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Page 1: Rapport de stage - Crédal - CLTB · Rapport de stage réalisé par omT Huppertz Maître de stage abriceF Adam Responsable des stages Bernard Hanin Approbation du projet Vincent Bodart

Rapport de stage - Crédal

Les � Community Land Trusts �, une solution

pour combattre les inégalités liées au logement à

Bruxelles ?

Rapport de stage réalisé par

Tom Huppertz

Maître de stage

Fabrice Adam

Responsable des stages

Bernard Hanin

Approbation du projet

Vincent Bodart

Approbation de la question de nature économique

Guilhem Cassan

Année académique 2014-2015

Master 120 en Sciences Économiques - Finalité Spécialisée

École d'économie de Louvain/UCL • Place Montesquieu 3 • 1348 Louvain-la-NeuveDépartement des sciences économiques/UNamur • Rempart de la Vierge 8 • 5000 Namur

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Table des matières

1 Descriptif du projet de stage 11.1 Crédal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11.2 Le projet de stage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31.3 Outils et méthodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31.4 Ré�exions critiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

2 Analyse d'une question économique 52.1 Question économique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

2.1.1 Situation du logement à Bruxelles . . . . . . . . . . . . . . . 62.1.2 Community Land Trust . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

2.2 Méthode . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92.2.1 Théorie du consommateur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92.2.2 La "propriété-occupation" comme couverture du risque de

�uctuation des loyers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102.2.3 Gestion tripartite du CLT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102.2.4 O�re et demande de services de logement . . . . . . . . . . . 102.2.5 Formule de revente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112.2.6 Verrouillage du subside . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.2.7 Redistribution et équité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

2.3 Résultats et conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

3 Évaluation personnelle 21

Bibliographie 22

Table des �gures 24

Annexes 27

iii

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Chapitre 1

Descriptif du projet de stage

1.1 Crédal

Crédal est né en 1984 suite à une ré�exion sur l'usage de l'épargne par lesbanques. En e�et, les principales banques belges participaient directement ou in-directement à l'apartheid en Afrique du Sud. Malgré le fait que l'action � banque-apartheid � interpella ces banques, la situation ne changea pas et des groupesd'épargne se formèrent pour allouer leurs économies à des projets en fonction devaleurs morales. La coopérative Crédal a été créée pour répondre au besoin d'or-ganismes �nanciers alternatifs.

Au niveau de la structure juridique du groupe Crédal, la coopérative à respon-sabilité limitée et à �nalité sociale rassemble les fonds des coopérateurs, délivreles crédits et, le cas échéant, distribue les béné�ces sous forme de dividendes auxcoopérateurs. Le groupe est doté de trois associations sans but lucratif (ASBL)assurant l'analyse et l'accompagnement des di�érents projets. Chacune a sa spé-ci�cité : l'accompagnement des associations et entreprises en économie sociale, lesactivités de micro�nance et le soutien à l'entrepreneuriat. J'ai e�ectué mon stageau sein de Crédal Conseil, la section destinée aux associations et entreprises enéconomie sociale.

Crédal Conseil s'articule autour de deux projets : l'agence conseil et le bureaud'étude. L'agence conseil accompagne la création, le développement ou la restruc-turation d'une entreprise à �nalité sociale en e�ectuant une étude de faisabilité duprojet, le plan �nancier, les statuts de la société et la mise en ÷uvre du projet.Elle donne également des conseils en gestion et �nance en établissant des outils degestion et en analysant des structures �nancières. Le bureau d'étude défriche lesopportunités pour l'économie sociale a�n de promouvoir des projets innovants.

Intéressons nous à présent aux informations �nancières des rapports d'activité,des comptes annuels et du prospectus de la coopérative Crédal.

La �gure 1.1 nous montre que le nombre de coopérateurs et le capital aug-mentent entre 2009 et 2013. L'augmentation des possibilités de �nancement al-ternative est importante en Europe car, comme le montre le rapport de Liikanenet al. (2012), l'économie européenne dépend fortement du �nancement des banques.L'impact de Crédal sur l'économie réelle est important car les prêts représententplus de 80 % du total des actifs. En comparaison, en 2011, les grandes banques

1

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2 CHAPITRE 1. DESCRIPTIF DU PROJET DE STAGE

européennes ont uniquement prêté environ 50 % du total de leurs actifs (cf. Lii-kanen et al. (2012)). Les coopératives comme Crédal diversi�ent et stabilisent lessources de �nancements (cf. Ferri and Kalmi (2014)) en ligne avec la stratégieEurope 2020 : l'activité de Crédal promouvoit une croissance inclusive et verte.En e�et, les microcrédits professionnels visent au développement entrepreneurial.Les microcrédits personnels permettent aux personnes exclues du système bancairetraditionnel de �nancer un achat indispensable au quotidien (véhicule permettantd'accéder à l'emploi, travaux d'isolation,...). Et le crédit solidaire soutient le déve-loppement de projets collectifs, citoyens , sociaux, environnementaux ou culturelsdans le monde associatif ou de l'économie sociale.

Figure 1.1 � Capital et coopérateurs

Malgré la crise �nancière et économique, les béné�ces de la coopérative sontrestés positifs (voir �gure 1.2) et ces trois dernières années, un dividende variantde 1,5 à 2,5 % a été distribué aux coopérateurs.

