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Biodiversité Atout et/ou contrainte de développement pour l’agriculture des Alpes du Nord ? Responsables scientifiques : LARRERE, Raphaël Directeur de recherche à l'INRA (Département SAE2 : "Sciences sociales, agriculture et alimentation, espace et environnement"). INRA, 65 Bd. de Brandebourg 94205 Ivry-sur-Seine Cedex. [email protected] & FLEURY, Philippe Animateur de recherche/déve- loppement, SUACI-GIS Alpes du Nord (Groupement d’Intérêt Scientifique), Maison de l'agriculture et de la forêt, 40 rue du Teraillet, F- 73 190 Saint Baldoph. [email protected] www.alpes-du-nord.com Participants au projet : SUACI montagne/ GIS Alpes du Nord Emmanuel Guisepelli, Yves Pauthenet, Sandrine Petit CEMAGREF, AMM Laurent Dobremez INRA Ecologie des forêts, prairies et milieux aquatiques Jean Marcel Dorioz Organismes financiers: Ce projet, réalisé dans le cadre du Groupement d’Intérêt Scientifique des Alpes du Nord, a bénéficié de financements complémentaires à ceux du programme DIVA "action publique, agriculture et biodiversité" du ministère de l’écologie et du développe- ment durable : Région Rhône-Alpes, Conseil général de l’Isère, Assemblée des Pays de Savoie (conseils généraux de Haute-Savoie et Savoie). 59

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Page 1: recapitulatifs en page 1 - Temistemis.documentation.developpement-durable.gouv.fr/docs/... · 2016. 4. 20. · 67 Rôledesrapacesnécrophages danslagestiondel’équarrissage. Responsablescientifique:

BiodiversitéAtout et/ou contrainte de développementpour l’agriculture des Alpes du Nord ?

Responsables scientifiques :LARRERE, Raphaël

Directeur de recherche àl'INRA (Département SAE2 :

"Sciences sociales, agricultureet alimentation, espace et

environnement").INRA, 65 Bd. de Brandebourg94205 Ivry-sur-Seine Cedex.

[email protected]&

FLEURY, PhilippeAnimateur de recherche/déve-

loppement,SUACI-GIS Alpes du Nord

(Groupement d’IntérêtScientifique),

Maison de l'agricultureet de la forêt,

40 rue du Teraillet,F- 73 190

Saint [email protected]

www.alpes-du-nord.com

Participants au projet :

SUACI montagne/ GIS Alpesdu Nord

Emmanuel Guisepelli,Yves Pauthenet,Sandrine Petit

CEMAGREF, AMMLaurent Dobremez

INRA Ecologie des forêts,prairies et milieux aquatiques

Jean Marcel Dorioz

Organismes financiers:

Ce projet, réalisé dans le cadredu Groupement d’Intérêt

Scientifique des Alpes du Nord,a bénéficié de financementscomplémentaires à ceux du

programme DIVA"action publique, agriculture etbiodiversité" du ministère del’écologie et du développe-

ment durable :Région Rhône-Alpes,

Conseil général de l’Isère,Assemblée des Pays de

Savoie (conseils généraux deHaute-Savoie et Savoie).

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P

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RESENTATION DES TRAVAUX DERECHERCHE

Introduction

� Une question au centre de notre probléma-tique : la prise en compte de la biodiversité est-elleune contrainte que la société imposerait à l’agri-culture dans le cadre d’un nouveau contratsocial, ou un atout dont peuvent se saisir lesexploitants ?

On présente souvent l’intégration d’objectifsrelatifs à la biodiversité dans les pratiques agri-coles comme une contrainte extérieure. Lesdéfenseurs de la nature sont alors considéréscomme le seul porte-parole légitime de labiodiversité et il s’agit de communiquer et deconvaincre les agriculteurs afin qu’ils s’engagentdans des contractualisations. Pour cela, ons’interroge sur les conditions (économiques etsociales) d’adhésion des agriculteurs et sur lescapacités d’adaptation de leurs exploitations àdes objectifs de gestion de la biodiversité.

De notre point de vue, il s’agit là d’une conceptionun peu simpliste des relations entre l’agricultureet la biodiversité. D’abord, la diversité biologiquedes alpages et des prairies n’est pas seulementle résultat des pratiques agricoles, elle est aussiun facteur de production, dans la mesure où endépendent la qualité du fourrage et la qualitéorganoleptique des fromages. Ensuite, lesagriculteurs ont des savoirs empiriques, parfoisenrichis par ce qu’ils ont appris des techniciensqui les conseillent, des naturalistes qu’ils ontcôtoyés, ou bien de leurs lectures, et peuventlégitimement se poser en porte-parole de labiodiversité. Enfin, ils peuvent avoir des raisonsd’adhérer à un objectif de préservation de labiodiversité, pas forcément les mêmes quecelles des protecteurs de la nature, mais pasnécessairement réductibles aux avantagesfinanciers des contrats. L’écologisation de cer-taines pratiques ne doit pas systématiquementêtre interprétée comme une normalisation quis’impose aux agriculteurs, par la réglementa-tion ou la contractualisation. Il peut s’agir,pour les éleveurs, d’une élaboration nouvellede sens et de rationalité des pratiques agricoles.

Matériels et méthodes

Pour mener à bien notre travail, nous avonsouvert trois chantiers d’études complémentaires :

� Les représentations sociales et les savoirsdes agriculteurs sur la biodiversité

L'objectif de cette enquête, auprès d’une qua-rantaine d’agriculteurs, a été d’identifier leursreprésentations et leurs savoirs empiriques enmatière de biodiversité puis d’analyser la façon

dont ces représentations interviennent dans lechoix de leurs pratiques.

� L’action collective dans la construction deprojets de gestion concertée de la biodiversité

Nous avons étudié 13 opérations différentes :actions locales de protection de la biodiversité(parcs nationaux, réserves naturelles …), sitesNATURA 2000, contrats d’agriculture durable,corridors écologiques. Sur ces projets, nousanalysons comment la diversité biologique s’esttrouvée mise en débat entre acteurs et commentmalentendus, incompréhensions, mais aussiconvergences et compromis, se construisent etévoluent. Ce travail repose sur des enquêtesindividuelles et sur la participation à certainesréunions. Nous avons utilisé les concepts de lasociologie de la traduction comme outil d’analyse.

� L’intégration dans l’exploitation et l’appropria-tion par les agriculteurs des contrats degestion de la biodiversité.

Ce travail repose sur une enquête approfondiedans 19 exploitations d’élevage. Cette enquêtese composait d’un questionnaire pour l’étude dufonctionnement des exploitations, suivi d’unentretien semi-directif pour appréhender lesmotivations des exploitants et le sens qu’ils don-nent à leur engagement dans une démarchecontractuelle.

� Une recherche partenariale et interdisciplinaire

Un groupe associant chercheurs, techniciens dudéveloppement agricole et gestionnaires del’environnement s’est réunit régulièrement afind’assurer le pilotage du programme : choix dessites d’étude, travail sur les protocoles, leshypothèses et l’analyse des informationsrecueillies. Entre chercheurs, nos pratiques detravail interdisciplinaire s’appuient sur des terrainscommuns, des échanges réguliers et desconcepts partagés entre approches agronomiqueset sociologiques. Enfin, dans une perspective deréflexivité sur notre recherche, nous nous sommesengagés avec Catherine Mougenot (sociologue,Université de Liège) dans la pratique du récit.

Résultats

� Les représentations sociales et les savoirsdes agriculteurs sur la biodiversité

Lorsqu’ils n’évoquent pas leurs cueillettes,c’est d’abord en tant qu’éleveurs que nosinterlocuteurs parlent des espèces et desmilieux naturels.

Les éleveurs caractérisent ainsi ce qu’est, àleurs yeux, une " bonne prairie ".D’abord, une bonne prairie n’a pas (ou a peu)d’espèces envahissantes : ombellifères, géranium,

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� Action publique, aspect de la biodiversitéet type d’agriculture concernés

Les Alpes, où est situé notre terrain, peuventêtre perçues comme un " site pilote ", d’analy-se des conditions dans lesquelles la biodiver-sité pourrait être prise en compte dans le déve-loppement agricole. Le contexte est celui desystèmes d’exploitation fondés sur la valorisa-tion des surfaces en herbe et d’une agricultureessentiellement orientée vers une productionde qualité (beaufort, reblochon, comté, …).Ces choix ont permis de préserver différentesformes de biodiversité et différents savoirsagricoles pour en assurer la gestion.Cependant, des évolutions récentes inquiètentà la fois certains acteurs de l’agriculture et lesgestionnaires de l’environnement : abandondes pentes, intensification des fonds de vallée.

Nous avons étudié plusieurs contextes institu-tionnels : espaces protégés, sites Natura 2000,mesures agri-environnementales, mais aussiprocédures d’aménagement (Schéma decohérence territoriale -SCOT-), ententes indivi-duelles hors procédures. Différents objectifsde gestion de la biodiversité sont pris encompte : les "espèces patrimoniales", végétalesou animales, les habitats d’intérêt communau-taire (directive habitat), et les corridorsécologiques.

� Objectifs

Ce projet s’inscrit dans une ambition inter-dis-ciplinaire associant sociologie et agronomie,dans le but d’étudier les relations entre desobjectifs de préservation ou de gestion de labiodiversité et l’activité agricole. Pour celanous articulons deux échelles de travail :

� à l’échelle de projets de gestion de la biodi-versité (sites Natura 2000, CTE, puis CAD,espaces protégés, etc...), nous cherchons àcomprendre comment la biodiversité s’esttrouvée mise en débat entre des gestionnairesde l’environnement, des agriculteurs, des éluslocaux et comment, au delà des malentenduset des incompréhensions, des convergencesse dégagent et des compromis se construi-sent, aboutissant dans certains cas à unaccord ;

� à l’échelle de l’exploitation agricole, nousnous intéressons aux agriculteurs qui se sontengagés dans des contrats de gestion de labiodiversité : comment insèrent-ils le contratdans le fonctionnement et le projet de leurexploitation ? Dans quelles situations cescontrats prennent-ils un sens et deviennent-ilslégitimes à leurs yeux? Quels sont les savoirsdes agriculteurs sur la biodiversité ?

� Mots clés

Biodiversité, représentations sociales, agricul-ture de montagne, politiques publiques,savoirs, développement local, nature,Recherche-Développement.

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cement une concession. C’est dans certains casun enrichissement. Si négocier c’est convaincre,c’est aussi comprendre les problèmes des autreset bouger. Ceci requiert un apprentissage long etdifficile.

Débattre du pourquoi … et du comment.Nous avons constaté que les discussions se cen-trent fréquemment sur la mise en œuvre des pro-jets (cahier des charges, pratiques et contrepar-ties financières) et que le débat sur les finalités duprojet étaient soit très rapides, voire éludés, soitprenaient très vite la forme d’un conflit de légiti-mité enlisant l’action. Situation paradoxale, où lesdifficultés à discuter des raisons de la préservationde la biodiversité paraissent aux animateurs deprojets au moins aussi grandes que le souhaitdes acteurs d’avoir ce débat : "on aime biencomprendre pourquoi on nous demande de fairetelle chose, qu’est-ce qui est attendu". Ceséchanges sont importants et là où ils ont eu lieu,chacun reconnaît les progrès faits dans laconnaissance de l’autre et dans l’adhésion auprojet.

Mais ce débat nécessaire sur les raisons de lapréservation de la biodiversité ne doit pas nonplus remplacer celui qui porte sur les choix tech-niques, économiques, sociaux que suppose laréalisation d’un plan de gestion. Finalement, cen’est pas tant, ou pas seulement, l’objet biologique,espèce, habitat ou paysage, qui conditionne lescontraintes et les atouts d’un projet. Ce quicompte, c’est bien la façon dont le plan de gestionest conçu, ses conséquences sur les activités etla vie quotidienne des personnes impliquées :selon la solution retenue il sera plus ou moinsfacile à mettre en œuvre pour l’agriculteur, plusou moins coûteux pour le gestionnaire.

� L’intégration technique dans l’organisation del’exploitation et l’appropriation sociale par lesagriculteurs de contrats de gestion de la biodi-versité

L’idée commune est que les agriculteurs s’enga-gent dans des contrats de gestion de la biodi-versité par effet d’aubaine, sans qu’il y ait modi-fication réelle de leur conduite technique et deleur conception du métier. A l’issue de notre travaild’enquête, cette idée nous semble erronée, oupour le moins caricaturale. Tout d’abord, tousles agriculteurs ne s’engagent pas dans descontrats. Ceux que nous avons rencontrés onttous des contacts nombreux en dehors de leurexploitation. Certains ont eu des expériencesantérieures hors de l’agriculture, d’autres sontfortement insérés aux plans local ou professionnel,d’autres encore exercent des activités les mettanten contact avec des non agriculteurs (ventedirecte, agritourisme, pluriactivité, …). Ceciexplique peut-être une sensibilité plus forte, uneréceptivité aux attentes, notamment environne-mentales, portées par les autres acteurs de la

société. La plupart de ces signataires affichentd’abord une motivation financière, mais celle-ciest très fréquemment associée à des motivationsd’un autre ordre : le contrat est le signe d'unereconnaissance de leur travail d’entretien et depréservation de l’espace.

En matière d’organisation technique, les agricul-teurs signataires adoptent parfois d’importantschangements dans la façon de conduire leurexploitation. Allant au-delà de la seule mise enœuvre d’un contrat sur une parcelle, souvent ilsinternalisent ce contrat dans un projet d’exploi-tation plus global associant dimensions économique,technique, sociale mais aussi environnementale.Ainsi beaucoup d’agriculteurs ne s’engagent pasque sur des parcelles marginales, de petite tailleet de qualité médiocre. Dans la majorité dessituations, les surfaces concernées représentent5 à 15% de la surface de fauche ou de pâture.Ceci se traduit souvent par des changementsimportants dans les modes d’utilisation de cesparcelles et parfois dans l’organisation de l’en-semble du système fourrager : des parcellespassent de fauche à pâture, ou l’inverse, d’autresdestinées à la production de foin pour lesvaches laitières sont récoltées aujourd’hui pourles génisses, il peut y avoir prise en pension debrebis pour augmenter la pression de pâture surdes zones débroussaillées, … Dans des casrares l’agriculteur reste extérieur à ce contrat : ilne reconnaît pas la légitimité de sa finalité,considère le cahier des charges comme inadaptéaux objectifs ou encore est confronté à des diffi-cultés importantes de mise en œuvre technique.

Enfin, dans la grande majorité des situations(13 sur 19), les agriculteurs ont intégré lecontrat dans une nouvelle cohérence d’exploi-tation et lui ont donné du sens par rapport àleur métier : intégré dans le système d’exploita-tion (tant au niveau des pratiques que de l’orga-nisation du travail), aboutissant parfois à desréaménagements avantageux, le contrat donneun sens nouveau au métier, une légitimité sup-plémentaire et s’inscrit ainsi dans l’éthique pro-fessionnelle de l’agriculteur. De ce qui est pré-senté comme une contrainte, la majorité desexploitants enquêtés en ont ainsi fait un atout.

Conclusion - perspectives

Se placer sur le terrain de la diversité biologiqueprésente de nombreux avantages en termes derelations entre acteurs et d’apprentissagesmutuels :

� les actions sont entreprises en fonction d’objec-tifs que l’on peut négocier et combiner à d’autres,comme c’est le cas avec l’utilisation pastorale despelouses et des alpages ou avec la fauche en altitu-de. Elles pourront être évaluées selon les résultats.On sort ainsi de l’opposition stérile entre l’exerciced’activités humaines et un principe de naturalitéqui entend protéger la nature des hommes ;

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vératre, rumex. Ensuite, une bonne prairie estdiversifiée. Trois types de discours ressortentpour parler de cette diversité :

� les agriculteurs qui ont des objectifs de pro-duction fourragère importants, parlent du rapportentre les graminées et les légumineuses, auxquelless’adjoignent quelques dicotylédones ;

� les alpagistes et les agriculteurs plus traditionnelsparlent des petites fleurs (trèfles sauvages, pis-senlits, etc.) qui donnent du goût au fromage ;

� d’autres agriculteurs parlent de la multitude desespèces sans forcément les inventorier.

Ces conceptions de la diversité relèvent d’uneapproche fourragère et pastorale. En effet, lesformes de diversité que les agriculteurs évoquentet repèrent sur le terrain sont toujours présentéescomme ayant des conséquences sur la qualité del’herbe ou du foin.

Un rapport esthétique, fréquemment exprimé,peut nuancer les appréciations dictées par lemétier.Ce point de vue professionnel n’est pas exclusif.Une sensibilité esthétique à la nature transparaîtainsi dans les nombreuses allusions à la beautédes fleurs. En dehors des plantes de cueillette,les espèces les plus fréquemment citées sont desplantes à belles fleurs. D’autres prétendent mieuxaimer voir une prairie toute fleurie que de faire unbouquet.

