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1 REVUE D’ACUALITES JURIDIQUES INTERESSANT LE NOTARIAT ANNEE 2016 MOIS D’AOUT PRESENTATION Cette revue est conçue pour présenter, sous diverses thématiques et par ordre chronologique de parution, les points jugés principaux méritant attention. L’idée étant de fournir un document « d’orientation » : il s’agit donc uniquement de repères assortis de très courtes observations dans lesquelles, en vue d’en faciliter l’utilisation et de permettre un « repérage » rapide, la notion principale est indiquée en gras. Les thématiques choisies, et annoncées ci-dessous, correspondent à une division tout à fait classique et se retrouvent dans les revues juridiques, notamment ici dans le DEFRENOIS FLASH. ACTES COURANTS et IMMOBILIER (urbanisme construction environnement - droits de préemption etc.) FAMILLE ET PATRIMOINE FISCAL ENTREPRISE ET DROIT COMMERCIAL RURAL PROFESSION Pour permettre une lecture plus facile, les abréviations suivantes sont utilisées : - L pour loi ; - O pour ordonnance ; - D pour décret ; - A pour arrêté ; - C. const pour Conseil constitutionnel ; - CE pour arrêt du Conseil d’état ; - Cass. pour Cour de cassation ; - RM pour réponse ministérielle ; - Circ. pour circulaire ; - JO Journal officiel (JO AN Journal officiel référence Assemblée nationale JO S référence Sénat). NOTA IMPORTANT Chacun des sujets cités est assorti d’un commentaire succinct ; ce dernier repose sur l’état du droit positif à l’époque de la parution mais les évolutions peuvent apporter ultérieurement des modifications : il faut donc s’efforcer de faire le lien sous cet aspect. Dans la mesure du possible, des indications seront données de ce chef . REVUE D’ACTUALITES Beaucoup moins « dense » que l’an dernier à pareille époque (Loi Macron ), voici la partie « août » de la revue estivale d’actualités.

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REVUE D’ACUALITES JURIDIQUES INTERESSANT LE NOTARIAT

ANNEE 2016 MOIS D’AOUT

PRESENTATION

Cette revue est conçue pour présenter, sous diverses thématiques et par ordre

chronologique de parution, les points jugés principaux méritant attention.

L’idée étant de fournir un document « d’orientation » : il s’agit donc uniquement de

repères assortis de très courtes observations dans lesquelles, en vue d’en faciliter l’utilisation

et de permettre un « repérage » rapide, la notion principale est indiquée en gras.

Les thématiques choisies, et annoncées ci-dessous, correspondent à une division

tout à fait classique et se retrouvent dans les revues juridiques, notamment ici dans le

DEFRENOIS FLASH.

ACTES COURANTS et IMMOBILIER (urbanisme – construction – environnement - droits de

préemption – etc.) FAMILLE ET PATRIMOINE FISCAL ENTREPRISE ET DROIT COMMERCIAL RURAL PROFESSION

Pour permettre une lecture plus facile, les abréviations suivantes sont utilisées :

- L pour loi ;

- O pour ordonnance ;

- D pour décret ;

- A pour arrêté ;

- C. const pour Conseil constitutionnel ;

- CE pour arrêt du Conseil d’état ;

- Cass. pour Cour de cassation ;

- RM pour réponse ministérielle ;

- Circ. pour circulaire ;

- JO Journal officiel (JO AN – Journal officiel référence Assemblée nationale – JO S

référence Sénat).

NOTA IMPORTANT

Chacun des sujets cités est assorti d’un commentaire succinct ; ce dernier repose sur

l’état du droit positif à l’époque de la parution mais les évolutions peuvent apporter ultérieurement

des modifications : il faut donc s’efforcer de faire le lien sous cet aspect. Dans la mesure du possible, des indications seront données de ce chef.

REVUE D’ACTUALITES

Beaucoup moins « dense » que l’an dernier à pareille époque (Loi Macron …), voici la partie

« août » de la revue estivale d’actualités.

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ACTES COURANTS et IMMOBILIER

1-*** O. n° 2016-985 du 20/07/2016 - JO 21/07/2016 (Ordonnance relative au bail réel solidaire - BRS)

*** L’ordonnance ci-dessus, pour laquelle le Gouvernement avait été habilité par l’article 94

de la loi dite Macron n° 2015-990 du 6 août 2015, crée un instrument juridique nouveau et

original qui repose pour l’essentiel sur la séparation entre la « propriété » du foncier et celle du bâti

sur une longue période : l’objectif poursuivi étant de permettre la constitution d’un patrimoine

immobilier, exclusivement réservé à l’usage d’habitation principale ou mixte (professionnel et habitation

principale) pour les personnes ayant un revenu modeste.

