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PREFECTURE DE LA REGION DILE-DE-FRANCE
REGION ILE-DE-FRANCE
OBSERVATOIRE FRANAIS DES DROGUES ET DES TOXICOMANIES
Observatoire rgional de sant dIle-de-France
tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003 Tendances rcentes et nouvelles drogues (TREND)
Juin 2004
La coordination du dispositif TREND Paris et la rdaction du rapport ont t ralises par
Sandrine HALFEN et Isabelle GRMY Observatoire rgional de sant dIle-de-France
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Nous remercions toutes les personnes qui ont particip au dispositif
TREND Paris, notamment les responsables de lobservation de terrain,
Jimmy Kempfer (espace festif) et Guillaume Pfaus (espace urbain), ainsi
que les quipes et les usagers des structures de premire ligne (Aides-
Audvih, Ego et Nova Dona) pour leur prcieuse participation au
dispositif TREND.
Nous remercions galement, pour leur collaboration lors de la mise
jour du recensement des structures de prise en charge des usagers de
drogues et des automates (distributeurs/rcuprateurs de seringues) en
Ile-de-France, Madame Moyse et Madame Denajar de la DASS de Paris,
Monsieur Houette de la DASES, Monsieur Vernet de la DDASS de Seine-
et-Marne, Monsieur Goux et Monsieur Patrick Bouti de la DDASS des
Yvelines, M. Douceron de la DDASS de lessonne, Madame Boucheny de
la DDASS des Hauts-de-Seine, Madame Borgalli-Lasne de la DDASS de
Seine-Saint-Denis, Madame Falip et Madame Zerbit de la DDASS du Val
de Marne, Monsieur La Ruche de la DDASS du Val dOise.
Nous remercions enfin lObservatoire franais des drogues et des
toxicomanies dont le financement a permis la ralisation de cette tude
ainsi que lquipe TREND de lObservatoire franais des drogues et des
toxicomanies, Pierre-Yves Bello, Abdalla Toufik, Michel Gandilhon,
Isabelle Giraudon, Nicolas Bonnet, pour son soutien mthodologique et
logistique.
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Sommaire
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Sommaire
Introduction p. 5
Mthode p. 11
Points de repres sur la toxicomanie Paris et en Ile-de-France p. 25
Les usagers et les contextes de consommation p. 35
Caractristiques des usagers p. 37
Modalits dusage p. 53
tat de sant des usagers p. 61
Organisation des trafics p. 67
Les produits consomms p. 73
Lusage de cannabis et de ses drivs p. 75
Lusage des opiacs (hrone, Subutex, mthadone, sulfate de morphine) p. 81
Lusage des produits stimulants (cocane, crack, ecstasy, amphtamines) p. 99
Lusage des produits hallucinognes (LSD, ktamine, GHB, champignons) p. 119
Lusage des mdicaments psychotropes (Rohypnol, Rivotril, Artane) p. 129
Synthse des observations p. 135
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Introduction
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Introduction
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Introduction
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LObservatoire franais des drogues et des toxicomanies (OFDT) a mis en place depuis 1999 un
dispositif national intitul TREND, Tendances rcentes et nouvelles drogues, visant reprer
les nouvelles tendances de consommation de produits psychoactifs. Ce dispositif repose sur un
rseau de douze sites dobservation en France mtropolitaine et dans les dpartements doutre-
mer 1. La coordination de chaque site dobservation est ralise au niveau local et lOFDT
assure la coordination du rseau des sites.
Ce dispositif repose, au niveau de chaque site, sur le recoupement des informations obtenues
selon quatre types de dmarches : une observation ethnographique en milieu festif et en milieu
urbain, la ralisation de groupes focaux associant dune part des professionnels des champs
sanitaires et dautre part des acteurs de la police et de la justice, la passation de questionnaires
quantitatifs auprs dusagers frquentant des structures de premire ligne et de questionnaires
qualitatifs auprs dquipes en charge des structures de premire ligne et dassociations de
rduction des risques intervenant dans les vnements festifs techno.
L'Observatoire rgional de sant d'Ile-de-France assure depuis 2002 la coordination de TREND
pour le site francilien 2 mais ce site a t intgr au dispositif TREND ds 1999.
Modifications du dispositif TREND Paris en 2003
Quelques limites, observes en 2002 pour Paris et la Seine-Saint-Denis, ont conduit
lObservatoire rgional de sant dIle-de-France, en accord avec lOFDT, modifier quelque
peu le dispositif TREND pour lanne 2003.
1 En France mtropolitaine, Bordeaux, Dijon, Lille, Lyon, Marseille, Metz, Paris, Rennes et Toulouse et dans les dpartements doutre-mer, la Guyane, la Martinique et la Runion. 2 S. Halfen, I. Grmy, Phnomnes mergents lis aux drogues Paris et en Seine-Saint-Denis en 2002, Tendances rcentes et nouvelles drogues (TREND), ORS Ile-de-France, septembre 2003 et OFDT, Observations locales des drogues, Observations sur les usagers de drogues en 2002 dans douze sites en
France, rapports locaux du rseau des sites TREND, OFDT, mai 2003, P.Y. Bello, A. Toufik, M. Gandilhon, I. Giraudon, N. Bonnet, Phnomnes mergents lis aux drogues en 2002, quatrime rapport national du dispositif TREND, OFDT, juin 2003. Tous les documents (rapports de site et rapports nationaux) sont disponibles sur le site de lOFDT : www.ofdt.fr.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Ces changements ont pour objectif damliorer la fiabilit des analyses, en favorisant le
recoupement des informations recueillies. En effet, une information portant sur un phnomne
mergent sera considre comme tant dautant plus fiable quelle sera rapporte par diffrentes
personnes et/ou en diffrents endroits.
Tout dabord, lensemble du dispositif a t recentr sur le seul dpartement de Paris, afin, avec
des moyens comparables 2002, de multiplier les sites dobservation dans cette ville et rduire
au maximum la possibilit quun phnomne puisse totalement chapper lobservation issue
du dispositif TREND. Le dispositif TREND 2003 a donc exclusivement port sur Paris.
En milieu festif, lobservation a t largie en 2003 dautres courants musicaux que la techno,
tels que le ragga, le reggae, le drum'n'bass, le hip hop, le hardcore, etc. Le dispositif a t plus
gnralement ouvert dautres vnements (clubs, soires, raves payantes) que les seuls
vnements festifs underground du type free-party et tecknival.
LOFDT a souhait faire voluer en 2003 le dispositif national dobservation ethnographique
afin de le rendre plus efficace. (cf. partie mthodologie).
Les espaces tudis Paris en 2003
La collecte des donnes pour le site TREND Paris concerne lensemble du territoire de la
ville. Nanmoins, certains espaces ont t plus particulirement concerns par lobservation en
milieu urbain et ont fait lobjet dune exploration approfondie durant lanne 2003. Ces espaces
ont t choisis pour leur diversit au regard des usages et des usagers frquentant ces lieux.
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Introduction
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Ainsi, trois zones gographiques ont fait lobjet dune observation approfondie :
le nord-est de Paris : essentiellement le quartier de la Goutte dOr, Chteau Rouge, le
boulevard de la Chapelle, le carrefour Marcadet-Poissonniers, la Porte de la Villette, la
Porte de Clichy
le centre de Paris : essentiellement le quartier des Halles, de Rambuteau, le boulevard
Sbastopol, le quartier de Strasbourg Saint-Denis
le sud de Paris : essentiellement les 14me et 15me arrondissements.
En milieu festif, les observations ont port la fois sur des vnements alternatifs (free parties,
sound systems), mais aussi des soires dans certains clubs ou discothques (Flche dOr,
Batofar, Gibus, Amnsia, Rex, etc.) ou dans des bars thmes ou branchs techno du 11e
arrondissement de Paris.
Outre ces vnements, les informations sur le milieu festif ont t recueillies dans un festival
hip hop Alliance Urbaine Bagneux, la manifestation de lAppel du 18 joints ainsi
qu deux manifestations contre les lois de Scurit Quotidienne, la Fte de la musique (21
juin 2003 sur les quais de la Seine), la Techno Parade Paris, un teknival, une fte techno
dans un chteau, la fte techno Attentat sonore Cergy Pontoise (95) ainsi qu diffrentes
ftes (Gaia Concept Password is love , Trance, Hommage Willyman , Electronicaes,
etc.).
Le rapport TREND 2003 relatif Paris
Le rapport relatif lobservation TREND Paris en 2003, qui alimentera le rapport national
ralis par lOFDT paratre prochainement, se compose de trois chapitres.
Le premier a pour principal objectif de fournir quelques donnes quantitatives de cadrage sur la
toxicomanie Paris, et plus gnralement en Ile-de-France. Ces donnes sont issues de
diffrentes sources disponibles dinformations (donnes de ventes de produits de substitution
aux opiacs, de matriel strile dinjection, dinfractions la lgislation sur les stupfiants, de
dcs par surdose), complts par un recensement des structures de prise en charge des usagers
de drogues et des automates (distributeurs/rcuprateurs de seringues) en Ile-de-France.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Les deux chapitres suivants sattachent dcrire spcifiquement les observations ralises en
2003 dans le cadre du dispositif TREND Paris.
