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RÉSUMÉ DE LA RECHERCHE :La question du droit d’auteur est aujourd’hui au premier plan de l’actualité en matière économique. Cela tient au poids des
activités de création dans la vie industrielle et à l’importance grandissante des industries culturelles et des médias dans les
échanges internationaux. L’objet de la recherche est d’éclairer les mécanismes à l’oeuvre en matière de protection de l’innovation
dans l’industrie en se focalisant sur l’analyse de la propriété intellectuelle dans le domaine de l’audiovisuel.
Le développement des industries culturelles se traduit par un volume croissant des flux financiers générés au titre du droit d’auteur.
Il donne aussi lieu à une évolution profonde des circuits de reversement de ces rémunérations et de leur régulation. Presque chaque
terme de la définition du droit d’auteur sevoit remis en question et appelle des aménagements voire des transformations de la
protection de la propriété intellectuelle : dans ses principes directeurs, dans ses mécanimes incitateurs, dans ses conditions
d’application, dans son contrôle et sa régulation.
Des décalages se sont ainsi créés entre les principes de base sur lesquels s’appuie la protection de la propriété intellectuelle et les
évolutions effectives de son exercice dans les processusde création et diffusion. Le système des droits d’auteurs s’est construit
progressivement, de manière pragmatique, et il se charge aujourd’hui d’un poids et de fonctions qui ne sont plus celles pour
lesquelles il a été originellement conçu. Les droits de propriété ne répondent plus notamment, au seul souci de protéger des
auteurs : ils visent aussi à protéger et susciter les investissements pour encourager la croissance et le développement des nouvelles
industries. Le problème des droits de propriété intellectuelle apparaît donc aujourd’hui largement comme un problème
d’application pratique et de gestion : détermination du contexte d’application d’une part, modalités de rémunération d’autre part.
La situation actuelle demande de réfléchir à l’élaboration de nouveaux principes directeurs. Pour ce faire, le rapport repère et
identifie la nature des différents modes de reversementsen dégageant plusieurs modèles de rémunération et d’organisation
sectorielle. Ces modèles sont mis en relation avec l’organisation des filières de production, les stratégies des acteurs économiques et
les relations qui existent au sein de ces filières ; ils sont illustrés par plusieurs cas réels, ainsi que par des conflits ou décisions
ayant fait l’actualité.
Plus précisément, le rapport est organisé autour des points suivants
* situation et conditions de remise en cause actuelle du droit d’auteur
* description et caractérisation des pratiques de gestion sectorielles des droits
* évaluation quantitative et actualisation des flux financiers générés par le droit d’auteur dans les industries culturelles
* évolution des sytèmes de droits et protection des auteurs
* impact sur la stratégie des acteurs économiques, l’organisation et les relations dans les filières
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
SOMMAIRE
INTRODUCTION 5
1. L’actualité de la question du droit d’auteur 5
2. Le droit d’auteur: une doctrine juridique et économique 8
Droit de l’hommeinaliénable... 8
... ou retour surinvestissement ? 10
L’immatériel ou leslimites du marché - Laprotection del’innovation 10
L’artistique ou leslimites du contrat - Larémunération des créateurs 11
Une expression,quatreacceptions 12
Un mode de rémunération 13
3. Un système remis en causedans toutes sescomposantes 15
L’auteur 15
L’oeuvre 16
L’idée de créationoriginale 16
Le processus decréation 17
Les secteurs deréférence 17
Le modèleimplicite création - diffusion 18
La notion de reproduction 18
Les modes de consommation 19
La durée de la protection 20
Les principes derémunération 22
Les territoires deréférence 24
4. Des questions àtraiter globalement 24
Le droit d’auteur : unesource dequestionnements pourl’économiste 27
Des questionspour le juriste 32
Un problème de gestion 33
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PARTIE I.
LE DROIT D’AUTEUR AU CONCRET : DES PRATIQUES VARIEES 35
1. Typologie des modes dediffusion : histoire d’une dématérialisation 35
Modèle 1 : L’oeuvreunique 36
Modèle 2 : Lacommercialisation dusupport 37
Modèle 3 : La télédiffusion de l’oeuvre 39
Modèle 4 : L’oeuvre enréseau 40
Des modèles idéauxtypiques mais des modes dediffusion innombrables 42
2. Le droit d’auteur dans l’audiovisuel : des configurations variées 44
Le cinéma, uncontextetrès favorable... 44
La vente de vidéogrammes : comme aucinéma... 51
La télévision, unemise en oeuvre difficile 53
3. Un champ d’application qui se transforme 56
Des modes de production qui se complexifient 56
Des possibilités de diffusion qui s’élargissent 58
Des marchés et desfilières qui s’intègrent 60
De nouveaux acteurséconomiques quiapparaissent 61
4. Les différents modèles d’application des droits d’auteur 68
Modèle 1 (marchédel’art) 69
Modèle 2 (édition littéraire, cinéma) 70
Modèle 3 (télédiffusion) 71
Modèle 4 (copie privée) 73
Du droit d’auteur au droit desauteurs : desrègles derépartition qui se
construisent 74
Quandle droit del’homme n’estplus gérable... La fin dudroit d’auteur ? 78
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PARTIE II.
LE DROIT D’AUTEUR EN FRANCE : UNE EVALUATION QUANTITATIVE 79
1. Des difficultés à évaluer lesvolumes de droitsd’auteurs 79
Le choix d’un objet : lesdroits d’auteur juridico-institutionnels 79
Le dispositif demesures 80
Les difficultés d’analyse : des catégoriesartificielles 82
Les difficultés d’analyse : lessociétésintermédiaires 83
Nationalité et territorialité : des concepts inappropriés 84
2. Les données disponibles 84
L’AGESSA 84
La Maison des Artistes 89
Les sociétés degestion collective desdroits d’auteurs 91
3. Huit milliards de francs ! 95
PARTIE III.
LE DROIT D’AUTEUR : UNE GRANDE ADAPTABILITE, AUX DEPENS DES
DROITS DES AUTEURS ? 9 9
1. Le droit d’auteur: un objet conventionnel qui évolue 99
2. Le droit d’auteur: quel droit pour quelles oeuvres ? 103
L’oeuvre,orpheline de son support ? 103
Tousauteurs ?De l’importance dusupportcomme définition de l’oeuvre 105
L’oeuvre et sonstatut :l’importance de la catégorisation 107
L’éclatement desoeuvres et des droits 108
3. La protection des ayantsdroit face aux nouvelles technologies de
diffusion 112
Les droits patrimoniauxface aupiratage 112
Le droit d’auteurface à lasimplicité de gestion ducopyright 115
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PARTIE IV.
QUAND LE DROIT D’AUTEUR DEVIENT UN PROBLEME
DE GESTION ET D’ECONOMIE 1 1 9
1. La gestion des droits d’auteur: entre les mains desdifférents acteurs 119
Salaire ou droitd’auteur ? Une questiond’étiquetage 119
Le droit d’auteur : incertitude et prime de risque 121
Le droit d’auteur : unenjeupour des points de vueparfoiscontradictoires 122
Droits de lapropriété intellectuelle et politiquesculturelles 124
Un problème de gestion 126
2. Les droits au coeur des questionséconomiques 127
Les droits, or del’ère immatérielle 127
Le contrôle desdroits : de nouveauxmécanismes decoordination 130
Des systèmes de protectionspécifiques 132
3. Droits de la propriété intellectuelle et régulation de la concurrence 135
Les droits au coeur des politiques économiques 135
Le droit des créateurs,entrave audroit (de diffusion) desoeuvres 137
Le droit d’auteur, un droitgéographiquement etculturellementsitué 138
L’harmonisation de la protectionentresecteurs industriels qui serejoignent 141
CONCLUSION 143
1. Le droit d’auteur : une valeur économique, juridique et symbolique 143
2. Un recours grandissant audroit d’auteur dans la vie économique 146
BIBLIOGRAPHIE 1 4 9
Articles, livres, communications 149
Etudes et documentsdivers 152
Données chiffrées 153
Actes decolloques 154
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Partie IV.
Quand le droit d’auteur devient
un problème de gestion etd’économie
1. LA GESTION DES DROITS D’AUTEUR : ENTRE LES MAINS DES DIFFERENTS ACTEURS
Salaire ou droit d’auteur ? Unequestion d’étiquetage
Comme nous l’avons vu au cours del’étude quantitative, il est assezdifficile de
distinguer lesdroits d’auteur des salaires. Il est faux depenser que tout ce que
touchent lesauteurssont desdroits d’auteurs. Lescontrats desréalisateurs de
cinéma prévoient leversementd’un salairepour le travail de technicien ainsi qu’un
pourcentage correspondant auxdroits d’auteurs. La plupart du temps, ce
pourcentage est"remplacé" dans lapratique par unminimum garanti et lesauteurs
perçoivent simultanément deux sommes,l’une au titre de salaire etl’autre au titre
de droits d’auteurs.A titre d’exemple, lecontrat deSergeMeynard pourle téléfilm
Le sang durenard prévoyait le versementd’un salaire de 275 kF(110 kF pour le
travail de scénariste et 165 kFpour le travail deréalisateur) etd’un minimum
garanti surdroits d’auteurs 275 kF(mêmerépartition). Nous soulignons cetétat de
fait pour insister sur le caractère conventionnel del’appellation "droits d’auteur".
