procédures l’universitÉ de valenciennes et du hainaut

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Mémoire de Master Professionnel de 2ème Année de Justice, Procès et Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT - CAMBRÉSIS Année Universitaire : 2015-2016 Discipline, spécialité : Justice et Médiation Présenté et soutenu par Mademoiselle Amandine DECOOL. Faculté, Institut ou Ecole : Faculté de Droit, d'Economie et de Gestion – FDEG L’erreur judiciaire. Etude de droits positifs et prospectifs. Directeur de mémoire Maître Franz HISBERGUES, Avocat au Barreau de Valenciennes et Maître de conférence à UVHC - FDEG. Maîtres de stage : Maître Bruno DUBOUT, Avocat au Barreau de Béthune et Maître Julien BENSOUSSAN Avocat au Barreau de Lille.

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Page 1: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

Mémoire de Master Professionnel de 2ème Année de Justice, Procès et Procédures

L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT - CAMBRÉSIS

Année Universitaire : 2015-2016

Discipline, spécialité : Justice et Médiation

Présenté et soutenu par Mademoiselle Amandine DECOOL.

Faculté, Institut ou Ecole : Faculté de Droit, d'Economie et de Gestion – FDEG

L’erreur judiciaire.

Etude de droits positifs et prospectifs. Directeur de mémoire

Ø Maître Franz HISBERGUES, Avocat au Barreau de Valenciennes et Maître de conférence à UVHC - FDEG.

Maîtres de stage :

Ø Maître Bruno DUBOUT, Avocat au Barreau de Béthune et Maître Julien BENSOUSSAN Avocat au Barreau de Lille.

 

Page 2: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

En préambule, je souhaite adresser mes remerciements aux personnes qui m’ont

apporté leur aide et qui ont contribué à l’élaboration de ce mémoire dont je garderai un

excellent souvenir. Je tiens en particulier à remercier :

- Maître Franz HISBERGUES, Avocat au Barreau de Valenciennes et Maître de

conférence à l’Université de Valenciennes et du Hainaut Cambrésis pour son aide, sa

disponibilité et ses précieux conseils.

- Maître Bruno DUBOUT et Maître Edouard DUBOUT, Avocats au Barreau de

Béthune, spécialisés en droit pénal pour avoir fait de ce stage une expérience enrichissante

d’un point de vue professionnel et humain.

- Maître Julien BENSOUSSAN, Avocat au Barreau de Lille, pour son soutien, ses

idées et ses précisions éclairantes sur certains points.

- Ma famille pour m’avoir soutenue tout au long de ce travail et mes relecteurs patients

et avisés pour parfaire cet écrit

Page 3: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

S O M M A I R E

INTRODUCTION………………………………...………………P.1

PREMIERE PARTIE : La vérité judiciaire est-elle exempte

d’erreurs ?........................................................................................P.9

Chapitre I : Les garde-fous garants de la vérité judiciaire en matière

pénale…………………………………………………….…………………..P.12

Section I : Les principes relatifs à l’organisation judiciaire……………..………..P.13

§ 1 : Les notions garantissant une bonne administration de la justice…..….P.13

§ 2 : Les recours source de protection des accusés…………………………P.20

Section II : Les principes judiciaires liés au procès pénal……………….…………P.26

§ 1 : La recherche d’une équité essentielle à la poursuite de la vérité…...…P.26

§ 2 : Les principes protecteurs de la personne poursuivie………….………P.32

Chapitre II : Les causes des erreurs judiciaires………………………..P.38

Section I : Le facteur humain…………………………….……………………….P.39

§ 1 : L’implication de la société, source d’erreurs judiciaires…………...…P.39

§ 2 : Les protagonistes du procès, acteurs de l’erreur judiciaire……...…….P.44

Section II : Les erreurs liées à l’organisation judiciaire….………………………..P.50

§ 1 : La mauvaise conduite des investigations……………………………...P.50

§ 2 : Les inconvénients de l’audience interférant dans la vérité judiciaire…P.55

Page 4: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

DEUXIÈME PARTIE : Les ripostes mises en place contre l’erreur judiciaire sont-elles suffisantes ?....................................P.58 Chapitre I : La réparation de l’erreur judiciaire……………………….P.60

Section I : L’émergence de l’erreur judiciaire au travers des différents recours….P.61

§ 1 : Le recours en révision………………………………..………………..P.61

§ 2 : Le réexamen d’une décision pénale consécutive au prononcé d’un arrêt de

la Cour Européenne des Droits de l’Homme………………………….P.66

Section II : L’indemnisation au titre de l’erreur……………………………………P.71

§ 1 : Le dédommagement octroyé à la victime d’erreur judiciaire………....P.71

§ 2 : La responsabilité des intervenants dans le système judiciaire…...……P.77

Chapitre II : Les solutions prospectives pour une vérité judiciaire

parfaite……………………………………………...……………………......P.83

Section I : Le perfectionnement des garde-fous……………………………..……P.84

§ 1 : Le renforcement du principe du contradictoire……………………..…P.84

§ 2 : L’accentuation des autres principes favorisant la recherche de la

vérité………………………………………………………………………………………..P.88

Section II : L’amélioration des réparations de l’erreur judiciaire…….……………P.96

§ 1 : L’élargissement des recours en révision et de l’indemnisation……….P.96

§ 2 : La prévention et la répression, source d’éradication de l’erreur

judiciaire……………………………………………………………………..……………P.100

CONCLUSION…………………………………………………P.103

ANNEXES…………………………………………………...….P.105

Page 5: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

BIBLIOGRAPHIE……..………………………...…………….P.120

TABLE DES MATIÈRES…………………………………...…P.125

TABLE DES DÉCISIONS DE JUSTICE…………...………...P.131

ABRÉVIATIONS………………………………......…………..P.132  

Page 6: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  1  

INTRODUCTION

« L’histoire des mœurs judiciaires n’est

pas même un perpétuel recommencement : c’est

l’éternel immobilité ».1

Maurice Lailler

Les erreurs judiciaires, existant de nos jours sous les affaires Outreau, Loïc Sécher et

bien d’autres, ne sont que le reflet des années qui précèdent notre système judiciaire actuel.

Ces erreurs perdurent depuis de longues années. Leur ancienneté est mise en exergue par

l’affaire Jean Rayne datant des années 1364. Cet échevin de Douai et commerçant de grains

s’est vu accuser de vendre ses grains avec de fausses mesures supérieures à celles autorisées

par la loi. Il fut pendu malgré son appel auprès du roi mais reconnu condamné injustement

grâce à sa famille qui est intervenue devant le conseil du roi. 2

Force est de constater que l’erreur judiciaire présente au moins depuis 1364 a parcouru

au minimum 652 années. Néanmoins, la révision - réexamen juridictionnel d’une décision en

vue de sa rétractation ou de son annulation par une juridiction supérieure auquel fait suite le

cas échéant un nouveau jugement de l’affaire au fond3 – laisse son empreinte depuis l’ancien

droit, notamment à Rome. L’erreur judiciaire existerait donc certainement depuis les prémices

de la justice.

Ces erreurs traversant toutes ces années jusqu’à notre monde contemporain sont

définies par Cornu dans son dictionnaire juridique comme « l’erreur de fait qui, commise par

une juridiction de jugement dans son appréciation de la culpabilité d’une personne poursuivie

peut, si elle a entraîné une condamnation définitive, être réparée sous certaines conditions au

moyen d’un pourvoi en révision ». Bien que cette erreur ait toujours existé, le mot même

d’erreur judiciaire s’est imposé lors de l’affaire Dreyfus

                                                                                                               1 Maurice Lailler, les erreurs judicaires et leurs causes, Ed Hachette Livre, Ed 1897. 2 Eusèbe de Laurière, Emmanuel Pastoret, Denis-François Secousse, Louis Guillaume de Vilevault, ordonnances des roys de France de la troisième race, recueillies par ordre chronologique… : Les ordonnances de Charles V, données depuis le commencement de l’année 1367, jusqu’à la fin de l’année 1373, de l’imprimerie royale, 1736. 3  Gérard Cornu, vocabulaire juridique, 10ème Ed, Quadrige, janvier 2014.

Page 7: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  2  

Au delà de cette définition stricte de l’erreur judiciaire présentée par Gérard Cornu,

notre système judiciaire et notre société ont été amenés à utiliser ce terme « d’erreur

judiciaire » pour des situations qui ne présentaient pas les conditions établies par la définition

de ce dernier. L’affaire Outreau, constamment qualifiée d’erreur judiciaire n’en est pas

véritablement une puisque les protagonistes ont tous été acquittés par une Cour d’Assises

jugeant en appel.

Cette idée d’erreur judiciaire, caractérisée comme condamnation d’une personne

innocente à la suite d’erreur de jugement, n’est peut-être plus adéquate en raison des affaires

Outreau, les disparues de L’Yonne ou l’affaire Bonnal qui sont de véritables fiascos. L’une

d’entre elles, l’affaire Outreau, a engendré l’incarcération de treize personnes pour des faits

de pédophilie durant deux ans pour finalement être acquittées. L’affaire des disparues de

L’Yonne a quant à elle entraîné la mise en cause des magistrats en 2001 pour négligences

graves à la suite de la disparition de plusieurs jeunes filles handicapées mentales dont l’auteur

a été jugé vingt ans après les faits. Désormais ne conviendrait-il pas de parler de « fautes à

caractères disciplinaires », « de fiascos judiciaires » ou « de dysfonctionnements » ?4

Bien heureusement, le recours en révision évoqué ci-dessus est institué depuis la nuit

des temps comme réponse aux erreurs judiciaires. C’est une procédure susceptible de

conduire à l’effacement des condamnations prononcées contre des innocents et à réparer les

préjudices moral et matériel subis.5 Cette procédure donnant l’avantage au condamné en

France, n’est pas régie de la même manière dans d’autres pays. L’Allemagne par exemple,

permet des révisions au détriment des accusés laissant ainsi la possibilité aux victimes

d’accéder à cette voie de recours. 6

En France, la révision fut longtemps indissociable de l’appel dès son instauration et

cette voie de recours était identique en matière civile et pénale. Au temps des gallo-romains,

les voies de recours n’étaient pas présentes dans toutes les civilisations, mais pour les

                                                                                                               4 Denis Salas, magistrat, secrétaire général de l’Association Française pour l’histoire de la justice et Directeur scientifique des cahiers de la justice, le nouvel âge de l’Erreur Judiciaire, revue Française d’administration publique, 2008, Ed école nationale d’administration. 5 Frédéric Desportes et Laurence Lazerges-Cousquer, Traité de Procédure Pénale, 4ème Ed, 2015, Editeur Economica. 6 Commission Nationale Consultative des droits de l’Homme, Avis sur la révision des condamnations pénales en cas d’erreur judiciaire, assemblée plénière du 13 février 2014.

Page 8: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  3  

Mérovingiens, le roi et l’évêque avaient le pouvoir de réformer ce qui avait été mal jugé selon

la constitution de Clotarii de 560.

Par la suite, une ordonnance de 1270, a envisagé une institution qui permettait de

remettre en cause le jugement de la cour du Roy. La « supplicatio » consistait à faire appel au

roi pour solliciter un amendement de jugement dans le cas où le protagoniste se considérait

mal jugé contre droit.

La confusion extrême qui existait entre les procédures civiles et pénales relatives au

recours en révision prit fin en 1667. La procédure pénale s’est alors consacrée aux lettres de

révision en 1670. Selon Jousse, instigateur du traité de la justice criminelle de France, ces

lettres sont celles que « le roi accorde pour revoir et examiner de nouveau le procès criminel

d’une personne condamnée contradictoirement, par arrêt ou jugement en dernier ressort afin

de révoquer la condamnation, s’il y a lieu et de renvoyer le condamné ou sa mémoire absous

des cas qui lui ont été imposés avec restitution et rétablissement de ses biens confisqués et de

sa réputation et bonne renommée. »

Malgré toutes ces évolutions, des lacunes persistent. C’est la raison pour laquelle le

droit moderne a procédé également à de nombreux changements – répondant à la naissance de

nouvelles mentalités populaires après la révolution - à commencer par la création de trois cas

d’ouverture de révision dans le code d’instruction criminelle de 1808, qui par la suite ne

cessera d’évoluer grâce aux enseignements tirés des erreurs judiciaires.

Ce mécanisme de révision du procès, permet de réétudier une affaire dont la véracité

des faits semble être erronée. Une fois le dossier réexaminé, la Cour de Révision, en cas

d’erreur judiciaire avérée, annule la condamnation prononcée. L’intéressé est dès lors

réhabilité. La réhabilitation consistant à effacer la condamnation selon l’article 133-1 du Code

Pénal, a été prononcée à plusieurs reprises en France.

Ce fut le cas pour Abdelkader Azzimani et Abderrahim El-Jabri, poursuivis et

condamnés à 20 ans de prison pour le meurtre d’un dealer en décembre 1997 à Lunel. La

Cour de Révision a annulé cette condamnation le 15 mai 2013 suite au revirement d’un

témoin et la découverte de traces ADN. Marc Machin, accusé d’avoir poignardé Marie Agnès

Page 9: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  4  

Bedot sous le pont de Neuilly a bénéficié également de la réhabilitation, deux ans après que la

Cour de Révision ait annulé sa condamnation.

D’autres protagonistes n’ont pas eu cette chance d’être reconnus victimes d’erreurs

judiciaires et réhabilités. Omar Raddad, accusé d’avoir tué sa patronne Ghislaine Marchal en

1991, a obtenu la grâce présidentielle mais s’est vu rejeter sa requête en révision malgré

plusieurs traces ADN d’autres individus retrouvés sur les lieux. Gaston Dominici condamné à

mort pour le meurtre d’un couple de britanniques en 1952, s’est vu convertir sa peine en

réclusion à perpétuité mais les multiples demandes de révision de sa famille ont toutes été

déboutées. Il en est de même pour Raymond Mis et Gabriel Thiennot suspectés d’avoir tué un

garde chasse dans l’Indre en 1946. Cinq de leurs requêtes ont été rejetées. Pire encore, Danis

Leprince, contraint en 1997 à purger une peine de prison à perpétuité pour un quadruple

homicide, se voit multiplier les recours avant d’être libéré par la Commission de Révision à la

suite de la découverte de nouvelles preuves incriminant sa femme. Malgré cette décision et les

éléments le disculpant dans cette affaires, la Cour de Révision prend la Commission à contre

pied et refuse d’annuler la condamnation de Danis Leprince, qui sera remis en liberté en 2012

suite à sa période de sûreté.7

La présence de tels désastres depuis des millénaires a forcé les savants puis les

scientifiques, à rechercher les meilleurs modes de preuves afin d’aboutir à des preuves

irrévocables. Une impressionnante évolution s’est mise en place.

Au moyen âge, sous l’influence des croyances religieuses, le système de preuve

reposait principalement sur l’Ordalie. Les accusés étaient alors soumis à des épreuves

physiques qui décidaient de l’innocence ou de la culpabilité de ces derniers. L’exemple le

plus connu, est celui des épreuves au fer rouge durant lesquelles les accusés devaient

parcourir une certaine distance en tenant une barre de fer chauffée à blanc. S’ils échouaient,

ils étaient alors automatiquement reconnus coupables. Ce système très peu fiable laissait

encore une place immense pour les erreurs judiciaires et fut vite mis de côté .8

                                                                                                               7 http://mobile.lemonde.fr/société/article/2014/02/27/révisions-de-proces-les-huit-erreurs-judiciaires-reconnues-et-les-autres43748713224.html 8 Monsieur de Carbonnière, cours histoire de la preuve, Lille 2, année 2014/2015

Page 10: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  5  

L’évolution de la science a permis d’aboutir entre autre à la mise en place de

l’autopsie médico légale en 1302 par un italien.9 Ce procédé étant l’examen médical des

cadavres, recherchant la cause d’une mort à priori considérée comme suspecte, a permis de se

rapprocher de la vérité judiciaire. En découvrant la cause et les circonstances exactes du

décès, un profil plus détaillé de l’auteur est ainsi établi, ce qui permet d’écarter plus

facilement la culpabilité de certains suspects.

Cependant faut-il encore que les médecins légistes réalisent leur mission

consciencieusement, ce qui n’est pas toujours le cas, comme le fit constater le Dr Cornil le

8 mai 1878, à la Cour d’Assises de la Seine : « Quand on procède à une autopsie, quand la vie

d’un accusé peut en dépendre, il faut y apporter des soins extrêmes. Dans l’affaire actuelle, je

ne puis moins faire que déclarer que l’autopsie a été faite très légèrement. ». De ces

constatations, il en découle que l’erreur judiciaire restait toujours possible. Néanmoins,

l’évolution de la preuve n’a pas atteint sa finalité. Au 20ème siècle, l’ADN (acide

désoxyribonucléique) qui constitue la molécule support de l’information génétique héréditaire

a fait son apparition.

Cette nouvelle preuve scientifique est à ce jour le moyen le plus efficace dans le

combat de l’erreur judiciaire. En effet, la découverte sur une scène de crime d’un fragment

d’ADN unique pour chaque individu, constitue une preuve irréfutable dans l’implication de ce

dernier dans l’affaire en cours. Cette méthode a déjà fait ses preuves lors de l’affaire

Abdelkader Azzimani et Abderrahim El-Jabri évoquée ci dessus, la découverte des traces

d’ADN ont orienté la justice vers deux autres suspects, ce qui a permis leur acquittement.

Peu importe la qualité des preuves apportées à l’affaire, la population continue de

douter de l’innocence de l’accusé reconnu victime d’erreur judiciaire, certainement par peur

et par souci de sécurité. Bien que Mr De la Roncière ait été réhabilité, son innocence n’a pas

été admise par toute la population, comme ce fut le cas pour l’affaire Borras ainsi que l’affaire

Cauvin.

Durant toutes ces années, les erreurs n’ont pas eu les mêmes répercutions sur la vie des

condamnés à tort. Fort heureusement, l’évolution fut plutôt favorable à ces individus. La

                                                                                                               9 Dr Eric Laurier, cours de détermination et d’évaluation du préjudice corporel et moral, médecin légiste au centre hospitalier de Valenciennes, Université de Valenciennes, Année 2015/2016

Page 11: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  6  

justice a pendant longtemps – depuis le code d’Hammourabie – utilisé comme répression aux

infractions : la peine de mort. Chaque protagoniste jugé coupable par la justice était alors mis

à mort. Il est évident que l’erreur judiciaire, en ce temps, était extrêmement grave. Elle a tué

des innocents tels que Jean Rayne, cité ci-dessus dont il est impossible après coup de leurs

rendre la vie. L’abolition de la peine de mort, n’ayant eu lieu que le 9 octobre 1981, c’est dire

le nombre d’innocents exécutés. 10 Désormais, bien que l’erreur judiciaire soit toujours

conséquente sur la vie de la victime, elle n’entraîne qu’une privation de liberté d’une durée

plus ou moins longue. Bien plus raisonnable qu’auparavant, ces conséquences semblent tout

de même dérangeantes. Il est inadmissible d’être privé de sa liberté alors même que l’on est

innocent. C’est pourquoi il faut espérer que ces erreurs disparaissent totalement du système

judiciaire un jour. Pour cela faut-il encore comprendre d’où elles proviennent.

Il est certain que le système judiciaire engorgé de lois en constante évolution n’est pas

propice à l’établissement de la vérité, mais est plutôt un frein au bon fonctionnement de la

justice. La multiplication de lois et la présence de lois qui n’ont plus lieu d’être, peuvent

provoquer des confusions, de l’ignorance, dans l’esprit des agents au service de la justice. La

complexité des textes de lois ne leur facilite en rien la tâche.

Le magistrat étant chef d’orchestre du procès pénal, ce dernier n’est certainement pas

étranger aux erreurs judiciaires. Toute la problématique repose sur le fait que la mentalité des

magistrats n’a jamais changé depuis la naissance du droit, qu’ils proviennent du monde

contemporain ou des siècles passés, il cède aux mêmes tendances, aux mêmes instincts.

Comme le relate Gayot de Pitaval dans son ouvrage « causes célèbres » il existe un atavisme

professionnel chez les magistrats ; «on s’aperçoit que rien ne rappelle la justice d’autrefois

autant que la justice d’aujourd’hui ». En fait d’exemple, les comportements similaires des

magistrats en charge de l’affaire « la veuve du prévôt de hauzen » en 1754 et de l’affaire

« Louis Cauvin » en 1892. Dans la première affaire, le bailli a répondu à l’accusatrice qui

hésitait à retirer sa plainte, que si elle se rétractait, elle aurait à payer les frais du dossier ainsi

que des dommages et intérêts. Dans l’affaire Cauvin, 138 ans plus tard, la jeune fille qui avait

fait condamner ce dernier, voulut revenir sur ses déclarations affirmant qu’elle avait menti, le

juge d’instruction lui déclara donc « vous avez le plus grand tort de persister dans les

mensonges que vous débitez pour essayer de sauver Cauvin, je vous avertis qu’au terme de

l’article 36 du Code Pénal vous êtes passible de travaux forcés si le jury vous reconnaît                                                                                                                10 http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/peinedemort/

Page 12: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  7  

coupable de faux témoignages. Si le juge est parfois un obstacle à la recherche de la vérité,

ses traits caractéristiques étant intemporellement identiques, l’erreur judiciaire est susceptible

de perdurer.

Fort heureusement, des magistrats ont su reconnaître leurs erreurs, ce fut le cas du juge

Yves Bonnet qui ne voulait plus risquer d’être complice d’une erreur judiciaire et voulait se

laver les mains. C’est la raison pour laquelle il a troqué sa robe de juge contre celle d’avocat.

Le juge Caignec quant à lui en reconnaissant son erreur a permis à la famille Esnault de

recevoir de la part de l’Etat, la somme de 1,2 million de francs pour faute lourde commise par

le service public de la justice, à la suite d’un jugement du Tribunal de Grande Instance de

Rennes en date du 27 novembre 2001. Malgré que cette affaire relève de la matière civile et

n’est donc pas le sujet de ce mémoire, force est de constater qu’en cas d’erreur, certains

magistrats savent se remettre en question quand il le faut. L’affaire Esnault évoquée ci-dessus

met en exergue que la matière civile n’est pas exemptée d’erreur. Effectivement l’erreur

judiciaire existe également dans cette matière et présente autant de complexité que les erreurs

judiciaires pénales étudiées jusqu'à maintenant.

Ces erreurs judiciaires pénales, qu’elles soient anciennes ou non, paraissent

inexplicables en raison des valeurs inculquées aux magistrats. En effet, l’enseignement des

magistrats est depuis toutes ces années organisé de telle sorte à prévenir les erreurs

judiciaires. Il n’est guère impossible d’énumérer le nombre de fois où il a été rappelé aux

magistrats que « si la culpabilité n’est pas d’une évidence telle que l’innocence apparaisse

comme impossible, le magistrat doit se réfugier dans le doute et clore le procès par un

acquittement ».

Ce principe encore enseigné aujourd’hui est le fruit de la loi Trajan, loi 5, de Poeni,

déjà adorée par Charlemagne qui l’enseignait à ses Missi Dominici : « Un juge ne condamne

jamais qui que ce soit sans être sûr de la justice de son jugement ; il ne décide jamais de la vie

des hommes par des présomptions. Ce n’est pas celui qui est accusé qu’il faut considérer

comme coupable, c’est celui qui est convaincu ; il n’y a rien de si dangereux et de si injuste au

monde que de se hasarder sur des conjectures ».11

                                                                                                               11 Eliane de Valicourt, L’erreur judiciaire, Ed l’Harmattan, 2005.

Page 13: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  8  

Existe-t-il d’autres principes tels que celui-ci ayant pour objectif d’atteindre la vérité ?

S’il s’avère que oui, pourquoi existe-t-il des erreurs judiciaires ?

Comment les répare-t-on ?

Bien que ces erreurs judiciaires peuvent engendrer une réparation, n’est-il pas possible

d’envisager des réformes les éradiquant ?

Il convient donc de s’interroger sur les raisons pour lesquelles la justice est envahie

d’erreurs judiciaires et sur les solutions qu’elle y apporte ?

Des principes sont mis en œuvre pour établir la vérité judiciaire. Pour autant, la justice

n’est guère exemptée d’erreurs judiciaires (PARTIE 1), c’est la raison pour laquelle des

solutions sont envisagées et envisageables afin de les réparer et les combattre. (PARTIE 2)

     

Page 14: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  9  

PARTIE 1 :

La vérité judiciaire est-elle

exempte d’erreur ?

Page 15: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  10  

La justice, « justicia » en latin est présentée comme « ce qui est idéalement juste,

conforme aux exigences de l’équité et de la raison. » En ce sens la justice est tout à la fois

« un sentiment, une vertu, un idéal, un bienfait, une valeur »12. L’institution judiciaire est par

ce fait entièrement construite autour de la vérité. Selon Gérard Cornu dans son ouvrage

« vocabulaire juridique » la vérité a plusieurs sens. Le sens le plus connu est ni plus ni moins

ce qui est « objectivement vrai, véritable en soi, la propriété intrinsèque de la réalité. »

Cependant dans le monde judiciaire, il prend un tout autre sens. Afin de comprendre

ce sens particulier attaché à la justice, il semble important de s’attarder sur la finalité de celle-

ci qui a pour objectif premier de juger. L’acte de juger consiste selon Paul Ricoeur, à

procéder à « la réunion de l’entendement et de la volonté, l’entendement qui considère le vrai

et le faux et la volonté qui décide. »13 Juger est alors « opiner, estimer tenir pour vrai et en

prendre position ». En conséquence, l’acte de juger s’oriente vers la vérité. Le jugement met

donc un terme à une incertitude au moment de l’achèvement du procès.

C’est ainsi qu’en matière judiciaire, la loi prévoit dans son article 1350 du Code Civil,

une présomption de vérité de la chose jugée14. Cette présomption de vérité constitue ce que

l’on appelle la vérité judiciaire. La loi impose de la tenir pour vrai. La véracité des faits

constatés et le bien fondé de la règle de droit appliquée n’engendrent pas pour autant la vérité

judiciaire qui s’ancre aux décisions de justice à compter de la date à laquelle elle passe en

force de choses jugées. Une décision passe en force de chose jugée quand toutes les voies de

recours prévues par la loi ont été exercées contre une décision de justice ou que les délais

prévus par la loi pour mettre en œuvre ces voies de recours sont épuisés15. La décision rendue

ne peut plus être remise en cause et tient pour conforme la vérité judiciaire.

Pour aboutir à cette vérité judiciaire, la justice a mis en place de nombreux principes

importants concernant l’organisation du procès pénal, qui, pour la plupart du temps, figure

dans l’article préliminaire du code de procédure pénale. (CHAPITRE I)

                                                                                                               12 Gérard Cornu, vocabulaire juridique, 10ème Ed, Quadrige, janvier 2014 13 Christine Lazerges, réflexion sur l’Erreur Judiciaire, RCS 2006.709 14 Florence Bussy, Recueil Dalloz l’Erreur Judicaire, D2005-2552 15 Bernard Bouloc et Haritini Matsopoulou, Droit pénal général et procédure pénale, Sirey 17ème Ed, 2009, p 457

Page 16: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  11  

Néanmoins, ce qui est jugé n’est pas forcément la vérité au sens premier qui a pour

objectif de connaître la vérité absolue. En effet on constate dans le monde judiciaire actuel et

ancien, des erreurs judiciaires. De ce fait, il semble important de s’attarder sur les causes de

ces erreurs (CHAPITRE II).

Page 17: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  12  

CHAPITRE I :

Les garde-fous garants de la vérité judiciaire en matière pénale.

Si la justice a pour objectif d’obtenir la vérité depuis sa création, ses méthodes pour y

parvenir se sont diversifiées et ont évolué au fil du temps. Il semble incontestable que notre

époque est la période qui atteint le plus aisément la vérité dans le procès pénal.

Le Code d’Instruction Criminelle promulgué le 16 décembre 1808 entrant en vigueur

le 1er janvier 181116 fut le premier code organisant le procès pénal. L’intention de Napoléon

étant de faire disparaître l’insécurité omniprésente qui régnait sous le directoire est due en

partie à la désorganisation de la justice pénale.17 Le nouveau code de procédure pénale prend

la relève du code d’instruction le 2 mars 1959 et élabore de nombreux principes

fondamentaux de la procédure pénale qui feront l’objet de plusieurs réformes pour

perfectionner la justice et obtenir sans difficulté la vérité judiciaire.

En 1990, au vu de l’importance que génèrent ces principes fondamentaux et par souci

de cohérence, Delmas Martys proposait l’insertion de ces principes dans le Code de Procédure

Pénale mais cela ne sera accompli que par la loi du 15 juin 2000 dans un article

préliminaire.18

Dans ces principes fondamentaux qui tendent à éviter des décisions faussées, certains

sont relatifs à l’organisation judiciaire (SECTION I), et d’autres en lien avec le

procès.(SECTION II)

                                                                                                               16 http://www.presse.justice.gouv.fr/artpix/1grandesdatesCPCPP.pdf 17 http://www.justice.gouv.fr/histoire-et-patrimoine-10050/1808-promulgation-du-code-dinstruction-criminelle-28567.html 18 Hervé Henrion, doctorant – E.R.P.C à l’Université de Montpellier I. Ouvrage archive de politique criminelle, l’Article préliminaire du Code de Procédure Pénale : vers une « Théorie Législative » du Procès Pénal ?, 2001/1 (n°23), P192, Ed. A.Pédone.

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  13  

SECTION I :

Les principes relatifs à l’organisation judiciaire.

L’organisation judiciaire revêt un caractère important puisqu’elle est mise en place

pour qu’il y ait une bonne administration de la justice. (Paragraphe 1). Elle vise à multiplier

les chances de manifestation de la vérité en prévoyant des recours en cas de difficulté relative

au fait ou à la procédure. (Paragraphe 2)

Paragraphe 1 : les notions garantissant une bonne administration de la justice.

La justice se trouve relativement bien administrée, organisée et gérée grâce à

l’intervention de la notion d’autonomie, (A) mais également par le fonctionnement spécifique

des juridictions pénales. (B)

A) L’indispensabilité de l’autonomie des acteurs judiciaires.

L’autonomie - ayant pour sens général : « pouvoir de se déterminer soi-même, faculté

de donner sa propre loi » - se trouve à deux niveaux. En effet, l’idée d’autonomie intervient

indirectement dans le principe de séparation des fonctions (1) et plus explicitement dans le

principe d’indépendance et d’impartialité de la justice (2)

1- La séparation des fonctions.

Le procès pénal se scinde en trois grandes périodes qui s’attachent à trois fonctions

distinctes : la poursuite, l’instruction et le jugement.19 La poursuite se définit comme étant

« l’exercice d’une voie de droit pour contraindre une personne à exécuter ses obligations ou à

se soumettre aux ordres de la loi ou de l’autorité publique ». L’instruction, « est une phase

d’un procès pénal au cours de laquelle le magistrat instructeur procède aux recherches

tendant à identifier l’auteur de l’infraction, à éclairer sa personnalité, à établir les

circonstances et les conséquences de cette infraction, afin de décider de la suite à donner à

l’action publique. » Le jugement est « l’action d’examiner une affaire en vue de lui donner

une solution, en général après l’instruction et les débats ». Ces trois fonctions révèlent

                                                                                                               19 Johan Dechepy-Tellier, la procédure pénale en schémas, Ed .Ellipses, 2015, p 60.

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  14  

l’existence d’un premier principe qu’est la séparation des fonctions, principe impactant

l’entière organisation judiciaire répressive. En effet, l’article préliminaire du Code de

Procédure Pénale dans lequel sont inscrits les grands principes du procès pénal, en fait état en

son alinéa 2. « La procédure pénale doit garantir la séparation des autorités chargées de

l’action publique et des autorités de jugement ».

Comme le précise le code, il est essentiel de mettre en place une séparation des

poursuites et du jugement, c’est ainsi qu’il est prévu que la poursuite sera déclenchée

uniquement par les magistrats ou fonctionnaires auxquels l’accusation est confiée par la loi.

Dès lors la saisine de la juridiction est effectuée par le parquet par application de l’article 31

du Code de Procédure Pénale. En conséquence, aucun juge n’est autorisé à s’autosaisir sauf

de rares exceptions. Cette séparation est retenue aussi bien par le Conseil Constitutionnel20 et

la Cour de Cassation,21 ce qui met en exergue l’importance de celle-ci qui doit alors être

observée de manière absolue, ce qui signifie sans limite.