Le premier de ces chapitres prsente une approche transversale des observations, et non une
approche par produit, et porte sur les caractristiques des usagers et leur tat de sant ainsi que
sur les contextes de consommation et lorganisation des trafics. Il sagit dans ce chapitre de
rendre compte des observations qui ne sont pas spcifiques un produit.
Le second de ces chapitres aborde, en revanche, les usages avec une approche par produit : les
opiacs (hrone, Subutex, mthadone, Sknan/Moscontin, Nocodion, rachacha,
opium), les produits stimulants (cocane, crack/free base, ecstasy, amphtamines), le cannabis,
les produits hallucinognes (LSD, ktamine, GHB, protoxyde dazote, champignons
hallucinognes, salvia divinorum) et les mdicaments psychotropes.
Pour chacun de ces produits, une premire partie porte plus spcifiquement sur les usagers
(leurs caractristiques et leurs modalits dusages) et une seconde plus strictement sur le produit
(sa disponibilit, son prix, le trafic, la perception du produit, les problmes sanitaires associs
lusage du produit).
Dans les deux derniers chapitres, laccent est plus particulirement mis sur les phnomnes
mergents lis aux usages et aux usagers : nouveaux groupes de consommateurs ou
modifications des caractristiques des usagers, changements dans les procdures de prparation,
dans les modes dadministration et dans les associations de produits, modifications du trafic et
de sa visibilit, apparition ou disparition dun problme de sant en relation avec la prise dun
produit, etc.
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Mthode
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Mthode
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Mthode
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Prsentation du dispositif TREND 3
Depuis sa mise en place en 1999, le dispositif TREND sappuie notamment sur un rseau de
sites situs en France mtropolitaine et dans trois dpartements doutre-mer. Les 12 sites
appartenant au rseau sont les suivants : Bordeaux, Dijon, lIle-de-France (Paris, Seine-Saint-
Denis), Lille, Lyon, Marseille, Metz, Paris, Rennes, Toulouse pour la France mtropolitaine ; la
Guyane, la Runion et la Martinique pour les dpartements doutre-mer. Lensemble de ces sites
constituent un des lments du systme dinformation sur les phnomnes mergents lis
lusage de drogues du dispositif TREND.
La prsente introduction vise fournir au lecteur les lments de comprhension ncessaires
une bonne lecture de ce [rapport]. La premire partie traitera des objectifs du dispositif TREND
dans son ensemble et des moyens quil utilise ou quil sest forg pour les raliser ; la seconde
sattardera plus spcifiquement sur le rseau des sites en dcrivant son fonctionnement et les
outils dont il dispose pour llaboration [].
Objectifs
Lobjectif du dispositif TREND est de fournir, en complment des dispositifs existants, des
lments de connaissance sur les phnomnes mergents lis aux usages de drogues. Ces
lments doivent permettre aux diffrents acteurs investis dans le champ de la toxicomanie,
quils soient mdecins, travailleurs sociaux, usagers, responsables publics, de disposer
dinformations prcoces sur les phnomnes relevant de lusage de drogues afin dlaborer des
rponses rapides et permettre ainsi une meilleure protection des usagers et de la population en
gnral. Lobservation est oriente en priorit en direction de lusage de substances illicites,
lequel, du fait de sa faible prvalence dans la population, chappait aux enqutes
pidmiologiques classiques. Le dispositif TREND est fond essentiellement sur la dtection
des phnomnes mergents, lesquels recouvrent soit des phnomnes indits soit des
phnomnes existants mais qui navaient pas t dtects par les systmes dobservation en
place.
3 Cette partie est extraite de la synthse nationale de lensemble des sites : Bello P.-Y., Toufik A., Gandilhon M., Giraudon I., Bonnet N., Phnomnes mergents lis aux drogues en 2002. Quatrime rapport national du dispositif TREND, Paris, OFDT, juin 2003, 288 p.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Dans ce cadre, le dispositif TREND tente dobserver les volutions partir de six thmatiques
principales :
les populations mergentes dusagers de produits ;
les modalits dusage de produits ;
les dommages sanitaires et sociaux associs la consommation de produits ;
les produits mergents ;
les modalits dacquisition de proximit ;
les perceptions et reprsentations des produits.
Pour ce faire, deux espaces principaux dinvestigation ont t dlimits : lespace urbain et
lespace festif techno. Lespace urbain recouvre pour lessentiel les usages et les modalits
dusage observables dans les structures daccueil de bas seuil (boutiques et programmes
dchange de seringues), les centres de soins et les lieux ouverts tels le monde de la rue et
des squats. Lespace festif techno dsigne les lieux o se droulent des vnements festifs
relevant de la culture techno et, ce, quel que soit le type dvnement, quil ait lieu dans le cadre
dun club, dun technival, dune free partie voire mme dune soire prive.
Le choix dinvestiguer en priorit ces deux espaces sest fait de manire pragmatique en se
fondant sur lexistence dune tradition dobservation de lusage de drogues sappuyant sur des
rseaux de personnes comptentes et exprimentes. Toutefois, cela ne signifie nullement que
ces deux espaces puisent eux seuls la ralit de lusage de drogues en France mtropolitaine
et dans les dpartements doutre-mer.
Outils de collecte
Lobservation dans ces deux espaces sappuie sur des outils spcifiques de collecte, des
investigations spcifiques et des systmes dinformation partenaires qui prexistaient la
cration du dispositif TREND.
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Mthode
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Les outils de collecte propres au dispositif sont constitus par le rseau des douze sites, le
systme SINTES (analyse des drogues de synthse) et la Veille mdia (analyse des perceptions
sur les substances illicites vhicules par un certain nombre de magazines destines un public
compos de jeunes adultes).
Les investigations spcifiques portent sur lapprofondissement dune problmatique particulire
mise en vidence lors dune observation.
Les systmes dinformation partenaires comprennent lenqute OPPIDUM des CEIP (Centre
dvaluation et dinformation sur les pharmacodpendances), qui offre une description chaque
anne des usagers frquentant les CSST ; le systme SIAMOIS de lINVS (Institut national de
veille sanitaire), lequel observe lvolution des ventes de matriel dinjection et de produits de
substitution ; lenqute ESCAPAD de lOFDT (Observatoire franais des drogues et des
toxicomanies), qui traite, sur la base dune enqute quantitative, des consommations de
substances psychoactives chez les jeunes de 18 ans ; les donnes de lOCRTIS (Office central
de rpression du trafic illicite de stupfiants), qui portent sur les dcs par surdose et de la
CNAMTS, qui scrutent lvolution des prescriptions de mdicaments appartenant la
configuration de lusage de drogues.
Le rseau des sites 4
Le rseau des sites est plac depuis lanne 2001 sous la responsabilit de douze coordinations
locales charges dassurer la ralisation de la collecte des informations ncessaires
lidentification des phnomnes mergents lis lusage de drogues. Celles-ci ont t mises en
place aprs deux annes de fonctionnement du dispositif afin de disposer dun interlocuteur
pour chaque site permettant dpouser au plus prs les ralits du terrain.
4 Cette partie est extraite de Bello P.-Y., Toufik A., Gandilhon M., Giraudon I., Bonnet N., op. cit.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Lobjectif de ces coordinations est dassurer, en partenariat avec la coordination nationale
assure par lquipe TREND de lOFDT, la constitution et la prennit dun rseau local de
collecte et danalyse des informations et de rdiger un rapport annuel local rendant compte des
volutions constates sur leur site. Les outils de collecte
Les outils de collecte dont disposent les coordinations locales sont les suivants :
des observations ethnographiques ralises dans lespace urbain et dans lespace festif
techno ;
des entretiens qualitatifs, raliss laide dun cahier guide, avec des quipes en charge
de structures de bas seuil, des associations de sant communautaire ou de rduction des
risques dans le cadre du mouvement festif techno ;
des groupes focaux runissant des professionnels investis dans les champs sanitaires et
rpressifs et des usagers impliqus notamment dans les groupes dautosupport ;
une enqute transversale quantitative ralise auprs dusagers de structures de bas seuil
partie prenante du rseau local. Les observations ethnographiques 5
Jusqu prsent, le recueil des donnes ethnographiques Paris et en Seine-Saint-Denis reposait
sur le travail de trois enquteurs conduisant des observations dans des lieux trs dlimits. En
2003, lobservation des usages a t ralise sous la responsabilit des deux personnes (lune
pour lespace urbain, lautre pour lespace festif) charges de mettre en place un rseau
dobservateurs de terrain (ou informateurs) disposant, indpendamment de leur participation au
dispositif TREND, dinformations sur les consommations de produits psychoactifs. Ces
observateurs, le plus souvent eux-mmes usagers de drogues, permettent de favoriser un accs
un nombre dinformations dautant plus lev que leur composition est htrogne, en termes
daccessibilit un groupe (ge, sexe, produits consomms, quartiers frquents, vnements
festifs frquents, etc.).
