physique statistique et simulations num eriques ... · 6 formalisme de la sommation d’ewald pour...

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Physique statistique et simulations num´ eriques : introduction aux m´ ethodes de mod´ elisation num´ erique de la mati` ere condens´ ee (gaz, liquides, solides, mol´ ecules biologiques) Marie-Pierre Gaigeot Professeur des Universit´ es au laboratoire LAMBE LAMBE Laboratoire Analyse et Mod´ elisation pour la Biologie et l’Environnement, UMR-CNRS 8587, Universit´ e d’Evry val d’Essonne, at. Maupertuis, F-91025 Evry - France [email protected] Master M2 - PCAV - UE 32 Ann´ ee Universitaire 2007-2008

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Page 1: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

Physique statistique et simulations numeriques :

introduction aux methodes de modelisation

numerique de la matiere condensee

(gaz, liquides, solides, molecules biologiques)

Marie-Pierre Gaigeot

Professeur des Universites au laboratoire LAMBE

LAMBE Laboratoire Analyse et Modelisation pour la Biologie et

l’Environnement, UMR-CNRS 8587, Universite d’Evry val d’Essonne,

Bat. Maupertuis, F-91025 Evry - France

[email protected]

Master M2 - PCAV - UE 32

Annee Universitaire 2007-2008

Page 2: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

Table des matieres

1 Definitions des ensembles thermodynamiques et de la fonction de par-

tition associee 5

1.1 Les ensembles de la mecanique statistique . . . . . . . . . . . . . . . . 5

1.2 Valeur moyenne et fluctuation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.3 Equations du mouvement : formalismes de Newton, de Lagrange, et de

Hamilton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.4 Ensemble microcanonique NVE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

1.5 Ensemble canonique NVT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

1.6 Ensemble grand canonique µVT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

1.7 Modele d’Ising 1D : resolution analytique . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

2 Simulations numeriques 22

2.1 Potentiels d’interaction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

2.1.1 Champ de forces intra-moleculaire . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

2.1.2 Au-dela des expressions harmoniques des interactions intra-molecu-

laires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

2.1.3 Introduction de termes a 3 corps dans les potentiels . . . . . . 34

2.1.4 Champ de forces inter-moleculaire . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

2.1.5 Introduction des effets de polarisation electrostatique : terme a

N-corps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

2.1.6 Potentiels pour les fluides de gaz rare . . . . . . . . . . . . . . . 44

1

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2.1.7 Potentiels pour les clusters de fullerene C60 . . . . . . . . . . . . 45

2.1.8 Potentiels pour les clusters d’oxygene O2 . . . . . . . . . . . . . 46

2.1.9 Potentiels pour l’eau liquide et pour les agregats d’eau . . . . . 47

2.1.10 Potentiels CHARMM et AMBER pour les biomolecules . . . . . 49

2.2 Deux classes de simulations numeriques : T nulle, T finie . . . . . . . . 51

2.2.1 T = 0K . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

2.2.2 T finie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61

2.3 Simulations de dynamique moleculaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

2.3.1 Exploration de l’espace des phases . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

2.3.2 Equations du mouvement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

2.3.3 Conservation de l’energie totale . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65

2.3.4 Algorithmes de resolution des equations du mouvement . . . . . 66

2.3.5 Conditions periodiques aux bords : simulation de milieux continus 70

2.3.6 Liste de Verlet . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73

3 Fluctuations, moyennes et principe d’ergodicite 75

4 Temperature en dynamique moleculaire 79

4.1 Temperature thermodynamique et temperature instantanee . . . . . . . 79

4.2 Distribution gaussienne de Maxwell-Boltzmann . . . . . . . . . . . . . 80

5 Illustration des fluctuations, et conservation de l’energie totale E 83

2

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6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-

tions periodiques 85

7 Dynamique moleculaire dans l’ensemble thermodynamique canoni-

que 85

7.1 Thermostat d’Andersen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

7.2 Thermostat de Nose-Hoover . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

8 Equilibration et echantillonnage en simulations de dynamique mole-

culaire 88

9 Configurations initiales des simulations numeriques de dynamique

moleculaire 91

10 Proprietes issues des simulations de dynamique moleculaire 96

10.1 RMSD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96

10.2 Rayon de gyration de molecules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96

10.3 Energie libre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97

10.4 Fonction de distribution radiale (RDF ou g(r)) . . . . . . . . . . . . . . 97

10.5 Fonctions de correlation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103

10.6 Coefficient de diffusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106

10.7 Spectre vibrationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108

10.8 Spectre infrarouge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

11 Mise en place d’un code de dynamique moleculaire pour des systemes

simples 115

3

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12 Principes de la dynamique moleculaire ab initio 116

12.1 Dynamique de type Born-Oppenheimer . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116

12.2 Dynamique de type Car-Parrinello . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116

Ouvrages de reference

- Computer Simulation of Liquids - M.P. Allen & D.J. Tildesley, Oxford Science Pu-

blications

- Understanding Molecular Simulation - D. Frenkel & B. Smit, Academic Press

- Molecular Modelling, Principles and applications - A.R. Leach, Prentice Hall

4

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1 Definitions des ensembles thermodynamiques et

de la fonction de partition associee

1.1 Les ensembles de la mecanique statistique

La physique statistique (ou mecanique statistique) et la modelisation numerique per-

mettent de definir des grandeurs thermodynamiques macroscopiques (comme la pres-

sion, l’energie libre, l’enthalpie, etc) a partir de la modelisation de systemes a l’echelle

microscopique.

En physique statistique, c’est la connaissance de la fonction de partition d’un systeme

qui permet d’acceder a l’ensemble des grandeurs thermodynamiques. L’apport des si-

mulations numeriques est de permettre le calcul des moyennes d’ensemble sans avoir a

calculer la fonction de partition explicitement.

Il existe plusieurs ensembles thermodynamiques en mecanique statistique : l’ensemble

microcanonique, l’ensemble canonique, l’ensemble grand canonique, et l’ensemble isobare-

isotherme. On suppose que la limite thermodynamique des differents ensembles conduit

aux memes grandeurs thermodynamiques.

En simulation numerique, nous utilisons des systemes modeles de taille finie. Il peut

alors y avoir des differences sur les valeurs des grandeurs thermodynamiques calculees

dans les differents ensembles. Il convient de s’en souvenir, et d’analyser les differences

le cas echeant.

Trois ensembles sont principalement definis ici : l’ensemble microcanonique, l’ensemble

canonique et l’ensemble grand-canonique. Comme nous le reverrons ci-dessous, les en-

sembles de la physique statistique sont caracterises par des grandeurs constantes (par

ex. N, V, E dans l’ensemble microcanonique), le reste des grandeurs n’etant connues que

par une valeur moyenne d’ensemble (c’est-a-dire obtenue dans l’ensemble statistique

5

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thermodynamique de reference) : par exemple on peut calculer les valeurs moyennes

de P ou F dans l’ensemble microcanonique. On dit donc que les variables conjuguees

des grandeurs constantes fluctuent.

1.2 Valeur moyenne et fluctuation

On definit les fluctuations. Si l’on s’interesse a la variable A de valeur moyenne 〈A〉,

alors les fluctuations de A sont definies par σ(A) qui est le RMSD (Root Mean Square

Deviation) tel que :

σ2(A) = 〈δA〉 =⟨

A2⟩

−⟨

A⟩2

(1)

avec

δA = A−〈A〉 (2)

1.3 Equations du mouvement : formalismes de Newton, de

Lagrange, et de Hamilton

• Equations de Newton

La mecanique Newtonienne est regie par les equations du mouvement :

~Fext = m~a (3)

que l’on ecrit pour chaque particule i qui compose le systeme d’interet :

~Fext,i = mi−→ai = mi

d2~ri

dt2=

d~pi

dt(4)

i variant de 1 a N . On doit donc connaıtre l’ensemble des forces qui s’appliquent sur

la particule i, en faire la somme∑ ~Fext,i, et cela est egal au produit de la masse de la

particule par son acceleration (ou a la derivee par rapport au temps de la quantite de

mouvement ~pi). Rappelons que ~F = −∇V : la force est egale au gradient du potentiel

6

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d’interaction (au signe pres). Si l’on connaıt le potentiel d’interaction, on connaıt la

force.

Rappel : ∇ = ∂∂x

~i + ∂∂x

~j + ∂∂x

~k en coordonnees cartesiennes.

Pour les systemes moleculaires qui nous interessent, le potentiel d’interaction est

V (~r1, ~r2, . . . , ~rN) : il depend des 3N coordonnees cartesiennes des particules. Ce po-

tentiel est a N − corps et traduit le fait que les interactions entre les particules sont

couplees (i interagit avec j, qui lui-meme interagit avec k, qui interagit avec l, qui...,

etc). On a donc un systeme compose de N equations differentielles couplees du second

degre en ~r a resoudre pour obtenir la trajectoire de chaque particule i du systeme. On

a besoin de N conditions initiales pour les resoudre (les N positions initiales ~ri).

• Equations de Lagrange

On definit le Lagrangien L(q, dqdt

, t) = K(dqdt

)− V (q) comme la difference entre l’energie

cinetique K(dqdt

) et l’energie potentielle V (q). Ici : q = q1, q2, . . . , qn et q = dqdt

=

dq1

dt, dq2

dt. . . , dqn

dt

= q1, q2, . . . , qn sont les vecteurs de dimension n qui definissent

l’ensemble des variables generalisees et leurs derivees, pour le systeme d’interet. Le

systeme est decrit par n degres de liberte.

Les variables generalisees qi ne sont pas forcement les vecteurs positions (elles peuvent

l’etre mais ce n’est pas obligatoire). Ce sont en general des variables quelconques qui

permettent de simplifier le probleme mecanique et mathematique. Les derivees qi sont

appelees les vitesses generalisees.

La mecanique Lagrangienne verifie les equations suivantes :

d

dt

(

∂L

∂qi

)

−∂L

∂qi= 0

pour chaque variable generalisee qi.

Il y a donc n equations couplees a resoudre. Ce sont des equations du second degre en

qi, et on a besoin de 2n conditions initiales pour les resoudre : n conditions initiales

7

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pour les qi et n conditions initiales pour les qi.

• Equations de Hamilton

Avec les equations de Hamilton, on cherche a ce que le mouvement du systeme soit

decrit par des equations differentielles du premier ordre. On introduit les variables

generalisees qi comme precedemment et les impulsions generalisees pi qui sont definies

par pi = ∂L∂qi

. Les equations de Hamilton sont alors :

qi =∂H

∂pi

−pi =∂H

∂qi

pour chaque valeur de i, et H = K(q)+V (q) est la somme de l’energie cinetique K( dqdt

)

et de l’energie potentielle V (q). Ici : q = q1, q2, . . . , qn et q = dqdt

=

dq1

dt, dq2

dt. . . , dqn

dt

=

q1, q2, . . . , qn sont les vecteurs qui definissent l’ensemble des variables generalisees et

leurs derivees, pour le systeme d’interet.

• Un exemple : le ressort a une dimension

Fig. 1 – Ressort a une dimension suivant l’axe des ~i.

Soit le ressort 1D illustre sur la figure 1. Nous allons montrer que les trois formulations

de la mecanique classique conduisent a la meme equation du mouvement, et donc a la

meme solution.

8

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– Formulation de Newton

L’equation de Newton sur l’axe ~i est :

Fext,x = max

−k(x − x0) = md2x

dt2= mx

Soit l’equation du mouvement a resoudre :

x +k

m(x − x0) = 0

– Formulation de Lagrange

On choisit la variable generalisee q = x et la vitesse generalisee associee q = x. Avec

ce choix, le Lagrangien du systeme est :

L = T − V =1

2mx2 −

1

2k(x − x0)

2

L’equation de Lagrange pour ce couple de variables generalisees est :

d

dt

∂L

∂x−

∂L

∂x= 0

Soit :

d

dt(mx) + k(x − x0) = 0

mx + k(x − x0) = 0

Soit a resoudre :

x +k

m(x − x0) = 0

– Formulation de Hamilton

On choisit la variable generalisee q = x. Le moment generalise associe est p = ∂L∂x

avec L = T − V = 12mx2 − 1

2k(x − x0)

2. Des lors : p = ∂L∂x

= mx

Le Hamiltonien du systeme est H = T + V = 12mx2 + 1

2k(x − x0)

2

9

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Les equations de Hamilton pour le couple de variables generalisees sont :

x =∂H

∂px

−px =∂H

∂x

Soit :

x =∂H

∂px=

∂H

∂(mx)=

1

m

∂H

∂x= x

−px =∂H

∂x⇐⇒ −mx = k(x − x0)

La premiere equation en x est evidemment triviale, et la seconde nous donne l’equation

du mouvement du ressort :

x +k

m(x − x0) = 0

On a bien trouve trois fois (Newton, Lagrange et Hamilton) la meme equation du

mouvement x + km

(x − x0) = 0.

1.4 Ensemble microcanonique NVE

L’ensemble microcanonique est l’ensemble NVE dans lequel le nombre N de particules

du systeme est constant, ainsi que le volume V et l’energie totale E. Notons que cet

ensemble n’est pas l’ensemble naturel des experiences. On travaille en effet plutot a

pression P constante, ou temperature T constante, ou potentiel chimique µ constant.

Par definiton de la mecanique statistique, les variables conjuguees aux grandeurs cons-

tantes de l’ensemble fluctuent. Pour l’ensemble microcanonique, il s’agit de la pression

(variable conjuguee de V), de la temperature (variable conjuguee de E) et du potentiel

chimique (variable conjuguee de N).

Si l’on definit H le hamiltonien du systeme ou H = Ecin + V est la somme de l’energie

cinetique et de l’energie potentielle du systeme, la fonction de partition dans l’ensemble

10

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microcanonique est :

Q(N, V, E) =∑

α

δ(Hα − E) (5)

ou la somme est ecrite sur tous les etats α possibles du systeme. On ecrit ainsi que

seuls les etats α qui ont un Hamiltonien Hα egal a l’energie E sont des etats permis

du systeme.

La grandeur thermodynamique naturelle de l’ensemble microcanonique est l’entropie

S qui est definie comme :

S = k ln Q(N, V, E) = k ln∑

α

δ(Hα − E) (6)

ou k est la constante de Boltzmann.

Les equations de Newton de la mecanique classique conservent l’energie totale : la

mecanique Newtonienne est donc la methode naturelle pour generer les etats α de l’en-

semble microcanonique. Ceci est realise par des simulations de dynamique moleculaire.

Les grandeurs thermodynamiques que l’on derive dans l’ensemble microcanonique sont :

• La temperature :

1

T=

∂S

∂E= k

∂ ln Q(N, V, E)

∂E(7)

soit

1

kT= β =

∂ lnQ(N, V, E)

∂E(8)

ou l’on a definit β = 1/kT l’inverse de la temperature.

• La chaleur specifique a volume constant :

Cv = T∂S

∂T= kT

∂ ln Q(N, V, E)

∂T=

1

β

∂ ln Q(N, V, E)

∂T(9)

11

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1.5 Ensemble canonique NVT

Dans l’ensemble canonique NVT, le systeme est caracterise par un nombre N de parti-

cules constant, un volume V constant et une temperature T constante. Si l’on definit

H le hamiltonien du systeme ou H = Ecin + V est la somme de l’energie cinetique et

de l’energie potentielle du systeme, la fonction de partition canonique s’ecrit :

Q(N, V, T ) =∑

α

e−βH(α) (10)

ou la somme est ecrite sur tous les etats α possibles du systeme. β = 1/kT est l’inverse

de la temperature du systeme (k est la constante de Boltzmann). Dans cet ensemble,

toutes les valeurs de l’energie E sont possibles, et l’on a des fluctuations d’energie.

La grandeur thermodynamique naturelle de l’ensemble canonique est l’energie libre F

definie comme :

F (N, V, T ) = −kT ln Q(N, V, T ) (11)

ou

βF (N, V, T ) = − ln Q(N, V, T ) = − ln∑

α

e−βH(α) (12)

On definit egalement la probabilite que le systeme soit dans la configuration α par :

P (N, V, T ; α) =e−βH(α)

Q(N, V, T )(13)

Les equations de Newton de la mecanique classique qui conservent l’energie totale ne

sont pas les equations appropriees pour generer les etats α de l’ensemble canonique ou

E fluctue. Nous verrons plus loin quelles methodes peuvent etre employees pour generer

les etats de l’ensemble canonique. Les simulations Monte-Carlo sont la methode natu-

relle pour generer les etats de l’ensemble canonique, mais on peut egalement modifier

les equations de Newton de la mecanique classique pour atteindre le meme objectif

avec des simulations de dynamique moleculaire classique.

Les grandeurs thermodynamiques que l’on derive dans l’ensemble canonique sont :

12

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• L’energie interne :

U(N, V, T ) =∂(βF (N, V, T ))

∂β= −

∂ ln Q(N, V, T )

∂β(14)

soit

U(N, V, T ) = −1

Q(N, V, T )

∂Q(N, V, T )

∂β(15)

U(N, V, T ) = −1

Q(N, V, T )

α

−H(α)e−βH(α)

=∑

α

H(α)P (N, V, T ; α)

= 〈H(α)〉

L’energie interne est donc la valeur moyenne du Hamiltonien du systeme, moyenne sur

l’ensemble des etats α possibles.

• La chaleur specifique a volume constant :

Cv(N, V, T ) = T∂F

∂T= −kβ2 ∂U(N, V, T )

∂β(16)

soit

Cv(N, V, T ) = −kβ2 ∂

∂β

α

H(α)P (N, V, T ; α)

= −kβ2 ∂

∂β

α

H(α)e−βH(α)

Q(N, V, T )

= −kβ2∑

α

[

H(α)

Q(N, V, T )

∂e−βH(α)

∂β+ H(α)e−βH(α) ∂

∂β

1

Q(N, V, T )

]

= −kβ2∑

α

[

−H2(α)e−βH(α)

Q(N, V, T )−H(α)e−βH(α) 1

Q2(N, V, T )

∂Q(N, V, T )

∂β

]

= −kβ2∑

α

[

−H2(α)e−βH(α)

Q(N, V, T )+ H(α)e−βH(α) 1

Q2(N, V, T )

α

H(α)e−βH(α) ]

= kβ2∑

α

H2(α)P (N, V, T ; α)− kβ2∑

α

H(α)P (N, V, T ; α)∑

α

H(α)P (N, V, T ; α)

13

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Soit :

Cv(N, V, T ) = kβ2(⟨

H2(α)⟩

− 〈H(α)〉2)

= kβ2⟨

δH⟩

(17)

La chaleur specifique est donc obtenue via l’ecart type des fluctuations du Hamiltonien

du systeme.

