rapport au directeur du livre et de la lecture sur le

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RAPPORT AU DIRECTEUR DU LIVRE ET DE LA LECTURE SUR LE PATRIMOINE DES BIBLIOTHÈQUES Au début du mois de novembre 1981, M. Jean Gattegno, directeur du livre et de la lecture, en accord avec M. Denis Varloot, directeur des biblio- thèques, des musées et de l'information scientifique et technique, priait M. Louis Desgraves, inspecteur général des bibliothèques, de constituer et de prési- der une commission chargée de lui « proposer toutes mesures utiles pour mieux conserver, mettre en valeur et enrichir le patrimoine des bibliothèques publiques, Bibliothèque nationale comprise, sans oublier le patrimoine contemporain ». Outre M. Des- graves, président, la Commission comprenait : MM. Pierre Aquilon, maître-assistant au Centre d'études supérieures de la Renaissance, Jean-Marie Arnoult, conservateur du Centre Joël Le Theule de la Bibliothèque nationale, Mmes Édith Bayle, chef de la section de l'Humanisme de l'Institut de recherche et d'histoire des textes du Centre national de la recherche scientifique, Marie-Louise Bossuat, conservateur en chef du Département des livres imprimés de la Bibliothèque nationale, MM. Maurice Caillet, inspecteur général honoraire (vice-président), Jean-Luc Gautier, conservateur à la Direction du livre et de la lecture (rapporteur), Alain Girard, conservateur à la Bibliothèque municipale de Caen, Henri-Jean Martin, profes- seur à l'École nationale des Chartes, chargé d'enseignement à l'École nationale supérieure de bibliothécaires, directeur d'études à l'École pratique des hautes études, Jean-Paul Oddos, conservateur à la Bibliothèque municipale de Troyes, Denis Pallier, conservateur chargé de la Division du plan et de la gestion des bibliothèques de la Direction des biblio- thèques, des musées et de l'information scientifique et technique, Louis Yvert, conservateur en chef chargé du Service des bibliothèques publiques de la Direction du livre et de la lecture. La Commission a considéré qu'étaient de son ressort les points suivants : la conservation de tous les documents, sans distinction d'âge ; la mise en valeur des fonds anciens, rares et précieux ; les acquisitions de documents qui, pour diverses raisons, constituent un patrimoine éminent et parfois sous- estimé : documents reçus au titre du dépôt légal, livres de bibliophilie et reliures d'art contemporains, documents produits à l'étranger, documents icono- graphiques, sonores et audio-visuels, documents pré- cieux, plus ou moins anciens, destinés à compléter les fonds. Les travaux ont débuté à la fin du mois de novembre. Près de deux cents personnes ont été consultées au cours de très nombreuses réunions, ainsi que les associations professionnelles et les organisations syndicales. Conformément aux enga- gements pris, un rapport d'environ 140 pages, assorti d'un volume d'annexes de 300 pages, a été remis au directeur du livre et de la lecture le 2 juin ; des exemplaires ont été adressés au directeur des biblio- thèques, des musées et de l'information scientifique et technique et à l'administrateur général de la Bibliothèque nationale. En attendant la diffusion de ce rapport, on en donne ici de larges extraits. Les coupures effectuées représentent environ un quart du texte. Elles sont toutes signalées par des crochets carrés, à l'exception des suppressions de notes, qui, pour la plupart, ren- voient aux annexes. J.-L. G. AVANT-PROPOS 1. PATRIMOINE ET BIBLIOTHÈQUES Le mot de patrimoine est rarement apparié à celui de bibliothèques. Il ne fait de doute pour per- sonne qu'un monument, un objet ancien constituent un patrimoine ; il n'en va pas de même pour les collections des bibliothèques, s'agit-il des plus pré- cieuses. En 1980 a été proclamée une « année du patrimoine ». Les mesures prises à cette occasion en faveur des collections des bibliothèques sont minimes par rapport à celles dont ont bénéficié les musées, les monuments historiques et même les

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Page 1: RAPPORT AU DIRECTEUR DU LIVRE ET DE LA LECTURE SUR LE

RAPPORT AU DIRECTEUR DU LIVRE ET DE LA LECTURESUR LE PATRIMOINE DES BIBLIOTHÈQUES

Au début du mois de novembre 1981, M. Jean

Gattegno, directeur du livre et de la lecture, en

accord avec M. Denis Varloot, directeur des biblio-

thèques, des musées et de l'information scientifique

et technique, priait M. Louis Desgraves, inspecteur

général des bibliothèques, de constituer et de prési-

der une commission chargée de lui « proposer toutes

mesures utiles pour mieux conserver, mettre en

valeur et enrichir le patrimoine des bibliothèques

publiques, Bibliothèque nationale comprise, sans

oublier le patrimoine contemporain ». Outre M. Des-

graves, président, la Commission comprenait :

MM. Pierre Aquilon, maître-assistant au Centre

d'études supérieures de la Renaissance, Jean-Marie

Arnoult, conservateur du Centre Joël Le Theule de

la Bibliothèque nationale, Mmes Édith Bayle,

chef de la section de l'Humanisme de l'Institut de

recherche et d'histoire des textes du Centre

national de la recherche scientifique, Marie-Louise

Bossuat, conservateur en chef du Département

des livres imprimés de la Bibliothèque nationale,

MM. Maurice Caillet, inspecteur général honoraire

(vice-président), Jean-Luc Gautier, conservateur à

la Direction du livre et de la lecture (rapporteur),

Alain Girard, conservateur à la Bibliothèque

municipale de Caen, Henri-Jean Martin, profes-

seur à l'École nationale des Chartes, chargé

d'enseignement à l'École nationale supérieure de

bibliothécaires, directeur d'études à l'École pratique

des hautes études, Jean-Paul Oddos, conservateur à

la Bibliothèque municipale de Troyes, Denis Pallier,

conservateur chargé de la Division du plan et de la

gestion des bibliothèques de la Direction des biblio-

thèques, des musées et de l'information scientifique

et technique, Louis Yvert, conservateur en chef

chargé du Service des bibliothèques publiques de la

Direction du livre et de la lecture.

La Commission a considéré qu'étaient de son

ressort les points suivants : la conservation de tous

les documents, sans distinction d'âge ; la mise en

valeur des fonds anciens, rares et précieux ; les

acquisitions de documents qui, pour diverses raisons,

constituent un patrimoine éminent et parfois sous-

estimé : documents reçus au titre du dépôt légal,

livres de bibliophilie et reliures d'art contemporains,

documents produits à l'étranger, documents icono-

graphiques, sonores et audio-visuels, documents pré-

cieux, plus ou moins anciens, destinés à compléter

les fonds. Les travaux ont débuté à la fin du mois

de novembre. Près de deux cents personnes ont été

consultées au cours de très nombreuses réunions,

ainsi que les associations professionnelles et les

organisations syndicales. Conformément aux enga-

gements pris, un rapport d'environ 140 pages, assorti

d'un volume d'annexes de 300 pages, a été remis

au directeur du livre et de la lecture le 2 juin ; des

exemplaires ont été adressés au directeur des biblio-

thèques, des musées et de l'information scientifique

et technique et à l'administrateur général de la

Bibliothèque nationale.

En attendant la diffusion de ce rapport, on en

donne ici de larges extraits. Les coupures effectuées

représentent environ un quart du texte. Elles sont

toutes signalées par des crochets carrés, à l'exception

des suppressions de notes, qui, pour la plupart, ren-

voient aux annexes. J.-L. G.

AVANT-PROPOS

1. PATRIMOINE ET BIBLIOTHÈQUES

Le mot de patrimoine est rarement apparié àcelui de bibliothèques. Il ne fait de doute pour per-sonne qu'un monument, un objet ancien constituentun patrimoine ; il n'en va pas de même pour les

collections des bibliothèques, s'agit-il des plus pré-cieuses. En 1980 a été proclamée une « année dupatrimoine ». Les mesures prises à cette occasionen faveur des collections des bibliothèques sontminimes par rapport à celles dont ont bénéficié lesmusées, les monuments historiques et même les

Page 2: RAPPORT AU DIRECTEUR DU LIVRE ET DE LA LECTURE SUR LE

archives. Il y a plus grave encore : personne ou

presque ne s'est avisé de cette carence parmi lepublic et les media.

Sans doute cette situation tient-elle à une mécon-naissance du patrimoine des bibliothèques. [...]

Il reste que ce désintérêt est particulier à laFrance. Presque partout à l'étranger, dans les paysanglo-saxons, mais aussi en Allemagne, en Italie,en Espagne, le patrimoine des bibliothèques estl'objet d'une toute autre considération.

2. CE RAPPORT

L'indifférence française à l'égard du patrimoinedes bibliothèques s'est traduite notamment parl'absence de toute réflexion officielle d'ensemble.En 1979, deux rapports ont été élaborés sur laconservation des collections de la Bibliothèquenationale. En 1981, quelques pages du rapport surles bibliothèques en France (la Bibliothèque natio-

nale exceptée) présenté au Premier ministre par ledirecteur du livre ont traité du patrimoine. Maisil n'existe pas d'étude exclusivement consacrée aupatrimoine de toutes les bibliothèques. Demandée le23 novembre 1981 par le directeur du livre et de lalecture à une Commission de douze membres, celle-cisera donc la première. [...]

PRÉSENTATION DES COLLECTIONS

Le patrimoine des bibliothèques publiques sesignale par sa variété ; sa qualité ; la forte proportiondes documents qui appartiennent à l'État.

A. IMPORTANCE ET DIVERSITÉ DES COL-LECTIONS[...]

1° La Bibliothèque nationale

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2° Bibliothèques universitaires, bibliothèques desgrands établissements littéraires et scientifiques,bibliothèques municipales

a) Documents traditionnels : livres et périodiquesimprimés

Les dénombrements les plus récents donnent lesrésultats suivants :

S'agissant des livres anciens au sens strict1, uneenquête conduite en 1975-1977 par le Service du

1. On appelle livres anciens les ouvrages imprimés avant

1811. De plus en plus cette limite paraît artificielle et l'on

tend à englober sous l'appellation de livres anciens tous les

ouvrages du XIXe siècle.

livre ancien de la Bibliothèque nationale, complétéeà l'occasion du présent rapport, a permis d'en recen-ser près de 4 600 000 dans les bibliothèques qui ont

répondu, soit infiniment plus qu'à la Bibliothèquenationale : près de 3 700 000 dans 238 bibliothèquesmunicipales de province, plus de 730 000 dans unetrentaine de bibliothèques universitaires, près de180 000 dans 6 bibliothèques de grand établissementlittéraire ou scientifique.

Une répartition par siècles serait hasardeuse. Auplus peut-on estimer à 30 000 environ le nombredes incunables conservés dans les bibliothèques quiont répondu à l'enquête.

Toujours aux termes de cette enquête, les fondsles plus riches (plus de 100 000 volumes) sont ceuxdes Bibliothèques municipales de Grenoble (250 000)et de Lyon (200 000), de la Bibliothèque nationaleet universitaire de Strasbourg (190 000), de la

Bibliothèque de la Sorbonne (120 000), des Biblio-thèques municipales de Toulouse (125 000) et deRouen (115 000), de la Bibliothèque Sainte-Gene-viève (111 000).

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b) Documents traditionnels : les manuscrits

Les dénombrements les plus récents donnent lesrésultats suivants :

c) Documents traditionnels divers

Cartes et plans ont fait l'objet de dénombrementsà l'occasion d'une enquête conduite en 1980 par leComité français de cartographie.

Estampes, dessins, affiches, partitions musicales,sceaux, monnaies, médailles, jetons : ces documentsn'ont fait l'objet d'aucun dénombrement récent ; auplus peut-on affirmer sans risque d'erreur qu'ils sechiffrent par centaines de milliers.

d) Documents d'invention récente

-- Photographies et plaques photographiques.Essentiellement conservées dans les bibliothèquesmunicipales, elles n'ont pas fait l'objet de dénom-brements précis. Elles se chiffrent par dizaines demilliers.

-- Films.- Microformes (microfilms, microfiches, micro-

cartes, cartes à fenêtre). La plupart se trouvent dansles bibliothèques universitaires (86 000 en 1977).

- Diapositives. Parmi les bibliothèques munici-

pales les plus riches : celle de Saint-Dié (86 000 en1979).

- Disques et autres « documents sonores » (ban-

des magnétiques, bandes-son, audiocassettes, audio-cartouches). 76 000 dans les bibliothèques munici-pales en 1979.

S'y ajoutent des dizaines de milliers de bandes-vidéo, vidéo-disques, vidéocassettes, transparents,ensembles multi-media.

e) Des objets

Les bibliothèques abritent toutes sortes d'objetsdont elles sont directement responsables. [...]

3° Autres bibliothèques : quelques aperçus

a) Bibliothèques dépendant du ministère de l'Éduca-tion nationale

b) Bibliothèques dépendant de divers ministères

B. L'INTÉRET DES COLLECTIONS

1° Des millions de pièces uniques ou rares[...]

a) Des oeuvres d'art

Parmi les pièces d'une haute valeur artistique queconservent les bibliothèques, de nombreuses collec-tions de dessins (maîtres français du XVIIIe siècledont Fragonard, Hubert Robert et Boucher de la

Bibliothèque municipale de Besançon) ou d'estampes(Fonds Callot de la Bibliothèque municipale deReims). Des manuscrits décorés tels que la Biblede Souvigny (Bibliothèque municipale de Moulins),qui porte la plus importante série de peintures bibli-ques romanes connue en France. Mais aussi desdizaines de milliers de pièces de toute époque remar-quables par leur typographie, leur reliure, etc.

b) Une collection documentaire irremplaçable

Les manuscrits

Parmi les pièces les plus précieuses, on relèverales dizaines de milliers de manuscrits médiévaux.Mais aussi de remarquables collections de manuscritsmodernes et contemporains. Manuscrits littérairestels que ceux de Michelet (Bibliothèque historiquede la ville de Paris), de Flaubert (Bibliothèque muni-

cipale de Rouen ; Bibliothèque nationale), de Valéry

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Larbaud (Bibliothèque municipale de Vichy), deVictor Hugo (Bibliothèque nationale), de Saint-JohnPerse (Bibliothèque municipale d'Aix-en-Provence),de Proust (Bibliothèque nationale), de Jules Verne

(Bibliothèque municipale de Nantes), de Stendhal(Bibliothèque municipale de Grenoble), de Montes-quieu (Bibliothèque municipale de Bordeaux), deMauriac (Bibliothèque littéraire Jacques Doucet).Mais aussi manuscrits musicaux : partitions de Lulli,Rameau, Couperin, etc. de la Bibliothèque munici-pale de Versailles. Historiques : fonds relatifs à laCommune et au saint-simonisme de la Bibliothèquemunicipale de Saint-Denis, archives de la familled'Argenson à la Bibliothèque universitaire dePoitiers. Scientifiques : collections de vélins de la

Bibliothèque du Muséum d'histoire naturelle, etc.

Les documents imprimés anciens

Parmi les millions de livres anciens que conserventles bibliothèques, pour ne parler que d'eux, descentaines de milliers sont uniques ou rares : impres-sions provinciales, clandestines, etc.

Mais, en fait, ce sont tous les livres anciens quidoivent être considérés comme des unica dans lamesure où par suite du caractère artisanal de leurfabrication, il ne saurait s'en trouver deux stricte-ment identiques. Deux exemplaires d'un même

ouvrage peuvent ne différer que par la façon dontils se présentent : reliure, papier, etc. ; toutes diffé-rences déjà susceptibles de profiter à l'historien.Mais il advient fréquemment que leurs textes mêmesoffrent des variantes introduites en cours d'impres-sion ; elles présentent parfois un intérêt considérable.

Des documents récents

Mais le privilège de l'unicité ou de la rareté n'estpas réservé aux documents anciens. Certaines piècesrécentes sont par nature uniques ou rares : livres debibliophilie, enregistrements sonores inédits (Archi-ves de la parole de la Bibliothèque nationale), etc.D'autres documents qui ont été édités, à l'origine,à un nombre important d'exemplaires, ont toujoursété rares en France ; il s'agit des documents produitsà l'étranger, échappant par conséquent au dépôt

légal, que seules quelques bibliothèques ont acquisou recueillis (bibliothèques universitaires). D'autresouvrages enfin, jadis courants en France, se sontpeu à peu raréfiés par auto-destruction ou par suitede négligence, de sinistres, etc. ; ainsi des journauxlocaux.

2° Des richesses partagées

Dans les bibliothèques se trouve aussi une multi-tude de pièces qui ne sont ni uniques ni rares :documents récents édités industriellement et quisubsistent à un grand nombre d'exemplaires.

Ils méritent aussi le nom de patrimoine pour deuxraisons. En premier lieu, comme tant d'autres docu-ments, ils peuvent se raréfier : parce que les maté-riaux dont ils sont faits, le papier notamment, sontde mauvaise qualité ; parce que personne, en raisonmême du nombre élevé d'exemplaires mis en circu-lation, n'aura songé à les préserver. Un ouvrage debibliophilie à tirage limité court moins de risquesde disparaître que tel livre de poche, tel annuaire,tel manuel scolaire.

De peu de prix en eux-mêmes, d'autre part, desdocuments courants peuvent être valorisés par leurprésence dans un fonds spécialisé, susceptible defournir aux chercheurs une documentation complèteet cohérente. C'est ce qui fait tout l'intérêt des fondsdes bibliothèques d'étude et de recherche en général,dont les collections deviennent des mines pour larecherche rétrospective sitôt qu'elles ont cessé del'être pour la recherche scientifique contemporaine.

Mais, patrimoine, tel spécimen de tel roman quiexiste à des milliers d'exemplaires dans les biblio-

thèques l'est aussi par cela qu'il se trouve immédia-tement à la disposition de tel lecteur dans sa ville,dans son quartier ; sans lui, le texte qu'il porte reste-rait inconnu ou difficilement accessible.

C. LA PROPRIÉTÉ DES FONDS

Les fonds des bibliothèques publiques, en parti-culier les plus précieux, sont géographiquement dis-

persés. Ils sont abrités par des établissements destatuts juridiques divers.

Mais, dans tous les cas, il est frappant de constaterque l'État est propriétaire d'une bonne partie descollections et non des moindres. Issus des confisca-tions révolutionnaires (1789-1793), même les fondsanciens des bibliothèques municipales lui appartien-nent pour la plupart ; ils ne sont que confiés en

dépôt aux communes (arrêté du 8 pluviôse an XI).

PREMIÈRE PARTIE

ÉTAT PRÉSENT

DES MESURES PARTIELLES ET TIMIDES

La situation actuelle se caractérise par :

- Les efforts faits par l'État pour la Bibliothèquenationale. Ils ont pris notamment la forme du plande sauvegarde à partir de 1980.

