIITE-FOI

    M. l'abb Ren Franois Rohrbacher naquit Langatte, audiocse de Nancy, le 27 septembre 1789. Il tait fils de NicolasRohrbacher, matre d'cole de cette paroisse, et de CatherineGantener. Ses parents taient pieux, et donnrent leur filsune ducation chrtienne. A cette poque de bouleversement po-litique et religieux, les tudes du jeune Rohrbacher durent trefort ngliges ; mais le dsir qu'il avait de s'instruire, et sa vo-lont ferme et persvrante surent vaincre les obstacles que luisuscitaient les circonstances. Il dut presque uniquement sontravail les connaissances qu'il acquit dans sa jeunesse. L'attraitvers l'tat ecclsiastique s'veilla de bonne heure en lui, favorispar les leons et les exemples qu'il recevait dans sa famille. Ilentra au grand sminaire de Nancy, et y reut les premiers or-dres de la clricature, le 6 avril 1 811 . Un an plus tard, le 21 mars1812, il reut le sous-diaconat, l'ge de 23 ans. Un documentretrouv dans ses papiers, nous fait connatre les admirablesdispositions que la grce produisit en son me, au moment o ilallait s'engager irrvocablement au service des autels. Nous nouscontenterons d'en citer ici les passages les plus importants :

    Vous avez dit, mon divin Sauveur : Si quis vultpost me ve-nire, abneget semetipsum et tollat crucem suam quotidi et sequa-tur me : oh ! donnez-moi la force de me renier moi-mme, dehar et de crucifier ma chair, et faites-moi la grce d'tre fidle

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    VI NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREaux rsolutions suivantes, que je vous conjure de rendre efficacespar la vertu de votre croix :

    (c D'abord, je mortifierai ma volont par une stricte obser-vance de tous les points de la rgle, je rechercherai les occasionsd'obir aux autres, et toutes les fois que je ne l'aurai pas fait, ouque je le ferai avec difficult, je dirai un Pater et un Ave^ et jem'imposerai une pnitence corporelle.

    2" Toutes les fois que je sentirai une envie naturelle et in-quite de faire quelque chose qui n'est pas command, ou que jepeux omettre, je ne le ferai pas, je tcherai sans cesse de con-trarier ma curiosit, mes rpugnances et mes fantaisies.

    3 A tous les repas, je mortifierai mon got et mon apptit,en quelque manire que ce soit, me rappelant souvent ce verset:Dederunt in escam meam fel^ et in siti mea potaverunt me aceto.

    4 Toutes les premires fois que je m'veillerai la nuit, jesortirai de mon lit, et me prosternant en terre, je dirai : cruxave, etc., et je ferai quelque mortification corporelle.

    Pour pratiquer l'humilit, que je n'espre, mon Jsus !que de votre infinie misricorde, (1") J'aurai toujours un grandsoin qu'il n'y ait rien dans mon extrieur, ma dmarche, monton, mes paroles, qui sente l'orgueil ou la vanit. (2") Je ne diraijamais rien ma louange, soit directement, soit indirectement,et j'viterai de parler de ma propre personne. (3) Toutes les foisqu'il m'arrivera quelqu'humiliation, je dirai un Pater et un Avepour celui qui me l'a faite; et si j'en ai t fch, j'en diraideux, et je m'imposerai de plus une pnitence; j'aurai uneaffection et des intentions particulires pour celui qui m'aurahumili

    Et vous, mon Jsus crucifi, auteur et consommateur de mafoi, sans lequel je ne peux rien, qui m'avez tir vous par votregrce ; ds aujourd'hui je veux mourir entirement au pch, etne plus vivre pour moi, mais pour vous seul, mon divin Jsus!qui tes mort pour moi. Ou plutt, je ne veux plus vivre dutout ; mais je veux, je dsire, je vous demande instamment parles douleurs de votre croix, que vous viviez seul en moi ; je neveux plus savoir que vous et votre croix : Niliil scire nisi Jesum,et hune crucifixum, je ne veux plus rien apprendre, dsirer, en-treprendre, qu'avec vous et par vous, ut sive vigilemus, sive

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. VIIdormiamus, simulcum illo vivamus. Seigneur Jsus, qui m'avezinspir ces bonnes rsolutions, faites-moi la grce d'y tre fidle.Je veux vous suivre, sequar te quocumque ieris^ non pas parce queje le veux, ou par mes propres efforts ; mais j'espre en votreineffable misricorde : non volentis neque currentis, sed misercntisest Dei.

    Nous voyons dj dans ces sentiments du jeune lvite le germede cette foi vive et ardente, qui fut le caractre distinctif de sapit. Il reut le diaconat, deux jours seulement aprs le sous-diaconat; et il fut ordonn prtre le 21 septembre 1812. Il n'avaitpu consacrer que deux annes aux tudes ecclsiastiques dans legrand sminaire ; de sorte qu'il dut lui-mme, son amourpour l'tude, un travail persvrant tout ce qu'il avait acquis.Et cependant, partir du jour o il reut le sacerdoce, jusqu'celui o il s'attacha M. de Lamennais, il se voua aux fonc-tions du ministre ecclsiastique avec un zle qui ne se dmentitjamais. Mais il savait que les lvres du prtre sont les dposi-taires de la science, et qu'il doit trouver dans l'tude et la prireun dlassement aux travaux que lui impose le soin des mes :aussi consacrait-il la lecture de quelque livre srieux les ins-tants dont il pouvait disposer. Et ils taient bien courts, cettepoque o les vides du sanctuaire, les besoins des populations,et l'tat de la socit, au sortir d'une rvolution qui en avaitbranl toutes les bases, foraient chaque prtre se multiplierpour ainsi dire, et faire ce que trois ou quatre auraient fait peine en temps ordinaire. On nous saura gr de citer ici les pa-roles que cet homme de Dieu crivit sur le point d'tre ordonnprtre.

    Au nom de la sainte Trinit, Pre, Fils et Saint-Esprit, sousl'invocation de Marie, ma bonne mre, de mes saints patrons, detous les saints prtres, de mon saint ange et de tous les saints,le 15 septembre de l'an de grce 1812, si, R. F. R. diacre parla grce, mais indigne pcheur par mon orgueil, ma vanit, majalousie, ma prsomption, suis entr en retraite au sminaire deiVancy, pour prparer, avec la grce de mon Jsus, mon indi-gnit inconcevable la rception du sacerdoce.

    ce mon Dieu ! pntrez-moi do la crainte de vos terribles ju-gements, afin que j'emploie bien ces prcieux instants, confige

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    VIII NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREtimor tuo. Brisez mon orgueil, videz mon cur de moi-mme,afin qu'il soit prt recevoir abondamment votre grce, et queje n'aie plus d'autres penses, d'autre dsir, d'autre volont, quevous, mon Dieu, mon hritage, mon attente, ma seule confiance,mon tout; sainte Vierge, et tous les saints, obtenez-moi cette grce.

    ma bonne et douce mre ! On nous a parl de votre bontet de la dvotion que nous devons avoir envers vous. Je me con-sacre de nouveau votre service. Je rciterai, tous les jours de mavie, le chapelet en votre honneur, et je ferai outre cela quelquebonne pratique pour l'amour de vous. ma bonne mre ! secou-rez-moi en ce moment; je dois tre sacr prtre, faites que jedevienne bon prtre pour l'amour de Jsus et de vous, ou obte-nez ma mort plutt que d'tre ordonn pour offenser Jsus etvous contrister. Je me remets entirement entre vos mains pourmon ordination; secourez-moi, comme vous l'avez dj fait sisouvent. Je voue ma personne, ainsi que mon futur ministre, votre sacr cur et celui de Jsus. Oh ! souvenez-vous que ja-mais pcheur ne vous invoqua en vain.

    L'abb Rohrbacher fut nomm le 1" octobre 1812, vicaire dela paroisse de Wibersviller, et six mois aprs Lunville. Sonzle pour le salut des mes l'engagea se vouer aux missions.Rentra donc chez les missionnaires diocsains en 1821, et il yresta jusqu'en 1826. Il fut nomm en 1823 suprieur de la mai-son. Il puisait dans sa pit toute son loquence, et sa parole,empreinte de la grce divine qui remplissait son cur, avait uneforce laquelle ne rsistaient point les bons habitants de la Lor-raine, et qui produisait en eux des fruits abondants de bndic-tion et de salut. Il avait de ces succs qui rjouissent le cur duprtre, sans nourrir sa vanit, parce qu'ils sont le tmoignage del'efficacit de la grce, plutt que du pouvoir de la parole hu-maine. Souvent, lorsqu'il descendait de chaire, ses auditeurs,mus par ses discours, se pressaient autour de lui, hommes,femmes et enfants, afin de lui baiser les mains. Il pouvait peines'arracher cette foule, dont le pieux empressement alarmait la fois son humilit et son extrme modestie ; et quelquefois ilrejetait ces tmoignages de reconnaissance et d'admiration avecune rudesse qui n'chappait point ses confrres, et dont le sou-venir gayait ordinairement le repas du soir.

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    SUR L'ABBE ROHRBACHER. IXOn pourrait croire qu'une Me aussi occupe que celle d'un mis-

    sionnaire absorbait tous les instants de l'abb Rohrbacher, et nelui laissait aucun loisir pour l'tude. Mais le dsir qu'il avaitde s'instruire pour la gloire de Dieu et l'utilit du prochain, luifaisait trouver le temps de lire les ouvrages modernes qui pou-vaient intresser la religion. Car il tait persuad qu'un prtre nedoit pas rester tranger au mouvement intellectuelquis'accomplitautour de lui ; parce que les armes dont se servent les ennemisde la religion pour la combattre changeant avec les sicles, lesarmes de ses apologistes doivent changer galement. 11 tenaitdonc bien connatre le champ de bataille oii taient en prsenceles deux armes qui ne cessent de se combattre depuis l'originedu monde. C'est ainsi qu'il lut V Histoire de la religion de Jsus-Christ^ par Stolberg, et la Restauration de la science politique,par M. de Maller. Il lisait aussi le Catholique de Mayence ou deSpire, qui tait alors comme l'entrept des ides catholiques,franaises et allemandes. Cette revue dfendait la religion avecun talent remarquable ; et ses trois principaux rdacteurs occu-pent aujourd'hui les trois grands siges de Cologne, de Spire etde Strasbourg.