*** Plusieurs décrets d’application, notamment en ce qui concerne les taux et les plafonds

sont à venir.

*** Le notariat ne sera que peu concerné par la phase initiale puisque seront à la

« manœuvre » les « organismes de foncier solidaire (OFS) » de l’article L. 329-1 du CU dans sa

rédaction résultant de la loi ALUR ; en revanche, les droits réels immobiliers en découlant, soit

lors de leur constitution postérieure à la conclusion du BRS, soit lors de leur mutation par

vente, donation ou succession, intéresseront au plus haut point la profession en particulier

sous l’angle de la publicité foncière.

*** Cette ordonnance complète le CCH par les articles nouveaux : - L. 255-1 à L. 255-6

(définition et caractéristiques du BRS) - L. 255-7 à L. 255-9 (droits et obligations des parties)

- L. 255-10 à L. 255-16 (modalités et effets de la transmission par vente, donation ou

succession des droits réels immobilier qui résultent du BRS) - L. 255-17 (nullité du BRS en

cas de non-respect de ses dispositions impératives, notamment plafond de ressources et de

prix) - L. 255-18 (extension, aux ventes de droits réels issus d’un BRS, de la protection de

l’acquéreur immobilier relative au délai de rétractation et de réflexion).

1° - *** En ce qui concerne la définition, les caractéristiques du BRS et les droits et obligations

de ses contractants, il est renvoyé aux textes cités ci-dessus : seulement quelques points seront

indiqués.

Par un BRS, un OFS consent à un preneur, dans les conditions prévues à l'article L. 329-1

du CU et pour une durée comprise entre dix-huit et quatre-vingt-dix-neuf ans (attention aux

impératifs de publicité foncière), des droits réels en vue de la location ou de l'accession à la

propriété de logements, avec s'il y a lieu obligation pour ce dernier de construire ou réhabiliter

des constructions existantes ; ces logements sont destinés, pendant toute la durée du contrat, à

être occupés à titre de résidence principale.

Le BRS peut être consenti selon plusieurs modalités.

- A un preneur qui occupe le logement = plafonds de prix de cession des droits réels et de

ressources du preneur à fixer par décret avec possibilité pour l’OFS d’appliquer des

seuils inférieurs. = Le contrat peut prévoir que le preneur doit occuper le logement

objet des droits réels sans pouvoir le louer.

- A un opérateur qui construit ou réhabilite des logements pour vendre, à des acquéreurs

agréés par l’OFS, les droits réels immobiliers attachés à ces logements à des

bénéficiaires répondant à conditions de ressources. - A un opérateur qui construit ou réhabilite des logements pour louer en respectant des

plafonds du loyer applicable et des ressources du locataire à fixer par décret avec

possibilité de seuils inférieurs. - Le BRS ne peut prévoir aucune faculté de résiliation unilatérale de la part du bailleur ni

faire l'objet d'une tacite reconduction. Les principaux droits et obligations des parties au contrat de bail sont les suivants.

- Obligation d’effectuer des travaux de construction ou de réhabilitation obligatoirement

initialement prévus.

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- Interdiction de diminuer la valeur de l'immeuble ou de démolir, même en vue de les

reconstruire, les ouvrages existants ou qui ont été édifiés ou réhabilités.

- Les constructions et améliorations réalisées par le preneur demeurent sa propriété en

cours de bail et deviennent la propriété de l'OFS à l'expiration du bail.

- Le preneur peut jouir librement des droits réels immobiliers et des installations ou

constructions qu'il a édifiées, rénovées ou réhabilitées, dès lors qu'il n'est pas porté

atteinte à la destination de l'immeuble, ou à l'état dans lequel il a été convenu que ces

droits réels immobiliers seraient remis en fin de bail.

- Des activités accessoires pourront être exercées après accord de l'OFS.

- La constitution de servitudes actives ou passives est possible : celles passives, sauf

accord de l’OFS, ne peuvent dépasser la durée du bail (attention au rôle du notaire en

la matière).

- Le preneur doit maintenir en bon état d'entretien et de réparations les constructions.

