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REVUE DE PRESSE L’Affaire de la rue de Lourcine De Eugène Labiche Mise en scène Yann Dacosta Contact presse : Francesca Magni 06 12 57 18 64

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REVUE DE PRESSE

L’Affaire de la rue de Lourcine

De Eugène Labiche

Mise en scène Yann Dacosta

Contact presse : Francesca Magni 06 12 57 18 64

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N° 674 – Du 19 au 25 janvier 2015

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Supplément du Figaro N° 21 913 du mercredi 21 janvier 2015

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Au Théâtre 13, c’est une réalisation d’un jeune metteur en scène, Yann Dacosta, qu’on applau- dira : L’Affaire de la rue de Lourcine de Labiche (6 janvier-15 février). C’est une transposition plutôt moderne et plutôt hallucinée, parfaitement maîtrisée. Elle a été créée au Théâtre de l’Ouest parisien, la saison dernière.

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Loin du théâtre de boulevard traditionnel, Yann Dacosta met en scène “Le crime de la rue de Lourcine”, une pièce peu montée de Eugène Labiche. Elle est, selon ses propres mots, “un ovni théâtral aussi proche du théâtre de l’absurde que de Kafka et du vaudeville”. Il développe ici un univers esthétique qui croise la musique- en en revisitant la forme (musique pop sur les paroles originales de la pièce)- le théâtre et le cinéma tout en se centrant sur le jeu des comédiens. Or donc, que s’est-il donc passé rue de Lourcine, après le banquet bien arrosé de l’institution Labadens auquel s’est rendu, à, l’insu de sa femme, Oscar Lenglumé, ancien élève de la dite institution ? Le matin le trouve dans son lit, avec un violent mal de tête et… avec Mistingue, un ancien de Labadens qu’il a perdu de vue. En lisant le journal, ils apprennent le meurtre affreux d’une jeune charbonnière dans la rue de Lourcine, par deux meurtriers en état d’ébriété. Du charbon dans leurs poches, un bonnet et une chaussure de femme dont ils ne connaissent pas la propriétaire. Ils ne se souviennent de rien “après la salade”. Ils sont sûrs d’avoir commis ce crime… “Bad trip” Comme dans le film “Bad trip”, toute la pièce tourne autour de la recherche d’indices. Mettant les doigts dans l’engrenage de la peur, Mistingue et Lenglumé font tout pour échapper au châtiment de la justice. La mécanique est en marche. Yann Dacosta subvertit tous les codes du genre, dirigeant le jeu des comédiens à la fois avec une précision d’horloger et une grande liberté. On retrouve, dans cette mise en scène, le souffle épique et l’esthétique du théâtre de Brecht. Avec pour base le burlesque, les comédiens, tous plus inventifs les uns que les autres, font feu de tout bois, élargissant leur palette vers le jeu du clown ou la comedia dell’arte, avec une préférence pour celui de Chaplin ou de Jacques Tati. Le décor rappelle celui des pièces de boulevard (papier peint, mobilier…), mais il est à son tour subverti par le travail élaboré d’une lumière qui, en ombre portée et comme surgis des profondeurs de l’inconscient, donne d’étranges contours aux lieux et aux personnages. L’action se déroule autour d’un module circulaire qui est tour à tour une piste de danse, un lit puis une table pour se transformer en une fontaine. À la fois, symbole de l’abondance et du statut social du rentier Lenglumé, c’est aussi le lieu où on peut se laver les mains de son crime ou laver sa conscience qui, comme chacun le sait, ne se voit pas. Tout se passe à l’intérieur de l’appartement de Lenglumé alors que les portes battantes laissent entrer l’écho d’un monde malade sous un orage apocalyptique. On rit beaucoup, mais d’un rire féroce des travers d’une bourgeoisie corrompue, médiocre, prête à tout y compris au crime pour sauvegarder les apparences et préserver son confort. Après avoir soulevé tous les tabous : adultère, bi et homosexualité, secrets,alcoolisme, chantage et mensonges…la fin heureuse ne change rien à l’affaire. Affreux,sales et bourgeois, les deux compères ont montré de quelles turpitudes ils étaient capables, prouvant ainsi à quel point reste mince la frontière entre l’inconvenance et la bienséance, entre la morale et la décence.