5 La description de lobservation ethnographique a t rdige par lORS Ile-de-France.
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Mthode
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Les enqutes qualitatives
Les enqutes qualitatives reposent sur des questionnaires semi-ouverts adapts la ralit de
chaque espace portant sur chacune des substances intressant le dispositif TREND. Les
substances investigues pour les deux espaces sont les suivantes : hrone ; buprnorphine haut
dosage (Subutex) ; sulfate de morphine (Sknan, Moscontin) ; mthadone ; codne ;
cocane ; crack/free base ; cannabis ; flunitrazpam (Rohypnol) ; trihexiphenidyle (Artane) ;
autres benzodiazpines ; solvants ; ecstasy ; amphtamines ; ktamine ; LSD ;
opium/rachacha ; champignons hallucinognes. Pour chaque produit, les thmes abords sont
relatifs la disponibilit, laccessibilit, au prix, la prparation, au mode dadministration,
aux problmes de sant, aux caractristiques des consommateurs, la perception du produit, au
trafic.
Pour lespace urbain, les questionnaires sont remplis, en collaboration avec le coordinateur, par
les quipes des structures de bas seuil partenaires du rseau local. Pour lespace festif techno, le
remplissage est confi des associations travaillant sur la rduction des risques intervenant dans
lespace festif techno.
Les groupes focaux
La mthode de travail recourant la constitution de groupes focaux sinspire de la pratique
de cette technique par lOrganisation mondiale de la sant lors de diagnostics rapides de
situation. Il sagit de runir des personnes ayant une thmatique commune mais des pratiques et
des points de vue diversifis. Il est ainsi possible dobserver des convergences dopinion (ou des
divergences) sur labsence, lexistence, le dveloppement de tel ou tel phnomne. On peut
ainsi produire de manire rapide et relativement lgre des connaissances sur des volutions
relativement rcentes. []
Les enqutes transversales quantitatives
Lenqute transversale quantitative est ralise, chaque anne, auprs des usagers des structures
de bas seuil participantes de chacun des sites. Le questionnaire volue lgrement chaque anne,
essayant de prendre en compte les remarques mises. Le recueil dinformation auprs des
usagers se droule pendant quelques semaines. Celui-ci repose sur un questionnaire ferm qui
aborde la description socio-dmographique de la personne, quelques lments de son tat de
sant, ses consommations de produits psychoactifs et en 2001 quelques questions plus
approfondies sur la consommation de buprnorphine haut dosage.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Autres outils
Observations diverses
Par ailleurs, dans le cadre du rseau des sites, des partenariats nationaux avec des associations
susceptibles de rapporter des observations, sous la forme de notes destines aux coordinations
locales, dans les deux espaces dinvestigation, peuvent tre tablis [].
SINTES
La plupart des coordinations TREND de mtropole sont partie prenante du systme SINTES
(Systme didentification national des toxiques et substances). La base de donnes SINTES vise
identifier, par le biais danalyses toxicologiques de produits de synthse, les nouvelles
tendances (suivi pidmiologique) et les nouveaux produits (identification de molcules ou
dassociations de molcules inconnues jusqualors). Les collectes ralises au niveau local
permettent de disposer dinformations sur la composition des drogues de synthse qui circulent
dans une rgion donne.
Les systmes dinformation partenaire
A linstar de ce qui se passe pour le dispositif national, qui a mis en place un partenariat avec un
certain nombre de sources institutionnelles dinformations telles les CEIP, lOCRTIS, lInVS ou
la CNAMTS, le rseau des sites bnficie des donnes prodigues par chacune des sources
susmentionnes mais dclines lchelon local. Ces donnes, essentiellement quantitatives,
permettent une mise en perspective des donnes qualitatives, qui composent le cur des
rapports de site.
Les synthses [] [de chaque site] sont donc le produit de la confrontation, de la mise en
perspectives, des donnes obtenues, au niveau local, grce aux outils de collecte prsents plus
haut. Cette mthode de travail, fonde sur le croisement des donnes, permet dviter la simple
juxtaposition dinformations. Chaque rapport de site est le fruit dun processus de
confrontations des donnes disponibles aboutissant une synthse des faits qui paraissent les
plus pertinents et les plus confirms. Le systme dinformation franais sur les drogues se
trouve ainsi enrichi de connaissances dcoulant directement des observations quotidiennes des
acteurs de terrain, quels quils soient.
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Mthode
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Le rapport de site
La rdaction des rapports de site est sous la responsabilit de chacun des coordinateurs de site.
Une charte de rdaction et une structure communes ont t tablies conjointement par les
coordinateurs et lOFDT. Toutefois chaque site peut adapter le plan en fonction des
problmatiques locales.
Ce rapport a trois objectifs :
Contribuer la synthse nationale annuelle sur les phnomnes mergents lis aux
drogues en France ;
Etre un outil dapprhension des phnomnes mergents lis aux drogues au niveau
local pour lensemble des personnes intresses et particulirement les dcideurs et les
professionnels.
Etre un outil de rtro information vers lensemble des acteurs du site ayant contribu
la collecte dinformation.
Il est important de rappeler que les collectes dinformations ralises concernent gnralement
des populations de taille restreinte, particulirement au niveau local. Linterprtation des
phnomnes dcrits dans les rapports de site doit donc se faire en prenant en compte les
importantes limites mthodologiques lies lobservation de phnomnes illicites et lusifs. La
mise disposition du lecteur de modifications prcoces des drogues de leurs usages et
consquences, pour fascinantes quelles puissent tre, ne peut faire oublier quil ne sagit que de
lun des aspects de lobservation des drogues et des toxicomanies et quil vient en complment
de lappareil [dobservation] pidmiologique classique.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Les mthodes de travail utilises Paris en 2003
Observation des usages en milieu festif et en milieu urbain
Jusquen 2003, le recueil des donnes ethnographiques dans le dispositif TREND en Ile-de-
France reposait sur le travail de trois enquteurs conduisant des observations dans des lieux trs
dlimits. Afin de rendre le dispositif dobservation plus efficace, celui-ci a volu en 2003,
permettant de recueillir des informations moins localises et davoir une image plus globale des
phnomnes.
Lobservation des usages a t ralise sous la responsabilit dune personne charge de mettre
en place un rseau dobservateurs de terrain (ou informateurs ou observateurs-cls )
disposant, indpendamment de leur participation au dispositif TREND, dinformations sur les
consommations de produits psychoactifs.
Ces observateurs, le plus souvent eux-mmes usagers de drogues, ont permis de favoriser un
accs un nombre dinformations dautant plus lev que leur composition a t htrogne, en
termes daccessibilit un groupe (ge, sexe, produits consomms, quartiers frquents,
vnements festifs frquents, etc.). En milieu festif, des personnes vivant dans des squats
(techno punks et teufeurs) en proche banlieue (Montrouge, 92, Vanves, 92 et Montreuil, 93) ont
aussi t interroges.
La responsabilit de cette observation en milieu urbain a t confie Guillaume PFAUS et
celle de lobservation en milieu festif Jimmy KEMPFER.
Durant lanne 2003, chaque espace dobservation a donn lieu la rdaction de quatre notes de
synthse ainsi que de notes portant spcifiquement sur des thmes transversaux qui ont sembl
intressants explorer en profondeur durant toute lanne.
Pour le milieu festif, il sagit des consommations de drogues dans le milieu festif gay,
espace qui navait pas t observ jusqu prsent et dont les consommations semblaient
prsenter des caractristiques particulires.
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Mthode
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Dans le milieu urbain, deux thmes ont t privilgis : la question de la
permabilit de lespace urbain et de lespace festif et celle des usages de drogues
parmi les femmes. Ces deux thmes avaient t voqus plusieurs reprises durant
lanne 2002 et il a sembl intressant de mieux comprendre ces deux problmatiques.
Recueil des donnes auprs de structures de premire ligne et dassociations de rduction des risques intervenant en milieu festif
Une enqute quantitative par questionnaire auprs dusagers de structures de premire
ligne a t ralise durant le second semestre 2003. Quatre structures parisiennes ont particip
au recueil des donnes auprs des usagers :
ACCUEIL EGO (18me arrondissement) : 53 questionnaires
AIDES-AUDVIH (1er arrondissement) : 53 questionnaires
STEP (18me arrondissement) : 45 questionnaires
NOVA DONA (14me arrondissement) 37 questionnaires.
Au total 188 questionnaires ont t complts par les quipes des structures auprs des usagers.
La saisie a t ralise par lOFDT et lexploitation statistique a t conduite lORS Ile-de-
France avec le logiciel SAS 8.02.
Une enqute qualitative par questionnaire visant raliser un tat des lieux de lusage de
drogues dans lespace urbain et dans lespace festif a t conduite durant le dernier trimestre
2003. Les quipes de trois structures de premire ligne ainsi que de deux associations ralisant
des actions de rduction des risques en milieu festif ont particip ce recueil :
EGO/STEP (18me arrondissement)
AIDES-AUDVIH (1er arrondissement)
NOVA DONA (14me arrondissement)
ASSOCIATION LIBERT (milieu festif)
ASSOCIATION TECHNO PLUS (milieu festif)
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Entretiens auprs de professionnels de sant
Des entretiens auprs de diffrents professionnels de sant, pour la plupart ayant particip au
dispositif TREND en 2002, ont t conduits en 2003, visant identifier des changements dans
le profil des usagers, dterminer si des phnomnes nouveaux ou une symptomatologie
nouvelle lis aux consommations de drogues avaient t observs. Les entretiens ont t raliss
avec des mdecins, des pharmaciens, un alcoologue et une infirmire.