A l’étude de l’alinéa 2 de l’article préliminaire, on relève que celui-ci énonce

uniquement le jugement et la poursuite. Cependant ce principe de séparation des fonctions

doit s’appliquer à l’ensemble des fonctions. Effectivement, concernant la séparation de

l’instruction et du jugement, des dispositions viennent garantir la mise en œuvre du principe

même si l’article reste muet. L’article 253 du Code de Procédure Pénale dispose « ne

peuvent faire partie de la Cour en qualité de Président ou d’assesseurs les magistrats qui dans

l’affaire soumise à la Cour d’Assises ont, soit fait un acte de poursuite, ou d’instruction, soit

participé à l’arrêt de mise en accusation ou à une décision sur le fond relative à la culpabilité

de l’accusé. » Cette interdiction du juge d’instruction de participer au jugement de l’affaire

qu’il a instruit est également retrouvée dans l’article 49 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale

et s’applique depuis le 15 juin 200022 au juge des libertés et de la détention.

Cette séparation des fonctions permet de parvenir à la vérité judiciaire en ce sens

qu’elle permet un décuplement du nombre d’intervenants et donc engendre la possibilité de

dialogue exposant différents points de vue. Cela a pour conséquence d’éviter de donner une

tâche aussi importante qu’est celle de la justice à un seul individu qui pourrait s’emberlificoter

                                                                                                               20 DC, n°95-360, 2 février 1995 21 crim. 17 février 1912, D.1913,I,375. 22 Loi n° 2000-516 du 15 juin 2000, Renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits des victimes, Article 137-1 du CPP.

Page 20: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  15  

dans une mauvaise voie. Cette séparation des fonctions met alors en exergue une impartialité

de la justice et favorise également une spécialisation des fonctions. Les fonctions étant

séparées, les acteurs ont une connaissance parfaite de leurs champs d’intervention ainsi que

leur rôle, ce qui permet d’éviter des débordements. Cette compétence particulière n’est pas

négligeable vis à vis du nombre incalculable de lois et d’articles, souvent modifiés et

réformés.

2- Le principe d’indépendance et d’impartialité.

L’indépendance et l’impartialité sont deux principes indissociables de l’idée de justice

utile, voire légitime. L’indépendance permet d’assurer la possibilité pour un organe public de

prendre ses décisions en toute liberté et à l’abri de toutes instructions et pressions afin

d’envisager une bonne administration de la justice. L’impartialité favorise l’absence de partis

pris, de préjugés, de préférences, d’idées préconçues afin de départager des adversaires en

toute justice et équité. Force est de constater que pour obtenir une vérité judiciaire, ces deux

principes semblent indispensables. L’indépendance se trouve à différents degrés mais

possède toujours les mêmes bienfaits. Il existe dans un premier temps, l’indépendance de

l’autorité judiciaire vis à vis des autres pouvoirs, tel est le cas avec le pouvoir législatif. En

effet, le législateur n’a pas la possibilité de censurer des décisions des juridictions, de leurs

adresser des injonctions et de se substituer à elles dans le jugement de litiges relevant de leur

compétence selon le Conseil Constitutionnel23. Cette indépendance existe également à l’égard

du pouvoir exécutif qui n’a guère la possibilité d’agir auprès de l’activité judiciaire

notamment concernant les garanties statutaires applicables aux magistrats ou l’inamovibilité

des magistrats du siège.

Il faut noter que cette indépendance se retrouve également au sein même du pouvoir

judiciaire. La Convention Européenne des Droits de l’Homme garantit le principe

d’indépendance à la juridiction appelée à rendre un jugement. En effet, l’article 6 paragraphe

1, relatif au droit à un procès équitable, ordonne que l’affaire soit étudiée par un tribunal

indépendant. Le tribunal se doit d’être indépendant vis à vis des parties. 24 L’idée

d’indépendance sera consacrée à son tour par le Conseil Constitutionnel25. L’article 64 de la

Constitution de la Vème République Française garantit l’indépendance des magistrats                                                                                                                23 DC n °98-399, 5 mai 1998 24 http://www.echr.coe.int/Documents/Guide_Art_6_FRA.pdf 25 Cons. Const. 2 février 1995, Décision, n° 95-360.

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  16  

Français de l’ordre judiciaire. « Le Président de la République est garant de l’indépendance de

l’autorité judiciaire, il est assisté par le Conseil de la Magistrature, une loi organique porte

statut des magistrats, les magistrats du siège sont inamovibles. » L’ordonnance n° 58-1270 du

22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature complète cet

article 64 de la Constitution. L’indépendance des magistrats a pour intérêt de prohiber tous les

liens juridiques entre le juge et l’un ou l’autre des parties au litige. Cependant ce principe ne

peut guère avoir une portée absolue puisque le juge a forcément des éléments objectifs

communs avec le justiciable tels que la nationalité, le milieu social, la génération et le même

sexe. La règle consiste alors que les liens pouvant exister entre le juge et les parties doivent

rester lointains. Ce principe d’indépendance est une garantie pour le justiciable en ce sens

qu’il lui promet lorsque le juge, quand il prend sa décision, ne se laisse pas influencer par des

pressions extérieures et notamment des pressions politiques ou par ses propres opinions ou

préjugés. Le juge appliquera purement la règle de droit et rendra une décision en toute

liberté.26 Afin d’aboutir à une décision judiciaire la plus proche de la vérité, le principe

d’indépendance impose au magistrat de changer de juridiction et de siéger au sein de

différentes chambres de juridiction pour éviter qu’une autorité de fait se crée entre les

membres d’une même formation collégiale ou une juridiction. Ce principe d’indépendance

préserve la confiance du public dans l’impartialité de la magistrature.

De ce principe d’indépendance découle celui de l’impartialité qui commande aux

magistrats de juger en toute objectivité sans prendre partie définitivement pour l’un ou l’autre.

Cette nécessité de neutralité a pour conséquence qu’aucun magistrat ne doit avoir de lien

avec les protagonistes du procès et d’intérêt dans cette affaire et semble donc essentielle à la

manifestation de la vérité judiciaire. Ce principe d’impartialité est tout comme celui

d’indépendance retrouvé à l’échelle européenne. En effet, l’article 6 paragraphe 1 de la

Convention Européenne des Droits de l’Homme impose à tout tribunal d’être impartial.

Concernant les critères d’appréciation de l’impartialité, la Cour « établit une distinction entre

une démarche subjective : c’est à dire chercher à déterminer la conviction ou l’intérêt

personnel de tel ou tel juge dans une affaire donnée ; et une démarche objective, c’est à dire

déterminer si le juge offrait des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute

légitime. » La Cour considère que l’impartialité personnelle d’un magistrat se présume jusqu'à

preuve du contraire. En raison du lien étroit entre le principe d’indépendance et d’impartialité,

                                                                                                               26 http://www.justice.gouv.fr/organisation-de-la-justice-10031/les-fondements-et-principes-10032/lindependance-et-la-neutralite-du-juge-12041.html

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  17  

la Cour Européenne des Droits de l’Homme examine souvent conjointement la question de

leur respect.27

B) le fonctionnement des juridictions pénales.

La juridiction est organisée de sorte que ce soit des professionnels qui interviennent

sous la forme d’une collégialité. (1) Ces professionnels prennent part dans le procès pénal,

ainsi que les différentes parties par le principe d’oralité et publicité des débats. (2)

1- Une collégialité professionnelle de magistrats.

Le fonctionnement du procès pénal est dirigé par de nombreux principes de haute

importance afin de se rapprocher au maximum de la vérité. Nous en avons déjà étudié certains

mais d’autres restent à être développés, tel est le cas de la professionnalisation des magistrats.

La justice ayant pour objectif de juger des protagonistes, elle peut avoir un impact

considérable sur leur vie et leur liberté, il est donc essentiel qu’interviennent des individus

dotés de compétences spécifiques. C’est la raison pour laquelle la France a décidé que les

juges devaient être des professionnels de la justice, magistrats de carrière. Ces magistrats sont

formés à l’Ecole Nationale de la Magistrature. L’égalité des citoyens et l’impartialité

semblent être atteintes grâce à ce principe et envisagent une vérité judiciaire.

S’il semble intéressant de s’attarder sur cette professionnalisation des magistrats, il est

nécessaire d’appréhender ce que l’on appelle lors du procès la collégialité. Elle désigne le fait

qu’une affaire soit jugée par plusieurs juges, elle est en lien avec la professionnalisation et est

aussi importante dans le combat contre une décision judiciaire inexacte. Évidemment, cette

collégialité est instigatrice d’une formation des jeunes magistrats mais semble avoir d’autres

atouts puisqu’elle permet d’obtenir une pluralité de regards et éviter d’éventuelles pressions.

Cependant, si professionnalisation et collégialité semblent dégager de nombreux

avantages, la Cour d’Assises, quant à elle, présente un tout autre schéma. C’est une juridiction

Départementale émanant de la Cour d’Appel qui tient ses assises successives dans chacun des

départements du ressort de la Cour, et qui est composée chaque trimestre pour juger les

                                                                                                               27 http://www.echr.coe.int/Documents/Guide_Art_6_FRA.pdf

Page 23: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  18  

crimes de droit commun et les délits connexes, est formée de la Cour, c’est à dire trois

magistrats et d’un jury de six membres en Première Instance. Ce jury a été emprunté à

l’Angleterre et fut introduit le 3 septembre 1791 en matière criminelle. Autant de conditions

qui permettent de se retrouver en présence de citoyens ignorants et naïfs selon Bouzat et

Pinatel, afin de garantir une Bonne justice.28 La référence étant lointaine, on peut constater

que de nos jours les bienfaits sont toujours présents, puisque le jury constitue une pluralité de

regards pouvant être source de plus d’objectivité et en harmonie avec des professionnels pour

tendre vers une vérité parfaite.

2- L’oralité et la publicité de l’audience.

L’oralité ne fait aucune part aux écritures et repose exclusivement sur des simples

échanges verbaux dont principalement les débats à l’audience. Le Président interroge le

prévenu, les témoins, ou la partie civile, celle-ci commence à plaider, suit les réquisitions du

ministère public pour mettre fin à cette oralité par la plaidoirie de la défense. Fondamental en

Cour d’Assises les jurés et accesseurs ne se décident que d’après ce qu’ils ont vu ou

entendu.29 Ce principe d’oralité est présent au niveau européen au sein de l’article 6

paragraphe 1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme : « toute personne a droit

à ce que sa cause soit entendue équitablement ».

Ce principe de l’oralité présent en droit interne bien qu’il revêt un caractère important

ne fait guère l’objet de consécration générale mais se trouve évoqué à de nombreuses reprises

dans le code de procédure pénale. En effet, l’article 347 du Code de Procédure Pénale prévoit

que le dossier de l’affaire ne soit pas emporté dans la salle de délibération. Néanmoins, un

arrêt de la Chambre Criminelle en date du 21 avril 198230 précise « que l’article 347 alinéa 3

se borne à prescrire que, les débats étant terminés, le dossier de la procédure, à l’exception de

l’arrêt de renvoi, soit, sur l’ordre du président, déposé entre les mains du greffier. Il n’interdit

pas notamment au magistrat de la Cour et aux jurés de conserver par devers eux, durant la

délibération, des notes prises pendant l’audience ou des documents qui leur auraient été remis

pendant les débats pour leur faciliter la compréhension de ceux-ci ». Il reste possible que le

président demande, dans l’hypothèse où il souhaite examiner certaines pièces de la procédure

                                                                                                               28 Eliane de Valicourt, L’Erreur Judiciaire, Ed. L’Harmattan, 2005, P 141, note de bas de page. 29 Michel Redon, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, tribunal correctionnel –juin 2012 ( actualisation octobre 2015) 30 Bull. Crim. n° 97

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  19  

que lui soit apporté le dossier. Les témoins font leur rapport oralement et ont la possibilité

tout de même de s’aider d’un document selon l’article 452 alinèa 2 au Tribunal Correctionnel

et selon l’article 536 du Code de Procédure Pénale au tribunal de police. Il en est de même

pour les experts. La jurisprudence le rappelle dans son arrêt de la Chambre Criminelle du 23

octobre 2013 en indiquant que « le débat devant la Cour d’Assises doit être oral ; ce principe

d’ordre public, qui ne peut être couvert ni par le silence ni par le consentement des accusés,

interdit qu’il soit donné lecture de tout ou partie du rapport d’un expert présent avant son

audition à la barre ». 31

Pour comprendre l’intérêt du principe de l’oralité dans la recherche de la vérité

judiciaire, il est nécessaire de ne pas perdre de vue que l’instruction qui comme on l’a dit

auparavant, est la phase du procès pénal où le magistrat instructeur procédant à des

recherches, n’est obligatoire qu’en matière criminelle. Ce qui signifie que dans les autres cas,

il n’y a pas de juge qui instruit à charge et à décharge pour établir le dossier de procédure.

C’est la raison pour laquelle l’absence d’instruction est compensée par l’oralité qui la réalise

elle-même et vient contrebalancer le manque d’objectivité. Objectivité qui est l’élément

moteur pour atteindre plus facilement la vérité. On peut également rajouter que la vérité

judiciaire est induite par ce principe puisqu’on ne prend pas uniquement pour acquis les écrits

établis par les forces de l’ordre -prenant plus ou moins parti- pour retenir la culpabilité et

responsabilité des protagonistes. De plus, l’oralité semble être utile pour obtenir des

éclaircissements dans les faits par les témoins, les experts ou bien même les prévenus afin

d’éviter de se tromper dans la décision.

L’oralité est unie au principe de publicité prévu à l’Article 6 paragraphe 1 de la

Convention Européenne des Droits de l’Homme. La publicité a pour avantage de sensibiliser

les citoyens et leur permettre de se rendre compte de la manière dont la justice est rendue, ce

qui peut être bénéfique un jour pour les citoyens qui seront choisis pour participer au jury de

la Cour d’Assises.

                                                                                                               31 Bull. Crim. n° 202

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  20  

Paragraphe 2 : Les recours source de protection des accusés.

L’erreur dans le monde judiciaire n’est pas acceptable. Une justice mal menée a un

impact considérable sur la liberté, l’honneur et le patrimoine des protagonistes qui la

rencontrent. C’est ainsi que l’on compte dans les grands principes permettant la recherche de

la vérité judiciaire, les voies de recours. Quand une erreur se glisse dans le système par les

tribunaux de 1ère instance, les voies de recours permettent de réparer celle-ci pour parvenir à

la vérité judiciaire qui sera établie définitivement une fois les recours épuisés ou quand les

délais, afin de les mettre en œuvre, auront pris fin. Les voies de recours sont donc ni plus ni

moins un atout de plus pour atteindre la vérité judiciaire. Deux types de voies de recours

existent : à commencer par les voies ordinaires (A) mais également une voie extraordinaire

beaucoup plus conditionnée. (B)

A) les voies de recours ordinaires.

Les recours ordinaires se scindent à leur tour en deux. Si l’opposition permet à un

protagoniste jugé par défaut de se voir rejuger l’affaire en sa présence avec les mêmes

juges(1) l’appel, quant à lui, consiste à soumettre un litige déjà jugé à un nouvel examen par

une juridiction supérieure. (2)

1- L’opposition.

La simple condamnation d’une personne qui n’a pas pu faire valoir ses arguments par

son absence involontaire peut engendrer une décision inexacte. L’opposition est alors un

moyen de réparer une erreur, qui est en l’occurrence le non respect d’un principe permettant

l’équité, qui donne le droit de présenter ses explications à l’audience pour se défendre. Nul

doute que cette opposition est mise en œuvre pour joindre la vérité judiciaire.

Le domaine d’application de l’opposition se limite aux décisions rendues par défaut,

donc pour les protagonistes qui n’ont été ni présents ni représentés à l’audience.32 Pour

bénéficier de cette opposition, il faut que le citoyen n’ait pas eu connaissance de la tenue de

                                                                                                               32 article 544 et 545 –contravention-, article 487 et 448 –délit- , article 379-2 à 379-6 –crimes- du code de procédure pénale.

Page 26: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  21  

l’audience en raison de problème de citation ou a été averti le jour de l’audience et a fourni

une excuse justifiée pour ne pas comparaître.

Selon l’article 493 du Code de Procédure Pénale, le prévenu, la partie civile victime de

l’infraction, la personne civilement responsable du fait du prévenu sont les seuls à pouvoir

déclencher l’opposition. De même, la loi du 8 juillet 1983, renforçant la protection des

victimes d’infractions permet aux assureurs qui garantissent les dommages, à exercer

également l’opposition dans les mêmes conditions que les personnes civilement responsables

et les parties civiles quand des poursuites pénales sont exercées en matière d’homicides ou de

blessures involontaires. Le ministère public est averti de l’opposition et avise la partie civile

par lettre recommandée avec accusé de réception quand c’est le prévenu qui a fait la

signification. Ce ministère public devant obligatoirement être présent au procès, n’a pas

d’intérêt à bénéficier du droit à l’opposition puisque s’il n’est pas présent, la juridiction n’est

pas valablement composée. Cependant, ce dernier peut former opposition dans les cas où une

ordonnance pénale est prise par le juge correctionnel ou de police sans débat. Cette opposition

doit être faite par déclaration au greffe du tribunal dans les 10 jours de l’ordonnance selon

l’article 495-3 et 527 alinéa 1 du Code de Procédure Pénale.

La détention ne fait en rien obstacle à cette opposition. Le détenu peut y avoir droit en

la déclarant auprès du chef d’établissement pénitentiel qui la constate, la date et la fait signer

par le détenu pour l’adresser au ministère public de la juridiction qui a rendu la décision, sans

obligation de délai.

Cette possibilité d’opposition, bien qu’elle soit bénéfique, est limitée dans le temps. Si

le prévenu réside en France métropolitaine, elle ne peut être faite que dans les 10 jours à

compter de la signification à personne du jugement. Un délai d’un mois est mis en place dans

le cas où le prévenu vit à l’étranger.

L’opposition présente des bienfaits pour la poursuite de la vérité judiciaire en ce sens

que la décision rendue sans possibilité pour le protagoniste de s’exprimer est anéantie. Les

juges saisis de l’affaire une 1ère fois seront saisis de nouveau et pourront prendre une

décision toute différente adoucissant ou aggravant la sentence. Elle a un effet dévolutif. Cet

effet dévolutif peut être retrouvé auprès de l’appel, seconde voie de recours ordinaire.

Page 27: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  22  

2- L’appel.

Comme le relate l’article préliminaire du Code de Procédure Pénale, comprenant les

principes fondamentaux au bon fonctionnement du procès pénal « Toute personne condamnée

a le droit de faire examiner sa condamnation par une autre juridiction ». L’appel est donc une

voie de réformation. Un nouvel examen d’une affaire déjà jugée est possible par une

juridiction supérieure. La vérité judiciaire ne peut être que plus facilement accessible par

l’intervention de ce 2ème examen.

L’intérêt de cet appel est d’une telle importance qu’il est retrouvé aussi bien pour des

affaires de petites conséquences telles qu’en matière contraventionnelle mais aussi en matière

correctionnelle et criminelle. Évidemment, l’appel en matière contraventionnelle n’est

possible que dans l’hypothèse où l’amende encourue est celle des contraventions de 5ème

classe ou selon l’article 131-16 alinéa 1 du Code Pénal, quand a été prononcée une suspension

de permis de conduire de 3 ans au plus. Quand le montant de l’amende encourue est supérieur

à 150 Euros, l’appel se trouve également possible.33 Les jugements émanant des tribunaux

correctionnels pouvant avoir une répercussion d’une plus ou moins grande envergure sur la

vie du prévenu, l’appel peut toujours être interjeté quel que soit le problème de fond, de

procédure, de relaxe. La Cour d’Assises ayant comme objectif de juger les crimes, et prenant

des sentences de privation de liberté de très longue durée, l’erreur est inacceptable. C’est pour

cette raison que la loi du 15 juin 2000 a remédié à l’absence d’appel en matière criminelle.

Néanmoins, la juridiction du deuxième degré est une autre Cour d’Assises comprenant trois

jurés supplémentaires.

Afin de rétablir la vérité judiciaire, cet appel peut être aussi bien interjeté par le

prévenu, la partie civile, le civilement responsable et le ministère public. Autant de personnes

susceptibles de contester les faits, contester la procédure, clamer leur innocence dans le but

que justice soit rendue correctement.

En matière correctionnelle, pour interjeter appel, une déclaration au greffe du tribunal

qui a rendu la sentence que l’on souhaite contester doit être signée par l’appelant, son

représentant ou mandataire. Dans l’hypothèse où cet appelant est détenu, la loi du 30

décembre 1985 a modifié l’article 503 du Code de Procédure Pénale pour permettre à celui-ci                                                                                                                33 Article 546 alinéa 1er du code de procédure pénale

Page 28: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  23  

d’interjeter appel par une déclaration auprès du chef d’établissement pénitentiaire. Ce dernier

en dresse l’acte, le date, le signe, fait signer au détenu et l’adresse sans délai au greffe du

tribunal juridictionnel qui a rendu la décision attaquée.

Si le jugement est contradictoire, l’appel doit être formé dans un délai de 10 jours à

compter de celui-ci. Dans le cas où le jugement est prononcé en l’absence du prévenu, quand

la date du prononcé n’a pas été indiquée ou quand le jugement est intervenu après audition

d’un avocat ayant assuré la défense, ou en l’absence de l’avocat ayant demandé à représenter

son client, le délai court à compter de la signification de ce jugement. Il arrive que le délai

d’appel d’une décision soit beaucoup plus court. En effet, concernant les jugements relatifs à

une demande de mise en liberté ou main levée du contrôle judiciaire ce délai est réduit à 24h.

Le Procureur, quant à lui, a deux mois à partir du jour où la décision a été rendue pour

interjeter appel. A l’expiration du délai, si aucun appel n’a eu lieu, le jugement devient

définitif. Si l’une des parties interjette appel de la décision dans le délai légal, les autres

parties peuvent faire un appel incident sous cinq jours selon l’article 500 du Code de

Procédure Pénale. Quand aucun protagoniste n’a procédé à un appel incident, cela signifie

que le sort du condamné ne pourra pas être aggravé vis à vis de la décision antérieure. C’est la

raison pour laquelle le ministère le fait systématiquement. Bien évidemment, quand le

prévenu ou partie civile se désiste de son appel principal, l’appel incident d’une autre partie

devient caduque.

Les délais d’appel en matière criminelle sont identiques à ceux de la matière

correctionnelle

L’effet dévolutif constaté par l’opposition est également présent en matière d’appel, ce

qui conduit la juridiction d’appel à être saisie du dossier complet. Cet aspect peut être dérogé

en matière correctionnelle. Tout comme l’effet suspensif qu’engendre également l’appel et

qui paralyse l’exécution de la décision prise sur l’action publique. Ce deuxième examen,

aubaine dans la quête de la vérité, peut déboucher sur un ultime examen qu’est celui de la

Cour de Cassation mais le protagoniste peut décider de ne pas y bénéficier. La décision de la

Cour d’Appel constituera la vérité judiciaire.

Page 29: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  24  

B) la voie de recours extraordinaire.

Si un troisième examen de l’affaire est possible, il faut préciser qu’il n’est pas

accessible à tous, puisqu’il nécessite un certain nombre de conditions.(1) Les conditions se

trouvant remplies, la procédure de la Cour de Cassation conduit à un arrêt de rejet ou de

cassation qui établit la vérité judiciaire. (2)

1- Les conditions de fond permettant l’accès au pourvoi en

cassation.

Contrairement à la voie de recours ordinaire qu’est l’appel, facile d’accès, la Cour de

Cassation ne sert qu’à vérifier la légalité des décisions de justice. Juge en droit, les cas

d’ouverture au recours en cassation sont donc extrêmement limités et peuvent se compter au

nombre de six, telle que la composition irrégulière de la juridiction. Les principes évoqués

précédemment ne sont pas respectés comme la présence dans la juridiction de jugement d’un

magistrat ayant participé à l’instruction ou bien même le défaut de publicité des débats. Font

partie également de cette liste limitative l’incompétence, l’excès de pouvoir, la violation des

règles de forme, le défaut, l’insuffisance ou la contradiction des motifs et pour finir le cas très

général de la violation de la règle de fond. Les moyens sur lesquels repose le pourvoi doivent

être précisés par le demandeur.

Les décisions susceptibles de pourvoi sont des décisions juridictionnelles rendues en

dernier ressort. Ce qui signifie qu’à l’instar du taux de ressort, la décision rendue en dernier

ressort sera la décision non susceptible d’appel ou bien les décisions rendues sur appel.

Afin de former ce pourvoi en cassation, il est obligatoire d’être partie dans l’instance

qui a rendu la décision que l’on souhaite voir annuler, mais également avoir un intérêt

personnel. Le ministère public pourra donc former un pourvoi en cassation sur l’action

publique, le prévenu contre la décision qui le condamne pénalement et civilement et la partie

civile contre la décision faisant grief aux intérêts civils.

Si la cour de cassation est une procédure lourde allongeant les procès et se trouvant

être le dernier maillon de la chaine judiciaire française pour la quête de la vérité judiciaire,

elle peut intervenir dès la mise en accusation. En effet, les arrêts de la chambre de

Page 30: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  25  

l’instruction statuant sur la détention ou renvoi devant une juridiction de jugement peut faire

l’objet d’un pourvoi en cassation par la personne mise en examen.

Si les conditions ne sont guère satisfaites, la Chambre Criminelle se doit de déclarer la

requête irrecevable. Requête qui aura pour conséquence de rendre la décision

juridictionnellement rendue en dernier ressort comme une décision définitive. Cette décision

sera donc prise pour vérité judiciaire.

2- La procédure délivrant la vérité judiciaire.

L’accès à la Cour de Cassation est loin d’être la plus rapide et la plus facile. Il faut non

seulement que les conditions soient remplies, faut-il encore être dans le délai pour former le

pourvoi. En cas de décision rendue contradictoirement, le délai est de 5 jours francs à compter

de celle-ci. Il diverge en cas de jugement rendu en l’absence du prévenu en décalant le point

de départ au jour de la signification de l’arrêt. Même si le délai n’est pas dépassé, la difficulté

reste sous-jacente puisque le demandeur se doit de déposer un mémoire écrit au greffe de la

cour de cassation dans un délai d’un mois. Mémoire invoquant les moyens que l’on a pu

développer ci-dessus qui sera examiné par le Président de la Chambre Criminelle pour vérifier

si la décision frappée de pourvoi n’est pas une décision insusceptible de voies de recours. Si

tel est le cas, une ordonnance de non admission est rendue. Dans l’autre hypothèse un

conseiller rapporteur est désigné et l’audience a lieu. Quand il s’agit d’une détention

provisoire, la Chambre Criminelle se doit de statuer dans les 3 mois de la réception du dossier

si elle ne souhaite avoir pour conséquence la remise en liberté d’office de la personne mise en

examen. Il en est de même concernant l’arrêt de mise en accusation.

La décision de la Cour peut tendre vers un arrêt de rejet ou un arrêt de cassation. La

différence est considérable. L’arrêt de rejet mettra fin au procès en estimant que les moyens

ne sont pas fondés tandis que l’arrêt de cassation entraîne le renvoi du dossier à une autre

juridiction pour statuer. S’il existe une différence indiscutable entre l’arrêt de rejet et l’arrêt

de cassation il est indéniable que ce pourvoi en cassation est l’ultime moyen de remettre en

cause la décision rendue. Il n’y a donc aucune difficulté à énoncer que ce troisième examen

possible d’une même affaire permet d’accéder à la vérité judiciaire au regard de sa définition

qui stipule que la décision définitivement rendue par la justice constitue la vérité judiciaire.

Page 31: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  26  

SECTION II :

Les principes judiciaires liés au procès pénal.

Si depuis de très nombreuses années, le symbole de la balance est le reflet d’une bonne

justice, c’est tout simplement parce qu’elle met en œuvre l’idée d’équilibre et de mesure.

Pour s’approcher de la vérité judiciaire, rien n’est plus important que la mise en place d’un

pied d’égalité entre les différents protagonistes intervenant dans ce procès. Il paraît donc

indispensable d’associer au procès pénal des principes permettant l’équité de celui-ci

(paragraphe 1). Il ne faut pas perdre de vue que le procès est un litige soumis à un tribunal

afin de répondre de la culpabilité ou non d’un citoyen pouvant être de bonne foi et non

coupable. C’est la raison pour laquelle, il paraît nécessaire d’insérer des principes permettant

d’atteindre au mieux la vérité. (Paragraphe 2)

Paragraphe 1 : La recherche d’une équité essentielle à la poursuite de la vérité.

Le procès pénal garantissant l’équité use pour y parvenir de principes permettant de

donner les mêmes droits à chaque partie (A), et met en œuvre également des droits source de

rééquilibrage en cas d’inégalité dans les forces que chacun possède. (B)

A) La garantie de l’égalité des armes et du contradictoire

Les fondements amenant les parties à bénéficier à peu près des mêmes droits sont ni

plus ni moins le principe du contradictoire (1) se trouvant être indissociable de celui d’égalité

des armes. (2)

1- Le principe du contradictoire.

Le procès pénal est construit de telle sorte que converge différents intérêts comme

d’un côté celui de l’intérêt en présence, de l’autre côté l’intérêt de la personne poursuivie et

enfin à l’écart l’intérêt général, l’intérêt des victimes et l’intérêt collectif ayant en partie un

intérêt commun. Il n’ y a donc aucun doute que règne au sein d’un procès pénal une certaine

adversité qui dégage l’intérêt pour les parties d’obtenir des moyens pour intervenir dans la

procédure pour s’approcher de la vérité judiciaire.

Page 32: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  27  

Leurs moyens afin d’être impliqués dans la procédure semblent être le principe du

contradictoire défini par la Convention Européenne des Droits de l’Homme comme étant « la

faculté, pour les parties à un procès pénal ou civil, de prendre connaissance de toutes pièces

ou observations présentées au juge, même par un magistrat indépendant en vue d’influencer

sa décision et de la discuter ».34 Ce principe du contradictoire est l’un des principes essentiels

du procès pénal dans la quête de la vérité judiciaire puisqu’il va permettre d’engager des

discussions, argumentations, explications sur les différents éléments du dossier de la

procédure. Il dessinera donc la limite du vrai et du faux. L’intérêt de ce principe est qu’avant

même la décision du juge, un débat sera donc engagé entre les parties. 35 L’oralité étudiée

dans les principes de l’organisation judiciaire comme étant un participant à l’élaboration de la

vérité judiciaire semble être liée à ce principe du contradictoire.

Ce principe du contradictoire n’est appliqué que dans la phase d’instruction et de

jugement. En effet, lors de la phase d’enquête, le principe du contradictoire est inexistant

puisque il ne permet pas au suspect de discuter de la nature et la teneur des preuves recueillies

contre lui. Mais l’intérêt de ce principe reste important dans la chasse de la vérité, en ce sens

qu’il engendre lors de la phase d’instruction la possibilité de former des demandes d’actes,

d’examens, d’auditions ou d’interrogatoires et des débats contradictoires. Pour éviter

d’entrainer des conséquences irréparables, ces débats contradictoires sont mis en œuvre lors

des mesures privatives de libertés.

En effet l’article 135-2 du Code de Procédure Pénale concernant le mandat d’arrêt

indique que sur réquisition du procureur, le Juge de la Liberté et de la Détention peut placer la

personne sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire par une ordonnance motivée suite

à un débat contradictoire. Ce débat contradictoire est également retrouvé au niveau de la

détention provisoire à l’article 137-1 « Lorsqu’il statue à l’issue d’un débat contradictoire il

est assisté d’un greffier ». Il en est de même pour l’article 145 qui dispose « s’il envisage

d’ordonner la détention provisoire de la personne, il l’informe que sa décision ne pourra

intervenir qu’à l’issue d’un débat contradictoire et qu’elle a le droit de demander un délai

pour préparer sa défense ». Les mesures privatives de liberté consistant à priver un individu

de sa liberté notamment de déplacement, si ce dernier devait présenter un danger ou un risque                                                                                                                34 CESDH, 31 mai 1998, Reinhart et Slimane Kaid. Condamnation de la France 35 Aurélie Cappello, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Question prioritaire de constitutionnalité –Juin 2015

Page 33: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  28  

pour la société, le principe du contradictoire mis en œuvre lors de la prise de décision

concernant celles-ci a pour intérêt d’échanger les pièces et discuter pour prendre la décision

la plus convenable pour l’intérêt de la société et pour l’intérêt du protagoniste.