Dany Toubiana

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Florence Yeremian

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Octobre 2014

Critiques / Théâtre L’Affaire de la rue de Lourcine d’Eugène Labiche par Corinne Denailles

Un cauchemar comique Dans cette comédie en un acte bâtie sur un quiproquo absurde, Labiche trousse un portrait assassin de la société bourgeoise du XIXe siècle qui prend l’eau de toutes parts. On y fréquente son monde et on méprise ceux qui n’en sont pas, mais, par ailleurs, on n’est pas trop à cheval sur sa propre moralité ; on serait même prêt à tout pour sauver la face et les convenances. C’est ce qui arrive à ce pauvre Lenglumé qui se retrouve, au lendemain d’un soir de beuverie clandestine, englué dans une histoire rocambolesque avec un certain Mistingue, cuisinier de son état, qui allez savoir comment, partage son oreiller ce matin-là. Par un stupide malentendu, assorti de troublantes pièces à conviction, les voilà convaincus d’avoir commis un meurtre. Effarés par ces hypothèses, tenaillées par la culpabilité, ils chevauchent leurs fantasmes au galop devant les yeux ahuris de Madame et du valet. Éclairage du versant noir de la pièce Si leurs aventures ridicules sont risibles, ils n’en vivent pas moins un véritable cauchemar. C’est ce versant noir qui domine le spectacle. Le metteur en scène Yann Dacosta prend ses distances avec la tradition et maîtrise son point de vue original de bout en bout. La scène initiale donne le ton ; on est plongé au coeur du cauchemar de Lenglumé qui rêve d’une boîte de nuit peuplée de danseurs aux masques fantastiques qui s’agitent sur une piste de danse. Au réveil, la piste de danse s’avère être son lit qui deviendra une fontaine. Notons la scénographie habile de Fabien Persil et William Defresne, on ne peut plus signifiante et esthétique, et les lumières de Thierry Vareille qui contribuent à l’ambiance inquiétante qui évoque les romans de Maurice Leblanc ou de Gaston Leroux. Rythme, justesse et inventivité Excellent directeur d’acteurs, Dacosta imprime au spectacle le rythme nécessaire, et les comédiens, justes et inventifs, font tous merveille, loin des clichés traditionnels. Benjamin Guillard est un Lenglumé apoplectique, perpétuellement agité. Pivot de l’édifice, il ne confond pas vitesse et précipitation. Son duo avec Mistingue (Guillaume Marquet) est excellent. Sa femme Norine, qui se prépare au baptême du neveu Potard, déambule bigoudis sur la tête et masque de beauté sur le visage pour finir dans une robe moche à souhait mais tellement chic (costumes de Morgane Mangard). Hélène Francisci lui prête une énergie et un abattage certains. Le valet Justin est perpétuellement éberlué (Pierre Delmotte) à peu près autant que le cousin Potard (Jean-Pascal Abribat), tout de vert pomme vêtu. Les comédiens ne cherchent jamais à faire rire ; tels des marionnettes sanglées dans leur statut social, ils jouent à fond la situation au premier degré, révélant ainsi conjointement la cruauté du propos et la drôlerie de la pièce. Cette sombre sarabande est conduite sous les auspices de la musique de Pablo Delcoq, lointain écho des mélodies de Kurt Weill, qui participe à l’architecture du spectacle. En compagnie de Pauline Denize (voix et violon), Decoq accompagne l’action sur scène à la guitare d’une belle voix grave. Cerise sur le gâteau, les quelques interventions chantées des comédiens, sont de qualité. Si on n’y rit jamais franchement, on savoure tout autant les perfidies et les répliques claquantes de Labiche que le talent, le style et l’originalité avec lesquels cette Affaire est rondement menée. L’Affaire de la rue de Lourcine d’Eugène Labiche. Mise en scène Yann Dacosta. Compositeur, Pablo Delcoq. Musiciens sur scène, Pauline Denize, Pablo Decoq. Costumes, Morgane Mangard. Lumières, Thierry Vareille. Scénographie, Fabien Persil et William Defresne. Son, Johan Allanic. Mise en danse, Frédéricke Unger. Au TOP à Boulogne jusqu’au 12 octobre 2014 à 20h30, dimanche à 16h. Rés. 01 46 03 60 44. Durée : 1h15. www.top-bb.fr © Julie Rodenbour Corinne Denailles mercredi 8 octobre

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Octobre 2014

Dans L’Affaire de la rue de Lourcine, le vaudeville le dispute au roman policier dans une sombre affaire d’assassinat burlesque. Yann Dacosta revisite les motifs labichiens dans une ambiance cauchemardesque et cocasse. Portée par cinq comédiens loufoques et énergiques et un duo de musiciens talentueux, cette version millimétrée séduit. N’hésitez pas.