Figure 1.2 � Béné�ce et dettes sur capital

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1.2. LE PROJET DE STAGE 3

1.2 Le projet de stage

En tant que stagiaire de l'équipe de Crédal Conseil, j'ai accompagné les porteursde projets d'associations ou d'entreprises d'économie sociale principalement auniveau économique et juridique. En ce qui concerne la partie �nancière, j'ai e�ectuédes études de faisabilité, véri�é des plans �nanciers, conçu des outils de gestion,...Sur le plan juridique, j'ai proposé une structure de société adaptée au projet,synthétisé les réglementations en vigueur selon le type d'activités . . .J'ai égalementrencontré les clients et me suis rendu sur place pour contribuer à la mise en ÷uvredes projets. Tout ces tâches ont été e�ectuées en étroite collaboration avec lesmembres de l'équipe de Crédal Conseil.

En pratique, j'ai contribué à la relecture du prospectus de la coopérative euro-péenne TAMA, à la création d'une épicerie sociale (plan �nancier, normes AFSCA,aspects organisationnels), à l'étude de la structure juridiques � Associations cha-pitre XII �, à une étude à propos de l'établissement d'une légumerie en Wallonie, àla rédaction du rapport d'activité pour conserver l'agrément comme agence conseilen économie sociale, à l'étude de faisabilité �nancière d'une épicerie coopérative,au plan �nancier d'un projet de coopérative de biométhanisation et à l'analyse decomptes d'ASBL pour une action de soutien �nancier d'un partenaire de Crédal.

1.3 Outils et méthodes

La méthode de travail, que j'ai mise en ÷uvre, varie d'un projet à l'autre. Néan-moins, sa structure est la plupart du temps assez similaire. Après avoir rencontréles porteurs de projet, une convention d'accompagnement, variant selon les besoinsdes clients, est établie. Pour une étude de faisabilité, une recherche est e�ectuée.Celle-ci est menée sur la base de donnée de Crédal et sur l'Internet (comptes dela BNB, portail de statistiques, des études,...). Pour des questions juridiques, lemoniteur belge est consulté. Ensuite, une note de synthèse est rédigée. Pour élabo-rer un plan �nancier complet, sur base des recherches, des hypothèses sont posées.Ensuite, le modèle est construit sur Microsof Excel. Tout au long de l'accompa-gnement, des échanges ont lieu avec les porteurs de projet et dans l'élaborationd'outils, une attention particulière est portée à la compréhension et l'appropriationde ceux-ci par les porteurs.

1.4 Ré�exions critiques

Durant mon stage, j'ai participé à un comité de crédit. Après la discussionet l'éventuelle décision d'octroi, chaque analyste classe le risque sur une échelle

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4 CHAPITRE 1. DESCRIPTIF DU PROJET DE STAGE

de trois niveaux. Après le comité, j'ai demandé, à certains employés de Crédal,quel était l'impact de rating du risque sur la gestion des risques de la coopérative.Et, il n'y en a pas. La gestion des risques se fait � en bon père de famille �sanssystème de provision de liquidité en cas de risque élevé et sans � Asset LiabilityManagement �. Etant donné la stabilité prouvée de Crédal, est-ce que le faiblemontant des crédits permet de se passer d'une gestion rigoureuse des risques ? Ouplutôt, la structure est-elle trop petite et les béné�ces d'une gestion des risques troppetits pour engager une personne hautement quali�ée s'occupant de ce domaine ?

Il existe sept structures agréées agence conseil en économie sociale (AC) enWallonie. Les e�ectifs ne sont pas très élevés (uniquement quatre personnes pourcertaines AC). Pourtant, les activités menées par ces AC sont très diversi�ées(gestion, �nance, droit, stratégie, communication, ... ) et les secteurs d'activitésmultiples (agriculture, immobilier, services,...). Cette diversi�cation entraine unemultitude de compétence di�cile à regrouper avec peu de ressources humaines.Ne serait-il pas judicieux de réduire le nombre d'agence conseil et de former degrandes équipes diversi�ée ?

Á la création de Crédal, la coopérative a fonctionné exclusivement grâce à desvolontaires bénévoles. Actuellement, une quarantaine de personnes sont employéespar Crédal mais l'implication des volontaires reste essentielle. En e�et, une centainede volontaire permettent à Crédal de disposer de compétences très diversi�ées ettechniques. J'ai eu l'occasion de travailler avec certains d'entre eux lors d'un comitéde crédit ou d'un projet nécessitant des compétences très spéci�ques. Pour unepetite structure comme Crédal, une telle équipe de volontaires bénévoles est uneénorme force pour faire face à beaucoup de situations récurrentes (comité de crédit,accompagnement des entrepreneurs ayant obtenu un microcrédit. . .) ou spéci�ques(projets nécessitants des connaissances particulières).

