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RAPPORT 2016 SUR LES DROITS DE L’HOMME – CÔTE D’IVOIRE
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
La Côte d’Ivoire est une république démocratique avec un gouvernement
démocratiquement élu. Au cours des élections législatives du 18 décembre, la
coalition gouvernementale en place a remporté 66 % des sièges à l’Assemblée
nationale. Le principal parti d’opposition, qui a boycotté les élections législatives
de 2011, a participé aux élections et remporté des sièges. Les élections se sont
déroulées de manière pacifique et ont été considérées comme inclusives et
transparentes. Des élections présidentielles se sont tenues dans le pays en
octobre 2015, à l’issue desquelles le président Alassane Ouattara a été réélu avec
une importante majorité. Les élections ont été jugées libres et équitables par des
observateurs nationaux et internationaux.
Les autorités civiles n’ont parfois pas maintenu un contrôle efficace des forces de
sécurité.
En avril, les Nations Unies ont levé toutes les sanctions qui pesaient sur le pays et
renouvelé le mandat de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI)
pour une dernière année jusqu’en juin 2017. Malgré des améliorations continues
quoique lentes en matière de sécurité et de réconciliation politique, les efforts du
gouvernement pour restaurer l’État de droit et gérer les problèmes d’impunité après
la crise postélectorale de 2010-2011 ne sont pas encore terminés.
Les problèmes les plus graves relatifs aux droits de l’homme concernaient les
exactions dont se sont rendues coupables les forces de sécurité, notamment les
exécutions extrajudiciaires et les violations commises sur des détenus et des
prisonniers, et l’incapacité du gouvernement à faire respecter l’État de droit. Les
Forces armées de Côte d’Ivoire (FACI), anciennement connues sous le nom de
Forces républicaines de Côte d’Ivoire, et la gendarmerie étaient responsables des
arrestations et des détentions arbitraires, notamment dans les centres de détention
informels qu’elles opéraient.
Les conditions dans les prisons et les centres de détention étaient dures et parfois
délétères, et la détention provisoire prolongée a constitué un problème. Le
judiciaire était inefficace et manquait d’indépendance. Le gouvernement a limité la
liberté de la presse et de réunion. La corruption au sein des pouvoirs publics était
répandue. Les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays (PDIP) ont connu des
conditions de vie difficiles et peu sûres. Il a subsisté de nombreux cas d’apatridie.
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Des cas de discrimination, d’agression sexuelle et de violence contre les femmes et
les enfants se sont produits. La discrimination sociale à l’encontre des groupes
ethniques, des personnes handicapées, de la communauté lesbienne, gay,
bisexuelle, transgenre et intersexe (LGBTI) et des victimes du VIH-sida a constitué
un problème. Des enfants et des travailleurs du secteur informel ont été assujettis à
des travaux forcés et des conditions de travail dangereuses par leurs employeurs,
surtout dans les zones rurales.
Le gouvernement a rarement pris de mesures visant à poursuivre en justice les
officiels responsables d’abus, que ce soit au sein des services de sécurité ou dans
d’autres secteurs des pouvoirs publics, et l’impunité constituait un problème grave.
Plusieurs personnalités haut placées alignées avec le gouvernement se seraient
rendues coupables de violations des droits de l’homme au cours de la crise
postélectorale de 2010-2011, et certaines ont conservé le poste important qu’elles
occupaient au sein des forces de sécurité.
Il y a eu des allégations d’exploitation sexuelle et de sévices commis par des
casques bleus déployés par l’ONUCI.
Section 1. Respect de l’intégrité de la personne, y compris le droit de vivre à
l’abri des atteintes suivantes :
a. Privation arbitraire de la vie et autres exécutions extrajudiciaires ou à
motivations politiques
Plusieurs exécutions arbitraires ou extrajudiciaires imputées aux pouvoirs publics
ou à leurs agents ont été signalées.
Par exemple, le 6 mars, des soldats des FACI ont utilisé des balles réelles pour
réprimer une manifestation à Assuéfry, près de Bondoukou, faisant trois morts et
un blessé chez les manifestants qui protestaient contre les mesures d’extorsion dont
des soldats se rendaient coupables. Les pouvoirs publics n’ont procédé à aucune
arrestation.
Un attentat terroriste a fait des victimes civiles. Le 13 mars, un attentat terroriste
dans une station balnéaire de Grand-Bassam a fait 16 victimes civiles, dont un
enfant. Le gouvernement a arrêté deux soldats et les a condamnés à dix ans de
prison pour avoir aidé les terroristes à préparer l’attaque.
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Le 28 janvier a débuté à la Cour pénale internationale (CPI), à la Haye, le procès
de l’ex-président, Laurent Gbagbo, et de son allié proche, Charles Blé Goudé.
Quatre chefs d’accusation avaient été prononcés contre eux pour crimes contre
l’humanité commis au cours de la crise postélectorale de 2010-2011 pendant
laquelle au moins 3 000 civils ont été tués et plus de 150 femmes et filles violées.
Le 31 mars, le procès de l’ex-Première dame Simone Gbagbo pour crimes contre
l’humanité et crimes de guerre a commencé à la Cour d’assises. (En détention
provisoire depuis 2011, elle a également été mise en accusation par la CPI.) Il
s’agissait du tout premier procès pour crimes contre l’humanité mené dans le pays.
Certains groupes de défense des droits de l’homme plaignants dans l’affaire se sont
retirés au cours de l’année des actions en cours, arguant qu’elles étaient entachées
d’irrégularités. Quelques jours plus tôt, en mars, la Cour suprême avait rejeté le
dernier appel interjeté par Simone Gbagbo de la peine de 20 ans de prison à
laquelle elle avait été condamnée dans le cadre d’un autre procès, en 2015, pour
lequel elle était accusée de crimes contre l’État.
Le 25 janvier, le procès de 19 officiers militaires inculpés en relation avec
l’assassinat du général Robert Guei et de sa famille en 2002 a repris. Le 18 février,
le tribunal militaire a condamné trois officiers (le général Dogbo Blé, ancien chef
de la garde républicaine, le commandant Anselme Séka Yapo, ancien chef de la
sécurité rapprochée de l’ex-première dame, et Daléba Séry) à la prison à perpétuité
pour meurtre et complicité de meurtre, et quatre autres à dix ans de prison. Les
12 autres accusés ont été acquittés.
b. Disparitions
Contrairement à l’année précédente, il n’a pas été fait état de disparitions à
motivations politiques.
c. Torture et autres châtiments ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants
Bien que la Constitution et la loi interdisent ces pratiques, il a été fait état de cas où
des responsables publics y auraient eu recours.
Selon un rapport publié en juillet par la division des droits de l’homme de
l’ONUCI, 1 129 cas de viol avaient été signalés entre 2012 et 2015, avec
1 149 victimes, dont 76 % d’enfants ; les agents publics représentaient 7 % des
auteurs présumés, en particulier des membres des FACI ainsi que des enseignants.
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Selon Amnesty International, des policiers ont violé une étudiante et fait subir des
violences sexuelles à une autre au cours de protestations universitaires en avril. Le
gouvernement a nié les accusations et n’a pas pris de mesures à l’encontre des
accusés.
Les Nations Unies ont signalé qu’entre le 1er janvier et le 20 décembre, elles
avaient reçu quatre allégations d’exploitation et de sévices sexuels commis par des
casques bleus de l’ONU déployés par l’ONUCI, dont deux incidents présumés au
cours de l’année, l’un en 2012 et l’autre à une date inconnue. Ces accusations
impliquaient des soldats de la paix sénégalais, nigériens et pakistanais et deux
d’entre elles concernaient des mineurs. Les deux accusations contre des soldats de
la paix sénégalais, dont une concernant une victime mineure, et celle contre un
observateur militaire nigérien faisaient l’objet d’enquêtes par les Nations Unies,
dont les résultats n’avait pas été rendus publics à la fin de l’année. L’accusation
contre le soldat de la paix pakistanais, concernant également une victime mineure,
faisait quant à elle l’objet d’une enquête menée par le gouvernement pakistanais, et
l’on n’en connaissait pas non plus l’issue en fin d’année.
Conditions dans les prisons et les centres de détention
Les conditions dans les prisons étaient dures et parfois délétères, du fait du manque
de nourriture, de la surpopulation extrême, de conditions sanitaires inadéquates et
de l’insuffisance des soins médicaux.
Conditions matérielles : De nombreuses prisons ont continué à être en situation de
surpopulation. Fin novembre, il y avait 11 192 prisonniers, dont environ
193 mineurs et 237 femmes. Au 21 septembre, la prison centrale d’Abidjan,
conçue pour accueillir environ 1 500 prisonniers, en comptait 3 845. D’autres
prisons signalaient également que le nombre de prisonniers dépassait la capacité
disponible.
Les grandes prisons disposaient en général de médecins, les petites, d’infirmiers.
Les prisonniers avec des problèmes de santé étaient censés être envoyés dans des
dispensaires qui disposaient de médecins, mais des soins de santé critiques pour les
prisonniers n’étaient pas toujours disponibles dans les établissements hospitaliers
locaux. Des œuvres caritatives ou des organisations religieuses finançaient parfois
les soins médicaux des prisonniers.
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Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) fournissait des suppléments
nutritionnels aux prisonniers vulnérables, tels que les femmes enceintes et les
personnes âgées. La mauvaise ventilation et les températures élevées, exacerbées
par la surpopulation carcérale, constituaient des problèmes dans certaines prisons.
Selon les chiffres des pouvoirs publics, 55 prisonniers étaient décédés au
26 septembre. En février, des affrontements armés entre les forces de sécurité et les
détenus de la prison centrale d’Abidjan ont fait des victimes, dont un gardien de
prison et dix détenus, notamment Yacouba Coulibaly, surnommé « Yacou le
Chinois », qui aurait pris le contrôle de certaines parties de la prison avec ses
hommes. Deux procès en relation avec les affrontements étaient toujours en cours à
la fin de l’année.
Les autorités ne détenaient pas toujours les hommes et les femmes dans des parties
distinctes de la prison. Dans certaines prisons, elles détenaient des mineurs avec
des adultes dans les mêmes cellules. Les personnes en détention provisoire et les
condamnés étaient détenus dans les mêmes locaux. Les enfants des détenues
restaient souvent en prison avec leur mère, bien que les prisons déclinent toute
responsabilité pour les soins ou l’alimentation des nourrissons. Les mères détenues
recevaient de l’aide d’organisations non gouvernementales (ONG) locales et
internationales.
Les prisonniers fortunés auraient pu acheter des cellules plus grandes, de la
nourriture et d’autres conforts, et engager du personnel pour laver et repasser leurs
vêtements. La ration alimentaire journalière allouée par l’État à chaque prisonnier
était de 500 francs CFA (0,85 dollar É.-U.), ce qui était insuffisant. La famille des
détenus suppléait souvent à leurs rations journalières si elle vivait à proximité de la
prison ou du centre de détention.
Aucune information n’était disponible sur les conditions dans les centres de
détention informels ou non officiels opérés par les FACI ou la Direction de la
sécurité du territoire (DST) car les pouvoirs publics ne permettaient pas aux ONG
locales ou internationales d’y pénétrer.
Administration pénitentiaire : Les dossiers pénitentiaires ont été détruits pendant la
crise postélectorale de 2010-2011 et le gouvernement n’a pas pris de mesures
significatives pour les récréer. La tenue des dossiers qui a repris à l’issue de la
crise n’était pas toujours appropriée. La loi prévoit des programmes de remise en
liberté pour travail et des peines de substitution à l’incarcération pour les jeunes.
Ainsi, en mai, 63 jeunes délinquants arrêtés en 2014 ont achevé un programme de
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réintégration de 18 mois à Bonoua, où ils ont appris la menuiserie et la couture.
Les juges qui prononçaient les peines étaient responsables des peines de
substitution et de la remise en liberté conditionnelle des prisonniers, mais il en
existait moins d’une vingtaine pour tous les tribunaux confondus et ils ne
fonctionnaient pas de manière efficace. Il n’existait pas de médiateur rattaché aux
prisons, mais les prisonniers pouvaient déposer leurs plaintes devant les autorités
judiciaires. Les autorités carcérales disposaient d’incitations ou de capacités
limitées pour enquêter sur les allégations de conditions de détention médiocres et
proposer des réparations le cas échéant. Les administrateurs de prison ont continué
à détenir ou libérer des prisonniers sans se conformer aux procédures judiciaires
normales. Il a été signalé que des personnes en détention provisoire avaient été
jugées par contumace en raison du manque de transports pour se rendre d’une
prison au tribunal.