Quand SergeMeynard perçoit sa rémunération,seuls les termes ducontrat
permettent dedistinguer la partie"salaires" de lapartie "droits d’auteur". En fait, ce
n’est pastout à faitvrai : si rien ne permet de distinguera priori le paiementd’un
salaire du paiementd’un droit d’auteur, larépartition librementdéfinie aucours de
la signature des contrats a desrépercussionsconcrètes. D’unepart, les charges
socialesrelatives audroit d’auteurempruntent uncircuit très spécifiquepuisqu’elles
sont versées àl’AGESSA. D’autre part, les taux descotisationssociales nesont pas
les mêmes nipour les diffuseurs ni pour lesauteurs et lesprestations auxquelles
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elles donnentdroit différent aussi. A titred’illustration, nous pouvonsconsulter le
tableau comparatifsuivant.
Ainsi, si la distinction des droits d’auteurs et dessalaires est affaire de
dénomination, lechoix de l’uneou de l’autre leur appose unemarque quirend la
différence effective.Sont droits d’auteur lesrémunérations qui ont été versées "en
droits d’auteur". Et payerquelqu’un endroitsd’auteurs ne signifie pas lui signer un
chèque particulier mais devoir emprunter la voie des droits d’auteurspour le
paiement des chargessociales et luidonnerla possibilité de bénéficier du régime des
auteurs.
Les droits d’auteur sontétablis par laloi, mais l’appellation "droits d’auteur" est le
plus souventle fait d’une négociation et de lasignatured’un contrat. Si les sommes
perçues par unpeintre en contrepartie del’autorisation dereproduire sonoeuvre sur
un calendrierentrentautomatiquement dans laclasse desdroits d’auteur,cela n’est
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plus automatiquepour lessommesperçues par unmetteur enscène de lapart de son
producteur.
Le droit d’auteur : incert i tude et prime de risque
Une des spécificitésmajeures des secteurs culturels tient à laplace centrale qu’y
tiennent le risque, l’incertitude, et lamaîtrise du temps. Dans ces domainessans
doute plus qu’ailleurs, la réussite et lesuccès d’une part sont très largement
aléatoires etd’autre part neconnaissent aucun seuil minimum ; leséchecspeuvent
donc s’avérer brutaux et complets. Cetteénorme incertitude qui caractérise le
marché desproductions culturelles est tout àfait spécifique de cette sphère
d’activité : incertitude quant à lavaleur f u t u r e prix derevente -d’une oeuvre(cas
de la peinture), incertitude quant aunombre de placesou d’exemplairesvendus
(industries culturelles ouspectacle vivant). Lesmécanismes d’anticipation durisque
structurent de cefait toutes les relations ausein des filières de production, y
compris, bien sûr,celles touchant audroit de propriété intellectuelle : protection des
rémunérations, réassuranceou transfert durisque, anticipation des recettes et des
comportements,dissolution du risque parla gestion degammes deprojets.
Commenous l’avons vu plus haut lajustification économique desdroits depropriété
est d’ailleursdirectement liée à l’existence decette incertitude de lacréation. Le
monopoleprovisoire queconfèrent, pendant ladurée deprotection, les droits de
propriété intellectuelle visentd’abord, on l’a vu, à compenser les imperfections du
marché en garantissant unerémunération et enincitant à l’innovation. Par la
proportionnalité des rémunérations ausuccès de l’oeuvre, lesdroits d’auteur
constituent parailleurs, en cas deréussite, une véritableprime au succès. Ils
permettentainsi, d’un côté, decompenser,d’un projet à l’autre, lesrisquesimportant
d’échecs quecomportetouteproduction ; mais ilstransmettentégalement, del’autre
côté, lesécarts auqueldonnelieu l’exploitation publique des oeuvres artistiques, en
accentuantdonc les déséquilibres derevenus ausein despopulationsd’auteurs98. En
outre, lesdifficultés de repérage del’exploitation desoeuvres tendentégalement à
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favoriser les oeuvres àsuccès,comparativement àcelles quisont moinsvisibles car
exploitées occasionnellement. Lesrémunérations octroyées auxcréateurs autitre
des droits depropriété intellectuellesont dece fait extrêmementinégales, comme en
témoignent les schémassuivants.7% des auteurscompositeursSACEM dépassent
60 000Fannuelsmais 3/4 touchentmoins de 6 000F ;1,5%des auteurs de théâtre
SACD touchentplus de 100000F par an, maisplus de 4/5 moins de10000F. Ce
phénomène seretrouve dans tous les pays et tous lessecteursculturels99. Le
déséquilibre entre les auteursest, en outre, accentué par lespratiques et les
rémunérations contractuelles qui existent àcôté du droit d’auteur. Lebesoin de se
garantircontre lesaléas del’accueil du public à uneoeuvre aentraîné eneffet une
augmentation importante descoûts deproduction (dansle cinéma notamment, mais
égalementdansle théâtre, l’opéra, la musique).Ce souci a conduit, de tous temps, à
des niveaux derémunération extrêmementhauts pour les quelquesauteurs qui
"marchent" et, parvoie de conséquence,pour tous lescollaborateurs artistiques "à
succès". Lescachetsimportants se sont deplus accompagnéspour ceux-là d’un rôle
de plus en plusimportant dans lesdécisions qui touchent la production et la
réalisation. Il faut cependantnoter que certainessociétés degestion collective
s’efforcent,dans unefaible mesuretoutefois, demettre enoeuvre desmécanismes
compensateurs sur labase des ressources"collectives" dont ellespeuventdisposer :
elles peuvent, parexemple, choisir devaloriser certainstypes d’oeuvres oucertains
types de créateurs.
Le droit d’auteur : un enjeu pour des points de vueparfois contradictoires
Le choix desmodes de rémunération desauteurs par leséditeurs ou les producteurs
met à jour lesintérêts divergents au sein de populations d’auteurs quitendent à se
présenter commehomogènes.C’est le casdans la peintureavec l’application dudroit
de suite, c’est aussi le casdans l’édition avec le développementgrandissant des
systèmes éditoriaux dedroits forfaitaires : si lesystème estgênant pour lesauteurs
confirmés, il estavantageuxpour les jeunesauteurs et illeur permetd’être édités.
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
D’un point de vueéconomique, le choix ne sefait doncjamais simplement entre des
droits depropriété intellectuelle ou pas, maisplutôt entre les droits depropriété d’un
groupe d’acteurs et ceuxd’un autre groupe100. Se focaliser sur laquestion des
bénéficiaires desdroits de propriété intellectuelle plutôt que surcelle de leur
principe permet de comprendre, notamment, leparadoxe selon lequel les
producteurs se battent,d’un côté, pour affaiblir le droits des auteurs mais
revendiquentparfois aussi, d’un autre côté, un droit du même ordre pour eux-
mêmes. La résolution duparadoxe est quedans un cas, c’est de la gestion des
relations avecleur "fournisseur" dont il est question,dansl’autre cas, de la gestion
des relations avec leursclients.
La différenciation qui s’opèreentre lescatégoriesd’auteur sousl’effet (ou à l’égard)
du droit d’auteur tientnotamment à despréférencestemporelles différentes :longue
duréepour desartistesplus anciens ou plus reconnus,rémunération immédiatepour
des jeunes artistes au succès et à l’avenirincertains ; on retrouve les mêmes
disparités dans d’autres catégories, lesproducteurs decinéma par exemple dont
certains visent ungros succès immédiat etdont d’autres inscriventleur production
dans lecadred’un catalogue auxrecettesrégulières et à la durée de vieplus longue.
La différenciationentre lesdifférentsacteurs de lachaîne deproductiontient aussi à
leur aversion etleur gestion du risque qui nesont pas lesmêmes en fonction de leur
situation(salarié ouentrepreneur) et deleur stratégie individuelle (producteurs de
cinéma101) : c’est d’ailleurs ce qui explique,dans lecinéma, l’existencesimultanée de
plusieurs modes de rémunération (salaires, droits d’auteurs, participation),
correspondant à desattitudesdifférentes àl’égard durisque.