Une scène d’orgie alcoolisée ouvre le bal : corps à la dérive, musique à plein tube. La fête, en somme. Le réveil s’annonce néanmoins brutal pour le riche Lenglumé. Se souvenant seulement d’avoir perdu un parapluie vert, il découvre dans son lit son camarade de beuverie, Mistingue, qui a oublié un mouchoir portant ses initiales. La femme du rentier lit à table un article sur une jeune charbonnière retrouvée assassinée dans la rue de Lourcine. À ses côtés, gisent les deux objets perdus… Le duo d’ivrognes aurait-il commis le crime ? La machine infernale s’élance alors et transforme la décence en ignominie.

Dans cette courte pièce en un acte, Labiche ausculte toutes les mesquineries de la bourgeoisie de l’Empire déclinant et ses tabous : adultère, homosexualité refoulée, mensonges, meurtres… Même si la fin s’épanouit dans la liesse, la bassesse des deux hommes met à mal la morale et renvoie plutôt aux instincts les plus primaires et malsains de l’existence. Sous des couverts de comédie, ce vaudeville se veut féroce et absurde.

La scénographie de Fabien Persil et William Defresne place le décor dans un appartement luxueux, où l’or le dispute aux tapisseries stylisées. Un table-fontaine trône au centre et se métamorphose en objet dramaturgiquement indispensable : à la fois symbole de richesse mais aussi d’oubli (le fleuve Léthé), ce bassin échoue à éponger les crimes des deux malfrats. Se laver les mains s’avère aussi vain que d’échapper à sa conscience.

Yann Dacosta situe sa vision de la pièce dans un cabaret inquiétant et cohérent. Orages grandiloquents, rhumes incessants, trombe d’eau s’immisçant dans l’intérieur rassurant de la maison, ours en peluche dissimulant bien des surprises… Autant d’éléments troublants parfaitement rendus par le metteur en scène. Construite sous forme d’enquête où l’amnésie constitue le suspect numéro un, L’Affaire de la rue de Lourcine se suit sans temps mort et avec un plaisir indubitable. Dans la plus pure tradition du vaudeville, de nombreuses chansons accompagnent avec parcimonie la comédie. Pablo Elcoq et Pauline Denize jouent en live une partition plutôt rock tandis que le reste de la distribution se lance dans des morceaux rythmés et amusants.

Benjamin Guillard et Guillaume Marquet s’apparentent à des Laurel et Hardy bouffons et vils : le premier, petit et trapu, campe un Lenglumé snob et lâche à souhait avec délectation, tandis que le second s’impose en Mistingue élancé et fortement alcoolisé. Ce tandem de bras cassés assure le show. Hélène Francisi régale en épouse dépassée par les événements tandis que Jean-Pascal Abricat, en cousin-témoin tout de vert pomme vêtu, ressemble beaucoup à Christian Hecq dans sa clownerie. Pierre Delmotte, enfin, s’illustre en domestique insolent.

Ainsi, L’Affaire de la rue de Lourcine mérite le détour, tant par sa mise en scène intelligente et logique dans sa démarche cauchemardesque que par l’abattage des comédiens-musiciens, très à l’aise dans leur rôle. Allez-y ! ♥ ♥ ♥ ♥

Thomas N’GO Hong

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Octobre 2014

L’Affaire de la rue de Lourcine est une comédie en un acte de Labiche, représentée la première fois à Paris, au Théâtre du Palais-Royal, le 26 mars 1857.

© Julie Rodenbour

Chez cet auteur de comédies loufoques et de vaudevilles à la mécanique admirable – maître du rire et peintre sans illusion de l’homme, un « animal humain » inscrit dans la société bourgeoise de son temps -, la verve jaillissante et les inventions cocasses du langage, soutenues par un comique extravagant et une logique de l’absurde, sont fertiles à l’extrême. Labiche rit des mœurs de ses contemporains mais il porte aussi à leur égard une disposition à voir leurs bons côtés. Ses personnages vivent des aventures extravagantes, par-delà la mesquinerie et la médiocrité, l’hypocrisie et l’égoïsme, aussi tricheurs et vaniteux soient-ils. Ils sont fourbes entre eux, dans leur vie privée comme dans leurs affaires. Lâches et velléitaires, ils n’ont de passion forte que pour leur argent. Quelle est cette Affaire de la rue de Lourcine ? À Paris, le rentier Lenglumé se réveille avec une belle gueule de bois et le souvenir d’avoir perdu son parapluie vert : « Nom d’un petit bonhomme ! J’ai ramené quelqu’un sans m’en apercevoir !… De quel sexe encore ? » Il trouve dans son lit son complice de beuverie, Mistingue qui a perdu son mouchoir. Madame Lenglumé lit un journal : le crime d’une charbonnière vient d’être commis, rue de Lourcine ; les meurtriers ont laissé sur place un parapluie vert et un mouchoir. Nos deux amis ne sont plus sûrs de rien, seraient-ce pas eux qui ont fait le coup ? Ces incertitudes, quant à la conduite à tenir – laquelle aurait fâcheusement failli – relèvent de la culpabilité de la bourgeoisie du XIX é, parvenue et donc douteuse.

