quels défis l'accord de paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations...

36
Recommandations du Réseau Climat & Développement, Octobre 2015 QUELS DéFIS L’ACCORD DE PARIS DOIT-IL RELEVER POUR RéPONDRE AUX BESOINS DES POPULATIONS AFRICAINES ?

Upload: racmarion

Post on 26-Jan-2017

1.630 views

Category:

Environment


2 download

TRANSCRIPT

Page 1: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Recommandations du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement Octobre 2015

Quels deacutefis lrsquoaccord de Paris doit-il relever Pour reacutePondre aux besoins des PoPulations africaines

PARIS CLIMAT 2015

Cet ouvrage a pu ecirctre conccedilu et publieacute gracircce au soutien du ministegravere franccedilais des Affaires eacutetrangegraveres et du Deacuteveloppement international de la Fondation MAVA de lrsquoADEME de la Fondation Heinrich Boumlll Nigeria de lrsquoOIF ndash IFDD de Germanwatch drsquoHELIO International de la Reacutegion Icircle-de-France et de Claude Bartolone Preacutesident de lrsquoAssembleacutee Nationale franccedilaise

Droits drsquoauteur Reacuteseau Action Climat ENDA Tiers Monde

Reproduction la reproduction de cette publication agrave des fins non commerciales notamment eacuteducatives est permise sans autorisation eacutecrite preacutealable des deacutetenteurs des droits drsquoauteurs agrave la condition que la source soit ducircment citeacutee

Coordination Joseph Yaovi Kogbe (Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement) Marion Richard (Reacuteseau Action Climat-France)

Auteurs (ordre alphabeacutetique) Is Deen Omolere Akambi (EcoBeacutenin) Ali Abdou Bonguere (EDER-Niger) Mouhamadou Farka Maiga (AMADE PELCODE) Abdoul Madjid Moutari (DEMI-E) Hindou Oumarou Ibrahim (AFPAT) Marion Richard (RAC-F) Zenabou Segda (WEP Burkina)

Remerciements aux relecteurs Sandrine Mathy (RAC-F) Alix Mazounie (RAC-F) Jean-Philippe Thomas (ENDA Energie)

Graphisme solennmarrelfr

Disponible aupregraves de Reacuteseau Action Climat-France47 avenue Pasteur ndash 93100 Montreuil ndash FranceInfosrac-forg

La publication est eacutegalement disponible en version eacutelectronique sur les sites suivants wwwclimatdeveloppementorgwwwrac-forgwwwendatiersmondeorg

Creacutedits photo couverture DEMI-E Niger

Associations membres du RCampDAfrique de lrsquoOuest REPAO Algeacuterie Amis de la Saoura Beacutechar Beacutenin CREDEL Eco-Beacutenin OFEDI JVE Beacutenin IDID Burkina Faso AFEP Burkina WEP Burkina Burundi AVOCHACLISD Cameroun ADD ADEID ACAMEE Carreacute Geacuteo Environnement CENAHC Horizon Vert Congo ACDA APEDD Cocircte drsquoIvoire AFHON Cocircte drsquoIvoire JVE Cocircte drsquoIvoire Enviscience Djibouti EVA France ACF Energies 2050 HELIO International RAC-F Rain Drop Guineacutee Carbone Guineacutee Germanwatch Guineacutee Eacutecologie Icircle Maurice DION Maudesco Mali AFAD Amade Pelcode ASIC CTESA GRAT Mali FolkeCenter Reacuteseau MUSONET Mauritanie ANPEC Maroc AHampE AESVT Niger ATPF Demi-E LEAD Niger EDER Niger JVE Niger Reacutepublique Centrafricaine JVE Centrafrique RDC ACDI Horizon Vert RCD JVE RCD OCEAN Planegravete Verte Seacuteneacutegal ADARS CONGAD ENDA Energie Tchad AFPAT LEAD Tchad Togo AFHON Togo ASEDI JVE Togo MVD OPED Togo RJE Tunisie 2C2D

Preacutesentation du reacuteseau climat amp deacuteveloppement

atelier annuel 2015 du rcampd

en bref

4

7

13

5lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

sommaire

31

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous 14

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire 18

Prioriser lrsquoadaptation et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation 21

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique 23

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat 26

Proteacuteger le climat et les droits humains 28

3

Le RCampD a tenu son 9egraveme atelier annuel du 14 au 18 avril 2015 dans les locaux du CIRED (Centre Interna-tional de Recherche en Environnement et Deacutevelop-pement) agrave Paris France en partenariat avec le CAN Afrique de lrsquoOuest et en eacutetroite coopeacuteration avec les associations franccedilaises de solidariteacute internationale membres de Coordination Sud en particulier ACF CARE-France CCFD-Terre Solidaire GERES Oxfam et Secours Catholique ndash Caritas France

Il a rassembleacute plus de 60 participants dont plus de 40 membres du RCampD et une vingtaine de repreacutesentants drsquoassociations franccedilaises de solidariteacute internationale issus de 20 pays europeacuteens et africains Allemagne Beacutenin Burkina Faso Burundi Cameroun Congo-Braz-zaville Cocircte drsquoIvoire Djibouti Ethiopie France Ile Mau-rice Mali Maroc Niger Reacutepublique Centrafricaine Reacutepublique Deacutemocratique du Congo Seacuteneacutegal Suisse Tchad et Togo

Lrsquoatelier a cibleacute les six theacutematiques prioritaires pour la socieacuteteacute civile africaine dans la perspective de la COP21 Il a permis de partager des analyses et expeacuteriences de terrain et de deacutevelopper pour chaque theacutematique un socle de nouvelles connaissances sur les grands enjeux ainsi que sur les questions deacutebattues dans le cadre des neacutegociations climat Lrsquoatelier a eacutegalement eacuteteacute lrsquooccasion de renforcer les capaciteacutes de plaidoyer de communication et drsquoutilisation des reacuteseaux sociaux et drsquoidentifier les prioriteacutes politiques du RCampD agrave lrsquoattention des deacutecideurs en vue de la COP21

atelier annuel 2015 du rcampd

Le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement (RCampD) reacuteunit les ONG francophones travaillant sur un deacuteve-loppement local etou national agrave lrsquoeacutepreuve des changements climatiques Creacuteeacute en 2007 par le

Reacuteseau Action Climat-France (RAC-France) et ENDA Ener-gie au Seacuteneacutegal le RCampD rassemble aujourdrsquohui pregraves de 80 ONG de terrain et de plaidoyer dans 21 pays drsquoAfrique et en France

En srsquoappuyant sur la diversiteacute de ses membres ndash por-teurs de projets sur le terrain ou experts des neacutegocia-tions internationales ndash le RCampD fait la promotion des modes de deacuteveloppement qui tiennent compte des contraintes climatiques et eacutenergeacutetiques Les membres mettent en œuvre des projets innovants et inteacutegreacutes au niveau local ou sensibilisent les populations et deacuteci-deurs nationaux et internationaux agrave la nouvelle donne eacutenergeacutetique et climatique Le RCampD travaille aussi pour renforcer la voix de la socieacuteteacute civile francophone dans les enceintes politiques nationales reacutegionales et internationales via des ateliers de renforcement de capaciteacutes et drsquoeacutechanges et des notes de deacutecryptage et de position communes

Chaque anneacutee le RCampD produit une vision partageacutee assortie de recommandations politiques En 2010 il srsquoest pencheacute sur la prise en compte des enjeux clima-tiques et eacutenergeacutetiques dans les politiques locales de deacuteveloppement en 2011 sur la gouvernance efficace

et eacutequitable des financements climat puis en 2012 sur des recommandations concregravetes pour Rio+20 Depuis 2013 le RCampD a alimenteacute le deacutebat sur les deux grands rendez-vous de lrsquoanneacutee 2015 les Objectifs de Deacuteveloppement Durable et lrsquoaccord mondial sur le climat avec un travail sur lrsquointeacutegration des contraintes climatiques et eacutenergeacutetiques dans les pratiques de deacuteveloppement (2013) puis sur le rocircle cleacute des eacutenergies renouvelables en Afrique pour lutter contre la pauvreteacute et les changements climatiques (2014)

Le RCampD a deacutecideacute de renforcer ce travail en cette anneacutee 2015 deacutecisive pour le climat et pour le deacuteveloppement en traduisant les prioriteacutes de la socieacuteteacute civile africaine en recommandations politiques pour la COP21 Six ambassadeurs du RCampD venus du Tchad du Niger du Burkina du Beacutenin et du Mali ont ainsi eacuteteacute choisis pour repreacutesenter et porter les preacuteoccupations formuleacutees par les associations membres sur six enjeux cleacutes eacutenergies renouvelables et efficaciteacute eacutenergeacutetique adaptation agriculture et seacutecuriteacute alimentaire financements genre et droits humains Ce travail est possible gracircce au sou-tien du ministegravere franccedilais des Affaires eacutetrangegraveres et du Deacuteveloppement international de la Fondation MAVA de lrsquoADEME de la Fondation Heinrich Boumlll Nigeria de lrsquoOIF ndash IFDD de Germanwatch drsquoHELIO International de la Reacutegion Icircle-de-France et de Claude Bartolone Preacutesident de lrsquoAssembleacutee Nationale franccedilaise

Preacutesentation du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement

copy R

eacutesea

u Cl

imat

amp D

eacutevel

oppe

men

t

4

LrsquoAfrique est le continent qui a contribueacute le moins aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre Pourtant crsquoest drsquoores et deacutejagrave la reacutegion la plus impacteacutee par les chan-gements climatiques Les eacuteconomies les eacutecosystegravemes les populations et plus particuliegraverement celles qui sont deacutejagrave fragiliseacutees par la pauvreteacute et la deacutegradation de leur environnement seront tregraves directement et tregraves neacutegativement toucheacutes Les impacts deacutejagrave observeacutes sur la production agricole et lrsquoeacutelevage sur la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communau-teacutes sur la disponibiliteacute en eau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures nrsquoiront qursquoen srsquoaggravant Certaines popula-tions ou pays subiront des dommages irreacuteversibles y compris en termes de vies humaines acculant les populations agrave la migration Sans actions immeacutediates et soutenues agrave plus long terme pour reacuteduire les impacts des changements climatiques les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement du continent africain sera menaceacutee

LrsquoAgence Internationale de lrsquoEnergie indique par ailleurs que pour stabiliser le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC il nous faut laisser sous terre au moins les 23 de nos reacuteserves connues en combustibles fossiles comme le charbon le gaz et le peacutetrole qui sont direc-tement responsables du reacutechauffement climatique1 Eacutetant donneacutee la dureacutee de vie des infrastructures cela implique notamment qursquoil est indispensable que toute nouvelle infrastructure de production drsquoeacutenergie doive fonctionner agrave partir de renouvelables et non de char-bon de gaz ou de peacutetrole Cela signifie que des conti-nents entiers dont lrsquoAfrique doivent non seulement srsquoadapter aux impacts des changements climatiques mais eacutegalement choisir un modegravele eacutenergeacutetique baseacute sur les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique et non sur les eacutenergies fossiles

Cependant cette crise est aussi une opportuniteacute pour repenser les politiques de deacuteveloppement de maniegravere agrave ce qursquoelles soient plus justes et accessibles agrave tous Ainsi 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoa pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute notamment en zone rurale Les eacutenergies fossiles ne sont pas en capaciteacute de reacutepondre agrave la neacutecessiteacute de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute et lrsquoeacutenergie le peacutetrole le charbon et le gaz sont trop chers et difficiles agrave importer et agrave transporter vers les zones rurales et enclaveacutees le charbon en particulier agrave des impacts sanitaires graves Heureusement la donne est en train de changer les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique vont permettre aux pays Africains drsquoatteindre lrsquoobjectif drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour

tous ndash y compris des plus vulneacuterables et isoleacutes Les solutions sont lagrave elles assainissent lrsquoair et creacuteent des emplois locaux elles contribuent au mieux-ecirctre de la communauteacute et agrave la lutte contre les changements climatiques

Lrsquoadaptation du modegravele de deacuteveloppement aux impacts des changements climatiques est eacutegalement une opportuniteacute pour repenser les politiques et inves-tissements en matiegravere drsquoagriculture drsquoinfrastructures drsquohabitat ou encore de gestion de lrsquoeau afin qursquoils soient plus adapteacutes aux besoins des populations et notamment des plus vulneacuterables ndash en particulier les femmes qui souffrent le plus des impacts des chan-gements climatiques et sont eacutegalement porteuses de solutions Crsquoest enfin une opportuniteacute pour favoriser le respect des droits humains trop souvent menaceacutes agrave la fois par les impacts des changements climatiques mais eacutegalement par des politiques et projets meneacutes au nom du deacuteveloppement ou du climat

Les prochaines neacutegociations internationales sur le climat (COP21) se tiendront du 30 novembre au 11 deacutecembre 2015 agrave Paris en France Le sommet de Paris sera deacuteterminant car il doit aboutir agrave un accord inter-national sur le climat qui preacuteservera des chances de contenir le reacutechauffement global en deccedilagrave de 2degC drsquoici 2100 Pour le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement ce sommet doit reacutepondre au double deacutefi de la lutte contre les changements climatiques et contre la pauvreteacute dans les pays les plus affecteacutes par ces derniers Le RCampD appelle agrave un accord qui

bullthinspProtegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

bullthinspFinance la lutte contre les changements climatiques dans les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables

bullthinspInvestit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables pour tous

bullthinspPermet aux populations les plus vulneacuterables de faire face aux impacts des changements climatiques

bullthinspPreacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique

1AIE World Energy Outlook 2012

En bREf

5

copy Hindou O Ibrahim

6

Tanger

RABATCasablanca

El Jadida

Safi

AgadirOuarzazate

Marrakesh

MohammediaMeknes

Kenitra

Teacutetouan

Oujda

Bouarfa

Ouarzazate

Marrakesh

Oujda

BouarfaMAROC

Fes

Tarfaya ALGERIA

SAHARA

BENIN

TOGO

BURKINA FASO

GHANA

NIGERIA

Natitingou

BanikoaraKandi

Malanville

DjougouNdali

Parakou

Tchaourou

Savalou

Abomey

Bohicon

OuidahLOMEacuteCotonou

SakeacuteteacutePORTO-NOVO

DJIBOUTI

SOMALIE

EacuteTHIOPIE

Obock

Tadjoura

DorraBalho

RandaGacirclacircfi

Yokobi

Holhol

Ali SabicirchDikhil

As Ela

DJIBOUTI CITY

lsquoArtaLoyada

Malgreacute sa faible contribution aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre (33 des eacutemissions mondiales lieacutees agrave lrsquoeacutenergie en 2012) lrsquoAfrique repreacutesente la reacutegion la plus affecteacutee par les changements climatiques et le restera probablement agrave lrsquoavenir Une analyse des donneacutees climatiques depuis 1950 montre une augmentation en intensiteacute et en freacutequence des eacutevegravenements climatiques extrecircmes2 ndash seacutecheresses fortes pluies engendrant des inondationshellip La seacutecuriteacute alimentaire la santeacute et les moyens de subsistance des africains sont deacutejagrave toucheacutes par les changements climatiques Alors que lrsquoon se dirige vers un reacutechauffe-ment global de plus de 2deg le cinquiegraveme rapport du GIEC rappelle que la tempeacuterature devrait augmenter plus vite en Afrique notamment dans les reacutegions arides ce qui aura un impact encore plus grave sur la production agricole la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine et la disponibiliteacute de lrsquoeau

Face agrave une telle situation le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement encourage le deacuteveloppement de la docu-mentation des enjeux et impacts des changements climatiques au niveau national et local Le RCampD a ainsi soutenu en 2015 la reacutealisation drsquoeacutetudes de cas sur les reacutealiteacutes veacutecues sur le terrain agrave Djibouti au Beacutenin et au Maroc afin drsquoillustrer les impacts des changements climatiques en Afrique et drsquoenrichir son plaidoyer dans les enceintes internationales notamment en vue de la COP21 agrave Paris

2Chiffres cleacutes du climat France et Monde Editions 2015 Repegraveres Service de lrsquoobservation et des statistiques

lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et durablement

lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

Pour savoir ce

que disent les

scientifiques sur

les changements

climatiques

consultez le site

leclimatchangefr

+15degC drsquoaugmentation de la tempeacuterature minimale extrecircme sur la deacutecennie 1991-2000 en moyenne par rapport agrave la

peacuteriode 1960-1990

+13degC entre 1960 et 2010

+1degC entre 1960 et 2000

un climat bouleverseacute

Des tempeacuteratures agrave la hausse

Le dernier rapport du GIEC indique que lrsquoAfrique srsquoest deacutejagrave reacutechauffeacutee drsquoau moins 05degC au cours des 50 agrave 100 derniegraveres anneacutees

En ce qui concerne les projections selon le sceacutenario le plus optimiste du dernier rapport du GIEC lrsquoaugmen-tation de la tempeacuterature deacutepassera les 2degC degraves 2080 et dans le cas drsquoun fort reacutechauffement degraves 2050 pour atteindre entre 3deg et 6degC drsquoici la fin du siegravecle3

monteacutee Du niveau Des oceacuteans

En Afrique subsaharienne on note deacutejagrave les effets de lrsquoeacuteleacutevation du niveau des mers qui se traduit par la salinisation des nappes phreacuteatiques lrsquoeacuterosion des zones cocirctiegravereshellip

Dans un monde agrave +4deg le GIEC estime que le niveau des oceacuteans augmentera plus vite en Afrique que pour la moyenne mondiale et atteindra 80 cm au-dessus des niveaux actuels voire bien plus le long des cocirctes des oceacuteans Indien et Atlantique drsquoici 2100 Le continent devrait connaicirctre un nombre particuliegraverement eacuteleveacute de personnes menaceacutees par les risques drsquoinondations

3 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobilising sources AMCEN UNEP Cli-mat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Sources Djibouti Rapport Meacuteteacuteo 2006

Beacutenin deuxiegraveme com-munication nationale du Beacutenin

Maroc httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

+1degC+13degC

+15degC

7

Les changements projeteacutes de la tempeacuterature annuelle moyenne (degC) en 20802090 par rapport agrave 19801990 au Maroc

dans les villes cocirctiegraveres du Mozambique de Tanzanie du Cameroun drsquoEacutegypte du Seacuteneacutegal et du Maroc

seacutecheresses fortes pluies et variabiliteacute pluviomeacutetrique

Selon le dernier rapport du GIEC il existe un important manque de donneacutees concernant les preacutecipitations an-nuelles en Afrique Les donneacutees disponibles montrent une baisse tregraves probable des preacutecipitations annuelles durant le XXe siegravecle dans la reacutegion Saheacutelienne ainsi qursquoune augmentation sur les reacutegions de lrsquoest et du sud du continent

Mohammed Saddik de lrsquoassociation Homme amp Environnement Le Maroc reccediloit de moins en moins de preacutecipitations durant la saison pluvieuse de sep-tembre agrave avril Dans la reacutegion Nord-ouest les preacuteci-pitations pendant cette saison ont baisseacute drsquoun tiers entre 1976 et 2006 Les seacutecheresses et inondations sont de plus de plus en plus freacutequentes Combineacutees agrave la surexploitation des nappes phreacuteatiques elles ont

entraicircneacute une baisse quasi-geacuteneacutera-liseacutee et tregraves alarmante des niveaux des nappes qui se traduit deacutejagrave par une importante diminution des cours drsquoeau et une intrusion des eaux marines dans les nappes cocirctiegraveres qui se salinisent

Au Beacutenin comme dans de nom-breux pays africains lrsquoagriculture est extrecircmement deacutependante de la date de deacutemarrage de la saison des pluies dont deacutecoulent les opeacute-rations de preacuteparation des terres et de semis Jusqursquoagrave la fin des anneacutees

1970 le ministegravere de lrsquoagriculture indiquait aux agri-culteurs la peacuteriode pendant laquelle les semences pouvaient ecirctre mises en terre Cependant depuis 1980 les premiegraveres pluies de lrsquoanneacutee arrivent de plus en plus tard ce qui rend tregraves difficile pour les services compeacutetents de recommander des dates de semis aux producteurs Le Beacutenin souffre eacutegalement de plus en plus drsquoinondations deacutevastatrices pendant la saison des pluies En effet les changements climatiques renforcent la deacutegradation et la destruction des forecircts galeries qui constituent une barriegravere naturelle contre les inondations

Agrave Djibouti le climat est naturellement semi-deacuteser-tique Cependant en milieu rural on constate ces derniegraveres deacutecennies une augmentation des situations extrecircmes ougrave aux seacutecheresses prolongeacutees succegravedent des pluies violentes qui nrsquoeacutepargnent ni les villages ni le couvert veacutegeacutetal en raison drsquoune forte eacuterosion des sols Ces crues drsquoeau provoquent lrsquoenvasement des points drsquoeau et la destruction des espaces agricoles et des parcours pastoraux aggravant ainsi la preacutecariteacute des populations En outre la quasi totaliteacute de lrsquoeau utiliseacutee pour des activiteacutes domestiques et agricoles provient des nappes souterraines dont le remplis-sage deacutepend des preacutecipitations et des conditions drsquoinfiltrations devenues probleacutematiques en raison des changements climatiques Cette situation touche plus particuliegraverement les populations les plus vulneacute-rables crsquoest-agrave-dire drsquoune part les habitants des zones peacuteri-urbaines de la capitale ougrave les quartiers sont alimenteacutes agrave tour de rocircle alors que certains secteurs ne sont toujours pas relieacutes au reacuteseau drsquoadduction drsquoeau potable et drsquoautre part les populations drsquoeacutele-veurs nomades et semi-nomades qui doivent modifier leurs trajectoires de transhumance agrave la recherche de nouveaux pacircturages et de points drsquoeau

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

8

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 2: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

PARIS CLIMAT 2015

Cet ouvrage a pu ecirctre conccedilu et publieacute gracircce au soutien du ministegravere franccedilais des Affaires eacutetrangegraveres et du Deacuteveloppement international de la Fondation MAVA de lrsquoADEME de la Fondation Heinrich Boumlll Nigeria de lrsquoOIF ndash IFDD de Germanwatch drsquoHELIO International de la Reacutegion Icircle-de-France et de Claude Bartolone Preacutesident de lrsquoAssembleacutee Nationale franccedilaise

Droits drsquoauteur Reacuteseau Action Climat ENDA Tiers Monde

Reproduction la reproduction de cette publication agrave des fins non commerciales notamment eacuteducatives est permise sans autorisation eacutecrite preacutealable des deacutetenteurs des droits drsquoauteurs agrave la condition que la source soit ducircment citeacutee

Coordination Joseph Yaovi Kogbe (Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement) Marion Richard (Reacuteseau Action Climat-France)

Auteurs (ordre alphabeacutetique) Is Deen Omolere Akambi (EcoBeacutenin) Ali Abdou Bonguere (EDER-Niger) Mouhamadou Farka Maiga (AMADE PELCODE) Abdoul Madjid Moutari (DEMI-E) Hindou Oumarou Ibrahim (AFPAT) Marion Richard (RAC-F) Zenabou Segda (WEP Burkina)

Remerciements aux relecteurs Sandrine Mathy (RAC-F) Alix Mazounie (RAC-F) Jean-Philippe Thomas (ENDA Energie)

Graphisme solennmarrelfr

Disponible aupregraves de Reacuteseau Action Climat-France47 avenue Pasteur ndash 93100 Montreuil ndash FranceInfosrac-forg

La publication est eacutegalement disponible en version eacutelectronique sur les sites suivants wwwclimatdeveloppementorgwwwrac-forgwwwendatiersmondeorg

Creacutedits photo couverture DEMI-E Niger

Associations membres du RCampDAfrique de lrsquoOuest REPAO Algeacuterie Amis de la Saoura Beacutechar Beacutenin CREDEL Eco-Beacutenin OFEDI JVE Beacutenin IDID Burkina Faso AFEP Burkina WEP Burkina Burundi AVOCHACLISD Cameroun ADD ADEID ACAMEE Carreacute Geacuteo Environnement CENAHC Horizon Vert Congo ACDA APEDD Cocircte drsquoIvoire AFHON Cocircte drsquoIvoire JVE Cocircte drsquoIvoire Enviscience Djibouti EVA France ACF Energies 2050 HELIO International RAC-F Rain Drop Guineacutee Carbone Guineacutee Germanwatch Guineacutee Eacutecologie Icircle Maurice DION Maudesco Mali AFAD Amade Pelcode ASIC CTESA GRAT Mali FolkeCenter Reacuteseau MUSONET Mauritanie ANPEC Maroc AHampE AESVT Niger ATPF Demi-E LEAD Niger EDER Niger JVE Niger Reacutepublique Centrafricaine JVE Centrafrique RDC ACDI Horizon Vert RCD JVE RCD OCEAN Planegravete Verte Seacuteneacutegal ADARS CONGAD ENDA Energie Tchad AFPAT LEAD Tchad Togo AFHON Togo ASEDI JVE Togo MVD OPED Togo RJE Tunisie 2C2D

Preacutesentation du reacuteseau climat amp deacuteveloppement

atelier annuel 2015 du rcampd

en bref

4

7

13

5lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

sommaire

31

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous 14

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire 18

Prioriser lrsquoadaptation et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation 21

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique 23

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat 26

Proteacuteger le climat et les droits humains 28

3

Le RCampD a tenu son 9egraveme atelier annuel du 14 au 18 avril 2015 dans les locaux du CIRED (Centre Interna-tional de Recherche en Environnement et Deacutevelop-pement) agrave Paris France en partenariat avec le CAN Afrique de lrsquoOuest et en eacutetroite coopeacuteration avec les associations franccedilaises de solidariteacute internationale membres de Coordination Sud en particulier ACF CARE-France CCFD-Terre Solidaire GERES Oxfam et Secours Catholique ndash Caritas France

Il a rassembleacute plus de 60 participants dont plus de 40 membres du RCampD et une vingtaine de repreacutesentants drsquoassociations franccedilaises de solidariteacute internationale issus de 20 pays europeacuteens et africains Allemagne Beacutenin Burkina Faso Burundi Cameroun Congo-Braz-zaville Cocircte drsquoIvoire Djibouti Ethiopie France Ile Mau-rice Mali Maroc Niger Reacutepublique Centrafricaine Reacutepublique Deacutemocratique du Congo Seacuteneacutegal Suisse Tchad et Togo

