pelgrims claire etude des batiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape br

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ETUDE DES BÂTIMENTS MODERNISTES DE GRANDE HAUTEUR DANS LEUR RELATION AU ROADSCAPE BRUXELLOIS PELGRIMS CLAIRE Mémoire de Fin d’Étude sous la Direction de Géry Leloutre

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Mémoire de fin d'études présenté à la Faculté d'Architecture La Cambre Horta en septembre 2015 en vue de l'obtention du grade de master en architecture.

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  • EtudE dEs btimEnts modErnistEs dE grandE hautEur dans lEur

    rElation au roadscapE bruxEllois

    pElgrims clairE mmoire de fin dtude sous la direction de gry leloutre

  • EtudE dEs btimEnts modErnistEs dE grandE hautEur dans lEur

    rElation au roadscapE bruxEllois

    Facult darchitecture la cambre - horta universit libre de bruxellesanne acadmique 2014 -2015

    pElgrims clairE mmoire de Fin dtude sous la direction de gry leloutre

  • 2

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    3

    tablE dEs matirEs

    table des matires 3

    Liste des figures 5

    liste des annexes 9

    Introduction gnrale 11

    Note mthodologique 17

    les plans de modernisation du rseau des voiries de ltat 19

    partiE i 23

    Chapitre 1 Ambitions de la rnovation urbaine 27

    chapitre 2 mise ltude de cette rnovation 31

    2.1 Historique des Plans particuliers dAmnagement 31

    2.2 Historique Plans du groupe Alpha 34

    2.3 historique plan tekhn 34

    chapitre 3 instruments de la rnovation urbaine 41

    3.1 la loi de 1962 et le secteur priv 41

    3.2 la politique de rnovation et de lutte contre les taudis et la politique de logements sociaux 42

    3.3 le dveloppement du rseau des autoroutes

    en Belgique et Bruxelles 43

    3.4 le plan Vert 52

    Rsum de la premire partie 57

    partiE ii EtudE dE cas 59

    Spcificits des cas dtudes 61

    chapitre 1 la petite ceinture 63

    1.1 une ceinture ? un modle hybride 63

    1.2 le quartier des radis 66

    1.3 le quartier de la porte de namur 69

    1.4 Le Quartier du XXe sicle 73

  • 4chapitre 2 lavenue louise 99

    2.1 la modernisation de lavenue et le problme de la spculation 99

    2.2 Logique dimplantation des immeubles-tours 107

    chapitre 3 la route express du maelbeek et les zones dhabitat

    avec espaces verts 111

    3.1 Amnagement dune voie express 112

    3.2 une solution aux problmes des inondations 113

    3.3 Des paysages urbains de texture verdure 114

    3.4 les instruments de la rnovation urbaine 118

    Chapitre 4 Lamnagement du pentagone 123

    4.1 Lamnagement dun ring intrieur 123

    4.2 le quartier des radis 128

    rsum de la deuxime partie 139

    conclusion 143

    Vers une dfinition du roadscape 145

    la ralisation du roadscape 146

    bibliographiE 151

    ANNeXeS 167

    RemeRCIemeNtS 173

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    5

    listE dEs FigurEs

    32 Cartes de la situation des plans particuliers damnagement

    35 synthse du plan de secteur alpha (bruxelles, 1955) in gustave abeels, 323

    groupe alpha, rseau autoroutier en 1958 (bruxelles, 1958)

    Gouvernement belge, plan de lagglomration avec les units de voisinages et les villes satellite propos par le Groupe Alpha (bruxelles, 1958)

    36 Circulation et parking, Rapport planchersol, et Rpartition des habitants (/ha), plan Tekhn, 1962 in p. de saulnier, 11, 15

    45 courants axiaux, circulation journalire in h. hondermarcq, la modernisation du rseau routier belge , 898

    rseau autoroutier bruxellois in ministre des travaux publics et de la reconstruction, Bruxelles: Carrefour de lOccident (bruxelles, 1956), 13

    46 Bruxelles, trafic de pntration in ministre des travaux publics et de la reconstruction, Bruxelles: Carrefour de lOccident (bruxelles, 1956), 4

    perspectives in ministre des travaux publics et de la reconstruction, Bruxelles: Carrefour de lOccident (bruxelles, 1956), 21, 25

    49 travaux publics, Boulevard Baudouin, 1958. bruciel

    travaux publics, Avenue de Beaulieu, 1975. Bruciel

    50 ministre des travaux publics, service des routes de bruxelles-capitale, Rseau des Routes Grande Circulation, 1971

    64 Fig. 46, etude de rentabilit de lamnagement des boulevards de la petite ceinture bruxelles, sectionnement pour ltude in paul lefvre, LAmnagement Routier de Bruxelles , 64

    Perspective originale in gry leloutre et Yannick Vanhaelen

    67 Ville de Bruxelles, Service technique des travaux Publics, Plan Particulier dAmnagement n22-15 des lots compris entre les rues des tanneurs, du chevreuil, blaes et le boulevard du midi , avant-projet dimplantation (Ville de bruxelles, ca 1968)

    68 Quartier des radis, projet de larchitecte courtoi, adapt par la ville de bruxelles en collaboration avec larchitecte in p. de saulnier, 21

    Collage concernant le projet finale du quartier des Radis in leloutre et Vanhaelen

    ministre des travaux publics, Porte de Namur et avenue de la Toison dOr, 1972. Bruciel

  • 671 Commune dIxelles. Direction des travaux Publics. Service de lUrbanisme, Plan Particulier dAmnagement n1901 des lots 13&14 , Plan de Destination et des prescriptions urbanistiques (ixelles, 1 fvrier 1965)

    72 Collage des PPA Astronomie, madou et extension

    Cartographie des projets projets et existants du Quartier du XXe sicle

    77 maquette du Quartier du XXe sicle in le quartier du xxe sicle. de la place madou la place Rogier, zone verte avec des immeubles-tours

    maquette de la tour botanique in Jean-pierre blondel, 48

    78 Commune de Saint-Josse-ten-Noode, Plan Particulier dAmnagement n79 de llot dlimit par la rue Botanique, la rue du Chemin de Fer, le boulevard st. lazare et le Jardin botanique , plan de destination et de prescriptions urbanistiques (saint-Josse-ten-noode, 5 dcembre 1962)

    Commune de Saint-Josse-ten-Noode, Plan Particulier dAmnagement n79A rvisant le Plan Particulier dAmnagement de llot dlimit par la rue Botanique, la rue du chemin de Fer, le boulevard st. lazare et le Jardin botanique , plan de Destination et Prescriptions Urbanistiques (Saint-Josse-ten-Noode, 17 octobre 1974)

    83 tableau comparatif des itrations des projets de limmeuble-tour botanique

    Photomontages in l. hendrickx

    84 Commune de Saint-Josse-ten-Noode, Plan Particulier dAmnagement de la chausse de louvain, de la rue scailquin et de la place madou , plan de destination et prescriptions urbanistiques (saint-Josse-ten-noode, 26 octobre 1961)

    89 Premier projet de ladministration communale et projet englebert, s.d., D2273/10A, Direction de lAmnagement du territoire, Rgion de Bruxelles-capitale

    Dessin publi par Hubert, 71.

    ministre des travaux publics, Bd Bischoffsheim, Place des Barricades, 1988. bruciel

    90 Commune de Saint-Josse-ten-Noode, Plan Particulier dAmnagement des lots dlimits par les rues du mridien, de la limite, de lunion, de Beriot, Potagre et le square Henri Frick , Plan de Destination et Prescriptions urbanistiques (saint-Josse-ten-noode, 18 octobre 1968)

    101 baucher - blondel - Filippone, Esquisse de transformation de lavenue Louise. Ilot existant type, barre de logement type propose et schma, 1953. Fonds baucher - blondel - Filippone.

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    7

    ministre des travaux publics, avenue Louise, 1967. Bruciel.

    102 Collage. Ville de Bruxelles, Service technique des travaux Publics division Urbanisme, Plan Particulier dAmnagement n40-31bis Quartier Louise , Plan de Destination, compos de 4 feuilles (Ville de Bruxelles, juillet 1970)

    travaux publics, Bd Bischoffsheim, 1988 et rond-point de lEtoile, 1969. bruciel

    105 Ville de bruxelles, service technique des travaux publics division Urbanisme, Plan Particulier dAmnagement n40-31bis Quartier Louise , Plan de Destination, compos de 4 feuilles et Drogation (Ville de Bruxelles, juillet 1970)

    Commune de Saint-Gilles, Plan Particulier dAmnagement lot n32 dlimit par avenue Louise, rue Blanche, rue de Livourne et rue de la Bont et lot n33 dlimit par avenue louise, rue de la bont, rue berckmans et chausse de Charleroi , Plan de Destination (Saint-Gilles, 10 dcembre 1971)

    106 maquette du plan particulier damnagement de lavenue Louise, ca 1971. Collection Georges Binder / Building & Data SA

    115 Amnagement de la valle du Maelbeek, s.d., archives de larau, coloris

    le projet immobilier du Foyer ixellois aux abords de la rue gray, Le Soir, s.d., archives de larau

    116 Cartographie du projet de rnovation de la valle du maelbeek, partie sud

    125 pierre de saulnier, brochure lectorale UAB, s.d., archives de larau.

    maquette du centre monnaie, D2043/101, Direction de lAmnagement du territoire, Rgion de Bruxelles-Capitale.

    Ville de bruxelles, service technique des travaux publics, plan particulier damnagement n44/31: rnovation de llot Grand-Poste compris entre le boulevard anspach, la rue du Foss aux loups et la rue de lEveques , plan de destination (Ville de bruxelles, 13 avril 1965)

    126 Cartographie du dbouch du tunnel assurant la liaison entre lavenue louise et les boulevards de la Jonction

    129 Quartier Hpital-Dinant, maquette de lamnagement in p. de saulnier, 26.

    Vue arienne de lchangeur de la place de la Justice, 1971. Bruciel.

    Ville de bruxelles, service technique des travaux publics division urbanisme, Plan Particulier dAmnagement n30-21. Rnovation des lots 18, 19, 22, 23, 24, 25, 26, 35, 36, 37, 38 , Plan de Destination (Ville de Bruxelles, 25 fvrier 1964)

  • 8130 Fig. 10 - Plan vert, plan Tekhn, 1962 in p. de saulnier, 13.

    131 Cartographie du pentagone et du rseau en toile du ring intrieur prvu par le plan tekhn en 1962

    132 Quartier des radis, projet de larchitecte courtoi, adapt par la ville de bruxelles en collaboration avec larchitecte et Quartier de la rue de la Querelle, maquette de lamnagement in P. de Saulnier, 21, 23.

