pianiste - mai_juin 2016
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PROGRESSEZ À VOTRE RYTHME, VIVEZ VOTRE PASSION ! www.pianiste.fr / Bimestriel mai-juin 20
Hélène
32PAGDE PARTITI TOUS NIVE
MOZASONATE K(2e ET 3e MOUVEMlBertini lScheidlMarcailhou d’AlScarlatti
Avec les consed’Alexandre S
JAZZST. JAMES INFIR
Avec Antoine
Une nature
rebelle
NOS TESTSTrois quarts-de-queue
à petits prixÀ L’AFFICHELucas Debargue
DOSSIERLes œuvres méconnuesdes grands génies
’
J O U E Z E
G A G N Eune mi ni c haî ne e t
e nc e i nt e s s ansY amahaP A GE 65
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à la perfection numérique
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mai-juin 2016 n PIANISTE n°98 n 3
LE MAGAZINE
5 ÉDITORIALPar Stéphane Friédérich
6 ACTUALITÉSÉvénements, festivals,partitions, livres…
20 À L’AFFICHELucas Debargue
26 DOSSIERŒuvres méconnues du grand répertoire
30 EN COUVERTUREHélène Grimaud
60 PIANOS À LA LOUPE
Trois petits quarts-de-queuepour budgets réduits et deux claviersportables à prix accessibles
66 CHRONIQUES DISQUESClassique et jazz
82 L’INVITÉE DE PIANISTE Jeannie Longo
LIVRET DE PARTITIONS
32 pages de partitions
annotées
LA PÉDAGOGIE
43 « VOULEZ-VOUS UNE FORMULE MAGIQUEPOUR LA TECHNIQUE? »Par Alexandre Sorel
44 TOUTES LES PIÈCES COMMENTÉES
58 LA LEÇON DE JAZZ d’Antoine Hervé :St. James Infirmary
SOMMAIRE NO 98 z MAI-JUIN 2016
2660
R O L A N D
P I A N I S T E
206
M A T H E N N E K / D G
30
JOUEZ ET GAGNEZ2 séjours pour deux personnesau Gstaad Menuhin Festival
VOIR PAGE 39
C O L O M B E C L I E R / / C M N
F E L I X B R O E D E / S O N Y M U S I C
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la dolce voltales liens secrets entre un artiste et une œuvre ont leur label
PASCAL AMOYEL // CHOPIN
Les grandes Polonaises
30/04
14/05
21/05
05/06
01/07
06/07
08/07
11/07 13/07
22/07
07/08
15/08 19 > 22/08
Le HavreFestival de FontmorignyClayes-sous-BoisParis, Théâtre des Bouffes-du-Nord
Saint-Etienne-le-MolardVermentonBruxellesBordeauxParis, Festival Chopin à BagatelleFestival de PontlevoyUchaux, Festival Liszt en ProvenceParis, Festival de l’Orangerie de SceauxFestival de la Chaise-Dieu(avec l’Orchestre National d’Île-de-France)
GEOFFROY COUTEAU // BRAHMS
Intégrale de l’œuvre pour piano seul
23/04
29/04
19/05
19/06
02/07
11/07
19/07
30/07
06/08
Château de MaintenonThéâtre de DreuxParis - Salle GaveauFestival Chopin à NohantFestival EygalièresFestival de SaintesFestival de Radio France et MontpellierFestival Messiaen au Pays de la MeijeMenton
ROGER MURARO // LISZT
Sonate en si mineur
22/04
27/05
04/06
10/06
05/06
15/07
19/07
30/07
Penboc’h en ArradonAnnecySully-sur-LoireBerneVeveyChambordMauzaugesSalon-de-Provence
estore.ladolcevolta.com
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ÉDITORIALNO 98 z MAI-JUIN 2016
mai-juin 2016 n PIANISTE n°98 n 5
PIANISTE EST UNE PUBLICATION BIMESTRIELLE
SOCIÉTÉ ÉDITRICE : Groupe Altice MediaSA au capital de 47 150 040 eurosSIÈGE SOCIAL : 29, rue de Châteaudun,75308 Paris Cedex 09Tél.: 01 75 55 10 00 - Fax: 01 75 55 41 11RCS 552 018 681 ParisPRINCIPAL ACTIONNAIRE : ALTICE MEDIA GROUP FRANCEPRÉSIDENT DIRECTEUR GÉNÉRAL : Marc LauferDIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Christophe Barbier
ABONNEMENTSPianiste - Service Abonnements4, route de Mouchy, 60438 Noailles CedexTél. : 01 70 37 31 53 - Fax: 01 55 56 70 91Depuis l’étranger : (+33) 1 70 37 31 53E-mail: [email protected]/abonnementsTarifs abonnements France Métropolitaine39 euros - 1 an (soit 6 nos + 6 CD);69 euros - 1 an (soit 6 n os + 6 CD + 6 DVD)
RÉDACTIONDIRECTEUR DE LA RÉDACTION :Bertrand DermoncourtTél. : 01 75 55 43 33 ([email protected])RÉDACTEUR EN CHEF : Stéphane FriédérichTél. : 01 75 55 41 51 ([email protected])SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Valérie JacobsTél. : 01 75 55 41 53 ([email protected])ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO: Camille Arcache(stagiaire), Sylvia Avrand-Margot, Jérémie Bigorie,
Jacques Bonnaure, Jérôme Chatin (photo), BernardDésormières, Michel Fleury, Elsa Fottorino, AntoineHervé (pédagogie), Jean-Pierre Jackson, MichelLe Naour, Alexandre Sorel, Véra Tsybakov(pédagogie), Philippe Venturini.DIRECTRICE ARTISTIQUE : Isabelle GelbwachsRÉDACTEUR-GRAPHISTE : Sarah Allien([email protected]),PHOTO DE COUVERTURE : Mat Hennek/DGMANAGEMENTDIRECTEUR GÉNÉRAL DÉLÉGUÉ:François DieulesaintDIRECTEUR DÉLÉGUÉ PÔLE CULTURE :Tristan ThomasTél. : 01 75 55 40 73 ([email protected])PUBLICITÉ:Hind Benbirahim (Directrice de clientèle) Tél. : 01 75 55 42 77 ou 06 26 95 86 46Fax : 01 75 55 16 06 ([email protected]) VENTE AU NUMÉRO RÉSERVÉE AUX DÉPOSITAIRES DE PRESSETél.: 0800 42 32 22 ANCIENS NUMÉROS-VPC: http://boutique.lexpress.frFABRICATION:Pascal Delépine (Directeur technique) ,Marie-Christine Pulejo, Pascale SupernantPRÉPRESSE: Groupe Altice Media
PÔLE GRAND PUBLICL’Express, L’Expansion, Classica, Lire,
StudioCinélive, Pianiste Directeur: Christophe Barbier
GROUPE EXPRESS-ROULARTA Secrétaire général : Richard KaracianDirectrice régie : Valérie Salomon Abonnements : Géraldine LegerDirecteur des ressources humaines :Richard KaracianDirectrice financière : Sophie de BeaudéanDirecteur comptabilité : Gilles HervoDirectrice des éditions électroniques :Sophie Gohier
Directeur achats et services généraux :Thierry Pallu
IMPRIMERIERoularta Printing. Imprimé en Belgique• Distribution: Presstalis• Diffusion en Belgique: AMP,Rue de la Petite Ile 1 B-1070 BruxellesTél: + 32 (0) 252 514 11 - E-mail: [email protected]° de commission paritaire : 0917 K 80147N° ISSN : 1627-0452 • Dépôt légal: 2e trim. 2016
Les indications de marques et adresses qui figurent dans les pages rédactionnelles sont fournies à titre informatif, sans aucun but publicitaire. Toute reproduction de textes, photos, logos,musiques publiés dans ce numéro est rigoureusement inter- dite sans l’accord express de l’éditeur.
Ce numéro comporte un CD jeté sur l’ensemble de la diffusion etun encart abonnement sur la totalité de la diffusion kiosque France,
Non, vous ne vous êtes pas trompé(e), votremagazine n’a pas échangé ses rubriquesmusicales contre des cours de physique etde mathématiques ! Cela étant, le phé-
nomène sonore peut s’expliquer scientifiquement.« Pourquoi un tel préambule ? » me direz-vous.Regardons en détail le parcours professionnel descinq lauréats du 27e Concours des Grands Amateurs,qui s’est déroulé à l’université Paris-II Assas, le10 avril dernier. Olivier Korber a remporté les troisprix, ceux du jury des musiciens, de la presse et dupublic. Il est, dans la vie « normale» (je veux dire,quand il ne fait pas le saltimbanque sur scènepour jouer magnifiquement les 12 Études opus 25 de Chopin, œuvres qui ne servent rigoureusementà rien dans la «vraie » vie), stratégiste des marchésfinanciers à la Société Générale. Les deux 2e Prixex æquo imposent tout autant le respect : JulienCohen convainc dans une superbe Partita n°1 de
Bach. Lui étudie les mathématiques à Cambridge.Étonnant dans l’explosive Suggestion diabolique deProkofiev, Olivier Dupont est ingénieur financierà la HSBC (dans le secteur de la valorisation desproduits dérivés). À ma grande honte, je n’ai pasosé lui demander de quoi il s’agissait… IskanderBursakov vient de Kazan, capitale de la Républiquedu Tatarstan. Son métier de conseiller juridique nerend pas justice à ses Rachmaninov et Liszt-Horowitz, pourtant très personnels. Enfin, le dernierlauréat, Emil Simeonov, dirige le département demathématiques appliquées à l’université de Vienne,en Autriche. Entre Schubert, Scarlatti, Brahms etLiszt, il n’aura pas eu le temps d’exposer ses travauxde recherche, ce qui, curieusement, n’a pas frustréle millier de personnes enthousiastes, qui ont passéun réjouissant après-midi. Sacrés amateurs !
Stéphane Friédérich
Rédacteur en chef
Les chefs-d’œuvre du pianoracontés et interprétésparClaire-Marie Le Guay
8 juin 2016 à 20 h 30SCHUBERT Impromptus opus 90
RENSEIGNEMENTS ET RÉSERVATIONS : Salle Gaveau,45-47, rue La Boétie, 75008 Paris - Tél. : 0149 5305 07. À partir de 18 euros. www.sallegaveau.com
J É R Ô M E C H A T I N P O U R P I A N I S T E
PIANISTE ET LA SALLE GAVEAU PRÉSENTENT
Retrouvezles playlists de
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Au cœur d’une œuvre
DERNIÈRE DATE DE LA SAISON 2016
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ACTUALITÉS ÉVÉNEMENTSPlus d’infos sur www.pianiste.fr
Que représente, à vos yeux, le Campus d’Or?
J’ai eu un peu de mal à me faire à l’idée que je l’avais remporté. Pour moi, c’était incroya-ble ! Piano Campus est le premier concoursimportant que j’ai passé. En Italie, les com-
pétitions ne sont pas de ce niveau.Comme en aviez-vous entendu parler?