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Chapitre 2

Analyse d'une question économique

2.1 Question économique

Depuis les récentes études sur les inégalités, notamment Piketty (2013) et lagouvernance des biens communs (Ostrom (1990)), les économistes manifestent unregain d'intérêt sur la répartition des richesses et les alternatives questionnantla propriété privée. Par contre, le logement comme vecteur de paupérisation etles inégalité à son d'accès sont rarement analysés d'un point de vue économique.Il m'a semblé pertinent d'analyser la crise du logement à Bruxelles décrite parBernard et al. (2007) pour ensuite explorer une piste de solution originale pouraugmenter l'accès au logement et particulièrement aux personnes précarisées : les� Community Land Trusts �(ci-après CLT) . Ce concept émane des Etats-Unis.Celui-ci repose sur une séparation du foncier et du bâti permettant à l'acquéreurdu logement de jouir des droits d'usage liées à la propriété. Le Trust est proprié-taire de la terre et détient une option d'achat sur l'immeuble, ce qui empêche laspéculation. Les CLT sont des organisations sans but lucratif ayant pour objectifsd'améliorer les intérêts sociaux, économiques et environnementaux d'une commu-nauté locale. Ils sont gérés démocratiquement et équitablement par les détenteursdes droits d'usage, des représentants du quartier et des représentants des pouvoirspublics (représenté sur la �gure 2.1 ). En 2010, une plate-forme Community LandTrust s'est formée à Bruxelles pour mener une étude de faisabilité et ensuite créerl'ASBL Community Land Trust Bruxelles (CLTB) et sa fondation. Crédal Conseila participé à l'étude de faisabilité du CLTB, pionnier européen. Dans ce rapportde stage, l'analyse portera sur les Community Land Trusts comme solution pourcombattre les inégalités liées au logement à Bruxelles.

Premièrement, une analyse empirique de la situation du logement à Bruxellessera e�ectuée. Deuxièmement, la piste des CLT pour combattre les inégalités liéesau logement sera explorée sous l'angle économique. L'accent sera mis sur la for-mule de revente, essentielle pour la pérennité de ce projet, établie par le CLTB.Finalement, les principaux résultats de l'analyse seront exposés et des perspectivesseront suggérées.

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6 CHAPITRE 2. ANALYSE D'UNE QUESTION ÉCONOMIQUE

Figure 2.1 � Structure du CLT Bruxelles

communitylandtrust.wordpress.com

2.1.1 Situation du logement à Bruxelles

La détermination du prix du logement dépend principalement de trois fac-teurs : la pression foncière, la pression démographique et l'investissement publicin�uençant la prise de valeur. Le développement rapide de Bruxelles et son interna-tionalisation ont augmenté la pression démographique et foncière. De plus, la crise�nancière a incité les investisseurs à se tourner vers les placements immobiliers enEurope. Kahane et al. (2012) montrent que la population bruxelloise augmente :la croissance naturelle est positive et le solde migratoire également.

Bruxelles est une ville de locataire. En e�et, plus de 50 % des logements sonthabités par des locataires (Bernard et al. (2007)). Et comme le montre la �gure2.2, le loyer augmente plus vite que l'indice santé en Belgique. Etant donné que lespensions, allocations sociales sont indexés par rapport à l'indice santé, le pouvoird'achat des ménages locataires diminue.

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2.1. QUESTION ÉCONOMIQUE 7

Figure 2.2 � Indice loyer et indice santé

De Keersmaecker (2014)

Sur la �gure A.1 en annexe, nous observons que 47% des locataires avaientdes revenus inférieurs à 1500 euros à Bruxelles en 2013. Sur la �gure 2.3, nousconstatons que pour les locataires à très faibles revenus (entre 500 et 1000 euros),le loyer représentait 70 % du buget des locataires à Bruxelles en 2013 ; cette partdiminue à 48 % pour la tranche de revenus de 1000 à 1500 euros.

Figure 2.3 � Revenus des locataires et loyer du logement

De Keersmaecker (2014)

Pour les personnes à faibles revenus, le parc locatif bruxellois est di�cile d'accèspour des parts de loyers de 25 ou 30 % dans le budget. En e�et, si le loyer représente30 % du budget, en 2013, le deuxième décile de revenu ne sait pas accéder au parclocatif bruxellois, le troisième uniquement à 1 % et le quatrième à 4 % (voir �gure

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8 CHAPITRE 2. ANALYSE D'UNE QUESTION ÉCONOMIQUE

A.2 en annexe). Depuis 2004, l'accessibilité du parc locatif Bruxellois diminue (voir�gure 2.4).

Figure 2.4 � Evolution du parc locatif accessible à chaque décile de revenus(2004-2013)

De Keersmaecker (2014)

En ce qui concerne les prix d'acquisition des logements à Bruxelles, les prixréels des maisons ont légèrement diminué depuis 2007 et celui des appartementsaugmenté dans la Région de Bruxelles-Capitale (Kahane et al. (2012)). Les niveauxde prix d'acquisition restant néanmoins élevé et le durcissement du crédit depuisla crise �nancière (Diamond and Rajan (2009) et Cornett et al. (2011)) ne facilitepas les possibilités d'acquisitions immobilières, surtout pour les personnes à basrevenus. De plus, Noël and Perrouty (2009) et Romainville (2010) expliquent que lapolitique régionale bruxelloise d'accès à la propriété immobilière favorise les classesmoyennes et supérieures en creusant les inégalités. Cette gentri�cation, principa-lement des quartiers centraux, est accentuée par l'absence de contrôle des loyerset la très faible augmentation des logements sociaux. Les aspects sociologiques deces inégalités liées au logement sont décrites dans Bugeja-Bloch (2013).

En conclusion, les personnes à bas revenus n'ont pas la possibilité d'acquérirun bien immobilier à Bruxelles. En cas de location, pour ces mêmes personnes,l'accessibilité du parc locatif bruxellois a fortement diminué et cela entraine unepart très élevée du loyer dans le budget. Selon le Rassemblement Bruxellois pourle Droit à l'Habitat, il faut attendre au minimum 10 ans pour obtenir un logementsocial dans la Région bruxelloise.

