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44 BÂTIMENT ENTRETIEN - JUILLET / AOÛT 2012 w Les mécanismes conventionnels de transfert de personnel au sein des entreprises de propreté, familièrement appelés « Annexe 7 », peuvent être source de complications dans certaines situations. Vincent Hagenbourger, responsable juridique du groupe Challancin et spécialiste en droit social, répond aux principales questions que posent ces dispositions propres à la convention collective des entreprises de propreté, lors d’une conférence organisée il y a quelques semaines pour informer quelques-uns de ses donneurs d’ordres et partenaires. Ressources humaines : mieux maîtriser « l’annexe 7 » Management Il n’est pas rare qu’un ou plusieurs salariés transférés refusent de signer le nouveau contrat qui entérine leur transfert. (DR) Le transfert du personnel s’ap- plique-t-il dans tous les cas de perte d’un marché ? L’article L.1224-1 du Code du travail pré- voit que « s’il survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nou- vel employeur et le personnel de l’entre- prise.» Ce dispositif légal a longtemps régi les transferts de personnel entre deux pres- tataires en cas de changement de titulaire d’un marché commercial jusqu’à un revire- ment de jurisprudence en 1985. À cette oc- casion, les juges ont considéré que le chan- gement de titulaire d’un marché commercial ne suffisait pas, à lui seul, à entrainer l’ap- plication de ce dispositif légal et impératif de transfert de personnel. Suite à ce revire- ment, les conséquences pour les entrepri- ses de propreté sont claires et sans appel : à défaut d’accord tripartite entre les salariés du site et les prestataires entrant et sortant, la perte d’un marché occasionnait néces- sairement l’embauche de personnel pour

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44 BÂTIMENT ENTRETIEN - JUILLET / AOÛT 2012

w Les mécanismes conventionnels de transfert de personnel au sein des entreprises de propreté, familièrement appelés « Annexe 7 », peuvent être source de complications dans certaines situations. Vincent Hagenbourger, responsable juridique du groupe Challancin et spécialiste en droit social, répond aux principales questions que posent ces dispositions propres à la convention collective des entreprises de propreté, lors d’une conférence organisée il y a quelques semaines pour informer quelques-uns de ses donneurs d’ordres et partenaires.

Ressources humaines : mieux maîtriser « l’annexe 7 »

Management

Il n’est pas rare qu’un ou plusieurs salariés transférés refusent de signer le nouveau contrat qui entérine leur transfert. (DR)

Le transfert du personnel s’ap-plique-t-il dans tous les cas de perte d’un marché ?L’article L.1224-1 du Code du travail pré-voit que « s’il survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour

de la modification subsistent entre le nou-vel employeur et le personnel de l’entre-prise.» Ce dispositif légal a longtemps régi les transferts de personnel entre deux pres-tataires en cas de changement de titulaire d’un marché commercial jusqu’à un revire-ment de jurisprudence en 1985. À cette oc-casion, les juges ont considéré que le chan-gement de titulaire d’un marché commercial

ne suffisait pas, à lui seul, à entrainer l’ap-plication de ce dispositif légal et impératif de transfert de personnel. Suite à ce revire-ment, les conséquences pour les entrepri-ses de propreté sont claires et sans appel : à défaut d’accord tripartite entre les salariés du site et les prestataires entrant et sortant, la perte d’un marché occasionnait néces-sairement l’embauche de personnel pour

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Gestion du personnel

le prestataire entrant et le reclassement voire le licenciement des salariés pour le prestataire sortant. Afin de pallier cette nouvelle problématique, les partenaires sociaux ont alors négocié, au niveau de la branche professionnelle, un accord réglant les modalités de transfert du personnel en-tre prestataire entrant et prestataire sortant à l’occasion de la perte d’un marché com-mercial. Dès lors, cet accord, dit « annexe 7 » est venu préciser les obligations incom-bant à chacune des parties dans un tel cas de figure. Toutefois, dans certaines situa-tions, liées par exemple à la nature de l’ac-tivité du repreneur, cette démarche peut ne pas être obligatoire. Ce sera le cas si l’entre-prise qui reprend le marché ne dépend pas de la convention collective appliquée dans les entreprises de propreté, s’il s’agit par exemple d’une entreprise de restauration.