- Le preneur doit s'acquitte du paiement d'une redevance dont le montant tient compte

de divers paramètres (voir le texte) : le défaut de règlement entraîne la résiliation après

indemnisation de la valeur des droits réels immobiliers.

- Les droits réels ainsi que les constructions édifiées, rénovées ou réhabilitées sur le

terrain ou l'immeuble bâti donné à bail peuvent être saisis. Les parties peuvent

librement convenir de la date d'échéance des sûretés qu'elles constituent ; défaut,

celles-ci prennent fin en cas de résiliation du contrat de bail.

2° - *** En matière de transmission des droits réels immobiliers le rôle du notariat sera plus

important, en conséquence les textes correspondants sont intégralement reprise ci-dessous : le

principe essentiel étant le plafonnement du prix ou des valeurs de cession.

« Art. L. 255-10.- Pour tout projet de cession ou donation des droits réels afférents au bien objet du bail réel solidaire, l'acquéreur ou donataire reçoit, de la part du cédant ou donateur, une offre préalable de

cession ou de donation mentionnant expressément le caractère temporaire du droit réel, sa date d'extinction, la nouvelle durée du bail réel solidaire résultant de l'application de l'article L. 255-12 si

l'organisme foncier solidaire agrée la transmission des droits réels dans les conditions prévues à l'article L. 255-11, les conditions de délivrance de cet agrément par l'organisme de foncier solidaire, les modalités de calcul du prix de vente ou de la valeur donnée, telles que prévues au bail. L'offre reproduit les dispositions du présent chapitre. Le cédant ou donateur est tenu de maintenir son offre préalable pour une durée de trente jours minimum à compter de sa réception par l'acquéreur ou donataire potentiel. Cette offre ne peut être acceptée par l'acquéreur ou donataire potentiel avant un délai de dix jours à compter de sa réception. Le cédant ou donateur informe l'organisme de foncier solidaire de son intention de céder les droits réels immobiliers qu'il tient de son bail réel solidaire, dans les trente jours qui suivent la réception par lui de l'acceptation de l'offre préalable de cession ou donation des droits réels et sollicite l'agrément de l'acquéreur

ou donataire par l'organisme de foncier solidaire. Il joint à sa demande l'offre préalable de cession ou de donation, les pièces permettant d'établir l'éligibilité de l'acquéreur ou du donataire choisi par lui, ainsi que le dossier de diagnostic immobilier prévu à l'article l. 271-4 du Code de la construction et de l’habitation. »

« Art. L. 255-11.- La vente ou la donation de droits réels afférents au bien objet du bail réel solidaire est subordonnée à l'agrément de l'acquéreur ou du donataire par l'organisme de foncier solidaire. L'organisme de foncier solidaire dispose d'un délai de deux mois à compter de la date de transmission de l'offre préalable de cession ou de donation pour délivrer son agrément. Celui-ci est fondé sur la vérification du respect des conditions d'éligibilité de l'acquéreur ou du donataire à la conclusion d'un bail réel solidaire définies à l'article L. 255-2, L. 255-3 ou L. 255-4, de la conformité de l'offre préalable de cession ou de donation avec le bail en vigueur, notamment du respect des stipulations

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concernant les modalités de calcul du prix de vente ou de l'évaluation des droits réels appartenant au vendeur ou au donateur, et, le cas échéant, de la validité du plan de financement de l'acquisition. Les règles fixées aux alinéas précédents sont prescrites à peine de nullité de la vente ou de la donation. La preuve du contenu et de la notification de l'offre préalable de vente ou de donation pèse sur le cédant ou le donateur. »

« Art. L. 255-12.- Si cet agrément est délivré, la durée du bail est de plein droit prorogée afin de permettre à tout nouveau preneur de bénéficier d'un droit réel d'une durée égale à celle prévue dans le contrat initial. »

« Art. L. 255-13.- En cas de refus d'agrément lors d'une cession, le cédant peut demander à l'organisme de foncier solidaire de lui proposer un acquéreur répondant aux conditions d'éligibilité prévues à l'article L. 255-2, L. 255-3 ou L. 255-4. Les conditions d'acquisition respectent les modalités de calcul du prix de vente stipulées dans le bail. Dans le cas où l'organisme de foncier solidaire n'est pas en mesure de proposer un acquéreur dans les six mois suivant la demande du cédant, il se porte acquéreur des droits réels afférents au bien objet du bail réel solidaire. En cas de refus d'agrément lors d'une donation des droits réels immobiliers, le bail réel solidaire peut être résilié conventionnellement et le preneur est indemnisé de la valeur de ses droits réels immobiliers, dans les conditions prévues par le bail. »