    Ville de bruxelles, service technique des travaux publics division urbanisme, Plan Particulier dAmnagement n22-15 des lots compris entre les rues des tanneurs, du chevreuil, blaes et le boulevard du midi , projet dimplantation (Ville de bruxelles, 24 juillet 1968)

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

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    listE dEs annExEs

    1. plans de modernisation du rseau des voiries de lEtat

    2. Carte gnrale

  • 10

    Introduction gnrale

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    11

    introduction gnralE

    le mouvement de la rnovation urbaine et le dveloppement du rseau autoroutier bruxelles suivi par la contestation qui a men au mouvement de reconstruction de la ville europenne ont t relativement bien documents par diffrents acteurs de la communaut bruxelloise, dtracteur du projet de ville moderne, notamment demey avec sa Chronique dune capitale en chantier 1. synthtisant ce rcit dans Des gratte-ciel dans Bruxelles, la tentation de la ville verticale 2, il utilise lironie pour nous persuader de toute la btise qui a men la destruction de la capitale, esprant ainsi prvenir le dveloppement dautres tours. ses chroniques trs dtailles sont la base historique de nombreux livres de vulgarisation des Archives darchitecture moderne 3. ces auteurs dressent systmatiquement le tableau de pouvoirs publics faibles ngociant avec des promoteurs immobiliers voraces. la base de largumentaire du mouvement idologique de reconstruction de la ville europenne soutenu par lARAU et les AAm, cette interprtation est galement lisible dans de nombreux articles scientifiques sur la problmatique plus large de limplantation des bureaux bruxelles 4.

    Aron, professeur La Cambre, dfend pourtant en 1978, dans son livre Le tournant de lurbanisme bruxellois 1958-1978, le scnario dune stratgie soutenue par les pouvoirs politiques qui a chou cause de ses contradictions internes 5. ainsi, selon lui :

    La fivre constructrice Bruxelles na t que la consquence de lintervention

    urbanistique de certains pouvoirs publics en vue de favoriser ponctuellement des

    investissements de grand profit immdiat. 6

    Cette stratgie est lie la mise en place dun rseau dautoroutes, de lchelle europenne celle de la ville, qui aurait fait de bruxelles le carrefour de loccident 7.

    Cette interprtation, rare lpoque, semble aujourdhui tre partage par un nombre croissant. dans son article lexpo 58 et le tout lautomobile. Quel avenir pour les grandes infrastructures routires urbaines Bruxelles 8, hubert revient sur lidologie du tout lautomobile qui dvore les pays occidentaux dans laprs-guerre et son impact Bruxelles. Cette approche historique, plus nuance, est galement adopte dans les travaux de lhistorien Bernard, notamment dans sa petite histoire des tours bruxelles publie par dejemeppe dans Bruxelles,

  • 12

    Introduction gnrale

    les tours, la ville 9 et dans Bruxelles 50 60, Architecture moderne au temps de lExpo 58 cocrit avec berckmans 10. De Kooning et Strauven remette galement, dans leur chapitre Bruxelles 1945-1970 : espoirs et illusions 11, la construction des tours dans le contexte de la construction du rseau autoroutier. laconte met pour sa part laccent sur limpact de la lgislation belge sur le mouvement de suburbanisation de lhabitat qui explique le dveloppement de la fonction tertiaire et des voies daccs rapides des zones dhabitat aux lieux de travail 12, comme soulign par Leloutre et Provost 13.

    concernant le dveloppement de linfrastructure routire, certains travaux acadmiques rcents postulent, au-del dune stratgie conomique et politique, lexistence lpoque de rels projets urbains, de planifications spatiales, qui organisent effectivement la prise de dcision politique. lchelle de la Belgique, Ryckewaert claire ainsi le dveloppement de linfrastructure routire accompagnant le dveloppement conomique du pays en considrant ce dveloppement comme tant guid non seulement par des intrts politiques et conomiques, mais aussi par des considrations dorganisation spatiale et urbanistique 14. tellier, qui pour sa part tudie empiriquement le propre de laction administrative technique des ingnieurs du souterrain bruxellois et dveloppe notamment lhistoire du tunnel comme solution technique, rationnelle et scientifique rpondant la double exigence de capacit et de non-interfrence : librer des volumes de trafic importants et viter les frictions dintersection entre voies de circulation perpendiculaires 15, met galement en vidence les projets urbains de ce corps administratif.

    dans le mme esprit, mais concernant le dveloppement des immeubles-tours Bruxelles, Leloutre a mis intuitivement en vidence la logique urbaine qui lie troitement, cette fois-ci, les tours au boulevard dans son article bruxelles haute voltige : regard sur le dbat des tours Bruxelles 16. Il a galement prsent ce travail avec Vanhalen au colloque Boulevards/Rings et limites urbaines en Europe 19e-21e sicles (ulb, 2013), posant lhypothse de lexistence dune forme de vision partage inhrente la transformation du paysage bruxellois le long du rseau routier 17. cest dans la continuit de cette dernire recherche que sinscrit tout naturellement ce document.

    Si la littrature dcrit donc gnralement la priode de la rnovation urbaine bruxelles comme une priode erratique, lobjet de ce mmoire est de vrifier lexistence, auprs des autorits publiques, dun projet de ville guidant effectivement les oprations de rnovation urbaine et notamment la construction des immeubles-tours bruxelles. les questions de recherche sont donc les

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    13

    suivantes : les amnagements de la rnovation urbaine Bruxelles se basent-ils, au-del dune stratgie conomique et politique ponctuelle, sur un projet urbanistique et territorial ? Quel est ce projet et comment les autorits publiques le mettent-elles en place ?

    la premire partie de ce mmoire dresse ltat des connaissances sur la planification de la rnovation urbaine Bruxelles. elle traite dans un premier temps des diffrents projets de masterplan de rnovation urbaine dont bruxelles fait lobjet. Elle dveloppe ensuite les instruments de cette rnovation, cest--dire les diffrents financements prvus dans le contexte lgislatif de lpoque. La deuxime partie vrifie ensuite, dans quatre territoires diffrents, comment la planification sopre rellement. elle tudie ainsi la petite ceinture, lavenue Louise, la route express du maelbeek et lamnagement du pentagone. Ce recensement de faits et de discours permet finalement de dfinir le roadscape, forme paysagre dveloppe travers les diffrents amnagements de rnovation urbaine Bruxelles, et dclairer llaboration de ce projet paysager.

  • 14

    Introduction gnrale

    1 Thierry Demey, Chronique Dune Capitale En Chantier (Bruxelles: Ed. Paul Legrain & C.F.C., 1990); Thierry Demey, Chronique Dune Capitale En Chantier, Ed. Paul Legrain & C.F.C. (Bruxelles, 1992). 2 Thierry Demey, Des Grattes-Ciel Dans Bruxelles, La Tentation de La Ville Verticale, Guide Badeaux (Bruxelles, 2008). 3 Voir Maurice Culot, Bruxelles, 100 Ans Durbanisme 1910-2010, Archives dArchitecture Moderne (Bruxelles, 2013); Maurice Culot, Bruxelles Architectures de 1950 Aujourdhui, Archives dArchitecture Moderne (Bruxelles, 2012). 4 Voir Michel De Beule, Bureaux et Planification Bruxelles, 50 Ans Doccasions Manques?, Brussels Studies, 2010; Christian Dessouroux, Fifty Years of Office Building Production in Brussels. A Geographical Analysis, Brussels Studies, 2010; B. Merenne-Schoumaker, Un Problme Mtropolitain Majeur: Lintgration Des Bureaux Dans Les Espaces Urbains. Le Cas de Bruxelles, in La Grande Ville Enjeu Du XXIe Sicle. Hommage Jean Basti, ed. by Beaujeu-Garnier, Dezert, and Ghemla, P.U.F. (Paris, 1961), pp. 36377. 5 Jacques Aron, Le Tournant de LUrbanisme Bruxellois 1958-1978, Fondation Joseph Jacquemotte (Bruxelles, 1978). 6 Ibid, p. 14. 7 Ministre des Travaux Publics et de la Reconstruction, Bruxelles: Carrefour de lOccident (Bruxelles, 1956), Magasin - salle de lecture gnrale, BRB. 8 Hubert, Lexpo 58 et Le Tout Lautomobile. Quel Avenir Pour Les Grandes Infrastructures Routires Urbaines Bruxelles, Brussels Studies, 22 (2008). 9 Pierre Bernard, Petite Histoire Des Tours Bruxelles, in Bruxelles, Les Tours, La Ville, by P. Dejemeppe (Bruxelles: Rgion de Bruxelles-Capitale, 2010), pp. 3889. 10 Caroline Berckmans and Pierre Bernard, Bruxelles 50 60, Architecture Moderne Au Temps de lExpo 58, Apart (Bruxelles, 2007). 11 M. De Kooning and Iwan Strauven, Bruxelles 1945-1970: Espoirs et Illusions, in Un Sicle Darchitecture et Durbanisme 1900-2000, by AA. VV., Mardaga (Lige: Dpartement Architecture et Urbanisme, Universit de Gand, 2000), pp. 11935. 12 P. Laconte, Concilier Densit et quit: Le Cas de Bruxelles (presented at the Colloque sur lurbanisme, la circulation, le stationnement et larrt des vhicules en zones urbaines, Bruxelles, Chambre du Commerce, 2007). 13 Gry Leloutre and Michel Provost, Construire Vertical, Une Optimisation Entre Plan et Structure, Bruxelles Patrimoine, 3 (2012), 12847. 14 Michael Ryckewaert, Building the Economic Backbone of the Belgian Welfare State: Infrastructure, Planning and Architecture 1945-1973 (NAI PUBL, 2011). 15 Cline Tellier, Corps Technique et Techniques Du Corps, Sociologie Des Ingnieurs Du Souterrain Bruxellois (1950-2010) (unpublished Thse prsente en vue de lobtention du titre de Docteur en Sciences sociales et politiques [dir. Franoise Nol], Universit Libre de Bruxelles, 2012), p. 99. 16 Gry Leloutre, Bruxelles Haute Voltige: Regard Sur Le Dbat Des Tours Bruxelles, in Linvention de La Tour Europenne, Picard (Paris: Pavillon de lArsenal, 2009). 17 Gry Leloutre and Yannick Vanhaelen, Le Diable Sur Les Boulevards. Permanence Dune Figure Mtropolitaine Polymorphe: Vers Une Dfinition de La Petite Ceinture Bruxelloise. (presented at the Colloque Boulevards/Rings et limites urbaines en Europe 19e-21e sicles. Culture, mobilit, territoire. Emergence et transformation de lidentit mtropolitaine bruxelloise, 18e - 21e sicle., Universit Libre de Bruxelles, 2013).