Les agriculteurs et la biodiversité : écologisa-tion du métier ou élaboration nouvelle ?Les représentations des éleveurs sur la nature etsur la diversité biologique ne sont pas figées. Sielles sont largement dépendantes de leurs pra-tiques (absence de chasse, permanence descueillettes, point de vue professionnel dominantsur la faune et la flore) elles évoluent en fonctiond’événements (comme l’arrivée récente du loup)et des contacts qu’ils entretiennent hors de leurmilieu professionnel. Les éleveurs enquêtésdemeurent agricolo-centrés, mais, du faitmême qu’ils ont presque tous eu affaire avecdes militants de la protection de la nature oudes agents d’un parc naturel régional, ilsdisposent de connaissances nouvelles qu’ilsintègrent à leurs savoirs empiriques et deconcepts nouveaux qu’ils réinterprètent selonleur propre vision du monde. L’avenir dira s’ils’agit là d’une acculturation – d’une "écologisa-tion" du métier d’éleveur – ou si l’on peut y déce-ler les prémisses d’une élaboration nouvelle : lessavoirs, les savoir-faire et l’éthique professionnelled’une agriculture multifonctionnelle. Ainsi, notretroisième enquête montre que certains agricul-teurs qui s’engagent dans des contrats de ges-tion de la biodiversité, en font un des éléments deleur projet d’exploitation et de leur métier.

� L’action collective dans la construction et lanégociation de projets de gestion concertée dela biodiversité

Valeurs, désirs et intérêts sont intimementintriqués.Les agriculteurs évoquent souvent pour expliquerleur réticence à s’engager dans un projet descontraintes techniques. Une discussion approfon-die sur les raisons qui motivent ce rejet, révèlesouvent alors qu’elles relèvent tout autant, dedivergences de valeurs que d’intérêts. Le problèmen’est pas alors de se mettre d’accord, dans unelogique de transaction, sur une solution conciliantdes intérêts différents, car chaque acteur estconvaincu que seul son point de vue est légitime.Pour les agriculteurs, "ils (les protecteurs de lanature) ne connaissent pas le terrain", "pourquoifaire ceci ? Nous avons toujours pratiqué de lasorte et si c’était si mauvais pour la biodiversité iln’y aurait plus rien". Du côté des protecteurs dela nature" les agriculteurs ne s’intéressent pas à lanature, ils ne voient que la rentabilité économique". Ilest souvent difficile de faire la part entre conflitd’intérêt et de légitimité car les deux sont trèsimbriqués. Cependant, parvenir à la résolution deconflits de légitimité est bien plus difficile. Cecirequiert de nombreuses discussions, des visitessur le terrain, pour que chacun se connaissemieux et se comprenne.

Négocier, c’est convaincre et bouger.Les accords paraissent plus solides là où lesacteurs sont arrivés à construire un compromisen reconnaissant une légitimité aux pratiquesde l’autre, à ses raisons d’agir et à sessavoirs. Il en va ainsi d’un éleveur qui s’engagedans Natura 2000 parce que cela lui permet d’en-tretenir le paysage de son enfance, mais il parleaussi de l’intérêt des naturalistes pour différentesplantes rares qu’il a appris à nommer et à situerdans ses parcelles. Il en est ainsi égalementquand un chargé de mission d’un espace protégécherche à comprendre les savoirs des agricul-teurs sur la biodiversité, leur logique et leurscontraintes professionnelles. Arriver à monter unprojet suppose des déplacements d’objectifs : unproblème posé de façon très biologique peutévoluer vers des objectifs plus globaux, partagea-bles avec d’autres acteurs. Par exemple, il ne s’a-git alors plus seulement de raisonner un cahierdes charges pour préserver un habitat d’intérêtcommunautaire, les prairies de fauche d’altitude.Après négociation l’objectif devient le maintien dela fauche en altitude pour des raisons biologiques,agricoles (autonomie fourragère des exploitations)et patrimoniales (la fauche d’altitude est une pra-tique à laquelle les agriculteurs sont très atta-chés). Les objectifs du projet ont changé, l’adhé-sion des différents acteurs et la conception ducahier des charges en seront plus faciles. Pourautant l’objectif biologique demeure et les mesu-res retenues sont cohérentes avec celui-ci. Unereformulation des objectifs initiaux n’est pas for-

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Pour aller plus loin dans la conception de projetsde gestion concertée de la biodiversité et dans laprise en compte de la biodiversité dans le déve-loppement agricole nous insistons sur la nécessi-té de travailler à une diffusion large et opération-nelle d’une représentation de l’action associantdes changements dans les connaissances, lesvaleurs et les relations entre acteurs. Ceci noussemble un enjeu à prendre en compte explicite-ment dans la conception des politiquespubliques, mais aussi dans la conception desoutils d’aide à la mise en œuvre de projets degestion de la biodiversité. C’est dans cet espritque nous travaillons actuellement la conceptiond’un outil.

Recommandations opérationnelles et élabo-ration d’un outil

En nous référant à cette conception du change-ment, nous avons dégagé quelques préconisa-tions qui sont de nature à faciliter la recherche decompromis fructueux entre les différents acteursdans la mise en œuvre de projets de gestionconcertée de la biodiversité :

� reconnaître la légitimité de chacun et com-prendre ses aspirations et ses contraintes ;

� reconnaître en particulier les savoirs des agri-culteurs sur la biodiversité (la leur) ;

� associer les objectifs de protection aux per-spectives d’évolution des exploitations et discuterdes conséquences techniques, économiques etsociales du projet ;

� savoir que, dans une négociation, aboutir àune reformulation des objectifs initiaux n’est pasforcément une concession : ce peut être un enri-chissement ;

� il ne faut pas craindre d’entrer en controverse(pour éviter les malentendus), mais il faut savoiren sortir, soit en suspendant le jugement, soit enrecherchant un compromis.

Ces préconisations ont fait l’objet de la rédactiond’une fiche de quatre pages que nous avons lar-gement diffusée dans les Alpes du Nord auprèsdes conseillers, des animateurs et des responsa-bles des chambres d’agriculture, des collectivitésterritoriales et des organismes gestionnaires del’environnement.

Une présentation plus systématique est envisa-gée sous forme d’un outil disponible pour fin2006. Sa structure reprendra ces principaux élé-ments en les organisant et en les commentant ens’appuyant sur les différentes phases d’un projet.

Cet outil à destination des animateurs du déve-loppement agricole et des gestionnaires de l’envi-ronnement associera :

� des supports de débat sur l’importance de labiodiversité pour l’agriculture des Alpes du Nord ;

� une démarche opérationnelle d’élaboration deprojets de gestion concertée de la biodiversité.

Actions de transfert, de communication

Nous avons accueilli le séminaire annuel de l’en-semble des projets DIVA en Haute-Maurienne(Savoie) les 27, 28 et 29 Juin 2005. Durant ceséminaire, nous avons organisé le 28 Juin unejournée de terrain avec le Parc national de laVanoise et le Groupement inter-cantonal de déve-loppement agricole de Haute-Maurienne. Nous yavons présenté nos travaux. La journée a égale-ment été l’occasion pour des acteurs locaux(agriculteurs, élus, représentants du Parc) dedébattre et de réfléchir des relations entre l’agri-culture et la biodiversité avec l’ensemble deséquipes de chercheurs impliquées dans DIVA.

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A

� aborder la biodiversité, c’est aller au devant decontroverses. Chaque acteur, en fonction de sonexpérience, de son savoir, peut prétendre être leporte-parole légitime des éléments de la biodiver-sité qui font l’enjeu de la négociation. Ne pascraindre ces controverses, tout en sachant lessuspendre jusqu’à plus ample informé, conduit àdes solutions plus stables que de se contenterd’un compromis ambigu ou d’un vague consensus ;

� la recherche de compromis dans les objectifspoursuivis implique, si l’on veut éviter les malen-tendus, que chacun comprenne les représentations,mais aussi les aspirations et les contraintes detous les autres acteurs concernés. Elle invite à lesrespecter, sans pour autant les adopter.

Mais se placer sur le terrain de la diversité biolo-gique c’est aussi être amené à résoudre des diffi-cultés non négligeables. Les modifications de ladiversité biologique sont lentes et il faudrait biensouvent attendre dix, voire quinze ans et pluspour évaluer une action quelconque. Il y a doncnécessairement tension entre les attentes d’acteurssouvent pressés et le temps nécessaire à l’obten-tion de résultats ayant un sens du point de vueécologique. Ces difficultés de mise en œuvre ren-dent nécessaire une incitation claire des pouvoirspublics en faveur de projets concertés de la bio-diversité. S’il en a bien été ainsi au départ (avec ladirective "habitats", la nouvelle politique agricolecommune, la loi d’orientation agricole) force estde constater que les acteurs locaux sont prisaujourd’hui d’une certaine lassitude. Les dossierssont complexes, les décisions restent en suspenset les crédits alloués ne permettent guère d’em-brasser de vastes ambitions.

CQUIS EN TERME DE TRANSFERT

Résultats acquis

Les résultats acquis en termes de gestion de labiodiversité concernent :

� l’aide à la conception et à la mise en œuvred’actions concertées en faveur de la prise encompte de la biodiversité dans l’agriculture ;

� des informations concrètes sur le rôle de dif-férents éléments de la biodiversité comme fac-teurs de production agricole et sur la façon dontcertains agriculteurs tiennent compte de la biodi-versité de leurs prairies pour décider de leurs pra-tiques ;

� des éléments de débat et de réflexion sur lesraisons qui poussent des agriculteurs à s’engagerdans des contrats de gestion de la biodiversité ;

� une aide à la mise en œuvre de politiquescontractuelles de gestion de la biodiversité et auraisonnement des conditions d’insertion de labiodiversité dans le développement agricole.

Concevoir autrement l’insertion de la biodi-versité dans le développement agricole

Habituellement, en matière de biodiversité,comme de façon plus générale pour les questionsd’environnement, les institutions demandent auxagriculteurs de modifier leurs pratiques, en leurproposant soit des solutions techniques clés-en-main soit un cahier des charges pré-élaboré avecdes contreparties financières. Cette démarche,même si elle se revendique de la négociation etde la gestion concertée, s’inscrit dans un schémalinéaire du changement, avec plusieurs étapessuccessives : proposition d’un cahier des charges,mise en œuvre éventuellement après adaptationlors de la négociation, et évaluation de sonimpact. Le changement est conçu essentiellementcomme un changement dans les pratiques agricoles.

A l’issue de notre travail, en s’appuyant à la foissur une analyse de la façon dont cette démarchelinéaire initiale a été déformée dans les lieux oùun accord a été construit et sur les travaux dessciences de la gestion nous proposons une autrereprésentation du changement autour des rela-tions biodiversité et agriculture. Que l’on regardele niveau de l’agriculteur et de son exploitation oucelui collectif des projets de gestion de la biodi-versité nous faisons le constat que les projetsayant réussis, des points de vue des acteurs del’environnement comme de ceux des acteursagricoles, se sont traduits par des changementsdans :

� les connaissances des agriculteurs en matièred’écologie des espèces, de sciences naturelles,ou les connaissances des gestionnaires de l’envi-ronnement sur le fonctionnement des exploita-tions et l’activité agricole en général ;

� les valeurs et les conceptions des uns et desautres. Au contact des protecteurs de la nature,les agriculteurs évoluent dans leur conception dumétier et inversement les protecteurs de la naturebougent aussi, intègrent dans leurs valeurs desdimensions liées au développement ;

� les pratiques agricoles bien sûr et leur organi-sation dans un système, l’exploitation agricole.Parfois, il peut s’agir non pas de modifications depratiques mais de conforter des pratiques agrico-les existantes mais menacées à court terme,comme le maintien de l’utilisation de zones trèsdifficiles en fortes pentes ;

� enfin, rien ne peut fonctionner sans l’établisse-ment et surtout sans le maintien tout au long dela mise en œuvre d’un projet de relations nouvellesentre des acteurs qui ont encore peu l’habitudede travailler ensemble.

L’insertion de la biodiversité dans le dévelop-pement agricole est une situation de change-ment qui comporte différentes facettes. C’estun projet commun et progressif, dans lequel ilne s’agit plus de se focaliser sur les conditionsd’adhésion des agriculteurs et sur l’adaptationdes pratiques agricoles.

Page 5: recapitulatifs en page 1 - Temistemis.documentation.developpement-durable.gouv.fr/docs/... · 2016. 4. 20. · 67 Rôledesrapacesnécrophages danslagestiondel’équarrissage. Responsablescientifique:

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Rôle des rapaces nécrophagesdans la gestion de l’équarrissage.

Responsable scientifique :François SARRAZIN

Université Pierre et Marie CurieLaboratoire Conservation des

Espèces, Restaurationet Suivi des Populations

UMR 5173MNHN-CNRS-UPMC,61 rue Buffon, 75005 PARIS

[email protected]

Participants au projet :

Centre d'EtudesTransdisciplinaires,

Sociologie, Anthropologie,Histoire (CETSAH) Unité de

l'EHESS (ESA 8037) :S. Bobbé., associée au CNRS,22 rue d'Athènes, 75009 Paris.

Associée à l’INRA, équipeMONA 63-65, boulevard de

Brandebourg,94204 [email protected]

Etude sociologique sur lessystèmes d’équarrissage

en France et leurs incidencesdans la relation qu’ils ont

aux nécrophages.

UMR 210 Économie publiqueINRA-INA PG, INRA,

Centre Versailles-Grignon,78850 Thiverval-Grignon.

[email protected];Pr. J. C. Bureau et Houssein

Boumellassa, (DEA)Etude économique du fonction-

nement de l'équarrissagepar les nécrophages.

CNITV - Ecole NationaleVétérinaire de Lyon

1, avenue Bourgelat - BP 8369280 Marcy l’Étoile.

[email protected]. Buronfosse & Mélanie

Texier, étudiante vétérinaire, 4e

année. Etude écotoxicologiquede l'impact de la qualité des

ressources sur les nécrophages

Université Pierre et MarieCurie Laboratoire

Conservation des Espèces,Restauration et Suivi desPopulations UMR 5173MNHN-CNRS-UPMC,

61 rue Buffon, 75005 PARISFrançois Sarrazin (porteur du

projet) ; Agnès Gault etMichela Bosè (thèses UPMC)

Etude des conséquencesde l'équarrissage sur le

comportement alimentaire desnécrophages.66

PRINCIPALES PUBLICATIONS

� Articles scientifiques publiés, sous pres-se et soumis pour publication

Fleury Ph., 2005. Biodiversité : atout et/ou contraintede développement pour l’agriculture des Alpes duNord. Communication Académie d’Agriculture deFrance, compte-rendu de la séance du 23mars 2005, 9p.Larrere R. et Fleury Ph., 2004. Malentendus, incompré-hensions et accords dans la gestion de la biodiversité.Fourrages, N° 179, 307-318.Petit S., Vansteelant J.Y., Plaige V., Fleury Ph., 2004.Les typologie de prairies, d'un outil agronomique à unobjet de médiation entre agriculture et environnement.Fourrages, N° 179, 369-382.Fleury Ph, Larrère R., Dorioz J.M. , Guisepelli E., JullianC., Birck C., 2003. Gestion concertée de labiodiversité, agriculture et développement local enmontagne. Montagnes méditerranéennes, N°18, lagestion concertée dans les espaces naturels protégés demontagne, 65-74.

� Participation à des colloques nationauxou internationaux (poster et communica-tion orale)

Petit S., Fleury P., Vansteelant J.Y., 2005. Recherche enpartenariat dans le Parc naturel régional du Haut-Jura :la conduite agri-environnementale des prairies. Parc etrecherche agri-environnementale : favoriser les syner-gies. N.Grange et F.Drugmant eds. Actes des rencont-res au Parc naturel régional du Pilat 2005.Véranne, 31mars -1er avril : 35-38.Hauwuy A, Fleury Ph, Poccard P, 2005. Une agricultures’appuyant sur la biodiversité des écosystèmes prai-riaux et microbiens : l’exemple des zones de montagnedes Alpes du Nord, avec des systèmes laitiers destinésà la production de fromages typés. ConférenceInternationale Biodiversité : Science et gouvernance.Paris, 24-28 janvier 2005.Larrère, R. 2005, intervention aux troisièmes journéesde l’IFB : Biodiversité : Sciences et gouvernance enrégions, La Rochelle, 13 et 14 Décembre 2005.Larrere R. et Fleury P. 2004. Malentendus, incompré-hensions et accords dans la gestion de la biodiversité.Journées AFPF 22-23 mars 2004, biodiversité des prai-ries.Larrère R. De quelques causes de malentendusconcernant la protection de la nature, conférence auXIIIème Congrès des Conservatoires d’espaces natu-rels, Ambleteuse, 21 au 24 Octobre 2004.Petit S., Vansteelant J.Y., Plaige V., Fleury P., 2004. Lestypologie de prairies, d'un outil agronomique à un objetde médiation entre agriculture et environnement. Actesdes journées AFPF 22-23 mars 2004, biodiversité desprairies, 135-143.Fleury Ph, Larrère R., Dorioz J.M. , Guisepelli E., JullianC., Birck C., 2003. Gestion concertée de labiodiversité, agriculture et développement local enmontagne. Colloque CERMOSEM, Le Pradel Ardèche :" la gestion concertée dans les espaces naturels protégésde montagne ", 22 mai 2003. Montagnes méditerra-néennes, N°18, la gestion concertée dans les espacesnaturels protégés de montagne, pp 65-74.