    M. de Lamennais dirigeait alors en France le parti catholique, la tte duquel l'avait plac son Essai sur Vindiffrence. Le gou-vernement, alarm des doctrines qu'il avait entrepris de rha-biliter, crut en arrter la propagation, en traduisant devant lestribunaux le prtre loquent qui s'en tait constitu le dfenseur.L'esprit de M. Rohrbacher, toujours veill, toujours attentif aumoindre cho du mouvement catholique qui commenait alors,s'intressa vivement, on le pense bien, cette affaire. Indigndes tracasseries et des perscutions dont M. de Lamennais taitl'objet, il commena de ressentir pour lui cet enthousiasme quepartageaient alors les plus nobles curs, et qui exera sur toutle reste de sa vie une si grande influence. Ce fut donc un senti-ment gnreux, de dgoiit pour l'injustice, et d'amour de l'op-prim, qui tablit entre M. de Lamennais et lui les premiersliens. Mais avant d'entrer dans le rcit de ces relations, il est n-cessaire de remonter plus haut, et de reprendre dplus en plusloin l'histoire du mouvement catholique en France.

    Dieu, dont la misricordieuse sagesse sait merveilleusement

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    X NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTP.AIREproportionner les moyens la fin qu'il se propose, et se plieraux dispositions des sicles qui fuient sous son regard ternel,Dieu, voulant agir sur une gnration d'hommes qui avaientferm ses temples, chass ses prtres et aboli son culte, confia des mains laques la prcieuse semence qui devait rformer lesides et les sentiments de la nation franaise, et prparer unegnration nouvelle. 11 fallait d'abord dblayer le sol encombrpar les ruines que la rvolution et l'impit avaient faites ; ilfallait dtruire ou dissiper cette masse de prjugs odieux, dontl'ignorance et la mauvaise foi avaient obscurci les questions lesplus importantes en philosophie, en politique, en histoire et enthologie. Pour ce travail de manuvres, des laques suffisaient :c'tait eux de prparer les voies aux ouvriers chargs de latche plus noble et plus difficile, de reconstruire la socit sur desbases plus solides. Trois laques, M. de Maistre, de Bonald etChteaubriant furent choisis de Dieu pour ce travail. Tous lestrois se mirent l'uvre avec zle et persvrance, sans se ren-dre bien compte peut-tre de son but et de la mission providen-tielle qu'ils avaient remplir. Et par une disposition singulire,qui prouve bien jusqu' quel point les mes taient malades etdbiles cette poque, le dernier des trois, malgr son infrioritrelative, malgr ses dfauts, ou plutt peut-tre cause d'eux, aeu sur l'opinion publique une influence beaucoup plus tendueque les deux autres. Mais l'action de ces derniers, de M. de Mais-tre surtout, quoique plus restreinte, a t plus profonde et plusdcisive ; car leurs livres, trop srieux et trop levs, pour tregots de tous les esprits, s'adressaient principalement aux intel-ligences d'lite, qui finissent toujours, aprs un temps plus oumoins long, par conqurir l'ascendant d leur supriorit.

    Aprs ces trois hommes parut M. de Lamennais, qui recueilliten quelque sorte leur hritage, rsuma leur action, et concentraleurs efforts. C'est de lui que Dieu se servit pour faire passer en-tre les mains du clerg la puissance intellectuelle qui avait tjusque-l exerce par des laques. Le progrs devint ds lors plussensible, plus rapide et plus soutenu : on y reconnaissait l'effetmanifeste de cette force surnaturelle, que donnent le caractresacerdotal et une union plus intime avec celui qui meut son gret gouverne les intelligences. Frapp du dsordre qu'avaient

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XIproduit dans les esprits, les vaines thories de la philosophie mo-derne, M. de Lamennais comprit que la source du mal taitprincipalement daqs cette indpendance, que la rvolution poli-tique du dix-neuvime sicle, combine avec la rvolution reli-gieuse du seizime, avait introduite dans toutes les classes de lasocit. Il essaya donc de rtablir le principe d'autorit, mconnuou nglig partout, et de lui rendre la place qui lui appartient,dans l'ordre philosophique aussi bien que dans l'ordre religieux.Mais sentantqu'un homme seul tait trop faible pour accomplir unaussi vaste dessein, il rsolut de fonder une congrgation reli-gieuse, dont le but principal serait de dfendre en philosophieet en thologie le principe d'autorit. Il confia son projet plu-sieurs ecclsiastiques distingus, qui, rpondant son appel,se grouprent autour de lui , comme autour de leur chef,afin de combattre sous sa conduite pour la cause de Dieu et del'glise.

    Cet homme extraordinaire, en qui le gnie apparaissait soutenupar la foi, et couronn de l'aurole du prtre, avait reu de Dieu,avec beaucoup d'autres dons, celui d'attirer, comme par unevertu secrte, les esprits levs et les curs gnreux. Les ca-tholiques, inquiets des tendances d'un gouvernement, qui, mal-gr ses bonnes intentions, compromettait l'Eglise, en l'encha-nant l'Etat, et en laissant peser sur elle cette masse de lois quela dfiance et la jalousie avaient inspires aux diverses poquesde notre histoire, les catholiques sentaient le besoin d'un chef,qui pt donner une voix leurs vux , une direction unique leurs efforts. Ce chef, ils crurent le reconnatre dans M. de La-mennais, et aussitt, prtres et laques, tous coururent lui,comme on va vers la lumire, avec une simplicit, une confianceet un dvouement sans bornes. Si tant d'abngation et de gnro-sit de la part des disciples ne pt prserver le matre des at-teintes de l'orgueil. Dieu du moins leur tint compte de leursbonnes intentions, en ne permettant pas qu'un seul d'entre euxle suivt dans sa chute. Et si la dfection de cet homme n'a pointeu d'gale dans l'histoire de l'glise, l'isolement o il s'est trouv,aprs s'tre spar d'elle, est sans exemple aussi, et montre bienque ses disciples, en s'attachant lui, n'avaient t mus, ni parun motif de vaine gloire, ni par un entranement factice ; mais

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    XII NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREqu'ils n'avaient eu en vue que la gloire de Dieu et le bien de lasainte Eglise.

    Parmi ces disciples M. Rohrbacher tait un de ceux quitaient entrs le plus avant dans l'esprit et dans les desseins dumatre. C'est aussi celui de tous qui a entrepris et excut l'u-vre la plus importante par son but, la plus considrable par letemps, la patience et le travail qu'elle lui a demands, par lesdifficults que son auteur a d vaincre pour la mener terme.Aprs avoir pass quelque temps auprs de JM. de Lamennais, Paris d'abord, puis la Chesnaie, maison de campagne situedans le diocse de Rennes, il fut envoy en 1828 Malestroil,au diocse de Vannes, o tait le noviciat de la congrgation queM. de Lamennais voulait fonder. L il fut charg de diriger lestudes thologiques des jeunes gens qui s'y prparaient leurmission future. Les tudes philosophiques taient particulire-ment diriges par M. l'abb Blanc, de pieuse mmoire, qui taiten mme temps suprieur de la maison, et qui a laiss im abrgde i histoire ecclsiastique, remarquable par la grandeur duplan, j)ar la justesse des vues, et par l'rudition qu'elle suppose.C'est Malestroit que l'abb Rohrbacher commena le livre quidevait faire sa gloire, si l'on peut parler de gloire, quand il estquestion d'un homme qui s'oubliait, ou plutt s'ignorait lui-mme, et qui a su conserver jusqu' la mort cette modestie en-fantine, que l'humilit chrtienne peut seule donner ; il travaillad'abord, comme pour s'essayer, l'poque et le })ontificat de saintGrgoire VIL Nous nous rappelons en avoir entendu de sa bou-che les premiers chapitres, et nous regardons comme un insignehonneur d'avoir pu jouir des lueurs d'un tel matre, et d'avoirvu jaillir pour ainsi dire les premiers flots de ce grand fleuve, quidevait purifier l'histoire ecclsiastique, altre depuis si long-temps par les prjugs, l'ignorance et la mauvaise foi.Une des qualits les plus remarquables de M. de Lamennais,c'tait un coup d'il prompt et sr la fois, qui lui faisait saisiren ceux qu'il voyait les aptitudes particulires de leur esprit ; etun talent merveilleux pour les pousser dans leurs voies. Les dis-ciples recevaient de lui, moins une direction continuelle et dedtail, qu'une impulsion gnrale, laquelle une fois donne,abandonnait ses propres inspirations l'intelligence qu'elle avait

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    XrV NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREL'abb Rohrbacher tait plus distingu encore par le caractre

    que par l'intelligence. C'tait un homme d'une droiture, d'uneloyaut, d'une sincrit d'esprit et de cur vraiment admirables.Naturellement vif dans la discussion, parce qu'il avait des con-victions profondes et trs-arrtes, et qu'il avait la conscience dene chercher en toute chose que la gloire de Dieu et l'utiUt del'glise, il souffrait avec peine la contradiction; et sa nature,rude et sincre, s'chappait quelquefois en des expressions queson cur dsavouait ensuite, et que sa conscience, timore commecelle d'un saint, se reprochait svrement. Souvent alors, pour sepunir et s'humilier, il demandait pardon celui qu'il craignaitd'avoir offens ; et il faisait cela avec la simplicit d'un enfant.Nous avons t tmoin nous-mme de plus d'un fait de ce genre.Une fois entre autres, dans l'un de ces entretiens familiers, maistoujours svres, qui terminaient chaque repas Malestroit,s'tant anim plus que de coutume, il adressa l'abb Blanc, soninterlocuteur, quelques paroles un peu vives. Lorsqu' la fin durepas, nous fmes tous runis, selon la coutume, la chapelle,M. Rohrbacher, d'une voix mue, nous dit : Messieurs, je vousdemande pardon du scandale que je viens de vous donner, priezle bon Dieu de me pardonner et de me corriger. Nous sor-tmes tous mus, difis de tant d'humilit et remplis d'admira-tion pour un homme qui savait si bien recheter les moindresfautes.

    Sous cette corce rude et grossire battait un cur tendre,accessible tous les nobles sentiments, et aux affections les plusdlicates, capables d'enthousiasme, gnreux, dvou, et d'unefidlit inaltrable. Sa pit vive et tendre clatait surtout pen-dant le saint sacrifice de la messe ; bien souvent, aprs la con-scration, son visage tait baign de larmes, et sa voix mle etforte, affaiblie par les sanglots.

    Aprs Notre-Seigneur Jsus-Christ et la sainte Vierge, iln'aimait rien autant que saint Pierre : On le voyait s'animer,quand il parlait de lui et des prrogatives que Notre-Seigneur luia accordes ; et lorsque, le dimanche, au salut, il entonnaitl'antienne : Tu es Petrus, qu'on avait coutume d'y chanter, sonvisage s'enflammait, et sa voix prenait une tendue, une puis-sance et un accent inaccoutums. Jamais aucun chrtien ne fut

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XVplus docile, plus tendrement soumis au Saint-Sige, et ceux qui,aprs les deux Encycliques de Grgoire XVI , lesquelles con-damnrent les doctrines politiques et philosophiques de son ma-tre, ont os souponner sa sincrit, et l'ont accus d'avoir misquelque restriction dans son obissance, ne connaissaient ni sahaute vertu, ni la droiture de son caractre. Un mot du pape luiaurait suffi pour lui faire rtracter ses opinions les plus chres ;et si, aprs les deux Encycliques, il a paru favoriser dans sonhistoire, avec trop d'ardeur peut-tre, certaines doctrines quisemblaient se rapprocher de celles que le pape avait signales ,c'est qu'il les entendait dans un sens bien diffrent de celui quele Saint-Sige avait en vue, et qu'il les croyait propres releverou confirmer les prrogatives du vicaire de Jsus-Christ.