1.6 Ensemble grand canonique µVT

L’ensemble grand-canonique est l’ensemble dans lequel le potentiel chimique µ, le vo-

lume V et la temperature T sont constants. La fonction de partition de cet ensemble

est :

(µ, V, T ) =

∞∑

N=0

αN

e−β[HN (αN )−µN ] (18)

ou N est le nombre de particules du systeme, HN est le Hamiltonien du systeme

contenant N particules, et la sommation∑

αNparcourt l’ensemble des configurations

αN du systeme. On peut ecrire(µ, V, T ) comme

(µ, V, T ) =

∞∑

N=0

eβµN∑

αN

e−βHN (αN ) =∞∑

N=0

eβµNQ(N, V, T ) (19)

ou Q(N, V, T ) est la fonction de partition de l’ensemble canonique.

On definit le grand potentiel comme :

βΩ(µ, V, T ) = − ln(µ, V, T ) (20)

C’est une definition analogue a celle de l’energie libre dans l’ensemble canonique.

La grandeur thermodynamique naturelle de l’ensemble grand canonique est PV/kT tel

que :

PV

kT= ln

(µ, V, T ) = ln

∞∑

N=0

eβµNQ(N, V, T ) (21)

On definit la probabilite que le systeme soit dans la configuration αN avec N particules :

P (µ, V, T ; αN) =e−β[HN (αN )−µN ]

(µ, V, T )

(22)

14

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Pour explorer les etats de l’ensemble grand canonique, il faut des schemas qui per-

mettent notamment de faire varier le nombre de particules dans le milieu, en ajoutant

ou en enlevant des particules. Les simulations Monte-Carlo sont les plus appropriees

pour atteindre cet objectif. Il faut egalement savoir calculer le potentiel chimique µ, ce

qui n’est pas trivial.

Les grandeurs thermodynamiques que l’on derive dans l’ensemble grand-canonique

sont :

• Le nombre moyen de particules :

〈N(µ, V, T )〉 = −∂[βΩ(µ, V, T )]

∂(βµ)

=∂[ln

(µ, V, T )]

∂(βµ)

=1

(µ, V, T )

(µ, V, T )

∂(βµ)

=1

(µ, V, T )

∞∑

N=0

αN

Ne−β[HN (αN )−µN ] =∞∑

N=0

αN

NP (µ, V, T ; αN)

• La susceptibilite :

χ(µ, V, T ) =β

〈N(µ, V, T )〉

∂〈N(µ, V, T )〉

∂(βµ)

〈N(µ, V, T )〉

∞∑

N=0

αN

N2P (µ, V, T ; αN) −

(

∞∑

N=0

αN

NP (µ, V, T ; αN)

)2

15

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1.7 Modele d’Ising 1D : resolution analytique

On considere un reseau de N spins si qui peuvent prendre les deux valeurs finies +1

ou −1 : on parle de spin haut(+1) et de spin bas(−1). A une dimension 1D, les spins sont

repartis sur une ligne et sont equidistants de d les uns des autres. Le Hamiltonien du

systeme est :

H = −J∑

i,j

SiSj − Hext

i

Si (23)

dans lequel les spins interagissent seulement avec leurs plus proches voisins (la somme

i,j SiSj est restreinte sur les paires i − j des plus proches voisins). Un critere sera

applique pour definir les plus proches voisins. Par convention, J > 0 correspond a une

interaction ferromagnetique et J < 0 a une interaction antiferromagnetique. Hext est le

champ magnetique externe applique au reseau. La convention est de repliquer le reseau

dans l’espace, comme illustre sur la figure 2, et tel que le premier spin S0 soit egal au

Fig. 2 – Reseau d’Ising 1D et illustration de la periodicite.

dernier spin SN−1 sur la ligne.

Compte tenu de l’interaction entre plus proches voisins, on peut ecrire :

H = −JN−1∑

i=0

SiSi+1 − Hext

N−1∑

i=0

Si (24)

La meme expression du Hamiltonien est utilisee a 1D, 2D, et 3D, les seules differences

etant dans la facon de considerer les voisins. La figure 3 illustre ce point a 2D.

On definit l’aimantation du reseau M =∑

i Si (somme des spins en chaque point du

reseau) et l’aimantation moyenne par spin m = M/N ou N est le nombre de sites du

reseau.

16

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Fig. 3 – Reseau d’Ising 2D (a gauche), et illustration de deux choix possibles (parmi d’autres) de

denombrement de plus proches voisins d’un atome (represente en rouge) (a droite). 1er cas : 4 atomes

voisins (en noir), 2eme cas : 8 atomes voisins (en noir).

Pour connaıtre les proprietes thermodynamiques du reseau de spins 1D, on doit tout

d’abord calculer la fonction de partition du systeme (ici dans l’ensemble canonique)

compose de N spins, les fonctions thermodynamiques etant calculees ensuite. La fonc-

tion de partition est :

Q(N, V, T ) =∑

α

e−βH(α)

=∑

α

eβJP

i,j SiSjeβHext

P

i Si

=∑

α

eβJP

i SiSi+1eβHext

P

i Si

Les etats α canoniques sont les etats qui correspondent aux valeurs permises des spins

du reseau, soit +1 ou −1. Donc :

Q(N, V, T ) =∑

S0=+1,−1

S1=+1,−1

SN−1=+1,−1

eβJ [S0S1+S1S2+....+SN−1S0]eβHext[S0+S2+...+SN−1]

(25)

17

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Q(N, V, T ) =∑

S0=+1,−1

S1=+1,−1

SN−1=+1,−1

eβJS0S1eβHext[S0+S1]/2eβJS1S2eβHext[S1+S2]/2 . . .

. . . eβJSN−1S0eβHext[SN−1+S0]/2

On pose : T (Si, Si+1) = eβJSiSi+1eβHext[Si+Si+1]/2 et la fonction de partition prend alors

l’expression :

Q(N, V, T ) =∑

S0=+1,−1

S1=+1,−1

SN−1=+1,−1

T (S0, S1)T (S1, S2) . . .T (SN−1, S0)

Si l’on prend l’exemple de 3 spins, S0, S1 et S2 tels que S0 = S2 par convention des

repliques, on a :

Q(N = 3, V, T ) =∑

S0=+1,−1

S1=+1,−1

T (S0, S1)T (S1, S0)

On va adopter les notations : T (Si = +1, Si+1 = +1) = T++, T (Si = −1, Si+1 =

−1) = T−−, T (Si = +1, Si+1 = −1) = T+−, T (Si = −1, Si+1 = +1) = T−+

Donc, en considerant toutes les combinaisons de spins possibles, la fonction de partition

est :

Q(N = 3, V, T ) = T++T++ + T−−T−− + T+−T−+ + T−+T+−

Si l’on ecrit la matrice suivante :

T++ T+−

T−+ T−−

On a alors :

T++ T+−

T−+ T−−

T++ T+−

T−+ T−−

=

T++T++ + T+−T−+ T++T+− + T+−T−−

T−+T++ + T−−T−+ T−+T+− + T−−T−−

Soit :

Q(N = 3, V, T ) = Tr = Tr 2 (26)

18

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La fonction de partition du reseau de 3 spins est egale a la trace du produit matriciel

2.

On generalise l’expression a N spins :

Q(N, V, T ) = Tr N (27)

avec toujours la meme matrice d’interactions entre 2 spins voisins.

La matrice est reelle symetrique, donc diagonalisable et ayant des valeurs propres

reelles. La trace d’une matrice est independante de la base dans laquelle la matrice est

calculee. Il suffit donc de diagonaliser la matrice pour obtenir ses valeurs propres et sa

trace facilement. On a ainsi :

=

T++ T+−

T−+ T−−

=

λ1 0

0 λ2

et

2 =

λ21 0

0 λ22

soit

Q(N = 3, V, T ) = Tr 2 = λ21 + λ2

2 (28)

En generalisant a N quelconque, on a :

Q(N, V, T ) = Tr N = λN1 + λN

2 (29)

ou les λi sont les valeurs propres reelles de la matrice .

Pour la diagonalisation de la matrice : il faut resoudre | − λ | = 0 ou est la

matrice identite composee de 1 sur la diagonale et 0 hors diagonale.

| − λ | =

eβ(J+Hext) − λ e−βJ

e−βJ eβ(J−Hext) − λ

= 0

qui donne les deux solutions suivantes :

λ = eβJchβHext ±√

e2βJch2βHext − 2sh2βJ (30)

19

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que l’on note

λ+ = eβJchβHext +√

e2βJch2βHext − 2sh2βJ

et λ− = eβJchβHext −√

e2βJch2βHext − 2sh2βJ

Dans ces conditions :

Q(N, V, T ) = Tr N = λN+ + λN

− = λN+ (1 + (

λ−

λ+)N)

avec∣

λ−

λ+| < 1

Dans la limite ou N 1, on a alors :

Q(N, V, T ) =λN+ (1 + (

λ−

λ+

)N) = λN+ (31)

Soit :

Q(N, V, T ) =[ eβJchβHext +√

e2βJch2βHext − 2sh2βJ]N (32)

que l’on peut reecrire a l’aide des definitions de sh, ch et ch2a − sh2a = 1 par :

Q(N, V, T ) = eβNJ[

chβHext +√

sh2βHext + e−4βJ ]N (33)

On connaıt la fonction de partition du reseau 1D de spins d’Ising, on peut donc deduire

les grandeurs thermodynamiques du milieu.

Ainsi l’energie libre est :

F = −kT ln Q(N, V, T ) = −NkT ln[ eβJchβHext +√

e2βJch2βHext − 2sh2βJ ] (34)

Si Hext = 0 : F = −NkT ln(2chβJ)

L’aimantation du systeme est :

M = −∂F

∂Hext= kT

∂ ln Q(N, V, T )

∂Hext= kT

1

Q(N, V, T )

∂Q(N, V, T )

∂Hext(35)

Soit apres plusieurs lignes de calculs :

M = NeβJshβHext

e2βJsh2βHext + e−2βJ(36)

20

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L’energie interne du systeme est :

U = −∂ ln Q(N, V, T )

∂β= −

1

Q(N, V, T )

∂Q(N, V, T )

∂β(37)

Soit apres plusieurs lignes de calculs :

U = −NJsh2βJ + eβJ(JchβHext + HextshβHext)(e

βJchβHext +√

e2βJsh2βHext + e−2βJ)

(eβJchβHext +√

e2βJsh2βHext + e−2βJ)(e2βJsh2βHext + e−2βJ)

qui donne une expression plus sympathique pour Hext = 0 :

U = −NJeβJ(2eβJ − e−βJ)

L’ensemble de ces calculs montre que meme pour un systeme tres simple, l’obtention de

la fonction de partition est difficile a obtenir analytiquement, et les derivees suivantes

pour l’obtention des grandeurs thermodynamiques est encore plus difficile.

On peut encore obtenir l’expression analytique de M pour un reseau d’Ising 2D place

en champ externe nul Hext = 0, comme l’a demontre Onsager en 1944. Au-dela, rien

ne peut etre fait analytiquement, et l’on doit avoir recours aux simulations numeriques

pour resoudre le probleme. Pour les reseaux d’Ising, on emploie la methode de Monte-

Carlo, car seules les proprietes statiques du milieu sont pertinentes. Il existe un grand

nombre de publications de simulations Monte-Carlo pour obtenir les proprietes ther-

modynamiques et magnetiques des reseaux d’Ising.

21

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2 Simulations numeriques

Pour obtenir les proprietes statistiques d’un systeme donne, il s’agit de savoir calculer

la fonction de partition (dans l’ensemble thermodynamique choisi) et de deriver les

grandeurs voulues, comme realise precedemment. On a vu avec le modele d’Ising 1D le

plus simple combien cela est complexe et difficile a realiser analytiquement.

C’est ici qu’interviennent les simulations numeriques.

Dans le domaine de la modelisation des proprietes des molecules, des liquides ato-

miques et moleculaires, des milieux de la matiere condensee (gaz, liquides, solides,

homogenes et heterogenes), des biomolecules isolees ou en liquide, des membranes, les

simulations numeriques sont principalement de deux types : simulations Monte-Carlo et

simulations de dynamique moleculaire. Les simulations Monte-Carlo permettent prin-

cipalement de determiner des proprietes thermodynamiques et statiques, alors que les

simulations de dynamique moleculaire permettent d’acceder aux proprietes thermody-

namiques, statiques mais egalement aux proprietes dynamiques. Le choix de la methode

est donc principalement lie aux proprietes que l’on souhaite calculer (statique versus

dynamique). Les deux methodes donnent des resultats equivalents sur les proprietes

thermodynamiques (diagramme de phase par exemple), mais la dynamique moleculaire

apporte en plus la connaissance des proprietes dynamiques du liquide.

Dans la suite de ce cours, nous allons decrire precisement les principes des simulations

de dynamique moleculaire. Les simulations Monte-Carlo ne sont pas presentees, par

manque de temps. Une autre raison est que les simulations de dynamique moleculaire

sont la methode principale employee pour la modelisation des proprietes des bio-

molecules. Ceci fait l’objet de l’UE34 couplee a cette UE32.

Rappelons ici qu’en dehors de la modelisation des proprietes de la matiere condensee, la

resolution des equations differentielles couplees qui regissent les equations des systemes

22

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est obtenue par la methode des elements finis. C’est le cas en particulier des modelisations

realisees dans le domaine de l’aeronautique (avions, voitures) et de la climatologie. Nous

ne presentons pas ces methodes ici.

Avant d’aller plus loin, la grandeur de base dans les simulations numeriques de Monte-

Carlo et de dynamique moleculaire est le potentiel d’interactions (ou champ de forces)

qui regit les interactions entre les particules du milieu et donc les mouvements. Nous

allons donc decrire precisement les champs de forces.

2.1 Potentiels d’interaction

Rappelons immediatement que la facon correcte de traiter les interactions entre atomes

et molecules est de resoudre l’equation de Schrodinger de la mecanique quantique ecrite

ci-dessous dans l’approximation de Born-Oppenheimer :

HΨ(~r1, ~r2, . . . ., ~rN) = E(~R1, ~R2, . . . , ~RM)Ψ(~r1, ~r2, . . . ., ~rN) (38)

ou H est l’operateur Hamiltonien quantique du systeme considere, Ψ(~r1, ~r2, . . . ., ~rN) est

la fonction d’onde du systeme qui depend de la position des N electrons du systeme,

et E est l’energie du systeme qui depend de facon parametrique de la position des

noyaux, soit E(~R1, ~R2, . . . ., ~RM). Les atomes et molecules interagissent via leurs nuages

electroniques. Resoudre l’equation de Schrodinger est couteux en temps de calculs, et

ne peut encore a l’heure actuelle n’etre realisee que pour des systemes composes de

quelques centaines d’atomes au maximum. Ceci restreint le champ d’investigation.

Pour aller au-dela, on se place dans le cadre de la mecanique classique dans laquelle les

electrons ne sont pas pris en compte et les atomes sont des particules ponctuelles. Les

nuages electroniques ne sont plus directement presents dans la representation, et l’on

doit modeliser les vraies interactions quantiques entre les nuages electroniques par des

modeles classiques d’interactions. Le developpement de potentiels d’interaction (ou de

23

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champs de forces) est un domaine de recherche a part entiere, qui est tres complexe.

Dans la suite, je presente les lignes directrices bien etablies.

Le potentiel d’interaction est une fonction des positions des atomes (ou noyaux) du

systeme moleculaire, soit l’expression generale V ( ~R1, ~R2, . . . , ~RM) dans laquelle ~Ri

est la position cartesienne du noyau i. On note indifferemment V ( ~R1, ~R2, . . . , ~RM) et

V (~r1, ~r2, . . . , ~rM). Comme on le voit sur la figure 4, la surface d’energie potentielle (ici

representee a 3D) est complexe : elle est composee de minima, d’extrema, de bassins

d’attraction de largeur et de profondeur variees. C’est un domaine “rugueux”.

Fig. 4 – Illustration de la complexite d’une surface de potentiel.

Le potentiel d’interaction est decompose en deux parties : le potentiel intra-mole-

culaire et le potentiel inter-moleculaire. A la place de potentiel d’interaction,

on emploie aussi le terme champ de forces. Dans notre texte, nous emploierons

indifferemment les deux expressions. Globalement, les interactions intra-moleculaires

24

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maintiennent les liaisons chimiques naturelles des molecules et permettent aux molecules

de se deformer, et les interactions intermoleculaires assurent l’organisation generale de

la matiere, par exemple les associations ou non entre molecules, la solvatation des

molecules.

La partie intra-moleculaire n’a de sens que pour des molecules. Cette partie prend en

effet en charge les interactions entre atomes a l’interieur de la molecule. Par exemple,

pour la molecule d’eau dessinee sur la figure 5, le champ de forces intra-moleculaire

Fig. 5 – Molecule d’eau composee d’un atome d’oxygene (rouge) et de deux atomes d’hydrogene

(gris).

modelise les interactions entre l’oxygene et chacun des hydrogenes a l’interieur de la

molecule.

La partie inter-moleculaire prend en charge les interactions entre atomes qui appar-

tiennent a des molecules differentes. Par exemple, les interactions entre atomes d’oxy-

genes de 2 molecules d’eau differentes, entre l’oxygene d’une molecule d’eau et les

hydrogenes de l’autre molecule d’eau dans le cas du dimere d’eau illustre sur la fi-

gure 6. Bien evidemment, si on modelise un milieu compose d’atomes uniquement (qui

ne forment pas de molecules), on a seulement des interactions inter-moleculaires.