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

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  • 16

    Note mthodologique

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

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    notE mthodologiQuE

    Cette recherche se concentre sur un corpus documentaire stalant de 1950 1974. marques par ltablissement du plan de modernisation du rseau routier belge dhondermarcq rclamant la cration du Fonds des routes, dune part, et par la dlgation de llaboration du plan de secteur ladministration de lAgglomration de Bruxelles signant la disparition dun projet de plan de secteur rformateur dautre part, ces deux dates enferment une priode de grande transformation de la capitale. se concentrent en effet, pendant cette priode marque par labsence dun urbanisme fort 18, les oprations de rnovation urbaine qui adaptent la ville la vie moderne et marquent de manire importante, compte tenu du court laps de temps, le paysage de la ville.

    comme mentionne dans lintroduction, la deuxime partie de ce document consistera en ltude en dtail de quatre gographies diffrentes: la petite ceinture comme ceinture autoroutire, lavenue louise comme voie de pntration, la voie express du maelbeek comme axe de ddoublement paysager et, enfin, le rseau en toile du ring intrieur du pentagone dfinissant lpicentre de la capitale. le choix de ces cas dtudes a t opr de manire dvelopper une tude englobante de la rnovation urbaine Bruxelles, lhypothse de dpart tant que ces diffrentes figures urbaines ont t lobjet de quatre types de planification diffrents. il sest cependant avr que ces diffrents cas dtude prsentaient un accs linformation trs diffrenci qui explique la structure peu quilibre de la deuxime partie de ce mmoire, limage des sources disponibles. Il faut galement noter que le cas du Quartier Nord a t volontairement cart de cette tude, dune part, parce quil met en place, travers une planification urbaine reconnue en tant que telle, un ensemble architectural compos dimmeubles-tours qui par leur groupement perdent leur fonction de reprsentation 19 et, dautre part, parce que lamnagement de ce quartier a dj t trs largement document et que son tude naurait pas pu tre porteuse de nouvelles connaissances concernant le processus dlaboration de la ville lpoque tudie.

    prcisons ensuite lobjet dtude de cette recherche archivistique relevant dune approche hypothtico-dductive classique. ce document tudie l urbanisme implicite 20, cest--dire les modles spatiaux et urbains qui dirigent le processus de dcision territoriale pris dans leur entiret. En effet, linstar des travaux de ryckewaert, les rationalits conomiques et politiques ne sont pas considres

  • 18

    Note mthodologique

    ici comme des externalits drangeant les ambitions de la planification urbaine rationnelle et moderne des architectes et urbanistes mais, au contraire, comme parties intgrantes des modles urbains tudis. Allant mme plus loin, la deuxime partie de ce document se concentre presque exclusivement sur la vision du projet urbain des diffrentes administrations publiques. le corpus documentaire est en effet li aux autorits publiques. il est, dune part, constitu de documents portants un discours technique sur ces amnagements de rnovation urbaine et, dautre part, des communications de ces projets la population, que ce soit travers des publications officielles ou par la presse. Ces derniers documents permettent de rendre lisibles les diffrents projets pour la ville apparaissant en filigrane dans les discours techniques.

    Lanalyse des stratgies mises en place par les autorits publiques lors de llaboration des projets de rnovation urbaine dans la deuxime partie de ce mmoire se base principalement sur les plans particuliers damnagement communaux et les plans du Service du trafic Routier et du Fonds des Routes tudiant lamlioration du rseau routier de ltat.

    Cette analyse a entran quelques difficults, les principes des projets de rnovation urbaine ntant que difficilement apprhendables. en effet, les diffrents documents facilement accessibles, cest--dire les plans particuliers damnagement communaux et les plans prospectifs du rseau routier de ltat, ne reprsentent quun fragment du projet lchelle de lagglomration et, mme mis bout bout, noffrent pas une lisibilit de ce dernier (ceci peut dailleurs expliquer la vision chaotique quont pu en avoir les contemporains). de plus, les projets de rnovation de ltat, dabord rests secrets jusquen 1962 pour ne pas blesser lopinion publique rfractaire lintervention de ltat dans les questions durbanisme, ne seront ensuite que rarement publis en attendant la ratification dun plan de secteur qui ne surviendra quen 1979 sous linfluence dune idologie toute fait contraire, celle de la reconstruction de la ville europenne. cela sajoute, pour le chercheur en herbe que nous sommes, la distance de temps qui nous spare des faits tudis. Cette distance a videmment entran la disparition de nombreux documents qui auraient t prcieux notre tude.

    pour analyser les diffrents projets de rnovation urbaine partir des projets damnagement routier et des plans particuliers damnagement, il a donc t ncessaire dintgrer dans le corpus documentaire les permis de construire, les rapports dactivit des administrations communales et ministrielles, mais aussi une masse documentaire plus floue principalement constitue par la presse dans laquelle les projets sont prsents, par les bulletins communaux reprenant les

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    19

    discussions pralables aux dcisions prises en conseil communal, et, surtout, par les dossiers administratifs accompagnant les plans particuliers damnagement. ces derniers contiennent toutes les attestations et les courriers transmis entre les diffrents niveaux de pouvoirs consults lors de llaboration du plan ainsi que des considrations parfois personnelles des diffrents acteurs impliqus. Ces diffrents documents permettent de rendre lisible la relation du fragment de planification tudi au projet de rnovation urbaine imagin dans sa globalit et les relations que ces fragments entretiennent entre eux.

    revenons maintenant aux plans de modernisation du rseau viaire.

    les plans de modernisation du rseau des voiries de ltat

    la premire constatation est que lensemble des plans tudiant les nouveaux tracs ne recouvre pas tout le rseau des voiries de ltat, et encore moins tout le territoire bruxellois. En effet, on peut observer que le Fond des routes et le Service du trafic Routier ne dessinent que les portions de ce rseau ncessitant des amnagements importants tunnel, viaduc ou largissement substantiel de lassiette de la voirie. Cest--dire que, finalement, les plans reprennent les ceintures, les voies de pntration et principalement les ouvrages dart ncessaires pour viter les croisements, les recoupements de circulation 21, entre ces deux types de voiries par un passage niveaux diffrents. Partant dune premire chelle de 1 :1.000 permettant de dcider limplantation du rseau, les fonctionnaires de ltat dessinent ensuite au 1 :500 ou au 1 :200 les tracs des trottoirs et les profils en long de ces diffrents amnagements. Les plans font rgulirement tat, par un simple trac dimplantation, des btiments en ordre ouvert prvus le long de ces tracs qui participent du mme systme ainsi que des btiments publics existants. LAdministration adopte par ailleurs un systme de rfrencement assez simple : la version b963 est la troisime itration de la section dont fait lobjet le plan 96, le B signifiant simplement quon se situe Bruxelles.

    Dans le cadre de ce travail, nous avons ralis une reconstruction cartographique (annexe 2), juxtaposant lchelle de lagglomration diffrents projets dautoroutes urbaines ou de voies express dessins entre 1969 et 1974 (annexe 1). Il na malheureusement pas t possible de retrouver des projets plus anciens, la date de 1969 correspondant simplement lanne des premiers projets archivs. il faut galement noter que cette cartographie reprend une version des plans. en effet, ladministration des routes et le Fonds des routes produisent et tudient

  • 20

    Note mthodologique

    diffrentes alternatives, mais les archives ne gardent la trace que de la dernire tentative de ce processus itratif. Quand plusieurs versions diffrentes chelles du plan taient accessibles, cest le plan le plus dfini qui a t choisi au dtriment du plan grande chelle. Cette reconstruction est un outil de travail qui permet de mettre en relation les diffrents projets de rnovation urbaine travers les plans particuliers damnagement et limplantation des btiments modernistes de grande hauteur avec les diffrents tracs prvus par lAdministration des Routes.

    18 Gry Leloutre, Reading Brusselsmetropolis beyond the Diffuse City Horizontalism as Operative Process for Urban Design, in Urbanism after Urbanism (presented at the VII Inter-national PhD Seminar Urbanism & Urbanization, Paris: Dominique Rouillart, 2013), p. 609 (p. 547). 19 Leloutre, Bruxelles Haute Voltige: Regard Sur Le Dbat Des Tours Bruxelles, p. 3. 20 Ryckewaert, p. 10. 21 P. Lefvre, LAmnagement Routier de Bruxelles, Annales Des Travaux Publics de Bel-gique, 1 (1959), 4571 (p. 49).

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    21

  • 22

    Partie I

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    23

    partiE i

  • 24

    Partie I

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    25

    ce document part de lhypothse que derrire la forte spculation et la construction travers diffrents plans particuliers damnagement des btiments modernistes de grande hauteur Bruxelles se cache en ralit un rel projet urbain de rnovation urbaine lchelle de la ville qui se met en place grce la conjonction entre un contexte lgislatif et des ambitions politiques et conomiques. en effet, si la priode tudie se situe entre les deux grandes priodes de forte planification 22 que sont, dune part, lorganisation de la structure monumentale de la mtropole royale, travers les plans dalignement 23, par les services de linspecteur Voyer jusquen 1903 et, dautre part, la prservation ou la reconstitution de ce patrimoine aprs plusieurs dcennies de transformations radicales travers le plan de secteur ds sa ratification en 1979, ce document postule quil y a nanmoins cette poque une convergence dintrt entre les autorits politiques et le secteur priv qui, partageant les mmes valeurs sur la question de lamnagement de la ville, agissent alors de concert en vue de la ralisation dun paysage renouvel bruxelles.

    lobjet de cette premire partie sera donc de mettre en vidence les ambitions de la rnovation urbaines, sa mise ltude et, enfin, les outils permettant sa ralisation dans le contexte lgislatif et administratif.

    22 Leloutre, Reading Brusselsmetropolis beyond the Diffuse City Horizontalism as Operative Process for Urban Design, p. 547. 23 Pour le passage du plan dalignement au plan damnagement, voir Benedikte Zitouni, Agglomrer: une anatomie de lextension bruxelloise (1828-1915) (Asp / Vubpress / Upa, 2010).

