robotisation d’une boîte de vitesses mécanique · du confort, mais aussi économique en termes...

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97 Robotisation d’une boîte de vitesses mécanique Dr. techn. Robert Fischer Dr.-Ing. Reinhard Berger Introduction La densification du trafic, la multiplication des contraintes réglementaires, l’augmentation du prix des carburants sont autant d’évolutions unanimement déplorées par les usagers, et qui laissent supposer que l’on s’acheminera nécessairement vers une automatisation de plus en plus importante de la chaîne cinématique. Pour s’imposer sur ce nouveau marché, les systèmes d´automatisation proposés devront être économiques et apporter du confort. La robotisation de la boîte de vitesses mécanique a pour sa part toutes les chances d’être une solution apportant du confort, mais aussi économique en termes de coûts de fabrication et de consommation. Reste à savoir dans quels secteurs ce système saura, s’imposer sur le marché. Dans le cas du système EKM (pilotage électronique de l’embrayage), le conducteur décide à quel moment et comment il change de vitesse, si bien qu’on reste assez proche de la boîte de vitesses classique à commande manuelle. Les différentes techniques d’embrayage développées par LuK sont parfaitement maîtrisées et applicables à tous les types de véhicules, quelle que soit la puissance du moteur. Si bien que le système EKM peut être également proposé à des automobilistes qui préfèrent passer les vitesses eux-mêmes, et ce quelle que soit la puissance du véhicule. Dans le cas de la boîte de vitesses robotisée (ASG), le changement de vitesses s’effectue automatiquement et, contrairement à la boîte automa- tique étagée, implique par son principe une rupture du couple, laquelle est d’autant plus sensible que l’effort est important. C’est pourquoi nous supposons que l’ASG s’imposera surtout sur les petits véhicules. Par ailleurs, l’utilisation de plus en plus répandue de pédales d’accélérateur électroniques ne peut que favoriser la commercialisation d’un tel système. Cet exposé s’organise en trois grandes parties: nous présenterons d‘abord le système de pilotage électronique d’embrayage en l’état actuel de série; puis, en deuxième partie, nous traiterons des nouveaux développements de ce système; et enfin, dans une troisième partie, il sera question de la robotisation d’une boîte de vitesses mécanique.

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Robotisation d’une boîte de vitesses mécanique Dr. techn. Robert Fischer

Dr.-Ing. Reinhard Berger

Introduction La densification du trafic, la multiplication des contraintes réglementaires, l’augmentation du prix des carburants sont autant d’évolutions unanimement déplorées par les usagers, et qui laissent supposer que l’on s’acheminera nécessairement vers une automatisation de plus en plus importante de la chaîne cinématique. Pour s’imposer sur ce nouveau marché, les systèmes d´automatisation proposés devront être économiques et apporter du confort. La robotisation de la boîte de vitesses mécanique a pour sa part toutes les chances d’être une solution apportant du confort, mais aussi économique en termes de coûts de fabrication et de consommation.

Reste à savoir dans quels secteurs ce système saura, s’imposer sur le marché.

Dans le cas du système EKM (pilotage électronique de l’embrayage), le conducteur décide à quel moment et comment il change de vitesse, si bien qu’on reste assez proche de la boîte de vitesses classique à commande manuelle. Les différentes techniques d’embrayage développées par LuK sont parfaitement maîtrisées et applicables à tous les types de véhicules, quelle que soit la puissance du moteur. Si bien que le système EKM peut être également proposé à des automobilistes qui préfèrent passer les vitesses eux-mêmes, et ce quelle que soit la puissance du véhicule.

Dans le cas de la boîte de vitesses robotisée (ASG), le changement de vitesses s’effectue automatiquement et, contrairement à la boîte automa-tique étagée, implique par son principe une rupture du couple, laquelle est d’autant plus sensible que l’effort est important. C’est pourquoi nous supposons que l’ASG s’imposera surtout sur les petits véhicules. Par ailleurs, l’utilisation de plus en plus répandue de pédales d’accélérateur électroniques ne peut que favoriser la commercialisation d’un tel système.

Cet exposé s’organise en trois grandes parties: nous présenterons d‘abord le système de pilotage électronique d’embrayage en l’état actuel de série; puis, en deuxième partie, nous traiterons des nouveaux développements de ce système; et enfin, dans une troisième partie, il sera question de la robotisation d’une boîte de vitesses mécanique.

