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Revue africaine de management - African management review ISSN : 2509-0097 VOL.3 (2) 2018 (PP.134-152) http://revues.imist.ma/?journal=RAM 134 Mécanismes internes de gouvernance et pérennité des établissements de micro finance au Cameroun, Bernadette YOUGANG * * Faculté des Sciences Economiques et de Gestion, Université de Yaoundé II- SOA, Yaoundé, Cameroun Résumé Le contexte économique mondial est marqué à la fin de la décennie 1980 par une profonde crise structurelle et financière qui a eu des répercussions en Afrique Centrale en général et au Cameroun en particulier. Pour palier cette situation, le secteur financier a été restructuré par les pouvoirs publics. Ce qui a conduit à la fermeture de plusieurs banques. L‟objectif de cet article est de mettre en exergue les effets des mécanismes internes de gouvernance sur la pérennité des Etablissements de Micro-finance (EMF) au Cameroun. Les méthodes déquations structurelles à travers la méthode PLS nous permettent détudier un échantillon composé de 98 EMF camerounais entre 2007 et 2015. Les résultats montrent qu‟il existe une relation positive entre la séparation des fonctions de PCA DG et la pérennité des EMF tandis qu‟il n‟existe pas de relation significative entre l‟actionnariat des salariés des EMF de notre échantillon et la pérennité des EMF camerounais. Mots clés : EMF, Gouvernance, Pérennité, Cameroun, actionnariat, microfinance. Abstract The global economy is marked at the end of decade 1980 by deep structural and financial crisis that has affected Central Africa in general and Cameroon in particular. To remedy this situation, the financial sector was restructured by public authorities. This led to the closure of several banks. The objective of this article is to highlight the effects of internal governance mechanisms on the sustainability of Microfinance Institution (MFIs) in Cameroon. The methods of structural equations using the PLS method allow us to study a sample composed of 98 Cameroon MFIs between 2007 and 2015. We find that there is a positive relationship between the separation of the Chairman of the Board of Directors (CBD) General Manager (GM) functions and the sustainability of MFIs while there is no significant relationship between employee share ownership and the sustainability of Cameroon's MFIs. Keys words: MFI, Governance, Sustainability, Cameroon, share ownership, microfinance

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Revue africaine de management - African management review

ISSN : 2509-0097

VOL.3 (2) 2018 (PP.134-152)

http://revues.imist.ma/?journal=RAM

134

Mécanismes internes de gouvernance et pérennité des établissements de

micro finance au Cameroun,

Bernadette YOUGANG *

* Faculté des Sciences Economiques et de Gestion, Université de Yaoundé II- SOA, Yaoundé, Cameroun

Résumé

Le contexte économique mondial est marqué à la fin de la décennie 1980 par une profonde crise structurelle et

financière qui a eu des répercussions en Afrique Centrale en général et au Cameroun en particulier. Pour palier

cette situation, le secteur financier a été restructuré par les pouvoirs publics. Ce qui a conduit à la fermeture de

plusieurs banques. L‟objectif de cet article est de mettre en exergue les effets des mécanismes internes de

gouvernance sur la pérennité des Etablissements de Micro-finance (EMF) au Cameroun. Les méthodes

d‟équations structurelles à travers la méthode PLS nous permettent d‟étudier un échantillon composé de 98

EMF camerounais entre 2007 et 2015. Les résultats montrent qu‟il existe une relation positive entre la

séparation des fonctions de PCA – DG et la pérennité des EMF tandis qu‟il n‟existe pas de relation significative

entre l‟actionnariat des salariés des EMF de notre échantillon et la pérennité des EMF camerounais.

Mots clés : EMF, Gouvernance, Pérennité, Cameroun, actionnariat, microfinance.

Abstract

The global economy is marked at the end of decade 1980 by deep structural and financial crisis that has affected

Central Africa in general and Cameroon in particular. To remedy this situation, the financial sector was

restructured by public authorities. This led to the closure of several banks. The objective of this article is to

highlight the effects of internal governance mechanisms on the sustainability of Microfinance Institution (MFIs)

in Cameroon. The methods of structural equations using the PLS method allow us to study a sample composed

of 98 Cameroon MFIs between 2007 and 2015. We find that there is a positive relationship between the

separation of the Chairman of the Board of Directors (CBD) – General Manager (GM) functions and the

sustainability of MFIs while there is no significant relationship between employee share ownership and the

sustainability of Cameroon's MFIs.

Keys words: MFI, Governance, Sustainability, Cameroon, share ownership, microfinance

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1. Introduction

Au cours des vingt dernières années, la question de la gouvernance a suscité un intérêt croissant dans le

secteur de la micro-finance. Les études de CSFI (2008) ont identifié la gouvernance comme l‟un des risques

principaux auxquels est confronté ce secteur. C‟est dans ce sens que le débat sur la gouvernance est mis au

centre des préoccupations de la microfinance. Plusieurs raisons militent en faveur de ces préoccupations,

notamment la croissance formidable des fournisseurs de services ; le nombre important des changements

institutionnels et légaux ; l‟évolution des institutions et la gestion des dettes (Labie et Mersland, 2011).

Si depuis quelques années, le thème du corporate governance fait l‟objet d‟une attention croissante de la

part des médias, en raison des différents scandales qui ont marqué la vie des affaires, tant au Cameroun qu‟à

l‟étranger, il s‟agit, comme le souligne très pertinemment Thiébaud (1994), d‟un aspect particulier d‟une

question sempiternelle : le partage des pouvoirs. En effet, les dirigeants ont tendance à privilégier les

investissements de court terme et moins rentables du fait de leur incertitude à rester longtemps dans l‟entreprise ;

tandis que les actionnaires tendent à privilégier les investissements de long terme et donc plus rentables.

Les actionnaires propriétaires ont également un objectif de maximisation de profit alors que les managers

cherchent par contre à maximiser le revenu. Ces derniers ont en fait un objectif de domination (statut, pouvoir,

prestige) et le besoin de sécurité. Pour résoudre ces problèmes de conflits d‟intérêts, la responsabilisation des

dirigeants passe par l‟attribution à ces derniers des actions appelées stocks-options dans le but d‟aligner leurs

intérêts sur ceux des actionnaires. Dans ce cas précis, les dirigeants auront tendance à privilégier les

investissements de long terme, dans le but de maximiser leur fonction d‟utilité en tant que propriétaire du capital.

Toutefois, dans le contexte économique mondial actuel marqué par de profondes crises structurelles et

financières qui ont eu des répercussions en Afrique Centrale en général et au Cameroun en particulier, une

attention grandissante est faite par les pouvoirs publics sur la restructuration du secteur de la microfinance, avec

notamment l‟appui des institutions de BrettonWoods (FMI, Banque Mondiale) et des principaux bailleurs de

fonds (Ngnodjom, 2006). Cette restructuration a conduit dans le secteur bancaire à la fermeture de plusieurs

établissements d‟épargne et de crédit, et ceux qui ont résisté ont renforcé les conditions d‟accès à leurs services

(Wanda, 2007). Cette rigueur sélective s‟est traduite par une aggravation de la sous bancarisation et la

marginalisation d‟une large frange de la population à l‟accès aux services bancaires et en particulier en milieu

rural. Cette situation a eu pour conséquence la naissance des banques de proximité qui répondraient mieux aux

besoins des ménages à faibles revenus. C‟est ainsi qu‟à partir des années 1990, dans un contexte de libéralisation

économique, la microfinance devient une alternative forte dans la collecte de l‟épargne et la prestation des

services financiers low-cost, contribuant ainsi de façon significative à la lutte contre la pauvreté et les inégalités

dans les pays en voie développement en général, et le Cameroun en particulier.