Les négociations menéesautour desdroits s’opèrent doncdans dessphères de
gestion différentes102. Le niveau privilégié (un secteur culturel, un sous-groupe
artistiquehomogène, uneproductionspécifique) estfixé par le jeu desacteurs, p a r
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
leurs interactions et,selon les cas, parl’environnementjuridique, réglementaire,
technique quipeut imposercertains contextes. Lesmêmes oeuvrespeuvent faire
l’objet de systèmes de protection différents selon la sphèredans laquelle on les
envisage.Ainsi, en France, lesfilms offrent d’unepart dessystèmes deprotection (et
de rémunération) différents aux musiciens et aux réalisateurs et scénaristes,d’autre
part un exercice différent dudroit moral selon qu’il sontdestinés au cinéma ou à la
télévision. De même, enAngleterre (sous le régime du copyright cette fois) une
oeuvrepeut être littéraire ou musicalemais pas lesdeux à lafois : les chansons y
font ainsi l’objet de deuxcopyrightsdistincts, lesconditions applicables à lamusique
et aux parolesétant différentes.
Droits de lapropriété intellectuelle et politiquesculturelles
En matièreculturelle et artistique,commedans ledomainetechnique et industriel,
la fonction et lerôle del’Etat peuventêtre conçus dedeux manières : tantôt comme
devantcompenser l’action du marché (enintervenant notamment dans dessecteurs
jugés stratégiques oudéficitaires mais dont le maintien est considéré comme
essentiel), tantôt commestimulateur etrégulateur de marchéssusceptiblesd’être
dévoyéssousl’effet du commerce (enl’occurrencele marché del’art et les industries
culturelles). Parallèlement,l’Etat peut soutenir lacréation et laproduction (au
risqued’être accusé d’imposer uneesthétique d’Etat àtravers sespréférences103), ou
la consommation et lademande(par exemplesousforme dechèques auspectateur)
sansinterférer alorsavec leschoix artistiques.C’est dans lemême typed’alternative
que se situe ledroit d’auteur. Le système depropriété intellectuelle est d’ailleurs
constitué dedeuxvolets, relativementdistincts, etcorrespondant à desphilosophies
différentes : littéraire etartistiqued’unepart, industriel d’autrepart. Il nes’agit pas
là, simplement,d’une coupureentrece qui relèverait de l’art et ce qui relèverait du
commerce, mais bienplutôt d’une séparation entre deux modes de production
industrielle et commerciale ou culturelle. Mais, etl’on retrouve ici le caractère
arbitraire dessystèmes depropriété intellectuelle que nousévoquions plus haut,
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cette coupure nes’exprime pas et ne se définit pas de lamêmemanière danstous les
pays.
L’intervention publique se justifie généralement par lesouci d’assurer la
reconnaissancesociale desauteurs et deprotéger l’intégrité deleur contribution
artistique. C’est d’ailleurs cet argument qui est leplus fréquemment mis enavant
par les acteursconcernés.Mais l’intervention publique enmatière d’innovation et de
création se justifie aussi, économiquement, par lanécessité decorriger les
imperfections du marché qui a tendance à ne pasrécompenser suffisamment
l’innovation et n’assure pas deréelles incitations àcréer. En effet, en l’absence de
mécanisme de protection,le créateur risque devoir son innovation instantanément
imitée et copiée en cas de succès,sans que sesinvestissements et soninventivité ne
puissentêtre rémunérés,sans qu’il nepuisse enbénéficier davantage par rapport à
ses concurrents. Ces deuxclasses d’arguments,sociaux d’unepart, économiques de
l’autre, renvoient à deuxvolets distincts dela protection intellectuelle (moral et
patrimonial), maisinterfèrent cependant en permanence dans sonapplication.
En outre, ladiversité des motifs quisont àl’origine du droit d’auteur signifie que le
système de propriétéintellectuelle doit s’envisagerdans le cadre général etplus
vaste del’ensemble desaidesélaborées enfaveur de lacréation et de l’innovation,
dont les subventions, les quotas, lesdispositifs dereconnaissance professionnelle, la
régulation de laconcurrence... Onpeut ainsidistinguer troistypes de politiques en
matière de rémunération de lapropriété intellectuelle :1. l’élaboration deprocessus
spécifiques de régulation (institués,comportantrègles et procédures commedans le
cas du droit d’auteurstricto sensu) qui viennent segreffer sur lespratiques des
acteurséconomiques et lesencadrer(cas du droit desuite en peinture104) ; 2. des
politiques qui s’inscriventdirectement dans leprocessus "technique" deproduction
(c’est le cas du cinéma ou de l’édition où sont imposées desformes ou desclauses de
contrats et de rémunération, où sont identifiées a priori des catégories de
collaborateurs particuliers...) ;3. des injonctions ou des recommandations aux
acteurséconomiques etjuridiques pourqu’ils tiennent compte desayantsdroit de
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façon "honnête" et correcte(e.g. les mesures favorisant la distribution ensalleou la
programmation de filmsfrançais plutôt qu’américains, ou lesquotas de chanson
française à la radio).
Dans tous les pays, plusieurslois s’associentainsi au droit d’auteur(droit des
marques, concurrence déloyale...) pour offrir, par exemple, une garantie
complémentairecontre les reproductions nonautorisées. Les différentsregistres de
l’action publique visent eneffet, le plus souvent, desobjectifs de mêmenature qui
sontsusceptibles d’êtreatteints deplusieursfaçons : parexemple en établissant des
droits depropriété quidonnent,a priori, des incitations à innover,ou en instaurant,
a posteriori, des incitations à transférer les produits decréation, enstimulant la
compétition sur les marchés. L’existence de mécanismes decompensationentre les
différents systèmes d’aideconduit d’ailleurscertainséconomistes àestimer quedans
les secteurs où laprotection desdroits de propriété est faible, la législation
concurrentielle devraits’appliquer avec plus de souplesse mais s’appliqueravecplus
de rigueurdansle cas contraire.
Un problème degestion
Le problème desdroits de propriété intellectuelle peut donc apparaître (etêtre
envisagé) d’abord comme un problème d’applicationpratique et de gestion:
détermination du contexted’applicationd’une part, desmodalités demise enoeuvre
d’autre part. Ainsi, au niveau européen, il existe pourchaque type dedroits de
propriété intellectuelle, un noyau deprérogatives essentielles,définies droit pa r
droit, etconstituant la substance etl’objet spécifique dudroit. Pour les brevets ou les
marques, cesobjets spécifiques sont à peuprès définis105. En matière dedroit
d’auteur, en revanche,il n’existeaucunedéfinition d’ensemble dece type. Quant aux
modalités de rémunération, la complexité de gestiond’un systèmeoù se trouvent,
d’un côté, unemultitude d’auteurs, et del’autre côté unemultitude dediffuseurs ont
incité, dans untrès grand nombre decas, àl’instauration de dispositifs degestion
collective. L’immatérialité deséchangesfait que le simple fonctionnement dumarché
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ne suffit pas àassurer lamise en relation des uns et desautres (problème de
repérage desoeuvres et desayantsdroit, problème decontrôle,... On se situedans
des contextesdans lequel l’auteur, pasplus que l’éditeur-producteur, n’aaucune
initiative et n’est même pas informé de l’utilisation desoeuvres,puisqu’à partir du
moment où il détient lesupport, un programmateur deradio peut passer un disque
quand il ledésire). Mais la gestioncollective ad’autresobjectifs ; il s’agit notamment
d’aboutir à unecertainehomogénéitédans lesconditions d’utilisation desoeuvres, ce
qui est d’autant plusimportantque,commenousl’avons notéplus haut, l’exercice du
droit d’auteur donnelieu, à sesmarges, ànégociation etinterprétation puisqu’on ne
se situe pas dans lecadre de produits parfaitementidentifiables etsubstituables
comme peuvent l’être la plupart des produits industriels. Si laportée des
autorisations et lesrémunérations demandées encontrepartie devaientvarier en
fonction dechacune des oeuvres durépertoire d’unesociété degestion collective, ce
type de gestionperdrait sonintérêt pour les utilisateurs. Lastandardisation des
transactions et deséchanges(qui permetleur multiplication) passedonc aussi pa r
une standardisation desproductions à l’intérieur de sous-groupeshomogènes
pouvant donnerlieu à un traitementglobal etautomatique.
2. LES DROITS AU COEUR DES QUESTIONS ECONOMIQUES
Les droits, or del’ère immatérielle
Du point de vueéconomique, l’éclatement des modes de diffusion et laréutilisation
partielle des oeuvresdans descréations modernes(films à base d’imagesd’archives
ou disques decompilation par exemple) posent deréels problèmes car la difficulté
majeure de laproduction - le facteur limitant et laressourcerare à gérer -n’est alors
plus seulement lacréation, la conceptionou la réalisation, mais devient désormais
l’acquisition desdroits d’exploitation.Ceux-làsontmultiples et complexes àacquérir,
l’identification et le repérage desdroits et desayants droit sont malaisés106, la
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négociation et la rédaction descontratsdemandent un temps important, cescoûts se
superposent aucoût de laproduction proprementdite...