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Le jeune metteur en scène Yann Dacosta n’y va pas par quatre chemins pour rendre au mieux la petite musique infernale de cette farce aux accents fantastiques, censée se passer dans la chambre d’un intérieur bourgeois aux airs de boîte de nuit fluo. Nos deux compères sont par nature d’authentiques bêtes de scène, les figures d’un cauchemar dont ils ont peine à distinguer la part d’invention et la part de réalité. Secrets inavoués, sorties interdites que l’on tait à sa douce-moitié trompée, délire et esprit festif, les personnages miment les rencontres mauvaises et fictives. Qu’est-on soi-même, si ce n’est les projections fantasmatiques dont on a peur ? Les acteurs, musiciens chanteurs à l’occasion de jolis refrains vaudevillesques, sont tout bonnement excellents, s’oubliant pour l’accomplissement de leur rôle scénique. Grotesques et burlesques pour le public, sérieux et graves pour leurs proches bernés, ils suscitent le rire franc et la moquerie joyeuse. Benjamin Guillard est un Lenglumé inénarrable – physique expressionniste et inquiétant de cinéma noir des années vingt, le regard hagard, commentant sa situation et courant sur le plateau, essoufflé, harcelé par ses craintes et ses frayeurs. Son partenaire de fête, Mistingue, qu’incarne avec un talent égal le mobile Guillaume Marquet, assure sa partition avec toute la mesure d’étrangeté souhaitée. Jean-Pascal Abribat en brave Potard, ami de la famille et propriétaire du parapluie, vêtu de vert des pieds jusqu’à la tête, est un fantoche et clown burlesque filiforme. Le valet facétieux Justin, interprété par Pierre Delmotte, allure classe et détachée, mais enrhumé, n’en pense pas moins sur le compte de son maître, tout en essayant de tirer son épingle du jeu. Quant à la figure féminine de la pièce, Norine – épouse de Lenglumé -, elle reste à l’écoute troublée de son abruti de mari, pris de folie. Hélène Francisci dans le rôle ne se laisse aucunement voler la vedette. Ajoutons la malice des musiciens, Pauline Denize et Pablo Elcoq, le compositeur. Grimaces, pitreries, apartés, adresses au public, la représentation passe comme une météorite scénique, une traînée lumineuse, entre bouffonneries et sourires en coin.

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Octobre 2014

Comédie de Eugène

Labiche, mise en scène de Yann Dacosta, avec Jean-Pascal Abribat, Pierre Delmotte, Pauline Denize, Pablo Elcoq, Hélène Francisci, Benjamin Guillard et Guillaume Marquet. Tandis qu'une musique style "Underground londonienne" envahit la salle, le rideau s'ouvre sur une étrange boîte de nuit où les danseurs masqués évoquent un club quelque peu louche. Un moustachu en tenue de cow-boy visiblement éméché traverse la scène, un ours en peluche blanc à la main. C'est ainsi que démarre le spectacle et déjà le public est subjugué par l'ambiance fantasmagorique qu'a choisi Yann Dacosta, soutenu par une scénographie hallucinante de Fabien Persil et William Defresne éclairée avec talent par Thierry Vareille. La Compagnie Le Chat Foin propose un vrai univers qui nous embarque dans des brumes d'alcool, lendemain de fête douloureux pour Lenglumé, le maître de maison, qui n'a aucun souvenir de la soirée passée la veille et retrouve dans son lit un certain Mistingue, ami d'études et compagnon de beuverie. Les deux bourgeois n'en mènent pas large quand ils apprennent qu'un meurtre a été commis cette nuit et que tout porte à croire qu'ils en sont les coupables. Pièce certainement à part dans l'oeuvre d'Eugène Labiche, "L'affaire de la rue de Lourcine" mêle le burlesque et l'angoisse et peut faire penser par moments à du Edgar Allan Poe, tant l'ambiance fantastique y est développée. Lenglumé pourrait être une sorte de Jack L'Eventreur qui ne se l'avoue pas. C'est de la société du 19ème siècle que Labiche dresse le portrait et de ses bourgeois dont le paraître guide le comportement dans cette histoire cruelle et sombre qui en dit beaucoup sur les mœurs de l'époque. Dans sa mise en scène en tous points excellente, Yann Dacosta installe sur scène deux formidables musiciens qui rythment le spectacle : Pauline Denize, violoniste impressionnante alterne discrétion et interventions décisives et Pablo Elcoq, qui chante d'une voix envoûtante, a composé l'univers musical décadent tendance Tom Waits qui correspond parfaitement au parti pris de mise en scène. La distribution est également splendide. Benjamin Guillard est un Lenglumé fascinant qu'on ne parvient pas à cerner. Tour à tour naïf ou pervers, victime ou assassin en puissance, il brouille les pistes avec délectation. L'autre compère c'est le non moins brillant Guillaume Marquet qui parvient à composer un personnage mémorable proche de la pantomime. La précision de son jeu fait mouche. Enfin, Jean-Pascal Abribat passe maître en burlesque, Hélène Francisi est une Norine de tempérament aux contours flous et Pierre Delmotte compose un Justin étrange à la Tim Burton. Tout ce petit monde (dans les superbes costumes de Morgane Mangard) est particulièrement à l'aise, chante et bouge (remarquable travail chorégraphique de Frédérike Unger) avec une belle cohésion pour donner à ce spectacle original et fort une rare perfection. On est sous le charme. Magnifique esthétiquement et interprété par une distribution brillante idéalement dirigée, "L'affaire de la rue de Lourcine" est un vaudeville singulier et une formidable réussite qu'on ne peut pas rater.