« Art. L. 255-14.- En cas du décès du preneur, les droits réels afférents au bien objet du bail réel solidaire sont transmis à son ayant droit. Le bail fait l'objet de plein droit d'une prorogation de telle manière que l'ayant droit bénéficie d'un bail d'une durée identique à celle prévue dans le bail initial, s'il répond aux conditions d'éligibilité mentionnées à l'article L. 255-2, L. 255-3 ou L. 255-4. Ces conditions d'éligibilité ne sont pas opposables au conjoint survivant, quel que soit le régime matrimonial, ou au partenaire de pacte civil de solidarité. Si l'ayant droit ne satisfait pas aux conditions d'éligibilité, il dispose d'un délai de douze mois à compter du décès pour céder les droits réels afférents au bien objet du bail réel solidaire à un acquéreur répondant aux conditions d'éligibilité susmentionnées et agréé par l'organisme de foncier solidaire. Ce délai peut être prorogé par l'organisme de foncier solidaire pour une durée correspondant aux délais de la régularisation par acte notarié de la cession des droits réels immobiliers. A défaut de cession dans ces délais, le bail réel solidaire est résilié et l'ayant droit est indemnisé par l'organisme de foncier solidaire de la valeur de ses droits réels immobiliers, dans les conditions prévues par le bail. »

« Art. L. 255-15.- L'organisme de foncier solidaire dispose d'un droit de préemption à son profit, mentionné dans le bail réel solidaire, à l'occasion de toute cession ou donation. Dans ce cas, il peut racheter les droits réels afférents au bien objet du bail réel solidaire ou les faire acquérir par un bénéficiaire répondant aux conditions d'éligibilité définies à l'article L. 255-2. L'organisme de foncier solidaire fait connaître sa décision d'exercer son droit de préemption dans un délai de deux mois à compter de la transmission de l'offre préalable de cession ou de donation. Ce délai est prorogé d'un mois en cas de refus de l'agrément. Le preneur est indemnisé de la valeur de ses droits réels immobiliers dans le respect des modalités de calcul du prix de vente stipulées dans le bail et de la valeur maximale mentionnée à l'article L. 255-5. »

« Art. L. 255-16.- A l'expiration du bail, les droits réels immobiliers du preneur deviennent la propriété de

l'organisme de foncier solidaire après indemnisation de la valeur de ses droits réels immobiliers, dans les conditions prévues par le bail et dans la limite de la valeur maximale mentionnée à l'article L. 255-5. Dans les baux qu'il consent, le preneur du bail réel solidaire mentionne, en caractères apparents, la date d'extinction du bail réel solidaire et son effet sur le contrat de bail en cours. A défaut de cette mention, les bénéficiaires du droit au bail d'habitation ont le droit de se maintenir dans les lieux pendant une durée de trente-six mois à compter de la date d'expiration du bail réel

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solidaire moyennant une indemnité d'occupation égale au dernier loyer d'habitation expiré et payable dans les mêmes conditions. Cette durée est réduite à douze mois pour les bénéficiaires de baux consentis en application des chapitres II et III du titre III du livre VI du présent code. »

3° - *** La protection de l’acquéreur immobilier est assurée ainsi qu’il suit : « Art. L. 255-18.- Les dispositions des articles L. 271-1 et L. 271-2 relatives à la protection de l'acquéreur sont applicables aux actes conclus en vue de l'acquisition des droits réels afférents aux logements, objet du bail réel solidaire. »

4° - *** La sanction de l’inexécution de l’un des éléments du dispositif est la nullité. « Art. L. 255-17.- Les baux réels solidaires conclus en méconnaissance de l'article L. 255-2, L. 255-3 ou L. 255-4 sont frappés de nullité. » *** Pour conclure, deux remarques peuvent être faites.

- D’abord sous un angle didactique : en tête il a été indiqué qu’il s’agissait d’un outil

« nouveau et original » ; il faut cependant relativiser et mettre en perspective, d’abord

avec un instrument récent le bail réel immobilier créé par l’ordonnance du 20 février

2014, ensuite avec des institutions plus, ou beaucoup plus, anciennes (bail à

construction, bail emphytéotique, etc.) – des comparaisons de ces « instruments »

peuvent être très formatrices.