Mais outre les surcoûts quenous venonsd’évoquer, le développement de la
protection artistiques’estaussi traduit par lamise en place deplusieurstypes de
taxes(sur les cassettespour la copie privée parexemple, ou surle chiffre d’affaires
des sociétés de télévision). Lamultiplication des droits (droitsd’auteur maisaussi
droits voisins) et desayants droit a ainsi induit, à recetteségales, un
renchérissement descoûts deproduction. Et l’on peut se demander si, àmoyen
terme, ces droits nerisquent pas d’êtrepréjudiciables à ceux-là mêmes qu’ilssont
censés protéger :dans certains cas, ils conduisent en effet à une limitation de la
production ou à un report dessurcoûts sur leséléments lesplus faibles de lafilière
de production(les exploitants de salle decinéma, par exemple, quisont lesdiffuseurs
finaux).
Cettecomplexité de la gestion desdroits s’estconjuguée à larevalorisation des droits
consécutive à la multiplication deschaînes etsupports dediffusion pour susciter un
phénomène deconcentration et de"ramassage" dedroits107 permettant aux
diffuseurs deréaliser deséconomies d’échelledans leurgestion et deséconomies
d’enverguredans leurmise envaleur (ventes enbloc...). D’unepart, lessociétés de
gestion collective se sont efforcées d’attirer le maximum d’affiliés pour être en
mesure d’offrir aux diffuseurs un catalogue d’oeuvres directement et facilement
accessibles. D’autrepart, des entreprisesspécialiséesdans le négoce desdroits
d’exploitation sesont créées (indépendantesou filiales de groupes audiovisuels ou
financiers) etsont à la tête deportefeuilles importants. Les portefeuilles dedroits
que possédaient lesproducteurs petits etgros ontainsi connu une véritable flambée,
qu’il s’agisse deceux desmajors (Twentieth, MGM/UA, Columbia (acquise par Sony
pour $ 3,5 milliards) ou MCA/Universal (acquise par Matsushita pour $ 6,5
milliards)) ou despetits indépendants(portefeuilleFechneracheté enFrance par la
Générale d’Imagespour 500 MF, celui d’Alain Terzian (16 films) pour 100 MF).
Durant les années 80, lesdroits audiovisuels disponiblesayant presquetous fait
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l’objet de rachats, cessociétés degestion dedroits ne secontentent plus deracheter
des "vieux"droits ou d’intervenir en aval(unefois que lesfilms sont sortis ensalle) :
elles cherchent àêtre présentes, deplus en plus, enamont du processus de
production(dès laphase deproduction) en acquérant àmoindresfrais une partie des
droits àvenir (et en assumantdonc désormais unepartie du risque deproduction).
Par ailleurs, le nombre de filmstournés étantlimité, ces sociétés ontvite élargi leur
activité en s’intéressant àd’autres produitsaudiovisuels et encontribuant ainsi à
l’intégration des marchés.Leurs portefeuilles sonthétéroclites ; ilscomportent des
milliers de films, mais aussi d’autres produitstélévisuels (séries,dessinsanimés,
documentaires, jeux...)
La généralisation desrachats dedroits et le développement desociétés spécialisées
dans leurnégoce onttransformé lestermes del’évaluation économique de cesdroits
d’exploitation :fiabilité et vérification deleur existence(quandil s’agit, par exemple,
d’achats dedroits sans supportsmatériels, quand les droitssont grevés, quand il
faut effectuer la reconstitution de lachaîne des droits...),valorisation et fixation du
prix (anticipation et projection économique quant à leur exploitation, taux de
rotation,valeur résiduelle, actualisation desactifsnets futurs).
La gestiond’un portefeuilledemande des investissements(pour la conservation des
supports), faitjouer des"effets decave" (raréfaction enretirant le film du marché
afin de faire monter artificiellement sonprix108) ou de "rafraîchissement"(ressortir
des films, quitte à les vendremoins chersafin de les raviver dans lamémoire du
public), nécessite unrenouvellementrégulier du portefeuille (par acquisition de
nouveaux films ou de produitscomplémentaires,pouvant se vendreconjointement à
des films "usés"), requiert deseffets de volume (afin dedevenir un interlocuteur
incontournable pour lesacheteurs; afin de minimiser, pour le diffuseur, les
interlocuteurs ouintermédiaires, la recherche deprogrammes, lanégociation des
droits et la gestion physique des ventes ;afin d’augmenter, pour lasociété dedroits,
le volume desventes enfavorisant lespackages,en plaçant àcôté des"locomotives",
des films plus difficiles à vendre). Les films sont eux-mêmes partiellement
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substituables àl’intérieur d’un catalogue ; lavaleur d’une comédie, parexemple, ne
sera pas lamêmepour unesociétédisposantd’un catalogue où de telsfilms sont déjà
largementreprésentés ou bienpour uneautrecherchant àcompléter etenrichir son
catalogue sur unsegment dela gammed’où elle estabsenteafin de pouvoirproposer
une offre complète à desdiffuseurs109.
Si le prix d’évaluation est difficile à établirlors de l’acquisition, le prix devente
ultérieure l’est donc tout autant. Eneffet, les pratiques de vente parpackage, la
diversité desterritoires d’exploitation et de la durée de cession dedroit rendent le
niveau de prixtrès fluctuant et difficile à identifier. Lesproducteurs et lessociétés
de droits,même quandellessont importantes, ne sontdonc pastoujours àmême de
connaître précisément leniveau exact desrecettes àattendre dans lesdifférents
pays ni lesmoyens decontrôler l’exploitation : cela dépend en effet del’audience
éventuelle, du prix payé par leconsommateur, del’importance du marché
publicitaire local, des modes de consommation en concurrence...Dans un tel
contexte, lafixation du prix passe parl’élaboration denormespubliées parexemple
dans lesjournauxprofessionnels,ou par une modification desmodes de fixation des
prix (généralisation du forfait).
Le contrôle desdroits : de nouveaux mécanismes decoordination
Nous avons vu, et nousl’avions aussi évoqué àpropos du développement de la
télévision par câble ousatellite, que ledéveloppement detechnologies de diffusion
massiveconduit à unedispersion des marchés etsoulève des problèmes de contrôle
non négligeables. Lerevenu marginal de certainesactivités est en effet,dans
certainscas,très largementinférieur à l’acquisitiond’informations sur lesnouveaux
marchés et aucoût du contrôle quipourrait être mis en place. Il est dece fait
intéressant deconstater un glissement d’une réponse entermes juridiques
(raffinement du droit desauteurs, institution de dispositifs decontrôle...) à une
réponse entermes économiques (régulation de laconcurrence,licences ou taxes
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fiscales, baisse desprix ou modification despratiques devente110, dispositif de
gestioncollective111, élaboration decontratsconventionnels).
Contrats types:l’exemple deBroadway112
On trouve de telsexemple decontratsconventionnelsnégociés et auxquels lespartiesprenantes souscrivent librement dans les contrats types(approved productioncontract) de l’association américaine desauteurs dramatiques quiexistent depuisplusieursdizainesd’annéespour lespièces dethéâtre et les comédiesmusicales. Cescontrats reconnaissent auxacteurs undroit très proche, dans sonesprit, du droitmoral (droit au respect del’oeuvre, droit de paternité). La seuledifférence est quel’auteur ne peut modifier unilatéralement une oeuvrequ’un producteur aaccepté deproduire et dans laquelle il a investi (sauf bien sur si le producteur accepte cesmodifications. Lecontrat concentre ce droit sur la seuletête del’auteur. Lesautrescollaborateursartistiques (metteur enscène,chorégraphe, décorateur,acteurs...) onten revanchetrès peu dedroits sur leur contribution àl’oeuvre. C’est donc l’auteur quiest, éventuellement, enmesure derelayer (ou de contrôler) ledroit moral desautrescollaborateurs. Dupoint de vue du producteur,l’énorme avantage estqu’il n’a en facede lui qu’un seul interlocuteur etn’a pas à négocier ni àdemanderl’autorisation àplusieursco-créateurs.Malgré le copyright, les auteurs ontainsi réussi ànégocier unsystème deprotection très proche decelui qui s’applique enFrance dans lecinéma,dans un secteur qui présente lemême type de caractéristiques(coût très élevé,création collective) ;mais enrevanche,rien de tel n’existe dans ledomaine ducinémaaméricain. Lecontrat type permet unerésolution simplifié et à un faible coût desconflits
A travers l’émergence dedispositifs de gestioncollective desdroits tout comme par la
négociation decontrats types dans dessous-secteursdéterminés, telle que nous
venons de ledécrire, denouveauxmécanismes decoordination semettentainsi en
place entre agentséconomiques, quidépassent lasimple gestion de droits. Ces
mécanismes ont des effets deplusieurs ordres. Il se traduisent d’abord par le
développementd’accords spécifiques, par des règleshors marché113, permettant de
créer unesituation d’équilibre entre producteurs etdiffuseurs ; ces accordsdonnent
lieu à l’établissement derentes desituation pour certainsmédiateurs (tels que les
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sociétésd’auteurschargées de collecter les droits), etconduisentmêmeparfois à des
accords de coalition de typeoligopolistique,entreproducteurs oudiffuseurs,visant à
l’établissement de barrières àl’entrée à l’égardd’une concurrence issue depays en
développement ouhors de la sphère d’exploitationtraditionnelle des oeuvres.