Nicolas Arnstam

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Humour et noirceur : voilà les deux mots qui résumeraient le mieux L'Affaire de la rue de Lourcine, pièce en un acte d'Eugène Labiche, actuellement présentée au Théâtre de l'Ouest parisien à Boulogne, dans une mise en scène de Yann Dacosta. C'est l'histoire d'un lendemain de fête. Un lendemain plus que difficile, de ceux où l'on a l'impression de se lever avec les cheveux qui poussent à l'intérieur du crâne et où la soirée de la veille reste floue ... très floue. Lenglumé, grand bourgeois parisien, se réveille au lendemain de cette nouba totalement déboussolé et découvre un autre homme dans son lit. Compagnon de débauche, l'intrus, un dénommé Mistingue, ne se rappelle pas plus les détails de la soirée. Un parapluie et un mouchoir perdu, quelques morceaux de charbon au fond des poches : voilà les seuls indices dont disposent nos deux pochtrons. Des indices qui, à la lecture d'un morceau de journal froissé, laissent à penser qu'ils ont commis la veille un meurtre.

Il y a beaucoup d'humour dans le texte de Labiche. Beaucoup de noirceur aussi. Même l'heureux dénouement et l'innocence de Mistingue et Lenglumé créent le malaise : ces deux-là se sont montrés sous leur vrai jour, prêts à tout pour camoufler leur crime, et ont dévoilé la laideur de leur âme. Un aspect renforcé par la mise en scène de Yann Dacosta et la scénographie de Fabien Persil et William Defresne. Loin de l'intérieur bourgeois fin 19e auquel on pouvait s'attendre, on se retrouve dans une chambre au décor étrange - des portes capitonnées de noir, un lit rond aux draps noirs - à mi-chemin entre l'esthétique porno-kitsch et le manoir de la famille Adams ...

Guillaume Marquet(récompensé par un Molière pour son rôle dans Le Dindon mis en scène par Philippe Adrien) et Benjamin Guillard sont magistraux dans les deux rôles principaux. Il y a dans leur duo quelque chose de Laurel et Hardy. Le reste de la distribution est également d'un excellent niveau et les interludes musicaux fonctionnent à merveille. Un spectacle que l'on n'hésite donc pas à vous recommander ! Après cette création au TOP à Boulogne, la pièce fera une longue tournée avec six semaines d'étapes au Théâtre 13 à Paris (en janvier - février). Pas d'excuses donc ...

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L’HEBDOMADAIRE CHRETIEN D’ACTUALITE

N°3610 du 6 au 12 novembre 2014

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Jean Grapin

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Difficile de parler d’une comédie le jour où le rire est dans la ligne de mire des kalachnikovs. Pourtant, il faut continuer de rire de tout pour répliquer à la violence, pour éviter de tomber dans le dégoût, pour empêcher les cons, les décérébrés et les fanatiques de dominer le monde. Rire demande un minimum d’esprit, d’intelligence et de philosophie, que les tueurs n’ont pas. C’est pour cela qu’ils tueront tous ceux qui ont un peu d’esprit, d’intelligence et de philosophie. C’est pour ça qu’il faut rire de plus en plus fort pour continuer de donner du combustible au feu de la dérision et de la provocation qui brûlait à la rédaction de Charlie Hebdo.