- Egalement sous un angle prospectif : souhaitons au BRS un meilleur accueil que celui

qui a été réservé, dans le passé, à des institutions à même objectif « d’acquisition

sociale » comme par exemple la loi sur la « location-accession ». 2-*** Cass. 3

e civ. – 13/07/2016 – n° 14-26958

*** Heureusement, en matière de ventes de types classiques, et pour une partie très

importante grâce aux mécanismes protecteurs mis en place par le notariat, le non-paiement du

prix est rarissime. Pour des opérations moins « classiques » (prix payé à terme en totalité ou

partiellement), cette question peut se poser : on en a ici l’illustration pour une VEFA et l’arrêt

précise les conséquences qui en découlent vis-à-vis des actions qui bénéficient au vendeur.

*** La Cour précise que la délivrance des lots antérieurement au paiement intégral du prix

assortie de l’absence de formalisation de garanties réelles (ici un privilège de vendeur) ne

sauraient priver le vendeur de l’action résolutoire comme constituant une renonciation tacite non

équivoque à l’exercice de cette dernière.

*** Malgré des faits « ambigus » (vente par une société à sa gérante), la solution apportée

semble évidente : elle avait été retenue en appel, elle est confirmée en cassation.

*** L’argumentaire de la Cour est didactiquement très intéressant : il permet d’aborder – la

spécificité en VEFA du paiement au fur et à mesure de l’avancement des travaux – l’importance de la

formalisation effective, sur laquelle on n’insistera jamais assez sur le plan opérationnel et

professionnel (preuve de l’information spéciale donnée si les clients entendent s’en

dispenser), des garanties réelles générant la pleine efficacité de leurs accessoires (ici action

résolutoire).

*** La Haute juridiction donne également des informations sur le caractère rétroactif de

l’action résolutoire : d’une façon générale, le vendeur exerçant cette dernière n’est pas fondé,

justement en raison du mécanisme rétroactif, à obtenir une indemnité compensatrice résultant

de l’utilisation des biens pendant la période courant entre la vente et sa résolution.

3-*** Cass. 3e civ. – 16/06/2016 – n° 15-14906

Suffisamment contre-intuitif pour être signalé : si une commune néglige d’exercer une action ou

refuse de le faire, tout contribuable inscrit à son rôle peut s’y substituer après autorisation du

tribunal administratif.

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4-*** Tribunal des conflits – 06/06/2016 – n° C4053 de la table Lebon

Ici aussi, décision de cette juridiction, intervenant rarement, qui mérite d’être rapportée : est

un contrat administratif celui qui lie une commune, gestionnaire d’un camping établi sur un

terrain qu’elle loue à cet usage, avec le propriétaire dudit terrain « dès lors que les tarifs et le

règlement intérieur » sont arrêtés d’un commun accord, le propriétaire se trouvant ainsi associé

à la gestion et au fonctionnement d’un service public.

5-*** CE – 19/07/2016 n° 370630 : toujours en matière de compétence juridictionnelle, le

Conseil précise que seuls les tribunaux judiciaires sont compétents en matière de prescription

acquisitive (usucapion) y compris si cette prescription s’exerce sur un terrain dépendant du

domaine privé de l’Etat ou d’une collectivité territoriale.

6-*** Cass. 1re

civ. – 13/07/2016 – n° 15-10474

*** Le prêt à usage (anciennement qualifié de commodat, terminologie en principe supprimée

en 2009 par la première loi de simplification du droit mais qui continue à figurer dans le

Code civil – articles 1875 et suivants) est, comme la prose de M. Jourdain, souvent utilisé

sans que les parties en ait conscience et, de ce fait, il génère un contentieux non négligeable

dans la mesure où il peut être confondu, volontairement ou non, avec d’autres contrats (bail-

donation – etc.).

*** La Cour précise que le nu-propriétaire occupant un bien que l’usufruitier a mis à sa

disposition en vertu d’un prêt à usage et qui effectue des travaux ne relevant pas des grosses

réparations (sans doute référence à 606 du C. civ.), « ne peut en demander le remboursement à

l’usufruitier que si les dépenses engagées sont extraordinaires, nécessaires, et tellement

urgentes que l’emprunteur n’a pu en prévenir le prêteur » : didactiquement, cet arrêt est

intéressant pour aborder ou illustrer les rapporteurs usufruitier/nu-propriétaire.