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2.2. MÉTHODE 9

2.1.2 Community Land Trust

Le concept de � Community Land Trust �a été mis en pratique aux Etats-Unisdès 1969. Il s'est ensuite di�usé ; puis fortement développé à partir des années80 (Davis (2010)). Il existe di�érentes formes de CLT ; néanmoins sept caractéris-tiques constituent leurs bases dans la littérature américaine. Dans son mémoire,Leroy (2014) a dressé une liste de ces attributs : l'existence d'une personne moralesans but lucratif, la dissolution de la propriété du sol et de celle du bâti, le ca-ractère permanent de l'accessibilité des logements (et du verrouillage du subside),la responsabilité perpétuelle, l'intendance, l'ouverture de l'a�liation et la gestiontripartite. Pour l'application du modèle des CLT dans la cadre légal belge, veuillezvous référez à Leroy (2014). Le CLT permet de favoriser l'accès à la propriété àdes personnes à bas revenus et à reconsidérer la gestion des droits de propriété surla terre. Dans ce rapport de stage, nous allons nous concentrer sur la faculté desCLT à combattre les inégalités au logement à Bruxelles.

2.2 Méthode

2.2.1 Théorie du consommateur

Considérons un consommateur et deux ensemble de biens : le logement et lesautres biens. Faisons l'hypothèse que l'accès à un CLT diminue le prix du bienlogement. Cette baisse de prix augmente le pouvoir d'achat du consommateur etdonc son bien-être car il atteint une courbe d'indi�érence supérieure (voir �gure2.5). L'analyse de Cornuel (2013) souligne que plus l'e�et de substitution sur laconsommation de logement est faible, plus l'augmentation du bien-être est impor-tante. Le marché immobilier est considéré comme un marché composés de bienshétérogènes (Cornuel (2013)). Les asymétries d'informations et surtout les coûtsde déménagement (et les droits d'enregistrements pour les acquisitions) réduisentl'élasticité de la demande.

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10 CHAPITRE 2. ANALYSE D'UNE QUESTION ÉCONOMIQUE

Figure 2.5 � Choix du consommateur avec CLT

2.2.2 La "propriété-occupation" comme couverture du risquede �uctuation des loyers

Sinai and Souleles (2003) soulignent que le fait d'être propriétaire réduit lerisque de l'augmentation du prix des loyers. Étant donné la part du budget consa-crée au loyer par les personnes à faibles revenus à Bruxelles et l'évolution de l'ac-cessibilité du parc locatif bruxellois (voir page 6), cette réduction de risque estimportante.

2.2.3 Gestion tripartite du CLT

La gestion tripartite (détenteur du droit d'usage, représentants du quartier etdes pouvoirs publics) favorise l'intégration des détenteurs d'usage dans le quartier(Bernard et al. (2010)). De plus, Maury (2011) souligne l'e�cacité accrue de cetteorganisation tripartite amorçant une nouvelle gestion urbaine locale prenant encompte les besoins et les attentes des personnes.

2.2.4 O�re et demande de services de logement

Si nous considérons un logement comme un bien fournissant une quantité deservices de logement, nous homogénéisons le marché immobilier a�n de pouvoirconsidérer l'o�re et la demande agrégée de logement. L'o�re de services de loge-ment est peu élastique étant donné que la quantité n'est pas facilement ajustable(décision d'investissement, permis de construction, construction ou rénovation,...)mais il existe tout de même des logements vacants et une certaines friction sur lemarchés immobiliers (Robinson (1979)). Dans notre cas, nous pouvons simpli�er le

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2.2. MÉTHODE 11

modèle sans prendre en compte la dynamique des nouvelles constructions selon lapro�tabilité du marché immobilier étant donné que l'o�re des CLT s'adresse à unpublic à faibles revenus. Sur la �gure 2.6, nous remarquons qu'une augmentationde l'o�re de services de logement (O à O'), par un CLT par exemple, entraine unebaisse du prix d'équilibre de ce marché (P à P'). L'amplitude du changement deprix dépend de la pente, l'élasticité, de la demande.

Figure 2.6 � O�re et demande de services de logement

2.2.5 Formule de revente

Le CLTB a �xé une formule de revente qui limite la plus-value en cas de reventeet détermine la part revenant au CLT.

La formule de revente établie par le CLTB en cas de plus-value est la suivante :

PRV = CI + (Inv − Am) + 25%PV + FCLTB (2.1)

où PRV est le prix de revente (portant sur l'ensemble des droits du cédant : ledroit de super�cie et la propriété des constructions), CI la contribution initiale duménage acquéreur à l'acquisition des droits, Inv les investissements réalisés, Amles amortissements cumulés, PV la plus-value et FCLTB le montant revenant àla fondation du CLTB.