Toutes les donnes recueillies en 2003 dans le cadre du dispositif TREND Paris, travers les
diffrentes mthodes prsentes ci-dessus, ont t informatises puis classes par produit et par
thme partir dune base dorganisation des donnes fournie par lquipe TREND de lOFDT 6.
Ainsi, pour chaque produit, les informations ont t classes selon diffrents thmes (une
information pouvant apparatre dans plusieurs thmes) : Disponibilit, Accessibilit, Prix,
Prparation-temporalit, Mode d'administration, Effets-frquence-intensit, Rgulation-
polyconsommation, Sant, Groupes de consommateurs, Perception des usagers, Perception des
non-usagers, Appellations, Petit trafic, Scne ouverte.
Les donnes pour Paris ont donc t confrontes les unes aux autres pour conduire les analyses
prsentes dans ce rapport.
6 Il sagit dune base ralise partir du logiciel QSR Nvivo.
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Mthode
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Contributions au dispositif TREND Paris en 2003
Observation des usages en milieu urbain et en milieu festif
Responsable de lobservation de terrain concernant lespace urbain : Guillaume PFAUS
Responsable de lobservation de terrain concernant lespace festif : Jimmy KEMPFER,
collaborateurs principaux : Benot DELAVAULT, Arnaud SOLANET
Enqute par questionnaire qualitatif auprs des quipes des structures de premire ligne et des associations de rduction des risques Milieu urbain
Espoir Goutte dOr : Paris, 18me. Recueil des donnes coordonn par Ccile
ROUGERIE, avec laide de Philippe BLANGIS, Diab DIALLO et Nordine
BENASSA ainsi que la participation dusagers.
Nova Dona : Paris, 14me. Recueil des donnes coordonn par Mustapha
BENSLIMANE
Aides Audvih : Paris, 14me. Recueil des donnes coordonn par Reno DELACROIX,
Jean-Jack LE BACQUER, Laurent GERLAUD
Milieu festif
Techno plus : Recueil des donnes coordonn par Matthieu BENAYOUN et Djamila
MEGHAIZEROU
Association Libert : Recueil des donnes coordonn par Jimmy KEMPFER
-
tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
24
Enqute par questionnaire quantitatif auprs des usagers des structures de premire ligne
L'enqute s'est droule entre mai et juillet 2003 l'Accueil Ego, Step et Nova Dona et entre
aot et septembre 2003 Aides-Audvih. Au total, le nombre de questionnaires remplis est le
suivant : Accueil Ego : 53, Aides-Audvih : 53, Step : 45 et Nova Dona : 37, soit un total de 188
questionnaires.
Entretiens avec des professionnels de sant
Monsieur BARY, mdecin, directeur du Centre du Moulin Joly, Croix rouge franaise,
(11me)
Madame DJURIC, infirmire, Centre du Moulin Joly, Croix rouge franaise, (11me)
Monsieur BONNET, pharmacien, ECIMUD de la Salpetrire (13me)
Monsieur EDEL, praticien hospitalier, ECIMUD de la Salpetrire (13me)
Monsieur JAURY, mdecin libral, Rseau Rive Gauche (15 me)
Monsieur LAFRAGETTE, pharmacien libral (7 me)
Madame THPOT, alcoologue, service dhpatologie de lhpital Necker (15 me)
Nous remercions toutes ces personnes pour leur prcieuse collaboration.
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Points de repres sur la toxicomanie Paris et en Ile-de-France
25
Points de repre
sur la toxicomanie
Paris et en Ile-de-France
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Points de repres sur la toxicomanie Paris et en Ile-de-France
27
Paris se rvle de loin le dpartement le plus confront la toxicomanie
La comparaison des diffrents indicateurs issus dILIAD 7 relatifs aux usagers de drogues (voir
tableau 1) montre que la rgion Ile-de-France, notamment Paris, demeure, actuellement encore
particulirement touche par les problmes de toxicomanie. Ainsi, les indicateurs relatifs au
recours au systme mdico-social, aux ventes de Stribox et de Subutex en pharmacies de
ville ainsi quaux dcs par surdoses placent Paris (et plus gnralement la rgion Ile-de-France)
au premier rang des dpartements de France confronts la toxicomanie.
Si la rgion Ile-de-France a depuis toujours t trs touche par les problmes de toxicomanie,
ces dix dernires annes ont vu des modifications profondes des caractristiques des usagers de
drogues, principalement en raison du dveloppement de la politique de rduction des risques.
Changement de physionomie de la toxicomanie avec la politique de rduction des risques
Initie en 1987 avec la vente libre des seringues et poursuivie en 1995/1996 avec les traitements
de substitution aux opiacs (mthadone et Subutex), la mise en place de la politique de
rduction des risques, a entran une forte diminution de la mortalit par surdoses, une baisse
des risques infectieux et a permis une meilleure prise en charge des toxicomanes.
La diffusion des traitements de substitution a conduit un nombre croissant dusagers dopiacs
sengager dans une dmarche de soins. Les ventes de Subutex en pharmacies de ville ont ainsi
fortement augment. Paris demeure le dpartement d'Ile-de-France o les ventes de produits de
substitution sont les plus importantes : plus de 40 % des ventes de Subutex en Ile-de-France et
prs de 60 % de celles de mthadone dlivre en mdecine de ville sont ralises dans la seule
capitale.
7 Le dispositif ILIAD, Indicateurs locaux pour linformation sur les addictions, mis en place par lODFT, regroupe des donnes sur les addictions provenant de diffrentes institutions, notamment de lInstitut de veille sanitaire, de lOffice central pour la rpression du trafic illicite de stupfiants, de la Direction de la recherche, des tudes, de l'valuation et des statistiques du ministre de l'Emploi et de la Solidarit.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
28
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Points de repres sur la toxicomanie Paris et en Ile-de-France
29
La diffusion des traitements de substitution a entran une forte baisse de lusage dhrone,
(usage qui aujourdhui ne semble plus en recul) comme en tmoigne, par exemple, le fait que le
nombre dinfractions pour usage dhrone a t divis par prs de quatre entre 1994 et 2000
alors que, durant la mme priode, celui de cannabis tait multipli par prs de trois.
Impact sanitaire important de la politique de rduction des risques
La diffusion des traitements de substitution, en entranant une diminution de la consommation
dhrone, a eu en particulier pour consquence de rduire trs sensiblement le nombre de dcs
par surdoses enregistrs par les services de police : de 299 dcs par surdoses en 1994 en Ile-de-
France, ce nombre sest stabilis autour de 50 depuis 1999 (13 Paris en 2002).
Paralllement la diffusion des traitements de substitution aux opiacs, lutilisation du matriel
de prvention (Stribox, seringues, kits dinjection, etc.) sest largement diffuse chez les
usagers depuis la fin des annes 80, limitant ainsi les pratiques de partage et les risques
infectieux, notamment du VIH et du virus de lhpatite C (VHC).
Outre la baisse probable des contaminations par le VIH, la politique de rduction des risques a
aussi permis de faciliter pour les usagers de drogues les contacts avec les professionnels de
sant. Elle a favoris un meilleur suivi thrapeutique du VIH, ayant permis de rduire la
mortalit par sida chez les usagers de drogues.
Nanmoins, si la diffusion des Stribox et laccs diversifi au matriel strile dinjection ont
probablement diminu de faon importante, chez les usagers injecteurs, les contaminations par
le VIH, limpact semble moins vident sur la prvalence du VHC. D'aprs diffrentes
enqutes 8, la prvalence du VHC reste leve chez les usagers de drogues, comprise entre 43 %
et 73 % selon les tudes. Lenqute ralise en 2002 auprs des usagers des structures de
premire ligne dans le cadre du dispositif national TREND a montr une prvalence du VHC de
62 % parmi les usagers ayant utilis linjection au cours de la vie (comme au cours du dernier
mois) et de 12 % parmi ceux ayant utilis le sniff mais jamais linjection (TREND/OFDT).
8 Emmanuelli J., Jauffret-Roustide M., Barin F., Epidmiologie du VHC chez les usagers de drogues, France, 1993-2002 , Bulletin pidmiologique hebdomadaire, Numro thmatique Epidmiologie de lhpatite C, N 16-17/2003, 22 avril 2003, pp. 97-100.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
30
Tableau 2 : Rpartition des structures de prise en charge et des outils de rduction des
risques par dpartement en fvrier 2004
Les structures de prise en charge Nb total de
CSST (1) Dont
CSST avec substitution mthadone
Nb de Boutiques
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Nb de PES
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Ile-de-France 58 + 3 MP* 47+ 2 MP* 8 1 16 7
* MP : CSST en milieu pnitentiaire ** l'un des CSST intervient aussi en milieu pnitentiaire
Les automates Distributeur
seul non coupl un rcuprateur
Rcuprateur seul non
coupl un distributeur
Distributeur coupl un rcuprateur
Totem de prvention
Total des automates en 2004
Total des automates en 2000
(2) Paris 16 0 3 5+4 * 28 18 Seine-et-Marne 0 0 1 0 1 0 Yvelines 0 0 0 0 0 0 Essonne 2 0 9 1 12 12 Hauts-de-Seine 16 0 7+1* 3 27 27 Seine-St-Denis 7 0 5 4 16 16 Val-de-Marne 11 0 14 4 29 16 Val-d'Oise 1 2 4 1 8 8
Ile-de-France 53 2 44 22 121 97
* Automates se composant de deux distributeurs
(1) Les Centres spcialiss de soins pour Toxicomanes (CSST) ont t comptabiliss selon le nombre de lieux de consultations, y compris les annexes, et non selon le nombre dassociations grant ces structures. (2) Donnes mises jour en juillet 2000
Sources : les DDASS d'Ile-de-France, la DASS de Paris, la DASES de Paris Donnes transmises en fvrier 2004
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Points de repres sur la toxicomanie Paris et en Ile-de-France
31
Rpartition ingale du dispositif de rduction des risques selon les dpartements dIle-de-France
Dans la rgion Ile-de-France, on assiste globalement un renforcement des politiques de
rduction des risques avec une augmentation du nombre de CSST dlivrant de la mthadone,
des installations supplmentaires de distributeurs et/ou rcuprateurs de seringues et une
augmentation de la prise en charge par les mdecins de ville des traitements de substitution par
le Subutex. Ces dernires annes ont en effet t marques par une diversification des
dispositifs, permettant datteindre des usagers de drogues ayant des profils, des demandes et des
besoins diffrents.