    Le sentiment du juste tait singulirement dvelopp en lui.La moindre injustice le rvoltait ; et quand une cause qui luiparaissait bonne et lgitime tait opprime, il s'y attachait avecl'ardeur et l'opinitret de son caractre. C'est ainsi que s'tabli-rent ses relations avec M. de Lamennais. Il l'aurait moins aimet admir, si ses adversaires avaient t plus justes, ou du moinsplus modrs et plus charitables son gard. M. de Lamennais,frapp, comme nous l'avons dit plus haut, de l'affaiblissementdu principe d'autorit, entreprit de le rtablir, en appuyant surlui tout l'ordre des connaissances humaines. Sa mthode offraiten apparence l'avantage d'une grande simplicit, puisqu'elledonnait la foi et la science la mme base, la croyance autmoignage. Mais il tait difficile qu'un esprit aussi absolu et aussioutr que le sien ne pousst pas jusqu' l'exagration les cons-quences d'un principe une fois admis par lui. S'il s'tait contentde prsenter le tmoignage des hommes, ou le sens commun,comme le critrium qui sert en gnral contrler et con-firmer les autres ; en ce sens que, pour s'en rapporter ses vi-dences, chacun doit s'tre mis en rapport avec les autres hommes,avoir reu d'eux, avec le langage, la connaissance des choses queni les sens extrieurs, ni le sens intime ne peuvent nous appren-dre, et s'tre assur que ceux-l et celui-ci lui rapportent lesmmes impressions semblables, en un mot qu'il est sain d'esprit,et qu'il jouit de l'usage entier des facults spirituelles, il n'au-rait rien dit que de trs-raisonnable. Si, reconnaissant en chaque

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    XVI NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREindividu la valeur des divers motifs de nos jugements, tels quel'vidence, le tmoignage des sens, le sens intime, il avait conclu fortiori qu'en gnral la certitude qu'ils donnent est plusgrande encore, lorsqu'elle est corrobore par le tmoignageunanime de ceux avec qui nous vivons, parce que cet accordsemble rvler un fait ou une ide qui tient la nature mme del'homme, cette doctrine n'aurait paru ni trange ni nouvelle.Mais aprs avoir rduit presque rien la raison individuelle, etavoir fait de chaque homme un enfant, port pour ainsi diredans le sein de l'humanit, et recevant d'elle tout faits et la-bors ses jugements, ses ides, en un mot tout ce qui constituela vie intellectuelle, comme l'enfant, port dans les entrailles desa mre, reoit d'elle l'aliment qui entretient en lui la vie ducorps, il donnait la runion de ces individualits faillibles uneautorit infaillible. C'tait d'abord une contradiction : car l'en-semble de ces tres impuissants ne pouvait jamais constituer unevritable force. C'tait de plus attribuer au genre humain, endehors de l'glise une autorit, une unit, qu'il n'a pas : c'taitsubordonner l'Eglise fonde par Jsus-Christ une autre glise,divine comme elle, mais plus large, plus ancienne, renfermantla premire en sa vaste enceinte, et lui servant de portiquencessaire.

    L'auteur de ce systme en sentit trs-bien lui-mme plus tardles inconvnients : et pour s'pargner d'avance l'humiliationqu'en se sparant de l'Eglise, il avait trahi tous ces principes, ilcherchait se persuader qu'il n'avait fait, au contraire, que lessuivre rigoureusement, et que, repouss de la socit catholi-que, il s'tait rfugi dans la grande glise du genre humain, ilconvenait, avec cette bonne foi, ou plutt cette indiffrence, quitmoigne d'un aveuglement dplorable de l'esprit et d'un pro-fond endurcissement du cur, que le pape, au point de vue dudogme catholique , avait agi sagement en condanmant sonsystme. Mais plus franc, en d'autres moments, avec soi-mmeet avec ses amis, il laissait voir qu'il avait t pouss cetteextrmit par l'acharnement avec lequel ses adversaires l'avaientpoursuivi, par les soupons qu'ils avaient conus et exprimstouchant la sincrit de sa soumission au Saint-Sige. Ces aveuxlui chapprent plus d'une fois en notre prsence ; et nous

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XVIIaimons constater ici, comme un hommage la mmoire demonseigneur de Qulen, archevque de Paris, qu'il reconnaissaitn'avoir jamais eu qu' se louer de ses procds son gard, et iln'en parlait qu'avec reconnaissance et vnration.

    Il tait singulier en effet, de voir des hommes, qui avaient sou-tenu contre M. de Lamennais les opinions gallicanes, et ni jus-que-l que les dcrets du Pape louchant la foi fussent infaillibleset irrformables, abandonner tout coup leurs principes, et d-clarer hautement que l'Encyclique du 25 juin 1834 tranchaitirrvocablement la question, et que Rome ayant parl, la causetait finie. A les entendre, le systme de M. de Lamennais sur lacertitude renfermait les erreurs les plus graves et les plus dan-gereuses. Et cependant, lorsque Ton considre la valeur des ter-mes dont le Pape s'est servi pour le dsapprouver, on ne peut s'em-pcher de reconnatre qu'ils en exagraientde beaucoup la porte,et que le souverain Pontife avait choisi les expressions les plusdouces et les plus bnignes pour le censurer ; il l'appelle un systmetrompeur, tout fait blmable o l'on ne cherche pas la vrit l oelle est certainement. Il lui reproche de ngliger les traditionsapostoliques, et (admettre des doctrines vaines, futiles, incertai-nes et non approuves par V Eglise. Parmi les doctrines philoso-phiques et thologiques que soutenaient les adversaires de M. deLamennais, il en tait plus d'une assurment qui avait t r-prouve par le Saint-Sige avec beaucoup moins de mnagements.Et si nous n'avions opposer aux partisans de la dclarationde 1682, et des propositions qu'elle renferme, qu'une censureaussi douce, ils sauraient bien en tirer parti contre nous, et nemanqueraient pas de dire que nous voulons tre plus catholiquesque le Pape. Cette rserve du pape Grgoire XVI est d'autantplus remarquable, que le systme de M. de Lamennais lui avaitt dnonc par treize vques, dans une lettre, laquelle contenaitune censure de cinquante-six propositions extraites du livre de cetauteur. Mais comme parmi ces propositions, il y en avait plu-sieurs qui non-seulement n'avaient rien de rprhensible, maisexprimaient des doctrines gnralement reues dans l'cole, lePape se contenta de censurer le systme en gnral, sans indiqueraucun point en particulier. Et en cela il mnageait la fois, etl'auteur de ce systme, et ceux qui le lui avaient dfr. S'il

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    XVIII NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTERAIREavait, au contraire, not quelques-unes des propositions qui luiavaient t dnonces comme dignes de censure, en laissant dect celles qui ne mritaient aucun blme, il aurait rendu l'au-teur et ses disciples le retour plus difficile, en exigeant d'euxune rtractation sur les points qui leur tenaient peut-tre leplus cur ; et il aurait paru de plus donner, contre son inten-tion, une leon aux treize prlats, en dclarant, par le fait,innocentes des choses qu'ils avaient juges rprhensibles.

    Les erreurs de M. de Lamennais avaient pour racine un cer-tain naturalisme secret, qui ne distinguait point assez l'ordresurnaturel de celui de la nature. De mme que l'Eglise semblaitn'tre dans son systme que le dveloppement ncessaire de lasocit du genre humain , ainsi la grce se prsentait luicomme l'panouissement de l'nergie naturelle de l'homme :c'est du moins ce que l'on peut conjecturer de certaines expres-sions vagues, dont l'inexactitude rvlait plutt une tendancequ'aucune doctrine bien dtermine, mais dont les consquencesn'chapprent point au regard pntrant de l'abb Rohrbacher.Le premier il en comprit la porte, et pour bien fixer ses idesdans une matire aussi importante, oij l'erreur est si facile et sidangereuse la fois, il se mit tudier la question de la grce,et rsuma le fruit de ses tudes dans son opuscule de la Nature etde la Grce ^ o la doctrine catholique est prsente avec uneclart et une exactitude vraiment remarquables. Cette matireavait t tellement obscurcie parles Jansnistes, que les principesde l'auteur parurent quelques-uns une nouveaut, quoiqu'ilsne fassent que rappeler la doctrine que l'Eglise a toujours ensei-gne, et que les grandes coles de thologie catholique ont tou-jours soutenue. Mais l'enseignement de la thologie tait enbeaucoup de sminaires vici un tel point, qu'on tait par-venu prsenter comme des nouveauts les opinions, ou mmeles doctrines les plus autorises dans l'Eglise, et inspirer contreelles au clerg une vritable rpulsion. Les derniers dcrets de lacongrgation de l'Index, ont la fois rvl la grandeur du mal, etmis fin un tat de choses aussi dplorable, en fltrissant, commeils mritaient de l'tre, la plupart des manuels o les lves dusanctuaire allaient puiser depuis longtemps des doctrines non-seu-lement vaines, futiles, incertaines et non approuves i)ar l'Eglise,

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XIXmais que le Saint-Sige avait toujours repousses, et qu'il avaitcondamnes implicitement plus d'une fois, et particulirementdans la Bulle Auctorem fidei. Il est vrai que ces mmes hommes,qui attribuaient une autorit si grande l'Encyclique de Gr-goire XVI, parce qu'elle condamnait leurs adversaires, quoiqu'ellene dsignt aucune proposition en particulier et qu'elle n'infligetau systme philosophique deJVI. de Lamennais aucune note grave,tenaient peu de compte de la bulle de Pie VI, quoique chacune despropositions qui y taient condamnes ft accompagne de sanote, de manire rendre toute mprise impossible. Ils sem-blaient donner entendre par l que ce qui les portait regarderla constitution de Grgoire XVI comme irrformable, c'taitmoins l'autorit du Pape qui l'avait promulgue, que la confir-mation qu'elle donnait leurs opinions.