� Articles de vulgarisation, communica-tion

Biodiversité : atout ou contrainte de développementpour l’agriculture des Alpes du Nord. Fiche 4 pages deprésentation des premiers résultats. Septembre 2004.Biodiversité : atout ou contrainte de développementpour l’agriculture des Alpes du Nord. Fiche 4 pages deprésentation des premiers résultats. Mars 2006 (ver-sion actualisée de la fiche de septembre 2004).Numéro spécial du bulletin " GIS-infos " sur agricultureet biodiversité. Décembre 2005. Diffusion 600 exem-plaires dans les Alpes du Nord.

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Baronnies, le Verdon et le Vercors. Du fait de lalégislation vétérinaire, le dépôt des carcasses nepeut se faire en plein champ mais sur des “char-niers”. La gestion initiale de ce système consis-tait pour les protecteurs des vautours à collecterles carcasses chez les éleveurs pour les déposersur les charniers remplissant ainsi un rôle délaissépar l'équarrisseur dans ces zones de moyennemontagne. Plus récemment, des autorisationsont été délivrées permettant la mise en placedirecte par les éleveurs, et sous contrôle desservices vétérinaires, de placettes d'alimentation.Ce système se développe actuellement dans lesGrands Causses mais ne représente encorequ’un nombre limité d’élevages. Parallèlement,le fonctionnement de l'équarrissage dans lesAlpes demeure pour l'instant sous la responsa-bilité des associations ou espaces protégés quiréintroduisent les vautours avec des modalitésde gestion différentes suivant les sites. Enfin, enOssau, aucun équarrissage naturel officiel n’estplus utilisé. L’expérience acquise en Franceconstitue, donc, de fait, un exemple utile auniveau international pour la restauration despopulations de nécrophages.

Dans ce contexte les nombreux partenaires fran-çais participant à la gestion de cet équarrissagenaturel et à la conservation des populations devautours (Ligue pour la Protection des Oiseaux,Parc National des Cévennes, Parc National desPyrénées, Parc Naturel Régional du Vercors,Vautours en Baronnies) ont souhaité la mise enplace d'une étude pluridisciplinaire de ce systè-me d'équarrissage faisant appel à des nécro-phages, ceci afin d'en évaluer l'efficacité et lapérennité en considérant ses conséquencespour les éleveurs et pour les espèces concernées.Quatre grands axes ont été engagés afin d'opti-miser le fonctionnement de ce système et de lemaintenir durablement :

� une approche ethnosociologique de la per-ception du rôle d'équarrisseur des nécrophagespar les différents acteurs (éleveurs, équarris-seurs, DSV, autorités locales, protecteurs) afinde mieux comprendre, entre autres, le passaged'espèce "nuisible" à espèce "utile" ;

� une approche économique des différents"circuits" d'élimination des carcasses (par leséleveurs, par les protecteurs des vautours, parl'équarrisseur officiel) afin de mesurer les coûtset bénéfices pour chaque acteur et optimiser, lapérennité du système ;

� une approche écotoxicologique permettantd'évaluer l'éventuel impact de certains traite-ments antiparasitaires des cheptels sur lespopulations de nécrophages ;

� une approche éco-éthologique de l'impact dela gestion des charniers sur les méthodes deprospection des vautours, sur leur consomma-tion des carcasses et donc à la fois sur l'efficacitéde l'équarrissage et sur la régulation de leurspopulations.

Principaux résultats

Les quatre axes du projet ont été réalisés et certainsse poursuivent au delà du cadre du programmeDIVA. Dans l’ensemble, ces travaux convergentvers l’intérêt de la mise en place des placettesd’alimentation à l’échelle des exploitations.

Des entretiens ont été réalisés principalementdans les Grands Causses et en Ossau maisaussi dans le Vercors et le Verdon, donc enprésence de modes variés de gestion : charnierset placettes, charniers seuls, absence d’équar-rissage naturel. Ils montrent que les placettessemblent renforcer le lien positif entre vautour etéleveur en améliorant la représentation de cetteespèce.

D’un point de vue économique la mise en placedes placettes paraît être un bon compromispour permettre la durabilité du système tout enautorisant un désengagement progressif et uneréduction des coûts pour les acteurs initiaux quesont les ONG et les espaces protégés impliquésdans la conservation des vautours.Dernièrement, la mise en place en France desmarchés publics d’équarrissage a rendu obliga-toire l’insertion de cet équarrissage par lesnécrophages dans le tissu économique assurantainsi une certaine pérennité à ce système.

D’un point de vue vétérinaire, l’étude écotoxico-logique montre l’absence de risque majeur pourles oiseaux. Parmi les échantillons exploitables,les premiers résultats montrent que le transfertde médicaments antiparasitaires depuis le mou-ton traité vers les rapaces nécrophages, s'ilapparaît possible, reste très limité et trèsvraisemblablement sans incidence sur la santédes individus et des populations. Les organo-chlorés rémanents restent également peu repré-sentés dans le foie des oiseaux étudiés. Eneffet, si quelques traces résiduelles de lindanepeuvent être détectées, ces concentrations sontbasses et restent, ainsi que pour les autrescomposés chlorés analysés, dans les limitesinférieures à ce qui est décrit chez les vautoursafricains.

Parallèlement, les développements du contexteréglementaire national et européen ont bénéficiéde la mise en place du programme de recherchenotamment au travers de l’investissement deThierry Buronfosse et des responsables de laLPO sur ces questions. Après avoir risquél’abandon de l’équarrissage par les nécrophagespour lutter contre les maladies à prions par desdépistages systématiques, une stratégied’échantillonnage a été obtenue et constitue uncompromis efficace entre vigilance sanitaire,coûts économiques et conservation de la biodi-versité

Enfin l’étude des comportements d’alimentationen groupe sur charnier dans les Grands Causseset celle des stratégies prospection dans les

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P� Action publique, aspect de la biodiversitéet type d’agriculture concernés

Ce programme de recherche s’est inscrit dansle cadre de la définition des politiquespubliques de gestion de l’équarrissage auniveau français et européen, de la conservationdes populations de rapaces nécrophages àces mêmes échelles et de la gestion de l’élevage,notamment ovin, de moyenne montagne.

� Objectifs

Les objectifs du programme étaient d’analyserles relations éleveurs-vautours dans le butd’assurer leur durabilité.

Ceci était envisagé en maintenant, d’une part,les comportements de prospection et, à terme,la viabilité et la régulation des populations devautours, et en optimisant d’autre part le servi-ce écologique de destruction des cadavresutile aux éleveurs.

Ces travaux étaient abordés sous quatreangles : ethnosociologique, économique,vétérinaire et écologique.

� Mots clés

Agropastoralisme, équarrissage, nécrophages,économie, ethnologie, ecotoxicologie,comportement alimentaire, réintroduction,vautour fauve.

RESENTATION DES TRAVAUX DE

RECHERCHE

Problématique

L'impact des pratiques agricoles sur la biodi-versité est le plus généralement considéré demanière négative, l’intensification des pratiquesétant actuellement identifiée comme une causemajeure d’uniformisation de la biodiversitéexploitée et de réduction de la biodiversitéassociée aux agrosystèmes. Cependant desmesures de gestion nouvelles peuvent mettreen évidence des sources de bénéfice réciproqueentre ces deux dimensions de notre environne-ment afin, certes, de préserver la biodiversitémais aussi de maintenir les services écologiquesqu’elle produit. Dans ce contexte, la relationliant les activités agropastorales à la viabilitédes populations de plusieurs espèces de rapacesnécrophages, notamment de vautours, peutconstituer un exemple fort de convergenceentre des objectifs de gestion agricole et deconservation de la biodiversité. A l’échelleinternationale, le déclin des décomposeurs, etparmi eux des nécrophages, entraîne la perted’un service écologique majeur. Ainsi, en Asieet en Afrique, le déclin des nécrophages estextrêmement important du fait de la toxicité decertains produits employés sur le cheptel et/oude la réduction de la disponibilité des ressourcestrophiques. Ce déclin menace la pérennité duservice écologique produit par ces nécrophageset entraîne localement des conséquencessanitaires négatives pour les populationshumaines. Dans le même temps, face aux crisesrécentes dues à l’émergence de maladies àprions ou de la fièvre aphteuse, la gestion del'équarrissage est devenue un enjeu sanitaireimportant à l'échelle européenne. Or la situationdes populations de rapaces nécrophages y estégalement très contrastée. Très abondants enEspagne, les vautours risquaient de voir leurssources d'alimentation disparaître suite auxconséquences de ces crises. A l'inverse, ledéclin très marqué des populations de vautoursen Europe du sud-est imposait de mettre enplace rapidement des programmes de restau-ration incluant une gestion de cet équarrissagenaturel.

En France, la restauration et la viabilité à longterme des populations de vautours fauve,moine et percnoptère dépendent en grandepartie de leur lien avec l'élevage, notammentovin, qui fournit par sa mortalité naturelle l'es-sentiel des ressources consommées par cesoiseaux. Ainsi le Vautour fauve, espèce présentedepuis toujours dans les Pyrénées, a étéréintroduit dans les Grands Causses dans lesannées 80, puis plus récemment dans les

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mais coutumier – il hésite à officialiser sapratique d’équarrissage naturel car il craint toutnouveau contrôle de son exploitation.

Si l’on veut parvenir à augmenter les placettesofficielles, il faut nécessairement prendre encompte cette "frilosité". Il se peut égalementque pour les éleveurs qui ne souhaitent pas serapprocher des gestionnaires d’un espaceprotégé (parc national), ou militants des associa-tions de protection de la nature (LPO), le fait quele collecteur appartienne à cette institution ou àla LPO peut ralentir le développement desplacettes. Une réflexion devrait être menée surun rapprochement et un éventuel partenariatavec la Direction Départementale de l’Agricultureet de la Forêt ou les Chambres d’Agricultureconcernées (en prenant en compte la réglemen-tation).

Sur les terrains conflictuels (Ossau) et sur lesterrains où les réintroductions et les program-mes sont en cours, la collecte par les institutionspeut permettre un travail de sensibilisation, d’in-formation scientifique sur l’éthologie du vautour.Ce lien peut permettre d’une part de développerle système d’équarrissage naturel adossé à unerelation directe éleveur/oiseau et, d’autre part,de renforcer les relations entre le monde agricoleet le monde des gestionnaires des espèces etespaces protégés.

Ce système semble donc bien constituer unexemple utile de restauration d’un lien entreagriculture et biodiversité au bénéfice mutuel deces deux entités. La question du maintien voiredu développement à long terme de ces pratiquesest donc posée. Peuvent-elles durer ? Sont-ellesréversibles ?

Il est incontestable que la viabilité à long termede ce système est d’abord dépendante ducontexte législatif et socio économique del’équarrissage. Nous avons fait l’expérience engrandeur réelle au cours du programme d’unchangement de ce contexte suite à la tentativede mise en place par l’Europe de contrôlessystématiques pour les maladies à prions chezles ovins et caprins destinés en partie à l’équar-rissage par les nécrophages. Ce système impo-sant le prélèvement de la tête de l’animal et laconservation du corps en l’attente des résultatsaurait rendu de fait impossible son dépôt pourles vautours et ce quel que soit la bonne volontéde certains éleveurs et gestionnaires.L’obtention, fin 2005, d’un compromis obligeantl’échantillonnage d’une partie (4%) des animauxmorts en élevage mais tolérant le dépôt desautres pour les nécrophages, a levé cettecontrainte aussi bien au niveau français quepour les pays du pourtour méditerranéen dontles populations, en dehors de l’Espagne,demeurent largement menacées. Cette évolutionrécente et rapide s’est encore amplifiée avec lamise en place début 2006 des marchés

d’équarrissage instituant la prise en compte desorganismes responsables de la conservation desvautours et donc de l’approvisionnement decharniers dans les réponses à ces appelsd’offres. Cette situation, à notre connaissancespécifique à la France, apporte symboliquementune reconnaissance au plus haut niveau du rôledes rapaces nécrophages dans la gestion del’équarrissage et modifie le paysage économiquepour cette pratique. Non pas qu’elle représenteun volume significatif par rapport aux flux usuelsde l’industrie de l’équarrissage mais parce qu’ellepérennise, au-delà de subventions nécessairementlimitées, le financement des coûts liés auxtransports et aux dépôts des carcasses pourdes structures (ONG, espaces protégés) dontles fonds propres ne le permettaient pas. Cefonctionnement continuant d’être neutre pourl’éleveur, les contraintes économiques liées àl’équarrissage sensu stricto ne devraient pas, aumoins à court terme, poser de problème majeur.L’évolution future du service public d’équarrissagedevra cependant être suivie avec attention.

Néanmoins, si la situation actuelle semble favo-rable, certains écueils potentiels méritent d’êtresuivis dans la mesure où leur influence futuresur ce système est encore difficile à évaluer.

Le premier d’entre eux reste du domaine écono-mique et réglementaire. La mise en place d’uneCertification Sanitaire Ovine (CSO) – Tremblante –pour l’utilisation des ovins pour certainesproductions ramène à un test systématique dedépistage des maladies à prion. Les éleveursintéressés par ce système CSO seraient donccontraints de renoncer au dépôt de carcassespour les nécrophages. L’imposition de cescontrôles pour l’obtention de certains labels oul’accès à certains débouchés pourrait donc ànouveau mettre en opposition activité écono-mique et maintien d’une certaine biodiversité.Dans ce nouveau contexte réglementaire, unepoursuite de l’étude ethnosociologique devraitpermettre de mesurer les conditions sociales quifondent l’acceptation, le refus du "systèmeéquarrissage naturel".

Le second point concerne le niveau d’accepta-tion de la croissance des populations de vau-tours par les populations humaines locales. Siactuellement cette question se pose d’abord enOssau, elle est également présente sous uneforme moins pressante dans les GrandsCausses. Le lien généré par la participation acti-ve ou passive des éleveurs à la croissance despopulations de vautours y est cependant plusfort et la compréhension du service écologiqueréel rendu par les vautours vient pondérer cequestionnement. Néanmoins, la situation ossa-loise et, plus encore espagnole nous amènenécessairement à considérer cette question surle long terme. Une approche annexe de cetteproblématique passerait par l’extension derecherches écotoxicologiques à de nouvelles

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Grands Causses et en Ossau, montrent que lesvautours gardent de bonnes capacités de détec-tion des ressources spontanées même lorsqu’ilsutilisent régulièrement des charniers et placet-tes. Il apparaît cependant que les adultes quijouent un rôle majeur pour la dynamique de cespopulations restent cantonnés sur les charniersproches des colonies, les jeunes oiseaux domi-nés en compétition pour ces ressources devantexploiter les sites périphériques. A l’échellepopulationnelle, les différentes populations sui-vies montrent de forts taux d’accroissement,dus essentiellement à des survies adultes trèsélevées. La population Caussenarde présentantnéanmoins un baisse de survie juvénile liée àl’augmentation du nombre de couples et lapopulation Ossaloise semble montrer un baissede fécondité.

Discussion et Perspectives

Si la gestion de l’équarrissage faisant appel auxnécrophages présente des formes variées suivantles régions et les situations, il apparaît que desbénéfices réciproques peuvent être identifiéssans que des désavantages majeurs puissentêtre mis en évidence à l’échelle de cette étude.