  • 26

    Partie I

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    27

    chapitrE 1 ambitions dE la rnoVation urbainE

    Rnover et moderniser la ville en ladaptant la circulation automobile afin de permettre bruxelles de jouer un rle important sur la scne internationale est clairement une volont des autorits publiques lpoque. laccs rapide en voiture au centre-ville doit en effet garantir le futur europen de Bruxelles qui organise alors lexposition universelle de 1958 et se porte candidate pour accueillir les institutions europennes. tout comme la fonction industrielle a, en son temps, reform la capitale, lmergence de la fonction tertiaire doit, elle aussi, donner naissance un nouveau paysage urbain 24.

    cela, sajoute galement une politique de lutte contre le dpeuplement de lagglomration travers la construction de logements ultramodernes. Le phnomne centrifuge des villes, li au dveloppement de lautomobile 25 peut, linstar de ce qui sest fait dans les grandes villes amricaines comme New York, Washington, Chicago, Philadelphie et Los Angeles, tre combattu par une entreprise de rnovation des centres. La migration de la population aise vers les limites de la ville ds la fin du XIXe sicle a en effet entran un appauvrissement dans le centre-ville et, cause de son tat de dcrpitude, le vieux tissu urbain est alors considr par les politiciens comme un ensemble de taudis dmolir, lexception de certains btiments prestigieux aux alentours de la Grand-Place 26. imitant ce qui, dans la priphrie, rpond aux attentes des habitants dlaissant les centres-villes,

    ce new-look des centres amricains sest traduit non seulement par la dmolition

    des immeubles des quartiers insalubres, la reconstruction dimmeubles modernes

    utilisant toutes les ressources de la troisime dimension et des techniques

    de construction les plus volues, la cration autour des volumes btis, de

    dgagements importants amnags en espaces verts, mais aussi par la cration

    dautoroutes urbaines et de parkings avec lappoint des transports en commun

    galement rnovs assurant laccs plus ais du centre. 27

    la transformation des centres urbains selon ce modle ainsi que lurbanisation despaces de plus en plus loigns des centres est une manire de diminuer la densit des habitants, procdant ainsi un desserrement progressif des villes li une augmentation du niveau de vie et de la motorisation 28. en plus de garantir le dveloppement tertiaire, laccessibilit du centre-ville et son desserrement doivent donc permettre dy attirer de nouveaux habitants.

  • 28

    Partie I

    Scaillon synthtise ainsi le principe :

    La proportion de voiries est actuellement de 30% de la superficie totale de nos villes,

    une nouvelle et surprenante proportion apparat, elle offre 65% du sol non bti pour

    35% de sol construit. nous pouvons donc noncer cette vrit qui ressemble une

    boutade : pour repeupler et revigorer les centres de nos vieilles villes, il suffit den

    dmolir le tiers. 29

    la commune de saint-Josse-ten-noode et le ministre des travaux publics et de la Reconstruction planifient ainsi en 1961 la construction dun quartier du XXe sicle 30 le long de la petite ceinture, entre la place madou et la place Rogier. Il sagit dun projet dune vaste zone groupant une dizaine de buildings, complexes plusieurs tages, immeubles-tours et gratte-ciel mlant de nombreux logements, des centres commerciaux, des bureaux et des parkings souterrains, le tout dans un environnement vert. ainsi, le Jardin botanique constituera

    le centre de cette nouvelle zone rsidentielle situe en bordure dune longue

    chane verte partant de lglise de la Chapelle via la bibliothque Albertine et la cit

    administrative, jusqu la place St-Lazare, prs de la gare du Nord 31.

    lchevin des travaux publics et de lurbanisme de la commune dixelles prne galement en 1972 la rnovation acclre de la valle du Maelbeek 32, travers llargissement de laxe de circulation de ce thalweg, la pose dun nouveau collecteur, une politique de logements sociaux et un rquipement de la zone. Llargissement est jug ncessaire au point de vue circulatoire, mais galement au point de vue du paysage urbain obtenir aprs remodlement 33, un paysage dcrit plus loin comme des constructions isoles sur des terrasses chelonnes sur les versants de la valle largement reverduriss 34.

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    29

    24 J. Declerck, Construire Bruxelles, Architecture et Transformations Urbaines En Europe. Guide de Lexposition, Palais Des Beaux-Arts, 9 Oct. - 28 Nov. 2010 (Bruxelles: Palais des Beaux-Arts, 2010), p. 48. 25 H. Hondermarcq, Les Autoroutes et Le Dveloppement Urbain. Le Rseau Prvu Pour Lagglomration Bruxelloise, Annales Des Travaux Publics de Belgique, 2 (1964), p. 110. 26 Berckmans and Bernard, p. 102. 27 Hondermarcq, Les Autoroutes et Le Dveloppement Urbain. Le Rseau Prvu Pour Lagglomration Bruxelloise, p. 110. 28 Ibid, p. 116. 29 E. Scaillon, La Rnovation Urbaine et Lunit de Voisinage, Rythme, 1963, 1012 (p. 11). 30 Le Quartier Du XXe Sicle. De La Place Madou La Place Rogier, Zone Verte Avec Des Immeubles-Tours, La Lanterne, 17 February 1961, p. 3. 31 Ibidem. 32 Demuyter, Communication de Mr lEchevin Des Travaux Publics et de lUrbanisme, Relative Aux Problmes de Rnovation de La Valle Du Maelbeek (presented at the Conseil communal, Ixelles, 1972), p. 3. 33 Ibid, p. 2. 34 Ibid, p. 9.

  • 30

    Partie I

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    31

    CHAPItRe 2 mISe LtUDe De Cette RNoVAtIoN

    non seulement, nous lavons vu, les autorits publiques ambitionnent de rnover la ville, mais cette volont de rnovation urbaine saccompagne aussi de sa mise ltude. Cest ainsi que senchane llaboration de nombreux plans particuliers damnagement, mais galement de lavant-projet de plan de secteur du groupe Alpha, du plan tekhn et, finalement, du premier projet de plan de secteur. Ces derniers masterplans, mme sils nont pas de valeur lgale, dfinissent ensemble les ambitions et, selon notre hypothse, guident la rnovation urbaine dans lagglomration bruxelloise.

    2.1 Historique des plans particuliers damnagement

    Les plans particuliers damnagement sont, lorigine, un des pouvoirs spciaux attribus aux Secrtaires gnraux par larrt-loi du 12 septembre 1940. maintenus par un arrt de Rgent le 2 dcembre 1946 en vue de la Reconstruction, il faut nanmoins attendre 1962 pour que la procdure complte dlaboration des plans particuliers damnagement soit finalement institue avec la Loi organique de lAmnagement du territoire. Celle-ci fixe, au sein du quatrime chapitre traitant des plans communaux, le contenu des plans particuliers damnagement et leur procdure dlaboration. Avant 1974, les diffrentes communes de Bruxelles font ainsi approuver plus dune centaine de plans particuliers damnagement. Les ppa dterminent

    1 la situation existante ; 2 laffectation dtaille des zones vises au 2 de larticle

    15 ; 3 le trac de toutes les modifications apporter au rseau existant des voies

    de communication ; 4 les prescriptions relatives limplantation, au volume et

    lesthtique des constructions et cltures, ainsi que celles relatives aux cours et

    jardins. 35

    Les diffrents plans particuliers damnagement antrieurs 1974 sont essentiellement de trois types. nous avons premirement les plans particuliers damnagement lis la sauvegarde des grands espaces verts de louest de bruxelles et la construction dun parksystme 36, deuximement, ceux attachs la construction de logements sociaux par ou pour les communes et ceux, troisimement, en relation avec la rnovation du rseau routier et la rnovation urbaine par lentremise du secteur priv.

  • 32

    Partie I

    cartes de la situation des plans particuliers damnagement

    1955 1960

    1974

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    33

    1965 1970

    larrt-loi de 1940, entirement repris dans celui de 1946, respecte le principe dautonomie communale pour les matires durbanisme et cantonne ltat dans son droit de tutelle. bien que contrle par la province, la commune choisit ainsi le planificateur, les arguments dadoption et les tapes dexcution des plans damnagement 37. nanmoins, larticle 11 laisse la possibilit au roi, exceptionnellement, de dcrter quune portion dtermine du territoire national doit, pour son amnagement, tre considre dans son ensemble et faire, en consquence, lobjet dun plan rgional pourvu de la force excutoire 38. ltat ambitionne en effet dintervenir dans la planification urbaine travers des plans de secteur, car l urbanisme lchelon communal, morcel, ne constituait pourtant pas pour ltat un instrument appropri dintervention 39, mais lopinion publique est alors oppose lide mme dune nouvelle rationalisation du territoire 40. Cest pourquoi aucune planification urbaine ne sera rendue publique mme si, ds 1948, ladministration de lurbanisme du ministre des travaux publics commande des bureaux dtudes privs des enqutes rgionales autour de Bruxelles, Courtrai et Lige, reprenant la technique des surveys rgionaux. Ceux-ci ont t dvelopps par Victor Bourgeois et le groupe lquerre dans le cadre des Congrs Internationaux dArchitecture moderne. Pralables la planification qui participent dune standardisation du processus dinvestigation empirique du territoire particulier la tradition urbanistique belge davant-guerre qui cherchait orienter le dveloppement de lagglomration en fonction de la gographie du milieu 41, ces enqutes dterminent, dune part, les limites dattraction de ces villes et tablissent, dautre part, un inventaire des problmes rsoudre 42. il faut attendre 1957 pour quun projet de loi donnant un statut lgal aux planifications rgionales de ltat soit mis ltude. La loi organique de lAmnagement du territoire, finalement vote en 1962, institue cette comptence.

  • 34

    Partie I

    2.2 Historique des plans du groupe Alpha

    Bruxelles, lenqute rgionale est ralise par le groupe Alpha. Le premier avant-projet du plan de secteur, ralis par le groupe Alpha entre 1948 et 1957, ne sera jamais publi parce que trop radical 43. il propose darrter ltalement urbain par ltablissement dune ceinture verte et le renforcement de treize centres satellites 44, dans la continuit des recherches du groupe effectues pendant la guerre 45. le premier projet de plan de secteur, ralis entre 1962 et 1965, reprend le modle du plan des autoroutes belges (1954) du Directeur gnral de lAdministration des Routes Hondermarcq planifiant la cration dun rseau routier radioconcentrique centr sur bruxelles 46. la publication de son rsum 47, introuvable aujourdhui, dvoile selon aron les besoins alarmants et croissants en ce qui concerne la construction de btiments tertiaires et dun rseau tendu de routes. Si ladaptation de la capitale au trafic moderne semble alors invitable dans un contexte de promotion de la voiture prive et de la vie en priphrie, ltude survalue nanmoins les besoins en prolongeant les tendances observes depuis 1947 sans prendre en compte aucun lment contradictoire 48. dans leur note de synthse, le Groupe Alpha prconise galement de mieux exploiter la morphologie du site de lagglomration et propose ainsi de structurer la ville par lamnagement des valles du maelbeek et de la Woluwe en coules vertes combinant une infrastructure routire et une infrastructure de gestion des eaux pluviales 49.

    2.3 historique du plan tekhn

    une autre chelle, la responsabilit est donne en 1955 au groupe tekhn, compos danciens architectes et urbanistes de loffice des Cits Africaines 50, dlaborer un plan directeur pour le pentagone qui sinscrive parfaitement dans le projet du Carrefour de loccident . Dfinissant la rpartition des affectations et la densit doccupation du sol, le plan de 1962 est utilis par la suite comme base par lAdministration de la Ville de Bruxelles, et ce, malgr le fait quil nait aucune valeur lgale.