Pour les molecules comprenant plus de 4 atomes, comme les molecules biologiques,

on a coutume de realiser une separation intra/inter-moleculaire legerement differente.

On parle d’interaction intra-moleculaire si les atomes qui interagissent sont au maxi-

25

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Fig. 6 – Illustration d’un dimere compose de deux molecules d’eau.

mum separes par 3 liaisons chimiques consecutives. Si les atomes sont distants de plus

de 3 liaisons chimiques, on parle alors d’interactions inter-moleculaires, meme si les

atomes appartiennent a la meme molecule ! On emploie la nomenclature suivante :

1-2, 1-3 et 1-4 representent les interactions intra-moleculaires et >1-4 represente les

interactions inter-moleculaires. La notation 1-2 signifie que l’on calcule les interactions

intra-moleculaires entre 2 atomes consecutifs separes par une liaison chimique (interac-

tion de stretching), 1-3 signifie que l’on calcule les interactions intra-moleculaires entre

3 atomes relies par 2 liaisons chimiques (interaction de bending), et 1-4 signifie que l’on

calcule les interactions intra-moleculaires entre 4 atomes relies par 2 liaisons chimiques

consecutives (interaction de torsion). Ceci est illustre sur la figure 7.

26

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tau

1

2,3

4

2

3

1

phi3

phi2

4

1

4

3

1’’

thetas1

s4

s2 s3

2

21

r 12 s2

s1

s2s3

1

2 phi 3

r12 r13

StretchBending

s1

Torsion propre

Torsion impropre

1

2

3

phi3

phi2

phi14

Fig. 7 – Illustration des coordonnees de stretch, bend, torsion, associees a la nomenclature 1-2,

1-3, 1-4 des interactions intra/inter-moleculaires employee pour traiter les interactions au sein des

molecules biologiques.

27

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Par definition, un champ de forces est un objet mathematique a N − corps c’est-a-

dire qui modelise les interactions entre les N atomes du systeme. On a par definition

V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN) ou ~ri represente la position de l’atome i dans l’espace. Cela signifie que

l’interaction de l’atome i avec l’atome j depend egalement de l’interaction de l’atome

j avec l’ensemble des autres atomes du systeme.

On simplifie et decompose l’expression generale V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN) a N-corps par une

somme de termes a 1-corps, 2-corps, 3-corps, 4-corps, etc de la maniere suivante :

V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN) =N∑

i=1

V (~ri) +N∑

i,j=1

V (~ri, ~rj) +N∑

i,j,k=1

V (~ri, ~rj, ~rk) + . . . . (39)

Cette decomposition est tronquee a l’ordre voulu. En general, on tronque a l’ordre

2, c’est-a-dire aux termes a 2-corps, ou a l’ordre 3 aux termes a 3-corps. On va tres

rarement au-dela, car la mise en place des expressions des potentiels au-dela de 3-corps

est tres compliquee. Le terme a 1-corps V (~ri) represente l’interaction de la particule i

avec un champ exterieur (electrique ~E ou magnetique ~B). Dans la majorite des calculs

que nous realisons, il n’y a pas de champ exterieur applique. Dans ces conditions,

l’expression generale du potentiel d’interaction est :

V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN) =

N∑

i,j=1

V (~ri, ~rj) +

N∑

i,j,k=1

V (~ri, ~rj, ~rk) + . . . . (40)

Nous decrivons dans la suite les expressions usuellement employees pour les differents

termes du champ de forces.

La figure 8 schematise les interactions intra-moleculaires et inter-moleculaires que nous

allons maintenant detailler.

28

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Fig. 8 – Illustration des interactions intra-moleculaires et inter-moleculaires. Les interactions intra-

moleculaires sont les 3 en haut de la figure : stretching, bending et torsion. Les interactions inter-

moleculaires sont les 2 en bas de la figure : electrostatique et van der Waals. Extrait du livre de

A. Leach.

Pour la suite, on definit :

∇i = ∂∂xi

~i + ∂∂yi

~j + ∂∂zi

~k ∇j = ∂∂xj

~i + ∂∂yj

~j + ∂∂zj

~k

rij =[

x2ij + y2

ij + z2ij

]1/2

~rij = ~rj − ~ri soit xij = xj − xi, yij = yj − yi, zij = zj − zi

29

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2.1.1 Champ de forces intra-moleculaire

En general, le champ de forces intra-moleculaire est decompose comme une somme d’in-

teractions entre des ressorts harmoniques. Ces ressorts representent les mouvements

d’elongation et de contraction des liaisons covalentes (entre 2 atomes consecutifs),

les mouvements d’ouverture et de fermeture des angles covalents (entre 3 atomes

consecutifs), les mouvements de torsion autour d’une liaison covalente (et faisant in-

tervenir 4 atomes consecutifs). Se referer a la figure 8.

Les expressions analytiques employees sont maintenant presentees.

• Elongation et contraction des liaisons covalentes (stretching)

V (i, j) =1

2kij

[

(

xij − x0ij

)2+(

yij − y0ij

)2+(

zij − z0ij

)2]

(41)

ou kij est la constante de raideur du ressort, xij, yij et zij sont les composantes du

vecteur position relative entre les 2 atomes i et j de la liaison covalente, x0ij, y0

ij et z0ij

les composantes du vecteur de reference autour duquel les deux atomes vibrent.

Les forces associees sont :

~Fi = −∇iV (i, j) = kij

(

xij − x0ij

)

~i + kij

(

xij − x0ij

)

~j + kij

(

xij − x0ij

)

~k = −~Fj (42)

• Ouverture et fermeture des angles de valence (bending)

V (i, j, k) =1

2kijk

(

θijk − θ0ijk

)2(43)

30

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ou kijk est la constante de raideur du ressort, θijk est l’angle de valence entre les 3

atomes i, j et k, et θ0ijk est l’angle de valence de reference autour duquel les trois

atomes vibrent.

• Torsion autour des liaisons covalentes

Plusieurs formes peuvent etre mises en place, et les plus employees dans la litterature

sont les deux suivantes :

V (i, j, k, l) =

M∑

n=0

Vn

2[1 + cos(nω − γ)] (44)

ou ω est l’angle de torsion, n est un entier que l’on choisit, γ est une phase que l’on

choiosit, et Vn est l’amplitude maximale.

Une autre expression est :

V (i, j, k, l) =M∑

n=0

Cn cos(ω)n (45)

ou Cn est l’amplitude.

On illustre sur les figures 9-10 des courbes de variation de l’energie potentielle de

torsion, pour les differentes expressions presenteees ci-dessus et differentes valeurs des

parametres.

31

Page 33: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

Fig. 9 – Energie potentielle de torsion, extrait du livre de A. Leach.

Fig. 10 – Energie potentielle de torsion, extrait du livre de A. Leach.

32

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2.1.2 Au-dela des expressions harmoniques des interactions intra-molecu-

laires

• Potentiel de Morse

Plutot que d’employer des expressions harmoniques du type V = 12k(σ − σ0)

2 on peut

introduire un potentiel de Morse qui prend en compte des effets anharmoniques du

potentiel. L’expression generale est :

VMorse = De

1 − e−a(σ−σ0)2

(46)

Une comparaison entre les deux potentiels est illustree sur la figure 11.

Fig. 11 – Illustration des courbures differentes d’un potentiel harmonique et d’un potentiel anhar-

monique de type Morse, extrait du livre de A. Leach.

• Termes de couplages entre coordonnees internes

On peut egalement aller au-dela des expressions 41 et 43 precedentes, en prenant en

compte les couplages entre coordonnees internes : couplage stretch/stretch, stretch/bending,

stretch/torsion, etc ...

33

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On a alors des expressions du type :

V (i, j, k, l) =kijkl

2

[(

xij − x0ij

)

(xkl − x0kl) +

(

yij − y0ij

)

(ykl − y0kl) +

(

zij − z0ij

) (

zkl − z0kl

)]

(47)

pour le couplage entre le stretch i − j et le stretch k − l, et

V (i, j, k, l) =kijkl

2

[(

lij − l0ij)

+(

lkl − l0kl

) (

θ − θ0)]

(48)

pour le couplage entre les 2 stretches i − j et k − l et le bending θ qui les associe.

Les champs de forces qui introduisent des termes de couplage entre coordonnees internes

ne sont utilises que dans des modelisations tres specifiques, notamment pour modeliser

des spectres vibrationnels de molecules.

2.1.3 Introduction de termes a 3 corps dans les potentiels

On peut introduire des interactions a 3-corps sous la forme de Axilrod-Teller :

V (i, j, k) = E0

[

1 + 3 cos γi cos γj cos γk

(rijrikrjk)3

]

(49)

ou rij, rik et rjk sont les trois distances entre les 3 atomes i, j, k, et γi, γj, γk les trois

angles entre les atomes.

34

Page 36: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

2.1.4 Champ de forces inter-moleculaire

Les interactions inter-moleculaires sont classiquement modelisees par les interactions

coulombiennes et les interactions de van der Waals. Se referer a la figure 8.

Toute molecule possede une densite electronique en mecanique quantique, que l’on

modelise classiquement par une distribution electrique multipolaire composee en general

de charges ponctuelles localisees sur chaque atome, de dipoles ponctuels loca-

lises sur chaque atome et de quadrupoles ponctuels localises sur chaque atome. On

peut pousser le developpement multipolaire au-dela des quadrupoles si on le souhaite.

Dans la pratique, on arrete souvent le developpement multipolaire a l’ordre le plus

bas, c’est-a-dire aux charges ponctuelles localisees sur les atomes. Plusieurs raisons a

cela, dont une principale : comme nous le verrons ci-dessous, les interactions et forces

electrostatiques entre charges ponctuelles sont faciles a calculer et peu couteuses en

temps de calculs, ce qui est un tres net avantage pour les simulations numeriques.

Il est evident que la somme des charges ponctuelles reparties sur les atomes est egale a

la charge totale de la molecule consideree, que la somme des dipoles ponctuels repartis

sur les atomes est egale au dipole permanent de la molecule consideree, etc. Ainsi, pour

la molecule d’eau representee sur la figure 12 : la distribution electronique quantique de

la molecule d’eau est classiquement approximee par trois charges ponctuelles localisees

sur les trois atomes de la molecule, avec qO = -0.834 e et qH = 0.417 e, telles que leur

somme vaille bien zero (qO + 2qH).

Les champs de forces electrostatiques qui prennent en compte des multipoles au-dela

des charges ponctuels atomiques sont qualifies de champs de forces evolues. Ce sont

principalement les champs de forces de Anthony Stone en Angleterre et de Pierre Clave-

rie et Nohad Gresh en France. On notera que pour ces champs de forces, les multipoles

sont a la fois localises sur les noyaux atomiques (sur les atomes) mais egalement sur

les barycentres des liaisons chimiques covalentes. Ces champs de forces sont tres precis

35

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Fig. 12 – Champ de forces coulombien TIP3 pour l’eau schematise ici : trois charges ponctuelles

localisees sur les trois atomes de la molecule telles que qO = -0.834 e et qH = 0.417 e. La charge totale

est bien egale a zero : molecule neutre.

mais egalement tres couteux en temps de calculs pour des simulations de dynamique

moleculaire.

Les interactions de van der Waals, dites de dispersion a longue distance et de repulsion

a courte distance modelisent les interactions d’origine purement quantiques d’associa-

tions entre dipoles induits a longue distance et de repulsion de Pauli a courte distance

(qui specifie que deux electrons de meme spin ne peuvent occuper la meme orbitale

atomique quantique).

• Expressions generales des termes electrostatiques

On presente ci-dessous une facon compacte d’exprimer les termes electrostatiques. On

se reporte a la figure 13.

On considere un ensemble d’atomes numerotes i avec i = 1 − N , chacun portant une

charge ponctuelle qi, un dipole ponctuel ~pi =

pix

piy

piz

(dipole ponctuel permanent ou

induit, comme nous le verrons dans la suite), un quadrupole Qi qui est un tenseur de

36

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Fig. 13 – Schema de principe : un ensemble de multipoles localises aux points ~ri de l’espace et le

point ~r de l’espace sur lequel les calculs seront realises. Note : le point ~r peut etre un point quelconque

de l’espace ou un point ~rq correspondant a la position d’un multipole.

dimension 3*3 tel que Qi =

Qixx Qixy Qixz

Qiyx Qiyy Qiyz

Qizx Qizy Qizz

.

Chaque atome est localise en ~ri de l’espace. Le vecteur ~ri est de composantes xi, yi, zi.

Le potentiel electrostatique V (~r) qui est cree par cet ensemble de multipoles en

n’importe quel point ~r de l’espace est :

V (~r) =N∑

i=1

(

qi − ~pi.∇~r + Qi : ∇~r∇~r

) 1

|~ri − ~r|(50)

ou

|~ri − ~r| est la distance qui separe l’atome i localise en ~ri du point ~r de l’espace

∇~r = ∂∂x

~i + ∂∂y

~j + ∂∂z

~k est le vecteur gradient exprime selon les coordonnees x, y, z du

vecteur ~r de l’espace

~pi.∇~r est le produit scalaire entre le vecteur ~pi et le vecteur ∇~r

Qi : ∇~r∇~r =∑

α,β=x,y,z Qiαβ∂

∂xα

∂∂xβ

avec xα = x ou xα = y ou xα = z et xβ = x ou

xβ = y ou xβ = z

soit

37

Page 39: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

Qi : ∇~r∇~r = Qixx∂2

∂x2 +Qixy∂∂x

∂∂y

+Qixz∂∂x

∂∂z

+Qiyx∂∂y

∂∂x

+Qiyy∂2

∂y2 +Qiyz∂∂y

∂∂z

+Qizx∂∂z

∂∂x

+

Qizy∂∂z

∂∂y

+ Qizz∂2

∂z2

Le champ electrostatique ~E(~r) qui est cree par cet ensemble de multipoles en

n’importe quel point ~r de l’espace est :

~E(~r) = −∇~rV (~r) (51)

La force electrostatique ~F (~r) qui est cree par cet ensemble de multipoles en n’im-

porte quel point ~r de l’espace est :

~F (~r) = −∇~rU(~r1, ~r2, · · · , ~rN) (52)

ou L’energie electrostatique U(~r1, ~r2, · · · , ~rN) de l’ensemble de N multipoles est :

U(~r1, ~r2, · · · , ~rN) =1

2

N∑

i=1

N∑

j=1

(

qi − ~pi.∇~rj+ Qi : ∇~rj

∇~rj

) (

qj − ~pj.∇~ri+ Qj : ∇~ri

∇~ri

) 1

|~ri − ~rj|

(53)

En utilisant la propriete ∇~rj

1|~ri−~rj |

= −∇~ri

1|~ri−~rj |

, on obtient :

U(~r1, ~r2, · · · , ~rN) =1

2

N∑

i=1

N∑

j=1

(

qi + ~pi.∇~ri+ Qi : ∇~rj

∇~rj

) (

qj − ~pj.∇~ri+ Qj : ∇~ri

∇~ri

) 1

|~ri − ~rj|

(54)

On ecrit maintenant certaines de ces expressions dans des cas simples : un ensemble de

N charges ponctuelles seulement, puis un ensemble constitue de N charges ponctuelles

et de N dipoles ponctuels. Ce sont les cas que l’on rencontrera le plus souvent dans

nos modelisations moleculaires.

38

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• Interactions coulombiennes entre charges ponctuelles

Tout atome du milieu portant une charge qi interagit avec un autre atome portant la

charge qj via l’energie potentielle d’interaction coulombienne :

UC(i, j) =1

4πε0

qiqj

rij

(55)

En coordonnees cartesiennes, la force ~Fi qui s’applique sur l’atome i est donc :

~Fi = −∇iUC(i, j)

et ~Fj celle qui s’applique sur l’atome j est :

~Fj = −∇jUC(i, j)

On a :

~Fi = −qiqj

4πε0

1

r3ij

[

(xj − xi)~i + (yj − yi)~j + (zj − zi)~k]

(56)

et

~Fj = −∇jV (qi, qj) =qiqj

4πε0

1

r3ij

[

(xj − xi)~i + (yj − yi)~j + (zj − zi)~k]

= −~Fi (57)

• Interactions coulombiennes entre charges et dipoles ponctuels

Le systeme constitue de N charges ponctuelles et de N dipoles ponctuels possede

l’energie electrostatique :

U(~r1, ~r2, · · · , ~rN) =1

2

N∑

i=1

N∑

j=1,j 6=i

(qi + ~pi.∇~ri) (qj − ~pj.∇~ri

)1

|~ri − ~rj|(58)

Soit apres quelques lignes de calculs (Attention a bien appliquer les derivations dans

le bon ordre !) :

U(~r1, ~r2, · · · , ~rN) =1

2

i,j,i6=j

[

qiqj

rij

+1

r3ij

(−qi ~pj + qj ~pi) . ~rij + ~pi .T ij. ~pj

]

(59)

39

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avec

~rij = ~rj − ~ri

|~rj − ~ri| = |~rij|

T ij =1

r3ij

(

1 − 3Aij

r2ij

)

Aij =

(xj − xi)2 (xj − xi)(yj − yi) (xj − xi)(zj − zi)

(yj − yi)(xj − xi) (yj − yi)2 (yj − yi)(zj − zi)

(zj − zi)(xj − xi) (zj − zi)(yj − yi) (zj − zi)2

et 1 est la matrice unite (valeurs 1 sur la diagonale, 0 hors de la diagonale).

La force ~Fi qui s’applique sur l’atome i est donc :

~Fi = −∇~riU(~r1, ~r2, · · · , ~rN)

et ~Fj celle qui s’applique sur l’atome j est :

~Fj = −∇~rjU(~r1, ~r2, · · · , ~rN) = −~Fi

2.1.5 Introduction des effets de polarisation electrostatique : terme a N-

corps

En mecanique quantique, le nuage electronique de chaque molecule (qui est represente

par la densite electronique ρ(~r)) est polarisable, c’est-a-dire que la molecule peut

acquerir un dipole de polarisation meme si initialement elle n’est pas dipolaire. De

meme, un ion est polarisable.