Concernant les conséquences comportementaleset populationnelles de la gestion des ressourcesen sites prédictibles, les résultats obtenus parl’observation des comportements au charniermontrent qu’à une échelle très locale il est sansdoute préférable de disperser les ressourcesdans l’espace et/ou le temps plutôt que de lesregrouper sur un site. Par ailleurs il sembleapparaître clairement que les individus adultesprofitent prioritairement des ressources immé-diatement disponibles près de la colonie, lesjeunes oiseaux étant contraints de prospecteren périphérie. Cette compétition entre classesd’âge pourrait être un facteur de régulation despopulations par la densité ce qui entraînerait àterme une augmentation relative des pertes dejeunes oiseaux sans que cela n’affecte pourautant la viabilité de ces populations. La concen-tration des ressources sur quelques sites prochesde colonies augmenterait cette compétitionalors que sa dispersion favoriserait la survie desjeunes. Pour des raisons logistiques et pouréviter de trop forts dérangements nous n’avonspu multiplier les observations hors du charnierprincipal dans les Grands Causses et notammentsur des placettes gérées par les éleveurs. De lamême manière, le suivi par télémétrie a concernéessentiellement des individus adultes et le com-portement des très jeunes oiseaux mériteraitd’être mieux compris. De nouvelles techniquesde localisation par GPS, encore en phase demise au point au moment du lancement duprogramme, permettraient d’accéder à desinformations plus fines sur les déplacements àpetite et grande échelle de ces oiseaux afind’estimer les budgets temps passés à prospec-ter sur et hors charnier. Les processus de

distribution spatiale et de compétition observés àce jour semblent néanmoins relativement robus-tes et cohérents avec le contexte évolutif cor-respondant aux traits d’histoire de vie de cetteespèce longévive et coloniale. Le travail réalisésur ces différents aspects doit se poursuivre etbénéficier très prochainement de la réactualisa-tion des quantités de ressources disponibles,permettant ainsi de tester leurs effets sur lesparamètres démographiques. Parallèlement, destravaux de modélisation des comportements deprospection permettront de mieux interpréter lesrésultats expérimentaux déjà acquis. Leur com-paraison avec d’autres espèces proches(Vautour moine, Vautour percnoptère) mais noncoloniale permettrait également de mieux com-prendre l’intérêt des charniers et placettes pourdes espèces ne s’alimentant pas nécessaire-ment en groupe. De la même manière, l'étudeécotoxicologique a été confrontée à un problèmed'échantillonnage si bien que les animaux analy-sés proviennent principalement que d'un seulsite géographique, les Grands Causses. La miseen place de protocoles standards de récoltes,de stockage et d’analyse des échantillons estdonc encouragée.

Dans tous les cas, si l’intérêt d’un apport régu-lier pour fixer des populations semble indéniable,ce système doit pouvoir évoluer vers une distri-bution plus aléatoire des ressources trophiques.La multiplication des sites d’alimentation par lamise en place ou la simple officialisation dessites de dépôt chez les éleveurs est une voiepermettant de restaurer une plus grande variabilitéspatio-temporelle dans l’apparition des ressources.La réduction des charniers lourds à un simpleappui aux programmes de réintroduction ou derestauration pour les populations les plus mena-cées, ou leur maintien pour gérer les carcassesen provenance d’élevage ne pouvant pasaccueillir de placette pour des raisons tech-niques est donc envisageable si le développe-ment des placettes par les éleveurs est assuré.Les dernières tendances dans les GrandsCausses semblent montrer une augmentationdes demandes d’installation de placette auprèsde la LPO. Par ailleurs, les contraintes de suiviindividuel des cheptels devraient à court termeréduire les pratiques de dépôt officieux etprobablement encourager la mise en place deplacettes. En effet si la placette est économi-quement la plus rentable tant pour la sociétéque pour l’éleveur concerné, on constate quecertains sont conscients de cet avantage sanspour autant être prêts à officialiser leur pratiqueresponsable de dépose sur une placette officieuse.Lorsqu’il n’a pas les conditions qui l’y obligent-trop de bêtes mortes par exemple, ou unemortalité non naturelle -, l’éleveur recourt aucollecteur ou à l’équarrisseur. Tout en reconnais-sant la valeur patrimoniale de l’oiseau (esthétiqueet l’attrait touristique qu’il représente) commeson efficacité à nettoyer les carcasses, il chercheà se maintenir dans un système responsable

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PRINCIPALES PUBLICATIONS

� Articles scientifiques soumis et en pré-paration.

Bobbé, S. Agriculture et biodiversité: des bénéficespartagés. Cinq exemples français d’équarrissage natu-rel (en préparation)Bobbé, S. L’agropastoralisme au service de la biodiver-sité. Exemple d’un mode d’équarrissage écologique(en préparation)Bobbé, S. Réflexions épistémologiques d’une ethnolo-gue confrontée au caractère illégal des pratiques étu-diées (en préparation)Bosè, M. & Sarrazin, F. Competitive behaviour and fee-ding rates in a reintroduced populations of Griffon vul-tures (Gyps fulvus), (soumis)Bosè, M. & Sarrazin, F. Dynamics of feeding groups:Competition and cooperation in Griffon vultures (Gypsfulvus). (soumis)Bosè, M., Le Gouar, P., Arthur, C., Boisselier-Dubayle,M.C, Choisy, J.P, Henriquet, S., Lécuyer, P., Pinna, J.L,Richard, M., Tessier, C. & Sarrazin, F. No sex effectson biometry, recoveries and movements in wild andreintroduced populations of Griffon Vultures (Gyps ful-vus). (soumis)Gault, A., Bretagnolle, V., & Sarrazin, F. Impact ofFeeding Stations on Griffon vultures’ foraging behavior.(soumis)Gault, A., Jiguet, F., Melin, M., Virondeau, A. &Sarrazin, F. Home range of a central place forager, theGriffon vulture Gyps fulvus, in response to food mana-gement (soumis)Gault, A., Robert, A., Bosè, M., Le Gouar, P., Arthur, C.,Lécuyer, P., Pinna, J.L, & Sarrazin, F. Long term survivalin a natural and a reintroduced population of Griffonvultures.

Les travaux en ethnosociologie menés par S. Bobbédonneront lieu à plusieurs articles scientifiques dansl’une des revues suivantes : Nature, Science et Société ,Le Courrier de l’Environnement, Ruralia, Terrain,Ethnologie française. Les travaux sur les analyses éco-toxicologiques seront valorisés par une publicationdans une revue de type Chemosphere, Comp.Biochem. Physiol. Plusieurs autres publications sur lesaspects éthnosociologiques et écologiques sont enpréparation

� Participations aux colloques nationauxou internationaux

Gault, A., Mersch, D. & Sarrazin, F. (2004). 10thInternational Behavioral Ecology Congress, Universityof Jyväskylä, Finland. PosterGault, A. and Sarrazin, F. (2004). InternationalSymposium on the Black Vulture, Cordoue, Espagne.Communication oraleGault, A. and Sarrazin, F. (2005). Student Conferenceon Conservation Science 2005, University ofCambridge, U.K. PosterGault, A. and Sarrazin F. (2005). 19th Annual MeetingSociety for Conservation Biology, University of Brasilia,Brazil. Students Awards finalist. Communication oraleSarrazin, F., Bobbé, S., Boumellassa, H., Buronfosse,T. & Gault, A. (2005). 19th Annual Meeting of theSociety for Conservation Biology. Brasilia. July 2005.Communication OraleSarrazin, F. (2005). International Meeting on“Conservation & Management of Vulture Populations”.Thessalonica, Greece. 14-16 November2005.Communication Orale invitée.Bessa-Gomes C., Gault, A. and Sarrazin, F. (2006)Journées francophones des Sciences de la Conservationde la Biodiversité. MNHN, Paris, 7-9 mars.Communication orale.

Deygout, C., Bessa-Gomes, C., Gault, A. & Sarrazin, F.(2006). Journées francophones des Sciences de laConservation de la Biodiversité. . MNHN, Paris, 7-9mars. PosterSarrazin, F., Bobbé, S., Boumellassa, H., Buronfosse, T& Gault, A. (2006). Journées francophones desSciences de la Conservation de la Biodiversité. MNHN,Paris, 7-9 mars. PosterGault, A., Bosè M. and Sarrazin, F. (2006) 1st EuropeanCongress of Conservation Biology. Eger, 22-26 aout,Hungary. Communication oraleGault, A., Doxa A., Bosè, M. & Sarrazin, F. (2006) 11thInternational Behavioral Ecology Congress, Universityof Tours, France. Communication orale

� Articles de vulgarisation, documentstechniques, scientifiques

Terrasse M., Sarrazin, F. Choisy, J.P., Clemente, C.,Henriquet, S., Lecuyer, P., Pinna, J.L., & Tessier, C.2004. A Success Story: The Reintroduction of GriffonGyps fulvus and Black Aegypius monachus Vultures inFrance. In Chancellor, R.D. & B.-U. Meyburg (eds)Raptors Worldwilde. WWGBP: 127-145Sarrazin, F., Le Gouar, P., Bosè, M ., Gault, A. et Robert, . A.2006. Dynamique à long temre des populations de vautoursfauves. LPO. Vautours infos 8 :5-8.Sarrazin, F. préparation d’un article sur la restaurationdes populations de vautours en vue de la publicationpar le PNC d’ouvrage de restitution des travauxconduits sur le territoire des Causses.Bobbé S. préparation d’un article sur les relations éle-veurs-vautours en vue de la publication par le PNCd’ouvrage de restitution des travaux conduits sur leterritoire des Causses.

L’étude ethnosociologique sera également publiéesous forme d’un article de vulgarisation dans une revuespécialisée (proche de l’Institut de l’élevage).

Par ailleurs, 8 rapports de fin d’étude sont disponiblesauprès de François Sarrazin :

Boumellassa, H. (2004. D.E.A. Paris X, Nanterre);Virondeau, A. (2004. D.E.S. UPMC) ; Melin, M. (2005.Master 1, UPMC) ; Doxa, A. (2005. Master 2, UPMC);Texier, M. (2006 Thèse vétérinaire E.N.V.L.) ; Gault, A.(2006. Doctorat UPMC) ; Bosè, M. (2006. DoctoratUPMC). Deygout, C. (2006.Master 2 INAPG).

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A

substances susceptibles d’être utilisées contreles nécrophages. Elle devrait également se dou-bler d’une étude sociologique approfondie enOssau permettant de suivre le travail réalisé par"la Commission des dégâts au bétail" et par uneanalyse des discours sociologique et sémiolo-gique des éleveurs qui se disent victimes d’at-taques de vautours.

CQUIS EN TERME DE TRANSFERT

Les acquis de ce programme en terme de transfertse situent à plusieurs niveaux.

Le premier niveauconcerne la mise en place et les méthodes del’équarrissage par les nécrophages pour les éle-veurs et les gestionnaires de nécrophages.

Le fait le plus marquant dans ce programme etle plus bénéfique pour l'avenir a probablementété l'obtention de l'abrogation du règlementeuropéen 2003/322. L'abandon de cette restric-tion a été permis grâce à la mobilisation denombreux acteurs dont l’un des partenaires duprogramme, Thierry Buronfosse, et grâce ausoutien constant du MEDD. Il permet de relancerles programmes de construction de placettesindividuelles chez les éleveurs ce qui apparaîtcomme particulièrement bénéfique pour denombreuses espèces de nécrophages.

Dans ce même contexte, le transfert de l’expé-rience acquise dans les Grands Causses sur lamise en place des placettes gérées par les éle-veurs est envisagé à plusieurs niveaux. Ce sys-tème sert actuellement d’exemple pour la miseen place de placettes, en vue de la conservationde la population de Vautour percnoptère duSud-est de la France, qui rentre dans les cadresrespectifs du plan de restauration national misen place par le MEDD pour cette espèce et leprogramme LIFE Percnoptère en cours.

Par ailleurs, dans les Pyrénées, la récente créa-tion d’une "Commission des dégâts au bétail"(où siègent des associations d’éleveurs, le PNP,la DIREN, l’IPHB…) pourrait être d’une part lelieu d’une restitution de ce travail et d’autre part,un lieu d’échange sur le "système équarrissagenaturel légal" qui est totalement inexistant enOssau. Par ce biais, des contacts avec leséleveurs (via les représentants du milieu agricole)pourraient se renforcer.

Enfin, l’expérience acquise dans la restaurationde cet équarrissage naturel intéresse directe-ment au niveau européen les pays concernéspar la conservation des nécrophages, qu’ils ysoient abondants comme en Espagne, menacéscomme dans les Balkans, ou en cours de réin-

troduction comme en Italie. En ce sens, l’amen-dement de la décision européenne décrit plushaut a été accueilli avec grand intérêt par cespartenaires européens. Il est cependant clair queles spécificités locales de l’élevage, des pra-tiques et des perceptions rendent peu probableune mise en place immédiate et à large échelledu système de placettes caussenard.

Le second niveaude transfert est à destination des gestionnairesde populations de rapaces nécrophages etconcerne le suivi de ces populations. Les proto-coles établis pour le marquage, le suivi en routinedes individus et des sites de reproduction sontcoordonnés et repris par les cinq sites de suivien France. Une base de données nationale estmaintenant utilisée pour la saisie des observa-tions dans les différents sites et permet l’échangeannuel des nouvelles données. Cette base aservi en partie de modèle pour la mise en placed’une base de données sur le Vautour percnoptère.De même des protocoles standardisés de récolteset de conservation d’individus morts ont été dif-fusés de façon à permettre au-delà du présentprogramme de maintenir une veille sur lesaspects écotoxicologiques pouvant affecter lesrapaces nécrophages. Ainsi l'approche d'étudedes produits antiparasitaires utilisés et leuréventuel transfert vers les animaux sauvagesnécrophages a permis de valider des méthodesanalytiques qui sont exploitées pour d'autresprogrammes (Life Percnoptère, Life Crécerelette).

Ces échanges se sont notamment formalisés aucours des réunions annuelles du Groupe VautourFrance réunissant une grande diversité d’acteursde la conservation de ces espèces. Une approchesimilaire d’échange d’informations techniquesconcernant le suivi et la gestion des populationsse met également en place au niveau européennotamment au sein de l’ "European GriffonVulture Working Group" pour laquelle la structurede la base de données francaise a été traduiteet distribuée.

Enfin, l’ensemble des travaux menés est sus-ceptible de concerner les responsables des pro-grammes de conservation d’espèces proches ettrès menacées en Asie et en Afrique même si letransfert des techniques et des méthodesemployées en France y nécessitera des adapta-tions.

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� Action publique, aspect de la biodiversitéet type d’agriculture concernés

Le projet est centré sur l’intégration de la bio-diversité reconnue au plan européen (N2000,zones à haute valeur naturelle [HNV]) dans laconception d’ensemble de la PAC.

� Objectifs

La recherche analyse la manière dont l’organi-sation des acteurs en France, en tant qu’Étatmembre impliqué dans les négociations, ainfluencé les positions défendues et les déci-sions prises sur une série de mesures du"premier pilier" et du "deuxième pilier" de laPAC que nous détaillerons dans la suite durapport. Une comparaison avec l’Angleterreservira de contrepoint à l’analyse conduite ici.Notre objet porte ainsi sur un processus dedécision. Ce processus se concrétise dans lesmesures politiques constitutifs du volet agrico-le de l’Agenda 2000 adoptées.Au total, nous avons donc :

� un objet à expliquer, qui sont les décisionsrelativement aux mesures politiques, analyséessous l’angle de l’intégration de la biodiversité.Au delà des invocations politiques internatio-nales (Rio 1992) ou européenne (Processus deCardiff 1998), cette notion d’intégration n’estpas univoque : c’est précisément un objet denotre travail que de caractériser les théoriesd’actions intégratives en présence ;

� des variables explicatives, qui portent sur lesystème d’acteurs tel qu’il est organisé auplan national. Nous analyserons ce systèmed’acteurs dans le cadre de processus de réfor-me de la PAC de 1999 (" Agenda 2000 ") telqu’il fut institué.

Le projet peut être situé dans ses composan-tes théoriques et de production de connais-sances au regard des termes de l’appel àproposition de recherche. En effet, le présentprojet vise :

� à préciser les termes théoriques d’une inté-gration de la biodiversité dans les politiquesagricoles. De ce point de vue, ils traitentclairement de la question " action publique,agriculture et biodiversité ", qui fonde leprogramme DIVA. À cet égard, nous rappelleronsici les considérants de l’APR : " Les enjeuxscientifiques déterminants pour faire avancerl'action publique en matière de biodiversitéportent d'abord sur un changement d'échelledans l'analyse des phénomènes à l'interfaceagriculture et biodiversité ". L’angle d’attaquestratégique peut particulièrement être mis enavant dans notre approche (cf. ASGE infra) ;

� à apporter des éléments de connaissancesur la structure et le fonctionnement de la PACdont les entretiens montrent qu’ils sont encore

très mal connus de beaucoup d’acteurs"biodiversité". Pour citer à nouveau l’APR : "Ils'agit d'aborder la compréhension des proces-sus sociaux et politiques qui interviennentdans la définition et la légitimation des actionsen faveur de la biodiversité. L'un des aspectsporte sur la nécessité d'anticiper des modesd'actions publiques qui complètent le disposi-tif existant, en en analysant les composantestechniques, économiques et sociales".

� Mots clés

Intégration de la biodiversité dans les poli-tiques publiques, PAC, politiques publiques,processus de décision politique, Europe,France, Angleterre

Quelle intégration de la biodiversitédans les politiques agricoles au niveau national ?Une analyse comparée de la France et de l'Angleterre

Responsable scientifique :

POUX, XavierAScA

8 rue Legouvé,75010 Paris

[email protected]

Participants au projet :

ASCAJean-Baptiste NARCY et

Dikran ZAKEOSSIAN,

University of Exeter(Royaume-Uni)Henry BULLER

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relative aux courants d’idées à l’interface agricul-ture et environnement/biodiversité ;

� une recherche documentaire plus "journalis-tique" permettant un repérage de l’évolution desidées et des thèmes sur la période étudiée.