- La quasi inexistence des moyens dégagés pourle patrimoine des bibliothèques universitaires et desbibliothèques des grands établissements.

- La modicité des efforts faits par les collecti-vités locales pour le patrimoine des bibliothèques

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municipales ; et les efforts faits par l'État en faveurde ce patrimoine. Ces efforts se sont concrétisés enparticulier par l'attribution à la Direction du livreet de la lecture à partir de 1978 de crédits de recher-che qui lui permettent de financer des travaux demise en valeur. Un autre pas important a été franchien 1982 par l'inscription au budget de la Directiondu livre et de la lecture de deux articles nouveauxlui permettant, l'un d'agir pour la conservation desfonds, l'autre d'aider à leur accroissement qualitatif.

- L'absence de politique véritable : c'est-à-direl'insuffisance globale des moyens mis en oeuvre -notamment pour la Bibliothèque nationale - etl'inexistence de structures de coordination et decoopération utiles à l'ensemble des bibliothèques.

I. LA CONSERVATION

A. L'ORGANISATION DE LA CONSERVATION

La conservation des documents anciens, rares etprécieux est plus ou moins bien assurée ; du moinspersonne - ou presque - ne doute plus que cetteconservation est nécessaire. La situation des docu-ments du XIXe et du XXe siècles est plus problé-matique.

En effet il n'a jamais été précisé aux bibliothèquesautres que la Bibliothèque nationale quels documentsdes XIXe et XXe siècles il leur appartenait respec-tivement de conserver. Il en résulte deux attitudeségalement dommageables. La première consiste à nepas préserver efficacement des documents qui appel-lent une conservation à long terme, par exemple enles communiquant sans discernement. Faute de

place, certains bibliothécaires vont jusqu'à éliminerdes ouvrages qui peuvent être rares, ou du moinsle devenir si tous les imitent. Des documents courentainsi le risque de disparaître totalement de France,si la Bibliothèque nationale n'en possède pas d'exem-

plaire (ouvrages étrangers, ouvrages français ayantéchappé au dépôt légal, etc.). Ils peuvent aussi nedisparaître que de la ville ou de la région qui lesabrite ; ce qui n'est pas moins grave dans la mesureoù les bibliothèques se doivent de garantir l'accèsle plus facile de tout à tous. Plus encore peut-êtreque les livres, les documents sonores se ressententd'une certaine négligence : l'idée qu'il existe poureux un public désireux de se livrer à des recherchesrétrospectives, n'a pas encore pénétré dans tous lesesprits.

La seconde attitude consiste à ne pas éliminer dedocuments, de peur qu'aucune autre bibliothèqueproche ou moins proche ne les conserve. On l'ob-serve jusque dans certaines bibliothèques centralesde prêt qui n'ont pourtant pas vocation à la conser-vation. Elle conduit les établissements qui l'adoptentà l'asphyxie.

B. LA RECHERCHE EN MATIÈRE DE CON-SERVATION

Les conditions d'une conservation optimale deman-dent à être précisées ; il en va de même des remèdesà apporter aux documents endommagés. Un labo-ratoire s'y emploie en France : le Centre de recher-ches sur la conservation des documents graphiques.Laboratoire associé du Centre national de larecherche scientifique, le Centre a été créé en 1963.Il est lié par une convention au ministère de laCulture, à la Bibliothèque nationale et au Muséumd'histoire naturelle. Le Muséum l'abrite ; le minis-tère de la Culture, la Bibliothèque nationale et leCNRS financent ses travaux.

Ceux-ci ont déjà donné des résultats substantiels :mise au point d'un procédé de désinfection desdocuments atteints par des insectes et des micro-organismes, d'un procédé d'assèchement des docu-ments mouillés par lyophilisation, d'un procédé dedésacidification de masse des papiers modernes,d'une cire protectrice pour les reliures, etc.

Cependant les moyens du Centre sont loin d'êtreen rapport avec l'enjeu de ses recherches. Pourtravailler sur tous les matériaux, il emploie vingtpersonnes (dont neuf à mi-temps et deux vaca-taires) ; ce sont les effectifs dont disposent lesautres laboratoires du monde pour les seules étudessur le papier. [...]

C. LES LOCAUX

[...] Quel que soit le type de bibliothèque, la plu-part des bâtiments anciens sont trop exigus. C'estvrai en particulier pour quelques bibliothèquesuniversitaires de province (Montpellier, Lyon), maisplus encore pour les bibliothèques universitairesanciennes de Paris et les bibliothèques des grandsétablissements qui conservent plus de la moitié desfonds anciens dont le ministère de l'Éducationnationale a la charge.

Installations électriques vétustes entraînant desrisques d'incendie ; chauffage inexistant ou tropfaible, ou au contraire excessif, d'où un dessèche-ment des documents ; canalisations usées, et dontla rupture provoque des inondations ; toitures ouverrières présentant les mêmes défauts et entraînantles mêmes désastres ; absence de protection contrele vol et l'incendie, la pollution, la lumière et l'humi-dité : il est peu d'établissements d'un certain âgequi, Bibliothèque nationale, bibliothèques universi-taires, bibliothèques des grands établissements oubibliothèques municipales, ne présentent tout oupartie de ces inconvénients. Jusqu'à certains bâti-ments neufs qui n'offrent pas toutes les garantiesd'une conservation optimale (absence de protectioncontre la lumière, de régulation thermique, etc.).

Il n'est pas rare que les réserves - quand ellesexistent - soient plus malsaines que les magasins.

Les exemples de dommages parfois irréparablescausés par l'état des locaux sont légions. [...]

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Pour la première fois en 1982, des crédits ontété dégagés par la Direction du livre et de la lecture

(200 000 F) pour permettre à certaines bibliothèquesmunicipales d'acquérir des appareils qui mesurent(thermohygromètres) et le cas échéant améliorent(humidificateurs, déshumidificateurs) les conditionsambiantes. Action doublement utile : elle sensibiliseles collectivités locales à la conservation du patri-moine tout en améliorant celle-ci. Elle ne sauraitcependant passer pour autre chose qu'un palliatif.

D. L'ENTRETIEN ET L'EQUIPEMENT DESDOCUMENTS

1° Le mobilier

Faute de crédits suffisants ou d'informations,

beaucoup de bibliothèques ne disposent pas desmatériels adaptés pour conserver leurs documents.

Certains mobiliers manquent sur le marché. Parexemple il n'existe à l'heure actuelle aucun meublede rangement permettant d'extraire sans les abîmerles documents iconographiques de grand format. [...]

2° L'équipement

a) Proportion des documents équipés ; les crédits

[...] Pour la reliure et la réparation des reliures,la Bibliothèque nationale a disposé, en 1982, de5 230 000 F. Il n'y a pas là de quoi relier plus de10 % des acquisitions. Faute de pouvoir être remisen état, de nombreux ouvrages demeurent incommu-nicables.

La situation des bibliothèques universitaires et desbibliothèques des grands établissements n'est pasmeilleure. Une dizaine d'entre elles possèdent unatelier de reliure ou de reliure-restauration. Maisla moitié de ces ateliers ne compte qu'une personne.On se bornera ici à citer quelques exemples signifi-catifs. La Bibliothèque du Musée de l'homme n'apu consacrer aucune part de son budget à la reliureen 1981, et il en sera de même en 1982. La Biblio-thèque Sainte-Geneviève (qui emploie un relieur-restaurateur) ne fait relier que 30 % de ses acqui-sitions. [...]

En 1969, les bibliothèques municipales de pro-vince consacraient un peu plus de 3 % de leursdépenses de fonctionnement à la reliure. En 1980,la proportion n'était plus que de 2,5 %. Les sommesglobales dépensées par ces bibliothèques munici-pales pour la reliure ont crû dans des proportionstrès inférieures au taux de l'inflation.

b) La qualité de la façon et des matériauxIl ne suffit pas qu'un document soit équipé

(reliure, montage, entoilage, etc.) ; il faut encoreque les matériaux employés, la façon ne l'endom-magent pas et assurent sa préservation à long terme.

La situation est dans l'ensemble insatisfaisante àcet égard. Un cahier des charges a été mis au point

par la Bibliothèque nationale pour la reliure ; ildemeure inconnu des autres bibliothèques.

Récemment a été élaborée une « Charte de l'enca-drement ». Les encadreurs signataires s'engagent à

employer des matériaux inoffensifs. Initiative parti-culièrement heureuse, dans la mesure où elle assureen amont un équipement satisfaisant de pièces sus-ceptibles d'enrichir un jour les collections publiques.

3° L'entretien

Le personnel de maintenance (magasiniers, gar-

diens) est presque partout en nombre insuffisant.Il est de surcroît mal préparé aux tâches qui sontles siennes : entretien des collections, communica-tion selon certaines modalités ; surtout dans le casdes nouveaux media. La formation préalable des

gardiens et des magasiniers est facultative ; c'est-à-dire la plupart du temps, inexistante.

Depuis 1978, la Direction du livre et de la lectureattribue aux villes des crédits qui leur permettentd'entreprendre des opérations de nettoyage et d'en-tretien des fonds anciens de leur bibliothèque muni-cipale. Il est demandé aux municipalités sous uneforme ou sous une autre une participation compa-rable à l'aide de l'État ; elles la fournissent rarement.Ce qui démontre toute l'importance de l'action del'État pour la sauvegarde de ces collections. Lescrédits dégagés donnent lieu à l'engagement de vaca-taires. Les opérations consistent à dépoussiérer lesdocuments, à traiter les reliures au moyen d'une cireinsecticide et fongicide, à effectuer de petites répa-rations qui éviteront à terme des restaurations pluscoûteuses. Elles sont l'occasion de procéder à desrécolements, de repérer les documents qui néces-sitent une restauration. En même temps qu'ellesprofitent directement aux collections, elles sensibi-lisent les villes à l'intérêt du patrimoine de leursbibliothèques.

Un effort financier considérable a été fait en1982 puisque les crédits d'entretien de la Directiondu livre et de la lecture sont passés de 380 000 Fen 1981 à 760 000 F ; une vingtaine de villes enbénéficieront au lieu de treize. Toutefois les sub-ventions allouées depuis 1978 n'ont permis de traiterqu'une infime partie des fonds des bibliothèquesbénéficiaires (vingt-huit jusqu'en 1981). D'autre partles villes conservant un fonds ancien qui n'ont encorereçu aucune subvention restent très nombreuses(environ deux cents). Or les initiatives locales enla matière sont rarissimes.

Les bibliothèques universitaires et les bibliothè-ques des grands établissements ne font l'objetd'aucune entreprise systématique comparable à cellede la Direction du livre et de la lecture. [...]

E. LA RESTAURATION

1° Les ateliers et les crédits

Il convient de distinguer entre :

- La restauration traditionnelle, qui s'effectuesur des documents anciens.

Page 8: RAPPORT AU DIRECTEUR DU LIVRE ET DE LA LECTURE SUR LE

- La restauration dite de masse, qui s'effectue

sur la production courante du XIXe et du XXe

siècles. Elle consiste à désacidifier les papiers demanière à stopper leur autodégradation et à lesenserrer par thermocollage dans une pellicule pro-tectrice.

a) La restauration traditionnelle

Elle se caractérise par :- la quasi exclusivité des ateliers de l'État en

matière de qualité.

Quelques restaurateurs privés, notamment pari-siens, sont capables de restaurer les documents selonles principes souhaitables : « sincérité », reversibilité,etc. ; ils n'atteignent pas la dizaine. Les quelquesateliers municipaux qui fonctionnent ne sont géné-ralement pas aptes à traiter les cas délicats.

Cette situation tient essentiellement au fait qu'iln'existe pas à l'heure actuelle de formation satisfai-sante pour les restaurateurs du secteur privé et des

municipalités. [...]

- l'insuffisance des ateliers de l'État.

Une demi-douzaine de bibliothèques universitaireset de bibliothèques de grand établissement possèdentun atelier de restauration plus ou moins développé.Mais ces ateliers travaillent quasi exclusivementpour les établissements qui les abritent. Ils ne suf-fisent d'ailleurs pas à répondre aux besoins de cesétablissements. [...]

Deux ateliers travaillent pour les bibliothèques

qui les abritent mais aussi pour d'autres biblio-thèques publiques : l'atelier de la Bibliothèque natio-nale et celui de la Bibliothèque municipale deToulouse qui, bien qu'atelier municipal, emploie dupersonnel d'État. Environ cent volumes ont étérestaurés en 1981 par chacun de ces ateliers au profitd'autres bibliothèques publiques. C'est le maximumqu'ils puissent faire ; les délais d'exécution sont trèslongs. Or ce sont des dizaines de milliers de piècesqui, dans toutes les bibliothèques, appellent unerestauration.

- l'inexistence de crédits spécifiques pour les

bibliothèques universitaires et les bibliothèques desgrands établissements.

Depuis plusieurs années, la Direction du livre etde la lecture attribue aux villes, pour faire restaurerles plus précieux des livres anciens de leur biblio-

thèque (ouvrages souvent d'État et qui sont choisissous le contrôle de l'Inspection générale), des crédits

qui n'ont cessé d'augmenter puisqu'ils sont passésde 15 000 F en 1969 à 700 000 F en 1982. Lacroissance de ces crédits se heurte moins actuelle-ment à l'absence de disponibilités financières qu'àla saturation des ateliers de l'État.

Les bibliothèques universitaires et les bibliothè-

ques des grands établissements ne bénéficient pasde crédits comparables. [...]

b) La restauration « de masse »Elle se pratique uniquement à la Bibliothèque

nationale au profit de ses collections. Une machine

à thermocoller fonctionne à l'atelier central, uneautre au Centre Joël Le Theule de Sablé (livres

imprimés), une troisième sera mise en service souspeu au Centre André François-Poncet à Provins(périodiques). Une machine à désacidifier en masseles papiers des livres modernes sera installée à Sabléavant la fin de 1982 sous réserve que les moyensnécessaires soient dégagés rapidement. Ces réalisa-tions s'inscrivent dans le plan de sauvegarde misen oeuvre à partir de 1980.

Le Centre de Provins sera sans doute amené,dans le cadre de ses campagnes de microfilmage dela presse, à restaurer certains des périodiques quelui prêteront d'autres bibliothèques publiques pourreconstituer des collections complètes. Mais iln'existe à l'heure actuelle aucun atelier effectuant

systématiquement désacidification et thermocollageau profit des bibliothèques municipales, des biblio-

thèques universitaires et des bibliothèques des grandsétablissements qui détiennent pourtant - on l'adit - des documents que ne possède pas la Biblio-

thèque nationale.

2° La formation, le statut et les carrières des restau-rateurs de l'État

Les statuts de la fonction publique obligent lescandidats au concours externe d'ouvrier de premièrecatégorie (des rangs desquels sortiront les restaura-teurs spécialistes), à justifier d'au moins deux CAP(certificats d'aptitude professionnelle) ; or il n'existepas à l'heure actuelle d'autre CAP adapté au métierde restaurateur que celui de reliure-main. Il enrésulte que le recrutement des ouvriers de premièrecatégorie se fait exclusivement sur concours interne,parmi les ouvriers de deuxième catégorie. Les res-taurateurs spécialistes y voient à bon droit uneinjustice en même temps qu'un facteur de sclérosede leur corps. Il en va de même de l'absence derecrutement externe pour l'accès au corps des restau-rateurs spécialistes. Ici encore le recrutement estexclusivement interne : il s'effectue parmi les ouvriersde première catégorie justifiant d'au moins cinq ansde pratique professionnelle. Cela, faute de filière

préparant aux métiers de la restauration ailleursqu'à la Bibliothèque nationale (voir plus haut, 1°, a).

Les ouvriers de première catégorie estiment quela préparation au concours de restaurateurs spécia-listes qu'ils reçoivent est insuffisante. Ils aspirent àune formation théorique plus poussée, qui leur per-mettrait de ne pas se sentir en position d'inférioritépar rapport aux bibliothécaires. Cependant les res-taurateurs ne souhaitent pas passer pour les théori-ciens qu'ils ne sont pas. Ils demandent la reconnais-sance de la haute qualité de leur travail avec laquellecontraste, de fait, la modestie de la carrière qui leurest offerte puisqu'elle s'achève en catégorie B.

3° Le Centre national de la restauration et de lareliure

Le Centre national de la restauration et de lareliure est un des cinq centres techniques de coopé-ration, regroupant des services communs des biblio-

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thèques, créés en 1977 au terme d'une conventionentre le secrétaire d'État aux Universités et l'admi-nistrateur général de la Bibliothèque nationale, pourpallier la partition des bibliothèques entre deuxministères. [...]

Faute de moyens, le Centre national de la restau-ration et de la reliure n'a jamais existé autrementque sur le papier. Il se confond avec les atelierspropres de la Bibliothèque nationale qui oeuvrent,il est vrai, au profit d'autres bibliothèques publiques.

F. LA DÉSINFECTION

Les collections des bibliothèques subissent fré-quemment des détériorations du fait d'insectes oude microorganismes.

Le Centre de recherches sur la conservation desdocuments graphiques est à même de venir en aideaux établissements pour l'identification des agentsdestructeurs, par des missions et des analysesd'échantillons ; il leur indique les remèdes adéquats.

Pour la désinfection proprement dite, la Biblio-thèque nationale dispose de plusieurs autoclaves -en particulier à Sablé - auxquels d'autres biblio-thèques peuvent avoir recours moyennant finance.Mais leurs capacités sont limitées par rapport auxbesoins. En outre le transport des documents peutêtre l'occasion de dégradations ou de pertes.

Des bibliothèques ont recours à des autoclavesautres que ceux de la Bibliothèque nationale ; leurutilisation est parfois coûteuse et ils ne présententpas toujours toutes les garanties souhaitables quantà l'innocuité des mélanges gazeux pour les docu-ments.

La situation est en passe d'être améliorée pourles bibliothèques municipales par la Direction dulivre et de la lecture qui se propose de mettre encirculation en 1983 une unité mobile de désinfection.Ses services seront gratuits. Mais le cas des biblio-thèques universitaires de province n'est pas réglé.

G. LES DOCUMENTS DE SUBSTITUTION

[...]

1° Les microformes

Quatre types de documents font l'objet d'uneentreprise de microreproduction systématique :

- Les livres imprimés de la Bibliothèque natio-

nale, à la Bibliothèque nationale même et au CentreJoël Le Theule de Sablé.

- Les documents du Département des estampeset de la photographie de la Bibliothèque nationale.Un laboratoire de microphotographie a été mis enplace en 1980 grâce aux fonds du plan de sauve-garde. [...]