    Mais Dieu, qui prparait le triomphe des saines doctrines, af-faiblies depuis longtemps dj par les prjugs, chez un grandnombre de catholiques en France, permit qu'une condamnationvnt frapper ceux qui les avaient dfendues avec un zle quelque-fois excessif, afin que la promptitude et la sincrit de leur sou-mission servissent d'exemple aux autres, et quteurs adversaireseux-mmes se trouvassent compromis, d'une manire heureusepour eux et salutaire pour tous, par l'empressement avec lequelils accueillirent en cette circonstance la dcision du Pape, sansattendre ni exiger l'accomplissement de toutes les formalitsqu'ils avaient regardes jusque-l comme ncessaires pour don-ner aux actes du Saint-Sige une autorit souveraine. Tous, encette conjoncture, ceux qui taient frapps, aussi bien que ceuxqui avaient provoqu le coup, travaillrent de concert dmolirces barrires, que d'injustes dfiances avaient leves entre laFrance et le Saint-Sige, et que celui-ci travaillait depuis long-temps renverser. Et Ton peut dire que les disciples de M. deLamennais remportrent en cette conjoncture le plus beautriomphe que Dieu pt accorder leurs efforts, puisque la mainqui les frappait tuait du mme coup l'ennemi qu'ils n'avaientcess de combattre. Et il n'y eut en cette lutte mmorable quedes vainqueurs, car elle donna gain de cause aux deux partis.

    Ce ne fut pas le moindre mrite de M. Rohrbacher d'avoir en-trevu, le premier, le principe des erreurs de son matre, et d'avoir

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    XX NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTHAIHEentrepris son Histoire ecclsiastique^ dans le but de les rfuter.M. de Lamennais subordonnait, comme nous l'avons vu plus haut,l'Eglise catholique Tglise primitive ou la socit du genrehumain; de mme qu'il subordonnait la grce la nature. C'estafin de saper par la base cette erreur capitale, que M. Rohrbacherconut la pense de prsenter l'Eglise catholique, comme em-brassant dans sa merveilleuse unit tous les temps et tous leslieux, et de prendre pour pigraphe de son histoire cette belleparole de saint Epiphane : La sainte Eglise catholique est lecommencement de toutes choses, parole qui n'est elle-mme quel'explication de cette autre de saint Paul : Le Christ tait hier, il estaujourd'hui et il sera dans tous les sicles. C'est, en effet, une doc-trine universellement admise par tous les grands thologiens, quil'ont eux-mmes apprise de l'Aptre des gentils, que Dieu voit etconnat toutes choses en son Verbe, et que c'est dans ce Verbe faitchair qu'il contemple et dveloppe tout l'ordre de la sanctificationdes lus; dtelle sorte que Notre-Seigneur Jsus-Christ est,comme homme, le premier n de toute crature, l'unique mdia-teur entre Dieu et les cratures intelligentes, et le chef suprmede l'glise en tous les temps, en tous les lieux, et sous toutes lesformes, sous la loi de nature et sous la loi crite, aussi bien quesous la loi de grce; de telle sorte encore, qu'il n'y a jamais eu etqu'il n'y aura jamais sons le ciel d'autre nom par lequel nous puis-sions tre sauvs. En commenant son histoire ecclsiastiquepar la cration du premier homme, l'abb Rohrbacher ne faisaitdonc que suivre la doctrine de saint Paul et des thologiens;et il est vraiment tonnant qu'on ait cherch lui en faire nn re-proche, et qu'on ait aperu l un reflet de l'erreur fondamentalede M. de Lamennais; tandis qu'elle y trouvait au contraire sarfutation la plus complte. En effet, si l'Eglise catholique est lecommencement de toutes choses, loin d'tre subordonne quoique ce soit, elle domine au contraire tout le reste : il n'y a, cheztous les peuples de la terre, de vrai et de bien dans l'ordre sur-naturel que par elle. Loin d'tre renferme et contenue, commequelque chose de plus troit, dans l'enceinte plus vaste du genrehumain, elle embrasse au contraire en son sein, dans tous lestemps et dans tous les lieux, tous les honunes qui ont cru d'unemanire mritoire, tous ceux qui ont t justifis et sauvs par

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    SUR L'ABBE ROHRBACHEP.. XXIrattente du Rdempteur promis, ou par la foi l'accomplissementdes promesses.

    C'est cette ide fondamentale qui a donn au plan de M. Rohr-bacher, dans la composition de son Histoire ecclsiastique, cetteampleur et cette lvation qui en font le principal mrite, et ra-chtent la plupart des imperfections de dtail qu'on lui a re-proches. C'est cette ide qui a fait de son ouvrage le livre le pluscomplet et le plus parfait qui existe en ce genre. Du point de vuelev 011 l'auteur s'est plac, il domine et embrasse tous les v-nements; il tient en sa main, pour ainsi dire, tous les fils de l'his-toire, et les rattache celle de l'glise comme leur centre com-mun. L'histoire de l'Eglise devient sous sa main comme un tissufort et compacte, dont l'ordre surnaturel forme la chane, tandisque les faits de l'ordre naturel en sont la trame, que les siclesdroulent avec une suite merveilleuse, malgr ses interruptionsapparentes. Quelquefois, en effet, une rvolution politique oureligieuse, suscite parles passions humaines, vient couper ce filque la main de Dieu tient et conduit avec tant de sagesse et d'ha-bilet ; mais tout aussitt ce divin ouvrier trouve dans sa misri-corde infinie le moyen de rparer le dgt, et de renouer le filinterrompu. Les passions et les crimes des hommes servent ainsi manifester sa misricorde et sa justice : ils sont dans ce vastetableau comme les ombres qui en font ressortir avec plus d'clatla lumire.

    Si l'Eglise catholique est le principe et le commencement detoutes choses, si Dieu ne croit rien qu'en son Fils et par son Fils,et si l'Eglise n'est que la continuation et le dveloppement ducorps mystique de Jsus-Christ, rien en ce monde n'est tranger son histoire. Tout, en effet, d'aprs la parole de l'Aptre, estpour les lus, tout, mme ce que l'on fait contre eux : et c'est lla clef de toute l'histoire, laquelle n'est sans elle qu'une nigmeindchiffrable, une suite confuse d'vnements qui ne semblentavoir aucun rapport entre eux. Ces rvolutions qui bouleversentle monde, ces passions qui l'agitent, ces crimes qui l'pouvantent,ces erreurs, ces hrsies que l'orgueil et une curiosit prsomp-tueuse ont inventes; ces guerres, qui ruinent et fatiguent lespeuples ; ces traits qui changent et reculent les bornes des Etats :tout cela, dans la pense de Dieu, n'a qu'un but, savoir de

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    XXII NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTUAIUErecueillir les lus disperss sur la terre, et d'achever ainsi laconstruction du corps mystique de Jsus-Christ. Ces penses sontassurment bien loignes de celles que se forme le vulgaire, etcelui qui tudie l'histoire dans cet esprit y dcouvre des chosesqui restent un mystre pour les autres. Rien ne l'tonn, rien nele choque, rien ne le scandalise. Le fil divin qu'il tient la mainsert le diriger dans ce labyrinthe inextricable, et l'on peut luiapphquer ce vers du pote latin :

    Flix qui potuit rerum cognoscere causas.De ce point de vue rien n'est tranger l'histoire de l'Eglise,

    parce qu'il n'est rien, mme parmi les vnements qui semblentappartenir l'ordre purement temporel, qui ne se rapporte elle par quelque endroit, et dont elle ne soit ou le but ou l'expli-cation.

    C'est cette pense fconde et sublime la fois qui a fourni M. Rohrbacher le cadre de son histoire, et qui lui a permis d'yfaire entrer tant de choses, qu'on ne retrouve dans aucun autreouvrage de ce genre. La multitude et la varit infinie des vne-ments qui passent sous les yeux du lecteur ne lui permettent pastoujours, je le sais, de saisir facilement le lien qui les unit; etdans ce vaste ensemble, l'harmonie du tout parat quelquefoisdisparatre dans la confusion des dtails. Mais cet inconvnienttait peu prs invitable, et l'auteur devait se rsigner ou passer sous silence beaucoup de choses qu'il importe cependantde connatre, ou sacrifier jusqu' un certain point la beaut ar-tistique de son uvre. Pour un esprit comme le sien il n'y avaitpas balancer. Il savait d'ailleurs que la nature de son ouvrage,et le genre du public auquel il s'adressait, lui permettaient detenir moins de compte de la forme extrieure et des agrmentsdu style, et que les lecteurs (ju'il avait principalement en vuechercheraient surtout dans son livre des faits prsents avecexactitude, et un esprit vraiment catholique. Or, sous ce doublerapport, V Histoire ecclsiastiuc de M. Rohrbacher est irrpro-chable dans son ensemble, autant (jue le comportent la nature etl'tendue de l'ouvrage. Aussi, en parcourant les observationsqui ont t faites l'aviteur, relativement certains faits dont

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XXIUl'exactitude tait contestable, nous avons t tonn de leur petitnombre. Encore faut-il dire sa dcharge, que parmi ces obser-vations, plusieurs taient peu fondes, ou reposaient sur desdocuments incertains.Au point de vue de l'auteur, l'histoire de l'Eglise primitivedevait tenir une place importante dans son livre ; et elle en estpeut-tre la partie la plus neuve. Il s'est attach suivre chezles peuples anciens les traces de cette rvlation que Dieu ft aupremier homme, et qui, malgr le mlange impur qu'y ajou-trent dans la suite les passions et les erreurs des nations ido-ltres, se maintint cependant toujours parmi elles, comme unflambeau la lumire duquel elles pouvaient, en correspondantfidlement la grce, connatre et suivre la voie qui conduitl'homme sa fin surnaturelle. Nous insisterons particulire-ment sur ce point, parce que c'est peut-tre celui sur lequell'auteur a t le plus vivement attaqu. On a cru retrouver danscette partie de son histoire les traces des erreurs de M. de La-mennais. Quelques-uns mme ont cru y voir la preuve queM. Rohrbacher s'tait fait illusion sur ses propres sentiments, etqu'il ne les avait jamais formellement rtractes. Et cependant,nous avons vu plus haut que c'tait prcisment pour les rfuterqu'il avait entrepris son ouvrage.