J’avais tenté le concours d’Astana, au Kazakhstan, oùPascal Escande, qui dirige Piano Campus, était membredu jury. Il m’a invité à y participer.Pour l’épreuve avec orchestre, les candidats ont
joué le 1er mouvement du Concerto n°1 pour piano
de Mendelssohn et créé une pièce de Lina Tonia.Quelle partition vous a semblé la plus difficile?
Elles étaient toutes deux délicates, mais dans un genredifférent. C’est la première fois que je jouais une telleœuvre contemporaine, qui était difficile à comprendre.Heureusement, je m’étais déjà produit avec un orchestre,même si ce n’était pas dans ce type de répertoire. Pour-tant, j’ai éprouvé beaucoup de plaisir. Je me demandemême si je ne préfère pas cela au récital solo !Parlez-nous de vos études…
J’étudie au conservatoire de Bologne et à l’Académie
d’Imola, auprès de Leonid Margarius. J’aimerais aussiparticiper à de nombreuses classes de maître, car il estessentiel de recueillir les enseignements les plus divers.Quel est votre répertoire?
Les dernières œuvres que j’ai apprises sont la Sonate « Waldstein » de Beethoven, Après une lecture du Dante et la Sonate en si mineur de Liszt, des Préludes et Fugues,extraits du Clavier bien tempéré de Bach, le Scherzo n°2de Chopin, la Sonate n°2 de Scriabine et divers concertos :le Premier de Liszt, le Troisième de Beethoven. En cemoment, je travaille le Concerto n°1 de Tchaïkovski.Allez-vous tenter d’autres concours ?
Cela me semble nécessaire, déjà pour me faire connaîtredans d’autres pays. On ne peut pas faire carrière sim-plement en Italie, les opportunités de jouer sont troppeu nombreuses.Une réponse immédiate : quel est votre pianiste
préféré?
Arturo Benedetti Michelangeli. Sa manière de penserla musique et de jouer répond exactement à ma définitionde la perfection.
Propos recueillis par Stéphane Friédérich
piano-campus.com
6 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
CONCOURS PIANO CAMPUS
VIVA
ITALIA!En février dernier, Nicolas Giovanelli remportait le Campus d’Or. Une médailledécernée à l’unanimité par le jury présidé par Michel Dalberto. Séduit par le talentdu jeune Italien de 17 ans, Pianiste lui attribue également son Prix. Entretien.
Piano Campus d’Or Nicolas Giovanelli (Italie)Piano Campus d’ArgeGeorge Todica (RoumanPiano Campus de Bro
(Ukraine)
À É C OS u r l e C D
e t 10 , N i c o l a j o u e l a S o n a
B e e t h o v e n , el o r s d u c o
Nicolas Gile va
de la com
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Joli nom pour ce festival ima-giné par Ludmila Berlinskaïaet Arthur Ancelle et installé
sur les bords de Loire, entre Talcy et Blois. Si vous aimez les réper-toires rares pour piano, sa 4e édition vous comblera alors une semainedurant. Les deux musiciens propo-seront en effet Francesca da Rimini de Tchaïkovski à deux pianos, maisaussi des pièces de Liszt, d’Arenskiet de Saint-Saëns (26 juillet). Le
New Russian Quartet, la jeune har-piste Anaëlle Tourret et le comé-dien Philippe Chevallier donne-ront des œuvres de Schubert, deChostakovitch et de Caplet (27).
Le 28, les pianistes Nikolaï Majara,Dimitri Malignan, Maria Matalaevet Nozomi Okabe, accompagnés pardes lauréats du diplôme de concer-tiste de l’École normale de musi-que de Paris, joueront Mascarade d’Aram Khatchaturian. Le 29, unrécital sur le thème des « carnavalsdes animaux » sera organisé avecde nombreux interprètes dans despartitions de Tchaïkovski, de Schu-bert, de Prokofiev, de Milhaud…
et de Saint-Saëns ! Enfin, le 30, c’estl’ensemble baroque Doulce Mémoirequi se produira sur scène.
du 26au30 juillet,
lacledesportes-festival.com
D
irigée d’une main de maître par Jean-Philippe Collard, la célèbre
manifestation créée en 1990 accueillera quelque 1000 artistespour plus de 50 concerts dans près de 40 lieux différents :la musique classique sera en fête dans un patrimoine exceptionnel.Parmi les musiciens invités : les pianistes Hélène Mercier et LouisLortie le 24 juin, le pianiste Nelson Freire le 28, le pianiste ÉdouardFerlet et la claveciniste Violaine Cochard le 1er juillet, les pianistesMarcela Roggeri et Jean-Philippe Collard le 3, la violoncelliste Camille Thomas avec le pianiste Julien Libeer le 4, le pianiste Seong-Jin Chole 5, ainsi qu’Emmanuelle Moriat et Jean-Philipe Collard le 11…Bref, une affiche prestigieuse pour un programme grisant !
du 23 juin au 23 juillet, flaneriesreims.com
Les Flâneries musicales
de Reims
MANIFESTATION
La Clé
des PortesLe château accueillera
le public avant les concerts.
Vue du châ teau e t de
l’église de Talc y, où seron t
donnés cer tains réci tals.
P A S C A L L E M A Î T R E -
C O L O M B E C L I E R / C M N
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Cela fait vingt-deux ansqu’Orléans vit au rythmede ce concours de pianocontemporain créé par Fran-
çoise Thinat. Aujourd’hui, celui-cifait partie intégrante du patrimoine
de la ville et rayonne dans le mondeentier, si l’on en juge par les natio-nalités des 31 candidats qui ont faitle déplacement depuis Taïwan, laCorée, le Canada… Accueillis pardes familles orléanaises le tempsdes épreuves, ils sont venus don-ner le meilleur d’eux-mêmes dansun répertoire dédié aux œuvresdes XX e et XXIe siècles. Mais quecherchent-ils dans cette compé-tition, l’une des seules au monde dece type? Pour comprendre leurs moti- vations, retour sur les premiers jours.
Côté public, curiosité puis fascination.Une candidate monte sur la scène del’Institut, lieu des épreuves de sélec-tion, se dirige vers l’un des deux pia-nos, place toutes sortes de percussionsde part et d’autre de l’instrument.Pendant huit minutes, elle passe duclavier aux cloches et lames, se saisitde baguettes, s’empare du clavier…Un ballet autant visuel qu’auditif.D’autres pianistes optent pour un
support électronique ou dévoilentd’infinies ressources sonores du meu-ble ou des cordes par des effleure-ments, des tapotements, des gratte-ments, des coups violents, sanscompter d’improbables jeux de pé-
dales. Certains jettent la partition àterre après avoir joué. Pas nouveau,mais toujours amusant comme jeude scène. Cette première épreuve avaitnotamment pour contrainte la créa-tion d’une pièce récente écrite poureux ou par eux. Cet aspect unique estrecherché par plusieurs interprètes,également compositeurs, commel’Ukrainien Vitaliy Kiyaytsia.
Sortir des sentiers battusi
Durant trois jours, ces passionnés ontfait découvrir leurs mondes avec
la plus grande liberté. « Le défi estimportant. Pour les autres concours,on peut roder son programme pendant des années. Pour se présenter à Orléans,il faut monter un programme de trois heures d’œuvres qu’on ne joue nulle part ailleurs, alors, passionné, oui, il faut l’être », explique Orlando Bass, uncandidat français. Mais comment le devient-on ? Cette musique, il l’a découverte seul, pas grâce à un
professeur, ni même pendant sesétudes. Poussé par sa curiosité, il s’estformé… sur Internet ! « J’ai écouté,cherché des partitions à l’autre bout de la Terre, découvert par moi-même…»S’inscrire ici est un vrai choix, im-
possible de tricher. Les quelques can-didats qui avaient hésité à s’éloignerdes sentiers battus ont été recalés. ÀOrléans, il faut jouer le jeu.Au terme de trois épreuves, trois fina-listes restaient en compétition faceau jury présidé par Jean-FrançoisHeisser. Au Théâtre d’Orléans, ils ontété départagés à l’issue d’un récital.Premier morceau imposé, le Concerto
pour neuf instrument s opus 24 de Webern. Le Japonais Takuya Otaki(1er Prix) a déployé une palette de sonorités magnifiques, en connivence
avec l’ensemble Court Circuit dirigépar Jean Deroyer. Comment ne pas
être accroché par unfinesse d’interpréta
sée à Philippe HersaCarillon d’Orléans . Ce
c’est l’Arménienne MAbrahamyan (2e Prixdonné l’interprétationproche de ce que le csiteur imaginait : « J’aicié la construction et lamique qu’elle a apportéecommenté. Le troisièmliste, le Français Philipptat (3e Prix), qui a davbrillé dans les épreuves
prix mis en jeu par les parte« Difficile d’être au top jusqu’au
constatait un candidat. « Il a toudans les trois tours d’avant. »Bien sûr, il ne faut pas s’attenécoutant de la musique contraine, à des grandes phrases lyou des épanchement romanMais on ne doit pas crains’aventurer dans un monde dioù tout est à découvrir. Se lancde nouveaux horizons peut sler passionnant. Isabella Vasrécemment nommée à la dirdu Concours d’Orléans, revi
Brin d’herbe, une compétitiotinée aux plus jeunes : « Ils adet s’amusent beaucoup avec le
Ils jouent, dans tous les sens dutout en montrant un degré d’emusicale et technique. »L’émotion était grande lors de monie de clôture. Un hommagleureux a été rendu à Françoisnat, qui a passé le flambeau à IVasilotta : « Elle saura assurer lnuité en s’appuyant sur le passé,l’inscrivant dans le futur.» De noorientations ont déjà été pris
élargiront davantage le champ ddu concours. Sylvia Avrand
8 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
ACTUALITÉS ÉVÉNEMENTSPlus d’infos sur www.pianiste.fr
REPORTAGE
AU CŒUR DU CONCOURS
INTERNATIONAL D’ORLÉANS
MariannaAbrahamy an.
Les membr es du jur y .
Les trois
finalis tes.
PhilippeHattat.
Taku ya
O taki.
Lde l’d’O
La 12e édition du prestigieux concours de piano contemporain s’est déroulée
du 18 au 28 février dernier. Pianiste avait fait le déplacement.