En règle générale, les visiteurs étaient autorisés dans les prisons officielles. L’accès
des prisonniers à leurs avocats et à leurs familles aurait été irrégulier sinon nul
dans les centres de détention informels des FACI et de la DST.
Surveillance indépendante : En règle générale, le gouvernement a donné aux
Nations Unies et aux ONG internationales un accès approprié aux prisons
officielles. En revanche, il ne leur a pas permis d’accéder aux centres de détention
informels opérés par les FACI et la DST. Les groupes locaux de défense des droits
de l’homme ont indiqué avoir eu un accès sporadique aux prisons.
Améliorations : Contrairement à l’année précédente, de l’eau potable était
disponible dans toutes les prisons et centres de détention officiels, pour répondre
aux besoins tant en eau de consommation qu’en eau de lavage.
d. Arrestations ou détentions arbitraires
La Constitution et la loi interdisent les arrestations et les détentions arbitraires ;
cependant, elles ont eu lieu. Les FACI (qui sont dénuées de pouvoir d’arrestation),
la DST et d’autres autorités ont arrêté et détenu arbitrairement des personnes,
souvent sans les inculper. Elles ont détenu brièvement un grand nombre d’entre
elles avant de les relâcher ou de les transférer dans des prisons et centres de
détention officiels, mais elles en ont également détenu d’autres pendant des
longues périodes. Les Nations Unies ont également signalé plusieurs incidents de
détention dans des établissements non autorisés et tenus secrets.
Rôle de la police et de l’appareil de sécurité
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La police, qui relève du ministère de l’Intérieur et de la Sécurité, et la gendarmerie,
qui relève du ministère de la Défense, sont responsables de l’application de la loi.
Le Centre de coordination des décisions opérationnelles (CCDO), unité conjointe
de membres du personnel de la police, de la gendarmerie et des FACI, a aidé la
police à assurer la sécurité dans certaines grandes villes. Les FACI, qui relèvent du
ministère de la Défense, sont responsables de la défense nationale. La DST, qui
relève du ministère de l’Intérieur et de la Sécurité, a la responsabilité de répondre
aux menaces extérieures. Les FACI, mieux formées et équipées que la police et la
gendarmerie, ont continué d’exercer des fonctions normalement placées sous la
responsabilité de ces entités. La gendarmerie nationale a assuré le contrôle pour le
compte des FACI de toutes les fonctions de sécurité sur le réseau routier, en
opérant par exemple les points de contrôle autorisés. Les FACI ont néanmoins
continué d’opérer des points de contrôle de sécurité non autorisés, surtout près des
frontières, où elles se rendaient coupables de mesures d’extorsion.
Les FACI étaient certes mieux formées et équipées que la police et la gendarmerie,
mais pas au niveau adéquat, et elles n’avaient pas de structure de commandement
et de contrôle adaptée. La corruption et l’impunité étaient endémiques dans les
FACI et les autres forces de sécurité, notamment la police, la gendarmerie, le
CCDO et la DST.
Dans nombre de communautés, des dozos (chasseurs traditionnels) remplissaient
un rôle de sécurité informel bien qu’ils n’aient pas l’autorité juridique nécessaire
pour procéder à des arrestations ou des détentions. Le gouvernement a dissuadé les
dozos, craints par la plupart de la population, de remplir ces rôles de sécurité.
En cas d’allégations de violations internes par les services de sécurité, la police et
le tribunal militaires sont responsables des enquêtes et des poursuites, mais ces
dernières se sont rarement produites.
Les forces de sécurité n’ont parfois pas empêché certaines violences sociétales ou
réagi lorsqu’elles se produisaient, surtout en cas d’affrontements
intercommunautaires dus à des problèmes fonciers. Dans certains cas, la
gendarmerie ou les FACI ont rétabli l’ordre quand la police n’intervenait pas.
Le 2 mars, le gouvernement, en collaboration avec la Communauté économique
des États d’Afrique de l’Ouest, a adopté un décret de création d’un centre national
de coordination des réactions urgentes aux crises. Bien qu’il ne fût pas
opérationnel en fin d’année, il avait notamment un rôle de prévention des conflits,
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de lutte contre le terrorisme et de réduction des temps de réaction en cas d’alerte de
crise.
En juin, la Cellule de coordination, suivi et réinsertion (CCSR), créée en juillet
2015 pour poursuivre le processus de réinsertion des ex-combattants à la suite de
l’expiration du mandat de l’Autorité de démobilisation, de désarmement et de
réinsertion (ADDR), a achevé ses travaux. Selon le gouvernement, ce sont plus de
69 000 ex-combattants qui ont été réinsérés à l’issue des processus mis en place
par l’ADDR et la CCSR.
Procédures d’arrestation et traitement des personnes en détention
La loi prévoit que les juges d’instruction ou le procureur de la République peut
ordonner la détention d’un suspect durant 48 heures sans chef d’accusation.
Toutefois, dans de nombreux cas, la police a arrêté et détenu des personnes sans
chef d’accusation au-delà du délai légal. Dans des cas particuliers, tels que les
atteintes présumées à la sûreté de l’État, le procureur de la République peut
autoriser une période de garde à vue de 48 heures supplémentaires. Un juge
d’instruction peut demander une détention provisoire pour une période pouvant
aller jusqu’à quatre mois à la fois sur présentation d’une justification écrite au
procureur de la République. Les délinquants primaires accusés de délits mineurs
peuvent être détenus pendant un maximum de cinq jours après leur première
audition par le juge d’instruction. Les récidivistes mineurs et les personnes
accusées de crimes peuvent être détenus pour six et dix-huit mois respectivement.
Alors que la loi prévoit que les détenus doivent être informés rapidement des
accusations portées contre eux, cela n’a pas toujours été le cas, particulièrement
dans les affaires concernant la sûreté de l’État et impliquant les FACI et la DST.
Dans d’autres cas, les magistrats n’ont pas pu vérifier si les détenus qui n’étaient
pas inculpés avaient été libérés. Un système de liberté sous caution existe, mais il
était utilisé à la seule discrétion du juge saisi de l’affaire. En général, les autorités
permettaient aux détenus d’avoir accès à des avocats. Dans les affaires impliquant
des questions de sécurité nationale, elles leur refusaient l’accès à des avocats et à
des membres de leur famille. Pour d’autres délits plus graves, l’État a commis
d’office un avocat à ceux qui ne pouvaient pas se permettre ses services, mais les
auteurs présumés d’infractions moins graves n’en avaient souvent pas. Des
observateurs des droits de l’homme ont signalé de nombreux cas de transfert des
détenus dans des établissements de détention en dehors de la juridiction du juge qui
préside l’affaire, ce qui est contraire à la loi.
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Arrestations arbitraires : Le 10 août, des agents de la DST ont interpelé sans
mandat d’arrêt Antoinette Meho, responsable de la section des femmes du Front
Populaire Ivoirien (FPI), parti de l’opposition. Elle a été détenue sans avoir accès à
sa famille ou à ses avocats pendant plusieurs jours avant d’être transférée à la
prison centrale d’Abidjan. Selon le ministre de la Justice, elle a été inculpée
d’atteinte à la sûreté de l’État et en fin d’année, elle était toujours en détention dans
l’attente de son procès.
Détention provisoire : Les cas de détention provisoire prolongée ont constitué un
problème. Selon les chiffres publiés par les pouvoirs publics, au 21 septembre,
environ 44 % de l’ensemble des détenus et 57 % de ceux dans la prison centrale
d’Abidjan étaient en détention provisoire, certains d’entre eux mineurs. Dans de
nombreux cas, la durée de la détention provisoire égalait ou dépassait la peine
prévue pour le crime présumé. L’insuffisance de personnel au ministère de la
Justice, l’inefficacité du judiciaire et le manque de formation ont contribué aux
détentions provisoires prolongées.
Possibilité pour un détenu de contester la légalité de sa détention devant un
tribunal : Bien que les détenus aient le droit de contester au tribunal la légalité de
leur détention et d’obtenir leur remise en liberté en cas de détention illégale, cela
s’est rarement produit, la plupart des détenus ignorant ce droit et ayant un accès
limité à des défenseurs publics.
e. Déni de procès public et équitable
La Constitution et la loi prévoient un pouvoir judiciaire indépendant et celui-ci a
dans l’ensemble été indépendant dans les affaires pénales ordinaires. Le pouvoir
judiciaire était insuffisamment financé et inefficace. L’absence continue de mises
en accusation civiles contre les éléments ouattaristes pour les crimes commis au
cours de la crise postélectorale de 2010-2011 indiquait que le judiciaire faisait
l’objet d’une influence politique et de la part de l’exécutif. De nombreux rapports
faisaient également état de corruption judiciaire, et de pots-de-vin qui ont souvent
influencé les décisions de justice. Au cours des deux dernières années, l’Inspection
générale des services judiciaires et pénitentiaires a ouvert des enquêtes
disciplinaires sur la base d’évaluations sur le terrain des 36 tribunaux que compte
le pays ; cependant, en fin d’année, aucun magistrat ou greffier n’avait fait l’objet
d’un renvoi ou de mesures disciplinaires.
Procédures applicables au déroulement des procès
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La Constitution et la loi prévoient le droit à un procès public équitable, mais le
pouvoir judiciaire ne l’a pas fait appliquer. Bien que la loi garantisse la
présomption d’innocence et le droit du prévenu d’être informé promptement et en
détail des accusations retenues contre lui, avec service d’interprétation gratuit si
nécessaire à partir de la mise en accusation jusqu’à la fin du dernier appel, l’État ne
respectait pas toujours cela dans la pratique. Par le passé, les cours d’assises, cours
spéciales convoquées selon les besoins pour juger des affaires pénales impliquant
des crimes majeurs, étaient rarement convoquées. Cependant, à partir de 2015,
elles ont été convoquées pour une session annuelle dans plusieurs villes de manière
à examiner des dossiers en attente. Les prévenus accusés de crimes ont droit à un
avocat à leurs frais. Les autres prévenus peuvent aussi chercher à obtenir les
conseils d’un avocat. Le système judiciaire prévoit des avocats commis d’office,
mais seule une assistance juridique gratuite limitée était disponible ; le
gouvernement disposait d’un petit fonds de défense pour rémunérer les avocats qui
acceptaient de représenter les indigents. Les prévenus ont le droit de bénéficier
d’un délai suffisant et de locaux adéquats pour préparer leur défense. Ils ne
peuvent pas consulter les preuves détenues par le Parquet, contrairement à leurs
avocats, qui ont légalement le droit de le faire. Les prévenus ont le droit de
présenter des témoins ou des éléments de preuve à leur décharge et de confronter
les témoins du procureur et des plaignants. L’absence d’un mécanisme de
protection des témoins était problématique. Les prévenus ne peuvent pas être
légalement tenus de témoigner ou de s’avouer coupables, bien qu’il ait été signalé
qu’une telle violation se soit parfois produite. Ils ont le droit d’être présents à leurs
procès, mais les tribunaux peuvent juger des prévenus par contumace. Les
personnes jugées coupables ont le droit d’interjeter appel à Abidjan, Bouaké et
Daloa, mais les tribunaux de plus haute instance ont rarement infirmé les verdicts.
Les tribunaux militaires n’ont pas jugé de civils ou fourni les mêmes droits que
dans les tribunaux pénaux civils. Même si le système de justice militaire n’était pas
doté de cours d’appel, les personnes jugées coupables par un tribunal militaire
pouvaient déposer une requête auprès de la Cour suprême pour que celle-ci
ordonne un second procès.
L’insuffisance relative d’avocats et de magistrats formés a entraîné un accès limité
à des procédures efficaces, surtout en dehors des grandes villes. En milieu rural,
des institutions traditionnelles administraient souvent la justice au niveau des
villages en traitant les dossiers portant sur des conflits familiaux et les questions
foncières simples conformément au droit coutumier. Les différends se réglaient à
la suite de longs débats. Il n’a pas été fait état de recours aux châtiments corporels.
La loi prévoit explicitement la fonction de « grand médiateur », nommé par le
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président, et dont la mission consiste à rapprocher les méthodes traditionnelles et
modernes de règlement de différends.