Les entretiens ont impliqué différentes catégoriesd’acteur— chercheurs, associatifs et administra-tifs —, aux niveaux régional (Poitou Charente),national et communautaire.

En outre, la participation à différentes réunions deréflexion sur le thème biodiversité et agriculture aconstitué une source d’informations essentielle.

Le contrepoint anglais a été assuré par l’équipede l’Université d’Exeter, sur la base d’interviewset de collecte de documents de référence.

� Pour agencer l’ensemble de ce matériau :le cadre du récit

Le récit permet d’articuler les deux cadres théo-riques sus-mentionnés, en donnant à voir :

� un système institué avec beaucoup de forcesde rappel, d’éléments structurels constituant enquelque sorte le "décor" de l’histoire ;

� des facteurs de changement sur la périodeconsidérée, mêlant aussi bien des stratégies etlogiques comprenant des intérêts constitués etdes formes d’adaptions des acteurs aux règlesdu jeu dans lequel ils agissent, que des proces-sus émergents donnant à voir des intérêts, desconnaissances et des acteurs non stabilisés.

� Schéma d’ensemble

Le schéma suivant propose une vision d’ensem-ble des composantes de notre recherche, partantde la problématique d’intégration telle qu’elle estposée par l’OCDE à la mobilisation du cadre durécit pour instruire une lecture stratégique decette question.

� �

Une grille normative de l’intégration (OCRE)-intégration institutionnelle

-intégration objectifs-intégration instruments

Comment réaliser l’intégration ?

Une théorie d’analyse stratégique de l’intégration (ASGE)-Analyse des acteurs et des institutions

L’intégration stratégiquese déroule dans un systèmed’action concret

Une grille de lecturesociologie

des organisations Un récit de la manière dontla biodiversitéa été intégrée

dans l’agenda 2000

Une grille de lecturesociologie

de la traduction

L’intégration est un processus complexe.Le récit est adapté pour rendre compte

(de cette complexité)

L’intégration stratégiquerepose sur des idées nouvellesqui structurent des réseauxd’acteurs (= forums d’idées)

P

76

RESENTATION DES TRAVAUX DE

RECHERCHE

Problématique

Pour mieux cerner la problématique de l’intégra-tion, nous mobilisons ici deux angles d’attaquesthéoriques complémentaires :

� celui, déjà ancien, élaboré par l’OCDE [1989],qui pose la question de l’intégration environne-mentale dans les politiques agricoles sur le planle plus général ;

� celui de l’Analyse stratégique de la gestion del’environnement [Mermet et al. 2005].

L’OCDE (1989) propose une grille d’analyse del’intégration qui, en dépit de son ancienneté, restepertinente par rapport à notre problématique. Surle plan le plus général, "une approche intégréeexige que les considérations relatives à l’environ-nement soient prises pleinement en compte dèsles premiers stades de l’élaboration et de la miseen œuvre des politiques agricoles". Pour l’OCDEcet objectif d’ensemble repose sur trois voletsmutuellement dépendants :

� l’intégration institutionnelle (collaboration,coopération, communication) ;

� l’élaboration d’objectifs convenus (en commun) ;

� l’élaboration d’instruments politiques d’intégra-tion.

Si l’approche OCDE pose clairement la nécessitéd’un changement dans l’organisation de la décision,elle ne précise pas les conditions selon lesquellesil peut survenir. L’hypothèse complémentaire retenuedans la recherche est que ce changement se jouedans le fonctionnement du jeu d’acteurs à l’œuvredans l’élaboration et la mise en œuvre despolitiques agricoles, et qu’il ne peut intervenirsans la mobilisation, au sein de ce jeu, d’acteursdéveloppant une stratégie intentionnelle en faveurde ce changement. Cette lecture stratégiqueinduit alors un déplacement de l’analyse qui faitpasser la question de l’intégration de la biodiversitédans les politiques du statut de "problème-col-lectif-à-résoudre-tous-ensemble" à celui deresponsabilité collective qui ne sera pas honoréesans l’intervention stratégique efficace d’un agentde changement porteur des objectifs de biodiver-sité. La problématique introduite au début decette section s’en trouve précisée : notre recher-che sur l’intégration de la biodiversité dans laPAC, sur les résistances auxquelles elle donnelieu et sur l’efficience des efforts qu’elle suscite,doit s’efforcer en premier lieu d’éclairer cetteintervention stratégique des acteurs de change-ment biodiversité, et c’est d’abord à eux que s’a-dresse cette recherche finalisée.

Matériel et Méthodes

� Les cadres d’analyse des processus straté-giques

Les apports de la sociologie des organisationsSe référer à la sociologie des organisations dansle cadre de la présente recherche permet "d’outiller"l’analyse du processus d’intégration visé. Ellenous conduit à s’attacher à identifier et décrire le"système d’action concret" au sein duquel l’inté-gration de la biodiversité dans les politiques agri-coles est susceptible de s’opérer, en analysantles marges de manœuvre stratégiques desacteurs recherchant cette intégration, comptetenu des caractéristiques instituées de ce système,mais aussi de ses zones d’incertitudes, laissantde la place à des évolutions indéterminées. Enoutre, ce cadrage théorique nourrit notre viséeprescriptive : l’identification des fondements dupouvoir de l’acteur au sein du système permet eneffet de pointer les éléments qui, au sein du sys-tème d’action concret, constituent des ressourcespotentielles pour les acteurs souhaitant voirs’opérer l’intégration visée.

Les apports de la sociologie de la traductionAppréhender l’intégration de la biodiversité dansles politiques agricoles comme un processusémergent nous invite ainsi à considérer, en deçàdes règles de fonctionnement du système d’actionconcret où doit s’opérer cette intégration, lesforums de production des idées où circule, sousdiverses acceptions, cette notion d’intégration.Cette approche conduit à tenter de cerner nonseulement les théories d’action qui fondent lesmesures adoptées, mais aussi les cercles au seindesquels ces théories ont vu le jour, et les acteursqui ont assuré leur reconnaissance dans laconception de la réforme. Elle conduit égalementà rechercher les " perdants " au sein de cesforums, c’est-à-dire les acteurs et idées qui n’ontpu être transformés en théories d’action recon-nues, restant à l’écart du processus de réformetel qu’il s’est déroulé mais ouvrant des perspecti-ves sur la réforme telle qu’elle aurait pu être.Enfin, en analysant les mécanismes de sélectiondes idées, elle peut là encore laisser espérer desenseignements d’ordre prescriptif, dans le cas oùceux à qui s’adressent les éventuelles prescriptionsfigurent dans le camp des perdants…

� Modes d’investigation

Les apports de la sociologie des organisationsLes modes d’investigation mobilisés ont combinéune recherche bibliographique et documentaire etune série d’entretiens auprès d’acteurs impliquésdans les champs de la biodiversité et/ou des poli-tiques agricoles dans le cadre de l’Agenda 2000.La recherche bibliographique et documentaire aporté sur trois grands volets :

� une recherche méthodologique et théoriquedont le présent rapport rend compte ;

� une recherche bibliographique de "contenu",

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1992-1995 : la consolidationdes enjeux d’intégration de labiodiversité et de l’environne-ment

1995-1997 : l’instauration de laréforme de la PAC, versl’Agenda 2000

1997-1998 : l’enclenchementdes négociations préparatoires

1998 (mars) -1999 (mars) :les négociations finales et lesommet de Berlin

1999 – 2000 : la déclinaison del’agenda 2000

� La volonté de "transformer" laPAC de 1992 (rugby)� Le renforcement des réseauxd’expertise environnementauxd’inspiration anglaise (WWF,IEEP, Birdlife)� La montée en puissance desHigh Nature Value farmland�La préparation d’un réseauengagé dans le "verdissement"de la PAC

� L’annonce de l’agenda 2000au conseil de Madrid 1995� La conférence de Cork sur ledéveloppement rural (1996)� Le "groupe Buckwell" :la CARPE (*)�L’ouverture (pêche aux idées)pour la constitution d’unedoctrine + "shopping list"environnement

� 1ère proposition de la PAC("paquet Santer I") 1997- Grandes lignes budgétaires,modulation 1er / 2ème pilier- points de "verdissement" de laPAC (shopping list) (propositionde suppression de la primemaïs ensilage)�Traduction pragmatique de ladoctrine Buckwell dans le forumdes communautés de politiquespubliques

� Mars 1998 : "Santer II"- ajustements sur des points denégociation (retour de la primemaïs ensilage)� possibilité de modulation 1eret 2ème piliers�Maintien de l’essentiel

Accent mis sur le 2ème pilier ausein du Règlement de dévelop-pement rural (RDR)Options d’intégration de labiodiversité dans le 1er piliersubsidiaire (bonnes pratiquesagricoles, conditionnalité, "art16", modulation)

� La digestion de la réforme,l’analyse de la répartitionindividuelle des aides de la PAC� Des MAE locales à l’élargis-sement conceptuel des PDD� Une biodiversité peureprésentée au plan national�Vers un débat globalisant

� La constitution d’un réseau"multifonctionnalité agricole" ouMFA (groupe de Seillac et alii.)� Une biodiversité "embarquée"dans un débat agro-social�L’organisation d’un débatglobalisant� Une co-gestion malmenéemais qui résiste bien (J.Chiracprésident depuis 1995)

� Crise ESB� Alternance politique, cohabi-tation� Fonctionnement de deuxréseaux politiques parallèles :- 1er pilier : Élysée, cogestionet DPEI au ministère de l’agri-culture- 2ème pilier : Matignon et syn-dicats alternatifs� Doctrine CTE�Contexte peu favorable àl’appropriation de Santer I parles MFA�Réaction à Santer I dans lescercles spécialisés 1er pilier�LOA institue les CTE

� Phase de fermeture institu-tionnelle des acteurs en chargede la négociation 1er pilier : lagestion du dossier par la DPEI,autres acteurs peu consultés� Arrivée tardive des contre-propositions sous forme d’uncollectif� Enjeu principal : le financementdes CTE au sein du 2ème pilier

� Les difficultés de transcriptiondu CTE dans les règles du RDR� Une mise en œuvre " au pasde charge ", la biodiversitémarginalisée

� Critiques de plus en plus fortesenvers la PAC 1992 (libérales etenvironnementales)� Extension importante de lapolitique MAE avec le CSS� Traduction des SSSI en sitesNatura 2000, mise en placed’une Plan national de la biodi-versité (1994) suite à "Rio"� Création des premiers Plansd’Action pour la Biodiversitélocaux (1995)

� Rôle croissant des ONGcomme la RSPB dans les débatssur la réforme de la PAC (expertise,participation aux groupes detravail du ministère de l’agriculture)�Coalition gouvernement +ONG + secteur agricole vers unePAC vers plus de développementrural de gestion des paysages etbiodiversité ; quasi-unanimitépour la dégressivité des aides PAC

� Critiques ouvertes de Santer I :pas de dégressivité, trop axéessur le pilier 1, budget MAE faible.� Déception que le développe-ment rural et la protection del’environnement ne sont pasprioritaires (cf. Cork).� Changement politique etvolonté forte de réduire le budgetagricole communautaire etnational.� Croissance importante dunombre de plans locaux d’actionsur la biodiversité dans lesrégions agricoles�Un débat national ouvertautour de la PAC et la biodiversité

� Enjeu : augmenter le pilier 2en réduisant le budget agricolenational.� UK marginalisée dans lesnégociations européennesconcernant la dégressivité totale� Position paradoxale :éco-conditionnalité vue commeune légitimation du système PAC.� Lancement de l’initiative semi-privée, les "Farms BAPs"

� Adoption de la modulation enGB pour financer des MAE trèsorientées "biodiversité"� Débat national surl’éco-conditionnalité.� RDR : peu de changements ence qui concerne les MAE maisdébut d’un débat national surl’éventuel remplacement des MAEBiodiversité : enjeu de plus enplus important dans le débat

EUROPE FRANCE ANGLETERRE

78

� Angleterre

La topologie du système d’action concret

On retiendra d’emblée la coordination de deuxgrandes catégories de circuits décisionnels officiels :

� les circuits "horizontaux", considérant les inter-actions au plan européen – concrètement :les acteurs qui se rencontrent à Bruxelles ou lorsdes sommets européens.

� Les circuits "verticaux", qui articulent desacteurs nationaux, appartenant

aux différents États membres, à l’arène bruxelloisevia des porte-parole sélectionnés.

La chronologie du système d’action concretLe tableau suivant résume les temporalités desdifférentes scènes du système d’action concretde la prise de décision.

Résultats et discussion

� Une présentation du système d’action concret

Le monde dela multifonctionnalité

Le monde de l’agriculture français

Le monde des négociations communautairesrelatives à l’agriculture

Le mondede la BDen Europe

Le mondede la BDen Angleterre

Le monde de la BDen France

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A

des outils et des instruments politiques. A lalumière des enseignements de la recherche, on voitqu’il faut que les réseaux et les objets convoquésà chaque étape soient proprement représentés.À cet égard, il faut souligner que la représentationde la biodiversité européenne s’est, depuis lapériode étudiée, considérablement développéeavec des projets comme IRENA ou les travauxsur les High Nature Value farmland (EEA, 2004) :il est indispensable que les réseaux français — ycompris ceux de recherche — se mobilisent surces chantiers.

CQUIS EN TERME DE TRANSFERT

Notre recherche s’adresse essentiellement auxacteurs activement impliqués dans le processusdécisionnel à l’interface agriculture et biodiversité.Sur un plan général, elle leur propose à la fois :

� une explicitation formalisée du "plateau de jeu"dans lequel ils interviennent sans en avoir néces-sairement une vision d’ensemble ;

� une grille de lecture stratégique qui, sans pro-poser de "recettes", permet d’enrichir la manièrede penser et organiser l’action.

Les formes du transfert se concrétisent par l’im-plication active de l’équipe de recherche lors deséminaires stratégiques auprès d’acteurs dumonde associatif français, agissant en faveur del’intégration de la biodiversité dans les politiques.On citera ainsi comme partenaires de ces actionsde transfert le WWF-France, la LPO et FranceNature Environnement, ainsi que les chargés demission du plan d’action agriculture de la straté-gie nationale biodiversité des ministères de l’agri-culture et de l’environnement.

PRINCIPALES PUBLICATIONS

� Articles scientifiques publiés, soumis et enpréparation.

Poux X. (2004) Niveaux et modalités d’intégration de labiodiversité prairiale dans les politiques. Grille d’analyse etexemples européens. Fourrages 179, 407-431Poux X. (2004) Une analyse environnementale desaccords de Luxembourg : une nécessaire réforme de laréforme. Courrier de l’environnement de l’INRA. n° 51, 5-18Poux X. (2005) Le “ saltus ” : un cadre d’analyse pour saisirles enjeux des systèmes agraires européens à HauteValeur Naturelle. La Cañada, n° 19, summer 2005Pflimlin A., Poux X. (2005) Biodiversity of grasslands andlivestock systems in Europe. Redefining the politicalissues. Grassland Science in Europe, vol 10, 221-226Poux X., Narcy J.-B., Zakeossian D. (2005) Les enjeux del’intégration de la biodiversité dans les politiques agricolescommunautaires : le cas français. Cahiers de l’académied’agriculture

� Articles en projet

Narcy J.-B., Poux X., Zakeossian D. Les enjeux straté-giques d’une intégration de la biodiversité dans les poli-tiques agricoles.

� Participations aux colloques nationaux ouinternationaux

Poux X. : Niveaux et modalités d ’intégration de la biodi-versité prairiale dans les politiques : grille d’analyse etéclairages européens – Congrès de l’AFPF, La Biodiversitédes Prairies : Un patrimoine – Un rôle fonctionnel, 23-24mars 2004, ParisPoux X. Analyse des accords de Luxembourg : opportuni-tés et risques pour la gestion de la biodiversité ColloqueONCFS, 14 septembre 2004, ParisPoux X. Penser localement, agir globalement : les enjeuxd’intégration de la biodiversité dans les politiques agrico-les européennes Biodiversité, science et gouvernance,UNESCO Paris, 24-28 janvier 2005Poux X. De l’usage des systèmes en situation straté-giques illustré à travers la gestion de la biodiversité,Séminaire de recherche développement durable : outils etméthodes d’aide à la décision publique, DGER - MAAPR10/05/2005Poux X. L’intégration de la biodiversité dans les politiquesagricoles : une comparaison France-Angleterre, Séminaire" politiques agricoles " de la SFER, 12 mai 2006

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� Les forums de production des idées

L’intégration de la biodiversité dans les politiquesagricoles passe par une compétition entre mou-vements d’idées au sein de différents forums. Elleest problématisée d’une façon bien spécifiquepar les différents "paradigmes" des forums scien-tifiques, "doctrines" des forums politiques etassociatifs et "modèles d’agriculture" du forumprofessionnel agricole.