7-*** L. n° 2016-1087 du 08/08/2016 – JO 09/08/2016 dite « reconquête de la biodiversité, de la

nature et des paysages »

1° - Quelques généralités

*** Cette loi sur la biodiversité, à juste titre tout à fait dans « l’air du temps », est

volumineuse (174 articles), ambitieuse et présente des aspects très techniques sous plusieurs

angles ; ses objectifs sont suffisamment définis dans l’intitulé lui-même et certains d’entre

eux, bien que très importants, n’ont pas d’impacts directs sur l’activité notariale : aussi, il ne

sera question ici que des dispositions qui peuvent concerner directement cette dernière.

*** Il ne sera cité que quelques-unes des idées directrices générales.

- Connaissance de la biodiversité / solidarité écologique / utilisation durable /

complémentarité entre environnement, agriculture, aquaculture et gestion des forêts.

- Principe de la réparation du préjudice écologique.

- Compilation dans l’inventaire du patrimoine des données issues des diverses études

d’impact dans ce domaine.

*** Sont également créées de nouvelles institutions de gouvernance de ce secteur et la

composition ou le fonctionnement d’autres, déjà existantes, sont modifiés (voir le texte).

*** Enfin, au titre des généralités, il faut indiquer que le texte est devenu définitif après une

censure partielle, le 4 août 2016, du Conseil constitutionnel.

2° - Les principales dispositions concernant l’activité notariale

*** Création des « obligations réelles environnementales » (à rapprocher de la notion de

« servitudes ») pour le maintien, la conservation, la gestion ou la restauration d’éléments de la

biodiversité ou de fonctions écologiques (voir le texte : L. art. 72 / C. environnement, article

L. 132-3).

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= Si le bien concerné est loué par bail rural, la création de l’obligation nécessite l’accord du

preneur ; par ailleurs la mise en œuvre d’une telle obligation ne peut préjudicier aux droits

d’exercice de la chasse ou résultant des réserves cynégétiques.

= Des mesures fiscales incitatives sont prévues (CGI art. 662 et 663).

= un bilan d’application de la loi devrait être réalisé (L. art. 73).

= Attention : le notaire pourra être conduit à rédiger de tels « contrats » et, surtout, à

l’occasion de mutation, en raison de son devoir d’information, il devra faire connaître ces

obligations et en tenir compte.

*** Mise en place de « zones prioritaires pour la biodiversité » (voir L. art. 74) ; là aussi, le rôle

d’information du notaire devra jouer, en particulier lors de mutations ou de conclusions de

baux ruraux lorsque, sur les terrains concernés, certaines pratiques agricoles seront

obligatoires ou interdites.

*** La « gestion du littoral » est également concernée par des mesures juridiques et d’incitation

fiscale :

- zones de sauvegarde du littoral : extension de l’exonération des droits de mutation à

tous les dons et legs au profit du Conservatoire du littoral et des rivages lacustres avec,

pour ce dernier, des obligations de rétrocession si les biens concernés ne sont pas en

zone de sauvegarde ;

- zones humides : exonération de taxes foncières (conditions fixées par L. 114) et

surtout, possibilité par les Agences de l’eau de délégation du droit de préemption de

l’article L. 322-4 du Code de l’environnement au profit d’une SAFER (C. envir.

L. 213-8-2) ;

- biens sans maître : en cas de renonciation, par la collectivité concernée (commune ou

EPCI) à exercer les droits, notamment de propriété, qui résultent de cette situation, ces

derniers sont transférés au Conservatoire ou à l’Etat (loi article 109 avec impact sur le

Code civil – article 713 – et le CGPPP L. 1123-3 et L. 1123-4).

Sur tous ces aspects, la vigilance du notaire devra évidemment s’exercer.

*** Certaines dispositions de loi concernent « l’urbanisme en général, les monuments historiques et

les sites inscrits »

= La loi ratifie l’ordonnance 2015-1174 du 23 septembre 2015 concernant la partie législative

du livre 1er

du CU.

= Elle prévoit de nouvelles modalités de révision d’un PLU par un EPCI (L. 156 / CU L. 153-

31) et la possibilité d’instituer des servitudes de « signalisation » de certaines installations

d’intérêt général (L. 156 / CU L. 153-41).

= Certaines règles applicables à l’environnement dans les centres commerciaux et à

l’urbanisme commercial sont modifiées (L. 86 / CU L. 111-19).