- Les manuscrits médiévaux des bibliothèques

publiques. En 1978, la Direction du livre a entreprisde financer le microfilmage en noir et blanc, par

une équipe de l'Institut de recherche et d'histoire destextes du CNRS, de tous les manuscrits médiévauxdes bibliothèques publiques ; les enluminures font

l'objet de photographies en noir et blanc et de dia-positives en couleurs. Les travaux sont achevés enBourgogne, en voie d'achèvement pour la Franche-Comté ; ils se poursuivent en Champagne-Ardenne.

- La presse française

Trois types d'initiatives se conjuguent :

. L'action de l'Association pour la conservationet la reproduction photographique de la presse(ACRPP). Fondée auprès de la Bibliothèque natio-nale en 1958, l'ACRPP, association sans but lucratif,s'est donné pour tâche de reproduire sur microfilml'ensemble de la presse française. Elle s'efforce dereconstituer des collections complètes à partir desfonds de la Bibliothèque nationale et d'autres biblio-thèques. Elle diffuse des copies.

. La microreproduction des périodiques locauxsous l'impulsion de la Direction du livre et de lalecture. Celle-ci a lancé en 1982 une entreprisesystématique de microfilmage des périodiques locauxdes départements. Les opérations débuteront par lesPyrénées orientales et le Puy-de-Dôme. [...]

. Des initiatives locales. [...]

Mais ces trois entreprises pêchent par leur imper-fection. Ce n'est qu'à une date récente que l'ACRPPa pu commencer à établir des négatifs qui jouerontle rôle d'archives de sécurité. Elle ne dispose pasde locaux adaptés pour les conserver.

Les opérations réalisées localement ne présententpas toutes les garanties d'une qualité optimale. Pasplus que l'ACRPP, les bibliothèques ne disposentde locaux appropriés pour conserver les microfilmsobtenus, en particulier les négatifs de sécurité.

Qu'il s'agisse des livres imprimés de la Biblio-thèque nationale, de ses collections iconographiques,des manuscrits médiévaux ou de la presse, la pro-gression des travaux est trop lente par rapport àl'urgence des besoins. Seuls deux photographes tra-vaillent à la filmothèque des manuscrits médiévaux ;il faudra des décennies pour l'achever à cerythme. [...]

Par contraste avec les pleins des opérations entre-

prises apparaissent d'autre part les vides de cellesqui restent nécessaires : rien pour les livres imprimésrares des bibliothèques municipales, des bibliothè-

ques universitaires et des bibliothèques des grandsétablissements, pour leurs documents iconographi-ques 1, pour leurs manuscrits modernes et contem-porains, etc. 2. Tout au plus quelques microfilmssont-ils effectués, au coup par coup, en fonction desdemandes des lecteurs.

1. Sinon des entreprises isolées du type de celle quemènent en coopération à Grenoble la Bibliothèque muni-cipale, les Archives départementales de l'Isère et le Muséedauphinois.

2. Une trentaine de bibliothèques universitaires et debibliothèques de grand établissement disposent pourtant d'unatelier photographique.

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2° Les reprints

Laissée presque tout entière au secteur privé,l'édition de reprints présente, sauf exception, auregard des impératifs de la conservation, quatretypes de défauts :

- Faute d'une concertation suffisante entre leséditeurs eux-mêmes d'une part, entre les éditeurset les bibliothécaires d'autre part, la production estanarchique. C'est ainsi que les mêmes titres peuventêtre reproduits par plusieurs éditeurs alors qued'autres, essentiels, ne le sont pas.

- La majeure partie de la production est insatis-faisante du point de vue scientifique : les éditionsreproduites ne sont pas les meilleures ; on ne signalepas quelles éditions, quels exemplaires sont repro-duits ; des parties sont omises.

- Le papier employé et les reliures sont de qua-lité médiocre ; de telle sorte que les reprints pose-ront comme les originaux, et souvent plus vite qu'eux,des problèmes de conservation.

- Les tirages étant peu nombreux, les prixd'achat sont généralement élevés.

3° Les droits des bibliothèques

[...] La Bibliothèque nationale s'est fait une doc-trine claire en cas de reproduction d'ouvrages deses collections. Si une microcopie existe, il estdemandé au lecteur de ne régler que la copie quilui est remise. Si, en revanche, aucune microcopien'existe, il lui est demandé de participer financiè-rement à l'établissement du microfilm de premièregénération dont sera tirée sa copie. En cas de repro-duction des documents à des fins commerciales, desdroits sont exigés.

Les usages sont au contraire flottants parmi lesautres bibliothèques qui ne reçoivent fréquemment,en échange du prêt d'un ouvrage de leur collectionpour un reprint, par exemple, qu'un ou deuxexemplaires.

II. L'EXPLOITATION DES DOCUMENTSANCIENS, RARES ET PRÉCIEUX

A. CONDITIONS DE L'EXPLOITATION : LESCATALOGUES

[...]

1° État du catalogage dans les bibliothèques

Des centaines de milliers de documents anciens,rares et précieux, dans les bibliothèques françaises,n'ont fait l'objet d'aucun catalogue ou de cataloguessi sommaires qu'ils sont inutilisables. Ils demeurentdonc inconnus du public.

Cette carence empêche l'exploitation des fonds.Elle favorise aussi leur dilapidation : un documentnon répertorié est plus vulnérable au vol 1.

1. D'autant que l'absence de catalogage s'accompagnesouvent de l'absence d'estampillage.

La situation est satisfaisante à la Bibliothèquenationale. Il n'en va pas de même dans les autres

bibliothèques publiques. Plus de cinquante pour centdes bibliothèques touchées par l'enquête de 1975-1977, précitée, sur les fonds anciens indiquent quetout ou partie des leurs demande à être cataloguéou recatalogué. Quelques bibliothèques universi-taires et bibliothèques de grand établissement sontconcernées (Bibliothèques universitaires de Rennes,de Bordeaux, de Clermont-Ferrand, de Toulouse,

Bibliothèque de l'Académie nationale de médecine,Bibliothèque Sainte-Geneviève, etc.). Mais c'est sur-tout dans les bibliothèques municipales que desfonds entiers restent en friche. [...]

Les causes de cette situation varient selon lesétablissements. Là où existe un personnel potentiel-lement capable de traiter les fonds, il peut ne pasêtre assez nombreux pour s'y consacrer. C'est notam-ment le cas dans la plupart des cinquante-quatre

bibliothèques municipales classées. L'une des rai-sons de leur classement était de mettre à la dispo-sition des villes un personnel scientifique capablede traiter les collections, en particulier les collectionsanciennes. Le nécessaire développement de la lecturepublique a conduit ce personnel, dont le nombre nes'est pas accru autant qu'il eût été souhaitable, ànégliger les fonds anciens, rares et précieux. Seulesdeux bibliothèques municipales possèdent un véri-table service du livre ancien, celles de Lyon et deToulouse. [...]

Mais les insuffisances de la formation initiale etcontinue et de l'information des bibliothécaires nesont pas une cause moins importante des carencesdu catalogage des documents anciens, rares etprécieux. Nul doute que le Certificat d'aptitude auxfonctions de bibliothécaire ne constitue pas unepréparation suffisante au traitement de ces docu-ments, que l'École nationale supérieure de biblio-thécaires ne prépare pas suffisamment, par exemple,au catalogage des manuscrits et des documents ico-

nographiques, l'École nationale des chartes, à celuides phonogrammes.

Divers stages de recyclage ont été organisés :par le Service des bibliothèques du ministère del'Éducation nationale et la Direction du livre duministère de la Culture pour tous les personnels(1977-1978), par le Centre de formation des per-sonnels communaux (1979), par l'École nationalesupérieure de bibliothécaires pour les enseignants(1980). Pour la première fois en 1982, la Directiondu livre et de la lecture a proposé à une quinzainede villes des subventions exceptionnelles pour l'achat

d'ouvrages de référence nécessaires au traitement desfonds ; la subvention donnera lieu à l'envoi d'uneliste d'ouvrages de base. Toutes ces actions deformation continue et d'information sont utiles. Ellesdemeurent insuffisantes.

2° Les catalogues collectifs

a) Ceux qui existent

Commencée en 1848, la publication du Cataloguegénéral des manuscrits des bibliothèques publiques

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de France avait été interrompue en 1975, au tome

cinquante-neuf. En 1978, la Direction du livre aentrepris de publier des suppléments aux cataloguesparus. Trois volumes ont été édités depuis1. Lapoursuite du Catalogue général des manuscrits seheurte à l'absence de personnel qualifié dans lesbibliothèques municipales. Si utile qu'il soit, d'autrepart, il n'est pas un véritable catalogue collectif :constitué par la juxtaposition de catalogues particu-liers, et dépourvu d'index général, il oblige qui veuty recenser par exemple tous les manuscrits d'unauteur, à en chercher la trace dans une centaine detables [...]

En 1978, la Direction du livre prenait en chargel'édition de catalogues régionaux d'incunables en vuede constituer une collection nationale complète.Dans chaque région, un bibliothécaire particulière-ment compétent est chargé de la rédaction ; celle-cipâtit donc moins que le Catalogue général desmanuscrits du manque de personnel qualifié. LaDirection du livre et de la lecture prend en charge,le cas échéant, les frais de missions et de dactylo-graphie ; elle subventionne la publication des ouvra-ges par la Société des bibliophiles de Guyenne. Deuxvolumes sont parus depuis 1979 (Champagne-Ardenne et Languedoc-Roussillon), deux autresseront publiés en 1982 (Midi-Pyrénées et Nord-Pas-

de-Calais)2.Lancé en 1953, le Répertoire international des

sources musicales est destiné à rassembler tous lesdocuments relatifs à la musique antérieurs à 1800,

qu'ils soient imprimés ou manuscrits. Grâce à uneéquipe mise à la disposition de la Bibliothèquenationale par le CNRS, les imprimés de Paris etdes principaux établissements de province ont puêtre répertoriés. S'agissant des manuscrits, le catalo-gage de ceux que conserve la Bibliothèque nationalepourra être mené à bien au prix de plusieurs annéesde travail. Quelques catalogues ont pu être réalisésen province ; mais le catalogage des manuscritsmusicaux, demandant un personnel qualifié àl'heure actuelle quasi inexistant, y paraît plus aléa-toire qu'à la Bibliothèque nationale, dotée d'undépartement spécialisé.

Première partie d'une bibliographie des atlasfrançais qui peut être considérée comme un cata-logue collectif, dans la mesure où elle recense, outreles collections de la Bibliothèque nationale, d'autresfonds parisiens et des fonds provinciaux, une biblio-

graphie des atlas du XVIe et du XVIIe sièclescommencée en 1978 par le Département des carteset plans de la Bibliothèque nationale grâce à laMission de la recherche du ministère des Univer-sités, devrait paraître en 1983. En 1970 a été publiée,à l'initiative du même Département, une liste des

1. Tome 58 bis : tables des tomes 57 et 58. Tome 60 :deuxième volume du catalogue de la Bibliothèque historiquede la ville de Paris. Tome 61 : suppléments aux cataloguesdes Bibliothèques municipales d'Aix-en-Provence, d'Arles, dePau et de Rouen.

2. La Bibliothèque nationale, pour sa part, a publiéen 1982 le premier fascicule du catalogue de ses incunables.

globes terrestres et célestes conservés dans les collec-tions publiques de France.

Soixante-quinze mille publications périodiquesréparties dans soixante-dix bibliothèques, outre laBibliothèque nationale, sont recensées dans le Cata-logue collectif des périodiques du début du XVIIesiècle à 1939, conservés dans les bibliothèques uni-versitaires des départements. On n'y trouve pas lesquotidiens depuis 1849 qui figurent, avec d'autrespériodiques locaux ou régionaux, dans la Bibliogra-phie de la presse française politique et d'informationgénérale, 1845-1944, publiée par la Bibliothèquenationale à raison d'un fascicule par département ;la présence des états des collections de la Biblio-

thèque nationale, des Archives départementales etdes bibliothèques municipales fait de cette biblio-graphie un véritable catalogue collectif.

b) Ceux qui manquent

Les catalogues collectifs à vocation nationalequ'on vient de citer sont imparfaits. Du moinsexistent-ils. On note en revanche l'absence de telscatalogues pour les documents suivants :

- Les monnaies et médailles

- Les livres imprimés anciens

Tout au plus peut-on observer ici ou là, sponta-nément issus, sans aide spécifique de l'État, desbesoins de la recherche, des embryons de cataloguescollectifs :

. par siècles : fichier des livres du XVIe siècleconservés en France constitué à l'Institut de recher-che et d'histoire des textes et à la Bibliothèquenationale à partir de catalogues particuliers.

. par régions de conservation : fichier des livresanciens conservés en Champagne-Ardenne (FCA)constitué à l'Université de Reims sous la directionde M. J. Descrains.

. par périodes et par régions de conservation :fichier des incunables et des livres du XVIe siècleconservés dans la région Centre, constitué au Centred'études supérieures de la Renaissance à Tours sousla direction de M. P. Aquilon ; fichier des livresdu XVIe siècle conservés en Basse-Normandie, cons-titué à la Bibliothèque municipale de Caen ; fichierdes livres du XVIIIe siècle conservés en Languedoc-Roussillon, constitué à l'Université de Montpelliersous la direction de M. J. Proust.

. par régions de conservation et par thèmes :catalogue des ouvrages sur la Normandie ou écritspar des Normands publié sur microfiches en 1980à partir des fiches provenant de diverses bibliothè-ques de Basse-Normandie. [...]

En 1968-1972, il était apparu à l'équipe de laRecherche coopérative sur programme n° 207 duCNRS, formée en vue de préparer la voie, en liaisonavec l'Institut de recherche et d'histoire des textes,à un recensement général des livres anciens conser-vés en France, qu'un catalogue sur ordinateur étaitde loin préférable à un catalogue imprimé. Unmodèle de bordereau a été mis au point pour la

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description des volumes. Mais, l'équipe disperséeen 1972, la mise à exécution du projet a tournécourt.

- Les documents iconographiques

Laboratoire du CNRS, l'Institut d'histoire moder-ne et contemporaine se propose d'établir un Atlasiconographique de la France. Un premier repéragesera effectué par l'envoi d'une circulaire aux établis-sements. L'Institut, sur demande des bibliothèques,pourrait envoyer des chercheurs procéder aux pre-miers inventaires.

3° La diffusion des catalogues locaux

[...] La diffusion des catalogues locaux peut sefaire sous diverses formes. Il peut s'agir de l'éditionà proprement parler d'un catalogue spécialementconçu pour l'impression. Il peut s'agir aussi de lamicroreproduction de catalogues sur fiches ou surregistres.

Or, peu de catalogues des bibliothèques françaises,quelle que soit la forme qu'ils revêtent, ont étédiffusés ; ils ne sont pas accessibles au public etnotamment aux chercheurs ailleurs que dans la

bibliothèque qui les abrite.

Quelques bibliothécaires comprennent mal l'inté-rêt que présenterait la diffusion de leurs catalogues.Ou répugnent à l'assurer par un souci de conserva-tion mal compris.

Plus fréquemment, les bibliothèques ne disposentpas des moyens nécessaires, par exemple pour lesfaire éditer. Et il est frappant de constater que leséditeurs français se refusent généralement à prendrele risque de publier de tels ouvrages ; la plupartdes catalogues de bibliothèques françaises qui parais-sent sont édités par des firmes étrangères 1.

De 1975 à 1978, le Service du livre ancien dela Bibliothèque nationale a fait reproduire sur micro-fiches les catalogues sur fiches ou sur registres dequelques bibliothèques. En 1982, la Direction dulivre et de la lecture a créé une collection « Patri-moine des bibliothèques de France ». Cette collec-tion accueillera des catalogues locaux dont l'éditioneffectuée par la Société des bibliophiles de Guyennesera entièrement prise en charge par la Direction dulivre et de la lecture. Un premier volume sortira despresses en 1982.

Mais cette action de l'État reste insuffisante. Denombreux catalogues demeurent inexploités faute decrédits pour les publier. [...]

La diffusion des catalogues locaux se heurte doncà des obstacles financiers. Mais elle se heurte aussià un certain désintérêt, particulier aux bibliothécairesfrançais, pour les catalogues qui voient le jour. Cedésintérêt explique dans une certaine mesure lesréticences des éditeurs privés.

1. Ainsi le Catalogue général auteurs des livres imprimésjusqu'à 1900 de la Bibliothèque municipale de Grenobleparu en 1980-1981 : reproduction photographique de fiches.

4° L'expérience du Centre national du livre ancienet des documents rares et précieux

L'oubli et la sous-exploitation des fonds anciens,rares et précieux des bibliothèques avaient conduiten 1974 la Direction des bibliothèques et de lalecture publique à créer le Service du livre ancien.Le but qui lui était assigné était de promouvoir lamise en valeur des collections anciennes. En 1977le Service du livre ancien devenait sous le nomde Centre national du livre ancien et des documentsrares et précieux (CNLA) l'un des cinq centrestechniques de coopération, regroupant des servicescommuns à toutes les bibliothèques, dont la gestionétait confiée à la Bibliothèque nationale.

Le bilan de son action est incontestablement posi-tif. Plusieurs fois citée dans ce rapport, l'enquêtede 1975-1977 a fourni le seul dénombrement desfonds anciens, rares et précieux qu'on possède. Des

catalogues de bibliothèques - on l'a signalé -ont été microreproduits sous son impulsion. Il a

participé à la rédaction des recommandations de laFédération internationale des Associations de biblio-thécaires et des bibliothèques pour le catalogage deslivres anciens (ISBD (A)).

Créée en 1978 à la Bibliothèque interuniversitairede Montpellier, une antenne du Centre a largementcontribué à faire mieux connaître les fonds de larégion.

La même année, cependant, le Centre reprenantson appellation de Service du livre ancien cessaitde fonctionner. Il fut en effet, à cette date, rattaché

par la Bibliothèque nationale à ses servicespropres. [...]

B. L'EXPLOITATION

1° La recherche

a) L'identification des documents : catalogues etbibliographies

Les travaux d'identification menés sur les fondsdes bibliothèques afin d'élaborer catalogues et biblio-graphies ouvrent le champ à la recherche. Ils consti-tuent aussi en eux-mêmes une recherche authentique.Et le ministère de la Recherche ne s'y est pas trompé,dont les crédits permettent à la Direction du livreet de la lecture de subventionner la rédaction et la

publication de catalogues spécialisés (incunables,manuscrits).

Des crédits de recherche, de même, permettentde mener des travaux d'inventaire sur les fonds de

quelques bibliothèques universitaires et bibliothèquesde grand établissement (Bibliothèques de la Sor-bonne, de l'École des langues orientales, Bibliothè-que d'art et d'archéologie, Bibliothèque nationale etuniversitaire de Strasbourg). De telles entreprisesrestent cependant trop rares, en partie parce queles universités elles-mêmes ne jugent pas toujours

prioritaires les demandes de crédits des bibliothèques.