Lrsquoatelier a cibleacute les six theacutematiques prioritaires pour la socieacuteteacute civile africaine dans la perspective de la COP21 Il a permis de partager des analyses et expeacuteriences de terrain et de deacutevelopper pour chaque theacutematique un socle de nouvelles connaissances sur les grands enjeux ainsi que sur les questions deacutebattues dans le cadre des neacutegociations climat Lrsquoatelier a eacutegalement eacuteteacute lrsquooccasion de renforcer les capaciteacutes de plaidoyer de communication et drsquoutilisation des reacuteseaux sociaux et drsquoidentifier les prioriteacutes politiques du RCampD agrave lrsquoattention des deacutecideurs en vue de la COP21

atelier annuel 2015 du rcampd

Le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement (RCampD) reacuteunit les ONG francophones travaillant sur un deacuteve-loppement local etou national agrave lrsquoeacutepreuve des changements climatiques Creacuteeacute en 2007 par le

Reacuteseau Action Climat-France (RAC-France) et ENDA Ener-gie au Seacuteneacutegal le RCampD rassemble aujourdrsquohui pregraves de 80 ONG de terrain et de plaidoyer dans 21 pays drsquoAfrique et en France

En srsquoappuyant sur la diversiteacute de ses membres ndash por-teurs de projets sur le terrain ou experts des neacutegocia-tions internationales ndash le RCampD fait la promotion des modes de deacuteveloppement qui tiennent compte des contraintes climatiques et eacutenergeacutetiques Les membres mettent en œuvre des projets innovants et inteacutegreacutes au niveau local ou sensibilisent les populations et deacuteci-deurs nationaux et internationaux agrave la nouvelle donne eacutenergeacutetique et climatique Le RCampD travaille aussi pour renforcer la voix de la socieacuteteacute civile francophone dans les enceintes politiques nationales reacutegionales et internationales via des ateliers de renforcement de capaciteacutes et drsquoeacutechanges et des notes de deacutecryptage et de position communes

Chaque anneacutee le RCampD produit une vision partageacutee assortie de recommandations politiques En 2010 il srsquoest pencheacute sur la prise en compte des enjeux clima-tiques et eacutenergeacutetiques dans les politiques locales de deacuteveloppement en 2011 sur la gouvernance efficace

et eacutequitable des financements climat puis en 2012 sur des recommandations concregravetes pour Rio+20 Depuis 2013 le RCampD a alimenteacute le deacutebat sur les deux grands rendez-vous de lrsquoanneacutee 2015 les Objectifs de Deacuteveloppement Durable et lrsquoaccord mondial sur le climat avec un travail sur lrsquointeacutegration des contraintes climatiques et eacutenergeacutetiques dans les pratiques de deacuteveloppement (2013) puis sur le rocircle cleacute des eacutenergies renouvelables en Afrique pour lutter contre la pauvreteacute et les changements climatiques (2014)

Le RCampD a deacutecideacute de renforcer ce travail en cette anneacutee 2015 deacutecisive pour le climat et pour le deacuteveloppement en traduisant les prioriteacutes de la socieacuteteacute civile africaine en recommandations politiques pour la COP21 Six ambassadeurs du RCampD venus du Tchad du Niger du Burkina du Beacutenin et du Mali ont ainsi eacuteteacute choisis pour repreacutesenter et porter les preacuteoccupations formuleacutees par les associations membres sur six enjeux cleacutes eacutenergies renouvelables et efficaciteacute eacutenergeacutetique adaptation agriculture et seacutecuriteacute alimentaire financements genre et droits humains Ce travail est possible gracircce au sou-tien du ministegravere franccedilais des Affaires eacutetrangegraveres et du Deacuteveloppement international de la Fondation MAVA de lrsquoADEME de la Fondation Heinrich Boumlll Nigeria de lrsquoOIF ndash IFDD de Germanwatch drsquoHELIO International de la Reacutegion Icircle-de-France et de Claude Bartolone Preacutesident de lrsquoAssembleacutee Nationale franccedilaise

Preacutesentation du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement

copy R

eacutesea

u Cl

imat

amp D

eacutevel

oppe

men

t

4

LrsquoAfrique est le continent qui a contribueacute le moins aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre Pourtant crsquoest drsquoores et deacutejagrave la reacutegion la plus impacteacutee par les chan-gements climatiques Les eacuteconomies les eacutecosystegravemes les populations et plus particuliegraverement celles qui sont deacutejagrave fragiliseacutees par la pauvreteacute et la deacutegradation de leur environnement seront tregraves directement et tregraves neacutegativement toucheacutes Les impacts deacutejagrave observeacutes sur la production agricole et lrsquoeacutelevage sur la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communau-teacutes sur la disponibiliteacute en eau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures nrsquoiront qursquoen srsquoaggravant Certaines popula-tions ou pays subiront des dommages irreacuteversibles y compris en termes de vies humaines acculant les populations agrave la migration Sans actions immeacutediates et soutenues agrave plus long terme pour reacuteduire les impacts des changements climatiques les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement du continent africain sera menaceacutee

LrsquoAgence Internationale de lrsquoEnergie indique par ailleurs que pour stabiliser le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC il nous faut laisser sous terre au moins les 23 de nos reacuteserves connues en combustibles fossiles comme le charbon le gaz et le peacutetrole qui sont direc-tement responsables du reacutechauffement climatique1 Eacutetant donneacutee la dureacutee de vie des infrastructures cela implique notamment qursquoil est indispensable que toute nouvelle infrastructure de production drsquoeacutenergie doive fonctionner agrave partir de renouvelables et non de char-bon de gaz ou de peacutetrole Cela signifie que des conti-nents entiers dont lrsquoAfrique doivent non seulement srsquoadapter aux impacts des changements climatiques mais eacutegalement choisir un modegravele eacutenergeacutetique baseacute sur les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique et non sur les eacutenergies fossiles

Cependant cette crise est aussi une opportuniteacute pour repenser les politiques de deacuteveloppement de maniegravere agrave ce qursquoelles soient plus justes et accessibles agrave tous Ainsi 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoa pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute notamment en zone rurale Les eacutenergies fossiles ne sont pas en capaciteacute de reacutepondre agrave la neacutecessiteacute de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute et lrsquoeacutenergie le peacutetrole le charbon et le gaz sont trop chers et difficiles agrave importer et agrave transporter vers les zones rurales et enclaveacutees le charbon en particulier agrave des impacts sanitaires graves Heureusement la donne est en train de changer les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique vont permettre aux pays Africains drsquoatteindre lrsquoobjectif drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour

tous ndash y compris des plus vulneacuterables et isoleacutes Les solutions sont lagrave elles assainissent lrsquoair et creacuteent des emplois locaux elles contribuent au mieux-ecirctre de la communauteacute et agrave la lutte contre les changements climatiques

Lrsquoadaptation du modegravele de deacuteveloppement aux impacts des changements climatiques est eacutegalement une opportuniteacute pour repenser les politiques et inves-tissements en matiegravere drsquoagriculture drsquoinfrastructures drsquohabitat ou encore de gestion de lrsquoeau afin qursquoils soient plus adapteacutes aux besoins des populations et notamment des plus vulneacuterables ndash en particulier les femmes qui souffrent le plus des impacts des chan-gements climatiques et sont eacutegalement porteuses de solutions Crsquoest enfin une opportuniteacute pour favoriser le respect des droits humains trop souvent menaceacutes agrave la fois par les impacts des changements climatiques mais eacutegalement par des politiques et projets meneacutes au nom du deacuteveloppement ou du climat

Les prochaines neacutegociations internationales sur le climat (COP21) se tiendront du 30 novembre au 11 deacutecembre 2015 agrave Paris en France Le sommet de Paris sera deacuteterminant car il doit aboutir agrave un accord inter-national sur le climat qui preacuteservera des chances de contenir le reacutechauffement global en deccedilagrave de 2degC drsquoici 2100 Pour le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement ce sommet doit reacutepondre au double deacutefi de la lutte contre les changements climatiques et contre la pauvreteacute dans les pays les plus affecteacutes par ces derniers Le RCampD appelle agrave un accord qui

bullthinspProtegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

bullthinspFinance la lutte contre les changements climatiques dans les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables

bullthinspInvestit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables pour tous

bullthinspPermet aux populations les plus vulneacuterables de faire face aux impacts des changements climatiques

bullthinspPreacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique

1AIE World Energy Outlook 2012

En bREf

5

copy Hindou O Ibrahim

6

Tanger

RABATCasablanca

El Jadida

Safi

AgadirOuarzazate

Marrakesh

MohammediaMeknes

Kenitra

Teacutetouan

Oujda

Bouarfa

Ouarzazate

Marrakesh

Oujda

BouarfaMAROC

Fes

Tarfaya ALGERIA

SAHARA

BENIN

TOGO

BURKINA FASO

GHANA

NIGERIA

Natitingou

BanikoaraKandi

Malanville

DjougouNdali

Parakou

Tchaourou

Savalou

Abomey

Bohicon

OuidahLOMEacuteCotonou

SakeacuteteacutePORTO-NOVO

DJIBOUTI

SOMALIE

EacuteTHIOPIE

Obock

Tadjoura

DorraBalho

RandaGacirclacircfi

Yokobi

Holhol

Ali SabicirchDikhil

As Ela

DJIBOUTI CITY

lsquoArtaLoyada

Malgreacute sa faible contribution aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre (33 des eacutemissions mondiales lieacutees agrave lrsquoeacutenergie en 2012) lrsquoAfrique repreacutesente la reacutegion la plus affecteacutee par les changements climatiques et le restera probablement agrave lrsquoavenir Une analyse des donneacutees climatiques depuis 1950 montre une augmentation en intensiteacute et en freacutequence des eacutevegravenements climatiques extrecircmes2 ndash seacutecheresses fortes pluies engendrant des inondationshellip La seacutecuriteacute alimentaire la santeacute et les moyens de subsistance des africains sont deacutejagrave toucheacutes par les changements climatiques Alors que lrsquoon se dirige vers un reacutechauffe-ment global de plus de 2deg le cinquiegraveme rapport du GIEC rappelle que la tempeacuterature devrait augmenter plus vite en Afrique notamment dans les reacutegions arides ce qui aura un impact encore plus grave sur la production agricole la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine et la disponibiliteacute de lrsquoeau

Face agrave une telle situation le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement encourage le deacuteveloppement de la docu-mentation des enjeux et impacts des changements climatiques au niveau national et local Le RCampD a ainsi soutenu en 2015 la reacutealisation drsquoeacutetudes de cas sur les reacutealiteacutes veacutecues sur le terrain agrave Djibouti au Beacutenin et au Maroc afin drsquoillustrer les impacts des changements climatiques en Afrique et drsquoenrichir son plaidoyer dans les enceintes internationales notamment en vue de la COP21 agrave Paris

2Chiffres cleacutes du climat France et Monde Editions 2015 Repegraveres Service de lrsquoobservation et des statistiques

lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et durablement

lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

Pour savoir ce

que disent les

scientifiques sur

les changements

climatiques

consultez le site

leclimatchangefr

+15degC drsquoaugmentation de la tempeacuterature minimale extrecircme sur la deacutecennie 1991-2000 en moyenne par rapport agrave la

peacuteriode 1960-1990

+13degC entre 1960 et 2010

+1degC entre 1960 et 2000

un climat bouleverseacute

Des tempeacuteratures agrave la hausse

Le dernier rapport du GIEC indique que lrsquoAfrique srsquoest deacutejagrave reacutechauffeacutee drsquoau moins 05degC au cours des 50 agrave 100 derniegraveres anneacutees

En ce qui concerne les projections selon le sceacutenario le plus optimiste du dernier rapport du GIEC lrsquoaugmen-tation de la tempeacuterature deacutepassera les 2degC degraves 2080 et dans le cas drsquoun fort reacutechauffement degraves 2050 pour atteindre entre 3deg et 6degC drsquoici la fin du siegravecle3

monteacutee Du niveau Des oceacuteans

En Afrique subsaharienne on note deacutejagrave les effets de lrsquoeacuteleacutevation du niveau des mers qui se traduit par la salinisation des nappes phreacuteatiques lrsquoeacuterosion des zones cocirctiegravereshellip

Dans un monde agrave +4deg le GIEC estime que le niveau des oceacuteans augmentera plus vite en Afrique que pour la moyenne mondiale et atteindra 80 cm au-dessus des niveaux actuels voire bien plus le long des cocirctes des oceacuteans Indien et Atlantique drsquoici 2100 Le continent devrait connaicirctre un nombre particuliegraverement eacuteleveacute de personnes menaceacutees par les risques drsquoinondations

3 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobilising sources AMCEN UNEP Cli-mat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Sources Djibouti Rapport Meacuteteacuteo 2006

Beacutenin deuxiegraveme com-munication nationale du Beacutenin

Maroc httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

+1degC+13degC

+15degC

7

Les changements projeteacutes de la tempeacuterature annuelle moyenne (degC) en 20802090 par rapport agrave 19801990 au Maroc

dans les villes cocirctiegraveres du Mozambique de Tanzanie du Cameroun drsquoEacutegypte du Seacuteneacutegal et du Maroc

seacutecheresses fortes pluies et variabiliteacute pluviomeacutetrique

Selon le dernier rapport du GIEC il existe un important manque de donneacutees concernant les preacutecipitations an-nuelles en Afrique Les donneacutees disponibles montrent une baisse tregraves probable des preacutecipitations annuelles durant le XXe siegravecle dans la reacutegion Saheacutelienne ainsi qursquoune augmentation sur les reacutegions de lrsquoest et du sud du continent

Mohammed Saddik de lrsquoassociation Homme amp Environnement Le Maroc reccediloit de moins en moins de preacutecipitations durant la saison pluvieuse de sep-tembre agrave avril Dans la reacutegion Nord-ouest les preacuteci-pitations pendant cette saison ont baisseacute drsquoun tiers entre 1976 et 2006 Les seacutecheresses et inondations sont de plus de plus en plus freacutequentes Combineacutees agrave la surexploitation des nappes phreacuteatiques elles ont

entraicircneacute une baisse quasi-geacuteneacutera-liseacutee et tregraves alarmante des niveaux des nappes qui se traduit deacutejagrave par une importante diminution des cours drsquoeau et une intrusion des eaux marines dans les nappes cocirctiegraveres qui se salinisent

Au Beacutenin comme dans de nom-breux pays africains lrsquoagriculture est extrecircmement deacutependante de la date de deacutemarrage de la saison des pluies dont deacutecoulent les opeacute-rations de preacuteparation des terres et de semis Jusqursquoagrave la fin des anneacutees

1970 le ministegravere de lrsquoagriculture indiquait aux agri-culteurs la peacuteriode pendant laquelle les semences pouvaient ecirctre mises en terre Cependant depuis 1980 les premiegraveres pluies de lrsquoanneacutee arrivent de plus en plus tard ce qui rend tregraves difficile pour les services compeacutetents de recommander des dates de semis aux producteurs Le Beacutenin souffre eacutegalement de plus en plus drsquoinondations deacutevastatrices pendant la saison des pluies En effet les changements climatiques renforcent la deacutegradation et la destruction des forecircts galeries qui constituent une barriegravere naturelle contre les inondations

Agrave Djibouti le climat est naturellement semi-deacuteser-tique Cependant en milieu rural on constate ces derniegraveres deacutecennies une augmentation des situations extrecircmes ougrave aux seacutecheresses prolongeacutees succegravedent des pluies violentes qui nrsquoeacutepargnent ni les villages ni le couvert veacutegeacutetal en raison drsquoune forte eacuterosion des sols Ces crues drsquoeau provoquent lrsquoenvasement des points drsquoeau et la destruction des espaces agricoles et des parcours pastoraux aggravant ainsi la preacutecariteacute des populations En outre la quasi totaliteacute de lrsquoeau utiliseacutee pour des activiteacutes domestiques et agricoles provient des nappes souterraines dont le remplis-sage deacutepend des preacutecipitations et des conditions drsquoinfiltrations devenues probleacutematiques en raison des changements climatiques Cette situation touche plus particuliegraverement les populations les plus vulneacute-rables crsquoest-agrave-dire drsquoune part les habitants des zones peacuteri-urbaines de la capitale ougrave les quartiers sont alimenteacutes agrave tour de rocircle alors que certains secteurs ne sont toujours pas relieacutes au reacuteseau drsquoadduction drsquoeau potable et drsquoautre part les populations drsquoeacutele-veurs nomades et semi-nomades qui doivent modifier leurs trajectoires de transhumance agrave la recherche de nouveaux pacircturages et de points drsquoeau

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

8

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 3: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Preacutesentation du reacuteseau climat amp deacuteveloppement

atelier annuel 2015 du rcampd

en bref

4

7

13

5lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

sommaire

31

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous 14

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire 18

Prioriser lrsquoadaptation et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation 21

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique 23

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat 26

Proteacuteger le climat et les droits humains 28

3

Le RCampD a tenu son 9egraveme atelier annuel du 14 au 18 avril 2015 dans les locaux du CIRED (Centre Interna-tional de Recherche en Environnement et Deacutevelop-pement) agrave Paris France en partenariat avec le CAN Afrique de lrsquoOuest et en eacutetroite coopeacuteration avec les associations franccedilaises de solidariteacute internationale membres de Coordination Sud en particulier ACF CARE-France CCFD-Terre Solidaire GERES Oxfam et Secours Catholique ndash Caritas France

Il a rassembleacute plus de 60 participants dont plus de 40 membres du RCampD et une vingtaine de repreacutesentants drsquoassociations franccedilaises de solidariteacute internationale issus de 20 pays europeacuteens et africains Allemagne Beacutenin Burkina Faso Burundi Cameroun Congo-Braz-zaville Cocircte drsquoIvoire Djibouti Ethiopie France Ile Mau-rice Mali Maroc Niger Reacutepublique Centrafricaine Reacutepublique Deacutemocratique du Congo Seacuteneacutegal Suisse Tchad et Togo

Lrsquoatelier a cibleacute les six theacutematiques prioritaires pour la socieacuteteacute civile africaine dans la perspective de la COP21 Il a permis de partager des analyses et expeacuteriences de terrain et de deacutevelopper pour chaque theacutematique un socle de nouvelles connaissances sur les grands enjeux ainsi que sur les questions deacutebattues dans le cadre des neacutegociations climat Lrsquoatelier a eacutegalement eacuteteacute lrsquooccasion de renforcer les capaciteacutes de plaidoyer de communication et drsquoutilisation des reacuteseaux sociaux et drsquoidentifier les prioriteacutes politiques du RCampD agrave lrsquoattention des deacutecideurs en vue de la COP21

atelier annuel 2015 du rcampd

Le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement (RCampD) reacuteunit les ONG francophones travaillant sur un deacuteve-loppement local etou national agrave lrsquoeacutepreuve des changements climatiques Creacuteeacute en 2007 par le

Reacuteseau Action Climat-France (RAC-France) et ENDA Ener-gie au Seacuteneacutegal le RCampD rassemble aujourdrsquohui pregraves de 80 ONG de terrain et de plaidoyer dans 21 pays drsquoAfrique et en France

En srsquoappuyant sur la diversiteacute de ses membres ndash por-teurs de projets sur le terrain ou experts des neacutegocia-tions internationales ndash le RCampD fait la promotion des modes de deacuteveloppement qui tiennent compte des contraintes climatiques et eacutenergeacutetiques Les membres mettent en œuvre des projets innovants et inteacutegreacutes au niveau local ou sensibilisent les populations et deacuteci-deurs nationaux et internationaux agrave la nouvelle donne eacutenergeacutetique et climatique Le RCampD travaille aussi pour renforcer la voix de la socieacuteteacute civile francophone dans les enceintes politiques nationales reacutegionales et internationales via des ateliers de renforcement de capaciteacutes et drsquoeacutechanges et des notes de deacutecryptage et de position communes

Chaque anneacutee le RCampD produit une vision partageacutee assortie de recommandations politiques En 2010 il srsquoest pencheacute sur la prise en compte des enjeux clima-tiques et eacutenergeacutetiques dans les politiques locales de deacuteveloppement en 2011 sur la gouvernance efficace

et eacutequitable des financements climat puis en 2012 sur des recommandations concregravetes pour Rio+20 Depuis 2013 le RCampD a alimenteacute le deacutebat sur les deux grands rendez-vous de lrsquoanneacutee 2015 les Objectifs de Deacuteveloppement Durable et lrsquoaccord mondial sur le climat avec un travail sur lrsquointeacutegration des contraintes climatiques et eacutenergeacutetiques dans les pratiques de deacuteveloppement (2013) puis sur le rocircle cleacute des eacutenergies renouvelables en Afrique pour lutter contre la pauvreteacute et les changements climatiques (2014)

Le RCampD a deacutecideacute de renforcer ce travail en cette anneacutee 2015 deacutecisive pour le climat et pour le deacuteveloppement en traduisant les prioriteacutes de la socieacuteteacute civile africaine en recommandations politiques pour la COP21 Six ambassadeurs du RCampD venus du Tchad du Niger du Burkina du Beacutenin et du Mali ont ainsi eacuteteacute choisis pour repreacutesenter et porter les preacuteoccupations formuleacutees par les associations membres sur six enjeux cleacutes eacutenergies renouvelables et efficaciteacute eacutenergeacutetique adaptation agriculture et seacutecuriteacute alimentaire financements genre et droits humains Ce travail est possible gracircce au sou-tien du ministegravere franccedilais des Affaires eacutetrangegraveres et du Deacuteveloppement international de la Fondation MAVA de lrsquoADEME de la Fondation Heinrich Boumlll Nigeria de lrsquoOIF ndash IFDD de Germanwatch drsquoHELIO International de la Reacutegion Icircle-de-France et de Claude Bartolone Preacutesident de lrsquoAssembleacutee Nationale franccedilaise

Preacutesentation du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement

copy R

eacutesea

u Cl

imat

amp D

eacutevel

oppe

men

t

4

LrsquoAfrique est le continent qui a contribueacute le moins aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre Pourtant crsquoest drsquoores et deacutejagrave la reacutegion la plus impacteacutee par les chan-gements climatiques Les eacuteconomies les eacutecosystegravemes les populations et plus particuliegraverement celles qui sont deacutejagrave fragiliseacutees par la pauvreteacute et la deacutegradation de leur environnement seront tregraves directement et tregraves neacutegativement toucheacutes Les impacts deacutejagrave observeacutes sur la production agricole et lrsquoeacutelevage sur la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communau-teacutes sur la disponibiliteacute en eau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures nrsquoiront qursquoen srsquoaggravant Certaines popula-tions ou pays subiront des dommages irreacuteversibles y compris en termes de vies humaines acculant les populations agrave la migration Sans actions immeacutediates et soutenues agrave plus long terme pour reacuteduire les impacts des changements climatiques les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement du continent africain sera menaceacutee

LrsquoAgence Internationale de lrsquoEnergie indique par ailleurs que pour stabiliser le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC il nous faut laisser sous terre au moins les 23 de nos reacuteserves connues en combustibles fossiles comme le charbon le gaz et le peacutetrole qui sont direc-tement responsables du reacutechauffement climatique1 Eacutetant donneacutee la dureacutee de vie des infrastructures cela implique notamment qursquoil est indispensable que toute nouvelle infrastructure de production drsquoeacutenergie doive fonctionner agrave partir de renouvelables et non de char-bon de gaz ou de peacutetrole Cela signifie que des conti-nents entiers dont lrsquoAfrique doivent non seulement srsquoadapter aux impacts des changements climatiques mais eacutegalement choisir un modegravele eacutenergeacutetique baseacute sur les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique et non sur les eacutenergies fossiles

Cependant cette crise est aussi une opportuniteacute pour repenser les politiques de deacuteveloppement de maniegravere agrave ce qursquoelles soient plus justes et accessibles agrave tous Ainsi 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoa pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute notamment en zone rurale Les eacutenergies fossiles ne sont pas en capaciteacute de reacutepondre agrave la neacutecessiteacute de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute et lrsquoeacutenergie le peacutetrole le charbon et le gaz sont trop chers et difficiles agrave importer et agrave transporter vers les zones rurales et enclaveacutees le charbon en particulier agrave des impacts sanitaires graves Heureusement la donne est en train de changer les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique vont permettre aux pays Africains drsquoatteindre lrsquoobjectif drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour

tous ndash y compris des plus vulneacuterables et isoleacutes Les solutions sont lagrave elles assainissent lrsquoair et creacuteent des emplois locaux elles contribuent au mieux-ecirctre de la communauteacute et agrave la lutte contre les changements climatiques

Lrsquoadaptation du modegravele de deacuteveloppement aux impacts des changements climatiques est eacutegalement une opportuniteacute pour repenser les politiques et inves-tissements en matiegravere drsquoagriculture drsquoinfrastructures drsquohabitat ou encore de gestion de lrsquoeau afin qursquoils soient plus adapteacutes aux besoins des populations et notamment des plus vulneacuterables ndash en particulier les femmes qui souffrent le plus des impacts des chan-gements climatiques et sont eacutegalement porteuses de solutions Crsquoest enfin une opportuniteacute pour favoriser le respect des droits humains trop souvent menaceacutes agrave la fois par les impacts des changements climatiques mais eacutegalement par des politiques et projets meneacutes au nom du deacuteveloppement ou du climat