Prisonniers et détenus politiques
Amnesty International a répertorié 226 prisonniers politiques arrêtés entre le début
de 2011 et le mois de septembre. En fin d’année, tous étaient encore en prison,
vingt d’entre eux souffraient de divers troubles et plus de la moitié étaient sous-
alimentés.
Certains partis politiques et groupes locaux de défense des droits de l’homme ont
affirmé que des membres du FPI, parti de l’ex-président Gbagbo, détenus sous des
chefs d’accusations tels que crimes économiques, vols à main armée, pillages et
détournements de fonds, étaient des prisonniers politiques, surtout quand ils étaient
accusés d’actes commis durant la crise postélectorale de 2010-2011.
Des représentants du gouvernement et de l’opposition ont donné diverses
appréciations du nombre de détenus politiques toujours en détention provisoire.
Une plateforme de dialogue avec l’opposition créée par le gouvernement s’est
réunie plusieurs fois au cours de l’année pour discuter de ces détenus et d’autres
questions concernant l’opposition. Les autorités ont relâché les 90 personnes
arrêtées en relation avec l’élection présidentielle de 2015, sauf trois. En septembre,
elles ont également relâché dix personnes associées au FPI, et en mars, 70 des
300 individus dont le FPI réclamait la remise en liberté.
Les prisonniers politiques recevaient les mêmes protections que les autres
prisonniers, y compris l’accès au CICR.
Procédures et recours judiciaires au civil
La Constitution et la loi prévoient un pouvoir judiciaire indépendant en matière
civile, mais le judiciaire était susceptible de corruption, d’influence extérieure et de
favoritisme fondé sur les relations familiales ou ethniques. Les citoyens ont le droit
d’intenter des procès pour demander des dommages-intérêts en cas de violation des
droits de l’homme ou pour tenter d’y mettre un terme, mais cela se produisait
rarement. Les particuliers comme les organisations ont le droit de faire appel d’une
décision négative d’un tribunal ivoirien auprès d’organismes régionaux de défense
des droits de l’homme. La justice a été lente et inefficace et il y a eu des problèmes
pour faire exécuter les ordonnances des tribunaux des affaires familiales.
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f. Ingérence arbitraire ou illégale dans la vie privée, la famille, le domicile ou
la correspondance
De tels actes sont interdits par la Constitution et par la loi ; cependant, l’État n’a
pas toujours respecté ces interdictions. La loi exige l’obtention d’un mandat par le
personnel de sécurité pour conduire une perquisition, qui peut être effectuée à tout
moment, l’accord du procureur pour garder toute preuve saisie au cours d’une telle
manœuvre et la présence de témoins pour y procéder. Cependant, des policiers se
sont parfois servis de mandats de perquisition générale sans nom ni adresse. Par
ailleurs, les FACI et la DST ont procédé à des arrestations sans mandats d’arrêt.
Dans certaines régions, des unités des FACI ont poursuivi leur occupation illégale
de maisons et d’entreprises malgré les efforts du gouvernement pour y mettre fin.
Certains dirigeants des partis de l’opposition ont signalé que les autorités avaient
gelé leur compte bancaire alors qu’ils ne figuraient sur aucune liste de sanctions à
l’échelle internationale et n’avaient été accusés d’aucun délit.
Une plateforme de dialogue entre le gouvernement et l’opposition a discuté des
problèmes d’occupation et de gels de comptes bancaires, et des représentants des
deux camps ont reconnus que certains progrès avaient été atteints. En mars, après
avoir réactivé quatre comptes bancaires appartenant à des associés de l’ex-
président Gbagbo, les autorités ont annoncé le maintien du gel de 43 autres
comptes. En août, elles ont réactivé douze autres comptes appartenant à des
responsables du FPI.
Section 2. Respect des libertés civiles, notamment :
a. Liberté d’expression et liberté de la presse
La liberté d’expression et la liberté de la presse sont garanties par la Constitution et
la loi, mais l’État les a restreintes toutes les deux. Le Conseil national de la presse
(CNP), organe public de réglementation de la presse écrite, a brièvement suspendu
ou réprimandé des journaux et des journalistes pour des affirmations qu’il
prétendait être fausses, diffamatoires, ou perçues comme des incitations à la
xénophobie ou à la haine.
Liberté de parole et d’expression : La loi interdit l’incitation à la violence, la haine
ethnique, la rébellion et l’outrage au chef de l’État ou à d’autres membres
importants du gouvernement.
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En mai, un journaliste du quotidien gbagbiste LG Infos auteur d’un article sur une
fusillade présumée ayant causé le décès d’un jeune homme franco-libanais devant
le domicile du président a été suspendu pendant un mois par le CNP. Ce dernier a
statué que l’information était fausse et avait entraîné une rhétorique xénophobe et
haineuse.
Liberté de la presse et des médias : Les médias indépendants étaient actifs et
exprimaient une grande variété d’opinions. Les journaux politiquement affiliés
avec l’opposition ont fréquemment publié des éditoriaux incendiaires contre l’État
et fabriqué des histoires de toutes pièces pour diffamer les opposants politiques.
La Haute Autorité de la communication audiovisuelle supervise la réglementation
et le fonctionnement des stations de radio et de télévision. Il existait de nombreuses
stations de radio indépendantes. La loi interdit la diffusion de tout commentaire
politique par les stations de radio privées. Il n’y avait pas de chaînes de télévision
privées.
Dans un effort continu de libéralisation des médias, le 1er mars, la Haute Autorité
de la communication audiovisuelle a annoncé les résultats de l’appel d’offre en
date de 2015 de licences d’exploitation par des fournisseurs privés de télévision
par câble et satellite. Trois multinationales ont reçu des licences et le ministère de
la Communication a déclaré que ces sociétés jouiraient d’une entière liberté
rédactionnelle et disposeraient de l’option de transmettre un contenu produit au
niveau local, tel que les actualités et d’autres programmes d’information. Un autre
appel d’offre pour les fournisseurs locaux a été lancé en mai.
Censure ou restrictions concernant le contenu : L’État a exercé une influence sur la
couverture des actualités et le contenu des programmes des chaînes de télévision et
des stations de radio publiques et privées. En février, la Radiodiffusion télévision
ivoirienne a suspendu la production de programmes de télévision et de radio en
direct par certains groupes religieux, ONG et guérisseurs traditionnels ; la
suspension était toujours en vigueur en fin d’année.
Lois sur la diffamation et la calomnie : La diffamation criminelle est passible d’une
peine d’un à trois ans de prison.
Sûreté nationale : La diffamation jugée comme une menace pour l’intérêt national
est passible d’une peine de six mois à cinq ans de prison.
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Liberté d’accès à internet
Le gouvernement n’a pas limité ou perturbé l’accès à internet ni censuré le contenu
affiché en ligne et aucun rapport crédible n’a fait état de surveillance sans
autorisation juridique appropriée des communications électroniques privées par les
autorités. Les autorités ont permis aux journaux suspendus de publier
intégralement leur contenu en ligne. Un site internet estimait que 22 % de la
population avait un accès à internet à domicile par ordinateur ou sur appareil
portatif. Cependant, le taux de pénétration des téléphones mobiles approchant les
100 %, l’accès à internet sur appareil portatif était certainement beaucoup plus
élevé.
Liberté d’enseignement et manifestations culturelles
Le gouvernement n’a imposé aucune restriction à la liberté de l’enseignement ou
aux manifestations culturelles. Cependant, des affrontements violents en juillet
entre les forces de sécurité et les syndicats étudiants qui protestaient contre le
projet du gouvernement d’héberger les Jeux de la Francophonie dans les logements
étudiants de l’Université Félix-Houphouët-Boigny à Abidjan pendant l’été 2017
ont fait des blessés parmi les étudiants et les membres des forces de sécurité. Une
trentaine d’étudiants ont été arrêtés. Par la suite, le gouvernement a suspendu
toutes les activités syndicales estudiantines sur les campus universitaires et y a
placé des forces de sécurité.
b. Liberté de réunion et d’association pacifiques
Liberté de réunion
La loi garantit la liberté de réunion, mais l’État n’a pas toujours respecté ce droit.
Les groupes qui désirent organiser des manifestations ou des rassemblements dans
des stades ou dans d’autres espaces fermés sont tenus par la loi d’en aviser le
ministère de l’Intérieur par écrit trois jours avant l’activité en question. De
nombreux groupes politiques de l’opposition ont signalé que leurs demandes
d’organiser des meetings politiques avaient été refusées et dénonçaient
l’incohérence des autorisations de réunion publique. Dans certains cas, des
responsables publics ont déclaré n’avoir pas été en mesure d’assurer la sécurité des
groupes d’opposition lors de leurs réunions publiques ou privées.
En juillet, à Yopougon, quartier favorable à Gbagbo dans l’ouest d’Abidjan, la
police a interpelé trois activistes gbagbistes qui organisaient la signature d’une
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pétition pour demander la libération de l’ex-président par la CPI. Ils ont été
relâchés deux semaines plus tard.
La police a employé une force excessive pour disperser des manifestants, faisant
des blessés et au moins un mort. En août, le tribunal militaire a condamné le
sergent-chef Gervais Zoukou à 18 mois de prison pour avoir, au cours des
protestations du mois de juin à l’Université Félix-Houphouët-Boigny, percuté avec
sa voiture un étudiant handicapé, qui est décédé des suites de ses blessures.
Liberté d’association
La loi prévoit la liberté d’association et, dans l’ensemble, les autorités ont respecté
ce droit. Si la loi interdit la création de partis politiques sur la base de critères
ethniques ou religieux, l’ethnicité constituait souvent un facteur majeur dans leur
composition.
c. Liberté de religion
Veuillez consulter le Rapport sur la liberté religieuse dans le monde du
département d’État à l’adresse suivante : www.state.gov/religiousfreedomreport/.
d. Liberté de circulation, personnes déplacées à l’intérieur de leur pays,
protection des réfugiés et personnes apatrides
La Constitution et la loi ne prévoient pas expressément la liberté de circulation, de
voyage à l’étranger, d’émigration et de rapatriement, mais en règle générale, l’État
a néanmoins respecté ces droits. Il a coopéré avec le Bureau du Haut-Commissariat
des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et d’autres organisations humanitaires
pour fournir protection et assistance aux personnes déplacées à l’intérieur du pays,
aux réfugiés, aux réfugiés de retour au pays, aux demandeurs d’asile, aux apatrides
et aux autres personnes en situation préoccupante.
Déplacements à l’intérieur du pays : Il y a eu des obstacles aux déplacements
internes. Les forces de sécurité et d’autres groupes non identifiés ont érigé et opéré
des barrages routiers, principalement le long des axes routiers secondaires de la
banlieue d’Abidjan. Bien que certains barrages routiers aient servi de manière
légitime à des fins de sécurité, le racket et l’extorsion étaient monnaie courante.
Ainsi, les FACI ont participé à des activités de racket à de postes de contrôle
illégaux avec la participation des gendarmes et de la police. Fin septembre, un
groupe de travail de la police sur la lutte contre le racket, en collaboration avec la
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Haute autorité pour la bonne gouvernance (HABG), a identifié 59 affaires devant
faire l’objet de poursuites judiciaires. En fin d’année, deux des accusés avaient été
jugés coupables de racket.
Exil : Plusieurs loyalistes à l’ex-président Gbagbo, dont certains sous le coup
d’accusations criminelles, sont restés en exil volontaire.
Émigration et rapatriement : Sur les plus de 39 000 réfugiés ivoiriens qui sont
restés en dehors du pays, plus de 19 000 se trouvaient au Liberia. En raison de
préoccupations sur la propagation éventuelle du virus Ebola, les frontières avec le
Liberia et la Guinée sont restées officiellement fermées jusqu’au mois de
septembre. Cependant, en décembre 2015, les couloirs humanitaires permettant de
reprendre le rapatriement volontaire des réfugiés du Liberia ont été ouverts, malgré
la fermeture de la frontière pour tous les autres voyageurs. De janvier à septembre,
le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a aidé
au retour de plus de 18 000 réfugiés, essentiellement en provenance du Liberia.
Avec l’ouverture de la frontière avec la Guinée au mois de septembre, le HCR a
facilité le rapatriement de 128 réfugiés supplémentaires de Guinée.
Personnes déplacées à l’intérieur du pays
Si la plupart des PDIP se trouvaient dans l’ouest et le nord-est du pays, à Abidjan
et dans sa banlieue, aucune estimation du nombre total de PDIP n’était disponible.