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b) L'histoire du livre ; les bibliothécaires et larecherche

Il ne saurait être question, dans ce rapport, deprendre la mesure de l'ensemble des recherchesconduites d'après les fonds des bibliothèques ; onse bornera à souligner que les carences des cata-

logues les freinent.L'une au moins des disciplines qui font appel, au

premier chef, aux documents des bibliothèques,mérite pourtant un examen : l'histoire du livre.

Classique dans les pays anglo-saxons ou germani-ques, elle ne doit son récent essor en France qu'àune poignée de chercheurs - souvent des bibliothé-caires - qui se sont efforcés de l'intégrer au courant

historique général à l'instigation de Lucien Febvre.Science auxiliaire de l'histoire, elle favorise en outrela conservation et l'accroissement des fonds en amé-liorant leur connaissance.

C'est l'exemple le plus typique d'une disciplineque paralyse l'insuffisance des inventaires, commela quasi inexistence en France d'une véritable histo-riographie des bibliothèques, qui ne se perpétueque sous la forme de publications aussi méritoiresque rares.

Des enseignants, dans l'Université, font référenceà l'histoire du livre, l'utilisent, mais il lui est rare-ment fait une place spécifique. Quand elle l'obtient,sa situation est toujours précaire. Une directiond'études à l'École pratique des hautes études faitfigure d'exception.

Dans la formation même des bibliothécaires,l'histoire du livre est loin d'avoir la place qu'ellemérite.

Pour conforter sa position, pour la développer,pour permettre aux universitaires, aux chercheurs,aux bibliothécaires, aux simples amateurs d'échangerleurs idées, un Institut d'étude du livre a été crééen 1978. Lui donnera-t-on les moyens de sesambitions ?

Phénomène de mentalité, le sous-développementde l'histoire du livre en France tient aussi aux diffi-cultés que rencontrent pour effectuer des travauxdans ce domaine ceux mêmes qui seraient le plusaptes à le faire : les bibliothécaires. Parmi les mis-sions du personnel scientifique des bibliothèquestelles qu'elles sont officiellement définies, la recher-che se signale par son absence1. Il en résulte desmalentendus avec les chercheurs.

2° L'animation

[...] Le grand public, lui aussi, doit se sentirconcerné par le patrimoine des bibliothèques. C'estle rôle de l'animation que de faire en sorte qu'il

1. Tout au plus le décret n° 70-1267 du 23 décembre1970 mentionne-t-il « la recherche bibliographique et docu-mentaire » parmi les missions des bibliothèques universi-taires. La mission de recherche de la Bibliothèque nationale

est de même inscrite dans ses statuts. Mais assigner unefonction aux établissements est une chose, l'assigner auxpersonnels et leur donner les moyens de l'assumer en estune.autre. [...]

le soit : visites, conférences, expositions, etc. Tousles bibliothécaires s'accordent à souligner le vifintérêt que provoque la plupart du temps parmi lesnon-spécialistes la découverte d'un livre ancien,d'un manuscrit, d'une estampe. L'animation permetà chacun de se sentir responsable du patrimoine.Elle favorise tout à la fois l'intérêt pour le documentet son respect. Elle concourt à l'enrichissement desbibliothèques en suscitant des vocations de donateurs.

Il est d'autant plus regrettable que l'imaginationqui préside, ici ou là dans les bibliothèques, à laconception des animations se voit souvent bridéepar une insuffisance de moyens. Pas de salle spéci-fique. Pas de matériel (vitrines, éclairage, panneaux,etc.). Pas d'atelier de reprographie pour éditer àmoindres frais les catalogues illustrés qui prolonge-ront dans les esprits l'intérêt éveillé par la visite.

Il faut y ajouter, dans bien des cas, une certaineimpréparation des bibliothéoaires. [...]

III. LES ACQUISITIONS

La totalité des documents que conservent les

bibliothèques, quel que soit leur âge, mérite le nomde patrimoine. Tous ces documents - et peut-êtresurtout les plus récents - sont susceptibles dedevenir dans des délais très brefs rares et doncprécieux.

Cela dit, il a paru hors de propos, dans le présentrapport, de prendre la mesure de l'ensemble desaccroissements des bibliothèques françaises. Ons'est donc limité aux documents suivants :

- Les documents dus au titre du dépôt légal,

parce qu'ils forment les collections nationales deconservation.

- Les documents porteurs d'images et de son,

parce que ceux-ci font désormais partie des modesprivilégiés de la culture et de la connaissance.

- Les documents parus à l'étranger, parce qu'ilssont indispensables aux chercheurs.

- Les livres de bibliophilie et les reliures d'art

contemporains, parce qu'ils constituent une produc-tion artisanale de haute qualité dont il appartienttraditionnellement aux bibliothèques de recueillir destémoins.

- Les documents précieux plus ou moins anciens,

parce que leur acquisition est nécessaire pour valo-riser les fonds, dans tous les sens du terme.

A. LES DOCUMENTS DUS AU TITRE DUDÉPOT LÉGAL D'IMPRIMEUR

Une commission interministérielle doit se pencherprochainement sur l'ensemble des problèmes liés audépôt légal ; aussi n'évoquera-t-on ici que le dépôtdes imprimeurs. [...]

Les imprimeurs sont plus ou moins nombreuxet plus ou moins productifs selon les régions : le

profit que les bibliothèques retirent de leurs dépôts

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varie donc de l'une à l'autre. En outre les change-ments d'imprimeur auxquels procèdent certains édi-teurs occasionnent parfois des ruptures dans lescollections des bibliothèques attributaires, particu-lièrement dans leurs collections de périodiques. Ilreste que le dépôt légal est pour ces bibliothèquesun mode d'enrichissement certain. Il favorise le

développement de fonds locaux.Il favorise aussi l'accroissement du patrimoine de

la Bibliothèque nationale : l'envoi à Paris d'un desdeux exemplaires d'imprimeur permet à cette der-nière de contrôler l'exhaustivité des dépôts que leséditeurs sont tenus d'effectuer auprès d'elle en quatre

exemplaires.Enfin le dépôt légal d'imprimeur concourt à

garantir la conservation du patrimoine impriménational. En effet les exemplaires des bibliothèquesattributaires constituent une seconde collection natio-nale de sécurité à côté de ceux de la Bibliothèquenationale.

Or la collecte, le traitement et la conservationdes exemplaires sont à l'heure actuelle mal assurés.

Mal informés ou réticents, des imprimeurs nesatisfont pas au dépôt légal, ou déposent des docu-ments incomplets.

Gestionnaire du dépôt légal, la Bibliothèque natio-nale verse aux bibliothèques attributaires des crédits

pour rétribuer des vacataires, acheter du petit maté-riel. Ils sont notoirement insuffisants. Les vacationssont trop peu nombreuses, mal rémunérées. Beau-coup de bibliothèques accumulent le retard pourl'envoi à la Bibliothèque nationale de son exem-plaire. Les exemplaires destinés à rester sur placene sont pas catalogués ni équipés.

Les vacataires ne peuvent effectuer les missionsd'incitation et de rappel indispensables auprès des

imprimeurs. Ils sont mal informés de la vie desentreprises (disparitions, regroupements, déménage-ments), des types de documents qu'il leur appartientde collecter, des moyens de coercition que leuroffre la loi.

La nécessaire conservation à long terme des exem-

plaires est parfois compromise par une communi-cation sans prudence.

B. LES ORIENTATIONS ET LA COORDINA-TION DES ACHATS

1° L'ouverture des bibliothèques à l'image et au son

Parce qu'elle bénéficie du dépôt légal, la situationde la Bibliothèque nationale est satisfaisante ; iln'en va pas de même pour les autres bibliothèques,en particulier pour les bibliothèques municipales.

S'agissant des images de toutes sortes, en effet,rares sont les établissements qui s'attachent à enrichirleurs collections ou à en créer. La constitution, àla Bibliothèque municipale de Grenoble, d'un fondsd'estampes contemporaines destinées au prêt àdomicile, fait figure d'exception ; comme le soinavec lequel la Bibliothèque municipale de Saint-Dié

accroît ses collections de photographies. Il est pour-tant avéré que, partout où des collections iconogra-

phiques sont mises à sa disposition, le public y prendun vif intérêt, surtout s'il s'agit de pièces relativesà sa région.

Plus que les documents iconographiques, lesdocuments sonores et audiovisuels tels que lesdisques sont acquis par les bibliothèques. Mais celaà des fins de communication immédiate, à l'exclu-sion de tout souci de conservation ; il y a pourtantaussi pour ces documents un public de chercheurs,au sens large, qui désire se livrer à des recherches

rétrospectives. Or ne leur sont offerts que des fondsfragmentaires, soit que les documents qu'ils recher-chent n'aient fait l'objet d'aucun plan d'acquisition

systématique, soit qu'aucune disposition n'ait étéprise pour leur conservation.

Indépendamment des documents véritablementédités, des chercheurs souhaiteraient pouvoir déposerdans leur région les archives sonores qu'ils ontrecueillies, constituer des collections cohérentes ;les bibliothèques ne leur offrent pas les structuresd'accueil qu'ils demandent.

Les exemplaires de la Bibliothèque nationale, quiau suprême degré se devrait d'assurer leur conser-vation à long terme, sont d'autant plus consultés,et donc endommagés, que les autres établissementsne peuvent en offrir au public.

2° Livres de bibliophilie et reliures d'art contempo-rains

On a tôt fait de dénombrer les bibliothèques qui,la Bibliothèque nationale mise à part, s'attachentà acquérir avec quelque constance, livres de biblio-philie et reliures d'art contemporains : Bibliothèquesmunicipales de Lyon, de Toulouse, de Mulhouse,de Montpellier - deux ou trois autres peut-être.

Cette situation est paradoxale : la France a tou-jours occupé et occupe encore une place éminentedans le domaine du livre de bibliophilie et de lareliure d'art. Elle est d'autant plus regrettable qu'uneau moins de ces activités, celle des « beaux livres »,ne survit pas sans de sérieuses difficultés.

Pour pallier l'une des causes de cette carence,la modicité des ressources des bibliothèques parrapport au coût des oeuvres de qualité, le ministèrede la Culture a dégagé en 1980, au titre de l'annéedu patrimoine, un crédit spécial de 25 000 F. Surles quatre reliures que cette somme a permis decommander pour les ouvrages de deux bibliothèquesmunicipales, deux l'ont été non pas à des profes-sionnels mais à des artistes plasticiens ; une heureusetentative était aussi faite pour vivifier le métier eny introduisant des courants nouveaux.

Plus que l'insuffisance des moyens financiers desbibliothèques, cependant, la véritable cause de leurindifférence aux « beaux livres » et aux reliuresd'art d'aujourd'hui, paraît être l'ignorance de laplupart des bibliothécaires en la matière. Ni l'Écolenationale supérieure de bibliothécaires, ni l'Écolenationale des chartes, ni les centres régionaux deformation professionnelle ne semblent, à cet égard,

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remplir efficacement leur mission. Il est vrai quela tâche est parfois au-dessus de leurs forces : desréticences à l'égard de ces oeuvres ne sont chezcertains qu'une forme de fermeture à l'art contem-porain. Chez d'autres, elles procèdent d'un méprisidéologique pour des pièces jugées élitaires. L'infor-mation régulière et les stages qui modifieraient lesmentalités, affineraient les goûts, font défaut.

3° Les documents parus à l'étranger

Le tableau suivant met en évidence la stagnationdes crédits mis à la disposition de la Bibliothèquenationale pour ses acquisitions étrangères de 1977à 1981 ; d'où, compte tenu de l'enchérissementconstant des documents, une baisse considérable destitres acquis.

La Bibliothèque nationale devrait voir ses créditsprogresser notablement en 1982. Ils ne lui permet-tront cependant pas d'assurer correctement lacouverture des pays et des disciplines tradition-nellement présents dans ses fonds. A fortiorilui interdisent-ils de combler ses lacunes : celles qu'aoccasionnées la pénurie de ces dernières années etd'autres plus anciennes (période 1914-1945); oud'étendre ses acquisitions vers des pays sous-repré-sentés dans ses collections et qui suscitent un intérêtcroissant (Inde, Japon, etc.).

En 1976, les bibliothèques universitaires ache-taient près de 90 000 livres étrangers et environ40 000 périodiques. En 1979, les chiffres tombentà 53 000 pour les livres et à 32 000 pour les pério-

diques. Soit une diminution de l'ordre de 40 %pour les livres et de 20 % pour les périodiques. Lenombre des étudiants, dans le même temps, s'accrois-sait dans des proportions notables.

4° Les acquisitions rétrospectives de documents pré-cieux

Toutes les bibliothèques ont vocation à compléterleurs collections en acquérant des documents plusou moins anciens, plus ou moins coûteux.

a) La prospection

[...] Seule, la Bibliothèque nationale dispose d'unservice spécialisé. Il s'efforce de signaler des piècesaux autres bibliothèques. Mais ses propres moyens

sont trop limités. Par ailleurs il n'est pas souhaitable

qu'un seul établissement, quel qu'il soit, appréciece qui est susceptible d'intéresser ou non tous lesautres.

b) Les crédits

En 1982, le crédit spécial dont bénéficie la Biblio-

thèque nationale pour l'achat des pièces les pluscoûteuses - dites « d'intérêt national » -- est passéde 3 à 7 MF. La progression paraît importante. Ilne s'agit en fait que d'un rattrapage puisque la

Bibliothèque nationale disposait de 3 MF depuis1979. [...]

Jusqu'en 1982, la Direction du livre et de la lec-ture ne bénéficiait d'aucun crédit du même type ;maintes fois le refus qu'elle a dû opposer aux deman-des des villes désireuses d'enrichir le patrimoine de

leur bibliothèque, mais trop pauvres pour y parvenirseules, avait empêché des accroissements de qualité.L'inscription au budget de cette Direction, en 1982,d'une dotation spécifique, constitue donc un faitdes plus positifs. Toutefois le montant de cette dota-tion - 1 MF - s'avère d'ores et déjà trop modique.Sauf à estimer que les villes ne doivent acquérir quedes documents de second ordre, les pièces majeuresétant réservées à la Bibliothèque nationale ; opinion

pour le moins discutable et que des années de res-trictions budgétaires ont par trop ancrée chez lesresponsables des bibliothèques municipales eux-mêmes.

Le droit des bibliothèques universitaires et desbibliothèques des grands établissements aux acqui-sitions rétrospectives de documents précieux n'a pasencore trouvé, à l'inverse de la Bibliothèque natio-nale et des bibliothèques municipales, sa recon-naissance budgétaire par la création d'une ligne

spécifique. [...]

c) Le droit de préemption

Institué par la loi de finances pour 1922, article 37,le droit de préemption de l'État pour les « objetsde collections » (décret d'application du 18 mars1924), qui l'autorise à se substituer à l'acquéreurlors d'une vente publique, apparaît comme un bonmoyen juridique d'enrichir les collections des biblio-thèques. En donnant licence à l'État de rester horsla course des enchères, il permet d'éviter une infla-tion de ces dernières que ne manquerait pas de

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provoquer la présence de ses représentants parmiles enchérisseurs.

Pourtant ce droit ne s'exerce pas aujourd'hui,au profit des bibliothèques, dans toutes les condi-tions de précision et de clarté souhaitables. Ainsi :

. Il était clair lorsque la Bibliothèque nationale,les bibliothèques universitaires, les bibliothèques desgrands établissements et les bibliothèques munici-pales relevaient d'une seule personne (le directeurdes bibliothèques et de la lecture publique étaiten même temps administrateur général de la Biblio-

thèque nationale) qu'il appartenait à la Bibliothèquenationale d'exercer le droit de préemption pour tousles établissements en cas de vente publique à Paris ;c'est le sens d'une circulaire du ministre de l'Édu-cation nationale en date du 31 août 1965 (n° 65-331).Mais que doit-il en être à présent que Bibliothèquenationale, bibliothèques municipales, bibliothèquesuniversitaires et bibliothèques des grands établisse-ments relèvent de responsables différents ? Lesbibliothèques municipales s'adressent tantôt à laDirection du livre et de la lecture, tantôt à la Biblio-thèque nationale selon des critères mal définis.

. La circulaire précitée stipule que le droit depréemption doit être exercé pour toutes les biblio-

thèques par un fonctionnaire de la Bibliothèquenationale. Mais qu'en est-il en cas de vente publiqueen province ?

L'usage voudrait aujourd'hui que tout conserva-teur d'État de province désireux d'exercer le droitde préemption demande une autorisation à sonadministration de tutelle. Cet usage est rarementsuivi. La lenteur qu'il implique est d'ailleurs contra-dictoire avec l'urgence de certaines affaires.

. En cas de vente publique à Paris, le droit depréemption étant exercé à l'heure actuelle soit parla Direction du livre et de la lecture, soit par la

Bibliothèque nationale, mais en concertation, lerisque n'existe guère qu'il soit exercé concurremmentpour deux bibliothèques différentes. En revanche,ce risque existe dans le cas des ventes publiques de

province. Par ailleurs, que ce soit en province ouà Paris, le risque est permanent d'une concurrenceentre bibliothèques d'une part, archives et muséesde l'autre.

. Les bibliothécaires sont mal informés sur ledroit de préemption : à quelles conditions l'exercer,comment, selon quels critères ? Cette situationrésulte en partie du caractère caduc des textesd'application.

DEUXIÈME PARTIE

PROPOSITIONS

POUR UNE POLITIQUE DU PATRIMOINE

L'État et les collectivités locales

A une série de mesures souvent utiles mais par-tielles, insuffisantes et mal coordonnées, on proposede substituer une véritable politique ; la conceptionqui l'inspire tient en quatre points :

1. Un certain nombre de tâches utiles à toutesles bibliothèques et appelant une centralisation enraison de leur nature même doivent être assuméespar l'État seul ; il en est ainsi, par exemple, du finan-cement de la recherche fondamentale en matièrede conservation ou de la coordination de la conser-vation des documents par l'ensemble des biblio-thèques.

2. En rupture avec le passé, l'État doit adopterune attitude exemplaire pour la conservation, lamise en valeur et l'accroissement des fonds desbibliothèques qui dépendent directement de lui. Ilest temps qu'il prenne conscience du fait que les

bibliothèques universitaires et les bibliothèques desgrands établissements conservent un précieux patri-moine menacé et sous-exploité. Il est temps quela Bibliothèque nationale dispose de moyens quisoient à la mesure de son rôle.