    Concept global susceptible dtre ralis progressivement 51, le plan tekhn a pour ambition dassurer le dveloppement de la fonction tertiaire sans pour autant ngliger la fonction rsidentielle 52. limmeuble-tour devient avec celui-ci un acteur assum de la transformation fondamentale de la ville en une mtropole internationale 53. inspir du modle fonctionnaliste des annes 1930, le plan

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    35

    gauche: synthse du

    plan de secteur Alpha

    (Bruxelles, 1955) in

    Gustave Abeels, Pierres et

    rues: Bruxelles, croissance

    urbaine 1780-1980 :

    18/11/82-21/1/83 (Socit

    gnrale des banques,

    1982), 323.

    droite: Groupe Alpha,

    rseau autoroutier en 1958

    (Bruxelles, 1958).

    bas: Gouvernement belge,

    plan de lagglomration

    avec les units de

    voisinages et les villes

    satellite propos par le

    Groupe Alpha (Bruxelles,

    1958).

    A. zone monumentale; B.

    zone commerciale; C. zone

    administrative; D1. zone de

    etit commerce; D2. zone

    dindustrie non polluante;

    E. unit dhabitation; F1.

    trs faible densit; F2. faible

    densit; F3. ville satellite;

    G. hinterland; H. autres

    affectations

  • 36

    Partie I

    haut: Circulation et parking,

    plan Tekhn, 1962.

    gauche: Rapport plancher-

    sol, plan Tekhn, 1962.

    jaune

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    37

    directeur prconise ainsi la cration dun nouveau paysage urbain par la totale, mais progressive reconstruction de la ville avec des tours stromtriques zones verticalement 54. la construction dimmeubles-tours permet de librer le sol et de crer de larges jardins publics, tout en dgageant des vues sur la Grand-Place 55. Le plan rorganise galement le pentagone pour une meilleure gestion du trafic en projetant un mini-ring passant trente mtres au nord et cent cinquante mtres au sud de la Grand-Place et en laccompagnant de la construction de nombreux parkings. Ces parkings sont alors supposs stimuler les activits commerciales sur les boulevards centraux 56. Le plan tekhn prvoit galement quatre changeurs articulant le mini-ring avec les boulevards centraux et de la jonction : entre le mont-de-arts et le quartier de la rue de lhpital, en contrebas de la cathdrale Saint-michel, la place de Brouckre et, enfin, dans le quartier de la Chaufferette, entre le boulevard anspach et la rue du midi.

  • 38

    Partie I

    35 Loi Organique Pour lAmnagement Du Territoire et de lUrbanisme, 1962, p. chap.4, art. 20. 36 Pour plus dinformations, voir Graldine Lacasse, Spatialit de lOuest de Bruxelles: Une Expression Emblmatique de La Ville Contemporaine: Description et Enjeux de Lespace Ouvert (unpublished mmoire sous la direction de G. Leloutre, Universit Libre de Bruxelles, 2010). 37 Zitouni, p. 259. 38 Arrt-Loi Du 12 Septembre, 1940, p. 19 cit par ; Zitouni, p. 259. 39 Aron, Le Tournant de LUrbanisme Bruxellois 1958-1978, p. 38. 40 Zitouni, p. 260. 41 Geoffrey Grulois, La Construction pistmologique de Lurbanisme En Belgique, Belgeo [en Ligne], 1-2 (2011), p. 8. 42 Aron, Le Tournant de LUrbanisme Bruxellois 1958-1978, p. 36. 43 De Beule, p. 3. 44 Aron, Le Tournant de LUrbanisme Bruxellois 1958-1978, pp. 3638. 45 voir Groupe Alpha, Un Centre Satellite, Art et Technique (Bruxelles, 1944). 46 Voir section 3.3. 47 Groupe Alpha, Rapports Sur Lamnagement de La Rgion Bruxelloise (Bruxelles, 1965), introuvable. 48 Aron, Le Tournant de LUrbanisme Bruxellois 1958-1978, pp. 6061. 49 Ministre des Travaux Publics, Commission Nationale pour lAmnagement du Territoire, Etudes Rgionales. Note de Synthse Des Rapports Du Groupe Alpha Sur Les Propositions Damnagement et de Dveloppement de La Rgion Bruxelloise, 6 April 1966, 4867-69, Document nRI/a-3. 50 Anne Van Loo, Dictionnaire de Larchitecture En Belgique de 1830 Nos Jours, Fonds Mercator, 2003. 51 Administration du patrimoine culturel, Le Patrimoine monumental de la Belgique (Editions Mardaga, 1971), p. 35. 52 R. Vandevelde, La Petite Ceinture: Gnalogie Dune Figure (unpublished mmoire sous la direction de G. Leloutre, ISACF La Cambre, 2011), p. 63; Leloutre, Bruxelles Haute Voltige: Regard Sur Le Dbat Des Tours Bruxelles, p. 3. 53 Leloutre and Provost, p. 135. 54 Leloutre, Bruxelles Haute Voltige: Regard Sur Le Dbat Des Tours Bruxelles, p. 3. 55 Berckmans and Bernard, p. 102. 56 Sven Sterken, Le Parking 58 Bruxelles, Rnovation Urbaine Dans Le Rtroviseur, Brux-elles Patrimoines, 2014, 10415.

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    39

  • 40

    Partie I

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    41

    chapitrE 3 instrumEnts dE la rnoVation urbainE

    les autorits politiques ambitionnent et tudient srieusement la rnovation de la capitale. Cependant, de manire gnrale dans lagglomration de Bruxelles, comme cest le cas pour la construction du quartier du xxe sicle , ni les pouvoirs publics, ni les petits propritaires nont les possibilits financires pour suivre cette vague de constructions nouvelles 57. les pouvoirs publics ont en ralit la possibilit de sappuyer sur le secteur priv et sur diffrents subsides de ltat pour transformer le paysage de la ville. en ce qui concerne les financements de ltat, il existe ainsi, dune part, un financement dans le cadre de la lutte contre les taudis et, dautre part, dans le cadre du dveloppement du rseau routier belge, celui du Fonds des Routes et les subsides du Plan Vert.

    3.1 la loi de 1962 et le secteur priv

    bien entendu, tout ceci ne se fera pas immdiatement, mais la contribution du

    secteur priv permettra de raliser des merveilles. 58

    La Loi organique de lAmnagement du territoire et de lUrbanisme de 1962, qui distribue les comptences urbanistiques aux autorits tatiques et communales, encadre la fabrication et la rnovation de la ville et donne, dans ce cadre, un rle indit au secteur priv. pour limiter les dpenses publiques, elle facilite en effet de manire unique en Europe la promotion immobilire en ce quelle dplace, par son article 25, le droit dexproprier des autorits publiques aux socits prives 59. Le propritaire de la moiti dun territoire dfini devient alors responsable de son amnagement et dtient lautorit ncessaire pour exproprier les autres propritaires. cette loi permet ainsi le remembrement du petit parcellaire bruxellois par le secteur priv lui-mme; un remembrement qui savre ncessaire limplantation de grands ensembles et dimmeubles de grande hauteur 60 prvus dans le cadre de la rnovation urbaine.

  • 42

    Partie I

    le recours au secteur priv pour limiter les dpenses publiques est, selon puttemans, la consquence du scepticisme des pouvoirs publics lgard du rle mme quils ont remplir 61. En effet, la loi de 1962 constitue, toujours selon puttemans, une arme double tranchant en ce quelle favorise la spculation par son article 25, dune part, et que, dautre part, elle

    donne tout pouvoir aux administrations communales et provinciales pour organiser

    les amnagements ncessaires de leurs territoires,

    mais tout en

    empchant les communes, en quelque sorte, de raliser toutes oprations

    durbanisme denvergure, moins, bien entendu, quelles ne disposent dune rgie

    foncire ou, tout le moins, de grands moyens financiers. 62

    la dcentralisation des questions urbanistiques au niveau communal, conserve par la loi de 1962, est mme discute lpoque. blondel, par exemple, dfend que cette dcentralisation, hrite de ltat libral datant de la cration de la Belgique, ne soit pas en adquation, dans le contexte de ltat-providence, avec les besoins contemporains dun urbanisme fort pour limiter et encadrer la spculation foncire 63.

    3.2 la politique de rnovation et de lutte contre les taudis et la politique de logements sociaux

    dans le cadre de cette rnovation urbaine, prexistaient dj la loi de 1962 certains instruments finanant la lutte contre les taudis et les politiques de logements sociaux. Si la premire loi De taeye de 1948 avait pour but dencourager la petite proprit prive en priphrie dans la continuit de la politique catholique de lentre-deux-guerres, la seconde loi De taeye (1953) promeut, pour inverser lexode urbain, dans la continuit de la loi socialiste brunfaut de 1949, la construction par les communes de grands ensembles de logements sociaux et met en effet en place un financement pour la dmolition des taudis 64. cest ainsi que la Ville de bruxelles, par exemple, se dote dun service daction et de coordination pour la lutte contre les taudis et la rnovation urbaine . complmentairement, la socit Nationale du Logement, remplaant en 1956 la Socit Nationale des Habitations et Logements Bon march de 1919, finance alors de nombreux projets de logements sociaux. en ralit, la loi de 1953 propose des aides publiques pour la dmolition dimmeubles dclars insalubres, mais sans pour autant mettre dobligation en termes daffectation des terrains librs 65. ces subsides sont donc

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    43

    utiliss pour la rnovation urbaine impliquant aussi bien des logements que des bureaux; les deux tant souvent dans les annes 1960 du moins penss simultanment.

    3.3 Le dveloppement du rseau des autoroutes en Belgique et bruxelles

    un autre pilier des moyens publics pour la rnovation urbaine est constitu par lautonomisation du Service du trafic Routier et la constitution en 1955 dun Fonds des Routes finanant la modernisation du rseau viaire.

    en Belgique

    Le Service du trafic Routier, appartenant la Direction gnrale des Routes, a t cr en 1955 afin

    dassurer lchelon national ltude scientifique des caractristiques de la

    circulation et du rseau routier de ltat, ltablissement des normes damnagement

    de ce rseau, llaboration des plans dorganisation de la circulation, le contrle de

    lexploitation du rseau des routes de ltat, les tudes conomiques permettant

    une planification raisonne base sur des critres objectifs de rentabilit et de degr

    durgence. 66

    Avec la cration de ce service, cest en effet la nouvelle discipline scientifique amricaine du trafic engineering , datant des annes 1920, qui est importe en Belgique. Cette discipline vise donner des bases scientifiques llaboration des plans de modernisation des voies de circulation. Afin dtre reconnue comme modalit lgitime danalyse et de traitement du problme de la circulation 67, la discipline base sur des tudes de terrain rationalise les flux (comptages, tableaux, cartes, photographies) et technicise lamnagement de la voirie 68. les problmes de mobilit sont traits par le Service du trafic Routier comme tant uniquement techniques, la question centrale se rsumant, selon tellier, une notion de capacit, nouvelle grandeur urbaine qui va bouleverser lamnagement de la ville 69.