La plupart des PDIP ont été déplacées en raison de la crise postélectorale de 2010-
2011 et des expulsions dues à l’occupation illégale des forêts protégées. Par
exemple, les Nations Unies estimaient que plus de 51 000 personnes ont été
expulsées au cours de l’été du parc national du Mont Péko, où elles vivaient et
effectuaient des activités agricoles de manière illégale. Contrairement à l’année
précédente, il n’a pas été signalé que le gouvernement a expulsé des résidents
abidjanais de zones inondables ou détruit des bâtiments construits sur des terres
occupées de manière illégale.
En 2014, le gouvernement a adopté la Convention de l’Union africaine sur la
protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de
Kampala), qui engage le gouvernement vis-à-vis des droits et du bien-être des
personnes déplacées par les conflits, la violence, les catastrophes naturelles ou les
droits de l’homme, et fournit un cadre de solutions durables pour les PDIP. Le
gouvernement a respecté le principe de rapatriement volontaire, mais il a fourni
une assistance limitée aux PDIP, et les Nations Unies et les ONG nationales et
internationales ont œuvré à combler les lacunes. Bien qu’un grand nombre de ces
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personnes déplacées soient retournées dans leur région d’origine, les conditions
difficiles, notamment le manque d’accès aux terres et au logement, et les
problèmes de sécurité ont empêché le rapatriement des autres. Les communautés
d’accueil avaient peu de moyens pour recevoir et aider les PDIP, et dans de
nombreuses situations, celles-ci ont recouru à des campements de fortune en zone
urbaine.
Protection des réfugiés
Droit d’asile : La Constitution et la loi prévoient l’octroi du droit d’asile ou du
statut de réfugié et les pouvoirs publics ont mis en place un régime de protection
des réfugiés. Selon le HCR, le pays hébergeait moins de 1 400 réfugiés, la plupart
des Libériens ayant choisi l’insertion en Côte d’Ivoire après l’invocation de la
clause de cessation en 2012 qui a mis fin au statut de réfugié pour les ressortissants
libériens. L’ensemble des 103 réfugiés libériens ayant fait une demande
d’établissement formel en Côte d’Ivoire ont vu celle-ci approuvée et sont restés
dans le pays.
Solutions durables : L’État a facilité l’insertion locale de réfugiés dans les
situations les plus extrêmes en délivrant des permis de résidence à tous les réfugiés
de plus de 14 ans afin de leur permettre de se déplacer librement dans le pays. Les
réfugiés avaient également la possibilité de se faire naturaliser, bien que le HCR ait
indiqué que la procédure prenait plus de cinq ans pour un grand nombre d’entre
eux.
Protection temporaire : L’État a également assuré une protection temporaire aux
personnes ne pouvant plus être qualifiées de réfugiés au titre des conventions
pertinentes des Nations Unies. Les personnes en attente de détermination de leur
statut ont reçu une lettre, valable trois mois, qui indiquait qu’ils étaient en attente
d’une décision relative à leur statut. Cette lettre permettait un séjour temporaire et
la liberté de circulation uniquement. Les porteurs de cette lettre n’étaient pas
éligibles à l’aide aux réfugiés, comme l’accès à l’éducation ou la santé.
Personnes apatrides
Il a subsisté de nombreux cas d’apatridie dans le pays. La nationalité s’acquiert par
les parents et non par la naissance sur le territoire national, et l’inscription des
naissances à l’état civil n’était pas généralisée. Le pays avait des résidents de
longue date qui étaient, légalement ou de fait, apatrides. Le HCR estimait toujours
le nombre d’apatrides à 700 000.
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Le programme de déclaration spéciale, basé sur une loi de 2013 qui permet aux
individus nés à l’étranger et vivant dans le pays avant l’indépendance en 1960
d’obtenir la nationalité par déclaration et qui donne aux ressortissants étrangers nés
dans le pays entre 1961 et 1973 l’option de devenir citoyens, a pris fin le
24 janvier. L’examen des dossiers s’est poursuivi pour les 123 810 demandes
déposées et environ 12 000 demandeurs ont reçu des certificats administratifs de
nationalité. Il incombait au demandeur d’effectuer la dernière étape, à savoir
convertir ce certificat en preuve ultime de la nationalité : un certificat judiciaire de
nationalité.
Le Plan national d’action pour l’éradication de l’apatridie dans le pays a été
finalisé à Grand-Bassam au cours d’un atelier organisé par le ministère de la
Justice les 8 et 9 septembre. Ce plan définit les étapes requises pour respecter les
obligations de l’État en vertu des conventions sur l’apatridie, notamment la
réforme juridique pour donner accès à la nationalité aux apatrides exclus du
programme de déclaration (autres migrants historiques, enfants trouvés, etc.).
Section 3. Liberté de participer au processus politique
La Constitution et la loi donnent aux citoyens la capacité de choisir leur
gouvernement au cours d’élections périodiques libres et justes, à bulletin secret, au
suffrage universel égal.
Élections et participation à la vie politique
Élections récentes : Au cours des élections législatives du 18 décembre, la coalition
gouvernementale en place a remporté 66 % des 255 sièges à l’Assemblée
nationale. Le principal parti d’opposition, qui a boycotté les élections législatives
de 2011, a participé aux élections et remporté des sièges. Les élections ont été
jugées pacifiques, inclusives et transparentes. Le président Alassane Ouattara a été
réélu avec un importante majorité aux élections présidentielles d’octobre 2015,
jugées libres et équitables par des observateurs nationaux et internationaux.
Le 30 octobre, le gouvernement a effectué un référendum sur une nouvelle
constitution visant à remplacer celle de l’après-coup militaire de l’an 2000. La
procédure constituante, et, dans une certaine mesure, le contenu du texte lui-même,
était controversé. Les partis de l’opposition et certaines organisations nationales et
internationales ont argué que le processus n’était ni inclusif, ni transparent, et ont
critiqué le nouveau texte, qui renforçait le rôle de l’exécutif. Malgré le boycott de
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l’opposition, le référendum a été adopté à une immense majorité au cours d’un
processus pacifique, inclusif et globalement transparent.
Partis politiques et participation à la vie politique : Si la loi interdit la création de
partis politiques sur la base de critères ethniques ou religieux, l’ethnicité constitue
souvent un facteur majeur dans leur composition. Des chefs de l’opposition ont
signalé que leurs demandes d’organiser des meetings politiques avaient été
refusées et ont dénoncé l’incohérence des autorisations de réunion publique.
Par exemple, le 3 octobre, le préfet du district d’Abidjan a refusé un permis pour
un sit-in de l’opposition prévu pour le 5 octobre à l’Assemblée nationale, où le
président était censé présenter la nouvelle Constitution aux députés. L’opposition a
reporté sa protestation au samedi suivant, mais le chef de l’opposition, Mamadou
Koulibaly, a été arrêté après avoir défié l’interdiction ; il a été relâché deux heures
plus tard.
Participation des femmes et des minorités : Les femmes et les minorités ont
participé au processus politique, et aucune loi ne restreint leur participation dans ce
domaine, contrairement aux croyances culturelles et traditionnelles, qui limitent le
rôle des femmes. Ainsi, 26 des 253 membres de l’Assemblée nationale, 11 des
197 maires et un des 31 présidents de conseils régionaux étaient des femmes.
Quelques femmes ont également occupé plusieurs postes importants : la première
vice-présidence de l’Assemblée nationale, neuf des 36 ministères du
Gouvernement, et la présidence de plusieurs commissions importantes.
Section 4. Corruption et manque de transparence au sein du gouvernement
La loi prévoit des peines criminelles pour la corruption dans la fonction publique,
mais elle n’est pas appliquée avec rigueur et les fonctionnaires s’y sont livrés
fréquemment en toute impunité. Les médias et les groupes de défense des droits de
l’homme ont fait état d’une corruption à grande échelle de fonctionnaires. Les
données de Transparency International ont indiqué que la corruption était un
problème grave, surtout pour les procédures judiciaires, la reddition de comptes par
les forces de sécurité, l’attribution des contrats et les questions douanières et
fiscales.
Corruption : Le 26 mai, le gouvernement a limogé le directeur et le directeur
adjoint du Conseil du coton et de l’anacarde à la suite d’un audit.
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En mai, la Haute autorité pour la bonne gouvernance (HABG), autorité
administrative indépendante autonome sur les plans juridique et financier, a fait
état de corruption dans 33 % des affaires ayant fait l’objet d’enquêtes, dont 64 %
de soumissions publiques.
L’autorité nationale de Régulation des marchés publics (ANRMP) a la
responsabilité de soutenir, surveiller et appliquer une concurrence loyale pour les
marchés publics. Après la publication en 2014 d’un rapport indiquant que 57 % de
l’ensemble des contrats publics étaient des marchés exclusifs, l’ANRMP a
commencé à les auditer et a découvert qu’entre mars 2015 et le mois de mars de
l’année visée par le présent rapport, 78 % des contrats approuvés avaient bénéficié
d’un appel d’offres.
Divulgation de situation financière : Un décret présidentiel exige du chef d’État,
des ministres, des chefs d’institutions nationales et des directeurs d’administration
d’établir une déclaration de leurs actifs et de leurs revenus. Contrairement au
passé, où le non-respect de cette disposition n’était pas pénalisé, la HABG a
commencé, en mars 2015, à exiger des fonctionnaires qu’ils déposent une
déclaration de patrimoine dans les 30 jours qui suivent le début de leur mandat. La
déclaration était confidentielle, mais la liste des déclarants était accessible au
public et publiée au journal officiel. Les responsables publics qui ne se
conformaient pas à cette exigence ou fournissaient une fausse déclaration
s’exposaient à des amendes équivalant à six mois de salaire. En octobre, environ
50 % des responsables publics avaient fait une déclaration d’actifs et aucun n’avait
reçu d’amende.
Accès public à l’information : La loi donne accès au public aux informations
publiques, sauf celles qui sont essentielles pour garantir la sûreté de l’État. Les
données concernant les activités et le budget des autorités publiques étaient
également disponibles en grande partie, mais variaient d’un ministère à l’autre et
d’importants délais retardaient leur accès. La plupart des données du ministère des
Finances, notamment le budget national, était accessible sur son site internet. En
règle générale, la passation de marchés publics était transparente. L’ANRMP a
fourni des informations essentielles sur la passation de marchés gratuitement et
rapidement, et disposait d’un processus transparent de prise de décisions et d’appel
public. Si les données demandées n’étaient pas disponibles, l’ANRMP transférait
la demande à la Commission d’accès à l’information d’intérêt public et aux
documents publics, instance administrative indépendante disposant du pouvoir de
contraindre et de sanctionner d’autres organes publics qui ne respecteraient pas la
loi.
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Section 5. Attitude du gouvernement face aux enquêtes internationales et non
gouvernementales sur les violations présumées des droits de l’homme
Plusieurs groupes nationaux et internationaux de défense des droits de l’homme
ont généralement fonctionné sans restriction gouvernementale ; ils ont mené leurs
enquêtes et publié leurs conclusions sur des dossiers de droits de l’homme. En
général, les autorités se sont montrées coopératives et réceptives à leurs points de
vue.
Organismes publics de défense des droits de l’homme : Au cours d’un
remaniement gouvernemental au mois de janvier, le président a créé le ministère
des Droits de l’homme et des Libertés publiques, dirigé par Paulette Badjo
Ezouehu, ancienne présidente de la Commission nationale des droits de l’homme
(CNDH). Ce ministère, financé par le gouvernement, est responsable de la mise en
œuvre et du suivi des politiques gouvernementales en matière de droits de
l’homme, fonction confiée auparavant au ministère de la Justice. La CNDH est un
organe consultatif qui relève du ministère des Droits de l’homme et des libertés
publiques, qui procède à des consultations sur les droits de l’homme, les évalue et
émet des propositions visant à les promouvoir, les protéger et les défendre. Le
ministère n’était ni suffisamment financé, ni efficace.