Parallèlement,l’émergence decontrats et demodes de gestion spécifiquesconduit à
une structuration des secteursd’activité ensous-groupeshomogènes dupoint de vue
de l’activité, de la production, du mode dediffusion ou des profils114. Ces sous-
groupes peuvent dèslors se transformer en lobbies capables d’influencer les
mécanismes de régulationconcurrentielle au niveau européen (UE) ou mondial
(GATT-OMC). Paradoxalement,on peut considérer que cerenforcement deseffets de
réseau répondindirectement à laphilosophie dela Commission Européenne qui
cherche àcréer ungrand marché unique ensupprimant lescloisonnementstenant
aux différenteslangues, auxdifférents marchés, modesd’organisation... De cepoint
de vue, l’évolution du droit de propriété artistique représente un outil
d’homogénéisation et d’action en soi. Commele montre l’économie del’innovation115,
c’est lacodification desdroits et des formes de droitsqui permet leur transmission et
leur mise enoeuvre.
Des systèmes deprotection spécifiques
Parallèlement àcette uniformisation desrègles, lasingularité de ces jeux d’acteurs
et l’éclatement dessituationsrencontrées surchacun desmarchés incitent deplus
en plus à élaborer une série de systèmes dedroit spécifiques adaptés aux
caractéristiques des différentssous-secteursconcernés : c’est le cas enmatière de
protection deslogiciels commepour l’information oul’édition par exemple. Chaque
domainevoudrait pouvoir mettre enplace un code juridique particulier (pouvant
donc donner lieu à adaptation,négociation, modification) plutôt que de s’efforcer
d’adapter larègle générale régissant ledroit d’auteur.
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IBM et les logiciels
Le cas deslogiciels116 nous fournit un tel exemple de problème dedroit né del’éclatement d’un marché. Jusque dans lesannées 70, les logicielsfaisaient partieintégrante desordinateurs etétaient vendus enmême temps que cesderniers ; l aquestion de leur protection et del’identification deleurs auteurs ne seposaitdonc p a spuisque la conception était internalisée par lesfabricants. Après qu’IBM a étépoursuivie auxEtats-Unis au titre de la loiantitrust, les logiciels ont étévendusséparément. Unnouveaumarché s’estcréé et laquestion de la valeur deslogiciels s’esttrouvée brutalement poséetout comme celle deleur protection puisque,comme laplupart des autresoeuvres del’esprit, la valeur dusupport matériel d’un logiciel estdérisoire parrapport au coûtd’élaboration du contenu.
La situationdans lesecteur culturel tend à se rapprocher decelle quenous venons
d’évoquer. L’édition se heurte, par exemple, à desrisques grandissant de
"photocopillage" ou,pour les dictionnaires,d’utilisation non rémunérée deleurs
informationsdans lesbanques dedonnéesou les CD-ROM. Lespertesfinancières
qui en résultentpourraientpousser à une intervention despouvoirs publics et à des
stratégies différenciées dans les multiples branches de ce secteur(édition
scientifique, scolaire,générale, encyclopédies). Car ledéveloppement considérable
des photocopies, au détriment de l’achat de livres, affecteessentiellement les
ouvrages scientifiques ettrès peu la littérature romanesque : leséditeurs des
premiers cherchentdonc à imposer l’institution de taxes ou l’obligation de
contractualiseralors que leséditeurs des seconds préféreraientmaintenir de bonnes
relations informelles avec lesbibliothèques et lesétablissementsd’enseignement
susceptiblesd’acquérir leurs ouvrages.On retrouve exactementle même type de
segmentation chez lesproducteurs decinéma ; leur position à l’égard du droit
d’auteur esttrès différente selon qu’ils sont réellement indépendants et orientés de
façon privilégiée vers le cinéma ou selon qu’ils sont adossés à undiffuseur de
télévision ou un groupe multimédia et qu’ils visent l’ensemble du marché de
l’audiovisuel.
La tentation, ou lavolonté, decertainséditeurs de sedoter d’un statut analogue à
celui desauteurs,mais spécifique,n’est pas unique.Ce mouvements’exprime dans
les mêmestermes dans ledomaine del’édition littéraire, musicale ou chez les
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producteurs del’audiovisuel. En matière de cinéma,la situation de producteurs
tentantd’accaparer unepartie desdroits d’auteur enrevendiquant unstatutfictif de
co-scénaristesn’est pas nouvelle.Mais elle tenait surtout à leurcapacité d’imposer
une telledécision à descollaborateurs (auteurs,scénaristesou metteurs enscène)
qui pouvaientdifficilement refuser souspeine de ne pastravailler ou ne pasêtre
retenus dans leprojet en cours.Ce qui est nouveau enrevanche,c’est le souhait de
voir ce droit reconnu entant quetel, dans des secteurscommel’édition et la musique
où il n’existe pas de caractèrecollectif desoeuvres, maisdanslesquels letravail de
producteur, d’éditeur, de directeur artistique, de directeur decollection ou de
programmateurconduit à intervenir deplus enplus directementdans la phase de
création. Dans le même temps, d’ailleurs, on est tentédans deplus en plus de
systèmes d’informations defaire appel à lalégislation du droit d’auteur pour se
protéger contre la réutilisation dessources et contre une concurrenceparasitaire
(c’était déjàle cas des annuaires en France(dès 1925),de la météo...). Làencore, il
s’agit d’une diversification desobjets susceptiblesd’être protégés autitre de la
propriété littéraire etartistique.
D’un côté, la régulation d’un marché éclatépoussedonc à l’institution de règles
partagées collectivement. Maisd’un autre côté, lafragmentation despublics et des
modes d’utilisation des oeuvresaiguisent desintérêts divergents et lesréponses
juridiques qui semettent enplacepeuventconduire à un éclatement desecteurs ou
d’activités jusque là considérés comme homogènes, enposant, par làmême, de
nouveauxproblèmesjuridiques. On observedonc un doublemouvement. Desacteurs
économiquescherchent à seraccrocher au droitd’auteur pourprotéger desconcepts
ou des idées,pour conforter leur position concurrentielle; lesmêmes acteurs
économiquesessaient de banaliserce droit pour diminuer lescoûts deproduction ou
abaisser lesbarrières àl’entrée dans un secteur.
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
3. DROITS DE LA PROPRIETE INTELLECTUELLE ET REGULATION DE LA CONCURRENCE
Les droits aucoeur despolit iques économiques
La difficulté tient à cequ’il ne s’agit pas seulementd’un problèmejuridique, mais
aussi d’une question de politiqueéconomique. L’action des différentes parties
prenantespassesimultanément par unetentative de faireévoluer la juridiction et
par des stratégies d’alliance, detensions et delobbying. D’ailleurs, les décisions
récentes en la matière ontdavantage été lerésultat derapports deforce (entre
producteurs, auteurs, diffuseurs, et consommateursnotamment) quecelui de
décisions descours de justice. C’est en particulier la situation qui prévaut
actuellement en Francedans ledomainemusical. Lesmusiciensrevendiquent un
droit voisin au titre des reventesultérieuresd’un enregistrement(soit 50% de ce qui
est touché par leproducteur) et seheurtent àl’opposition décidée deséditeurs. Les
débats autour de lamise en placed’un tel droit traduisentbien cette interférence
permanente entrepréoccupations juridiques (homogénéisation d’une situation),
considérations économiques(menaces dedélocalisation desenregistrements) et
rapports deforce ausein d’unefilière (grèves etinterruptionsd’enregistrements).
La question des droits apparaîtdonc importante et peutêtre stratégique pour
nombre d’acteurs économiques des médias. Enmatière de créationartistique et
culturelle, cetteconvergence des préoccupationspose problème et seheurte à un
risque quand elle s’accompagne d’une maîtrise sur l’amont de la filière,c’est-à-dire
sur la production.C’est déjà vrai du cinéma où les chaînes detélévision sont
désormais celles qui décident si unfilm se feraou non selon qu’ellesacceptent, ou
non, de pré-acheter les droits depassageultérieurs surleur antenne. Cal’est aussi
en matière de publicité, decommunication et demédias, par exemple. Lepoids
prépondérant decertains opérateurs (Havas ou lescentrales d’achat d’espaces
publicitaires en France ou enGrande Bretagne, les agencesartistiques enmatière
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de cinéma117) leur donne uneposition beaucoupplus forte quecelle de laplupart des
supportsavec lesquels ilstraitent. Ce n’est passeulement unequestion deliberté
économique qui est encause oumême deprix d’accès àl’art et à laculture, c’estplus
généralement un problème de liberté d’expression et la possibilité,pour certains
courants artistiques etformes d’expression, detout simplement exister. Cela
suppose, de lapart despouvoirs publics, uneapplication souple, voireparadoxale,
des règles de laconcurrence.