    Le Service du trafic Routier et de Bruxelles-Capitale dispose de trois budgets diffrents : le budget ordinaire pour lentretien du rseau, le budget extraordinaire - pour les dgts hivernaux par exemple - et, enfin, le Fonds des Routes pour la

  • 44

    Partie I

    modernisation du rseau. Ce dernier budget est lui-mme divis en un budget pour la construction dun rseau dautoroutes interurbaines et un budget, de lordre de 1 milliard par an en 1965, pour lamnagement des routes ordinaires dans lesquelles il faut compter les routes express, mais aussi les autoroutes urbaines 70. Le Fond des Routes constitue une source de financement qui permet ce service de dfinir les priorits et de planifier la modernisation du rseau en toute autonomie, sans tre soumis lannalit des budgets. Cet organisme parastatal finance aussi bien les travaux dexcution que les expropriations ncessaires ces travaux. il sagit du troisime Fonds des Routes dbloqu par ltat pour son rseau routier. En 1928 dabord, un Fonds spcial des Routes avec une dotation de 600 millions de francs est libr pour remettre en tat les routes principales endommages et non entretenues pendant la guerre 1914-1918. ensuite, en 1933, un Fond de 800 millions de francs permet de poursuivre les travaux entrepris avec le premier fond.

    Cest le Directeur gnral des Routes, Hondermarcq, qui aide ltablissement dun troisime fond et la rorganisation administrative de la gestion des voiries. Dans son expos prsent le 31 aot 1950 au VIe Congrs belge de la Route, celui-ci soutient que les travaux prvus et inachevs davant-guerre ne correspondent plus aux besoins contemporains tant donns les progrs de lindustrie automobile. Le mauvais tat des routes, qui fait ironiquement la notorit du Belgian Road test , est responsable, selon son service, de lencombrement chronique des voiries, mais galement de nombreux accidents de la route et de llvation anormale des frais dutilisation et dentretien des vhicules 71. il propose donc premirement llaboration dun plan gnral damnagement parce que :

    Lampleur et lurgence des travaux [] ne peuvent [] saccommoder de ralisations

    fragmentaires, htrognes et dissmines, telles quelles rsultent habituellement de

    llaboration des budgets annuels sous laction dinfluences multiples qui ne tiennent

    pas suffisamment compte de lintrt gnral. 72

    Par ailleurs, une rorganisation administrative est, selon lui, ncessaire dans la mesure o la rpartition des routes vicinales, provinciales et de ltat ne suit alors aucune logique et que la rpartition du rseau en voirie dtat et en voirie communale et le traitement des questions techniques concernant toutes les voiries par les mmes Grands Corps techniques de ltat permettraient de grandes conomies 73.

    en ce qui concerne le financement, Hondermarcq dfend que linfluence directe de la politique financire sur le dveloppement des routes 74 oblige, pour garantir la ralisation rapide et continue dun programme routier, sappuyer sur

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    45

    haut: courants axiaux,

    circulation journalire in

    H. Hondermarcq, La

    modernisation du rseau

    routier belge , Annales

    des Travaux Publics de

    Belgique, 6 (1950): 898.

    bas: Rseau autoroutier

    bruxellois in Ministre des

    Travaux Publics et de la

    Reconstruction, Bruxelles:

    Carrefour de lOccident

    (Bruxelles, 1956), 13.

  • 46

    Partie I

    haut: Bruxelles, trafic de

    pntration in Ministre des

    Travaux Publics et de la

    Reconstruction, Bruxelles:

    Carrefour de lOccident

    (Bruxelles, 1956), 4.

    milieu et bas: perspectives

    in Ministre des

    Travaux Publics et de la

    Reconstruction, Bruxelles:

    Carrefour de lOccident

    (Bruxelles, 1956), 21, 25.

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    47

    des ressources suffisantes dans les dlais prvus et sur une continuit dans la disposition de ces crdits. Il propose donc la composition dun Fond spcial et temporaire des Routes, chappant lannalit des Budgets, dun montant de 3,7 milliards par an, sous la forme dune administration ayant une personnalit juridique distincte de ltat et place sous lautorit du Ministre des Travaux Publics 75.

    Lorganisme parastatal Fonds des routes est finalement cr en 1955 en vue de faciliter le financement des travaux de construction et damnagement des autoroutes et des routes de ltat. Il dispose dun budget nettement suprieur ce qui tait demand en 1950. Ainsi, le budget comprenant les expropriations est de 81 en 1965, 238 en 1966 et 332,5 milliards de francs belges en 1967 76.

    Bruxelles

    Le Service du Trafic Routier met en place en 1956 une rorganisation complte de la circulation dans lagglomration bruxelloise sur des bases modernes en vue de lExposition universelle de 1958 77; rorganisation qui est base sur ltude des donnes collectes sur le rseau existant. Lexposition de 1958 agit alors comme un catalyseur pour la transformation et lamlioration du rseau routier 78. En organisant la premire exposition universelle daprs-guerre, Bruxelles veut en effet montrer au monde une capitale moderne pourvue de toutes les infrastructures daccs et de communication. Prsentant les travaux dinfrastructure raliss en prparation de lExpo 58 et prcisant que :

    les travaux de Bruxelles, bien loin de constituer un point daboutissement, ne sont,

    au contraire, que la premire tape dun vaste programme stalant sur quinze ans et

    destin faire du rseau routier belge lun des premiers dEurope 79,

    le ministre Vanaudenhove certifie ainsi que Bruxelles :

    grce la modernisation de ses grandes artres pourra jouer de manire pleinement

    efficace son rle de premier centre politique, administratif et conomique du pays

    et

    carrefour de grandes voiries traditionnelles de lOccident, pourra, en toute lgitimit,

    revendiquer une place de choix dans lEurope Unie de demain. 80

  • 48

    Partie I

    La justification de lexcution de ces grands travaux ne fait en effet pas seulement appel laugmentation considrable du nombre de vhicules en Belgique et Bruxelles et linadaptation manifeste du rseau bruxellois cette intensit de circulation, mais aussi limportance nationale et internationale de lagglomration bruxelloise. Derrire chaque recommandation plane galement le risque de voir le centre-ville perdre en attractivit, linstar de certaines villes amricaines. En effet,

    Les prjudices rsultant de cette situation [de saturation du rseau] peuvent devenir

    considrables pour toutes les activits des centres des grandes agglomrations,

    qui perdent progressivement leur caractre attractif faute de pouvoir tre atteints

    aisment. Cest le processus connu de certaines villes amricaines o les pertes

    commerciales et les pertes en rentres fiscales dpassent parfois 40%. 81

    Entre la solution extrme du rgne des transports en commun , qui va lencontre des tendances individualistes et du dveloppement conomique normale dune grande agglomration , et celle des autoroutes urbaines jusquaux centres daffaires qui demanderait des investissements colossaux pour les expropriations et entranerait des problmes de stationnement larrive, le ministre des Travaux Publics et de la Reconstruction opte, en 1956, dune part, pour la modernisation et le dveloppement du rseau existant Bruxelles afin den faire un rseau maill, trs dense et systmatiquement modernis ainsi que, dautre part, pour lamnagement de parkings de courtes et de longues dures sur tout le territoire bruxellois 82. Lide est, dans le choix des artres incorporer dans le rseau, dviter des destructions trop importantes 83, souvent onreuses. En 1951 dj, Hondermarcq, directeur gnral des routes lpoque, rfute la prolongation directe des grandes artres au travers des villes 84 parce que cette solution, adopte dans les villes amricaines filiformes qui drainent jusqu 80.000 vhicules par jour, ne convient pas la structure radioconcentrique de Bruxelles. Cest pourquoi lAdministration des Routes adopte alors la solution dune ceinture autoroutire de 7,5 km de rayon permettant non seulement daccommoder la circulation de transit, mais galement dabsorber, par sa proximit, une partie de la circulation de pntration et de la circulation interne . Le ring doit constituer une artre rserve exclusivement la circulation et non pas un boulevard ordinaire permettant la btisse riveraine 86, mais est propos conjointement lachvement de la seconde ceinture qui doit, elle, conserver un statut de boulevard urbain.

    Pourtant, les tudes prliminaires relatives la circulation et son dveloppement Bruxelles, effectues ds 1952 en se basant sur le projet de ring des autoroutes et des voies de pntration nouvelles propos par lAdministration des Routes comme ossature toute solution densemble 87, prsentent le projet de

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    49

    haut: Le viaduc au-dessus du canal qui permet laccessibilit

    lexposition de 1958 et, en fond de perspective, la tour de la

    Prvoyance Sociale. Travaux publics, Boulevard Baudouin, 1958.

    Bruciel.

    bas: Lautoroute de Namur pntre dans la ville. Elle doit

    ensuite rejoindre le centre-ville en se superposant la voie

    ferre. Travaux publics, Avenue de Beaulieu, 1975. Bruciel.

  • 50

    Partie I

    Ministre des Travaux publics, Service des Routes de Bruxelles-

    Capitale, Rseau des Routes Grande Circulation, 1971.

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    51

    ring comme un projet raliser par tape, les amnagements lintrieur du ring projet ayant la priorit. Ces tudes, suivies dans leurs propositions pour le plan de 1956 et compltes alors par des comptages effectus en 1954 et 1955, proposent, comme dit plus haut, un rseau maill de voies radiales et concentriques 88. Les tudes visent en effet mettre en vidence et quantifier la caractristique essentielle de Bruxelles concernant la circulation, cest--dire son organisation radiale et concentrique. La circulation radiale est explique par la position gographiquement centrale de Bruxelles, la densit de population en Belgique et la centralisation administrative et commerciale au sein de la ville et, enfin, la position de Bruxelles comme Carrefour de lOccident, cest--dire au croisement de diffrentes routes de trafic international. La circulation concentrique permet, quant elle, dune part, la liaison des quartiers priphriques et, dautre part, laccs depuis le centre-ville aux diffrentes radiales 89. Le programme est prsent comme suit :

    Les voies de pntration ncessaires seront ralises en amnageant les artres existantes et en crant des artres nouvelles qui ddoubleront les chausses

    traditionnelles insuffisantes ou desserviront des zones o la btisse est en voie

    datteindre une densit importante.