Le remaniement gouvernemental du mois de janvier a donné lieu à la création du
ministère de la Solidarité, de la Cohésion sociale et de l’Indemnisation des
victimes, financé par le gouvernement et dirigé par Mariatou Koné. Auparavant,
les questions de la cohésion sociale et de l’indemnisation des victimes relevaient
de deux organes publics, la Commission nationale pour la réconciliation et
l’indemnisation des victimes des crises survenues en Côte d’Ivoire (CONARIV) et
le Programme national de cohésion sociale. Au cours de l’année, le ministère,
efficace et suffisamment financé, a facilité le rapatriement volontaire des réfugiés,
encourageant la cohésion sociale et indemnisant les victimes des crimes incluses
sur la liste de la CONARIV. Le fait d’élever ces questions au niveau ministériel
reflétait l’un des objectifs déclarés de réconciliation du président pour son second
mandat.
En janvier, l’ONUCI et les FACI ont ajouté la CNDH au Mécanisme conjoint sur
les droits de l’homme pour partager des informations, répondre aux allégations de
violations des droits de l’homme commises par les FACI et coordonner les
activités relatives aux droits de l’homme au sein des FACI. En août, la CNDH a
commencé à ouvrir des bureaux en dehors de la capitale pour assurer certaines des
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activités, notamment de suivi, de la division des droits de l’homme de l’ONUCI,
censée fermer en mars 2017. Bien que sa charte précise qu’elle constitue un
organisme non gouvernemental indépendant, sur le plan financier, la CNDH
dépend totalement de l’approbation du ministère de la Justice, et ses bureaux en
dehors d’Abidjan n’étaient pas complètement pourvus de matériel ou de personnel.
La Cellule spéciale d’enquête, au sein du ministère de la Justice, contrôlée par des
civils, a continué ses enquêtes et ses poursuites à l’encontre d’auteurs présumés de
violations des droits de l’homme commises au cours de la crise postélectorale. Elle
disposait d’un mandat illimité, mais manquait de ressources et de personnel.
En mars 2015, le gouvernement a créé la CONARIV pour fournir et distribuer une
indemnisation financière aux victimes des crises survenues entre 1990 et 2011. Dix
milliards de francs CFA (soit 17 035 000 dollars É.-U.) ont ainsi été alloués à cet
effort. Le 19 avril, la CONARIV a remis son rapport final au président, avec une
liste consolidée de victimes, un projet de plan de réconciliation et une proposition
de politique nationale de réparation. La CONARIV a validé les demandes
d’indemnisation de 316 954 victimes sur les 874 056 reçues. La CONARIV a
officiellement achevé ses activités fin avril, et le ministère de la Solidarité, de la
Cohésion sociale et de l’Indemnisation des victimes était responsable du versement
des réparations. Le rapport final et les recommandations de la CONARIV n’ont pas
été rendu publics.
Section 6. Discrimination, abus sociétaux et traite des personnes
Condition féminine
Viol et violences conjugales/familiales : La loi interdit le viol et prévoit des peines
d’emprisonnement de cinq à vingt ans pour toute personne reconnue coupable de
viol. La loi ne pénalise pas de façon explicite le viol conjugal. La réclusion
criminelle à perpétuité peut s’appliquer aux cas de viols en bande si les violeurs
ont des liens de parenté avec la victime ou exercent une certaine autorité sur elle ou
si la victime a moins de quinze ans. La plupart des affaires de viol ont été jugées
sur la base du chef d’accusation moins grave d’« attentat à la pudeur », passible de
six mois à cinq ans de prison. Sur les vingt affaires de viol jugées entre
octobre 2015 et le mois de juin sur quatre sessions de la Cour d’assises, 14 ont
abouti à des condamnations avec des peines allant de trois à dix ans de prison.
Le gouvernement a fait des efforts pour faire appliquer la loi, mais les groupes
nationaux et internationaux de défense des droits de l’homme indiquaient que le
CÔTE D’IVOIRE 23
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viol restait monnaie courante. Fin septembre, l’ONUCI avait fait état de dizaines
de cas de viol, notamment plusieurs viols en bande et viols commis par des
membres des FACI (voir section 1.c.). Les responsables civils de telles infractions
étaient condamnés pour des délits moins graves ou restaient en détention
provisoire. Les auteurs de viol reconnus coupables recevaient des peines allant
d’un mois à dix ans de prison.
Les femmes victimes de tels actes subissaient souvent des pressions de la part de
parents, de policiers ou de chefs traditionnels pour tenter de chercher un accord à
l’amiable avec le violeur plutôt que de le poursuivre en justice. En juillet, le
ministère de la Justice a publié une circulaire indiquant que juger une affaire de
viol sur la base d’un chef d’inculpation moins grave constituait une violation de la
loi et que tenter de chercher un accord à l’amiable avec le violeur ne devait en
aucun cas mettre fin à l’enquête ou au processus judiciaire.
Dans certaines régions, des services psychosociaux étaient disponibles pour les
victimes de viol, avec l’aide d’ONG. Les victimes de viol n’avaient plus besoin
d’obtenir un certificat médical, dont le prix pouvait atteindre 50 000 francs CFA
(soit 85 dollars É.-U.), pour faire avancer une plainte en justice. Néanmoins, dans
les faits, les affaires n’avançaient que rarement sans, dans la mesure où il servait
souvent de preuve principale. Dans une circulaire interministérielle publiée au
mois d’août, le gouvernement a annoncé que les gendarmes et les policiers ne
pouvaient plus demander aux victimes de fournir un certificat médical, et qu’une
plainte, écrite ou orale, de la victime suffisait pour lancer une enquête. Cependant,
la police manquait de matériel et de formation pour enquêter sur les affaires de
viol, et les certificats médicaux constituaient souvent la seule preuve disponible.
La loi n’interdit pas spécifiquement la violence au foyer, qui est demeurée un
problème grave et courant. Selon le ministère de la Promotion de la femme, de la
Famille et de la Protection de l’enfant, plus de 36 % des femmes indiquaient avoir
été à un moment ou un autre victimes de violences physiques ou psychologiques.
Les victimes ont rarement fait état d’actes de violence au foyer en raison de
barrières culturelles et du fait que la police ignorait souvent les femmes qui
signalaient des cas de viol ou de violence au foyer. De nombreuses familles de
victimes auraient exhortées ces dernières à retirer leurs plaintes et à rester avec un
partenaire violent par crainte de la stigmatisation sociale.
En juillet, le ministère de la Promotion de la femme, de la Famille et de la
Protection de l’enfant a approuvé la création d’un programme national contre les
violences sexistes en coordination avec la Campagne des Nations Unies contre la
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violence sexuelle en temps de conflit. Les objectifs principaux comprenaient la
prévention des violences sexistes, la coordination d’une réponse multisectorielle et
l’élimination de l’impunité.
Le ministère de la Promotion de la femme, de la Famille et de la Protection de
l’enfant a apporté de l’aide aux victimes de violences au foyer et de viol,
notamment sous la forme d’accompagnement psychologique dans des centres
publics. Le Comité national de lutte contre les violences faites aux femmes et aux
enfants a également surveillé les cas de maltraitance et fait des annonces radio
hebdomadaires pour indiquer des numéros d’appel d’urgence pour les victimes.
En juin, le gouvernement a créé le Comité national de lutte contre les violences
sexuelles liés aux conflits, placé sous l’autorité du président, qui s’est réuni en
novembre à Grand-Bassam. Le chef d’État-Major des forces armées, le ministre de
la Défense et plusieurs responsables de ministères sectoriels avaient pour mission
de travailler en collaboration avec le comité.
Mutilations génitales féminines/excision (MGF/E) : Les MGF/E constituaient un
problème grave. La forme la plus courante de MGF/E relevait du type II, soit
l’excision totale du clitoris et des lèvres mineures, mais l’infibulation était
également pratiquée. La loi interdit explicitement les MGF/E et prévoit, à l’endroit
des personnes se livrant à cette pratique, des peines de prison qui peuvent aller
jusqu’à cinq ans et des amendes de 360 000 à deux millions de francs CFA (soit
610 à 3 400 dollars É.-U.). Ces sanctions sont doublées quand il s’agit de praticiens
médicaux. Les MGF/E étaient pratiquées le plus fréquemment parmi les
populations rurales du nord, où environ 70 % des femmes et des filles ont été
soumises à cette pratique, suivies de la partie centre-nord du pays (50 %) et de la
région d’Abidjan (36 %). La procédure s’effectuait généralement avant le
cinquième anniversaire de la fillette. Des ONG locales ont continué de mener des
programmes de sensibilisation du public et œuvré pour persuader les praticiens de
mettre fin à cette pratique. Au cours de l’année, l’État a engagé des poursuites dans
certains cas de MGF/E.
En février, au cours d’une manifestation marquant la Journée internationale de
tolérance zéro à l’égard des mutilations génitales féminines, Euphrasie Kouassi
Yao, ministre de la Promotion de la femme, de la Famille et de la Protection de
l’enfant, a déclaré que le gouvernement commençait à poursuivre en justice les
personnes qui ordonnaient les MGF/E et prêtaient assistance pendant les
procédures en insistant sur l’application de la loi en vigueur. Il n’a cependant pas
été fourni de plus amples détails.
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Autres pratiques traditionnelles néfastes : Les cas de violence sociétale à l’encontre
des femmes comprennent des pratiques traditionnelles telles que les décès pour
cause de dot (c’est-à-dire le fait de tuer la future mariée en raison de différends
concernant la dot), le lévirat (le fait de contraindre une veuve à épouser le frère de
son mari décédé) et le sororat (le fait de contraindre une femme à épouser le mari
de sa sœur décédée).
Harcèlement sexuel : La loi interdit le harcèlement sexuel et prévoit des peines
allant d’un à trois ans de prison et des amendes comprises entre 360 000 et un
million de francs CFA (610 et 1 700 dollars É.-U.). L’État l’a cependant rarement
appliquée, de sorte qu’il était répandu et généralement toléré. En 2015, Anne-
Désirée Ouloto, ministre de la Promotion de la femme, de la Famille et de la
Protection de l’enfant de l’époque, a déclaré que 38 % des élèves avaient subi le
harcèlement sexuel à l’école, et que les enseignants s’en rendaient coupables sur
14 % des élèves.
Droits génésiques : Les couples et les personnes ont le droit de décider du nombre
de leurs enfants, ainsi que de l’espacement et du moment de leur naissance, de
gérer leur santé génésique et de disposer des informations et des moyens de le faire
sans discrimination, coercition ou violence. La politique gouvernementale exige la
disponibilité et la gratuité des services de soins de santé d’urgence pour tous, mais
ces soins n’étaient pas disponibles dans toutes les régions, surtout dans les zones
rurales, et coûtaient souvent cher. Les indicateurs relatifs à la planification
familiale sont restés bas, et la capacité des pouvoirs publics à proposer des services
de santé génésique et maternels d’excellente qualité était très limitée.
Seulement 14 % des filles et des femmes âgées de 15 à 49 ans utilisaient une
méthode moderne de contraception. Le besoin non satisfait de services de
planification familiale atteignait 27 % au niveau national et plus de 30 % pour les
femmes et les filles les plus démunies. Chez les adolescentes sondées, 30 % étaient
ou avaient été enceintes, et ce chiffre atteignait 46 % dans les zones rurales. Des
menaces de violence, réelles ou perçues, de la part de maris ou de membres de leur
famille ont empêché certaines femmes de chercher à obtenir des services de
planification familiale ou de santé. Les femmes des zones urbaines pouvant se le
permettre avaient accès à la contraception et à un suivi qualifié pendant
l’accouchement. Selon l’Enquête démographique de santé de 2011-2012, environ
57,4 % des femmes enceintes accouchaient dans un établissement de santé. Pour
les femmes pauvres ou vivant en zone rurale qui souhaitaient avoir accès aux
CÔTE D’IVOIRE 26
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hôpitaux et aux centres de santé, les transports et les frais relatifs aux services ont
constitué un obstacle important.
Selon le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), en 2015, le taux de
mortalité maternelle était de 645 décès par centaine de milliers de naissances
vivantes, par rapport à 717 en 2010. Outre le manque de services de soins de santé
maternels appropriés, les facteurs contribuant au taux de mortalité maternelle élevé
comprenaient les grossesses à répétition trop peu espacées, avec à chaque fois un
risque de complications obstétriques, les avortements incomplets, la prévalence du
VIH-sida et la scarification des MGF/E, entraînant un arrêt dans la progression du
travail.