Il s’agit de s’assurer lecontrôle du pluralisme et de ladiversité artistique et
culturelle à l’aide d’outils conçuspour maîtriser le comportement desopérateurs
économiques.L’attitude et lesdifficultés de la CommissionEuropéenne en la matière
témoignent de cesdifficultés pour que s’établisse unejurisprudencecohérente et
"lisible". D’un côté, ainsi que le montrent les attendus de sesdécisions, la
Commissions’efforce degarantir ladiversité desinformationsou des oeuvres mises à
la disposition du public, del’autre côté elle apprécie etsanctionne, le caséchéant, le
caractèredominantd’une position et lesentravessignificatives à la concurrence. Or,
le pluralisme peut être menacé sans que la concurrence nesoit bloquée ;
inversement, certaines situations demonopole s’accompagnent d’une fortevariété
des productions. Les cas de la presseou de la télévision montrentbien que le
pluralisme politique n’est pas nécessairementgaranti par la multiplicité des
opérateurs ; à l’inverse les monopoles publicsd’audiovisuelsont souventobligés, par
leur nature monopolistiquemême, d’assurer surleurs antennes ladiversité des
modesd’expressionsouspeine de se couperd’une partie importante dupublic.
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
Le droit descréateurs, entrave audroit (dediffusion) desoeuvres
Depuis leur débuts, ledroit d’auteur et lecopyright ont davantage étéforgés par
l’économie de ladiffusion (apparition del’imprimerie) que parcelle de lacréation118.
A l’origine d’ailleurs, lespremiersdroits d’exclusivité étaient dévolus auxéditeurs et
aux imprimeursplutôt qu’auxauteurs.
Les droits depropriété en matière denouveauxmédias répondentdonc demoins en
moins au seulsouci de protéger desauteurs. Dans desprocessus decréation
éminemmentcollectifs, lescontributions de chacun deviennent en effetanonymes et
la capacité d’innovationtient plus à l’organisation qui est mise en place qu’augénie
créatif de quelques-uns.L’enjeu des droits de la propriété intellectuelle estdonc
désormais également de protéger et desusciter les investissementsdans ces
nouvellesindustries(investissements matériels ouimmatériels) afin depermettre et
d’encourager leur croissance etleur développement. D’un strict point de vue
économique d’ailleurs, les rémunérationsattendues des auteurs sontsouvent
supérieures a posteriori en cas d’élargissement des conditions de diffusion. Un
système deprotection doit permettre à lafois une "juste" rémunération desauteurs
et la maximisation desbénéficesissus de ladiffusion ou d’effets deréseau.C’est au
nom de tels principes que laCommission Européenne a été amenée àarbitrer dans
certainsconflits qui ont étéportés devantelle.
La décision UIP(12/7/89)119
En 1981, les trois plus importants producteurs américains de filmscinématographiques ettélévisuels (Paramount,MCA, et MGM/United Artists) ontconstitué une filialecommuneappelée United International Picture. UIP avaitpourobjet la distribution exclusive,dans lespays de la communauté, des filmsproduits oudistribués par lestrois groupes,principalement pourl’exploitation en salles où UIPdétient en moyenne unquart dumarché desrecettes-films.L’objectif de la filiale étaitde réduire lesfrais générauxconsidérables résultant de laclistribution des films partrois organismesséparés.A ce titre, UIPdisposaitd’une licence d’exclusivité de 10 anspour la distribution desfilms des sociétés mères ; elleavait également ledroit exclusifde produire, financer etdistribuer lesfilms locaux dans uneautre langue quel’anglaiset pour lemarchénational correspondant.
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Dans un premier temps, laCommission aconsidéré lacréation decette filiale commeun accord entre entreprises indépendantes conduisant à une restriction de l aconcurrence. Eneffet, àl’origine, Paramount, MGA et UA avaientchacune leur propreréseau dedistribution sur lemarché européen ; or,avec UIP, ces sociétés selivraientuniquement concurrence sur la production delong métrages et entant quedistributeurs pour le marché dessalles américaines, deschaînes detélévisionpubliques et desvidéocassettes.
Dans unsecond temps, les sociétés américaines ont apporté des modifications àleuraccord afin dedonner àchacunedavantaged’autonomiedans ladistribution deleurfilms et d’individualiser les contributions respectives des troissociétés. LaCommission a alorsdonné sonagrément, au vu desavantagesdégagés par lacréationd’UIP : distribution plus efficace et rationnelle, réduction des coûtspour lesproducteurs (y compris européens), maintien d’un réseau de distributionéconomiquement viabledans desmarchés en déclin, stimulation de laproduction. Ellea considéré que cesavantagesl’emportaient sur les inconvénientsd’une restriction dela concurrencepourtant bien réelle. De fait, après avoir obtenul’accord de lacommission en 1989,UIP a vu ses parts demarché augmenter nettement (+ 22% en1989 et +15,5% en 1990).D’autre part, audelà de cesinclicateurschiffrés, UIP (par sastructure, l’importance et le nombre de ses films) réguledésormais largement lemarché des salles, en bloquantéventuelle dessorties defilms à certainesdates, enoccupant des salles...
Le droit d’auteur, un droit géographiquement etculturellement situé
L’ancrage et la caractérisationgéographique desdroits d’auteurs constitue unpilier
de la Convention deBerne surla propriété littéraire et artistique. Mais parce fait
même, lesdistorsions delégislation entre pays et l’absence d’homogénéisation des
réglementations deviennent de plus en plus sensibles dans un contexte de
délocalisation desproductions et d’internationalisation desdiffusions. Letemps n’est
plus où un auteurde théâtre pouvait autoriser sapièce enprovince et l’interdire à
Paris. Pareillement, les musiciens ne se contentent plus d’enregistrerdansleur pays
d’origine ni dans celui où ils vivent; et lescompagniesphonographiquespeuvent
même presser desdisques sous descieux encoredifférents. Cettesituations’observe
plus particulièrement dans lamusique etl’audiovisuel à propos desdroits voisins
(pour les musiciens de studio, lesdoubleurs, les techniciens notamment). Elle est du
même ordre que celle qui prévaut dans le secteur de la recherche sur les
biotechnologiesconcernant la"brevetabilité" duvivant.
La diffusion internationale desoeuvres n’est pas un faitnouveaumais elle acquiert
une dimensionnouvelle avecle caractère immatériel des oeuvres.Auparavant, le
livre ou le disque devaientêtre exportés, le concert devait faire l’objet d’une
exécution publique dans le pays tiers... Il y avait donc soit matérialisation de
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l’échange,soit visibilité (dans le paysdestinataire) del’acte d’exploitation :dans les
deux cas pouvait s’appliquer un principede territorialité. Ce sont ceséléments qui
disparaissentdésormais puisque la diffusion internationale ne constitueplus
seulement unmarché dérivé ou secondaire, mais parfois(grâce auxmoyens de
transmission) uneextension directe dumarché initial.
Sensible aux impactsnégatifs de ces disparités, à l’expansion du marché
international desbiens soumis àcopyright et à l’internationalisation de lapiraterie,
la Commission Européenne sepenche, depuisplusieursannées, sur laquestion de
l’harmonisation.Dans unepremière étape, elle arédigé, en 1988, unlivre vert qui
était plutôt marqué par une approcheinspirée ducopyright (un "droit d’auteursans
auteurs"), ens’intéressantessentiellement à lasanté deséconomiesculturelles. Les
critiques suscitées par cepremierprojet ont conduit la Commission à réorienter le
programme de travail qui asuivi le livre vert, afin de tenir davantagecompte du
point de vue des concepteurs et descréateurs. C’est ce programme quis’est
concrétisé, aucours desannéessuivantes, dans lesdirectives que nousavons déjà
évoquées :protection deslogiciels (1991),droit de location et droits voisins(1992),
diffusion par câble etsatellite (1993),rapprochement des conventions de Berne et de
Rome,directive sur lesbanques dedonnées.