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Le programme de ce festival prestigieux au cœur du grand vignoble deBourgogne attire de nombreux solistes internationaux. Parmi les pia-nistes, notons la venue de Michel Dalberto accompagnant le violonisteRenaud Capuçon et le violoncelliste Charles Hervet (19 juin, au châteaudu Clos Vougeot). Le claveciniste Patrick Ayrton participera à un concertdédié à l’œuvre de Bach (24 juin, au château de Meursault).
du 18 au 26 juinmusiqueetvin-closvougeot.com
MUSIQUE & VIN AU CLOS VOUGEOT
Classique, jazz, ciné-concert etmanifestations dédiées au jeunepublic… Un concentré de pia-
nos en trois jours ! Et un fil conduc-teur pour cette 13e édition : Bach etMozart. Une quarantaine d’artisteset des lauréats de concours interna-tionaux joueront de tous les claviersau cours de 30 concerts répartis danstoute la ville, et parfois accompa-gnés par l’Orchestre national deLille. Quelques artistes : Fazil Say dans sa musique et le Concerto n°23de Mozart, Alexandre Tharaudet les Variations Goldberg, un
« marathon Satie » d’étudiants enconservatoire, Wilhem Latchou-mia, Cédric Tiberghien, MarieVermeulin et Vanessa Wagnerdans les Concertos pour pianos deBach et le Concerto « Jeunehomme »de Mozart des sœurs Bizjak, d’AnneQueffélec et de Julian Trevelyan,sans oublier les récitals de BorisGiltburg, de Dmitry Masleev, desduos Jatekok et Édouard Ferlet avecViolaine Cochard, de Claire-MarieLe Guay…
du 17 au 19 juin,
lillepianosfestival.fr
Pour sa 9e édition, la manifestation réunit de nombreux artisteset, parmi eux, des pianistes dont certains sont les parrainsdes concerts. Ils présentent ainsi de jeunes confrères. C’est ainsi
que l’on entendra Charlotte Coulaud dans un concerto de Bach (20 mai)et Nima Sarkechik dans des œuvres de Brahms (21). Le même jour,Vincent Balse participera à un concert thématique « Un petit cabaret… »,avec notamment la pianiste Stéphanie Fontanarosa. Et, le 22, YannaëlQuenel jouera dans la « Fantaisie pour petites et grandes oreilles ».
du 20 au 22 mai, lesmusicalesdebagatelle.com
Les Musicales de Bagatelle
Lille piano(s) festival
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10 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
La firme de claviers numé-riques Casio a développé,en collaboration avec le pres-tigieux facteur de pianos
acoustiques Bechtein, une séried’instruments haut de gamme quePianiste a présenté dans son n°94.Pourla faire connaître au grand public,elle a mis sur pied un événementpédagogique, avec comme porte-
flambeau Benjamin Grosvenor.Qui mieux que lui, en effet, auraitpu adhérer à un tel projet ? Lepianiste anglais de 26 ans expliqueque, durant ses années d’études, il asouvent dû travailler sur un cla- vier numérique. À l’époque, il aété obligé de transformer son jeu
pour tirer le maximum de l’instru-ment. Aujourd’hui, il constate qu’ilpeut conserver son toucher : « Alors que je ne change rien à ma technique,
je retrouve quasiment la même sensa-tion que sur un piano acoustique . »
Un échange enrichissant
Pour débuter cette journée, Benja-min Grosvenor s’est prêté au jeu
de la classe de maître et a fait ainsises premiers pas en tant que péda-gogue. Face à lui, cinq élèves encycle de perfectionnement dansles CRR de Lyon, de Montpellier,d’Avignon, de Lille et de Nantes.Le cadre intimiste des salons dela Fondation Dosne-Thiers, nichée
dans le 9e arrondissement de Paris,se prêtait bien à l’événement, mais…nous ne pouvons que rapporter lespropos de l’intéressé, les journa-listes étant restés derrière la porte.« D’abord, j’étais impressionné, mais cela s’est vite transformé. J’ai vrai-ment aimé échanger avec ces jeunes,leur donner des conseils, même si c’était très court », commente Benjamin
Grosvenor. Lui-même se souvientd’avoir bénéficié de ceux de StephenHough ou de Leif Ove Andsnesdans les mêmes conditions. Quelbénéfice peut-on tirer d’une si brèverencontre ? « En peu de temps, on
pénètre dans l’univers d’un pianiste,un peu comme si celui-ci ouvrait une
fenêtre. C’est enrichissant autant pour l’élève que pour le maître . »À la suite de cet après-midi péda-gogique, l’un des cinq étudiants adonné un récital. Puis ce fut au tourde Benjamin Grosvenor de jouer :
d’abord, la Sonat e n°2 de Chopinsur un Bechstein, puis deux œuvresde Liszt et de Grainger/Gershwinsur un GP-500 de Casio. Oups :problème de réglage resté sur Lis-tener 3 au lieu de Player. Après unpetit ajustement, le pianiste anglaisa pu mettre en valeur les multiplesfacettes du clavier numérique. Dequoi être conquis.
Sylvia Avrand-Margot
COMPTE-RENDU
UN PROJET DE MAÎTREFin mars, le pianiste Benjamin Grosvenor donnait une masterclass et un récital
dans les salons de la Fondation Dosne-Thiers, à Paris. Un événement imaginé parCasio pour promouvoir son clavier numérique GP-500 conçu avec Bechstein.
EN BREF
Kit Armstrong jouera le 16let, dans le cadre du festiva
la Vézère, à Brive-la-Gaillala Sonate en si mineur de Lisles Variations Goldberg de B
festival-vezere.
Le 20 juin, à la PhilharmonParis, Boris Berezovsky seduira sous la direction de JClaude Casadesus, à la têtl’Orchestre national de Lilledonnera le Concerto n°2 de pin. Seront également propl’ouverture de La Force du dde Verdi, les Métaboles detilleux et le Boléro de Rave
philharmoniedepa
Les 10 et 11 juin à MaastrichtPays-Bas,Didier Castell-Jacoa imaginé un petit festival de d
jours. Trois concerts : « Omet Lumières » avec le QuaMarsyas (Clara et Robert Smann, Brahms); « Heure exquavec les pianistes Joël CapbeMelaine Dalibert (Milhaud, Llawski…), la violoniste Elena Lnova et le pianiste Ashot Khatourian (Lekeu) ; et, enfin, «Lumières en musique » avsoprano Laurence Malherbla pianiste Michèle Pondep(Scarlatti, Rameau, Mozart…www.theateraanhetvrijtho
Geoffroy Couteau interpréla Sonate n°13 de Beethovedes pièces de Brahms, le 19à la salle Gaveau. Ce récital scrit dans la saison des conPhilippe Maillard.
sallegaveau.
DidierCastell-Jacomin.
BenjaminGrosvenor(à gauche)
avec un élève.
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La noblesse du jeu de MuzaRubackyté est saisissante. L’ Ara-besque opus 18 de Schumann,
avec laquelle elle a ouvert le concert,a captivé le public par la grandeuret la grâce singulière du son. Avecles 18 miniatures du Carnaval des animaux , la pianiste lituanienne adévoilé une autre facette de son jeu.Elle a insufflé à chaque phrase un
tempérament, une allure, de sorteque son discours musical ne nous apas échappé. Elle a fasciné d’autantplus le public qu’elle a construit,à partir de ces fragments, un acce-lerando gigantesque, maintenant unetension constante.Pierre angulaire de son récital (etgrande découverte pour la plupart),les Pièces pour piano de Mikalojus
Konstantinas Ciurlionis (1875-1911)occupaient le cœur de son pro-gramme. Muza Rubackyté, en tantqu’ambassadrice de sa musique, œuvre pour mieux faire connaîtrele répertoire de son compatriote.
Les Nocturnes et Préludes ont donnéun aperçu de l’évolution du com-positeur lituanien, d’un style roman-tique à des pièces aux rythmes etaux modalités plus contrastés. Le jeu viscéral de la pianiste, puisantdans les nuances et accentuant lescontrastes, ne pouvait qu’aiguisernotre curiosité pour la musiquede son pays.Pour clore son concert, Muza Ruba-ckyté a fait écho à l’inventivité et autourment des œuvres de Schumannavec la modernité et la fulgurance dela Sonate n°6 de Prokofiev. Ce quis’impose à nous, au regard de ce panelmusical offert par la pianiste, c’est samanière de s’approprier avec justesseles œuvres. Un très beau moment.
Camille Arcache
MUZA RUBACKYTÉ
Le piano nobleEn mars, à Gaveau, la pianiste lituanienne a offert
un magnifique récital, avec des œuvres de Schumann,Ciurlionis et Prokofiev, qu’elle a transfigurées.
EN BREF
Katia et Marielle Labèque
se produiront le 22 juin
au Théâtre du Châtelet.Leur spectacle, intitulé « Love
Stories », est bâti autour
du mythe de Roméo et Juliette.
Elles joueront West Side Story
dans la version que Leonard
Bernstein a fait arranger pour
elles, puis Star Cross’d Lovers
de David Chalmin dans
une chorégraphie pour sept
danseurs de Yaman Okur.
chatelet-theatre.com
Le 1er juin, Lars Vogt donnera
un récital à l’Auditorium du
Louvre. Il jouera les Variations
Goldberg de Bach et la Sonate
opus 111 de Beethoven.
louvre.fr/musiques
C H R I S T I N E
D E
L A N O Ë
v FESTIVALDE LAVÉZÈRE
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Que signifie « Invité
spécial »?
Justement, je croyais que vous alliez me donner la
réponse ! En vérité, je me produisen récital, en ouverture du festival,puis en concerto, à sa clôture.Scarlatti, Clémenti et Chopin :
n’est-ce pas un choix étrange
pour un récital?
Oui, en effet, il n’y a pas de relationentre Scarlatti et le reste du pro-gramme. En fallait-il une ? En tantqu’Italien, cela m’amuse toujours deprésenter des œuvres de compositeurs
de mon pays quand je joue à l’étran-ger. On connaît peu Clémenti, musi-cien très sous-estimé, auteur deplus de 50 sonates dont une quin-zaine sont des chefs-d’œuvre. D’ail-leurs, selon Schindler, le secrétairede Beethoven, ce dernier préféraitcelles de Clémenti à celles de Mozart. Je crois même que Mozart était assez jaloux de lui, car il gagnait beaucoupplus d’argent que lui !Vous avez choisi la Sonate en si
mineur opus 40 n°2 de Clémenti…
C’est son « Appassionata » ! Imaginez le concentré d’écritures dans cettemusique, car Clémenti est né deuxans après la mort de Bach et a dis-paru quatre ans après celle de Schu-bert. Sa musique passe de la fin dubaroque au romantisme !Et Scarlatti : comment sélectionner
six sonates parmi 555?
Trouver des sonates qui soientmoins belles que les autres n’est pasévident. Il faut aussi qu’elles soientcontrastées. J’ai par ailleurs envie de jouer des pièces que l’on entend peu. J’en ai découvert quelques-unes avec
mon professeur, Maria Tipo, grandeinterprète de Scarlatti.Vous enseignez aussi. Qu’apportent
les sonates de Scarlatti sur le plan
pédagogique?
Les sonates améliorent la légèretéet la vitesse de jeu ainsi que la clartéd’un toucher non legato. Qui plusest, on travaille en détail les plus petites nuances.Quelle est la part de liberté
dans l’interprétation des œuvres
classiques?