Une expertise est sollicitée pour déterminer la valeur vénale à l'acquisition(EA) et à la cession (EC). La plus-value correspond à EC − EA, La fondationrecevra le maximum entre 3.000 euros indexés annuellement par rapport à l'indicedes prix à la consommation (IPC) et 6 % de la plus-value expertisée. En cas demoins value (MV), celle-ci sera supportée par le cédant (sauf si la Fondation endécide autrement). En cas de moins-value, la formule 2.1 devient donc :

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12 CHAPITRE 2. ANALYSE D'UNE QUESTION ÉCONOMIQUE

PRV = CI + (Inv − Am)−MV + FCLTB (2.2)

Par souci de simpli�cation, supposons que la contribution initiale soit égaleà la valeur vénale d'acquisition (CI = EA) et qu'aucun investissement dans lebâtiment n'a été réalisé (Inv = 0 et donc Am = 0). La formule 2.1, dans le casd'une plus-value (ECT > CIt0), devient donc :

PRVT = CIt0 + 25%(ECT − CIt0)

+ maxiIPC ,iim

{6%(ECT − CIt0); 3000(1 + iIPC)

T−t0}

(2.3)

Et la formule 2.2, dans le cas d'une moins-value (ECT < CIt0) :

PRVT = CIt0 + (ECT − CIt0)

+ maxiIPC ,iim

{6%(ECT − CIt0); 3000(1 + iIPC)

T−t0}

(2.4)

Dans les équations 2.3 et 2.4, t0 fait référence à la période d'achat, T à lapériode de vente, PV = ECT −CIt0 , ECT = CIt0(1 + iim)

T−t0 ( iim est l'in�ationannuelle des biens immobiliers), FCLTB = MAX(6%(ECT −CIt0); 3000i

T−t0IPC ) et

iIPC est l'in�ation annuelle en utilisant l'indice des prix à la consommation commeindicateur.

Pour comparer le prix de revente d'un bien immobilier sur le marché "normal"et en tant que CLT, prenons par exemple un bien immobilier dont la contributioninitiale (ou prix d'acquisition) est égale à 100.000 euros (CI = EA = 100.000euros). Ensuite, déterminons iim comme l'in�ation annuelle des biens immobiliers.Nous allons comparer le prix de revente pour un même bien selon son le marchéimmobilier classique et selon son utilisation au CLTB avec des taux d'in�ationimmobilière et d'in�ation générale (en utilisant l'indice des prix à la consommationcomme indicateur) donnés.

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2.2. MÉTHODE 13

Figure 2.7 � Évolution des PRV avec iim = 3 % et iIPC = 1 %

Sur la �gure 2.7, avec iim = 3 % et iIPC = 1 %, le prix de revente (PRV) dumarché dépasse celui du CLT en période 2 (PRV marché < PRV CLT en t = 1) etl'écart se creuse de plus en plus car la croissance de PRV du marché est supérieureà celle du CLT. Par contre, le taux de croissance de cet écart diminue et tend vers3 % ; en e�et, si iim > 0 et iim > iIPC , alors

limt→+∞

(| PRVmarche,t − PRVCLT,t |)(| PRVmarche,t−1 − PRVCLT,t−1 |)

− 1 = iim

Dans le cas où iim > 0 et iim < iIPC ,

limt→+∞

(| PRVmarche,t − PRVCLT,t |)(| PRVmarche,t−1 − PRVCLT,t−1 |)

− 1 = iIPC

Figure 2.8 � Évolution des PRV avec iim = - 2 % et iIPC = 1 %

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14 CHAPITRE 2. ANALYSE D'UNE QUESTION ÉCONOMIQUE

Sur la �gure 2.8, avec iim = - 2 %, iIPC = 1 %, le prix de revente (PRV)du marché reste constamment légèrement inférieur à celui du CLT et l'écart secreuse à un rythme constant de 1 %. Si iim < 0, alors nous savons que, ∀t > 1,

(| PRVmarche,t − PRVCLT,t |)(| PRVmarche,t−1 − PRVCLT,t−1 |)

−1 = iIPC . Dans le cas d'une dé�ation du marché

immobilier, le PRV du CLT est toujours supérieur ou égal à celui du marché. Ene�et, malgré la moins-value subie par le cédant dans la formule de revente du CLT,il reste toujours le troisième terme de l'équation 2.4 :

maxiIPC ,iim

{6%(ECT − CIt0); 3000(1 + iIPC)

T−t0}

qui est égal ou supérieur à zéro.

Intéressons-nous à présent aux points d'intersection du PRV du marché et duPRV CLT qui dépend de iim et iIPC dans le cas d'une plus-value (étant donné quele PRV du CLT est égal ou supérieur au PRV marché dans le cas d'une moins-value). Cela permet de déterminer les situations de taux d'in�ation immobilière etgénérale pour lesquelles le PRV CLT est inférieur au PRV du marché. Pour trouverces points d'intersection, nous égalisons les deux prix de revente :

CIt0(1 + iim)T−t0 = CIt0 + 0, 25

{CIt0(1 + iim)

T−t0 − CIt0}

+ maxiIPC ,iim

{0, 06(CIt0(1 + iim)

T−t0); 3000(1 + iIPC)T−t0

}(2.5)

Ensuite, nous séparons en deux cas de �gure selon la fonction de maximisationqui dépend de iIPC et iim. Le cas 1 avec 0, 06(CIt0(1+iim)

T−t0) > 3000(1+iIPC)T−t0

donne iim = 0. Le cas 2 avec 0, 06(CIt0(1 + iim)T−t0) < 3000(1 + iIPC)

T−t0 donneiIPC = f(iim). Le développement mathématique complet se trouve en annexe.

Dans le cas 1, iim = 0 et donc le point d'intersection entre les deux PRV secroisent quand l'in�ation immobilière est nulle. Ceci concorde avec la constatationprécédente que le PRV du CLT est toujours supérieure au PRV du marché en casde dé�ation immobilière sous nos hypothèses. Dans le cas 2, l'in�ation générale(IPC) est fonction de l'in�ation immobilière et nous allons donc nous intéresser àcette relation. En modélisant la relation entre iim et iIPC , nous pouvons observerles di�érents prix de revente en fonction du marché ou du CLT selon le coût initial(CIt0).