L’analyse des mouvements d’idées en référence àla sociologie de la traduction débouche sur lamise en évidence de la victoire de la multifonc-tionnalité agricole (MFA) comme "point de passa-ge obligé", pour s’imposer comme référent com-mun au sein de chaque forum. Elle y incarne eneffet à la fois le dénominateur commun d’unedoctrine défendue dans le forum de la rhétoriquepolitique, de paradigmes défendus dans lesforums scientifiques et d’un modèle d’agricultureporté dans le forum professionnel, et le réseaud’alliances qui lie les acteurs défendant ces idéesdans leurs forums respectifs. Ainsi, les écologuesdu paysage et leurs agro-systèmes, les économistesruraux et leurs systèmes agraires, les sociologuesruraux et leur société rurale, la confédération pay-sanne et son agriculture paysanne et, enfin, leParti Socialiste et son nouveau contrat Agriculture- Société, se retrouvent autour de ce concept deMFA.

� Quelles sont les sources de pouvoir dontdispose la MFA au sein du système d’actionconcret ?

En référence à la sociologie des organisations,l’analyse méthodique des différentes sources depouvoir permet de révéler les points forts et lesfaiblesses des acteurs MFA sur les deux scènes,nationale et européenne, où se joue conjointe-ment l’intégration de la biodiversité dans les poli-tiques agricoles.

Ainsi, si l’on considère le pouvoir tiré de l’expertise,la MFA s’appuie incontestablement sur dessavoirs académiques dans diverses disciplines(économie et sociologie rurale en particulier). Ceschamps d’expertise laissent cependant en plancertains segments clés de l’intégration de labiodiversité dans les politiques agricoles, maîtrisésen revanche par les acteurs autres acteursmajeurs de la réforme, ceux de la co-gestion.Ceci induit un partage de fait des territoires : à laMFA le second pilier, à la co-gestion le premier.

Concernant le pouvoir des marginaux sécants, laMFA dispose et joue incontestablement d’atoutsdans ce domaine, en particulier à l’interface entreles élites administratives et la société civile. Maiscette force n’est pas organisée de manière àrésonner dans les enceintes de la Commission –l’absence de la MFA sur ce plan la défavorisevis-à-vis d’autres acteurs français comme laDPEI, qui elle maîtrise l’interface entre Paris etBruxelles.

Enfin, une lacune évidente du pouvoir dont disposele réseau constitué autour de la MFA concerne lamaîtrise des règles formelles (y compris descircuits de financement) et la gestion de l’information.

� Une traduction lacunaire de l’intégration de labiodiversité dans les politiques agricoles

Si les acteurs du réseau MFA ont su jouer deleurs alliances inter-forums pour s’imposercomme les porte parole-français de l’intégrationde la biodiversité dans les politiques agricoles,ils n’ont ni donné à voir dans leur discours leshabitats – les ZNIEFF, les espèces emblématiques,les zones humides, … – et les enjeux de protectionde la nature discutés au niveau européen, ni pro-posé de mise en perspective du développementde l’exploitation avec le fonctionnement "macro"des marchés. Cette lacune provoque un manquede crédibilité au niveau européen, sur deux plans.En premier lieu, l’absence de mentions explicitesaux marchés dans son discours (et a fortiori decritique argumentée au-delà des principes), alorsque la co-gestion dans le même temps se posi-tionne en la matière, est sans doute perçucomme un non-dit suspect pour les interlocuteurseuropéens auxquels elle s’adresse. En secondlieu, la MFA n’est ni le porte-parole des espacesnaturels que ses interlocuteurs européens souhaitentprotéger, ni des impacts du 1er pilier de la PACsur la biodiversité et l’environnement qui sont aucœur de leurs préoccupations. Sans préjuger ducontenu d’un éventuel accord ou désaccord, ilétait donc impossible de ‘prendre langue’ sur desobjets absents.

Quels enseignements stratégiques et pistesde recherche ?

Finalement, l’histoire de l’échec de la MFA dansl’intégration de la biodiversité et celle, en contre-point, des acteurs anglais débouche sur un constatpresque trivial : on ne peut pas conduire un telprocessus politique sans enrôler les porte-parolede la biodiversité. La réciproque doit aussi êtrerappelée : il faut aussi enrôler ceux de l’agriculture.On retrouve un constat fondateur de l’étude depréfiguration du programme DIVA : l’intégrationdécoule d’une polarité entre un monde hérité dela protection de la nature et d’un monde hérité dela production agricole. Pour les acteurs françaisen charge de l’intégration visée, oublier ce constatpour des raisons conceptuelles — parce que ceserait trop réducteur — ou stratégique — pourocculter ou englober l’autre —, c’est risquer derépéter les erreurs de la MFA.

Cette polarité ménage un espace de co-contructionà reconnaître et gérer sur un plan stratégique,dont l’objectif est bien l’intégration effective de labiodiversité dans les politiques agricoles. Il fautalors avancer sur les trois plans que suggère lagrille de l’OCDE : une intégration institutionnelle,une intégration des objectifs clairement établis enmatière d’habitats et d’espèces et une intégration

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P� Action publique, aspect de la biodiversitéet type d’agriculture concernés

Politiques publiques : Natura 2000 et ContratsTerritoriaux d’Exploitation en Zones humides.

� ObjectifsLa proposition de recherche fait suite à denombreux travaux de suivi et d’évaluation despolitiques agri-environnementales mises enœuvre en marais de l’Ouest et vise à répondreaux questions principales suivantes :

� comment est construite la relation " agricul-ture - conservation de la nature " dans le cadred’action publique qui régit les dispositifsNatura 2000 et CTE/CAD ?

� quelle est la capacité des acteurs de laconcertation à construire cette interrelationdans les dispositifs mis en œuvre en maraischarentais et marais poitevin ?

� quels sont les facteurs qui interviennent surcette co-construction, et plus particulièrement,quelles sont les connaissances qui sont pro-duites et mobilisées dans cette co-construction ?

� quelle est l’articulation entre cette co-cons-truction et le cadre d’action publique, et enparticulier quelles sont les incohérences quecette articulation révèle et comment le cadred’action publique peut-il être modifié ?

Cette recherche consiste dans l’analyse detextes réglementaires européens et nationauxqui régissent la mise en œuvre des sitesNatura 2000 et des CTE, ainsi que dans cellede situations concrètes d’application de cespolitiques (sites N2000 en marais poitevin etcharentais, dispositif CTE/CAD en Charente-Maritime et en Vendée), l’une et l’autre sousl’angle particulier d’une mise en relation del’agriculture et de la biodiversité en zones demarais. Les résultats attendus de cette rechercheconsistent à mieux comprendre, sur le planscientifique, les facteurs qui régissent laterritorialisation des politiques publiques etl’institutionnalisation de l’action collective dansle cadre de dispositifs de concertation. Sur leplan opérationnel, il s’agit de formuler despropositions en terme de mise en œuvre deces politiques, notamment dans l’articulationentre ce qui est construit dans ces dispositifsde concertation et le cadre d’action publique.

� Mots clés

Agriculture, biodiversité, politiques publiques,concertation, évaluation, Natura 2000,Contrats Territoriaux d’Exploitation, Marais del’Ouest.

RESENTATION DES TRAVAUX DE

RECHERCHE

L’action publique qui est liée à la constructiond’une relation socialement et écologiquementacceptable entre l’activité agricole et la conser-vation de la nature est au centre de cetterecherche. Cette action publique est circonscriteà la mise en œuvre de deux politiquespubliques emblématiques d’une telle relation :l’une est d’inspiration nationale et se focalisesur les "Contrats Territoriaux d’Exploitation"(CTE), l’autre est impulsée par l’Europe et vise àétablir le réseau Natura 2000. Cette actionpublique s’inscrit dans une unité de temps etde lieu. Les politiques retenues sont quasisimultanées : la mise en place de la DirectiveHabitats à partir de 1992, mais effective 3 ansaprès et toujours en cours, et celle des Contratsd’Agriculture Durable (CAD) qui ont succédéaux CTE dans le cadre de l’application de la Loid’Orientation Agricole de 1999. Unité de lieu,puisque nos recherches portent sur les maraisde l’ouest, plus particulièrement le territoire duParc Interrégional situé en Vendée et le cantonde Rochefort-Nord en Charente-Maritime.

Deux problèmes nous intéressent. Le premiertient au statut de la concertation dans uncontexte d’impératif délibératif et d’obligationde résultats. Le second porte sur la relationentre les différents "mondes" et l’actionpublique. L’hypothèse qui nous guide part duconstat selon lequel la politique CTE est unetentative d’ouverture vers d’autres "mondes"(d’où le concept de multifonctionnalité) alorsque la directive Habitats est plutôt centrée surle "monde" de l’environnement autour duconcept écologique de biodiversité. Notrehypothèse porte sur le rôle de l’action collectiveau sein de ce cadrage initial : dans le cas duCTE, elle tend à limiter le processus d’ouverturealors que dans l’autre elle tend à l’initier.

Nos observations s’appuient sur trois démarchescomplémentaires. Les interviews des chargésde mission recrutés par les opérateurs. Desobservations directes de réunions avec prisesde notes ou enregistrements. Et enfin, les tracesécrites au cours de la procédure : comptesrendus de réunions (Comités de Pilotage et"Groupes de Travail") ; production scientifique(cartes, tableaux, etc.) ; quelques articles depresse. En plus des outils d’analyse commel’analyse de discours ou l’observation partici-pante, nous avons fait le choix de mobiliser lelogiciel Prospero qui s'avère adapté à ce typede corpus et de problématique. Il a été utilisépour mettre en forme les résultats présentésdans les parties I et II du rapport final, la partieIII reposant sur un travail d’analyse qualitativepropre aux sciences sociales. La partie I s'ap-

Natura 2000 et Contrats Territoriaux d’ExploitationAnalyse de deux modes de construction

d’une problématiqueagriculture-conservation de la nature

Responsable scientifique :

BILLAUD, Jean-PaulDR sciences sociales

CNRS – LADYSSS. Univ deParis X, Bat K

200, av. de la République.92 001 Nanterre Cedex

[email protected]

Participants au projet :

Patrick STEYAERT,IR INRA-SAD

(St Laurent-de-la-Prée)Coresponsable

Guillaume OLLIVIER,Allocataire

(Bourse INRA)

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A

celui d’un recodage dans son propre universcognitif, ce qui entraîne, de fait, précisémentparce que cela correspond à une sorte d’épreuveépistémique mais aussi à une volonté de domes-tication et de maîtrise, un processus de mise enréseau (avec d’autres énoncés, d’autres activités,etc.) autrement plus complexe que ce qui estproposé par le cadrage initial. Certes, chacun desénoncés mériterait un examen particulier et doitêtre situé dans son contexte : on perçoit bien parexemple que le fait de donner un contenu à labiodiversité, si générique dans les textes, doitbeaucoup à l’enjeu d’en faire un concept maîtrisépour sa propre activité, l’indétermination face àune telle nouveauté étant insupportable ; à l’in-verse, l’agriculture fait partie du paysage familieret pousse moins à l’invention épistémique et pra-tique, sauf pour renvoyer à l’incertitude politiquequi la caractérise de plus en plus. Autrement dit,que l’on se situe sur le plan des formatsinstitutionnels ou sur celui des enjeux cognitifs,l’action collective laisse une empreinte signifi-cative que notre comparaison entre la phase destextes et celle des scènes de la concertation apermis de mettre très clairement en lumière.

Nous avons ensuite interrogé la tension qui tra-verse chacun des dispositifs et qui renvoie autracé des frontières du monde auquel onappartient – en l’occurrence, ceux de l’agricultu-re et de l’environnement - : comment l’ouvrir touten préservant son identité ? Paradoxalement,c’est le monde agricole qui apparaît le plus frileuxen la matière, sans doute parce que sa capacité àreprésenter une "figure du bien commun" est lar-gement mise à mal ; il semble s’ensuivre un replisur soi, tout au moins une crispation identitairedont on pressent toutefois qu’elle n’est pas par-tagée par toutes ses composantes. L’ouverturedont semble faire preuve le monde de l’environ-nement est sans doute tributaire de la nécessitédans laquelle il est, mais aussi del’opportunité qui lui est proposée, d’inscrire sonunivers de sens dans un référentiel beaucoupplus large. Nul doute que ce processus consistantà faire de la conservation de la nature un desprincipes légitimes pour le "bien commun" entraînede nouveaux agencements de pouvoir, parmi les-quels on a vu par exemple la montée en puissancedes propriétaires et des collectivités territoriales,sans oublier les nouveaux agencements affectantla distribution des légitimités au sein même desprotecteurs de la nature. L’action collective neproduit donc pas un monde indifférencié.

L’action collective reste toutefois limitée : l’espacepublic qu’elle rend visible est très fragmenté, et letravail spécifique consistant à le rendre plus intégré,c’est-à-dire à l’échelle de la cité, particulièrementfragile, ainsi qu’on l’a vu avec les opérateursNatura 2000. Pour assurer la robustesse desapprentissages et inscrire ceux-ci dans la duréeet dans des référentiels plus larges, il faut desoutils et des instruments compatibles avec ceuxdes autres "mondes" et, en particulier, intégrables

à celui des institutions. La plupart du temps, lessituations créées par les processus d’apprentis-sage n’ont d’autres moyens disponibles que ceuxdéjà existants, qu’il faut alors ajuster, recycler,aménager ou incorporer comme tels. Sous cetangle, l’action collective comme processus aucœur de l’action publique est nécessairementconfrontée à la question du pouvoir et de sacapacité à exercer une souveraineté au-delà de lasituation d’interaction dont elle est le produit.

CQUIS EN TERME DE TRANSFERT

Avant de faire la synthèse de certains acquis quenous pensons utiles pour concevoir et mettre enœuvre l’action publique environnementale, nousvoudrions préciser certaines limites quant à lanature des connaissances produites et à l’usagequi peut en être fait. Pour nous, les résultats quenous avons produits doivent être considéréscomme des enseignements. Ce sont des élémentsd’analyse et d’interprétation de situations com-plexes qui peuvent aider les acteurs de cessituations à penser leur action, qu’ils soientconcepteurs de politiques publiques ou qu’ilsaient à les mettre en œuvre. Ils trouvent leurcaractère de "généricité" par la validité qu’ils peu-vent acquérir lorsque ces acteurs reconnaissentdans ces enseignements des élémentsd’interprétation qui font sens par rapport à leurpropre expérience.

Nous avons déjà réalisé un transfert de cesenseignements, certes de manière occasionnelletout au long du processus de concertation encours, avec les opérateurs des dispositifs N2000étudiés. Nos questions, nos interprétations ontpermis à ces opérateurs de mieux préciser etcomprendre leur rôle dans ces situations d’inte-raction sociale (ce qui a permis de mener larecherche présentée en partie III) et d’adapterleurs actions (création de scènes, prise en comptedes asymétries sociales, usages de concepts etde connaissances dans des lieux et à desmoments particuliers). Une liste d’acquis, telleque nous le faisons ici, ne saurait faire l’économiede leur contextualisation (retour sur les situationsétudiées et la manière de les analyser) ni de leurproblématisation au regard des expériences parti-culières de chacun.

Ces réserves étant formulées, quels sont cesacquis principaux ? Nous avons organisé laprésentation de ces acquis à trois niveaux :

� la conception des politiques publiques ;

� la mise en œuvre de ces politiques et leur terri-torialisation ;

� l’articulation entre référentiel des politiques etréférentiel de l’action collective.

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puie sur la collecte des textes de mise en œuvreeffectuée pour une part sur les bases de donnéesen ligne et pour les textes les plus anciens et lesmoins publicisés à partir d'archives papier. Lapartie II s'appuie sur un corpus volumineux de1658 textes, soit près de 12 000 pages, qui couvrela période de 1999 à 2006. Nous avons ainsiconstitué dans la partie I un corpus par politiqueet une subdivision dans chacune d'elles. Dans lapartie II, nous avons regroupé les textes liés auxdeux mises en œuvre : sur les sites de Rochefortet du marais poitevin pour Natura 2000 et lesdépartements de Vendée et Charente-Maritimepour les CTE et CAD. Les résultats sont présentésde façon synthétique dans des histogrammesempilés permettant de mettre en évidence lesdifférences entre politique des contributionsrespectives des items choisis. L’ensemble desdonnées sont regroupées en tableaux dans lesannexes du rapport final.

� Notre recherche est constituée de 3 parties

La première partie (Le cadrage de l’actionpublique environnementale par les politiques dela nature et de l’agriculture) porte sur l’ensembledes textes qui composent une politique, de sonénoncé général aux décrets d’application enpassant par les annexes d’inspiration plutôttechnique. Nous cherchons ainsi à évaluer la partrespective des dimensions prescriptive et procé-durale que le législateur entend donner à la poli-tique proposée. Autrement dit, nous voulons saisirles ressources disponibles pour l’action collective,à partir du moment où le cadre normatif est dessinéet les procédures de concertation proposées.