Les prochaines neacutegociations internationales sur le climat (COP21) se tiendront du 30 novembre au 11 deacutecembre 2015 agrave Paris en France Le sommet de Paris sera deacuteterminant car il doit aboutir agrave un accord inter-national sur le climat qui preacuteservera des chances de contenir le reacutechauffement global en deccedilagrave de 2degC drsquoici 2100 Pour le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement ce sommet doit reacutepondre au double deacutefi de la lutte contre les changements climatiques et contre la pauvreteacute dans les pays les plus affecteacutes par ces derniers Le RCampD appelle agrave un accord qui

bullthinspProtegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

bullthinspFinance la lutte contre les changements climatiques dans les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables

bullthinspInvestit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables pour tous

bullthinspPermet aux populations les plus vulneacuterables de faire face aux impacts des changements climatiques

bullthinspPreacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique

1AIE World Energy Outlook 2012

En bREf

5

copy Hindou O Ibrahim

6

Tanger

RABATCasablanca

El Jadida

Safi

AgadirOuarzazate

Marrakesh

MohammediaMeknes

Kenitra

Teacutetouan

Oujda

Bouarfa

Ouarzazate

Marrakesh

Oujda

BouarfaMAROC

Fes

Tarfaya ALGERIA

SAHARA

BENIN

TOGO

BURKINA FASO

GHANA

NIGERIA

Natitingou

BanikoaraKandi

Malanville

DjougouNdali

Parakou

Tchaourou

Savalou

Abomey

Bohicon

OuidahLOMEacuteCotonou

SakeacuteteacutePORTO-NOVO

DJIBOUTI

SOMALIE

EacuteTHIOPIE

Obock

Tadjoura

DorraBalho

RandaGacirclacircfi

Yokobi

Holhol

Ali SabicirchDikhil

As Ela

DJIBOUTI CITY

lsquoArtaLoyada

Malgreacute sa faible contribution aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre (33 des eacutemissions mondiales lieacutees agrave lrsquoeacutenergie en 2012) lrsquoAfrique repreacutesente la reacutegion la plus affecteacutee par les changements climatiques et le restera probablement agrave lrsquoavenir Une analyse des donneacutees climatiques depuis 1950 montre une augmentation en intensiteacute et en freacutequence des eacutevegravenements climatiques extrecircmes2 ndash seacutecheresses fortes pluies engendrant des inondationshellip La seacutecuriteacute alimentaire la santeacute et les moyens de subsistance des africains sont deacutejagrave toucheacutes par les changements climatiques Alors que lrsquoon se dirige vers un reacutechauffe-ment global de plus de 2deg le cinquiegraveme rapport du GIEC rappelle que la tempeacuterature devrait augmenter plus vite en Afrique notamment dans les reacutegions arides ce qui aura un impact encore plus grave sur la production agricole la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine et la disponibiliteacute de lrsquoeau

Face agrave une telle situation le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement encourage le deacuteveloppement de la docu-mentation des enjeux et impacts des changements climatiques au niveau national et local Le RCampD a ainsi soutenu en 2015 la reacutealisation drsquoeacutetudes de cas sur les reacutealiteacutes veacutecues sur le terrain agrave Djibouti au Beacutenin et au Maroc afin drsquoillustrer les impacts des changements climatiques en Afrique et drsquoenrichir son plaidoyer dans les enceintes internationales notamment en vue de la COP21 agrave Paris

2Chiffres cleacutes du climat France et Monde Editions 2015 Repegraveres Service de lrsquoobservation et des statistiques

lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et durablement

lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

Pour savoir ce

que disent les

scientifiques sur

les changements

climatiques

consultez le site

leclimatchangefr

+15degC drsquoaugmentation de la tempeacuterature minimale extrecircme sur la deacutecennie 1991-2000 en moyenne par rapport agrave la

peacuteriode 1960-1990

+13degC entre 1960 et 2010

+1degC entre 1960 et 2000

un climat bouleverseacute

Des tempeacuteratures agrave la hausse

Le dernier rapport du GIEC indique que lrsquoAfrique srsquoest deacutejagrave reacutechauffeacutee drsquoau moins 05degC au cours des 50 agrave 100 derniegraveres anneacutees

En ce qui concerne les projections selon le sceacutenario le plus optimiste du dernier rapport du GIEC lrsquoaugmen-tation de la tempeacuterature deacutepassera les 2degC degraves 2080 et dans le cas drsquoun fort reacutechauffement degraves 2050 pour atteindre entre 3deg et 6degC drsquoici la fin du siegravecle3

monteacutee Du niveau Des oceacuteans

En Afrique subsaharienne on note deacutejagrave les effets de lrsquoeacuteleacutevation du niveau des mers qui se traduit par la salinisation des nappes phreacuteatiques lrsquoeacuterosion des zones cocirctiegravereshellip

Dans un monde agrave +4deg le GIEC estime que le niveau des oceacuteans augmentera plus vite en Afrique que pour la moyenne mondiale et atteindra 80 cm au-dessus des niveaux actuels voire bien plus le long des cocirctes des oceacuteans Indien et Atlantique drsquoici 2100 Le continent devrait connaicirctre un nombre particuliegraverement eacuteleveacute de personnes menaceacutees par les risques drsquoinondations

3 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobilising sources AMCEN UNEP Cli-mat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Sources Djibouti Rapport Meacuteteacuteo 2006

Beacutenin deuxiegraveme com-munication nationale du Beacutenin

Maroc httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

+1degC+13degC

+15degC

7

Les changements projeteacutes de la tempeacuterature annuelle moyenne (degC) en 20802090 par rapport agrave 19801990 au Maroc

dans les villes cocirctiegraveres du Mozambique de Tanzanie du Cameroun drsquoEacutegypte du Seacuteneacutegal et du Maroc

seacutecheresses fortes pluies et variabiliteacute pluviomeacutetrique

Selon le dernier rapport du GIEC il existe un important manque de donneacutees concernant les preacutecipitations an-nuelles en Afrique Les donneacutees disponibles montrent une baisse tregraves probable des preacutecipitations annuelles durant le XXe siegravecle dans la reacutegion Saheacutelienne ainsi qursquoune augmentation sur les reacutegions de lrsquoest et du sud du continent

Mohammed Saddik de lrsquoassociation Homme amp Environnement Le Maroc reccediloit de moins en moins de preacutecipitations durant la saison pluvieuse de sep-tembre agrave avril Dans la reacutegion Nord-ouest les preacuteci-pitations pendant cette saison ont baisseacute drsquoun tiers entre 1976 et 2006 Les seacutecheresses et inondations sont de plus de plus en plus freacutequentes Combineacutees agrave la surexploitation des nappes phreacuteatiques elles ont

entraicircneacute une baisse quasi-geacuteneacutera-liseacutee et tregraves alarmante des niveaux des nappes qui se traduit deacutejagrave par une importante diminution des cours drsquoeau et une intrusion des eaux marines dans les nappes cocirctiegraveres qui se salinisent

Au Beacutenin comme dans de nom-breux pays africains lrsquoagriculture est extrecircmement deacutependante de la date de deacutemarrage de la saison des pluies dont deacutecoulent les opeacute-rations de preacuteparation des terres et de semis Jusqursquoagrave la fin des anneacutees

1970 le ministegravere de lrsquoagriculture indiquait aux agri-culteurs la peacuteriode pendant laquelle les semences pouvaient ecirctre mises en terre Cependant depuis 1980 les premiegraveres pluies de lrsquoanneacutee arrivent de plus en plus tard ce qui rend tregraves difficile pour les services compeacutetents de recommander des dates de semis aux producteurs Le Beacutenin souffre eacutegalement de plus en plus drsquoinondations deacutevastatrices pendant la saison des pluies En effet les changements climatiques renforcent la deacutegradation et la destruction des forecircts galeries qui constituent une barriegravere naturelle contre les inondations

Agrave Djibouti le climat est naturellement semi-deacuteser-tique Cependant en milieu rural on constate ces derniegraveres deacutecennies une augmentation des situations extrecircmes ougrave aux seacutecheresses prolongeacutees succegravedent des pluies violentes qui nrsquoeacutepargnent ni les villages ni le couvert veacutegeacutetal en raison drsquoune forte eacuterosion des sols Ces crues drsquoeau provoquent lrsquoenvasement des points drsquoeau et la destruction des espaces agricoles et des parcours pastoraux aggravant ainsi la preacutecariteacute des populations En outre la quasi totaliteacute de lrsquoeau utiliseacutee pour des activiteacutes domestiques et agricoles provient des nappes souterraines dont le remplis-sage deacutepend des preacutecipitations et des conditions drsquoinfiltrations devenues probleacutematiques en raison des changements climatiques Cette situation touche plus particuliegraverement les populations les plus vulneacute-rables crsquoest-agrave-dire drsquoune part les habitants des zones peacuteri-urbaines de la capitale ougrave les quartiers sont alimenteacutes agrave tour de rocircle alors que certains secteurs ne sont toujours pas relieacutes au reacuteseau drsquoadduction drsquoeau potable et drsquoautre part les populations drsquoeacutele-veurs nomades et semi-nomades qui doivent modifier leurs trajectoires de transhumance agrave la recherche de nouveaux pacircturages et de points drsquoeau

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

8

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 4: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Le RCampD a tenu son 9egraveme atelier annuel du 14 au 18 avril 2015 dans les locaux du CIRED (Centre Interna-tional de Recherche en Environnement et Deacutevelop-pement) agrave Paris France en partenariat avec le CAN Afrique de lrsquoOuest et en eacutetroite coopeacuteration avec les associations franccedilaises de solidariteacute internationale membres de Coordination Sud en particulier ACF CARE-France CCFD-Terre Solidaire GERES Oxfam et Secours Catholique ndash Caritas France

Il a rassembleacute plus de 60 participants dont plus de 40 membres du RCampD et une vingtaine de repreacutesentants drsquoassociations franccedilaises de solidariteacute internationale issus de 20 pays europeacuteens et africains Allemagne Beacutenin Burkina Faso Burundi Cameroun Congo-Braz-zaville Cocircte drsquoIvoire Djibouti Ethiopie France Ile Mau-rice Mali Maroc Niger Reacutepublique Centrafricaine Reacutepublique Deacutemocratique du Congo Seacuteneacutegal Suisse Tchad et Togo

Lrsquoatelier a cibleacute les six theacutematiques prioritaires pour la socieacuteteacute civile africaine dans la perspective de la COP21 Il a permis de partager des analyses et expeacuteriences de terrain et de deacutevelopper pour chaque theacutematique un socle de nouvelles connaissances sur les grands enjeux ainsi que sur les questions deacutebattues dans le cadre des neacutegociations climat Lrsquoatelier a eacutegalement eacuteteacute lrsquooccasion de renforcer les capaciteacutes de plaidoyer de communication et drsquoutilisation des reacuteseaux sociaux et drsquoidentifier les prioriteacutes politiques du RCampD agrave lrsquoattention des deacutecideurs en vue de la COP21

atelier annuel 2015 du rcampd

Le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement (RCampD) reacuteunit les ONG francophones travaillant sur un deacuteve-loppement local etou national agrave lrsquoeacutepreuve des changements climatiques Creacuteeacute en 2007 par le

Reacuteseau Action Climat-France (RAC-France) et ENDA Ener-gie au Seacuteneacutegal le RCampD rassemble aujourdrsquohui pregraves de 80 ONG de terrain et de plaidoyer dans 21 pays drsquoAfrique et en France

En srsquoappuyant sur la diversiteacute de ses membres ndash por-teurs de projets sur le terrain ou experts des neacutegocia-tions internationales ndash le RCampD fait la promotion des modes de deacuteveloppement qui tiennent compte des contraintes climatiques et eacutenergeacutetiques Les membres mettent en œuvre des projets innovants et inteacutegreacutes au niveau local ou sensibilisent les populations et deacuteci-deurs nationaux et internationaux agrave la nouvelle donne eacutenergeacutetique et climatique Le RCampD travaille aussi pour renforcer la voix de la socieacuteteacute civile francophone dans les enceintes politiques nationales reacutegionales et internationales via des ateliers de renforcement de capaciteacutes et drsquoeacutechanges et des notes de deacutecryptage et de position communes

Chaque anneacutee le RCampD produit une vision partageacutee assortie de recommandations politiques En 2010 il srsquoest pencheacute sur la prise en compte des enjeux clima-tiques et eacutenergeacutetiques dans les politiques locales de deacuteveloppement en 2011 sur la gouvernance efficace

et eacutequitable des financements climat puis en 2012 sur des recommandations concregravetes pour Rio+20 Depuis 2013 le RCampD a alimenteacute le deacutebat sur les deux grands rendez-vous de lrsquoanneacutee 2015 les Objectifs de Deacuteveloppement Durable et lrsquoaccord mondial sur le climat avec un travail sur lrsquointeacutegration des contraintes climatiques et eacutenergeacutetiques dans les pratiques de deacuteveloppement (2013) puis sur le rocircle cleacute des eacutenergies renouvelables en Afrique pour lutter contre la pauvreteacute et les changements climatiques (2014)

Le RCampD a deacutecideacute de renforcer ce travail en cette anneacutee 2015 deacutecisive pour le climat et pour le deacuteveloppement en traduisant les prioriteacutes de la socieacuteteacute civile africaine en recommandations politiques pour la COP21 Six ambassadeurs du RCampD venus du Tchad du Niger du Burkina du Beacutenin et du Mali ont ainsi eacuteteacute choisis pour repreacutesenter et porter les preacuteoccupations formuleacutees par les associations membres sur six enjeux cleacutes eacutenergies renouvelables et efficaciteacute eacutenergeacutetique adaptation agriculture et seacutecuriteacute alimentaire financements genre et droits humains Ce travail est possible gracircce au sou-tien du ministegravere franccedilais des Affaires eacutetrangegraveres et du Deacuteveloppement international de la Fondation MAVA de lrsquoADEME de la Fondation Heinrich Boumlll Nigeria de lrsquoOIF ndash IFDD de Germanwatch drsquoHELIO International de la Reacutegion Icircle-de-France et de Claude Bartolone Preacutesident de lrsquoAssembleacutee Nationale franccedilaise

Preacutesentation du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement

copy R

eacutesea

u Cl

imat

amp D

eacutevel

oppe

men

t

4

LrsquoAfrique est le continent qui a contribueacute le moins aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre Pourtant crsquoest drsquoores et deacutejagrave la reacutegion la plus impacteacutee par les chan-gements climatiques Les eacuteconomies les eacutecosystegravemes les populations et plus particuliegraverement celles qui sont deacutejagrave fragiliseacutees par la pauvreteacute et la deacutegradation de leur environnement seront tregraves directement et tregraves neacutegativement toucheacutes Les impacts deacutejagrave observeacutes sur la production agricole et lrsquoeacutelevage sur la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communau-teacutes sur la disponibiliteacute en eau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures nrsquoiront qursquoen srsquoaggravant Certaines popula-tions ou pays subiront des dommages irreacuteversibles y compris en termes de vies humaines acculant les populations agrave la migration Sans actions immeacutediates et soutenues agrave plus long terme pour reacuteduire les impacts des changements climatiques les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement du continent africain sera menaceacutee

LrsquoAgence Internationale de lrsquoEnergie indique par ailleurs que pour stabiliser le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC il nous faut laisser sous terre au moins les 23 de nos reacuteserves connues en combustibles fossiles comme le charbon le gaz et le peacutetrole qui sont direc-tement responsables du reacutechauffement climatique1 Eacutetant donneacutee la dureacutee de vie des infrastructures cela implique notamment qursquoil est indispensable que toute nouvelle infrastructure de production drsquoeacutenergie doive fonctionner agrave partir de renouvelables et non de char-bon de gaz ou de peacutetrole Cela signifie que des conti-nents entiers dont lrsquoAfrique doivent non seulement srsquoadapter aux impacts des changements climatiques mais eacutegalement choisir un modegravele eacutenergeacutetique baseacute sur les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique et non sur les eacutenergies fossiles

Cependant cette crise est aussi une opportuniteacute pour repenser les politiques de deacuteveloppement de maniegravere agrave ce qursquoelles soient plus justes et accessibles agrave tous Ainsi 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoa pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute notamment en zone rurale Les eacutenergies fossiles ne sont pas en capaciteacute de reacutepondre agrave la neacutecessiteacute de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute et lrsquoeacutenergie le peacutetrole le charbon et le gaz sont trop chers et difficiles agrave importer et agrave transporter vers les zones rurales et enclaveacutees le charbon en particulier agrave des impacts sanitaires graves Heureusement la donne est en train de changer les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique vont permettre aux pays Africains drsquoatteindre lrsquoobjectif drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour

tous ndash y compris des plus vulneacuterables et isoleacutes Les solutions sont lagrave elles assainissent lrsquoair et creacuteent des emplois locaux elles contribuent au mieux-ecirctre de la communauteacute et agrave la lutte contre les changements climatiques

Lrsquoadaptation du modegravele de deacuteveloppement aux impacts des changements climatiques est eacutegalement une opportuniteacute pour repenser les politiques et inves-tissements en matiegravere drsquoagriculture drsquoinfrastructures drsquohabitat ou encore de gestion de lrsquoeau afin qursquoils soient plus adapteacutes aux besoins des populations et notamment des plus vulneacuterables ndash en particulier les femmes qui souffrent le plus des impacts des chan-gements climatiques et sont eacutegalement porteuses de solutions Crsquoest enfin une opportuniteacute pour favoriser le respect des droits humains trop souvent menaceacutes agrave la fois par les impacts des changements climatiques mais eacutegalement par des politiques et projets meneacutes au nom du deacuteveloppement ou du climat

Les prochaines neacutegociations internationales sur le climat (COP21) se tiendront du 30 novembre au 11 deacutecembre 2015 agrave Paris en France Le sommet de Paris sera deacuteterminant car il doit aboutir agrave un accord inter-national sur le climat qui preacuteservera des chances de contenir le reacutechauffement global en deccedilagrave de 2degC drsquoici 2100 Pour le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement ce sommet doit reacutepondre au double deacutefi de la lutte contre les changements climatiques et contre la pauvreteacute dans les pays les plus affecteacutes par ces derniers Le RCampD appelle agrave un accord qui

bullthinspProtegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

bullthinspFinance la lutte contre les changements climatiques dans les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables

bullthinspInvestit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables pour tous

bullthinspPermet aux populations les plus vulneacuterables de faire face aux impacts des changements climatiques

bullthinspPreacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique

1AIE World Energy Outlook 2012

En bREf

5

copy Hindou O Ibrahim

6

Tanger

RABATCasablanca

El Jadida

Safi

AgadirOuarzazate

Marrakesh

MohammediaMeknes

Kenitra

Teacutetouan

Oujda

Bouarfa

Ouarzazate

Marrakesh

Oujda

BouarfaMAROC

Fes

Tarfaya ALGERIA

SAHARA

BENIN

TOGO

BURKINA FASO

GHANA

NIGERIA

Natitingou

BanikoaraKandi

Malanville

DjougouNdali

Parakou

Tchaourou

Savalou

Abomey

Bohicon

OuidahLOMEacuteCotonou

SakeacuteteacutePORTO-NOVO

DJIBOUTI

SOMALIE

EacuteTHIOPIE

Obock

Tadjoura

DorraBalho

RandaGacirclacircfi

Yokobi

Holhol

Ali SabicirchDikhil

As Ela

DJIBOUTI CITY

lsquoArtaLoyada

Malgreacute sa faible contribution aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre (33 des eacutemissions mondiales lieacutees agrave lrsquoeacutenergie en 2012) lrsquoAfrique repreacutesente la reacutegion la plus affecteacutee par les changements climatiques et le restera probablement agrave lrsquoavenir Une analyse des donneacutees climatiques depuis 1950 montre une augmentation en intensiteacute et en freacutequence des eacutevegravenements climatiques extrecircmes2 ndash seacutecheresses fortes pluies engendrant des inondationshellip La seacutecuriteacute alimentaire la santeacute et les moyens de subsistance des africains sont deacutejagrave toucheacutes par les changements climatiques Alors que lrsquoon se dirige vers un reacutechauffe-ment global de plus de 2deg le cinquiegraveme rapport du GIEC rappelle que la tempeacuterature devrait augmenter plus vite en Afrique notamment dans les reacutegions arides ce qui aura un impact encore plus grave sur la production agricole la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine et la disponibiliteacute de lrsquoeau

Face agrave une telle situation le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement encourage le deacuteveloppement de la docu-mentation des enjeux et impacts des changements climatiques au niveau national et local Le RCampD a ainsi soutenu en 2015 la reacutealisation drsquoeacutetudes de cas sur les reacutealiteacutes veacutecues sur le terrain agrave Djibouti au Beacutenin et au Maroc afin drsquoillustrer les impacts des changements climatiques en Afrique et drsquoenrichir son plaidoyer dans les enceintes internationales notamment en vue de la COP21 agrave Paris

2Chiffres cleacutes du climat France et Monde Editions 2015 Repegraveres Service de lrsquoobservation et des statistiques

lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et durablement

lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

Pour savoir ce

que disent les

scientifiques sur

les changements

climatiques

consultez le site

leclimatchangefr

+15degC drsquoaugmentation de la tempeacuterature minimale extrecircme sur la deacutecennie 1991-2000 en moyenne par rapport agrave la

peacuteriode 1960-1990

+13degC entre 1960 et 2010

+1degC entre 1960 et 2000

un climat bouleverseacute

Des tempeacuteratures agrave la hausse

Le dernier rapport du GIEC indique que lrsquoAfrique srsquoest deacutejagrave reacutechauffeacutee drsquoau moins 05degC au cours des 50 agrave 100 derniegraveres anneacutees

En ce qui concerne les projections selon le sceacutenario le plus optimiste du dernier rapport du GIEC lrsquoaugmen-tation de la tempeacuterature deacutepassera les 2degC degraves 2080 et dans le cas drsquoun fort reacutechauffement degraves 2050 pour atteindre entre 3deg et 6degC drsquoici la fin du siegravecle3

monteacutee Du niveau Des oceacuteans

En Afrique subsaharienne on note deacutejagrave les effets de lrsquoeacuteleacutevation du niveau des mers qui se traduit par la salinisation des nappes phreacuteatiques lrsquoeacuterosion des zones cocirctiegravereshellip

Dans un monde agrave +4deg le GIEC estime que le niveau des oceacuteans augmentera plus vite en Afrique que pour la moyenne mondiale et atteindra 80 cm au-dessus des niveaux actuels voire bien plus le long des cocirctes des oceacuteans Indien et Atlantique drsquoici 2100 Le continent devrait connaicirctre un nombre particuliegraverement eacuteleveacute de personnes menaceacutees par les risques drsquoinondations

3 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobilising sources AMCEN UNEP Cli-mat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Sources Djibouti Rapport Meacuteteacuteo 2006

Beacutenin deuxiegraveme com-munication nationale du Beacutenin

Maroc httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

+1degC+13degC

+15degC

7

Les changements projeteacutes de la tempeacuterature annuelle moyenne (degC) en 20802090 par rapport agrave 19801990 au Maroc

dans les villes cocirctiegraveres du Mozambique de Tanzanie du Cameroun drsquoEacutegypte du Seacuteneacutegal et du Maroc

seacutecheresses fortes pluies et variabiliteacute pluviomeacutetrique

Selon le dernier rapport du GIEC il existe un important manque de donneacutees concernant les preacutecipitations an-nuelles en Afrique Les donneacutees disponibles montrent une baisse tregraves probable des preacutecipitations annuelles durant le XXe siegravecle dans la reacutegion Saheacutelienne ainsi qursquoune augmentation sur les reacutegions de lrsquoest et du sud du continent

Mohammed Saddik de lrsquoassociation Homme amp Environnement Le Maroc reccediloit de moins en moins de preacutecipitations durant la saison pluvieuse de sep-tembre agrave avril Dans la reacutegion Nord-ouest les preacuteci-pitations pendant cette saison ont baisseacute drsquoun tiers entre 1976 et 2006 Les seacutecheresses et inondations sont de plus de plus en plus freacutequentes Combineacutees agrave la surexploitation des nappes phreacuteatiques elles ont

entraicircneacute une baisse quasi-geacuteneacutera-liseacutee et tregraves alarmante des niveaux des nappes qui se traduit deacutejagrave par une importante diminution des cours drsquoeau et une intrusion des eaux marines dans les nappes cocirctiegraveres qui se salinisent

Au Beacutenin comme dans de nom-breux pays africains lrsquoagriculture est extrecircmement deacutependante de la date de deacutemarrage de la saison des pluies dont deacutecoulent les opeacute-rations de preacuteparation des terres et de semis Jusqursquoagrave la fin des anneacutees

1970 le ministegravere de lrsquoagriculture indiquait aux agri-culteurs la peacuteriode pendant laquelle les semences pouvaient ecirctre mises en terre Cependant depuis 1980 les premiegraveres pluies de lrsquoanneacutee arrivent de plus en plus tard ce qui rend tregraves difficile pour les services compeacutetents de recommander des dates de semis aux producteurs Le Beacutenin souffre eacutegalement de plus en plus drsquoinondations deacutevastatrices pendant la saison des pluies En effet les changements climatiques renforcent la deacutegradation et la destruction des forecircts galeries qui constituent une barriegravere naturelle contre les inondations

Agrave Djibouti le climat est naturellement semi-deacuteser-tique Cependant en milieu rural on constate ces derniegraveres deacutecennies une augmentation des situations extrecircmes ougrave aux seacutecheresses prolongeacutees succegravedent des pluies violentes qui nrsquoeacutepargnent ni les villages ni le couvert veacutegeacutetal en raison drsquoune forte eacuterosion des sols Ces crues drsquoeau provoquent lrsquoenvasement des points drsquoeau et la destruction des espaces agricoles et des parcours pastoraux aggravant ainsi la preacutecariteacute des populations En outre la quasi totaliteacute de lrsquoeau utiliseacutee pour des activiteacutes domestiques et agricoles provient des nappes souterraines dont le remplis-sage deacutepend des preacutecipitations et des conditions drsquoinfiltrations devenues probleacutematiques en raison des changements climatiques Cette situation touche plus particuliegraverement les populations les plus vulneacute-rables crsquoest-agrave-dire drsquoune part les habitants des zones peacuteri-urbaines de la capitale ougrave les quartiers sont alimenteacutes agrave tour de rocircle alors que certains secteurs ne sont toujours pas relieacutes au reacuteseau drsquoadduction drsquoeau potable et drsquoautre part les populations drsquoeacutele-veurs nomades et semi-nomades qui doivent modifier leurs trajectoires de transhumance agrave la recherche de nouveaux pacircturages et de points drsquoeau

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

8

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 5: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