    Il est certain que Dieu n'exige rien de l'homme qu'il ne puisseaccomplir, et que celui-ci a toujours par consquent les moyensde connatre les vrits, et de remplir les prescriptions indispen-sables pour le salut. Quelque paisses que fussent les tnbres ol'idoltrie avait plong les peuples de l'antiquit, quelque pro-fond que ft l'abme oii les passions les avaient prcipits, il estcertain nanmoins que chaque homme en particulier pouvaitatteindre sa fin, et que ceux qui se perdaient se perdaient parleur faute, et pouvaient s'appliquer ces paroles du prophte : Taperte vient de toi : perditio tua ex te. Or, pour justiter en cecas la Providence, il n'y a que deux hypothses possibles. Il faut,ou que l'homme, ne tenant aucun compte des notions qu'il areues, dans la famille d'abord, et dans la socit au milieu delaquelle il vit, fasse pour ainsi dire table rase, et reconstruise nouveaux frais l'ensemble des vrits et des principes sans les-quels il ne peut aller Dieu. Ou bien, il faut que tout en tenant

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    XXIV \OTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREcompte des notions qui lui ont t transmises par la traditionde la famille et de la socit, il s'applique, avec le secours na-turel de son intelligence, et le concours surnaturel de la grcedivine, qu'il peut toujours se procurer par la prire, dgagerla vrit des erreurs qui la dfigurent, ou des tnbres qui l'obs-curcissent. Or, mme en supposant que la premire hypothsesoit ralisable, qui ne voit combien son application est difficile?Quelle force d'esprit et de caractre ne faut-il pas, en effet, queleffort de volont, pour rejeter d'un seul coup toutes les ides quel'on a reues de ceux-l mmes en qui la nature et la raison nouscoinmandent de voir et d'honorer les reprsentants de Dieu et lesministres de sa providence? A quel degr de dveloppement doittre parvenue dj l'intelligence, pour se mettre ainsi au-dessusdes habitudes de toute la vie? Exiger un tel effort d'espritd'hommes plongs dans les tnbres et les superstitions de l'ido-ltrie, c'est les condamner un labeur, impossible pour la plu-part d'entre eux, et leur rendre par consquent la damnationpresque invitable.On comprend que les jansnistes aient embrass et soutenuavec ardeur cette hypothse, si favorable leurs principes tou-chant le petit nombre des lus. Persuads d'un ct que presquetous les hommes sont vous la damnation, et de l'autre, que lapart de la volont dans l'uvre du salut est nulle, puisque, sui-vant eux, elle ne peut rsister ni l'attrait de la grce ni celuidu plaisir, ils taient consquents, lorsqu'ils soutenaient quel'idoltrie avait effac jusqu'aux derniers vestiges des vrits in-dispensables au salut. Celui-ci tant, en effet, tout entier l'uvrede Dieu, il importe peu que l'homme se dispose, par le concoursde la grce et de sa libre volont, recevoir des secours surnatu-rels plus efficaces, qui le mettent en tat de connatre d'une ma-nire utile pour le salut les vrits, et de pratiquer les actes devertu sans lesquels il ne peut atteindre sa fin. Toute grce tantefficace et l'homme ne pouvant lui rsister, il est facile de com-prendre que l'homme, plac dans les conditions les plus dfa-vorables, et mme dans une impossibilit morale de se sauver,se sauvera nanmoins, ds que Dieu parlera son ciu^ ; puisque,dans le systme des jansnistes, il agit toujours avec toute l'ten-due de l'nergie de son pouvoir, et que sa grce se confond avec

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    SUR L'ABB ROHP.BACHER. XXVsa toute-puissance ; mais que des thologiens catholiques, chargsde sauvegarder dans leur enseignement la justice et la misri-corde de Dieu, adoptent des opinions qui, sans tre formellementidentiques celles que nous venons d'exposer, s'en rapprochentnanmoins de telle sorte, qu'elles sont dans la pratique sujettes peu prs aux mmes inconvnients, c'est une chose trange, notre avis.

    Tout, dans le systme de M. de Lamennais, n'a pas t con-damn par le Saint-Sige ; et si parmi ses livres il en est quiaient rendu un vritable service la religion, c'est bien cettepartie de son Essai sur l'indiffrence, o, recueillant les traditionsparsesdes peuples de l'antiquit, telles que la science moderneles a dcouvertes et constates, il a dmontr d'une manire p-remptoire que les vrits indispensables au salut se sont mainte-nues au milieu mme des tnbres et des vices de l'idoltrie.Tromp par l'ide fausse qu'il se faisait de l'Eglise primitive,ide qui n'tait que la consquence ncessaire de son systme surle sens commun tel qu'il le comprenait, il a exagr, nous enconvenons, dans un sens favorable aux peuples de l'antiquit, lacondition oii les avait laisss l'idoltrie. Partant de ce principe,que la raison gnrale ne peut en aucun cas se tromper, et re-connaissant au genre humain la mme autorit qu' l'Eglisetelle que l'a tablie Jsus-Christ, il devait ncessairement ad-mettre que l'enseignement des vrits rehgieuses tait, mme ausein du paganisme, pur et intact, comme il l'est aujourd'hui dansl'ghse et que l'idoltrie n'avait jamais t une erreur de l'es-prit, mais seulement un crime de la volont.

    Nous voyons reparatre ici, sous une autre forme, le dfautque nous avons constat plus haut chez M. de Lamennais, celuide gnraliser les faits, et de les traduire en principes absolus.Il est possible que la tradition primitive se soit conserve purechez plusieurs peuples anciens ; et les dcouvertes faites en cesderniers temps, par ceux qui ont pu tudier de plus prs les mo-numents de l'antiquit, ne permettent gure de douter qu'il n'enait t ainsi. On peut d'ailleurs juger de l'tat des peuples anciens,par celui o l'on a trouv les nations du nouveau monde auseizime sicle. Or, il est incontestable que, chez plusieurs d'en-tre elles, la notion d'un Dieu suprme, crateur du ciel et de la

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    XXVI NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREterre, rcompensant les bons et chtiant les mchants aprs cettevie, s'tait maintenue malgr les superstitions de l'idoltrie. Maisconclure de l qu'il a d en tre ainsi chez tous les peuples sansexception, c'est une supposition que l'histoire ne confirme point,et qu'elle semble plutt contredire.Que l'idoltrie ait t quelquefois, souvent mme peut-tre,

    un crime de la volont, et non une erreur de l'esprit ; c'est un faitque l'exemple des Juifs dmontre jusqu' l'vidence. Car ilsavaient certainement la notion d'un Dieu unique; et cependantils retournaient, la moindre occasion, au culte des idoles. Aureste, il faut connatre bien peu le cur humain, pour ignorerque l'idoltrie y a des racines secrtes et profondes ; et si la lu-mire du christianisme disparaissait parmi nous, il serait bienttremplac par une idoltrie moins grossire et moins absurdepeut-tre que celle des peuples de l'antiquit, mais qui ne seraitni moins corrompue ni moins funeste.

    M. de Lamennais a toutefois, malgr ses exagrations, renduun vritable service la cause de la religion sous ce rapport, enappelant l'attention des thologiens et des apologistes sur unpoint de la plus grande importance, et qui jusqu'ici avait donnlieu aux objections les plus formidables. 11 tait difficile, en effet, des chrtiens, enrichis de tous les trsors que nous a acquis lardemption, et combls des bienfaits de! Dieu, de croire qu'unDieu si bon, qui a daign se faire homme, et mourir pour noussur la croix, ait laiss pendant tant de sicles le genre humaintout entier dans un tat o le salut tait presque moralementimpossible. Plus Dieu a t gnreux notre gard, plus il nousest difficile de croire qu'il se soit montr si svre envers ceux quinous ont prcds. N'est-ce pas d'ailleurs amoindrir l'effet de lardemption, et le prix du sang que Jsus-Christ a vers pour nousque de soustraire sa bienfaisante influence tous les sicles quil'ont prcd? Aussi le sens des peuples catholiques s'est-ilrvolt contre cette supposition injurieuse la bont divine; etles exagrations de M. de Lamennais n'ont t que la ractioncontre un autre excs bien plus dangereux, notre avis : car ilvaut mieux, tout prendre, exagrer la misricorde de Dieu quesa justice.

    M. de Lamennais, en appelant l'attention des thologiens et

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XXVFIdes controversistes sur ce point, leur a donn l'occasion de l'exa-miner de plus prs. Une tude plus approfondie de la question amodifi d'une manire heureuse les opinions que l'influence dujansnisme avait accrdites ; et personne n'a contribu autant ce rsultat que M. l'abb Rohrbacher dans son Histoire eccl-siastique. Il s'y est appliqu, en efet, avec un soin tout particu-lier, faire ressortir, toutes les fois qu'il en a trouv l'occasion,les vestiges de la tradition primitive, soit chez les peuples anciens,soit chez les peuples barbares, qui ont t dcouverts en ces der-niers temps, sans prtendre toutefois qu'elle s'y soit maintenuepure de tout mlange d'erreur. Et si quelques expressions qui-voques ont pu rendre parfois sa pense douteuse en ce point,toute incertitude disparat, lorsqu'on se donne la peine de com-parer les divers passages de son histoire o il a eu occasion detraiter ce sujet. C'est l d'ailleurs le seul moyen de connatrela vritable pense d'un auteur : aussi ne devrait-on jamais se per-mettre de juger un livre, avant d'avoir fait cette comparaison.M. Rohrbacher, du reste, s'est expliqu de la manire la plusclaire ce sujet, en rpondant aux observations qui lui avaient tfaites ; et il rsulte de ses explications qu'il n'a jamais voulu direautre chose, sinon que la rvlation primitive s'tait conserveau milieu des tnbres du paganisme, altre et dfigure, il estvrai, par les passions, les erreurs et les prjugs, mais jamais ce-pendant au point d'tre mconnaissable pour celui qui, usant con-venablement de ses facults naturelles, et cooprant la grce deDieu, cherchait srieusement connatre la vrit. Ds qu'ildclare que c'est l ce qu'il a voulu dire, et que son assertionest confirme par un grand nombre de passages de son histoire,on ne saurait sans injustice l'accuser d'avoir pens le contraire.Au reste, une chose nous a douloureusement frapp dans lesobservations qui ont t faites, soit officiellement soit d'une autre

    manire, sur XHistoire ecclsiastique de M. Rohrbacher. Tousceux qui ont t chargs de l'examiner, et d'en rendre compte, con-viennent unanimement que l'esprit en est irrprochable et le butexcellent. Cette considration devait, ce semble, les rendre plusaccommodants quant aux dtails : car le sens de ceux-ci doit treexpliqu par l'esprit gnral du livre. Et cependant nous avonst surpris de la svrit avec laquelle on s'est attach relever