La polarisation est le reflet du deplacement de densite electronique autour de chaque

noyau sous l’effet de l’application d’un champ electrique externe ~E. Ce champ electrique

externe peut provenir de l’application d’un champ exterieur ou du champ cree par des

molecules polaires presentes dans le milieu.

40

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Dans les simulations a l’echelle atomique, on modelise la polarisation moleculaire

par des dipoles induits (c’est-a-dire non permanents) localises sur chaque atome. Par

convention, le dipole induit ~pi = αi~Ei est associe a l’atome i du milieu ou αi est la pola-

risabilite de l’atome i et ~Ei le champ electrique applique sur l’atome i. La polarisation

electrostatique ~P est obtenue comme la somme des dipoles induits normalises par le

volume V de la molecule (ou plus generalement le volume de la boıte de simulation) :

~P =1

V

N∑

i=1

~pi (60)

La connaissance de chaque dipole induit ~pi provient de la resolution de l’equation self-

consistante :

~pi = αi

[

~Ei −N∑

q 6=i,q=1

Tiq~pq

]

(61)

dans laquelle Tiq est un tenseur geometrique de dimension 3*3 et d’expression generale :

Tiq =1

r3iq

1 −3

r5iq

x2iq xiqyiq xiqziq

yiqxiq y2iq yiqziq

ziqxiq ziqyiq z2iq

(62)

ou 1 est la matrice 3*3 identite, riq est la distance qui separe les atomes i et q, et xiq,

yiq, ziq sont les composantes du vecteur ~riq.

L’equation 61 est self-consistante puisque la valeur du dipole induit ~pi sur l’atome i

depend de la valeur des dipoles induits ~pq localises sur tous les autres atomes q du

milieu. Cela “tourne en rond”, et l’on parle alors de self-consistance.

La polarisation et les dipoles induits atomiques sont des objets a N − corps puisque la

valeur du dipole induit ~pi depend des N − 1 autres dipoles induits ~pq (q 6= i).

Tout ceci sera demontre dans l’UE 34.

Note : ce modele est appele modele de Thole, du nom de son auteur. Il existe un autre

modele appele modele de Drude, egalement base sur des dipoles induits atomiques, mais

modelises differemment. Une autre facon de mettre en place la polarisation moleculaire

41

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classiquement est de modeliser des charges atomiques fluctuantes, qui fluctuent en

fonction de la geometrie de la molecule : cela permet de mettre en place un dipole

moleculaire induit directement sans passer par des dipoles atomiques induits. Ce modele

est developpe par quelques auteurs de la litterature (B. Berne aux USA et F. Calvo en

France notamment). Cela sera egalement presente dans le cadre de l’UE 34.

42

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• Interactions de van der Waals

Les interactions de van der Waals sont en general modelisees par la forme de Lennard-

Jones :

VLJ(i, j) = 4ε

[

(

σij

rij

)12

(

σij

rij

)6]

(63)

que l’on nomme egalement forme 12-6. L’exposant 12 correspond a l’interaction de

repulsion a courte distance, et la partie 6 a l’interaction de dispersion a longue distance.

Les forces de van der Waals qui s’appliquent sur chaque atome sont :

~Fi = −∇iVLJ(i, j)

et

~Fj = −∇jVLJ(i, j)

Soit :

~Fi =48ε

rij

[

2

(

σij

rij

)12

(

σij

rij

)6]

[

(xj − xi)~i + (yj − yi)~j + (zj − zi)~k]

(64)

et

~Fj = −~Fi = −48ε

rij

[

2

(

σij

rij

)12

(

σij

rij

)6]

[

(xj − xi)~i + (yj − yi)~j + (zj − zi)~k]

(65)

Une autre expression du potentiel de van der Waals peut etre :

V (i, j) =ε

1 − 6/h

[

eh(1−r/rm) −

(

r

rm

)6]

dans laquelle le mur repulsif a courte distance est moins fort que pour le potentiel

Lennard-Jones precedent. L’expression des forces est plus compliquee qu’avec le poten-

tiel Lennard-Jones, c’est une des raisons pour lesquelles ce potentiel d’interaction est

moins employe.

43

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On peut compliquer encore l’expression generale avec :

V (i, j) = Ae−αr/rm +

[

C6

r6+

C8

r8+

C10

r10

]

F (r/rm)

ou F (r/rm) est une fonction d’amortissemnt du type :

F (r/rm) = e−(D rmr

−1)2

si r/rm 6 D

= 1 si r/rm > D

A nouveau, l’expression generale du potentiel et des forces est compliquee, ce qui n’est

pas avantageux dans les simulations numeriques.

Nous detaillons maintenant certains des potentiels d’interaction mis en place dans la

litterature. Plusieurs lecons seront a retenir : la complexite ou non des expressions

de l’energie potentielle et donc des forces, un potentiel d’interaction est generalement

developpe pour un systeme moleculaire specifique, et surtout un potentiel d’interaction

est justifie pour un type de domaine donne. Ainsi, des potentiels developpes pour la

phase liquide sont rarement applicables pour traiter des proprietes de la phase solide

ou d’agregats, et inversement. Quelques potentiels sont universels, mais ils sont rares.

2.1.6 Potentiels pour les fluides de gaz rare

Les interactions entre atomes de gaz rare (Argon, Xenon, Krypton) sont modelisees par

les seules interactions de van der Waals. En effet, ces atomes sont neutres, non polaires,

les interactions electrostatiques sont donc nulles. On peut ajouter des interactions de

polarisation, car ces atomes sont polarisables. Ceci est toutefois rarement inclus dans

les modeles.

Les champs de forces des gaz rares sont generalement de type Lennard-Jones

VLJ(i, j) = 4ε

[

(

σij

rij

)12

(

σij

rij

)6]

(66)

44

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avec par exemple εAr−Ar = 119.6 K et σAr−Ar=3.4 A. Voir le livre de Allen et Tildesley

pour un tableau des valeurs tabulees pour les differents atomes de gaz rare.

Le potentiel Lennard-Jones est reconnu comme permettant de bien modeliser les pro-

prietes des agregats de gaz rare, les proprietes des fluides de gaz rare (gaz et liquide),

mais il existe des defauts pour la modelisation des solides de gaz rare.

Barker, Fisher et Watts (Mol.Phys.,vol 21,page 657,1971) ont employe une forme bien

plus complexe pour traiter les interactions Argon-Argon. C’est :

VBFW (i, j) =∑

k,l

V (k, l) +∑

k,l;,m

V (k, l, m) (67)

ou V (k, l) est un potentiel d’interaction a 2-corps entre 2 atomes de gaz rare et

V (k, l, m) est un potentiel d’interaction a 3-corps entre 3 atomes de gaz rare. Ils ont

choisi les expressions suivantes :

V (k, l) = ε

[

5∑

i=1

Ai(r − 1)ieα(1−r) −2∑

i=1

C2i+6

δ + r2i+6

]

(68)

ou r = rkl/Rm avec Rm la separation interatomique au minimum du potentiel, les

constantes Ai et C2i+6 sont obtenues par ajustements sur des grandeurs experimentales

connues, et

V (k, l, m) = E0

[

1 + 3 cos γi cos γj cos γk

(rijrikrjk)3

]

(69)

est le potentiel a 3-corps d’Axilrod-Teller deja presente.

Ce potentiel permet de decrire tres precisement les proprietes des gaz, liquides, et

solides de gaz rare d’Argon.

2.1.7 Potentiels pour les clusters de fullerene C60

Un fullerene est un agregat compose de 60 atomes de carbone, C60. Un potentiel assez

utilise dans la litterature est celui de Lu et collaborateurs (Phys.Rev.Lett., vol 68, page

45

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1551, 1992) ou de Schelkacheva et Tareyeva (Phys.Rev.B.,vol 61, page 3143, 2000), dans

lequel on place 60 charges δq sur les milieux des liaisons covalentes simples C − C et

30 charges −2δq sur les milieux des liaisons covalentes doubles C = C. La molecule de

fullerene est ainsi bien neutre. On aura donc les interactions charge-charge a calculer.

Le potentiel a 2-corps d’interaction de van der Waals entre 2 atomes de carbone a la

forme suivante :

V (s) = −α

[

1

s(s − 1)3+

1

s(s + 1)3−

2

s4

]

+ β

[

1

s(s − 1)9+

1

s(s + 1)9−

2

s10

]

(70)

ou s = r/D avec D le diametre de l’agregat C60.

D’autres expressions existent dans la litterature.

2.1.8 Potentiels pour les clusters d’oxygene O2

Cette fois, nous avons a traiter a la fois les interactions intra-moleculaires oxygene-

oxygene a l’interieur de chaque molecule O2 et les interactions inter-moleculaires oxygene-

oxygene entre 2 molecules O2 differentes. On peut simplifier le probleme en gelant

la molecule O2 a sa configuration d’equilibre obtenue dans des calculs tres precis de

mecanique quantique par exemple. Il faut noter que la molecule O2 est magnetique, on

doit donc introduire ce type d’interaction dans le potentiel classique.

Un potentiel utilise dans la litterature est celui de Etters, Kobashi et Belak, note EKB,

qui est tel que :

VEKB = Vrd(~ri, ~rj, ~ni, ~nj) + Velec(~ri, ~rj, ~ni, ~nj) + Vmagn(~ri, ~rj, ~ni, ~nj, ~si, ~sj) (71)

ou Vrd est le potentiel d’interaction de repulsion-dispersion a 2-corps, Velec est le poten-

tiel electrostatique a 2-corps ou les atomes d’oxygene portent une charge ponctuelle, et

Vmagn est le potentiel magnetique (~si est le spin de l’atome d’oxygene). Dans ce potentiel

d’interaction, la geometrie de la molecule O2 est figee, il n’y a donc pas d’interactions

intra-moleculaires.

46

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On a :

Vrd(i, j) =

4∑

k=1

(

Ae−αrk − f(rk)

[

C6

r6k

+C8

r8k

+C10

r1k0

])

(72)

avec

f(r) = e−(rcut/r−1)2 si r ≤ rcut

= 1 si r > rcut

et

Vmagn(i, j) = 2J(rij)~si.~sj + D [ (~si.~ni) + (~si.~ni)] (73)

J(r) = J1e−a1(r−r0) si r ≤ rmin

J(r) = J2e−a2(r−r0)+a3(r−r0)2 si rmin ≤ r < rmax

J(r) = J3e−a4(r−r0) si r > rmax

Ce potentiel relativement complique donne d’excellents resultats pour la structure et

la thermodynamique des agregats d’oxygene O2.

2.1.9 Potentiels pour l’eau liquide et pour les agregats d’eau

La figure 14 resume schematiquement les principaux champs de forces mis au point et

utilises dans la litterature pour modeliser les interactions entre molecules d’eau, soit

pour modeliser l’eau liquide (ou le fluide supercritique) soit pour modeliser des agregats

d’eau. Ces potentiels sont de trois types :

1) La molecule d’eau a une geometrie figee (celle calculee en mecanique quantique) et les

interactions sont de type inter-moleculaires, avec interactions entre les charges portees

par les atomes et interactions de van der Waals sous forme Lennard-Jones 12-6. On note

au passage que les charges portes par les atomes d’hydrogene sont toujours localisees

sur ces atomes, alors que la charge portee par l’atome d’oxygene est soit localisee sur cet

atome soit deplacee legerement par rapport a la position de cet atome. Il existe tres peu

47

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Fig. 14 – Resume schematique des principaux champs de forces mis au point et utilises dans la

litterature pour modeliser les interactions entre molecules d’eau. Extrait de la revue de Florent Calvo.

Les charges electrostatiques sur les atomes sont notifiees, la notation LJ signifie que des parametres

Lennard-Jones sont associes aux atomes, et D ou Q signifie que des dipoles et quadrupoles atomiques

permanents ont ete inclus dans le modele (cela ne s’applique qu’aux potentiels RWL).

de modeles dans la litterature incluant des multipoles d’ordre superieur aux charges. Ce

sont des modeles tres couteux en temps de calculs et donc tres peu utilises. Par ailleurs,

la demonstration de l’utilite d’inclure des dipoles atomiques permanents et quadrupoles

atomiques permanents n’a pas ete demontree. Ces potentiels sont principalement ceux

developpes par Rowlinson (nomenclature RWL). Par ailleurs, seules les interactions

Lennard-Jones oxygene-oxygene sont calculees, quel que soit le modele.

2) On peut supplementer cela avec les interactions de polarisation. 3) En plus de cela,

les interactions intra-moleculaires de stretch O-H et de bending H-O-H sont modelisees.

Les potentiels SPC, SPC/E et TIP sont particulierement pertinents pour modeliser

les proprietes de l’eau liquide, ils sont extremement employes et populaires dans la

48

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litterature. Le potentiel TIP4P permet egalement d’obtenir d’excellents resultats de

structure et de diagramme de phase pour les agregats d’eau. A nouveau, ces potentiels

sont incapables de reproduire correctement les proprietes vibrationnelles des agregats

d’eau mais egalement de l’eau liquide (que ce soit pour les modes de vibration intra-

moleculaires ou inter-moleculaires). Pour l’eau liquide par exemple, il faut noter qu’un

modele d’eau qui est capable de reproduire correctement des proprietes structurales et

thermodynamiques sera en general incapable de modeliser correctement les proprietes

de viscosite ou de constante dielectrique, et inversement. Il faut donc faire attention a

choisir son modele d’eau en fonction des proprietes que l’on souhaite modeliser.

Le modele TIP3 est usuellement employe pour modeliser l’eau de solvatation autour

des molecules biologiques. Le modele SPC est egalement employe dans la litterature a

cet effet. Les modeles TIP4 et SPC sont tres bons en general pour decrire les proprietes

de solvatation d’ions atomiques immerges dans l’eau liquide.

2.1.10 Potentiels CHARMM et AMBER pour les biomolecules

L’expression generale de ces potentiels a 2-corps est la suivante :

V (i, j) =∑

stretch i−j

1

2kij

(

rij − r0ij

)

+∑

bend i−j−k

1

2kijk

(

θijk − θ0ijk

)2

+∑

torsion i−j−k−l

M∑

n=0

Vn

2[1 + cos(nω − γ)]

+∑

i−j

1

4πε0

qiqj

rij

+∑

i−j

4εij

[

(

σij

rij

)12

(

σij

rij

)6]

composes de termes intra-moleculaires 1-2, 1-3 et 1-4, et de termes intermoleculaires

electrostatiques et de van der Waals.

49

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Les nouvelles versions datant de 2003 incluent les effets de polarisation electrostatique.

On parle alors de champs de forces de seconde generation a N-corps.

Ces potentiels donnent de tres bons resultats sur les proprietes de structure et de dy-

namique des molecules biologiques en phase liquide, car les parametres sont developpes

pour la phase liquide (c’est-a-dire molecule biologique immergee dans l’eau liquide). Ils

sont generalement tres nettement moins satisfaisants pour traiter les proprietes de la

phase gazeuse, c’est-a-dire molecule biologique isolee. Ces potentiels sont inadequats

pour traiter les proprietes des vibrations intramoleculaires des molecules biologiques,

car les parametres et les formes a 2-corps employees ne sont pas suffisants pour avoir

une bonne representation vibrationnelle. Nous verrons un exemple plus loin. A noter

egalement, des jeux de parametres totalement differents ont ete developpes pour les

proteines d’un cote et pour les acides nucleiques de l’autre.

Tout ceci sera revu en details au cours de l’UE 34.

50

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2.2 Deux classes de simulations numeriques : T nulle, T finie

On remet sur la figure 15 l’illustration d’une surface d’energie potentielle (dessinee

a 3D) pour montrer encore une fois sa complexite. Si l’on coupe la surface d’energie

Fig. 15 – Illustration de la complexite d’une surface de potentiel.

potentielle selon une certaine coordonnee q, on obtient typiquement l’image de la fi-

gure 16. Sur ce graphe, on voit apparaıtre trois bassins d’attraction notes A, B et C,

de profondeur et de largeur differentes. Sur la figure 17 on note les “points” principaux

de cette surface d’energie potentielle. On observe trois minima associes a chaque bassin

d’attraction (minima m1, m2 et m3), et deux points selles qui permettent respective-

ment de passer entre les bassins d’attraction A et B (point selle s1) et B et C (point

selle s2). Toute coupe de la surface d’energie potentielle suivant n’importe quelle direc-

tion q fera apparaıtre des bassins d’attraction auxquels on associe des minima et des

points selles.

Dans la suite, on presente deux types de modelisation numerique : l’une a temperature

51

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Fig. 16 – Coupe 2D selon une coordonnee q d’une surface d’energie potentielle.

nulle, et l’autre a temperature finie. Chacune de ces modelisations se rapporte a une

exploration differente des zones de la surface d’energie potentielle V ( ~R1, ~R2, . . . , ~RM)

a 3M − 6 degres de liberte.

2.2.1 T = 0K

Une simulation numerique a temperature nulle correspond a la determination des mi-

nima et points selles (souvent appeles etats de transition) de la surface d’energie po-

tentielle. Cela correspond a trouver les points notes minima m1, m2 et m3 et points

selles s1 et s2 sur la figure 17.

Trouver ces etats particuliers n’a de sens que pour des molecules en phase gazeuse

ou des clusters de molecules formant des assemblages moleculaires specifiques. Voir les

illustrations ci-dessous sur la figure 18 pour un dipeptide d’alanine (3 minima d’energie

potentielle sur la surface d’energie potentielle), et sur les figures 19-20 pour des isomeres

52

Page 54: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

Fig. 17 – Coupe 2D selon une coordonnee q d’une surface d’energie potentielle. On reporte les

minima et points selles de la surface.

conformationnels de la base uracile de l’ARN formant des liaisons hydrogene avec un

nombre croissant de molecules d’eau environnantes.

53

Page 55: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

Fig. 18 – Differents isomeres conformationnels de l’alanine dipeptide qui sont associes a des minima

d’energie potentielle sur la surface d’energie potentielle de l’alanine dipeptide (surface composee de 60

degres de liberte ; 22 atomes constituent la molecule). Ces configurations sont notees C7eq (a gauche),

C7ax (au centre) et C5 (a droite). Issu du travail personnel de M.P. Gaigeot et al..