La seconde partie (Les dispositifs d’action col-lective : des situations d’interactions entre cadrageet débordement) est focalisée sur l’action collecti-ve proprement dite, dans sa temporalité commedans les multiples lieux où elle prend la forme deconfrontations entre acteurs que l’on qualifie de"situations d’interaction". Nous cherchons à éva-luer, au-delà des formes organisationnelles etsociales que prend concrètement l’action collective(la question des "formats" et des "équivalencescognitives" abordée dans le rapport intermédiaire),les effets – déplacements, ajustements – qu’en-traîne une telle action par rapport au cadre initial.En un mot, nous tentons de voir si l’actioncollective dispose d’une autonomie propredans la construction de l’espace public.

La troisième partie (Produire un espace public àpartir des dispositifs d’action collective : une acti-vité d’intermédiation spécifique) pose la questionde la trajectoire de cette action collective enterme de durabilité institutionnelle. Evaluer cequi se joue autour d’une action collective enchâsséedans une action publique suppose que l’on traitedes modalités de son institutionnalisation, celle-ciétant comprise comme le processus par lequel

elle pèse (aussi) sur les institutions elles-mêmeset reconfigure en conséquence l’espace public.

Faire une lecture critique de l’action publique auregard de la place prise par l’action collectivedans le mouvement d’inscription, dans l’espacepublic, d’un nouveau type de relation entre l’agri-culture et la conservation de la nature, tel estdonc l’objet du travail présenté. Le choix de mettreen parallèle une politique publique relevant del’un et l’autre des termes de cette relation(CTE/Natura 2000) a fourni le fil directeur d’uneréflexion dont on ne cachera pas qu’elle devradonner lieu à des approfondissements. La tech-nologie de traitement des données est complexeet est loin d’avoir fourni toutes ses potentialités.Nous avons dégagé des tendances et ouvert unchamp de questions que nous traiterons dans lecadre de la valorisation de ce programme. Maiscette option technique nous a permis de mettreen vis-à-vis les textes et les dispositifs d’actioncollective autrement que sous l’angle d’une éva-luation critique de l’application d’une politiquepublique ; de ce point de vue, cette technique aintroduit à un type d’approche que nous estimonsoriginale. Son produit doit cependant être rappro-ché de nos travaux menés sous un angle plusqualitatif – dans le cadre des programmes SLIMet GRENAT - dont les résultats ont enrichi l’inter-prétation proposée et auxquels nous avons faitréférence à l’occasion. Précisément parce queleurs conclusions sont convergentes.

Reprenons les deux problèmes mis à l’agendade notre recherche.

Nous avons tout d’abord interrogé le statut de laconcertation dans un contexte d’énoncé politiqueassociant une démarche tout à la fois prescriptiveet procédurale. La question centrale était desavoir si l’action collective qui en résulte avait uneépaisseur propre qui permette d’y voir un travailpolitique, "travail par lequel des acteurs problé-matisent les pouvoirs qui sont associés aux diffé-rentes entités mobilisées". Il existe de fait unevéritable autonomie dont les différents acteursont usé pour imprimer leur marque sur le cadragequi leur était proposé. C’est ainsi que les tendan-ces à l’enclavement dans le cas de Natura 2000et au désenclavement dans le cas des CTE ontété corrigées par une action collective dont lesformes ont été très diverses, liées d’une part auxnombreux formats dans lesquels elle s’est exer-cée, d’autre part aux processus de débordementdont elle fut l’agent et l’objet tout à la fois. Au-delà de ce travail sur les formats institutionnelspour en faire des ressources pour l’action et enlimiter les contraintes (celle de la fermeturecomme de l’ouverture), l’action collective a étéégalement l’occasion d’un travail épistémiqueque l’on a pu que repérer mais dont on perçoitl’importance. La circulation de certains énoncés,comme biodiversité, agriculture, habitats, prairies,pour s’en tenir à ceux qu’on a évoqués, a un prix :

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assurer la mise en œuvre concrète et leur nécessaireévolution au regard de retours sur expérience.

A l’inverse, dans les CTE/CAD, la mise en œuvrede l’action collective par des formes et organi-sations très instituées, dominées par des asy-métries de pouvoir héritées du passé, ont plutôtgénéré l’enclavement d’une politique au départplus ouverte. Ceci pose la question de la capacitédes organisations à intégrer la nouvelle donneenvironnementale et à adapter leur formes d’orga-nisation et d’intervention en conséquence. Untravail de thèse en cours (Ollivier G.) et articuléavec ce projet de recherche porte plus spécifi-quement sur cette question.

L’articulation entre action collective et poli-tique publique

L’analyse comparée des dispositifs N2000 etCTE/CAD a montré une relative autonomie del’action collective dans le premier cas et un fortencadrement par l’administration dans lesecond. Elle a aussi montré la plus grandecapacité du premier à générer l’espace public etle relatif enclavement du second. Cet encadrementpar l’administration est notamment lié à lavolonté des pouvoirs publics de ne pas êtredébordés sur le plan financier et à pouvoir éva-luer et contrôler l’efficacité du dispositif auregard de critères contenus dans le RDR euro-péen (justification élaborée des compensationsfinancières au regard des manques à gagner ousurcoûts des actions). Ce contrôle ex ante, s’ilpermet d’éviter les débordements, limite lespossibilités de construction de l’espace public.A l’inverse, la forte autonomie des dispositifsN2000 sera soumise à une évaluation ex-post,qui se traduit déjà dans les faits par la révisiondes DOCOB issus des concertations parl’administration de l’environnement. Ceci met enexergue les questions d’évaluation : si les critè-res de celles-ci s’établissent uniquement sur lecontenu du cadre normatif et non aussi sur descritères permettant de qualifier la qualité desprocessus de construction mis en œuvre locale-ment, on risque d’aboutir, comme dans le casdes OLAE, à un constat d’inefficacité écologiquedu dispositif sans en apprécier la dynamique etle potentiel de changement à l’œuvre.

En lien avec ce point, nos résultats mettent enavant la question de l’institutionnalisation desformes de démocratie technique inventéesdans le cadre de N2000 ainsi que des produitsqui en sont issus. L’autonomie du dispositif setraduisant par la création de nouvelles scènesd’interaction et par l’intégration d’enjeux territo-riaux non prévus par le cadre normatif sera-t-ellereconnue par les institutions en place ? Sera-t-elle pérennisée dans ses formes comme dansses modalités de fonctionnement pour assurer laprise en charge effective de l’animation et de lamise en œuvre concrète des plans de gestion ?On peut voir dans l’action des collectivités terri-

toriales et l’inscription dans la Loi sur les AffairesRurales des comités de pilotage comme organede décision et d’animation territoriale un débutde ce processus d’institutionnalisation.

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La conception des politiques publiques

Bien que banal, il est nécessaire de rappeler quele contenu d’une politique (le produit) est lerésultat d’un travail de conception (le processus)qui vient en réponse à des enjeux politiques etqui met en scène des référentiels anciens et desacteurs porteurs de systèmes d’intérêt. Nousavons montré que la politique N2000 a étéconçue principalement par des acteurs dumonde de la conservation de la nature, enréponse à des enjeux internationaux (mise enréseau de la nature) et en s’appuyant surtout surdes savoirs scientifiques. Ces modalités deconstruction sont sans doute à la base du mou-vement de contestation connu en France.L’acceptabilité sociale de la politique, et doncson opérationnalisation, n’a pu être obtenue quepar le déplacement, par l’action collective,d’enjeux stricts de conservation vers unemeilleure prise en compte des préoccupationssociales territorialisées.

Les deux politiques étudiées mêlent desapproches substantielles et procédurales.Cependant, il apparaît assez clairement que lesmodalités et instruments de l’approche procédu-rale semblent faire défaut et qu’il est nécessaired’en préciser les démarches et méthodescomme les critères d’évaluation. Une questionessentielle nous semble aussi devoir porter surla manière d’articuler ces deux démarchesentre elles en vue d’en assurer une meilleuresynergie plutôt que de les juxtaposer au risquede générer des incompréhensions, voire deseffets antagonistes.

Enfin, il nous semble important d’insister sur lanature des savoirs mobilisables et mobiliséspour construire le contenu des politiques. Outreque la façon de mobiliser ces savoirs dépenddes enjeux soutenus par les politiques (la miseen réseau de la nature conduit à s’appuyer surdes savoirs taxonomiques plutôt que fonction-nalistes, avec les instruments liés tels que lesinventaires biologiques), leur existence ou leurdisponibilité conditionne les façons de construirele contenu. Ainsi, dans le domaine de la conser-vation de la nature, la politique contient peu depropositions quant aux techniques pour gérerles sites. Alors que la politique CTE/CAD estdominée par ces savoirs techniques, notammentdans les actions qu’elle propose et qui résultentde propositions émanant du monde de l’expertisecomme du monde professionnel. Ceci met aussien exergue la difficulté du monde de l’environ-nement de mettre en circulation les savoirs issusdes expériences de gestion dont il est porteur.

La construction d’un espace public

Le point le plus important nous semble être celuidu rôle des opérateurs et co-ordinateurs dedispositifs d’action collective. Ces acteurs,centraux dans l’accompagnement des proces-

sus d’interaction sociale et dans la productiondes résultats attendus de ces dispositifs, n’ontque peu de ressources à leur disposition sur les-quelles ils pourraient s’appuyer. Ils sont souventen situation de "fusible" entre la politique et ledispositif, devant s’engager en personne sans"parapluie" pour faire tenir ensemble les interac-tions qu’ils organisent. Un travail importantserait à conduire pour créer les compétences etsavoir-faire nécessaires, pour produire des outilset méthode d’animation adaptés et aussi pourdonner un statut officiel à ce type d’activité.

Paradoxalement, c’est l’absence de modalités etd’instruments des procédures délibératives quinous semble avoir été l’occasion pour les opéra-teurs, dans le cas de N2000, d’inventer desmodalités d’action et des registres d’activitésqui ont permis à l’action collective de construirel’espace public. Ils ont créé des scènes pourprendre en compte des enjeux territoriaux noncontenus dans le cadre normatif ; ils ont gérédes interactions entre une pluralité d’acteurs enveillant à obtenir une forte "équitabilité" de lareprésentation sociale ; ils ont géré des asymé-tries fortes entre acteurs par des méthodesd’enrôlement etc. Bref, ils ont adopté desdémarches flexibles, adaptatives, constammentarticulées avec la problématisation des enjeux etdes actions par les acteurs. C’est sans doutecette démarche de travail et l’intégration deces enjeux territoriaux qui a permis l’émergenced’un espace public alors que les prescriptionscontenues dans la politique ne s’y prêtaient pasa priori.

Dans ce registre, le rôle des objets médiateurs(tels que prairie, cartes) apparaît prometteur.Ces objets, autour desquels se construisent lesdébats et s’élaborent les actions, ont une plusgrande capacité que d’autres à obtenir l’adhésiondes acteurs à la politique, à explorer des contro-verses et à construire des accords, bref à lier lesenjeux de la politique aux préoccupations socialesdes acteurs des territoires et à participer à laconstruction de l’espace public.

Dans ce registre aussi, il faut citer la "puissancemédiatrice" du territoire pour concevoir le chan-gement. Il est source d’identité, de savoir, deconstruction de liens entre acteurs – activités –objets techniques et naturels, d’un ensembled’éléments concrets et identificatoires qui mobi-lisent et permettent une traduction opérationnelleet contextualisée d’enjeux plus globaux. Onretrouve ainsi, avec N2000, une dynamiqueengagée au travers des OLAE, dont la plupartdes acteurs disaient regretter la disparition. Ledéficit de "territoire concret" comme based’élaboration des CTE/CAD est une des raisonsde leur faible capacité à générer l’espace public.On peut, dans ce registre, insister sur la néces-sité d’inventer des formes d’animation territoria-le qui aille au-delà de la conception des produits(cahiers des charges, plans de gestion) pour en

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Biodiversité et agricultureEnjeux et perspectives pour la politique agricole commune

(PAC) de l’Union européenne

Responsable scientifique :

Sandrine MALJEAN-DUBOISCNRS, Centre d’études etrecherches internationales

et communautaires(CERIC UMR 6201)38 av. de l’Europe

13090 [email protected]

Participants au projet :

CEFE (Montpellier)Jacques Lepart,

Pascal Marty

CERIC, Université PaulCézanne Aix-Marseille IIIMarie-Pierre Lanfranchi,

Nathalie Rubio,Nathalie Thome,

Eve Truilhe-Marengo

Faculté Université Saint-Louis(Bruxelles)

Charles-Hubert Born,Nicolas De Sadeleer

INRAMarc Benoit,

François Bonnieux,Isabelle Doussan

Institut d’AménagementRégional, Univeristé PaulCézanne Aix-Marseille III

Jérôme Dubois

LAMETA (Montpellier)Tristan Le Cotty,

Sandra Said,Sophie Thoyer

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PRINCIPALES PUBLICATIONS

� Articles scientifiques publiés, sous presse,soumis pour publication et en préparation

Billaud J.-P., 2003 - Local Democracy Put to the Testof Negotiated Development, in Kasimis, C., Stathakis,G. (Eds). The developement of countryside in southernEurope. Ashgate, Hampshire, pp. 139-156.Billaud JP., Steyaert P., 2004. Agriculture et conserva-tion de la nature : raisons et conditions d’une néces-saire co-construction entre acteurs. Fourrages, 179,393 – 406.Steyaert P., 2006 – Dispositif d’action collective : unconcept pour comprendre la gestion concertée del’eau à l’échelle de bassins versants. In Ph. Mérot (éd.)Qualité de l’eau en milieu rural. Savoirs et pratiquesdans les bassins versants. Paris, INRA (à paraître)Steyaert, P., 2006. Vers la constitution de dispositifsterritoriaux d’apprentissage collectif. Acad. Agric. deFrance, séance du 11 janvier 2006, 10p. (accessible àhttp://www.academie-agriculture.fr)Steyaert P. Using intermediary concepts as tools formeaning in environmental management. A case studyin the French coastal wetlands. In Mélard F. (Ed.) Lesobjets intermédaires dans l’action environnementale.(en préparation)

� Participation à des colloques nationauxou internationaux (communication orale etposter)

Steyaert P., 2004. Concertation autour d’objets deNature : la facilitation du processus de construction deplans de gestion. XIIIème Congrès des Conservatoiresd’Espaces Naturels : Ambleteuse, 21 - 24 Octobre2004Billaud JP., Steyaert P., 2006. La construction dessavoirs et la gestion des zones humides. A propos desmarais de l’ouest. Coll. du CEMAGREF " Eau et terri-toires. Quelles priorités pour la recherche ? " Lyon, 9-10 janvier 2006.

� Rapports de fin d'étude (mémoires demaîtrise, de DEA, thèses...)

Bollendorf E., 2003. Natura 2000 : compromis entreconservation de la nature et exigences socio-écono-miques ? Construction de la carte du site " Marais deRochefort ". Mem. de DEA Environnement, Temps,Espace et Société. 82 p. + annOllivier G. La recomposition du monde agricole sousl’effet des politiques agri-environnementales (en prépa-ration)

� Rapports de recherche

Steyaert P., 2004. Natura 2000: from consultation toconcerted action for natural resource management inAtlantic coastal wetlands, SLIM (Social Learning forIntegrated Management and Sustainable Use of Waterat Catchment scale) Case Study Monograph 7 (acces-sed at http://slim.open.ac.uk).

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Le principe selon lequel les agriculteurs doiventrespecter les exigences de la protection de l’en-vironnement pour bénéficier du soutien des mar-chés avait été incorporé dans la réforme del’Agenda 2000. Avec la réforme de la PAC de2003 la conditionnalité est devenue obligatoire.Ces réformes ont introduit l’exigence pour lesÉtats membres d’adopter les mesures environ-nementales qu’ils considèrent comme appro-priées eu égard à la situation des surfaces agri-coles utilisées ou de la production concernée.Cette exigence a été intégrée dans le "règle-ment horizontal" (CE) n° 1259/1999 qui établitles règles communes pour tous les paiementsaccordés directement aux agriculteurs.

Les États membres avaient trois possibilitéspour remplir cette obligation : accorder un sou-tien aux engagements agro-environnementaux,fixer des exigences environnementales générales(fondées sur la législation environnementale) etfixer des normes environnementales spécifiques.Lorsque les agriculteurs ne respectent pas lesexigences environnementales, des sanctionsappropriées doivent être appliquées, qui peuventconsister dans la réduction, voire la suppressiondes aides directes.

Telle que décidée, la mise en œuvre de la condi-tionnalité démontre la très forte imbrication entreles politiques nationales et communautaires,fondée sur des allers et retours incessants. Danscet exemple, la politique communautaire serévèle très dépendante des politiques et desinitiatives nationales ; elle ne constitue en rienune politique supranationale. Il faut plutôt laconsidérer comme fournissant aux États membresdes instruments d’intervention "avec un moded’emploi à respecter". Chaque État peut doncjouer de cette liberté selon son propre modèleagricole tout en bénéficiant des financementseuropéens. Selon H. Delorme, c’est donc unecertaine renationalisation de la PAC qui estaujourd’hui visible. "La coordination qu’effectuela Pac tend de plus en plus à se limiter à la sur-veillance des budgets et des gestions nationalesdes aides à l’agriculture". Tout comme lesmécanismes de découplage des aides, la miseen œuvre de la conditionnalité laisse donc unetrès grande marge de manœuvre aux États.