La dérision et la provocation éclatent dans cette pièce de Labiche et dans la mise en scène qu’en a fait Yann Dacosta.

L’histoire racontée par Labiche est déjà très décapante pour l’image que voudraient avoir les bourgeois et, de façon plus générale, les humains, dans le miroir : Un homme riche du nom de Lenglumé se réveille un matin avec un homme inconnu dans son lit. La veille, il a trop bu, lors d’une soirée avec les anciens de sa promotion, et il ne se souvient de rien. L’autre non plus. Situation ambigüe et délicate, totalement vaudevillesque, surtout quand il s’agit d’affronter les regards et les soupçons de son domestique et de sa femme, mais situation qui s’assombrit soudain quand un article du journal leur donne à penser que tous les deux, Lenglumé et son camarade, Mistingue, sont responsables du crime d’une jeune femme commis la nuit précédente dans la rue de Lourcine où ils étaient, sans doute, sans aucun doute, peut-être, ils ne savent plus, ils étaient trop saouls.

Convaincus d’avoir commis ce crime, reconnus par un cousin de sa femme qui débarque et campe dans l’appartement, leurs réactions vont soudain révéler en quoi ces personnages aux apparences si correctes, si léchées, si sociales et bienpensantes sont de véritables scélérats, des crapules de la plus basse espèce, des assassins. Tout ça pour sauver leur peau. Tous deux devenant complice pour sitôt après tenter de s’étrangler l’un l’autre, de se noyer, pour faire disparaître le dernier témoin du forfait.

Raconté comme ça, on ne dirait pas une comédie, mais la fin et le brio de Labiche finit par tourner l’histoire à la farce.

Yann Dacosta a fait de cette pièce, une sorte de cabaret absurde, déjanté, extraverti.

Dans un décor signé Fabien Persil et William Defresne où à six portes latérales mènent sur la chambre de Lenglumé qui devient peu après salle à manger, puis patio où grenouille une fontaine après que d’avoir été piste de danse où s’étreignent les corps ivres. Fond de plateau : une scène sur laquelle sont juchés une violoniste, un guitariste, micros en bouche. Car ce spectacle est musical. Des musiques, des chansons surgissent au milieu des scènes, des passages de poursuites, de courses, de luttes sont présentés comme des chorégraphies. Parfois, le chanteur, Pablo Elcoq, accompagné de la violoniste Pauline Denize, pousse un couplet de sa voix caverneuse comme onde rock (il a aussi composé les musiques). Tout cela dans des lumières de Thierry Vareille faites de beaucoup de ponctuels qui varient passent par toute la gamme de couleur dans des tons très acidulés.

Mais c’est avant tout le jeu des acteurs qui apporte la dimension excentrique. Parfois clownesques, toujours forçant le trait, exagérant la moindre réaction, tous les interprètes ont créé là des personnages démesurés, absolument pas réalistes, chacun porteur des ses propres tics physiques, de sa gestuelle, de sa démarche. Les costumes de Morgane Mangard sont au diapason, empruntant un peu à toutes les époques, sauf pour les deux protagonistes principaux qui restent dans une sobriété chromatique presque datés.

À partir de la pièce de Labiche, Yann Dacosta et sa troupe ont réussi à créer une sorte de manège visuel un peu fou, un peu baroque, un vent de jeunesse où les comédiens vont juste un petit trop loin, ils vont jusqu’au bout de leurs choix, ce qui risque de déplaire aux puristes des vaudevilles. Mais je suis sûr que ce spectacle ne fera pas se retourner Labiche dans sa tombe, non, il le fera plutôt sortir de terre et danser la ronde sous les étoiles en riant.

Bruno Fougniès

Je suis Charlie

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« L’affaire de la rue de Lourcine » Jusqu’au 15 février au Théâtre 13/Seine