Cependant, en termes dquipement, il existe dimportantes disparits entre les dpartements,
variant de aucun distributeur et/ou rcuprateur de seringues dans les Yvelines 29 dans le Val
de Marne (voir tableau 2).
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
32
Graphique 1 : Rpartition par arrondissement des structures de prise en charge et des
outils de rduction des risques Paris en fvrier 2004 9
.T .Ds
.C(m)
.Ds
.C .2C(2m)
.B .2Ds .Dr .2T
.3C(2m)
.C(m) .2Ds .Dr
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.B .Dr
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.2C(m)
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.B .Dr .T
.4Dr .T
VI
VIII
VII
XV
XVI
XIV
XIII
XII
V
XX
XIX
XVIII
XVII
IX X
III
XI
I
II .T
IV
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.C(m) .Ds
Sources : DASS de Paris, DASES de Paris, fvrier 2004
- C : CSST - Ds : Distributeur seul non coupl un rcuprateur - (m) : dont CSST avec mthadone - Dr : Distributeur coupl un rcuprateur - B : Boutique - S : Sleep-in - T : Totem de prvention 10 : un Totem du 1er arrondissement et du 20me arrondissement
disposent de deux Distribox, de mme que deux Totem du 10me arrondissement
Lecture : par exemple, le 10me arrondissement de Paris dispose de deux CSST (les deux avec mthadone), d'une "boutique", de deux distributeurs seuls, d'un distributeur coupl un rcuprateur et de deux Totem.
9 Est exclu de la carte le CSST situ en milieu pnitentiaire dans le 14me arrondissement. 10 Le Totem de prvention est une sorte de borne qui se compose d'un distributeur de kits de prvention, d'un rcuprateur de seringues, d'un distributeur de prservatifs (gratuits ou payants selon les conventions) et d'un panneau d'information.
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Points de repres sur la toxicomanie Paris et en Ile-de-France
33
Concentration dans le nord de Paris des activits autour de la toxicomanie
A Paris, la situation est aussi trs htrogne selon les arrondissements (voir graphique 1). Si
lemplacement des Centres de soins spcialiss aux toxicomanes (CSST) est tributaire de celui
des hpitaux, celui des autres structures de prise en charge ( boutique , programme dchange
de seringues, Bus) dpend davantage des politiques conduites dun arrondissement lautre, des
besoins locaux ressentis, des priorits politiques, des lieux de vente de drogues, de prostitution,
des politiques coercitives, des pressions exerces par les habitants pour empcher l'installation
de ce type de structures, etc.
Les donnes relatives aux ventes de Subutex, de Stribox, la dlivrance de mthadone,
l'accs des distributeurs/rcuprateurs de seringues, l'existence de structures accueillant les
usagers de drogues ( boutique et sleep-in) et de centres de soins, placent nettement en avant
le nord-est parisien (notamment le 10me et le 18me) (voir carte ci-contre).
Nanmoins, au cours de ces quatre dernires annes, on peut noter, dune part, un accroissement
important du nombre dautomates installs Paris (le nombre de distributeurs est pass de 18 en
juillet 2000 11 28 en fvrier 2004 avec cinq nouvelles implantations prvues en 2004), dautre
part, une meilleure rpartition dans les diffrents arrondissements de Paris. Si en juillet 2000,
six arrondissements de Paris ne disposaient daucune structure daccueil pour les usagers de
drogues ou daucun outil de rduction des risques, ce nest plus le cas que de trois
arrondissements actuellement (4me, 8me et 16me, indiqus en gris sur la carte ci-contre). Cet
accs plus large au matriel dinjection, par le biais des distributeurs, peut peut-tre expliquer la
baisse des ventes de Stribox dans les pharmacies de ville (voir tableau 1).
11 date de la mise jour des donnes dans le cadre du rapport : Halfen S., Grmy I., Toxicomanies et rduction des risques en Ile-de-France, ORS Ile-de-France, dcembre 2000.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Les usagers et les contextes de consommation
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Les usagers et les
contextes de consommation
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Tableau 3 : Consommation des produits parmi les usagers interrogs des structures de premire ligne* (en %)
(n = 188) Proportion d'usagers du produit
parmi les usagers interrogs
Usage au cours de la
vie
Usage au cours du
mois
Usage quotidien
% dusagers quotidiens parmi
les usagers au cours du dernier
mois
Cannabis 91 72 45 62 Hrone 87 31 9 29 Cocane / crack 80 44 17 (3/16)** 37 Buprnorphine 72 45 37 80 Benzodiazpines (hors Rohypnol) 49 32 17 52 Rohypnol 47 15 6 38 Mthadone 44 30 24 81 Ecstasy 35 10 1 5 Sknan, Moscontin 33 18 12 67 Codine 30 4 1 29 LSD 30 5 0 0 Amphtamines 28 6 0 0 Champignons 26 3 0 0 Poppers 19 2 0 0 Artane 12 5 2 33 Ktamine 12 4 0 0 Solvants 11 0 0 -- Rachacha 10 2 1 25
Tabac 92 92 100 Alcool 64 21 34
Lecture : Parmi les usagers de cannabis au cours du dernier mois (72 %), 62 % dclarent une consommation quotidienne. Au total, parmi lensemble des usagers des structures, 45 % ont indiqu avoir une consommation quotidienne de cannabis au cours du dernier mois.
* Accueil Ego, Aides-Audvih, Step et Nova Dona ** Le premier chiffre entre parenthses correspond lusage de la cocane et le second celui du crack.
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Les usagers et les contextes de consommation
37
Caractristiques des usagers
Les usagers rencontrs dans lespace urbain Prcarit sociale des usagers des structures de premire ligne
La population des usagers interroge dans les structures de premire ligne (Accueil Ego, Aides-
Audvih, Step et Nova Dona) est particulirement touche par les problmes de consommation
de produits psychoactifs (voir tableau ci-contre). Lenqute quantitative mene dans ces
structures permet de mieux caractriser cette population dun point de vue social et
dmographique. Cest une population essentiellement masculine : au total, 81 % sont des
hommes et 19 % des femmes. La proportion de femmes varie nanmoins du simple au triple
selon les structures : de 28 % Ego 9 % Step (23 % Aides et 14 % Nova Dona). L'ge
moyen des personnes interroges est de 35,5 ans (hommes 36,0 ans, femmes 33,4 ans) avec un
ge minimum de 20 ans et un ge maximum de 59 ans. La rpartition par ge est la suivante :
20-29 ans, 21 %, 30-34 ans, 23 %, 35-39 ans, 27 % et 40 ans et plus, 29 %.
Parmi l'ensemble des usagers interrogs, 60 % vivent seuls (48 % avant 35 ans et 70 % 35 ans
et plus), moins de deux personnes sur dix vivent en couple. Alors que 12 % des usagers disent
avoir au moins un enfant charge, seuls 5 % disent vivre avec des enfants.