En application des réformes communautaires,en 2005, tous les agriculteurs recevant des paie-ments directs seront soumis à la conditionnalité(règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil etrèglement (CE) n° 796/2004 de la Commission).La conditionnalité vise le respect de dix-neuftextes communautaires, dans les domaines del’environnement, de la santé publique, animaleet végétale et du bien-être des animaux. Lesagriculteurs seront sanctionnés en cas de non-respect (réduction partielle ou totale de l’aidedirecte). Les bénéficiaires des paiements directsseront également tenus de conserver les terres

dans des conditions agronomiques et environ-nementales satisfaisantes. Ces conditions serontdéfinies par les États membres et devront com-prendre des normes en matière de protectiondes sols, de maintien de leur structure et de leurteneur en matières organiques ainsi qu’enmatière de préservation des habitats et des pay-sages, y compris la protection des pâturagespermanents. En outre, les États membres doiventégalement veiller à ce qu’il n’y ait pas de dimi-nution importante de leur superficie totale depâturages permanents, si nécessaire en interdisantleur conversion en terres arables.

Ainsi, en matière de conditionnalité, les exigencesrelèvent de trois logiques :

� certaines exigences relèvent spécifiquementdu droit communautaire. Ces nouvelles exigencessont issues de la transposition en droit françaisde 19 directives ou règlements européens danstrois domaines : 5 textes portent sur l’environne-ment, 4 sur l’identification des animaux, 4 sur lasanté publique et la sécurité alimentaire, 3 sur lasanté animale et 3 sur le bien-être animal. Leurprise en compte est progressive puisque 9textes ont été retenus en 2005, 7 en 2006 et 3en 2007. Mis à part les directives "habitats" et"oiseaux", la plupart de ces textes ne concernentpas directement la protection de la biodiversité.Il s’agit bien plutôt de textes visant à réglementerles pollutions et nuisances ou la sécurité alimen-taire. Pour autant, leur effet sur la biodiversité nedoit pas être sous-estimé ;

� d’autres exigences sont définies par chaqueÉtat membre, au nom du principe de subsidiarité,il s’agit des Bonnes conditions agricoles et envi-ronnementales (BCAE). Elles visent à maintenirles terres dans de bonnes conditions agrono-miques et à définir un état d’entretien minimal.Elles s’appliquent dès 2005 ;

� enfin, certaines visent à maintenir une superfi-cie minimale de prairies permanentes au sein dela SAU.

Par rapport aux mesures contractuelles résultantdes MAE, le changement de logique doit êtresouligné. Alors que ces mesures ne concernaientque de faibles sommes, issues du second pilierde la PAC (le développement rural), et distribuéessur la base de l’engagement volontaire de chacun,la conditionnalité, en jouant sur le premier pilier(les marchés), et de façon automatique, changetotalement d’échelle en touchant un très grandnombre d’exploitations. Mis à part les BCAE, lamise en œuvre de la conditionnalité s’appuie surdes textes déjà anciens, avec comme ambitionde les faire appliquer. En reprenant des textesréglementaires pour la plupart préexistants, laconditionnalité donne un moyen supplémentaireà l’administration de sanctionner – financièrement –le non-respect des textes.

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P� Action publique, aspect de la biodiversitéet type d’agriculture concernés

Politique agricole commune de l’Union euro-péenne, biodiversité sauvage, tous typesd’agriculture.

� Objectifs

L’objectif de cette recherche pluridisciplinaireétait de resituer la prise en compte de labiodiversité, naturelle et agricole, dans unepolitique agricole commune en pleinbouleversement, tant sur le plan européenqu’international.

Trois niveaux d’analyses ont été distingués etétudiés par les différents chercheurs, chacunavec leur regard disciplinaire.

Le premier concerne la meilleure prise encompte de la biodiversité dans une activitéagricole de plus en plus mondialisée. Le droitinternational constitue donc un cadre perti-nent. Notamment, les réformes successives dela PAC tiennent aujourd’hui au moins autant del’évolution des accords commerciaux dans lecadre de l’OMC que d’une prise de consciencesubite des enjeux environnementaux.

Le deuxième s’intéresse à l’évolution interned’une politique agricole européenne en pleinemutation qui structure fortement les comporte-ments des États.

Le troisième analyse la mise en œuvre nationaled’injonctions européennes liées à la prise encompte de l’environnement qui laissent unegrande part d’initiative aux niveaux nationauxet locaux.

Fondée sur cette acception large de labiodiversité, c’est cette conjonction de troisniveaux d’analyse, à partir d’approchespluridisciplinaires, qui fait l’originalité de cetterecherche sur des pratiques agricoles en devenirface au défi de conservation de la biodiversité.

� Mots clés

Biodiversité, conditionnalité, contractualisation,agriculture, politique agricole commune, Unioneuropéenne, mesures agro-environnementales,contrats territoriaux d’exploitation, droit, sciencepolitique, commerce international, OMC, Natura2000.

RESENTATION DES TRAVAUX DE

RECHERCHE

Des liens étroits lient, pour le meilleur et pourle pire, la biodiversité et les activités agricoles.Depuis la fin de la seconde guerre mondiale,l’intensification de l’agriculture, et corollairementl’abandon des terres les plus marginales, ontcontribué à précipiter le déclin ou la disparitionde nombreux habitats semi-naturels et espèceset à uniformiser ou banaliser des paysages àhaute valeur biologique et culturelle. La biodi-versité en milieu agricole s’en est considéra-blement appauvrie à tous ses niveaux (géné-tique, espèces, écosystèmes, paysages).

Occupant à l’heure actuelle près de la moitiédu territoire de la Communauté, les paysagesagricoles européens doivent leur physionomieactuelle en grande partie à une politique déli-bérée de soutien à la production en agriculture.Mise en place au début des années soixanteafin d’assurer l’autosuffisance alimentaire del’Europe des Six, la Politique agricole commune(PAC) constitue à n’en pas douter l’un desprincipaux facteurs de l’érosion de la biodi-versité européenne. Quoiqu’ils n’expliquentpas à eux seuls ce phénomène, les effets dusoutien communautaire à la production decertains produits clés (céréales, lait, bétail)et des incitants financiers à la restructuration– principaux volets de la PAC – se sont révélésparticulièrement dommageables pour labiodiversité en milieu agricole, dont lapréservation dépend, on le sait, en grandepartie du maintien in situ de pratiquesagricoles extensives.

À partir du milieu de la décennie 80, les réfor-mes de la PAC ont progressivement instituédes mesures incitatives et contractuelles envue d’une meilleure prise en compte desenjeux environnementaux (les mesuresagro-environnementales ou MAE). Mais cesmesures, aujourd’hui bien étudiées, se sontrévélées limitées dans leurs effets. Ce constata conduit à la révision radicale, à mi-parcoursde la nouvelle PAC, en juin 2003, afin notam-ment de "promouvoir une agriculture durableet orientée vers le marché", de rendreobligatoire la conditionnalité des aides et de"renforcer le développement rural". Les nou-velles baisses des prix décidées à cetteoccasion et le découplage des aides risquentcependant d’affaiblir l’effet bénéfique desmesures prises en faveur de l’environnement.

C’est ainsi que notre recherche visait à étudier,à partir d’exemples concrets, la mise en œuvrede procédures nouvelles, aux effets incertains.

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ter ses travaux à la fois à la communauté deschercheurs et aux administrations nationales etlocales du MEDD et du MAP.

Par ailleurs, Isabelle Doussan a été sollicitée parl’INRA pour participer à un travail de réflexionsur la conditionnalité des aides, dans le cadred’une expertise demandée par le Ministère del’agriculture.

Actions de formation

Une action d’animation a été réalisée à destina-tion des équipes financées par le programmeDIVA. Deux séances ont été organisées ( DUBOISJ., MALJEAN-DUBOIS S., LANFRANCHI M.-P.) .Une première journée a été organisée le 12 mars2004 sur un thème introductif : Le droit européende la conservation de la nature : les directives" oiseaux " et " habitats " et les activités agricoles.Le deuxième séminaire DIVA, organisé à Chizé les17, 18 et 19 mai 2004, a fourni l’occasion pour undeuxième temps d’animation, portant surActivités agricoles et outils contractuels de pro-tection de la biodiversité (une demi-journée).

PRINCIPALES PUBLICATIONS

� Publication d’un ouvrage collectif de resti-tution

En termes de valorisation, outre le séminaire du 2 juin2006, ouvert au public, l’équipe projette la publicationd’un ouvrage collectif, réunissant les contributions des dif-férents auteurs, qui devrait paraître début 2007 (Bruylant,Bruxelles).

� Ouvrages

I. Doussan (dir.), La multifonctionnalité agricole, objet deconfrontation entre le droit de l’environnement et le droitde la concurrence, à paraîtreJ. Dubois, S. Maljean Dubois (dir.) Natura 2000 : de l’in-jonction européenne aux négociations locales (co-dir.), LaDocumentation française, coll. Monde européen et inter-national, 2005, 361 p. Avec notamment les contributionsde Jérôme Dubois, M.-P. Lanfranchi , M. Lanord, , S.Maljean-Dubois, N. Thomé, E. Truilhé, J. Lepart, P. Marty

� Articles scientifiques publiés, sous presse,soumis pour publication et en préparation

C.-H. Born, " Chapitre II. La politique agricole commune ",in N. de Sadeleer, C.-H. Born, Droit international et com-munautaire de la biodiversité, Dalloz, 2004, pp. 623-657.I. Doussan " Brèves réflexions sur la " conditionnalité "des aides agricoles et les " bonnes conditions agricoles etenvironnementales ", Droit de l’environnement, n° 126,mars 2005, p. 46.I. Doussan " Commerce international des produits agrico-les et environnement : de la " fonction écologique " de l’a-griculture à la qualité des produits ", Droit de l’environne-ment, n° 124, décembre 2004, p. 241.I. Doussan " L’environnement et la réforme de la PAC : dela multifonctionnalité agricole à la schizophrénie, Droit del’environnement, n° 118, mai 2004, p. 93.S. Maljean-Dubois, " La biodiversité dans les négociationsinternationales : de la Convention de Rio sur la diversitébiologique au Protocole de Carthagène sur la biosécurité", in Les biodiversités. Objets, théories, pratiques, PascalMarty, Franck-Dominique Vivien, Jacques Lepart, RaphaëlLarrère (dir.), CNRS éditions, 2005, pp. 211-226.S. Maljean-Dubois, " Les dimensions internationales de lapolitique communautaire de protection de l’environnement", in mélanges en l’honneur de Jacques Bourrinet,L’intégration européenne au XXIème siècle, LaDocumentation française, Paris, 2004, pp. 279-309.E. Thruilé, " Contractualisation, réglementation : quellearticulation entre les outils de gestion des sites Natura2000 ? ", RJE, 2005, 2, pp. 131-146.

� Thèses et HDR

J. Dubois, HDR présentée le 28 juin 2005, Les territoirescontre l’aménagement. Essai sur la multiplication desdispositifs territoriauxJ.-N. Le Gwill, thèse en cours M.-P. Lanfranchi (dir.),Labellisation et agriculture au regard du droit de l’OMC,dépôt 2005C. Randier, thèse en cours S. Maljean-Dubois (dir.),L’application de la directive européenne Natura 2000 auxzones de montagne, financement Conseil régional PACA(soutenance prévue fin 2006)

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Enfin, depuis près de 15 années, la PAC a aussiévolué pour se conformer aux accords sur lecommerce international, négociés au sein duGATT dans le cadre de l’Uruguay Round, puis,depuis 1995, au sein de l’Organisation Mondialedu Commerce (OMC). Alors qu’une grande partiedes interventions publiques sert désormaisavant tout à soutenir le revenu des agriculteurs,la nécessité de découpler les aides de la pro-duction, afin de minimiser leurs effets de distorsionde concurrence sur les marchés mondiaux, afavorisé la croissance des budgets destinés auxpaiements rémunérant les agriculteurs pour leurcontribution à l’environnement et à l’entretien del’espace. Cette tendance est aussi renforcée parle constat que l’expansion de l’activité agricole ades effets contradictoires sur la qualité de l’envi-ronnement et sur l’aménagement du territoire, àla fois positifs lorsque l’agriculture contribue àentretenir des aménités paysagères et à fournirdes services écologiques (valeur esthétique despaysages, usages récréatifs de certains espacesentretenus, protection de certaines espècesvégétales ou faunistiques, lutte contre les inon-dations), et négatifs lorsque les pratiques inten-sives participent à la pollution et à la surexploi-tation des ressources (pollution de l’eau, érosiondes sols, appauvrissement de la biodiversitéetc.).

Aujourd’hui, l’avenir de ces soutiens est endébat. En effet, la pression de l’OMC se main-tient. Le récent accord de la Conférence minis-térielle qui s’est tenue à Hong-Kong en décemb-re 2005 entérine l’engagement des paysdéveloppés à éliminer les soutiens qui ont deseffets de distorsion sur les marchés mondiaux.Cet accord devrait donc accélérer le découplagedes aides européennes. Le maintien de l’envi-ronnement étant un attribut légitime de la multi-fonctionnalité de l’environnement, on peut espérerque les budgets dédiés à l’agro-environnementaugmentent. Cependant, étant donné les dis-sensions grandissantes au sein de l’UnionEuropéenne sur les questions budgétaires, iln’est pas improbable que les ressources de laPAC diminuent après 2013, date à laquelle lebudget agricole sera renégociable. Les finance-ments dédiés à l’agro-environnement et audéveloppement rural, moins sensibles politique-ment que les aides aux cultures, risquent d’êtreles premiers à subir des restrictions. Dans cecontexte budgétaire difficile, et face à unedemande sociale croissante pour une améliora-tion de la qualité environnementale des milieuxruraux, il est certain qu’une attention croissantesera portée à l’efficacité des interventionsagro-environnementales, aussi bien en termesde gain environnemental qu’en termes de coût.Une question importante qui préoccupe doncdéjà les décideurs est celle des critères et desprocédures d’allocation de ces aides : commentidentifier les priorités environnementales,comment définir les pratiques qui devraient être

subventionnées, comment calculer le montantdes subventions à accorder et comment s’assurerque les programmes agro-environnementauxatteignent leurs objectifs.De l’ensemble des travaux, il ressort que laprise en compte de la contrainte environne-mentale dans l’activité agricole relève de troislogiques bien distinctes. La première dépendde la sensibilisation du consommateur final,au moyen d’éco-labels reconnus mettantl’accent sur la qualité de production du produit.La seconde s’appuie sur des procédurescontractuelles entre les producteurs et lespouvoirs publics dans le but de favoriser desmodes de culture davantage respectueux del’environnement. La dernière, aujourd’huirenforcée par l’introduction de la conditionnalitédes droits à paiement unique (DPU), est denature réglementaire. La superposition d’outilsdistincts pourrait a priori apparaître séduisantevu l’importance des enjeux agricoles.Pourtant, la plupart des auteurs soulignent aucontraire la non-coordination entre ces troislogiques, qui se croisent sans complémentaritéévidente. Force est donc de constater uneabsence de visibilité des objectifs et desmoyens qui nuit à un changement pérennedes pratiques et des modes de consommation.C’est aujourd’hui l’éclatement des initiativesqui semble prédominer, tant dans les logiquesd’actions que dans les niveauxlégitimes de décision (OMC, PAC, initiativesnationales). Tant au niveau international qu’auniveau européen le foisonnement des initiativeset des négociations contribue à rendre l’avenirde la contrainte environnementale incertain.Une telle situation tend aussi à favoriser, surles territoires, les comportements attentistes.

CQUIS EN TERME DE TRANSFERT

Les changements induits par les évolutions de laPAC ne sont pas tous connus. De même, noussommes aujourd’hui encore dans une phasetransitoire. Aucune recherche ne saurait prévoirles accords à venir au sein de l’OMC, encoremoins la façon dont le juge tranchera lesconflits. Il en va de même à l’échelle commu-nautaire, chacun s’accorde à dire que le statuquo actuel lié à la mise en œuvre de la PAC seraremis en cause dès 2013. Néanmoins, les différentescontributions ici rassemblées cherchent à faireun état des lieux le plus précis et le plusexhaustif possible des négociations en cours etdes questions en débat. Dans une périodecaractérisée par une grande incertitude quant àl’avenir, cette recherche s’attache à montrer lesapports et les faiblesses des différents dispositifsaujourd’hui expérimentés.

Le 2 juin 2006, l’équipe a organisé un séminairede restitution à Aix-en-Provence afin de présen-