La microfinance est considérée comme une activité exercée par des entités agréées n‟ayant pas le statut

des banques ou d‟établissements financiers, pratiquant de façon habituelle, des opérations de crédit et/ou de

collecte de l‟épargne et offrant des services financiers spécifiques au profit des populations évoluant pour

l‟essentiel en marge du circuit bancaire traditionnel (COBAC, 2002). De ce fait, la microfinance s‟inscrivant

comme outil stratégique dans la lutte contre la pauvreté et les inégalités, sa pérennité est indispensable dans un

contexte de développement durable lequel implique tributaire d‟une bonne gouvernance.

Le terme même de pérennité recèle une ambiguïté sémantique. En effet, la perception qu‟en ont les

dirigeants révèle une diversité des points de vue et montre qu‟il existe non pas une seule, mais une pluralité de

pérennités. Pour les uns, il s‟agit avant tout de faire perdurer un patrimoine et de pérenniser le contrôle et/ou la

direction de l‟entreprise au sein d‟un même groupe d‟actionnaires (en général une famille). Pour les autres, il

s‟agit de faire vivre dans la durée un projet, c‟est-à-dire soit des activités/ produits/marques, soit plus

globalement des organisations dans lesquelles s‟insèrent les hommes détenteurs des savoirs tacites auxquels ces

activités s‟adossent (Mignon, 2009).

Dans le cadre de la gouvernance d‟entreprise, la structure d‟actionnariat émerge comme un élément

constitutif. Elle occupe une position importante quand on la considère tel un dispositif de résolution des conflits

d‟intérêts entre le dirigeant et les actionnaires, surtout lorsqu‟elle est une décision stratégique dans la mesure où

cette structure peut se révéler complaisante dans la réalisation de l‟objectif de maximisation de valeur de la firme

(Hirigoyen, 1997). Dès lors, l‟objectif de cette étude est de mettre en exergue l‟impact de la gouvernance

structurelle sur la pérennité des établissements de microfinance au Cameroun. Ce travail va s‟articuler sur trois

points essentiels : il nous sera judicieux avant de nous appesantir sur la discussion et la conclusion en passant par

la méthodologie et la présentation des résultats, de présenter d‟emblée la revue de la littérature et les hypothèses

de cette recherche.

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2. Revue de la littérature

Bien que l‟histoire contemporaine de la microfinance fournisse des exemples de réussite, elle reste

néanmoins émaillée aussi bien par les crises que par les faillites. La pérennité des entreprises entre les EMF

constitue davantage une des préoccupations majeures de plusieurs dirigeants. Notre travail porte plus

spécifiquement sur l‟impact des mécanismes internes de gouvernance sur la pérennité des EMF.

Le terme survie est très souvent utilisé pour parler de la résistance et de la réussite d‟une entreprise

pendant les premières années de son cycle de vie. Quant à la pérennité, tout comme la croissance, elle

correspond à un concept très répandu dans la vie des entreprises de nos jours. Elle évoque le succès, la

performance et la rentabilité. En outre, elle constitue l‟un des objectifs chers aux gestionnaires. C‟est dans cet

ordre d‟idées que Brechet (1994) précise : « La mission du gestionnaire nous semble bien être celle de permettre

l‟émergence et la réalisation, sous une forme d‟organisation viable (qui existe dans la durée) d‟un projet défini à

entreprendre. » Il ressort que la viabilité renvoie à la pérennité, autrement dit, la longévité et la durabilité de

l‟entreprise. La pérennité est à la fois large dans la mesure où d‟autres termes peuvent être employés dans un

sens similaire (survie, longévité) et flou en ce sens que la pérennité des entreprises laisse apparaître diverses

situations : on parle de pérennité du pouvoir et de pérennité du projet (Mignon, 2001). A cet effet, la perception

qu‟ont les dirigeants révèle une diversité des points de vue et montre qu‟il existe non pas une, mais des

pérennités. Pour les uns, il s‟agit avant tout de faire perdurer un patrimoine et de pérenniser le contrôle et/ou la

direction de l‟entreprise au sein d‟un même groupe d‟actionnaires (en général une famille). Pour les autres, il

s‟agit de faire vivre dans la durée un projet, c‟est-à-dire soit des activités/produits/marques, soit plus globalement

des organisations dans lesquelles s‟insèrent les hommes détenteurs des savoirs tacites auxquels ces activités

s‟adossent. Cette pérennité ne peut être obtenue que grâce au rôle que joue la gouvernance au sein de

l‟entreprise.

Il ressort des analyses de Mard & Marsat (2011) que la nature des actionnaires peut influencer la

résolution des conflits d‟agence. En effet, les actionnaires ne constituent pas une population homogène en termes

de motivations. Un actionnaire familial n‟a certainement pas les mêmes exigences de rentabilité qu‟un fonds de

pension. Par ailleurs, pour un type d‟actionnaire donné, son influence sur la gouvernance de l‟entreprise va

dépendre de la part de capital détenu, de l‟objectif et de l‟horizon du placement. Comme pour la concentration de

l‟actionnariat, l‟impact de la nature des actionnaires sur la gouvernance de l‟entreprise semble donc complexe.

Plusieurs types d‟actionnaires ont été étudiés dans la littérature : dirigeants, familles, institutions, industriels. Il

en ressort également qu‟afin d‟atténuer le conflit entre actionnaires et dirigeants, une solution consiste à rendre le

dirigeant actionnaire, en lui attribuant des actions ou des stock-options. Cette incitation positive tend à faire

converger les intérêts des dirigeants avec ceux des actionnaires (Jensen & Meckling, 1976). L‟actionnariat du

dirigeant constitue donc a priori un mécanisme de gouvernance susceptible de limiter ses comportements

opportunistes, par exemple en matière de gestion des résultats. Néanmoins, lorsque les droits de vote détenus par

le dirigeant augmentent, celui-ci peut exercer un contrôle sur la gouvernance de l‟entreprise. Dans ce cas, le

dirigeant est en mesure d‟atténuer l‟efficacité de mécanismes de gouvernance tels que le marché du travail des

dirigeants ou le marché des prises de contrôle (Mork, Shleifer & Vishny, 1988). Ce comportement traduit une

volonté d‟enracinement des dirigeants et a été observé, par exemple, parmi les dirigeants des firmes familiales.

Les auteurs de la théorie des droits de propriété reprennent dans le même sens la thèse émise par Berle &

Means (1932) selon laquelle l‟émergence des sociétés anonymes conduit à une baisse de l‟efficacité économique.