L’interprétation est sujette aux modes.Aujourd’hui, beaucoup de pianistesse croient obligés de faire quelquechose d’original à chaque fois que seprésente une note longue dans unconcerto de Mozart. Est-ce réellementutile ? À l’inverse, il ne faut pas exa-gérer la sobriété du jeu et doser avec justesse l’ornementation.Au concert de clôture du festival,
vous donnerez le Concerto n°2
de Chopin. De plus en plus
d’interprètes tentent l’expérience
d’un piano ancien dans ce type
de répertoire. Pas vous?
J’habite non loin de Florence où setrouve l’Accademia delle fortepiano,une institution qui possède une im-pressionnante collection de pianosanciens originaux et restaurés. Il faut jouer sur ces instruments pour com-prendre le son de l’époque de Chopin.Mais ils sont très différents des claviersmodernes, au niveau de l’enfoncementdu toucher, de la rapidité, de la dyna-mique. Ils nécessitent de développerune technique particulière qui n’estpas la mienne. Je m’en tiens doncau piano moderne.
Quels sont vos projetsdiscographiques?
Jouer, voire enregistrer, les Variations Goldberg de Bach, graver les sonatespour violoncelle et piano de Beet-hoven avec Enrico Dindo, réaliserun projet avec le compositeur italienRuggero Laganà… J’ai du pain surla planche, comme on dit !
Propos recueillis par Stéphane Friédérich
crescendo-jura.ch
12 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
EN BREF
Adam Laloum interpréteraœuvres de Mozart, de Chop
de Schumann, salle Rameau, la saison Piano à Lyon, le 10
pianoalyon.
Irina Lankova se produirasalle Gaveau, le 10 mai. L’Orctre de chambre Nouvelle Eu(dir. Nicolas Krauze) l’accomgnera dans le Concerto emineur de Chopin.
sallegaveau.
Le 6 mai, Dominique Mesera au Château de Pibar
illustrant en musique le PÉphémère au cœur des vigneBandol. Au programme, la So« Appassionata» de BeethoRenseignements : 049490
Jean Muller offrira un récila Philharmonie du Luxembole 9mai. Au programme, lesVtions Goldberg de Bach, lacarolle n°3 d’Iván BoumansÉtudes de Ligeti et la Sonate piano n°1 de Brahms.
philharmon
Grigory Sokolov donnerconcert à la Halle aux GraiToulouse, le 3mai, avec desvres de Schumann et de Cho
grandsinterpretes.
Alexandre Tharaud jouera latti, Beethoven, RachmaninChopin, le 11mai, salle Ramdans le cadre de Piano à Ly
pianoalyon.
LE PROGRAMME DU 2 AU 12 AOÛTLes invités: Pietro De Maria (2août), François Chaplin (3), Varvara (4),
Marc Laforêt et l’écrivain Jean-Yves Clément (5), le violoncelliste Henri
Demarquette et le pianiste Vassilis Varvaresos (6), le duo Elena Bobrovskikh
et Valentine Butard (7), Jean-Marc Luisada, le même jour, puis à nouveau
Vassilis Varvaresos et le philosophe Michel Onfray (9), Giovanni Bellucci
(10), la violoniste Priscille Reynaud et le pianiste Thierry Ravassard (11),
Pietro De Maria et Varvara accompagnés par l’Orchestre international
de Genève dirigé par Alexei Ogrintchouk (12).
Le pianiste est l’« invité spécial » de la 13e éditionde ce festival international qui se dérouledans le Jura suisse. Encore peu connu en France,celui-ci a gravé l’intégrale Chopin et le Clavierbien tempéré de Bach pour Decca.Rencontre.
PIANO À SAINT-URSANNE
PIETRO DE MARIA
LA TOUCHE ITALIENNE
Lan
L E O N A R D O F E R R I
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mai-juin 2016 n PIANISTE n°98 n 13
Placée sous la direction de Vladimir Spivakov, la manifestationrendra hommage au violoniste Jascha Heifetz. Bien qu’elle réserveune place importante aux cordes, les pianos n’en seront pas absents.
En témoigne la venue de David Bismuth, d’Andrew Tyson, de SofiaGulbadamova et de Lilit Grigoryan en musique de chambre(6, 7, 11 et 12 juillet). Du côté des récitals, on suivra évidemmentGrigory Sokolov, interprète de Schumann et de Chopin (l7). Dédiéà la musique classique et romantique, le festival de Colmar a invitél’Orchestre du Capitole de Toulouse (dir. Tugan Sokhiev) ainsi quel’Orchestre philharmonique de Russie (dir. Vladimir Spivakov).
du 5 au 14 juillet, festival-colmar.com
Chaque année, le Nohant Fes-tival Chopin accueille quel-que 6000 spectateurs venus
du monde entier. Pour son demi-siècle d’existence, la manifestation,au cœur de la propriété de GeorgeSand, lance plusieurs événements.Le 3 juin, à la gare d’Austerlitz, uneanimation exceptionnelle sera pro-posée autour de Chopin. Serontaussi mis à disposition des mélo-manes les enregistrements remasté-risés des deux premiers volumesdes archives musicales du festival.La liste des artistes invités est im-pressionnante : Arcadi Volodos,Edgar Moreau, Nicholas Angelich,Nelson Freire, le Quatuor Debussy,
Rémi Geniet, Seong-Jin Cho, Chris-tian Zacharias, Christina et MichelleNaughton, Vassilis Varvaresos,Maxence Pilchen, François Chaplin, Yves Henry, François-René Duchâ-ble, Dang Thai Son, Charles Richard-Hamelin, Eric Lu, Julien Brocal et Janusz Olejniczak. Sans oublier de jeunes pianistes tels que FlorianNoack, Ismaël Margain, GuillaumeBellom, Geoffroy Couteau, le Duo Jatekok et le Prix Cortot 2016. Enfin,des spectacles littéraires et musicaux,des classes de maître animées par Yves Henry, des causeries-rencontreset des conférences seront organisés.
du 4 juin au 27 juillet,
festivalnohant.com
FESTIVAL DE NOHANT
50ans de romantisme
Colmar lance sa 28e édition
Imaginé par Karine Grosso, ce festival niché dans le village de Percy,
en Rhône-Alpes, rapproche magnifiquement habitants, mélomanes
de passage et artistes. Récitals et classes de maître se mélangent avec
bonheur. On notera la présence d’un invité exceptionnel, Ivry Gitlis, un
hommage à Oscar Peterson, une carte blanche au pianiste Nima Sarke-
chik, une classe d’impro d’Antoine Galvani… sans compter les concerts
de jazz d’Ahn Tuan, de l’Argentine Karin Lechner et de Karine Grosso.
du 1er au 6 juillet, piano-en-trieves.com
FESTIVAL DE PIANO EN TRIÈVES
NicholasAngelich.
N I C O L A S
B R O D A R D
harmoniamundi.com
Un renouveau des formes
Trop novateur pour son temps, le Concerto n°1 pour piano
de Brahms, créé à Hanovre en 1859, eut besoin de quelquesannées pour s’imposer. Les normes du genre y sont redéfinies.
L’affrontement traditionnel entre un soliste virtuose et
l’orchestre est dépassé au profit d’un traitement équilibré
et d’une approche plus “symphonique”. Les Ballades op. 10,
sont, elles aussi, issues de cet élan vers un renouveau des
formes qui caractérise la production du jeune Brahms.
C D
H M C 9 0 2 1 9 1
© J
o s e p M o l i n a f o r h a r m o n i a m u n d i
JOHANNES BRAHMS
Concerto pour piano no1Ballades op.10
Paul LewisSwedish Radio Symphony Orchestra
Daniel Harding
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14 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
Parlez-nous de la création
du festival…
Le violoniste Arvid Enge-gård et moi l’avons créé en
2004. Nous proposions plusieursconcerts de musique de chambredans une église. Pour la premièreédition, nous avions reçu le soutiende Leif Ove Andsnes. Pendant quel-ques années, nous avons fait venirun Steinway de concert, puis en2007, nous avons acheté notre pro-pre piano, ce qui était plus pratique.D’autres paroisses nous ont imitéset, aujourd’hui, il y a cinq ou six pia-nos de concert dans tout l’archipel.
Un véritable festival « alterné » estné. En effet, une année, il est dédiéà la musique de chambre, et l’annéesuivante, au piano. Arvid Engegårdest le directeur artistique de la pre-mière manifestation, et Jean-EfflamBavouzet, de la seconde.Quand avez-vous fait venir
Jean-Efflam Bavouzet?
Je l’ai entendu en 2008 et je lui aidemandé de prendre la directionartistique du festival. Il a réfléchi…deux secondes environ. Il invite desartistes prestigieux, et nous regardonsensemble les propositions de pro-grammes. Nous avons à disposition
le Lofoten Festival Strings, un ensem-ble composé de musiciens pour laplupart solistes au sein de grandesformations européennes.Quel sont vos publics et les lieux
de concerts?
En 2015, nous avons accueilli plusde 4000 spectateurs. Certains sont venus de Chine et d’Australie ! C’estun tourisme de mélomanes. Lesconcerts ont lieu dans des églises enbois d’une acoustique remarquable, voire exceptionnelle.
Propos recueillis
par Stéphane Friédérich
du 11 au 17 juillet, lofotenfestival.com
EN BREF
LES INVITÉSLes pianistes: Jean-Efflam
Bavouzet, Joachim Carr, Bertrand
Chamayou, Ingrid Fliter, Nelson
Freire, Marc-André Hamelin
et Georgy Tchaidze.
Les autres musiciens: l’Engegård
Quartet, Lofoten Festival Strings
et la mezzo-soprano Marianne
Beate Kielland.
FESTIVAL DE LOFOTEN
ENTRE MUSIQUE
DE CHAMBRE ET PIANOKnut Kirkesæther, le directeur de la manifestation,dont la prochaine édition sera dédiée au piano,évoque son histoire et son principe.
La 36e édition du festival s’ouvrepar un prélude à l’Opus (12 mai,à Puteaux) : un récital d’Anna
Fedorova accompagnant la violon-celliste Anastasia Kobekina. Khatiaet Gvantsa Buniatishvili proposerontdes partitions de Brahms, Liszt, Ravel,Gershwin et d’Anthony Girard(15 juin). Denis Matsuev se produira
lors d’une carte blanche (17). Le pia-niste Bruno Fontaine jouera avectrois sopranos, les Jérome Sisters (18).Les jeunes prodiges géorgiens, IliaLomtatidze et Sandro Nebieridze,
ont choisi des pièces de Chopin, deRavel, Sogny, Prokofiev, etc. (24).Les sœurs Labèque donneront des
œuvres diverses, allant de Schumannà Stravinsky, en passant par Tchaï-kovski, Strauss et Satie (30). Fanny Azzuro, quant à elle, accompagnerale Quatuor à cordes Van Kuijkdans des morceaux de Haydn, Men-delssohn, Schumann et la créationmondiale du Quintette pour pianod’Anthony Girard (5 juillet).
du 11 juin au 8 juillet,
festival-auvers.com
FESTIVAL
DE SAINT-DENAu sein de la vaste programmdu festival, on notera la venuNicholas Angelich en trio avmezzo-soprano Karine Deshet le violoniste (et altiste!) RenCapuçon dans des œuvreBrahms (29 mai). Jonas Vi accompagnera l’ensemble vSequenza 9.3 dans des pide Fauré, Vaughan WilliaPoulenc, etc. (4 juin). ALaloum et l’Orchestre de chamde Lausanne (dir. Joshua Westein) joueront le Concerto piano n°23 de Mozart (18).
du 26mai au 24 j
festival-saint-denis.