Cette disposition s’applique-t-elle à tous les salariés ?Pas totalement, et c’est là que les choses peuvent se compliquer. Le transfert de per-sonnel n’étant pas une mesure d’ordre pu-

blic, mais un mécanisme régi par la conven-tion collective de branche, le salarié peut refuser de passer au service du prestataire entrant. Un arrêt de la Cour de cassation du 10 octobre 2006 stipule que « L’accord exprès du salarié sur le transfert conven-tionnel de son contrat ne peut résulter de la seule poursuite du travail ». Par ailleurs, pour entrer dans le champ de ce mécanis-me le salarié doit, être en CDI, effectuer au moins 30 % de son temps de travail sur le site concerné, être présent sur le chantier depuis au moins 6 mois à la date du trans-fert et ne pas avoir été absent depuis plus de 4 mois sauf cas de congé maternité, congés de longue maladie ou parental.

Que se passe-t-il si le salarié refuse de signer l’avenant de son contrat ?Selon la loi et la jurisprudence, l’em-ployeur a pour obligation de reclasser un salarié refusant son transfert, ce refus ne pouvant pas être une cause valable de li-cenciement. Dans la pratique il peut arri-ver qu’un ou plusieurs salariés ne veulent pas signer leur transfert ayant peur de

perdre des avantages, sans pour autant souhaiter leur reclassement ou le départ du site. Les situations sont alors bien sou-vent gérées au cas par cas, parfois en rela-tion avec le donneur d’ordres qui connaît mieux le personnel en poste.

Lors d’un changement d’employeur, les salariés perdent-ils leurs avanta-ges acquis ?Non. Les avantages individuels acquis du salarié sont conservés. Il en va de même pour les horaires de travail. La répartition hebdomadaire des horaires entre les jours de la semaine ne peut être changée de ma-nière unilatérale sans que cela entraine une modification substantielle du contrat de travail. Le repreneur ne pourra donc pas de façon unilatérale décréter qu’un salarié tra-vaillant 5 jours sur 7 passe désormais à une fréquence de 6 jours sur 7. Il en va de même pour les périodes d’intervention sur site. L’agent travaillant en horaire de journée ne pourra pas, sans son accord, être contraint d’intervenir la nuit. En revanche, si l’orga-nisation propre à la nouvelle entreprise de a

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Management

propreté exige que les heures de prise ou de fin de service soient sensiblement déca-lées (de 6 à 7 heures, de 18 à 19 heures, par exemple…), le salarié ne pourra s’y oppo-ser. La question des avantages collectifs, comme l’adhésion à une mutuelle, est en revanche plus complexe à aborder. Les ré-gimes de mutuelle peuvent être liés à un site, dans ce cas-là doivent-ils être transfé-rés ? L’entreprise entrante doit-elle sup-porter les frais d’une telle couverture, pou-vant notamment occasionner le paiement de charges sociales supplémentaires pour le cas où le régime frais de santé qui était collectif dans la précédente entreprise (et bénéficiait donc d’exonérations sociales), ne bénéficie-rait plus qu’aux salariés du site transférés dans leur nouvelle société ? La question se règle en général au cas par cas en fonction des régimes de frais de santé existants ou non dans l’entreprise « d’accueil ».

Qu’advient-il des salariés protégés, représentants syndicaux notamment, lors d’un transfert de personnel ?Le transfert de salariés ayant des mandats représentatifs ou syndicaux doit donner lieu à autorisation de la part de l’inspection du travail. Toutefois, même une fois l’accord obtenu, le salarié, qui perdra de facto son mandat, peut refuser ce changement d’em-ployeur. Les entreprises de propreté souhai-teraient une évolution de la jurisprudence sur ce point afin que la décision de l’inspec-teur du travail s’impose au salarié.