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    XXVIII NOTICE niOCHAPHIQUE ET LITTIUIP.Ecertains passages, certaines expressions, dont l'inexactitude, et ledanger, si toutefois il existait, disparaissent dans l'ensemble dulivre. Cette rigueur, compare l'indulgence excessive avec la-quelle on a jug des ouvrages du mme genre, bien autrementdangereux, ne peut s'expliquer qu'en supposant chez les jugesou les critiques un parti pris et des prjugs dont un juge devraittoujours tre exempt. On se rappelle avec quelle vivacit laBibliographie catholique a attaqu ds le commencement VHis-toire ecclsiastique de M. Rohrbacher en plusieurs articles, ol'on retrouve toutes les accusations dont ce livre a t l'objet.Or, ce mme recueil, loin de se montrer aussi svre l'garddu livre de l'abb Guette, dont le Saint-Sige a fait justice depuisen le mettant l'index, et que plusieurs conciles ont fltris,comme il le mritait, n'a eu pour cet auteur que des encourage-ments et des loges. Ce rapprochement sufft lui seul pour indi-quer l'esprit dans lequel ont t faites la plupart des critiques dulivre de M. Rohrbacher. Tandis qu'aucune paille n'chappait encelui-ci, on n'apercevait point dans les autres des poutres quiauraient frapp des yeux non prvenus. Tandis qu'on dnonait l'autorit ecclsiastique une uvre que l'on reconnaissait excel-lente dans son ensemble, dans son but et dans son esprit, onlaissait entre les mains des lves du sanctuaire des livres quiauraient d pervertir l'esprit du clerg franais, s'il n'avait tsauv par le bon sens admirable qui le distingue, et par un atta-chement inaltrable au Saint-Sige. Nos observations ne s'adres-sent point la Bibliographie catholique, telle qu'elle est rdigedepuis quelque temps ; et nous sommes bien sr que son directeuractuel se montrerait la fois et plus juste envers M. Rohrbacher,et plus svre l'gard de l'abb Guette.On a encore reproch M. Rohrbacher un certain esprit d-mocratique, qui le porte, non-seulement exagrer les fautes et

    les vices des rois, mais encore affaiblir l'ide que la religionnous donne de la royaut. Si ce reproche tait fond, il seraitd'autant plus grave, que dans ce temps, o l'orgueil et l'espritd'insubordination portent au mpris de toute autorit divine et hu-maine, c'est un devoir, pour ceux qui parlent au nom de Dieu etde l'Eglise, de ragir contre cette funeste tendance et d'entourer lepouvoir de la considration qui lui est due. Car, quelque indignes

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XXIXet mchants que soient ceux qui en sont revtus, il est toujoursun reflet et comme un coulement de la puissance infinie deDieu. Sur ce point deux opinions extrmes ont t formules.Les uns, frapps exclusivement des inconvnients de l'esprit dervolte et d'insubordination dans les peuples, ont cru qu'on nesaurait jamais trop fortifier le principe d'autorit. Ils ont doncenseign que le pouvoir est inadmissible, et que l'abus qu'en faitcelui qui en est revtu ne donne jamais aux peuples d'autre droitque celui de ne pas faire les choses qu'on leur commande, quandelles sont contraires la loi divine ; que toute rsistance activeest interdite, et qu'un chrtien doit toujours, l'exemple desfidles des premiers sicles, souffrir toutes les perscutions, lamort mme, s'il le faut, plutt que de repousser par la force l'in-justice.

    Cette doctrine, formule d'une manire aussi absolue, porte enquelque sorte avec elle son correctif, par l'exagration mmedont elle est empreinte; et il tait impossible que le sens catho-lique ne se rvoltt pas contre une opinion qui essayait de donnerune sanction divine au despotisme le plus humiliant, et mettaitsous la sauvegarde de Dieu lui-mme les excs entrepris contresa loi et l'honneur de son glise. Elle avait de plus l'inconvnientde condamner, au moins d'une manire indirecte, la conduite del'Eglise pendant plusieurs sicles : car, malgr toutes les peinesque se sont donnes quelques thologiens pour dgager sa res-ponsabilit dans les sentences de dposition, prononces par lespapes contre plusieurs princes qui abusaient de leur autorit, etfoulaient aux pieds les droits les plus sacrs, il est impossiblepour tout esprit de bonne foi, de sparer l'Eglise des souverainspontifes qui agissaient en ces circonstances. Outre que ces sen-tences ont t portes plus d'une fois dans des conciles trs-nom-breux, ou mme cumniques, on peut toujours appliquer cescas la doctrine de saint Augustin : que l'Eglise ne peut approuverl'erreur ou l'injustice, ni directement, par un consentement for-mel, ni indirectement par son silence.

    D'autres, frapps au contraire des prils et des malheurs quele despotisme a plus d'une fois prpars aux peuples et l'Eglise,se sont jets dans l'excs oppos , et ont prtendu que les peuplespeuvent toujours, en toute circonstance, repousser l'oppression

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    XXX NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREpar la force, et qu'ils sont les seuls juges des dissentiments quis'lvent entre eux et les princes. C'tait blmer implicitementles enseignements de l'Eglise, et la conduite des chrtiens despremiers sicles. C'tait de plus ouvrir la porte toutes les r-volutions, et consacrer tous les excs de la dmagogie. L'une etl'autre doctrine avaient le tort d'riger en principes absolus desprescriptions qui, tant toutes pratiques de leur nature, doiventtre diversement apprcies selon les circonstances. M. de La-mennais a t plus loin encore, et, renouvelant les erreurs deWiclef et de Jean Huss, il a sembl attribuer au pch l'originedu pouvoir.

    L'glise, se tenant galement loigne de ces deux extrmes,a, soit par sa conduite, soit par ses enseignements, proclam lavraie doctrine sur cette question importante. En vain ses enne-mis ont-ils cherch tablir une contradiction flagrante entreses actes et ses jugements, aux diverses poques de son histoire.Toutes leurs objections tombent devant cette seule considration,qu'il s'agit ici d'un point de morale pratique, qui ne peut tredcid dans un sens absolu et ap|^)licable tous les temps et tous les lieux, et pour lequel il faut tenir compte de la constitu-tion des divers pays, de leurs rapports avec l'Eglise catholique,et de plusieurs autres circonstances, qu'il serait trop long d'nu-mrer ici. 11 suffit aux catholiques de savoir, que ce que l'Eglisea fait est bien fait ; ce qu'elle a enseign est vrai, et ce qu'elle acommand est juste. Les premiers chrtiens ont bien fait de selaisser gorger, plutt que de prendre les armes pour secouer lejoug des tyrans qui les opprimaient; et l'Eglise a bien fait de leurprescrire ou conseiller cette conduite. Mais aussi, et par la mmeraison, les peuples catholiques, au moyen ge, ont bien fait deforcer leurs rois garder les promesses qu'ils avaient jures, etde dfendre contre eux par les armes les droits de Dieu et la li-bert de l'Eglise ; et celle-ci a bien fait de leur prescrire ou con-seiller cette conduite. Les Papes n'ont point outre-pass leursdroits, en dposant les princes qui refusaient de se soumettre leurs desseins ; et ils ont agi en cela, non-seulement commemandataires des nations catholiques, chargs par elles de pro-tger leur foi et de dfendre leurs intrts, mais encore en vertud'un droit qu'ils tiennent de Dieu lui-mme, et qui leur donne le

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XXXIpouvoir d'interprter la loi de Dieu dont ils sont les gardiens, dersoudre toutes les questions de morale, pour les peuples aussibien que pour les individus, et dlier ainsi les consciences. 11faut tre insens, et n'avoir jamais ouvert l'histoire deTEglise,pour leur contester ce droit. S'ils ne l'avaient possd, ils se se-raient tromps, et l'Eglise avec eux, pendant plusieurs sicles,sur la nature et l'tendue des prrogatives qu'ils ont reues deJsus-Christ ; ou ils auraient tromp les peuples, et n'auraientt que des imposteurs. Voil pourtant la triste alternative la-quelle se sont condamns quelques thologiens ignorants ouserviles, qui n'ont pas craint d'attribuer une usurpation undroit que les souverains pontifes ont exerc pendant plusieurssicles, du consentement et avec le concours de l'Eglise toutentire.M. Rohrbacher, dans le cours de son Histoire ecclsiastique,

    n'a fait que constater et mettre en relief l'enseignement et lapratique de l'Eglise sous ce rapport; et il a jug avec d'autantplus de raison la chose ncessaire, que ce point est un de ceuxque les historiens qui l'ont prcd, et particulirement Fleury,ont le plus obscurcis. Ces derniers, toutes les fois qu'un dissenti-ment s'est lev'entre les princes et le Saint-Sige, n'ont presquejamais manqu de donner gain de cause ceux-l. Et comme,d'un autre ct, les Papes qui ont lutt avec le plus d'nergiecontre les tyrans, sont en mme temps ceux dont l'Eglise a con-serv le meilleur souvenir et qui se sont le plus distingus parleur saintet, les dclamations et les rcits faux ou incomplets deces historiens devaient ncessairement laisser dans l'esprit dulecteur une impression singulire. Car, on leur prsentait, d'unepart, comme de grands princes, ceux qui avaient lutt avec leplus d'acharnement contre le Saint-Sige, et de l'autre, les sou-verains Pontifes qui avaient cherch les faire rentrer dans ledevoir, comme des hommes violents ou au moins imprudents ettmraires. Or, si, dans les querelles de ce genre, il y a pour lecatholique, avant tout examen, quelque prsomption, elle doittre videmment en faveur des derniers. Quelque confiance, eneffet, que Ton puisse avoir dans la sagesse et les bonnes inten-tions des princes, il nous semble qu'un catholique doit recon-natre, au moins au mme degr, ces qualits dans ceux en qui

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XXXIIImprise l'autorit la plus grande, donne chacun le droit dempriser la sienne, et mrite qu'on use de ce droit. Si l'au-teur n'avait eu l'occasion de manifester diverses reprises,dans son livre, le fond de sa pense sur ce sujet, ces expressions,prises la lettre, prsenteraient en effet un sens inexact. Maiselles sont suffisamment corriges par les dclarations formellesqu'il a donnes ce sujet. Il reconnat dans sa dfense, qu'il n'estpas permis aux particuliers de se rvolter, et que c'est un droitqui est rserv aux peuples. On peut dire, en un certain sensqu'un souverain, qui mprise l'autorit de l'Eglise, donne cha-cun le droit de mpriser la sienne, et mrite qu'on use de cedroit. Il est bien vident qu'il ne s'agit point ici d'un droit strictet rigoureux. C'est ainsi qu'on dit d'un pre, qui se met au-dessusde toute loi, et mne une vie si scandaleuse, qu'il donne sesenfants le droit de le mpriser, et qu'il mrite qu'ils usent de cedroit. Cela signifie, qu'autant qu'il est en lui, il autorise parses exemples ses enfants le mpriser, et qu'il mrite aux yeuxde Dieu qu'ils le fassent. C'est au reste de cette manire queles choses se passent. La rvolte des rois contre Dieu a presquetoujours pour effet la rvolte des peuples contre les rois ; Dieu seservant des premiers pour punir les seconds : et ceux-ci mritentvraiment le chtiment qu'il leur envoie, mme lorsque les peuplespchent en se rvoltant. L'auteur, en disant que le souverainanticatholique se dpose lui-mme, absout lui-mme ses sujetsde tous devoirs envers lui, se met lui-mme hors la loi, indiquepar ces expressions qu'il n'entend point parler d'une vritabledposition ; car aucun souverain ne se dpose lui-mme en cesens ; mais il veut dire seulement que lorsqu'un prince ne tientaucun compte de l'autorit de Dieu, qui garantit la sienne, il nepeut plus l'invoquer pour rappeler au devoir ses sujets rvoltscontre lui. Ceux-ci, en effet, ne pourraient-ils pas alors luidemander de quel droit il en appelle l'autorit de Dieu, lors-qu'il la foule aux pieds et la mprise lui-mme.