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Le pilotage électronique de l’embrayage: Etat actuel de la série

Principe de fonctionnement La figure 1 illustre le principe de fonctionnement du système électro-motorisé EKM. Cette figure a déjà été présentée lors du dernier colloque [1] et indiquait à l’époque les pistes envisagées pour le développement du système. Ce dernier repose sur l’utilisation de l’embrayage à compensation automatique d’usure SAC [2], qui réduit l’effort de commande et permet, combiné à un système de contrôle des couples, l’utilisation d’un servo-moteur de dimension réduite. Comme ce petit moteur électrique génère très peu de chaleur, il est possible d’intégrer le servo-moteur et le boîtier de commande dans un «actionneur intelligent», lequel remplace la pédale de débrayage et permet ainsi un gain de confort important. Il n’est pas nécessaire de modifier le système de débrayage ni la boîte de vitesses, la seule contrainte étant l’adjonction de capteurs destinés à reconnaître les rapports et l’intention de changement de rapports. Tous les autres signaux sont déjà pris en charge par les autres organes.

embrayage à compensationd'usure (SAC)

reconnaissance durapport engagé

"actionneur intelligent"

capteursexistant

capteur de vitesse(existant)

Figure 1: Système électromotorisé «EKM»

Pour développer le système EKM, LuK a collaboré avec la société BOSCH en assurant la maitrise d´oeuvre du projet.

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Simplification du système La simplification du système EKM était l’un de nos objectifs majeurs lors de son développement. Il devait s’agir exclusivement d’un système «add-on», évitant toute modification de la boîte de vitesses, du changement de vitesses et du système de débrayage. A cela s’ajoute la réduction à un minimum du nombre de capteurs et la simplification du câblage (cf fig 2). On a pu ainsi faire l’économie du capteur de course d’embrayage, de même que du capteur de régime à l’entrée de la boîte de vitesses. Quant à l’intention de changement de rapports, l’objectif était de la détecter au moyen d’un capteur de course clipsé sur le levier de vitesses, évitant ainsi d’avoir à modifier le levier de vitesses et d’altérer les sensations du conducteur. Tout ceci a pu être réalisé par le biais de systèmes électroniques intelligents [3].

capteur de positiond'embrayage

cablage

cablage

capteur de régimeentrée de boîte

modification de laboîte de vitesse

capteurd'effort

modification dulevier de vitesse

capteur deposition

modification du mécanismede débrayage

Figure 2: Add-On EKM: Simplification de ma mise en oevre

Ajoutons à cela le regroupement du servo-moteur et du module de régulation, évoqué plus haut.

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Le pilotage au juste couple Le pilotage au juste couple (figure 3) est indispensable si on veut améliorer le confort au réattelage et réduire autant que possible les temps de débrayage-réembrayage en dépit d’un moteur électrique de petite taille.

coup

le

temps

couple limite de glissement

couple d'embrayage

couple moteur

couple limite du moteur

Figure 3: Le pilotage au juste couple

Un embrayage doit être en mesure de transmettre avec fiabilité le couple moteur, et ce même dans les conditions les plus défavorables, ce qui implique qu’il dispose d’une réserve supplémentaire suffisante. En pratique, un embrayage complètement fermé peut transmettre de 1,2 à 2,5 fois le couple moteur maximum. Le principe de base du pilotage au juste couple consiste à adapter à chaque fois le couple d’embrayage au couple moteur et ne laisser qu’une marge réduite de sécurité.

La figure 4 montre les avantages du système lors du changement de vitesses. Dans le cas d’un système conventionnel dépourvu d’un système de pilotage au juste couple, le couple de l’embrayage est bien supérieur au couple moteur. Au moment où le conducteur veut changer de vitesses et relâche l’accélérateur, le couple moteur diminue. L’actionnement du levier de vitesses alerte le capteur d’intention de changement de rapports et l’embrayage doit dès lors passer de la position «tout fermé» à la position «tout ouvert», ce qui détermine le temps de débrayage. Celui-ci ne doit pas être trop long, car l’embrayage risque de continuer à transmettre du couple pendant la synchronisation de la nouvelle vitesse, et par là même de