3. L'État ne s'en remettrait pas aux seules collec-tivités locales du soin de conserver, de mettre envaleur et d'accroître le patrimoine des bibliothèquesmunicipales sans aggraver la dégradation accélérée,la sous-exploitation et l'appauvrissement qui lecaractérisent. Les collectivités locales manquent demoyens financiers pour assumer ces trois missions ;le transfert d'une partie des ressources de l'Étatà leur profit pourra y remédier. Mais elles manquentaussi du personnel qualifié indispensable, et, souvent,d'un véritable intérêt pour ces fonds. [...]

L'aide que l'État se doit d'apporter aux collecti-vités locales ne leur sera pas dispensée par défianceet à des fins d'appropriation. Mais, au contraire, dansun esprit de responsabilité et de service fondé surdeux constatations :

. Une grande partie des collections précieusesque conservent les bibliothèques municipales luiappartiennent (la plupart des livres anciens, lesexemplaires reçus au titre du dépôt légal d'impri-meur).

. L'ensemble des fonds, quel que soit leur statut

juridique, constitue de facto, en même temps qu'une

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série de patrimoines locaux, un patrimoine national ;on a mis en relief, au début du présent rapport, la

complémentarité des collections conservées dans lesdifférents types de bibliothèques..

4. L'accroissement du rôle de l'État qu'on préco-nise tant pour les bibliothèques municipales quepour les bibliothèques universitaires, les bibliothè-ques des grands établissements et la Bibliothèquenationale, n'implique pas que les tâches nécessairesdoivent être toutes centralisées à Paris, ni que l'Étatdoive les assumer seul. Bien au contraire, ellesseront d'autant mieux accomplies qu'elles bénéficie-ront de la mise en place de services régionaux.Utiles à toutes les bibliothèques, ils devront êtreles lieux privilégiés d'une coopération entre l'Étatet les collectivités locales. La création de ces services,

proposition majeure du présent rapport, conditionnedans une large mesure la réussite des entreprisesenvisagées tout en constituant un moyen économiqueet cohérent de les mettre en oeuvre [...]

I. LES PRINCIPALESMESURES A METTRE EN oeUVRE

A. POUR MIEUX CONSERVER LES COL-LECTIONS

1" Un plan national de conservation partagée

a) Partager la conservation et les acquisitions

Un groupe de travail regroupant des représentantsde la Direction du livre et de la lecture, de la Direc-tion des bibliothèques, des musées et de l'informa-tion scientifique et technique et de la Bibliothèquenationale devra se réunir dans les meilleurs délaispour déterminer quels établissements conserverontquels documents, les moyens qui leur sont néces-saires, les ministères et éventuellement les collecti-vités locales qui devront dégager ces moyens. On secontentera ici d'indiquer des directions.

Dans chaque région, une bibliothèque municipaleconservera l'ensemble de la documentation relativeà sa région 1. Les dix-neuf bibliothèques de provinceattributaires du dépôt légal d'imprimeur recevrontdes moyens spécifiques non seulement pour collecter,mais pour conserver les exemplaires dus ; la néces-sité d'assurer la pérennité de ces documents devraconduire à ne les communiquer qu'avec discernement

(exclusion du libre accès, du prêt à domicile, etc.).Présenté par l'Association française d'archives

sonores, le projet d'implanter une phonothèque parrégion mérite d'être examiné avec la plus grandeattention.

La Bibliothèque de La Joie par les livres seraitplus particulièrement chargée de conserver les livrespour enfants.

1. Certaines bibliothèques municipales s'efforcent dejouer ce rôle, mais sans coordination avec les autres. Etleurs moyens sont insuffisants.

Les bibliothèques universitaires et quelques biblio-thèques de grands établissements, pour leur part,conserveront l'ensemble de la documentation scien-tifique et technique, y compris les sciences humaines.Il serait très souhaitable que, à l'occasion d'uneredéfinition des missions des Centres d'acquisitionet de diffusion de l'information scientifique et tech-

nique (CADIST), soit ajoutée à la liste de ces mis-sions, celle non seulement d'acquérir mais de conser-ver les documents de leur spécialité.

Enfin d'autres établissements que ceux qui dépen-dent de la Direction du livre et de la lecture ou dela Direction des bibliothèques, des musées et del'information scientifique et technique, déjà spécia-lisés dans tel ou tel domaine, pourraient être associés,

moyennant des aides financières, à la conservationdu patrimoine national. Par exemple le Centre natio-nal de recherche et de documentation pédagogiqueet ses filiales pour les ouvrages scolaires. Ou leCentre international de documentation occitane pourles ouvrages en langue d'oc.

La mise en oeuvre de ce plan de conservation

partagée prendrait d'autant plus de sens, que desmoyens seraient donnés aux différents établissementsd'acquérir. systématiquement les documents ressor-tissant à leur champ de conservation.

b) Faciliter et contrôler l'élimination

Inévitable, l'élimination doit sortir de la semi-clandestinité qui la caractérise pour figurer officiel-lement parmi les fonctions nécessaires des biblio-thèques. Il conviendrait à cet égard de modifier oud'expliciter l'article R.341-3 du Code des communesqui affirme l'inaliénabilité des collections des biblio-thèques publiques.

Mais, corollaire indispensable, l'élimination doitêtre contrôlée de telle sorte qu'aucun document nepuisse disparaître non seulement de l'ensemble duterritoire national, mais de la région qui l'abrite.On propose pour ce faire un dispositif de sécuritéà deux niveaux :

1. Interdiction est faite aux annexes (celles des

bibliothèques municipales mais aussi les sectionsdes bibliothèques universitaires, les bibliothèquesd'UER, etc.), de rien éliminer de leur propre auto-rité. Elles remettent à la bibliothèque centrale dontelles dépendent les documents dont elles souhaitentse défaire.

2. Les bibliothèques centrales, à leur tour, remet-tent les documents qu'elles ne désirent pas garderà un service régional qui effectue un tri, conserveau moins un exemplaire de chaque document etredistribue éventuellement les autres exemplaires àd'autres établissements, tels que les établissementsspécialisés précités (a) ou le Centre national deprêt. Comme les régions, Paris devrait pouvoir dis-poser d'un tel service à l'usage des bibliothèquesuniversitaires et des bibliothèques des grands éta-blissements.

Conçu en partie pour permettre une meilleuredisponibilité des documents, ce plan de conservationn'a de sens, bien entendu, qu'assorti de catalogues

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exhaustifs et d'un réseau de prêt de ces documents(ou de copies de ceux-ci) sûr et rapide.

2° Doter la France d'un laboratoire de pointe enmatière de conservation

[...] La double appartenance du Centre de recher-ches sur la conservation des documents graphiquesau CNRS et au ministère de la Culture paraissantêtre un obstacle à son développement nécessaire, on

propose dans un premier temps son transfert puret simple au ministère de la Culture, postes relevantà l'heure actuelle du CNRS compris ; transfert satis-faisant au plan de la raison dans la mesure où la

Bibliothèque nationale ayant été récemment ratta-chée au ministère de la Culture, le Centre ne travaille

que pour des établissements relevant de ce ministère(outre les bibliothèques : archives et musées).

Un plan pluri-annuel de croissance devrait parailleurs être défini. Il devra comprendre une aug-mentation rapide des effectifs sur la base minimalede quinze nouveaux postes de chercheurs ou d'ITA

(Ingénieurs techniciens administratifs) en trois ans.Dès 1983, en outre, la Direction du livre et de lalecture en tant que telle pourrait venir en aide auCentre en mettant à sa disposition un poste deconservateur ; adjoint au directeur, appelé à ledécharger d'une partie de ses tâches administratives,le titulaire de ce poste serait plus spécialement

responsable de l'information et de la formation.

3° Construire et aménager des locaux appropriés

On attirera l'attention des différents responsablessur les points suivants :

. Il convient d'éviter, dans toute la mesure dupossible, de loger des bibliothèques dans des locauxanciens dont l'inadaptation est avérée.

. On évitera, de même, d'opérer une séparation

géographique entre fonds anciens et fonds récents.[...]

. Qu'il s'agisse de construction ou d'adaptation,les locaux devront tendre à se rapprocher des condi-tions optimales, à présent bien connues, de laconservation (lumière, température, hygrométrie,etc.).

. Qu'il s'agisse de construction ou d'adaptation,il convient de prévoir notamment les espaces sui-vants :

- Des magasins suffisamment vastes, y comprisdans les bibliothèques universitaires ; sans remettreen cause la mise en libre accès de l'essentiel descollections récentes des bibliothèques universitaireset des bibliothèques municipales.

- Au sein même des magasins, des réserves

particulièrement satisfaisantes au regard de la sécu-rité et de la salubrité.

- Des salles de consultation spéciales pour lesdocuments précieux 1.

1. S'agissant des locaux, on recommande aussi de prévoirdes salles réservées aux animations. Voir B, 3°, b.

a) Pour la Bibliothèque nationale

Il est indispensable que les programmes de tra-vaux proposés par la Bibliothèque nationale pourl'année 1982, puis dans le cadre du plan d'équipe-ment 1983-1985, soient intégralement pris en consi-dération et qu'une marge suffisante soit prévuepour les défaillances inopinées d'installations dontles plus anciennes sont antérieures à la premièreguerre mondiale et dont la majôrité a d'un demi àun quart de siècle d'existence.

Ceci comporte :

. En 1982, l'aménagement ou l'équipement demagasins à Provins (microfilmothèque de reproduc-tion et presse régionale) et Versailles (livres et

périodiques), la réfection de la couverture du« magasin central » des Imprimés, le ravalement de

l'Arsenal, des réfections de toitures et des opérationsde mise hors d'eau à l'Arsenal, à Provins et à Sablé,des tranches substantielles de rénovation des instal-lations de chauffage et d'électricité à la Bibliothèquenationale et à l'Arsenal.

. En 1983, la poursuite des opérations de réfec-tion du chauffage et de l'électricité, le rééquipementde magasins pour les Départements des cartes etplans et des estampes, l'aménagement du comblePetits-Champs pour le Département des livres impri-més (magasins et locaux de travail), des opérationslimitées à l'Arsenal (ateliers de conservation et de

reproduction), à Provins et à Sablé (magasins) maissurtout la construction des dépôts de Redon (publi-cations - 4 000 m2) et de Saint-Lizier (documentssonores et photothèque de sécurité - environ6 000 m2 - évaluations totales comprises pourl'année 1983 entre 104 et 110 MF).

Les années suivantes devraient voir l'achèvementde la réfection des installations de chauffage et declimatisation et le complément des installations deprotection contre le vol et l'incendie à la Biblio-thèque nationale et à la Bibliothèque de l'Arsenal,l'équipement ou l'achèvement des opérations deRedon et de Saint-Lizier, le lancement du Centrede prêt (à Troyes) et le développement décisif des

magasins de Provins (dépôt de 10 000 m2) et deSablé (dépôt de 5 000 m2). [...]

b) Pour les bibliothèques universitaires et les biblio-thèques des grands établissements

Un inventaire précis des besoins sera dressé parl'Inspection générale, dans le cadre de la missiond'étude sur la conservation des fonds anciens etprécieux des bibliothèques universitaires et desbibliothèques des grands établissements que lui aconfiée le ministre de l'Éducation nationale. Lesmesures qui en découleront devront s'orienter selondeux axes :

- Extensions. Elles permettraient le rassemble-ment de fonds actuellement séparés. Quelques sec-tions de bibliothèques universitaires de provinceanciennes devraient bénéficier de ces extensions(Lyon, Montpellier, etc.). Mais surtout les biblio-thèques universitaires de Paris anciennes et lesbibliothèques des grands établissements.

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- Adaptations : réfection des chauffages et amé-

lioration de l'hygrométrie, rénovation des installa-tions électriques, protection contre le vol, l'incen-die, etc.

c) Pour les bibliothèques municipales

[...] Le ministre de la Culture a récemmentannoncé qu'une loi serait prochainement proposéeau Parlement, visant à rattraper le retard en matièrede bibliothèques municipales ; on ne peut que lasouhaiter la plus ambitieuse possible. Cependant,elle devrait s'assortir d'un programme d'adaptationimmédiate de certains locaux anciens ou récentsqu'il n'est pas envisagé de désaffecter avant long-temps. Ce programme dégageant des priorités devraêtre établi avec le concours de l'Inspection géné-rale. Les villes accepteront d'autant plus volontiersde mettre en oeuvre des moyens pour effectuer lestravaux nécessaires que la Direction du livre et dela lecture pourra participer à leur financement danstoute la mesure de ses possibilités légales, soit àl'heure actuelle pour 50 %. Une dizaine de biblio-thèques municipales devront bénéficier d'opérationsd'adaptation dès 1983 ; sur la base d'une prise encharge de 50 % des coûts, la participation minimalede la Direction du livre et de la lecture à chacunede ces opérations peut être estimée à 500 000 F

(5 MF en 1983).

4" Rattraper le retard en matière d'entretien etd'équipement des documents

a) Le mobilier

Des études devront être demandées par la Direc-tion du livre et de la lecture, en liaison avec laBibliothèque nationale, pour la mise au point desmobiliers adaptés qui font défaut, en particulierpour la conservation des documents iconographiquesde grand format.

Dans quelques bibliothèques, par ailleurs, subsis-tent des éléments de mobilier ancien. Ils méritentd'être recensés, sauvegardés.

b) L'équipement

Pour la reliure et les fournitures les plus indis-pensables, la Bibliothèque nationale doit disposerdès 1983 de 10 MF (au lieu de 6,3 MF en 1982).La croissance des crédits devra s'accompagner d'uneaugmentation des effectifs (+ cinq sous-bibliothé-caires, un commis, deux magasiniers).

Chaque bibliothèque municipale d'une certaineimportance, chaque bibliothèque universitaire etbibliothèque de grand établissement devrait disposerd'au moins un relieur attaché à l'établissement. Il

pourra effectuer le montage des documents icono-graphiques, les menues réparations qui évitent àterme des restaurations coûteuses.

La Direction du livre et de la lecture incitera lesvilles à recruter des relieurs pour les bibliothèques

municipales en leur proposant de prendre en charge

une partie des salaires et des charges sociales pen-dant un an au plus, sur le modèle de l'action menéeen 1982 pour le recrutement de bibliothécaires etde sous-bibliothécaires.

Une cinquantaine de postes sont nécessaires pourles bibliothèques universitaires et les bibliothèquesdes grands établissements. Bibliothèques universi-taires et bibliothèques des grands établissementsdevront, de plus, recevoir des crédits spécifiquespour leur permettre de rattraper leur retard enmatière de reliure en faisant appel au secteur privé.

Le cahier des charges mis au point par la Biblio-thèque nationale pour améliorer la qualité des reliu-res en vue de leur conservation à long terme devraêtre diffusé auprès des autres bibliothèques.

c) L'entretien

La Bibliothèque nationale devra se voir attribuerdès 1983 dix postes de magasiniers plus spécialementchargés d'assurer la maintenance et le récolementde ses collections.

La politique d'entretien des fonds des bibliothè-ques municipales menée par la Direction du Livreet de la lecture doit être repensée selon les modalitéssuivantes :

. Les opérations engagées doivent être plus nom-breuses (de l'ordre de quarante par an au lieu de

vingt).. La possibilité doit être offerte aux responsables

des opérations d'effectuer des stages pour les ypréparer. Il convient de leur fournir des instructionsplus complètes.

. Les opérations ne doivent pas toucher seulementles livres anciens mais aussi des documents tels queles photographies, les estampes, les périodiques.

. Les subventions doivent être telles qu'elles per-mettent l'achat de petits matériels nécessaires à la

préservation (boîtes, étuis, etc.) dont l'utilité serévèle à l'occasion des opérations de nettoyage.

. Les subventions de l'État doivent être systéma-tiquement reconduites, sous réserve d'une partici-pation des villes, jusqu'à ce que l'intégralité desfonds visés ait pu être traitée.

Il serait souhaitable que l'attribution de crédits

spécifiques permît aux bibliothèques universitaires etaux bibliothèques des grands établissements demener des opérations du même ordre.

5° Accroître et diversifier la restauration

a) Les ateliers employant du personnel d'État :extensions et créations

[...] Les besoins des bibliothèques universitairesparisiennes et des bibliothèques des grands établis-sements justifient la création à leur seul profit d'unatelier de restauration à Paris. Elle n'exclut pas lerenforcement des ateliers existants, qui pourraientainsi effectuer à titre provisoire la restauration des

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documents les plus précieux. Seraient nécessaires,en fonction de la capacité d'accueil des ateliers :

Les bibliothèques de province, pour leur part,qu'elles soient universitaires ou municipales, de-vraient pouvoir disposer de cinq ateliers à vocationinterrégionale d'ici à 1985. On propose à cet égard,selon une répartition visant à couvrir l'ensembledu territoire :

. Le renforcement de l'atelier de la Bibliothèquemunicipale de Toulouse (+ un poste de restaura-teur spécialiste en 1983 ; + deux postes par la suitesous réserve d'un déménagement dans des locauxplus vastes).

. L'affectation au Centre Joël Le Theule de Sabléd'un personnel suffisamment nombreux pour qu'ilpuisse travailler au profit des établissements envi-ronnants.

. La création de trois ateliers nouveaux. Leurlocalisation devra permettre d'assurer la couverturedes régions non desservies par les ateliers de Tou-louse et de Sablé. Ils pourraient se situer à Amiens,

Lyon et Troyes.

Seul le Centre Joël Le Theule de Sablé est doté,à l'heure actuelle, de moyens lui permettant detraiter massivement les documents sur papier desXIXe et XXe siècles. Les quatre autres ateliers pro-vinciaux et l'atelier parisien dont on propose lacréation ou le renforcement devront disposer d'équi-pements du même type. Comme le Centre Joël LeTheule, ils devraient se voir associer un atelier demicrographie. Traitement et microreproductiondevront être effectués en concertation avec ce Centre.

Parallèlement devront être renforcés tant enéquipements qu'en personnel, pour satisfaire auxbesoins propres des établissements qui les abritent,les ateliers de la Bibliothèque nationale et universi-taire de Strasbourg (+ deux postes de restaurateursspécialistes), de la Bibliothèque interuniversitaire deMontpellier (idem) et de la Bibliothèque universitairede Caen (idem).

Les renforcements et les créations proposés ci-des-sus devraient soulager la Bibliothèque nationaled'une partie des restaurations qu'elle accomplit auprofit des autres bibliothèques publiques. Cependantpour continuer à travailler pour ces bibliothèques,ainsi qu'il sera nécessaire, comme pour faire face àses propres besoins, la Bibliothèque nationale devraitse voir attribuer dès 1983 :

. Quatre postes de sous-chef d'atelier.

. Dix postes d'ouvrier de première catégorie.