Environ la moiti des usagers dclarent vivre dans des conditions de logements relativement
stables (logement indpendant stable 33 %, logement stable dans la famille, chez des parents ou
des proches 12 % ou logement stable en institution 4 %) et l'autre moiti dcrit des conditions
de logements extrmement prcaires (SDF 24 %, logement prcaire en institution 11 %,
logement prcaire chez des proches 8 % ou autre 7 %). Les femmes (voir tableau 4 page
suivante) semblent plus souvent que les hommes disposer d'un logement individuel stable (47 %
contre 30 %). Les usagers de l'Accueil Ego sont de loin les plus prcariss, en termes de
logement : seuls 11 % ont un logement individuel stable contre 42 % en moyenne dans les trois
autres structures. Les usagers de l'Accueil Ego sont 38 % dclarer tre SDF (22 % Aides-
Audvih et Step et 8 % Nova Dona). Si la grande majorit des usagers (91 %) ont dclar vivre
en Ile-de-France depuis plus de 6 mois, ce sont ceux qui vivent en Ile-de-France depuis moins
de 6 mois qui dcrivent les conditions de logement les plus prcaires. Parmi les usagers
interrogs, 10 % ont un niveau d'tudes primaire, 61 % ont un niveau secondaire (BEPC, BEP,
CAP), 20 % ont le niveau bac et 9 % un niveau d'tudes suprieur au bac.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
38
Tableau 4 : Conditions de logements des usagers interrogs dans les structures de premire ligne* (en %)
Logements stables
(1) Logements prcaires
(2)
Hommes (n= 150) 48,7 51,3 Femmes (n= 36) 52,8 47,2
Moins de 35 ans (n= 84) 47,6 52,4 35 ans et plus (n= 104) 51,0 49,0
Aides-Audvih (n= 53) 56,6 43,4 Accueil EGO (n= 53) 20,8 79,2 Nova Dona (n= 37) 70,3 29,7 STEP (n= 45) 57,8 42,2
Ensemble (n= 188) 49,5 50,5
(1) Logements stables : logement indpendant stable, logement stable en famille, chez des parents, logement stable en institution (2) Logements prcaires : logement prcaire en famille, chez des parents, logement prcaire en institution, SDF, camion ou autre
Tableau 5 : Type de ressources au cours du dernier mois parmi les usagers interrogs des structures de premire ligne* (en %)
(n = 188) Pourcentage
dusagers ayant ces ressources
Revenus demplois 27,1 Assedic 13,3 RMI 29,3 AAH 13,8 Aucune ressource 24,5 Aides : famille, proches, tiers 4,8 Autres 3,2
* Accueil Ego, Aides-Audvih, Step et Nova Dona
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Les usagers et les contextes de consommation
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Les femmes semblent avoir un niveau d'tudes plus lev que les hommes (42 % ont un niveau
bac ou plus contre 26 % des hommes).
Au cours des six derniers mois, la plupart des personnes n'ont pas travaill : 17 % disent avoir
eu une activit rmunre continue, 9 % une activit rmunre intermittente, 44 % dclarent
avoir t au chmage et 16 % dcrivent d'autres types d'activit comme la mendicit, le vol, le
deal, la prostitution, etc. Les conditions de vie sont particulirement difficiles pour les usagers
des structures (voir tableau 5) : seuls 27 % d'entre eux citent des ressources lies un travail (y
compris prostitution, travail non dclar, deal), 43 % citent comme ressources le RMI ou une
AAH, et 32 % disent n'avoir aucune ressource ou vivre de la mendicit ou d'aides (famille,
proches, tiers).
Une nette majorit des personnes (86 %) bnficient d'une couverture sociale (55 % des usagers
ont la CMU) mme si 10 % dclarent n'avoir aucune couverture sociale (14 % chez les
personnes de moins de 35 ans contre 7 % chez celles de 35 ans et plus, 12 % chez les hommes
contre 3 % chez les femmes). Les usagers de la structure Aides-Audvih sont particulirement
prcariss : 17 % n'ont aucune couverture sociale contre 7 % des usagers des trois autres
structures (notons que 100 % des usagers de Nova Dona ont une couverture sociale).
Une clientle toxicomane ancienne et dsinsre pour laquelle la prise en charge sociale reste extrmement difficile
Les personnels des structures de premire ligne comme les professionnels de sant font tat
quune grande partie de leur clientle sont des personnes usagres de drogues depuis de
nombreuses annes et trs dsinsres tant du point de vue social que familial. Dans une
structure de prise en charge prventive et de suivi de pathologies infectieuses telles que le VHC,
le VIH et autres IST, la clientle usagre de drogues accueillie, qui pour des raisons souvent
lies sa dsinsertion, na pas recours l'hpital, prsente le plus souvent des conduites
addictives trs anciennes. Il s'agit, le plus souvent, danciens hronomanes, parfois sous
substitution, trs poly-consommateurs, utilisant notamment du crack, essentiellement fum,
mais parfois aussi par voie intraveineuse. Ils vivent dans la rue ou dans des squats depuis
plusieurs annes. gs de 35 40 ans, ils sont compltement dsinsrs de la vie familiale (en
gnral tellement violente qu'ils prfrent la rue ) et de la vie sociale.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Ils se serviraient des traitements de substitution prescrits comme d'un matelas pour
redescendre ou pour grer les priodes o l'argent manque pour acheter dans la rue (Rambuteau,
Chteau Rouge, Les Halles) des produits tels que le crack, mdicaments (Rohypnol) et des
sulfates de morphine. L'alcool et le tabac sont toujours trs prsents. Le parcours de ces
toxicomanes est souvent non linaire avec des priodes calmes et des priodes de crises plus
fortes o pertes de suivi, recours l'injection sont frquentes. Ce sont des personnes, suivies
depuis de nombreuses annes pour lesquelles tout projet de vie et de rinsertion semble se
solder invariablement ou presque par des checs.
Les professionnels de sant en exercice libral interrogs (mdecin et pharmacien) prennent
galement en charge parmi leur clientle usagre de drogues des personnes trs dsinsres
plutt ges, vivant de minima sociaux, (RMI, Assedics ou Cotorep), suivies au long court. Ces
patients semblent relativement bien contrls d'un point de vue des addictions et des
complications somatiques, en particulier les pathologies hpatiques et le VIH, mais aussi la
prise en charge dentaire et nutritionnelle ainsi que gyncologique pour les femmes. En
revanche, le problme majeur de ces patients est dordre social et, pour eux, les rponses
sociales semblent peu adaptes, en termes de prises en charge, et impuissantes contribuer
leur rinsertion.
Limportance des difficults sociales est accentue par les problmatiques familiales en gnral
trs lourdes. Ces patients, socialement et familialement trs dsinsrs sont en gnral entrs
trs prcocement dans la toxicomanie. Ce sont des personnes elles-mmes impliques dans des
problmatiques familiales qui peuvent tre svres. Un mdecin signale limportance des
dysfonctionnements familiaux dans lesquels les problmes d'addictions prsents chez les
parents, le sont galement chez les enfants. Les enfants sont marqus par les addictions des
parents du fait des difficults affectives et sociales qu'elles ont entranes, marqus aussi par des
modles parentaux peu cadrs en matire de consommation de produits addictifs. Dans ces cas
l, le mdecin de famille peut jouer un rle de vritable rfrent et mdiateur familial pour
essayer, dans une prise en charge parfois moins stigmatisante qu'un recours
psychothrapeutique, de dnouer les conflits familiaux.
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Les usagers et les contextes de consommation
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Dans cette population de personnes dsinsres, certaines des femmes usagres de drogues ont
eu des enfants. Si la grossesse n'est pas toujours planifie, elle constitue, en gnral un moment
privilgi o les rponses sociales offertes permettent aux mamans toxicomanes de s'en sortir
momentanment. Cependant, cette amlioration psychologique et sociale apparat souvent
transitoire et il arrive qu'aprs la naissance les problmes sociaux reprennent le dessus, avec
notamment des problmes aigus de logement, d'aide sociale dficiente qui amnent souvent des
dcisions de justice aboutissant au retrait de l'enfant et un retour de la maman dchue dans une
toxicomanie importante.
Les professionnels de sant interrogs mettent en avant que, s'il reste confirm que les
traitements de substitution ont permis une stabilisation des problmes d'addictions et une prise
en charge effective et efficace des problmes somatiques, cela n'a gure permis de faire voluer
les situations sociales de ces personnes svrement dpendantes et fortement dsinsres,
notamment en ce qui concerne les conditions de logement et laccs au travail.
Le profil des femmes usagres de produits psychoactifs et leurs perceptions plus ngative que
les hommes de leur consommation
Les femmes frquentant les structures de premire ligne sont trs minoritaires. Elles prsentent
des caractristiques particulires : un peu plus jeunes que les hommes, elles sont plus souvent
dun niveau dducation plus lev, plus souvent dtentrice dun logement stable et dune
couverture sociale.
Selon lobservation de terrain en milieu urbain, les femmes entres dans des problmes de
consommations de produits psychoactifs semblent beaucoup plus que les hommes soucieuses de
le cacher. Lorsque la consommation de drogues est visible, cest parce que cest prcaire
selon les dires de lune dentre elles, qui a ajout quand on peut, on vite de se montrer . Les
femmes sont en gnral rticentes se mettre dans des tats aussi extrmes que les hommes en
abusant des drogues. Elles cherchent en gnral prserver certaines apparences. Une femme
compltement dfonce passe moins bien quun homme. Et cest plus choquant . De plus,
comme le mentionne une autre femme beaucoup [de femmes] pensent qualler vers les
associations cest une dfaite . Les femmes seraient plus soucieuses de limage quelles
donnent delles-mmes alors que cette proccupation semble absente chez les hommes. Cest en
tout cas une ide rcurrente exprime parmi les quipes des structures de premire ligne, qui
vise interprter ainsi le fait que la proportion des femmes frquentant ces lieux est infrieure
la proportion des femmes usagres de drogues qui auraient besoin dun tel soutien.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Une des raisons pouvant expliquer la rticence des femmes frquenter les structures daccueil
serait notamment le fait que les femmes usagres de drogues ayant souvent recours la
prostitution pour financer leur consommation, le regard port sur elles est doublement
stigmatisant et difficile supporter. Des hommes eux-mmes reconnaissent que le fait dtre
usager de drogues est un trait de lidentit sociale plus facile assumer que le fait de se
prostituer.