54

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Fig. 19 – Quatre isomeres conformationnels de plus basse energie de l’Uracile entouree d’une

molecule d’eau qui sont associes a des minima d’energie potentielle sur la surface d’energie potentielle

du systeme (surface composee de 39 degres de liberte ; 15 atomes constituent le complexe/agregat).

Issu du travail personnel de M.P. Gaigeot et al., article J.Phys.Chem.B.,105 :5007, 2001. Les energies

relatives sont dans l’unite kcal/mol.

55

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Fig. 20 – Quatre isomeres conformationnels de plus basse energie de l’Uracile entouree de trois

molecules d’eau qui sont associes a des minima d’energie potentielle sur la surface d’energie potentielle

du systeme (surface composee de 57 degres de liberte ; 21 atomes constituent le complexe/agregat).

Issu du travail personnel de M.P. Gaigeot et al., article J.Phys.Chem.B.,105 :5007, 2001. Les energies

relatives sont dans l’unite kcal/mol.

56

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Il existe des algorithmes numeriques specifiques pour trouver les minima/extrema d’une

surface d’energie potentielle. Une illustration de la methode est schematisee sur la

figure 21. N’oublions pas qu’un systeme compose de N particules possede 3N − 6

Fig. 21 – Illustration schematique de la caracterisation des minima de la surface d’energie potentielle.

degres de liberte et possede donc une surface d’energie potentielle de dimension 3N−6.

Trouver les points particuliers tels que points minima ou points selles sur une surface

complexe de dimension 3N − 6 est un challenge remarquable.

Les algorithmes communement employes pour caracteriser les minima/points selles

sont l’algorithme de Steepest-Descent et l’algorithme de Gradient Conjugue. Ceci est

presente dans l’UE34. Voir egalement le livre “Numerical Recipes” pour plus de details.

Trouver les minima de la surface d’energie potentielle signifie que l’on trouve les struc-

tures moleculaires de plus basses energies sur la surface d’energie potentielle : on parle

alors d’optimisation de geometrie. On caracterise ainsi des isomeres conforma-

tionnels. Realiser des optimisations de geometrie est communement notifie comme

57

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modelisation a temperature nulle 0K. En effet, a chaque minimum d’energie poten-

tielle correspond une certaine geometrie des molecules, et par definition d’un minimum

la conformation associee ne possede pas d’energie cinetique, elle ne possede que de

l’energie potentielle.

On parle de minima locaux sur la surface d’energie potentielle et de minimum absolu.

Ceci est illustre sur la figure 22, ou l’on a represente trois bassins d’attraction sur

Fig. 22 – Illustration des notions de minima locaux et minimum absolu d’une surface d’energie

potentielle.

la surface d’energie potentielle (coupe selon la direction quelconque q). Le minimum

d’energie associe au bassin d’attraction A est celui qui possede l’energie potentielle V

la plus basse parmi les trois minima. On l’appelle le minimum absolu. Les deux autres

58

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minima d’energie associes aux bassins B et C ont des energies potentielles plus hautes.

On parle alors de minima locaux.

Pour caracteriser completement un etat minimum de la surface il faut verifier que

toutes ses frequences de vibration sont positives. Un etat de transition ou point selle

sur la surface d’energie potentielle a toutes ses frequences positives sauf une qui est

imaginaire. Cette frequence est associee au chemin sur la surface d’energie potentielle

qui permet de passer d’un minimum de la surface d’energie potentielle a un autre

minimum, via un etat de transition.

Le calcul des frequences est effectue par diagonalisation d’une matrice Hessienne. En

coordonnees cartesiennes, cette matrice est composee des derivees secondes de l’energie

potentielle par rapport aux coordonnees cartesiennes des atomes : ∂2V (~r1,~r2,...,~rN )∂~ri∂~rj

. C’est

une matrice de dimension 3Nx3N .

La diagonalisation de la matrice de Hessien fournit les 3N − 6 modes normaux de

vibration du systeme constitue de N atomes. Voir l’illustration des mouvements associes

aux modes normaux de vibration de la molecule de formaldehyde en phase gazeuse sur

la figure 23.

59

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Fig. 23 – Illustration des modes normaux pour la molecule de formaldehyde en phase gazeuse.

Extrait du travail personnel de M.P. Gaigeot et al., J.Chem.Phys.125 :144106, 2006.

60

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2.2.2 T finie

Les simulations numeriques a l’echelle microscopique qui prennent en compte la notion

de temperature finie du milieu sont principalement de deux types : simulations Monte-

Carlo et simulations de dynamique moleculaire.

Seule la methode de dynamique moleculaire est presentee dans la suite. Notons juste ici

que quelques elements de modelisation sont communs aux deux methodes, comme les

champs de forces employes, les conditions periodiques, les sommes d’Ewald pour traiter

les interactions electrostatiques. Les algorithmes sont intrinsequement differents. Les

proprietes etudiees avec chacune de ces methodes peuvent egalement etre differentes,

en particulier seules les simulations de dynamique moleculaire permettent d’acceder

aux proprietes dynamiques.

On illustre schematiquement sur la figure 24 l’exploration a temperature finie de la sur-

face d’energie potentielle telle qu’elle est realisee au cours des dynamiques moleculaires

dans l’ensemble microcanonique NV E. A energie totale E fixee, on peut ne explorer

que les zones hachurees sur la figure de la surface d’energie potentielle. Ce sont les zones

energetiquement accessibles. Rappelons que E = K + V , l’energie totale se repartit en

energie cinetique et en energie potentielle. Ainsi, on peut avoir suffisamment d’energie

pour explorer l’ensemble des bassins d’attraction ou pas suffisamment et dans ce cas

on ne peut explorer que quelques bassins de la surface d’energie potentielle.

Tout ceci est a opposer a la figure 22 dans laquelle on illustrait la notion de determination

des points d’energie minimale sur la surface de potentielle lorsque l’on realise des op-

timisations de geometrie a temperature nulle. En dynamique moleculaire on explore

des bassins d’attraction sur la surface d’energie potentielle alors qu’en optimisation de

geometrie on ne caracterise que les points d’energie minimum de la surface d’energie

potentielle.

61

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Fig. 24 – Illustration schematique de l’exploration a temperature finie de la surface d’energie poten-

tielle telle qu’elle est realisee au cours des dynamiques moleculaires dans l’ensemble microcanonique

NV E.

62

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2.3 Simulations de dynamique moleculaire

2.3.1 Exploration de l’espace des phases

La presentation precedente ne tient pas compte des vitesses des atomes. En simulations

de dynamique moleculaire, on explore en fait l’espace des conformations moleculaires

comme precedemment illustre, mais egalement l’espace des vitesses des atomes. On

explore en realite l’espace des phases note Γ = (~r1, ~r2, · · · , ~rN) , (~v1, ~v2, · · · , ~vN) ou

encore Γ = (~r) , (~v) ou ~r = ~r1, ~r2, · · · , ~rN et ~v = ~v1, ~v2, · · · , ~vN sont les vecteurs

globaux qui contiennent respectivement l’ensemble des vecteurs positions des N atomes

et l’ensemble des vecteurs vitesses des N atomes.

La qualite d’une simulation de dynamique moleculaire sera reliee a “l’exhaustivite” de

l’exploration de l’espace des phases qui aura reellement ete obtenu.

Par definition, on devrait explorer l’ensemble de l’espace des phases accessible au

systeme au cours d’une simulation de dynamique moleculaire (accessible veut dire ici

accessible compte tenu des conditions thermodynamiques de la simulation). L’explo-

ration de l’ensemble de l’espace des phases du systeme nous permettrait de calculer

exactement la fonction de partition du systeme, simplement en sommant les valeurs

de e−E/kT dans l’ensemble thermodynamique canonique. Ceci nous assurerait de pou-

voir calculer toutes les grandeurs thermodynamiques, statiques et dynamiques de facon

exacte.

Dans la pratique, cela necessiterait des simulations excessivement longues en temps de

calculs et/ou une statistique tres importante sur le nombre de simulations a realiser.

Par ailleurs, certaines zones de l’espace des phases sont difficilement explorees (meme

si thermodynamiquement accessibles). C’est le cas par exemple des zones associees

aux etats de transition entre bassins d’attraction. Meme une simulation extremement

longue ne permet pas d’explorer ces zones de facon statistiquement suffisante.

63

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Dans la pratique, on explorera une partie seulement de l’espace des phases accessible,

et l’on en deduira les proprietes thermodynamiques, statiques et dynamiques, de facon

approchee. Ceci signifie que l’on sait pertinemment que l’on commet une erreur sur

les valeurs calculees a l’issue des simulations de dynamique moleculaire. A charge pour

nous de quantifier cette erreur.

Dans la pratique, on verifie toujours a posteriori la qualite de l’exploration de l’espace

des phases au cours des simulations : on verifie que l’on a effectivement suffisamment et

convenablement explore l’espace des positions et des vitesses. On represente pour cela

une projection dans le plan (~r) , (~v) de l’ensemble des positions et vitesses des atomes du

systeme. On a une figure a deux dimensions dont l’axe horizontal represente l’ensemble

des coordonnees des vecteurs ~ri et l’axe vertical represente l’ensemble des coordonnees

des vecteurs ~vi des atomes i = 1−N du systeme simule. On regarde la forme generale

de la figure obtenue. Une dynamique moleculaire dans laquelle l’espace des phases a

ete explore convenablement se traduit par un noircissement homogene et uniforme.

Tout biais dans la statistique, c’est-a-dire une non exploration d’une certaine partie de

l’espace des phases se traduit par l’apparition de zones blanches (zones dans lesquelles

on n’est pas passe au cours de la dynamique). On observera alors un noircissement non

homogene de la figure.

2.3.2 Equations du mouvement

Les simulations de dynamique moleculaire consistent a resoudre les equations de New-

ton du mouvement :∑

~Fext = m~a

pour chaque atome qui compose le systeme d’interet, soit a resoudre :

(~Fext)i = mi−→ai = mi

d2~ri

dt2=

d~pi

dt(74)

64

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pour chaque atome i, i variant de 1 a N . On doit donc connaıtre l’ensemble des forces

qui s’appliquent sur l’atome i, en faire la somme∑

(~Fext)i, et cela est egal au produit

de la masse de l’atome par son acceleration (ou a la derivee par rapport au temps

de la quantite de mouvement ~pi de l’atome). Rappelons que ~F = −∇V : la force est

egale au gradient du potentiel d’interaction (au signe pres). Si l’on connaıt le potentiel

d’interaction, on connaıt la force.

Rappel : ∇ = ∂∂x

~i + ∂∂x

~j + ∂∂x

~k en coordonnees cartesiennes.

On a donc un systeme compose de N equations couplees (puisque N atomes constituent

le systeme) a resoudre.

2.3.3 Conservation de l’energie totale

L’energie totale du systeme est E = K + V ou K est l’energie cinetique du systeme

et V son energie potentielle. On sait que K =∑N

i=112mi~v

2i =

∑Ni=1

~p2i

2mi. K ne depend

que des vitesses des particules. Nous verrons dans la suite que l’on sait mettre en place

des expressions anamytiques de l’energie potentielle V . Notons simplement ici que V

ne depend que des positions des atomes qui constituent le milieu, soit la notation

V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN) dans la suite.

Prouvons que E est une quantite constante du mouvement dans une dynamique New-

tonnienne, soit dEdt

= 0

On a :

dE

dt=

d

dt

[

N∑

i=1

~p2i

2mi

+ V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN)

]

=N∑

i=1

~pid−→p i/dt

mi

+dV (~r1, ~r2, . . . ., ~rN)

dt

On sait que d~pi

dt= ~Fi , ~Fi = −∇V , et ~pi = mi~vi = mi

d~ri

dt, d’ou :

dE

dt=

N∑

i=1

d~ri

dt~Fi +

N∑

i=1

∂V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN)

∂~ri

∂~ri

∂t

65

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par application des compositions de derivees pour dV (~r1, ~r2, . . . ., ~rN)/dt

On a finalement :

dE

dt= −

N∑

i=1

d~ri

dt

∂V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN)

∂~ri+

N∑

i=1

∂V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN)

∂~ri

∂~ri

∂t

dE

dt= −

N∑

i=1

d~ri

dt

∂V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN)

∂~ri+

N∑

i=1

∂V (~r1, ~r2, . . . ., ~rN)

∂~ri

d~ri

dt= 0

Dans une dynamique Newtonienne, l’energie totale E est donc une constante du mou-

vement (qui ne depend pas du temps). Ceci doit etre verifie dans nos simulations.

A l’equilibre, on a egalement∑N

i=1 ~pi = ~P = ~0 puisque par definition∑N

i=1 ~pi =∑N

i=1~Fi

et∑N

i=1~Fi = ~0 pour un systeme a l’equilibre.

2.3.4 Algorithmes de resolution des equations du mouvement

On resoud le systeme d’equations couplees numeriquement. Pour cela, on discretise en

temps, et on emploie des algorithmes numeriques de resolution. L’algorithme le plus

employe est celui de Verlet, du nom de son auteur Loup Verlet, chercheur francais

de l’Universite d’Orsay. La publication de cet algorithme date de 1964. Il existe deux

algorithmes de Verlet, l’un appele Position Verlet et l’autre appele Velocity Verlet.

Pour la suite, nous supposons que notre systeme d’interet est compose de N parti-

cules, chaque particule i est reperee dans l’espace par sa position ~ri en coordonnees

cartesiennes, et on note ~r = ~r1, ~r2, . . . . . . , ~rN le vecteur de l’espace qui contient

l’ensemble des positions des atomes. De meme, ~v = ~v1, ~v2, . . . . . . , ~vN est le vecteur

de l’espace qui contient l’ensemble des vitesses des atomes. On note ~Fi la force totale

qui s’exerce sur l’atome i (anciennement notee ( ~Fext)i ).

66

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• Algorithme Position Verlet

On part des deux developpements de Taylor suivants, ecrits pour chaque atome i du

systeme (developpements avec +δt et −δt, que l’on nomme forward et backward en

anglais) :

~ri(t + δt) = ~ri(t) + ~vi(t)δt +~Fi(t)

2miδt2 +

d3~ri

dt3δt3 + O(δt4)

~ri(t − δt) = ~ri(t) − ~vi(t)δt +~Fi(t)

2miδt2 −

d3~ri

dt3δt3 + O(δt4)

On somme les deux expressions :

~ri(t + δt) + ~ri(t − δt) = 2~ri(t) +~Fi(t)

miδt2 + O(δt4) (75)

soit

~ri(t + δt) = 2~ri(t) − ~ri(t − δt) +~Fi(t)

miδt2 + O(δt4) (76)

La nouvelle position ~ri(t + δt) de l’atome i a l’instant t + δt est connue a partir des

positions anciennes de l’atome aux deux instants precedents t et t−δt , ainsi qu’a partir

de la force totale ~Fi(t) qui s’applique sur l’atome i a l’instant precedent t. L’erreur

commise sur la nouvelle position est a l’ordre 4, O(δt4).

Pour calculer la vitesse de l’atome i a l’instant t, on ecrit un nouveau developpemnt

de Taylor a l’ordre 2 :

~vi(t) =~ri(t + δt) − ~ri(t − δt)

2δt+ O(δt2) (77)

Les expressions 76 et 77 constituent l’algorithme de verlet appele Position Verlet.

On connaıt ainsi la position ~ri de chaque atome i a l’instant t + δt de la dynamique, et

sa vitesse ~vi a l’instant precedent t de la dynamique, c’est-a-dire position et vitesse a

deux instants decales.

67

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Pour initier l’algorithme, on doit donner la position ~ri(0) de chaque atome i aux instants

initiaux t = 0 et t = −δt de la simulation, on calcule la force totale ~Fi(0) qui s’exerce

sur chaque atome i a l’instant initial t = 0, et le tour est joue. L’algorithme permet

d’integrer ensuite les mouvements ~ri(t + δt) aux instants ulterieurs.

• Algorithme Velocity Verlet

On commence par ecrire un developpement de Taylor pour obtenir l’expression de la

position ~ride chaque atome a l’instant t + δt (comme ci-dessus) :

~ri(t + δt) = ~ri(t) + ~vi(t)δt +~Fi(t)

2miδt2 + O(δt3) (78)

Pour obtenir les vitesses au meme instant t + δt, il nous faut tout d’abord les forces

~Fi(t + δt) qui s’exercent sur chaque atome, soit ~Fi(t + δt) = −∇Vi[~r1(t + δt), ~r2(t +

δt), . . . ., ~rN(t+δt)]. Dans cette expression, on voit que l’on a besoin de calculer l’energie

potentielle (puis la derivee) du systeme pour les nouvelles positions atomiques ~ri(t+δt).

Si l’on reprend le developpement de Taylor de ~ri en temps arriere (backward en anglais),

en prenant l’instant t + δt comme instant de reference dans le developpement, (on

emploie notamment−δt au lieu de +δt), on a alors :

~ri(t) = ~ri(t + δt) − ~vi(t + δt)δt +~Fi(t + δt)

2miδt2 + O(δt3) (79)

Si l’on additionne les deux developpements de Taylor, on obtient alors :

~ri(t+δt)+~ri(t) = ~ri(t)+~ri(t+δt)+~vi(t)δt−~vi(t+δt)δt+~Fi(t)

2miδt2+

~Fi(t + δt)

2miδt2+O(δt3)

soit

~vi(t + δt) = ~vi(t) +~Fi(t) + ~Fi(t + δt)

2miδt + O(δt3) (80)

Les equations 79 et 80 constituent l’algorithme Velocity Verlet dans lequel les positions

~ri et vitesses ~vi de chaque atome i du systeme sont connues exactement au meme instant

68

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de la dynamique t + δt . Note : les 2 algorithmes de Verlet produisent exactement la

meme trajectoire.

Pour initier l’algorithme, on doit donner la position ~ri(0), la vitesse ~vi(0) et la force

~Fi(0) pour chaque atome i du systeme a l’instant initial t = 0 de la simulation, et

le tour est joue. L’algorithme permet d’integrer ensuite les mouvements ~ri(t + δt) et

vitesses ~vi(t + δt) aux instants ulterieurs. Cet algorithme est conceptuellement plus

simple, mais il est aussi legerement plus couteux que Position Velocity, puisque les

forces doivent etre calculees a t + δt et gardees en memoire a l’instant precedent t.