LrsquoAfrique est le continent qui a contribueacute le moins aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre Pourtant crsquoest drsquoores et deacutejagrave la reacutegion la plus impacteacutee par les chan-gements climatiques Les eacuteconomies les eacutecosystegravemes les populations et plus particuliegraverement celles qui sont deacutejagrave fragiliseacutees par la pauvreteacute et la deacutegradation de leur environnement seront tregraves directement et tregraves neacutegativement toucheacutes Les impacts deacutejagrave observeacutes sur la production agricole et lrsquoeacutelevage sur la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communau-teacutes sur la disponibiliteacute en eau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures nrsquoiront qursquoen srsquoaggravant Certaines popula-tions ou pays subiront des dommages irreacuteversibles y compris en termes de vies humaines acculant les populations agrave la migration Sans actions immeacutediates et soutenues agrave plus long terme pour reacuteduire les impacts des changements climatiques les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement du continent africain sera menaceacutee

LrsquoAgence Internationale de lrsquoEnergie indique par ailleurs que pour stabiliser le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC il nous faut laisser sous terre au moins les 23 de nos reacuteserves connues en combustibles fossiles comme le charbon le gaz et le peacutetrole qui sont direc-tement responsables du reacutechauffement climatique1 Eacutetant donneacutee la dureacutee de vie des infrastructures cela implique notamment qursquoil est indispensable que toute nouvelle infrastructure de production drsquoeacutenergie doive fonctionner agrave partir de renouvelables et non de char-bon de gaz ou de peacutetrole Cela signifie que des conti-nents entiers dont lrsquoAfrique doivent non seulement srsquoadapter aux impacts des changements climatiques mais eacutegalement choisir un modegravele eacutenergeacutetique baseacute sur les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique et non sur les eacutenergies fossiles

Cependant cette crise est aussi une opportuniteacute pour repenser les politiques de deacuteveloppement de maniegravere agrave ce qursquoelles soient plus justes et accessibles agrave tous Ainsi 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoa pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute notamment en zone rurale Les eacutenergies fossiles ne sont pas en capaciteacute de reacutepondre agrave la neacutecessiteacute de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute et lrsquoeacutenergie le peacutetrole le charbon et le gaz sont trop chers et difficiles agrave importer et agrave transporter vers les zones rurales et enclaveacutees le charbon en particulier agrave des impacts sanitaires graves Heureusement la donne est en train de changer les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique vont permettre aux pays Africains drsquoatteindre lrsquoobjectif drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour

tous ndash y compris des plus vulneacuterables et isoleacutes Les solutions sont lagrave elles assainissent lrsquoair et creacuteent des emplois locaux elles contribuent au mieux-ecirctre de la communauteacute et agrave la lutte contre les changements climatiques

Lrsquoadaptation du modegravele de deacuteveloppement aux impacts des changements climatiques est eacutegalement une opportuniteacute pour repenser les politiques et inves-tissements en matiegravere drsquoagriculture drsquoinfrastructures drsquohabitat ou encore de gestion de lrsquoeau afin qursquoils soient plus adapteacutes aux besoins des populations et notamment des plus vulneacuterables ndash en particulier les femmes qui souffrent le plus des impacts des chan-gements climatiques et sont eacutegalement porteuses de solutions Crsquoest enfin une opportuniteacute pour favoriser le respect des droits humains trop souvent menaceacutes agrave la fois par les impacts des changements climatiques mais eacutegalement par des politiques et projets meneacutes au nom du deacuteveloppement ou du climat

Les prochaines neacutegociations internationales sur le climat (COP21) se tiendront du 30 novembre au 11 deacutecembre 2015 agrave Paris en France Le sommet de Paris sera deacuteterminant car il doit aboutir agrave un accord inter-national sur le climat qui preacuteservera des chances de contenir le reacutechauffement global en deccedilagrave de 2degC drsquoici 2100 Pour le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement ce sommet doit reacutepondre au double deacutefi de la lutte contre les changements climatiques et contre la pauvreteacute dans les pays les plus affecteacutes par ces derniers Le RCampD appelle agrave un accord qui

bullthinspProtegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

bullthinspFinance la lutte contre les changements climatiques dans les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables

bullthinspInvestit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables pour tous

bullthinspPermet aux populations les plus vulneacuterables de faire face aux impacts des changements climatiques

bullthinspPreacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique

1AIE World Energy Outlook 2012

En bREf

5

copy Hindou O Ibrahim

6

Tanger

RABATCasablanca

El Jadida

Safi

AgadirOuarzazate

Marrakesh

MohammediaMeknes

Kenitra

Teacutetouan

Oujda

Bouarfa

Ouarzazate

Marrakesh

Oujda

BouarfaMAROC

Fes

Tarfaya ALGERIA

SAHARA

BENIN

TOGO

BURKINA FASO

GHANA

NIGERIA

Natitingou

BanikoaraKandi

Malanville

DjougouNdali

Parakou

Tchaourou

Savalou

Abomey

Bohicon

OuidahLOMEacuteCotonou

SakeacuteteacutePORTO-NOVO

DJIBOUTI

SOMALIE

EacuteTHIOPIE

Obock

Tadjoura

DorraBalho

RandaGacirclacircfi

Yokobi

Holhol

Ali SabicirchDikhil

As Ela

DJIBOUTI CITY

lsquoArtaLoyada

Malgreacute sa faible contribution aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre (33 des eacutemissions mondiales lieacutees agrave lrsquoeacutenergie en 2012) lrsquoAfrique repreacutesente la reacutegion la plus affecteacutee par les changements climatiques et le restera probablement agrave lrsquoavenir Une analyse des donneacutees climatiques depuis 1950 montre une augmentation en intensiteacute et en freacutequence des eacutevegravenements climatiques extrecircmes2 ndash seacutecheresses fortes pluies engendrant des inondationshellip La seacutecuriteacute alimentaire la santeacute et les moyens de subsistance des africains sont deacutejagrave toucheacutes par les changements climatiques Alors que lrsquoon se dirige vers un reacutechauffe-ment global de plus de 2deg le cinquiegraveme rapport du GIEC rappelle que la tempeacuterature devrait augmenter plus vite en Afrique notamment dans les reacutegions arides ce qui aura un impact encore plus grave sur la production agricole la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine et la disponibiliteacute de lrsquoeau

Face agrave une telle situation le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement encourage le deacuteveloppement de la docu-mentation des enjeux et impacts des changements climatiques au niveau national et local Le RCampD a ainsi soutenu en 2015 la reacutealisation drsquoeacutetudes de cas sur les reacutealiteacutes veacutecues sur le terrain agrave Djibouti au Beacutenin et au Maroc afin drsquoillustrer les impacts des changements climatiques en Afrique et drsquoenrichir son plaidoyer dans les enceintes internationales notamment en vue de la COP21 agrave Paris

2Chiffres cleacutes du climat France et Monde Editions 2015 Repegraveres Service de lrsquoobservation et des statistiques

lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et durablement

lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

Pour savoir ce

que disent les

scientifiques sur

les changements

climatiques

consultez le site

leclimatchangefr

+15degC drsquoaugmentation de la tempeacuterature minimale extrecircme sur la deacutecennie 1991-2000 en moyenne par rapport agrave la

peacuteriode 1960-1990

+13degC entre 1960 et 2010

+1degC entre 1960 et 2000

un climat bouleverseacute

Des tempeacuteratures agrave la hausse

Le dernier rapport du GIEC indique que lrsquoAfrique srsquoest deacutejagrave reacutechauffeacutee drsquoau moins 05degC au cours des 50 agrave 100 derniegraveres anneacutees

En ce qui concerne les projections selon le sceacutenario le plus optimiste du dernier rapport du GIEC lrsquoaugmen-tation de la tempeacuterature deacutepassera les 2degC degraves 2080 et dans le cas drsquoun fort reacutechauffement degraves 2050 pour atteindre entre 3deg et 6degC drsquoici la fin du siegravecle3

monteacutee Du niveau Des oceacuteans

En Afrique subsaharienne on note deacutejagrave les effets de lrsquoeacuteleacutevation du niveau des mers qui se traduit par la salinisation des nappes phreacuteatiques lrsquoeacuterosion des zones cocirctiegravereshellip

Dans un monde agrave +4deg le GIEC estime que le niveau des oceacuteans augmentera plus vite en Afrique que pour la moyenne mondiale et atteindra 80 cm au-dessus des niveaux actuels voire bien plus le long des cocirctes des oceacuteans Indien et Atlantique drsquoici 2100 Le continent devrait connaicirctre un nombre particuliegraverement eacuteleveacute de personnes menaceacutees par les risques drsquoinondations

3 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobilising sources AMCEN UNEP Cli-mat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Sources Djibouti Rapport Meacuteteacuteo 2006

Beacutenin deuxiegraveme com-munication nationale du Beacutenin

Maroc httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

+1degC+13degC

+15degC

7

Les changements projeteacutes de la tempeacuterature annuelle moyenne (degC) en 20802090 par rapport agrave 19801990 au Maroc

dans les villes cocirctiegraveres du Mozambique de Tanzanie du Cameroun drsquoEacutegypte du Seacuteneacutegal et du Maroc

seacutecheresses fortes pluies et variabiliteacute pluviomeacutetrique

Selon le dernier rapport du GIEC il existe un important manque de donneacutees concernant les preacutecipitations an-nuelles en Afrique Les donneacutees disponibles montrent une baisse tregraves probable des preacutecipitations annuelles durant le XXe siegravecle dans la reacutegion Saheacutelienne ainsi qursquoune augmentation sur les reacutegions de lrsquoest et du sud du continent

Mohammed Saddik de lrsquoassociation Homme amp Environnement Le Maroc reccediloit de moins en moins de preacutecipitations durant la saison pluvieuse de sep-tembre agrave avril Dans la reacutegion Nord-ouest les preacuteci-pitations pendant cette saison ont baisseacute drsquoun tiers entre 1976 et 2006 Les seacutecheresses et inondations sont de plus de plus en plus freacutequentes Combineacutees agrave la surexploitation des nappes phreacuteatiques elles ont

entraicircneacute une baisse quasi-geacuteneacutera-liseacutee et tregraves alarmante des niveaux des nappes qui se traduit deacutejagrave par une importante diminution des cours drsquoeau et une intrusion des eaux marines dans les nappes cocirctiegraveres qui se salinisent

Au Beacutenin comme dans de nom-breux pays africains lrsquoagriculture est extrecircmement deacutependante de la date de deacutemarrage de la saison des pluies dont deacutecoulent les opeacute-rations de preacuteparation des terres et de semis Jusqursquoagrave la fin des anneacutees

1970 le ministegravere de lrsquoagriculture indiquait aux agri-culteurs la peacuteriode pendant laquelle les semences pouvaient ecirctre mises en terre Cependant depuis 1980 les premiegraveres pluies de lrsquoanneacutee arrivent de plus en plus tard ce qui rend tregraves difficile pour les services compeacutetents de recommander des dates de semis aux producteurs Le Beacutenin souffre eacutegalement de plus en plus drsquoinondations deacutevastatrices pendant la saison des pluies En effet les changements climatiques renforcent la deacutegradation et la destruction des forecircts galeries qui constituent une barriegravere naturelle contre les inondations

Agrave Djibouti le climat est naturellement semi-deacuteser-tique Cependant en milieu rural on constate ces derniegraveres deacutecennies une augmentation des situations extrecircmes ougrave aux seacutecheresses prolongeacutees succegravedent des pluies violentes qui nrsquoeacutepargnent ni les villages ni le couvert veacutegeacutetal en raison drsquoune forte eacuterosion des sols Ces crues drsquoeau provoquent lrsquoenvasement des points drsquoeau et la destruction des espaces agricoles et des parcours pastoraux aggravant ainsi la preacutecariteacute des populations En outre la quasi totaliteacute de lrsquoeau utiliseacutee pour des activiteacutes domestiques et agricoles provient des nappes souterraines dont le remplis-sage deacutepend des preacutecipitations et des conditions drsquoinfiltrations devenues probleacutematiques en raison des changements climatiques Cette situation touche plus particuliegraverement les populations les plus vulneacute-rables crsquoest-agrave-dire drsquoune part les habitants des zones peacuteri-urbaines de la capitale ougrave les quartiers sont alimenteacutes agrave tour de rocircle alors que certains secteurs ne sont toujours pas relieacutes au reacuteseau drsquoadduction drsquoeau potable et drsquoautre part les populations drsquoeacutele-veurs nomades et semi-nomades qui doivent modifier leurs trajectoires de transhumance agrave la recherche de nouveaux pacircturages et de points drsquoeau

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

8

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 6: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

copy Hindou O Ibrahim

6

Tanger

RABATCasablanca

El Jadida

Safi

AgadirOuarzazate

Marrakesh

MohammediaMeknes

Kenitra

Teacutetouan

Oujda

Bouarfa

Ouarzazate

Marrakesh

Oujda

BouarfaMAROC

Fes

Tarfaya ALGERIA

SAHARA

BENIN

TOGO

BURKINA FASO

GHANA

NIGERIA

Natitingou

BanikoaraKandi

Malanville

DjougouNdali

Parakou

Tchaourou

Savalou

Abomey

Bohicon

OuidahLOMEacuteCotonou

SakeacuteteacutePORTO-NOVO

DJIBOUTI

SOMALIE

EacuteTHIOPIE

Obock

Tadjoura

DorraBalho

RandaGacirclacircfi

Yokobi

Holhol

Ali SabicirchDikhil

As Ela

DJIBOUTI CITY

lsquoArtaLoyada

Malgreacute sa faible contribution aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre (33 des eacutemissions mondiales lieacutees agrave lrsquoeacutenergie en 2012) lrsquoAfrique repreacutesente la reacutegion la plus affecteacutee par les changements climatiques et le restera probablement agrave lrsquoavenir Une analyse des donneacutees climatiques depuis 1950 montre une augmentation en intensiteacute et en freacutequence des eacutevegravenements climatiques extrecircmes2 ndash seacutecheresses fortes pluies engendrant des inondationshellip La seacutecuriteacute alimentaire la santeacute et les moyens de subsistance des africains sont deacutejagrave toucheacutes par les changements climatiques Alors que lrsquoon se dirige vers un reacutechauffe-ment global de plus de 2deg le cinquiegraveme rapport du GIEC rappelle que la tempeacuterature devrait augmenter plus vite en Afrique notamment dans les reacutegions arides ce qui aura un impact encore plus grave sur la production agricole la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine et la disponibiliteacute de lrsquoeau

Face agrave une telle situation le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement encourage le deacuteveloppement de la docu-mentation des enjeux et impacts des changements climatiques au niveau national et local Le RCampD a ainsi soutenu en 2015 la reacutealisation drsquoeacutetudes de cas sur les reacutealiteacutes veacutecues sur le terrain agrave Djibouti au Beacutenin et au Maroc afin drsquoillustrer les impacts des changements climatiques en Afrique et drsquoenrichir son plaidoyer dans les enceintes internationales notamment en vue de la COP21 agrave Paris

2Chiffres cleacutes du climat France et Monde Editions 2015 Repegraveres Service de lrsquoobservation et des statistiques

lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et durablement

lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

Pour savoir ce

que disent les

scientifiques sur

les changements

climatiques

consultez le site

leclimatchangefr

+15degC drsquoaugmentation de la tempeacuterature minimale extrecircme sur la deacutecennie 1991-2000 en moyenne par rapport agrave la

peacuteriode 1960-1990

+13degC entre 1960 et 2010

+1degC entre 1960 et 2000

un climat bouleverseacute

Des tempeacuteratures agrave la hausse

Le dernier rapport du GIEC indique que lrsquoAfrique srsquoest deacutejagrave reacutechauffeacutee drsquoau moins 05degC au cours des 50 agrave 100 derniegraveres anneacutees

En ce qui concerne les projections selon le sceacutenario le plus optimiste du dernier rapport du GIEC lrsquoaugmen-tation de la tempeacuterature deacutepassera les 2degC degraves 2080 et dans le cas drsquoun fort reacutechauffement degraves 2050 pour atteindre entre 3deg et 6degC drsquoici la fin du siegravecle3

monteacutee Du niveau Des oceacuteans

En Afrique subsaharienne on note deacutejagrave les effets de lrsquoeacuteleacutevation du niveau des mers qui se traduit par la salinisation des nappes phreacuteatiques lrsquoeacuterosion des zones cocirctiegravereshellip

Dans un monde agrave +4deg le GIEC estime que le niveau des oceacuteans augmentera plus vite en Afrique que pour la moyenne mondiale et atteindra 80 cm au-dessus des niveaux actuels voire bien plus le long des cocirctes des oceacuteans Indien et Atlantique drsquoici 2100 Le continent devrait connaicirctre un nombre particuliegraverement eacuteleveacute de personnes menaceacutees par les risques drsquoinondations

3 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobilising sources AMCEN UNEP Cli-mat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Sources Djibouti Rapport Meacuteteacuteo 2006

Beacutenin deuxiegraveme com-munication nationale du Beacutenin

Maroc httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

+1degC+13degC

+15degC

7

Les changements projeteacutes de la tempeacuterature annuelle moyenne (degC) en 20802090 par rapport agrave 19801990 au Maroc

dans les villes cocirctiegraveres du Mozambique de Tanzanie du Cameroun drsquoEacutegypte du Seacuteneacutegal et du Maroc

seacutecheresses fortes pluies et variabiliteacute pluviomeacutetrique

Selon le dernier rapport du GIEC il existe un important manque de donneacutees concernant les preacutecipitations an-nuelles en Afrique Les donneacutees disponibles montrent une baisse tregraves probable des preacutecipitations annuelles durant le XXe siegravecle dans la reacutegion Saheacutelienne ainsi qursquoune augmentation sur les reacutegions de lrsquoest et du sud du continent

Mohammed Saddik de lrsquoassociation Homme amp Environnement Le Maroc reccediloit de moins en moins de preacutecipitations durant la saison pluvieuse de sep-tembre agrave avril Dans la reacutegion Nord-ouest les preacuteci-pitations pendant cette saison ont baisseacute drsquoun tiers entre 1976 et 2006 Les seacutecheresses et inondations sont de plus de plus en plus freacutequentes Combineacutees agrave la surexploitation des nappes phreacuteatiques elles ont

entraicircneacute une baisse quasi-geacuteneacutera-liseacutee et tregraves alarmante des niveaux des nappes qui se traduit deacutejagrave par une importante diminution des cours drsquoeau et une intrusion des eaux marines dans les nappes cocirctiegraveres qui se salinisent

Au Beacutenin comme dans de nom-breux pays africains lrsquoagriculture est extrecircmement deacutependante de la date de deacutemarrage de la saison des pluies dont deacutecoulent les opeacute-rations de preacuteparation des terres et de semis Jusqursquoagrave la fin des anneacutees

1970 le ministegravere de lrsquoagriculture indiquait aux agri-culteurs la peacuteriode pendant laquelle les semences pouvaient ecirctre mises en terre Cependant depuis 1980 les premiegraveres pluies de lrsquoanneacutee arrivent de plus en plus tard ce qui rend tregraves difficile pour les services compeacutetents de recommander des dates de semis aux producteurs Le Beacutenin souffre eacutegalement de plus en plus drsquoinondations deacutevastatrices pendant la saison des pluies En effet les changements climatiques renforcent la deacutegradation et la destruction des forecircts galeries qui constituent une barriegravere naturelle contre les inondations

Agrave Djibouti le climat est naturellement semi-deacuteser-tique Cependant en milieu rural on constate ces derniegraveres deacutecennies une augmentation des situations extrecircmes ougrave aux seacutecheresses prolongeacutees succegravedent des pluies violentes qui nrsquoeacutepargnent ni les villages ni le couvert veacutegeacutetal en raison drsquoune forte eacuterosion des sols Ces crues drsquoeau provoquent lrsquoenvasement des points drsquoeau et la destruction des espaces agricoles et des parcours pastoraux aggravant ainsi la preacutecariteacute des populations En outre la quasi totaliteacute de lrsquoeau utiliseacutee pour des activiteacutes domestiques et agricoles provient des nappes souterraines dont le remplis-sage deacutepend des preacutecipitations et des conditions drsquoinfiltrations devenues probleacutematiques en raison des changements climatiques Cette situation touche plus particuliegraverement les populations les plus vulneacute-rables crsquoest-agrave-dire drsquoune part les habitants des zones peacuteri-urbaines de la capitale ougrave les quartiers sont alimenteacutes agrave tour de rocircle alors que certains secteurs ne sont toujours pas relieacutes au reacuteseau drsquoadduction drsquoeau potable et drsquoautre part les populations drsquoeacutele-veurs nomades et semi-nomades qui doivent modifier leurs trajectoires de transhumance agrave la recherche de nouveaux pacircturages et de points drsquoeau

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

8

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 7: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Tanger

RABATCasablanca

El Jadida

Safi

AgadirOuarzazate

Marrakesh

MohammediaMeknes

Kenitra

Teacutetouan

Oujda

Bouarfa

Ouarzazate

Marrakesh

Oujda

BouarfaMAROC

Fes

Tarfaya ALGERIA

SAHARA

BENIN

TOGO

BURKINA FASO

GHANA

NIGERIA

Natitingou

BanikoaraKandi

Malanville

DjougouNdali

Parakou

Tchaourou

Savalou

Abomey

Bohicon

OuidahLOMEacuteCotonou

SakeacuteteacutePORTO-NOVO

DJIBOUTI

SOMALIE

EacuteTHIOPIE

Obock

Tadjoura

DorraBalho

RandaGacirclacircfi

Yokobi

Holhol

Ali SabicirchDikhil

As Ela

DJIBOUTI CITY

lsquoArtaLoyada

Malgreacute sa faible contribution aux eacutemissions de gaz agrave effet de serre (33 des eacutemissions mondiales lieacutees agrave lrsquoeacutenergie en 2012) lrsquoAfrique repreacutesente la reacutegion la plus affecteacutee par les changements climatiques et le restera probablement agrave lrsquoavenir Une analyse des donneacutees climatiques depuis 1950 montre une augmentation en intensiteacute et en freacutequence des eacutevegravenements climatiques extrecircmes2 ndash seacutecheresses fortes pluies engendrant des inondationshellip La seacutecuriteacute alimentaire la santeacute et les moyens de subsistance des africains sont deacutejagrave toucheacutes par les changements climatiques Alors que lrsquoon se dirige vers un reacutechauffe-ment global de plus de 2deg le cinquiegraveme rapport du GIEC rappelle que la tempeacuterature devrait augmenter plus vite en Afrique notamment dans les reacutegions arides ce qui aura un impact encore plus grave sur la production agricole la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine et la disponibiliteacute de lrsquoeau

Face agrave une telle situation le Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement encourage le deacuteveloppement de la docu-mentation des enjeux et impacts des changements climatiques au niveau national et local Le RCampD a ainsi soutenu en 2015 la reacutealisation drsquoeacutetudes de cas sur les reacutealiteacutes veacutecues sur le terrain agrave Djibouti au Beacutenin et au Maroc afin drsquoillustrer les impacts des changements climatiques en Afrique et drsquoenrichir son plaidoyer dans les enceintes internationales notamment en vue de la COP21 agrave Paris

2Chiffres cleacutes du climat France et Monde Editions 2015 Repegraveres Service de lrsquoobservation et des statistiques

lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et durablement

lrsquoafriQue continent le Plus affecteacute Par la crise climatiQue

Pour savoir ce

que disent les

scientifiques sur

les changements

climatiques

consultez le site

leclimatchangefr

+15degC drsquoaugmentation de la tempeacuterature minimale extrecircme sur la deacutecennie 1991-2000 en moyenne par rapport agrave la

peacuteriode 1960-1990

+13degC entre 1960 et 2010

+1degC entre 1960 et 2000

un climat bouleverseacute

Des tempeacuteratures agrave la hausse

Le dernier rapport du GIEC indique que lrsquoAfrique srsquoest deacutejagrave reacutechauffeacutee drsquoau moins 05degC au cours des 50 agrave 100 derniegraveres anneacutees

En ce qui concerne les projections selon le sceacutenario le plus optimiste du dernier rapport du GIEC lrsquoaugmen-tation de la tempeacuterature deacutepassera les 2degC degraves 2080 et dans le cas drsquoun fort reacutechauffement degraves 2050 pour atteindre entre 3deg et 6degC drsquoici la fin du siegravecle3

monteacutee Du niveau Des oceacuteans

En Afrique subsaharienne on note deacutejagrave les effets de lrsquoeacuteleacutevation du niveau des mers qui se traduit par la salinisation des nappes phreacuteatiques lrsquoeacuterosion des zones cocirctiegravereshellip

Dans un monde agrave +4deg le GIEC estime que le niveau des oceacuteans augmentera plus vite en Afrique que pour la moyenne mondiale et atteindra 80 cm au-dessus des niveaux actuels voire bien plus le long des cocirctes des oceacuteans Indien et Atlantique drsquoici 2100 Le continent devrait connaicirctre un nombre particuliegraverement eacuteleveacute de personnes menaceacutees par les risques drsquoinondations

3 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobilising sources AMCEN UNEP Cli-mat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Sources Djibouti Rapport Meacuteteacuteo 2006

Beacutenin deuxiegraveme com-munication nationale du Beacutenin

Maroc httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

+1degC+13degC

+15degC

7

Les changements projeteacutes de la tempeacuterature annuelle moyenne (degC) en 20802090 par rapport agrave 19801990 au Maroc

dans les villes cocirctiegraveres du Mozambique de Tanzanie du Cameroun drsquoEacutegypte du Seacuteneacutegal et du Maroc

seacutecheresses fortes pluies et variabiliteacute pluviomeacutetrique

Selon le dernier rapport du GIEC il existe un important manque de donneacutees concernant les preacutecipitations an-nuelles en Afrique Les donneacutees disponibles montrent une baisse tregraves probable des preacutecipitations annuelles durant le XXe siegravecle dans la reacutegion Saheacutelienne ainsi qursquoune augmentation sur les reacutegions de lrsquoest et du sud du continent