À L’ABBAYE
DE L’EPAULe festival sarthois accueille, la magnifique abbaye édau XIIIe siècle par BérangèrNavarre, une programmapour l’essentiel vocale. Touteil ne faudra pas manque31mai, la journée «Pianos àles étages » : « Qui va pianalto » avec l’altiste Adrien seau accompagné par le piaGaspard Dehaene. Puis un réde transcriptions réunira Van
Wagner, Wilhem Latchou Cédric Tiberghien et Marie meulin dans des œuvres Debussy, Stravinsky, RavVarèse. Enfin, on retrouVanessa Wagner avec le musélectro Murcof dans un étonspectacle « classicélectro »
du 25 mai au 1er
epau.sarthe.
FESTIVAL D’AUVERS-SUR-OISE
Opus 36
Les îles Lofotensont situées au nordde la Norvège.
Knut Kirkesæther.
V
FannyAzzuro.
S D P
J O H N - A R N E J O H A N N E S S E N
J E A N - B A P T I S T E M I L L O T
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mai-juin 2016 n PIANISTE n°98 n 15
Parlez-nous de la 3e édition
de votre festival…
Je suis passionné par la musi-que de chambre, et pour cette 3e édi-tion, nous avons choisi le « cœur »du romantisme germanique : Brahms,Schumann… Il y aura aussi quel-ques incursions dans le classicismeavec Mozart, Haydn et Beethoven, voire des digressions avec Vieux-temps, Tchaïkovski, Rota et Piaz-
zolla. Pour ce dernier, nous accueil-lerons l’Ensemble Astoria à l’occa-sion de la sortie de son nouvel albumconsacré aux œuvres du compositeurargentin. Une partie des concertssera dédiée au répertoire «habituel »,et une autre sortira des sentiers bat-tus. L’Ensemble Kheops, lui, nousfera voyager dans un « Prélude àl’Orient-Express », de Beethoven àRota, en passant par Mozart, Bruchet Dürrüoglu. Enfin, des artistes bienconnus en France se produiront, tels
que les violonistes Tatiana Samouil,Alissa Margulis et la pianiste ÉlianeReyes avec l’altiste Dimitri Murrath.On retrouve ce goût des mélanges
dans votre disque qui réunit
des pièces de Villa-Lobos,
de Ginastera, de Haydn…
Pas de thématique, ni de concept !Mais un seul fil conducteur : les piècesqui me tiennent à cœur entre deuxcontinents. J’ai découvert la musique
sud-américaine au cours de mesétudes. LesDanses de Ginastera pos-sèdent une énergie folle, des disso-nances étonnantes et flirtent parfoisavec le piano-bar. Un ami brésilienm’a fait découvrir l’œuvre de Villa-Lobos. C’est un univers radicalementdifférent entre ces deux compositeurs,malgré leur proximité géographique.
Propos recueillis
par Stéphane Friédérich
Du 30 septembre au 2 octobre,
brusselschambermusicfestival.be
ENTRETIEN AVEC… JULIEN BEURMS
Double casquetteLe jeune pianiste belge et directeur du Brussels
Chamber Music Festival sort son premier disqueavec le label Azur. Un beau début de carrière.
Académie internationalede musique de Flaine
Cette année, l’institution invitera plusieurs enseignants : FrançoiseBuffet-Arsenijevic, Cécile Edel-Latos, Yoshiko komori et IgorLazkov. À noter, une classe d’accompagnement au piano de Laetitia
Bougnol. Divers concerts seront proposés. Comme tous les ans, l’Académiedécernera quatre grands prix dont un dédié au piano.
du 30 juillet au 13 août, aimdeflaine.fr
G U I L L A U M E K A Y A C A N
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ACTUALITÉS INSTRUMENTSPlus d’infos sur www.pianiste.fr
LE F228 ARIA : QUEL PIED !En février dernier, le facteur italien a présenté le F228 Aria, un magnifiquepiano à queue monopode. L’instrument subjugue par ses qualités musicalesexceptionnelles et son design aérien. Époustouflant !
16 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
FAZIOLI
KAWAI
UNE NOUVELLSÉRIE
ÉCONOMIQUE
Outre la récente gamGX et l’offre de presShigeru Kawai,
la nouvelle série GL, présenlors du dernier salon Musicpropose cinq modèlesdimensionnels, du tout petau grand quart-de-queue :GL-10 (153 cm) testé page 6GL-20 (157 cm), GL-30 (166GL-40 (180 cm) et GL-50(188 cm). Du coup, les pian
GM-10, GE-20 et GE-30disparaissent du cataloguefabricant japonais. Si les qplus grands GL (de 17000 eà 25100 euros) sont produau Japon, le tout petit GL-10(12000 euros), lui, est fabrdans une usine Kawai,en Indonésie. Sa mécaniqula fameuse Millenium IIIen ABS Carbon, reste toute
japonaise. La conceptionet la philosophie de factureces instruments sont similaà celles des pianos GX,plus haut de gamme (touchallongées, limitation des ped’énergie, etc.). En revanchla qualité de certains de lecomposants, comme les têde marteaux, apparaîtplus ordinaire. La finitiondu meuble, moins travailléest aussi plus économique(pieds non évasés, absencede chanfreins sur le couverDans des dimensions
comparables (166 cm, 180et 188 cm), les prix des nouvGL sont 12 à 13 % inférieurà ceux des pianos GX. Des abordables pour des instrumd’une bonne fiabilité et d’uexcellent toucher, qui sédunombre de pianistes. Noustesterons prochainement.
www.kawaifr
L’excellent pianiste d’origine mal-taise, Stefan Cassar, a mis en valeurles qualités musicales spécifiques de
l’instrument, liées à sa constructiontrès particulière. En effet, le fait qu’ilsoit monopode – au lieu des troispieds habituels – a induit l’installa-tion d’une coque en carbone sous lepiano, qui permet une transmissionparticulière du son et, notamment,un accroissement des basses, pour-tant déjà importantes sur le F228de série. Quant à la partie haute dela ceinture arrière, d’une forme incur- vée, elle agit comme un pavillon degramophone et augmente les har-moniques et les aigus.
Côté esthétique, l’élégance et la légè-reté ont été accentuées par l’emploid’un cuir bleu sombre. Ainsi, l’alu-minium brillant du pied et de lacoque se détache mieux. Le cadreest de couleur aluminium doux satiné, le cuir de la banquette dédiéeest fauve, comme la table d’harmo-nie. Si l’ensemble mécanique-clavierest quasiment identique à celui duF228, la tringlerie des trois pédales
a été modifiée. Des solutions hydrau-liques ont été mises en œuvre, afind’adapter la forme très particulière
du pied central.Son démontage pour le transports’avère simple, sécurisé et rapide(moins d’un quart d’heure), grâce àun outillage spécifique bien pensé– un berceau en deux quarts de cer-cle. À l’instar du M. Liminal, l’Ariaa la double vocation d’agrémenterdes lieux majestueux, tels un yacht,un hôtel particulier, un loft ou unpalace, et aussi des salles de concertprestigieuses. Le prix de l’instrumentd’exception, produit pour l’instanten un seul exemplaire, n’a pas encore
été communiqué.Bernard Désormières
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ous souvenez-vous dupiano à queue M. Limi-nal qui avait créé l’évé-
nement au salon Musicoraen 2006 ? Ce modèle audesign futuriste évoquait « un oiseaudont l’aile gauche commence à se déployer et dont l’aile droite est encore colléeau corps ». Imaginé par le designerPhilippe Gendre au sein de la sociétéfrançaise NYT Line, l’instrumentavait été réalisé par le prestigieuxfacteur italien Fazioli à partir d’unquart-de-queue F183. Dix exem-plaires avaient été produits et ven-dus dans le monde entier.La même année, la conception d’un
deuxième modèle assez similaire, maisfabriqué avec la base instrumentaled’un trois-quarts-de-queue FazioliF228, avait été envisagée. Mais ce n’estqu’en janvier 2015 que le projet s’estconcrétisé. Achevé un an plus tard, cepiano d’exception, baptisé Aria, a étéprésenté en février dernier à l’Institutculturel italien de Paris, en présencedu facteur Paolo Fazioli et de PhilippeGendre, dans le cadre d’un concert.
M. Liminal.
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Remplaçant le DGX-650, letout nouveau clavier numé-rique portable DGX-660 de
la firme japonaise, d’un poids d’envi -ron 30 kg, est proposé dans deuxfinitions (noire ou blanche). Il estdoté d’une fonction d’accompagne-ment dans 200 styles de musique etd’un clavier un peu léger de 88 tou-ches GHS (Graded Hammer Stan-dard), qui équipe les modèles P-45 etP-115, premiers prix de la marque.Le DGX-660 accueille égalementune intéressante entrée micro dédiéeaux effets DSP intégrés. Il est doncpossible de chanter et de s’enregis-trer grâce à l’enregistreur USB. Leséchantillons sonores Pure CF Sam-pling sont toujours d’une confortable
polyphonie de 192 notes, et les effetsde réverbération et de résonance ontété améliorés et étendus. Une sec-tion Piano Room offre un large choixde sonorités de pianos avec leur environnement virtuel modifiable.Enfin, grâce à l’acquisition du connec-teur optionnel BlueTooth UB-BT01,on dispose d’une connexion sans fil
entre l’instrument et un iPod Touch,un iPhone, un iPad ou encore unordinateur Mac. Un instrument àprix accessible et au goût du jourpour se divertir ! B. D.
Disponible au prix de 860 euros.
Option connecteur
Bluetooth UD-BT01 à 54 euros
fr. yamaha.com
SALON DE LA
MUSIQUE DE
FRANCFORTLa «Muzikmesse» s’est dérouléedu 7 au 10avril. Avant même son
ouverture, nous avions obtenu en
avant-première quelques infos
significatives, parmi lesquelles
la production interne de têtes de
marteaux C. Bechstein, la présen-
tation d’un piano demi-queue
de salon en érable moucheté de
C. Bechstein aussi, un prototype
audacieux de piano droit inno-
vant de Feurich et un nouveau
modèle de clavier numérique de
Casio. Pianiste était présent sur
le salon. Nous ferons un bilan
complet des nouveautés dans le
domaine des pianos acoustiques
et des claviers numériques dans
notre prochain numéro.
YAMAHA
Compact maiscomplet !
PIANO NUMÉRIQUE
Pour le plaisir de jo
Tout savoir sur le piano numérique B1 : Korgfr.net
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8/18/2019 Pianiste - Mai_Juin 2016
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ACTUALITÉS PARTITIONS, LIVRESPlus d’infos sur www.pianiste.fr
D’où vous vient le goût
pour la composition ?