    Quant aux artres concentriques du rseau, elles comprendront :

    a) le Grand Ring, caractre dautoroute ;

    b) les boulevards de grande ceinture complts et amnags de manire raliser la

    sparation du trafic local et du trafic de transit ;

    c) les boulevards de Petite Ceinture dont le rle de drainage et de rpartition des

    trafics est particulirement important. 90

    Le Service du Trafic Routier, dchargeant la Direction des Routes du brabant dj surcharge, soccupe notamment de ltude et de lexcution des travaux damnagement entre 1956 et 1958 de lavenue Louise et des boulevards de la petite ceinture de Bruxelles, largissant ainsi le cadre de sa mission gnrale dtude. Vu le succs et la tenue dans les dlais impartis des oprations prcdentes, ce Service continue ensuite tre charg de ltude et lexcution dautres ouvrages dart importants Bruxelles. Cest en 1964 que ce partage de fait entre la Province du Brabant et ltat cesse et que les missions du Service du Trafic Routier sont officiellement tendues par larrt ministriel du 1er juillet la gestion des routes de ltat dans larrondissement de Bruxelles-Capitale. Ce service devient ainsi double : celui du Trafic Routier et de Bruxelles-Capitale .

  • 52

    Partie I

    Ses missions stendent aussi la modernisation de ce rseau dont, par ailleurs, la longueur varie chaque anne, compte tenu des oprations dchange de voirie avec les communes du ressort 91. Lambition est de progressivement ne garder dans le rseau des routes de ltat que les itinraires principaux appels tre transforms en autoroutes urbaines et routes express 92, prolongeant ainsi la rationalisation nationale plaide par Hondermarcq en 1950.

    En 1964, le nouveau projet damnagement routier de Bruxelles renforce et prolonge le plan de 1950. Il vise amliorer le maillage du rseau pour favoriser une meilleure rpartition de toutes les activits sur le territoire de la Capitale 93. Il propose entre autres une nouvelle hirarchisation des voiries en autoroutes interurbaines, en autoroutes urbaines (y compris la petite et la grande ceintures) et, enfin, en routes express. Ces dernires permettent d assurer des liaisons convenables dans toutes les directions et notamment entre les communes priphriques , mais sont insuffisamment larges pour tre transformes en autoroutes urbaines 94. Outre le prolongement des autoroutes interurbaines le plus loin possible vers le centre, le plan reprend galement le projet de ring intrieur autour de la Grand-Place dfini dans le Plan Tekhn de 1962.

    3.4 Le Plan Vert

    LAdministration des Travaux Publics et de la Reconstruction met galement en place en 1958 un programme de verdurisation des villes et des campagnes concomitant aux travaux damnagement des voiries et des cours deau. Le Plan Vert prvoit des financements pour lamnagement des voiries de ltat, routes ordinaires et autoroutes, mais galement une aide pour les communes dsireuses dappliquer les principes mis. Nanmoins, tout nouvel amnagement de voirie se doit de respecter ces derniers sous peine de ne pas tre ligible pour les autres financements de lAdministration des Travaux Publics et de la Reconstruction. Le nouveau Service du Plan Vert propose galement son aide pour laborer les projets paysagers de verdurisation. Il sagit, en effet, davantage dune question de paysage et de rythme que de verdure puisque lobjectif principal de ces diffrentes recommandations est de rompre la monotonie du paysage 95 le long des routes, en mettant en valeur les lments caractre pittoresque, en cartant sensiblement les deux voies de circulation pour y insrer des lots importants de verdure 96 et en crant pour lautomobiliste une srie de dcors transversaux de distance en distance 97.

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

    53

    Le programme met galement des recommandations quant au trac des voiries, aussi bien ordinaires quautoroutires, qui doivent respecter le paysage. Ainsi, en ville, se pliant aux exigences du milieu quelle aborde, elle [la voirie] sintgrera au paysage urbain 98 et dans les campagnes, on recherchera donc des tracs en courbes ; pour celles-ci, le paysage se modifie constamment, car le regard balaie la rgion traverse 99. Le plan propose de respecter et mme de jouer avec la topographie. Ainsi, lorsque le terrain prsentera une dclivit transversale, deux voies de circulation seront tablies des niveaux diffrents 100 pour rendre la valle visible par les deux sens de circulation.

    Le souci de verdurisation, inhrent au desserrement du centre-ville, est dj prsent en 1956 dans le plan pour lagglomration de Bruxelles 101. Si le long de la petite ceinture, le nouvel amnagement demande de rduire les platanes deux alles, il sagit bien de maintenir les plantations les plus abondantes possible lintrieur des villes et le fait de les disposer ainsi permettra ces arbres dacqurir un dveloppement inattendu et de prsenter une couronne spcialement toffe 102. De plus, les pouvoirs publics travaillent la cration de nouvelles touffes arbores dans la capitale et, selon le plan, des dcisions importantes interviendront, qui permettront de multiplier, partout o ce sera possible, llment capital dont on a pu craindre le rtrcissement : lespace vert 103.

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    Partie I

    57 Le Quartier Du XXe Sicle. De La Place Madou La Place Rogier, Zone Verte Avec Des Immeubles-Tours. 58 Ibidem. 59 Culot, Bruxelles Architectures de 1950 Aujourdhui, p. 57. 60 Laconte, p. 2. 61 Pierre Puttemans, Urbanisme et Politique Foncire, Rythme, 37 (1963), 78. 62 Ibidem. 63 Jean-Pierre Blondel, Hambourg Ou Lurbanisme Selon Son chelle, Habiter, mars 1963. 64 De Kooning and Strauven, p. 3. 65 Ibidem. 66 Administration des Routes, Service du Trafic Routier et de Bruxelles-Capitale, Lamnagement du rseau des routes de lEtat de Bruxelles-Capitale entre 1965 et 1971 (Bruxelles: Ministre des Travaux Publics, March 1967), p. 1. 67 Pierre Lannoy, Lautomobile Comme Objet de Recherche, Chicago, 1915-1940, Revue Franaise de Sociologie, 44, 3 (2003), p. 502. 68 Tellier, pp. 9294. 69 Ibid, p. 96. 70 Administration des Routes, Service du Trafic Routier et de Bruxelles-Capitale, p. 33.Dans ce rapport, il est explicitement fait tat dune critique par rapport linclusion des autor-outes urbaines dans le budget des routes ordinaires. Largument selon lequel les autoroutes urbaines sont trs similaires dans leur construction aux autoroutes interurbaine permet aux fonctionnaires du Service du Trafic Routier de plaider en 1967 pour le financement des au-toroutes urbaines avec le budget dvolu aux autoroutes interurbaines, ce qui permettrait une augmentation du budget qui leur est dvolu. 71 H. Hondermarcq, La Modernisation Du Rseau Routier Belge, Annales Des Travaux Publics de Belgique, 6 (1950), p. 894. 72 Ibid, p. 905. 73 Ibid, pp. 906907. 74 Ibid, p. 914. 75 Ibid, p. 915. 76 Administration des Routes, Service du Trafic Routier et de Bruxelles-Capitale, p. 33. 77 Ibid, p. 3. 78 Vandevelde, p. 65. 79 Ministre des Travaux Publics et de la Reconstruction, Bruxelles: Carrefour de lOccident, avantpropos. 80 Ibid, p. 95. 81 Hondermarcq, Les Autoroutes et Le Dveloppement Urbain. Le Rseau Prvu Pour Lagglomration Bruxelloise, p. 103. 82 Ministre des Travaux Publics et de la Reconstruction, Bruxelles: Carrefour de lOccident, pp. 8-10. 83 Lefvre, p. 47. 84 H. Hondermarcq, Le Projet de Ceinture de Circulation de Lagglomration Bruxelloise, Annales Des Travaux Publics de Belgique, 3 (1951), 36792 (p. 372). 85 Ibid, p. 374. 86 Ibid, p. 375. 87 Lefvre, p. 45. 88 Ibid, pp. 4647. 89 Ibidem. 90 Ibid, p. 47. 91 Administration des Routes, Service du Trafic Routier et de Bruxelles-Capitale, p. 7.

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    92 Ibid, p. 27. 93 Administration des Routes, Service du Trafic Routier de Bruxelles-Capitale, Avant-Projet Du Rseau Des Routes Grande Circulation de Bruxelles-Capitale (Bruxelles, 1964), p. 24. 94 Ibid, p. 28. 95 Ministre des Travaux Publics et de la Reconstruction, Le Plan Vert (Bruxelles, 1958), p. 7. 96 Ibid, p. 17. 97 Ibid, p. 21. 98 Ibid, p. 49. 99 Ibid, p. 16. 100 Ibid, p. 17. 101 Ministre des Travaux Publics et de la Reconstruction, Bruxelles: Carrefour de lOccident. 102 Ibid, p. 78. 103 Ibid, p. 79.

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    Partie I

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    RSUm DE LA PREmIRE PARTIE

    Nous avons vu dans cette premire partie que les diffrentes autorits publiques comptentes Bruxelles partagent une volont de rnovation urbaine profonde pour, dune part, se positionner dans le contexte international comme Carrefour de lOccident et ple tertiaire important et, dautre part, pour endiguer le processus dexode urbain observable depuis le dbut du sicle. Ces deux ambitions se conjuguent autour du rfrentiel dattractivit de lagglomration qui demande, en imitant les qualits reconnues la priphrie, dune part, une accessibilit accrue de lagglomration - dans un contexte de motorisation croissante, principalement par les vhicules automobiles - et, dautre part, une verdurisation du cadre urbain qui passe galement par la construction en ordre ouvert de btiments de grande hauteur. Nous avons ensuite pos comme hypothse que les instruments de cette rnovation urbaine, dans un contexte o les autorits communales comptentes ne disposent pas des moyens financiers requis, sont le recours et lencouragement des initiatives du secteur priv (notamment par le droit dexpropriation qui lui est donn), le financement dans le cadre de la lutte contre les taudis pour lexpropriation et la dmolition des btiments vtustes, le financement du Fond des Routes pour la modernisation du rseau routier et les expropriations ncessaires laugmentation de lassiette et, dans une moindre mesure, le financement du Plan Vert pour la cration dun cadre plus verdoyant. La deuxime partie de ce mmoire sera loccasion de vrifier cette hypothse en tudiant quatre figures urbaines Bruxelles : la petite ceinture, lavenue Louise, la route express du maelbeek et le rseau en toile du ring intrieur du pentagone.