Mohammed Saddik de lrsquoassociation Homme amp Environnement Le Maroc reccediloit de moins en moins de preacutecipitations durant la saison pluvieuse de sep-tembre agrave avril Dans la reacutegion Nord-ouest les preacuteci-pitations pendant cette saison ont baisseacute drsquoun tiers entre 1976 et 2006 Les seacutecheresses et inondations sont de plus de plus en plus freacutequentes Combineacutees agrave la surexploitation des nappes phreacuteatiques elles ont

entraicircneacute une baisse quasi-geacuteneacutera-liseacutee et tregraves alarmante des niveaux des nappes qui se traduit deacutejagrave par une importante diminution des cours drsquoeau et une intrusion des eaux marines dans les nappes cocirctiegraveres qui se salinisent

Au Beacutenin comme dans de nom-breux pays africains lrsquoagriculture est extrecircmement deacutependante de la date de deacutemarrage de la saison des pluies dont deacutecoulent les opeacute-rations de preacuteparation des terres et de semis Jusqursquoagrave la fin des anneacutees

1970 le ministegravere de lrsquoagriculture indiquait aux agri-culteurs la peacuteriode pendant laquelle les semences pouvaient ecirctre mises en terre Cependant depuis 1980 les premiegraveres pluies de lrsquoanneacutee arrivent de plus en plus tard ce qui rend tregraves difficile pour les services compeacutetents de recommander des dates de semis aux producteurs Le Beacutenin souffre eacutegalement de plus en plus drsquoinondations deacutevastatrices pendant la saison des pluies En effet les changements climatiques renforcent la deacutegradation et la destruction des forecircts galeries qui constituent une barriegravere naturelle contre les inondations

Agrave Djibouti le climat est naturellement semi-deacuteser-tique Cependant en milieu rural on constate ces derniegraveres deacutecennies une augmentation des situations extrecircmes ougrave aux seacutecheresses prolongeacutees succegravedent des pluies violentes qui nrsquoeacutepargnent ni les villages ni le couvert veacutegeacutetal en raison drsquoune forte eacuterosion des sols Ces crues drsquoeau provoquent lrsquoenvasement des points drsquoeau et la destruction des espaces agricoles et des parcours pastoraux aggravant ainsi la preacutecariteacute des populations En outre la quasi totaliteacute de lrsquoeau utiliseacutee pour des activiteacutes domestiques et agricoles provient des nappes souterraines dont le remplis-sage deacutepend des preacutecipitations et des conditions drsquoinfiltrations devenues probleacutematiques en raison des changements climatiques Cette situation touche plus particuliegraverement les populations les plus vulneacute-rables crsquoest-agrave-dire drsquoune part les habitants des zones peacuteri-urbaines de la capitale ougrave les quartiers sont alimenteacutes agrave tour de rocircle alors que certains secteurs ne sont toujours pas relieacutes au reacuteseau drsquoadduction drsquoeau potable et drsquoautre part les populations drsquoeacutele-veurs nomades et semi-nomades qui doivent modifier leurs trajectoires de transhumance agrave la recherche de nouveaux pacircturages et de points drsquoeau

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

8

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 8: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Les changements projeteacutes de la tempeacuterature annuelle moyenne (degC) en 20802090 par rapport agrave 19801990 au Maroc

dans les villes cocirctiegraveres du Mozambique de Tanzanie du Cameroun drsquoEacutegypte du Seacuteneacutegal et du Maroc

seacutecheresses fortes pluies et variabiliteacute pluviomeacutetrique

Selon le dernier rapport du GIEC il existe un important manque de donneacutees concernant les preacutecipitations an-nuelles en Afrique Les donneacutees disponibles montrent une baisse tregraves probable des preacutecipitations annuelles durant le XXe siegravecle dans la reacutegion Saheacutelienne ainsi qursquoune augmentation sur les reacutegions de lrsquoest et du sud du continent

Mohammed Saddik de lrsquoassociation Homme amp Environnement Le Maroc reccediloit de moins en moins de preacutecipitations durant la saison pluvieuse de sep-tembre agrave avril Dans la reacutegion Nord-ouest les preacuteci-pitations pendant cette saison ont baisseacute drsquoun tiers entre 1976 et 2006 Les seacutecheresses et inondations sont de plus de plus en plus freacutequentes Combineacutees agrave la surexploitation des nappes phreacuteatiques elles ont

entraicircneacute une baisse quasi-geacuteneacutera-liseacutee et tregraves alarmante des niveaux des nappes qui se traduit deacutejagrave par une importante diminution des cours drsquoeau et une intrusion des eaux marines dans les nappes cocirctiegraveres qui se salinisent

Au Beacutenin comme dans de nom-breux pays africains lrsquoagriculture est extrecircmement deacutependante de la date de deacutemarrage de la saison des pluies dont deacutecoulent les opeacute-rations de preacuteparation des terres et de semis Jusqursquoagrave la fin des anneacutees

1970 le ministegravere de lrsquoagriculture indiquait aux agri-culteurs la peacuteriode pendant laquelle les semences pouvaient ecirctre mises en terre Cependant depuis 1980 les premiegraveres pluies de lrsquoanneacutee arrivent de plus en plus tard ce qui rend tregraves difficile pour les services compeacutetents de recommander des dates de semis aux producteurs Le Beacutenin souffre eacutegalement de plus en plus drsquoinondations deacutevastatrices pendant la saison des pluies En effet les changements climatiques renforcent la deacutegradation et la destruction des forecircts galeries qui constituent une barriegravere naturelle contre les inondations

Agrave Djibouti le climat est naturellement semi-deacuteser-tique Cependant en milieu rural on constate ces derniegraveres deacutecennies une augmentation des situations extrecircmes ougrave aux seacutecheresses prolongeacutees succegravedent des pluies violentes qui nrsquoeacutepargnent ni les villages ni le couvert veacutegeacutetal en raison drsquoune forte eacuterosion des sols Ces crues drsquoeau provoquent lrsquoenvasement des points drsquoeau et la destruction des espaces agricoles et des parcours pastoraux aggravant ainsi la preacutecariteacute des populations En outre la quasi totaliteacute de lrsquoeau utiliseacutee pour des activiteacutes domestiques et agricoles provient des nappes souterraines dont le remplis-sage deacutepend des preacutecipitations et des conditions drsquoinfiltrations devenues probleacutematiques en raison des changements climatiques Cette situation touche plus particuliegraverement les populations les plus vulneacute-rables crsquoest-agrave-dire drsquoune part les habitants des zones peacuteri-urbaines de la capitale ougrave les quartiers sont alimenteacutes agrave tour de rocircle alors que certains secteurs ne sont toujours pas relieacutes au reacuteseau drsquoadduction drsquoeau potable et drsquoautre part les populations drsquoeacutele-veurs nomades et semi-nomades qui doivent modifier leurs trajectoires de transhumance agrave la recherche de nouveaux pacircturages et de points drsquoeau

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

8

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 9: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

des conseacuteQuences dramatiQues sur les PoPulations et lrsquoenvironnement

impacts sur la santeacute

LrsquoOMS4 estime qursquoen 2030 lrsquoAfrique sub-saharienne paiera le plus lourd tribut en termes de mortaliteacute attribuable aux changements climatiques La hausse des tempeacuteratures et la modification des reacutegimes plu-viomeacutetriques pourraient creacuteer de nouveaux habitats favorables au deacuteveloppement drsquoorganismes patho-gegravenes comme les moustiques et allonger la liste des reacutegions en Afrique sub-saharienne contamineacutees par la dengue la fiegravevre jaune et la malaria Les maladies drsquoorigine hydrique et alimentaire en conseacutequence des impacts sur lrsquohygiegravene du manque drsquoeau ou de son excegraves et de lrsquoutilisation des eaux useacutees pour la production alimentaire risquent eacutegalement de se multiplier

impacts sur lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

En Afrique subsaharienne les chercheurs srsquoaccordent sur lrsquoextrecircme importance des questions de seacutecuriteacute alimentaire Avec un reacutechauffement de 15 agrave 2 degC seacutecheresse et ariditeacute rendront entre 40 et 80 des terres agricoles impropres agrave la culture du maiumls du millet et du sorgho agrave lrsquohorizon 2030-2040 Drsquoici agrave 2050 la baisse des calories disponibles pourrait conduire agrave une augmentation du nombre drsquoenfants souffrant de malnutrition de 20 (compareacute agrave un monde sans changements climatiques) dont la moitieacute en Afrique sub-Saharienne5 Les projections les plus laquo optimistes raquo (+2degC en moyenne agrave la surface du globe) preacutevoient que

4 Hales S Kovats S Lloyd S Campbell-Len-drum D Quantitative risk assessment of the effects of climate change on selected causes of death 2030s and 2050s Geneva World Health Organization 2014

5 Nelson GC Rosegrant MW Koo J Robertson R Sulser T Zhu T Ringler C Msangi S Palazzo A Batka M Magalhaes M Val-monte-Santos R Ewing M Lee D (2009) Changement Climatique - Impact sur lrsquoagriculture et coucircts de lrsquoadaptation Institut inter-national de recherche sur les politiques alimentaires Washington DC

La progression du climat aride et semi-aride vers le nord en 1991-2000 par rapport agrave 1961-1979 au Maroc

Djibouti Une berge eacuterodeacutee par lrsquooued

Djibouti Des arbres deacuteracineacutes par les crues

Source httpwwwminenvgovmaPDFsCLIMATchangements_climatiquespdf

copy E

VAcopy

EVA

0-1Stations Stations

Peacuteriode 2071-2099Peacuteriode 2041-2070

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1961-1970

Indice drsquoariditeacute de De MartonnePeacuteriode 1991-2000

1-22-33-44-5gt = 5

ArideSemi-arideSemi-humideHumide

0-11-22-33-44-5gt = 5

9

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 10: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Djibouti Une opeacuteration de distribution des vivres aux eacuteleveurs sans ressources

copy E

VA

le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)6

Au Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau de seacutecheresse prolongeacutee et de manifestation de vents violents ne sont pas sans conseacutequences sur la santeacute animale En effet les peacuteriodes drsquoexcegraves drsquoeau constituent une peacuteriode favorable agrave la multiplication des germes pathogegravenes conduisant agrave la prolifeacuteration drsquoaffections diarrheacuteiques et eacutepidermiques telles que la galle chez les petits rumi-nants comme les caprins et les ovins

Selon Ahmed Ali Dimbio de lrsquoassociation EVA Dji-bouti Le bassin versant de Weiumlma situeacute au nord de la reacutepublique de Djibouti est lrsquoune des zones rurales les plus peupleacutees du pays Sa population vit essentiel-lement de lrsquoeacutelevage avec une introduction reacutecente de lrsquoagropastoralisme Agrave lrsquoinstar des autres zones rurales du pays cette reacutegion a connu de graves seacutecheresses au cours des derniegraveres deacutecennies Plus de 60 de lrsquoalimentation provient de lrsquoaide alimentaire fournie par le PAM et en 2011 pregraves de 70 des meacutenages avaient une consommation alimentaire pauvre ou limiteacutee Les prix des denreacutees de base ainsi que celui de la viande ont fortement augmenteacute agrave titre drsquoexemple le prix de la viande a doubleacute depuis 2009 celui de la pomme de terre agrave augmenteacute de 50 en 2 ans

6 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

impacts sur les moyens Drsquoexistence

Les changements climatiques ont des impacts sur les moyens de subsistance des populations africaines ce qui conduit agrave la deacuteteacuterioration de leurs conditions de vie et plus globalement modifie la structure sociale traditionnelle

La baisse constante de revenu des agriculteurs au Beacutenin lieacutee notamment aux changements climatiques se traduit par lrsquoaugmentation de la pauvreteacute Saiumld Hounkponou de lrsquoassociation IDID au Beacutenin Nous avons beaucoup eacutetudieacute la commune de Dassa-Zoumegrave au centre du pays Plus drsquoun chef de meacutenage sur cinq y affirme avoir deacutescolariseacute au moins un enfant ces cinq derniegraveres anneacutees pour des raisons financiegraveres 85 des cas de deacutescolarisation lrsquoont eacuteteacute au cours des anneacutees scolaires 2007-2008 et 2010-2011 caracteacuteriseacutees par de tregraves mauvaises reacutecoltes En outre la situation de preacutecariteacute a ameneacute 75 des meacutenages agrave recourir au placement drsquoenfants chez des tiers car ils ne pouvaient plus subvenir seuls agrave leurs besoins

De plus en plus de jeunes cherchent de nouvelles sources de revenus plus prometteuses Dans cette mecircme commune du Beacutenin de nombreux jeunes optent pour lrsquoexode ou pour lrsquoexercice de lrsquoactiviteacute de taxi-moto ce qui contribue agrave la rareacutefaction de la main drsquoœuvre agricole Enfin les petits agriculteurs qui ont reacuteguliegraverement recours agrave lrsquoemprunt en deacutebut de saison pour lrsquoachat des semences des intrants voire de la main drsquoœuvre salarieacutee ont de plus en plus de difficulteacutes pour rembourser ces creacutedits

Deacuteplacements De populations et conflits

Les changements climatiques augmentent les deacutepla-cements de populations en particulier agrave cause de la hausse du niveau des mers et de la rareacutefaction des ressources naturelles Ceci multiplie les situations drsquoex-trecircme pauvreteacute et drsquoinseacutecuriteacute alimentaire catalyseurs de conflits Ainsi dans la zone saheacutelo-soudanienne les populations nomades drsquoeacuteleveurs sont confronteacutees agrave une forte reacuteduction des zones de pacircturage et de ressources en eau et doivent modifier leurs couloirs de transhumance Srsquoensuit une concentration de popula-tion dans certaines zones et des conflits entre agricul-teurs et eacuteleveurs Agrave Djibouti on observe depuis 2010

10

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 11: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

des deacuteplacements massifs de populations nomades qui se sont regroupeacutees sur certains sites suite agrave la perte de leur cheptel et sont depuis presque entiegraverement deacutependantes de programmes drsquoaide alimentaire (PAM FAO etc)

Selon le Norwegian Refugee Council les reacutefugieacutes cli-matiques eacutetaient 3 fois plus nombreux que ceux des conflits en 2013 (dans le monde entier) Pourtant aucun statut juridique ni aucun droit speacutecifique ne leur est reconnu Le Programme des Nations Unies pour lrsquoEnvironnement estime qursquoil pourrait y avoir 50 millions de deacuteplaceacutes environnementaux en Afrique en 2060

lrsquoenvironnement deacutegradeacute

les changements climatiques accentuent la Deacutesertification et la DeacutegraDation Des sols

Agrave Djibouti comme dans lrsquoensemble de la zone saharo-soudanienne les seacutecheresses reacutecurrentes et la deacutereacute-gulation du cycle des preacutecipitations devenues trop aleacuteatoires favorisent la deacutesertification Ce pheacutenomegravene est renforceacute drsquoune part par la surconsommation de pacirc-turages par les cheptels drsquoeacuteleveurs qui se concentrent sur quelques zones en raison de la forte diminution des pacircturages Drsquoautre part ces populations qui voient leur principale source de revenu diminuer reacutealisent de plus en plus des coupes de bois contraires agrave leurs valeurs traditionnelles qui fragilisent davantage encore lrsquoeacutequilibre eacutecologique

la bioDiversiteacute en Danger

Agrave Djibouti les changements climatiques ont accentueacute la diminution voire conduit agrave la disparition drsquoespegraveces veacutegeacutetales endeacutemiques utiliseacutees pour leur valeur nutri-tive ou leurs proprieacuteteacutes meacutedicinales ou estheacutetiques En parallegravele ce pheacutenomegravene a favoriseacute le deacuteveloppement drsquoespegraveces envahissantes et reacutesistantes aux seacuteche-resses comme le prosopis qui occupent maintenant plus de 80 des zones cocirctiegraveres et des plaines du sud du pays Cette situation a reacuteduit les revenus drsquoun grand nombre drsquoexploitants qui deacutependent de ces plantes (gueacuterisseurs traditionnels vendeurs de pro-duits traditionnels estheacutetiques) et marque le deacuteclin des pratiques traditionnelles agrave base de plantes Les changements climatiques ont eacutegalement contribueacute agrave la rareacutefaction drsquoespegraveces comme les antilopes les lapins les phacochegraveres les autruches et les francolins (oiseaux endeacutemiques)

En milieu rural les populations sont forte-ment tributaires des ressources naturelles qui ont consideacuterablement diminueacute Mal-greacute les lois traditionnelles qui protegravegent lrsquoenvironnement agrave travers des mesures coercitives il devient de plus en plus diffi-cile de les appliquer car agrave cocircteacute de ces lois ou regravegles il faut offrir des alternatives pour permettre aux gens de vivre deacutecemmentPropos drsquoun chef coutumier reacutegion du Goda Djibouti

copy D

R

11

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 12: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

les ineacutegaliteacutes facteur de vulneacuterabiliteacute

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute les populations les plus pauvres et les plus deacutependantes des ressources naturelles sont les plus vulneacuterables aux impacts des changements climatiques La rareacutefaction ou deacuteteacuterioration drsquoune ressource causeacutee par les changements climatiques peut avoir un impact direct sur leurs capaciteacutes agrave subvenir agrave leurs besoins et agrave ceux de leur famille Lrsquoaccegraves agrave lrsquoinformation climatique aux prix du marcheacute ou agrave lrsquoeacuteducation influe aussi sur les capaciteacutes drsquoadaptation etou la vulneacuterabiliteacute des individus Ces personnes ont ainsi un panel de solu-tions plus restreint que celles qui disposent de moyens drsquoexistence tregraves diversifieacutes Plusieurs facteurs influent sur le niveau de vulneacuterabiliteacute des populations le genre lrsquoacircge la cateacutegorie sociale lrsquoappartenance ethniquehellip

Les populations autochtones habitent tregraves souvent des zones (montagneuses forestiegraveres deacutesertiques etc) ougrave lrsquoaccegraves aux services sociaux de base (santeacute eacuteducation etc) est deacutejagrave difficile ce qui renforce leur vulneacuterabiliteacute

Autrefois alors que jrsquoeacutetais jeune berger des espegraveces diverses drsquoantilopes et drsquoautres herbivores cocirctoyaient les becirctes domestiques agrave proximiteacute des campements nomades Aujourdrsquohui observer une gazelle relegraveve drsquoune chance drsquoun hasard Ahmed Meko chef coutumier de la reacutegion Weiumlma (nord de Djibouti)

La corveacutee drsquoeau une tacircche peacutenible effectueacutee par les femmes et les filles

Pour aller plus loin consulter les eacutetudes de

vulneacuterabiliteacute du Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement

sur le Beacutenin Djibouti et le Maroc disponibles sur

le site Internet du RCampD

Les ineacutegaliteacutes de genre repreacutesentent eacutegalement un facteur de vulneacuterabiliteacute pour les femmes En effet on observe dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique aux marcheacutes aux ressourceshellip En Afrique seulement 2 des femmes ont un accegraves agrave la terre alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture7

Saiumld Hounkponou Dans le deacutepartement des Col-lines au centre du Beacutenin les peacuteriodes drsquoexcegraves de pluie interviennent chaque anneacutee pendant les mois drsquoaoucirct agrave septembre coiumlncidant avec la peacuteriode de reacutecolte des produits de la grande saison des pluies Cette activiteacute est essentiellement exeacutecuteacutee par les femmes qui subissent donc en prioriteacute les fortes pluies qui caracteacuterisent la peacuteriode Ce sont eacutegalement les femmes qui srsquooccupent du seacutechage de ces produits pour leur stockage Or les pluies intempestives qui tombent de faccedilon intermittente viennent mouiller les produits mis au seacutechage

Les deacutecegraves drsquoenfants repreacutesentent 80 des deacutecegraves attribueacutes aux changements climatiques8 Pneumonie diarrheacutee et paludisme sont les 3 plus grandes causes de mortaliteacute des enfants et les changements climatiques contribuent largement agrave leur diffusion Drsquoici agrave 2050 on estime que 25 millions drsquoenfants suppleacutementaires souffriront de malnutrition agrave cause des changements climatiques9

7 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

8 UNICEF The Challenges of Climate Change

Children on the front line 2014

9 Nelson GC et al Cli-mate Change Impact on agriculture and costs of

adaptation International Food Policy Research

Institute 2009

copy D

EMI-E

12

lrsquoafrique continent le plus affecteacute par la crise climatique

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 13: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

lrsquoaccord de Paris sur le climat Quels enjeux Pour lrsquoafriQue

13

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 14: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous

Permettre lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable Pour tous

Source Africa Energy Outlook International Energy Agency 2014

eacutetat des lieux

Un tregraves faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie en Afrique assorti drsquoune forte deacutependance aux eacutenergies fossiles

LrsquoAfrique sub-saharienne compte 13 de la population mondiale mais seulement 4 de la consommation drsquoeacutenergie dont la moitieacute est fournie par de la biomasse traditionnelle La consommation drsquoeacutelectriciteacute de la tota-liteacute de lrsquoAfrique sub-saharienne est infeacuterieure agrave celle de lrsquoEspagne et 63 de cette consommation se concentre en Afrique du Sud En 2014 625 millions de personnes soit 70 de la population drsquoAfrique subsaharienne nrsquoavaient toujours pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute ndash dont 80 habitent en zone rurale Quatre personnes sur cinq recourent agrave lrsquoutilisation de la biomasse principalement le bois de feu pour la cuisine avec des technologies qui ont des rendements eacutenergeacutetiques deacuteplorables (foyers 3 pierres par exemple)10

10 Africa Energy Outlook International Energy

Agency 2014

Paradoxalement malgreacute son faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie lrsquoAfrique est fortement deacutependante des eacutenergies fos-siles en particulier pour sa production drsquoeacutelectriciteacute

La consommation de peacutetrole repreacutesente 15 de la consommation globale drsquoeacutenergie en Afrique sub-sa-harienne et les renouvelables hors utilisation de la biomasse traditionnelle moins de 2 du mix eacutenergeacute-tique sub-saharien11

Une deacutependance incompatible avec la lutte contre la pauvreteacute et contre les changements climatiques

Des eacutenergies coucircteuses et qui ne beacuteneacuteficient que trop peu aux populations Les pays enclaveacutes et non producteurs drsquohydrocarbures comme le Mali sont approvisionneacutes agrave partir des pays voisins Les longs trajets rencheacuterissent les coucircts drsquoap-provisionnement Mais le fait drsquoecirctre un pays producteur ne facilite pas pour autant lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie ainsi le Nigeacuteria a exporteacute pour 89 milliards de dollars US de peacutetrole en 2013 alors que 93 millions de Nigeacuterians nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute Par ailleurs les cen-trales fossiles alimentent avant tout des entreprises notamment multinationales et ne beacuteneacuteficient que trop rarement aux populations Le peacutetrole et le gaz butane beacuteneacuteficient aux populations les plus aiseacutees mais restent hors de prix pour une large partie des populations Les Eacutetats deacutepensent des sommes tregraves importantes pour subventionner les eacutenergies fossiles ndash jusqursquoagrave 20 du budget de certains pays drsquoAfrique de lrsquoOuest12 et en tout 21 milliards de dollars annuellement en Afrique Pourtant ces mesures ne beacuteneacuteficient pas aux plus pauvres 442 de ces subventions vont aux 20 des meacutenages les plus riches tandis que les 20 des plus pauvres nrsquoen perccediloivent que 7813 Au final les populations les plus pauvres drsquoAfrique sont celles qui paient les prix les plus eacuteleveacutes pour lrsquoeacutenergie au monde Au rythme actuel tous les Africains nrsquoauront accegraves agrave lrsquoeacutelectriciteacute qursquoen 2080 Pire ils nrsquoauront pas accegraves agrave des moyens de cuisson non polluants avant 2150

11 Ibid

12 Hans V La transfor-mation eacutenergeacutetique en

Afrique de lrsquoOuest 2014

13 Power People Plant Seizing Africarsquos energy

and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa Progress

Panel

copy Joseph Y Kogbe

Charbon45

Hydro22

Fioul17

Gaz 14

Nucleacuteaire 2

Reacuteparition par source de la capaciteacute installeacutee en Afrique sub-saharienne pour la production drsquoeacutelectriciteacute

Autre EnR -1

14

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 15: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Des infrastructures veacutetustes et insuffisantesLes pics de consommation et les coupures drsquoeacutelectriciteacute coucirctent 2 agrave 4 de PIB annuel agrave lrsquoAfrique sub-saha-rienne et renforcent la pauvreteacute en particulier des femmes et des populations rurales14

Des eacutenergies nuisibles agrave la santeacute et agrave lrsquoenvironnement 600 000 Africains meurent chaque anneacutee agrave cause de la pollution de lrsquoair inteacuterieur geacuteneacutereacutee par lrsquoutilisation de la biomasse pour la cuisson dont principalement des femmes et des enfants Le charbon est eacutegalement responsable de maladies respiratoires Les eacutenergies fossiles et la biomasse traditionnelle geacutenegraverent des im-pacts neacutegatifs sur lrsquoenvironnement ndash via leur utilisation etou leur exploitation (peacutetrole) et in fine sur la santeacute deacuteforestation et deacutegradation des sols (biomasse) mais eacutegalement pollution locale de lrsquoeau des solshellip

Des dispariteacutes renforceacutees en matiegravere de santeacute et drsquoeacuteducationLa plupart des enfants africains nrsquoont pas accegraves agrave lrsquoeacutelec-triciteacute agrave lrsquoeacutecole15 Lrsquoargument selon lequel le deacuteveloppe-ment des eacutenergies fossiles permettrait de lutter contre la pauvreteacute et de deacutevelopper lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous bien que tregraves couramment employeacute est donc faux Au contraire cela revient agrave enfermer les pays africains dans une deacutependance coucircteuse nuisible pour la santeacute et lrsquoenvironnement qui nrsquoest pas agrave mecircme de reacutepondre aux besoins des populations locales et qui les place sur la trajectoire drsquoun deacuteveloppement fortement carboneacute