Lorsque Lenglumé, un rentier financièrement à l’aise, se réveille avec un sévère mal de tête, à la suite d’une soirée très arrosée des anciens de l’Institution Labadens, il découvre couché à ses côtés un inconnu, Mistingue. Tous deux se demandent ce qu’ils font ensemble, puisque « après la salade », ils ne se souviennent plus de rien. Un journal trouvé dans la pièce évoque l’horrible crime commis contre une charbonnière, rue de Lourcine, et bien des indices qu’ils découvrent dans leurs poches semblent les accuser. Dans cette pièce, Labiche exploite toutes les ficelles du vaudeville, quiproquos, mensonges en cascades jusqu’à l’absurde, et en profite pour égratigner les bourgeois, bêtes, égoïstes, veules, prêts à tout pour garder leur confort et leur tranquillité. La scénographie très réussie, met au centre de la pièce un bassin où les héros se lavent, non pour effacer des remords qu’ils n’ont pas, mais pour se débarrasser des traces supposées de leur forfait. La mise en scène de Yann Dacosta sans laisser complètement de côté l’aspect parfois sombre de la pièce choisit un parti pris qui renvoie plutôt au cinéma burlesque. Le désordre est partout, dans les bruits de verres cassés, dans l’orage qui éclate, dans le comportement anomique des personnages. Quand le rideau s’ouvre, des ombres évoluent derrière un voile noir, évoquant la soirée de la veille aux aspects cauchemardesques. Puis les personnages apparaissent un à un, s’interrogeant sur ce qui a bien pu se passer. Une enquête avec une logique délirante démarre, où se révèlent les tares de cette bourgeoisie mesquine, arc-boutée sur l’orgueil de sa position sociale, angoissée par tout ce qui pourrait la mettre en cause, uniquement soucieuse des apparences, prête à toutes les trahisons et à aller jusqu’au crime, car il y a de la noirceur derrière le rire de Labiche. Á ce jeu de massacre, nul n’échappe, ni les bourgeois, Lenglumé (très bon Benjamin Guillard) ou Mistingue (Guillaume Marquet), ni la femme de Lenglumé interprétée avec ce qu’il faut d’adaptation à des situations abracadabrantes par Hélène Francisi, ni le valet (Pierre Delmotte) qui épouse peu ou prou les tares de son maître. Jean-Pascal Abribat se désarticule et met un comble au burlesque dans son interprétation de Potard, le beau-frère, à la recherche accessoirement de son parapluie, mais surtout d’un prêt. La pièce s’accompagne de chansons interprétées par les acteurs accompagnés de deux musiciens. Finalement tous, de parfaits scélérats pourtant, s’en sortent bien. C’est du Labiche !

Micheline Rousselet

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Vaudeville anxiogène, L’affaire de la rue de Lourcine (1857) d’Eugène Labiche (1815-1888) entraîne le spectateur dans la spirale d’un effrayant thriller psychologique sur fond de perversité et d’hypocrisie bourgeoise. Mis en scène au Théâtre 13 par Yann Dacosta et propulsé par une puissante scénographie, le texte de l’auteur du Voyage de M. Perrichon (1860) s’y profile avec une couleur humoristique férocement expressive. Sans doute, l’on retrouve dans L’affaire de la rue de Lourcine bon nombre d’ingrédients qui ont fait la célébrité du théâtre de Labiche : une cascade de quiproquos et de rebondissements ; des personnages imbus d’eux-mêmes, comme le parfait petit-bourgeois béotien incarné dans L’affaire par Lenglumé ; d’autres, secondaires mais futés, comme le cousin faussement bêta (Potard), le domestique un peu indiscret (Justin) ou la femme candide (Norine) jamais mise au courant des « affaires » de son mari. Pourtant, par son climat résolument sombre, psychotique et pessimiste - à mille lieux du délicat et aérien Un chapeau de paille d’Italie (1851) - L’affaire se démarque de la production habituelle de Labiche. Cette tragi-comédie en milieu bourgeois a comme toile de fond un horrible crime (celui d’une jeune charbonnière). Cependant, l’auteur dramatique français a semble-t-il délaissé sur le plan de l’intrigue les circonstances du crime et les ressorts théâtraux potentiels d’une enquête policière pour se concentrer avec un parfum d’humour noir sur le comportement de Lenglumé, personnage fantasque et calculateur imprégné de culpabilité. D’ailleurs, la pièce débute par le réveil dans son lit de ce rentier ridicule, ne se souvenant plus de ce qu’il a fait la veille au soir, et dont tout laisse penser qu’il est l’auteur du crime de la rue de Lourcine. Dans L’affaire, les comédiens se révèlent convaincants, en particulier Benjamin Guillard dans son rôle de Lenglumé, un superbeauf calculateur et pulsionnel tentant d’éliminer toute personne de son entourage qui pourrait le dénoncer. Au-delà de l’intrigue, simple et un peu manichéenne, c’est surtout par la suggestion des caractères et le jeu expressif des comédiens que le spectacle convainc. Constamment, la passion de Lenglumé pour le positionnement social et les convenances s’entrecroise avec son proche passé criminel, offrant des effets décalés et parfois savoureux. Au-delà du crime, le texte de Labiche nous oriente vers toutes les cachotteries honteuses du personnage : adultère, alcoolisme, chantage… Judicieusement, la mise en scène de Yann Dacosta s’affiche baroque et inquiétante avec de nombreux intermèdes musicaux (guitare, violoncelle), un jeu raffiné de lumières, des décors imposants et un surprenant bassin, lieu symbolique de toutes les tartufferies de Lenglumé. Recréant l’image saisissante de deux superbeaufs gladiateurs, la scène dans laquelle Lenglumé et Mistingue s’entretuent dans le bassin s’avère particulièrement réussie. Pièce atmosphérique où sans doute l’étrange l’emporte (sans l’exclure) sur le rire, L’affaire de la rue