• Algorithme de Leap-Frog (saute-mouton)

Dans cet algorithme, les vitesses et positions des atomes sont calculees a des instants

alternes, et les vitesses font explicitement partie de l’algorithme qui calcule les nouvelles

positions.

On a :

~vi(t +δt

2) =

~ri(t + δt) − ~ri(t)

δt+ O(δt2)

et

~vi(t −δt

2) =

~ri(t) − ~ri(t − δt)

δt+ O(δt2)

ce qui donne :

~ri(t + δt) = ~ri(t) + ~vi(t +δt

2)δt

et

~ri(t − δt) = ~ri(t) − ~vi(t −δt

2)δt

En utilisant la relation deja vue plus haut :

~ri(t + δt) = 2~ri(t) − ~ri(t − δt) +~Fi(t)

miδt2 + O(δt4)

69

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dans laquelle on remplace les expressions pour ~ri(t + δt) et ~ri(t − δt) ci-dessus, on

obtient alors :

~vi(t +δt

2) = ~vi(t −

δt

2) +

~Fi(t)

miδt + O(δt3) (81)

On calcule ainsi la vitesse de chaque atome i a l’instant demi-entier t+ δt/2 a partir de

la force totale ~Fi(t) qui s’applique sur l’atome a l’instant t et de la vitesse a l’instant

demi-entier precedent t − δt/2 . La nouvelle position de l’atome est obtenue par la

relation

~ri(t + δt) = ~ri(t) + ~vi(t +δt

2)δt (82)

dans laquelle la vitesse a l’instant demi-entier t + δt/2 est directement inseree.

Pour initier l’algorithme, on doit donner la position ~ri(0) de chaque atome i a l’instant

initial t = 0 de la simulation, la vitesse ~vi(−δt2) de chaque atome a l’instant demi-entier

precedent −δt/2, on calcule la force totale ~Fi(0) qui s’exerce sur chaque atome i a

l’instant initial t = 0, et le tour est joue. L’algorithme permet d’integrer les mouvements

~ri(t + δt) aux instants ulterieurs.

D’autres algorithmes ecrits a des ordres superieurs existent. Ils peuvent etre plus precis,

mais seront toujours plus couteux en temps de calcul, car il faut garder en memoire

beaucoup plus de donnees. Ils ne sont pas forcement meilleurs pour permettre de

conserver les grandeurs qui doivent etre constantes le long des trajectoires, comme

l’energie totale E. Les algorithmes ci-dessus sont en general les meilleurs compromis

precision/rapidite/conservations des grandeurs, et sont ceux que l’on rencontre le plus

frequemment dans les codes de dynamique moleculaire de la litterature. C’est pourquoi

nous ne presentons pas les autres algorithmes ici.

2.3.5 Conditions periodiques aux bords : simulation de milieux continus

Pour modeliser la matiere condensee continue (liquides et solides) avec des tailles fi-

nies et raisonnables (pour les temps de calculs) de systemes, on applique les conditions

70

Page 72: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

Fig. 25 – Illustration des conditions aux bords periodiques en simulations numeriques de la matiere

condensee, ici en 2D. Image extraite du livre de A. Gerschel.

aux bords periodiques (PBC en anglais, pour Periodic Boundary Conditions). Un fluide

quelconque est ainsi represente par N atomes places dans une boıte centrale cubique (ou

toute autre forme), qui est repliquee dans toutes les directions de l’espace. Cela consti-

tue 9 boıtes repliquees dans le plan 2D (voir dessin figure 25), et 27 boıtes repliquees

dans l’espace 3D. Il existe dans la simulation une boıte centrale (aussi appelee boıte

principale) de simulation, toutes les autres sont ses repliques. Toute particule qui au

cours de son mouvement sort (respectivement, entre) par un cote de la boıte principale

de simulation a son image qui est localisee dans la boıte la plus proche entrer (res-

pectivement, sortir) dans (respectivement, de) la boıte principale de simulation. Ainsi,

la boıte de simulation contient toujours N particules fixes. Ceci vaut donc pour les

simulations dans les ensembles microcanoniques et canoniques.

A chaque instant de la dynamique, on doit savoir quels sont les atomes qui appar-

71

Page 73: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

tiennent effectivement a la boıte principale de simulation. Pour cela, on applique le

schema suivant. Supposons que les coordonnees des particules evoluent entre 0 et L (L

largeur de la boıte) pour chacune des 3 directions de l’espace. Si une particule sort de

la boıte dans la direction ~i de l’espace, cela signifie que sa coordonnee x est telle que

x > L ou x < 0. Pour qu’elle soit a nouveau localisee dans la boıte principale, il faut

translater x de−L dans le 1er cas et de+L dans le 2nd cas. Cela revient a faire entrer

les images de la particule, initialement respectivement situee a gauche (dans le 1er cas)

et a droite (dans le 2nd cas), dans la boıte principale suivant la direction x de l’espace.

L’algorithme employe pour realiser cela dans les 3 directions de l’espace est le suivant :

x = (|x| − L)*sign(1, x)

y = (|y| − L)*sign(1, y)

z = (|z| − L)*sign(1, z)

ou la fonction sign renvoie un signe +1 si x > 0 (meme chose pour y et z), et −1 si

x < 0. Dans l’expression, on a les valeurs absolues de x, y et z qui interviennent.

Si les coordonnees sont comprises entre −L/2 et +L/2 dans chaque direction de l’es-

pace, on ecrit les memes expressions.

Avec la representation periodique, il faut egalement faire attention a prendre en compte

correctement quelles particules interagissent effectivement entre elles. En effet, comme

illustre sur la figure 26, ce sont les images periodiques les plus proches qui interagissent

entre elles, et non pas les particules situees dans la meme boıte centrale de simulation.

En general, les potentiels d’interaction dependent de la distance relative rij entre deux

particules i et j. La distance relative qui correspond a rij minimum (image periodique

la plus proche) est obtenue par :

xij = (|xij| − L)*sign(1, xij)

72

Page 74: Physique statistique et simulations num eriques ... · 6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les simulations en condi-tions p erio diques 85 ... { Formulation de Lagrange

Fig. 26 – Illustration des conditions aux bords periodiques en simulations numeriques de la matiere

condensee et de la facon de prendre en compte les plus proches voisins pour le calcul des interactions.

Image extraite du livre de A. Gerschel.

yij = (|yij| − L)*sign(1, yij)

zij = (|zij| − L)*sign(1, zij)

2.3.6 Liste de Verlet

La liste des voisins de Verlet est employee pour les systemes moleculaires de grande

taille afin de diminuer les temps de calculs sur l’evaluation des interactions inter-

moleculaires et des forces. L’idee de base est de mettre en place une liste d’atomes

voisins pour chaque atome qui constitue le systeme et de ne calculer les interactions

intermoleculaires et les forces que pour ces atomes voisins. L’image correspondante est

representee sur la figure 27. L’idee sous-jacente est qu’il n’est pas besoin de calculer les

interactions et forces entre particules trop eloignees en distance, on ne calculerait que

73

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des valeurs proches de zero.

Fig. 27 – Illustration pour les definitions des rayons utilises pour la liste de Verlet.

On choisit deux rayons rc et rl schematises sur la figure 27, qui definissent 2 spheres

qui entourent l’atome i central. La sphere de rayon rc est la sphere principale d’inter-

action autour de l’atome i, et la sphere de rayon rl correspond a l’enveloppe maximale

autorisee : seules les interactions et forces entre l’atome i et les atomes qui sont inclus

dans la sphere maximale de rayon rl sont calculees. Evidemment, les atomes bougent

au cours du temps, tel que des atomes initialement contenus dans la sphere de rayon

rl en sortiront, et des atomes initialement non presents dans cette sphere y rentreront

au cours de leur mouvement. Il faut donc remettre a jour cette liste de voisins par

intervalles reguliers afin de prendre en compte ces mouvements.

L’algorithme de base est donc le suivant. Tous les ∆t pas de temps, pour chaque atome

i du systeme on identifie quels sont les atomes voisins contenus dans la sphere de rayon

maximal rl centre sur l’atome i. Pour les ∆t pas de temps suivants de la dynamique

moleculaire, on ne calculera les interactions et forces que entre ces atomes idenfies. En

general, ∆t =20-30 pas de dynamique moleculaire.

74

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3 Fluctuations, moyennes et principe d’ergodicite

Toutes les quantites, a l’exception de l’energie totale E, fluctuent au cours du temps en

dynamique moleculaire. On a ainsi : A(t) = A(~r(t), ~v(t)) avec ~r(t) = ~r1(t),−→r2 (t), . . . , ~rN(t)

et ~v(t) = ~v1(t),−→v2(t), . . . , ~vN(t).

Pour les systemes a l’equilibre thermodynamique qui nous interessent, le systeme est

stationnaire, ce qui signifie que le systeme fluctue au cours du temps mais qu’il n’y a pas

de reel changement fondamental de ce systeme. Dans ces conditions, la moyenne d’une

grandeur calculee sur une duree finie τ de simulation de dynamique moleculaire A =

〈A〉time = 1τ

∫ τ

0A (Γ(t)) dt approche la valeur thermodynamique d’ensemble 〈A〉enssi le

temps τ est suffisamment long, soit : 〈A〉ens = limτ→∞ 〈A〉time

Le principe d’ergodicite dit qu’une moyenne d’ensemble est egale a une moyenne tem-

porelle.

Definissons tout cela.

Comme deja dit, les simulations numeriques nous permettent de calculer des gran-

deurs moyennes extraites de la simulation, valeurs qui seront representatives de

l’echantillonnage qui a ete realise.

En dynamique moleculaire, on suit l’evolution du systeme au cours du temps. Il est

donc logique de calculer toute moyenne d’une grandeur A comme :

A = 〈A〉time = limτ→∞

1

τ

∫ τ

0

A (Γ(t)) dt (83)

ou A(Γ(t)) est la valeur de A au point Γ de l’espace des phases, point explore a l’instant

t de la dynamique. τ est le temps total de la simulation de dynamique moleculaire. Ce

temps doit etre le plus long possible (d’ou τ → ∞) pour que la moyenne ait un sens

statistique. Comme le temps τ est fini dans nos simulations (τdyn), on peut ecrire

75

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l’equation precedente a l’aide d’une somme discrete :

A = 〈A〉time =1

τdyn

τ=τdyn∑

τ=1

A (Γ(t)) (84)

et tel que l’indice τ de sommation ne soit rien d’autre que l’index qui courre sur la

trajectoire de dynamique.

En simulation Monte-Carlo, le temps n’est pas present, mais l’indice de sommation

τdyn peut etre remplace par l’indice qui repere la conformation generee τconf . Donc, on

peut ecrire une moyenne comme :

A = 〈A〉conf =1

τconf

τ=τconf∑

τ=1

A (Ω) (85)

ou A(Ω) est la valeur de A pour la conformation Ω generee dans l’espace des confor-

mations accessibles.

La mecanique Newtonienne peut etre reecrite via le formalisme de Liouville, avec

l’operateur de Liouville L defini par :

iL =

(

i

d~ri

dt∇~ri

+∑

i

d~pi

dt∇~pi

)

(86)

les sommes courrent sur le nombre d’atomes du systeme (i = 1 − N). Les points de

l’espace des phases Γ sont repartis selon une loi de densite de probabilite ρens(Γ). Cette

fonction est determinee par le choix de l’ensemble thermodynamique dans lequel les

simulations seront realisees : ρNVE(Γ) dans l’ensemble microcanonique, ρNVT(Γ) dans

l’ensemble canonique, etc.

Cette densite de probabilite est regie par le theoreme de Liouville :

∂ρens(Γ, t)

∂t= −iLρens(Γ, t) (87)

ou l’on note explicitement le temps t dans ρens(Γ, t) pour rappeler que le point Γ de

l’espace des phases est obtenu a l’instant t de la dynamique moleculaire.

76

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La solution formelle de l’equation de Liouville est :

ρens(Γ, t) = e−iLtρens(Γ, 0) (88)

ou e−iLt = 1 − iLt − 12L2t2 + . . . ., et ρens(Γ, 0) est la densite de probabilite a l’instant

initial de la dynamique.

Dans ces conditons,

dA(Γ(t))

dt= iLA(Γ(t)) (89)

et

A(Γ(t)) = eiLtA(Γ(0)) (90)

La moyenne de A dans l’ensemble thermodynamique de simulation est alors :

Aens = 〈A〉ens =〈A|ρens〉 =∑

Γ

A(Γ)ρens(Γ) (91)

qui signifie que la moyenne de A depend de l’evolution de ρens(Γ) dans l’ensemble

thermodynamique voulu.

Le principe d’ergodicite nous dit que :

Aens =∑

Γ

A(Γ)ρens(Γ) =< A >time=1

τdyn

τ=τdyn∑

τ=1

A (Γ(t)) (92)

La moyenne d’ensemble est egale a la moyenne sur la duree de la trajectoire de dyna-

mique moleculaire, et que

Aens =∑

Γ

A(Γ)ρens(Γ) = 〈A〉conf =1

τconf

τ=τconf∑

τ=1

A (Ω) (93)

La moyenne d’ensemble est egale a la moyenne sur l’exploration des conformations par

simulation Monte-Carlo.

On note au passage immediatement que Aens = 〈A〉time = 〈A〉conf : les simulations

Monte-Carlo et de dynamique moleculaire doivent fournir les memes valeurs moyennes.

77

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Attention :

Les egalites 92 et 93 supposent que l’exploration de l’espace des phases (equation 92)

ou de l’espace des conformations (equation 93) est realise parfaitement et extensive-

ment, ce qui signifie que tout l’espace des phases (respectivement, tout l’espace des

conformations) a ete explore ! Dans la pratique, on doit s’en assurer !

78

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4 Temperature en dynamique moleculaire

4.1 Temperature thermodynamique et temperature instan-

tanee

Dans l’ensemble canonique, la temperature d’un systeme compose de N particules est

definie a partir de la moyenne de l’energie cinetique via :

<N∑

i=1

1

2mi~v

2i >NVT=

3

2NkT (94)

Cette expression n’est rien d’autre que le theoreme d’equipartition d’energie : chaque

degre de liberte atomique possede une energie cinetique de kT/2 ou k est la constante

de Boltzmann (soit 1/2mi~v2i = 1/2kT ).

L’hypothese sous-jacente est que les composantes cartesiennes des vitesses atomiques

sont distribuees selon la distribution gaussienne de Maxwell-Boltzmann :

P (vx,i) =

mi

2πkTe−

miv2x,i

2kT (95)

La distribution est ecrite ci-dessus pour la composant x de la vitesse de l’atome i, la

meme expression peut etre ecrite pour les 2 autres composantes cartesiennes P (vy,i) et

P (vz,i).

On introduit la notion de temperature instantanee T (~v) :

T (~v) =1

3kN

N∑

i=1

mi~v2i (96)

La temperature instantanee T (~v) fluctue donc au cours du temps puisque les vitesses

atomiques changent au cours du temps, et l’on definit alors la temperature du systeme

dans l’ensemble microcanonique via la moyenne :

TN =1

M

M∑

l=1

T (~vl) (97)

79

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La temperature microcanonique depend donc du nombre N de particules qui consti-

tuent le systeme moleculaire et de la duree de la simulation M . Pour N et M grands,

la temperature TN converge vers la temperature thermodynamique correcte. Il faut

retenir deux choses : on ne peut definir la notion de temperature que pour un systeme

moleculaire grand et des simulations de dynamique moleculaire longues : ce sont les

conditions qui assurent que la temperature moyenne issue de la simulation converge

vers la temperature thermodynamique.

4.2 Distribution gaussienne de Maxwell-Boltzmann

Nous allons voir que les vitesses des atomes verifient effectivement une distribution

gaussienne de Maxwell-Boltzmann dans les simulations de dynamique moleculaire dans

l’ensemble micro-canonique. Nous illustrons cela sur un fluide de gaz rare d’argon. La

simulation de dynamique moleculaire est realisee pour 125 atomes d’argon.

Sur la figure 28 on observe bien une distribution gaussienne (de Maxwell-Boltzmann) de

la composante x des vitesses de l’ensemble des atomes d’argon en bleu, la distribution

identique obtenue pour 10 atomes seulement de la boıte de simulation. On remarque

que chaque atome pris individuellement ne verifie pas la distribution gaussienne de

l’ensemble. La distribution des vitesses selon une loi gaussienne de Maxwell-Boltzmann

possede un sens statistique.

Sur la figure 29, on observe que la distribution de Maxwell-Boltzmann des vitesses

est obtenue sur des temps courts de simulation. Pour une simulation de 100 femto-

secondes, la distribution est deja observable meme si elle est accompagnee de bruit.

A partir de 1 pico-seconde de dynamique, la distribution de Maxwell-Boltzmann est

stable et n’evolue plus.

Ces courbes illustrent le fait que dans une simulation micro-canonique NVE, les vi-

tesses des particules verifient spontanement une distribution de Maxwell-Boltzmann,

80

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0 1 2 3 4 5 6norme de la vitesse

0

100

200

300

400

histo

gram

me

1 atome4 atomes10 atomes125 atomes

Distribution de la norme des vitesses des atomes100 ps dynamique

Fig. 28 – Distribution des vitesses des atomes d’un fluide d’argon obtenue dans des simulations de

dynamique moleculaire. Etude statistiqiue en fonction du nombre d’atomes pris en compte.

et que cette distribution est obtenue tres rapidement. La redistribution d’energie dans

les differents degres de liberte pour atteindre un etat d’equilibre thermodynamique,

notamment caracterise par une distribution de Maxwell-Boltzmann des vitesses, est

realisee sur des echelles de temps de quelques dizaines-centaines de femto-secondes.

81

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0 1 2 3 4 5 6norme de la vitesse

0

2

4

6

8

histo

gram

me

temps 0.1 ps1.0 ps10 ps100 ps

Distribution de la norme de la vitesse des atomesInfluence temps de DYN, Tous atomes pris en compte

Fig. 29 – Distribution des vitesses des atomes d’un fluide d’argon obtenue dans des simulations de

dynamique moleculaire. Etude statistiqiue en fonction du temps de simulation de la dynamique.