Nous avons gardé l'hypothèse de départ en ce qui concerne la contribution ini-tiale (CIt0=100.000) et la modélisation a été faite sur 10 périodes a�n que la repré-sentation graphique représente les intuitions. La �gure 2.9 montre les intersections

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2.2. MÉTHODE 15

entre les deux prix de revente (marché et CLT) selon l'in�ation immobilière (axedes abscisses) et l'in�ation relative à l'IPC (axe des ordonnées). Lorsque iim < 0,nous nous apercevons que le PRV du CLT est supérieur au PRV du marché. Quandl'in�ation immobilière est très faible, le PRV CLT peut être inférieur au PRV mar-ché si iIPC est très faible ou assez élevé. Par contre, si l'in�ation immobilière estélevée, la représentation montre que le PRV du marché est beaucoup plus élevéeque le PRV du CLT.

−4e+09

−3e+09

−2e+09

−1e+09

0e+00

−2 −1 0 1 2

−3

−2

−1

0

1

2

i_IM

i_IP

C

Figure 2.9 � Intersections des PRV selon iim et iIPC avec CIt0= 100.000

Sur la �gure 2.10, CIt0=10.000 (100.000 auparavant) et toutes autres chosessont égales par ailleurs. Outre les mêmes constatations de la �gure 2.9, nous re-marquons que si CIt0 est faible, le PRV CLT est beaucoup plus élevé que le PRVmarché si iim est faible et iIPC élevé. Cela est dû au terme

+ maxiIPC ,iim

{6%(ECT − CIt0); 3000(1 + iIPC)

T−t0}

des équations 2.3 et 2.4. En e�et, lorsque iim est faible, le terme devient

0, 06(CIt0(1 + iim)T−t0) < 3000(1 + iIPC)

T−t0

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16 CHAPITRE 2. ANALYSE D'UNE QUESTION ÉCONOMIQUE

et cette di�érence est d'autant plus marquée si iIPC est fort élevé.

−4e+08

−3e+08

−2e+08

−1e+08

0e+00

1e+08

2e+08

−2 −1 0 1 2

−3

−2

−1

0

1

2

i_IM

i_IP

C

Figure 2.10 � Intersections des PRV selon iim et iIPC avec CIt0= 10.000

Sur la �gure 2.11, nous notons que, pour une contribution initiale plus élevée(CIt0=500.000), la pente de la frontière est moins forte. Cela s'explique par le faitque le poids de 3.000 indexé à iIPC in�uence moins une contribution initiale élevée(CIt0) lorsque

0, 06(CIt0(1 + iim)T−t0) < 3000(1 + iIPC)

T−t0

.En conclusion, la formule de revente du CLTB réduit la spéculation immobilière

quand l'in�ation immobilière est positive. Plus l'in�ation immobilière est grande,plus la di�érence entre le prix de revente du marché et le prix de revente duCLTB est grande. En cas de dé�ation, le prix de revente du CLT est supérieur àcelui du marché et d'autant plus grand lorsque l'in�ation générale est élevée. Auniveau de la conception de la formule, elle s'avère assez complexe et son choix ade nombreuses implications sur le prix de revente selon la contribution initiale,l'in�ation relative à l'IPC et surtout l'in�ation immobilière.

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2.2. MÉTHODE 17

−2.0e+10

−1.5e+10

−1.0e+10

−5.0e+09

0.0e+00

−2 −1 0 1 2

−3

−2

−1

0

1

2

i_IM

i_IP

C

Figure 2.11 � Intersections des PRV selon iim et iIPC avec CIt0= 500.000

2.2.6 Verrouillage du subside

La Région de Bruxelles-Capitale subsidie le CLTB. Étant donné la captation dela plus-value lors de la revente en cas d'in�ation immobilière, le concept de CLTverrouille le subside des pouvoirs publics. En e�et, une fois le bâtiment achetéou construit, celui-ci pourra rester accessible à des personnes à faibles revenuscontrairement aux autres biens en cas d'in�ation immobilière. Comparé aux sub-sides réduisant les loyers des personnes à faibles revenus, dans une approche àlong terme et lors de période de pression immobilière à la hausse, les CLT peuvento�rir des logements à ces personnes à moindre coûts pour les pouvoirs publics.Néanmoins, étant donné le caractère long-terminste des logements CLT, dans lecas d'une augmentation des revenus du détentueur du droit d'usage, l'accès auCLT est garanti et ne s'ajuste donc pas à court terme. Ceci dépend bien sûr denombreux facteurs comme le type de logement, la part du subside, la participa-tion �nancière des détenteurs du droit d'usage. . .qui ne sont pas analysés dans cerapport de stage. Un exemple est illustré sur la �gure 2.12. Celui-ci considère unein�ation annuelle immobilière positive (3,42 %) et montre le verrouillage des dif-

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18 CHAPITRE 2. ANALYSE D'UNE QUESTION ÉCONOMIQUE

férents subsides (achat du sol et accessibilité) selon une revente du logement après10 ans.