Dans la même période, lesvolets TRIPS (concernant lapropriété intellectuelle) des
accords du GATT ont renforcé l’idée d’un marché globalisé dans lequel les
productions intangiblesprotégées par desdroits depropriété intellectuellesdevaient
être envisagées en mêmetemps que lesbiens et lesservices.Ce marché globalisé
nécessite desniveaux deprotection minimaledanschacun depaysafin qu’il n’existe
pas,entreeux, dedifférences compétitivessources de distorsions.Dans cesaccords,
le droit moral passe ausecondplan puisqu’il n’est pasrendu obligatoire pour les
états signataires del’accord.
La dématérialisation dessupports deproduction, de diffusion et deconsommation
rend d’autantplus importante l’harmonisation des droits selon les différentspays,
qu’il devient très facile de se jouer des législations enassurant, le caséchéant, une
délocalisation desproductionsou des émissionsdans lespays les pluscommodes, ou
bien, en se contentant d’exploiter les clauses de territorialité (cf. affaire
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Phil Collins/Imtrat120). Ainsi, les éditeursphonographiquesfrançais font-ils jouer la
menace d’enregistrer leurs disques en Grande Bretagnepour contraindre les
musiciensfrançais à ne pasrevendiquer dedroits voisins sur lesenregistrements
auxquels ilsparticipent121. L’exemple estdéjà donné par la télévision parsatellite :
Ted Turner aimplanté sasociété enAngleterre enespérant pouvoir diffuser des
programmes àdestination de la Francesans devoir satisfaire aux quotas de
programmation correspondants.
La diffusion de chaînes detélévision par satellite fait notammentéchouer toute
tentative deréglementation à unéchelonpurementnational (qu’il s’agisse dequota,
de constitutiondansl’actionnariatou de rémunération desauteurs).Pour traiter la
question, laCommunauté Européenne aretenu la théorie de l’injection : la loi qui
s’applique en matière de protection desdroits estcelle du pays d’émission et non
celle dupays récepteur ou despays de "l’empreinte".Mais unetelle dispositionremet
largement en causel’économieactuelle descontrats supposant unrépartition et un
fractionnement territorial desdroits. Dans la plupart despays, eneffet, la diffusion
des films obéit à une chronologie permettant leurexploitation successive sur
différents supports etdifférents marchés :salles decinéma, télévision payante,
vidéo, télévision généraliste. Or avec la généralisation de ladiffusion par satellite,
cette chronologie dessupports et desmarchés vole enéclat puisquecertainsfilms
peuvent être diffusés sur la télévisiond’un pays (etdonc être accessibles via le
satellite aux paysvoisins) avant même d’avoir étéprojetés dans lessalles de ces
mêmesvoisins.
Les disparités dudroit de la propriété entrepays se traduisentégalement par des
variations desconditions derentabilité. On constate parexemple très clairement
comment la concurrenceentre fournisseurs de programmes issus dedifférentspays
et le développement degroupes internationaux incitent de plus en plus les
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producteurs às’opposer à la mise enoeuvre de droitsvoisins et àdéfendre l’idée du
copyrightau détriment de larègle dudroit d’auteur.
Direct ive européenne sur ledroit d’auteur en matière desatel l i te et decâble122
Deux textes,d’inspiration très voisine, ont étéadoptés enEurope ces dernières annéespour réguler le secteur audiovisuel. Il s’agit de la Directive adoptée parl’UnionEuropéenne enseptembre1993 et de la conventionédictée en février 1994 par leConseil del’Europe sur le"droit d’auteur et les voisins dans le cadre de ladiffusiontransfrontière par satellite".
La nouvelle Directivetraite du droit d’auteur en matière desatellite et decâble.Contrairement aux premiers projetsde la précédente DirectiveTélévisions sansfrontières, elle interdit, pour lecâble, lessystèmes de licences légales ouobligatoires e trecommande unsystème de gestion collective.Cela signifie que lespropriétaires dedroits tels que les producteurs nepeuventplus faire valoir leurs droits sur lecâble defaçon individuelle, mais seulement par lebiais de sociétés de recouvrement; lesdiffuseurs restentlibres, en revanche, de conclure deleur côté descontrats delicence.
La Directive confirme également, en lessimplifiant, lesmodalités de diffusion par
satellite puisqu’elle généralise la théorie del’injection et interdit également la
concession delicence.Seule est désormaisnécessaire l’obtention desdroits d’auteur
dans lepays d’origine de latransmission. En revanche,pour éviter que ne se créent
des "pavillons decomplaisance" dudroit d’auteur, la Directive fixe une norme de
protection minimale pour tous lesEtats membres. Seloncelle-là, établie enoctobre
1993, lesdroits d’auteur d’une oeuvrelittéraire et artistiquedoivent courirtoute la
vie de l’auteur et70 ans après sa mort. Pour les droitsvoisins, le délai estfixé à 50
ans après l’événement d’origine.Enfin, toutepublication légale d’uneoeuvre non
publiée précédemmentseraprotégée 25ans.
L’harmonisation de laprotection entresecteurs industriels qui serejoignent
La complexité desdroits tient d’unepart, on l’a vu, à l’éclatement desoeuvresmais
elle résulteaussi, d’autrepart, à l’extrême diversité descontextes d’exploitation et de
conception. Les technologies nouvellesconduisent, plusou moins directement, pa r
l’élargissement desprocessus de production et dediffusion, par l’internationalisation
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des entreprises, à uneabolition des frontièresnationales etsectorielles. Celarend
très sensible la question de l’harmonisation desdifférents systèmesjuridiques.
Quand différents secteurs industriels serapprochent - c’est le cas pour
l’informatique, l’audiovisuel et les télécommunications - lespratiques, les termes et
les modes de reconnaissances desapports créatifs peuvent différer profondément :
cela setraduit en particulier par lajuxtaposition de vocabulaires, de notions, de
concepts et de systèmesjuridiques dont rien n’assurea priori la cohérence.Ainsi, en
matière de jeux vidéo ou de CDI par exemple, leslogiciels informatiquessont en
général protégés par ledroit des brevetsalors que lescénario d’unprogramme
interactif relèvera plutôt dudroit d’auteur.Plus généralement, onpeut noterqu’en
matière d’industries deprogrammesinformatiques,actuellement plus de sixrégimes
de protectionsont àl’oeuvre etpeuventêtre mobiliséssimultanément (secret,brevet,
copyright, normalisation, contrats, marque, droit de laconcurrence). Unedirective
européenne a bien étéélaborée mais elle restera sui generis et ne devrait pas
influencer larègle générale,ce qui pose des limites à sa généralisationdans d’autres
domaines industrielstels que le design. L’extrême éclatement de lasituation
juridique incite donc à larecherched’un nouveau paradigme carselon les cas, on
pourrait multiplier les questions soulevées : lesdroits voisins123 relèvent-il, p a r
exemple, dudroit du travail, des droits d’auteurs ou dudroit patrimonial ?Faut-il
arbitrer les conflits en fonction du droit de la propriété ou du droit de la
concurrence ? Aux Etats-Unis, laFederal CommunicationCommission considère le
problème du copyright comme hors de sajuridiction124 alors qu’en France le
Ministère de laCulture portetoute son attention à laquestion du droit d’auteur.
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
Conclusion
1. LE DROIT D’AUTEUR : UNE VALEUR ECONOMIQUE, JURIDIQUE ET SYMBOLIQUE
La façon dont droit moral et droit économique s’articulent et se renforcentl’un
l’autre est tout à faitsemblable de lafaçon dont valeur économique etvaleur
artistiques’établissentsimultanément125.
"L’auteur est juridiquementfort, socialementprivilégié, économiquementfaible"126.
L’auteur est en effetprotégéjuridiquement par desconventionsinternationalestrès
protectrices reconnaissant sonstatut, sondroit à rémunération, son lien à l’oeuvre,
instituant desinstitutionsprofessionnelles luipermettantd’agir et d’être représenté,
des mesures nationales deprotection (fiscales et sociales). Le système netient que
parce questatut social de l’auteur, reconnaissance juridique et droitséconomiques
sont étroitement liés. En l’occurrence, sile droit moral apparaît tellement essentiel
pour tous lesauteurs,c’est qu’il est inaliénable, assure lareconnaissance deleur
paternité surl’oeuvre,mais aussi, etpeut-être surtoutqu’il est un desfondements et
une des justifications deleur modeactuel derémunération.
Cette articulationentre lepoids symbolique dustatutd’auteur et sa reconnaissance
économique juridique se manifeste,a contrario, dans la difficulté que peuvent
éprouver certainessociétés degestioncollective oucertainescatégoriesd’auteurs à
imposer la reconnaissance deleurs droits. A ses débuts, commeencoreaujourd’hui,
la SACEM a été impopulaire car lepublic comme lesutilisateurs ne comprenaient
pas d’avoir à payer pour des chansons ou de lamusique faisant partie d’un
patrimoine commun,dont lesauteurs(contrairement auxinterprètes) leurs étaient
souvent inconnus. C’estd’ailleurs la mêmesituation quel’on retrouve aujourd’hui en
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
Russie.Sous lerégime communiste, les droits d’auteursn’étaient pasreconnus a u
motif que leurs créations constituaient un bien collectif. Cette situation rend
aujourd’hui difficile la maîtrise du piratage et de lacopie non autorisée car la
plupart des acteurséconomiques n’ont pasréellement conscienced’abuser de droits
dont ils ne disposentpas.