La contradiction tient une place plus marquante au stade de la phase de jugement.

Cette implication importante est en partie expliquée par la présence de l’oralité durant cette

phase. Oralité qui, on le rappelle, est également un moyen d’accéder à la vérité judiciaire. Le

principe du contradictoire et de l’oralité font donc bon ménage pour éviter de prendre une

décision inexacte. Afin que les parties puissent discuter librement des éléments de preuve

comme le permet le principe du contradictoire, celui-ci doit se mêler au principe qui permet

l’égalité des parties.36

2- L’égalité des armes.

« La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des

droits des parties » introduit l’article préliminaire du code de procédure pénale. Cet équilibre

des parties mis en lien avec la contradiction est un principe inhérent à l’Article 6 paragraphe

1 de la Convention Européenne de Droits de l’Homme. Sa présence au sein de la Convention

Européenne des Droits de l’Homme n’est pas anodine, elle reflète l’influence de ce principe.

Évidemment, si l’adversité présente dans le procès pénal entraîne la nécessité du principe de

contradiction imposant le débat entre les parties, cette contradiction n’a d’intérêt que si elle

est équitable et fait donc appel à l’équilibre des droits des parties. Tout un processus essentiel

pour discerner le vrai du faux et rendre une décision prise comme vérité judiciaire. Ce

principe est défini tout simplement par l’absence de domination d’une partie sur l’autre dont

la Convention Européenne des Droits de l’Homme le présente de la même manière avec un

vocable légèrement différent. Selon elle, « ce principe impose que la procédure offre la

possibilité raisonnable pour chacune des parties au procès, de présenter sa cause dans des

conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son

adversaire. 37 Cette idée est également rappelée par le Conseil Constitutionnel qui explique

que « le respect des droits de la défense implique en particulier l’existence d’une procédure

juste et équitable garantissant l’équilibre des droits des parties ». 38 Exigence

                                                                                                               36 Maud Léna, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Jugement- octobre 2008 (actualisation Octobre 2013) 37 CESDH, Delcourt C/ Belgique, 17 janvier 1970 , requête n° 2689-65. 38 Conseil constitutionnel 5 Aout 2010 :n° 2010-612 DC paragraphe 12 .

Page 34: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  29  

constitutionnelle, ce principe tout comme le contradictoire s’applique lors de la phase

d’instruction et de jugement. 39

Cette recherche de l’équilibre des parties engendre une certaine égalité des armes.

Toutes les parties se doivent d’obtenir les mêmes armes ou encore des substituts pour se

défendre. Si tous les protagonistes ayant un intérêt dans le procès pénal possèdent les mêmes

armes, le combat risque d’être plus juste et d’atteindre de manière plus aisée la vérité

judiciaire. C’est pourquoi l’équilibre des parties devait être mis en place vis à vis de

l’accusation qui possédait d’office des moyens plus importants que les parties privées au vu

de leur pouvoir de recourir à la contrainte étatique et la force publique. C’est ainsi que les

citoyens, au fil du temps, se sont vu octroyer des moyens pour participer activement au procès

pénal comme le droit d’obtenir des informations sur le cours de l’enquête et de formuler des

demandes d’actes auprès du magistrat instructeur.

B) Les pouvoirs suscitant le rééquilibrage des parties.

Le suspect, le prévenu, l’accusé, est celui que la justice poursuit et juge. Pour parvenir

à ces poursuites, à ces jugements, elle procède à des investigations, des instructions contre lui

le plaçant dans une situation d’infériorité, pas très confortable. C’est pourquoi des principes

sont mis en œuvre permettant un rééquilibrage. Ce rééquilibrage est acquis par l’intervention

des droits de la défense, définis comme étant un ensemble d’attributs donnés aux personnes

privées du procès pénal tels que : Le droit à l’information (1) et le droit à l’assistance d’un

avocat. (2)

1- Le droit à l’information.

Dans l’intention de respecter le droit de la défense le législateur se doit de faire

intervenir le droit à l’information dans le procès pénal, puisque le protagoniste ne peut se

défendre qu’en ayant connaissance de ce qu‘on lui reproche.

Une information complète est exigée afin de combler les droits de la défense

découlant même du principe d’équité en lien avec le principe du contradictoire. Multiplicité

                                                                                                               39 Aurélie Cappello, Répertoire de droit pénale et de procédure pénal, Question prioritaire de constitutionnalité –Juin 2015

Page 35: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  30  

de principes qui, assemblés nous assurent l’obtention de la vérité judiciaire. La chambre

criminelle prononce donc dans un arrêt « la nécessité de divulguer des précisions sur la

nature et les raisons de la prévention, puis y greffe l’idée que le prévenu doit être en capacité

de se défendre des divers chefs d’inculpation, chacune des circonstances aggravantes

susceptibles d’être retenues.40

Faut-il encore que cette information soit comprise et donc profitable. C’est la raison

pour laquelle est prévue l’assistance d’un interprète, la traduction des pièces essentielles au

procès pénal au vu de la consécration d’un droit à la compréhension des informations par la

jurisprudence 41 et par l’article préliminaire42 du Code de Procédure Pénale.

Cette obligation d’informations, si elle permet indirectement à la personne poursuivie

de se défendre et donc de participer à l’élaboration de la vérité judiciaire, intervient

également pour la victime qui apprend quels sont ses droits.

Ce droit à l’information rencontre une certaine limite concernant la garde à vue

puisque l’ensemble des pièces du dossier ne peuvent être obtenues par l’avocat de l’intéressé

au stade de l’enquête préliminaire. Le suspect était d’une certaine manière lésé mais se verra

obtenir un véritable statut juridique par la transposition du droit de l’Union Européenne en

procédure pénale .43 En effet, son droit d’information s’est intensifié grâce à la transposition

de la directive 2012 /13/UE par la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 lui permettant de connaître

immédiatement la qualification, la date, le lieu présumé de l’infraction qui justifieront sa

garde à vue. Cette loi a également prévu de donner à l’intéressé un document récapitulant ses

droits lors de la notification de sa garde à Vue. Avant même la prolongation de cette garde à

vue les documents mentionnés à l’article 63-4-1 du Code de Procédure Pénale pourront être

observés par le suspect mais la procédure ne pourra être consultée intégralement y compris

pour son avocat. Évidemment, comme le réfute l’article préliminaire, la personne, en plus de

son droit à l’information, a le droit d’être assistée d’un défenseur.

                                                                                                               40 Crim, 20 septembre 2000 , Bull.crim.n° 274 41 Crim ,29 juin 2005, Bull, crim., n°1 99 42 L.n°2013-711 du 5 aout 2013, Portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France. Art. 4 43 Etienne Vergés, Professeur à l’Université de Grenoble, Membre de l’Institut Universitaire de France, revue mensuelle lexisnexis juris classeur, juillet / août 2014.

Page 36: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  31  

2- Le droit à l’assistance d’un avocat.

Le droit à l’assistance de l’avocat est associé au droit à l’information dans l’article

préliminaire du code de procédure pénale. Cette union est due à l’intérêt commun que partage

ce principe qu’est le droit de la défense.

Le droit à l’assistance d’un avocat consacré constitutionnellement depuis longtemps

au titre des droits de la défense sera formulé « droit à l’assistance effective de l’avocat dans

une décision du 30 juillet 2010 dans le but de rapprocher des exigences de la Cour

Européenne des Droits de l’Homme.44 L’assistance effective d’un professionnel de la défense

tel que l’avocat a comme avantage d’améliorer la compréhension de l’accusation et des

moyens qui la sous-tendent mais aussi aide le protagoniste dans la formulation de ses

observations et demandes. La compréhension est nécessaire pour atteindre la vérité judiciaire

d’une telle manière que si les protagonistes ne comprennent pas ce que leur énoncent parfois

maladroitement les professionnels du droit, les réponses ne sont pas toujours de qualité et

peuvent déboucher sur une décision inexacte.

Le défenseur est donc présent du début de l’enquête jusqu’à la décision pour

expliquer ce que l’individu ne comprend pas mais également pour mettre des mots sur des

explications parfois mal entreprises. Les magistrats dotés d’un niveau d’étude élevé, ne se

rendent pas toujours compte que leurs explications, questions, ne sont pas en adéquation avec

un public dont l’intellectualité est légèrement plus faible. Cette barrière entre ces deux types

de personnages peut être un obstacle à la vérité. C’est l’une des raisons pour laquelle,

l’avocat est indispensable à la quête de la vérité judiciaire.

Appliqué tout au long de la procédure, le principe général de ce droit à l’assistance

d’un avocat est « qu’en matière pénale, il appartient à l’intéressé de décider en toute liberté

d’être ou de ne pas être assisté d’un avocat au besoin commis d’office »45 Les dires de

l’intéressé pouvant être conséquents pour la suite de l’événement lors de l’interrogatoire de

première comparution que ce principe est dérogé et oblige la présence de l’avocat. Le

défenseur peut être choisi en toute liberté46. Si l’assistance effective de l’avocat s’applique

                                                                                                               44 Aurélie Cappello, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Question prioritaire de constitutionnalité –Juin 2015 45 Cons. Const.11 aout 1993 : n° 93-326 DC§ 25 46 Cons. Const. 22 janvier. 1999 :n° 98-408 DC§ 25.

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  32  

tout au long de la procédure, la phase de l’enquête est plus problématique. En effet, l’avocat

ne pourrait être présent qu’au cours de la garde à vue excluant la présence de l’avocat à

d’autres moments de l’enquête. Ce droit de l’intéressé de s’entretenir avec un avocat lors de la

garde à vue est inscrit dans la décision du Conseil Constitutionnel du 11 Août 1993. Cet

entretien serait limité à une durée de 30 minutes selon l’Article 63-3 -1 alinéa 1er et 63-4

alinéa 2 du Code Procédure Pénale. Le droit à l’assistance effective d’un avocat évolue au

niveau de la garde à vue et atteint grâce à la loi du 27 mai 2014, la possibilité pour une

personne soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une

peine d’emprisonnement et qui demeure libre d’être assistée durant ses auditions et ses

confrontations.

Paragraphe 2 : Les principes protecteurs de la personne poursuivie.

Si l’organisation judiciaire est construite de telle sorte qu’une certaine impartialité

règne, il n’empêche que celui qui enquête, qui juge, qui instruit, n’est ni plus ni moins

humain. Il se peut que face à la monstruosité de certains faits, le premier venu fasse le bon

coupable. Face à cette humanité au sein de la justice et dans le besoin d’obtenir une vérité

judiciaire, il est intéressant de développer des droits protégeant dans un premier temps les

personnes suspectées, poursuivies et jugées (A) mais également de prévoir leur protection par

l’intermédiaire du respect des principes relatifs à la tenue du procès. (B)

A) La protection « même » du suspect.

Le souci de la vérité judiciaire oblige le législateur à instaurer un principe de

présomption d’innocence (1) afin d’éviter que dès l’instant où des éléments de l’enquête, de

l’instruction concordent avec un citoyen, il ne soit considéré directement dans l’esprit des

intervenants comme coupable. Ce qui peut venir fausser la suite des interventions jusqu’au

jugement.

1- La présomption d’innocence.

La présomption d'innocence communément définie comme étant « un préjugé en

faveur de la non culpabilité », n’a été jusqu'à la fin du XXe siècle contenue que dans l'article

Page 38: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  33  

neuf de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Article neuf qui dispose « que

tout homme est présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable ». C'est finalement

la loi du 4 janvier 1993, qui a permis l'intervention de la présomption d'innocence dans le

Code Civil donnant droit à une réparation à son atteinte à l’article 9-1 . Ce droit ne verra le

jour dans le cadre de la procédure pénale, en son article préliminaire, que par la loi du 15 juin

2000.47 Force est de constater que ce principe est d'une grande envergure pour être mis en

œuvre à multiples reprises.

Cette présomption permet au suspect de ne pas être immédiatement considéré comme

coupable au moment où il est interpellé jusqu'à son éventuel procès, et plus précisément

jusqu'à ce qu’une décision définitive ne soit intervenue. Dans un premier temps, il conduit

donc les forces de police ou de gendarmerie à enquêter et les juges à instruire, à charge et à

décharge. En recherchant également des éléments de disculpation, s’érigent donc des bases

solides pour la suite du procès, sources d’égalité qui ne sont négligeables dans la recherche de

la vérité judiciaire.

Cette présomption se rapporte à la preuve. Le fait d’être considéré comme non

coupable dans l’attente de la décision du juge, entraîne la prise en mains de la charge de la

preuve par l’accusation et éventuellement de la partie civile. Ce qui veut dire que l’accusé n’a

pas à prouver son innocence tout comme la personne poursuivie n’a pas à collaborer à la

recherche de la vérité. C’est la raison pour laquelle il existe le droit de se taire et de ne pas

s’incriminer soi-même.48 L’intéressé est donc protégé contre les coercitions abusives de la

part des autorités. Le ministère public doit rapporter la preuve de la responsabilité du prévenu

alors que la partie civile doit prouver le dommage qu’elle a subi et le rapport de cause à effet

avec l’infraction. Bien que la charge de la preuve revienne à l’accusation, celle-ci ne peut

fonder son argumentation sur des preuves recueillies par le biais de pressions ou de

contraintes à l’encontre de l’accusé. Ce rôle confié au ministère public, revêtu de la qualité de

demandeur pour avoir comme finalité de faire appliquer la loi, est similaire au rôle que

confère l’article 1315 du Code Civil au demandeur. « Celui qui réclame l’exécution d’une

obligation doit la prouver ». Cette similitude n’est pas anodine et peut mettre en exergue la

fiabilité de ce système dans la recherche de la vérité judiciaire. Si c’est principalement sur

                                                                                                               47  Johan Dechepy-Tellier, la procédure pénale en schémas, Ed .Ellipses, 2015. 48 Coralie Ambrois Casterot, Agrégée des Facultés de droit, Membre du Haut Conseil de la Magistrature de Monaco, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Octobre 2013.

Page 39: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  34  

l’accusation que pèse la charge de la preuve, la personne poursuivie pourra tenter d’écarter ou

d’atténuer sa culpabilité en rapportant certains arguments. La quête de la vérité judiciaire

exacte est donc constamment stimulée par la présomption d’innocence qui combat contre le

déséquilibre dans les rapports de force mais également lutte pour obtenir une grande partialité.

Dans le cas où les charges rapportées par le ministère public ne suffisent pas à

emporter la conviction du juge et laissent planer le doute dans l’esprit de celui-ci, la personne

poursuivie échappe au prononcé de condamnation selon l’adage « in dubio pro reo ». Adage

résultant également de la présomption d’innocence.

La présomption d’innocence s’impose aux journalistes. La personne suspectée ou

poursuivie bénéficie d’un droit subjectif extra patrimonial au respect de la présomption

d’innocence. Dans l’hypothèse où ce droit aurait été violé, c’est à dire que l’intéressé aurait

été présenté publiquement comme coupable des faits pour lesquels un enquête est en cours,

une action en réparation de l’atteinte ainsi que l’insertion d’une rectification ou diffusion d’un

communiqué pourraient être envisagées. Ces mécanismes, mettent en exergue l’importance du

principe de présomption d’innocence.

B) L’équité dans le déroulement du procès.

Si des principes doivent être érigés pour protéger directement la personne poursuivie,

le droit d’être jugé dans un délai raisonnable (1) ainsi que la motivation (2) constituant des

éléments relatifs de la tenue du procès ne sont guère négligeables dans cette protection.

1- Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable.

L'article préliminaire du Code de Procédure Pénale issue de la loi du 15 juin 2000

impose le droit d'être jugé dans un délai raisonnable. Ce délai raisonnable, qui, bien qu’il n’ait

été prévu dans le code que récemment, se trouve être fondamental pour parvenir à une bonne

justice. S'il est utile que le jugement intervienne rapidement dans le souci de préserver les

souvenirs du prévenu ou des témoins, ce principe peut permettre d'éviter de trop longues

détentions provisoires parfois injustifiées. La détention provisoire ayant des atouts peut aussi

engendrer des conséquences quand la personne poursuivie est finalement relaxée. Afin de

diminuer ces conséquences ayant un impact direct sur la vie, l’honneur de l’intéressé, le droit

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  35  

d'être jugé dans un délai raisonnable est essentiel. Plus le délai pour être jugé sera raisonnable

plus on se rapproche de la vérité puisque passeront à la barre des témoins, des prévenus plus

fiables, ayant de meilleurs souvenirs. Sans compter que les durées excessives de procès

peuvent engendrer des changements de versions suite à des pressions, discussions entre les

différents protagonistes de l'affaire développant des contradictions favorisant des décisions

s’éloignant de la vérité.

Le Conseil d'État indique « le caractère raisonnable du délai doit, pour une affaire,

s'appréciait de manière globale – compte tenu notamment de l'exercice des voies de recours –

et concrète en prenant en compte sa complexité, les conditions de déroulement de la

procédure, le comportement des parties tout au long de celle-ci et aussi, dans la mesure où le

juge a connaissance de tels éléments, l'intérêt qu'il peut y avoir pour l'autre, compte tenu de sa

situation particulière, des circonstances propres aux litiges, et le cas échéant, de sa nature

même, à ce qu'il soit tranché rapidement.49

Ce délai raisonnable est également une exigence de la Convention Européenne des

Droits de l’Homme que l’on retrouve en son article 6 paragraphe 1. Pour apprécier la durée de

ce délai raisonnable, il faut s’attarder sur des périodes précises. Le point de départ de ce délai

est la date où la personne est arrêtée ou détenue. La jurisprudence de la convention a précisé

que la durée de la procédure n’est ni plus ni moins que la durée du procès dans son intégralité.

Le point d’arrivée est alors l’obtention d’une décision exécutive. Les critères d’appréciation

du caractère raisonnable du délai de la Cour Européenne des Droits de l’Homme sont au

nombre de trois. Il convient de s’attarder sur la complexité de l’affaire qui s’apprécie soit à

partir d’éléments de fait ou des éléments de droit. Le protagoniste peut être jugé dans un délai

raisonnable plus court, si l’affaire dans laquelle il se trouve impliqué n’est pas complexe. En

effet, si l’affaire est complexe, la durée de l’instruction peut être plus longue en raison de la

difficulté de la recherche de la véracité des faits, auteurs, et complices. Le délai raisonnable

doit être plus long. L’enjeu du litige est le second critère. Le Procureur de la République peut

utiliser des procédures simplifiées permettant d’accélérer le délai du jugement si la valeur du

litige est faible. Enfin l’appréciation des comportements doit être prise en compte. Le juge

doit s’assurer que les parties ont pu exercer leurs droits à la défense. 50 La jurisprudence de la

Cour Européenne des Droits de l’Homme en date du 14 juin 2001 Brochu/France considère                                                                                                                49 CE, ass., 28 juin 2002, Magiera, req.n° 239575 : préc.note 64 50 http://www.cabinetaci.com/avocat/libertes-fondamentales-avocat/les-droits-de-la-defense/le-droit-detre-juge-dans-un-delai-raisonnable/

Page 41: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  36  

que le délai raisonnable d’une procédure judiciaire moyenne s’opère dans un délai inférieur à

2 ou 3 ans. Les juridictions administratives sont compétentes pour contrôler le caractère

raisonnable ou non du délai.

Afin de parvenir à un délai raisonnable, la loi impose l’examen de l’affaire dans un

délai de deux mois pour les dossiers instruits dans lesquels une personne est en détention. En

matière criminelle, ce délai est d’un an à compter de la date à laquelle la décision de mise en

accusation est devenue définitive .51

2- La motivation des décisions.

La motivation de la décision constitue ni plus ni moins l'argumentation des juges. Ce

principe est l’un des principes révolutionnaires organisant la justice, et est donc apparu avec

la loi du 16 et 24 août 1790.

La vérité judiciaire étant définie comme la décision rendue par le tribunal, la

motivation de celle-ci intervient donc pour obtenir la vérité judiciaire. La quête de la vérité est

d’autant plus atteinte avec ce principe en ce sens que la motivation permet de faire connaître

et comprendre quelles ont été les raisons qui ont amené les juges à prendre cette décision mais

aussi de démontrer l'impartialité des magistrats. Les juges mettent en exergue leur

raisonnement juridique et cohérent, ce qui supprime toutes suspicions de préjugés ou de

considérations arbitraires.52 En effet les juges ont pour obligation de répondre à tous les chefs

de conclusions selon l'article 459 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale. La motivation des

décisions suscitant un meilleur contrôle de la décision par la juridiction supérieure53 permet

une fois de plus de constater l’intérêt de cette motivation dans la recherche de la vérité. En

effet, plus il y a d’éléments qui motivent la décision prise par la première juridiction, plus les

juridictions supérieures – telles la Cour d’Appel et la Cour de Cassation sources d’obtention

de la vérité judiciaire- ont de facilité à intervenir, ce qui favorise encore la recherche de la

vérité judiciaire.

                                                                                                               51 Bernard Bouloc, Professeur à l’Université Panthéon-Sorbonne Paris-1), RCS, 2002, p 138, le droit d’être jugé dans un délai raisonnable : loi du 15 juin 2000. 52 Maud Léna, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Jugement- octobre 2008 (actualisation Octobre 2013) 53 Florence Bussy, Recueil Dalloz, l’erreur judiciaire –D 2005-2552, l’obligation de motivation des décisions de justice.

Page 42: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  37  

Cette motivation se trouve d’autant plus renforcée dans les situations présentant des

enjeux de liberté telle que la détention provisoire. Effectivement, les juges se trouvent obligés

de démontrer le caractère indispensable de la détention par rapport aux critères posés par

l'article 144 du Code de Procédure Pénale, et d'autre part expliquer en quoi le contrôle

judiciaire serait insuffisant.

Notre justice, comprenant un arsenal de principes relatifs à l'organisation judiciaire et

au procès, depuis le code de l’Instruction Criminelle, semble avoir mis tout en œuvre pour se

rapprocher de la vérité et rendre une décision qui sera considérée comme vérité judiciaire.

Cependant, cette vérité judiciaire n'étant ni plus ni moins la décision définitive rendue par une

juridiction diffère de la vérité absolue qui consiste à joindre la certitude. En conséquence, la

vérité judiciaire peut constituer la réalité mais peut également être source d’erreurs. Il

convient donc de s'interroger sur la provenance de ces erreurs.

Page 43: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  38  

CHAPITRE II.

Les causes des erreurs judiciaires.

La vérité judiciaire est établie par des hommes avec le concours de multiples

intervenants au préalable, qui ne sont guère des Dieux. Paradoxalement, notre justice est ainsi

faite, qu'elle est régie par des hommes qui auront comme mission de procéder à des

investigations, instructions et jugements à l’encontre d’autres humains. Ces hommes

bénéficiant de ce pouvoir, sont dotés tout comme le reste de la population, de qualités mais

également de défauts. Malheureusement la justice va faire les frais de la faillibilité de

l'homme. Les erreurs judiciaires peuvent trouver leurs sources dans les facteurs humains.

(SECTION I). Cependant, bien que des principes aient été mis en œuvre aussi bien au niveau

de l'organisation judiciaire que du procès, ils ne sont pas toujours respectés et n'atteignent pas

encore la perfection pour bénéficier d'une justice convenable. Les erreurs judiciaires semblent

pouvoir découler de l'organisation judiciaire. (SECTION II)

Page 44: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  39  

SECTION I :

Le facteur humain.

Il est indispensable de rappeler que lorsque justice est rendue, l'intérêt de la société est

retenu. C'est ainsi que l'organisation judiciaire a édifié une autorité, le ministère public ayant

pour objectif de défendre l'intérêt collectif. La société ayant alors directement sa place dans le

procès pénal, il arrive qu'elle s'immisce d'elle-même, un peu plus, pouvant parfois provoquer

des erreurs (Paragraphe 1). Si cette société peut engendrer un désastre judiciaire, il ne faut pas

perdre de vue que ce sont les personnes au cœur même du procès qui peuvent établir la vérité.

Elles sont parfois donc les causes des erreurs (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L’implication de la société, source d’erreurs judiciaires.

Comme le relate Maître Nathalie Faussat, « il y a un véritable engouement du public

pour tout ce qui concerne les faits divers judiciaires quels qu'ils soient »54. Les chaînes de

télévision sont de plus en plus conquises par des reportages sur la justice. En conséquence, les

médias générateurs de ces reportages interviennent dans le procès pénal, pouvant interférer

dans son fonctionnement et engendrer une erreur (A). Cette intervention provoque un intérêt

chez le public qui n’est pas non plus irresponsable dans les erreurs judiciaires. (B)

A) La manipulation des médias.

Les médias, tenant pour vrai les informations qui leur sont transmises, déclarent

régulièrement des éléments calamiteux sur la défense, calomnies qui ne devraient pas exister

par l'application du principe fondamental qu’est la présomption d'innocence. Ces

divulgations, bien qu’interdites par l'article 11 du code de procédure pénale qui dispose : « la

procédure au cours de l'enquête de l'instruction est secrète » peuvent influencer des personnes

intervenant au procès pénal (1) et surtout créer une insécurité pour la population qui est

conséquente sur les décisions des juges. (2)

                                                                                                               54 Hervé Charrette, ancien ministre des affaires étrangères –député de Maine et Loire – Président de la Convention Démocrate- Perspectives et Réalités , Grand débat national sur la justice- après Outreau quelle réforme de la justice pénale ?, Ed. l Harmattan 2006 , p 64

Page 45: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  40  

1- L’influence des médias sur les personnes afférentes au procès.

Les médias, étant une institution ou un moyen impersonnel permettant une diffusion

large et collective d'informations et d'opinions quel qu'en soit le support, s'emparent du sujet

« justice ». Ils s'immiscent dans le procès pénal et peuvent engendrer des erreurs judiciaires

ayant des conséquences déplorables. Bien que le journaliste puisse être préoccupé par les

intérêts de la défense, il est amené indirectement à relater des éléments défavorables envers

la personne poursuivie, dues à des sources délatrices.55 Il a tendance à puiser ses informations

auprès de personnes fortement accusatrices. En se pressant de tirer des informations auprès

des commissaires, des parents des victimes, des voisins, et du ministère public, ne rapportant

que des éléments négatifs pour la défense, ce journaliste ne peut être comparé qu'au ministère

public comme le présente un vieil Adage.

Cependant, cette divulgation d’informations tendant à abattre la personne poursuivie,

peut avoir un impact sur la décision rendue par la juridiction et provoquer des erreurs. Cette

décision dans le cadre des Assises est prise par un jury choisi parmi toute la population et

influencé par les médias qui, du début de l'enquête jusqu'au jour de l'audience, par leurs

reportages, articles de presse, présentent les aspects négatifs de l’affaire. Les jurés endoctrinés

par les médias vont se construire leurs opinions avant même d'entrer dans l'enceinte du

tribunal. Le dossier sera donc étudié lors de l'audience sans intérêt, l'erreur judiciaire est donc

susceptible de se produire. Cette idée n’est guère nouvelle, faisant l'objet le 3 juin 1891 d'un

article dans le journal l’éclair.56

Les médias de manière parfois involontaire peuvent non seulement influencer les jurés

par des articles en défaveur de la défense mais aussi les personnes directement liées au procès

pénal. C’est le cas de l’importante erreur judiciaire qu’est l'affaire de pédophilie d’Outreau où

les médias ont créé un certain désastre en étant la source même de certaines déclarations d’

enfants soi-disant victimes de viols. Par exemple, Aude a répété manifestement ce qui était

relaté à la télévision ou dans les journaux.57

                                                                                                               55 Maurice Lailler, Les erreurs judiciaires et leurs causes, Ed Hachette Livre, Ed.1897, p 39 56 L’Eclair du 3 juin 1891, « Quelques-uns de nos confrères sont trop modestes, ne se rendent pas assez compte de l’influence de la presse sur les verdicts rendus. Pendant des mois, « elle chauffe » l’opinion, dramatise l’affaire, prive inconsciemment le prévenu, par un mot cruel, un détail répugnant, des vagues sympathies qui pouvaient décider de son sort….Qui dira jamais la pression subie par le cerveau d’un bon juré, lisant le matin dans sa feuille que toute compassion lui serait imputée à faiblesse ; que l’opinion exige de lui un implacable arrêt ? etc » 57 Gilles Antonowicz, La faiblesse des hommes, Ed Max milo, 2013. p 213

Page 46: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  41  

De plus, cette intervention des médias dans la justice n’est pas sans conséquences

surtout lorsque l’on constate qu'il leurs arrive de fausser également l'enquête. Sur ce point,

nous pouvons encore citer l'affaire Outreau dans laquelle ils ont prétendu que les Legrand

auraient été gérants d'un sexe shop à Ostende. Ces éléments n’existant pas dans le dossier,

nous sommes forcés de constater que c’est purement une invention des médias, qui sont donc

incontestablement sources d'erreurs par leur facilité d'influencer des personnes intervenant

dans le procès pénal mais également en créant un émoi chez le public.

2- L’émoi de la population.

Si les médias arrivent à atteindre les jurés par leurs reportages et articles, c'est parce

qu'avant tout, ils parviennent à toucher la population. Un problème est alors sous-jacent quand

on constate que la société est importante dans la décision que la juridiction va rendre. Si

importante, qu'une autorité telle que le ministère public intervient dans le procès pénal pour

requérir, dans l'intérêt de cette société.

Évidemment, si les médias accèdent aux émotions du public, suscitant chez eux une

insécurité, une crainte, les magistrats devront y répondre. En se focalisant sur le public qui

est soumis aux calomnies des médias et qui réagit en clamant que justice soit rendue, parfois

même par l'évocation de la réapparition de la peine de mort, le magistrat ne va-t-il pas

s'éloigner de la réalité et rencontrer l'erreur ? Cette médiatisation engendrant une insécurité

dans l'esprit de la population, entraîne chez les magistrats, des situations bien compliquées,

les obligeant parfois à l'inverse de ce qui est prévu, mettre sur un piédestal l'intérêt de la

société. Cette surélévation de l'intérêt social peut créer une erreur judiciaire alors même que

ces divulgations négatives ne devraient pas être, en raison du respect du principe de

présomption d'innocence.

Pour répondre à cette peur et insécurité de la population entretenues par les médias, le

magistrat préfère mettre un innocent en prison que de laisser un coupable en liberté. Ce fut le

cas dans l'affaire d’Outreau, des innocents ont été placés en détention provisoire pour une

durée relativement longue pour plusieurs raisons prévues par l'article 144 du Code de

Procédure Pénale dont celles relatives aux troubles à l'ordre public, ordre public plutôt

confondu dans cette affaire par opinion publique. Dans cette affaire désastreuse, lors des

Page 47: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  42  

demandes de mise en liberté, la population criait haut et fort dans la rue « à mort les

pédophiles ». Les magistrats refusaient donc systématiquement ces demandes, parfois même

par peur de violence sur les personnes poursuivies.

La justice ne peut être rendue convenablement et donc sans erreur judiciaire, étant

donné l'intrusion d'une multiplicité d’intervenants tels que les médias interférant dans la

réalité, et la population clamant ses opinions. Il s’ensuit de ces explications que l'opinion

publique peut être responsable des erreurs judiciaires.

B) La ferveur de l’opinion publique envers les affaires judiciaires.

L’opinion publique bien qu’elle soit source d’erreurs car elle influence les décisions

des juges, l’est également en colportant des rumeurs (1) et propageant ses convictions et ses

préjugés. (2)

1- Les rumeurs génératrices de confusions au sein du procès.

« Rien ne naît sans germe : mais peu importe la valeur du grain et l’adresse de la main

qui l’a lancé. A peine tombée dans l’esprit de la foule, la semence d’accusations si vide soit-

elle se développe et rapidement devient « le chorus de haine et de proscription »58

La rumeur dénoncée dans cette citation est également une source d’erreur judiciaire

surtout dans les années 1800 où le procès pénal était régi par le code de l’organisation

judiciaire. Ce fut le cas de l’affaire Rispal et Galland en 1817, dans laquelle Jean Courbon

trouvé mort sur le revers du fossé fut déclaré, suite à l’autopsie, mort par apoplexie.

Cependant l’affaire à peine classée, le public se chargeait de colporter des rumeurs engendrant

l’arrestation de trois hommes, et donc une erreur judiciaire. L’humain étant un grand

interprète de tous faits ou situations, les rumeurs touchent toutes personnes dans le monde et à

chaque instant de la vie.