. Six postes d'ouvrier de deuxième catégorie.

b) Formation et carrière des personnels de la res-tauration

[...] Les conditions de réouverture d'un concoursexterne pour l'accès au corps des ouvriers de pre-mière catégorie devront faire l'objet d'une étude

approfondie : dérogation à l'obligation de posséderdeux CAP ou mise en place d'un second CAP

adapté.

De même, une formation devrait-elle être mise enplace pour permettre à des oandidats de l'extérieurde se présenter au concours de restaurateur spécia-liste. Ces candidats devront justifier obligatoirementdu CAP de reliure-main, qui apparaît comme lameilleure préparation au métier de restaurateur. Laformation complémentaire indispensable dont ladurée reste à étudier pourrait être mise en place àl'Institut français de restauration des oeuvres d'art(réouverture et aménagement de la section Artsgraphiques), dans le cadre de la maîtrise de scienceset techniques de restauration des oeuvres d'art del'Université de Paris I et surtout à l'École Estienne.Dans tous les cas, il devrait être fait appel, pourcontribuer à l'enseignement théorique et surtout pra-tique, aux spécialistes de la Bibliothèque nationale.

La formation des candidats internes au mêmeconcours devra être plus poussée sur le plan théo-rique et mieux étalée dans le temps. Ils pourraientsuivre certains cours de l'École Estienne, de l'Institutfrançais de restauration des oeuvres d'art ou de lamaîtrise de Paris I en même temps que les candidatsde l'extérieur. Selon la durée de la formation com-

plémentaire exigée de ces derniers après le CAP,il conviendra d'étudier la possibilité de réduire lapériode de cinq ans de pratique actuellement exigéepour se présenter au concours interne ; cela afinde tendre à mettre à parité les temps de préparationdes candidats de l'intérieur et de l'extérieur.

La possibilité pour tout ou partie de la maîtrised'accéder à la catégorie A de la fonction publiqueserait un facteur d'amélioration de la qualité ducorps des restaurateurs spécialistes en même tempsque la juste reconnaissance de la haute technicitéd'un métier d'art.

Enfin, il conviendrait de se pencher sur les pro-blèmes posés par le développement de la restaurationdes documents les plus récents : définition d'unstatut pour les personnels de la restauration demasse ; formation des restaurateurs de documentsphotographiques et sonores.

c) Le recours au secteur privé

Il est impossible d'avoir plus largement recoursau secteur privé pour la restauration traditionnelle,sans obtenir des garanties quant à la qualité dutravail. Or, celle-ci passe d'abord par une amélio-ration de la formation des restaurateurs privés àlaquelle pourrait aboutir la mise en place, proposéeplus haut, de filières adaptées à l'École Estienne,à l'Institut français de restauration des oeuvres d'artou dans le cadre de la maîtrise de Paris I ; cesfilières formeront les futurs restaurateurs du secteur

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privé en même temps qu'elles prépareront les can-didats au concours de restaurateur spécialiste del'État.

Un cahier des charges type pour la restaurationtraditionnelle devrait pouvoir être élaboré par la

Bibliothèque nationale pour diffusion auprès desautres bibliothèques, cependant que la Bibliothèquenationale elle-même et l'Inspection générale, maisaussi les ateliers employant un personnel d'Étatimplantés en province, assureraient ou continueraientd'assurer des contrôles réguliers de la qualité destravaux effectués.

En contrepartie des investissements et des recru-tements auxquels les ateliers privés procéderaient,l'État devrait leur assurer des commandes stables parle biais de crédits spécifiques, attribués d'une manièreaccrue aux bibliothèques municipales mais aussiaux bibliothèques universitaires et aux bibliothèquesdes grands établissements. Il devra veiller à ce queleurs travaux leur soient réglés avec plus de céléritéqu'à l'heure actuelle. [...]

6° Reproduire, par procédés photographiques, l'en-semble des documents les plus précieux et les plusmenacés

a) Les microformes

[...] L'attribution à la Bibliothèque nationale demoyens suffisants devra lui permettre de mener àbien, à partir de cette année, ainsi qu'il est prévu,le microfilmage systématique de tous les périodiquestant régionaux que locaux qu'elle reçoit par ledépôt légal. Cependant, le microfilmage rétrospectifdes périodiques locaux entrepris par la Direction dulivre et de la lecture devra se poursuivre à un rythmeaccéléré. Pour microfilmer en dix ans 50 millions depages (estimation minimale du travail à effectuer),il conviendrait de disposer de cinq unités de produc-tion employant chacune huit personnes.

Sur le modèle de la politique pratiquée par laDirection du livre et de la lecture, les responsablesd'entreprises spontanées devront être incités à seconcerter avec la Bibliothèque nationale ; en effet,celle-ci est à même de prendre part, dans certainscas, au financement, de favoriser la qualité et doncla pérennité et la maniabilité des microfilms par ladiffusion du cahier des charges qu'elle a établi etdes contrôles effectués en cours d'opération.

Parallèlement devrait être lancée, tant par laDirection des bibliothèques, des musées et de l'infor-mation scientifique et technique, que par la Direc-tion du livre et de la lecture, auprès des bibliothèques

publiques qui dépendent d'elles mais aussi auprèsde certains établissements semi-publics ou privés,une vaste campagne de microreproduction de tousles documents présentant un caractère d'unicité oude rareté. Parmi lesquels : les manuscrits moderneset contemporains ; les imprimés uniques ; les reliures

précieuses ; les monnaies et médailles ; certainsdocuments iconographiques. Des tirages devraientêtre effectués systématiquement à partir des plaquesphotographiques.

Comme la microreproduction des périodiqueslocaux, celle des imprimés du XIXe et du XXe siè-cles devra faire l'objet d'une concertation préalableavec la Bibliothèque nationale, susceptible d'avoirdéjà effectué ou de projeter cette microreproductiondans son Centre de Sablé.

Les moyens de ce Centre devront être considéra-blement accrus, tant pour lui permettre de satisfaireles besoins de la Bibliothèque nationale que ceuxdes autres bibliothèques publiques auxquelles descopies seraient délivrées à un prix qui ne doit pasêtre dissuasif. La Bibliothèque nationale doit pouvoir

disposer d'une équipe pour choisir les ouvrages,programmer les opérations.

La mise en oeuvre de cette politique nécessitedes moyens financiers nouveaux qui pourraient êtredemandés dans certains cas aussi bien aux collec-tivités locales qu'à l'État. Cependant, c'est en pureperte qu'on dégagerait ces moyens sans la mise enplace d'équipes régionales chargées de préparer etd'effectuer les campagnes photographiques d'unemanière cohérente, rapide et satisfaisante au regardde la qualité ; les programmes présentés plus hautse fondent tous sur l'existence de telles équipes.

Un négatif de deuxième génération devra êtreconservé à l'échelon régional, dans un dépôt appro-prié, plutôt que par des bibliothèques ne disposantpas à l'heure actuelle de locaux adaptés. Cependant,la conservation du négatif de première générationdevrait être assurée à l'échelon national, sans quesoit remis en cause le droit de propriété éventueldes collectivités locales. Il conviendrait à cet égardde prévoir des locaux suffisants dans les différentsdépôts qu'il est envisagé de construire ou d'amé-nager, notamment à Saint-Cyr (documents icono-graphiques de tous les établissements ressortissantau ministère de la Culture) ou à Saint-Lizier (voirA, 3°, a).

Dans le cadre d'une politique générale de micro-reproduction, enfin, l'État, que ce soit ou non àl'occasion d'une entreprise qu'il finance en totalitéou en partie, devrait inciter les bibliothèques àacquérir des appareils de lecture. Ceux-ci pourraiententrer, dès 1983, parmi les matériels utiles à laconservation pour lesquels la Direction du livre etde la lecture accorde des crédits aux villes, moyen-nant une augmentation de ces crédits (500 000 Fen 1983). La Direction des bibliothèques, des muséeset de l'information scientifique et technique devraitdisposer de subventions du même type pour lesbibliothèques universitaires et les bibliothèques desgrands établissements.

b) Les reprints

Plus que par le passé, l'État doit-il éditer desreprints dans le cadre d'une politique globale desubstitution de copies aux documents originaux ?L'édition de reprints, à vrai dire, paraît une solutiontrop longue et trop coûteuse pour que la micropho-tographie ne lui soit pas préférée comme procédéessentiel ; ce qui n'exclut pas que telle ou telle admi-nistration, par exemple les universités, se fasse édi-trice à l'occasion.

Page 22: RAPPORT AU DIRECTEUR DU LIVRE ET DE LA LECTURE SUR LE

Du moins l'État pourrait-il s'efforcer d'obtenir des

producteurs, qu'ils appartiennent au secteur privéou au secteur public, une amélioration de la qualitédes reprints qu'ils publient en leur proposant lasignature d'une charte où se verraient précisées lesqualités minimales d'un bon reprint. L'acceptationpar les signataires des obligations énoncées par cettecharte donnerait lieu à l'obtention d'une sorte delabel de qualité officiel.

Le respect des recommandations définies serait

obligatoirement exigé des éditeurs privés qui ontrecours aux collections publiques.

D'une manière générale, ces éditeurs auraient toutintérêt à se concerter davantage avec les bibliothé-caires susceptibles de leur indiquer les ouvragesparticulièrement rares et qu'il serait opportun dereproduire. Les uns y trouveraient leur compteen se voyant offrir la possibilité de mettre à la dispo-sition du public des documents de substitution ; lesautres en augmentant leurs chances de vendre lestitres qu'ils publient.

La réimpression de certains ouvrages que leséditeurs n'ont pas songé à reproduire ou dont l'édi-tion présente à première vue trop de risques pourraitd'ailleurs être encouragée par des subventions :soit aides à l'édition, soit promesse d'achat d'uncertain nombre d'exemplaires au profit des biblio-

thèques publiques.

c) Les droits des bibliothèques

La contrepartie exigible par les bibliothèques

publiques autres que la Bibliothèque nationale, encas de reproduction d'ouvrages de leurs collections,demande à être précisée pour diffusion rapide auprèsdes responsables. Le cas des reproductions effectuéespar des éditeurs privés à des fins commercialesparaît clair : les bibliothèques doivent pouvoir parti-ciper aux bénéfices éventuels plus largement qu'enrecevant un ou deux exemplaires ; on peut imaginerque leur soit ouvert chez l'éditeur un crédit en nature.

S'agissant de microreproductions effectuées à lademande de chercheurs à des fins privées, les exi-gences de la conservation doivent être conciliéesdans toute la mesure du possible avec celle de lamise à la disposition du public. D'un côté, il seraitanormal que toute commande d'un chercheur ne fûtpas l'occasion pour la bibliothèque détentrice de semunir d'au moins un négatif de sécurité et d'unpositif de consultation. De l'autre, on ne sauraitpénaliser les chercheurs en leur faisant supporter lecoût de toutes les copies effectuées. Le procédéserait d'autant plus regrettable qu'il favoriserait les

plus fortunés.

B. POUR MIEUX EXPLOITER LES COLLEC-TIONS

1° Guides, inventaires, catalogues

a) Des catalogues nationaux informatisés

L'objectif auquel il convient de tendre est la miseen place de catalogues nationaux informatisés, aussi

complets que possible, de tous les types de docu-ments anciens et spéciaux. Pour faire le point desexpériences en la matière, françaises ou étrangères,pour dresser un inventaire des questions (cataloguessouhaitables, bordereaux, logiciels adaptés, listesd'autorités, etc.) et dégager des solutions, on proposela création sous l'égide de la Commission livre et

informatique qui réunit au sein du ministère de laCulture des représentants de la Direction du livreet de la lecture, de la Bibliothèque nationale et dela Bibliothèque publique d'information, d'un groupede travail associant, outre la Bibliothèque nationaleet la Direction du livre et de la lecture, la Directiondes bibliothèques, des musées et de l'information

scientifique et technique, des représentants del'Institut de recherche et d'histoire des textes duCNRS, des bibliothèques publiques et des usagers.

Les premiers essais d'automatisation pourraientêtre effectués à partir de catalogues existants. [...]

Les catalogues projetés prendraient tout leur sens,s'ils devaient éviter aux bibliothèques les plus dému-nies des travaux de catalogage. Les banques dedonnées devront donc être alimentées dans un pre-mier temps par les établissements les plus richestout à la fois en personnel et en documents, du typede la Bibliothèque nationale, de la Bibliothèquenationale et universitaire de Strasbourg et des Biblio-thèques municipales de Lyon, de Toulouse, de Bor-deaux et de Grenoble.

Il serait souhaitable de renforcer à cet effet lepersonnel scientifique et technique de ces établis-sements.

b) Des publications

En attendant la mise en place, qui demandera plu-sieurs années, de catalogues informatisés, l'actuelle

politique de l'État de publication de cataloguescollectifs et locaux doit être poursuivie et amplifiée.

Catalogues collectifsÉditrice du Catalogue général des manuscrits des

bibliothèques publiques de France, dont la publica-tion doit être poursuivie, la Direction du livre et dela lecture devrait y faire place, le cas échéant, aux

bibliothèques publiques qui ne dépendent pas d'elle :bibliothèques des grands établissements, bibliothè-ques universitaires1. Voire même à des bibliothèquessemi-publiques ou privées telles que les bibliothèquesde sociétés savantes ou les bibliothèques confession-nelles 2 ; il y aurait là, outre un moyen de mieuxfaire connaître leurs fonds, une incitation à les sta-biliser. [...]

1. Un supplément au catalogue de la Bibliothèque de laSorbonne et le catalogue de la Bibliothèque d'art et d'ar-chéologie viennent d'être achevés. Un supplément au cata-logue de la Bibliothèque de l'Institut et un nouveau supplé-ment au catalogue de la Bibliothèque Mazarine sont encours d'élaboration.

2. Le Catalogue général des manuscrits pourrait ainsiaccueillir, par exemple, les catalogues des manuscritshébraïques de la Bibliothèque de l'Alliance israélite univer-selle et de la Bibliothèque du Séminaire israélite de Francequi viennent d'être achevés.

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Comme celle du Catalogue général des manuscrits,la publication des catalogues régionaux d'incunablesdoit être poursuivie. Cette collection aussi, toute-fois, doit s'ouvrir aux bibliothèques qui dépendentde la Direction des bibliothèques, des musées et del'information scientifique et technique 1. Des réu-nions régulières entre les différents partenaires(rédacteurs, éditeurs) auxquels serait associée laBibliothèque nationale, sous l'égide de la Directiondu livre et de la lecture, permettraient d'assurerl'harmonisation des règles suivies, en même tempsque de préparer une table générale automatisée detous les catalogues français d'incunables.

Par une note jointe au présent rapport, le Centreinternational de documentation occitane propose àla Direction du livre et de la lecture de comman-diter l'édition des séries chronologiques de l'Inven-taire général des livres imprimés en occitan du XVe

au XVIIIe siècles ; s'agissant de fonds conservésessentiellement dans des bibliothèques municipales,cette proposition mérite d'être examinée avec atten-tion.

Première étape vers un catalogue national desdocuments iconographiques, le projet d'Atlas icono-graphique de la France mis au point par l'Institutd'histoire moderne et contemporaine du CNRSdevra être soutenu par la Direction du livre et dela lecture et la Direction des bibliothèques, desmusées et de l'information scientifique et technique.

Catalogues locauxAide financière à l'achat d'ouvrages utiles au

traitement des fonds ; prise en charge intégrale del'édition de catalogues au sein d'une collection natio-nale ; aide à la publication de catalogues hors collec-tion : cette politique commencée par la Directiondu livre et de la lecture en 1982 demande à êtredéveloppée. La collection « Patrimoine des biblio-thèques de France » devrait pouvoir accueillir àmoyen terme deux volumes par an au lieu d'un. Ilserait souhaitable d'offrir des vacations aux villestant pour leur rédaction que pour leur mise enforme. Cette entreprise qui, au même titre que leCatalogue général des manuscrits et les cataloguesrégionaux d'incunables, est une entreprise de recher-che, trouverait tout naturellement sa place parmi lestravaux financés grâce à l'enveloppe interministé-rielle du ministère de la Recherche, ainsi que laDirection du livre et de la lecture l'a demandé à

partir de 1983 (260 000 F en 1983).Sur le modèle de la politique conduite par le

Service du livre ancien de la Bibliothèque nationale,l'édition de catalogues spécialement conçus pourl'impression pourrait se voir associer la microrepro-duction de catalogues sur fiches ou sur registres.

1. La révision du catalogue des incunables de la Biblio-thèque Mazarine pourra être achevée dans un délai decinq ans. Le catalogue de la Bibliothèque de l'Institut esten voie d'achèvement. Un catalogue collectif des incunablesdes bibliothèques des grands établissements intégrant le cata-logue de la Bibliothèque du Muséum paru en 1978 seraitsouhaitable et techniquement possible en raison du petitnombre des établissements concernés. De même, un cata-logue collectif des incunables des bibliothèques universi-taires de Paris.

L'obtention par la Direction des bibliothèques,des musées et de l'information scientifique et tech-nique de crédits recherche, lui permettrait de menerune politique d'aide à l'élaboration et à la publi-cation de catalogues comparable à celle de la Direc-tion du livre et de la lecture. [...]

Tant auprès des bibliothèques universitaires etdes bibliothèques des grands établissements que des

bibliothèques municipales, enfin, une liste des cata-logues existants devrait être diffusée pour vente oupour échange ; les archives du Service du livreancien de la Bibliothèque nationale contiennent àce sujet des renseignements exploitables.

c) Sauvegarde et mise en valeur des fonds oubliés :des inventaires photographiques

Il reste à prendre des mesures immédiates pourla mise en valeur au moins sommaire et la sauve-

garde des fonds des petites bibliothèques de pro-vince. Méthode nouvelle en France, destinée àrompre avec les habitudes de perfectionnisme quine sont pas de mise devant l'urgence des sauvetagesnécessaires, le lancement d'inventaires photographi-ques pourrait bien constituer le recours souhaité.

Le principe en est simple : des équipes régionalesprocédant systématiquement bibliothèque par biblio-thèque effectuent des relevés photographiques desdocuments en leur entier (monnaies et médailles,documents iconographiques) ou de leurs parties lesplus significatives (livres anciens) et ajoutent surplace sans recherches bibliographiques approfondiesquelques éléments utiles à leur identification. Ladocumentation obtenue est regroupée pour traite-ment dans un centre régional doté de tous les ins-truments d'identification souhaitables.

Ce procédé résout le problème de l'absence de

personnel qualifié dans les petites bibliothèques. Ilconstitue une mesure conservatoire, en sensibilisantles collectivités locales à l'intérêt de leurs fonds eten permettant d'établir un premier inventaire. Ilfacilite dans des délais rapides l'accès aux fonds,en permettant dans un premier temps l'élaborationde guides2. Il n'est pas contradictoire avec l'élabo-ration de catalogues régionaux ou nationaux scien-tifiques satisfaisants : la documentation ainsi réuniepermettra de les constituer.