Pour démontrer la supériorité d‟un mode organisationnel sur un autre, cette théorie s‟est intéressée au

phénomène d‟atténuation des droits de propriété. Pour ses partisans, les droits de propriété ne sont en effet

pleinement efficaces que s‟ils entrainent l‟exclusivité absolue et qu‟ils sont librement transférables comme c‟est

le cas dans la firme capitaliste traditionnelle dans laquelle l‟unique propriétaire est en même temps le

gestionnaire (Demsetz ; 1967 & Alchian ; 1969). A partir du moment où certains droits de propriété ont été

transférés à une tierce partie, il y a risque d‟adoption de comportements opportunistes de la part des dirigeants

étant donné l‟existence d‟asymétrie d‟information.

Ainsi, la problématique d‟asymétrie d‟information dans les firmes mutualistes a été abordée par Fama &

Jensen (1983) en termes de relations d‟agence. Dans cet article, les auteurs expliquent l‟avantage que procurent

les créances résiduelles des mutuelles financières. Dans ce type d‟organisation, seuls les clients ont le droit de

détenir les créances résiduelles et celles-ci sont remboursables sur simple demande de telle sorte que les

coopérateurs peuvent sanctionner la conduite des dirigeants en cas de mécontentement, puisqu‟il s‟ensuit une

diminution du capital mis à la disposition des membres de la coopérative. Ils reconnaissent toutefois le caractère

limité du rôle joué par les coopérateurs via le conseil d‟administration, ce dispositif n‟assurant pas une fonction

réelle de contrôle sur les pratiques managériales. Par ailleurs, comme le souligne Courtois (1991), les dirigeants

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ont la faculté de constituer une réserve non distribuable qui les met à l‟abri, du moins pendant un certain temps,

de la sanction que constitue le retrait de capital.

Guery (2015) analyse l‟actionnariat salarie sous deux angles: Pour les dirigeants d‟une part, l‟actionnariat

salarié peut constituer un outil visant à améliorer la performance de l‟entreprise au travers des conséquences

positives qu‟il est susceptible d‟exercer sur les attitudes et comportements des salariés : plus grande implication,

meilleure satisfaction au travail, amélioration de la motivation, réduction du turn-over, de l‟absentéisme, etc. Il

est également un moyen de stabilisation du capital, voire une arme anti-OPA dans les entreprises cotées

notamment. Pour les salariés d‟autre part, dans la mesure où l‟actionnariat salarié est largement alimenté par les

primes de participation et d‟intéressement, il est une source de revenu complémentaire au salaire et le moyen de

se constituer une épargne de long terme. Ce mécanisme est néanmoins risqué puisque, par définition, le salarié

en tant qu‟actionnaire est confronté à un risque fort dans la mesure où son placement est intégralement investi en

actions de l‟entreprise et n‟est donc pas diversifié : si l‟entreprise disparaît, c‟est dans le même temps l‟épargne

des salariés actionnaires qui disparaît. Un second enjeu d‟importance pour les salariés est l‟incidence que

pourrait exercer l‟actionnariat salarié sur la gouvernance de l‟entreprise. Dès lors que les salariés se trouvent

dans une situation dans laquelle ils sont actionnaires de leur entreprise ils ont théoriquement une plus grande

capacité à influer sur les décisions de l‟entreprise, si ce n‟est individuellement, tout du moins collectivement par

le biais de la présence de représentants des salariés au conseil d‟administration ou de surveillance de l‟entreprise

(dans certaines conditions), de l‟exercice des droits de vote liés aux fonds d‟épargne salariale ou par le biais des

associations d‟actionnaires salariés. On peut par ailleurs noter, en dehors du contexte de l‟actionnariat salarié,

que les récentes évolutions législatives tendent à favoriser la présence de représentant de salariés dans les

conseils.

Poulain-Rhem (2009) a fait également une étude sur l‟actionnariat des salariés qui est au cœur du débat

sur la gouvernance d‟entreprise. Pour cet auteur, dans le cadre d‟une gouvernance actionnariale, faisant primer

les intérêts des actionnaires dans le processus de prise de décision stratégique, l‟actionnariat des dirigeants

s‟inscrit dans une perspective d‟alignement des intérêts dirigeants/actionnaires. Dans le cadre d‟une gouvernance

partenariale, où sont pris en compte les intérêts de l‟ensemble des partenaires de l‟entreprise, l‟actionnariat des

salariés non-dirigeants permet de rémunérer le risque du capital humain spécifique à la firme. Son rôle apparaît

déterminant car polyvalent dans le processus de création de valeur.

Dans le même ordre d‟idées, Garvey & Swan (1994) contestent l‟hypothèse de maximisation de la valeur

actionnariale en s‟appuyant sur les impératifs de l‟organisation interne des firmes impliquant les salariés et les

créditeurs. Ils affirment ainsi : « La gouvernance de l‟entreprise ne peut être comprise dans un monde où les

droits de propriété sont parfaitement définis, de telle sorte que les actionnaires, en tant que créanciers résiduels,

représentent le seul groupe digne de considération. (...) En effet, c‟est seulement lorsque les contrats sont

incomplets que les problèmes de gouvernance deviennent intéressants mais, en conséquence, les actionnaires ne

sont plus les vrais créanciers résiduels ». Cette opinion est également exprimée avec force par Charreaux &

Desbrières (1998), qui remarquent que la représentation de la valeur actionnariale nuit à une bonne

compréhension du processus de création de valeur, la firme constituant en fait un nœud de contrats entre les

différents « stakeholders ».

Pour Fama (1980), le conseil d‟administration doit comprendre en son sein, des administrateurs

internes, c‟est à dire des individus qui participent quotidiennement à la vie de l‟entreprise et possèdent des

informations spécifiques. Leur rôle est d‟informer les autres administrateurs de ce qui se passe concrètement

dans l‟entreprise. Cet auteur indique que cela suffit à contrôler l‟opportunisme du dirigeant, sauf en cas de

collusion entre les administrateurs internes et le dirigeant qu‟ils sont chargés de contrôler. Préoccupés par leur

valeur sur le marché des administrateurs, ces derniers n‟ont pas intérêt à être soupçonnés de collusion avec le

management.

Dans le cas de l‟Allemagne, Franks & Mayer (1995) mettent en évidence un taux de rotation plus élevé

des dirigeants dans les entreprises où l‟actionnariat est plus concentré.

Des résultats similaires ont été obtenus pour le Japon : Kaplan & Minton (1994), comme Kang & Shivdasani

(1997), montrent que le remplacement des dirigeants en cas de mauvaise performance est plus probable en

présence de gros actionnaires. Dans le même sens, Yafeh &Yosha (1995) trouvent que la présence de gros

actionnaires limite les dépenses discrétionnaires des dirigeants japonais. Franks, Mayer & Renneboog (1995)

soulignent qu‟au Royaume-Uni c‟est à travers les gros actionnaires et une concentration accrue de la propriété

des actions que s‟exerce le contrôle sur les entreprises dont les performances sont mauvaises.