Ces rumeurs communément définies comme étant un bruit informel persistant sans

source déterminée, on peut s’interroger sur la question de savoir comment elles ont pu être

retenues par les enquêteurs ou les juges ? La réponse est évidente et révèle que la rumeur est                                                                                                                58 Victor Hugo, Le Pape, poème, 29 Avr. 1878.

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  43  

tout simplement la solution du problème à l’absence de preuve. Dans les affaires où aucune

preuve ne permet de poursuivre quelqu’un, les rumeurs peuvent avoir un grand intérêt pour

rendre quand même justice et engendrer à coup sûr des erreurs judiciaires. Marie Besnard en a

subi les conséquences. En 1949, elle sera arrêtée et inculpée alors que le juge n’a même pas

un commencement de preuve, pas le moindre indice. Ce qui lui vaudra ces poursuites, ce sont

les simples rumeurs de commères. 59

Ces rumeurs, parfois différentes sur une même affaire, peuvent en effet entraîner un

certain flou dans les enquêtes au point de ne plus arriver à dissocier le vrai du faux. Souvent

le point de départ de ces rumeurs était la mésintelligence qui régnait entre la victime et le

soupçonné comme ce fut le cas de l’affaire Doise de 1861 où la femme Doise était brouillée

avec son père et l’affaire Lerondeau de 1878 où l’épouse lui faisait régulièrement des scènes

de vie. Les épouses Doise et Lerondeau faisaient donc toutes les deux les parfaites

coupables. Ce caractère chez l’humain, qui tend à colporter des rumeurs, n’est pas le seul

démon de celui-ci, susceptible d’entraîner l’erreur judiciaire. Les préjugés, les convictions en

font partie.

2- Le procès conditionné par les convictions.

Chaque humain a pour caractéristique d’être unique, c’est à dire d’avoir son propre

caractère, propre physique, propre mode de vie qui peut provenir de l’éducation reçue des

parents. Ces différences, bien qu’elles permettent des échanges intéressants, enrichissants les

connaissances, ne sont pas toujours tolérées. Certains citoyens ayant leur propre conviction et

valeur en excluent d’autres de la société. Cette exclusion peut être dangereuse au niveau de la

justice. Des innocents peuvent se voir coupables uniquement parce que la population a des

préjugés. Ce fut le cas dans l’affaire Dreyfus où l’accusation était très légère mais la religion

de celui-ci – Juif- n’était pas acceptable. 60

A cette époque, la France, pays catholique, s’adonne de plus en plus à des actes

antisémites. C’est dans ce contexte, que la ferveur populaire qui n’épargnait d’ailleurs pas la

hiérarchie militaire française, a placé Alfred Dreyfus sous le joug d’une accusation totalement

                                                                                                               59 Christian Faure, scénario : Olga Vincent, Daniel Riche, Société de production : ramona production, pays d’origine France Belgique, genre : film dramatique ,biographie diffusée pour la 1ère fois sur TF1 le 25 septembre et 2 octobre 2006, date de sortie 2006. 60 Emile Zola, l’affaire Dreyfus la vérité en marche. Ed. Flammarion, 25 janvier 1994.

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  44  

arbitraire et dépourvue de preuve tangible. Au cours de cette affaire, la France a vu ses

citoyens divisés, les Dreyfusards et Antidreyfusards se sont affrontés de façon virulente dans

le but de faire pencher la balance judiciaire au gré de leurs opinions.

Paragraphe 2 : Les protagonistes du procès, acteurs de l’erreur judiciaire.

Le procès pénal fait intervenir plusieurs personnes afin d’établir la vérité. Les

témoignages, sensés être bénéfiques à l’élaboration de la vérité, sont source d’erreurs (A) tout

comme les aveux.(B)

A) Le témoignage, un mode de preuve réfutable.

S’il paraît compliqué d’accorder une totale confiance aux témoignages pouvant être

faux pour différentes raisons (1) il en est de même concernant la parole de l’enfant qui est

susceptible d’être parfois le fruit de leur imagination. (2)

1- Les faux témoignages.

Le témoignage, action de rapporter ce que l’on a vu, entendu, et ce que l’on sait, n’est

pas toujours bénéfique. Bien qu’il soit prévu dans le Code de Procédure Pénale, il a été

source de beaucoup d’erreurs judiciaires que l’on peut lister : affaire Solena en 1945, Guy

Mauvillain en 1975, Ranucci en 1974, Marc Machin en 2001.

Autant d’affaires où les témoignages ont créé des problèmes jusqu’à nuire à la

manifestation de la vérité ; s’ils sont dangereux pour le procès pénal, c’est pour différentes

raisons.

Si les faux témoignages sont régulièrement retrouvés lors du procès pénal et favorise

l’erreur judiciaire, la raison pour laquelle ils sont établis se trouve être différente. Ils peuvent

être manigancés par l’appât du gain, la vengeance ou dans le but de se rendre intéressant,

rendre service ou par influence. En avril 1893, au Tribunal de Tours, une domestique, Mlle

Hünmel raconta que Mr V*** l’avait violée trois ans auparavant afin d’aider sa maîtresse

Mme V*** qui était en divorce avec le prévenu. Néanmoins, l’examen gynécologique dévoila

que Mlle Hünmel était encore vierge. Christian Lacono, ancien maire de Vence, fut condamné

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  45  

en 2009 pour le viol de son petit fils qu’il aurait commis dans les années 1990. Deux ans plus

tard, le petit fils revint sur sa version des faits et expliqua avoir menti pour faire inculper son

grand père sous l’influence des conflits qui existaient entre son père et son grand père.La

personne décide volontairement de témoigner de fausses informations, ce qui peut engendrer

la condamnation d’un innocent. A contrario, le faux témoignage peut être inconscient.

Occasionné par une mémoire défaillante, il est indépendant de la volonté. Évidemment, les

affaires judiciaires étant parfois jugées des années après les faits, il est difficile pour les

témoins de se souvenir des détails. A plus forte raison il arrive que les enquêteurs, juges

d’instruction, ne facilitent pas la tâche aux témoins en raison de leur manière de les

interroger. Les questions sont posées d’une telle façon qu’elles sont susceptibles d’influencer

les témoins.

Si les faux témoignages peuvent entraîner les erreurs judiciaires, il faut savoir que

celles-ci sont engendrées par l’absence de leur prise en compte par des juges d’instruction,

enquêteurs, magistrats qui sont parfois laxistes et qui ne leur portent guère d’intérêt, comme

ce fut le cas dans l’affaire Ranucci. Il a été condamné alors que la plupart des témoins

clamaient que le kidnappeur de la petite fille était un homme qui avait une SIMCA 1100

grise. La voiture de Ranucci n’était pas ce modèle, il possédait un coupé Peugeot. Les témoins

indiquaient également que l’homme était plus vieux que Ranucci. Au final, au moins 8

témoins tombaient dans les oubliettes dans la prise de décisions qui le condamna.61 Ces

témoignages ont été mis de côté uniquement dès l’instant où Ranucci a eu un accident, pris la

fuite et avait donc quelque chose à cacher. Les témoignages n’ont pas été considérés comme

étant de valeur pour établir la vérité parce que les juges avaient une idée préconçue.

A l’inverse, s’il arrive d’être face à des témoignages faux ou non pris en compte, il ne

faut guère oublier que l’on a tendance dans certains cas à leur donner trop d’importance. Les

policiers, les juges répondent souvent à l’accusé : « si vous êtes innocents, pourquoi le témoin

accuse ? ». Cette valorisation ne devrait pas exister puisque l’on a vu des raisons pour

lesquelles un témoin peut mentir. Cette conviction des juges, que le témoin est forcément

celui qui dit vrai, peut également causer des erreurs judiciaires puisque le juge s’enivre dans

ces témoignages et perd de vue les autres preuves. Cette situation ne se retrouve pas dans le

système accusatoire de l’Angleterre car il restreint les témoignages qui peuvent incriminer

l’accusé et permettent de poser des questions d’une telle nature que l’on se demande parfois si                                                                                                                61Jacques Vergès, Les erreurs judiciaires, que sais je ?, Ed. Puf, 2éme édition 2015.

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  46  

le témoin n’est pas l’accusé. Ce système Anglais peut-être intéressant puisqu’il permet

d’établir une équité et peut être faire tomber la vérité.

Le témoignage étant susceptible de créer des méfaits dans le procès pénal, l’enfant

pouvant y faire son apparition, est d’autant plus problématique.

2- L’incrédibilité de la parole de l’enfant influencé.

Vu son jeune âge, l’enfant dégage une problématique considérable dans le procès

pénal. Cette juvénilité oblige une très grande protection, « l’enfant en raison de son manque

de maturité physique et intellectuelle a besoin d’une protection spéciale, de soins spéciaux,

notamment une protection juridique appropriée avant et après la naissance » . 62 Cette

protection est retrouvée aussi bien dans le code de procédure pénale que dans la convention

de New York 1990. En recherchant constamment sa protection, quand l’enfant intervient en

tant que victime dans le procès pénal, il est mis sur un piédestal. Sa parole devient de suite le

champ de la vérité et peut occasionner une erreur judiciaire. C’est ainsi que Loïc Sécher fut

incarcéré de nombreuses années pour rien.

Il s’est vu accusé de viol par une jeune fille, qui 8 ans après, avoue avoir menti.63 Les

conséquences peuvent être à plus grande échelle comme ce fut le cas dans l’affaire d’Outreau

où un nombre assez important de personnes ont été accusées de pédophilie par plusieurs

enfants et leurs parents eux-mêmes impliqués. La Cour d’Appel finira par faire éclore la

vérité et acquitter les innocents.64

Toute la difficulté est que l’on ne peut pas faire abstraction totale des dires d’un enfant

qui prétend avoir été victime de sévices. Des déclarations aussi malsaines, horribles peuvent

parfois être faussées et nous aveugler, créant des dégâts dans la vie des personnes faisant

l’objet de l’imagination de l’enfant. La parole de l’enfant doit être recueillie avec précaution

car il arrive toujours à donner du corps à des idées qui proviennent de son imagination. Sa soif

d’apprendre et l’influence qu’exerce sur lui l’entourage le disposent à écouter et répéter ce

qu’on lui dit comme ce fut le cas avec Madame Badaoui dans l’affaire d’Outreau qui a réussi

                                                                                                               62 Convention relative aux droits de l’enfant, New York, 26 janvier 1990, préambule. 63 Annie Ragnaud –Sabourin, Les grandes Erreurs Judiciaire de France, Ed. De Barée, 2014, p 298 64 Alain Marécau, Chronique de mon Erreur Judiciaire, Ed. Flammarion, 28 aout 2011.

Page 52: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  47  

à faire accuser de nombreux innocents alors même qu’elle était la source du problème.

L’adage « La vérité sort toujours de la bouche des enfants » n’est pas toujours celui qu’il faut

écouter et appliquer dans le procès pénal. Dans le procès pénal, afin de parvenir à la vérité, il

convient d’analyser une multiplicité d’éléments tels que l’aveu, qui est lui-même source

d’erreur judiciaire.

B) L’infiabilité des personnes poursuivies.

Si pour certaines raisons les personnes poursuivies peuvent avoir un intérêt à faire des

faux aveux spontanément qui peuvent être susceptibles d’entraîner des erreurs judiciaires (1),

des aveux peuvent être soutirés. (2)

1- Les aveux spontanés.

Dans le procès pénal, de manière étonnante, nous constatons que de nombreux

protagonistes procèdent de leur plein gré, à des aveux très bien accueillis par les intervenants

de la justice qui estiment qu’ils sont sources de vérité puisque l’accusé s’expose à une

sanction qu’il aurait pu éviter en taisant ses actes. L’aveu, qui consiste à reconnaître ou à

déclarer que l’on est l’auteur d’une infraction ou d’une action blâmable, ou simplement

pénible à révéler, semble être l’idéal pour les enquêteurs, les juges d’instruction, les

magistrats. Cependant, ce qui paraît simple de prime abord, peut en réalité cacher des

complications. En effet, l’aveu solutionne de manière rapide les problèmes que peuvent

rencontrer les intervenants judiciaires pour établir la vérité. On a tendance à penser qu’une

personne poursuivie ne va pas s’incriminer –avouer- si ce n’est pas elle, au risque de subir

une grosse sanction. Il faut savoir que ceci arrive régulièrement pour diverses raisons. Les

raisons susceptibles de provoquer de faux aveux, sont la fragilité mentale, l’intérêt à se faire

emprisonner, la protection d’une personne, des facteurs qui la favorisent.

Le faux aveu est parfois déclenché en fonction de la personnalité. Un jeune est

effectivement plus susceptible d’avouer en raison de son immaturité qui peut le conduire à

être influencé. Patrick Dils était âgé de 14 ans quand il a avoué le double homicide

d’enfants.65 Les experts concluent qu’à 14 ans, il avait un âge mental de 8 ans. Le 24 avril

                                                                                                               65 Christophe Hondelatte, Faite entrer l’accusé, « Patrick Dils, marathon pour un acquittement » août 2003 sur France 2.

Page 53: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  48  

2002, il sera acquitté après 15 ans d’accusation à tort. L’affaire Jean-Marie Deveaux est un

autre exemple où l’aveu est obtenu d’un jeune homme immature.

Le jeune âge n’est pas le seul facteur de faux aveux. Il arrive que des personnes

respectueuses avouent quand ils voient que clamer leur innocence ne sert à rien dans la phase

préalable du procès ; il est donc indéniable que l’aveu soit source d’erreur judiciaire. De plus,

une fois qu’il est examiné, il est considéré comme preuve décisive de culpabilité et il est

compliqué de revenir en arrière. Les juges pensent que ce revirement est un mensonge. Ceci

vaut aussi bien pour l’aveu spontané que soutiré.

2- Les aveux soutirés.

Si l’aveu spontané est susceptible de créer l’erreur judiciaire, l’aveu soutiré l’est

également et se trouve même être inadmissible. Le fait de soutirer des aveux revient à obtenir

quelque chose de quelqu’un par une adroite insistance qui n’est guère favorable à la recherche

de la vérité. S’acharner peut provoquer chez l’individu un épuisement conduisant à l’aveu

dans un souci de paix. Dans cette situation, il n’avoue pas par faute mais pour que la pression

qu’il subit cesse.

Cet aveu peut être extirpé de différentes façons. La manipulation psychologique est

l’une d’entre elles. Elle peut se présenter sous différentes formes. A savoir, procéder à des

interrogatoires de plusieurs heures mais aussi jongler avec les sentiments des gens.

Outre la manipulation psychologique, il est possible d’obtenir des confidences en ne

satisfaisant pas les besoins vitaux du suspect ; affaibli, il n’hésitera pas à se désigner comme

coupable pour mettre fin à ce calvaire.

Si ces deux méthodes tendent à aboutir à un aveu, la violence physique est le

stratagème le plus fréquemment utilisé. Il arrive régulièrement que les personnes poursuivies

subissent des violences dans le but d’extorquer une culpabilité. L’affaire Mis et Thiennot en

1946 n’est ni plus ni moins une erreur judiciaire, du fait des faux aveux obtenus par la torture

tout comme l’affaire Jean Deshays en octobre 2012 où l’aveu provient de violences

ordinaires.

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  49  

Les protagonistes à l’origine de ces méthodes engendrant des aveux soutirés, sources

d’erreurs judiciaires, sont les enquêteurs. En conséquence, l’erreur judiciaire n’est pas causée

uniquement par des facteurs humains mais aussi par l’organisation judiciaire.

Page 55: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  50  

SECTION II :

Les erreurs liées à l’organisation judiciaire.

De par son rôle important et difficile, la justice fait intervenir une pluralité de

personnes chacune leur tour lors de différentes périodes. L’organisation est construite de telle

sorte que la première phase est l’enquête, suivie de l’instruction. Durant cette phase, le but

étant de rechercher la culpabilité ou non de quelqu’un, il est fort possible que des erreurs se

glissent (Paragraphe 1) tout comme la 2ème phase qui est celle relative au procès.

(Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La mauvaise conduite des investigations.

Le procès pénal ne peut aboutir que si dans un premier temps des intervenants

judiciaires procèdent à une enquête pour rechercher comment les faits ont pu avoir lieu, qui a

agi et pour quelles raisons. Cette mission revient aux policiers (A) mais leur travail est

complété par celui du juge d’instruction qui a comme son nom l’indique et pour objectif

d’instruire l’affaire (B), tous deux sont susceptibles d’engendrer des erreurs.

A) Les forces de police campées sur leurs positions.

Les forces de police ne sont pas irresponsables dans les affaires judiciaires. Si le code

prévoit la présomption d’innocence, elles s’enferment dans une présomption de culpabilité (1)

et ne manquent pas d’utiliser des pressions afin de parvenir à un résultat dans les affaires qui

leur sont confiées. (2)

1- La présomption de culpabilité.

Les policiers, les gendarmes ayant pour mission d’enquêter quand ils reçoivent une

plainte ou retrouve un corps sans vie, sont les 1ers intervenants de la procédure pénale. Leur

rôle est important puisque les éléments qu’ils vont trouver lors de l’enquête vont avoir un

impact pour la suite de l’affaire. De ce fait, à partir du moment où une enquête est « mal

menée », il peut y avoir des conséquences graves pour l’intéressé.

Page 56: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  51  

Malheureusement, il arrive trop souvent que les policiers bafouent la présomption

d’innocence durant leurs investigations, ce qui est susceptible de provoquer des erreurs

judiciaires. Dès l’instant où une personne est arrêtée, elle est considérée comme coupable.

Cette présomption de culpabilité, exercée régulièrement par les services de police, peut être

considérablement désastreuse pour le procès.

Pour démontrer que cette pratique est courante, il suffit de s’attarder sur l’affaire Loïc

Sécher ou l’affaire d’Outreau. Loïc Sécher n’était arrivé au commissariat que depuis quelques

minutes, ne connaissait guère l’objet de son arrestation qu’il était déjà condamné. Les

policiers essayaient d’obtenir ses aveux en lui promettant qu’il ne serait pas envoyé dans les

quartiers des « pointeurs » « Tu es un violeur, il faut avouer ».66 Tout l’interrogatoire est

tourné sur sa culpabilité.

Cette manière d’agir se trouve être à l’opposé du rôle des agents de police, qui sont

normalement chargés de rechercher des preuves qui accablent le protagoniste ou le dégagent

de tout soupçon. L’enquête, comme la définition l’indique, a pour but de procéder à

l’ensemble de recherches destinées à faire la lumière sur quelque chose. Dans de nombreuses

affaires, les policiers ont déjà fait la lumière sans même avoir recherché. Comme le dit si bien

Maître Dupont Moretti, ils agissent parfois de cette manière parce qu’ils ont des difficultés

avec les affaires de mœurs comme dans l’affaire Loïc Sécher. Il fut un temps où selon certains

procès verbaux la sodomie était un acte d’accusation, on ne s’interrogeait même pas s’il était

consenti. De même dans l’affaire d’Outreau, les innocents de ce procès avaient été présumés

coupables. Le titre du film « Présumé coupable » qui raconte l’histoire d’un des accusés de

l’affaire d’Outreau en est l’illustration parfaite. Cette présomption d’innocence est

certainement bafouée parce que l’on pense aussi que la victime ne peut dire que la vérité.

Si les policiers agissent de cette manière pour des raisons qui ne sont pas forcément

excusables, il faut savoir que cela engendre de nombreux dégâts. L’erreur judiciaire peut voir

le jour. En présumant coupable la personne poursuivie, ils peuvent s’éloigner d’indices

pouvant innocenter l’intéressé mais aussi provoquer de faux aveux par le biais de pressions.

                                                                                                               66 Loïc Sécher et Eric Dupond Moretti, Le calvaire et le pardon, Les ravages d’une Erreur Judiciaire revue et corrigée, Ed. Michel Lafon, 2013.

Page 57: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  52  

2- Les pressions policières.

Les pressions policières sont au cœur même des erreurs judiciaires. Comme nous

avons pu le déclarer à plusieurs reprises, elles peuvent provoquer des aveux qui ne sont que

mensonges sans aucun intérêt et ne servent qu’à nous éloigner de la vérité. L’objectif de ces

agents de police ou de gendarmerie étant à tout prix de résoudre l’enquête rapidement, même

au mépris d’innocents, tous les moyens sont bons pour y parvenir. C’est ainsi que dans les

erreurs judiciaires françaises, nous avons découvert que des policiers utilisaient la torture et la

violence dans l’affaire Mis et Thiennot et Deshays comme nous l’avons évoqué dans les

aveux soutirés et la manipulation psychologique dans l’affaire Loïc Sécher, Outreau, Marc

Machin. Pour les affaires de viols, leur stratagème est toujours le même et consiste à dire que

s’ils parlent, ils ne seront pas incarcérés avec les « pointeurs ». Tel est le cas de Loïc Sécher,

« Si tu refuses de signer les procès verbaux, tu iras en prison dans le quartier des pointeurs et

tu seras violé de la même façon que ce que tu as infligé à la victime. Autant de stratégies

utilisées pour boucler l’enquête et obtenir les remerciements. « Si tu avoues, tu pourras aller

dans un centre de désintoxication où tu seras pris en charge ». Ces pressions peuvent être

faites à l’abri de tout soupçon comme ce fut le cas pour Marc Machin qui s’est entretenu avec

le commissaire Jean Paul Mules sans que soit établi un procès verbal.67 La discussion

informelle avait pour objectif de le faire avouer en essayant de le réconforter.

La régularité et dangerosité des pressions étaient d’une telle importance que le

législateur a dû réagir. Trois lois ont été légiférées afin de diminuer les catastrophes liées à

ces comportements. Malgré la loi de juin 2000 qui impose que les questions des officiers de

police figurent sur le procès pénal, des injures, des pressions, stratégies ont tout de même

étaient mises en œuvre dans l’affaire d’Outreau. Aujourd’hui, avec la loi du 5 mars 2007

imposant l’enregistrement des interrogatoires et la présence de l’avocat, l’espoir est grand de

diminuer ces pressions même si l’erreur judiciaire ne sera pas forcément évitée puisqu’elle

peut provenir également du juge d’instruction.

B) La désorganisation de l’instruction.

Les défauts des policiers ont tendance à être également repérés chez le juge

d’instruction qui a bien trop souvent appétence pour l’instruction à charge favorisant une fois                                                                                                                67 Frédérique Lantieri,Marc Machin, les meurtres du Pont de Neuilly,faite entrer l’accusé, 22 sept 2013,France 2.

Page 58: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  53  

de plus l’erreur judiciaire. (1) Cette instruction est régulièrement de durée excessive

entraînant des difficultés à la réalisation d’un procès proche de la vérité. (2)

1- L’instruction à charge.

Comme les agents de police et de gendarmerie, le juge d’instruction doit respecter le

principe de présomption d’innocence. L’individu même suspecté d’avoir commis une

infraction ne peut être considéré coupable par le juge d’instruction qui doit instruire à charge

et à décharge.

Cependant les éléments à décharge suscitent rarement d’intérêt chez le magistrat qui se

consacre uniquement à la recherche de la culpabilité. Cette obstination pour l’instruction à

charge se révèle dangereuse pour le bon fonctionnement de la justice et favorise les erreurs

judiciaires. De manière récurrente, le juge considère l’accusation, non pas comme une

hypothèse qu’il faut vérifier, mais plutôt comme un théorème à démontrer. Il construit le

procès envers le prévenu mais jamais envers le ministère public. Cette pratique n’est pas

neutre et peut faire intervenir dans le système judiciaire des erreurs. En effet, une fois que le

juge d’instruction a trouvé suffisamment d’éléments défavorables envers la personne

poursuivie, il peut être persuadé d’avoir en face de lui le coupable. N’ayant pas cherché des

preuves en faveur du suspect, il ne peut pas déceler une ombre d’innocence. La personne se

trouve dès lors condamnée.

Dans l’affaire de Loïc Sécher qui clamait son innocence, si le juge avait accepté la

demande de confrontation, la petite fille aurait peut-être avoué avoir menti. Cette initiative

aurait évité les sept années passées derrière les barreaux pour un viol qu’il n’avait pas

commis. Cette absence de recherche de preuves par le juge d’instruction disculpant le suspect

se retrouve dans l’affaire Marc Machin où le juge d’instruction n’a jamais prétendu revenir et

s’attarder sur la rétractation de celui qui avait quelque temps auparavant avoué. Marc Machin,

volontaire à l’élaboration de la vérité avait expliqué qu’il était en mesure de décrire les

vêtements de la victime alors qu’il ne l’avait pas tuée, car les policiers lui avaient, durant

l’enquête, montré les photos afin de lui rafraîchir la mémoire. Ces faits ne seront pas étudiés

par le juge d’instruction qui n’établira pas également le lien avec le deuxième meurtre sous le

pont de Neuilly lors de la détention provisoire de Marc Machin et malgré la demande de

l’avocat.

Page 59: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  54  

Lors de l’instruction, tout se déroule comme si la personne était déjà condamnée alors

que le but de cette instruction est de rassembler les preuves. Ce fonctionnement ne peut

provoquer que des erreurs judiciaires tout comme la durée de l’instruction.

2- La durée excessive de l’instruction.

Si le stage auprès d’avocats nous fait comprendre que rendre la justice est une tâche

difficile, il permet de constater que le manque de moyens et de personnels ne facilite pas les

choses.

La durée relativement longue des instructions peut être une cause d’erreurs judiciaires

mais se trouve tout simplement être le fruit de l’absence de moyens. Il est vrai que la durée

excessive des instructions peut avoir un impact sur le procès.

Durant les temps où l’instruction est mise en pause, les différents protagonistes de

l’affaire continuent à vivre et peuvent venir bousculer, transformer les informations. En effet,

il arrive que les interrogatoires chez le juge d’instruction des suspects, des témoins, ou même

les confrontations aient lieu très longtemps après les faits, ce qui permet parfois aux auteurs

de faire des pressions à leurs coauteurs ou témoins. C’est ainsi qu’il arrive que des versions

différentes de celles de la garde à vue soient données. Ces points qui divergent, viennent

perturber la suite de l’affaire. La détention provisoire est un moyen d’éviter ces pressions

mais pour être honnête est-elle le meilleur moyen quand on sait que les prisonniers arrivent à

obtenir des téléphones ?

Si la durée de l’instruction peut déclencher des changements de versions, la mémoire

des témoins peut être défaillante. Chaque humain possède une capacité de mémoire différente.

Il se peut que des personnes à long terme n’aient plus de souvenirs précis des faits. Cette perte

de mémoire peut entraîner des faux témoignages involontaires pouvant fausser l’enquête.

La durée abusive des instructions peut entraîner des erreurs judiciaires mais la rapidité

ne serait pas la meilleure des solutions. L’instruction serait bâclée et cela provoquerait à son

tour des erreurs judiciaires. Un juste milieu doit alors être trouvé. Si les causes des erreurs

judiciaires peuvent se déceler dans la phase d’investigation et d’instruction, il est possible

dans relever lors de l’audience.

Page 60: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  55  

Paragraphe 2 : Les inconvénients de l’audience interférent dans la vérité

judiciaire.

Si l’instruction peut être source d’erreurs judiciaires, l’audience au procès est

susceptible d’exercer les mêmes conséquences ; elle est d’autant plus impliquée dans les

erreurs judiciaires puisqu’elle condamne parfois en cas de doute où l’absence de preuves est

constatée. (B) La création du statue d’experts lors de ces audiences ne dégage pas que des

avantages (A).

A) Les experts.

La confiance qui est accordée aux experts peut s’affirmer être très dangereuse pour la

décision (1) tout comme l’expert lui même qui néglige parfois sa mission. (2)

1- Une confiance aveugle envers les experts.

L’expert, bien qu’il ait subit des débuts critiques et des difficultés pour se créer une

place au sein de la justice, a connu au fil de temps une évolution. A leur apparition, étant

obligés d’expertiser à charge sous peine de ne plus expertiser du tout, les experts n’avaient

pas une grande reconnaissance. D’ailleurs, pendant un temps, leurs rapports n’étaient guère

pris au sérieux entraînant des erreurs judiciaires comme celle de la Roncière en 1985. Le

rapport d’expertise contredisait cette accusation, les juges l’ont ignorée.

Cependant la situation des experts a très rapidement changé quelques années plus tard

mais ils sont toujours causes d’erreurs judiciaires parce qu’à l’inverse, une trop grande

importance leur est consacrée, ce fut le cas pour Marie Besnard. Poursuivie pour

empoisonnement sur le fondement de rumeur, suite à la mort de son mari, Marie Besnard s’est

vu accuser par ses proches d’avoir empoisonné ce dernier. Après plusieurs incidents, une

instruction est ouverte. Un premier expert est nommé et conclut que Léon Besnard a été

empoisonné à l’arsenic, Madame Besnard demandant une contre expertise se voit répondre

par le jeune juge « étant savant le docteur Beroud ne peut se tromper ». Lors du procès, une

vingtaine d’experts continuent d’incriminer Marie Besnard. Cependant lors des débats, la

défense met en exergue les différences entre les résultats des prélèvements effectués par les

experts et les rapports rendus par ces derniers à la Cour. Les taux d’arsenic étaient ainsi

Page 61: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  56  

gonflés. Ces incohérences auraient du interpeller les magistrats mais accordant trop de crédit à

leurs experts, Marie Besnard resta incarcérée durant cinq ans.

Cette croyance des juges en leurs experts se retrouve dans de nombreuses erreurs

judiciaires : affaire Dreyfus, Loïc Sécher, Omar Raddad. Pourtant le principe mis en œuvre

est que le juge n’est pas lié aux expertises. La pratique révèle que les experts entérinent les

conclusions d’expertises comme ils boivent les témoignages, aveux et autres preuves qui leurs

sont apportés.68

2- La négligence des experts dans leurs missions.

Bien que l’évolution scientifique permette de comprendre la raison pour laquelle les

juges offrent autant de confiance aux experts, l’analyse de certaines affaires met en exergue

qu’ils n’exercent pas toujours leurs missions avec sérieux engendrant des erreurs judiciaires.

Omar Raddad en subit les conséquences. Les experts graphologues n’ont pas examiné les

pièces objectivement, ils les ont fait plutôt parler. En effet, ils ont prétendu que l’écriture

accusant Omar ressemblait à 2/3 à celle de la victime mais ne peuvent certifier qu’elle

correspondait bien à la sienne. Leurs explications se trouvent être, que si l’écriture ne

ressemblait pas totalement à celle de la victime c’est uniquement parce qu’elle écrivait sous

agonie. Cette analyse interprétative engendre encore des dégâts pour Omar Raddad qui

continue à se battre pour être blanchi.

Si les experts peuvent fausser les rapports par le biais d’interprétations, ils peuvent

également entraîner des erreurs en bâclant leurs missions. La Commission Parlementaire mise

en place à la suite du fiasco d’Outreau nous a permis de mettre en exergue la négligence des

experts. Elle met en avant leurs désintéressements à l’exercice de leurs missions. L’expert est

allé en maison d’arrêt très tardivement et a rendu un rapport dans la foulée très succinct. Il est

également relevé qu’il est resté seulement 1 heure avec Mme Badaoui, ce qui paraît léger pour

établir la situation de quelqu’un et que les conclusions ont été rédigées en 1 H 30. L’expert

n’avait également pas consulté le dossier avant l’entretien comme demandé dans sa mission.

Il ne peut être difficilement contesté dans le cadre de cette affaire que la mission exercée par

les experts a été sabrée, expédiée lorsqu’on voit cette liste d’erreurs. De surcroît, les quatre

                                                                                                               68 Roger Merles et André Vittu, traité de droit criminel, procédure pénale, 01/2000 Ed Cujas.

Page 62: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  57  

expertises et trois rapports ont été remplis le même jour alors même que les accusés étaient en

détention provisoire dans des centres différents et éloignés.

Quand un doute subsiste à la véracité du rapport, il doit profiter à l’accusé.

B) La négligence de la présomption d’innocence lors de l’audience.

La présomption d’innocence impose au juge lors de l’audience que le doute profite à

l’accusé. Cette inapplication est source d’erreurs judiciaires.

1- L’absence de considération du « doute profite à l’accusé »

La sanction susceptible d’être prise lors de l’audience, pouvant être des peines

privatives de liberté, il convient d’être sûr de la culpabilité avant même de condamner.

Ces peines privatives de liberté peuvent tellement être conséquentes sur la vie d’une

personne que la justice considère que le doute doit profiter à l’accusé. Ce principe fait partie

de ceux qui ne sont pas toujours respectés, un de plus. Ce principe très ancien découlant de la

présomption d’innocence -loi dominante de l’instruction criminelle- était en ce temps déjà

oublié.