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générer des bruits de grenaille, voire des dommages au niveau de la boîte de vitesses. La figure 4 illustre le déroulement du même processus avec un système de pilotage au juste couple. Le couple de l’embrayage n’est que très légèrement supérieur au couple moteur, ce qui fait que la course jusqu’à l’ouverture complète est nettement plus réduite que dans le cas d’un embrayage traditionnel. Si maintenant le conducteur relâche l’accélérateur pour changer de vitesses, le couple moteur chute, immédiatement suivi du couple de l’embrayage. Si bien qu’au moment où la reconnaissance d’intention de changement de rapports est alertée, l’embrayage est déjà presque ouvert, et le débrayage s’effectue très rapidement. Ceci permet même au conducteur d’opérer des changements de vitesses brutaux sans faire craquer ou endommager la boîte de vitesses.

couple d'embrayage

Signal d'intention depassage de vitesse

positionpapillon

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temps en s

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temps en s

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Figure 4: Passage de vitesse a) sans pilotage au juste couple et b) avec pilotage au juste couple

Il existe une alternative au système EKM à moteur électrique, à savoir le système EKM hydraulique. Ce dernier a d’ores et déjà été construit en série par LuK. Il est de conception et de réalisation plus complexe que le système électronique, mais en théorie plus rapide. Cependant, grâce au pilotage au juste couple, les systèmes à moteur électrique permettent de réduire considérablement le temps de débrayage-embrayage, si bien qu’ils n’ont rien à envier aux systèmes hydrauliques.

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Le système de pilotage au juste couple présente un second avantage lors d’un réattelage (figure 5). Un coup d’accélérateur produit des pics dans la caractéristique du couple et donc des vibrations ou secousses qui peuvent être plus ou moins violentes selon les véhicules. Le système de pilotage au juste couple permet de neutraliser celles-ci par le biais d’une très brève phase de glissement, sans conséquence sur la consommation du véhicule ni l’usure de l’embrayage.

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couple d'embrayage

temps [s] temps [s]

temps [s] temps [s]

Figure 5: Choc au réattelage a) sans pilotage au juste couple et b) avec pilotage au juste couple

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Le système EKM avec pilotage au juste couple permet également de limiter la sollicitation de la chaîne cinématique :

• En cas d’un démarrage brutal, on évite les à-coups dus à une fermeture trop brusque de l’embrayage (valable pour toutes versions du système EKM).

• La réserve maximale de transmission de couple disponible au niveau de l’embrayage n’est généralement pas utilisée et l’embrayage fait fonction de limiteur de couple.

• Cet effet s’observe également dans le cas d’à-coups transmis par l’arbre de sortie (en aval du système).

• L’usure de l’embrayage tend à être moindre que dans le cas d’un mécanisme commandé par une pédale, du fait que l’électronique, contrairement au conducteur, apporte la réponse optimale à toute situation (valable pour toutes versions du système EKM).

Dans l’hypothèse d’une utilisation exclusive du système EKM, on pourrait réduire le dimensionnement de l’ensemble de la chaîne cinématique.

Le pilotage au juste couple implique la sollicitation permanente du système de débrayage, donc des joints d’étanchéité, des conduites et de la butée. Plus de 4 millions de kms d’essais ont démontré que cela n’était pas gênant outre mesure, et ce pour les raisons suivantes:

• Le système SAC impliquant un effort de débrayage minime, la charge maximale s’en trouve réduite d’autant.

• La course supplémentaire engendrée par la modulation du couple de l’embrayage est compensé par une course de commande réduite à l’ouverture de l’embrayage, si bien que la somme des courses de commande ne dépasse pas celle d’un système classique.

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Réalisation en série La figure 6 présente les composants actuellement montés en série, à savoir l’actionneur d’embrayage intelligent, lequel remplace la pédale d’embrayage, l’embrayage à compensation automatique d’usure avec réduction de l’effort de débrayage (SAC) et les capteurs additionnels destinés à la reconnaissance des rapports et de l’intention de changement de rapports.

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Figure 6: Add-on EKM: Composants

L’actionneur d’embrayage comprend le vérin émetteur habituellement intégré au bloc-pédale. Il pourrait tout aussi bien piloter un système de débrayage semi-hydraulique que le système à butée annulaire hydraulique ou mécanique. Son adaptation à un système de commande d’embrayage exclusivement mécanique serait possible au prix de quelques minimes modifications.

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La simplicité des composants représentés ici permet de conclure à une grande fiabilité du système. Cette simplicité s’explique également par le fait qu’on a pu, grâce à une recherche poussée dans le domaine des composants électroniques, faire l’économie, par exemple, d’un capteur de régime à l’entrée de la boîte de vitesses et d’un capteur de course d’embrayage. Les quelques extraits de presses qui suivent montrent assez que cela ne s’est pas fait au détriment du confort de conduite:

...équipé lors des essais d'une boîte

semi - automatique (on passe les vitesses

sans débrayer), un système parfaitement

intégré au concept d'ensemble...