Les principaux résultats que nous venons de présenter montrent qu‟il existe une relation entre les

mécanismes internes de gouvernance et la pérennité des organisations. Cependant, cette revue de la littérature ne

permet pas d‟arriver à un consensus sur le sens de la relation. L‟étude du cas des EMF camerounais contribuera à

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l‟approfondissement de la réflexion sur le thème de la gouvernance des EMF. Ce manque d‟homogénéité des

résultats indique que le lien entre modes internes de gouvernance et pérennité n‟est sans doute pas direct, et que

plusieurs variables intermédiaires entrent en jeu. Ces divergences d‟opinion nous ont amené à formuler les

hypothèses suivantes :

Hypothèse 1 : Plus les fonctions de PCA et de DG sont disjointes, plus l’EMF est pérenne.

Hypothèse 2 : plus les salariés non dirigeants détiennent une partie des actions de l’EMF, plus il est

pérenne.

3. Méthodologie

3.1- Echantillon

La base de sondage est extraite du répertoire national d‟identification des établissements de microfinance

camerounais du Ministère des Finances au 30 juin 2012. Dans le souci de sécuriser l‟argent des épargnants et par

là l‟ensemble du secteur financier, le MINFI a publié en date du 30 juin 2012 une liste des EMF agréés et le texte

se présente de la manière suivante : « Le ministère des Finances porte à la connaissance du grand public que les

établissements de microfinance, ci-après désignés, ont été régulièrement agréés et sont de ce fait habilités à

exercer l‟activité de microfinance sur l‟ensemble du territoire national. A cet effet, il invite la clientèle des

établissements de microfinance à plus de vigilance et à s‟assurer, avant toute relation d‟affaire, que les structures

sollicitées disposent d‟un agrément dûment signé par le Ministère des Finances et l‟affichent dans leurs guichets

ainsi que les conditions tarifaires. En conséquence, le Ministre des Finances décline sa responsabilité pour les

transactions de toute nature effectuées avec la (les) structure (s) dont le nom ne figure pas sur la présente liste ».

Cette liste publiée par le MINFI comporte des établissements de première, deuxième et troisième

catégorie ainsi que les établissements constitués en réseau et ceux qui sont indépendants. Parmi les

établissements constitués en réseau, 175 appartiennent au réseau CAMCCUL (05 dans l‟Adamaoua, 06 dans le

Centre, 13 dans l‟Extrême-Nord, 18 dans le Littoral, 05 dans le Nord, 61 dans le Nord-Ouest, 17 dans l‟Ouest, 45

dans le Sud-Ouest et 04 dans le Sud), 43 appartiennent au réseau CVECA (dont 05 à l‟Extrême-Nord, 04 au

Nord et 34 dans la région du Centre), tandis que 27 appartiennent au réseau CMEC (dont 09 dans la région du

Nord-Ouest, 18 dans la région de l‟Ouest) et 06 du réseau MUCADEC tous localisés dans la région du Centre.

Concernant les EMF indépendants, 140 appartiennent à la première catégorie (dont 03 dans l‟Adamaoua, 45 dans

le Centre, 03 à l‟Est, 02 à l‟Extrême-Nord, 38 dans le Littoral, 02 dans le Nord, 07 dans le Nord-Ouest, 31 à

l‟Ouest, 05 au Sud, 05 dans le Sud-ouest). 43 sont de la deuxième catégorie (dont 01 dans l‟Adamaoua, 15 dans

le Centre, 01 à l‟Extrême-Nord, 18 dans le Littoral, 02 dans le Nord-Ouest, 03 à l‟Ouest et 03 dans le Sud-

Ouest). 04 appartiennent à la troisième catégorie (dont 01 dans l‟Extrême-Nord, 02 dans le Littoral, 01 dans le

Nord).

En résumé, la liste des Etablissements de Microfinance publiée par le Ministère des Finances au 30 juin

2012 comme autorisés à exercer l‟activité de microfinance au Cameroun est de 439. Mais, vu les critères de

sélection de notre population d‟étude à savoir les EMF agréés au plus tard en 2006, 235 font partie de notre

population d‟étude représentés dans 5 régions. Ainsi, nous avons 67 EMF indépendants de première catégorie,

19 EMF indépendants de la deuxième catégorie, 148 EMF affiliés au réseau CAMCCUL et 01 au réseau CMEC.

Compte tenu du fait que notre objectif est de mettre en exergue l‟impact des mécanismes internes de

gouvernance sur la pérennité des EMF, nous avons choisi la méthode hypothético-déductive qui consiste à

émettre des hypothèses à partir des résultats des différents travaux antérieurs dans le domaine de la recherche et

les tester. Nous avons à cet effet procédé à la collecte des données au travers d‟un questionnaire.

La collecte des données s‟est déroulée en début de l‟année 2015 et porte sur les années antérieures. Elle a

été réalisée sous forme de questionnaire adressé aux dirigeants d‟établissements de microfinance de trois régions

du Cameroun (Centre, Littoral et Ouest). A l‟issue de la collecte, 98 questionnaires ont été exploitables.

L‟échantillon définitif est donc constitué de 98 EMF.

3.2- Opérationnalisation des variables L‟étude d‟un phénomène ou d‟une variable par rapport à une autre est faite par l‟analyse

bidimensionnelle. Ces variables sont supposées reliées par une causalité. L‟étude implique à cet effet la

détermination des facteurs qui peuvent influencer, causer ou occasionner le phénomène.

Dans le cadre de notre étude, nous avons les variables indépendantes et les variables dépendantes. La

variable indépendante est le facteur déterminé tandis que la variable dépendante est le facteur déterminant.

Les variables indépendantes sont liées à la gouvernance structurelle à savoir la structure de propriété du

capital et le dualisme. La structure de propriété est essentiellement mesurée par l‟actionnariat et principalement

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celui des salariés non dirigeants tandis que le dualisme est mesuré par la séparation des fonctions de PCA et de

DG.

Du moment où les établissements de microfinance sont des organisations non cotées, nous nous

limiterons à l‟utilisation des indicateurs internes pour la mesure de la pérennité qui représente la variable

dépendante.

Compte tenu de l‟hétérogénéité des formes institutionnelles des EMF de notre échantillon et des missions

spécifiques associées à chacune des formes institutionnelles, nous avons opté pour une approche

multidimensionnelle de la pérennité. Elle renvoie à la pérennité de pouvoir et la pérennité de projet. La pérennité

de pouvoir comprend la pérennité de direction et la pérennité de contrôle tandis que la pérennité de projet

comprend la pérennité des activités et la pérennité organisationnelle (Mignon, 2001).

La collecte des données sur le terrain a été suivie d‟une opération de saisie des données. Cette opération

permet de transformer les informations sur papier en données facilement accessibles à l‟analyse. Ce transfert

s‟est fait au moyen d‟un masque de saisie conçu sur CSPRO, car il présente l‟interface de saisie identique au

questionnaire et les procédures de contrôle sont assez soignées.

3.3- Méthode d’estimation choisie Vu la complexité des situations qui nous amènent à construire des modèles incorporant un grand nombre

de variables, nous avons jugé nécessaire d‟utiliser les méthodes de modélisation par équations structurelles avec

variables latentes, ceci pour plusieurs raisons (Roussel & al – 2002 ; Haenlein & Kaplan – 2004 ; Kline – 2005) :

- Elles permettent de tester de manière simultanée l‟existence de relations causales entre plusieurs variables

latentes explicatives et plusieurs variables latentes expliquées.