    L'autre proposition que l'abb Cailleau reproche M. Rohr-bacher porte : Tout gouvernement anticatholique, ou qui com-bat l'autorit de l'Eglise catholique, apostolique et romaine, estau fond une absurdit et une tyrannie. Une absurdit, en ce qu'a-prs avoir pos en principe qu'on n'est point oblig de respecter

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    XXXIV NOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREaucune autorit, puisqu'on ne l'est pas de respecter la plusgrande, il prtend nanmoins qu'on est oblig de respecter lasienne ; une tyrannie, en ce qu'il contraint les hommes par laforce se soumettre une absurdit pareille. Nous ne voyonspoint ce qu'il peut y avoir de rprhensible dans ce passage, etnous croyons comme l'auteur que tout gouvernement qui combatl'autorit de l'glise est absurde et tyrannique la fois.

    L'abb Cailleau reproche l'auteur de soutenir une doctrinecondamne par l'encyclique de Grgoire XVI, lorsqu'il dit danssa dfense que le droit de rvolte est rserv aux peuples. Nousferons remarquer d'abord ce sujet que la phrase incrimineest restrictive : ce n'est point une thse qu'il pose, mais c'est aucontraire une restriction qu'il apporte au droit de rvolte. Or, iln'a certainement pas voulu dire que les peuples ont toujours ledroit de se rvolter ; mais il a entendu cette proposition clans lemme sens que les thologiens catholiques du moyen ge, quitous, depuis saint Thomas jusqu' Suarez, ont enseign que lespeuples peuvent en certaines circonstances opposer la force latyrannie des princes. Or, cette doctrine n'a point t condamnepar l'encyclique de Grgoire XVI, qui n'a rprouv que le droitde rvolte, tel que l'cole dmagogique l'a proclam, et qui estinconciliable avec tout gouvernement, quelle que soit sa forme.Au reste, M. Rohrbacher, fidle aux convictions de toute sa vie,n'a point voulu s'en rapporter ses lumires, dans sa propre

    cause ; il a envoy son livre Rome, afin qu'il y ft examin, etqu'il pt corriger ce que l'on y aurait trouv de rprhensible.Or, la seule observation qui lui ait t faite, c'est qu'il avait ignorune bulle de Benot XIV, qui tranchait la question l'gard desrites chinois et malabares. Toutes les critiques, toutes les objec-tions tombent, il nous semble, devant ce tmoignage. On sait,en effet, combien la foi romaine est tendre et dlicate, avecquelle perspicacit les thologiens chargs d'examiner les livresy dcouvrent la moindre erreur. Dans cette capitale de la chr-tient, les sciences thologiques continuent de tenir le rangqu'elles occupaient autrefois dans toutes les universits catholi-ques : elles y sont toujours enseignes avec cette ampleur et cettelvation, qui, tout en se tenant fortement aux dfinitions del'glise, ne s'alarment point des opinions qu'elle tolre, et les

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XXXVlaissent flotter en quelque sorte l'aise, comme la frange gra-cieuse dont la varit orne, selon l'expression du prophte, la robede l'pouse. Nulle part on ne voit les choses d'aussi haut, et c'estpour cela que nulle part le regard ne s'tend aussi loin, nullepart, qu'on le sache bien, l'esprit n'est aussi large, aussi dgagde ces systmes, de ces prjugs d'cole ou de pays, de ces opi-nions troites, fruit d'tudes imparfaites, qui s'effarouchent desmoindres divergences, et condamnent sans examen tout ce quine s'accorde pas avec elles. L'examen qui a t fait Rome deY Histoire ecclsiastique ^ de M. Rohrbacher, est donc une garantiede l'orthodoxie de son livre, et le tmoignage flatteur qu'il areu des thologiens auxquels il l'a soumis est une ample com-pensation des critiques peu bienveillantes dont son ouvrage a tl'objet K

    Il ne faut point s'tonner, au reste, que son livre ait t aussivivement attaqu. Il heurtait des prjugs qui avaient vieilli parminous, et qui s'tayaient de noms respectables. La bonne foi aveclaquelle ils taient accueillis, par un grand nombre d'ecclsiasti-ques les rendait plus dangereux encore, et plus difficiles draci-ner. Propags par l'enseignement des sminaires, par les livresque l'on mettait entre les mains des aspirants au sacerdoce, sou-tenus par l'autorit et les exemples d'hommes vertueux et recom-mandables, ils auraient fini par altrer profondment l'esprit duclerg franais, si une raction puissante n'tait venue, tempsencore, en arrter les progrs. Or nul n'a plus contribu cemouvement salutaire que M. l'abb Rohrbacher, dans son His-toire ecclsiaslique ; et c'est lui surtout que nous devons l'heu-reuse modification qui s'est opre dans les esprits, dans les insti-

    1 Nous citerons ici un rapport officiel fait par des hommes qui n'taient certespas enclins se laisser aveugler sur le mrite du livre. Voici leurs paroles : L'Histoire universelle de M. l'abb Rohrbacher, si intressante sous tant de rapports, dans laquelle on trouve une vaste rudition, des aperus neufs et frappants, des ides grandes et nobles, un parfum de pit qui charme les curs en les portant la vertu, des rectifications des faits que d'autres histo- riens avaient tronqus ou dnaturs, une narration qui plat et qui rarement lasse le lecteur, un style qui, malgr ses nombreux dfauts, rveille l'attention par une teinte d'originalit qui attache et intresse; cette histoire, disons-nous, au moyen des corrections que nous avons indiques, deviendra un livre clas- sique, et comme le manuel historique de tous les prtres et de tous les lves du sanctuaire.

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    XXXYl NOTICE BIOr.r.APHIQLlE ET LlTTr.AIREtutions et dans les habitudes du clerg depuis quelque temps. Il nefaut donc pas s'tonner que son livre ait soulev tant de rcla-nialions, et donn lieu des critiques si svres. Elles taientinspires par un motif bon en soi, par la crainte de voir com-promises des opinions que l'on s'tait accoutum regardercomme la vraie doctrine de l'Eglise ; de telle sorte que celle-cidut paratre une nouveaut tmraire ceux qui n'avaient eupour les guider dans l'tude de la thologie que les manuelsdont l'index a fait enfin justice en ces derniers temps, etqui n'avaient eu ni le temps ni l'occasion d'aller puiser dessources plus sres. Aussi devons-nous tre trs-indulgents pourceux qui, moins favoriss que nous, et ayant vcu unepoque o l'enseignement tait moins pur qu'il ne l'est aujour-d'hui, n'avaient pour rgle de leur jugement et de leur conduiteque les opinions qu'ils avaient apprises de leurs matres. La doci-lit est une vertu assez rare de nos jours, pour qu'elle ait droit nos gards, mme lorsqu'elle se trompe sur son objet : et lavivacit avec laquelle plusieurs ecclsiastiques, recommandablespar leurs verhis, ont attaqu VHistoire ecclsiastique de M. Rohr-bacher tait un effet de leur zle pour ce qu'ils croyaient la sainedoctrine, et de leur aversion pour toute nouveaut. Leurzle, il est vrai, n'tait pas selon la science, mais on ne pouvaitexiger d'eux qu'ils connussent ce qu'on ne leur avait jamais ap-pris et qu'ils se montrassent favorablement disposs pour des doc-trines qu'on leur avait prsentes comme nouvelles et tmraires.Des ides gnralement reues et propages par l'enseignement,finissent par former comme une atmosphre morale, qu'on respireinvolontairement, et laquelle chappent seulement quelqueshommes, qui plus heureux que les autres, ont pu s'lever desrgions plus hautes et plus srieuses. Mais ceux-ci perdraient unepartie de leurs avantages, et se montreraient ingrats envers Dieudu bienfait qu'ils en ont reu, s'ils en prenaient occasion d'ac-cuser avec amertume ceux qu'il a traits moins favorablement, aulieu de les plaindre et d'avoir pour eux une indulgence charita-ble et compatissante. Nous ne reprocherons donc point ceuxqui, d'office ou autrement, ont critiqu VHistoire ecclsiastiquede M. Rohrbacher d'avoir cd, sans le vouloir des prjugsd'cole (fui devaient leur paratre respectables. Mais nous plaant

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    SUR L'ABBE ROHRBACHER. XXXVIlau point de vue o ils se trouvaient par un fcheux concours decirconstances, nous ne pouvons que les plaindre, et bnir Dieud'avoir fait surgir des temps meilleurs parmi nous et purifirenseignement thologique des erreurs et des prjugs quil'avaient altr. Mais nous reconnatrons en mme temps, commela justice nous y obhge, que M. Rohrbacher a t un des princi-paux instruments dont Dieu se soit servi dans cette uvre de r-gnration, et que son histoire, malgr quelques imperfections,et pour le fond et pour la forme, est un des monuments les plusprcieux de la science ecclsiastique en ces derniers temps, celuipeut-tre qui a exerc le plus d'influence sur la direction gn-rale des esprits, parce qu'il rpondait au besoin le plus imprieuxde notre poque.

    C'est par l'histoire en effet, que les sources de la science avaientt altres, et que les erreurs les plus dplorables s'taient intro-duites. L'histoire ecclsiastique n'avait point chapp cette con-tagion universelle, et Fleury s'tait rendu l'interprte de tous lesprjugs de ces temps. Son livre jouissait dans le clerg d'uneautorit que le temps et l'esprit de parti avaient affermie : il for-mait lui seul l'opinion et la conscience de la plupart des eccl-siastiques qui se seraient reproch de suspecter l'exactitude et labonne foi d'un auteur qu'on leur avait recommand, et dont ilsavaient entendu la lecture pendant le cours de leurs tudes tholo-giques. Pour attaquer une rputation si bien tablie, pour renver-ser cette forteresse, o s'taient retranchs les prjugs les plusdplorables, il fallait un courage que pouvaient seules donner laconviction d'accomplir un devoir, et la confiance dans le se-cours d'en haut.VHistoire ecclsiastique de M. Rohrbacher a t l'uvre detoute sa vie; elle et suffi elle seule pour illustrer une congr-gation tout entire, tant elle suppose de recherches, de courageet de patience. Elle est la fois, et le rsum le plus complet desgrands travaux historiques qui l'ont prcde, et la source odevront puiser l'avenir tous ceux qui voudront s'occuper decet objet. Elle est la gloire, non-seulement de celui qui l'a entre-prise, mais encore du clerg de France tout entier, lequel, se-couant gnreusement le joug de vieux prjugs, l'a accueillieavec un louable empressement, et lui a donn, en prenant sur

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    XXXVIII INOTICE BIOGRAPHIQUE ET LITTRAIREson ncessaire, un succs qui serait dj glorieux pour un livred'un mdiocre volume.