Toxicomanie et prostitution restent troitement lies parmi les femmes
Les personnes interroges (hommes et femmes) dans le cadre de lobservation en milieu urbain
dclarent que, dans les milieux les plus prcaires, les ressources provenant de la prostitution
reprsentent une part largement majoritaire des ressources qui alimentent le march de la
drogue. Si la prostitution voque par les diffrents observateurs TREND Paris ne concerne
que celles des femmes, les hommes toxicomanes semblent aussi tirer des ressources de la
prostitution fminine.
Ainsi, lapparence et ltat physique des hommes usagers de crack trs prcariss tant
dgrads, au point de limiter leurs possibilits dacqurir des ressources par le vol ou dautres
moyens, une grande partie dentre eux tirent leurs ressources de la prostitution des femmes. Au-
del du racket des femmes, les hommes peuvent aussi avoir un rle de protecteur pendant
lactivit de prostitution des femmes, impliquant un partage des gains. Les hommes peuvent
simposer dans ce rle, ce qui ne laisse pas aux femmes concernes dautre choix que
daccepter, dans dautres cas, ce sont les femmes qui choisissent ce protecteur . Elles
semblent le faire en tenant compte de plusieurs facteurs : la qualit de la relation quelles ont
avec cet homme et sa rputation (quil ne soit pas connu pour tre trop imprvisible ou violent) ;
sa respectabilit dans le milieu pour plus de scurit ; mais aussi le fait que cet homme ne
soit pas trop impressionnant physiquement , de faon pouvoir se dfendre en cas de conflit
avec lui. Parfois, un homme peut tre arnaqu par la femme quil est suppos protger : il a
veill toute la nuit, et au moment de consommer ses produits, elle disparat sans partager avec
lui ni le produit, ni les gains de la prostitution.
Les personnes rencontres dans le cadre de lobservation en milieu urbain pensent que les
femmes, parce quelles ont plus facilement accs aux ressources que les hommes, notamment
travers la prostitution, consommeraient gnralement davantage et leurs conduites addictives
seraient aussi plus excessives que celles des hommes.
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Les usagers et les contextes de consommation
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A la diffrence de lanne 2002, o des consommations de produits psychoactifs avaient t
signales parmi des groupes de femmes prostitues (opiacs, benzodiazpines, crack,
amphtamines parmi des femmes dEurope de lEst, crack et hrone parmi des femmes
dAfrique), en 2003, la question de la prostitution a peu t voque par nos observateurs en
relation avec des consommations de produits. Ainsi, des cas de jeunes prostitues, parfois
mineures, originaires de zones rurales d'Europe de l'Est (Roumanie, Georgie, Ukraine, Russie,
Albanie) ont t signals par une des structures qui prcise que si les consommations ne sont
pas au devant de la scne parmi ces jeunes filles soumises la prostitution dans des rseaux trs
organiss, elles peuvent nanmoins tre prsentes, notamment travers l'alcool. Cette mme
structure voque aussi lapparition trs rcente de femmes, relativement ges (entre 40 et 60
ans), originaires du nord-est de la Chine, de zones de faillites de nombreuses industries lourdes,
qui se prostituent mais dont l'inclusion dans un rseau de prostitution n'a pas t rellement mise
en vidence. Cette nouvelle population qui, depuis lanne 2003, se fournit en prservatifs
dans cette structure reste pour l'instant une nigme pour les intervenants de cette structure
mais les consommations de produits psychoactifs semblent absentes.
Plus grande visibilit de toxicomanes issus de milieux sociaux levs
Les professionnels de sant libraux (pharmaciens, mdecins) interrogs font tat dune
clientle diversifie en terme d'origine sociale. La mise en place, en 2003, dans le sud-ouest
parisien dune structure de soins pour toxicomanes relevant du secteur priv qui prend en charge
des toxicomanes issus de milieux aiss voire fortuns a fait apparatre une clientle qui navait
pas recours aux lieux traditionnels de soins pour toxicomanes. Ainsi, en raison d'un
conventionnement avec cette structure prive de soins, une pharmacie dit avoir doubl sa
clientle (aujourdhui de plus de 150 personnes traites) avec des patients venant se faire
dlivrer sur ordonnance des produits de substitution, principalement issus de milieux sociaux
aiss. Un mdecin note dans sa clientle la prsence de vieux hronomanes, pisodiquement
sous traitement de substitution, exerant des professions artistiques (crivain, photographe) avec
peu de contraintes notamment dhoraires de travail et voluant dans un milieu ais. Cette
profession artistique leur a permis de perdurer dans des addictions avres, tout en restant
insrs dans leur cadre professionnel. Cependant un mdecin alcoologue mentionne que le
passage dune situation aise une situation de dsinsertion peut tre trs rapide, indiquant voir
de plus en plus d'hommes issus de professions librales ou de cadres de 40-50 ans fragiliss par
une situation conomique peu favorable et qui rentrent dans des conduites d'alcoolisation.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Or, le milieu du travail apparat de moins en moins tolrant aux comportements dviants et aux
conduites addictives, notamment alcooliques. Ce mdecin indique que les personnes se
dsocialisent trs rapidement, accumulent les dettes, les ruptures et autres soucis familiaux et la
dgringolade sociale peut tre trs rapide : en moins de deux ans on peut voir des personnes
se dsinsrer professionnellement, socialement et familialement et tomber dans une situation
d'isolement affectif et social profond.
Des usagers dEurope de lEst
Leur prsence, dj mentionne lanne dernire, se confirme. Il est cependant particulirement
difficile dapprocher ces usagers de drogues, dont la plupart ne parlent pas du tout le franais.
Daprs des usagers de drogues interviews, les personnes dEurope de lEst ne se mleraient
pas aux autres groupes de personnes prcaires et toxicomanes. Presque toujours en groupe, ils
seraient assez violents et sont particulirement redouts par les autres usagers de drogues.
Cependant, si un certain nombre dentre eux sont littralement SDF et se rassemblent la nuit
dans des espaces urbains dsaffects (sous des ponts ou dans des hangars abandonns), la
plupart dentre eux vivent dans des squats relativement organiss et situs en-dehors de la ville,
dans des communes attenantes. Il y aurait ainsi des squats trs peupls dans les communes de
Bagnolet et Montreuil [ceci avait aussi t signal durant 2002]. La journe, ces personnes
gagneraient le centre-ville de Paris afin de se procurer leurs moyens de subsistance
(observation de terrain en milieu urbain).
Certains usagers dEurope de lEst commenceraient frquenter des structures de premire
ligne du nord de Paris. Ces usagers seraient surtout des hommes polytoxicomanes consommant
du Subutex, souvent par voie intraveineuse, de lalcool en grande quantit, de lecstasy, du
cannabis. Parmi cette population, des Polonais seraient des consommateurs damphtamines,
notamment par voie intraveineuse. Ils seraient les premiers pourvoyeurs damphtamines sur
Paris. Il est souvent question, dans les tmoignages recueillis, dune filire polonaise de
distribution damphtamines, la Pologne tant considre comme un pays producteur de ces
drogues qui, vendues sous forme de poudre, peuvent tre ingres, snifes ou injectes.
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Les usagers et les contextes de consommation
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Les usagers rencontrs dans lespace festif Clubbeur ou teuffeurs : des caractristiques diffrentes
Deux catgories de personnes semblent pouvoir distinguer les amateurs de musique
techno frquentant les espaces festifs techno :
les teuffeurs : amateurs de musique techno plutt alternative ou underground de type
Hard Core frquentant les ftes technos clandestines (free partie) et teknivals. Il
sagit dune appartenance culturelle spcifique avec ses codes vestimentaires (souvent
des treillis ou dautres vtements amples et trs fonctionnels comme des sweats
capuche, des parka, etc.). La consommation de produits psychoactifs peut tre incluse
dans ce mode de vie.
Les clubbeurs : personnes frquentant les clubs dans les milieux techno branchs. Le
clubbeur sort plutt le week-end, il peut parfois tre qualifi ironiquement de teuffeur
du dimanche ou de touriste par ceux qui sestiment tre des teuffeurs
authentiques 12. les clubbeurs sont souvent plus insrs socialement que les teuffeurs.
Il sagit damateurs dune musique techno dansante de type House .
Des consommations importantes de produits psychoactifs dans le milieu festif gay
Lobservation des consommations dans le milieu festif gay masculin montre que de nombreuses
drogues sont associes la fte, aux botes, aux sorties, aux rencontres, aux ambiances festives
en gnral, et leur usage semble souvent considr comme parfaitement intgr alors mme
que des consommations quotidiennes de benzodiazpines ou dantidpresseurs durant la
semaine pour rguler les effets secondaires des stimulants ont t signales.
Les produits les plus couramment utiliss en milieu festif gay sont les stimulants (cocane,
ecstasy, plus rarement amphtamines) et les hallucinognes dorigine synthtique (ktamine,
GHB, poppers). Certains de ces hallucinognes ne semblent dailleurs quasiment utiliss que
parmi les gays (GHB et poppers).
Lusage de drogues dans le milieu gay semble avoir pour principale spcificit par rapport aux
usages dans le milieu festif en gnral, que les effets attendus des produits sont trs
frquemment en lien avec la sexualit et avec une sorte de qute de la performance sexuelle.