82

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5 Illustration des fluctuations, et conservation de

l’energie totale E

Sur la figure 30, on illustre l’evolution au cours du temps des grandeurs d’energie

totale E, d’energie potentielle Epot et d’energie cinetique Ecin pour une simulation de

dynamique moleculaire d’un fluide d’argon (125 atomes d’argon dans la simulation).

La duree totale de simulation est de 200 pico-secondes. On observe la conservation

de l’energie totale, et les fluctuations associees de l’energie potentielle et de l’energie

cinetique.

Les 10 premieres pico-secondes correspondent a la periode d’equilibration du systeme.

On voit ainsi les variations des grandeurs au fur et a mesure des periodes d’application

de scaling des vitesses. Une fois cette periode passee, les grandeurs evoluent correcte-

ment. En particulier, les fluctuations faibles de l’energie cinetique montrent bien que

la valeur de la temperature fluctue peu.

83

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0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10t (ps)

-6-5-4-3-2-10

etot

100 150 200t (ps)

-6

-5

-4

etot

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10t (ps)

-7-6-5-4-3

epot

100 150 200t (ps)

-7-6-5-4-3

epot

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10t (ps)

11.5

22.5

3

ecin

100 150 200t (ps)

11.5

22.5

3

ecin

Fig. 30 – Illustrations des deux regimes d’equilibration et de dynamique au cours du temps. Illus-

tration egalement des fluctuations de l’energie cinetique et de l’energie potentielle au cours du temps

et de la conservation de l’energie totale au cours du temps. Simulation d’un fluide d’argon compose

de 125 atomes.

84

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6 Formalisme de la sommation d’Ewald pour les

simulations en conditions periodiques

Ce formalisme s’applique au calcul des interactions et des forces coulombiennes, et est

employe a la fois pour les simulations de dynamique moleculaire et de Monte-Carlo.

Par definition, les interactions coulombiennes entre particules qui appartiennent a des

boıtes repliquees dans l’espace divergent. Pour eviter cela, on emploie le formalisme

d’Ewald developpe par Ewald.

Ceci sera detaille dans l’UE 34.

7 Dynamique moleculaire dans l’ensemble thermo-

dynamique canonique

Par definition, les simulations de dynamique moleculaire sont realisees dans l’ensemble

micro-canonique, ou l’energie totale est constante, a moins de modifier le Hamiltonien

du systeme pour simuler d’autres ensembles thermodynamiques. Pour realiser des si-

mulations de dynamique moleculaire dans l’ensemble canonique, il faut mettre en place

un controle de la temperature du milieu via un thermostat. Il existe plusieurs facons

de realiser cela.

7.1 Thermostat d’Andersen

Le systeme moleculaire est couple a un thermostat par des forces stochastiques ins-

tantanees qui modifient aleatoirement les vitesses des particules. Entre les collisions

stochastiques le systeme evolue selon la dynamique Newtonienne habituelle. Les colli-

sions stochastiques doivent rester decorrelees, ce qui conduit a choisir une distribution

85

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de collision de la forme d’une distribution de Poisson P (ν, t) = e−νt ou ν est le pa-

rametre de frequence de collision. P (ν, t) est la probabilite que la prochaine collision

d’une particule avec le bain (ou thermostat) soit obtenue dans l’intervalle de temps dt.

L’algorithme d’Andersen se decompose de la maniere suivante :

1- Le systeme simule suit la dynamique Newtonienne habituelle sur une duree ∆t (et

le parametre ν = 1/∆t).

2- Au bout du temps ∆t , on choisit au hasard un nombre de particules qui subiront des

collisions stochastiques. Nous rappelons que la probabilite qu’une particule soit choisie

dans l’intervalle de temps ∆t est ν∆t .

3- Pour chaque particule tiree au hasard, sa vitesse est modifiee et est tiree au ha-

sard dans une distribution de Maxwell-Boltzmann centree sur la temperature T du

thermostat. Les vitesses des autres particules ne sont pas modifiees.

Il est important de noter ici que pour faire en sorte que le systeme possede exactement

la temperature T , on modifie les vitesses des particules : on modifie donc la dynamique

Newtonienne reelle du systeme. Dans ce cas, toute fonction de correlation temporelle

de grandeurs dynamiques seront dependantes du couplage impose avec le thermostat,

et ne seront pas exploitables facilement. Nous reviendrons la-dessus plus loin.

7.2 Thermostat de Nose-Hoover

On introduit un Hamiltonien modifie de la mecanique classique dans lequel on decrit

N particules couplees a des coordonnees supplementaires qui jouent le role d’un ther-

mostat qui prelevera ou remettra de l’energie cinetique/temperature au sein des degres

de liberte mecaniques. La dynamique engendree n’est plus Newtonienne. La methode

de Nose-Hoover est la bonne methode pour generer les etats de l’ensemble canonique.

86

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On ecrit le Hamiltonien H d’un ensemble de N particules comme :

H =

N∑

i=1

~p2i

2mi+ V (~r1, ~r2, . . . , ~rN) +

ζ2Q

2+ g

s

β(98)

dans lequel on reconnaıt le Hamiltonien de la mecanique Newtonienne supplemente par

deux termes qui representent deux variables fictives ζ et s de la dynamique.

Les equations du mouvement correspondantes sont :

d~ri

dt=

~pi

mi

d~pi

dt= −

∂V (~r1, ~r2, . . . , ~rN)

∂~ri− ζ~pi

dt=

1

Q

[

N∑

i=1

~p2i

mi−

g

β

]

1

s

ds

dt=

d ln s

dt= ζ

Des algorithmes ont ete mis en place pour resoudre ces equations du mouvement. Nous

ne les presentons pas ici.

87

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8 Equilibration et echantillonnage en simulations

de dynamique moleculaire

Compte tenu de la prise en compte des positions et des vitesses dans les simulations de

dynamique moleculaire, l’exploration statistique qui est realisee est l’echantillonnage

de l’espace des phases, c’est-a-dire de l’ensemble des positions et vitesses du systeme.

On note en general l’espace des phases par Γ = ~r, ~v ou ~r = (~r1, ~r2, . . . ., ~rN) et

~v = (~v1, ~v2, . . . ., ~vN) sont les vecteurs contenant l’ensemble des positions des atomes

(~r) et des vitesses (~v).

Les simulations de dynamique moleculaire sont decomposees en deux parties : une

premiere partie appelee equilibration avec contrainte de temperature, et une seconde

partie qui correspond a la dynamique moleculaire sans contrainte sur laquelle les

moyennes sont effectivement calculees.

Comme nous l’avons vu precedemment, toutes les quantites issues des simulations de

dynamique moleculaire fluctuent, sauf l’energie totale qui est conservee au cours du

temps. Toutefois, les systemes simules doivent etre a l’equilibre thermodynamique,

c’est-a-dire dans des conditions telles que la temperature du systeme soit en equilibre

(cad egale) avec la temperature du milieu exterieur dans lequel le systeme est plonge.

Typiquement, la temperature du systeme est egale a la temperature du recipient qui le

contient (equilibre thermique avec les parois du recipient).

Il faut donc que la temperature moyenne de notre systeme issue des simulations de

dynamique moleculaire fluctue peu. Nous savons comment proceder pour atteindre cet

objectif : c’est le but de la periode appelee equilibration dans les simulations de

dynamique moleculaire.

Pendant cette periode, on equilibre la temperature du systeme simule en appliquant des

contraintes sur les vitesses. Ainsi, on souhaite que le systeme simule ait une temperature

88

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moyenne T0 (par ex : 300K, 50K, 1000K,...) avec des fluctuations faibles autour de cette

valeur. A chaque pas de la dynamique, on calcule la temperature instantanee T (~v). Si

T (~v) > T0 on applique un facteur de scaling sur les vitesses des atomes afin de recentrer

la valeur de la temperature instantanee sur la valeur T0 voulue.

Le facteur d’echelle a appliquer (on applique le meme quel que soit la particule du

systeme) est α =√

T0/T (~v), ce qui signifie que toutes les vitesses des atomes doivent

etre multipliees par cette valeur, soit ~vnewi = α−→v old

i = T0/T (~v)−→v oldi

Si l’on applique ce schema a chaque pas d’integration des equations du mouvement, on

modifie la distribution de Maxwell-Boltzmann des vitesses a chaque pas de la dyna-

mique et l’on perturbe le systeme de facon significative. Comme vu precedemment, tout

systeme evolue spontanement pour donner une distribution de Maxwell-Boltzmann. Si

on laisse le systeme relaxer sans contraintes appliquees sur les vitesses pendant une

duree ∆t, le systeme evoluera naturellement vers un equilibre statistique et une dis-

tribution gaussienne de Maxwell-Boltzmann centree sur une temperature T1. En fait,

l’equilibration est le processus naturel pendant lequel il y a redistribution de l’energie

parmi les differents degres de liberte du systeme.

Si l’on applique par periodes successives ∆t le schema suivant : a) calcul de la temperature

instantanee T (~v) et comparaison a T0, b) si T0 − δT < T (~v) < T0 + δT (avec δT =

ecart a la valeur desiree, valeur fixee a l’avance) : le systeme possede une distribution

de Boltzmann des vitesses centree correctement sur la valeur centrale T0, on laisse le

systeme continuer sa trajectoire. Si T (~v) > T0 + δT ou T (~v) < T0 − δT : le systeme

ne possede pas une distribution de Boltzmann des vitesses centree correctement sur la

valeur centrale T0, et l’on doit appliquer une contrainte de rescaling sur les vitesses telle

que ~vnewi = α−→v old

i = T0/T (~v)−→v oldi . On reprend la dynamique moleculaire en conser-

vant les positions des atomes mais en ayant modifie les vitesses de la facon precedente.

On applique les points a) et b) sur une duree de dynamique τequil que l’on choisit afin

89

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d’atteindre une distribution de Boltzmann des vitesses stable et centree correctement

sur la valeur T0 . C’est la periode d’equilibration avec contraintes sur les vitesses.

Une fois la distribution de Boltzmann des vitesses stable obtenue, on laisse le systeme

evoluer sans contraintes de vitesses. La distribution de Boltzmann est maintenue. Cette

periode s’appelle la periode de dynamique moleculaire sans contraintes de vitesses. Elle

s’effectue sur la duree τdyn voulue. La temperature moyenne issue de la simulation sera

bien centree sur T0 et aura des fluctuations faibles. Cela a ete illustre sur la figure 30.

Toutes les grandeurs issues de la simulation de dynamique moleculaire sont calculees

pendant la seconde periode de dynamique. On ne garde pas les valeurs generees pendant

la premiere partie.

90

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9 Configurations initiales des simulations numeriques

de dynamique moleculaire

Les conditions initiales se referent aux positions initiales des atomes a l’instant t = 0

des simulations dans le cas des simulations Monte-Carlo et dynamique moleculaire, et

aux vitesses initiales des atomes a t = 0 dans le cas des simulations de dynamique

moleculaire. Les recettes suivantes sont appliquees en simulations Monte-Carlo et en

simulations de dynamique moleculaire. Il n’y a pas de differences.

• Simulation d’un solide : on positionne les atomes sur les sites connus des reseaux

cristallins. Par exemple sur les sites d’un reseau cubique simple si le solide simule

correspond a cette symetrie de reseau, ou d’un reseau cubique faces centrees si le solide

simule correspond a cette symetrie de reseau. Illustration sur la figure 31.

Fig. 31 – Schema d’un reseau cubique faces centrees.

• Simulation d’un fluide ou liquide : deux cas de figure se presentent.

a) On commence la simulation de scratch. On placera les atomes du systeme sur les

sites connus du reseau cristallin le plus simple possible, le reseau cubique simple ou

cubique faces centrees (voir figure 31), sans vitesse initiale. On tire ensuite au hasard

les vitesses des atomes dans une distribution de Maxwell-Boltzmann afin de generer

une temperature initiale du systeme centree sur une valeur voulue. On chauffera pro-

gressivement le systeme pour atteindre la temperature du fluide voulu. En chauffant,

91

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les atomes acquierent de l’energie cinetique, peuvent se deplacer et interagir entre eux,

et distordre le reseau cristallin initial pour finalement former un liquide non structure.

Sur la figure 32, on illustre l’evolution des mouvements des atomes d’argon dans une

simulation de dynamique moleculaire de fusion de l’argon. On part de l’argon solide

a tres basse temperature, et l’on augmente progressivement la temperature dans le

systeme afin d’atteindre un liquide d’argon. On represente ici la projection des posi-

tions ~r des atomes dans un plan donne, pour les 4 temperatures choisies. On voit (en

haut a gauche) que le systeme est initialement dans un etat solide puisque les atomes

d’argon ne s’eloignent pas de leur position definie dans le solide. Au fur et a mesure

de l’augmentation de temperature, les atomes acquierent de l’energie cinetique et donc

des mouvements de vibration autour de leur position initiale dans le solide (les taches

associees a chaque atome grossissent progressivement) puis des mouvements de transla-

tion de plus grande amplitude jusqu’a s’eloigner de leur position initiale dans le solide.

Lorsque le liquide est obtenu (en bas a droite), la notion de site associe a chaque atome

n’existe plus et les atomes peuvent venir occuper des positions laissees vacantes par

d’autres atomes. Il n’y a plus de structure ordonnee : c’est un liquide.

b) La simulation peut etre demarree a partir d’une simulation anterieure du meme

fluide realisee a la temperature Told. On reprend ainsi les conditions de positions et

vitesses de cette autre simulation. En generale, les positions sont conservees, et on

applique un coefficient de scaling sur les vitesses pour avoir une distribution centree

autour d’une nouvelle valeur Tnew de temperature.

• Simulation d’une molecule biologique : on part en general d’une conformation

qui a ete obtenue dans des experiences de cristallographie (en phase solide) ou de RMN

(en phase liquide). Il existe une banque de donnees appelee PDB dans laquelle on peut

chercher cela.

92

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0 1 2 3 4 50

1

2

3

4

5T=0.001

0 1 2 3 4 50

1

2

3

4

5T=0.01

0 1 2 3 4 50

1

2

3

4

5T=0.1

0 1 2 3 4 50

1

2

3

4

5T=1.0

Fig. 32 – Illustrations de l’evolution des mouvements des atomes d’argon dans une simulation de

dynamique moleculaire en fonction de l’augmentation de la temperature. En allant du haut a gauche

vers le bas a droite, c’est-a-dire en augmentant progressivement la temperature du milieu, on voit

l’augmentation de l’amplitude des mouvements. On passe d’un solide a un liquide. Simulation d’un

fluide d’argon compose de 125 atomes.

93

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• Simulation d’un solute immerge dans l’eau liquide

La question est maintenant de savoir comment on prepare une simulation dans laquelle

une molecule de solute (par exemple une molecule biologique) est immergee dans un

solvant (par exemple l’eau liquide).

Le processus est simple et bien etabli. On possede separement la conformation de la

molecule de solute et d’une boıte homogene de solvant, ici d’eau liquide. La boıte

d’eau liquide est non equilibree, c’est-a-dire que les molecules d’eau sont placees sur

les sommets d’un reseau cubique simple solide. Les configurations sont illustrees sur

la figure 33 dans le cas d’un dipeptide d’alanine comme solute et d’une boıte d’eau

composee de 500 molecules.

Fig. 33 – Solute dipeptide d’alanine et boıte de 500 molecules d’eau.

On cree ensuite une cavite de la forme et de la dimension de la molecule de solute au

centre de la boıte d’eau afin d’inserer le solute au centre du solvant. Cela signifie que

l’on enleve des molecules d’eau qui sont presentes au centre de la boıte de simulation,

afin de remplacer l’espace ainsi libere par la molecule de solute.

On laisse ensuite le solvant se relaxer autour du solute. Pour cela, on realise une

dynamique moleculaire dans laquelle la molecule de solute est traitee rigide (pas de

94

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deformations intra-moleculaires) et ne peut subir ni translation ni rotation, alors que

les molecules de solvant sont libres de subir toutes deformations intra-moleculaires et

translations et rotations. Le solvant s’adapte donc non seulement a la presence de

l’ensemble des molecules de solvant mais egalement a la presence du solute en son sein.

Le solute est ensuite libre de se relaxer et de bouger dans une dynamique moleculaire

suivante. On obtient alors une configuration comme presentee sur la figure 9. Cette

configuration est alors consideree comme la configuration de depart d’une dynamique

moleculaire du systeme compose d’un solute et d’un solvant aqueux.

95

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10 Proprietes issues des simulations de dynamique

moleculaire

10.1 RMSD

RMSD est l’acronyme de Root Mean Square Deviation. Le critere RMSD est employe

pour mesurer la ’difference’ entre la structure d’une molecule obtenue a l’instant t de la

dynamique et celle de reference de la meme molecule. La reference peut etre la structure

de l’instant initial t = 0 de la dynamique, et l’on mesure ainsi les variations de structure

au cours du temps, ou bien la reference peut etre une structure issue d’experiences de

cristallographie ou de RMN et l’on mesure alors les variations de structure au cours de

la dynamique par rapport a cette mesure experimentale.

On definit :

RMSD =

∑Ni=1 d2

i

N(99)

ou N est le nombre d’atomes de la molecule et

d2i =

(

xi − xrefi

)2

+(

yi − yrefi

)2

+(

zi − zrefi

)2

avec (xi, yi, zi) les coordonnees de

l’atome i dans la structure generee dans la dynamique a l’instant t, et (xrefi , yref

i , zrefi )

les coordonnees de l’atome i dans la structure de reference.

La somme∑N

i=1 s’entend sur tous les atomes de la molecule, ou bien sur une partie

seulement des atomes de la molecule. Ainsi, pour les proteines, on distingue en general

le squelette de la molecule du reste de la molecule : le RMSD est en general calcule

seulement sur les atomes du squelette.

10.2 Rayon de gyration de molecules

Il est interessant de caracteriser les structures de polymeres (polymeres ou chaınes de

carbones, proteines, acides nucleiques, ...) en termes de molecules allongees ou repliees.