En France,malgré cettefaible reconnaissance dustatut decertain ayantsdroit, les
sociétés de gestioncollective réussissent às’imposerdansle paysage et à devenir des
passages obligés pour des raisonspratiques degestion : la taille du répertoire et
l’éclatement desmodes de consommation desoeuvres rend l’exercice du droit
d’auteurcomplexe et incite lesauteurscomme lesdiffuseurs ou les producteurs à
s’orienter vers une solution simplificatrice. Parallèlement, d’ailleurs,l’exemple
évoquéplus haut du secteurthéâtral américainmontre que la loi sur lecopyright
dans les paysanglo-saxons nesignifie absolument pas que lapersonnalité ou les
droits desauteurssoient systématiquementnégligés. Lecopyright (et la doctrine
works madefor hire) est aussi (etpeut-êtresurtout) unesolution pragmatique au
problème de lacollaboration et de la gestion des droit.
Le poids descontradictions et du conventionneldansl’application du droit d’auteur
se traduitd’un côté par unrenforcement de la composantejuridique de larégulation
(poids important de la composante jurisprudentielle pour l’explicitation des
contradictions,élaboration de nouvelles législationsad hoc127) ; de l’autre côté par
l’importance de la régulationéconomique ("rachat"de facto ou substitution dudroit
patrimonial au droit moral dans les contrats,régulation de la concurrence,
émergenced’un droit économiquesui generis du producteur ou del’investisseur,
contrats privés, anticipation desacteurs économiques en fonction du droit de la
propriété intellectuelle128, marchandage de certainséchanges129...)
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
Si le monopole est lacontrepartieéconomique de lacomposantepatrimoniale du
droit d’auteur, le droit moral de l’auteur estparallèlement ledroit de porter un
jugement sans recours sur leprojet défendu par leproducteur ou lediffuseur
susceptible de sesaisir del’oeuvre. L’atteinte à l’intégrité de l’oeuvre estsubjective
et peut être invoquée par lesayantsdroits dèsqu’on modifie une oeuvre ouqu’on
l’associe à une autre :quiconque illustre une image deFrançois Mitterrand par une
chanson de Serge Gainsbourg courtthéoriquement lerisque d’être poursuivi en
justice par leurs héritiers respectifs quipourront exiger un dédommagement
monétaire (parfoisplusieurs centaines demilliers de francs). Commenous leverrons
plus loin, cela signifiedonc quel’exercice dudroit moral setraduit souvent,dans la
pratique, par la"cession" de cedroit, ce qui rapprochedoncencoredavantage le droit
d’auteur "à la française" du copyright. En matière d’images d’archives ou de
réutilisation d’extraits, la séparationjuridique entredroit moral et droitpatrimonial
s’avère de cefait artificielle en pratique. Quand les producteurs contactent unayant
droit (par exemple le réalisateurd’uneoeuvre dont ilssouhaitentutiliser un extrait),
ils lui demandent, en général, une autorisation tout en lui annonçant,
simultanément, une proposition derémunération. Même si le montant de la
rémunération estpréétabli par destextescollectifs130, l’ayant droit est enposition de
marchander undroit moral qui est discrétionnaire. Ainsi, lesréalisateurs sevoient
courammentproposer desrémunérations de 700 à 1 500 F laminute (et exigent
parfois 5 000F)pour l’exploitation TV d’extraits deleurs émissions, là où lastricte
application des textes desconventionscollectivesaboutirait à peine à 130F.131
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
2. UN RECOURS GRANDISSANT AU DROIT D’AUTEUR DANS LA VIE ECONOMIQUE
La tentation, de lapart du secteur industriel,de s’abriterderrière le droitd’auteur
ne tient pas seulement à des raisonsstratégiquesmais répond aussi à l’évolution de
la conceptiontechnique : de plus en plus"partagée" (par le biais de partenariat,
échanges,transferts technologiques),de plus en plusincrémentale, de moins en
moins radicale,elle répond souvent à unemodification marginale ou à un simple
réarrangement"nouveau" decomposants oud’élémentstechniquesdéjà connus p a r
ailleurs : c’est cetteconfiguration qui nepeut donner lieu à protectionindustrielle.
On retombe donc dans le champ desproductions artistiques où c’est moins le
processus technique qui est nouveau quel’originalité de sacombinaison.
L’insatisfaction quepeut susciter la protection dudesign industriel a poussé les
entreprises à chercher laprotection des droitd’auteur en mettant l’accent sur
l’importance de la composanteartistique de leursproductions. De cettemanière, les
manufacturiersauxquels des droitsexclusifs ont étéreconnus enmatière dedesign
peuventcontrôler l’exploitation desproductionsdans lesquelles leur matériau est
partie prenante,ce qui remet encausele principe de la protection des brevets.Ce
qui est donc encause, c’est la capacité des"arts appliqués" à revendiquer
simultanément le fonctionnement dumarché artistique et le fonctionnement du
marchéindustriel132 ; en effet, les systèmes deprotection ont étéconçus à une époque
où les artsétaient "appliqués" àl’industrie sansencore en fairepartie comme de nos
jours. Onretrouve lemême type de problème quedans laproduction culturelle qui
devient de plus en pluscollective, en intégrant le travail des collaborateurs
techniques.
De façonanalogue, enmatièreinformatique,dans lesannées 80, auxEtats-Unis, ont
été déposés et agréés unemultitude de brevetsrelatifs à des procédures,voire à des
algorithmes utilisables ausein d’un programme d’ordinateur. Beaucoup d’entre eux
ne sont pas nouveaux nioriginaux maisapparaissentconventionnels et"évidents"
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
pour les développeurs quicraignent de subir unepluie de procès individualisés,
relatifs à telle ou telleprocédure usuellementemployée. Le problème estd’autant
plus grave que leslogiciels modernes comportent des milliers deprocédures
distinctes et brevetables, chacuneajoutant au risqued’utiliser abusivement des
brevets déjà déposés. Comme lesdifférentes fonctions d’un logiciel sont
interdépendantes etintégrées, celapose desdifficultés parfois insurmontables aux
développeurs.D’où la tentation grandissante de sedétourner desbrevets pourfaire
appel à la protection du droit d’auteur.
Le passage d’une régulation juridique à une régulation économique133 e t
l’élargissement dessecteursd’application setraduit dèslors par une confusion des
genres et desdroits. Le droit moral est, enparticulier, au coeur des divergences
entre les différentssystèmesjuridiques et suscite des controversesimportantesentre
pays, mais aussi entre auteurs/ interprètes et producteurs / éditeurs /
radiodiffuseurs134. Le droit d’auteur se chargedonc aujourd’hui d’un poids et de
fonctions qui nesontplus cellespour lesquellesil a été originellementconçu. C’est
d’ailleurs sansdoute ce quiexplique l’importancegrandissante qu’il tend àprendre
dans la vie économique etdans lesrégulations internationales. Si,comme on l’a
parfois noté dans lespages quiprécèdent, la "dématérialisation" de l’oeuvreconduit
souvent à sadissolution et àl’oblitération du droit desauteurs et descréateurs,d’un
autre côté, on observe également unetendance opposée, comme le notait le
professeur Sirinelli : à savoir une sacralisation desproduits réduits àleur essence, à
leur valeurajoutéediraient deséconomistes.
De ce point de vue, lesrésultats dégagés à partir del’analyse dessecteurs culturels
et de l’audiovisuel n’apparaissent sans doute pas spécifiques et concernent
également lessecteurs plus traditionnelsde la vie économique etindustrielle plus
traditionnels, confrontés eux aussi à l’importance grandissante de lapar t
immatérielle deleur activité : développement des phénomènes demarque,poids des
tâches d’innovation et de conception, généralisation despratiques decertification et
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
de normalisation... Onpeut supposer, en particulier, que ces secteurspourraient
tendre àobéir à des modèles dediffusion et de rémunérationanalogues àceux que
nous avonsétablis dans lapremière partie dece rapport.
Le tableau que nousavionsconstruit (Tableau 1) pour caractériser lesproduits et les
modes dediffusion desoeuvresselon la disponibilitéspatiale ettemporelle etselon la
chaîne desintervenantspeut dèslors se compléter en s’élargissant auxsecteurs de la
vie économique etindustrielle présentant des caractéristiques dumême ordre et
danslesquels lesmodèlesseraientdoncsusceptiblesd’être mis en oeuvre.
La documentation Française : Inciter, protéger, rémunérer... : quels droits, pour quels auteurs ?
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