- Elles permettent de construire et de tester la validité et la fiabilité de construits latents, élaborés à partir de la

combinaison de plusieurs items (échelles de mesure)

- Elles permettent d‟évaluer et de comparer de manière globale des modèles de recherche complexes, en prenant

en compte les erreurs de mesure.

La technique la plus couramment choisie pour estimer les modèles de relations structurelles repose sur l‟analyse

des covariances (covariance based structural equationmodeling, ou CBSEM). Mais, nous avons utilisé

l‟approche PLS (partial least square) basée sur l‟analyse des variances car bien adaptée aux analyses de type

exploratoire, ou au test de modèles partiels, compatible avec de petits échantillons et avec des modèles

relationnels complexes (jusqu‟à plusieurs centaines de variables), réservé au test de modèles récursifs (la

causalité entre les variables latente doit être univoque). Or, la méthode Lisrel est adaptée aux échantillons de

grande taille, toutes les variables doivent être continues ou d‟intervalle et être distribuées normalement et permet

de tester les modèles récursifs et non récursifs.

Ce choix tient aussi au fait que nos variables sont en majorite des construits reflexifs c‟est-à-dire qu‟ils

sont la cause des indicateurs et se présente de la manière suivante :

= construit latent;

xi = indicateurs ;

coefficient représentant l‟effet du construit sur l‟indicateur (loading);

indicateur de l‟erreur de mesure.

3.4- Le test du modèle de recherche La procédure de test du modèle est menée en suivant la méthodologie habituellement employée dans les

études utilisant l‟approche PLS. Nous nous baserons notamment sur les recommandations de Haenlein& Kaplan

(2004) et Sosik &al. (2009).

La procédure de validation et d‟estimation comprend deux parties :

En premier lieu, il s‟agit d‟examiner les caractéristiques générales des variables du modèle (statistiques

descriptives, niveau et significativité des corrélations). Ceci nous permet de vérifier que les liens postulés entre

les variables existent.

- En second lieu, le modèle structurel est testé (mise à l‟épreuve des hypothèses formulées).

Pour la mise en pratique des analyses de régression PLS, nous avons choisi d‟utiliser le logiciel statistique

Statistical Package for Social Science (SPSS 18.0).

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4. Résultats

La première étape a consisté à présenter quelques statistiques descriptives mettant en exergue les

différentes variables des modèles à partir du logiciel statistique Statistical Package for Social Science (SPSS

18.0). Par la suite, le test du khi-deux a permis de relever l‟existence de corrélations entre les variables de

pérennité et de gouvernance des EMF.

L‟équation du khi deux se présente comme suit :

Oi = fréquence observée (réelle)

Ti = fréquence théorique (prévue)

X2= Khi-deux

k= nombre de catégorie

Tc= total des colonnes

Tl= total des lignes

N= taille de l‟échantillon

Le calcul de khi-deux à l‟aide du programme informatique donne trois indicateurs :

- „X2‟ représente le khi-deux obtenue avec la formule ci-dessus ;

- „ddl‟ représente le nombre de degré de liberté ;

- „prob‟ représente la probabilité de signification de X2.

ddl= (l-1) (c-1)

l et c représentent respectivement le nombre de lignes et le nombre de colonnes du tableau de

contingence.

Le tableau suivant présente les différents EMF de l‟échantillon en catégorie et région d‟implantation.

Tableau 1 : Echantillon d’EMF retenus pour l’enquête

Ville Cat1 Cat2 Total

Yaoundé 12 10 22

Douala 28 22 50

Bafoussam 22 4 26

Total 62 36 98

Source: Notre enquête.

La microfinance étant la finance de proximité et ayant vu le jour dans le souci de bancariser ceux qui

n‟étaient pas « bancables », la taille de notre échantillon se justifie dans la répartition géographique. En effet,

Douala est une ville économique dont le commerce représente la principale activité, raison pour laquelle les

EMF prolifèrent dans cette ville pour servir les petits épargnants ; Bafoussam étant une ville agricole, le nombre

d‟EMF de notre échantillon dans cette ville est non négligeable du fait de la présence des paysans qui ont besoin

des services microfinanciers ; Yaoundé étant par contre la capitale politique dans laquelle les services publics

sont concentrés, le nombre d‟EMF de notre échantillon qui se trouve dans cette ville est plus réduit par rapport à

Douala et Bafoussam. Ceci se justifie par le fait que la majeure partie de la population de la ville de Yaoundé

travaillent dans l‟administration et n‟ont pas besoin des services des EMF.

Le tableau suivant présente la répartition des EMF selon le pourcentage du capital détenu par leurs

salariés.

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Tableau 2 : Répartition des EMF selon le capital détenu par leurs salariés

Cat1 (n= 62) Cat2 (n=36) Ensemble

(n=98)

Aucune fraction du capital n‟est détenue par les salariés

non dirigeants

67,7% 88,9% 75,5%

Existence d‟une fraction du capital détenue par les salariés

non dirigeants

32,3% 11,1% 24,5%

Total 100,00% 100,00% 100,00%

Source: Notre enquête.

32,3% des EMF de la première catégorie ont une fraction du capital détenu par les salariés non dirigeants

tandis que 11,1% des EMF de la deuxième catégorie ont une fraction du capital détenue par les salariés non

dirigeants. Les EMF de notre échantillon ne donnent pas la possibilité aux salariés non dirigeants de participer au

capital de l‟entreprise. Il s‟agit ici du capital économique, constitué par les revenus, la détention des moyens de

production et d‟un patrimoine matériel et financier contrairement au capital culturel. Ce dernier est caractérisé

par des ressources symboliques, des dispositions et des qualifications intellectuelles, mesurables notamment par

le niveau de diplôme et au capital social. Le capital social se définit comme l‟ensemble des ressources actuelles

ou potentielles qui sont liées à la possession d‟un réseau durable de relations plus ou moins institutionnalisées

d‟interconnaissance et d‟interreconnaissance (Bourdieu, 1980).

Le graphique ci-après est une illustration de la représentation des EMF en fonction de la détention du

capital par les salariés non dirigeants.

Figure 1: Représentation des EMF en fonction de la détention du capital par les salariés

Source : Notre enquête.

Seule la représentation des EMF en fonction de la détention du capital par les salariés non dirigeants ne

suffit pas pour déterminer leur degré de pérennité. A cet effet, nous allons présenter l‟actionnariat des salariés en

fonction des caractéristiques des EMF, illustré par le tableau ci-après.

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Tableau 3:Actionnariat des salariés et caractéristiques de l’EMF

Des actions détenues par les salariés non

dirigeants

Non (n=74) Oui (n=24) Ensemble

(n=98)

Localisation du siège social

de l’entreprise

Centre 27,0% 8,3% 22,4%

Littoral 48,6% 58,3% 51,0%

Ouest 24,3% 33,3% 26,5%

La forme juridique de

l’entreprise

coopérative 27,0% 58,3% 34,7%

SA 70,3% 33,3% 61,2%

SARL 2,7% 8,3% 4,1%

La qualité de l’entreprise indépendant 70,3% 58,3% 67,3%

en réseau 29,7% 41,7% 32,7%

Source : Notre enquête.