Autoflotte 7/1997

...ou boîte semi - automatique avec

commande manuelle, sans débrayer

(une version qui séduirait David Coulthard

lui - même)... Die Welt 28.06.97

...le nouvel embrayage automatique...Passer les vitesses devient un vraiplaisir, et devrait convaincre les automobilistes les plus réticents dubonheur de trouver à chaque fois lebon rapport, pour un meilleur confortet une conduite plus économique... Handelsblatt 26.06.97

...L'embrayage automatique développé par LuK représenteun nouveau progrès dans le domaine du confort... mot 17/1997

...le plaisir de passer les vitesses,surtoutquand on choisi l'embrayage automatique.Il fonctionne tellement bien qu'il vous faitoublier toutes les merveilles automatiqueset électroniques du monde... FAZ 10/1997

Figure 7: Critiques de presse concernant l´EKM LuK

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Le pilotage électronique d’embrayage: Nouveaux développements

Objectifs Le système tel qu’il existe actuellement en série représente déjà une solution peu coûteuse et très performante. Il aura d’autant plus de chances de pénétrer le marché qu’il saura présenter les avantages d’un système compact, économique, intégrant un grand nombre de fonctions supplémentaires.

LuK s’est fixé les objectifs suivants :

• réduction de l’encombrement et du poids.

• amélioration des possibilités d’application du système dans le véhicule.

• pilotage de couples plus élevés.

• extension des fonctionnalités du système.

• réduction des coûts

L’actionneur d’embrayage Le système tel qu’il existe actuellement en série comprend des composants ayant déjà fait leur preuves dans d’autres applications du domaine de l’automobile, ce qui justifiait pleinement leur utilisation. Il s’agit entre autres d’un mécanisme à vis sans fin et d’un entraînement par biellettes. Ceci offre l’avantage d’une plus grande souplesse et permet de compenser les tolérances sans réglage préalable à neuf.

Les nouveaux développements du système ont en outre permis de réduire les modules électroniques de commande et de puissance. Il devrait donc être possible de réduire le poids et l’encombrement du système et, finalement, d’améliorer son rendement.

Le choix confirmé d’une conception modulaire permet en outre de faciliter l’installation de l’actionneur d’embrayage, qu’il est notamment possible de monter directement sur la boîte de vitesses.

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Figure 8: Nouveau développement de l´actionneur d´embrayage

L’embrayage Grâce à l’embrayage à compensation automatique d’usure SAC, utilisé conjointement au système EKM, l’effort nécessaire au débrayage est bien moindre que sur un embrayage classique, ce qui réduit d’autant l’effort imposé à l’actionneur. L’optimisation de l’ensemble embrayage-actionneur-modules est un de nos objectifs de recherche, et devrait permettre d'obtenir des composants plus simples et plus économiques. Le maintien en position fermée de l’embrayage par l’application d’une force extérieure représente un début de solution. C’est ce que LuK appelle «Active Clutch» (AC) (cf fig 9).

L’ Active Clutch tel qu’il est présenté ici est de conception plus simple que le SAC ou qu’un embrayage classique. Il suffit d’un levier pour l’actionner,

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ce qui induit un rapport direct entre la course de commande, l’effort de commande et le couple de l’embrayage, et facilite ainsi le réglage et la modulation (dosabilité).

levier(diaphragme sans précontrainte)

débrayage mécanique

moteur electrique

ressort de compensation

réducteur autobloquant

Encombrement/PoidsMise en oeuvreCoût (embrayage) -20%

Figure 9: Active Clutch (AC): schéma de principe

Comment et pourquoi est-il possible de simplifier l’embrayage à ce point ?

Le contrôle des couples entraîne une relation particulière entre la distribution des couples de l’embrayage et de la course de commande d’une part, et la fréquence d’utilisation d’autre part. On sait que les temps de repos et donc de délestage du système sont proportionnellement importants, et ce non seulement en fonction de la réglementation en vigueur mais aussi dans la pratique quotidienne des automobilistes. Il s’ensuit que la courbe des distributions des couples atteint son maximum au moment où le couple d’embrayage est relativement faible (tirage faible charge et rétro - cf fig 10a).