    Aussi, cette uvre une fois acheve, l'auteur put dire avecsaint Paul : J'ai achev ma carrire, et j'attends la couronnede justice qui m'est rserve, et que le Seigneur, juge souverai-nement juste, me rendra au dernier jour. 11 pouvait, en effet,prsenter Dieu avec confiance ce monument qu'il avait lev sa gloire et l'honneur de son Eglise. Dieu donc, aprs luiavoir laiss le temps de terminer la seconde dition de son his-toire, de faire les corrections qu'il avait juges ncessaires, etde rpondre aux observations qui lui avaient t adresses. Dieune voulut pas retarder plus longtemps pour lui la rcompensequ'il avait si hien mrite.

    M. l'abb Rohrbacher vivait depuis quelque temps au milieudes pieux enfants de M. Liebermann, au sminaire du Saint-Esprit, Paris. 11 avait trouv dans cette maison une bien-veillante hospitalit, et un asyle conforme ses gots ; deslivres qu'il pouvait consulter dans ses travaux, la retraite etle silence, si favorables l'tude et la mditation, et sur toutcela des curs amis et dvous, dont le conseil, les soins etl'affection ont adouci ses dernires annes. Ces saints prtreshonoraient en lui le restaurateur de l'histoire ecclsiastique.Ils regardaient comme une bndiction pour leur maison laprsence de cet homme, si simple et si modeste au milieu del'clat que son uvre mmorable avait attach son nom, etdont la vie tout entire tait un modle pour les lves confis leurs soins. Fidle son caractre et ses habitudes, jusqu'auxderniers jours de sa vie, l'abb Rohrbacher, aprs avoir consacrtoute sa journe l'tude et la prire, aimait passer sesrcrations avec les novices, se faisant enfant avec eux, et plusqu'eux encore, les gayant par ses rcits et ses bons mots, lescharmant par sa douce familiarit, et les difiant en mme tempspar les discours pieux dont il savait entremler ses entretiens,sans ostentation toutefois ni effort, mais avec une onction et un-propos merveilleux. On sentait alors, en l'coutant, que sesparoles n'taient que le rejaillissement de la foi et de la charitqui remplissaient son me. En effet, cet homme qui n'avait rienautant aim sur la terre que Dieu et son Eglise, qui avait vcu,

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    SUR L'ABB ROHRBACHEP,. XXXIXpour ainsi dire, dans le pass de celle-ci, et dont la principaleoccupation avait t de raconter ses luttes et ses triomphes, cethomme l'aima jusqu' ses derniers moments d'un amour tendreet filial, prenant part ses victoires et ses humiliations, joyeuxcomme un enfant, quand elle avait fait quelque nouvelle con-qute, triste et soucieux, lorsqu'il apprenait qu'elle tait op-prime ou perscute. Toutes ses esprances, toutes ses affec-tions, son me et sa vie tout entire taient l'Eglise, et je nesais, si en dehors d'elle, il y avait quelque chose en ce monde quipt mouvoir et troubler sa belle me. C'est dans ce pieux asileque la mort vint le trouver ; elle fut pour lui le reflet de sa vie,et comme le crpuscule qui termine un beau jour. Nous emprun-terons la plume loquente de M. Louis Veuillot le rcit de sesderniers moments.

    Depuis quelque temps dj, sa vie n'tait qu'une longueprire- il est mort en priant. Dans les derniers jours, il ne vou-lait pas se sparer de son brviaire, mme lorsque sa vue, djpresque teinte, ne lui permettait plus d'y lire. Il le tenait sur sesgenoux, ou le faisait poser sur sa poitrine. Quand sa mmoiresemblait voile comme ses yeux, et glace comme ses mains, lesprires de l'Eglise sortaient encore de sa bouche. Il oubliait lenom de ses amis, et les faits qui venaient d'arriver, mais il savaittoujours les psaumes par cur, et il les rcitait avec les tmoinsqu'difiait son agonie.

    Il avait cru qu'il mourrait le 10 janvier. Le soir de ce jourl, M, l'abb Bouix, son ami, lui ayant suggr cette oraison :Amo te. Domine^ amem ardentius, il rpondit : Ce n'est pasassez, il faudrait aimer Jsus avec son cur lui. Il ajouta : J'avais propos au bon Dieu de mourir aujourd'hui midi,parce que c'est l'heure o il est all au ciel. J'avais pri l'ange dela mort d'accompagner mon me, et de l'introduire dans le seindes misricordes infinies. Un des jeunes ecclsiastiques quiavaient eu le bonheur d'tre choisis pour le servir dans sa mala-die lui raconta qu'il venait de faire une longue promenade avecses compagnons. L'abb Rohrbacher sourit. Vous avez tbien loin, lui dit-il ; avez-vous fait un pas pour l'ternit ?

    On a not les derniers murmures et les derniers bgayements,de cette haute intelligence, lorsqu'elle semblait dj, par inter-

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    XL NOTICE BIOGRAPHIQUR ET LITTRAIREvalles, envahie de ces tnbres d'un instant qui nous cachent leschoses humaines, avant do se dissiper pour jamais devant leschoses de Dieu... Mon Dieu ! mon Dieu ! disait-il, faites-moi mi-sricorde ; ainsi soit-il ! Dlivrez-moi, et prenez-moi dansl'esprit de votre Eglise ! Je vous ai pri de me recevoir l'heure011 vous tes mort, Jsus ! Exaucez-moi ! > Mater misericor-di, salus infirmorum, ora pro nobis ! Mon Dieu, recevez monme en votre cur compatissant. Miseremini saltem vos,amicimei Auxilium Christianorum ! In te, Domine, speravi,non confundar in ternumf Jsus, Marie, Joseph, cur ago-nisant de Jsus, ayez piti de moi. Ora pro nobis, sancta DeiGenitrix, ut digni efficiamur promissionibus Christi. w Commeon lui demandait s'il faisait volontiers Dieu le sacrifice de sa vie,il rpondit : Notre-Seigneur, le premier, a fait le sacrifice dela sienne, comment ne lui abandonnerais-je pas le peu de joursqui peuvent me rester encore vivre ? Mon Dieu, ayez piti demoi ; et vous, M. l'abb, priez pour moi.

    Dominus det nobis suampacem et vitam ternam, amen. Marie conue sans pch,priez pour moi qui ai recours vous, M. de Lamennais s'est-il confess avant de mourir? O est son me? Mon Dieu, ayez pitide moi. Mon Dieu ! Mon Dieu ! Sainte Mre de Dieu, ayezpiti de moi ! Monsieur, dites ces messieurs que je suis tou-jours trs-attach l'Eglise romaine et au souverain Pontife. Ce furent l ses dernires paroles, et Dieu permit que sonserviteur, qui avait tant aim l'Eglise romaine pendant sa vie, lafint par un dernier tmoignage d'amour et de soumission enverselle. 11 mourut le 17 janvier 1856, cinq heures du matin, laveille de la Chaire de saint Pierre Rome, fte pour laquelle ilavait toujours eu une dvotion particulire. Dieu voulut que ceft aussi la premire que son serviteur ftt dans le ciel.

    il fut enterr ct de M. Liebermann, comme il l'avait de-mand, et ces deux hommes, qui avaient eu le mme but, lesmmes affections, pendant leur vie, se trouvrent l'un prs del'autre aprs leur mort, et sur la terre et dans le ciel.

    Nous terminerons cette notice par la copie de son testament,qui est la fois l'expression de ses dernires penses, la rcapitu-lation de ses travaux, et l'histoire de sa vie.

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    SUR L'ABB ROHRBACHER. XLI Au nom du Pre, du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il. Je lgue mon me Dieu, qu'il veuille bien la recevoir dans son in-

    finie misricorde. In te, Domine, speravi, non confundar in ternum. Je lgue mon corps la terre de mon Dieu, en attendant la rsurrec-tion gnrale. Credo resurrectionem morluorum. Je soumets d'esprit et de cur au jugement du Saint-Sige, c'est--

    dire de notre Saint-Pre le Pape, tout ce que j'ai crit et tout ce que j'-crirai. Uhi'est Petrus, ibi Ecclesia :

    1 Le Catchisme du sens commun. Dans les deux premires ditions,qui sont identiques, cet opuscule expose l'tat de la controverse tel que jele concevais alors, plutt que des ides dfinitivement arrtes. La 3'' di-tion, entirenient refondue et considrablement augmente, publie parTabb Migne, en 1842, a pour but d'claircir les questions fondamentalesentre la raison et la foi, la philosophie et la thologie; afin que les catho-liques puissent s'entendre cet gard et marcher dsormais l'ennemi,sans s'exposer tirer les uns sur les autres. D'aprs les dcouvertes quej'ai faites sur le vrai systme de Descartes touchant la certitude, une nou-velle dition du Catchisme du sens commun doit paratre ces jours-ci,23 fvrier, sous ce titre : Catchisme du sens commun et de la philosophiecatholique, quatrime dition.

    2 Lettre d'un membre du jeune clerg Monseigneur l'vque deChartres. Elle a t rimprime dans un journal.

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    XLII NOTICK BIOGRAPHIQUE ET LITIUIRE SUR L'ABB ROIIRBACHER.clique. Ce travail devait tre publi : comme les esprits commenaient se calmer cette poque, on crut plus sage de ne le publier pas. Il serabon de conserver le manuscrit comme renseignement, d'autant plus qu'ilen reste une copie entre les mains de M. de Lamennais. Pour M. deLamennais lui-mme. Dieu veuille avoir piti de lui et lui redonner latoi. Par celles de mes lettres qui se trouvent la fin des 20 et 21* volumesde l'Histoire, on sait quelle a t ma conduite cet gard. Le 1*"' d-cembre 1852, je lui ai fait envoyer un exemplaire de la seconde dition del'Histoire, aprs avoir su par une lettre de sa main que cela lui feraitplaisir. Je n'en ai pas eu de nouvelles. Dans sa dernire maladie, je mesuis transport son logis ; des messieurs qui se trouvaient l me direntqu'on lui parlerait de ma visite, et que, sans doute, il me recevrait danshuit jours. Je retournai : j'y trouvai son neveu, Ange Biaise, qui promitde m'crire quand son oncle serait en tat de me recevoir. Je n'ai pasreu d'avertissement, et M. de Lamennais est mort sur les entrefaites.crivain en deux tomes : le premier dit oui, le second dit non; valeurtotale, zro.

    Apres tre entr dans les dtails de son testament, M. Rohrba-cher finit en disant :

    Telles sont mes dernires volonts, que je veux tre fidlement etponctuellement excutes. Pater, in manus tuas commendo spiri