= Le régime d’exception de pétition d’une autorisation d’urbanisme de L. 421-4 du CU

s’applique désormais dans les espaces boisés (L. 81).

= En vertu de l’article 58 de la loi, le régime d’incorporation de terrains dans le domaine

public est modifié en ce qui concerne ceux définis par L. 113-8 du CU (protection, gestion et

ouverture au public des espaces naturels sensibles, boisés ou non).

En conclusion de ce 2° il semble utile d’insister sur le fait que cette nouvelle loi contient nombre de dispositions concernant « insidieusement », si l’on peut s’exprimer ainsi, l’activité notariale : la vigilance

opérationnelle et l’information sont donc de rigueur en la matière.

8-*** 1° - D. 2016-1104 - D. 2016-1105 – ces deux décrets du 11 août 2016 au JO du 13 août

2016 – Arrêté du 3 août 2016 au JO du 7 août 2016 // 2° D. 2016-1140 du 29 juillet 2016 au

JO du 30 juillet 20016

En matière de baux d’habitation et à usage mixte les textes ci-dessus précisent :

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- ceux suivant le 1° - les nouvelles normes relatives à l’état des installations intérieures

d’électricité et de gaz et les obligations d’information en la matière incombant au

bailleur ;

- celui suivant le 2° - l’encadrement de certains loyers en cas de location ou de

renouvellement à compter du 1ier

août.

///////////////////////////////////////////////////////////////////////////////////

FAMILLE ET PATRIMOINE

1-*** Cass. 1re

civ. – 13/07/2016 – n° 14-27148

Un contrat d’assurance sur la vie pour faire l’objet de nullité pour insanité d’esprit : dans ce cas,

l’action correspondante exercée par les ayant droits du souscripteur ne dérive pas directement

du contrat, elle répond donc à la prescription quinquennale.

2-*** Avis de la Cour de cassation du 04/07/2016 – n° 16006 P

« Les créances périodiques nées d’une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la

suite de fourniture d’un bien ou d’un service par un professionnel à un consommateur sont

soumises au délai de prescription de deux ans prévu à l’article L. 218-2 du Code de la

consommation, applicable au regard de la créance ».

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FISCAL

Unique *** CE – 30/06/2016 n° 375547

*** La vente d’un terrain à bâtir génère souvent une plus-value fiscale dont le calcul est parfois

compliqué et contesté par l’Administration : ici le cas d’espèce portait sur une revente en

cours de projet immobilier.

*** Un bien immobilier est acquis à titre de terrain à bâtir pour, après démolition des

constructions existantes, réaliser un immeuble neuf ; le projet, pour lequel des frais importants

avaient été engagés (démolition, terrassement et réalisation de fondations), ne va pas à son

terme et le bien est revendu : cette revente génère une plus-value dont la base de l’impôt

correspondant, fixée dans la déclaration, est remise en cause par le fisc, ce dernier rejetant la

déductibilité des frais, ci-dessus indiqués, exposés pour la réalisation du projet initial de

construction.

*** Le Conseil réfute l’argumentation de l’Administration en confirmant la déductibilité

s’appuyant notamment sur la qualification de terrain à bâtir qui n’exclut pas la prise en compte des

frais engagés pour l’opération intermédiaire.

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ENTREPRISE ET DROIT COMMERCIAL

1-*** D. 2016-1030 du 26 juillet 2016 au JO du 28 juillet 20016 qui précisent les nouvelles

informations exigibles pour les déclarations de créations d’entreprise.

Page 9: REVUE D’ACUALITES JURIDIQUES INTERESSANT …cfpn-nancy.com/sites/default/files/RA 2016 Aout .pdf · Les principaux droits et obligations des parties au contrat de bail sont les

9

2-*** CE – 08/07/2016 n° 386792 (JO du 21/07/2016

En matière d’information des salariés lors de la cession de l’entreprise à laquelle ils collaborent, le

conseil vient d’annuler une disposition du décret du 28 octobre 2014 : le délai de deux mois

accordé auxdits salariés pour présenter une offre d’achat ne commence à courir qu’à partir de

la conclusion de la vente.

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RURAL

Pas d’actualités particulières dans ce domaine.

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PROFESSION Nota préliminaire : dans les diverses situations citées ci-dessous, outre les aspects directs « responsabilité notariale », on trouvera de nombreuses analyses relatives aux principes généraux du droit mais aussi à la pratique professionnelle.

Pas d’actualités particulières dans ce domaine.