L‟actionnariat salarié est un dispositif permettant d‟associer les salariés à la vie financière et aux résultats

de leur entreprise. L‟actionnariat-salarié est la plupart du temps une manifestation de confiance des salariés

envers leur entreprise. C‟est aussi l‟expression d‟une volonté de bénéficier de son développement sous un autre

angle que seul celui du contrat de travail. Pour l‟entreprise, c‟est rechercher un outil de motivation et de

fidélisation aboutissant à une convergence d‟intérêts entre l‟entreprise et ses salariés.

En considérant la localisation du siège social de l‟entreprise, 8,3% des EMF localisés au centre ont une

fraction du capital détenu par les salariés non dirigeants ; 58,3% des EMF localisés dans le littoral ont une

fraction du capital détenue par les salariés non dirigeants tandis que 33,3% des EMF localisés l‟Ouest ont une

fraction du capital détenue par les salariés non dirigeants . Nous constatons qu‟en termes de détention du capital

par les salariés non dirigeants, la région du littoral a le plus grand nombre (58,3%). Cela n‟est-il pas dû peut-être

au fait que dans le Centre les administratifs étant des intellectuels perçoivent mieux les tenants et les aboutissant

de telle conjonction –couple actionnariat-salarié- que les habitants du Littoral et de l‟Ouest qui sont moins

scolarisés et n‟y comprennent pas grand-chose ?. Le tableau suivant est une illustration de la représentation des

EMF par région.

Figure 2: Représentation des EMF par région

Source : Notre enquête.

Concernant la forme juridique, 58,3% de coopérative ont une fraction de capital détenu par les salariés

non dirigeants ; 33,3% de SA ont une fraction du capital détenu par les salariés non dirigeants et 8,3% de SARL

ont une fraction du capital détenu par les salariés non dirigeants. Pour ce qui est de la détention du capital par les

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salariés non dirigeants, les coopératives ont le plus grand nombre (58,3%). Ceci peut être dû au fait que dans les

coopératives, les concernes se connaissent très bien et se font mutuellement confiance d‟autant plus que les parts

sociales constituent le capital de l‟entreprise. Le graphique ci-dessous est une illustration de la représentation des

EMF selon leur forme juridique

Figure 3 : Représentation des EMF selon leur forme juridique

Source : Notre enquête.

La qualité de l‟entreprise a une influence sur le capital détenu par les salariés non dirigeants. Ainsi,

58,3% des EMF indépendants ont une partie du capital détenu par les salariés dirigeants tandis que dans les EMF

en réseau, 41,7% ont une part de capital détenu par les salariés non dirigeants. Le graphique ci-après est une

illustration de la représentation des EMF selon leur typologie.

Figure 4: Représentation des EMF selon leur typologie

Source : Notre enquête

Le Tableau suivant résume les résultats des différentes procédures de validation des construits réflexifs

du modèle de mesure de la disjonction des fonctions de PCA et de DG:

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Tableau 4 : Les indicateurs de mesure de la frontière entre le conseil d’administration et la direction

générale

#Item Libellé

S3Q1 Les fonctions de direction et de contrôle ne sont pas assurées par un même individu

S3Q2 Dans votre entreprise, le DG n‟est pas l‟actionnaire majoritaire

S3Q3 Le CA de votre entreprise est constitué en majorité des administrateurs externes

S3Q4 Le DG a un lien de familiarité avec les administrateurs internes

Source : construit par l‟auteur

Tableau 5 : Vérification de la validité du construit de la frontière entre le conseil d’administration et la

direction générale

FCA-DG

S3Q1 0,766

S3Q2 0,700

S3Q3 -0,082

S3Q4 0,840

Source : Notre enquête

Le tableau 5 ci-dessus montre que 76% des EMF de notre échantillon affirment que les fonctions de

direction et de contrôle ne sont pas assurées par un même individu, 70% affirment que le DG n‟est pas

l‟actionnaire majoritaire et 84 % affirment que le DG n‟a pas un lien de familiarité avec les administrateurs

internes.

L‟item S3Q3 n‟étant pas suffisamment corrélé au construit, il a été ignoré par la suite.

Tableau 6: Analyse de la validité du modèle de mesure de la frontière entre le DG et le PCA

contributions croisées

(cross loadings)* FCA-DG

S3Q1 0,781

S3Q2 0,671

S3Q4 0,851

Source : Notre enquête

En procédant aux contributions croisées, les valeurs sont supérieures à 50% (tableau 6). Ce qui nous

permet de dire que ces indicateurs nous montrent que les fonctions de DG et de PCA des EMF de notre

échantillon sont distinctes.

*Toutes les contributions sont significatives : la procédure de bootstrap donne des valeurs de t> 1,96 pour tous

les indicateurs

Tableau 7 : confirmation de la séparation des fonctions de conseil d’administration et de la direction

générale

Fiabilité du composite 0,814

Alpha de Cronbach 0,655

Variance moyenne extraite 0,595

Source: Notre enquête.

Toutes les contributions factorielles (factor loadings) des variables sensées mesurer la distance entre le

conseil d‟administration et la direction générale sont supérieures à 0,5 et significatives. La validité convergente

de l‟échelle de mesure est donc validée. L‟analyse du tableau ci-dessus nous permet de constater que les

conditions requises pour assurer la validité des dimensions de qualité réflexive du produit sont assurées : la

valeur de l‟alpha de cronbach étant supérieur à 0,5 (0,7 dans notre cas), l‟homogénéité des échelles est de ce fait

suffisante.

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Tableau 8: Frontière entre le Président du conseil d’administration et la Direction Générale

Effectifs Pourcentage

Existence de frontière entre le CA et la DG 82 83,7

Absence de frontière entre le CA et la DG 16 16,3

Total 98 100,0

Source: Notre enquête.

Le tableau 8 ci-dessus nous montre que 83,7% des EMF de notre échantillon ont un DG distinct du PCA

tandis que 16,3% ont un DG confondu avec le PCA.

Dans le premier cas, L‟idée est d‟attribuer la direction générale de la société (la gestion au jour le jour)

au Directeur Général, tout en conservant un contrepoids dans la personne du Président du Conseil

d‟administration (qui représente les actionnaires).Dans ce mode de direction, le Directeur Général est désormais

le véritable chef d‟entreprise : il est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom

de la société et dispose ainsi du pouvoir de décision et d‟action au nom de la société.

Dans le second cas, on parle de Président Directeur Général c‟est-à-dire un propriétaire d‟entreprise qui

la gère lui-même. Dans ce mode de direction, le Président du Conseil d‟administration cumule ses fonctions avec

celles du Directeur Général. Il détient donc, à côté de ses fonctions de Président du Conseil d‟administration, les

pouvoirs et les responsabilités du Directeur Général.