Si l’on observe maintenant la caractéristique de l’effort de commande du système SAC, on constate que cet effort est le plus important au moment où la courbe des distributions des couples atteint son maximum (fig 10b). L’idée était donc de revoir la construction de l’embrayage afin de ramener à zéro la caractéristique de l’effort de commande, ce qui est possible grâce à l’ Active Clutch (cf fig 10c).

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Figure 10: Active Clutch (AC), charge en pilotage au juste couple

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L'énergie globale du travail de l’actionneur qui limite la capacité de l’actionneur d’embrayage est la même quel que soit le système utilisé, AC ou SAC, mais reste en tous les cas nettement inférieure à celle d’un embrayage classique, ainsi que le montre la figure 11. Grâce à un système approprié de compensation d’usure on peut, dans le cas de l’ Active Clutch, réduire encore sensiblement l’effort nécessaire et donc le travail de l’actionneur (zone hachurée fig 11), ce qui permet soit d’obtenir des couples plus élevés, soit de réduire la taille du moteur électrique.

course

effo

rt

a)

b)conventionnel SAC AC

∅ effort butée effortactionneur

travailactionneur

Figure 11: Active Clutch (AC) – comparatif

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Reconnaissance d’intention de passage et du rapport engagé On utilise aujourd’hui un capteur d’intention de passage de vitesse et deux capteurs pour la reconnaissance des rapports:

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Figure 12: Reconnaissance d´intention de passage et du rapport engagé avec 3 capteurs

Le capteur 3, destiné à reconnaître les rapports dans le sens du passage de vitesse, et le capteur d’intention de passage de vitesse enregistrent en fait tous deux le même déplacement, dans la même direction. La nécessité d’avoir recours à deux capteurs dépend largement de l’ensemble des mécanismes d’articulation situées en amont de la boîte de vitesses, au niveau desquels, en raison des jeux et des phénomènes d’élasticité qu’on observe, il est difficile d’établir clairement le rôle effectivement joué par la reconnaissance de l'intention de passage de vitesse et du rapport engagé.

Pour rendre possible l’économie d’un troisième capteur, y compris dans le cas de mécanismes présentant beaucoup de jeu et d’élasticité, on

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positionne le capteur sélecteur de rapports en position oblique, si bien qu’il remplit ainsi les deux fonctions, à savoir reconnaissance des rapports à l’entrée de la boîte et sélection du nouveau rapport. Dans ce cas de figure, le signal du capteur d’intention de passage de vitesse transmis à la boîte de vitesses suffit, même s’il est moins efficace, pour permettre d’identifier sans risque d’erreur le rapport engagé.

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Figure 13: Reconnaissance de l´intention de passage et du rapport engagé avec 2 capteurs

Dans le cas de figure le plus favorable, deux capteurs suffiront à l’avenir pour assurer les fonctions de reconnaissance des rapports et de l’intention de passage de vitesse.

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Le glissement Auparavant, les recherches menées pour le développement du système EKM visaient essentiellement à réduire les vibrations par glissement [4]. Cet objectif a été abandonné, car l’usure, dans le cas de systèmes fonctionnant uniquement par glissement, était globalement très importante. L’usure spécifique due à un glissement permanent de l’embrayage s’est avérée bien plus importante que lors du démarrage et du changement de vitesses.

Le système SAC présente, en raison d’une réserve d’usure plus impor-tante, une perspective intéressante. On s’efforcera néanmoins de réduire sensiblement l’usure liée aux systèmes de régulation par glissement.

Ces systèmes présentent en outre l’inconvénient d’une consommation plus élevée. Cependant, il ne faut pas oublier que le confort de la chaîne cinématique incite les conducteurs à utiliser les rapports les plus élevés, et donc à moins consommer, ce qui s’est également confirmé pour le double volant amortisseur «DVA».

LuK s’est donc proposé de travailler à l’optimisation de l’ensemble du système.

La figure 14 met en relation le comportement des différents paramètres hors glissement. On observe qu’à l’aide d’amortisseurs de torsion de conception classique (14/2), il est possible, lorsque le véhicule est en marche, de maintenir l’amplitude des oscillations angulaires à l’entrée de la boîte de vitesses en dessous du niveau de celles générées par le moteur. Si l’on à recours au glissement, on admet d’abord qu’on peut faire l’économie de l’amortisseur de torsion. Mais si l’on utilise un disque d’embrayage rigide, l’amplitude des oscillations angulaires est alors bien plus importante qu’en présence d’un amortisseur de torsion. Dans l’exemple présenté ici, cette amplitude est à 1600 t /min environ 4 fois plus importante.