Je ne me considère pascomme un compositeur« professionnel ». Je res-
sens l’écriture comme un momentde liberté. Un instant caché aussi,que je livre au public lorsqu’il décou- vre l’une de mes pièces en « bis »,à l’issue d’un récital. D’ailleurs, ilm’est arrivé de jouer ma musique par paresse parce que je n’avais pas eu letemps de préparer un morceau vir-tuose, propre à épater l’assistance !Donc vous improvisiez…
Non ! Je n’oserais pas le faire en public. Tout ce que je joue est écrit.Comment sont nées vos œuvres ?
Au départ, il s’agit d’une improvisa-tion dont je trouve la matière inté-ressante. Je l’écris pour m’en rappeler.Beaucoup de partitions sont nées dansles années 1980. Mes proches m’inci-taient à les publier, mais mon activitéd’interprète ne m’en laissait guèrele temps. Puis j’ai franchi le pas.
On ne trouve nulle trace d’études
de composition dans votre
parcours. Pourtant, votre langage
est clairement défini, partant
du romantisme pour aller
vers des harmonies plus ancrées
dans le XXe siècle…
J’ai pratiqué la composition avantl’étude du piano. Je n’ai pas suivide cours de composition mais desclasses d’écriture, notamment celleque Jacques Castérède consacraitaux œuvres du XX e siècle. Au Conser- vatoire de Paris, Pierre Sancan etClaude Pascal m’ont encouragé à
poursuivre dans cette voie. Il paraîtessentiel de maîtriser l’écriture pourne pas écrire trop de banalités. Lamienne s’est nourrie du répertoireromantique, mais je n’ai jamais ima-giné composer des pastiches deMendelssohn ou de Schumann. Je ne cherche pas non plus la nou- veauté pour la nouveauté et j’aipourtant l’impression de porter uneécriture personnelle.
Abdel Rahman El Bacha est non seulement l’undes grands interprètes d’aujourd’hui mais, on le saitmoins, un compositeur dont les œuvres sont publiéesaux éditions Delatour France.
18 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
En lisant vos partitions,
on constate qu’il s’agit
d’une écriture souvent épurée,
qui va à l’essentiel…
Ma culture initiale me portait versune affectivité plus exposée. L’apport
de la culture française a affiné monstyle. Donner davantage de valeur àchaque note, c’est préserver l’essentiel.Quelles sont les esthétiques
du XXe siècle qui vous attirent ?
Nous avons l’embarras du choix, etles éclatements de styles sont bien- venus. Dans le passé, j’ai joué des œu- vres d’Alain Louvier, l’opus 11 deSchoenberg et créé aussi le Concerto
pour piano de Bechara El-Khoury. Trois immenses compositeurs du XX e siècle me parlent au cœur : Ravel,Prokofiev et Rachmaninov. Ils sontde grands repères auxquels j’ajoute-rais Stravinsky, des musiciens sud-américains et espagnols comme Villa-Lobos, Mompou, Rodrigo, Granadosou encore De Falla.Avez-vous songé à composer
pour les plus jeunes ?
Une œuvre pédagogique sera d’autantplus réussie que l’on connaît la per-sonne à laquelle elle est destinée. J’aiécrit des œuvres « occasionnelles »pour mes enfants. Je songe à com-poser des partitions pour débutants,
ce qui est difficile, car elles doiventêtre belles et faire éprouver du plaisir.Quelles seront les prochaines
parutions ?
Des Préludes et chants, un ensemblede partitions avec des styles impré-gnés de culture espagnole, de couleursorientales et de chansons liba naisesque j’ai entendues enfant. Celles-cisont marquées par des modes parti-culiers. Un autre recueil réuniratrois pièces orientales plus longueset plus virtuoses : une danse rituelle,un Bacchus au rythme asymétrique
et des variations sur un air égyptien.Propos recueillispar Stéphane Friédérich
Partitions à découvrir
aux éditions Delatour France
Dix pièces romantiques
Le Monde des enfants,
six pièces pour piano
F. Chopin – Valse posthume
en la mineur (ou mazurka),
version conçue par A. R. El Bacha
DES PARTITIONS
DE BONNECOMPOSITION !
ENTRETIEN
DELATOUR
FRANCETROISREGARDS…Le petit recueil de Stéph
Michot est une belle découv
Ce musicien autodidacte ét
le piano vers l’âge de 20
Pianiste et musicologue, il e
gne aussi. Prélude, Klaviers
et Le poète parle sont les
partitions qu’il propose ici
pièces jouent sur les har
niques. Embuées mais
équilibrées, elles ouvrent
de beaux espaces lyriques
servés dans une tonalité per
nelle, même si les titres su
rent de lointaines réminisce
romantiques.
www.editions-delatour.
PIANOKALÉIDOSCOPVing-deux pièces sont réu
de Bach à Schulhoff, puisant
des éditions déjà parues. Un c
intéressant, car nombre de cd’œuvre y sont présentés,
aussi des partitions que l’on tr
rarement dans les recueils d
type : l’Allegretto D.915 de Schu
la Sonatine HWV581 de Hae
un extrait de la Sonate opu
n°3 de Kozeluch, etc. Des morc
« Urtext » qui ne sont pas do
www.baerenreite
EN BREF
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GER - EXEMPLAIRE NUMERIQUE
Le livre de Stanislaw Dybowski(« The Laureates of the ChopinCompetitions in Varsaw ») a
certes été rédigé en anglais, maisil est des plus instructifs. En effet,pour la première fois, il retrace, de1927, l’année de la première édition, jusqu’en 2005, presque quatre-vingtsans d’histoire de l’un des plus célè-bres concours de piano. Cent dix-sept lauréats sont répertoriés (bio-graphies, œuvres interprétées durantles épreuves, comptes-rendus de lapresse, interviews de l’époque, etc.)dans l’ouvrage. S’y ajoutent près
plaisir, notamment des pianistesfrançais, tels Bernard Ringeissen,Marc Laforêt, Jean-Marc Luisada,Caroline Sageman, Érik Berchotou encore Philippe Giusiano. Lemusicologue a entrepris un long etmagnifique travail d’archiviste qui
amoureux du piano. L’éditeur Selene publie aussi de nombreuxenregistrements consacrés à la musi-que polonaise. S. F.
Éditions Selene, 642 p.,
ouvrage disponible
uniquement sur Internet
mai-juin 2016 n PIANISTE n°98 n 19
ENCYCLOPÉDIE
Les lauréats du Concours
Chopin de Varsovie
Critique littéraire etmusical, RomaricGergorin nous pré-
sente l’un des musiciensles plus insaisissables del’Histoire. Attachant etdéroutant, Erik Satie jon-
religieux. L’auteur décrit parfaite-ment les années d’apprentissage de
l’autodidacte qui forgeamoins son style en absor-bant celui des autresqu’en les refusant métho-
diquement. Occultisme,socialisme, passion pourle Moyen Âge, détesta-tion du romantisme, toutest passé en revue !Malheureux en amour etsans véritable reconnais-sance sociale – il reçoit les
civil et revendique le statut d’anar-chiste libertaire –, le compositeur,
provocateur et solitaire, poursuit sagéniale entreprise de mystificationsonore. Cette biographie dense vaau cœur des angoisses de l’artiste et
étudie implacablement son impos-sibilité à résoudre les dilemmes deses rapports humains alors que lagalerie de personnages qu’il côtoie,issus de tous les milieux, nous sidère.Il veut, comme le dit avec justesseRomaric Gergorin, « sortir de l’his-toire de la musique ». Un pari chère-ment gagné.
Actes Sud/Classica,
176p., 18 euros
BIOGRAPHIE
Erik Satie
Écrivain, éditeur et organisateurde festivals, Jean-Yves Clémenta publié plusieurs ouvrages
consacrés aux musiciens du roman-tisme. Comment faire carrière sansChopin, Liszt et Rachmaninov ?Gould répondit en partie à la ques-tion. De la synthèse d’une immensedocumentation se dresse un portraitdes plus originaux, qui inspire unerègle de vie, au sens religieux du
terme, avec tout ce que cela com-porte d’originalité et de fanatismeartistique. Jean-Yves Clément décor-
tique le « culte Gould », offrant uneréflexion approfondie à partir del’éducation de l’artiste. D’autrespages sont tout aussi intéressantescomme celles dédiées à l’évolutionparadoxale des goûts et à l’obsessionde l’enregistrement audio et vidéodu pianiste. Ce livre érudit intéressera
avant tout ceuxqui connaissentdéjà le réper-
toire, le jeu etle personnageGould. Il est,à lui seul, une
et rythmé se révèle passionnante.Actes Sud/Classica,
176 p., 16 euros
PORTRAIT
Glenn Gould ou le piano de l’esprit
LE SON
DU SILENCE
Moi qui n’ai jamais
été enfant, j’entre dans la salle
immense du Royal Albert Hall
à Londres. » À la premièrephrase de sa biographie,la jeune pianiste sud-coréenneH.J. Lim pose déjà le cadrede son histoire. À 12 ans,elle quitte son pays pour venirétudier en France. Le souffledu récit est court, les phrasessont simples et directes. Troprapides, trop dévoreusesde sons et de silences.
Le récit est au pronompersonnel « je », un « je » dedécouverte, d’émerveillement,d’incompréhensions aussi.Le soutien de la spiritualité,un travail immense portentune vie en musique, rythméed’une écriture fraîche.On lit pêle-mêle les échecset la rencontre des maîtrestel Henri Barda, l’étudedu piano dans un garage,les concours, la Chapellemusicale Reine Elisabeth enBelgique… Ce livre est commetendu vers l’intégrale dessonates de Beethoven, queH.J. Lim a gravée à 24 ans etqui fit débat (Warner Classics).Il y a des défis moins heureux…
Albin Michel,
192 p., 18euros
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À L’AFFICHE
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LUCAS DEBARGUE
La révélation Il n’a décroché « que » le 4e Prix du Concours Tchaïkovski, et pourtantil a éclipsé le nom des trois premiers lauréats. En juillet dernier, le cœurdu public russe a chaviré au rythme des éblouissantes interprétationsdu jeune prodige de 25 ans, inconnu jusque-là des professionnelset des mélomanes. Depuis, sous les feux des projecteurs, il est invitépar les plus prestigieux festivals, enchaîne récitals et interviews, et sortson premier disque consacré à Scarlatti, Liszt, Chopin et Ravel. Rencontre.
VVoici les deux derniers numéros
de Pianiste avec, en couverture,
Vladimir Horowitz et Radu Lupu.
Que vous inspirent-ils ?