En délaissant ce principe, les erreurs judiciaires sont ainsi favorisées. Évidemment, le

doute ayant pour définition (ce qui est contraire à la certitude), est indéniable si l’on

condamne sans avoir la certitude de la culpabilité, on peut risquer de mettre un innocent en

prison. Le juge ne devrait condamner que dans l’hypothèse où il bénéficie d’une certitude

absolue. Si tel n’est pas le cas, il devrait se réfugier dans le doute et clore le procès par un

acquittement. Cependant cette solution ne serait pas acceptée par une société apeurée qui

clamerait honte à la justice. C’est ainsi que les juges ont condamné un innocent. La

condamnation de Loïc Sécher aurait pu être évitée si le principe du doute « profite à

l’accusé » avait été appliqué car en l’espèce la jeune fille a changé de version et l’a amplifiée

au fur et à mesure des auditions, il n’y avait aucune constatation médico-légale ni d’ADN et

l’accusé manifestait son innocence. Maître Dupond Moretti a confié que cette affaire « ne

reposait pas sur des preuves mais sur un dossier d’impressions ». Les erreurs judiciaires étant

nombreuses et régulières, des solutions ont été trouvées pour pouvoir y répondre.

Page 63: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  58  

PARTIE 2 :

Les ripostes mises en place

contre l’erreur judiciaire

sont-elles suffisantes ?

Page 64: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  59  

En 1851, la Gazette des Tribunaux affirmait que « grâce aux garanties que les lois

pénales Françaises ont créées au profit des accusés, la condamnation d’un innocent est

devenue aujourd’hui cas impossible ». Ayant relevé des erreurs judiciaires précédemment de

1810 à nos jours, il est indéniable que cet article est loin de la vérité.

Force est de constater que l’erreur judiciaire est vouée à ne jamais s’effacer totalement

du système judiciaire. Si le manque de règles ou le non respect à la lettre de celles-ci peuvent

faire l’objet d’amélioration, les facteurs humains entraînant les erreurs judicaires ne

disparaîtront jamais. L’homme étant faillible et non doté que de qualités, il fera toujours des

erreurs. Il convient donc de prévoir des solutions à ces erreurs judiciaires non évitées,

créatrices de dégâts multiples pour les victimes.

En effet, certains ont passé une partie de leur vie en prison, ont perdu tout ce qu’ils

possédaient : clamer au quotidien leur innocence nécessitait de vendre leurs biens pour

s’offrir un avocat. Ce fut le cas de Loïc Sécher. D’autres ont pu voir leurs familles se

dissoudre. Alain Marécaux accusé à tort dans l’affaire d’Outreau a effectivement subi un

divorce et le placement de ses enfants perturbés en raison de leur mal être. Tant de

conséquences engendrées par la justice qui se doit de les réparer. (CHAPITRE I).

La mise en place de solutions tendant à réparer le mal causé ne permet guère de faire

machine arrière. Elles permettent juste la possibilité de se reconstruire une nouvelle vie. Cette

reconstruction est loin d’être facile. Il en résulte qu’il est plus judicieux de ne jamais avoir

affaire à cette réparation et donc exclure l’erreur judiciaire. La prévention est nécessaire.

Ainsi, même si ces erreurs judiciaires ne disparaîtront jamais totalement du système, il est

cependant possible à l’aide de réformes d’en réduire les nombres. (CHAPITRE II). L’erreur

judiciaire ne deviendrait qu’une exception.

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  60  

CHAPITRE I :

La réparation de l’erreur judiciaire.

Dans l’intention de résoudre les erreurs judiciaires causant des conséquences

déplorables pour l’individu qui les subit, le système judiciaire a développé un droit à

réparation. Si l’obtention d’indemnisation est nécessaire à la victime, il est indispensable

qu’elle soit accompagnée d’une répression. En effet la répression peut avoir pour objectif

d’éviter que de nouvelles erreurs judiciaires aient lieu.

Cependant, avant même d’accorder une réparation et d’envisager une éventuelle

répression, (SECTION II) faut-il encore que ces victimes d’erreurs judiciaires aient une

occasion de clamer leur innocence. C’est la raison pour laquelle des recours supplémentaires

ont été mis en œuvre. (SECTION I).

Page 66: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  61  

SECTION I :

L’émergence de l’erreur judiciaire au travers des différents recours.

Régulièrement l’erreur judiciaire n’est pas découverte durant les recours tels que

l’Appel et la Cour de Cassation. La décision passée en force de choses jugées a pour

conséquence de laisser des innocents croupir en prison. Cette situation justifie l’intervention

d’un dernier recours « le pourvoi en révision ». Selon la jurisprudence, ce recours est « par

elle même une voie de recours absolument exceptionnelle, admise dans un intérêt supérieur

d’équité et d’humanité et permettant d’accorder d’une part à celui qui a été la victime

innocente d’une erreur judicaire une réparation morale et matérielle, et d’autre part d’assurer

la bonne administration de la justice en rendant libre l’exercice régulier de la répression

envers le véritable coupable.69 Bien que cette révision se dissocie difficilement de l’appel

jusqu’en 1670, ce recours existe depuis l’ancien droit, s’il est susceptible de constater des

erreurs judiciaires il peut corriger des erreurs de fait. Un autre recours voit le jour le 15 juin

2000 pour corriger les erreurs de droit, c’est le réexamen d’une condamnation suite à une

décision de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

Paragraphe 1 : Le recours en révision.

La révision étant une exception à l’ordre public et à l’autorité de chose jugée, le

recours en révision n’est pas susceptible d’être mis en œuvre dans toutes situations, il faut que

des conditions soient remplies. (A) La procédure menée, conduisant à une décision favorable,

a des effets remarquables pour la victime d’erreur judiciaire. (B)

A) Les conditions pour accéder à la révision du procès.

Le recours en révision n’est ouvert que dans certains cas (2) et n’est possible que si la

décision contestée est susceptible de révision (1).

1- La nécessité d’une décision susceptible de révision.

Le recours en révision intervenant après qu’une décision soit passée en force de choses

jugées permet déjà d’en déduire que les décisions susceptibles de cette révision doivent être                                                                                                                69 Crim. 22 janv 1898, DP 1900, I, 142, 2ième espèce.

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  62  

définitives et donc ne plus pouvoir faire l’objet d’une voie de recours. Dans l’hypothèse où

l’appel est encore possible, la révision ne sera guère recevable. Si le caractère définitif d’une

décision est un obstacle à la révision, il n’est pas l’unique, trois critères sont encore à remplir

dont celui de la nature de la décision.

Il est établi par la Jurisprudence que la demande de révision d’une contravention est

exclue.70 Cependant, si cette contravention est indivisible de crime ou de délit qui font eux-

mêmes l’objet d’une révision, la demande est recevable. 71 Le critère alors énoncé dans le

code de procédure pénale est la nécessité d’une décision pénale en matière correctionnelle et

criminelle.

Afin d’obtenir cette révision, faut-il encore que la décision porte une reconnaissance

de culpabilité.72 Aucune décision ne pourrait tendre vers la révision si elle délibère un

acquittement ou une relaxe. La révision en défaveur du prévenu est impossible et engendrerait

bien trop de demandes de victimes mécontentes de la décision étant donné la sévérité

déclenchée par l’infraction. Cependant une personne reconnue auteur d’un délit par une

juridiction statuant sans l’intérêt civil, bien qu’elle ne soit pas condamnée, peut faire une

demande de révision.73 Cette révision n’est possible que dans les situations où aucun autre

moyen, procédure ne soient envisageables pour réparer l’erreur. C’est la raison pour laquelle

le recours en révision est une voie extraordinaire.

Les critères ci-dessus relatés sont résumés de la sorte : « La révision d’une décision

pénale définitive peut être demandée au bénéfice de toutes personnes coupables d’un crime ou

délit » à l’article 622 alinéa 1 du Code de Procédure Pénale. Ce même article dénonce

également les 4 cas permettant l’ouverture de la révision.

2- La restriction des cas de révision.

Parmi les quatre cas d’ouverture énoncés dans l’article 622 du Code de Procédure

Pénale, trois d’entre eux proviennent du code de l’Instruction Criminelle. Le dernier est le

                                                                                                               70 Crim. 5 mai 1994, B. N° 172. 71 Crim. 5 nov 1987, B. N° 392. 72 Frédéric Desportes et Laurence Lazerges- Cousquer, Traité de Procédure Pénale, 4ème Ed, 2015, Editeur Economica 73 Crim. 27 avril 1989, B. N° 179.

Page 68: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  63  

résultat d’une loi plus récente de 1895 qui se verra progresser par une loi du 23 juin 1989. Ces

deux lois permettent d’aboutir à une augmentation des cas de révision.

Les trois premiers cas d’ouverture sont bien trop précis pour ouvrir régulièrement la

révision. Le premier précise que l’ouverture est possible lors de « condamnation pour

homicide alors que sont produites des pièces faisant naître des indices suffisants sans

l’existence de la prétendue victime ». Le second présente la situation d’une contrariété de

jugement, c’est à dire que deux personnes ont été condamnées pour une infraction similaire

alors qu’une seule personne est l’auteur de cette infraction. Le troisième permet l’ouverture de

la révision si les témoins qui étaient intervenus dans l’affaire et avaient permis d’aboutir à une

condamnation, ont fait de faux témoignages. Ces trois situations rarissimes ne permettant

guère la révision qui n’était donc pas une solution parfaite à la réparation de l’erreur judicaire.

Le nouveau cas d’ouverture mis en œuvre en 1895 est générateur d’évolution. Si cette

loi envisageait d’ouvrir la révision à chaque fois qu’un fait nouveau était de nature à établir

l’innocence du condamné, elle limite encore l’accès à la révision, qui, avec la loi de 1989 est

autorisé dans l’hypothèse où le fait nouveau permettrait de faire naître un doute sur la

culpabilité du condamné.

La condition de faits nouveaux combinée à celle de nature à faire naître un doute sur la

culpabilité du condamné est appréciée au cas par cas par la Commission de Révision et la

Cour. Mais il arrive que la Commission et la Cour ne voient pas d’un même œil ce fait

nouveau. Est considéré comme un fait nouveau de nature à faire naître un doute sous la

culpabilité : la révélation qu’à la date des faits, l’intéressé était hospitalisé en un lieu très

éloigné du lieu de l’infraction et que son état civil avait été usurpé par un tiers non identifié.74

Il en est de même s’agissant de condamnation pour agressions sexuelles sur mineur de moins

de 15 ans, dans le cas où la victime se rétracte parce qu’elle avait accusé son père lors d’un

divorce conflictuel à l’âge de 9 ans.75 A l’inverse ne seraient acceptés comme faits nouveaux

« des rétractions tardives et ambiguës de la victime de viols aggravés dès lors qu’elles ne sont

pas corroborées par des éléments objectifs ». La révision ne peut donc être acceptée qu’après

étude poussée de la Cour et Commission qui étudieront si la décision est susceptible de faire

l’objet de révision et si la situation entre dans un des cas d’ouverture.

                                                                                                               74 Crim. 28 Juin 1994, B. N° 258. 75 Cour rév. 16 mai 2007, pourv. n° 06-85053.

Page 69: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  64  

B) L’acheminement de la révision aux multiples retentissements.

Le recours en révision n’est accordé qu’à l’issue d’une procédure comprenant

plusieurs étapes (1) conduisant à une décision, qui, favorable peut entraîner de nombreux

effets (2).

1- Une procédure stricte.

Bien que les conditions semblent être remplies dans l’esprit des protagonistes qui

souhaitent bénéficier de la révision, le chemin vers celle-ci est un travail de longue haleine.

Les demandes de révision pouvant provenir en vertu de l’article 623 du Code de

Procédure Pénale, du ministre de la justice, du condamné, du conjoint, des enfants, parents

légataires universels….. sont filtrées dans un premier temps par une Commission de Révision.

C’est la raison pour laquelle la demande de révision doit être établie auprès de la Commission

chargée d’étudier la requête, passage incontournable pour obtenir la révision du procès. Cet

organe de filtrage, doté d’un pouvoir d’instruction, peut procéder directement à des

confrontations, expertises, vérifications et auditions ou par le biais de commissions rogatoires

afin de saisir la Chambre Criminelle quand il estime que la révision pourrait être admise. A la

suite de débats judiciaires contradictoires, donnant la parole à l’avocat général et le requérant

ou son représentant, la commission délibère une décision motivée insusceptible de recours.

C’est uniquement une fois que l’étude des conditions par la commission prend fin et dégage

une réponse favorable que l’on accède à la Cour de Révision. Par conséquent, la révision

n’est pas facilement accessible. De surcroît, si le dossier n’est pas en l’état, la Chambre

Criminelle, Cour de Révision, bénéficie du même pouvoir d’instruction que la commission.

L’article 624 du Code de Procédure Pénale permet à la Cour de Révision de suspendre

l’exécution de la condamnation. Cet Article fera l’objet de précisions de la part de la

Jurisprudence qui déclare que la demande de suppléments d’infos sur la réalité du fait

nouveau n’exclut pas l’éventuelle suspension de l’exécution76. Cette demande de révision

obligeant à tant de sacrifices peut, suivant la décision de la Cour de Révision, aboutir à un

arrêt de rejet motivé et insusceptible de recours si la requête jugée est mal fondée. Une

annulation avec renvoi est envisageable quand de nouveaux débats contradictoires sont

                                                                                                               76 Crim. 26 Février. 1997, B. n° 80.

Page 70: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  65  

exécutables. A l’inverse, dans les situations d’amnistie et de décès77, ou de prescriptions de

l’action publique78, l’annulation de la condamnation peut être exemptée de renvoi. De

nouveaux débats ne pouvant avoir lieu, le renvoi est inutile. Cependant, il est important de

signaler que la Cour se doit de statuer elle-même sur le fond s’il s’avérait qu’une fois son

arrêt rendu par celle-ci, il soit impossible de faire de nouveaux débats.

L’annulation de la condamnation peut également être décrétée sans renvoi en raison de

l’absence de l’infraction. Il est indéniable qu’aucun renvoi ne peut être prononcé s’il ne

subsiste aucune charge à l’égard d’un condamné suite à l’annulation du jugement ou de

l’arrêt. Ce fut le cas d’une personne complice d’un auteur principal relaxé par la Cour

d’Appel de renvoi après cassation.79 La procédure de révision étant indéniablement source

d’investissement, il est nécessaire pour les protagonistes de ne pas perdre de vue les effets

positifs qu’elle pourrait engendrer.

2- La réhabilitation des victimes d’erreur judiciaire.

Les victimes d’erreurs judicaires sont de toute évidence enchantées des effets de la

révision quand celle-ci leur a été accordée, bien qu’elle ne leur permette pas de faire machine

arrière, retourner dans le passé et éviter les années de prison subies sans raison, cette révision

annule leurs condamnations, entraînant la suppression sur le fichier du casier judiciaire.

Quoi que l’on puisse penser de ces deux effets apparaissant dérisoires vis à vis de la

gravité, ils rétablissent la vérité et entraînent une possible réinsertion du protagoniste qui ne se

sent plus considéré comme coupable mais reconnu comme véritable victime d’erreur

judiciaire. Même si ce n’est pas toujours le cas dans la pratique, l’article 626 alinéa 6 du Code

de Procédure Pénale tente de parvenir à cet objectif. En effet, l’arrêt ou le jugement de

révision décidant l’innocence du condamné, peut si celui-ci le demande être affiché à divers

endroits : la ville où a été prononcée la condamnation, la commune du lieu où le crime ou

délit a été commis, dans celle du domicile des demandeurs en révision, dans celle du lieu de

naissance du requérant et enfin du dernier domicile de la victime de l’erreur judiciaire si elle

est décédée. Nul doute que la victime d’erreur judiciaire est autorisée à se dédouaner auprès

de la population, c’est la raison pour laquelle, suite à cette révision, il est obligatoire d’insérer                                                                                                                77 Crim. 25 Nov. 1991, B. n° 434. 78 Crim. 8 Février. 1989, B. n° 62. 79 Crim. 17 Janv. 2007. B. n°11.

Page 71: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  66  

dans le Journal Officiel la décision ainsi que les extraits dans cinq journaux choisis par la

juridiction. Les victimes d’erreurs judiciaires ayant subi de graves désagréments dus à cette

condamnation à tort font l’objet d’une réparation intégrale du préjudice matériel et moral.

Cependant il se peut que cette réparation ne soit accordée si le protagoniste a été condamné

pour s’être volontairement accusé ou fait accuser, pour protéger l’auteur des faits. Cette

révision permettant de réparer l’erreur n’est pas l’unique moyen d’y parvenir.

Paragraphe 2 : Le réexamen d’une décision pénale consécutive au prononcé d’un

arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

La Convention Européenne des Droits de l’Homme signée le 4 novembre 1940 à

Rome, mise en vigueur le 3 septembre 1953 et ratifiée en France le 31 décembre 1973 a

permis au justiciable de disposer du droit de saisir la Cour Européenne des Droits de

l’Homme pour faire valoir une violation des dispositions de la Convention. Depuis la loi du

15 juin 2000, le droit français n’avait aucune procédure permettant de corriger les effets de la

violation, en a maintenant la possibilité grâce aux réexamens mais les nombreuses conditions

requises n’en facilitent pas l’accès aux victimes d’erreurs judiciaires. (A) La procédure quant

à elle n’est pas non plus exemptée de difficultés. (B)

A) La soumission du réexamen à de nombreuses exigences.

Pour bénéficier du réexamen d’une décision pénale consécutive au prononcé d’un arrêt

de Cour Européenne des Droits de l’Homme, il faut dans un premier temps que la demande

soit recevable.(1) Une fois que le requérant a rempli les conditions de recevabilité de la

demande, faut-il encore que les conditions de fond soient comblées (2) pour qu’il puisse

prétendre à ce réexamen.

1- Les conditions de recevabilité des demandes de réexamen.

Une fois de plus le chemin pour parvenir aux réexamens d’une décision pénale

consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour Européenne des Droits de l’Homme est parsemé

d’embûches. Une multiplicité de conditions sont requises, à commencer par un délai d’un an à

compter de la décision de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

Page 72: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  67  

Le réexamen peut être demandé par le Ministre de la Justice, le Procureur Général près

la Cour de Cassation, le condamné ou, en cas d’incapacité, son représentant et en cas de décès

de ce dernier ces ayants droits. Il n’est possible que dans des cas très limités.

Si la décision doit être définitive, pénale et porter déclaration de culpabilité comme

dans le cas de la demande de révision, la condition qui les différencie est ni plus ni moins

l’obligation de constater une violation de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.

Seule une décision pénale qui a épuisé la voie de recours et comprend une condamnation

prononcée en violation de la Convention Européenne des Droits de l’Homme constatée par la

Cour, peut faire l’objet d’un réexamen selon plusieurs conditions. Concernant l’obligation de

former la demande dans un délai d’un an à compter de la décision rendue par la Cour

Européenne des Droits de l’Homme, la loi a prévu une situation différente pour les cas où la

violation a eu lieu avant la publication de la loi du 15 juin 2000 : dans ce cas selon l’article

89II de cette loi , une requête peut être présentée dans un délai d’un an à compter de la

publication. Cette loi permet d’étendre le réexamen à un plus grand nombre de personnes.

Bien que les demandes de révision et de réexamens ne réclament pas tout à fait les mêmes

conditions, toutes les deux sont aussi difficiles à mettre en œuvre pour les victimes d’une

erreur judiciaire. Le réexamen impose de surcroît des conditions de fond.

2- Les conditions de fond.

Le constat d’une violation, requis pour effectuer une demande de réexamen quand on

s’estime victime d’une erreur, ne permet pas pour autant le réexamen de l’affaire. Selon

l’article 626-1 du Code de Procédure Pénale, il est avéré que le réexamen est ordonné « des

lors que, par sa nature et sa gravité, la violation constatée entraîne pour le condamné des

conséquences dommageables auxquelles la satisfaction équitable allouée sur le fondement de

l’article 41 de la Convention ne pourrait mettre un terme ». Il doit alors être vérifié que la

violation démontrée par la Cour Européenne est d’une particulière gravité mais également

rechercher si le réexamen est l’unique solution pour faire cesser cette violation. Tout sera

apprécié in concreto par la Commission.

Si en théorie la Commission peut accepter le réexamen quand la violation dotée d’une

certaine gravité a entraîné pour le condamné des conséquences dommageables auxquelles seul

le réexamen de l’affaire peut mettre un terme, la pratique révèle une légère différence. Dans la

Page 73: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  68  

pratique, le réexamen est alors imposé si la violation constatée a inspiré le sens de la décision

pénale. S’agissant de la procédure suivie devant la Cour d’Assises, a été considérée comme

violation de nature à justifier un réexamen de l’affaire, celle de l’article 6-1 et 6-3 de la

Convention, c’est à dire la violation du principe permettant le choix de l’avocat.80 C’est

également le cas de la violation de l’article 6-1 et 3 de la Convention « qui résultait de la

durée excessive des débats devant la Cour d’Assises et de l’état de fatigue susceptible d’en

résulter tant pour l’accusé ou son conseil que pour les juges et les jurés et des conditions dans

lesquelles s’étaient déroulés les débats qui ne pouvaient répondre aux exigences d’un procès

équitable et notamment au respect des Droits de la Défense et d’Egalité des Armes »81. Quant

aux procédures suivies devant la Cour d’Appel, la violation consistant à priver le prévenu du

droit à l’assistance d’un avocat car il était non comparant et non excusé, a permis de justifier

le réexamen82. Il arrive que la commission de réexamen rende une décision négative. Ce fut le

cas de l’affaire Hakkar le 30 Novembre 2000 où elle a estimé que la violation du droit à être

jugé dans un délai raisonnable ne justifiait pas un réexamen de l’affaire.

Malgré que les conditions pour obtenir un réexamen soient strictes pour éviter des

demandes inconsidérables injustifiées, le simple fait que le requérant n’ait pas demandé à la

Cour de lui accorder une satisfaction équitable n’interdit pas de constater une violation

particulièrement grave pour prendre uniquement fin par réexamen de l’affaire. Si la victime

de l’erreur judicaire pense que les conditions requises pour se voir bénéficier du réexamen

sont remplies, elle pourra faire étudier l’affaire par la Commission de Réexamen.

B) La bilatéralisation du processus de réexamen.

La procédure de réexamen a lieu en deux temps : une commission se doit d’abord

d’étudier la recevabilité de la demande (1) avant de renvoyer l’affaire devant une autre

juridiction pour qu’elle procède aux réexamens. (2).

1- La procédure suivie devant la commission.

Tout comme la révision, un organe de filtrage est mis en place avant d’accéder au

réexamen de l’affaire, il s’agit de la Commission de Réexamen composée de sept magistrats                                                                                                                80 Comm. Réex. 30 nov. 2000, n° 00 RDH003, Hakkar, 81 Comm. Réex. 24 nov. 2005, B. n°1, Makhfi. 82 Comm. Réex 24 janv. 2002, n° 01 RDH 006, Van Pelt.

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  69  

de la Cour de Cassation, qui a pour finalité de statuer sur la recevabilité, le bien fondé des

demandes, de vérifier que les conditions précitées ci-dessus soient remplies. Est mis en

exergue une fois de plus la difficulté que rencontrent les victimes d’erreurs judiciaires pour

atteindre le réexamen de leur affaire.

Après les débats contradictoires, les observations orales des victimes parties civiles,83

la Commission peut rendre une décision, d’irrecevabilité ou de rejet mais aussi rendre au

grand bonheur des requérants une décision déclarant la demande justifiée. La Commission de

Réexamen pourra tout comme la Commission de Révision suspendre l’exécution de la

condamnation.

L’affaire considérée recevable par la Commission ne peut guère être réexaminée par

celle-ci, et se voit renvoyée devant une juridiction différente selon les cas de figure. Lorsque

la violation concerne une procédure suivie devant une juridiction de fond, c’est alors une

juridiction de même ordre et de même degré qui sera chargée de réexaminer l’affaire. A

l’inverse, si cela concerne une procédure devant la Cour de Cassation, l’affaire sera renvoyée

devant celle-ci statuant en assemblée plénière. Si les violations venaient d’être constatées par

les deux juridictions développées ci-dessus, la Commission demande à une juridiction de fond

de réexaminer l’affaire. Bien que la Commission ne peut réexaminer l’affaire dont elle vient

de déclarer la demande recevable, elle peut exceptionnellement sous application de l’article

626-4 du Code de Procédure Pénale renvoyant aux alinéas 3 et 4 de l’article 625 du Code de

Procédure Pénale, statuer au fond et annuler les condamnations lui paraissant non justifiées

dans l’hypothèse où il est impossible de procéder à de nouveaux débats. Il s’agit par exemple

des cas d’amnistie, de décès, de démence, de coutumace ou de défaut d’un ou plusieurs

condamnés d’irresponsabilité pénale et des cas de prescription de l’action ou de la peine.

Cependant les cas tendant au renvoi devant une juridiction étant plus fréquents, il convient

d’étudier comment cette juridiction procède pour réexaminer l’affaire.

2- La procédure suivie devant la juridiction de renvoi.

La victime d’une erreur judiciaire réussissant à parvenir à cette étape peut se sentir

proche de la victoire. Pour autant, elle n’est pas encore sortie d’affaire quand on s’aperçoit

que les juridictions saisies au fin de réexamen statuent selon les règles applicables devant                                                                                                                83 Comm. Réex. 16 oct. 2003, B. n°1.

Page 75: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  70  

elles.84 C’est la raison pour laquelle dans les cas où la procédure est suivie devant la Cour de

Cassation, elle statuera en l’état des seuls mémoires déposés lors de l’examen initial de ce

pourvoi hormis le cas où un moyen devrait être soulevé d’office.

Concernant le réexamen par la Cour d’Assises de renvoi, la Chambre Criminelle a eu

l’occasion de préciser certains points85 la Cour d’Assises de renvoi continue de bénéficier de

la plénitude de juridiction afin de juger à nouveau l’accusé, ce qui veut dire qu’aucune

disposition légale ou conventionnelle interdit d’aggraver le sort de l’accusé, pourtant la

victime d’erreur judiciaire a l’espoir d’obtenir une décision plus favorable voire même une

décision l’innocentant, mais peut faire l’objet d’une décision plus sévère que celle prononcée

auparavant. Quant à la victime, elle est recevable à intervenir au soutien de l’action publique

et peut demander la condamnation de l’auteur à lui payer les frais relatifs à cette nouvelle

instance mais elle n’est pas autorisée à demander une nouvelle fois l’indemnisation de son

préjudice si elle s’est déjà vu accorder cette indemnisation précédemment une décision

devenue définitive. Les personnes condamnées jusqu’à ce jour peuvent participer au

réexamen de l’affaire en toute liberté dans l’hypothèse où la commission a suspendu

l’exécution de la condamnation. Cependant, cette suspension n’est pas toujours acceptée. En

l’absence de décision déclarant la suspension de l’exécution de la condamnation, la personne

qui fait l’objet d’une sanction privative de liberté demeurera détenue jusqu’à la décision sans

que cette détention ne puisse excéder la durée de la peine prononcée. C’est la raison pour

laquelle, la décision de la juridiction réexaminant l’affaire doit avoir lieu rapidement, c’est à

dire dans l’année suivant la décision de la Commission sinon le détenu pourra être remis en

liberté sauf s’il est détenu pour une autre cause.

La victime d’une erreur judiciaire innocentée par le processus de réexamen d’une

décision pénale consécutif au prononcé d’un arrêt de la Cour Européenne des Droits de

l’Homme pourra obtenir l’affichage de la décision mais aussi la réparation de son préjudice

qui est une indemnisation.

                                                                                                               84 Crim. 6 sept. 2006, B. n° 215. 85 Crim. 7 déc. 2005, B. n° 329.

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  71  

SECTION II :

L’indemnisation au titre de l’erreur.

La victime déclarée non coupable par une décision définitive peut enfin prétendre à

une éventuelle indemnisation amplement méritée en raison de l’erreur judicaire qu’elle a

subie. L’indemnisation de l’erreur judicaire n’est en vérité qu’une possible réparation de la

détention provisoire. Si pendant longtemps aucune indemnisation n’était prévue pour les

détentions provisoires subies par des protagonistes condamnés à tort, la loi n° 70-643 du 17

juillet 1970 l’a envisagée (A) mais afin d’éliminer tout risque de nouvel erreur, il convient

d’exiger qu’une répression soit faite (B).

Paragraphe 1 : Le dédommagement octroyé à la victime d’erreur judiciaire.

Bien que le droit à réparation fasse l’objet d’un certain nombre de conditions, limitant

le nombre de personnes bénéficiant d’une indemnisation (A), le double degré de juridiction

permet d’avoir un second avis provenant d’une autre juridiction (B). Une seconde chance est

en effet accordée à la victime de l’erreur judiciaire.

A) Les modalités de l’indemnisation d’une détention injustifiée.

Pour obtenir la réparation de son préjudice (2), la victime de l’erreur judiciaire doit

remplir des conditions de fond (1).

1- Les conditions de fond du droit à réparation.

La réparation d’une erreur judiciaire est indispensable pour la personne qui en est

victime, compte tenu de l’horreur qu’elle a pu entraîner. A la suite de cette accusation à tort, il

est fort plausible que la victime ait passé des jours, semaines et années en prison. Cette

réparation a justement un aspect négatif en ce sens qu’elle se cantonne aux victimes d’erreurs

judiciaires ayant subi une détention provisoire soit prononcée ab initio, soit suite au non

respect du contrôle judiciaire. Un protagoniste n’ayant subi aucune journée de détention

provisoire, ne pourrait être indemnisé alors même qu’il est victime d’erreur judiciaire. Il

importe peu que, suite à cette accusation mal fondée il ait été obligé d’aller pointer au

commissariat plusieurs fois par semaine ou ait été obligé de ne pas paraître dans une

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  72  

commune ou s’est vu interdire de quitter le territoire. Selon l’article 706-33 du Code de

Procédure Pénale la victime d’erreur judiciaire ayant subi un contrôle judiciaire ne peut

bénéficier de la réparation de l’erreur. La détention injustifiée est d’une gravité de degré

important, qui engendre la réparation, mais ce n’est pas le cas pour les mesures restrictives de

droit. Cependant, pour bénéficier de la réparation de l’erreur judiciaire, la nécessité d’avoir

subi une détention provisoire doit être accompagnée d’une décision de non lieu, relaxe,

acquittement, devenue définitive. L’obligation pour le requérant de posséder une décision

définitive implique que toutes les voies de recours aient été épuisées avant que le premier

Président de la Cour d’Appel ou Commission Nationale de réparation des détentions ne

statue. La nécessité du non lieu, relaxe et acquittement, suppose de rejeter une demande

d’indemnisation formée par un requérant condamné du chef des infractions pour lesquelles il

a été placé en détention provisoire, même si aucune peine d’emprisonnement ferme n’a été

prononcée à son encontre. 86 La Commission Nationale de Réparation de la détention

provisoire a répondu à de nombreuses questions concernant l’exigence d’une décision de non

lieu, relaxe ou acquittement devenue définitive : s’il est impossible de les énumérer toutes, on

peut citer la question relative à l’annulation de la procédure. Bien que ce problème ne soit pas

envisagé par le législateur, la Commission a estimé qu’une personne ayant subi une détention

provisoire dans le cadre d’une procédure annulée pouvait être indemnisée, en s’appuyant sur

l’article 149 du Code de Procédure Pénale : le législateur « a voulu, sauf dans les cas limitatifs

qu’il a énumérés, que toutes personnes non déclarées coupables définitivement aient le droit

d’obtenir réparation du préjudice que lui a causé la détention et ce peu importe la cause de

non déclaration de culpabilité ». Il n’empêche que malgré ces conditions déjà très drastiques

ne permettant pas la réparation de toutes les erreurs judiciaires, cinq cas d’exclusion du droit à

réparation ont été prévus par le législateur à l’article 149 du Code de Procédure Pénale.