Dans son dernier rapport la communauteacute scientifique (GIEC) eacutetablit que pour limiter le reacutechauffement clima-tique en deccedilagrave du seuil de 2degC le budget carbone de la planegravete ndash crsquoest-agrave-dire les gaz agrave effet de serre que nous pouvons encore eacutemettre collectivement ndash est extrecircmement limiteacute Selon lrsquoAgence Internationale de lrsquoEnvironnement (AIE) ceci signifie que les pays ne pourront exploiter et brucircler qursquoun tiers au maximum des reacuteserves connues en eacutenergies fossiles En effet le charbon le gaz et le peacutetrole sont les principaux responsables des changements climatiques ils repreacute-sentent plus de 80 du mix eacutenergeacutetique mondial et les eacutemissions lieacutees agrave la combustion de lrsquoeacutenergie consti-tuent les deux tiers des eacutemissions mondiales de GES16 Une veacuteritable transition eacutenergeacutetique est neacutecessaire beacuteneacutefique et urgente

14 Power People Plant Seizing Africarsquos energy and climate opportunities Africa Progress report 2015 Africa

15 Ibid

16 Energy and climate change World energy outlook special report International Energy Agency 2015

Heureusement les solutions existent

LrsquoAfrique dispose drsquoun vaste potentiel tregraves largement inexploiteacute en matiegravere drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Agrave titre drsquoexemple moins de 1 du potentiel geacuteothermique du Rift17 est exploiteacute LrsquoAfrique fait partie des reacutegions les plus ensoleilleacutees du monde et pourtant dans lrsquoespace CEDAO18 la part du solaire dans le mix eacutenergeacutetique est infeacuterieure agrave 1 Le potentiel eacuteolien existe mais est encore assez mal connu dans plusieurs reacutegions En matiegravere drsquoeffi-caciteacute eacutenergeacutetique les foyers de cuisson ameacutelioreacutes se deacuteveloppent largement en Afrique de lrsquoOuest De larges ameacuteliorations sont encore possibles dans les bacirctiments les transports urbains ou encore le reacuteseau eacutelectrique ndash dans les pays de la CEDEAO plus de 10 de lrsquoeacutelectriciteacute est gaspilleacutee dans le reacuteseau en raison de sa veacutetusteacute19 Les technologies sont disponibles et lrsquoinvestissement dans ces solutions permet de reacutepondre simultaneacutement aux deacutefis drsquoun deacuteveloppement eacutequi-table de lrsquoatteacutenuation et de lrsquoadaptation aux impacts des changements climatiques

Le deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables facilite lrsquoaccegraves de tous agrave lrsquoeacutenergie y compris dans les zones rurales les plus reculeacutees et agrave moindre coucirct En effet le reacuteseau centraliseacute est agrave un stade embryonnaire et la creacuteation drsquoinfrastructures de reacuteseau stable coucircte cher et nrsquoest pas adapteacutee aux zones rurales En revanche les initiatives deacutecentraliseacutees de mini-reacuteseaux ou hors-reacuteseaux alimenteacutes par des eacutenergies renouvelables reacutepondent mieux agrave ces besoins speacutecifiques Selon lrsquoIRENA les eacutenergies renouvelables coucirctent moins cher que les geacuteneacuterateurs au fioul ou les raccordements agrave un reacuteseau centraliseacute instable Mais les subventions aux eacutenergies fossiles faussent les prix et empecircchent lrsquoinvestissement dans ces solutions drsquoougrave la neacutecessiteacute de les rediriger progressivement vers les eacutenergies renouvelables

17Le Rift (ou rift est-africain) est une zone drsquoeacuteloignement entre deux plaques tectoniques la plaque africaine et la plaque eacutethiopienne Elle srsquoeacutetend sur plusieurs mil-liers de km de lrsquoEthiopie au Mozambique

18 Communauteacute Econo-mique des Eacutetats drsquoAfrique de lrsquoOuest

19 Politique sur lrsquoEfficaciteacute Energeacutetique de la CEDEAO Septembre 2012

budget carbone

soit au maximum 13 des reacuteserves connues en peacutetrole

gaz et charbon

1050 gtco2

15

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 16: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Lrsquoaccegraves aux services sociaux de base comme la santeacute ou lrsquoeacuteducation est largement freineacute par le faible accegraves agrave lrsquoeacutenergie Le deacuteveloppement de solutions durables et accessibles agrave tous permettrait drsquoeacutelectrifier les centres de santeacute de conserver des vaccins de deacutevelopper lrsquoeacuteclairage le soir pour les eacutetudes etc Elles permet-traient eacutegalement de reacuteduire les impacts de la bio-masse et des eacutenergies fossiles sur la santeacute comme sur lrsquoenvironnement

Les secteurs de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et des eacutenergies renouvelables repreacutesentent un potentiel important et sous-exploiteacute de creacuteation drsquoemplois locaux directs mais aussi indirects puisque les communauteacutes pour-raient degraves lors deacutevelopper des activiteacutes de transfor-mation geacuteneacuteratrices de revenus et mieux lutter contre lrsquoexode rural

Il srsquoagit eacutegalement drsquoun formidable vecteur drsquoauto-nomisation des femmes qui sont particuliegraverement impacteacutees par la pauvreteacute eacutenergeacutetique Avec lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables elles peuvent consacrer tout ou partie du temps destineacute agrave la corveacutee de bois agrave drsquoautres activiteacutes notamment geacuteneacuteratrices de revenus

Enfin ces solutions permettent de reacuteduire la vulneacute-rabiliteacute des pays et populations Elles permettent notamment de renforcer lrsquoagriculture en deacutevelop-pant les infrastructures rurales y compris le stockage des reacutecoltes les processus de transformation et le transport Elles permettent reacutegalement de reacuteduire la deacuteforestation Or outre le rocircle que la forecirct joue en matiegravere de biodiversiteacute les eacutecosystegravemes forestiers et agro-forestiers permettent de preacuteserver davantage drsquohumiditeacute dans les sols et ainsi de mieux maicirctriser le cycle de lrsquoeau mais aussi de limiter lrsquoeacuterosion due agrave des vents violents En bonne santeacute ces eacutecosystegravemes

permettent ainsi de renforcer la reacutesilience face aux impacts des changements climatiques

Les collectiviteacutes territoriales africaines sont deacutesormais leacutegitimes pour participer activement agrave la gestion et au deacuteveloppement de lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables et agrave son financement Malheureusement le manque de moyens financiers et de capaciteacutes hu-maines suffisantes handicape le processus de deacutecen-tralisation et les empecircche de planifier efficacement les investissements en faveur des eacutenergies renouvelables

Quel rOcircle Pour la coP21

La question de lrsquoeacutenergie est preacutesente de maniegravere trans-versale dans les neacutegociations internationales mais nrsquoest pas traiteacutee en tant que telle Les mots laquo eacutenergies fossiles raquo et laquo eacutenergies renouvelables raquo nrsquoapparaissent que deux ou trois fois dans le texte de neacutegociation Depuis plus de vingt ans les neacutegociations eacutechouent agrave reacuteduire les eacutemissions de GES en eacutevitant les ques-tions cleacutes quelles sont les eacutenergies responsables et quelles sont les solutions eacutenergeacutetiques face aux chan-gements climatiques Tant que le texte de lrsquoaccord et les engagements des pays ne se confronteront pas agrave cette question lrsquoaccord de Paris ne pourra envoyer les signaux neacutecessaires aux investisseurs et aux bailleurs pour comprendre lrsquourgence et la forme de la mutation eacutenergeacutetique neacutecessaire

Lrsquoaccord de Paris lrsquooccasion drsquoengager une transition eacutenergeacutetique en Afrique

Un des principaux enjeux de la Convention Climat depuis 1992 et de lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris fin 2015 est bien de reacuteduire au plus vite les eacutemissions de GES avant et apregraves 2020 Chaque Eacutetat est inviteacute agrave publier ses objectifs en matiegravere de climat dans sa contribution (CPDN iNDC en anglais) notamment pour reacuteduire la teneur carbone de sa production et de sa consommation eacutenergeacutetique Dans le cas des pays en deacuteveloppement les plus pauvres il ne srsquoagit pas de reacuteduire les eacutemissions de GES actuelles mais drsquoeacuteviter des eacutemissions futures gracircce agrave un soutien financier et technologique des pays historiquement

copy O

FED

I

16

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 17: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

responsables des changements climatiques Crsquoest lagrave une formidable opportuniteacute pour lrsquoAfrique de mettre en avant son potentiel en matiegravere drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et drsquoeacutenergie renouvelable pour obtenir des finance-ments climat pour des programmes qui permettront in fine de deacutevelopper rapidement lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous et donc un levier de lrsquoeacuteradication de la pauvreteacute Drsquoailleurs plusieurs pays africains comme le Maroc lrsquoEacutethiopie le Kenya ou encore Djibouti ont soumis des contributions particuliegraverement inteacuteressantes qui se basent notamment sur un fort deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et plusieurs pays africains et plus geacuteneacuteralement du Sud ont conditionneacute dans leur contribution un objectif drsquoatteacutenuation plus ambitieux agrave lrsquoobtention de finance-ments internationaux

La question des subventions aux eacutenergies fossiles

Mais ces efforts de deacuteveloppement seront annihileacutes si par ailleurs la communauteacute internationale continue drsquoinvestir dans les eacutenergies fossiles et de les subven-tionner alors que ce sont les principaux responsables des changements climatiques Lagrave encore la CCNUCC peut envoyer un signal fort aux investisseurs et in-dustriels et prendre les deacutecisions neacutecessaires pour marquer la fin progressive des eacutenergies fossiles et planifier la fin des subventions directes et indirectes qui leur sont accordeacutees alors mecircme qursquoelles beacuteneacuteficient principalement aux plus riches Cette fin planifieacutee des eacutenergies fossiles doit srsquoaccompagner drsquoune redirection de ces financements vers les eacutenergies renouvelables notamment pour les populations les plus pauvres Crsquoest lrsquooccasion de faire drsquoune pierre deux coups en soutenant lrsquoaccegraves des populations les plus deacutemunies aux services eacutenergeacutetiques durables

faire de lrsquoaccord de Paris un meacutecanisme qui renforce les engagements des pays

Au regard des contributions des pays deacutejagrave annonceacutees les efforts seront tregraves certainement insuffisants pour limiter lrsquoaugmentation de tempeacuterature en-deccedilagrave de 2degC drsquoougrave la neacutecessiteacute de pouvoir rehausser reacuteguliegraverement ces engagements Il est essentiel que lrsquoaccord de Paris

inclue une clause de reacutevision agrave la hausse de tous les engagements tous les cinq ans agrave commencer par ceux des pays pollueurs historiquement responsables des changements climatiques

Il y a eacutegalement un enjeu agrave investir massivement dans les secteurs drsquoavenir et sobres en gaz agrave effet de serre sans attendre lrsquoaccord de Paris Les rapports du PNUE sont clairs les principaux investissements et efforts ne peuvent attendre 2020 ils doivent ecirctre faits degraves aujourdrsquohui Pro

copy C

arreacute

Geacuteo

Env

ironn

emen

t

Pour aller plus loin sur la question

de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour

tous consulter la Note de deacutecryptage

sur lrsquoeacutenergie du Reacuteseau Climat amp

Deacuteveloppement 2015

17

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 18: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

teacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

Proteacuteger lrsquoagriculture familiale et la seacutecuriteacute alimentaire

eacutetat des lieux

Lrsquoagriculture secteur agrave la fois eacutemetteur de GES et vulneacuterable

Le secteur agricole est responsable drsquoenviron un tiers des eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre (GES) La moitieacute des eacutemissions agricoles est lieacutee agrave la deacutefores-tation La mise agrave disposition de nouvelles terres pour la production agricole entraicircne eacutegalement une libeacuteration de carbone Par ailleurs les exploitations agro-indus-trielles agrave grande eacutechelle sont fortement eacutemettrices de GES du fait de lrsquoutilisation de produits phytosanitaires et drsquoengrais Enfin la transformation puis le transport des marchandises contribuent eacutegalement aux eacutemissions de GES du secteur

La variabiliteacute des tempeacuteratures ainsi que leur hausse tendancielle la multiplication et lrsquointensiteacute accrue des pheacutenomegravenes climatiques extrecircmes constituent de seacuterieuses menaces pour lrsquoagriculture et en premier lieu les petits agriculteurs Les changements clima-tiques ont eacutegalement des impacts neacutegatifs sur les res-sources halieutiques et sur la distribution des stocks de poissons ndash et donc au final sur les populations qui deacutependent de ces ressources ndash en raison du deacutepla-cement des poissons et de lrsquoacidification des oceacuteans

La seacutecuriteacute alimentaire menaceacutee par les changements climatiques

La plus grande partie des populations des pays du Sud sont des petits producteurs et productrices qui vivent de lrsquoagriculture pluviale de la pecircche ou de lrsquoeacutelevage crsquoest-agrave-dire de moyens de subsistance tregraves fortement deacutependants des conditions climatiques et environne-mentales Les changements climatiques entraicircnent deacutejagrave et entraicircneront un affaiblissement ou une destruction de ces moyens de subsistance menaccedilant ainsi lrsquoaccegraves de ces populations aux ressources naturelles et donc leur seacutecuriteacute alimentaire

Le nombre de maladies des plantes augmentera constituant autant de risques pour les reacutecoltes La baisse des rendements agricoles contribuera certai-nement agrave la hausse des prix des produits alimentaires de base LrsquoIFPRI estime qursquoen inteacutegrant le facteur climatique les prix augmenteront de maniegravere sup-pleacutementaire de 23 agrave 37 pour le riz de 52 agrave 55 pour le maiumls de 94 agrave 111 pour le bleacute et de 11 agrave 14 pour le soja20

Entre 2030 et 2050 on srsquoattend agrave ce que les chan-gements climatiques entraicircnent pregraves de 250 000 deacutecegraves suppleacutementaires par an dus agrave la malnutrition au paludisme agrave la diarrheacutee et agrave la chaleur21 Alors qursquoactuellement 795 millions de personnes souffrent de la faim22 selon le PNUE 50 de la population mondiale sera en risque de sous-alimentation en 2050 du fait drsquoune augmentation de la demande et des changements climatiques (dans un sceacutenario agrave 2degC de reacutechauffement) contre environ 30 sans changements climatiques23

LrsquoAfrique particuliegraverement menaceacutee

Les impacts des changements climatiques en Afrique seront encore plus prononceacutes Si les tendances clima-tiques actuelles se confirment la production de bleacute pourrait y enregistrer une baisse de 10 agrave 20 drsquoici agrave 2030 compareacute aux rendements moyens des anneacutees 1998-200224 Globalement en Afrique subsaharienne un reacutechauffement drsquoenviron 2degC entraicircnerait aussi une reacuteduction de 10 du rendement agricole total drsquoici 2050 ce chiffre pouvant monter agrave 15 voire 20 dans le cas drsquoun reacutechauffement supeacuterieur25

Dans un sceacutenario laquo optimiste raquo de reacutechauffement qui resterait limiteacute agrave 2degC entre 350 et 600 millions drsquoAfricains souffriront drsquoun deacuteficit en eau et le taux de sous-alimentation en Afrique augmentera de 25 agrave 90 drsquoici agrave 2050 (90 pour lrsquoAfrique de lrsquoouest)26

20 Impact des chan-gements climatiques

sur lrsquoagriculture et les coucircts de lrsquoadaptation

Institut International de Recherches sur les

politiques alimentaires octobre 2009

21 Site internet de lrsquoOMS aoucirct 2014

22 FAO The State of Food Insecurity in the World

(SOFI) 2015

23 PNUE Africarsquos Adapta-tion Gap 2 Bridging the

gap ndash mobilising sources 2015

24 Richard Munang Jesica Andrews laquo LrsquoAfrique

face au changement climatique raquo Afrique

Renouveau Eacutedition Speacute-ciale Agriculture 2014

25 Bates BC ZW Kundzewicz S Wu and

JP Palutikof Eds Climate Change and Water IPCC

Technical Paper VI - June 2008 IPCC Secretariat

Geneva

26 Lloyd S J Kovats R S amp Chalabi Z (2011)

Climate Change Crop Yields and Undernutrition

Development of a Model to Quantify the Impact

of Climate Scenarios on Child Undernutrition Environmental Health

Perspectives

copy ENDA Energie

18

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 19: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoagriculture est un sujet complexe dans les neacutegocia-tions Une premiegravere raison est que lrsquoagriculture preacute-sente des enjeux agrave la fois pour lrsquoatteacutenuation et pour lrsquoadaptation La seconde renvoie au principe mecircme des neacutegociations lrsquoapproche de la CCNUCC nrsquoeacutetant pas agrave lrsquoorigine sectorielle Enfin lrsquoagriculture eacutetant un sujet hautement politique pour de nombreux Eacutetats les discussions sont tregraves conflictuelles en particulier sur la question de lrsquoatteacutenuation Les questions agricoles sont traiteacutees geacuteneacuteralement dans le texte sous le terme de laquo land use raquo crsquoest-agrave-dire drsquousage des terres

faire des neacutegociations climat une opportuniteacute pour lutter contre la faim et la pauvreteacute

La seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologique mdash doit consti-tuer un principe phare de lrsquoaccord de Paris et y ecirctre incluse de maniegravere opeacuterationnelle crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

La question de lrsquousage des terres et du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo

Certains pays proposent de drsquoadopter comme objec-tif de long terme27 dans lrsquoaccord non pas un objectif mondial de laquo zeacutero eacutemissions raquo de GES (drsquoici 2050 ou la fin du siegravecle) mais un objectif de laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo Ce dernier deacutenonceacute par de nombreuses orga-nisations de la socieacuteteacute civile permettrait aux Eacutetats et aux industries de continuer agrave eacutemettre des gaz agrave effet de serre sans modifier leur modegravele agricole industriel tout en se tournant vers des technologies de seacuteques-tration du carbone Le concept de laquo zeacutero eacutemissions nette raquo est ainsi utiliseacute par certains gouvernements et industriels pour srsquoexoneacuterer de tout engagement dans des actions reacuteelles et effectives de reacuteduction drsquoeacutemis-sions qui neacutecessitent lrsquoarrecirct de lrsquoexploitation et de la consommation drsquoeacutenergies fossiles et un changement de modegravele agricole Il pose par ailleurs de nombreux autres problegravemes

27 Lrsquoobjectif de long terme est lrsquoobjectif global que les pays signataires de lrsquoAccord de Paris doivent se donner pour guider leur action agrave long terme ndash agrave 2050 par exemple Lrsquoideacutee est de concreacutetiser lrsquoobjectif de contenir lrsquoaug-mentation de tempeacuterature mondiale en-deccedilagrave de 2degC en donnant un signal clair aux pays et aux inves-tisseurs sur la direction que les pays deacutecident de prendre collectivement

Drsquoune part la seacutequestration de carbone dans les forecircts ou les sols nrsquoest pas permanente contrairement aux reacuteductions drsquoeacutemissions lieacutees agrave lrsquoarrecirct de lrsquoutilisation des ressources fossiles28 Drsquoautre part le GIEC estime dans son 5e rapport que les sceacutenarios qui ont recours agrave la seacutequestration du carbone pour ne pas deacutepasser 2degC drsquoaugmentation de tempeacuterature neacutecessitent entre 500 millions et 6 milliards drsquohectares de terres deacutedieacutees au stockage du carbone Agrave titre de comparaison la production agricole mondiale srsquoeacutetend actuellement sur 15 milliards drsquohectares de terres et 6 milliards drsquohectares eacutequivalent au double de la surface de lrsquoAfrique La mobilisation de telles surfaces est tout agrave fait impossible et en tout eacutetat de cause ne pourrait conduire qursquoagrave un nouveau cycle drsquoaccaparement des terres qui aurait des conseacutequences dramatiques sur la seacutecuriteacute alimentaire

En outre les beacuteneacutefices potentiels des technologies de seacutequestration du carbone preacutesenteacutees dans le rapport du GIEC sont loin drsquoecirctre acquis la production indus-trielle drsquoagro-carburants peut se reacuteveacuteler encore plus eacutemettrice de GES que lrsquoutilisation drsquoeacutenergies fossiles29 la technologie de la capture et du stockage de car-bone est encore loin drsquoecirctre mature opeacuterationnelle et commercialisable agrave grande eacutechelle30 et les beacuteneacutefices reacuteels de la production de biochar sont eacutegalement mis en doute31 Enfin certaines pratiques comme lrsquoagro-eacutecologie paysanne permettent de seacutequestrer du carbone dans les sols sans remettre au cause les droits des populations locales et leur seacutecuriteacute alimen-

28 A rights-based approach to land use in a future climate agreement policy and implementation framework EIA and CIEL may 2015

29 Du Climate and Business Summit agrave la COP21 Quelles solutions pour le climat Action contre la Faim Agronomes et veacuteteacuterinaires sans frontiegraveres Amis de la Terre France CARE France CCFD-Terre Solidaire France Nature Environnement Gevalor Oxfam France Peuples Solidaires Reacuteseau Sortir du Nucleacuteaire Secours Catholique WECF mai 2015

30 Ibid

31 African Biodiversity Network Biochar Land Grabbing the Impacts on Africa 2010

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

19

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 20: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

taire Sur la question du laquo zeacutero eacutemissions nettes raquo et de maniegravere geacuteneacuterale il est crucial que lrsquoaccord de Paris prenne en consideacuteration les impacts de toute politique climatique sur la seacutecuriteacute alimentaire et les droits humains notamment au regard des mesures drsquoatteacutenuation concernant le secteur des terres

Eacutecarter les fausses solutions privileacutegier lrsquoadaptation et lrsquoagriculture familiale

LrsquoAlliance mondiale pour lrsquoagriculture intelligente face au climat (Global Alliance for a Climate Smart Agricul-ture ndash GACSA) a eacuteteacute lanceacutee agrave New York le 23 septembre 2014 lors du Sommet sur le Climat du Secreacutetaire Geacuteneacute-ral des Nations Unies Preacutesenteacutee comme une initiative majeure en matiegravere de lutte contre les changements climatiques dans lrsquoagriculture la GACSA ndash notamment soutenue par la France et les Eacutetats-Unis ndash et lrsquoinstitu-tionnalisation de laquo lrsquoagriculture intelligente face au climat raquo (CSA) qursquoelle propose sont tregraves preacuteoccupantes Les acteurs de cette Alliance refusent en effet toute deacutefinition du concept et tout cadre de redevabiliteacute et aucun critegravere social ou environnemental nrsquoest en lrsquoeacutetat preacutevu

En outre le monde paysan nrsquoy est que peu repreacutesenteacute contrairement aux geacuteants de lrsquoagro-alimentaire des engrais et pesticides industriels des semences et bio-technologies qui en sont deacutejagrave parties prenantes avec comme objectif de srsquoattribuer le label drsquolaquo agriculture intelligente face au climat raquo La GACSA nrsquoest en fait qursquoun promoteur de lrsquoagriculture intensive telle que pratiqueacutee agrave grande eacutechelle avec les conseacutequences que lrsquoon connaicirct en matiegravere drsquoimpacts sur lrsquoenvironnement et sur les populations

LrsquoAccord de Paris ne doit pas chercher agrave promouvoir un modegravele agricole baseacute sur lrsquoagrobusiness ou sur lrsquoaugmentation apparente de la productiviteacute des terres sans prise en compte des enjeux eacutecologiques et de seacutecuriteacute alimentaire Il ne doit pas non plus mettre en avant la Climate Smart Agriculture (laquo lrsquoagriculture intel-ligente face au climat raquo) et son Alliance mondiale en les inteacutegrant dans lrsquoAgenda des solutions par exemple32

Lrsquoenjeu veacuteritable est au contraire de srsquoorienter vers les vraies solutions qui permettent agrave la fois de reacutepondre aux enjeux drsquoatteacutenuation drsquoadaptation et de respect des droits humains Il srsquoagit donc de preacuteserver et financer les agricultures paysannes qui repreacutesentent la premiegravere forme drsquoagriculture dans le monde avec pregraves de 500 millions drsquoexploitations33 ainsi que les pratiques agro-eacutecologiques Faiblement eacutemettrices de GES ces derniegraveres sont les solutions les plus agrave mecircme de garantir la seacutecuriteacute alimentaire et nutritionnelle de tous drsquoameacuteliorer les rendements et les revenus des petits producteurs de deacutevelopper une agricul-ture durable et indeacutependante des eacutenergies fossiles et drsquoameacuteliorer la reacutesilience des paysans face aux eacuteveacutene-ments climatiques extrecircmes Les neacutegociations climat doivent eacutegalement permettre de soutenir notamment financiegraverement les strateacutegies drsquoadaptation qui viennent renforcer la capaciteacute de reacutesilience des communauteacutes et de leurs systegravemes alimentaires Prioriser lrsquoadaptation

32Le gouvernement franccedilais a proposeacute qursquoun

des piliers de lrsquoaccord de Paris soit laquo lrsquoAgenda

des solutions raquo dans lequel serait identifieacute un

ensemble drsquoinitiatives volontaires qui renforce-raient les efforts de lutte contre les changements

climatiques

33 Coordination SUD Recommandations de

la Commission Climat et Deacuteveloppement pour la

Confeacuterence de Lima sur le changement climatique

Les agricultures familiales sont incontournables

dans la lutte contre les changements climatiques

2014

copy D

R

20

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 21: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

eacutetat des lieux

Lrsquoadaptation une prioriteacute pour les pays en deacuteveloppement

Lrsquoadaptation est une prioriteacute pour les pays en deacutevelop-pement et notamment les pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables comme ceux drsquoAfrique sub-saharienne ou encore les petits Eacutetats insulaires En effet ce sont les pays les moins responsables des changements climatiques qui souffrent et souffriront le plus de leurs dommages humains et eacuteconomiques alors mecircme que leurs capaciteacutes de reacuteponse sont souvent limiteacutees