Je me souviens de comment RaduLupu avait interprété le Concerto deSchumann. Dès l’entrée des accords,on entend « tout » : tous les sons ettoutes les lignes. C’est aussi surpre-nant que rare. D’habitude, on per-çoit des accords plaqués à l’épaisseur
indistincte. Rien que cela est unique.Quant à Vladimir Horowitz, il estmon maître à penser. C’est un magi-cien, un fantaisiste, un prestidigi-tateur, un menteur, un artiste, biendavantage qu’un pianiste. Bref, unefigure complexe, tournoyante et, àlui seul, une école de civilisation.Deux pianistes aussi
passionnés par le son
que vous-même…
S’agit-il vraiment de son ? Questiondifficile. Quand je travaille une œuvre, je me coule littéralement en elle. Mon
goût ou ma subjectivité en matièrede son passent au second plan.Oui, mais a priori, vous choisissez
des œuvres qui correspondent
à votre goût…
Disons que j’apprends à aimercertains morceaux. Parfois, ils sontingrats comme la sonate de Beethovenque j’ai présentée au Concours Tchaï kov ski [Sonate n°7 en rémajeur opus 10 n°3, ndlr ]. Lorsque
je l’ai découverte, elle ne me parlaitabsolument pas. Je ne l’ai aimée queprogressivement.Alors, pourquoi l’avoir
programmée ?
Elle m’intéressait, primo, parcequ’elle contient des centaines dechoses passionnantes, deuzio, parceque je suis têtu, et tertio, parce qu’ilfaut outrepasser son goût. La musi-que dépasse tout cela. Aimer ou ne
pas aimer Rachmaninov ou Mozart,tout le monde s’en fiche ! Je ne croispas qu’il existe « un » son Mozart,Schubert ou Ravel. Il y a ce qui estbon et ce qui est mauvais, ce qui estennuyeux et ce qui est captivant. Lepéché ultime en musique, c’est pré-cisément d’être ennuyeux. À la pre-mière lecture, je lis une partitionbelle et qui débute par le silence.L’interpréter, c’est assumer de nepas ennuyer son auditoire.Comment le captiver ?
Certainement pas en faisant des
mimiques ! Je vous réponds cela parcequ’il paraît que je bouge beaucoup.Certains trouvent ma manière d’êtreau piano insupportable. On ne peutcaptiver qu’en montrant la vie dela musique, le son qui précède etcelui qui suit la note que vous jouez.Il s’agit de se concentrer, de faireabstraction du trac, d’abord …Le trac n’est pas que le propre
du musicien…
Se retrouver tout nu sur scène, c’estgênant, vous ne trouvez pas ? Il y acomme une forme d’exhibition-nisme et, en même temps, une cer-taine jouissance à l’être. La concen-tration, c’est la mémoire. Tous les
jours, je fais un exercice de mémo-risation. Je possède une excellentemémoire et je peux me rappeler lesdétails de n’importe quelle journéeheure par heure.Rena Shereshevskaya,
avec qui vous travaillez,
affirme que vous avez restitué
la Sonate n°3 de Prokofiev
de tête, sans l’avoir apprise…
En quoi est-ce exceptionnel ? Onécrit aussi que j’ai eu un parcours aty-pique. En quoi l’est-il ? On me ditqu’il est « normal » pour un pianisted’être assis dès l’âge de 3 ans devantle clavier, puis de travailler à l’ado-lescence les Études de Chopindix heures par jour. C’est stupide !Vous imaginez Glenn Gould ainsi ?Les petits singes, qui jouent du pianodepuis leur enfance, ont été sélec-tionnés pour porter le nœud papillon.Cela me donne envie de fuir.Céder au conformisme de passer
un concours, en l’occurrence celui
de Tchaïkovski, n’est-ce pas un peu
contradictoire avec vos propos ?
Nullement ! Le principe du concoursest intéressant parce qu’il représenteune échéance. Nulle échappatoire.Il permet également de se produiresur scène et, pour un pianiste, il n’estpas facile de trouver des engage-ments. L’épreuve offre des conditionsexceptionnelles de jeu. J’étais heu-reux de jouer dans l’acoustique extra-ordinaire de la Grande Salle duConservatoire de Moscou.Précisément, qu’avez-vous
éprouvé quand vous êtes monté
sur scène ?
Dès que je me suis mis à jouer, j’ai ressenti une sorte d’intimité musi-cale bien supérieure à celle que je connais dans des petites salles d’unecentaine de spectateurs. C’était unesensation déroutante dans un lieuaussi vaste et impressionnant.Quel piano aviez-vous choisi ?
Quatre modèles étaient à la dispo-sition des candidats. J’ai opté pour leCFX de Yamaha, qui était le plus
mai-juin 2016 n PIANISTE n°98 n 21
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LUCAS DEBARGUE
EN QUELQUES DATES
1990 Naissance à Parisle 23 octobre2001 Début du pianoau conservatoire de Compiègne,dans la classe de Mme Muenier2007 Arrêt du piano.Faculté de lettres modernes2010-2011Reprise du piano.Études avec Philippe Tamborini2011 Études au Conservatoirede Paris, avec Jean-FrançoisHeisser, études avec RenaShereshevskaya, à l’École normalede musique de Paris2015 4e Prix du ConcoursTchaïkovski de Moscou2016 1er disque chez Sony Classical
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À L’AFFICHE LUCAS DEBARGUE
même époque où je me suis initié
au jazz. Auparavant, j’improvisaisau flair, alors que, paradoxalement,c’est le style musical qui demandele plus de bases techniques.Vous vous mettez au piano assez
tardivement, vers l’âge de 11 ans.
Vous passez par le Conservatoire
de Paris. Vous n’en parlez jamais…
Il y a des gens formidables dans cetteinstitution. J’ai fait l’erreur de nem’inscrire qu’en classe de piano et,
du coup, je n’ai pas rencon
personnalités qui m’auraien J’ai très mal vécu mon passagce cours. C’était la concu totale, la jalousie, l’espionnagpianistes. Tout cela m’était portable, et les méthodes d vail ne m’ont pas convaincu. jamais eu l ’occasion de préun programme de récital en Vous travaillez avec Rena
Shereshevskaya. Ne vous a-
confortable et le meilleur pourles œuvres que je voulais interpréter.Il était très bien réglé, et j’ai retrouvéma balance sonore.Durant le concours, votre rapport
avec le public moscovite
a été extraordinaire. Certainsl’ont expliqué par votre
ascendance russe…
Cela n’est pas avéré à 100 % et, detoute façon, si je me sens une attacheavec la Russie, c’est moins pour desraisons héréditaires que spirituelles. J’ai découvert la musique et la lit-térature de ce pays lorsque j’étaisadolescent et elles m’ont bouleversé.Il est vrai aussi qu’en Russie,
les études musicales sont
intimement liées à un cursus
artistique plus global…
Comment peut-on imaginer qu’iln’en soit pas ainsi ? En France, laspécialisation à outrance de l’ensei-gnement musical professionnel estabsurde et mène souvent à l’impasse,tout simplement parce que la musi-que « dévore » autre chose qu’elle-même. C’est un monstre qui se nour-rit de tous les autres arts. Certains jours, je travaille mieux mon pianoen passant des heures dans une biblio-thèque. C’est dans ces moments-làque je clarifie ma pensée. C’est
autrement plus profitable que de répé-tercomme un fou un ornement dansune pièce de Chopin – lui, le génialimprovisateur – alors qu’il l’auraitpeut-être écrit bien différemmentle lendemain. Qui sait ?Venons-en à votre formation.
On vous dit autodidacte…
C’est faux ! Le malentendu vientdu fait que la plus grosse partie dutravail se fait seul avec la partition. Je n’ai jamais appris à lire la musique,mais enfant, j’avais un besoin vitald’acquérir cet alphabet. Déchiffrer
et jouer, c’était devenu boulimique,addictif. Je lisais et je mettais unmaximum de notes à côté avec lesmoyens techniques dont je disposais,c’est-à-dire pas grand-chose. Har-moniquement, je ne comprenais rienà ce que je faisais. Mes connaissancesen théorie musicale étaient mini-males. En revanche, j’étais très bonen dictée. Je me suis intéressé à l’har-monie il y a deux ans environ, à la
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« Certains jours, je travaille mieux mon piadans une bibliothèque où je clarifiema pensée. C’est autrement plus profitableque de répéter comme un fou. »
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jamais dit que vous aviez
de sérieux problèmes,
notamment techniques ?
Jamais ! À chaque fois que j’ai abordéun problème technique, elle a ren- versé la question en me prouvant
que j’écoutais « mal ». Avoir uneconscience précise de chaque note jouée est essentiel. Ce n’est donc pasune question de doigts ni de réper-toire. Je suis par nature un anarchi-que de la musique. Elle a libéréen quelque sorte mon écoute et m’aappris à apprendre rapidement et« bien». En effet, lorsqu’on est obsédépar des questions techniques, on nepeut pas se consacrer à l’œuvre quel’on veut interpréter. Progressive-ment, j’ai assimilé le programmedu Concours Tchaïkovski – quatreheures de musique tout de même –,qu’elle m’a proposé de tenter dèsnotre deuxième cours.Comment déterminez-vous
votre répertoire ?
Je fonctionne avec des chocs qui pro- viennent de sources diverses commel’écoute d’un interprète. J’ai enviede partir de ce qu’il a proposé et dereprendre l’histoire pour la poursuivreà ma façon. Je déroule une narration jusque dans les sonates de Scarlatti.On m’a d’ailleurs reproché de les
jouer de manière romantique…N’est-ce pas le cas ?Pourquoi inventer une dichotomieentre les styles ? Arbitrairement, toutce qui précède la Révolution fran-çaise serait baroque. On joue doncau tempo tout ce qui appartient àl’Ancien Régime. Tout ce qui succèdeà cette période serait romantique, mar-qué par la « naissance» de l’individu.Il est toutefois étrange que le métro-nome n’ait pas existé à l’époque baro-que et que les partitions aient eu sipeu d’indications de tempos ou de
nuances. On supposait donc que lesmusiciens allaient comprendre pareux-mêmes. « Jouer droit » est doncabsurde dans les répertoires baroqueet classique. On ne chante jamais« droit » parce qu’on interprète. Etinterpréter suppose de connaître par-faitement le texte pour s’en affranchir.Votre répertoire comporte,
comme on l’a entendu
lors du Concours Tchaïkovski,
des pièces rarement jouées,
notamment de Medtner.
D’où vous vient cette passion
pour ce compositeur russe ?