La reprise d’un marché, pour une en-treprise de propreté, nécessite sou-vent une phase de découverte du client et du site sur lequel intervien-nent les équipes déjà en place. Jusqu’à quel point un donneur d’ordres peut-il s’immiscer dans l’organisation du travail et les choix opérés par le pres-tataire reprenant le marché ?Le pouvoir de direction, d’organisation ou encore de rémunération revient à la seule entreprise prestataire. Le sous-traitant doit être le seul employeur du personnel utilisé, géré et rémunéré par lui, qu’il encadre et dirige dans l’accomplissement de sa tâche et qui demeure soumis à sa seule autorité : le personnel du sous-traitant ne doit pas être intégré de fait chez le donneur d’or-dres, en jouissant, notamment, des mêmes conditions de travail que les salariés de ce dernier. Par ailleurs, les moyens matériels

nécessaires à l’exécution des travaux doi-vent être fournis par le sous-traitant à ses salariés, une certaine tolérance sur l’appré-ciation de ce critère étant toutefois envisa-geable. Ce sont ces exigences qui permet-tent d’éviter une situation de « prêt de main d’œuvre illicite », même si cela en-traine certaines difficultés pour le client, qui connaît souvent depuis de nombreuses années les salariés du prestataire interve-nant sur son site. Il n’est pas exceptionnel non plus que ces agents aient bénéficié d’un transfert des effectifs du client à celui du prestataire, dans le cadre d’une externa-

lisation de la prestation. Il faudra dans ce cas précis, que l’entreprise bénéficiant du marché fasse preuve d’une extrême vigi-lance pour éviter toute ingérence du don-neur d’ordres. En externalisant le travail le client perd de ses prérogatives. Ainsi, sauf motifs particuliers – liés notamment à des problèmes de sécurité – le donneur d’ordre ne pourra pas imposer les horaires de pré-sence, ou les méthodes de travail aux agents de propreté. Ceux-ci doivent être conformes aux exigences du cahier des charges et contrôlés par l’encadrement du prestataire.

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Le législateur a introduit la notion de « communauté de travail » dans les textes régissant les relations en-tre sous-traitant et donneur d’or-dres ? En quoi consiste cette notion ? Quelle incidence a-t-elle pour les prestataires ?Cette idée de « communauté de travailleurs » découle à la fois du partage d’un même lieu et environnement de travail, entre sa-lariés du donneur d’ordres et salariés du prestataire, ainsi que d’une proximité dans l’exercice des tâches de chacun. Une équipe de nettoyage qui interviendrait de nuit en l’absence de tout salarié du client ne ré-pondrait pas forcément à cette notion de « communauté de travailleurs ». Pour le lé-gislateur la question se pose en termes de représentativité des salariés du prestataire dans le cadre des élections professionnel-les. Un arrêt de la Cour de cassation de 2010 indique clairement que « sont inté-grés de façon étroite et permanente à la communauté de travail, les travailleurs mis à disposition par une entreprise extérieure

qui, abstraction faite du lien de subordina-tion qui subsiste avec leur employeur, sont présents dans les locaux de l’entreprise uti-lisatrice depuis au moins un an, partageant ainsi des conditions de travail en partie communes susceptibles de générer des in-térêts communs. »

Un salarié d’une entreprise de pro-preté peut donc voter et se présenter lors des élections professionnelles au sein de l’entreprise cliente ?Oui, s’il répond aux conditions énoncées par la loi du 20 août 2008 à savoir : être pré-sent dans l’entreprise utilisatrice depuis 12 mois sans discontinuer pour être électeur et depuis 24 mois pour être éligible. Le sa-larié de l’entreprise sous-traitante ne pour-ra toutefois pas se présenter aux élections au Comité d’Entreprise, même si des ac-cords au cas par cas peuvent permettre aux employés du prestataire de profiter de cer-tains avantages du CE au même titre que les salariés du client (restaurant d’entreprise, prestations culturelles ou sportives…)

Dans le cas où un salarié du presta-taire serait élu au sein de l’entreprise cliente à qui incombe la charge de ses heures de délégation ?Logiquement c’est son employeur, l’entre-prise prestataire, qui doit assumer la charge des heures de délégation. Même si ce cas de figure est rare, on imagine bien la difficulté qu’une telle situation peut représenter pour une PME dont l’un de ses salariés serait élu représentant du personnel au sein d’une entreprise cliente à fort effectif, exigeant donc un nombre d’heures important de dé-légation. La raison voudrait que, dans ce cas-là, prestataire et donneur d’ordres s’en-tendent sur une organisation et une réparti-tion de la charge financière…