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    Partie II

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    PARTIE IITUDE DE CAS

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    SPCIFICITS DES CAS DTUDES

    Lobjet de cette deuxime partie sera dtudier llaboration de diffrents projets de rnovation urbaine. Nous commencerons, dans un premier temps, par les projets de rnovation urbaine de la petite ceinture, figure urbaine caractrise par un dedans et un dehors, mais dont le caractre de boucle est discutable 104. En effet, elle ne ceinture pas le centre-ville en ce quelle ne dtermine pas la limite des pntrantes urbaines et est marque par une forte diffrenciation Est-Ouest. Ses diffrentes sections gardent, par ailleurs, une identit propre ; identit qui se rpercute dans les diffrents amnagements prvus le long de son parcours 105 dont les projets du Quartier des Radis, de la Porte de Namur et du Quartier du XXe sicle plus particulirement tudis. Lamnagement du quartier des Radis propose des logements sociaux dans un environnement vert tandis que lamnagement de la Porte de Namur se concentre sur ltablissement dun ple culturel et commercial. Lamnagement du Quartier du XXe sicle situ entre la place Rogier et la place madou, enfin, tente de combattre lexode urbain par une politique de logements ultramodernes dans la verdure. Nous discuterons dans un deuxime temps du projet de lavenue Louise, figure radiale du plan des autoroutes qui nest donc pas marque par une intriorit et une externalit, mais pour laquelle lobjet est de rduire la spculation immobilire et la pression tertiaire le long de son trac. Dans un troisime temps, nous nous pencherons sur les projets de rnovation urbaine de la valle du maelbeek sappuyant sur les besoins infrastructurels partags par diffrentes communes dune rocade de ddoublement accompagnant le placement dun nouveau collecteur dans ce bassin hydrographique. Enfin, dans un quatrime temps, nous tudierons certaines interventions, isoles au sein du pentagone, mais lies au projet infrastructurel du mini ring et des implantations de parking prvu par le plan Tekhn et par lAdministration des Routes.

    104 Vandevelde. 105 Leloutre and Vanhaelen.

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    Partie II

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    CHAPITRE 1 LA PETITE CEINTURE

    1.1 Une ceinture ? Un modle hybride

    La transformation de la plus petite des ceintures de Bruxelles en autoroute urbaine pour assurer la rpartition du trafic automobile vers les diffrentes voies radiales du rseau de lagglomration est planifie ds 1952 par lAdministration des Routes comme premire tape de la modernisation du rseau dautoroutes nationales et internationales 106. Cette transformation, ralise trs rapidement en vue de lexposition universelle de 1958, a cependant pour ambitions immdiates damliorer laccessibilit du site dexposition depuis la priphrie est de Bruxelles. Contrairement la figure thorique de la ceinture dfendue dans les diffrents plans des autoroutes, en pratique, il sagit dun croissant qui est ralis par la continuit du boulevard Lopold II, de la petite ceinture et de lavenue Louise. Les projets de rnovation urbaine se concentrent alors, suivant la figure de ce croissant, dans la partie orientale du boulevard et maintiennent la forte diffrenciation sociale entre la partie est, historiquement riche, et la partie ouest, populaire, de lagglomration 107. Le fait que la rnovation de la partie ouest de la ceinture nest que trs peu projete sexplique aussi en raison du projet, abandonn plus tard, dlargissement du canal qui complique les initiatives prives ces endroits 108.

    Saint-Josse-ten-Noode est la premire commune dvelopper une vision globale pour limplantation le long de la petite ceinture de btiments de grande hauteur travers la construction dun quartier du XXe sicle autour du Jardin Botanique 109. Les autres communes lui embotent le pas et mnent rapidement un politique de rnovation urbaine. Limplantation de btiments modernistes de grande hauteur le long de la partie est de la petite ceinture se clture en 1983 avec lachvement de la tour des Finances de la Cit administrative. De nos jours, le paysage de la Petite Ceinture semble complet 110. Cependant, la rnovation urbaine le long de la petite ceinture ne rpond pas une logique unique. Elle se constitue de diffrents amnagements mis en place travers diffrents plans particuliers damnagement raliss par diffrentes communes - la Ville de Bruxelles, Saint-Gilles, Ixelles, Etterbeek, Saint-Josse-ten-Noode et Schaerbeek

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    Partie II

    haut: Contredisant la figure de boucle de la petite ceinture, son amnagement se concentre sur la partie ouest des boulevard. Fig. 46, Etude de rentabilit de lamnagement des boulevards de la petite ceinture Bruxelles, sectionnement pour ltude in Paul Lefvre, LAmnagement Routier de Bruxelles , 64.

    bas: Les diffrentes sections de la petite ceinture gardent leurs identits malgr luniformisation de la voirie. Perspective originale in Gry Leloutre et Yannick Vanhaelen, Le Diable sur les boulevards. Permanence dune figure mtropolitaine polymorphe: vers une dfinition de la petite ceinture bruxelloise.

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

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    - et qui rpondent aux spcificits de chaque section de la petite ceinture. En effet, malgr lhomognisation de linfrastructure qui confirme dans limaginaire collectif la figure de boucle, les projets conservent les diffrentes structurations spatiales et identits des sections de boulevard du XIXe sicle. Selon Leloutre et Vanhaelen, les diffrents projets de rnovation urbaine respectent une diversit despaces, datmosphres, mais aussi dusages le long de la petite ceinture 111. Ainsi, la porte de Halle, que le projet routier prvoit de garder en tronon neutre , conserve sa fonction de parc destination du quartier, dviant le trafic automobile par la place Poelaert. Tandis que la porte de Namur et le boulevard de Waterloo conservent leur fonction commerciale et culturelle et que lamnagement autour de la place Qutelet prvoit une articulation par un jeu de gabarit entre lchelle mtropolitaine de la petite ceinture et lchelle du quartier rsidentiel 112.

    Les projets de rnovation urbaine sont donc sensiblement diffrents. Leloutre et Vanhaelen proposent nanmoins de catgoriser lusage de la grande hauteur selon trois diffrentes logiques : conomique, iconique et paysagre 113. Premirement, les btiments de grande hauteur sont utiliss stratgiquement pour financer et pour rendre possible par une emprise au sol moindre, lamnagement de carrefours et douvrages dart importants du plan des routes. La tour madou compense ainsi le cot des expropriations ncessaires pour lamnagement de la rue Scailquin ; le Centre International Rogier et la tour du midi, tout comme le centre monnaie et la tour Philips dans le pentagone, permettent llargissement de la voirie - et llargissement de la place Rogier dans le premier cas -, aussi en prvision du mtro. Deuximement, certains btiments, utiliss comme marqueurs, soulignent les lieux dexceptions et forment un graphique tridimensionnel de lintensit urbaine 114. Cest le cas de la tour IBm, pour le Jardin Botanique, et de lancien htel Hilton, pour le parc dEgmont. Dans ce cas, larchitecture incarne la modernit et limplantation isole dans un lieu dexception renforce la fonction de reprsentation du propritaire. Cette fonction de reprsentation ne peut, en effet, tre effective quavec un caractre dexception, que ce soit travers larchitecture ou lisolation gographique ou fonctionnelle de limmeuble-tour 115. Finalement, toujours selon Leloutre et Vanhaelen, les tours taient utilises dans une stratgie paysagre comme partie dune composition grande chelle, celle du rseau dautoroutes qui structure la ville. La tour de la Prvoyance Sociale est ainsi pense pour contrebalancer la basilique de Koekelberg et entretenir un rapport avec les serres du Jardin Botanique. La composition mtropolitaine qui la met en relation avec la tour Astronomie et la tour des Finances est pense pour tre vue depuis une voiture en mouvement 116.

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    Partie II

    Le long de cette petite ceinture, nous allons tudier plus en profondeur lamnagement du quartier des Radis en un complexe de logements sociaux, celui de la Porte de Namur en un complexe commercial, culturel et de bureaux et, enfin, lamnagement du Quartier du XXe sicle, mlant logements et bureaux autour du Jardin Botanique. Il faut noter que le quartier des Radis fera, par ailleurs, lobjet dun dveloppement plus tendu dans le chapitre concernant lamnagement du pentagone.

    1.2 Le quartier des Radis

    Le quartier des Radis fait lobjet dun premier plan particulier damnagement arrt le 27 juillet 1961 et dun second plan particulier damnagement modificatif arrt le 24 juillet 1968. Le projet se situe lintrieur du pentagone, le long du boulevard du midi dont lamnagement dmontre une ambivalence entre son rle de voie rapide automobile et sa fonction de lieu de dambulation, o dborde le march du midi et o sorganise depuis 1880 la foire du midi 117. Parce quil sagit dune zone rsidentielle socialement dfavorise ayant peu dattrait pour des investisseurs privs, cest par une politique de construction dimmeubles de logements sociaux et de rquipement de la zone que la Ville de Bruxelles planifie la rnovation urbaine de ce quartier. Le projet propose un paysage rsolument rsidentiel, mais dchelle mtropolitaine, fait dimmeubles de logements sociaux modernes le long dun axe qui symbolise, justement, cette nouvelle condition mtropolitaine 118.

    Directement aprs lapprobation du premier plan de 1961, la Ville de Bruxelles dcide dtendre la rnovation et organise un concours dide mis sur pied pour trouver un amnagement rationnel et valable, une rnovation de ce quartier assez ancien 119 fortement influenc, alors, par le concept du plan Tekhn 120. Le second projet de 1968 agrandit considrablement son tendue par le remembrement de quatre lots supplmentaires.

    Lavant-projet de plan dimplantation 121 propose la construction le long du boulevard du midi de deux barres de logements de quatorze niveaux. Celui-ci prvoit galement ldification dune tour trois ailes de trente niveaux, mlant logements et bureaux sur un long socle compos despaces pour lartisanat et le commerce local. La verticalit du projet permet de rduire la superficie construite seulement 28%, offrant ainsi, avec 40% de superficie de parking en surface, la possibilit de dvelopper des espaces verts sur 31% de la superficie du PPA. Le Service de

  • Etude des btiments modernistes de grande hauteur dans leur relation au roadscape bruxellois

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    Partie II

    Ministre des Travaux publics, Porte de Namur et avenue de la Toison dOr, 1972. Bruciel.

    Le projet du quartier des Radis fait lobjet de plusieurs projets. La Ville de Bruxelles et lAdministration de lurbanisme ne parviennent pas se mettre daccord. haut: Quartier des Radis, Projet de larchitecte Courtoi, adapt par la ville de Bruxelles en collaboration avec larchitecte in P. de Saulnier, Bruxelles lheure de la rnovation , Habiter, dcembre 1963, 21.

    milieu: collage concernant le projet finale in Leloutre et Vanhaelen.

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    lUrbanisme de ltat refuse pourtant le projet. Aprs diffrentes itrations, le projet dimplantation final 122 revoit la baisse les hauteurs maximales et abandonne laffectation de bureaux pour finalement proposer, selon le conseil communal, des