Les décisions de non lieu, relaxe ou acquittement ayant pour seul fondement la

reconnaissance de son irresponsabilité ou une amnistie postérieure à la mise en détention

provisoire ne sont pas susceptibles d’entraîner une réparation. Il en est de même pour la

prescription de l’action publique intervenue après libération de la personne ou si celle-ci était

dans le même temps détenue pour une autre cause ou faisait l’objet d’une détention pour

s’être librement et volontairement accusée ou laissée accuser à tort en vue de faire échapper

l’auteur des faits aux poursuites. Pour procéder à la réparation du préjudice, il doit exister un

lien de causalité entre celui-ci et la privation de liberté. Suite à cette exigence, certaines                                                                                                                86 CNRD, 4 avr. 2003, B. n° 4.

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  73  

indemnisations se trouvent être refusées. Les préjudices relatifs à l’atteinte à la présomption

d’innocence87 et ceux relatifs à l’honneur et à la considération du requérant88 n’ont par

exemple pas pu être indemnisés. En dépit de cette difficulté à obtenir la réparation de l’erreur

judiciaire, certains ont tout de même la chance de profiter de cette réparation du préjudice.

2- La réparation du préjudice.

Les décisions définitives déclarant un acquittement, relaxe ou non lieu vont permettre

aux victimes d’erreur judiciaire, une réparation du préjudice intégrale. Comme on a déjà pu le

citer auparavant, les décisions rendues par la Cour de Révision ou de Réexamen engendrent

donc une réparation du préjudice moral et matériel.

Différents préjudices matériels sont susceptibles de procurer une réparation à

condition d’être liée directement à la détention : la perte de revenu, la perte de chance de

trouver un emploi ou d’effectuer une formation et les frais divers.

La perte de revenu durant la période d’emprisonnement et après la libération peut

faire l’objet d’une réparation ; la victime de l’erreur judiciaire peut bénéficier de réparation

dans l’hypothèse où elle a perdu son emploi en raison de sa détention et doit rechercher un

travail après sa libération89. Ce fut le cas de Loic Sécher, accusé à tort de viol sur mineur, il

fut mis en détention provisoire , ce qui lui causa la perte de son emploi d’agriculteur. Pour se

payer un avocat, il a même été obligé de vendre ses terres. C’est la raison pour laquelle il n’a

pu reprendre son métier à sa sortie de prison. Alain Marécaux, victime du fiasco d’Outreau a

fait également l’objet de détention provisoire ce qui a interrompu l’exercice de sa profession

d’huissier. Il fut même contraint de céder son étude. La réparation sera équivalente à cette

période de recherche. La détention se trouve être la cause première de la rupture du contrat de

travail. La réparation pourra donc également être sollicitée quand l’arrestation de l’individu

sur son lieu de travail a entraîné son licenciement en raison de l’abandon de poste 90. Bien que

les individus ayant perdu leur travail à cause de la détention soient avantagés dans le

processus d’indemnisation, le fait de ne pas trouver d’emploi ou de ne pas pouvoir effectuer

une formation suite à la détention est aussi pris en compte. La Commission Nationale de

                                                                                                               87 CNRD, 28 juin 2002, 01RDPOI3-31 janv. 2003, B.n°1. 88 CNRD, 19 déc. 2003, B.n°8. 89 CNRD, 21 oct. 2005, B. n° 9. 90 CNRD, 18 déc. 2006, B. n° 15.

Page 79: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  74  

Réparation précise néanmoins que si la détention a privé d’une chance sérieuse de travail le

requérant, l’indemnité allouée doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à

l’avantage qu’aurait procuré cette chance si elle s’était réalisée.91 La détention, crée une

étiquette malveillante, qui s’inscrit sur le front de ceux qui en sortent, ne permettant pas une

réinsertion facile. Cette indemnisation est donc nécessaire, surtout en raison du doute qui

subsiste auprès de la population pouvant entraîner un refus d’embauche de la victime d’erreur

judiciaire bien qu’elle ait été dégagée de toute culpabilité. Quant aux frais, tous ceux liés à la

détention pourront déclencher une réparation. C’est le cas notamment des frais d’avocat tels

que les honoraires relatifs à une demande de mise en liberté mais aussi les frais de

déplacement des personnes venues rendre visite au requérant en prison. Il ne peut s’agir que

de l’hypothèse où la communauté a supporté les frais de l’épouse qui a rendu visite à son

époux détenu, ou de la situation où le requérant a payé les frais de déplacement de la

personne venue lui rendre visite.

Le préjudice moral présente autant d’importance que le préjudice matériel au sens où

il s’attarde aux sentiments. L’indemnisation pourra être envisagée en fonction de la

personnalité du requérant, sa situation familiale, son âge au moment de l’incarcération, la

profession exercée, la durée de sa détention, les conditions de celle-ci.

Les conditions de détention sont effectivement d’une grande importance. Il est évident

que les victimes d’erreurs judiciaires doivent être indemnisées quand elles ont été incarcérées

dans des prisons en surpopulation où l’hygiène laisse à désirer, quand elles ont fait l’objet de

violence liée à la nature de l’incrimination mais aussi d’isolement. Si le respect de la dignité

est conséquent, la famille est vitale, ce qui oblige sa prise en compte dans la réparation quand

par exemple la détention a engendré l’impossibilité d’assister à la naissance de son enfant ou

les obsèques d’une personne de la famille.92 Le fait pour un protagoniste d’avoir déjà été

incarcéré antérieurement à la détention dont il en demande l’indemnisation n’est pas un

facteur d’atténuation du choc carcéral. Le choc carcéral n’est pas amoindri en raison de ce

second emprisonnement. En conséquence, énormément de préjudices subis par la victime

d’erreur judiciaire par le biais de détention injustifiée peuvent être réparés. La loi du 15 juin

2000 a introduit un double degré de juridiction pour obtenir cette réparation du préjudice,

action principale et autonome.

                                                                                                               91 CNRD, 14 nov. 2005, n° 5C-RD.O15. 92 CNRD. 26 juin 2006, B. n° 9.

Page 80: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  75  

B) Le principe du double degré de juridiction.

En raison du double degré de juridiction mis en œuvre dans le cas du droit à

réparation, le contentieux est confié dans un premier temps au 1er Président de la Cour

d’Appel en première instance (1) et la Commission Nationale de Réparation de la détention

est chargée de statuer en Appel (2).

1- La procédure suivie devant le 1er Président de la Cour d’Appel.

La réparation est un processus long nécessitant un nombre incalculable de conditions.

Ayant déjà fait l’objet de discussions précédemment, les conditions de fond sont la 1ère étape à

gravir pour parvenir à une éventuelle réparation du préjudice. Une fois celle-ci remplie, la

victime de l’erreur judicaire souhaitant une indemnisation va pouvoir saisir la juridiction

compétente soit le Premier Président de la Cour d’Appel dans le ressort de laquelle a été

prononcée la décision disculpant le protagoniste : c’est à dire le ressort ou le non lieu, la

relaxe ou l’acquittement ont été prononcés. Cette saisine s’opère par le biais d’une requête

prévue dans le code depuis le 17 juillet 197093 et doit être introduite dans un délai de 6 mois à

compter de la décision définitive de relaxe, non lieu ou d’acquittement à condition que le

requérant ait été avisé de son droit de demander cette indemnisation et des dispositions de

l’article 149-1 du Code de Procédure Pénale. Cette non prise en compte de ce délai entraîne

une fin de non recevoir.

Selon l’article R26 du Code de Procédure Pénale, la requête doit être dotée de

certaines mentions qui toutefois ne sont pas forcément sanctionnées par l’irrecevabilité

puisque cet article relate dans sa liste des documents et informations qui trouvent parfois leur

utilité à l’instruction94. La requête comprenant l’exposé des faits, le montant de la réparation

demandée, des indications pratiques, doit être remise sur récépissé ou lettre recommandée

avec accusé de réception au greffe de la Cour d’Appel. Les indications renseignent sur la

décision qui a engendré l’incarcération précisant la date et le lieu de la détention mais aussi la

juridiction qui a prononcé la relaxe, le non lieu et l’acquittement et enfin l’adresse où doit être

faite la notification du demandeur. Les pièces justificatives sont imposées.

                                                                                                               93 Loi n° 70-643 du 17 juillet 1970, tendant à renforcer la garantie des droits individuels des citoyens. 94 v.not. CNRD, 14 nov. 2003, 03 CRD 026.

Page 81: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  76  

Les vérifications relatives à la compétence du Président à la forme de la requête et aux

délais, étant accomplies, il convient au premier Président de procéder à l’instruction de la

demande. Si le Président le juge utile, il peut, afin d’évaluer le préjudice, mettre en œuvre des

expertises psychiatriques, comptables, ou bien entendre le demandeur avant de donner une

date d’audience. Néanmoins, quand il a constaté qu’une condition n’est pas remplie, il fixera

directement et rapidement une date d’audience.

La décision rendue lors de l’audience publique par principe après débat judiciaire

contradictoire est motivée et peut faire l’objet d’un appel. Cette décision susceptible d’appel

est assortie de l’exécution provisoire. Cet appel faisant naître une seconde chance pour la

victime de l’erreur judiciaire a lieu devant la Commission Nationale de Réparation des

Détentions.

2- La procédure suivie devant la Commission Nationale de

Réparation des Détentions.

Le principe selon lequel « les décisions prises par le 1er Président de la Cour d’Appel

peuvent dans les dix jours de leur notification faire l’objet d’un recours devant une

Commission Nationale d’Indemnisation des Détentions Provisoires » a été introduit par la loi

du 15 juin 2000. Ce principe de double juridiction mis en œuvre dans le but de satisfaire

l’exigence du protocole n° 7 de la Convention Européenne Des Droits de l’Homme et plus

particulièrement son article précisant le droit de pouvoir faire examiner sa déclaration de

culpabilité par une juridiction supérieure, impose certaines conditions.

Ce recours, possible uniquement dans les 10 jours à compter de la notification de la

décision du 1er Président souvent opéré par la remise d’une copie sur récépissé ou par lettre

recommandée avec accusé de réception, doit être remis par le demandeur au greffe de la Cour

d’Appel en quatre exemplaires. Le défaut d’exemplaires n’entraîne pas l’irrégularité de la

demande95 alors que si le recours adressé au greffe de la Cour d’Appel s’opère par lettre

recommandée avec accusé de réception ou télécopie, l’irrecevabilité sera déclarée. La

personne admise au recours tels que le demandeur, l’agent judiciaire du trésor ou le Procureur

Général près la Cour d’Appel doivent donc remettre en mains propres la déclaration de

recours à l’exception des détenus qui, ne pouvant sortir du centre de détention, sont autorisés                                                                                                                95 CNRD, 20 déc. 2002, B. n°12.

Page 82: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  77  

à donner leur déclaration de recours auprès du greffe d’un établissement pénitentiaire 96 ou

envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception au greffe de la Cour d’Appel.97

Le point de départ du délai pour interjeter l’appel étant la notification de la décision, il

convient que celle-ci soit notifiée correctement. C’est la raison pour laquelle la décision doit

être notifiée au demandeur lui même en précisant les délais et modalités du recours possible.

S’il s’avère que cette notification n’est pas régulière, le recours devant la Commission

Nationale de Réparation demeure recevable étant donné que le délai d’appel n’a pas

commencé à courir. Cette procédure suivie devant la Commission Nationale de Réparation

des Détentions ayant le même objectif que le 1er Président de la Cour d’Appel qui possède les

mêmes pouvoirs, la Commission bénéficie elle aussi de la possibilité de procéder à des

investigations tout comme des dispenses d’investigation.

Des expertises de demandes de précisions à l’administration pénitentiaire en vue de

vérifier les demandes du requérant fondées sur certaines circonstances dommageables de son

incarcération ainsi que d’auditions du demandeur, sont offertes à la Commission. La décision

rendue après débats judiciaires contradictoires ayant accordé la parole au demandeur ou son

avocat, agent judiciaire du trésor et Procureur Général est insusceptible de recours sauf dans

les cas où il y a un excès de pouvoir. En conséquence, une fois ce recours épuisé la somme

octroyée ou non à la victime d’erreur judiciaire en raison de sa détention injustifiée ne peut

plus être contestée et devient définitive. Cette victime mécontente de sa réparation peut

toujours espérer voir la responsabilité du magistrat engagée.

Paragraphe 2 : La Responsabilité des intervenants dans le système judiciaire.

La répression de l’erreur judiciaire aboutit par le biais d’engagements de

responsabilité de l’État en raison du dysfonctionnement de la justice (A), cependant si l’on

pouvait penser que l’erreur judiciaire engendre également la responsabilité des magistrats qui

sont la cause de cette erreur, la question de cette responsabilité est problématique et

compliquée.(B) Selon Geneviève Giudicelli Delage « l’irresponsabilité n’est plus concevable

mais la responsabilité du bouc émissaire ne l’est pas davantage ».

                                                                                                               96 CNRD, 20 déc. 2002, B. n° 11. 97 CNRD, 20 déc. 2002, B. n° 14.

Page 83: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  78  

A) La responsabilité de l’Etat potentiellement partagée avec les

magistrats.

L’État dont la responsabilité est engagée du fait d’un dysfonctionnement du service

public de la justice (1) peut attaquer le magistrat responsable par le biais des actions

récursoires (2).

1- La responsabilité de l’État en raison des dysfonctionnements du

service public de la justice.

L’article 141-1 du Code de l’Organisation Judiciaire offre une possible responsabilité

de l’État qui s’engage à réparer les dysfonctionnements du service de la justice dès l’instant

où un dommage a été causé aux usagers qui peuvent alors bénéficier d’une réparation. Pour

que la responsabilité de l’Etat soit engagée, il faut avoir subi un fonctionnement défectueux

de la justice : les actes juridictionnels effectués par des magistrats lors de l’instruction, le

jugement , les actes liés à l’exécution du service public de la justice par des autorités

judiciaires doivent avoir été mal menées. Cependant si pour atteindre cet objectif il est

nécessaire au préalable d’avoir subi cette variété de dommages relatés ci-dessus, il est

indispensable de remplir des conditions de fond.

L’exigence du dommage personnel n’étant jamais très compliqué à prouver pour le

requérant, devra mettre en exergue le lien de causalité entre le préjudice et la faute commise

par le service de justice. En l’occurrence, pour engager la responsabilité de l’État dans le but

d’obtenir une réparation, c’est une faute lourde qui est requise afin d’éviter de remettre en

cause facilement l’autorité de choses jugées. Cette faute lourde qui a fait l’objet d’une

première définition très stricte laissant peu de place à la réparation était définie comme celle

« qui a été commise sous l’influence d’une erreur tellement grossière qu’un magistrat ou un

fonctionnaire de justice, normalement soucieux de ses devoirs n’y eut pas été entraîné98 ou

« qui révèle une intervention de nuire de la part de son auteur » ou « procède d’un

comportement anormalement déficient ».99 Les critiques d’une partie de la doctrine espérant

l’instauration d’une faute simple ne verront guère leur souhait exhaussé. Toutefois la mise en

œuvre d’une conception très large de la faute lourde permet de s’y rapprocher.                                                                                                                98 1er Civ. 3 oct. 1953, B. n° 224. -20 fév. 1996, B.I, n° 94. 99 TGI Paris, 22 juill. 1999, D, 1999, IR, p. 214.

Page 84: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  79  

Soucieux d’indemniser les victimes du fonctionnement défectueux de la justice, une

arrêt du 23 février 2001 assouplit la notion de faute lourde ; la Cour de Cassation a retenu que

constitue une faute lourde « toute déficience caractérisée par un fait ou série de faits

traduisant l’inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est

investi ».100 En 2007, l’inaction du juge d’instruction qui pendant 4 ans et 1 mois n’a pas

accompli les actes nécessaires au bon déroulement de l’info a été considérée comme une faute

lourde susceptible d’engager la responsabilité de l’Etat.101

Cette possibilité de réparation et d’engagement de responsabilité est un moyen pour

une victime d’erreur judiciaire de se voir réparer cette erreur qui n’aurait jamais dû arriver.

L’Etat a du faire les frais de cette réparation qui peut avoir un impact sur les magistrats qui

ont été la cause de cette réparation.

2- L’action Récursoire.

L’action récursoire est un recours en justice par une personne qui a dû exécuter une

obligation dont une autre était tenue contre le véritable auteur de l’obligation pour obtenir sa

condamnation . Cette action qui peut être envisagée par l’État envers les magistrats si un

magistrat commet une faute personnelle qui a entraîné pour l’État l’obligation de

dédommager la victime en raison du dysfonctionnement de la justice prévu à l’article 141-1

du Code de l’Organisation Judiciaire, l’État bénéficie d’une action récursoire.102 Autrement

dit l’État qui a vu sa responsabilité engagée due au dysfonctionnement du service de la

justice et a donc dû réparer ce dommage, peut se retourner contre le magistrat si ce

dysfonctionnement est du à une faute personnelle de celui-ci. En raison du statut du magistrat,

lui assurant une protection fonctionnelle, l’Etat ne peut envisager l’action récursoire que si le

magistrat a commis une faute lourde.

Ce pouvoir d’action récursoire appartient au Garde des sceaux. Celle-ci est portée

devant la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation.103 Toutefois, il semble que dans la

                                                                                                               100 Christine Lazergues – Réflexion sur l’E. J. – RCS 2006, 709. 101 1er Civ., 13 mars 2007, B.I, n° 107. 102 Jean Louis Gallet – Répertoire de la responsabilité de la puissance publique,-régime législatif spéciaux d’indemnisation relevant de la Juridiction judiciaire-fév 2008. Actualisation avril 2016. 103 Serge Petit, Répertoire de la Responsabilité de la puissance publique,Service public de la justice, Juin 2012, actualisation Avril 2016.

Page 85: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  80  

pratique cette action n’ait jamais eu lieu104 au vu de l’inexistence de jurisprudence. Peut alors

être mis en exergue l’inaction de l’État qui n’est pas anodine quand on s’aperçoit que la faute

personnelle doit être totalement détachable du service public. Cette situation se fait

effectivement rare. En général la faute personnelle du magistrat se lie souvent à celle du

service public. Si la responsabilité civile n’est jamais engagée envers le magistrat, la mettant

sur un piédestal, il en est peut être autrement d’un point de vue disciplinaire.

B) La responsabilité des magistrats.

Le magistrat à l’origine de l’erreur judiciaire ne risque pas de sanction

disciplinaire.(1). A l’inverse, responsable pénalement il peut être contraint à payer une

amende et faire l’objet d’une incarcération dans l’hypothèse où il est la cause d’une détention

arbitraire. (2)

1- La difficile répression des juges sur le plan disciplinaire.

Outre l’existence de la responsabilité civile des magistrats jamais mise en œuvre, il

existe des actions en responsabilité disciplinaire. L’article 43 de l’Ordonnance de 1958

relative aux statuts de la magistrature relate que « tout manquement par un magistrat aux

devoirs de son état, à l’honneur, à la délicatesse ou à la dignité, constitue une faute

disciplinaire ».

Quand le Ministre de la Justice souhaite engager des poursuites, elles s’opèrent devant

le Conseil Supérieur de la Magistrature mais, la loi du 15 juin 2001 a permis au 1er Président

de la Cour d’Appel et aux Procureurs Généraux d’être également à l’initiative de ces

poursuites. A l’issue de ces poursuites, les sanctions disciplinaires applicables aux magistrats

sont : le blâme avec inscription au dossier, la mutation d’office et le retrait de certaines

fonctions, l’abaissement d’échelon, la rétrogradation, la mise à la retraite d’office, l’admission

à cesser ses fonctions lorsque le magistrat n’a pas le droit à une pension de retraite, et la

révocation.

                                                                                                               104 Eliane de Valicourt, l’Erreur Judiciaire, chapitre 2, le régime fondé sur la faute personnelle du juge, Ed l’Harmattan 2005 p. 318.

Page 86: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  81  

La question qui se pose est de savoir si l’erreur judiciaire peut entraîner des

conséquences disciplinaires pour le juge à la source de cette erreur ? Pour y répondre, il

convient de rappeler que l’erreur judicaire est souvent l’hypothèse d’une mauvaise

appréciation des faits où le juge a pris pour coupable un innocent105 ; dans la mesure où la

mauvaise appréciation commise par un magistrat dans l’exercice de ses fonctions ne constitue

pas une faute disciplinaire, le magistrat qui a commis une erreur judiciaire ne pourra se voir

sanctionner disciplinairement. Cette absence de possibilité d’engager la responsabilité du

magistrat provient tout simplement de la nécessité de préserver l’indépendance. S’il s’avérait

que le pouvoir exécutif puisse interférer dans la justice pour sanctionner les juges, le principe

d’indépendance et donc d’impartialité serait bafoué. Cependant ces principes sont essentiels

au bon fonctionnement de la justice.

S’il paraît difficile de mettre en œuvre la responsabilité des magistrats, certains auteurs

comme Christine Lazerges se questionne sur l’éventuelle possibilité de mettre en œuvre une

sanction disciplinaire en raison d’une faute lourde, d’une extrême gravité du magistrat sans

contrevenir au principe d’indépendance. Selon elle, le renforcement de la responsabilité

disciplinaire fait l’objet d’un fort consensus du moins en élargissant les modes de saisine du

Conseil Supérieur de la Magistrature. Au delà de cette responsabilité disciplinaire, les

magistrats ne sont pas irresponsables pénalement.

2- La détention arbitraire, sanction pénale imputable aux

magistrats.

L’erreur judicaire inacceptable et engendrant d’énormes conséquences sur la victime,

n’a à l’inverse que peu de répercussion pour les magistrats qui sont source de cette erreur et

qui se voient exemptés de responsabilité disciplinaire mais aussi de responsabilité civile.

Toutefois leur responsabilité pénale peut être engagée comme tout citoyen. L’erreur

judiciaire va pouvoir déclencher l’engagement de responsabilité des magistrats, bénéfique

pour la victime car il a été prévu un garde-fou législatif contre les erreurs judiciaires en

matière de détention qui est ni plus ni moins un délit de forfaiture prévu par le Code Pénal.

                                                                                                               105 Marie-Anne Frison-Roche, Professeur à l’Univ Paris Dauphiné,l’Erreur du Juge RTD Civ, 2001-819.

Page 87: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  82  

L’article 432-4 du Code Pénal dispose « Le fait, par une personne dépositaire de

l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, agissant dans l’exercice ou à

l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, d’ordonner ou d’accomplir

arbitrairement un acte attentatoire à la liberté individuelle » Cette détention arbitraire peut

engendrer 7 ans d’emprisonnement et 100 000 € d’amende mais si celle-ci dure plus de sept

jours la peine peut aller jusque 30 ans de réclusion criminelle et 450 000 € d’amende. Afin de

pouvoir appliquer cet article, il est requis que la personne ait subi une atteinte à la sûreté

personnelle c’est à dire à la liberté individuelle. Cette atteinte peut résulter d’une arrestation,

d’une détention ou même une rétention quels que soient le lieu, la durée, ce qui permet de

retenir qu’une victime ayant subi une détention arbitraire ordonnée par un magistrat peut

engager la responsabilité de celui-ci. Toutefois faut-il encore que l’élément moral soit retenu.

Il convient de pouvoir prouver qu’au moment où le magistrat a requis ou ordonné la

détention, il savait pertinemment que c’était illégal.106 L’exigence du caractère intentionnel de

l’infraction exclut la responsabilité pénale en cas de simple négligence. Cette nécessité

d’élément moral peut briser l’espoir qu’avait la victime de l’erreur judiciaire de voir

condamner le magistrat alors même que contrairement à la responsabilité civile et

disciplinaire, cette responsabilité pénale est envisageable.

En conséquence, une victime d’erreur judiciaire est relativement lésée en terme de

réparation. Si elle bénéficie de moyens de faire réviser la décision, sans compter les voies de

recours telles que l’Appel et la Cour de Cassation, elle ne peut se voir indemniser qu’en

raison d’une détention injustifiée, d’une faute lourde et dans le cas d’une détention arbitraire

si elle s’est constituée partie civile quand la responsabilité pénale du magistrat a été engagée.

                                                                                                               106 Geneviève Casile-Hugues, répertoire de droit pénal et de procédure pénale, section 2 abus d’autorité, oct. 2013, actualisation janv. 2014.

Page 88: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  83  

CHAPITRE II :

Les solutions prospectives pour une vérité judiciaire parfaite.

Les erreurs judiciaires ont pour conséquence de détruire la vie de ceux qui la

subissent, on peut citer les protagonistes de l’affaire Outreau, Loïc Sécher, Roland Agret et

bien d’autres, qui ont tous connu une dégringolade en raison d’accusations mal fondées.

Grève de la faim pour certains, suicide pour d’autres mais aussi mutilation, ils ont crié leur

innocence en détention mais ne seront guère écoutés.

Si certains moyens ont été envisagés afin de solutionner ces erreurs, ils ne

remplaceront jamais le mal qui a été fait. Les solutions évoquées dans le chapitre précèdent ne

ramèneront pas à la vie le père de Loïc Sécher traumatisé par la culpabilité de son fils et

décédé sans pouvoir le revoir une dernière fois ; ou ne permettront pas non plus de

reconstruire la famille d’Alain Marécaux. C’est la raison pour laquelle bien qu’il soit

important d’avoir un système de réparation, il est plus pertinent d’agir antérieurement aux

erreurs plutôt que postérieurement pour les faire disparaître du système judiciaire Français.

Chaque erreur a été engendrée pour une raison, il est donc nécessaire de réformer les points

susceptibles de créer ces erreurs. Les garde-fous, mis en œuvre pour se rapprocher de la vérité

encore bien trop imparfaite, doivent faire pour certains l’objet d’évolution dans le but

d’éradiquer les erreurs. (SECTION I) L’impossibilité de les faire disparaître en totalité

impose donc de préserver les solutions aux erreurs et convient même de les réformer en raison

de leur difficulté d’accès et faiblesse. (SECTION II)

Page 89: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  84  

SECTION I :

Le perfectionnement des garde-fous.

Thémis, déesse de la justice, allégorie de la justice du droit est représentée par une

balance pour l’équilibre, les yeux bandés en signe d’impartialité.107 Pour parvenir à ces

objectifs lors du procès pénal, la justice a mis en place une série de garde-fous. L’un deux,

essentiel au bon déroulement du procès et à l’établissement de la vérité est le principe du

contradictoire, permettant de discuter l’énoncé des faits et les moyens juridiques entre les

adversaires. S’il en ressort qu’il pourrait être renforcé à différentes étapes pour éviter des

erreurs judiciaires. (Paragraphe 1), il n’est pas le seul principe devant bénéficier d’évolution.

(Paragraphe 2)

Paragraphe 1 : Le renforcement du principe du contradictoire.

Le contradictoire est absent de la phase d’enquête préliminaire. S’il est nécessaire de

l’envisager à ce niveau (A), son renforcement dans une autre phase du procès pénal,

l’instruction, peut être provoquée par l’instauration d’un juge de l’instruction. (B)

A) L’intervention de l’avocat dans l’enquête préliminaire.

L’enquête préliminaire est menée sous l’autorité du parquet secrètement et non

contradictoirement.108 Afin d’amoindrir les erreurs judiciaires, une réforme semble nécessaire

pour pallier à ce manque de contradictoire essentiel à la bonne administration de la justice qui

exclut l’intervention de l’avocat aussi bien pour les investigations (1) que pour l’accès aux

dossiers. (2)

1- L’autorisation des demandes d’investigation.

Selon Monsieur Pradel, le droit de demander des investigations ou encore d’agir est au

« cœur de la contradiction puisque le droit de proposer est celui de faire entendre sa voix et

d’indiquer au juge ses moyens de défense ». S’il n’y a pas de contradictoire, le droit de

                                                                                                               107 Justice.gouv.fr/histoire-et-patrimoine-10050/les-symboles-de-la-justice-21974.html 108 http://www.maitre-eolas.fr/post/2009/01/23/1293-de-l-enquete-preliminaire-et des droits-de-la-défense-un-cas-pratique

Page 90: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  85  

demander des investigations et d’agir disparaît, c’est le cas de l’enquête préliminaire excluant

le principe du contradictoire où les investigations des avocats ne sont guère possibles.

La seule prérogative tolérée à l’avocat est de pouvoir faire des observations au

Procureur de la République. Il lui est interdit de formuler des demandes d’actes ou poser des

questions au cours d’une audition ou confrontation pour engager des débats sur l’accusation.

Selon l’article 63-4-3 du Code de Procédure Pénale cette absence du contradictoire ne permet

pas à celui qui fait l’objet de l’enquête d’y prendre part et entraîne un avantage pour le

Parquet qui n’est ni plus ni moins l’accusation. Des Erreurs Judiciaires sont susceptibles de

prendre forme dès le commencement de l’enquête préliminaire, laissant dans les mains d’un

seul homme faillible, le Procureur de la République, les pouvoirs d’investigations. La balance

symbole de la justice juste ne semble pas équilibrée puisque le suspect est dans l’impuissance

et l’impossibilité de se défendre. Il semble donc impossible de se rapprocher de la vérité

facilement. Une réforme, modifiant le contradictoire qui permettrait à l’avocat de procéder à

des investigations, serait donc utile afin de rééquilibrer cette balance.

M. Porteron avait déjà formulé l’idée de mettre en œuvre des investigations écrites en

rajoutant une phrase à l’article 63-4 alinéa 4 du Code de Procédure Pénale qui prescrirait que

« l’avocat peut faire valoir dans ses observations la nécessité de certaines investigations» 109

dans le but d’accéder véritablement à une équité. Il conviendrait même de permettre au

conseil de formuler des interrogations sur les circonstances entourant l’infraction.

De surcroît, bien que le Procureur se doit d’être neutre, à la lecture de l’affaire, il peut

se faire une fausse idée du dossier et entraîner la construction des investigations qu’il délègue

au policier, dans ce sens. Si la culpabilité fait partie de sa 1ère conviction, il pourrait

rechercher et rassembler des preuves uniquement à charge. Cette pratique est contraire à la

présomption d’innocence. La réforme évoquée ci-dessus, faisant intervenir l’avocat, pourrait

avoir comme objectif de favoriser la recherche à décharge. Une réforme appliquant le

contradictoire à l’enquête préliminaire aurait également l’avantage de résoudre un problème

souvent rencontré par les avocats qui interviennent parfois trop tard. Leur intervention a lieu

quand des relevés téléphoniques ou vidéos de surveillance ne sont plus disponibles, les

relevés téléphoniques ne sont accessibles que durant une période d’un an. Il arrive également

                                                                                                               109 Christine Gavalda-Moulenat, comment renforcer le contradictoire dans le procès, Archives de politique criminelle, Ed A.Pédone, 2007/1 (n °29)

Page 91: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  86  

que l’avocat se retrouve face à des témoins n’ayant plus de souvenirs très précis. Aucun

élément énuméré ne permet une bonne défense. La réforme aurait donc pour avantage de

pallier aux problèmes de disparition de preuves matérielles mais aussi à la perte de souvenirs

des témoins. Cette réforme n’a de sens que si l’accès au dossier est enfin autorisé à l’avocat.

2- L’accès du dossier dès la garde à vue.

Malgré de nombreuses avancées concernant le droit à l’information de la personne

gardée à vue depuis la loi du 27 mai 2014, tels que l’accès parcellaire au dossier mais aussi

l’information immédiate de la qualification, de la date et du lieu présumé de l’infraction, il

s’avère que les avocats et leurs clients gardés à vue n’ont absolument pas accès à l’intégralité

du dossier.

Il serait primordial de l’envisager en raison des avantages que cela génère. L’accès en

intégralité du dossier, base de toutes contradictions est un moyen de discuter des preuves mais

aussi d’en réclamer de nouvelles afin de se rapprocher de la vérité. Une réforme développant

cette idée a également pour intérêt de permettre aux avocats de contester la régularité de

procédures suscitant une défense imparable. La défense tout comme l’accusation, a une place

considérable dans l’élaboration de la vérité que toutes réformes engendrant la possibilité

d’une meilleure défense peuvent éviter des erreurs judiciaires.

Une réforme à l’accès aux dossiers paraît donc incontestablement nécessaire pour que

les avocats puissent demander des investigations mais il faut se méfier des méfaits qu’elle

pourrait engendrer.

Il convient de prendre garde aux éventuelles fuites qui jusqu’à ce jour ont été évitées

grâce à la préservation du dossier resté secret. Elles pourraient atteindre l’oreille toujours

tendue des médias, une des causes des erreurs judiciaires en dévoilant des informations

publiques.