Tableau 9: Frontière entre conseil d’administration, direction générale et caractéristiques de l’EMF

(pourcentage ligne)

Frontière conseil d‟administration direction

générale

frontière existant

entre le CA et la DG

Absence de frontière

entre le CA et la DG

Région Centre 81,8% 18,2%

Littoral 76,0% 24,0%

Ouest 100,0% ,0%

A quelle catégorie appartient votre

EMF

1 ere catégorie 80,6% 19,4%

2è catégorie 88,9% 11,1%

Qualité de l‟EMF Indépendant 78,8% 21,2%

En réseau 93,8% 6,3%

Les salariés non dirigeants détiennent

une partie du capital

Non 86,5% 13,5%

Oui 75,0% 25,0%

Source : Notre enquête

La lecture du tableau 9 nous montre que :

81, 8% des EMF de la région du centre affirment qu‟il y a une séparation claire des fonctions de PCA et

de DG, 76% des EMF de la région du littoral affirment également qu‟il y a une séparation claire des fonctions

entre le PCA et le DG tandis que tous les EMF de la région de l‟Ouest de notre échantillon affirment qu‟une

séparation claire des fonctions existe entre le PCA et le DG.

80,6% des EMF de la première catégorie de notre échantillon affirment que la séparation claire des

fonctions de PCA et de DG existe alors que 88,9% des EMF de la deuxième catégorie affirment qu‟il y a une

séparation des fonctions entre le PCA et le DG.

Quant à la qualité de l‟EMF, 78,8% des EMF indépendants affirment que les fonctions de PCA et de

DG sont clairement séparées alors que 93,8% des EMF des EMF en réseau affirment que les fonctions de PCA et

de DG sont clairement séparées.

86,5% des EMF dont les salariés non dirigeants ne possèdent aucune fraction du capital affirment que la

séparation des fonctions entre le PCA et le DG est claire tandis que 75,5% des EMF dont les salariés non

dirigeants possèdent une fraction du capital affirment qu‟il y a une séparation des fonctions de PCA et de DG.

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Tableau 10: Statistiques descriptives des dimensions de la pérennité

Statistique contrôle Direction Organisationnelle Activité

Nb. d’observations 98 98 98 98

Moyenne 53,389 38,951 76,591 61,621

Source: Notre enquête

La moyenne arithmétique, noté X ou , est la mesure la plus commune de tendance centrale, elle se

définit comme la somme des scores divisée par le nombre de scores. Par exemple, en biologie la moyenne peut

être résumée par la somme des observations divisée par l‟effectif de l‟échantillon étudié :

∑x

µ=

N

Où représente la moyenne mathématique

X les observations

N le nombre total des observations

Elle est calculée pour les caractères quantitatifs.

Tableau 11: Moyenne des dimensions de la pérennité selon les caractéristiques individuelle de la pérennité

Pérennité de

contrôle

Pérennité de

direction

PérennitéOrgan

isationnelle

Pérennité

des

Activités

Région Centre 60,83 31,18 74,63 55,87

Littoral 56,64 42,88 85,03 64,02

Ouest 40,84 37,98 62,01 61,86

A quelle catégorie

appartient votre EMF

1ère

catégorie 49,97 41,63 74,93 59,12

2è catégorie 59,27 34,33 79,44 65,92

Qualité de l‟EMF Indépendant 54,23 40,38 74,18 62,29

En réseau 51,66 36,01 81,56 60,25

Les salariés non dirigeants

détiennent une partie du

capital

Non 52,82 37,13 78,49 61,93

Oui 55,16 44,56 70,73 60,67

Source: Notre enquête

Les EMF du Centre ont une pérennité de contrôle plus élevée tandis que la pérennité de direction est

plus élevée dans les EMF du Littoral (voir tableau 11). Ceci peut s‟expliquer par le fait que Douala étant la

capitale économique où sont concentrées les affaires, les dirigeants restent le plus longtemps possible au sein de

la société alors que à Yaoundé, les gens ont tendance à se retourner vers le gouvernement compte tenu du fait

que les administrations publiques dominent sur les institutions privées. Le graphique suivant est une illustration

de la représentation des dimensions de pérennité par région.

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Figure 5: Représentation de la typologie de pérennité des EMF par région

Source : Notre enquête

Les EMF de la deuxième catégorie ont une pérennité de contrôle plus élevée tandis que chez les EMF

de la première catégorie, c‟est la pérennité de direction qui est plus élevée. Nous pouvons à cet effet dire que

ceci tient au fait que, les EMF de deuxième catégorie fonctionnant comme les banques classiques où la mission

commerciale prime sur la mission sociale, ont des actionnaires qui détiennent le capital pendant longtemps dans

l‟entreprise puisque les profits générés sont satisfaisants du fait qu‟ils atteignent rapidement l‟autosuffisance

opérationnelle.

La pérennité de contrôle et la pérennité de direction sont plus élevées dans les EMF indépendants. La

pérennité de pouvoir est alors plus élevée dans les EMF indépendants que dans les EMF en réseaux. Ceci peut se

justifier par le fait que le statut d‟indépendance confère à l‟EMF une liberté d‟action, ce qui peut amener les

actionnaires et les dirigeants à rester le plus longtemps possible dans l‟entreprise. Nous pouvons aussi expliquer

ceci par le fait que les EMF en réseau ont à la tête un organe faîtier à qui ils rendent compte de leur gestion et les

EMF indépendants sont plus tournés vers la diversification des produits et vers l‟innovation.

La pérennité de contrôle et la pérennité de direction sont plus élevées dans les EMF où les salariés non

dirigeants détiennent une fraction du capital. Etant actionnaire de l‟entreprise, les salariés veilleront à ce qu‟elle

mette plus de temps dans la mesure où la sauvegarde des acquis est très importante dans un pays en

développement comme le nôtre.

4.2- Vérification de la multidimensionnalité de la pérennité

Il est question pour nous ici de vérifier les dimensions de la pérennité de Mignon (2001) à savoir la

pérennité de contrôle, la pérennité de direction, la pérennité de l‟organisation et la pérennité des activités.

Tableau 1 : Analyse de la validité du modèle de mesure de la pérennité

Corrélations entre construit)

Contrôle

Direction Organisationnelle Activité

contrôle 0,68*

Direction 0,04 0,71*

Organisationnelle 0,03 0,00 0,52*

Activité 0,00 0,00 0,03 0,60*

*Racine carré de la variance moyenne extraite

Source : Notre enquête

L‟analyse du tableau montre que les quatre dimensions de pérennité réflexive sont assurées : l‟homogénéité

des échelles est suffisante, la validité convergente (évaluée par les contributions factorielles, et la variance

moyenne extraite) ainsi que la validité discriminante (évaluée par l‟examen des corrélations entre construits et

par les contributions croisées) sont acceptables.

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4.3- Test des hypothèses de la recherche

Le tableau suivant présente le test de l‟influence de la gouvernance structurelle sur la pérennité des EMF de

notre échantillon.

Tableau 2 : Test de l’effet de la séparation des fonctions de PCA et DG et de l’actionnariat des salariés

non dirigeants sur la pérennité

Régression Equation de régression

Equation de régression : Y (Pérennité)

Y= 0,116 Actionnariat salarié + 0,460 Frontière CA - DG

(p= 0,000; R2= 0,231 R

2ajustée= 0,278)

Valeur

Erreur

standard t Pr> |t| f²

Actionnariat salarié 0,116 0,090 1,286 0,202 0,017

Frontière PCA - DG 0,460 0,090 5,099 0,000 0,274

Source Notre enquête

Il apparait, clairement à travers la lecture du tableau 13, qu‟il existe une relation significative entre la

gouvernance structurelle et la pérennité (p= 0,000 ; R- deux= 0,231 ; R- deux ajustée= 0,278). De plus la

frontière entre conseil d‟administration et la direction générale (Pr > |t|= 0,000) exerce un effet statistiquement

significatif positif sur la pérennité de 27,4%. Toutefois, au seuil de 5%, le coefficient associé à l‟actionnariat des

salariés n‟est pas significatif. L‟hypothèse H1 est validée tandis que l‟hypothèse H2 est rejetée.