Les effets ricochets des impacts des changements climatiques

Les changements climatiques ont deacutejagrave et auront un impact de plus en plus grave sur la production agricole et lrsquoeacutelevage la stabiliteacute des eacutecosystegravemes dont vivent de nombreuses communauteacutes la disponibiliteacute de lrsquoeau et in fine sur la seacutecuriteacute alimentaire la santeacute humaine les modes de vie et les cultures Sans actions immeacutediates et agrave plus long terme les efforts en matiegravere de lutte contre la pauvreteacute de promotion des droits humains drsquoaccegraves agrave la santeacute et agrave la digniteacute seront annihileacutes et la capaciteacute mecircme de deacuteveloppement de nombreux pays en particulier africains sera menaceacutee En effet les impacts des changements climatiques amoindrissent les impacts positifs des politiques de lutte contre la pauvreteacute Ainsi de mauvaises reacutecoltes dues agrave un retard des pluies ou de fortes seacutecheresses vont reacuteduire for-tement les revenus des agriculteurs qui risqueront de devoir sacrifier la possibiliteacute de se soigner ou drsquoenvoyer leurs enfants agrave lrsquoeacutecole

Par ailleurs les initiatives drsquoadaptation permettent souvent de geacuteneacuterer des ressources et de contribuer agrave la reacuteduction de la pauvreteacute Ainsi la pratique de lrsquoagro-foresterie qui permet notamment de lutter contre

lrsquoavanceacutee du deacutesert dans le Sahel permet aussi de reacuteduire les deacutepenses en engrais chimiques et de diversifier les revenus des agriculteurs par la vente de fruits Enfin toute planification du deacuteveloppement qui nrsquointegravegrerait pas dans sa conception et sa reacutealisa-tion lrsquoadaptation aux changements climatiques futurs entraicircne des risques de mal-adaptation Des mises au rebus preacutematureacutees de ces infrastructures pourraient ecirctre rendues neacutecessaires ce qui nrsquoirait pas sans sur-coucircts pour financer de nouvelles infrastructures mieux adapteacutees au contexte climatique et agrave ses impacts

Au-delagrave de lrsquoadaptation les pertes et dommages

Mecircme si le reacutechauffement climatique peut ecirctre limiteacute agrave 2degC il est deacutesormais certain que certaines populations ou pays subiront des dommages parfois dramatiques Il nrsquoexiste pas de deacutefinition officielle des laquo pertes et dommages raquo mais lrsquoexpression fait globalement reacutefeacute-rence aux preacutejudices irreacuteversibles subis en raison des changements climatiques et qui ne peuvent pas ecirctre eacuteviteacutes par des efforts drsquoatteacutenuation ou drsquoadaptation

Agrave titre drsquoexemple la hausse du niveau des oceacuteans engendrera des pertes et dommages tregraves eacuteleveacutes La population mondiale a tendance agrave se concentrer sur les cocirctes 600 millions de personnes vivent dans des reacutegions cocirctiegraveres agrave moins de 10 megravetres au-dessus du niveau de la mer et 150 millions de personnes ne sont qursquoagrave un megravetre de la mareacutee haute Selon le dernier rapport du GIEC un reacutechauffement de 2degC conduirait agrave une hausse du niveau des mers de 70 cm drsquoici 2080 tandis qursquoun reacutechauffement de 4degC provoquerait une hausse de 1 megravetre du niveau des mers drsquoici 2100 ce qui toucherait 700 millions de personnes34 Cependant les pertes et dommages irreacuteversibles ne se limitent pas aux impacts lieacutes agrave la hausse du niveau des mers on peut citer notamment les deacuteplacements forceacutes de populations la perte de leurs terres de leur identiteacute culturelle et de leur droit agrave la digniteacute

34 Partie 1 du 5egraveme rapport IPCC The physical science basis Climate Change 2013 Working group 1 technical support unit Cambridge University Press 2013

Prioriser lrsquoadaPtation et les Pertes et dommages au mecircme titre Que lrsquoatteacutenuation

et les pertes et dommages au mecircme titre que lrsquoatteacutenuation

copy Hindou O Ibrahim

21

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 22: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Des communauteacutes et populations plus vulneacuterables que drsquoautres

Les populations les plus deacutependantes des ressources naturelles comme les petits agriculteurs et popula-tions agro-pastorales les populations autochtones et les femmes sont les groupes les plus toucheacutes par les changements climatiques Ils sont eacutegalement ceux qui ont le moins de capaciteacute agrave srsquoadapter en raison de leur accegraves limiteacute aux ressources (financiegraveres fonciegraveres etc) et de leur faible controcircle sur ces ressources

Les ineacutegaliteacutes sont un vecteur suppleacutementaire de vul-neacuterabiliteacute Ainsi les ineacutegaliteacutes hommes femmes lrsquoacircge la cateacutegorie sociale ou lrsquoappartenance ethnique sont des facteurs deacuteterminants du niveau de vulneacuterabiliteacute des populations Il est donc essentiel drsquoadopter une analyse diffeacuterencieacutee en fonction de ces facteurs afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques des populations et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees La participation des populations facilite lrsquoidentification de ces vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et permet eacutegalement drsquoassurer leur appropriation et de renforcer lrsquoimpact des projets

Le rocircle cleacute des populations dans lrsquoadaptation face aux changements climatiques

Neacuteanmoins les populations vulneacuterables sont eacutegale-ment sources de solutions Ainsi les femmes et les populations autochtones sont garantes de savoirs et de capaciteacutes drsquoadaptation speacutecifiques qursquoil est neacutecessaire de preacuteserver et de diffuser notamment parce qursquoils sont souvent agrave la base des strateacutegies drsquoadaptation les plus efficaces pour toute la communauteacute (en matiegravere drsquoeacutener-gie de seacutecuriteacute alimentairehellip) Ainsi les connaissances traditionnelles permettent souvent aux agriculteurs etou aux eacuteleveurs agrave partir de lrsquoobservation de leur envi-ronnement drsquoestimer les tendances meacuteteacuteorologiques pour la saison ou lrsquoanneacutee

Quel rOcircle Pour la coP21

Lrsquoadaptation prioriteacute des pays les plus vulneacuterables et de leurs populations doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation tout comme les pertes et dommages En effet mecircme si les actions en termes drsquoatteacutenuation permettent de rester en-deccedilagrave de 2degC (voire 15degC) les besoins financiers en termes drsquoadap-tation et de pertes et dommages sont et seront tregraves importants et concerneront tous les pays

Le manque drsquoambition globale actuelle en matiegravere de reacuteduction des eacutemissions de gaz agrave effet de serre a un impact direct sur les besoins financiers en termes drsquoadaptation et de pertes et dommages si les efforts pour reacuteduire les eacutemissions mondiales de gaz agrave effet de serre ne sont pas suffisants les besoins en matiegravere drsquoadaptation et de pertes et dommages deacutejagrave tregraves im-portants augmenteront drsquoautant plus et si les efforts en matiegravere drsquoadaptation sont trop faibles les pertes et dommages seront lagrave encore plus conseacutequents

Ce lien direct entre atteacutenuation adaptation et pertes et dommages doit se traduire drsquoune part dans lrsquoadoption drsquoun Objectif Global pour lrsquoAdaptation qui soit directe-ment fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation Drsquoautre part des cycles de revue de 5 ans pour les strateacutegies drsquoadaptation devront ecirctre articuleacutes avec les cycles de revue des politiques drsquoatteacutenuation ainsi que des flux et besoins financiers afin que lrsquoeacutetat drsquoavancement en matiegravere drsquoatteacutenuation informe le niveau drsquoadaptation neacutecessaire et les financements correspondants

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur

lrsquoadaptation du Reacuteseau Climat

amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

22

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 23: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

copy UNFCCC

eacutetat des lieux

Des engagements existants

La Convention Climat contient deux principes phares pour guider lrsquoaction des pays un principe de laquo res-ponsabiliteacutes communes mais diffeacuterencieacutees raquo des Eacutetats et un principe de solidariteacute par lequel la Convention appelle les pays deacuteveloppeacutes agrave appuyer financiegraverement et technologiquement les pays en deacuteveloppement La traduction opeacuterationnelle de ces principes reste objet de deacutebat mais ils peuvent cependant servir col-lectivement de normes pour eacutevaluer et comparer les meacutecanismes et engagements financiers climat

Agrave Copenhague fin 2009 les pays deacuteveloppeacutes srsquoeacutetaient engageacutes agrave mobiliser collectivement 100 milliards de dollars par an drsquoici agrave 2020 pour appuyer les efforts de lutte contre les changements climatiques dans les pays en deacuteveloppement Ils srsquoeacutetaient eacutegalement engageacutes agrave deacutemontrer leur bonne foi et acceacuteleacuterer les efforts en deacuteboursant 30 milliards de dollars entre 2010 et 2012 Enfin ils avaient acteacute la creacuteation du Fonds Vert pour le climat premier fonds reacutegi par la CCNUCC deacutedieacute agrave la lutte contre les changements climatiques et accessible agrave lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement (agrave la diffeacuterence des autres fonds existants)

Le paysage des financements climat

Plusieurs types de flux financiers publics et priveacutes dons et precircts et provenant agrave la fois de sources nationales et internationales permettent de financer la lutte contre les changements climatiques Via les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux transitent les fonds publics qui per-mettent dans certains cas de lever des financements du secteur priveacute Le foisonnement des financements climat se traduit par un manque de coordination au niveau international et creacutee un fardeau administratif suppleacutementaire dans les pays beacuteneacuteficiaires

La CCNUCC a creacuteeacute plusieurs fonds deacutedieacutes agrave lrsquointer-vention climatique pour le financement des mesures drsquoatteacutenuation et drsquoadaptation Ces fonds sont dits laquo multilateacuteraux raquo et gegraverent des financements publics En 2013 ils repreacutesentaient 600 millions drsquoeuros par

an Depuis la premiegravere capitalisation du Fonds Vert en 2014 a permis drsquoobtenir environ 10 milliards de dollars drsquoengagements ndash un premier pas neacutecessaire mais agrave mettre au regard de lrsquoengagement de 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 Pour le Fonds Vert ces montants seront accordeacutes sous forme de dons ou de precircts sur une peacuteriode de 4 ans (2015-2018) 50 des financements de ce Fonds sont destineacutes agrave lrsquoatteacutenuation et 50 agrave lrsquoadaptation dont la moitieacute doit aller aux pays particuliegraverement vulneacuterables en particulier les Eacutetats africains ce dont la socieacuteteacute civile se feacutelicite

En dehors de la CCNUCC il existe trois cateacutegories de fonds Drsquoune part les fonds bilateacuteraux et multilateacuteraux pour le deacuteveloppement et lrsquoenvironnement (Banque Mondiale AFDhellip) qui contribuent dans une certaine mesure au financement de la lutte contre les change-ments climatiques mais continuent bien souvent par ailleurs de financer des projets incompatibles avec cette derniegravere au nom du deacuteveloppement Par ailleurs certains pays deacuteveloppeacutes ont eacutegalement creacuteeacute des fonds bilateacuteraux deacutedieacutes agrave la lutte contre les changements climatiques Enfin plusieurs fonds multilateacuteraux heacuteber-gent des initiatives deacutedieacutees au climat dont plusieurs ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lrsquoinitiative de la Banque Mondiale

Les besoins de financements

Selon le PNUE lrsquoadaptation dans lrsquoensemble des pays en deacuteveloppement pourrait coucircter 150 milliards de dollars drsquoici 20252030 et entre 250 et 500 milliards de dollars par an drsquoici 2050 ndash et ce mecircme si la commu-nauteacute internationale reacuteussit agrave limiter le reacutechauffement climatique en deccedilagrave de 2degC35

Pour lrsquoAfrique seule ce coucirct repreacutesente deacutejagrave 7 agrave 15 milliards de dollars par an pour lrsquoadaptation drsquoici 2020 et pourrait atteindre 50 milliards de dollars par an en 2050 ndash dans le sceacutenario le plus optimiste et sans tenir compte des coucircts de la transition eacutenergeacutetique36 LrsquoAfrique a en outre besoin drsquoinvestir dans son potentiel drsquoeacutenergies renouvelables et drsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cela neacutecessite des investissements initiaux importants qui deviendront rentables mais peuvent difficilement ecirctre porteacutes par des pays tregraves pauvres et fortement endetteacutes

35 UNEP 2014 The Adaptation Gap Report 2014 United Nations Environment Programme (UNEP) Nairobi

36 Africarsquos Adaptation Gap 2 Technical Report Bridging the gap ndash Mobi-lising sources AMCEN UNEP Climat Analytics African Climat Finance Hub 2015

Mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatique

mobiliser les financements agrave la hauteur du deacutefi climatiQue

23

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 24: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Des contributions financiegraveres insuffisantes et trop souvent inadapteacutees

De maniegravere geacuteneacuterale il est tregraves difficile de compta-biliser les financements climat car les pays bailleurs comptabilisent des flux tregraves diffeacuterents ce qui geacutenegravere des estimations extrecircmement varieacutees La France par exemple comptabilise la valeur totale de ses precircts et non leur partie concessionnelle le Japon quant agrave lui comptabilise des financements priveacutes et ses garanties de creacutedit agrave lrsquoexport

Dans de nombreux cas les financements climat sont deacutebourseacutes sous forme de precircts Entre 44 et 51 des flux financiers laquo climat raquo (issus des fonds multilateacuteraux APD deacutedieacutes) sont deacutecaisseacutes sous forme de dons La France a principalement recours agrave des precircts au taux du marcheacute ou tregraves peu concessionnels Les dons ne repreacutesentaient en 2014 que 7 des financements climat deacuteclareacutes par lrsquoAgence Franccedilaise de Deacuteveloppement

En outre dans la plupart des cas ces financements sont comptabiliseacutes deux fois une fois pour le climat et une fois pour lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement (APD) alors mecircme qursquoil est neacutecessaire de mobiliser des ressources publiques additionnelles pour reacutepondre agrave la fois aux enjeux du deacuteveloppement et agrave ceux des changements climatiques qui repreacutesentent un surcoucirct De plus trop souvent les pays bailleurs ndash dont la majoriteacute ne respectaient deacutejagrave pas lrsquoobjectif de deacutedier 07 de leur revenu national brut agrave lrsquoAPD ndash redirigent des financements existants du deacuteveloppement vers la

lutte contre les changements climatiques Cela signifie que les efforts consentis pour le climat se font au deacutetri-ment drsquoautres enjeux cleacute du deacuteveloppement comme lrsquoeacuteducation ou la santeacute

Par ailleurs une majoriteacute des financements climat est alloueacutee aux projets drsquoatteacutenuation Selon le rapport 2014 du Comiteacute permanent des financements seuls 11 agrave 24 des financements climat visent lrsquoadaptation alors que crsquoest sur ce volet qursquoune majoriteacute de pays expriment des besoins importants En outre une par-tie de ces financements eacutetiqueteacutes laquo adaptation raquo est deacutebourseacutee sous forme de precircts qui ne reacutepondent pas aux enjeux drsquoadaptation et de planification des pays les plus deacutemunis et deacutejagrave lourdement endetteacutes

Au final on voit encore mal aujourdrsquohui comment la communauteacute internationale sera en mesure de mobili-ser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et aucun meacutecanisme nrsquoa eacuteteacute eacutetabli pour ce faire

LrsquoAfrique le parent pauvre des financements climat

Les financements climat ont jusqursquoagrave preacutesent cibleacute en prioriteacute lrsquoAsie et le Pacifique LrsquoAfrique apparaicirct comme le parent pauvre des bailleurs climat on estime que seuls 1 agrave 2 milliards de dollars sont mobiliseacutes chaque anneacutee pour lrsquoadaptation en Afrique agrave travers diffeacuterentes sources (fonds climat aide bilateacuterale etc) Mais les donneacutees plus preacutecises de CFU37 reacutevegravelent que depuis

37 Climate Funds Update Note reacutegionale sur le

financement climatique Afrique subsaharienne (note 7) octobre 2014

copy R

AC

24

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 25: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

2003 seulement 23 milliard $ ont eacuteteacute octroyeacutes (via des fonds deacutedieacutes au climat) en Afrique subsaharienne dont 600 millions $ approuveacutes en 2014 Seuls 45 de ces financements sont deacutedieacutes aux mesures drsquoadaptation niveau bien infeacuterieur aux 7 agrave 15 milliards $ annuels estimeacutes neacutecessaires pour financer les seuls besoins drsquoadaptation de la reacutegion jusqursquoen 2020 En sachant que plus de 45 de la population africaine vit dans des pays disposant de la plus faible capaciteacute drsquoadaptation au monde il est crucial drsquoinvestir dans les systegravemes de services sociaux de base ainsi que dans le renfor-cement des capaciteacutes institutionnelles

En matiegravere drsquoatteacutenuation lrsquoAfrique eacutemettant peu de GES nrsquoest pas non plus prioritaire dans lrsquoattribution des financements Agrave titre drsquoexemple lrsquoAfrique nrsquoa repreacute-senteacute qursquoenviron 2 des investissements au titre du Meacutecanisme de Deacuteveloppement Propre Il est pourtant essentiel de permettre au continent de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous en eacutevitant de srsquoengager dans des modes de deacuteveloppement baseacutes sur des eacutenergies fossiles

Selon les conclusions de la banque mondiale en 2013 moins drsquoun tiers des financements climat approuveacutes pour lrsquoAfrique a eacuteteacute deacutecaisseacute Lrsquoune des barriegraveres pour lrsquoaccegraves aux financements climat en Afrique reste la capaciteacute drsquoabsorption limiteacutee des pays Ceci a pour conseacutequence qursquoune grande partie des financements destineacutes aux pays africains sont preacuteleveacutes par des inter-meacutediaires Depuis quelques anneacutees plusieurs pays africains cherchent agrave renforcer leurs entiteacutes nationales pour pouvoir directement beacuteneacuteficier des financements internationaux sans intermeacutediaires coucircteux Cepen-dant seules les entiteacutes nationales du Rwanda et du Seacuteneacutegal ont reacuteussi agrave obtenir un financement de pro-gramme aupregraves du Fonds drsquoadaptation

Quel rOcircle Pour la coP21

Le volet financier de la COP21 agrave Paris comprend plu-sieurs dimensions cleacutes Drsquoune part les pays deacuteveloppeacutes doivent respecter leur engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 pour financer un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques dans les pays en deacuteve-loppement Drsquoautre part de nouveaux engagements financiers pour la peacuteriode drsquoapregraves 2020 doivent ecirctre ancreacutes dans lrsquoaccord de Paris pour financer agrave la fois

lrsquoadaptation et la reacuteduction des eacutemissions futures de GES Une majoriteacute de pays en deacuteveloppement ont proposeacute des plans de reacuteduction de leurs eacutemissions qui neacutecessitent des financements internationaux pour pouvoir ecirctre mis en œuvre dans leur totaliteacute Si les investissements dans lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique et les eacutenergies renouvelables seront rentables dans la dureacutee le coucirct initial est souvent trop important pour ecirctre supporteacute par des pays fortement endetteacutes pauvres avec de faibles ressources financiegraveres et un secteur priveacute peu deacuteveloppeacute La COP21 est lrsquooccasion pour les acteurs financiers et les bailleurs de srsquoengager agrave investir massivement et sans attendre dans ces domaines Les instruments financiers doivent ecirctre adapteacutes aux speacutecificiteacutes et difficulteacutes des pays viseacutes notamment en Afrique et ne doivent pas viser une rentabiliteacute agrave tregraves court terme Enfin le financement de lrsquoadaptation neacutecessite des ressources publiques notamment parce qursquoelle nrsquoest geacuteneacuteralement pas consideacutereacutee comme rentable et nrsquoattire pas les financeurs priveacutes

La COP21 doit donc permettre de mobiliser des finan-cements adapteacutes ndash crsquoest agrave dire publics ndash pour le deacuteve-loppement de lrsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie durable pour tous et lrsquoadaptation dans les pays en deacuteveloppement et de faciliter les transferts de technologies Cela neacutecessite la creacuteation de meacutecanismes financiers permettant de geacuteneacuterer des recettes publiques automatiques et preacute-visibles pour garantir lrsquoatteinte des engagements pris Heureusement les solutions existent taxer le transport maritime et aeacuterien taxer les transactions financiegraveres en Europe Ce qui manque aujourdrsquohui crsquoest la volonteacute politique de les mettre en oeuvre

Les modaliteacutes drsquoattribution des financements sont eacutegalement un sujet crucial il est essentiel que les financements soient en majoriteacute destineacutes aux pays les plus pauvres et qursquoils soient distribueacutes de maniegravere plus eacutequilibreacutee entre lrsquoadaptation et lrsquoatteacutenuation Enfin une dimension essentielle sera la reacuteorientation des investis-sements de maniegravere agrave ce qursquoils soient tous compatibles avec les objectifs de lutte contre les changements climatiques et de respect des droits humains

Pour aller plus loin consulter la Note de

deacutecryptage sur les financements climat du

Reacuteseau Climat amp Deacuteveloppement 2015

25

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 26: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

copy D

EMI-E

Nig

er

Reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les politiques climat

reacuteduire les ineacutegaliteacutes de genre dans les PolitiQues climat

eacutetat des lieux

Les ineacutegaliteacutes de genre un facteur de vulneacuterabiliteacute speacutecifique pour les femmes

Le fait drsquoecirctre un homme ou une femme constitue souvent un deacuteterminant significatif du niveau de risque auquel une personne est confronteacutee face aux chocs clima-

tiques et aux modifications de lrsquoenvironnement et de lrsquoeacuteconomie Les moyens de subsistance des femmes deacutependent en grande partie des ressources naturelles (lrsquoeau les produits de la forecirct lrsquoagriculture) et sont fortement tributaires des aleacuteas climatiques Les impacts des changements climatiques (deacutegradation des terres et des forecircts baisse des rendements etc) conduisent agrave la rareacutefaction des ressources rendant plus difficiles les activiteacutes meneacutees par les femmes Ainsi ce sont majori-tairement les femmes et les filles qui sont chargeacutees de la corveacutee drsquoeau dans les zones rurales des pays du Sud Lorsque la ressource en eau se rareacutefie elles doivent aller en chercher toujours plus loin avec des trajets parfois dangereux qui leur prennent plus de temps

Par ailleurs les ressources et les options dont disposent les individus pour reacutepondre agrave ces chocs et modifi-cations sont eacutegalement fortement deacutependantes des normes et attentes sociales lieacutees au genre Lrsquoaccegraves des femmes aux ressources eacuteconomiques et productives et le controcircle limiteacute qursquoelles en ont mais aussi les obs-tacles rencontreacutes dans lrsquoexercice de leurs droits consti-tuent des difficulteacutes suppleacutementaires pour srsquoadapter aux changements climatiques On observe ainsi dans de nombreux pays un accegraves restreint des femmes agrave lrsquoinformation climatique au marcheacute aux ressourceshellip

Agrave titre drsquoexemple si les femmes produisent 60 agrave 80 des ressources alimentaires issues de petites exploitations agricoles elles ne deacutetiennent que 10 agrave 20 des titres de proprieacuteteacute fonciegravere dans les pays en deacuteveloppement Crsquoest encore plus prononceacute en Afrique ougrave seulement 2 drsquoentre elles ont un accegraves agrave la terre

alors qursquoelles contribuent agrave 80 de la production de la nourriture38 Les femmes voient donc leur palette drsquooptions et de capaciteacutes drsquoadaptation extrecircmement reacuteduite lorsque leurs terres ne sont plus cultivables

Ces ineacutegaliteacutes se retrouvent eacutegalement dans la question de lrsquoeacutenergie La principale source drsquoeacutener-gie utiliseacutee en Afrique est la biomasse De la mecircme maniegravere que pour lrsquoeau ce sont tregraves majoritairement les femmes qui effectuent la corveacutee de bois avec des trajets qui srsquoallongent de plus en plus en raison de la deacuteforestation et des segravecheresses reacutecurrentes Par ailleurs les populations rurales utilisent encore tregraves largement des foyers traditionnels tregraves voraces en bois qui entraicircnent principalement pour les femmes et les enfants de seacuterieux problegravemes de santeacute (infections respiratoires pulmonaires oculaires etc) dus agrave la fumeacutee ainsi que des risques de brucirclure ou drsquoincendies

Les femmes vectrices de solutions

Si les femmes et les filles sont plus affecteacutees par les changements climatiques que les hommes et les garccedilons elles jouent un rocircle essentiel dans la lutte contre les changements climatiques en apportant des solutions concregravetes en premier lieu agrave lrsquoeacutechelle com-munautaire gracircce agrave leurs connaissances expeacuteriences et savoir-faire Elles jouent en effet un rocircle cleacute afin drsquoassurer la seacutecuriteacute alimentaire et fournir les moyens drsquoexistence agrave leurs familles et aux communauteacutes gracircce agrave leur gestion de lrsquoeacuteconomie domestique et des ressources naturelles agrave leurs activiteacutes geacuteneacuteratrices de revenus et agrave leur participation agrave de nombreuses institutions socioculturelles politico-eacuteconomiques et de protection de lrsquoenvironnement agrave travers des groupements et associations

En outre le deacuteveloppement des eacutenergies renouve-lables et la promotion de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique per-met de geacuteneacuteraliser lrsquoaccegraves agrave des services eacutenergeacutetiques (eacuteclairage cuisson et activiteacutes productives) En corol-laire la charge de travail des femmes est reacuteduite et elles peuvent deacutegager du temps pour drsquoautres tacircches qui peuvent ecirctre geacuteneacuteratrices de revenus Au-delagrave les

38 Recherche sur le genre et les changements clima-

tiques dans lrsquoagriculture et la seacutecuriteacute alimentaire

pour le deacuteveloppement rural 2egraveme eacutedition FAO

CCAFS 2013

26

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 27: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

effets positifs importants sur les femmes en termes drsquoeacuteducation drsquoalphabeacutetisation de nutrition de santeacute drsquoopportuniteacutes eacuteconomiques et drsquoimplication dans les affaires communautaires seront beacuteneacutefiques pour tous les membres de la famille

Quel rOcircle Pour la coP21

Assurer lrsquoeacutequilibre des genres dans la participation

Les organisations laquo Femmes et Genre raquo repreacutesentent lrsquoun de neufs groupes drsquoobservateurs au sein de la CCNUCC Par ailleurs plusieurs organisations internatio-nales et de la socieacuteteacute civile travaillent sur les questions lieacutees au genre et au climat