Cette réforme visant à renforcer le contradictoire par le biais de l’accès intégral au

dossier de procédures, n’est pas insignifiante quand on constate que la directive

2012/2013/UE du 22 mai 2012 l’a envisagée tout comme le jugement du Tribunal

Correctionnel de Paris du 30 décembre 2013. En annulant pour la première fois le procès

Page 92: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  87  

verbal d’audition d’une personne gardée à vue pour défaut d’accès de l’avocat et de

l’intéressé au dossier, ce jugement a indirectement inscrit une volonté d’autoriser l’accès au

dossier en totalité.

B) l’éventualité d’une réforme du juge d’instruction.

L’étude des causes des erreurs judiciaires dans un chapitre antérieur nous a permis de

mettre en exergue la fragilité du juge d’instruction qui a tendance à s’éloigner de la vérité

judiciaire. Or le but de la justice est d’éviter que des innocents passent leur vie en prison

pendant que des coupables sont en liberté. Si la Commission Parlementaire, rassemblée suite

au fiasco d’Outreau, a envisagé une réforme instaurant la collégialité du juge d’instruction en

raison de la jeunesse des magistrats et leur caractère souvent individualiste,110 une réforme

différente est envisageable pour développer un peu plus le principe du contradictoire essentiel

dans le procès pénal pour aboutir à la vérité.

Il pourrait être intéressant de reformer « le juge d’instruction » pour « le juge de

l’instruction ». Ce juge de l’instruction est déjà créé dans différents systèmes tels que

l’Allemagne en 1975, le Portugal en 1987, l’Italie en 1989, ce qui met en exergue la fiabilité

du système. D’ailleurs les cantons Suisses s’apprêtent à les copier. Cette appellation de juge

de l’instruction est celle du juge arbitre dans le projet réforme de la procédure pénale en

France en 2009. Ce juge arbitre est une idée bien plus ancienne, reprise dans le rapport

Delmas Martys de 1991 de la Commission Justice Pénale et Droits de l’Homme111. Cette

réforme restée lettre morte jusqu’à ce jour avait pour objectif d’évincer le juge d’instruction

au profit d’un magistrat du Parquet qui enquête à sa place. L’instauration d’un juge de

l’instruction permettrait de contrebalancer les pouvoirs du Parquet. 112 Le principe du

contradictoire, source de renforcement constant, sera de nouveau présent par ce système

mettant en œuvre le parquet contre la défense arbitrée par le juge. Cette situation semble plus

juste que celle où un seul homme, le juge d’instruction a pour prérogative d’apprécier seul la

valeur des charges et de décider d’un éventuel renvoi devant une formation de jugement.

                                                                                                               110 Président Mr André Vallini, Rapporter Mr Philippe Houillon, député, Rapport fait au nom de la commission d’enquête chargée de rechercher les dysfonctionnements de la justice dans l’affaire dite d’Outreau et de formuler des propositions pour éviter leur renouvellement, enregistré à la présidence de l’Assemblée Nationale le 6 juin 2006. 111 Annexe N° 1, P. 105, Le rapport Delmas Martys de 1991 de la commission justice pénale et droit de l’Homme. 112 Dominique Inchauspé- l’Erreur Judiciaire, Ed.Puf-sept 2010, p 495.

Page 93: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  88  

D’autant plus que la problématique du juge d’instruction est de cumuler des pouvoirs

d’enquêtes et de prononcer des décisions à caractère juridictionnel.113 Pierre Truche, 1er

Président de la Cour de Cassation avait déclaré dans le Figaro du 28 Juin 1999 page 9 qu’il

n’était « pas sein d’instruire et de juger » affichant ainsi son enthousiasme en faveur d’un juge

de l’instruction.114

Ce nouveau juge de l’instruction posséderait le pouvoir de contrôler certains actes du

Parquet les plus coercitifs et de refuser ou donner des autorisations. Toutefois quelques

craintes subsistent chez certains non partisans de la mise en place du juge de l’instruction. Ils

estiment que le Parquet aura soit une toute puissance parce que le juge autorisera tout le temps

les demandes, certainement en raison de l’absence de la défense durant les débats s’il y en a,

ou soit les pouvoirs du juge de l’instruction seront accrus lui permettant de reprendre

l’enquête, ce qui ne changera pas de l’état actuel des choses. Un arbitre doit être à égale

distance de chaque adversaire bénéficiant des mêmes règles de jeu. Ce n’est en respectant

cette idée que la mise en œuvre du juge de l’instruction aura pour intérêt d’éviter les erreurs.

De surcroît, les opposants à cette réforme mettent en avant qu’au quotidien une

instruction opérée par un procureur conduira à la recherche d’éléments à charge et non à

décharge mais n’est-ce-pas déjà ce que l’on a relevé avec le Juge d’Instruction ? Bien que des

réformes portant sur le renforcement du contradictoire peuvent éviter des erreurs judiciaires,

des réformes s’attardant sur d’autres principes pourraient permettre de parvenir à cet objectif.

Paragraphe 2 : L’accentuation des autres principes favorisant la recherche de la

vérité.

La présomption d’innocence, second principe phare de notre système judiciaire, est

rarement respectée. Une fois retenu entre les griffes de la justice et ses différents services, il

est impossible d’être considéré comme un innocent. Pourquoi avoir instauré un parcours

passant par plusieurs phases avant d’aboutir à une décision si l’on est persuadé de la

culpabilité du protagoniste dès la première rencontre. Ces comportements étant un obstacle à

                                                                                                               113 www.lepetitjuriste.fr/droit-penal/procedure-penale/lasuppression-du-juge-instruction-vers-une-remise-encause-de-l’independance-desjuges/. 114 Annexe N° 2, P. 106, Article de presse dans le journal Libération de Pierre Truche concernant l’éventuelle suppression du Juge d’Instruction

Page 94: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  89  

l’établissement de la vérité, la présomption d’innocence doit être renforcée (A). Dans le but

d’obtenir le bon fonctionnement de la justice, il convient de bénéficier de moyens

importants.(B)

A) Le renforcement de la présomption d’innocence.

La présomption d’innocence, pas souvent respectée, oblige à prévoir une réforme

mettant en œuvre des moyens susceptibles d’écarter la présomption de culpabilité (1) Une fois

la présomption d’innocence développée au plus haut niveau, la détention provisoire

dévastatrice n’a plus de sens et doit être réformée pour éviter que des innocents fassent

l’objet d’années de prison. (2)

1- L’intensification de la présomption d’innocence lors des

investigations.

La loi du 15 juin 2000 promulguée pour renforcer la présomption d’innocence,115 est à

multiples reprises bafouée. Régulièrement, les enquêtes et les instructions sont diligentées

sous la présomption de culpabilité. La garde à vue donne lieu trop souvent à des pressions

policières en raison de la certitude de culpabilité des enquêteurs mais aussi d’investigations à

charge engendrant des erreurs judiciaires. Bien que des réformes aient vu le jour tendant à

éviter ces désagréments, telles que la loi de juin 2000, obligeant la présence des questions des

policiers sur les procès verbaux mais aussi la loi du 5 mars 2007 instaurant l’enregistrement

filmé des interrogatoires et également la loi prévoyant l’assistance de l’avocat dès la garde à

vue, des dérives sont encore possibles impliquant une réforme.

L’avocat désormais présent pendant une partie de la garde à vue laisse aux policiers la

possibilité d’exercer tous les types de pressions à l’abri des regards. Une éventuelle réforme,

instaurant une vidéo surveillance quotidienne au sein des services policiers ou de

gendarmerie, pourrait faire l’objet de réflexions ?

Il est indéniable que de prime abord, cette vidéo surveillance aurait pour méfait d’être

attentatoire à la liberté individuelle et d’engendrer peut être une perte de volonté des services

                                                                                                               115 loi n°2000-516-légifrance.gouve.fr

Page 95: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  90  

de police blessés d’avoir perdu la confiance de leurs supérieurs. Cependant des avantages

peuvent en être dégagés concernant les erreurs judiciaires comme l’impossibilité d’exercer

des pressions à n’importe quel moment ou pour d’autres problèmes rencontrés tels que « les

ripoux » ou les refus de prises de mains courantes ou de plaintes constamment relevés dans

notre système. Cette vidéo surveillance ne serait pas inutile quand on sait que même si

l’avocat a le droit d’être présent durant la garde à vue, les enquêteurs, selon la loi du 1er juin

2011, sont tenus de ne l’attendre que 2 h alors qu’il est souvent surchargé dans son travail. Il

arrive donc que le suspect soit seul. Cette réforme paraît peut être excessive ? La réflexion

sur ce sujet bien qu’elle aboutisse à une réponse négative pourrait, peut-être, être bénéfique.

Quant au problème de l’instruction à charge des policiers, il peut être réglé simplement par

la réforme évoquée précédemment permettant l’accès au dossier et les demandes

d’investigations de l’avocat rétablissant l’équilibre.

L’instruction à charge du juge peut être évitée par l’instauration de la collégialité si

l’on n’envisage pas la réforme du juge de l’instruction. Cette collégialité a déjà fait l’objet de

nombreuses discussions et a failli être insérée dans notre système judiciaire mais a échoué en

raison du manque de moyens budgétaires.116 Elle permettrait d’éviter l’instruction à charge,

en ce sens qu’elle évite à une seule personne de s’enferrer dans une opinion défavorable

envers le poursuivi, qui pourrait être susceptible d’engendrer uniquement des recherches de

preuves de culpabilité. Par l’instauration du principe de présomption d’innocence consistant à

considérer que la personne n’est pas coupable tant qu’elle n’a pas été jugée, la détention

provisoire ne devrait donc pas exister.

2- La restriction des recours à la détention provisoire.

En France au 1er juillet 2016, on constate qu’il y a 69 375 détenus pour 58 311 places.

En 1 an le nombre de détenus dormant sur des matelas à même le sol est passé de 1019 à

1648, l’une des raisons est de nouveau l’augmentation du recours à la détention provisoire

mise en œuvre par les juges par précaution.117 Pour autant, la détention constitue normalement

l’exception du principe de liberté. Cette idée est d’ailleurs invoquée par Adeline Hazan,

contrôleur général des lieux de privation de liberté. Force est de constater qu’il est loin d’être

le cas selon les statistiques. Si Monsieur Jean François Burgelin, anciennement Procureur                                                                                                                116 www.dalloz-actualité.fr/chronique/fin-du-college-de-l-instruction-beaucoup-de-bruit-pour-rien-ou-comedie-des-erreurs1#.V6xu5vSvinM 117 Gilles Bouleau, Journal télévisé TF1de 20 H du 8 août 2016 .

Page 96: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  91  

Général à la Cour d’Appel et Cour de Cassation, estime que dans l’affaire Outreau, il n’est

pas choquant d’avoir eu des mandats de dépôt, pour lui, il est ahurissant de voir la durée des

détentions provisoires excessives.118 Cette problématique de la détention provisoire trop

souvent mise en œuvre avec une durée parfois excessive n’est pas sans conséquence pour

ceux qui la subissent. C’est la raison pour laquelle une réforme de la détention provisoire doit

être envisagée , elle est nécessaire et en contradiction avec la présomption d’innocence

.Comment est-ce possible de proférer la présomption d’innocence et finalement envisager au

cours de l’instruction l’incarcération provisoire de la personne que l’on est censé considérer

non coupable ?

L’article 144 du Code de Procédure Pénale listant les règles à suivre pour « dégainer »

la détention provisoire fait une parfaite illustration de cette contradiction. Le troisièmement de

cet article « empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses

coauteurs ou complices » met bien en exergue que la personne est coupable.

La présomption d’innocence étant essentielle à la bonne administration, tout comme la

détention provisoire qui, elle, sert à éviter des débordements dans le cas les plus graves et

complexes, cette contradiction devra malheureusement toujours exister dans notre système.

Cependant, des réformes peuvent peut-être permettre d’éviter, le plus possible, le recours à la

détention provisoire pour les cas les moins graves en utilisant plus souvent de nouvelles

alternatives inscrites dans le code de Procédure Pénale comme la caution existant depuis le

droit romain ou le contrôle judiciaire mis en place depuis le 12 juillet 1970. Mais la pratique

met en exergue que la caution tout comme la constitution de sûreté personnelle ne sont

réellement mises en œuvre que pour les affaires financières. Il conviendrait peut-être

d’envisager une réforme pour utiliser davantage ces moyens en droit commun.

Évidemment, si un protagoniste mis en examen a réglé une caution importante, ou si

sa maison est hypothéquée, il est peu probable qu’il parte en cavale au risque de tout perdre.

Si la justice craint d’éventuelles fuites, le contrôle judiciaire est quant à lui bien plus

protecteur instaurant l’interdiction de quitter le territoire, l’obligation de pointer, l’interdiction

de contacter certaines personnes au risque de pressions. Il pourrait presque aboutir aux mêmes

avantages que la détention provisoire en évitant les impacts qu’elle crée dans la vie de celui

                                                                                                               118 Hervé de Charrette, Grand débat national sur la justice, après Outreau quelle réforme de la justice pénale?, Ed. l’Harmattan 2006

Page 97: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  92  

qui la subit. Pourquoi n’est-il donc pas plus souvent utilisé ? Le bracelet électronique issu des

hautes technologies peut également être utilisé afin d’éliminer l’usage de la détention

provisoire. La réforme doit insister d’autant plus sur l’obligation d’utiliser ces méthodes pour

ne voir appliquer la détention que dans les cas les plus graves.

Si une réforme aboutissait sur cette idée, il serait essentiel que la détention provisoire

prévue dans les cas exceptionnels soit limitée dans le temps pour éviter tous les dégâts.

Aujourd’hui, en matière criminelle la prolongation de cette détention provisoire est

envisageable dans un délai d’un an. Il en ressort qu’aucun nouveau débat n’aura lieu sur ce

sujet avant 1 an sauf si des demandes de mise en liberté sont faites par l’avocat. En

matière correctionnelle, ce délai est de 4 mois. Ces délais sont beaucoup trop longs quand on

sait que les demandes de mise en liberté n’aboutissent pas toujours à une réponse favorable

comme ce fut le cas dans l’affaire Outreau. Des suicides ont déjà eu lieu en raison de ce type

de fonctionnement.119 Le rapport Léger propose une réforme instaurant la réduction de la

durée de détention avant procès soit l’enquête jusqu’à l’audience ; cette durée est portée à 1

an pour des peines encourues supérieures à 3 ans et égales ou inférieures à 10 ans, elle

s’élève à 2 ans en matière criminelle et à 3 ans pour les matières criminelles faisant l’objet de

terrorisme. Agir plus vite est grandement utile pour éviter les erreurs judiciaires.

B) L’enrichissement budgétaire de la justice garant d’un bon

fonctionnement.

La rapidité d’action de la justice peut avoir pour conséquence la réduction d’erreur

judiciaire. Cependant le système français fait durer l’étude des dossiers, ce qui n’est pas sans

conséquence. Ce constat impose d’entreprendre une certaine réflexion à ce sujet. (1) La

justice avec son arsenal de tribunaux, de services, d’agents, de technologies nouvelles, tous

nécessaires à l’élaboration de la vérité judiciaire implique qu’elle soit dotée d’un énorme

budget pour éviter les erreurs. (2)

1- Une meilleure réactivité de la justice.

La justice n’entraîne pas toujours satisfaction de la population, qui bien trop souvent,

hésite à engager des poursuites en raison du temps excessif qu’elle met pour établir la vérité et                                                                                                                119 Laurent Delahousse,france tv info, 13 h15 le dimanche 7 août. Eric Dupont-Moretti : Parole à la défense

Page 98: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  93  

rendre une décision. Bien que ce constat a pour conséquence pour la justice la perte de

crédibilité auprès de ces citoyens, ce système est surtout susceptible d’engendrer des erreurs

judiciaires. Des réformes devraient donc être conçues pour que le système judiciaire Français

soit plus rapide.

Pourquoi pas par le biais de la création d’un délai maximum dans lequel la justice

devrait être rendue mais cette hypothèse semble compliquée à envisager étant donné que toute

affaire n’est pas dotée de la même complexité. Il est plus facile d’entreprendre la mise en

œuvre des différents délais pour chaque phase du procès pénal. Un délai pourrait être

envisagé dans un premier temps durant l’enquête tout en sachant que si l’on permettait

l’intervention de l’avocat dès l’enquête préliminaire, comme on a pu l’évoquer auparavant,

les enquêtes seraient peut être bouclées plus rapidement. La durée de l’instruction est très

excessive d’après l’étude des causes des erreurs judiciaires et peut générer des changements

de versions volontaires par le biais de pressions, ou involontaires par la perte de mémoire des

témoins. C’est la raison pour laquelle ce délai doit être projeté aussi au niveau de

l’instruction, plus on agit vite, moins on risque la disparition de preuves qui pourraient établir

la vérité.

Si un délai maximum paraît essentiel pour rendre une justice exempte de toute erreur,

il convient aussi de prévoir un délai minimum pour prévenir l’éventuelle négligence de

l’enquête ou de l’instruction.

La France est malheureusement très lente en tout point. Elle intervient très tardivement

concernant la prolongation de la détention provisoire par rapport à d’autres pays tels que la

Belgique qui se penche sur cette question dans un délai d’un mois, permettant donc de ré-

ouvrir les débats de la détention et chasser toutes les erreurs plus rapidement que la France.

La Belgique agit également plus rapidement en offrant au détenu la possibilité de réclamer sa

comparution en audience publique quand sa détention excède un délai de 6 mois (1 an si la

peine applicable dépasse 15 ans de travaux forcés) .120 La réforme suscitant une accélération

dans l’intervention de la justice peut donc être bénéfique mais elle n’est possible qu’avec

d’importants moyens budgétaires.

                                                                                                               120 https://www.senat.fr/lc/lc16/lc16_mono.html#toc22.

Page 99: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  94  

2- La nécessité de moyens supplémentaires.

La justice est une institution judiciaire gigantesque implantée sur 6 085 241 m2 en

2015, qui emploie 78 941 agents et ayant rendu 1 203 339 décisions en matière pénale en

2014121 c’est dire l’importance qu’elle génère. La justice est dotée de nombreux agents, de

nombreux services qui gravitent autour d’elle, il est donc indéniable qu’elle est très coûteuse.

En 2015, elle a bénéficié d’un budget de 7, 94 milliards d’€uros qui se révèle insuffisant, 122

se traduisant par un impact sur son fonctionnement pouvant avoir pour conséquence

l’apparition d’une erreur judiciaire.

Il a pu être observé lors de l’étude de causes des erreurs judiciaires, la durée excessive

de l’instruction. Néanmoins, une étude approfondie des raisons de cette durée excessive

démontre un nombre insuffisant de magistrats par rapport au nombre d’affaires nouvelles

chiffrées en 2014 à 18 588 ou au nombre de mises en examen chiffrées à 33 300. Afin de

pallier à ce problème, il faudrait augmenter le nombre de magistrats, ce qui implique

l’obtention de moyens supplémentaires. Il conviendrait donc d’augmenter considérablement

le budget de la Justice.

Ce constat est le même concernant la rapidité de l’enquête évoquée dans les

paragraphes précédents. Il est nécessaire d’employer plus d’agents, de policiers pour répondre

au problème du recours systématique à la détention provisoire, conséquente en cas d’erreur

judiciaire.

Il a été discuté dernièrement d’utiliser le plus souvent le contrôle judiciaire ainsi que

le bracelet électronique. Toutefois, l’un impose un nombre inconsidérable d’agents, l’autre

demande des sommes astronomiques en raison du coût des hautes technologies.

De surcroît, l’augmentation du budget pourrait diminuer le nombre d’erreurs

judiciaires puisque les avocats seraient mieux rémunérés plus dans le cadre de leurs

interventions sous l’Aide Juridictionnelle ; plus l’avocat est bien rémunéré, plus il passe du

temps sur le dossier et plus il est susceptible de trouver des erreurs.

                                                                                                               121 Annexe N° 3, P.107, Les chiffres clés de la Justice 2015 . 122 http://www.justice.gouv.fr/budget-et-statistiques-10054/chiffres-cles-de-la-justice-10303/

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  95  

La Justice, pour être rendue convenablement a besoin de nombreux moyens. Il semble

que le Ministère de la Justice commence à faire un effort dans ce sens même si le budget

alloué en 2016 reste faible, il a été augmenté à 8, 04 milliards d’Euros. 80 280 emplois sont

déjà pourvus et il est prévu la création de 1 024 postes en 2016.123

                                                                                                               123 http://www.justice.gouv.fr/publication/budget_justice_2016.pdf

Page 101: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  96  

SECTION II :

L’amélioration des réparations de l’erreur judiciaire.

L’espoir est grand de voir disparaître définitivement les erreurs judiciaires du système

Français avec l’évolution des garde-fous. Bien que des réformes aient lieu pour perfectionner

l’organisation judiciaire, aucune ne pourra rendre l’homme infaillible. En raison de cette

faillibilité de l’homme, il est donc fondamental de parer les solutions de l’erreur judiciaire. Si

le recours en révision, et l’indemnisation doivent faire l’objet d’une nette amélioration

(Paragraphe 1), la prévention et une véritable répression des magistrats doivent voir le

jour.(Paragraphe 2)

Paragraphe 1 : L’élargissement des recours en révision et de l’indemnisation.

La révision (A) tout comme l’indemnisation (B) présentent de nombreux défauts

auxquels il semble intéressant de s’attarder et d’y réfléchir.

A) Une réforme du recours en révision ajustée.

Le recours en révision, bien qu’il ait évolué est encore critiquable. Les cas d’ouverture

trop stricte permettent rarement d’y accéder. Une réforme doit donc voir le jour pour

envisager un accès moins contraignant (1) tout en prenant garde aux éventuels méfaits d’une

ouverture trop large. (2)

1- L’extension des cas d’ouverture.

La révision, recours existant depuis un temps très lointain, n’était exploitée que par un

nombre restreint de personnes. La loi du 23 juin 1989 votée dans le contexte de l’affaire

Seznec a élargi la possibilité d’y accéder si « après une condamnation vient à se produire ou à

se révéler un fait nouveau ou un élément inconnu de juridiction au jour du procès, de nature à

faire naître un doute sur la culpabilité du condamné » ; mais, il s’avère que ce recours reste

difficile d’accès. Ainsi Roland Agret accusé à tort en 1970 du meurtre de deux hommes, a

confié cette difficulté dans un article de Vincent Vantighem, publié le 6 mars 2013 dans le

quotidien 20 minutes. « Si cet élément est nouveau pour vous, il ne l’est pas pour la

Page 102: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  97  

justice ».124 Il a toujours crié son innocence, a même entamé des grèves de la faim, s’est

mutilé jusqu’à ses deux doigts envoyés au Garde des Sceaux.125 Est-ce le dessein d’une

justice convenable ?

Quand on s’attarde sur les statistiques, on s’aperçoit malheureusement que la révision

est inaccessible ; en 2011, la Commission a été saisie de cent vingt quatre requêtes, ce qui met

en exergue qu’un grand nombre de détenus ou coupables forment des demandes de révision.

La Commission ainsi que son Président se sont prononcés sur cent soixante demandes. Les

cent trente cinq décisions rendues collégialement se répartissent en quatre vingt seize

décisions d’irrecevabilité, un désistement, trente six rejets et deux transmissions à la Cour de

Révision. Force est de constater le nombre dérisoire de décisions faisant l’objet de révision.

En outre, ce résultat lamentable se retrouve chaque année de 2002 à 2011, le nombre de

saisines de la Cour de Révision varie entre deux et quatre sauf en 2006 où l’on observe une

certaine hausse faisant grimper le nombre de saisines à huit.126

Il est incontestablement primordial de réfléchir à une réforme augmentant la

possibilité de révision. Cette idée est loin d’être frivole quand on analyse le nombre d’erreurs

dans le système judiciaire Français. Bien que la Commission Nationale Consultative des

Droits de l’Homme, dans son avis sur la révision des condamnations en cas d’erreurs

judiciaires, avait pensé à élargir la liste des personnes prévues pouvant demander la révision

en raison des évolutions juridiques et sociologiques de la famille en l’accordant au pacsé ou

conjoint, elle n’envisageait pas d’élargir un peu plus les cas d’ouverture.127 Cette solution

semble pourtant essentielle.

2- Les effets néfastes d’un accès excessif à la révision.

Si une réforme s’avère propice, elle doit faire l’objet d’une réflexion poussée. Elle

pourrait éviter que des innocents passent une grande partie de leur vie en prison en raison

                                                                                                               124 Annexe N°4 P. 112, Article de Roland Agret victime d’une erreur judiciaire évoquant la difficulté d’accéder au recours en révision. 125 Nathalie Renoux Reportage accusé à tort, l’innocence à tout prix : affaire Roland Agret, , épisode 4 culture infos / France 2010. 126 Annexe N°5 P.114, Les statistiques de la Commission de la Révision et de la Chambre Criminelle statuant comme Cour de Révision. 127 Avis sur la révision des condamnations pénales de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme-Assemblée Plénière -13 fév 2014.

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  98  

d’une erreur et perdent ce qu’ils ont mis du temps à construire, si elle n’apporte pas de limite,

elle peut entraîner des effets néfastes.

Premièrement, cette réforme ne doit pas être ouverte à tous. Elle viendrait remettre en

cause le principe de l’autorité de choses jugées qui pour rappel est la situation qui se réalise

quand toutes les voies de recours ont été épuisées ou les délais pour les exercer écoulés ; la

décision juridictionnelle est alors définitive. C’est la raison pour laquelle, les États Unis,

contrairement à la France, n’envisagent pas la révision mais utilisent la grâce pour réparer les

erreurs.

Une réforme, augmentant trop le nombre de cas d’ouvertures à la révision, pourrait

entraîner des contestations systématiques des détenus ; il serait difficile de dissocier ceux qui

souhaitent la révision, mécontents de subir une punition pour l’infraction qu’ils ont commise,

de ceux qui sont accusés à tort. Cette réforme doit être réfléchie, en prenant en compte la

victime. Dans les demandes de révision, il y a peut-être des innocents mais aussi peut-être des

coupables. Il faut penser aux vraies victimes qui pourraient être choquées de voir leurs

paroles remises en doute si facilement. Il en ressort que cette réforme se doit de trouver un

juste milieu pour éviter que le recours ne soit trop rare.

B) Un système d’indemnisation propice aux victimes d’erreur judiciaire.

La victime d’erreur judiciaire, bien qu’elle ait déjà subi une erreur de la justice qui

n’aurait jamais dû avoir lieu, elle se doit d’attendre son indemnisation dont la procédure est

trop longue et impose trop de conditions. Une réforme doit être pensée pour faciliter

l’indemnisation (1) qui se doit d’élargir ses cas d’ouverture. (2)

1- L’accélération du processus d’indemnisation.

L’indemnisation des victimes des erreurs judiciaires n’est possible que pour les

condamnés à tort ayant subi une détention provisoire. Néanmoins, de nombreuses conditions

sont requises pour y parvenir et la procédure est longue. Les difficultés pour y parvenir sont

bien illustrées dans « dans le calvaire et le pardon » coécrit par Loïc Sécher, victime d’erreur

judiciaire et Maître Eric Dupont-Moretti qui explique que lorsqu’il a écrit au Garde des

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  99  

Sceaux pour demander directement l’indemnisation de Loïc Sécher, dans le but d’éviter une

trop longue procédure, il a essuyé un refus.

Il est scandaleux que la Justice responsable du problème impose à nouveau à la

victime d’erreur judiciaire des conditions et une procédure longues avant d’être indemnisée.

L’attente inacceptable est difficile pour ces victimes d’erreur judiciaire qui sortent de prison

souvent démunies de biens et qui doivent patienter pour obtenir une indemnisation nécessaire

à leur reconstruction quand on sait qu’ils ont déjà perdu assez de temps en incarcération sans

raison. Cette procédure d’indemnisation ne devrait-elle pas faire l’objet d’une réforme pour

en faciliter l’accès aux victimes d’erreurs judiciaires ? Telle est la question.

Il conviendrait peut-être de s’attarder également sur le caractère dérisoire de cette

indemnisation qui même si elle était élevée, ne remplacerait ni le temps perdu ni le mal crée ;

toutefois équivalente à l’erreur subie, elle serait plus juste et permettrait au protagoniste de

reconstruire plus facilement sa vie. Une chose est sûre, elle devrait être ouverte dès qu’une

erreur judiciaire a été supportée, peu importe, que la victime ait été incarcérée.

2- L’élargissement du bénéfice de l’indemnisation.

Si l’erreur judiciaire doit être indemnisée, c’est en raison des graves désagréments

causés à la victime. Actuellement, seules les détentions sont indemnisables car la privation de

liberté de travail a pu faire perdre certainement tous les biens du protagoniste, mais d’autres

moyens utilisés par la Justice peuvent causer des contrariétés à la victime qui pourrait de ce

fait réclamer une indemnisation. En effet, il arrive qu’au lieu d’être mis en détention

provisoire le juge opte plutôt pour le contrôle judiciaire. Celui-ci ne fait aucunement l’objet

d’indemnisation en cas d’erreur judiciaire.

Une personne qui serait reconnue, après plusieurs décisions de culpabilité, non

coupable ne pourrait réclamer un dédommagement en raison de sa soumission à un contrôle

judiciaire. Pourtant ce contrôle judiciaire ne cause-t-il pas une certaine atteinte à sa liberté et

donc des conséquences sur son mode de vie ? Quelle différence y a-t-il avec l’incarcération si

ce n’est le degré d’atteinte à la liberté ?

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  100  

La victime d’erreur judiciaire devrait bénéficier d’une indemnisation quand elle a été

contrainte de respecter un contrôle judiciaire entraînant pour rappel l’obligation de pointer

dans un commissariat plusieurs fois dans la semaine, l’interdiction de quitter le territoire, de

paraître dans certaines communes et de rencontrer certaines personnes. Toutes ces

obligations ont eu pour conséquence l’atteinte à la liberté du citoyen qui n’a pu mener sa vie

comme il le souhaitait pendant un laps de temps alors même qu’il n’avait rien fait. Il ressort

de ce constat qu’il est honteux de ne pas indemniser ce type de situation surtout que dans ces

hypothèses, l’honneur de cet homme a forcément été touché tout comme l’honneur d’une

personne poursuivie qui bénéficie quelques jours ou mois plus tard d’un non lieu. Cet homme

poursuivi, bien qu’il ait été rapidement dégagé de tout soupçon, a été tout de même pendant

une durée plus ou moins longue considéré comme un éventuel coupable. Cette erreur n’est

pas non plus réparée. L’unique indemnisation des détentions n’est guère suffisante.

L’indemnisation pourrait tout simplement disparaître si on développe une certaine prévention

des différentes erreurs.

Paragraphe 2 : La prévention et la répression sources d’éradication des erreurs

judiciaires.

L’erreur judiciaire est susceptible de disparaître pour ne devenir qu’une exception si

on envisage de régler le problème avant qu’il n’apparaisse, tout en envisageant de véritables

sanctions quand il est trop tard. Si une réforme développant une prévention peut être

nécessaire pour diminuer l’erreur judiciaire (A), cet objectif peut être atteint plus facilement

en augmentant la répression des magistrats. (B)

A) La prévention.

En France, il est régulièrement présenté comme réponse aux erreurs judiciaires la

sanction du juge incompétent et non la prévention des mauvaises décisions. Pourtant, prohiber

l’erreur sous la menace de la sanction, n’évite en rien un accident. Le meilleur moyen est de

rendre improbable ou sans conséquence l’accident. La prévention de l’erreur judiciaire semble

être nécessaire. Développer cette prévention au mépris de la répression des

dysfonctionnements résonne comme une révolution puisque aujourd’hui c’est le système

inverse qui est mis en œuvre, le juge ne voyant jamais sa responsabilité engagée. Les

canadiens procèdent déjà de cette manière. Postérieurement à de nombreuses affaires

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  101  

retentissantes, ils ont examiné ce qui ne fonctionnait pas dans leur système, par le biais d’un

comité de réflexions composé de procureurs pendant une durée de 2 ans environ.128

Il y a un intérêt à ce que tous les intervenants de la Justice réfléchissent ensemble pour

prévenir les condamnations injustifiées. Si la prévention paraît être un moyen intéressant pour

pallier aux erreurs judiciaires, comment pourrait-elle être organisée ? La réponse n’est guère

compliquée à trouver si l’on s’inspire du modèle aérien et médical. En effet au sein du

système aérien, des techniques de prévention des défaillances systémiques sont mises en

place. M. P-H Goungen Directeur Général d’Air France explique que « Si la faute non

intentionnelle combinée avec diverses circonstances provoque un accident, la sanction des

auteurs ne permet pas d’éviter l’accident. Au contraire, c’est le rassemblement d’informations

relatives à l’erreur produite qui permet d’éviter un autre accident basé sur les mêmes

facteurs ». 129 C’est la raison pour laquelle le système aérien prévoit des commissions

d’enquêtes après les accidents pour évoquer avec les pilotes concernés ce qui s’est passé.