Pour améliorer le fonctionnement du système par le biais du glissement, on peut considérer approximativement que le glissement à opérer devra être de même importance que l’amplitude des oscillations angulaires normalement observées. Ce qui supposerait qu’en présence d’un disque d’embrayage rigide on ait à produire un glissement extrêmement important, et ce pour toutes les phases de la conduite.

L’optimisation du système d’embrayage à glissement est possible par le biais d’un amortisseur de torsion simplifié, sans élément de frottement et raideur faible. La figure (14/4) montre que le découplage sans glissement est meilleur qu’avec l’amortisseur de torsion amélioré, et ce dès un régime de 1300 t/min.

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2: Amortisseur de torsion idéal

4: Amortisseur de torsion simplifié (faible raideur, faible hyset)

3: friction rigide

1: excitation moteur

Figure 14: Excitation de la chaîne cinématique avec système non-glissant

Comment l’optimisation du système est-elle possible? Si, en présence d’un amortisseur de torsion simplifié, on a recours au glissement, il est possible d’éliminer la résonance à bas régime. Il est intéressant de noter qu’il se produit une nouvelle résonance, représentée figure 15 par un trait fin, de niveau supérieur à la résonance observée hors glissement. Cela est dû à une nouvelle répartition des masses tournantes. Dans le cas du système vibratoire hors glissement, la chaîne cinématique est prise entre la lourde masse tournante du moteur et la masse du véhicule ; dans le cas du système à glissement, la masse tournante du moteur est remplacée par la masse tournante du disque d’embrayage, beaucoup plus petite. Dans l’exemple présenté ici, il ne serait pas pertinent d’opérer un glissement autour de 1600 t/min, puisqu’à ce moment-là l’amplitude des oscillations angulaires hors glissement est bien moins importante (cg fig 16). Reste à expliquer l’origine de cette résonance dans le cas d’un système à glissement. A la base, il faut rappeler que dans un tel système le découplage n’est jamais parfait. Le profil de la courbe de frottement, les variations de régime au niveau du glissement, de même que les défauts géométriques générant du voile et autres, induisent des excitations transmises à la chaîne cinématique par l’embrayage à glissement.

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e [1

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13% du temps totalde conduite

4: Amortisseur de torsion conventionnel

5: Excitation moteur

2: Amortisseur de torsion simplifié "glissant"

3: Amortisseur de torsion simplifié sans glissement

1: DVA

Figure 15: Optimisation avec embrayage piloté en glissement

La figure 15 montre que grâce au système à glissement amélioré et à l’utilisation d’un amortisseur de torsion à faible raideur (15/2 et 15/3), on obtient une amélioration sensible de l’isolation vibratoire comparé à l‘amortisseur de torsion conventionnel. Toutefois la qualité du découplage est inférieure à celle du double volant amortisseur DVA (15/1).

Un tel système à glissement a obtenu des résultats intérressants lors un essai clientèle: Les phases de glissement représentaient seulement 13% du temps global de conduite révélant une augmentation de la consommation de l’ordre de 0,4% et une augmentation de l’usure de l’ordre de 13%, aisément rattrapée par l’embrayage SAC.

Cependant, cet exemple concerne un véhicule à propulsion, sur lequel le régime de résonance est naturellement plutôt bas dès le départ. Sur les véhicules à traction avant, la courbe de résonance est en générale bien plus élevée et il n’est pas possible de l’éliminer des phases de conduite les plus fréquentes, y compris en utilisant un amortisseur de torsion à très faible raideur. Une version améliorée du système, peut faire mieux que les solutions traditionnellement proposées, mais des essais menés pour un véhicule de gamme moyenne présentent une usure supérieure d´environ 40 % et une augmentation de la consommation de environ 0,8 %.

116

Robotisation d’une boîte de vitesses mécanique

Construction Les enseignements que l’on a pu tirer de l’utilisation en série de l’automati-sation de l’embrayage (EKM) ont avantageusement contribués au développement de la robotisation de la boite de vitesse mécanique (ASG).