Le code pénal, qui pénalise l’avortement quel que soit le cas, sauf si la grossesse
menace la vie de la mère, a contribué à un nombre élevé de grossesses non
souhaitées. Environ deux femmes sur cinq avaient eu leur premier enfant avant
l’âge de 18 ans, et la moitié environ de ces naissances s’étaient faites avec des
risques importants en raison de tentatives non fructueuses d’avorter illégalement en
faisant appel à des guérisseurs traditionnels ou au moyen de plantes médicinales,
de pilules, de tessons de bouteilles et d’autres objets tranchants. Bien que les
femmes et les filles ayant recours à des avortements illégaux aient, en théorie,
accès à des soins de santé d’urgence, la plupart d’entre elles hésitaient à le faire en
raison de l’illégalité de l’avortement.
Discrimination : La loi accorde les mêmes droits et statuts juridiques aux femmes
qu’aux hommes en vertu du Code du travail, mais pas des lois relatives à la
religion, au statut personnel, à la propriété, à la nationalité et à l’héritage. Les
femmes ont été victimes de discrimination en matière de mariage, de divorce, de
garde des enfants, d’emploi, de crédit, de paie, de propriété ou de gestion d’une
entreprise ou d’un bien, d’éducation, de processus judiciaire et de logement.
En 2012, le Parlement a adopté une série de lois visant à réduire les inégalités entre
les sexes au niveau du mariage, notamment certaines permettant aux femmes de
bénéficier d’une déduction d’impôt sur le revenu et de participer aux décisions
familiales. Toutefois, elles étaient rejetées par un grand nombre d’autorités
religieuses et traditionnelles et il n’y avait aucune indication que l’État les faisait
appliquer.
Certaines femmes ont éprouvé des difficultés pour obtenir des prêts parce qu’elles
ne pouvaient pas remplir les conditions d’emprunt, notamment proposer des
garanties, dont le titre ne saurait être établi au nom d’une femme, sous la forme de
CÔTE D’IVOIRE 27
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biens ménagers coûteux. D’autres ont été victimes de discrimination économique
en matière de propriété ou de gestion d’entreprise.
Des organisations de femmes ont continué de mener campagne pour obtenir une
réforme fiscale qui permettrait aux mères célibataires de bénéficier d’une
déduction d’impôts pour leur progéniture. La loi sur la succession est également
discriminatoire envers les femmes.
Les organisations de défense des droits des femmes ont continué à parrainer des
campagnes contre le mariage forcé, les pratiques relatives à la succession excluant
les femmes et d’autres usages considérés comme néfastes pour les femmes et les
filles. Elles ont également fait campagne contre certaines dispositions de la loi
discriminatoires envers les femmes et ont poursuivi leurs efforts pour encourager
les femmes à participer davantage à la vie politique à l’échelle locale et nationale.
Enfants
Enregistrement des naissances : La citoyenneté est transmise aux enfants par l’un
des parents. Au moins un des parents doit être citoyen pour qu’un enfant puisse
être considéré comme étant Ivoirien de naissance. Pour les enfants nés en dehors
des établissements de santé, la loi accorde aux parents un délai de trois mois pour
déclarer la naissance de leur enfant à l’état civil moyennant un droit de 500 francs
CFA (0,85 dollar É.-U.). Certains rapports ont signalé que le coût effectif de
l’enregistrement des naissances était plus élevé parce que des fonctionnaires
corrompus exigeaient des pots-de-vin. Pour les naissances dans les établissements
de santé, l’enregistrement était gratuit si les parents fournissaient les documents
requis dans les 30 jours qui suivaient la naissance. Plus de deux millions d’enfants
de moins de 17 ans n’étaient pas enregistrés, dont au moins 1,5 million de moins
de 5 ans. Bien que l’État n’ait pas officiellement refusé de services publics, comme
l’éducation ou les soins de santé, aux enfants sans papiers, certaines écoles auraient
exigé que les parents présentent les pièces d’identité de leurs enfants en vue de leur
inscription. Les enfants sans papiers ne pouvaient pas poursuivre leurs études après
l’école primaire.
Éducation : L’éducation était gratuite et obligatoire pour tous les enfants de 6 à
16 ans. Les parents d’enfants qui ne sont pas en conformité avec la loi s’exposent à
des amendes allant jusqu’à 500 000 francs CFA (850 dollars É.-U.) ou des peines
de deux à six mois de prison. En principe, les élèves ne devaient pas prendre en
charge l’achat des manuels et uniformes ou les frais de scolarité ; cependant,
certains d’entre eux l’auraient tout de même fait dans la mesure où ces différentes
CÔTE D’IVOIRE 28
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dépenses n’étaient pas prises en charge par l’État pour chacun d’entre eux.
Certaines écoles s’attendaient à ce que les parents contribuent aux salaires et aux
allocations logement des enseignants, surtout dans les zones rurales. Les élèves qui
échouaient à l’examen d’entrée en secondaire ne pouvaient pas bénéficier de
l’éducation secondaire publique gratuite et beaucoup de familles ne pouvaient pas
se permettre les frais de scolarité d’établissements privés.
La scolarisation des filles était inférieure à celle des garçons, en particulier dans les
zones rurales. La préférence des parents pour une scolarisation des garçons plutôt
que des filles aurait persisté, surtout en milieu rural. La plupart des écoles ne
disposaient pas d’installations sanitaires adéquates pour les filles. Les taux de
grossesse chez les écolières étaient élevés. De nombreux rapports ont fait état
d’enseignants exigeant de leurs élèves et étudiants des faveurs sexuelles en
échange d’argent ou de bonnes notes. Des écoles signalaient que certaines jeunes
filles ne retournaient pas à l’école après leurs vacances en raison d’un mariage
précoce ou forcé.
Au cours de l’année, le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique, en
collaboration avec ses partenaires financiers et techniques, a mis en place des
programmes de sensibilisation encourageant les enfants à rester à l’école. Il a
également travaillé avec des enseignants pour leur permettre de détecter certains
problèmes dès les premiers stades, comme les grossesses et les cas d’exploitation
sexuelle et de violence.
Maltraitance d’enfants : Le viol ou la tentative de viol, au sens de la loi, commis
sur la personne d’un mineur de moins de 16 ans était puni d’une peine de prison
allant d’un an à trois ans et d’une amende de 360 000 à un million de francs CFA
(610 à 1 700 dollars É.-U.). Des enfants ont néanmoins été victimes de violences et
d’abus physiques et sexuels. Au cours de l’année, les autorités ont signalé des viols
commis sur des fillettes âgées parfois de cinq ans seulement. Elles reclassaient
souvent les accusations de viol d’enfant comme des attentats à la pudeur car les
peines étaient moins sévères. Il a été procédé à un certain nombre de poursuites et
condamnations au cours de l’année. Pour aider les enfants victimes de violences et
de maltraitances, l’État a coopéré avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance
(UNICEF) pour renforcer le réseau d’actions de protection des enfants du pays.
Bien qu’il ait incombé aux ministères de l’Emploi, des Affaires sociales et de la
Formation professionnelle, de la Justice, de la Promotion de la femme, de la
Famille et de la Protection de l’enfant, et de l’Enseignement de lutter contre la
maltraitance des enfants, ils n’étaient pas efficaces en raison d’un manque de
CÔTE D’IVOIRE 29
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ressources et de coordination interministérielle. En 2015, le ministère de
l’Enseignement a publié un document dans lequel il s’engageait à protéger les
enfants de toute maltraitance dans l’enceinte de l’école et à contribuer à la
prévention, la détection et le signalement de la maltraitance des enfants en dehors
des établissements scolaires. Cependant, en octobre, aucune mesure du ministère
n’avait été signalée.
Mariage forcé et mariage précoce : La loi interdit le mariage des hommes de moins
de 20 ans et des femmes de moins de 18 ans sans consentement parental. Elle
pénalise spécifiquement quiconque oblige un mineur de moins de 18 ans à
contracter une union matrimoniale religieuse ou coutumière. Cependant, des
mariages traditionnels ont été célébrés, les mariées étant parfois des fillettes âgées
de 14 ans à peine. Les Nations Unies ont documenté plusieurs affaires de mariage
forcé et de tentatives de mariage forcé au cours de l’année.
Selon l’Enquête démographique de santé de 2011-2012, étude la plus récente
disponible, 10 % des femmes âgées de 20 à 24 ans se sont mariées avant l’âge de
15 ans et 33 % d’entre elles se sont mariées avant l’âge de 18 ans.
En mars, les autorités ont condamné un homme de la région de Dabou à six mois
de prison pour contacts sexuels avec une fille de moins de 15 ans.
Mutilations génitales féminines/excision (MGF/E) : Voir sous-section Condition
féminine ci-dessus.
Exploitation sexuelle des enfants : L’âge minimum pour les rapports sexuels
consensuels est de 18 ans. La loi interdit l’emploi, le recrutement ou l’offre
d’enfants à des fins de prostitution ou pour des films, des photographies ou des
événements pornographiques. Les contrevenants sont passibles de sanctions allant
d’une peine de cinq à vingt ans de prison et d’une amende de cinq à cinquante
millions de francs CFA (8 510 à 85 180 dollars É.-U.). En cas de condamnation, le
détournement de mineur est passible d’un à trois ans de prison et d’une amende de
360 000 à un million de francs CFA (610 à 1 700 dollars É.-U.).
La Côte d’Ivoire était un pays d’origine, de transit et de destination d’enfants
soumis à la traite des personnes, y compris à des fins sexuelles. Au cours de
l’année, l’unité de lutte contre la traite au sein de la police nationale a procédé à
plusieurs arrestations d’individus soupçonnés d’être impliqués dans le trafic sexuel
d’enfants.
CÔTE D’IVOIRE 30
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En janvier, les autorités ont condamné deux individus à six mois de prison et une
amende de deux millions de francs CFA (3 400 dollars É.-U.) pour proxénétisme
d’enfants, bien que le fait de forcer des enfants à se prostituer ou de les offrir à des
fins de prostitution soit passible d’une peine minimale de cinq ans de prison. L’un
des proxénètes exploitait neuf filles dans son restaurant.
Veuillez également consulter le Rapport sur la traite des personnes du
département d’État à l’adresse suivante :www.state.gov/j/tip/rls/tiprpt/.
Enfants déplacés : Des ONG locales ont signalé que dans l’ensemble du pays, des
milliers d’enfants vivaient dans les rues. Celles qui se consacraient à aider ces
enfants avaient elles-mêmes du mal à estimer l’ampleur du problème et à
déterminer si ces enfants avaient accès ou non aux services publics. Aucun
programme public connu ne traitait spécifiquement du problème des enfants sans-
abri.
En janvier, le gouvernement a lancé un nouveau service pour la protection des
mineurs aux prises avec la loi. La Direction de la protection judiciaire de l’enfance
et de la jeunesse au sein des tribunaux de première instance a été inaugurée dans
quatre districts : deux à Abidjan, un à Man et un à Bouaké. Elle a été créée afin
d’aider les magistrats responsables des affaires impliquant des enfants à trouver
des manières de les réinsérer dans la société.
Enlèvements internationaux d’enfants : La Côte d’Ivoire n’est pas partie à la
Convention de la Haye de 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international
d’enfants. Veuillez consulter l’Annual Report on International Parental Child
Abduction (Rapport annuel sur les enlèvements parentaux internationaux
d’enfants) du département d’État à l’adresse suivante :
travel.state.gov/content/childabduction/en/legal/compliance.html.
Antisémitisme
La communauté juive du pays comptait moins de cent personnes. Aucun acte
d’antisémitisme n’a été signalé.
Traite des personnes
Veuillez consulter le Rapport sur la traite des personnes du département d’État à
l’adresse suivante : www.state.gov/j/tip/rls/tiprpt/.
CÔTE D’IVOIRE 31
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Personnes handicapées
La loi exige du gouvernement qu’il assure l’éducation et la formation de personnes
atteintes de handicaps physiques, mentaux, visuels, auditifs et cérébromoteurs,
qu’il les embauche ou les aide à trouver un emploi, qu’il conçoive des résidences et
des installations avec accès pour fauteuils roulants, et qu’il adapte machines, outils
et lieux de travail pour que les personnes handicapées puissent y accéder et s’en
servir, et qu’il leur donne accès au système judiciaire. Cependant, les installations
avec accès pour fauteuils roulants étaient rares et seuls cinq tribunaux sur 36
étaient accessibles par fauteuil roulant. Il existait peu de programmes de formation
et d’assistance à l’emploi pour les personnes handicapées. La loi interdit également
les actes de violence contre les personnes handicapées et l’abandon de telles
personnes ; cependant, il n’y a eu aucune indication que l’État faisait appliquer ces
lois.