Durant cette commission, il en résulte un vrai débat contradictoire qui est le meilleur moyen

de prévention.

Dans le système judiciaire, ce qui permettrait d’éviter des erreurs, c’est le retour

systématique d’expériences mais aussi des bureaux d’enquêtes d’accidents judiciaires ouvrant

« les boites noires de nos tribunaux » afin d’éviter les dérapages, car il serait capable de nous

informer sur le fonctionnement du système. Il conviendrait d’être apte à déceler les facteurs

potentiels de risques qui peuvent être le déséquilibre des parties, l’urgence etc. Jusqu’à ce

paragraphe, dans ce chapitre, il n’avait été évoqué que des réformes de la procédure pénale

pour certaines offrant plus de garanties, de recours aux justiciables et de meilleures

indemnisations. S’il semble que la prévention n’est pas inutile pour éviter l’erreur judiciaire

elle peut être également mise en œuvre en développant chez le magistrat, la culture du doute

et la prudence dans l’analyse. « Le magistrat est payé pour avoir des doutes lorsque tout le

monde a des certitudes ». Quand il ne respecte pas sa mission, il devrait tout de même être

sanctionné.

                                                                                                               128 Annexe N° 6, P. 116, Rapport sur la prévention des erreurs judiciaires du groupe de travail du comité FPT des chefs des poursuites pénales canadiens. 129 Les cahiers de la justice-la prévention des Erreurs Judiciaires. Ed Dalloz-enm-2008.

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  102  

B) L’instauration d’une véritable répression des magistrats.

Il fut un temps où des débats récurrents avaient lieu sur la responsabilité personnelle

des magistrats. Ces débats s’orientaient vers une mise en cause plus fréquente de cette

responsabilité. Lors de l’étude des moyens de répressions, il a été observé que cette

responsabilité était moindre voire absente. L’irresponsabilité partielle du magistrat est liée à

son statut qui lui assure une protection fonctionnelle. Cette absence de responsabilité des

magistrats est critiquable.

Malgré que la prévention paraisse plus bénéfique dans le combat sur l’erreur en évitant

l’accident, la sanction du magistrat n’est pas totalement désuète de sens. La définition de la

répression, action d’exercer des contraintes graves sur quelqu’un ou un groupe afin

d’empêcher le développement d’un désordre, met en exergue que la répression du magistrat

pourrait également éviter l’accident. Un magistrat, connaissant les risques qu’il encourt en cas

d’erreur, exercera sa mission du mieux possible. Il mettra tous les moyens en œuvre pour

établir la vérité. Cependant, actuellement le magistrat sait qu’il est presque intouchable.

Partout dans le monde, les différents pays ont érigé des règles accompagnées de sanctions

pour éviter que ce soit l’anarchie mais aussi éviter la délinquance. En suscitant la peur auprès

de la population par le biais de sanctions, les citoyens ne passent pas à l’acte. La situation se

trouve être la même pour les magistrats en imposant des répressions en cas d’erreurs. Le juge

ne va pas négliger sa mission. D’ailleurs toute personne exerçant un métier est susceptible de

voir engager sa responsabilité. Pourquoi n’est-ce jamais le cas du magistrat ? Les

conséquences de sa négligence sont parfois bien plus graves que pour d’autres métiers

exceptés ceux du monde médical.

Toutefois le magistrat ne doit pas non plus être la cible à abattre à chaque fois qu’une

erreur judiciaire se produit d’autant plus qu’elle est souvent induite par les différentes phases

du Procès Pénal. La répression doit donc avoir lieu dans les situations où le magistrat est en

grande partie responsable. Il convient une fois de plus de trouver un juste milieu et de surtout

réfléchir aux problèmes de l’atteinte à l’indépendance du magistrat en cas d’engagement de sa

responsabilité.

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  103  

CONCLUSION

« Les seules vraies erreurs sont celles que

nous commettons à répétition.

Les autres sont des occasions d’apprentissage »

Le Dalaï Lama.

Dans l’objectif d’atteindre une justice idéalement parfaite, le système judiciaire

français doit apprendre de ses erreurs. Il est primordial d’analyser les défaillances,

comprendre les raisons pour lesquelles la Justice n’est pas parvenue à la vérité afin

d’éradiquer un maximum d’erreurs judiciaires. Cette étude poussée des erreurs doit être un

perpétuel recommencement. A chaque analyse, des réformes pourront être réfléchies dans le

but de faire disparaître la problématique constatée. Il serait même judicieux de s’inspirer des

systèmes judiciaires des pays voisins qui parviennent plus facilement à la vérité.

« Errare humanum est »

« L’erreur est humaine »

Sénèque.

Hélas, l’homme est un être humain doté de sentiments qui le rend faillible. Toute la

problématique de la justice repose sur le fait qu’il intervient constamment que ce soit pour

juger, procéder à des investigations ou témoigner. L’homme est indéniablement la plus grande

source d’erreurs judiciaires. Malheureusement, aucune réforme ne pourrait corriger ses

défauts, prêt à mentir par amour, par vengeance, par passion ou par colère. L’erreur judiciaire

est donc vouée à persister dans notre système judiciaire. Ce constat est difficile à accepter

pour les victimes d’erreurs judiciaires qui subissent des conséquences importantes. C’est la

raison pour laquelle la réparation doit être irréprochable.

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  104  

« Le pardon est plus grand qu’un sentiment,

C’est une force qui déclenche d’admirables effets »

Auclair Marcel.

Certains actes dont l’erreur judiciaire paraissent impardonnables, pourtant sans nier

le mal qui a été fait, il est vital de se reconstruire et la démarche du pardon est la clé de la

guérison. Les victimes d’erreurs judiciaires pourraient envisager le pardon afin de délester le

passé et construire le présent. De toute évidence, la réparation de l’erreur ne permettant pas de

revenir en arrière, les victimes n’ont que deux solutions : vivre avec cette erreur ou pardonner

et oublier pour croquer à nouveau la vie à pleines dents. Ces individus ne doivent pas oublier

qu’ils sont eux-mêmes humains et donc susceptibles de provoquer des erreurs. Ce pardon

reste cependant un acte qui suppose un cheminement intérieur, long, exigeant, difficile à

vouloir et dur à parcourir. Néanmoins, celui-ci est possible, Loïc Sécher l’a démontré en

pardonnant à cette jeune fille qui l’avait accusé de viol à tort durant 8 ans. Quelle grande et

sage décision !

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  105  

ANNEXES

Annexe N° 1 : Le rapport Delmas Martys de 1991

de la commission justice pénale et droits de l’homme.

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  106  

Annexe N° 2 : Article de presse dans le journal Libération

de Pierre Truche

concernant l’éventuelle suppression du Juge d’Instruction

Pierre Truche ne veut plus de juges d'instruction. — 28 juin 1999 à 23:04

Le président de la Cour de cassation, Pierre Truche, «espère bien»que le juge d'instruction disparaîtra à terme car, pour lui, «il n'est pas sain d'instruire et de juger en même temps». Dans une interview à paraître aujourd'hui dans le Figaro, Pierre Truche estime qu'«il faudrait confier l'enquête à un procureur, avec, en face, un vrai juge désigné par le Conseil supérieur de la magistrature», qui interviendrait «dès qu'un droit fondamental serait en cause, et fixerait des délais au procureur». Pierre Truche doit être remplacé le 1er juillet par le président de la Cour d'appel de Paris, Guy Canivet.

 

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  107  

Annexe N° 3 : Les chiffres clés de la Justice 2015

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  108  

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  109  

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  111  

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  112  

Annexe N° 4 : Article de Roland Agret , victime d’une

erreur judiciaire évoquant la difficulté d’accéder

au recours en révision

• ACCUEIL > • SOCIÉTÉ

Roland Agret: «C'est à force de cogner qu'on obtient justice...» ENTRETIEN – Victime d’une erreur judiciaire, Roland Agret a passé sept ans en prison avant d’obtenir la révision de son procès…

Roland Agret lors de l'émission Vivement Dimanche, sur France 2, le 12 septembre 2007 - BENAROCH/SIPA Propos recueillis par Vincent Vantighem o Publié le 06.03.2013 à 00:00 o Mis à jour le 07.03.2013 à 06:53

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  113  

Que pensez-vous du Projet Innocence à la française? Plus il y a de gens qui bossent sur les erreurs judiciaires, mieux c’est. Mais ils vont se heurter aux mêmes problèmes auxquels je me suis heurté. Condamné à tort, vous avez fait une grève de la faim, vous vous êtes coupés deux doigts, vous avez avalé des manches de fourchette. Et une fois dehors, vous vous êtes tirés une balle dans le pied pour être indemnisé. C’est si difficile que ça d’obtenir justice? C’est à force de cogner qu’on obtient justice. Le problème de la justice française, c’est ce qu’on appelle l’élément nouveau. Pour obtenir la révision d’un procès, il faut trouver un élément nouveau qui n’a pas été abordé lors du procès qui a conduit à votre condamnation. Mais souvent si cet élément est nouveau pour vous, il ne l’est pas pour la justice. Avant la naissance du Projet Innocence, vous avez fondé Action Justice qui aide aussi les condamnés à tort. Comment cela fonctionne-t-il? On recherche la vérité dans les vieux dossiers. Parfois, on se met hors des passages cloutés pour trouver de nouveaux éléments. Attention, rien d’illégal, hein. Mais des choses qui ne sont pas vraiment prévues par la loi. On est devenus les spécialistes du milieu des emmerdeurs. Quel bilan en tirez-vous? On a réussi à faire avancer entre 12 et 15% des dossiers qui nous ont été soumis. On a obtenu quatre grâces, une révision, deux annulations de peine et dix-huit acquittements. Si l’on voit le bon côté des choses, on peut dire que c’est pas mal. Si l’on voit le mauvais, on peut se dire qu’il y a encore du travail.  

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  114  

Annexe N° 5 : Les statistiques de la Commission de la

Révision et de la Chambre Criminelle statuant comme

Cour de Révision

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  115  

Page 121: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  116  

Annexe N° 6 : Rapport sur la prévention des erreurs

judiciaires

du groupe de travail du comité FPT des chefs des

poursuites pénales canadiens.

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  117  

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  119  

Page 125: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  120  

BIBLIOGRAPHIE

I /Code :

- Coralie Ambroise-Castérot et Jean-François Renucci, Code de Procédure Pénale,

Dalloz, 57ème édition, 2016.

II /Convention,Ordonnance, Lois , rapport de commission d’enquête…….. :

- Convention relative aux droits de l’enfant, New York, 26 janvier 1990, préambule

- Eusèbe de Laurière, Emmanuel Pastoret, Denis-François Secousse, Louis Guillaume

de Vilevault, ordonnances des roys de France de la troisième race, recueillies par ordre

chronologique… : Les ordonnances de Charles V, données depuis le commencement

de l’année 1367, jusqu’à la fin de l’année 1373, de l’imprimerie royale, 1736.

- Loi n°2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption

d’innocence et les droits des victimes.

- Loi n°2013-711 du 5 aout 2013 portant diverses dispositions d’adaptation dans le

domaine de la justice en application du droit de l Union européenne et des

engagements internationaux de la France.

- Loi n°70-643 du 17 juillet 1970 tendant à renforcer la garantie des droits individuels

des citoyens.

- Avis sur la révision des condamnations pénales de la Commission Nationale

Consultative des Droits de l’Homme-Assemblée Plénière -13 fév 2014.

- Président Mr André Vallini, Rapporter Mr Philippe Houillon, député, Rapport fait au

nom de la commission d’enquête chargée de rechercher les dysfonctionnements de la

justice dans l’affaire dite d’Outreau et de formuler des propositions pour éviter leur

renouvellement, enregistré à la présidence de l’Assemblée Nationale le 6 juin 2006.

Page 126: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  121  

III /Ouvrages :

- Gérard Cornu, vocabulaire juridique, 10ème Ed, Quadrige, janvier 2014.

- Eliane de Valicourt, L’Erreur Judiciaire, Ed. L’Harmattan, 2005.

- Florence Bussy, Recueil Dalloz l’erreur judicaire, D2005-2552

- Bernard Bouloc et Haritini Matsopoulou, Droit pénal général et procédure pénale,

Sirey 17éme Ed, 2009.

- Hervé Henrion, doctorant – E.R.P.C à l’université de Montpellier I. Ouvrage archive

de politique criminelle, l’article préliminaire du code de procédure pénale : vers une

« théorie législative » du procès pénal ?, 2001/1 (n°23), P192, Ed. A.Pédone.

- Johan Dechepy-Tellier, la procédure pénale en schémas, Ed .Ellipses, 2015.

- Michel Redon, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, tribunal correctionnel

–juin 2012 (actualisation octobre 2015).

- Aurélie Cappello, Répertoire de droit pénale et de procédure pénal, Question

prioritaire de constitutionnalité –Juin 2015.

- Maud Léna, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Jugement- octobre 2008

(actualisation Octobre 2013).

- Hervé Charrette , ancien ministre des affaires étrangères –député de Maine et Loire –

Président de la Convention Démocrate- Perspectives et Réalités, Grand débat national

sur la justice- après Outreau quelle réforme de la justice pénale ?, Ed. l Harmattan

2006.

- Maurice Lailler, Les erreurs judiciaires et leurs causes, Ed Hachette Livre, Ed. 1897.

- Gilles Antonowicz, La faiblesse des hommes, Ed Max Milo, 2013.

- Emile Zola, l’affaire Dreyfus la vérité en marche. Ed. Flammarion, 25 janvier 1994.

- Annie Ragnaud –Sabourin, Les grandes erreurs judiciaires de France, Ed. De Barée,

2014, p 298.

- Alain Marécaux, Chronique de mon erreur judiciaire, Ed. Flammarion, 28 août 2011.

- Jacques Vergès, Les Erreurs Judiciaires, que sais je ? , Ed. Puf, 2éme Edition 2015.

- Loic Sécher et Éric Dupond Moretti, Le calvaire et le pardon, Les ravages d’une

Erreur Judiciaire revue et corrigée, Ed. Michel Lafon, 2013.

- Victor Hugo, Le Pape, poème, 29 Avr. 1878.

- Les cahiers de la justice-la prévention des Erreurs Judiciaires. Ed Dalloz-enm-2008.

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- Jean Louis Gallet – Répertoire de la responsabilité de la puissance publique,-régime

législatif spéciaux d’indemnisation relevant de la Juridiction judiciaire-fév 2008.

Actualisation avril 2016.

- Serge Petit, Répertoire de la Responsabilité de la puissance publique, Service public

de la justice, Juin 2012, actualisation Avril 2016.

- Geneviève Casile-Hugues, répertoire de droit pénal et de procédure pénale, section 2

abus d’autorité, oct. 2013, actualisation janv. 2014.

- Christine Gavalda-Moulenat, comment renforcer le contradictoire dans le procès,

Archives de politique criminelle, Ed A.Pédone, 2007/1 (n °29)

- Dominique Inchauspé- l’Erreur Judiciaire, Ed.Puf-sept 2010, p 495.

- Frédéric Desportes et Laurence Lazerges- Cousquer, Traité de Procédure Pénale, 4

ème Ed, 2015, Editeur Economica

- Roger Merles et André. Vittu, traité de droit criminel, procédure pénale, 01/2000 Ed

Cujas.

- Coralie Ambrois Casterot, Agrégée des Facultés de droit, Membre du Haut Conseil de

la Magistrature de Monaco, Répertoire de droit pénal et de procédure pénale, Octobre

2013.

IV /Article :

- L’Eclair du 3 juin 1891, « Quelques-uns de nos confrères sont trop modestes, ne se

rendent pas assez compte de l’influence de la presse sur les verdicts rendus. Pendant

des mois, « elle chauffe » l’opinion, dramatise l’affaire, prive inconsciemment le

prévenu, par un mot cruel, un détail répugnant, des vagues sympathies qui pouvaient

décider de son sort….Qui dira jamais la pression subie par le cerveau d’un bon juré,

lisant le matin dans sa feuille que toute compassion lui serait imputée à faiblesse ; que

l’opinion exige de lui un implacable arrêt ? etc »

Page 128: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  123  

V/Revues :

- Christine Lazerges, réflexion sur l’Erreur Judiciaire, RCS 2006.

- Etienne Vergés, Professeur à l’université de Grenoble, membre de l’Institut

Universitaire de France, revue mensuelle lexisnexis, Juris classeur, juillet / aout 2014.

- Bernard Bouloc, Professeur à l’Université Panthéon-Sorbonne (Paris-1), RCS, 2002,

p 138, le droit d’être jugé dans un délai raisonnable : loi du 15 juin 2000.

- Denis Salas, magistrat, secrétaire général de l’Association Française pour l’histoire de

la justice et Directeur scientifique des cahiers de la justice, le nouvel âge de l’Erreur

Judiciaire, revue Française d’administration publique, 2008, Ed école nationale

d’administration.

- Marie-Anne Frison-Roche, Professeur à l’Univ Paris Dauphiné,l’erreur du Juge RTD

Civ, 2001-819.

VI /Site internet :

- http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/peinedemort/

- Justice.gouv.fr/histoire-et-patrimoine-10050/les-symboles-de-la-justice-21974.html

- http://www.maitre-eolas.fr/post/2009/01/23/1293-de-l-enquete-preliminaire-et des

droits-de-la-défense-un-cas-pratique.

- www.lepetitjuriste.fr/droit-penal/procedure-penale/lasuppression-du-juge-instruction-

vers-une-remise-encause-de-l’independance-desjuges/.

- www.dalloz-actualité.fr/chronique/fin-du-college-de-l-instruction-beaucoup-de-bruit-

pour-rien-ou-comedie-des-erreurs1#.V6xu5vSvinM

- https://www.senat.fr/lc/lc16/lc16_mono.html#toc22.

- http://www.justice.gouv.fr/budget-et-statistiques-10054/chiffres-cles-de-la-justice-

10303/

- http://www.justice.gouv.fr/publication/budget_justice_2016.pdf

- http://www.presse.justice.gouv.fr/artpix/1grandesdatesCPCPP.pdf

http://www.justice.gouv.fr/histoire-et-patrimoine-10050/1808-promulgation-du-code-

dinstruction-criminelle-28567.html

Page 129: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  124  

- http://mobile.lemonde.fr/société/article/2014/02/27/révisions-de-proces-les-huit-

erreurs-judiciaires-reconnues-et-les-autres43748713224.html

- http://www.echr.coe.int/Documents/Guide_Art_6_FRA.pdf

- http://www.justice.gouv.fr/organisation-de-la-justice-10031/les-fondements-et-

principes-10032/lindependance-et-la-neutralite-du-juge-12041.html

- http://www.cabinetaci.com/avocat/libertes-fondamentales-avocat/les-droits-de-la-

defense/le-droit-detre-juge-dans-un-delai-raisonnable/

VII / Films, Reportages,

- Christophe Hondelatte, Faite entrer l’accusé, « Patrick Dils, marathon pour un

acquittement » août 2003 sur France 2.

- Frédérique Lantieri Marc Machin, les meurtres du Pont de Neuilly, faite entrer

l’accusé, 22 septembre 2013 sur France 2.

- Christian Faure, Film Marie Besnard : L’empoisonneuse, 2006.

- Gilles Bouleau Journal télévisé de 20 H du 8 août 2016 sur TF1

- Laurent Delahousse , Francetv info, 13 h15 le dimanche 7 août. Eric Dupont-Moretti :

Parole à la défense.

- Nathalie Renoux, Reportage accusé à tort, l’innocence à tout prix : affaire Roland

Agret, épisode 4 culture infos / France 2010.

VIII / Cours

- Monsieur de Carbonnière, Cours histoire de la preuve, , Lille 2, année 2014/2015

- Dr Eric Laurier, Cours de détermination et d’évaluation du préjudice corporel et

moral, médecin légiste au centre hospitalier de Valenciennes, Université de

Valenciennes, Année 2015/2016

Page 130: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  125  

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION………………………………………………...P.1

PREMIÈRE PARTIE : La vérité judiciaire est-elle exempte

d’erreurs ?........................................................................................P.9

Chapitre I : Les garde-fous garants de la vérité judiciaire en matière

pénale…………………………………………………………...……………P.12

Section I : Les principes relatifs à l’organisation judiciaire………………………P.13

§ 1 : Les notions garantissant une bonne administration de la justice...……P.13

A) L’indispensabilité de l’autonomie des acteurs judiciaires………P.13

1) La séparation des fonctions…………………………………P.13

2) Le principe d’indépendance et d’impartialité…...…………..P.15

B) Le fonctionnement des juridictions pénales……………..………P.17

1) Une collégialité professionnelle de magistrats……….……..P.17

2) L’oralité et la publicité de l’audience……………………….P.18

§ 2 : Les recours source de protection des accusés……………………...….P.20

A) Les voies de recours ordinaires…………………………...……..P.20

1) L’opposition………………………………………………...P.20

2) L’appel…………………………………………………..….P.22

B) La voie de recours extraordinaire….……………………………P.24

1) Les conditions de fond permettant l’accès au pourvoi en

cassation……………………………………………… ……P.24

2) La procédure délivrant la vérité judiciaire……… …………P.25

Page 131: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  126  

Section II : Les principes judiciaires liés au procès pénal………………………….P.26

§ 1 : La recherche d’une équité essentielle à la poursuite de la vérité……...P.26

A) La garantie de l’égalité des armes et du contradictoire……….…P.26

1) Le principe du contradictoire……………………………….P.26

2) L’égalité des armes………………………………….………P.28

B) Les pouvoirs suscitant le rééquilibrage des parties……………...P.29

1) Le droit à l’information……………………..………………P.29

2) Le droit à l’assistance d’un avocat……………………...…..P.31

§ 2 : Les principes protecteurs de la personne poursuivie………...………..P.32

A) La protection « même » du suspect……………………………..P.32

1) La présomption d’innocence………………………………..P.32

B) L’équité dans le déroulement du procès………………………...P.34

1) Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable……………...P.34

2) La motivation des décisions………………………………...P.36

Chapitre II : Les causes des erreurs judiciaires…………………….…P.38

Section I : Le facteur humain……………………………………………………..P.39

§ 1 : L’implication de la société, source d’erreurs judiciaires……………...P.39

A) La manipulation des médias………………………………….....P.39

1) L’influence des médias sur les personnes afférentes au

procès……………………………………………………….P.40

2) L’émoi de la population………………………………….…P.41

B) La ferveur de l’opinion publique envers les affaires judiciaires...P.42

1) Les rumeurs génératrices de confusions au sein du procès…P.42

2) Le procès conditionné par les convictions………………….P.43

§ 2 : Les protagonistes du procès, acteurs de l’erreur judiciaire…………....P.44

A) Le témoignage, un mode de preuve réfutable…………………...P.44

1) Les faux témoignages…………………………………...…..P.44

2) L’incrédibilité de la parole de l’enfant influencé…………...P.46

B) L’infiabilité des personnes poursuivies………………………….P.47

Page 132: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  127  

1) Les aveux spontanés…………………………….……..……P.47

2) Les aveux soutirés………………………………….……….P.48

Section II : Les Erreurs liées à l’organisation judicaire……………………….…...P.50

§ 1 : La mauvaise conduite des investigations………………………….…..P.50

A) Les forces de police campées sur leurs positions………….…….P.50

1) La présomption de culpabilité………………………...…….P.50

2) Les pressions policières…………………………………..…P.52

B) La désorganisation de l’instruction……………………………...P.52

1) L’instruction à charge………………………….……………P.53

2) La durée excessive de l’instruction……………………...….P.54

§ 2 : Les inconvénients de l’audience interférant dans la vérité judiciaire…P.55

A) Les experts…………………………………………………...….P.55

1) Une confiance aveugle envers les experts…………….…….P.55

2) La négligence des experts dans leurs missions……………..P.56

B) La négligence de la présomption d’innocence lors de l’audience.P.57

1) L’absence de considération du « doute profite à l’accusé »....P.57

DEUXIÈME PARTIE : Les ripostes mises en place contre

l’erreur judiciaire sont-elles suffisantes ?....................................P.58

Chapitre I : La réparation de l’erreur judiciaire……………………....P.60

Section I : L’émergence de l’erreur judiciaire au travers des différents recours….P.61

§ 1 : Le recours en révision………………………………………………....P.61

A) Les conditions pour accéder à la révision du procés………….....P.61

1) La nécessité d’une décision susceptible de révision………..P.61

2) La restriction des cas de révision………………….………..P.62

B) L’acheminement de la révision aux multiples retentissements….P.64

1) Une procédure stricte…………………………………….…P.64

2) La réhabilitation des victimes d’erreur judiciaire………..…P.65

Page 133: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  128  

§ 2 : Le réexamen d’une décision pénale consécutive au prononcé d’un arrêt de

la Cour Européenne des Droits de l’Homme……………………………………………….P.66

A) La soumission du réexamen à de nombreuses exigences…………...P.66

1) Les conditions de recevabilité des demandes de réexamen….....P.66

2) Les conditions de fond………………………………..………...P.67

B) La bilatéralisation du processus de réexamen…………………….....P.68

1) La procédure suivie devant la commission……..……………....P.68

2) La procédure suivie devant la juridiction de renvoi…………….P.69

Section II : L’Indemnisation au titre de l’erreur………………………………...….P.71

§ 1 : Le dédommagement octroyé à la victime d’erreur judiciaire………....P.71

A) Les modalités de l’indemnisation d’une détention injustifiée…..…..P.71

1) Les conditions de fond du droit à réparation……...…………….P.71

2) La réparation du préjudice…………………..……………...…..P.73

B) Le principe du double degré de juridiction………………..………...P.75

1) La procédure suivie devant le 1er Président de la Cour d’Appel..P.75

2) La procédure suivie devant la Commission Nationale de Réparation

des Détentions………………………………………..…………P.76

§ 2 : La responsabilité des intervenants dans le système judiciaire………...P.77

A) La responsabilité de l’État potentiellement partagée avec les

magistrats………………………………………………………………………P.78

1) La responsabilité de l’État en raison des dysfonctionnements du

service public de la justice……………………………………...P.78

2) L’action récursoire………………………………………….…..P.79

B) La responsabilité des magistrats…………………..……………..….P.80

1) La difficile répression des juges sur le plan disciplinaire…...….P.80

2) La détention arbitraire, sanction pénale imputable aux

magistrats……………………………………………………….P.81

Page 134: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  129  

Chapitre II : Les solutions prospectives pour une vérité judiciaire parfaite....P.83

Section I : Le perfectionnement des garde-fous………………………………….P.84

§ 1 : Le renforcement du principe du contradictoire……………..…………P.84

A) L’intervention de l’avocat dans l’enquête préliminaire……..….P.84

1) L’autorisation des demandes d’investigation…………….…P.84

2) L’accès au dossier dès la garde à vue………...……………..P.86

B) L’éventualité d’une réforme du juge d’instruction……..………P.87

§ 2 : L’accentuation des autres principes favorisant la recherche de la

vérité………………………………………………………………………………………..P.88

A) Le renforcement de la présomption d’innocence…………….…P.89

1) L’intensification de la présomption d’innocence lors des

investigations……………………………………………..…P.89

2) La restriction des recours à la détention provisoire…….…...P.90

B) L’enrichissement budgétaire de la justice garant d’un bon

fonctionnement…………………………………………...……..P.92

1) Une meilleure réactivité de la justice……………………….P.92

2) La nécessité de moyens supplémentaires…..……………….P.94

Section II : L’amélioration des réparations de l’erreur judiciaire………………….P.96

§ 1 : L’élargissement des recours en révision et de l’indemnisation…...…..P.96

A) Une réforme du recours en révision ajustée…………………….P.96

1) L’extension des cas d’ouverture…………………………….P.96

2) Les effets néfastes d’un accès excessif à la révision…..……P.97

B) Un système d’indemnisation propice aux victimes d’erreur

judiciaire…………………………………………………...……P.98

1) L’accélération du processus d’indemnisation………..……..P.98

2) L’élargissement du bénéfice de l’indemnisation…..………..P.99

§ 2 : La prévention et la répression, source d’éradication des erreurs

judiciaires………………………………………………………………………………....P.100

A) La prévention………………………………………………….P.100

Page 135: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  130  

B) L’instauration d’une véritable répression des magistrats…...…P.102

CONCLUSION………………………...……………………….P.103

ANNEXES………………………………………..…………… P.105

BIBLIOGRAPHIE……………………………………………..P.120

Page 136: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  131  

TABLE DES DÉCISIONS DE JUSTICE

- DC, n°95-360, 2 février 1995. - Crim.  17  février  1912,  D.1913,I,375.  - DC  n°  98-­‐399,  5  mai  1998  - Cons.  const  .2  février  1995,  Décision,  n°  95-­‐360. - CESDH,  31  mai  1998,  Reinhart  et  Slimane  Kaid.  Condamnation  de  la  France - CESDH,  Delcourt  C/  Belgique,  17  janvier  1970. - Cons.  Const.  5  Aout  2010  :n°  2010-­‐612  DC  paragraphe  12  . - Crim,  20  septembre  2000  ,  Bull.crim.n°  274 - Crim  ,  29  juin  2005,  Bull,  crim.,    n°  199. - Cons.  Const  .11  aout  1993  :  n°  93-­‐326  DC§  25 - Cons.    Const.  22  janvier.  1999  :n°  98-­‐408  DC§  25. - CE,  ass.,  28  juin  2002,  Magiera,  req.n°  239575  :  préc.note    64 - Crim.  22  janv  1898,  DP  1900,  I,  142,  2ième  espèce. - Crim.  5  mai  1994,  B.  N°  172. - Crim.  5  nov  1987,  B.  N°  392. - Crim.  27  avril  1989,  B.  N°  179. - Crim.  28  Juin  1994,  B.  N°  258. - Cour  rév.  16  mai  2007,    pourv.  n°  06-­‐85053. - Crim.  26  Février.  1997,  B.  n°  80. - Crim.  25  Nov.  1991,  B.  n°  434. - Crim.  8  Février.  1989,  B.    n°  62. - Crim.  17  Janv.  2007.  B.  n°11. - Comm.  Réex.  30  nov.  2000,  n°  00  RDH003,  Hakkar, - Comm.  Réex.  24  nov.  2005,  B.  n°1,  Makhfi. - Comm.  Réex  24  janv.  2002,  n°  01  RDH  006,  Van  Pelt. - Comm.  Réex.  16  oct.  2003,  B.  n°1. - Crim.  6  sept.  2006,  B.  n°  215. - Crim.  7  déc.  2005,  B.  n°  329. - CNRD,  4  avr.  2003,  B.  n°4. - CNRD,  28  juin  2002,  01RDPOI3-­‐31  janv.  2003,  B.n°1. - CNRD,  19  déc.  2003,  B.n°8. - CNRD,  21  oct.  2005,  B.  n°  9. - CNRD,  18  déc.  2006,  B.  n°  15. - CNRD,  14  nov.  2005,  n°  5C-­‐RD.O15. - CNRD.  26  juin  2006,  B.  n°  9. - v.not.  CNRD,  14  nov.  2003,  03  CRD  026. - CNRD,  20  déc.  2002,  B.    n°12. - CNRD,  20  déc.  2002,  B.  n°  11. - CNRD,  20  déc.  2002,  B.  n°  14. - 1er  Civ.  3  oct.  1953,  B.  n°  224.   - 20  fév.  1996,  B.I,  n°  94. - TGI  Paris,  22  juill.  1999,  D,  1999,  IR,  p.  214. - 1er  Civ.,  13  mars  2007,  B.I,  n°  107.

Page 137: Procédures L’UNIVERSITÉ DE VALENCIENNES ET DU HAINAUT

  132  

PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

Art : Article Bult. Crim. : Bulletin Criminel CE : Conseil d’État CESDH : Cour Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme CNRD : Commission Nationale de Réparation de la Détention Provisoire Com Réex : Commission de Réexamen Cour Rev : Cour de Révision Cons. Const. : Conseil Constitutionnel CPP : Code de Procédure Pénale CRIM : Arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation Ed. : Edition L : Loi P : Page RCS : Revue de Science Criminelle et de Droit Pénal comparé RTD Civ : Revue trimestrielle de droit civil TGI : Tribunal De Grande Instance