Figure 2.12 � Verrouillage perpétuel des subsides et captation de la plus-value

communitylandtrust.wordpress.com

2.2.7 Redistribution et équité

Pour analyser la redistribution engendrée par l'accès à la propriété et au loge-ment, nous devons distinguer deux équités : l'équité verticale et l'équité horizontale.La première cherche a réduire les écarts de niveau de vie entre les individus et ladeuxième à octroyer les mêmes droits et obligations à des personnes dans la mêmesituation. L'impact d'un CLT améliore l'équité verticale car ce concept réduit unepartie des di�érences de revenus et d'accès au logement (surtout dans une villecomme Bruxelles). Par contre, en ce qui concerne l'équité horizontale, le CLT nepermet pas à toute les personnes vivant dans la même situation d'améliorer leurniveau de vie. En e�et, étant donné le nombre limité de logement fourni par leCLT, une sélection s'opère et cela ne favorise pas l'équité horizontale. Les CLTsont compatibles avec le point de vue de Rawls (2009), ils pro�tent aux personnesles moins avantagées en favorisant l'accès au logement de manière durable.

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2.3. RÉSULTATS ET CONCLUSION 19

2.3 Résultats et conclusion

Dans une situation d'inégalité croissante d'accès au logement dans la Régionde Bruxelles-Capitale et d'un marché immobilier haussier, le CLTB est un conceptpermettant de réduire les inégalités en facilitant l'accès durable à la propriété etau logement des personnes à faibles revenus. Premièrement, le CLT permet dediminuer le côut du logement du détenteur du droit d'usage et donc d'atteindreune courbe indi�érence plus élevée. Deuxièmement, la propriété immobilière réduitles risques de �uctuation du loyer représentant une part importante du budgetdes personnes à faibles revenus. De plus, le CLT instaure une gestion tripartitepermettant l'intégration et la participation des détenteurs du droit d'usage dansle projet. Ensuite, les CLT, par rénovation ou construction, augmentent l'o�rede services de logement et donc cela entraine une baisse du prix de ce service.L'amplitude de la diminution du prix dépendra du nombre de services de logementssupplémentaires mais également de l'élasticité de la courbe de demande. En outre,la formule de revente du CLTB réduit la spéculation immobilière quand l'in�ationimmobilière est positive. Plus l'in�ation immobilière est grande, plus la di�érenceentre le prix de revente du marché et le prix de revente du CLTB est grande.En cas de dé�ation, le prix de revente du CLT est supérieur à celui du marché etd'autant plus grand lorsque l'in�ation générale est élevée. Ce mécanisme permet deverrouiller le subside et d'assurer la transmission du droit d'usage à des personnesà faibles revenus. Finalement, la redistribution engendre une équité verticale maispas spécialement une équité horizontale.

Il faudrait approfondir l'impact des CLT avec des modélisations en s'appuyantsur des données empiriques (série temporelle des taux d'in�ation, revenus des per-sonnes à bas revenus, capacité d'emprunt de celle-ci,...) et exploiter les études decas des exemples américains pour tenter de dégager des enseignements pour lesfuturs CLT européens. Avec ces futures études, des comparaisons au niveau del'e�cacité des politiques publiques de logements (CLT vs. logements sociaux) etdes �nancements des CLT pourront être e�ectuées.

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20 CHAPITRE 2. ANALYSE D'UNE QUESTION ÉCONOMIQUE

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Chapitre 3

Évaluation personnelle

J'ai apprécié mon expérience de stage. Après 4 années d'études assez théoriques,la pratique permet de consolider le savoir et surtout de le mettre à disposition deprojets de société. Ce qui m'a particulièrement plu, c'est la plus-value sociale,environnementale ou culturelle apportée par les projets accompagnés par Crédal.En e�et, j'ai pu travailler en fonction de mes valeurs morales, ce qui est importantà mes yeux, en contribuant à des projets de société. Je pense que la formationd'économiste ne se résume pas à l'objectif de décrocher un emploi bien rémunéré nid'uniquement améliorer la rentabilité d'une entreprise mais surtout de contribuer àla mise en ÷uvre de projets relevant les dé�s du XXIe siècle siècle. J'ai pu en releverquelques-uns chez Crédal. L'ambiance de travail était propice à mon intégrationrapide dans l'équipe de Crédal Conseil. Dès mes premiers jours de travail, nousavons été manger ensemble. Au niveau des compétences acquises, je distingueraicelles plutôt liées à la connaissance et celles liées à une manière de travailler et des'organiser.

Connaissances

D'un point de vue économique, les di�érents travaux que j'ai réalisé m'ontpermis d'améliorer ma compréhension et d'alimenter mes ré�exions. C'est sur-tout mon esprit analytique et la mise en pratique des connaissances-méthodes quej'ai développés. En e�et, j'ai acquis une certaine rigueur d'analyse �nancière etde modélisation pour estimer la faisabilité économique de projets concrets. J'aiégalement approfondi des connaissances juridiques, jusqu'ici quasiment exclusive-ment théorique. Plus particulièrement, j'ai appris les avantages, inconvénients etspéci�cités des ASBL et des SCRL. La multitude des projets accompagnés par Cré-dal Conseil m'a permis d'aborder des projets d'agriculture, d'horeca, d'industrieagro-alimentaire, d'insertion socio-professionnelle, de ressourcerie, de distributionalimentaire . . .La visite sur le terrain, notamment de plusieurs épiceries sociales,permettent de développer une approche pratique, de mieux se rendre compte duvécu des personnes. De manière général, l'aspect concret des réalisations e�ectuésm'a éveillé.