Les personnes handicapées auraient fait face à une grave discrimination en matière
d’emploi et d’éducation. Si l’État réservait 800 emplois dans la fonction publique
aux personnes handicapées, dans la pratique, les fonctionnaires refusaient parfois
de les embaucher. Les prisons et les centres de détention ne fournissaient pas
d’aménagements spéciaux pour les personnes handicapées.
L’État a accordé un appui financier aux écoles spécialisées, aux programmes de
formation, aux associations et aux coopératives d’artisans pour handicapés mais de
nombreuses personnes handicapées mendiaient dans les rues des villes et dans les
zones commerçantes parce qu’ils n’avaient pas d’autres débouchés économiques.
Bien que les écoles publiques ne soient pas interdites aux personnes handicapées,
elles ne disposaient pas des ressources nécessaires pour accueillir les élèves
handicapés. Les handicapés mentaux étaient souvent sans-abri.
Le ministère de l’Emploi, des Affaires sociales et de la Formation professionnelle
et la Fédération des handicapés étaient responsables de la protection des droits des
personnes handicapées.
En janvier, le ministère de l’Emploi, des Affaires sociales et de la Formation
professionnelle a signé un accord avec La Libellule, cabinet de recrutement privé,
pour promouvoir l’emploi des personnes handicapées et améliorer leur condition
sociale. En juin, il a également signé un accord similaire avec six entreprises
privées.
Minorités nationales/raciales/ethniques
CÔTE D’IVOIRE 32
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Le pays compte plus de 60 groupes ethniques, et la discrimination ethnique était
problématique. Les autorités considéraient qu’environ un quart de la population
était composé d’étrangers, bien que nombre d’entre eux soient résidents de
deuxième ou troisième génération. Des différends entre groupes ethniques,
principalement fonciers, aboutissaient à des actes de violence sporadique, surtout
dans l’ouest du pays. En dépit d’une mise à jour en 2013 des procédures accordant
à des propriétaires putatifs fonciers dix ans supplémentaires pour établir leur titre
de propriété, la législation en matière de propriété foncière continuait de manquer
de clarté et n’était pas appliquée, donnant lieu à des conflits entre les populations
autochtones et d’autres groupes.
Bien que la loi interdise la xénophobie, le racisme et le tribalisme, rendant ces
formes d’intolérance passibles de cinq à dix ans de prison, aucune inculpation n’a
été prononcée au cours de l’année. Il a été signalé des cas de maltraitance et de
harcèlement par la police de résidents africains qui n’étaient pas citoyens ivoiriens.
Le harcèlement de la part des agents de l’État reflétait l’idée reçue selon laquelle
les étrangers étaient responsables de la forte criminalité et de cas de falsification de
cartes d’identité.
À Bouna, dans le nord-est du pays, le conflit intercommunautaire du mois de mars
entre agriculteurs loni et bergers foulani, dont un grand nombre étaient burkinabè,
a fait de nombreuses victimes. Au cours du conflit, des dozos ont tué au moins 27
personnes. On estime qu’environ un millier de personnes ont fui au Burkina Faso à
la suite des affrontements. Les autorités ont arrêté le chef régional des dozos, qui
était toujours en détention en fin d’année en attente de son procès.
Actes de violence, discrimination et autres abus basés sur l’orientation
sexuelle et l’identité de genre
La seule mention dans la loi d’activité sexuelle entre personnes du même sexe était
une forme d’attentat à la pudeur passible d’une peine allant jusqu’à deux ans de
prison, tout comme les actes hétérosexuels en public. S’il existait une législation
antidiscriminatoire, elle n’abordait pas la discrimination basée sur l’orientation
sexuelle ou l’identité de genre (voir la section 7.d.).
La discrimination et la violence sociétales à l’encontre de la communauté LGBTI
étaient problématiques. Ainsi, en juin, des membres de la communauté LGBTI se
sont rassemblés dans une ambassade pour signer un livre de doléances à la suite
d’une attaque terroriste à l’étranger contre la communauté LGBTI. Après la
CÔTE D’IVOIRE 33
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publication d’une photographie de la signature du livre sur les médias sociaux, des
personnes LGBTI figurant sur le message ont été agressées et un grand nombre
d’entre elles ont dû fuir leur foyer.
Les forces de l’ordre traitaient parfois la violence sociétale à l’égard de la
communauté LGBTI avec lenteur et inefficacité. Les quelques rares organisations
LGBTI dans le pays ont fonctionné librement, mais avec prudence.
Stigmatisation sociale liée au VIH et au sida
Il n’existait pas de discrimination d’État basée sur le statut sérologique. Une loi
de 2014 condamne expressément toute forme de discrimination à l’encontre des
personnes séropositives et garantit leur accès aux soins et aux traitements. La loi
prévoit également des amendes pour discrimination ou refus de soin basé sur le
statut sérologique.
Le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique a géré un programme d’aide aux
populations vulnérables (hommes homosexuels, travailleurs du sexe, migrants) qui
courent un risque élevé de contracter le VIH-sida. Le ministère de la Promotion de
la femme, de la Famille et de la Protection de l’enfant a fourni des aliments, des
services d’éducation et une protection aux orphelins et aux enfants vulnérables,
notamment ceux touchés par le VIH-sida.
La dernière Enquête démographique et de santé signale qu’environ 47 % des
femmes et 45 % des hommes avaient, en 2011-2012, fait état d’attitudes
discriminatoires à l’encontre des personnes atteintes par le VIH-sida. Selon le
rapport 2014-2015 d’Afrobarometer, 76 % de la population étaient tolérants vis-à-
vis des personnes vivant avec le VIH-sida. Cependant, en dehors de l’enceinte des
établissements hospitaliers, la stigmatisation sociétale était répandue, la
discrimination la plus explicite visant les hommes homosexuels vivant avec le
VIH-sida. Par conséquent, de nombreuses personnes vivant avec le VIH-sida
choisissaient de ne pas révéler leur statut à leur famille et à leurs amis par crainte
de stigmatisation.
Section 7. Droits des travailleurs
a. Liberté d’association et droit à la négociation collective
La loi, y compris les règlements et statuts connexes, garantit le droit des
travailleurs, à l’exception des membres de la police et des forces armées, de créer
CÔTE D’IVOIRE 34
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les syndicats de leur choix et d’y adhérer, prévoit le droit de faire grève dans des
conditions licites et d’entreprendre des négociations salariales et interdit la
discrimination antisyndicale par les employeurs ou d’autres entités envers les
membres de syndicats ou les responsables syndicaux. Elle interdit le licenciement
de salariés pour activités syndicales et exige la réintégration des employés dans les
huit jours qui suivent la réception par un employeur d’une plainte pour
licenciement abusif. La loi permet aux syndicats du secteur formel de mener leurs
activités sans ingérence. Les organisations de travailleurs étaient indépendantes du
gouvernement et des partis politiques. Cependant, selon la Confédération syndicale
internationale, la loi n’a pas de critères objectifs permettant d’établir la
reconnaissance des syndicats représentatifs, ce qui pourrait permettre aux
employeurs des secteurs public et privé de refuser la négociation avec les syndicats
au motif qu’ils ne sont pas représentatifs. Les étrangers doivent obtenir le statut de
résident, dont la procédure d’obtention dure trois ans, avant de pouvoir prétendre à
l’exercice de fonctions syndicales.
La loi exige également une longue série de négociations et un préavis de six jours
pour toute grève, ce qui rend les grèves légales difficiles à organiser et à maintenir.
Les travailleurs sont contraints d’assurer à un niveau minimum les services dont
l’interruption pourrait mettre en danger les vies, la sécurité ou la santé des
citoyens, créer une crise nationale menaçant leurs vies ou nuire au fonctionnement
de l’équipement. Par ailleurs, si les autorités jugent que la grève constitue une
menace à l’ordre public, le président a des pouvoirs importants lui permettant de
réquisitionner les grévistes par décret sous peine de sanctions. Il peut également
exiger un arbitrage en cas de grèves dans les services importants, bien que la loi ne
définisse pas ce terme.
Hormis les grandes exploitations agricoles industrialisées et quelques corps de
métiers, les protections juridiques excluaient pour la plupart les travailleurs du
secteur informel, notamment les petites exploitations agricoles, les petits éventaires
en bordure de rue et de route et les ateliers en milieu urbain.
Le manque de ressources et d’inspections gênait les efforts du gouvernement pour
faire appliquer les lois en vigueur dans le secteur formel. Les sanctions prévues en
cas de violations, des amendes comprises entre 10 000 et 100 000 francs CFA
(entre 17 et 170 dollars É.-U.) étaient insuffisantes pour avoir un effet dissuasif.
Les procédures judiciaires administratives étaient soumises à de longs retards et
appels.
CÔTE D’IVOIRE 35
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Pour que les négociations concernant une nouvelle convention collective soient
lancées, un syndicat devait représenter 30 % des travailleurs. Les conventions
collectives s’appliquaient aux employés du secteur formel et étaient en vigueur
dans de nombreuses grandes entreprises commerciales et dans divers secteurs de la
fonction publique. Bien que le Code du travail permette éventuellement aux
employeurs de refuser toute négociation, le ministère de l’Emploi, des Affaires
sociales et de la Formation professionnelle n’a pas enregistré de plaintes de la part
des syndicats. Toutefois, une confédération syndicale internationale connue a
signalé que le gouvernement n’avait pas versé les cotisations sociales à plusieurs
syndicats malgré un accord de négociation collective valide.
Les enseignants des universités et des écoles primaires ont fait grève pendant
l’année. Aucun cas de briseur de grève n’a été signalé pendant l’année.
Le ministère de l’Emploi, des Affaires sociales et de la Formation professionnelle
n’a rapporté aucun cas de plaintes pour discrimination antisyndicale ou ingérence
des employeurs dans les activités syndicales durant l’année ; cependant, la
Confédération syndicale internationale a fait état de quatre affaires en 2015.
Celles-ci concernaient l’arrestation d’un représentant syndical se plaignant de
salaires trop bas, l’occupation par l’armée d’un bureau syndical pendant plusieurs
années, la dispersion par la force de 200 grévistes du ministère du Commerce et les
violations par le gouvernement du droit de grève au moyen du transfert de
représentants et dirigeants syndicaux dans différentes parties du pays.
b. Interdiction du travail forcé ou obligatoire
La Constitution et la loi interdisent toutes les formes de travail forcé ou obligatoire,
y compris celui des enfants. Dans le cadre de leur formation, les inspecteurs du
travail de l’École nationale d’administration ont pu bénéficier de nouveaux
modules sur la lutte contre le travail des enfants. Cependant, 739 inspections
effectuées au cours de l’année n’ont pas mené à des enquêtes sur les infractions
relatives au travail des enfants, bien que cette pratique soit répandue. Un accord de
coopération entre les gouvernements de la Côte d’Ivoire et du Ghana en matière de
lutte contre la traite transfrontalière et le travail des enfants prévoit des peines de
prison d’un à cinq ans pour les contrevenants. Il stipule également des amendes
comprises entre 500 000 et un million de francs CFA (entre 850 et 1 700 dollars
É.-U.) si le contrevenant est un parent de l’enfant, son tuteur ou une personne qui a
la charge de l’éducation de l’enfant et laisse faire à l’enfant un travail dangereux.
Les contrevenants sans lien de parenté avec l’enfant s’exposent à une peine de dix
à vingt ans de prison et à une amende de cinq à vingt millions de francs CFA (de
CÔTE D’IVOIRE 36
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8 510 à 34 070 dollars É.-U.) en cas de condamnation de participation au travail
forcé des enfants. Les ressources, les inspections, les sanctions et les mesures
correctives étaient insuffisantes pour avoir un effet dissuasif.
Le Comité national de surveillance des actions de lutte contre la traite,
l’exploitation et le travail des enfants (CNS), présidé par la Première dame
Dominique Ouattara, et le Comité interministériel sont chargés de l’évaluation des
actions du gouvernement et des donateurs en matière de travail des enfants.
En 2015, le gouvernement a rédigé et achevé un plan national d’action 2016-2020
de lutte contre la traite des personnes.