de Lourcine à travers le personnage emblématique de Lenglumé nous plonge dans une incursion assez fascinante dans l’hypocrisie des mœurs et dans le quotidien d’une certaine bourgeoisie au XIXe siècle. Comme ses contemporains - du Mirbeau du Journal d’une femme de chambre (1900) au Zola de La fortune des Rougon (1870) -, Labiche nous questionne avec une certaine noirceur sur l’avidité, la bêtise, la cruauté et le double langage !

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Thierry De Fages

On traîne parfois (un peu) des pieds en allant découvrir la énième production de l’un de nos vaudevilles d’antan, certes charmants, divertissants, mais bien vus… Souvent englués dans un dix-neuvième siècle esthétiquement pesant, ou littéralement pulvérisés par des idées de mise en scène “contemporaines“ laissant le spectateur (et votre serviteur) pantois. Au Théâtre 13, ô joie, rien de cela. Yann Dacosta et sa compagnie du Chat Foin s’emparent avec créativité, sans toutefois la dénaturer, de “L’Affaire de la rue de Lourcine“, comédie (musicale) grinçante du sieur Labiche dont ils extraient la drôlerie, la noirceur, ainsi que l’intemporalité du propos, ici moins anecdotique que dans d’autres ouvrages, mettant en lumière les possibles bassesses, voire la scélératesse du genre humain lorsqu’il s’agit de sauver sa peau, ou simplement les apparences. Soit une relecture singulière de l’oeuvre mais respectueuse, cohérente, enlevée et savoureuse, à voir jusqu’au 15 février. L’intrigue. Ce matin-là Lenglumé, bourgeois sans histoire, se réveille dans son lit les mains couvertes de charbon aux côtés de Mistingue, ancien camarade d’école. Tous deux n’ont aucun souvenir de la nuit de débauche qu’ils viennent de passer. L’un a perdu son parapluie, l’autre son mouchoir. Tandis qu’ils tentent de recouvrer leurs esprits, la femme du premier apprend dans le journal le meurtre d’une jeune charbonnière par deux ivrognes ayant (justement) abandonné un parapluie et un mouchoir sur les lieux du crime. Les fêtards sont alors convaincus d’avoir fait le coup et vont tout mettre en oeuvre pour effacer indices, preuves, et neutraliser les éventuels témoins. Tout… Apre est la farce. Assez laids, peu glorieux sont ses protagonistes, nous tendant un miroir interrogateur aussi glaçant qu’amusant, évidemment grossissant. De cette partition, Yann Dacosta a choisi de réaliser un cauchemar apocalyptique effréné. Une réussite que son entreprise. Visuellement, théâtralement, musicalement. Au coeur d’une arène métallique bordée de portes, habillée d’éclairages fluos fantasmatiques, sous une pluie battante, l’orage grondant régulièrement, évoluent des personnages aux yeux cernés de noir, aux actions cadencées par des musiques hystériques ou hypnotiques (excellentes créations de Pablo Elcoq). Elément central de la scénographie, une immense fontaine dans laquelle les criminels supputés viennent et reviennent noyer les traces de leurs méfaits. Criminels remarquablement incarnés par Benjamin Guillard et Guillaume Marquet dont l’urgence désespérée, irréfléchie et égoïste fait merveille. De la scène d’ouverture orgiaque où le premier, passablement imbibé, accroché à une peluche, sautille tel Zébulon sans jamais s’arrêter, jusqu’à leur duel aquatique en sous-vêtements, bouteille et couteau-hachoir en main, ils se révèlent désopilants. Autour d’eux Hélène Francisci est une maîtresse de maison à la poigne et à l’abattage réjouissants, Jean-Pascal Abribat un témoin gênant strip-teaseur des plus cocasses. Quant à Pierre Delmotte, il compose avec talent un domestique nonchalant au professionnalisme relatif… A voir !

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