Elle est née chez Arioso, célèbre maga-sin de musique de la rue de Rome,
à Paris. Publicité gratuite ! J’allais y dépenser mon argent de poche et j’aidécouvert l’œuvre de Medtner à l’âgede 14 ans. J’ai plongé dedans et n’ensuis pas ressorti. Sa Sonate n°1 fait explicitement référence au Prélude n°1du clavier bien tempéré de Bach, et sondernier thème est emprunté à la Sym-
phonie « Pathétique » de Tchaïkovski.Cette pièce est germanique et russe,avec une construction beethovénienne.Parlez-nous de la Ballade n°4
de Chopin, qui figure sur le disque
que vous avez enregistré…
La spiritualité de l’œuvre doit surgirdès le début. Les premières mesuressont les plus délicates de la partition.Il me semble qu’il faut travaillerla main gauche seule. Chopin a com-mencé avec cette « sérénade » dontil est nécessaire de retrouver le chantet d’éviter à tout prix une lecture académique. Les accords, presque arpégés, sont ceux d’une guitare oud’une contrebasse dont la mélodie,au-dessus, serait tenue par une flûtefantomatique. Ces divers instru-
ments se croisent avec des intona-tions dissemblables. Il faut gérer cesantinomies tout en restant lucide,car les déplacements à la main gau-che sont techniquement difficiles.Voilà donc une ballade qui est à lafois une forme sonate et une pièceliée à la variation et à la rhapsodie.Pensez-vous que les pianos
modernes soient les plus adaptés
pour restituer l’extrême finesse
de cette polyphonie ?
Vous touchez du doigt un problèmecrucial. Aujourd’hui, convaincre
un label d’enregistrer un disque surun piano ancien, ce n’est pas facile.Idem pour les organisateurs deconcerts! C’est même aller contreles intérêts de tout le monde, car onconstruit des instruments de plusen plus puissants, pour que les pianis-tes et les orchestres jouent encoreplus fort. Je préfère évidemmentla longueur de son d’un vieux Erard,Pleyel ou Bechstein. [
ORCHESTRE SYMPHONIQUEODENSE DU DANEMARK CHEF
ALEXANDRE VEDERNIKOVOPÉRA «LA TRAVIATA»
Boris Berezovsky
David KadouchMikhaïl RudyAnna Vinnitskaya
Muye WuClaire Desert
Andreï KorobeinikovAlexandre KniazevGuillaume Coppola
Evelyne Berezovsky
DU 13 AU 21 AOÛT 2016
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À L’AFFICHE LUCAS DEBARGUE
Prenons l’exemple du croisementdes arts dans votre interprétationde Gaspard de la nuit de Ravel… Je suis assez distrait de nature et j’absorbe par conséquent tout ce qui
passe à ma portée. J’ai trouvé beau-coup d’idées visuelles et sonores pourRavel dans la peinture tardive deGoya. Je pense à sa toile Le Sabbat des sorcières. Cela étant, je n’ai pasd’affinités particulières avec Ravel.Comment cela ?Ce compositeur est adulé, maisd’autres musiciens le mériteraienttout autant, comme Medtner ouHaydn. Ravel est « grand» dans trois
œuvres qui font écho à quelqud’intime dans sa vie. Gasparnuit correspond à la disparitson père, le Trio, juste avant songement pendant la Première Gmondiale, et, enfin, Daphnis equi associe amour chaste et msensuelle. Dans chacune de cesil y a un secret qui m’intéressecoup plus que ceux du TombCouperin ou des Miroirs. Qu joue Gaspard de la nuit, j’oublieComment décririez-vouscette partition ?Cette pièce intemporelle s’oul’infini. Elle n’a pas de contremais la plus grande cohérencmonique sur la durée la plus lRavel n’a pas composé une auttition plus riche avec un mathématique aussi réduit. Les tromières notes de Scarbo sont lpremières notes d’Ondine renvGaspard de la nuit est une œuvrlement «immobile». Nous resun tournoiement, et pourtantqu’il ne se soit rien passé. LaScarbo, c’est presque du « rienÉvoquons vos projets… Je joue la Sonate en si mineur deElle m’a pris du temps pas seusur le plan technique, mais ment en raison de sa constr
monstrueuse, à part dans la ption du compositeur. On ne pcompter sur l’adrénaline commles Rhapsodies ou les Étudesd’extranscendante, car c’est une métaphysique. Je dois aussi dbeaucoup de concerts en Ruen Corée avec le Concerto Beethoven, le Trio de Tchaïen compagnie d’autres lauréConcours Tchaïkovski, les Barde Fauré, les Fantaisiestücke ode Schumann et la Sonate Szymanowski. Cette pièce es
projet le plus ambitieux. C’epartition gigantesque et peu depuis Rubinstein, son créatRichter. Elle est difficile à appmais elle est puissante et intenstionnellement parlant. Il fautdans chaque note et accomplir utable travail d’esclave du son !
Propos re
par Stéphane Fr
Lire la chronique du CD page 75
Vous jouez également du jazz.Cela vous donne-t-il davantagede liberté dans votre interprétationdu répertoire classique ?La vraie liberté n’est ni politique
ni spirituelle : elle s’obtient par lelangage, qu’il s’agisse de littérature– la discipline la plus difficile –, dedanse, de peinture, de musique, etc. Travailler son langage fait émergerun style, donc une respiration dansle flot de nos pensées. Un artistedoit en principe discerner ce quiest important de ce qui ne l’est pas.Il est un trafiquant de ses souvenirs,en quête de l’émotion juste.
24 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
« Travailler son langage fait émerger un style, donc une respiration dans le flot de nos pensées. »
F E L I X B R O E D E / S O N Y M U S I C
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Nos nouveaux pianos LX/HP perpétuent notre tradition de pianos domestiques luxueux destinés aux pianistes de tous niveaux, alliant
la technologie la plus avancée et l’authenticité du toucher dans un design classique et sophistiqué. Leur encombrement minimal
leur permet de se loger dans les espaces les plus restreints, tout en projetant un champ sonore riche et enveloppant grâce à la
remarquable conception de leurs meubles. Embarquant notre tout dernier générateur de sons et notre tout nouveau mécanisme
de clavier, un système de haut-parleurs multicanaux évolué et de nombreuses fonctionnalités numériques, ils vous permettront de
profiter des splendides sons de piano numérique Roland pendant de nombreuses années.
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DOSSIER
26 n PIANISTE n°98 n mai-juin 2016
LLa première raison, assez peu pro-bante, c’est la routine. Le grand réper-toire pianistique s’est mis en placeil y a bien longtemps, et depuis, deshabitudes se sont créées. Un exem-ple : les éditeurs de Beethoven ontcru bon, pour doper leurs ventes, dedonner des titres à quelques sonates.Des bons musicographes ont mêmepris l’initiative d’associer quelques
histoires délicieusement romanti-ques à certaines musiques. La Sonate en ut mineur opus 13 fut publiée sousle titre de « Grande Sonate pathétique ».En fait, elle n’était pas plus déve-loppée qu’une autre, ni plus pathé-tique que la Sonate en ut mineuropus 10 n°1, peu connue. Mais letitre associé à l’énergie du 1er mou- vement et à la tendresse cantabiledu 2e fit la réputation de cette œuvreau demeurant très réussie. Le 1ermou- vement de la Sonata « Quasi una
fantasia » en do dièse mineur, avecle charmant balancement de ses trio-lets, évoquait une rêverie amoureuseau clair de lune. On a pu raconterque Beethoven l’avait écrit en se pro-menantavec sa bien-aimée (immor-telle) dans le parc d’un château,à la brune. Et voilà comment unesonate à la forme atypique devientla Sonate « Au clair de lune » – et
tant pis si les deux autres mouve-ments n’ont rien de lunaire !Concernant la Sonate « Appassionata»,c’est aussi l’éditeur qui la nommaainsi, mais le ton fougueux des deuxmouvements extrêmes suggérait sibien on ne sait quelle passion brutaleque la fortune de la sonate était faiteauprès des amateurs voulant éprou- ver de fortes émotions. Car une par-tie des troupes mélomanes adore seraconter des histoires. C’était vraiau début du XIX e siècle, ça l’est
toujours. Une musique trop abne « parle » pas nécessaireme jeux du son ne suffisent pas resser le gros des amateurs. Lede la Symphonie n°5 de Beet– outre les célèbres «pompompom » et la prodigieuse moduen ut majeur du dernier mment – tient à ce qu’elle a étédérée comme la «Symphonie du
De même, chez Haydn, les synies à titre ont plus de succd’autres. Dans le 1er mouvde « La Poule » – Symphonie on peut entendre une sorte decot » au hautbois !
À juste titre? Ainsi donc, on ne compterait pmorceaux ou les œuvres dont lefut assuré par leur titre. Brève érationnon exhaustive. Chez Mla « Marche turque » – en f« Rondo alla turca » qui n’est
une marche ! – a fait la populala Sonate en la majeur K.331,de ses effets percussifs qui prétimiter les musiques des janissChez Beethoven, la dédicace« bagatelle» vraisemblablemetinée à Therese von Brunswété mal déchiffrée. Au lieu dTherese », on a cru lire « Für EComme on ne connaissait pede ce nom dans la vie du mu
ŒUVRES MÉCONNUESDU GRAND RÉPERTOIRE
MERVEILLES OUBLIÉESC’est un cri de détresse lancé à tous les pianistes et les mélomanes ! Alors que le répertoireest immense, on doit bien admettre que l’on interprète toujours les mêmes « chefs-d’œuvre »,les autres compositions restant sur la touche. Pourquoi cette injustice qui fait que de Schumannon a bien plus de chances d’entendre les Études symphoniques et Kreiseriana que les Chantsde l’aube ou les Feuillets d’album ? Que les Sonates n°8, n°14 et n°23 de Beethoven sontnettement plus à la page au concert et au disque que les n°9, n°15 et n°24 ? Éléments de répon
Extrait de la partitionde la Sonate D.575 de Schubert.Reproduction avecl’aimable autorisation
des éditions Bärenreiter.
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aux Scènes de la forêt , et que le Clair de lune de Debussy est le mouve-ment lent de la Suite bergamasque,qui évoque tout un univers à la Watteau, dont l es pér ipéties de Pierrot et de la lune.
Des chiffres et des lettres
Le titre (ou plutôt son absence) n’estpas seul responsable de la négligenceoù l’on tient certaines œuvres. Aprèstout, les trois dernières sonates deBeethoven se passent de titre – il est vrai que pour les happy few piano-philes, on les désigne par leur numérod’opus (109, 110 et 111), et cette classi-ficationen dit assez aux connaisseurs.
Idem pour l’opus 106 ou les D.958,D.959 et D.960 de Schubert. C’estd’ailleurs beaucoup plus chic de dire« j’adore la D.960 », sans préciser l’auteur – ça va de soi –, plutôt quede confesser que l’on pleure en écou-
tant « Tristesse » de Chopin. Évidem-ment, cette manie des titres fait quel’on passe à côté de merveilles quin’ont pas eu la chance d’être titrées.En vrac, les Sonates n°4 en mi bémol etn°11 en si bémol majeur de Beethoven,les Polonaises en ut mineur opus 40n°2 et en fa dièse mineur opus 44 deChopin, qui ne sont ni « militaires »ni « héroïques », les Sonates en mibémol majeur D.568 et si majeur D.575 de Schubert où le jeune compositeurdevient enfin lui-même, les Nachstücke opus 23 ou les Chants de l’aube deSchumann, où se révèle si bien sonunivers spirituel, les Variations sur unthème de Schumann opus 9 de Brahms,moins brillantes que les Variations sur un thème de Paganini oude Haendel,mais