Une procédure maximale est proposée en annexe.Des essais, dès 1983, devront tester son adéquation,préciser les temps nécessaires et les coûts. [...]

d) Le concours des non-bibliothécairesLe retard considérable accusé par la France dans

l'inventaire de ses fonds exige que, partout où ilsse manifestent en dehors des bibliothèques, lesconcours soient acceptés, soutenus et même suscités.C'est ainsi que la Direction des bibliothèques, desmusées et de l'information scientifique et techniqueet la Direction du livre et de la lecture devraients'associer aux régions pour donner aux équipes

2. Il serait souhaitable de disposer à court terme - enattendant des catalogues complets - de guides régionauxdes fonds du type de ceux que publient les Archives dépar-tementales.

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d'universitaires et de chercheurs qui ont entreprisou se proposent d'entreprendre l'élaboration de

catalogues les moyens de mener leurs entreprises àbien. Parties prenantes, ces administrations centralesseraient mieux à même de coordonner et d'harmo-niser des travaux qui -dans une large mesure, àl'heure actuelle, s'ignorent. [...]

On ne nourrira cependant pas d'illusions sur letype de concours que l'Université, à l'heure actuelle,est susceptible d'apporter au catalogage des fonds.Les enseignants eux-mêmes insistent sur ce point :formés en histoire du livre tardivement et insuffi-samment, souvent ignorants des langues anciennesdont la connaissance est indispensable pour le trai-tement d'une grande partie des fonds antérieurs auXVIIIe siècle, les étudiants ne constitueront pas lamain-d'oeuvre qu'on souhaiterait pour combler leretard. Exigeant plus que la capacité de mettre enforme les données hâtivement recueillies sur undocument : une véritable aptitude à recueillir cesdonnées par un examen approfondi de toutes lescomposantes du document, le catalogage des fondsanciens et spéciaux ne saurait s'improviser ; et ilfaut pour le maîtriser plus que les quelques moisdont la plupart des étudiants disposent.

A cette situation qui contraste avec celle des paysanglo-saxons, il est possible de remédier dans unecertaine mesure en permettant que l'histoire du livrepuisse enfin faire l'objet à l'Université d'un ensei-gnement à part entière, dispensé dès le premiercycle ; le corollaire indispensable étant que des tra-vaux catalographiques et bibliographiques soienthabilités à faire l'objet de mémoires et de thèses.D'utiles contributions pourraient ainsi être apportéesà la mise en valeur des fonds. La conservation deceux-ci n'y gagnerait pas moins ; ces utilisateurs etsouvent futurs utilisateurs des bibliothèques que sontles étudiants traiteraient ces documents avec d'autantplus de ménagement qu'ils auraient appris à lesconnaître.

Plus qu'à ces éventuels concours efficaces maisponctuels, toutefois, l'avenir de la contribution desuniversitaires et chercheurs à l'inventaire des fondsappartient à des équipes stables, permanentes, rom-pues aux techniques bibliothéconomiques. L'exempledu décret du 7 novembre 1980 (n° 80-883) auxtermes duquel le ministre de l'Éducation nationalepeut autoriser chaque année quatre professeursagrégés de l'enseignement du second degré, anciensélèves des Écoles normales supérieures de la rued'Ulm et du boulevard Jourdan, à occuper pendantquatre ans des fonctions de recherche à la Biblio-thèque nationale, mérite à cet égard d'être médité ;on souhaiterait que des accords du même type puis-sent être conclus non seulement avec les Écolesnormales supérieures mais avec d'autres grandesécoles (École des chartes, etc.) au profit d'autresbibliothèques et notamment des bibliothèques muni-cipales de province. [...]

e) Des normes simplesConditions essentielles de la réalisation de cata-

logues collectifs, facteurs de maniabilité des diffé-rents catalogues locaux, des normes existent pour le

catalogage des images animées, des enregistrementssonores, des documents cartographiques 1.

D'autres demandent à être précisées : pour leslivres anciens, sur la base des recommandations dela Fédération internationale des Associations debibliothécaires et des bibliothèques ; pour les docu-ments iconographiques.

Pour être applicables, les normes doivent êtresimples. Les usagers eux-mêmes n'exigent pas desbibliothécaires que leurs catalogues entrent dansd'infinis détails : mieux vaut un catalogue sommaire

qu'un catalogue idéal qui ne voit pas le jour parexcès de perfectionnisme. C'est ainsi que les univer-sitaires consultés par la Commission sont unanimesà demander, pour les livres anciens, des cataloguesà titre court sur le modèle des short-titles anglo-saxons. Les bibliothécaires - au moins dans unpremier temps - doivent-ils se montrer plus exi-geants qu'eux ?

Des fichiers d'autorité devraient être établis rapi-dement en liaison avec les pays étrangers.

La mise au point de systèmes d'indexation, dequelque type de documents qu'il s'agisse, s'avèreindispensable dans la perspective d'une recherchedocumentaire automatisée.

2° Faciliter l'exploitation : les reproductions

Destinée à préserver les documents originaux enévitant de les communiquer au public, la reproduc-tion (duplication de documents sonores et audio-visuels, microreproduction) favorise aussi la diffusiondu texte, des sons, ou de l'image dont ils sont por-teurs : non seulement en permettant de les mettresur place à la disposition du public 2 mais encoreparce que d'autres copies pourront être offertessimultanément et en permanence aux usagers d'autresbibliothèques. Favorisant aussi bien la conservationque la diffusion, la reproduction apparaît biencomme l'un des axes majeurs d'une politique dupatrimoine. [...]

3° L'exploitation

a) La rechercheAu-delà du catalogage proprement dit, l'associa-

tion avec l'Université et le monde de la recherchedoit être encouragée pour l'exploitation et mêmel'enrichissement de certains fonds spécialisés. Laconvention passée entre l'Université et la ville deClermont-Ferrand pour la création, à la Biblio-

thèque municipale, du Centre international BlaisePascal, celle qui, conclue entre l'Université de Picar-die et le Centre culturel des Fontaines de Chantilly,a donné naissance au Centre de recherches desFontaines devraient être suivies, à cet égard, debien d'autres du même type.

Des structures régionales de concertation s'avèrentnécessaires ; on attend avec intérêt sur ce point lesconclusions de la Commission Querrien.

1. Ces normes ont été mises au point en 1980 et 1981par l'Association française de normalisation (AFNOR).

2. Dans toute la mesure du possible, les reprints doiventêtre mis à la libre disposition des chercheurs.

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Le personnel scientifique des bibliothèques semontrerait d'autant plus enclin à collaborer avec lesuniversitaires et les chercheurs, qu'il se sentirait surun pied d'égalité avec eux ; reconnaissance pleine etentière de sa vocation à la recherche, parité de laformation et des carrières apparaissent comme lesconditions d'une coopération confiante, profitable àla mise en valeur aussi bien qu'à l'enrichissement desfonds.

b) Le « grand public »

[...] S'agissant des bibliothèques municipales, lesmunicipalités devront être encouragées à considérerl'animation comme une fonction à part entière,nécessitant des moyens propres. Mais cette fonctionne doit pas être inscrite seulement dans les espritset dans les budgets ; elle doit l'être aussi dans l'archi-tecture des bibliothèques par l'aménagement de salles

spécifiques.Plutôt que d'aider chaque établissement à acquérir

les matériels nécessaires qu'il risquerait de sous-utiliser, il serait opportun de mettre en place, àl'échelon régional, un service qui en consentiraitle prêt au gré des besoins. Ce service qui pourraitêtre commun dans certains cas aux bibliothèques,aux musées et aux services d'archives mettrait enoutre à la disposition des différents établissementsun atelier de reprographie. Il serait à même de coor-donner les différentes animations au sein de larégion, d'organiser des expositions partagées.

Un service national, dont la constitution n'est pasmoins souhaitable, aurait pour tâche d'établir uneliste des expositions prévues sur tout le territoire,afin de faciliter leur coordination et leur connais-sance, de fournir les établissements en fiches tech-niques sur des thèmes récurrents (la fabrication dulivre, etc.), d'aider par des subventions spécifiquesà l'édition de catalogues, d'élaborer des listes decatalogues et de les diffuser.

Un système de garantie mutuelle favoriseraitincontestablement l'organisation d'expositions en

déchargeant les bibliothèques du coût des assu-rances. [...]

C. POUR ACCROITRE QUALITATIVEMENTLES COLLECTIONS

1° Mieux collecter les documents dus au titre dudépôt légal d'imprimeur

[...] Toutes les bibliothèques attributaires devrontse voir affecter par l'État un poste de sous-bibliothé-caire d'ici à 1985. Dès 1983, en outre, les créditsqu'elles reçoivent devront augmenter de façonqu'elles puissent assurer une collecte plus complètedes documents ainsi que, à titre transitoire, unerémunération plus correcte des vacataires. L'indivi-dualisation budgétaire des crédits consacrés au dépôt

légal, sans qu'il soit question d'en retirer la gestionà la Bibliothèque nationale, paraîtrait pour l'avenirune bonne garantie de meilleur fonctionnement descentres de province.

Le renforcement des moyens mis à la dispositionde ces centres devra s'accompagner d'un effortd'information mené tant auprès d'eux-mêmes, pour

les renseigner mieux sur leurs droits et devoirs,

qu'auprès des imprimeurs, par le canal, notamment,des préfectures et des organismes de formation ini-tiale et continue, pour les convaincre de l'intérêtdes dépôts.

2° Diversifier et coordonner les achats

Donner à la Bibliothèque nationale les moyensd'acquérir des témoins de la production la plussignificative de toutes les époques ; mais donneraussi aux autres bibliothèques publiques la possi-bilité d'acquérir de tels témoins, et non pas seulementdes pièces secondaires : cette visée sera implicitedans les mesures qu'on préconise. La décentralisationdu patrimoine est plus juste que sa concentration.Elle est aussi plus favorable à sa préservation.

a) Les documents iconogi-aphiques, sonores et audio-visuels

[...] Plus que par le passé, les bibliothèquesdevront s'attacher à recueillir des « images » : nonseulement les traditionnelles estampes, qu'elles soientanciennes ou contemporaines, mais aussi des docu-ments photographiques : albums de famille, archivesdes photographes locaux, des journaux locaux, aveclesquels des liens devraient être systématiquementétablis. Il serait souhaitable que leur collecte se fîten concertation avec les services d'archives. Les

bibliothèques municipales s'attacheront tout particu-lièrement à recueillir les images relatives à leur

région. La microreproduction ouvre la voie à unepolitique d'échanges, notamment avec la Bibliothè-que nationale.

Certains documents sonores et audio-visuels, d'au-tre part, devront être collectés désormais en vue deconstituer des fonds de conservation et d'étude.C'est ainsi qu'il est nécessaire d'inciter les chercheursà déposer en des lieux qui pourraient être notam-ment les phonothèques régionales dont on a sou-haité la création (I, A, 1°, a), les archives sonoresqu'ils ont recueillies (ethnotextes, etc.). Les biblio-thèques, et notamment les centres régionaux préci-tés, pourraient être, comme la Phonothèque natio-nale, à l'origine d'enquêtes et même participer àleur financement. Pour recueillir les archives sonoreset empêcher que ne se poursuivent des destructionsmassives, les établissements collecteurs devront éta-blir des liens avec les stations régionales de FR3,avec les radios locales.

b) Reliures d'art et livres de bibliophilie contem-porainsLes bibliothèques doivent acquérir davantage de

livres de bibliophilie et de reliures d'art contempo-rains. Cela afin de jouer leur rôle de conservatoirede ce type d'oeuvres. Mais aussi pour soutenir cesactivités. On propose donc que, dès 1983, une partdes crédits permettant à la Direction du livre et dela lecture d'aider les villes à acquérir des documentsprécieux pour leur bibliothèque municipale, puisseservir à commander des reliures d'art et même àsusciter des éditions de livres de bibliophilie.

Cependant, les achats des bibliothèques ne sau-raient à eux seuls lever les incertitudes qui pèsentsur l'avenir des relieurs d'art et surtout sur celui des

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imprimeurs et éditeurs de livres de bibliophilie. Ellesdoivent donc faire plus que d'acquérir leurs oeuvres :les faire connaître au public, informer les artisteseux-mêmes sur la production de leurs confrères.Elles aideront par là à répandre le goût des vraisbeaux livres. Elles pourront susciter des vocations.Elles favoriseront une émulation profitable à laqualité des oeuvres.

Mais la qualité de l'information que les bibliothé-caires dispenseront au public et aux artistes, celle deleurs achats dépendront de la formation et desinformations qu'ils auront eux-mêmes reçues. Sanscette information et cette formation préalables, lepatrimoine des bibliothèques risquerait fort de nes'enrichir que de pièces secondaires, pour ne pasdire inutiles ; et les fonds de l'État et des collectivitéslocales auraient été dépensés en pure perte.

c) Les documents parus à l'étranger

La Bibliothèque nationale

Pour retrouver un volume d'acquisitions correct,s'agissant des disciplines et des pays traditionnelle-ment représentés dans ses fonds ; pour commencerà combler ses lacunes, à tenter des ouvertures versde nouveaux pays et de nouveaux types de docu-ments (bibliophilie, microcopies de thèses, etc.), laBibliothèque nationale doit disposer en 1983 d'uncrédit minimal de 6 MF.

Les bibliothèques universitaires et les bibliothèquesdes grands établissements

L'accroissement des documents étrangers dansles collections des bibliothèques universitaires et des

bibliothèques des grands établissements passe parune augmentation globale de leurs crédits d'acqui-sition.

En 1979, les crédits des bibliothèques universi-taires ne permettaient d'acheter que 0,26 livre et0,08 titre de périodiques par étudiant. L'objectif àcourt terme est l'achat d'un ouvrage par étudiant etpar an, tout en maintenant les abonnements de pério-diques. A moyen terme il convient de se rapprocherdes normes de l'UNESCO, en acquérant trois livreset 0,6 titre de périodiques par étudiant.

d) Les acquisitions rétrospectives de documentsprécieux

La prospection ; la coordination des achats

Les bibliothèques devraient disposer de servicescommuns de prospection présentant toutes les garan-ties d'indépendance. Il pourrait s'agir :

- à Paris et pour suivre les ventes de Paris, duservice compétent de la Bibliothèque nationale ren-forcé et doté d'une certaine autonomie ;

- dans les régions, de services à créer.

La possibilité d'instituer des services communsaux archives, aux musées et aux bibliothèques mérited'être étudiée.

Il ne s'agit nullement, bien entendu, de déposséderles bibliothèques de leur droit propre à choisir lesdocuments qui enrichiront leurs collections. Lesservices communs leur apporteront des informations

qu'elles n'auraient peut-être pas obtenues sans eux.Toute liberté leur sera laissée de ne pas acquérirles documents signalés. Elles pourront mener, sielles le désirent, de leur côté, leur propre politiquede prospection.

Pour ce qui les concerne, les services communs,en signalant aux bibliothèques les documents sus-

ceptibles de prendre place dans leurs collections,devront se fixer pour principe de veiller à une justerépartition des documents les plus précieux.

Services de prospection, ils devront être aussi,tout naturellement, des instances de coordination desachats. C'est ainsi que toute intention de préempterdans les régions qu'ils couvriront respectivementdevra leur être signalée ; en cas de concurrence, ilsjoueront le rôle de médiateurs, sans disposer d'au-cun pouvoir discrétionnaire.

Les crédits nécessaires

La vocation de la Bibliothèque nationale, des

bibliothèques municipales à recueillir des témoinsde la production la plus haute du passé doit êtreaffirmée par de substantielles augmentations descrédits dégagés par l'État pour l'acquisition de docu-ments dits d'intérêt national (20 MF pour la Biblio-thèque nationale en 1983, 2 MF pour la Directiondu livre et de la lecture).

Mais les bibliothèques universitaires et les biblio-thèques des grands établissements doivent se voirreconnaître le même droit par l'attribution à la Direc-tion des bibliothèques, des musées et de l'informationscientifique et technique d'une dotation spécifique.

Le droit de préeniption

Les compétences respectives de la Bibliothèquenationale, de la Direction du livre et de la lecture etde la Direction des bibliothèques, des musées et del'information scientifique et technique doivent êtreprécisées clairement.

Les risques de concurrence entre établissements

pourraient être levés par l'instauration des servicescommuns précités.

Mieux informés, les conservateurs devront êtreinvités à user du droit de préemption avec discerne-ment, et à partir d'un seuil à déterminer.

3° Favoriser les libéralités

Les administrations centrales, relayées par lesbibliothèques, devront s'efforcer par une meilleureinformation de développer pour les documents res-sortissant aux bibliothèques, la pratique de la dationen paiement. La commission ministérielle compétentedevra être invitée à se montrer particulièrementréceptive à cet égard.

Moyen de mettre en valeur les collections publi-ques, l'animation doit être aussi conçue comme unefaçon d'encourager les libéralités de toute sorte.Toutefois, aucune incitation en la matière ne s'avé-rera efficace, surtout auprès des possesseurs descollections les plus précieuses, tant que les biblio-thèques publiques ne pourront garantir aux éventuelsdonateurs qu'elles sauront conserver leurs collectionsdans d'aussi bonnes conditions qu'eux-mêmes. [...]

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D. MIEUX FORMER ET MIEUX INFORMERPROFESSIONNELS ET USAGERS

1° Les personnels des bibliothèques

a) Les formations initiales

L'allongement à deux ans de la scolarité de l'Écolenationale supérieure de bibliothécaires (ENSB) per-mettrait notamment :

. à l'ensemble des élèves d'acquérir une meilleureformation en matière de patrimoine durant la pre-mière année ;

. à certains d'entre eux de se spécialiser dans cedomaine au cours de la deuxième année (qui donne-rait lieu à un mémoire de fin d'étude plus substantielet d'un niveau de recherche plus élevé) ;

. d'instituer une coopération souhaitable avecl'École nationale des chartes (cours communs, échan-ges d'enseignants) ;

. d'ouvrir les enseignements de la deuxième annéeaux personnels désireux de se recycler.

Les centres régionaux de formation profession-nelle qui préparent au certificat d'aptitude aux fonc-tions de bibliothécaire (CAFB) et au concours derecrutement des sous-bibliothécaires d'État (CSB)devront être repensés sur les bases suivantes :

. Le temps de préparation au CSB et au CAFBdoit être allongé.

. Les centres doivent bénéficier de moyens suffi-sants et d'un personnel enseignant très qualifié,disposant du temps nécessaire à la préparation descours.

S'agissant du CAFB on propose, dès 1983, ledéveloppement dans le tronc commun des coursrelatifs au patrimoine et la création d'une véritableoption spécialisée.