12 Par contre le teuffeur pourra tre peru par le clubbeur comme quelquun qui est dans labus, dans le dpassement des limites en matire de consommation de drogues
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Les produits ou les associations de produits sont en effet utiliss pour favoriser les rapports
sexuels et pour dcupler le plaisir . Dans ce contexte, les associations des produits illicites
avec des mdicaments sexuellement stimulants, tels que le Viagra, ne semblent pas rares.
Poursuite du morcellement de lespace festif techno et mergence dvnements trs confidentiels 13
Durant lanne 2002, les observations du milieu festif techno issues du dispositif TREND
Paris et en Seine-Saint-Denis avaient permis de noter la dsorganisation des espaces festifs,
suite au dcret d'application de l'amendement Vaillant 14 sign durant le premier semestre 2002.
En 2003, les observations en milieu festif techno montrent que lapplication de cet amendement
semble effectivement avoir contribu dsorganiser le milieu festif techno et favoriser le
morcellement de lespace festif en diffrents petits espaces o les interventions sanitaires sont
plus difficiles mener.
En effet, cette loi semble avoir contribu diminuer le nombre dvnements de type free
parties, mais surtout modifier nettement leur caractristiques, en rendant ces ftes trs
confidentielles, ne regroupant souvent pas plus de 200 300 personnes, lies par une forte
appartenance un sous groupe musical et qui suivent un crew , une bande, voire une tribu .
Les informations relatives ces ftes ne circuleraient que par le bouche oreille et non plus
par Infoline 15. Ce type de fte nattirerait pas de gros dealers professionnels et les produits
seraient vendus sur un mode plus convivial , ils seraient mme souvent acquis sur le mode du
troc (un peu de cannabis contre des ecstasy, une varit decstasy contre une autre, etc.). De
nombreuses personnes viendraient nanmoins ces nouvelles teufs avec leurs propres
produits, prvus pour tre consomms durant la nuit.
13 Cette partie fait la synthse de lensemble des observations en milieu festif ralises durant lanne 2003 sur ce nouveau type de teufs . 14 Cet amendement (inspir par lamendement Mariani) rglemente lorganisation de rassemblements exclusivement festifs caractre musical et rduit, de fait, trs nettement la possibilit dorganiser de gros vnements . 15 Au sujet de ces nouvelles teufs , voir aussi la partie sur la ktamine.
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Les usagers et les contextes de consommation
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Afin de restreindre encore plus la visibilit de ce type dvnements mais aussi afin de limiter la
stigmatisation par rapport aux autres milieux festifs, les organisateurs de ces ftes ne
souhaiteraient pas lintervention des associations de prvention. La prsence des associations
serait en effet associe aux drogues, aux dbordements, aux problmes, etc.
Les vnements festifs de type underground semblent peu attirer les femmes
Selon les observateurs du milieu festif, les filles seraient en gnral en minorit dans les ftes
techno. Elles peuvent reprsenter environ 40 50 % lors dvnements comme la fte techno de
la fte de la musique qui sest droule le 21 juin sur les quais de la Seine. Mais lors dune free
party de type Hardcore (avec beaucoup de basses 16), le pourcentage de filles dpasserait
rarement 10-20 %. En gnral, plus la musique est dure , moins il y a de filles.
Les conditions dans lesquelles se droulent les vnements festifs underground (souvent dans
des friches industrielles) semblent aussi constituer un frein pour les filles : froid, manque de
confort (pas de toilettes, ni deau pour se laver), lieux parfois sales et trs poussireux.
Nanmoins depuis la mdiatisation du mouvement techno, certains observateurs affirment que
la proportion de filles prsentes lors des ftes aurait sensiblement augment.
La permabilit entre lespace festif et lespace urbain
Les observations recueillies en Ile-de-France durant lanne 2002 dans le cadre du dispositif
TREND nous avaient conduit conclure que la frontire entre les caractristiques des usages en
milieu festif et ceux en milieu urbain tait plus permable quauparavant, en termes de produits
consomms, de mode de consommation, de frquences de consommation et de mode
dadministration des produits. En particulier, plusieurs observateurs signalaient que des
personnes qui jusqualors consommaient des produits psychoactifs exclusivement dans un
contexte festif avaient dsormais des consommations hors de ce cadre, conduisant probablement
des usages plus rguliers et plus problmatiques.
16 Le Hardcore est la musique type des free parties. Il se dcline en sous-genres avec des variantes : speedtek, Gros Hardcore, etc.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Ce constat a conduit explorer davantage cette question en 2003, travers lobservation en
milieu urbain. Ainsi, une partie de cette observation a port sur la problmatique du passage
dune consommation dite rcrative une consommation de produits hors dun contexte festif,
sur les caractristiques de ce passage et des usagers 17.
Les modalits de passage
La permabilit entre les deux espaces de consommation (milieu festif et milieu urbain) peut
se dfinir :
soit par des contacts (au travers du deal notamment) entre des usagers appartenant
respectivement lun ou lautre de ces espaces. Ainsi, des jeunes issus du milieu festif
apparaissent dans des contextes de deal et de consommation o, habituellement, on
rencontre essentiellement des usagers de drogues en situation de grande prcarit et qui
nont pas de lien avec la culture techno.
soit par le passage dun mode de consommation (et souvent de vie) propre lun des
deux espaces vers lautre, qui se manifeste toujours dans le sens dun usage de drogues
dans un cadre festif vers un usage hors cadre festif dans un contexte de prcarit, et
jamais dans lautre sens. Ainsi, des jeunes issus du milieu festif adoptent une
consommation de drogues dsorganise, quotidienne, compulsive, et un mode de vie
prcaire qui peut aller jusqu lerrance, sans pour autant se mler aux groupes
dusagers trs prcaires (notamment de crack), tels quils sont dcrits concernant le
nord-est parisien.
Le second cas semble tre le plus courant et concernerait notamment la plupart des usagers
frquentant le sud de Paris. Mme lorsque des usagers issus du milieu festif se mettent
frquenter les mmes lieux que ceux en grande prcarit du milieu urbain, ils auraient plutt
tendance rester en groupe sans vraiment se mler aux autres groupes dusagers.
17 Cette partie fait la synthse de lensemble des observations en milieu urbain ralises durant lanne 2003 sur ce thme.
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Les usagers et les contextes de consommation
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Les lieux de contacts entre les usagers des deux espaces
Il semble que le trafic de drogues, hors celui de mdicaments dtourns, ne soit pas le lieu de
croisement des personnes prcaires usagers de drogues du milieu urbain et des personnes
usagers de drogues issues du milieu festif. Dun ct, lintrt pour les drogues de synthse qui
caractrise les usagers festifs ne semble pas tre partag par les usagers du milieu urbain, en
tout cas les plus prcaires dentre eux. De plus, lapprovisionnement en drogues, telles que
lhrone et la cocane, nemprunte pas les mmes voies selon quil sagisse du sud ou du nord.
Enfin, si le deal de crack est le fait des mmes filires du trafic dans les deux zones, il ne se
passe ni aux mmes moments, ni dans les mmes lieux.
Cependant, les lieux de deal de mdicaments dtourns apparaissent comme les lieux de
contacts privilgis entre les usagers de drogues issus du milieu festif et ceux du milieu urbain
proprement parler. Cest le cas des environs des Halles ainsi que, par intermittence, le quartier
de Chteau-Rouge. Ainsi, avant les vacances dt, il tait possible dobserver la prsence de
jeunes, vtus dans un style techno ou punk, la plupart du temps en groupe, venus
sapprovisionner en mdicaments de substitution et en benzodiazpines (Rohypnol,
Rivotril). En septembre, ces groupes avaient disparu de la scne de Chteau-Rouge puis sont
rapparus en fin danne 2003. Daprs des usagers-revendeurs de cachets, ils viendraient
essentiellement pour sapprovisionner en Sknan, utilis en voie injectable.
En 2003, dans le cadre de lobservation en milieu urbain, il a t voqu le cas dusagers de
drogues frquentant des squats technos , dans lesquels vivent, dans une certaine marginalit
et prcarit, des jeunes se revendiquant de la culture techno, trs ports sur lusage de drogues.
Ces lieux seraient frquents, sporadiquement, aussi bien par des jeunes bien insrs
socialement et appartenant au milieu techno, que par des usagers de drogues du milieu
urbain prcariss. Du fait de cette configuration, ces lieux seraient particulirement indiqus
pour le deal.
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tat des lieux de la toxicomanie et phnomnes mergents lis aux drogues Paris en 2003
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Les caractristiques des usagers issus du milieu techno
Concernant la question de lusage de drogues en milieu festif, des connaisseurs du milieu des
raves et des free parties distinguent en gnral quatre catgories de participants ces
vnements :
des personnes attires par la musique qui sy joue et qui ventuellement
consommeront des drogues. Elles reprsentent la grande majorit des personnes
prsentes dans ces ftes
des personnes qui viennent faire du commerce de drogues
des personnes ges dau moins trente ans se revendiquant plus ou moins de
mouvements de travellers , notamment des Spirale Tribes , quon peut voir
comme un avatar des mouvements hippies des annes 70. Ces Spirale Tribes ,
comm