Lrsquoeacutequilibre entre les sexes est un indicateur important de la participation des femmes dans le processus de prise de deacutecision et les femmes continuent agrave ecirctre sous-repreacutesenteacutees dans de nombreuses deacuteleacutegations dans les organes de la Convention mais aussi au niveau deacutecisionnel dans les pays qui font face aux plus grands risques climatiques Lrsquoaccord de Paris devra donc favoriser une large participation des femmes dans les processus drsquoeacutelaboration de mise en œuvre suivi et eacutevaluation des politiques et actions de lutte contre les changements climatiques

Assurer lrsquointeacutegration du genre dans les politiques climatiques

La mise en œuvre de lrsquoeacutegaliteacute de genre dans les solu-tions climatiques deacutefinies aux niveaux international reacutegional national et local reste le plus grand deacutefi agrave relever Il est donc essentiel drsquoassurer lrsquoeacutegaliteacute des

genres comme un principe directeur de la lutte contre les changements climatiques et la reconnaissance des impacts diffeacuterencieacutes sur les hommes et les femmes afin drsquoidentifier les vulneacuterabiliteacutes et besoins speacutecifiques et de pouvoir formuler et mettre en œuvre des solutions reacuteellement adapteacutees

Lrsquoobjectif est eacutegalement de passer drsquoapproche laquo gender-sensitive raquo agrave une approche laquo gender-responsive raquo crsquoest-agrave-dire de passer de la prise en compte des capaciteacutes besoins et prioriteacutes des hommes et des femmes et des reacutepercussions des deacutecisions sur la situation des femmes par rapport aux hommes agrave leur inteacutegration reacuteelle dans la budgeacutetisation et la mise en œuvre afin de reacuteduire les ineacutegaliteacutes Il srsquoagit enfin de faire de cette approche une reacutealiteacute en inscrivant lrsquoeacutegaliteacute des genres dans le chapeau opeacuterationnel du texte de lrsquoAccord et en le deacuteclinant de maniegravere opeacuterationnelle dans les diffeacuterentes theacutematiques de lrsquoaccord et dans les politiques programmes et projets agrave tous les niveaux

copy D

EMI-E

Nig

ercopy

WSP

Des

sin

baseacute

sur

une

ideacutee

B M

omm

en U

NIC

EF

Les femmes Trop occupeacutees pour parler des questions drsquoeau

27

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 28: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

copy Hindou O Ibrahim

Proteacuteger le climat ET les droits humains

Proteacuteger le climat et les droits humains

eacutetat des lieux

Les changements climatiques une menace pour les droits humains

Les changements climatiques sont une menace pour les Eacutetats et les populations Leurs conseacutequences fragi-lisent voire remettent en cause lrsquoaccegraves agrave des services essentiels comme lrsquoeau lrsquoalimentation ou la santeacute et deviennent reacuteguliegraverement des catalyseurs de conflits intercommunautaires voire intereacutetatiques Les change-ments climatiques constituent ainsi une menace pour les droits des populations et en particulier de certaines cateacutegories deacutejagrave tregraves vulneacuterables comme les femmes les populations autochtones les agriculteurs pauvres ou les socieacuteteacutes traditionnelles Ces personnes vivent par essence au plus pregraves de leur environnement et doivent leur survie agrave la production et la preacuteservation des ressources naturelles En outre certains projets et investissements internationaux qui ont des impacts neacutegatifs sur le climat dans les pays en deacuteveloppement creacuteent des risques sociaux et environnementaux graves pour les communauteacutes locales et les peuples autoch-tones On constate de nombreux cas de violation des droits fonciers des droits humains et de deacutegradation environnementale lieacutes aux projets miniers ou forestiers par exemple

Un paradoxe les droits humains bafoueacutes au nom du climat

Certains projets preacutesenteacutes comme des solutions agrave lrsquourgence climatique sont en fait sources de problegravemes sociaux sanitaires et alimentaires pour les populations ndash crsquoest par exemple le cas de la politique de deacuteveloppe-ment des agro-carburants qui se traduit par un accapa-rement des terres agricoles destineacutees agrave la production vivriegravere ou des projets de grands barrages pour la pro-duction drsquoeacutelectriciteacute laquo propre raquo qui exproprient et privent de leurs terres les communauteacutes locales39 De nombreux

39Pour en savoir plus sur les grands barrages consulter la Publication des Amis de la Terre Agrave

qui profitent vraiment les grands barrages

droits sont ainsi menaceacutes droit agrave lrsquoalimentation droit foncier droit agrave la santeacute droit agrave un logement droit agrave lrsquoeau droit agrave lrsquoeacuteducation droit agrave lrsquoeacutenergie et plus geacuteneacuteralement le droit agrave une vie digne et le droit au deacuteveloppement

Une transition juste et eacutequitable

Se pose eacutegalement la question drsquoune transition juste et eacutequitable qui peut se reacutealiser via lrsquointeacutegration de lrsquoapproche baseacutee sur les droits dans les changements climatiques Par exemple la lutte contre les change-ments climatiques implique de fermer les centrales eacutelectriques fonctionnant agrave base drsquoeacutenergies fossiles Ceci doit se faire en permettant la creacuteation de nou-veaux emplois pour les personnes qui travaillaient dans ce secteur afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des popula-tions impliqueacutees

Lrsquoinformation et la participation trop souvent insuffisantes

Afin drsquoassurer la prise en compte des droits des populations les Eacutetats ont le devoir drsquoinformer les populations sur lrsquoenvironnement et de permettre leur participation dans la gestion de lrsquoenvironnement lrsquoeacutelaboration la mise en œuvre et lrsquoeacutevaluation des politiques et projets Or ces mesures drsquoinformation et de consultation font trop souvent deacutefaut aujourdrsquohui Ainsi alors que de nombreuses normes nationales et internationales preacutevoient que les communauteacutes soient consulteacutees avant lrsquoapprobation drsquoun projet et la reconnaissance des droits des peuples autochtones dans leurs territoires le projet de barrage de Santa Rita au Guatemala a eacuteteacute lanceacute sans que les commu-nauteacutes Qrsquoechi de la reacutegion ne reccediloivent de reacuteponse agrave leurs demandes drsquoinformations sur ce projet qui menace leurs droits drsquoaccegraves agrave lrsquoeau agrave une alimen-tation adeacutequate et agrave leur liberteacute de mouvement40

40WATCH THIS Lettre drsquoInformation ONG 11

laquo Barrage hydroeacutelectrique de Santa Rita Une

histoire de douleur raquo Carbon Market Watch 29

avril 201528

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 29: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

Lrsquoapproche par les droits

Lrsquoapproche baseacutee sur les droits humains est fondeacutee sur la mise en œuvre des normes de protection et de promotion des droits humains et lrsquoeacutelaboration des politiques sur la base du laquo droit raquo et non du laquo besoin raquo Cette approche implique qursquoun droit contrairement agrave un besoin est opposable Sa mise en œuvre neacutecessite donc la creacuteation drsquoun meacutecanisme juridique indeacutepen-dant permettant aux personnes ou aux groupes qui estiment que leurs droits ont eacuteteacute violeacutes de deacuteposer une plainte Enfin ceci doit deacuteboucher sur un processus qui identifie un responsable garantisse la protection du droit et le cas eacutecheacuteant permette une reacuteparation agrave la hauteur des deacutegacircts engendreacutes

Une approche baseacutee sur les droits revient eacutegalement agrave prioriser entre diffeacuterentes options possibles drsquoatteacute-nuation ou drsquoadaptation celles qui ne renforcent pas la vulneacuterabiliteacute des personnes affecteacutees ou en engendrent de nouvelles mais qui permettent au contraire de proteacuteger ces personnes et de renforcer leurs capaciteacutes agrave avoir une vie digne

Des normes internationales insuffisantes

Plusieurs structures des Nations Unies et rapporteurs speacuteciaux qui travaillent sur les droits reconnaissent tregraves clairement lrsquoimpact des changements climatiques sur les droits humains En mars 2008 le Conseil des Droits de lrsquoHomme organe des Nations unies deacuteclarait ainsi que Les changements climatiques font peser une menace immeacutediate et de grande ampleur sur les populations et les communauteacutes de par le monde et ont des reacutepercussions sur la jouissance effective des droits de lrsquohomme

Plusieurs normes principes et lignes directrices pro-tegravegent les droits humains dont les droits des peuples autochtones Ainsi la Convention ndeg169 de lrsquoOIT est

lrsquoun des textes contraignants majeurs sur les droits des populations autochtones La Banque Mondiale a quant agrave elle creacuteeacute des sauvegardes sociales et environnemen-tales ainsi que le Partenariat pour le Carbone Forestier pour proteacuteger les droits humains dans les programmes et projets qursquoelle finance Drsquoautres structures ont aussi adopteacute des lignes directrices et politiques comme le FEM la FAO ou le PNUD

Bien que ces normes repreacutesentent une grande avan-ceacutee pour les droits humains les standards diffegraverent selon les meacutecanismes ce qui geacutenegravere un manque de coheacuterence ainsi que des problegravemes de transmission et drsquoapplication Ces normes sont malheureusement cantonneacutees au niveau international et peu appliqueacutees au niveau national

Un groupe de travail sur REDD+41 a permis de creacuteer des sauvegardes pour les droits humains et les droits des peuples autochtones mais ces derniers restent peu contraignants et sans meacutecanisme clair drsquoengagement et de respect par les Eacutetats Enfin plusieurs reacutefeacuterences aux droits humains et agrave la reconnaissance des connais-sances traditionnelles des peuples autochtones comme vecteur de solutions ont eacuteteacute inteacutegreacutes dans les Accords de Cancun en 2010

Quel rOcircle Pour la coP21

De plus en plus drsquoorganisations de la socieacuteteacute civile ndash issues du caucus des peuples autochtones des syndicats et des associations de solidariteacute ndash se mobi-lisent pour faire une vraie place aux droits humains dans lrsquoaccord de Paris

Les droits humains sont un eacuteleacutement transversal pour la lutte contre les changements climatiques qursquoil sera crucial drsquoinclure dans les dispositions opeacuterationnelles de lrsquoaccord de Paris Il srsquoagit notamment drsquoy reconnaicirctre

41 REDD+ (Reducing of Emissions from Defores-tation and Forest Degra-dation) est un meacutecanisme eacutetabli sous lrsquoeacutegide de la CCNUCC qui vise agrave reacuteduire les eacutemissions lieacutees agrave la deacuteforestation et agrave la deacutegradation des forecircts en geacuteneacuterant des creacutedits carbone

copy H

indo

u O

Ibr

ahim

copy R

AC

29

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 30: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

les diffeacuterents textes existants des Nations unies sur les droits Cela se fera eacutegalement par la prise en compte des principes de sauvegarde du REDD+ qui reconnaissent et respectent les droits des peuples autochtones et des femmes du Cadre sur lrsquoadaptation de Cancun qui reconnaicirct les connaissances traditionnelles et locales et de la reconnaissance des principes du consentement libre informeacute preacutealable et en connaissance de cause (CLIPC) Le respect de ces droits devra srsquoaccompagner drsquoun renforcement du droit agrave lrsquoinformation et agrave la parti-cipation au processus deacutecisionnel deacutejagrave reconnu par la Convention Climat afin drsquoassurer la participation de la socieacuteteacute civile et des communauteacutes locales aux prises de deacutecision agrave tous les niveaux

Il est eacutegalement fondamental drsquoassurer le respect des droits via lrsquoadoption de sauvegardes sociales et environnementales dans les initiatives promues par lrsquoAgenda des solutions ainsi que dans les projets qui beacuteneacuteficient de financements climat

En outre lrsquoaccord de Paris doit poser les bases drsquoune transition juste et eacutequitable pour srsquoassurer que les reacuteformes et politiques publiques pour le climat accom-pagnent les travailleurs issus des secteurs eacutemetteurs de gaz agrave effet de serre afin drsquoeacuteviter que la transition ne conduise agrave une plus grande preacutecariteacute des populations impliqueacutees

La socieacuteteacute civile joue un rocircle crucial pour assurer la voix des populations dans les neacutegociations climat deacutenoncer le non respect des droits et aider les communauteacutes agrave faire respecter les leurs Elle doit donc ecirctre associeacutee agrave lrsquoeacutelaboration et agrave la mise en œuvre des contributions nationales (iNDC) programmes et meacutecanismes climat afin drsquoassurer la transparence et le respect des droits Enfin les Eacutetats doivent assurer sa repreacutesentativiteacute dans les institutions et entiteacutes nationales y compris celles en lien avec le Fonds Vert afin de faciliter lrsquoidentification des prioriteacutes nationales

Pour aller plus loin consulter

la Note de deacutecryptage sur droits

humains et climat du Reacuteseau

Climat amp Deacuteveloppement 2015

copy D

EMI-E

Nig

er

30

quels enjeux pour lrsquoafrique Dans lrsquoaccorD De paris sur le climat

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 31: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

les recommandations du reacuteseau climat amp deacuteveloPPement issues de lrsquoatelier de Paris

la deacuteclaration de Paris ndash mai 2015

Agrave lrsquooccasion de la COP21 qui se deacuteroulera agrave Paris fin 2015 et deacutebouchera sur un accord mondial de lutte contre les changements climatiques les 75 associations rassembleacutees au sein du RCampD souhaitent faire entendre leurs propositions aupregraves des bailleurs des Eacutetats et des neacutegociateurs pour permettre et garantir un deacuteveloppement sobre en carbone et reacutesilient face aux changements climatiques en Afrique

1 un accord Qui Protegravege et renforce les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres

Pour ecirctre placeacute sous le signe de la justice climatique lrsquoaccord qui sera signeacute agrave Paris doit reconnaicirctre les vulneacuterabiliteacutes speacutecifiques des populations les plus affecteacutees dont les femmes et les communauteacutes autochtones et proteacuteger leurs droits Crsquoest par ailleurs la cleacute de la reacuteussite des efforts de la lutte contre les changements climatiques

Les bailleurs les gouvernements africains la COP21 peuvent et doivent

Inteacutegrer les droits humains et lrsquoeacutegaliteacute des genres dans les politiques programmes meacutecanismes et projets agrave tous les niveaux

Renforcer la participation des populations locales et autochtones et des femmes agrave toutes les eacutetapes du processus de planification des politiques programmes et projets communaux nationaux et internationaux

Promouvoir et renforcer les principes de transpa-rence et de redevabiliteacute agrave travers les meacutecanismes de reporting de suivi de veacuterification de recours et de sanction en cas de non respect par les partenaires financiers ou les Eacutetats

Analyser les vulneacuterabiliteacutes et les speacutecificiteacutes pour une meilleure identification des besoins des communauteacutes locales les plus vulneacuterables Agrave partir de lagrave deacutefinir plus drsquoindicateurs sensibles au genre et aux droits humains dans les politiques et projets climat

Renforcer les capaciteacutes des acteurs de lrsquoadmi-nistration et de la socieacuteteacute civile sur les questions lieacutees au genre et aux droits humains

Eacuteliminer les discriminations pour faciliter lrsquoaccegraves des femmes et des populations autochtones aux ressources fonciegraveres eacutecologiques et financiegraveres

copy APPAT Tchad

31

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 32: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

2 un accord Qui finance la lutte contre les changements climatiQues dans les Pays les Plus Pauvres et les Plus vulneacuterables

Les financements climat destineacutes aux pays les plus pauvres et les plus vulneacuterables restent le parent pauvre de la neacutegociation et de la lutte contre les changements climatiques Il est impeacuteratif que la COP21 deacutemontre que les engagements pris seront tenus et que de nouveaux engagements seront pris pour reacutepondre agrave lrsquourgence climatique dans les pays les plus en difficulteacute

Les bailleurs peuvent et doivent

Garantir et opeacuterationnaliser lrsquoaccessibiliteacute directe des financements en priorisant les populations les plus vulneacuterables notamment les populations autochtones et les femmes

Encourager et deacutevelopper une gouvernance des financements par et pour lrsquoAfrique via le soutien agrave la creacuteation ou le renforcement drsquoentiteacutes nationales lrsquoaccegraves direct aux financements et la participation active de la socieacuteteacute civile africaine

Eacutelaborer une liste drsquoexclusion en matiegravere de financements climat et deacuteveloppement pour les eacutenergies fossiles les laquo fausses solutions raquo telles que le nucleacuteaire les OGM le captage et stockage de carbone (CCS) lrsquoagriculture intelligente face au climat (CSA) ainsi que les projets nuisibles aux droits sociaux et environnementaux

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Consolider le cadre institutionnel les entiteacutes et les politiques nationales et renforcer les capaciteacutes pour eacutelaborer des projets financcedilables et acceacuteder aux financements internationaux

Inteacutegrer les budgets climat dans les programmes de deacuteveloppement et de planification nationaux locaux et communaux

Instaurer et renforcer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux financiers et des besoins au niveau des Eacutetats

La COP21 peut et doit

Consacrer a minima 50 des financements publics agrave lrsquoadaptation sous forme de dons et additionnels agrave lrsquoAide Publique au Deacuteveloppement

Augmenter le volume des financements climat qui transitent par les fonds de la CCNUCC notamment le Fonds Vert et le Fonds pour lrsquoAdaptation

Garantir lrsquoadditionnaliteacute des engagements et la priorisation des financements publics et des dons en actant une deacutefinition et comptabilisation claire et preacutecise des financements publics et leur articulation avec les financements priveacutes

Creacuteer des financements innovants tels que la taxation sur les transactions financiegraveres et celle des eacutemissions maritimes et aeacuteriennes

Mettre un terme agrave tous les financements clima-ticides des institutions financiegraveres publiques et rediriger ces financements vers le deacuteveloppe-ment sobre en carbone et reacutesilient geacuteneacuterant des impacts sociaux et environnementaux positifs mesureacutes et veacuterifieacutes

Adopter drsquoici la COP21 une feuille de route permet-tant de clarifier comment sera atteint lrsquoengagement des 100 milliards de dollars par an drsquoici 2020 et selon quels jalons intermeacutediaires Cette feuille de route doit deacutemontrer que les financements seront majoritairement publics et prioriseront lrsquoadaptation

Pour les pays deacuteveloppeacutes garantir que leurs engagements financiers concernant lrsquoapregraves-2020 seront publics et prioriseront lrsquoadaptation Ces engagements doivent ecirctre seacutepareacutes de ceux deacutedieacutes au meacutecanisme financier sur les pertes et dommages

Instaurer un meacutecanisme de suivi et drsquoeacutevaluation des flux et des besoins financiers dans lrsquoaccord de Paris ainsi qursquoau niveau national ndash dans les PANAs les PANs et les laquo contributions nationales raquo (iNDC) notamment ndash et garantir leur reacutevision peacuteriodique en fonction de la trajectoire drsquoatteacutenuation et des sceacutenarios de changements climatiques

32

les recommanDations

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 33: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

3 un accord Qui investit massivement dans lrsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiQues durables Pour tous

Le dernier rapport du GIEC est tregraves clair il faut acceacuteleacuterer nos efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions degraves maintenant notamment en abandonnant deacutefinitivement les eacutenergies fossiles et en investissant massivement dans les eacutenergies renouvelables et lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique Cette transition est non seulement possible mais souhaitable y compris dans les pays les plus pauvres et les moins eacutemetteurs de GES car elle peut permettre drsquoatteindre les objectifs drsquoaccegraves agrave lrsquoeacutenergie pour tous

Les bailleurs peuvent et doivent

Diminuer et sortir progressivement des subventions directes et indirectes aux eacutenergies fossiles au profit de subventions aux eacutenergies renouvelables et agrave lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique visant en prioriteacute des systegravemes eacutenergeacutetiques durables qui ont le plus grand impact sur le deacuteveloppement et sur le climat

Garantir que les projets financeacutes soient transpa-rents et comptabilisables qursquoils fassent lrsquoobjet drsquoanalyses drsquoimpacts et associent les parties prenantes agrave la base de lrsquoamont agrave lrsquoaval

Accompagner les Eacutetats et les reacutegions dans le deacuteveloppement de strateacutegies eacutenergeacutetiques et de programmes drsquoaccegraves aux services eacutenergeacutetiques durables agrave niveau reacutegional ainsi que dans la deacuteclinaison sectorielle des politiques nationales

Les gouvernements africains peuvent et doivent

Mobiliser des financements additionnels endo-gegravenes pour assurer le deacuteploiement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacutetique

Mettre en place des meacutecanismes leacutegislatifs tech-niques et financiers pour encourager la production et la vente de services eacutenergeacutetiques durables et adapteacutes aux besoins des populations et assurer le deacuteveloppement de filiegraveres locales

Assurer lrsquoadeacutequation des projets et solutions technologiques aux besoins locaux ainsi que leur appropriation par la population locale en tenant compte des droits humains et des ineacutegaliteacutes de genre

Doter les collectiviteacutes territoriales de moyens leacutegaux et financiers afin qursquoelles puissent assu-rer la compeacutetence eacutenergie sur leur territoire et mettre en place un meacutecanisme de dotation des collectiviteacutes pour leur politique eacutenergie

Favoriser les eacutechanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies

Deacutevelopper des feuilles de routes transparentes et explicites en matiegravere de deacuteveloppement des eacutenergies renouvelables et de lrsquoefficaciteacute eacutenergeacute-tique avec des objectifs intermeacutediaires ainsi que les besoins financiers correspondants Ces feuilles de route seront traduites dans les laquo contributions nationales raquo (iNDC) pour lrsquoapregraves-2020

La COP21 peut et doit

Pour les pays deacuteveloppeacutes renforcer degraves main-tenant leurs engagements existants en matiegravere de reacuteduction de leurs eacutemissions de GES pour lrsquoavant 2020

Renforcer avant lrsquoentreacutee en vigueur de lrsquoaccord de Paris les laquo contributions nationales raquo preacutevues pour apregraves 2020

Renforcer lrsquoaccegraves aux eacutenergies renouvelables dans les pays les plus pauvres notamment en apportant un soutien financier et technologique

33

les recommanDations

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 34: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

4 un accord Qui Permet aux PoPulations les Plus vulneacuterables de faire face aux imPacts des changements climatiQues

Lrsquoadaptation constitue la prioriteacute des pays les moins avanceacutes et de leurs populations en particulier en Afrique Elle doit se voir accorder la mecircme importance que lrsquoatteacutenuation dans le futur accord qui doit ecirctre adopteacute agrave Paris et dans les strateacutegies de financements

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Renforcer les financements deacutedieacutes agrave lrsquoadaptation dans les pays les plus affecteacutes

Garantir lrsquoaccegraves agrave des moyens de subsistance reacutesilients ainsi que le respect des droits humains et de lrsquoeacutegaliteacute des genres agrave travers les pratiques drsquoadaptation

Prioriser lrsquoadaptation des communauteacutes locales et autochtones et des groupes les plus vulneacuterables dont les femmes ainsi que lrsquoadaptation agrave base communautaire

Valoriser les savoirs traditionnels et autochtones capitaliser sur les bonnes pratiques et vulgariser les informations climatiques et les innovations

Inteacutegrer lrsquoadaptation dans tous les plans de deacuteve-loppement de lutte contre la pauvreteacute et les plans sectoriels pour plus de coheacuterence

Allouer des budgets nationaux et locaux agrave lrsquoadap-tation et opeacuterationnaliser des guichets climat nationaux

Renforcer les capaciteacutes et la participation de la socieacuteteacute civile pour la mise en œuvre des politiques et projets drsquoadaptation

La COP21 peut et doit

Creacuteer dans lrsquoaccord de Paris un Objectif Global drsquoadaptation directement fonction des trajectoires drsquoatteacutenuation et de reacutechauffement Cela signifie que les besoins drsquoadaptation des pays les plus vulneacuterables augmentent ou diminuent en fonction des efforts de reacuteduction drsquoeacutemissions de la commu-nauteacute internationale

5 un accord Qui Preacuteserve la seacutecuriteacute alimentaire et le climat en inves-tissant massivement dans lrsquoagriculture familiale et agro-eacutecologiQue

Lrsquoagriculture et par lagrave-mecircme la seacutecuriteacute alimentaire est directement menaceacutee par les changements climatiques En mecircme temps lrsquoagriculture industrielle est responsable drsquoune partie croissante des eacutemissions de gaz agrave effet de serre Dans ce contexte la COP21 doit agrave la fois agir sur les eacutemissions du secteur agricole tout en preacuteservant et soutenant les modegraveles agricoles peu eacutemetteurs reacutesilients et garants de la seacutecuriteacute alimentaire

Les bailleurs et les gouvernements africains peuvent et doivent

Prioriser les agricultures familiales et les pra-tiques agro eacutecologiques compte-tenu de leur rocircle fondamental dans la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser que les changements climatiques ne deviennent un alibi pour deacutevelopper un modegravele agricole baseacute sur la promotion de lrsquoagro-business et des OGM

Soumettre lrsquoensemble des projets agricoles et de seacutecuriteacute alimentaire agrave des eacutetudes drsquoimpacts preacutealables en particulier en matiegravere de droits humains environnementaux et sociaux

La COP21 peut et doit

Inclure la seacutecuriteacute alimentaire mdash et ainsi la promotion de lrsquoagriculture familiale et agro-

eacutecologique mdash de maniegravere opeacuterationnelle dans lrsquoaccord de Paris crsquoest-agrave-dire agrave la fois dans le preacuteambule les objectifs geacuteneacuteraux et le chapitre sur lrsquoadaptation

Reconnaicirctre la responsabiliteacute principale de lrsquoagriculture industrielle pour les eacutemissions de lrsquoagriculture et ne pas permettre de compenser les eacutemissions du secteur industriel par le secteur agricole

Exiger que les actions drsquoatteacutenuation lieacutees au secteur de lrsquousage des terres y compris le stoc-kage de carbone nrsquoimpactent pas neacutegativement la seacutecuriteacute alimentaire

Refuser drsquoinscrire le concept drsquoagriculture intel-ligente face au climat et lrsquoAlliance Mondiale pour une agriculture intelligente face au Climat (GACSA) dans lrsquoAccord de Paris et dans lrsquoagenda des solutions

34

les recommanDations

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2
Page 35: Quels défis l'accord de Paris doit-il relever pour répondre aux besoins des populations africaines ?

wwwclimatdeveloppementorginfoclimatdeveloppementorg

  1. Bouton 3
  2. Bouton 2