EKM

réconnaissance durapport engagé

réconnaissance d'intensionde passage de vitesse

actionneur d'embrayage avec calculateur EKM integré

actionneur de boîte de vitesse

ASG

actionneur d'embrayage avec calculateur ASG integré

Figure 16: Add-on EKM et ASG

Le système d’articulations situé en amont de la boîte de vitesses, ainsi que ses capteurs de reconnaissance des rapports et d’intention de passage, indispensables sur le système EKM, peuvent cette fois être supprimés. Le tout est remplacé par un actionneur de boîte de vitesses asservi (fig 16).

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En optant résolument pour un système de type additionnel (add-on), on peut d’éviter des modifications de la boîte de vitesses, ce qui suppose une grande souplesse d’application du système. L’ASG est conçue comme un assemblage modulaire, utilisant un grand nombre de composants standards. L’adaptation de l’actionneur à la boîte de vitesses se fait par un réducteur, les moteurs électriques et les boîtiers de commande sont de conception standard pour tous utilisateurs, permettent une production en grande série. La collaboration avec BOSCH s’avère, là encore, fructueuse.

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Figure 17: Réalisation modulaire de l´ASG

L’électronique de commande s’est considérablement réduite. C’est pourquoi, sur les moteurs équipés du système ASG, la fonction de commande et l'amplificateur sont intégrés à l’actionneur d’embrayage.

Notre partenaire, BOSCH, prend en charge le système d’exploitation, le pilotage électronique des moteurs électriques et le calcul de l’instant de changement de rapports, adaptable au profil du conducteur. LuK met au point le pilotage de l’embrayage et des moteurs de la boîte de vitesses, établit le cahier des charges concernant le moteur à explosion, et assure la coordination de l’ensemble du système de changement de vitesses.

Chaque constructeur a sa propre idée du pilotage d'une boîte de vitesses robotisée. Le concept élaboré par LuK propose un vaste éventail d’applications, qui permettent de déterminer au mieux à quel moment et comment s’effectuera le changement de vitesses, en fonction du choix constructeur.

118

Processus de passage de vitesse Une boîte de vitesses robotisée pose le problème fondamental de l’interruption de couple. Celle-ci est représentée en figure 18 par l’intervalle situé entre le rapport antérieur et le nouveau rapport. On procède dans un premier temps à une réduction du couple, aussi bien au niveau du moteur qu’au niveau de l’embrayage, puis on libère le rapport engagé, la synchronisation s’effectue et on engage le nouveau rapport, à la suite de quoi on procède à une nouvelle montée en couple.

Passage de vitesse

Interruptiondu couple

Acc

élér

atio

n

baisse du couple montée en couple

désengagementet choix

synchronisation

engagementtemps

ancienrapport

nouveaurapport

Figure 18: ASG: Phases de changement de rapport

On peut distinguer dans ce processus deux types de phénomènes à évaluer différemment quant aux contraintes qu’ils appliquent à l’élément de couplage :

• des phénomènes ayant une incidence sur l’accélération du véhicule

• des phénomènes correspondant à des temps morts absolus

Pour les phases ayant une incidence sur l’accélération du véhicule, on observe qu’il est indispensable de brider le «moteur électrique» actionneur, des variations trop brusques dans les accélérations du véhicule pouvant avoir des effets désagréables. Seule l’optimisation du système permet d’obtenir une interaction bien équilibrée du moteur, de l’embrayage et de la boîte de vitesses. Au moment de la synchronisation, le double débrayage, par exemple, est un moyen de délester le système.

119

Les temps morts, cependant, requièrent la vitesse maximale des actionneurs. Il convient alors de veiller à ce que, lors du désengagement du premier rapport et de la phase rapide qui s’ensuit, la synchronisation ne soit pas trop violemment sollicitée.

Acc

élér

atio

n

temps

Influence de l'accélération du véhicule⇒ contrôle des actionneurs

temps mort⇒ vitesse maxi. de l'actionneur

Figure 19: Optimisation de l´interruption de couple

Pour résoudre ces contradictions, LuK a développé un composant élastique de couplage qui réagit dès que la force de couplage franchit un certain seuil, et ne présente ensuite, dans un premier temps, qu’un faible niveau d’effort (cf fig 20).

Ce composant élastique de couplage présente les avantages suivants :

• Les phases de roue libre qui sont des temps morts absolus, sont plus courtes si l’on a au préalable précontraint ce composant élastique intégré (lors du désengagement du rapport antérieur et de la position verrouillée des synchros).

• Le maintien de la force de couplage à un niveau déterminé assure un changement de vitesses facile et confortable.

• La limitation de l’ effort par élasticité protège la boîte de vitesses et les actionneurs.