Figure 6 : Résumé du modèle d’équation structurelle des hypothèses H1 et H2

Source : Notre enquête

5. La discussion et la conclusion :

Nos résultats infirment les études de Poulain-Rhem (2009) selon lesquelles l‟actionnariat des salariés, au

travers de la multiplicité des mécanismes permettant d‟y accéder, directs ou indirects, présente la spécificité

d‟accompagner la mutation de la gouvernance dans sa double dimension, ce qui illustre son rôle déterminant car

polyvalent dans le processus de création de valeur de l‟entreprise. Ils infirment également les résultats de Guery

(2015) selon lesquels l‟actionnariat salarié peut constituer un outil visant à améliorer la performance de

l‟entreprise au travers des conséquences positives qu‟il est susceptible d‟exercer sur les attitudes et

comportements des salariés d‟une part et d‟autre part, il est une source de revenu complémentaire au salaire et le

moyen de se constituer une épargne de long terme. L‟auteur va plus loin en nuançant ses propos dans la mesure

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où il précise que ce mécanisme est néanmoins risqué puisque, par définition, le salarié en tant qu‟actionnaire est

confronté à un risque fort dans la mesure où son placement est intégralement investi en actions de l‟entreprise et

n‟est donc pas diversifié : si l‟entreprise disparaît, c‟est dans le même temps l‟épargne des salariés actionnaires

qui disparaît. Un second enjeu d‟importance pour les salariés est l‟incidence que pourrait exercer l‟actionnariat

salarié sur la gouvernance de l‟entreprise. Dès lors que les salariés se trouvent dans une situation dans laquelle ils

sont actionnaires de leur entreprise ils ont théoriquement une plus grande capacité à influer sur les décisions de

l‟entreprise, si ce n‟est individuellement, tout du moins collectivement par le biais de la présence de

représentants des salariés au conseil d‟administration ou de surveillance de l‟entreprise (dans certaines

conditions), de l‟exercice des droits de vote liés aux fonds d‟épargne salariale ou par le biais des associations

d‟actionnaires salariés. On peut par ailleurs noter, en dehors du contexte de l‟actionnariat salarié, que les récentes

évolutions législatives tendent à favoriser la présence de représentant de salariés dans les conseils.

La différence dans les résultats antérieurs et les nôtres peut-être due au fait que ces études n‟étaient pas

faites dans le secteur de la microfinance d‟une part et d‟autre part au cadre contextuel (pays développés

contrairement au nôtre qui est un pays en voie de développement). De plus, les précédentes études sont réalisées

dans des pays où le marché financier est très développé alors dans notre pays il est encore embryonnaire. De

même, la non concordance de nos résultats avec ceux des précédents auteurs peut être due aux mauvaises

réponses fournies par les dirigeants d‟EMF qui sont parfois réservés et par conséquent réticents à fournir leurs

informations aux personnes étrangères à leur structure dans la mesure où ils ont souvent tendance à croire que ce

sont des enquêtes à des fins politiques. Si nous écartons cette hypothèse de biais dans les résultats, cette

recherche nous permet de mieux comprendre les raisons du caractère éphémère des EMF de notre pays dans la

mesure où les EMF naissent tous les jours et ne vivent pas longtemps, situation qui plonge les exclus du système

bancaire classique dans une pauvreté accrue puisque ces structures cessent d‟exister emportant sur elles l‟argent

des épargnants. Ce qui rend la solution d‟inclusion des exclus du système bancaire classique et de réduction de

pauvreté pire que le problème.

Cette étude a eu pour objectif de vérifier empiriquement l‟existence d‟une relation entre les mécanismes

internes de gouvernance et la pérennité des EMF camerounais. Elle s‟est construite sur un socle théorique

emprunté au courant de la gouvernance microfinancière et sur les méthodes d‟équations structurelles.

Sur la base d‟un échantillon de 98 EMF camerounais de première et deuxième catégories, les résultats

montrent que la séparation des fonctions de PCA et de DG influence la pérennité des EMF tandis que

l‟actionnariat des salariés non dirigeants n‟a aucune influence sur la pérennité des EMF camerounais. Ces

résultats corroborent les travaux de Ondoa (2011) selon lesquels des irrégularités constatées lors de la mission de

contrôle administratif du MINFI auprès des EMF effectué en Juin 2009, sont dues à des insuffisances sur le plan

de l‟organisation et du fonctionnement des organes sociaux et opérationnels, avec en prime une grande faiblesse

dans les systèmes de contrôle et une absence totale de charte du contrôle interne, ainsi qu‟une forte ingérence des

PCA dans la gestion des établissements avec des pouvoirs élargis se substituant même aux dirigeants

responsables agréés. De même, Charreaux (1997) dans ses travaux montre que la séparation des fonctions de

PCA et de DG conduit à une bonne performance de l‟organisation.

Il ressort de nos travaux que la gouvernance structurelle à travers la séparation des fonctions de PCA et de

DG influence la pérennité des EMF de notre échantillon tandis que l‟actionnariat des salariés n‟a aucune

influence sur leur pérennité. Ces résultats confortent l‟idée selon laquelle l‟efficacité des mécanismes de

gouvernance sur l‟amélioration de la performance des EMF requiert non seulement une approche spécifique au

secteur, mais également une approche adaptée au type de propriété.

Recommandations et perspectives de recherche

Ainsi, au vu de ces résultats, les décideurs auprès des EMF devraient octroyer des primes pour permettre

aux employés d‟avoir des actions dans l‟entreprise, développer un système de gestion des compétences et des

carrières par la fidélisation du personnel, mettre en place des contrats à durée indéterminée capable de stimuler la

motivation au travail.

L‟Etat devrait aussi mettre en place un comité efficace de surveillance des EMF sur le plan du

fonctionnement. Un comité existe déjà certes, mais n‟a pas encore mis en place des rouages nécessaires pour

surveiller les EMF de près et savoir lesquels sont en difficulté. Le constat est alarmant surtout dans notre

contexte dans la mesure où les épargnants sont toujours surpris lorsqu‟un EMF tombe en faillite alors que si le

comité de surveillance fonctionnait normalement, il devrait déjà informer les populations d‟une éventuelle

faillite dudit établissement.

Compte tenu de l‟importance de la microfinance dans la lutte contre la pauvreté et la réduction du

chômage, il est important pour les recherches futures de mettre en parallèle la pérennité et la performance des

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EMF dans le but de comprendre l‟interaction entre les deux concepts et d‟élargir le champ d‟observation vers la

sous-région Afrique centrale notamment en zone CEMAC, d‟où avec un échantillon de grande envergure.

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151

Références

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