La formation des personnels responsables desdocuments musicaux, sonores et audio-visuels doitfaire l'objet d'une étude particulière. Tant à l'ENSBque dans les centres régionaux de formation profes-sionnelle, cette formation serait facilitée par unescolarité plus longue.

Parmi les points sur lesquels la formation despersonnels scientifiques et techniques demande àêtre développée, on notera : les problèmes et lestechniques de la conservation, les documents sonoreset audio-visuels, l'histoire du livre, l'animation.

Il serait souhaitable de fusionner les catégoriesde magasinier et de gardien de bibliothèque en uncorps unique qui devrait bénéficier d'une formationinitiale obligatoire portant notamment sur la classi-fication, l'histoire du livre, l'entretien et la manipu-lation des documents.

b) La formation permanente et l'informationDes stages nombreux doivent être offerts aux

personnels désireux de s'initier ou de se perfection-ner dans le domaine du patrimoine. Il serait notam-ment souhaitable que des stages puissent être pro-

posés aux personnels nommés dans des établissementsoù ils auront à connaître des problèmes du patri-moine.

Les sujets sur lesquels il est nécessaire de ras-sembler des informations pour diffusion systéma-tique sont notamment :

. Les copies disponibles sur le marché : reprints(titres, qualité des réimpressions) ; microformes(notamment celles que produisent le Centre JoëlLe Theule de Sablé, l'Association pour la conser-vation et la reproduction photographique de la

presse).. Les normes.. Les matériels et les techniques de la conser-

vation. Il serait nécessaire à cet égard de créer unerevue française sur la conservation et la restauration,de diffuser des bibliographies et des notes tech-

niques.. Les précautions à prendre en matière de commu-

nication : selon quels critères et comment commu-

niquer les documents précieux ; l'usage de la photo-copie ; les conditions dans lesquelles les documentsdoivent être exposés, etc.

. Les aides susceptibles d'être apportées par l'État.

. Les procédures à suivre pour les donations, legset dations.

. Le droit de préemption.

2° Les usagers

Mieux faire connaître les livres, mieux faireconnaître les bibliothèques aux usagers pour favo-riser la conservation, l'exploitation et l'accroissementdes fonds : ces objectifs peuvent être atteints notam-ment :

. Par le développement, déjà souhaité plus haut,de l'histoire du livre. Admission plus large des tra-vaux catalographiques et bibliographiques parmi lesrecherches donnant lieu à diplômes dans l'Université,obligation pour les auteurs d'éditions critiques deposséder des connaissances minimales en matièred'histoire du livre (bibliographie matérielle, etc.)sont quelques-unes des mesures envisageables pourobtenir des chercheurs une meilleure connaissancedu patrimoine des bibliothèques.

. Par le développement et la diffusion de l'histoiredes bibliothèques.

. Par une large information au moyen de revues

générales (comme la Revue française d'histoire dulivre) ou plus centrées sur des bibliothèques parti-culières (comme la Revue de la Bibliothèque natio-nale ou les Mélanges de la Bibliothèque de la Sor-

bonne).

E. SAUVEGARDER LE PATRIMOINE DESBIBLIOTHÈQUES SEMI-PUBLIQUES ETPRIVÉES

On a proposé d'étendre aux bibliothèques semi-publiques et privées, telles que les bibliothèquesconfessionnelles, des campagnes de microreproduc-tion en vue de constituer des archives de sécurité

(A, 6°, a), de leur ouvrir les catalogues collectifsnationaux tel que le Catalogue général des manus-crits (B, 1°, b). La sauvegarde de leurs fonds, leurmise à la disposition d'un public plus large appelle

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cependant une action plus vigoureuse de la partdes pouvoirs publics. Il convient donc que ceux-ci :

- encouragent les dépôts des fonds dans les

bibliothèques publiques ;- multiplient les conventions avec les établis-

sements ; une aide à l'entretien et au catalogageaurait pour contrepartie une meilleure ouverture aupublic, la participation des établissements à desentreprises d'intérêt collectif ainsi que des garantiesquant à la stabilité des collections. [...]

II. DES STRUCTURES NOUVELLES

DE COORDINATION ET D'EXÉCUTION 1

A. DES CENTRES RÉGIONAUX

La nécessité de disposer de services régionaux aété évoquée à plusieurs reprises dans les pages quiprécèdent : pour le tri et la conservation des ouvrageséliminés par les bibliothèques de chaque région ; pourla restauration ; pour la microreproduction à desfins de conservation ou d'exploitation ; pour laconservation des négatifs de deuxième génération ;pour l'animation ; pour la recherche des documentsanciens et la coordination des acquisitions, etc. Defait, sans ces services, la plupart des actions propo-sées demanderaient des délais contradictoires avecl'urgence des sauvetages à opérer quand elles nes'avéreraient pas purement et simplement impossi-bles. Comment restaurer davantage de documentssans ateliers régionaux ? Comment venir à boutrapidement du microfilmage des manuscrits médié-vaux, des périodiques locaux, d'autres documentsprécieux sans équipes spécifiques formées et bienoutillées ?

Deux possibilités s'offrent pour mettre en placeces services : concevoir chacun d'eux isolément, enfonction des différents besoins exprimés. Ou tenterde les rassembler en une organisation cohérente etrationnelle, relais et moteur d'une véritable politiquedu patrimoine. L'économie des moyens aussi bien

que l'intérêt des fonds appellent cette dernière orga-nisation : les mêmes équipes peuvent simultanémentou successivement poursuivre le microfilmage desmanuscrits médiévaux, commencer celui des autresdocuments précieux ; les mêmes ateliers peuventservir au microfilmage de la presse locale, à l'orga-nisation d'expositions, au microfilmage des docu-ments du XIXe et du XXe siècles éliminés par lesbibliothèques de la région ; il y a grand intérêt àce que laboratoires et ateliers de restauration soientles plus proches possible des magasins, etc. Pas

d'opération utile au patrimoine des bibliothèques quine soit liée aux autres et qui ne souffrirait d'en êtreséparée.

Les pages qui suivent visent à préciser le profildes centres régionaux dont on propose la création.

1. Les propositions qui suivent ne sont pas contradic-toires avec celles de la Commission Pingaud-Barreau. Voirle rapport remis par cette Commission au ministre de laCulture, p. 69-72 et 75.

1° Fonctions

Les centres n'auront pas pour vocation d'inter-venir autoritairement auprès des bibliothèques. Leursresponsables ne sauraient disposer réglementairementd'un pouvoir de contrôle, pouvoir qui doit resterentre les mains de l'Inspection générale. Leur aidedevra être demandée ; ils devront non pas s'imposermais s'efforcer de faire comprendre l'utilité de cetteaide. La liberté des établissements à l'égard descentres pourra se concrétiser par la passation avecceux-ci de contrats à durée limitée.

Les centres auront vocation à intervenir auprèsde tous les types de bibliothèques.

Les fonctions des centres découlent tout naturel-lement des besoins exprimés plus haut. Il pourras'y ajouter des fonctions autres que strictementpatrimoniales qu'il n'était pas du ressort de la com-mission de préciser.

Les fonctions patrimoniales des centres seraientnotamment :

a) Pour la conservation des collections :

. L'accueil, le tri puis la conservation et la redis-tribution éventuelle des documents éliminés par lesbibliothèques de la région selon la procédure décriteplus haut (I, A, 1°, b).

. L'accueil des documents provenant de biblio-

thèques privées (bibliothèques confessionnelles,bibliothèques de sociétés savantes, etc.) ou publiqueshors d'état de les préserver. Les centres joueront lerôle de structure d'accueil de dernier recours pourdes collections en péril ; ils n'auront pas pour butd'accroître à tout prix leurs collections propres. Ilss'efforceront de redistribuer avec l'accord de toutesles parties les documents qui leur auront été confiés.

. L'assistance aux bibliothèques dans leurs tâchesde prévention, de contrôle et d'entretien (mises enréserve, contrôles thermiques et hygrométriques,etc.).

. L'aide aux bibliothèques pour le choix des docu-ments à restaurer. La restauration des documentsgrâce à des ateliers qui se confondront avec ceuxdont on a évoqué plus haut la nécessité (I, A, 5°, a).L'assistance aux bibliothèques dans leurs rapportsavec les restaurateurs privés.

. La reproduction par procédés photographiquesdes documents uniques ou rares. Les centres serontainsi les relais indispensables de la politique néces-saire de microfilmage des manuscrits médiévaux,des périodiques locaux, de tous les documents pré-sentant un caractère d'unicité ou de rareté ; ils dispo-seront du personnel et du matériel permettant demener à bien ces tâches rapidement et correctement.Ils seront pourvus de magasins adaptés à la conser-vation optimale des microformes obtenues.

b) Pour l'exploitation des collections :

. La recherche, le dénombrement et l'inventairedes fonds selon les méthodes définies plus haut

(I, B, 1°, c).

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. Le recensement des catalogues existants.

. L'aide aux bibliothèques pour le catalogage deleurs fonds (personnel, usuels) et la publication descatalogues obtenus.

. La constitution de catalogues régionaux en vuede leur publication et de l'élaboration à l'écheloncentral de catalogues nationaux (catalogues impri-més, sur microformes, automatisés, etc.).

. Le prêt des documents recueillis, ou de copiesde ces documents effectuées par le centre lui-même.

. L'aide matérielle et intellectuelle à l'animation

(organisation d'expositions, publication de catalo-gues d'exposition, d'actes de colloques, etc.).

c) Pour l'accroissement des collections

. L'incitation à la collecte des documents souter-rains et marginaux (affiches, tracts, etc.) et la coor-dination de cette collecte.

. Le suivi des ventes publiques dans la région.

. Éventuellement, l'apport de conseils pour l'ac-quisition de documents anciens, rares et précieux.

d) Pour la formation et l'information dans tous lesdomaines

. La constitution d'un centre de documentation

ouvert aux professionnels et au public.

. La collecte et la diffusion de l'information, aussi

bien horizontale (interbibliothèques) que verticale

(régions → Paris ; Paris → régions).

. La formation permanente et dans certains cas

initiale de toutes les catégories de personnel. Cer-

tains centres pourraient se voir rattacher le centre

de formation professionnelle de leur région.

2° Locaux et personnels

On peut prévoir selon les besoins et les capacitésdes régions deux sortes de centres :

. Des centres à vocation purement régionale(type B).

. Des centres plus importants (type A) dont cer-tains services pourront seconder, à la demande, lescentres régionaux voisins de type B.

a) Centres de type A

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3° Statut

Les centres pourraient être intégrés à de grandesbibliothèques, notamment municipales, qui s'effor-cent de jouer à l'heure actuelle le rôle de bibliothè-ques régionales. Ils se confondraient avec elles.Elles recevraient pour assurer les tâches nécessairesdes moyens propres. Les centres pourraient êtreaussi totalement autonomes par rapport aux biblio-thèques existantes.

L'intégration présente de nombreux avantages.Directeur d'une grande bibliothèque, le directeur ducentre jouirait de l'autorité que lui confère celle-ciauprès des établissements plus petits. Le centre dis-poserait directement des ressources documentaires dela bibliothèque.

Cependant, aucune bibliothèque ne possède àl'heure actuelle des locaux suffisants pour remplircorrectement toutes les fonctions nécessaires descentres. En outre, il paraît bien que l'aide des centresserait d'autant mieux acceptée dans certains cas parde petites bibliothèques qu'ils ne seraient pas liésà des bibliothèques importantes. D'autres bibliothè-

ques importantes accepteraient mal de voir assumerpar des établissements comparables un rôle régional.Enfin, la tentation serait constante chez la biblio-thèque chargée du centre de privilégier ses besoinsau détriment de ceux des autres bibliothèques.

Ces inconvénients paraissent supérieurs aux avan-tages. C'est la raison pour laquelle il semble préfé-rable de concevoir des centres indépendants des

bibliothèques existantes. Pourvus de locaux neufs,suffisants, fonctionnels, d'un matériel adapté, d'unpersonnel appelé uniquement à prêter main forteaux bibliothèques, ils seraient à même d'assumerpleinement leurs missions.

Il reste à préciser la nature de cette indépendance.L'objectif premier des centres étant de faciliter unebonne coopération entre les bibliothèques de toutescatégories, les collectivités locales - régions, dépar-tements, communes - doivent être étroitementassociées à la définition de leurs missions et à leurgestion. Cependant, compte tenu des responsabilitésde l'État en la matière, de la nécessité d'une actioninterministérielle (Culture - Éducation nationale)et du fait que les premiers centres créés auront unecompétence étendue à plusieurs régions, il apparaîtnécessaire de prévoir pour ces centres un statutd'État. La solution la meilleure pourrait être cellede l'établissement public national auquel seraitaffecté du personnel d'État, au moins en ce quiconcerne le personnel scientifique (conservateurs)et les restaurateurs spécialistes. Ce n'est qu'aprèsune période transitoire de mise en place et d'évalua-tion des résultats obtenus, qu'un transfert de compé-tence pourrait être envisagé entre l'État et lesrégions.

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La question de savoir s'il n'y aurait pas avantageà créer des centres communs à tous les établisse-ments patrimoniaux (archives, musées, bibliothèques)devra faire l'objet d'une étude approfondie à lalumière des travaux de la Commission Querrien.Restauration des documents, animation, campagnes

photographiques : autant de besoins communs àtous ces établissements et auxquels pourraient répon-dre des installations partagées. L'éventualité de cesservices communs est un argument supplémentaireen faveur de l'autonomie des centres par rapportaux bibliothèques.

4° Propositions d'implantations pour les années1983-1985

On souhaite l'implantation de cinq centres régio-naux de type A d'ici à 1985. Leur création devraêtre proposée aux collectivités locales. Les négocia-tions porteront notamment sur la distribution descharges entre l'État et elles. Selon une répartitiongéographique visant à couvrir l'ensemble du terri-toire, les villes destinées à abriter les centres pour-raient être Amiens, Bordeaux, Lyon, Troyes etSablé. Ce dernier centre prendrait place dans leslocaux du Centre Joël Le Theule de la Bibliothèquenationale moyennant un accord avec celle-ci.

Les actions les plus urgentes, appelant la mise enplace prioritaire des services compétents, sont larestauration et la réalisation de relevés photogra-

phiques.On tiendra compte dans toute la mesure du pos-

sible de l'existant. C'est ainsi que l'atelier de restau-ration de la Bibliothèque municipale de Toulousepourrait jouer le rôle d'atelier régional dispensantpar là le centre de Bordeaux d'en comporter un. [...]

B. UN CENTRE NATIONAL DE COORDINA-TION ET D'IMPULSION

1° Missions

Un certain nombre de tâches demandent à êtreaccomplies à l'échelon national. Communes à l'en-semble des bibliothèques, elles appellent la mise enplace d'un service commun au ministère de la Cul-ture et au ministère de l'Éducation nationale.

Parmi les missions de ce centre, on relèvera :

. L'orientation des travaux du Centre de recher-ches sur la conservation des documents graphiquesen liaison avec les centres régionaux.

. Les négociations avec les producteurs de docu-ments.

. La définition des normes en liaison avec lesinstances compétentes.

. L'élaboration de guides1, d'inventaires et decatalogues nationaux (constitution de banques dedonnées, etc.).

. L'élaboration et la diffusion de listes des cata-logues existants.

. La prospection pour les acquisitions rétrospec-tives et la coordination de ces acquisitions. Le suivides ventes publiques à Paris.

. La collecte et la diffusion de l'information danstous les domaines (élaboration de la revue sur laconservation et la restauration déjà mentionnée,diffusion de notes techniques, etc.).

. La formation continue de certains personnels.

2° Statut

Le statut du centre est difficile à préciser alorsque les modalités de la régionalisation ne sont pasconnues dans leur entier. Il pourra s'agir d'un Centrenational du livre ancien et des documents rares etprécieux revivifié : c'est-à-dire pourvu des moyensnécessaires pour assurer son rôle de service commun.Il pourra s'agir aussi d'un des services d'un établis-sement public rassemblant soit des services utiles àtoutes les bibliothèques, soit des services utiles àtous les établissements patrimoniaux.

Dans les deux cas, il devra entretenir des liensétroits avec l'Inspection générale apte à assurer laliaison entre les centres régionaux et lui.

3° A titre transitoire : un Comité consultatif dupatrimoine

En attendant la création d'un véritable centrenational interministériel, il sera créé auprès de laDirection du livre et de la lecture un Comité consul-tatif du patrimoine. Ce Comité composé de techni-ciens donnera son avis sur les orientations souhai-tables des actions de la Direction du livre et de lalecture en faveur du patrimoine des bibliothèques.Il rassemblera des informations à l'intention de cesdernières. Il fera le point des actions entreprises.

Un représentant des bibliothèques qui ressortissentau ministère de l'Éducation nationale y sera invitéde façon permanente.

CONCLUSION

Il ressort de ce rapport que l'état du patrimoinede toutes les bibliothèques françaises est, sans aucuneexagération, alarmant. Si des dispositions urgentesne sont pas prises dans les plus brefs délais, ce

1. Notamment d'un nouveau guide des richesses desbibliothèques de France sur le modèle de celui de Dacieret Neveux (1932).

n'est plus un plan de sauvegarde qu'il faudra mettreen place, mais un plan de reconstitution des collec-tions nationales, à supposer que les pertes prévisiblesne soient pas irréparables [...]

Ce rapport vise à attirer de façon pressante l'atten-tion des pouvoirs publics sur cette situation et àproposer un ensemble cohérent de mesures propresà promouvoir une véritable politique patrimoniale

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de conservation, d'accroissement et de communica-tion, au sens large du terme, intéressant l'ensembledes bibliothèques publiques et même privées, tantà Paris qu'en province.

L'une des principales mesures préconisées est lacréation, dans chaque région, de services communsà toutes les bibliothèques, dont le rôle sera, notam-ment, de coordonner leur action. Ainsi, les ministèresde la Culture et de l'Éducation nationale, en liaisonavec les collectivités intéressées, pourront-ils mettreen oeuvre une politique du patrimoine homogène,cohérente et adaptée aux besoins spécifiques desrégions dans leur diversité.

L'action proposée n'a pas, évidemment, pour seulsbuts la préservation et l'accroissement du patrimoine.Elle doit aussi - et surtout - permettre de lafaçon la plus complète la mise à la disposition dece patrimoine non seulement des usagers tradition-nels, mais aussi de l'ensemble des citoyens. Desexpériences ponctuelles ont, en effet, montré l'intérêtque porte le grand public aux documents conservésdans les bibliothèques, et, en particulier, à ceuxrelatifs à sa région.

Conserver et accroître pour communiquer et dif-fuser, telle est la ligne de force de la politique qu'onpréconise. [...]