120

charge

course

Figure 20: Elasticité de couplage lors du passage de vitesse

Mesures Les effets observés sur plusieurs modélisations du processus de changement de rapports sont illustrés par différentes mesures.

La figure 21a présente l’accélération du véhicule lors d’un changement rapide de rapport sans contrôle spécifique de la vitesse des actionneurs. La brusque chute du couple induit un «choc au débrayage» dont les effets vibratoires sont ressentis par la synchronisation. Le réembrayage très rapide induit un fort pic d’accélération suivi d’une phase de glissement dûe à la limitation de couple maximum transmissible par l’embrayage. Après cette phase de glissement on observe des effets vibratoires dits de «balancement» du véhicule.

Comparativement, la figure 21b illustre une phase d’accélération lors d’un changement de rapport optimum en confort. La chute et la reprise de couple comme la synchronisation sont plus longues alors que les temps morts sont limités au minimum.

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a) changement de rapport inconfortable

b) changement de rapport confortable

choc au débrayage

choc desynchronisation

Balancement

choc auréembrayage

temps

Acc

élér

atio

n

temps

Acc

élér

atio

n

Figure 21: Mesure de passage de vitesses

Les phases de changement de rapport définies fig. 18 et 19 sont également représentées en couleurs fig. 21.

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Perspectives LuK développe le système additionnel ASG à moteurs électriques dans le cadre de plusieurs projets clients, l’objectif étant de lancer le système sur le marché d’ici l’an 2000. Jusqu’à ce jour, plusieurs dizaines de véhicules en ont été équipés, lesquels sont actuellement testés chez nos clients.

Parallèlement à cela, nous travaillons d’ores et déjà au développement d’une nouvelle génération d’ ASG, dont la conception cette fois est radicalement différente de celle d’un changement de vitesses classique à commande manuelle. Ces nouvelles boîtes présentent les mêmes avantages que le système additionnel ASG, avec des coûts unitaires de production nettement moindres.

Résumé Le système de pilotage électronique d’embrayage EKM, présenté il y a quatre ans, est désormais fabriqué en série. Nos clients disposent ainsi d’une solution économique, performante et fiable.

Les nouveaux développements du système visent essentiellement à en réduire le poids et l’encombrement, à l’adapter à des moteurs plus puissants, à étendre ses fonctionnalités, et enfin réduire le coût de sa fabrication. Des éléments de réponse sont d’ores et déjà apportés, tels que de nouveaux actionneurs d’embrayage, plus compacts, un embrayage simplifié (Active Clutch), la suppression d’un capteur ainsi que le recours à un système de glissement permanent à bas régime.

La boîte de vitesses robotisée ASG apparaît comme un prolongement logique et avantageux du système EKM. L’ensemble du système d’articulations situé en amont de la boîte de vitesses, qui comprend les capteurs de reconnaissance des rapports et de l’intention de changement de rapports, est supprimé et remplacé par un actionneur de boîte de vitesses asservi. Là encore il est essentiel de proposer un système «add-on» évitant d’avoir à modifier la boîte de vitesses. Les recherches concer-nant «l’incidence» de l’interruption du couple sur le processus de changement de rapports confirment ce que nous supposions déjà, à savoir que le système électromotorisé ASG permet des changements de vitesses aussi rapides et confortables que le système hydraulique.

Au regard des attentes de la clientèle telles qu’elles s’expriment actuellement, et de l’accroissement des possibilités techniques existantes, nous sommes convaincus du large succès que les deux systèmes, EKM et ASG, rencontreront sur le marché. Cela vaut en particulier pour les petits véhicules et les pays en voie de développement, où l’on ne trouve pratiquement pas de boîte automatique.

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Documentation [1] Kremmling, B.; Fischer, R.:

Automatisierte Kupplung – Das neue LuK-EKM. 5. Internationales LuK-Kolloquium 1994, S. 89-111

[2] Reik, W.: Selbsteinstellende Kupplungen für Kraftfahrzeuge. VDI-Berichte 1323, Kupplungen in Antriebssystemen ’97, S. 105-116

[3] Fischer, R.; Salecker, M.: Strategien zur Kupplungsansteuerung. VDI-Berichte 1323, Kupplungen in Antriebssystemen ’97, S. 269-290

[4] Albers, A.: Elektronisches Kupplungsmanagement (EKM) – Die mitdenkende Kupplung. 4. Internationales LuK-Kolloquium 1990, S. 77-102