Cependant, le travail forcé ou obligatoire est resté une réalité dans de petites
entreprises de production de denrées agricoles et d’autres entreprises plus grandes
de ce secteur, surtout dans les plantations de cacao, de café, d’ananas et de
caoutchouc, et dans le secteur informel, notamment pour les domestiques, les
ouvriers agricoles non industriels, les travailleurs des mines artisanales et les
employés de boutiques de rue et de restaurants. Les travaux forcés dans les
plantations de cacao, de café et d’ananas se limitaient aux enfants (voir
section 7.c.). Certains rapports ont signalé que le travail forcé d’adultes dans le
secteur de la production du caoutchouc signifiait surtout de longs horaires et de bas
salaires pour des travailleurs vivant, de fait, dans des conditions d’asservissement.
Veuillez également consulter le Rapport sur la traite des personnes du
département d’État à l’adresse suivante :www.state.gov/j/tip/rls/tiprpt/.
c. Interdiction du travail des enfants et âge minimum d’admission à l’emploi
Le Code du travail de 2015 a relevé l’âge minimum d’admission à l’emploi de 14 à
16 ans, mais l’âge minimum pour les programmes d’apprentissage et les travaux
dangereux est resté le même (respectivement 14 et 18 ans). Le travail de nuit était
interdit aux mineurs de moins de 18 ans. La loi interdisait l’exploitation des
enfants sur les lieux de travail, mais le ministère de l’Emploi, des Affaires sociales
et de la Formation professionnelle n’a fait appliquer cette disposition de manière
effective que dans la fonction publique et dans les grandes sociétés
multinationales.
La traite des enfants et les pires formes de travail des enfants étaient interdites par
la loi. Bien que le manque de ressources et de formation ait continué à entraver
l’application des lois sur le travail des enfants, l’État a pris des mesures pour traiter
le problème des pires formes de travail des enfants. L’État a œuvré à la mise en
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place de son plan national d’action 2015-2017 contre la traite, l’exploitation et le
travail des enfants, et a renforcé son système national de surveillance du travail des
enfants. En 2015, un raid ciblant plusieurs entreprises de la région de San-Pédro a
permis la libération de 48 enfants victimes de la traite et des pires formes de travail
des enfants et l’inculpation de 22 personnes pour traite. À partir de 2014, le
gouvernement a mis en place des réglementations plus strictes en matière de
déplacements de mineurs à partir ou en direction de la Côte d’Ivoire, en exigeant
des enfants et des parents des documents prouvant les liens de parenté, y compris
au moins un acte de naissance ; cependant, ces réglementations n’étaient pas
toujours appliquées.
La sous-direction de la Lutte contre le travail des enfants du ministère de l’Emploi,
des Affaires sociales et de la Formation professionnelle, le CNS et le Comité
interministériel dirigeaient les efforts d’application de la loi. Le plan national
d’action 2015-2017 disposait d’un budget de 9,6 milliards de francs CFA
(16,4 millions de dollars É.-U.). Il appelle à des efforts d’amélioration de l’accès à
l’éducation, aux soins de santé et aux activités génératrices de revenus au profit des
enfants, ainsi qu’à la mise en place d’enquêtes nationales, de campagnes de
sensibilisation et d’autres projets en partenariat avec des ONG locales permettant
de mettre en évidence les dangers liés au travail des enfants. La Première dame
Dominique Ouattara a fait de l’éradication du travail des enfants une clé de voûte
de ses efforts, et elle a continué à y participer activement.
L’État s’est engagé dans plusieurs partenariats avec l’Organisation internationale
du Travail (OIT) visant à réduire le travail des enfants dans les plantations de
cacao. Par le biais de son Programme international pour l’abolition du travail des
enfants (IPEC), l’OIT avait deux projets en cours dans ce domaine, tous deux
achevés en 2015.
Le gouvernement a travaillé avec une entité gouvernementale étrangère à deux
projets relatifs au travail des enfants. Le premier, mis en œuvre par l’International
Cocoa Initiative, était le projet Éliminer le travail des enfants dans la cacaoculture
(Eliminating Child Labor In Cocoa, ECLIC), lancé récemment. L’objectif de ce
projet de quatre ans et doté de 2,6 milliards de francs CFA (4,5 millions de dollars
É.-U.) était d’aider les 50 communautés de cacaoculteurs du pays à élaborer et
mettre en œuvre des plans d’action communautaire et de fournir des services
d’éducation et de subsistance directs de manière à réduire l’usage de travail des
enfants dans le secteur cacaotier. Le second projet correspondait à la troisième et
dernière étude de mesure de la prévalence du travail des enfants dans les zones
cacaotières de Côte d’Ivoire et du Ghana, conformément à la déclaration pour
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soutenir la mise en œuvre du Protocole Harkin-Engel et à son cadre d’action.
L’étude était prévue pour la saison cacaotière 2018-2019 pour faire suite aux
études réalisées en 2008-2009 et en 2013-2014.
L’État a travaillé avec des ONG pour mener des campagnes de sensibilisation des
familles agricoles au travail des enfants axées sur la liste, mise au point par l’État,
des pires formes de travail des enfants qui sont interdites. Par conséquent, les
organisations locales des employés de maison se sont également efforcées de
prévenir l’exploitation des enfants dans le domaine des travaux domestiques.
D’autres ONG ont mené campagne contre la traite des enfants, le travail des
enfants ainsi que les sévices sexuels ciblant les enfants.
Les contrevenants s’exposent à une peine de prison d’un à cinq ans et à une
amende de 500 000 à un million de francs CFA (850 à 1 700 dollars É.-U.). Les
sanctions n’étaient cependant pas suffisantes pour avoir un effet dissuasif, et le
gouvernement n’a pas appliqué ces dispositions de manière efficace. Le travail des
enfants est resté un problème répandu, surtout dans les plantations de cacao et de
café et les mines d’or et de diamants.
Les enfants travaillaient souvent dans des exploitations agricoles familiales et
comme vendeurs, cireurs de chaussures, coursiers, aides domestiques, serveurs
dans les restaurants de rue, et surveillants et laveurs de voitures. Certaines fillettes
commenceraient dès l’âge de neuf ans à travailler comme domestiques, souvent à
l’intérieur de leur cercle familial élargi. Si la prévalence globale du travail des
enfants a diminué, des enfants des zones rurales ont continué de travailler dans des
plantations de cacao dans des conditions dangereuses, notamment risque de
blessures causées par des machettes, contraintes physiques provenant du transport
de lourdes charges et exposition à des produits chimiques nocifs. Alors qu’un
faible pourcentage d’enfants travaillant dans les plantations de cacao n’avait aucun
lien de parenté avec les exploitants, la majorité travaillait dans des exploitations
familiales ou avec leurs parents. Selon un rapport publié en 2014 par l’OIT,
environ 40 % des enfants âgés de 5 à 14 ans travaillaient et presque 25 % de
l’ensemble des enfants exerçaient une activité économique tout en fréquentant
l’école.
Veuillez également consulter les Conclusions sur les pires formes de travail des
enfants du département du Travail à l’adresse suivante :
www.dol.gov/ilab/reports/child-labor/findings/.
d. Discrimination en matière d’emploi et de profession
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La loi interdit la discrimination en matière d’emploi et de profession fondée sur le
sexe, l’âge, l’origine nationale, la citoyenneté, la race, la religion, l’opinion
politique et l’origine sociale, mais elle n’aborde pas la discrimination fondée sur
l’orientation sexuelle et/ou l’identité de genre, la couleur ou la langue. Une loi
de 2014 interdit spécifiquement la discrimination au travail fondée sur le statut
sérologique au VIH-sida, mais elle n’aborde pas les autres maladies transmissibles.
Le Code du travail adopté en juillet 2015 comprend des dispositions visant à
encourager l’accès à l’emploi des personnes handicapées. Il stipule que les
employeurs doivent réserver un certain quota de postes pour les demandeurs
handicapés qualifiés. La loi ne prévoit pas de peines en cas de discrimination en
matière d’emploi.
Le gouvernement n’a pas toujours veillé efficacement à l’application de la loi. Des
cas de discrimination en termes d’emploi et de profession fondée sur le sexe, la
nationalité et le handicap et à l’encontre des personnes LGBTI se sont produits
(voir la section 6). Bien que les femmes, dans le secteur formel, aient reçu le même
salaire et payé les mêmes impôts que les hommes, certains employeurs ont opposé
une résistance à leur embauche.
Et bien que, dans le secteur privé, la loi garantisse les mêmes protections pour les
travailleurs migrants que pour les citoyens, ils étaient pour la plupart victimes de
discrimination en termes de traitement et de salaires.
e. Conditions de travail acceptables
Le salaire minimum pour l’ensemble des professions était de 60 000 francs CFA
par mois (100 dollars É.-U.), à l’exception du secteur agricole, où il était de
25 000 francs CFA (40 dollars É.-U.). L’estimation officielle du seuil de pauvreté
était comprise entre 500 et 700 francs CFA (entre 0,85 et 1,19 dollar É.-U.) par
jour. Le ministère de l’Emploi, des Affaires sociales et de la Formation
professionnelle était responsable de faire respecter la loi sur le salaire minimum.
L’État ne faisait appliquer la loi qu’aux fonctionnaires salariés ou aux employés
inscrits à la Sécurité sociale. Les syndicats ont contribué à la mise en place
effective des normes en matière de salaire minimum dans le secteur formel. Les
fédérations syndicales ont tenté de lutter pour un traitement juste des travailleurs,
conformément à la loi, dans les cas où les sociétés ne respectaient pas les normes
en matière de salaire minimum ou pratiquaient la discrimination entre certaines
catégories de travailleurs, par exemple les femmes ou entre ressortissants
nationaux et étrangers.
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La loi ne prévoit pas l’égalité de salaire à travail égal. Il n’a pas été signalé que
l’État ait pris de mesures pour corriger les grands écarts de salaire entre les
employés étrangers non africains et leurs collègues africains qui travaillaient pour
le même employeur.
La semaine de travail normale est légalement fixée à 40 heures. La loi exige le
paiement d’heures supplémentaires pour tout travail additionnel et une période de
repos hebdomadaire d’au moins 24 heures. Elle n’interdit pas les heures
supplémentaires obligatoires.
La loi prévoit certaines normes en matière de santé et de sécurité dans le secteur
formel. La loi prévoit la mise en place d’un comité en matière d’emploi, de
sécurité et de santé, responsable de vérifier la protection et la santé des travailleurs
sur les lieux de travail. Les comités de ce type doivent être composés de
représentants syndicaux. Le président du comité pouvait signaler des conditions de
travail dangereuses ou insalubres à l’inspecteur du travail sans craindre d’être
pénalisé pour cela. Plusieurs millions de travailleurs migrants étrangers ou de
travailleurs du secteur informel, qui représentent 70 % de l’économie non agricole,
ne bénéficient pas de la législation actuellement en vigueur. Le gouvernement n’a
pas veillé efficacement à l’application de la loi et les sanctions étaient insuffisantes
pour avoir un effet dissuasif (500 000 à un million de francs CFA, soit 850 à
1 700 dollars É.-U.).
En vertu de la loi, les travailleurs du secteur formel ont le droit de se soustraire à
une situation qui présente un danger pour leur santé ou pour leur sécurité sans
risquer de perdre leur emploi. Ils peuvent avoir recours au mécanisme d’inspection
du ministère de l’Emploi, des Affaires sociales et de la Formation professionnelle
pour documenter des conditions de travail dangereuses. Les autorités ont protégé
les employés dans ce type de situation dans la pratique.
Le ministère de l’Emploi, des Affaires sociales et de la Formation professionnelle a
estimé le nombre d’inspecteurs du travail à 300 au plus, ce qui était insuffisant
pour faire respecter la loi dans la pratique. Des inspecteurs du travail auraient
fermé les yeux sur certaines violations moyennant des pots-de-vin.
Bien que la loi oblige les entreprises à fournir des services médicaux à leurs
employés, les petites sociétés, les entreprises du secteur informel, les foyers
employant des domestiques, ainsi que les exploitations agricoles (en particulier
pendant les récoltes saisonnières) ne s’y sont pas conformés. Les heures de travail
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excessives étaient fréquentes, et les employeurs enregistraient et payaient rarement
les heures supplémentaires conformément à la loi. En particulier, les employés du
secteur de la manufacture informelle manquaient souvent d’équipements de
protection adéquats. L’application de la fourniture de services médicaux dans le
secteur informel était globalement inexistante.