21

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22 CHAPITRE 3. ÉVALUATION PERSONNELLE

Organisation

J'ai appris à m'adapter à une forme d'organisation donnée, tant sur le planpratique (outils informatiques) que sur le plan relationnel ( c'est-à-dire la plani�-cation de réunions des membres de l'équipe . . .). Ce ne fut pas systématiquementaisé de m'harmoniser avec ce mode de travail. En outre, j'ai a�né ma gestiondu temps a�n de répondre de manière e�ciente aux tâches demandées dans lesmeilleurs délais possibles. J'ai appris à me contraindre à des horaires, ce qui estfort di�érent de mon rythme de travail personnel en tant qu'étudiant. Je me suisrendu compte de l'importance de la proximité du logement vis-à-vis du lieu detravail et des contraintes imposées par un horaire à temps plein.

Outils

Au niveau des outils, j'ai fortement perfectionné mon utilisation d'Excel. E�ec-tivement, en analysant des comptes et en e�ectuant des modélisations �nancières,j'ai pu découvrir davantage les possibilités qu'o�rent ce logiciel. J'ai également af-�né mes recherches de données sur l'Internet - de nombreuses recherches m'ont étéd'une précieuse aide dans les tâches qui m'était assignées. J'ai appris à m'adapteraux di�érentes structurations de ces informations selon les besoins de Crédal.

Relations professionnelles

Malgré mes expériences des jobs d'étudiants dans le monde du travail, le stagechez Crédal m'a donné la possibilité de développer des relations professionnellessur une plus longue durée et surtout avec une approche di�érente : celle de l'éco-nomie sociale. J'ai perfectionné ma manière communiquer en fonction du publiccible - parfois des explications techniques doivent être transmises d'une manièrecompréhensive voir même pédagogique. De par mon ressenti, en tant que sujet,l'approche est assez di�érente tant en interne que dans les liens avec les clients.Je pense avoir amélioré mes capacités relationnelles dans cet environnement varié.De plus, j'ai pu élargir mon réseau de connaissances professionnelles en économiesociale, ce qui pourrait être un tremplin vers le monde du travail qui s'ouvrira àmoi dans quelques semaines.

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Table des �gures

1.1 Capital et coopérateurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21.2 Béné�ce et dettes sur capital . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2

2.1 Structure du CLT Bruxelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62.2 Indice loyer et indice santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 72.3 Revenus des locataires et loyer du logement . . . . . . . . . . . . . 72.4 Evolution du parc locatif accessible à chaque décile de revenus(2004-

2013) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82.5 Choix du consommateur avec CLT . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102.6 O�re et demande de services de logement . . . . . . . . . . . . . . . 112.7 Évolution des PRV avec iim = 3 % et iIPC = 1 % . . . . . . . . . . 132.8 Évolution des PRV avec iim = - 2 % et iIPC = 1 % . . . . . . . . . 132.9 Intersections des PRV selon iim et iIPC avec CIt0= 100.000 . . . . 152.10 Intersections des PRV selon iim et iIPC avec CIt0= 10.000 . . . . . 162.11 Intersections des PRV selon iim et iIPC avec CIt0= 500.000 . . . . 172.12 Verrouillage perpétuel des subsides et captation de la plus-value . . 18

A.1 Répartition des locataires suivants leurs revenus mensuels . . . . . . 27A.2 Part du parc locatif accessible à chaque décile de revenus (2013) . . 27

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26 TABLE DES FIGURES

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Annexe A

Figure A.1 � Répartition des locataires suivants leurs revenus mensuels

De Keersmaecker (2014)

Figure A.2 � Part du parc locatif accessible à chaque décile de revenus (2013)

De Keersmaecker (2014)

27

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28 ANNEXE A.

Développement mathématique complet des points d'intersection du PRVdu marché et du PRV du CLT qui dépend de iim et iIPC dans le cas d'uneplus-value

CIt0(1 + iim)T−t0 = CIt0 + 0, 25

{CIt0(1 + iim)

T−t0 − CIt0}

+ maxiIPC ,iim

{0, 06(CIt0(1 + iim)

T−t0); 3000(1 + iIPC)T−t0

}(A.1)

0, 75CIt0(1 + iim)T−t0 = 0, 75CIt0

+ maxiIPC ,iim

{0, 06(CIt0(1 + iim)

T−t0); 3000(1 + iIPC)T−t0

}(A.2)

Le cas 1 :

⇒ 0, 06(CIt0(1 + iim)T−t0) > 3000(1 + iIPC)

T−t0 (A.3)

0, 75CIt0(1 + iim)T−t0 = 0, 75CIt0 + 0, 06(CIt0(1 + iim)

T−t0)

(0, 75− 0, 06)(1 + iim)T−t0CIt0 = (0, 75− 0, 06)CIt0

(1 + iim)T−t0 = 1

iim = 0

Le cas 2 :

⇒ 0, 06(CIt0(1 + iim)T−t0) < 3000(1 + iIPC)

T−t0 (A.4)

0, 75CIt0(1 + iim)T−t0 = 0, 75CIt0 + 3000(1 + iIPC)

T−t0

CIt0(1 + iim)T−t0 = CIt0 + 4000(1 + iIPC)

T−t0

iIPC =T−t0

√1

4000CIt0(1 + iim)T−t0 − CIt0 − 1

= f(iim)