96

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Le critere du rayon de gyration permet de quantifier cela. Plusieurs definitions peuvent

etre employees. Par exemple, on peut calculer la distance entre les extremites du po-

lymere et regarder l’evolution de cette distance en fonction du temps. On peut aussi

calculer la distance entre le centre de masse du polymere et ses extremites, et suivre son

evolution au cours du temps. On peut encore calculer le rayon de gyration en moyen-

nant les distances de chaque atome au centre de masse, chaque distance etant ponderee

par la masse de l’atome. Ainsi un atome lourd contribue de facon plus importante a la

valeur du rayon de gyration qu’un atome leger. Comme pour le critere RMSD, on peut

ne prendre en compte que les atomes de la chaıne principale de la molecule (le squelette

des proteines par exemple) pour le calcul du rayon de gyration. On suit l’evolution de

ce critere en fonction du temps.

10.3 Energie libre

Cela est fait en details dans l’UE 34. Nous ne presentons rien ici.

10.4 Fonction de distribution radiale (RDF ou g(r))

Une fonction de distribution radiale est un histogramme normalise (nous verrons le

facteur de normalisation qui est employe) qui decompte le nombre de particules qui

sont presentes a l’interieur de couches. Voir l’illustration de la figure 34. La fonction

de distribution radiale mesure la correlation statistique qui existe entre les positions

des particules. C’est une mesure moyenne qui reflete l’ensemble de la dynamique et

l’ensemble des particules.

Une fonction de distribution radiale est composee de pics qui representent les couches de

particules voisines. Le premier pic est associe a la premiere couche de particules voisines,

le second pic a la seconde couche de particules voisines (a plus longue distance), etc ...

97

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Fig. 34 – Illustration des couches et du decompte des particules a l’interieur des couches pour mettre

en place la fonction de distribution radiale.

Plus la couche (ou le pic) est localisee a longue distance, moins il existe de correlations

de position entre les particules qui appartiennent a ces couches. Au contraire, plus

la couche (ou le pic) est localisee a courte distance, plus il existe de correlations de

position entre les particules qui appartiennent a ces couches.

Principe du calcul d’une fonction de distribution radiale :

– choisir une particule i de reference localisee en ~ri

– dessiner une sphere de rayon r et d’epaisseur ∆r autour de ~ri (voir illustration de la

figure 34). ∆r est choisi suffisamment petit.

– une particule j appartient a cette sphere si la distance rij = |~ri − ~rj| est telle que

r − ∆r ≤ rij < r. On definit ainsi des couronnes concentriques d’epaisseur ∆r.

– Si la particule j appartient bien a cette couronne spherique, on incremente un comp-

98

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teur d’histogramme note ni(r, ∆r)

– on realise ce decompte d’histogramme pour toutes les particules du milieu.

– on divise ni(r, ∆r) par le volume de la couronne spherique 4πr2∆r, et on moyenne

sur l’ensemble des particules 1N

∑Ni=1

ni(r,∆r)4πr2∆r

– la fonction de distribution radiale est finalement obtenue en normalisant par la den-

site du milieu ρ = NV

ou V est le volume du milieu : g(r) = 1ρ

1N

∑Ni=1

ni(r,∆r)4πr2∆r

, soit

g(r) =V

N2

N∑

i=1

ni(r, ∆r)

4πr2∆r(100)

– on fait attention que ce calcul est realise a chaque pas de la simulation de dynamique

moleculaire. On doit donc moyenner le resultat sur l’ensemble des pas de dynamique,

ici note τ , soit

g(r) =1

τ

V

N2

N∑

i=1

ni(r, ∆r)

4πr2∆r(101)

On definit ensuite le nombre de coordination nc qui represente le nombre de parti-

cules qui sont localisees au maximum a la distance Rc d’une particule de reference (cad

localisees a l’interieur de la sphere de rayon Rc centree sur une particule de reference) :

nc(r) =N

V

∫ Rc

0

4πr2g(r)dr (102)

nc donne le nombre de particules plus proches voisines de la particule de reference.

Les figures 35 illustrent des fonctions de distribution radiale typiques d’un solide et

d’un liquide homogene. Un solide est caracterise par des pics parfaitement localises

dans l’espace, tres faible largeur (pratiquement des diracs) et d’amplitude forte. Le

liquide homogene apparaıt comme un solide deforme avec des pics plus larges et moins

intenses, des pics moins bien definis que pour le solide. La fonction de distribution

radiale doit tendre vers l’asymptote 1 a longue distance, asypmtote caracteristique du

99

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Fig. 35 – Illustration des fonctions de distribution radiale typiques d’un solide, liquide homogene

et gaz.

gaz. Un gaz est caracterise par un g(r) qui vaut zero ou 1, c’est une marche d’escalier.

La fonction de distribution radiale peut etre utilisee pour definir des solides ou liquides,

comme decrit ci-desus, mais egalement pour definir les liaisons hydrogenes formees

entre les atomes d’une molecule de solute immergee dans un solvant (par exemple l’eau

liquide). On determine ainsi quels atomes du solute sont offerts a la solvatation et donc

100

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potentiellement a la formation de liaisons hydrogene avec les atomes du solvant, et

quels atomes sont enterres et donc non accessibles au solvant. Ceci est illustre dans le

cas de la molecule N-methyl-acetamide (NMA, figure 36) immergee dans l’eau liquide

(calculs de dynamique moleculaire ab initio - M.P. Gaigeot et Coll.) sur la figure 37.

Fig. 36 – Representation de la molecule NMA N-methyl-acetamide (a gauche) et de la molecule

immergee dans une boıte d’eau liquide (a droite).

Sur les figures 37, les premiers pics des distributions radiales sont localises aux distances

de l’ordre de 1.8-2.0 A, ce qui correspond a des valeurs de liaisons hydrogenes. A part

pour les distributions solvant-solvant, les seconds pics sont difficilement discernables,

ce qui montre que seule une couche de solvant est parfaitement organisee autour de la

molecule solute NMA. Les autres couches de solvant ne sont pas bien structurees, ce

qui se traduit par des seconds pics de distribution radiale qui ne sont pas bien definis.

101

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1 2 3 4 5 6r (Ang.)

0

0.5

1

1.5

2Trans-NMACis-NMA

1 2 3 4 5 6r (Ang.)

0

0.5

1

1.5

2Trans-NMACis-NMA

3 4 5 6 7 8r (Ang.)

0

1

2

3

4Trans-NMACis-NMA

1 2 3 4 5 6 7r (Ang.)

0

1

2

3

4

5

6Trans-NMACis-NMA

Fig. 37 – Fonctions de distribution radiales solute-solvant et solvant-solvant pour la simulation de

dynamique moleculaire de NMA N-methyl-acetamide immergee dans l’eau liquide (calculs de dyna-

mique moleculaire ab initio - M.P. Gaigeot et Coll.) Conventions : H est l’atome d’hydrogene du groupe

N − H de NMA, O est l’atome d’oxygene du groupe C = O de NMA, C est l’atome de carbone du

groupe C = O de NMA, Ow et Hw sont les atomes d’oxygene et d’hydrogene des molecules d’eau de

solvant. RDF : H-Ow (haut a gauche), O-Hw (haut a droite), C-Ow (bas a gauche), Ow-Ow, Ow-Hw,

Hw-Hw (bas a droite). Sur la figure, on a represente les resultats obtenus ppour Trans-NMA (lignes

pleines) et Cis-NMA (lignes pointillees). Les distances sont en Angstrom.

102

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10.5 Fonctions de correlation

Beaucoup de grandeurs physiques seront calculees a partir de fonctions de correlation

temporelle. Cela provient de la Theorie de la Reponse Lineaire, que nous ne presentons

pas ici.

Principe du calcul d’une fonction de correlation temporelle d’une grandeur

quelconque A(t) :

On veut calculer C(t) =< A(t).A(0) > la correlation de la valeur de la grandeur A(t)

a l’instant t avec la valeur de la grandeur A(0) a l’instant initial de la simulation

t = 0. Les < · · · > signifient une moyenne statistique d’ensemble. Cette statistique

s’entend par un nombre important de simulations de dynamique moleculaire realisees

sur le systeme etudie, sur lesquelles on moyenne le calcul de A(t).A(0). Le calcul de

A(t).A(0) a chaque instant t de la simulation est evident a realiser dynamique par

dynamique, il suffit de multiplier les deux grandeurs entre elles instant t par instant t,

il faut ensuite moyenner le resultat a chaque instant t sur l’ensemble des dynamiques

realisees.

C’est la que le “bas blesse”. En effet, les simulations de dynamique moleculaire peuvent

etre relativement cheres en temps de calculs. Aussi, on realise tres rarement plusieurs si-

mulations differentes (qui different par les conditions initiales de positions et de vitesses

des atomes du systeme). On realise donc tres rarement une statistique qui permette de

calculer effectivement une moyenne d’ensemble du type < · · · >.

Pour palier cela, on utilise l’astuce suivante. En general, suivant le principe d’ergodicite,

on realise une seule simulation de dynamique moleculaire suffisamment longue. Chaque

instant t de la dynamique peut etre vu comme un instant t = 0 potentiel, celui d’une

autre simulation, puisque les coordonnees et vitesses des atomes sont differents de ceux

aux instants precedents de la simulation. On va donc dire que chaque instant t de

103

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la simulation peut servir de temps t = 0 pour le calcul des fonctions de correlation.

On definit ainsi M origines de temps tj = 0 issues de la simulation de dynamique

moleculaire.

On calcule alors la fonction de correlation C(t) comme suit :

C(t) =1

M

M∑

j=1

A(tj)A(tj + t) (103)

suivant l’image representee sur la figure 38. Il faut bien faire attention a prendre en

compte correctement les instants posterieurs a chaque nouvel instant tj = 0 en trans-

latant de l’intervalle t voulu. La moyenne d’ensemble est representee par la moyenne

sur les M instants origines tj = 0.

Fig. 38 – Illustration de l’astuce des temps t = 0 pour le calcul des fonctions de correlation.

La figure 39 illustre une fonction de correlation typique, ici des vitesses ~v. On voit par

exemple que la fonction de correlation tend rapidement vers zero, en environ 0.2 pico-

secondes. Cela signifie que le vecteur vitesse ~v(t) perd la memoire du vecteur vitesse

initial ~v(0) en environ 0.2 pico-secondes. En d’autres termes, quel que soit l’instant t

de la simulation, le vecteur vitesse ~v(t) perd completement la memoire des vecteurs

vitesse anterieurs de 0.2 pico-secondes.

104

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Fig. 39 – Illustration d’une fonction de correlation typique (ici des vitesses ~v).

105

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10.6 Coefficient de diffusion

Les simulations de dynamique moleculaire ont l’avantage d’inclure explicitement la no-

tion temporelle. On peut donc s’en servir pour determiner des mouvements de molecules

et en particulier des coefficients de diffusion.

Deux formules peuvent etre employees pour calculer le coefficient de diffusion d’une

particule (atome, molecule) : la formule d’Einstein ou la formule basee sur la fonction

de correlation des vitesses.

La formule d’Einstein est :

D(t) =1

6t|~ri(t) − ~ri(0)|2 (104)

La formule basee sur la fonction de correlation des vitesses est :

D(t) =1

3

∫ ∞

0

< ~vi(t).~vi(0) > (105)

Fig. 40 – Illustration de courbes de diffusion D(t) pour un liquide a deux temperatures differentes.

106

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L’indice i dans ces formules represente la particule i que l’on caracterise. Ces deux

formules sont representatives d’un espace a 3 dimensions.

Ces formules nous donne l’evolution d’un coefficient D en fonction du temps comme

illustre sur la figure 40. Ce coefficient est le carre du deplacement moyen suivant la

formule d’Einstein. Le coefficient de diffusion D est obtenu comme la pente de la

courbe.

Si l’on est dans un liquide dans lequel plusieurs particules de type i sont presentes,

on calcule le coefficient de diffusion moyen representatif de l’ensemble des particules

du meme type i. Dans ces conditions, on moyenne les expressions precedentes sur le

nombre de particules du meme type, Ni ici, soit :

D(t) =1

Ni

Ni∑

i=1

1

6t|~ri(t) − ~ri(0)|2 (106)

D(t) =1

3

1

Ni

Ni∑

i=1

∫ ∞

0

< ~vi(t).~vi(0) > (107)

107

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10.7 Spectre vibrationnel

Le spectre vibrationnel d’un systeme donne (que ce soit une molecule, l’ensemble des

molecules d’un liquide, un liquide atomique ou moleculaire, un solide atomique ou

moleculaire) est calcule par la transformee de Fourier de la fonction de correlation

des vitesses des atomes du systeme. On l’appelle VDOS pour Vibrational Density Of

States :

V DOS(ω) =∑

i=1,N

∫ ∞

−∞

〈vi(t)·vi(0)〉 exp(iωt) dt (108)

ou la somme courre sur l’ensemble des N atomes qui constituent le systeme dont on

caracterise le spectre vibrationnel.

Cette formule nous fournit le spectre vibrationnel total du systeme considere (3N − 6

modes de vibration pour les N atomes du systeme). Il faut bien faire attention a ce

que certaines des vibrations seront actives en spectroscopie vibrationnelle infrarouge,

certaines seront actives en spectroscopie vibrationnelle Raman, certaines ne seront

actives ni en spectroscopie infrarouge ni en spectroscopie Raman. En aucun cas, le

spectre VDOS ne peut donc etre directement compare aux spectres experimentaux

infrarouge ou Raman. Le spectre VDOS donne l’ensemble des 3N−6 modes de vibration

du systeme considere, sans indication d’activite infrarouge ou Raman.

Le spectre vibartionnel VDOS peut etre decompose en composantes atomiques indi-

viduelles en restreignant la sommation de la formule 108 a des indices d’atomes pre-

definis. On extrait ainsi la contribution d’un atome ou d’un groupe d’atomes particulier

des pics vibrationnels. Cette decomposition est utilisee pour interpreter le spectre vi-

brationnel VDOS afin d’attribuer chaque pic vibrationnel a des mouvements atomiques

specifiques.

Ceci est illustre sur la figure 41 dans le cas de la simulation de dynamique moleculaire

ab initio de la molecule N-methyl-acetamide NMA immergee dans l’eau liquide (voir

108

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figure 36 pour l’image du systeme simule) (resultats extraits des travaux de M.P. Gai-

geot et Coll.). Illustration sur le domaine de frequences 1000-2000 cm−1. On presente

ici le spectre VDOS de la molecule de solute N-methyl-acetamide.

109

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1000

1200

1400

1600

1800

1000

1200

1400

1600

1800

NM

A

CONH

NM

A

CH

3/C

=O si

de

CH

3/N

-H si

de

C/C

=O si

de

C/N

-H si

de

Fig. 41 – VDOS de N-methyl-acetamide NMA immergee dans l’eau liquide a 300 K. Resultats

extraits des travaux de M.P. Gaigeot et Coll.

110

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10.8 Spectre infrarouge

Le spectre vibrationnel infrarouge est obtenu via la transformee de Fourier de la fonc-

tion de correlation du moment dipolaire du systeme considere ~M (note ici M) :

I (ω) =2πβω2

3cV

∫ ∞

−∞

dt 〈M(t)·M(0)〉 exp(iωt) (109)

ou β = 1/kT , c est la vitesse de la lumiere, V est le volume du systeme.

Une illustration est presentee sur la figure 42 dans le cas de la simulation de dyna-

mique moleculaire ab initio de la molecule N-methyl-acetamide NMA, soit en phase

gazeuse soit immergee dans l’eau liquide (voir figure 36 pour l’image du systeme simule)

(resultats extraits des travaux de M.P. Gaigeot et Coll.). Illustration sur le domaine

de frequences 1000-2000 cm−1. On presente sur la figure 42 le spectre infrarouge de la

molecule de solute N-methyl-acetamide.

On voit bien sur la figure 42 les modifications de spectre infrarouge de la molecule

NMA, selon sa conformation Trans ou Cis, et selon qu’elle est en phase gazeuse ou en

phase liquide. Les positions des bandes vibrationnelles actives en infrarouge, leur forme

ainsi que leur intensite varient en effet considerablement selon ces conditions.

On illustre sur la figure 43 l’attribution des bandes vibrationnelles actives infrarouges

de la molecule NMA a partir de la connaissance du spectre infrarouge, du spectre VDOS

et des decompositions du spectre VDOS comme presente dans la section precedente.

La comparaison du spectre infrarouge issu du calcul a celui mesure experimentalement

est presente sur la figure 44 pour NMA immergee dans l’eau liquide. Le tres bon

accord obtenu ici provient essentiellement de la qualite des simulations de dynamique

moleculaire ab initio qui ont ete employees dans le travail. Aucun champs de forces

classiques n’est a l’heure actuelle capable de fournir un tel accord avec l’experience.

111

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1000

1500

0

2000

4000

1000

1500

0

600

1200

1000

1500

0

2000

4000

1000

1500

0

600

1200

Fig. 42 – Spectres infrarouges de Trans-NMA (en haut a gauche) et Cis-NMA (en bas a gauche) en

phase gazeuse, de Trans-NMA (en haut a droite) et Cis-NMA (en bas a droiote) immergees dans l’eau

liquide. Spectres presentes sur le domaine de frequences 1000-2000 cm−1, les intensites sont egalement

en unite cm−1. Resultats extraits des travaux de M.P. Gaigeot et Coll.112

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Fig. 43 – Illustration de l’attribution des bandes vibrationnelles actives infrarouges de la molecule

NMA : phase gazeuse (en haut) et phase aqueuse (en bas). Resultats extraits des travaux de M.P. Gai-

geot et Coll.

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Fig. 44 – Comparaison du calcul du spectre infrarouge issu du calcul et celui mesure

experimentalement est presente sur la figure 44 pour NMA immergee dans l’eau liquide. L’experience

est en traits pleins et la simulation en traits pointilles. Resultats extraits des travaux de M.P. Gaigeot

et Coll.

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11 Mise en place d’un code de dynamique moleculaire

pour des systemes simples

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12 Principes de la dynamique moleculaire ab initio

12.1 Dynamique de type Born-Oppenheimer

12.2 Dynamique de type Car-Parrinello

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