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Thomas M’SAÏDIE Mayotte, un département perpétuellement transitoire Par Thomas M’SAÏDIE ATER en droit public à l’UPVD (Université de Perpignan Via Domitia). VIII e Congrès du droit Constitutionnel Français (AFDC) à Nancy Communication au Congrès de l’AFDC (Nancy 16-18 juin 2011) Résumé de l’article L’Île de Mayotte, depuis son rattachement à la France en 1841 n’a pas cessé d’hériter d’un certain nombre de particularités qui ont profondément affecté l’efficacité de son fonctionnement, mais essentiellement sa stabilité statutaire. Elle a vacillé entre plusieurs statuts constitutionnels qui ont comme dénominateur commun, leur caractère innovatoire, transitoire et éphémère. Depuis la loi de 2001, Mayotte s’est lentement rapprochée du statut de département, bien que son fonctionnement en qualité de département puisse se constater dans la pratique depuis quelque temps auparavant elle s’est également profondément enlisée dans une phase transitoire interminable faisant d’elle un « département perpétuellement transitoire ». La présente étude se propose donc de tracer les vicissitudes qui ont jalonné cette île dans sa marche vers sa départementalisation, tout en montrant qu’en réalité, l’Île au Lagon, en plus d’être un département dans les faits depuis un certain temps, va être un département qui, malheureusement est condamnée à être sempiternellement transitoire. Dès lors ce territoire insulaire demeure singulier puisque le régime transitoire dans lequel il se trouve est non seulement perceptible dans le fonctionnement déguisé de Mayotte en département, mais se trouve également prolongé par la soumission préalable de cette île au droit commun.

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Page 1: Par Thomas M’SAÏDIE ATER en droit public à l’UPVD ...saidieTD8.pdf · C’est l’ordonnance royale du 10 novembre 1844 qui va transférer l’administration de ... être prolongé

Thomas M’SAÏDIE

Mayotte, un département perpétuellement transitoire 

Par Thomas M’SAÏDIE

ATER en droit public à l’UPVD (Université de Perpignan Via Domitia).

VIIIe Congrès du droit Constitutionnel Français (AFDC) à Nancy

Communication au Congrès de l’AFDC (Nancy 16-18 juin 2011)

Résumé de l’article

L’Île de Mayotte, depuis son rattachement à la France en 1841 n’a pas cessé d’hériter

d’un certain nombre de particularités qui ont profondément affecté l’efficacité de son

fonctionnement, mais essentiellement sa stabilité statutaire. Elle a vacillé entre plusieurs

statuts constitutionnels qui ont comme dénominateur commun, leur caractère innovatoire,

transitoire et éphémère. Depuis la loi de 2001, Mayotte s’est lentement rapprochée du statut

de département, bien que son fonctionnement en qualité de département puisse se constater

dans la pratique depuis quelque temps auparavant elle s’est également profondément enlisée

dans une phase transitoire interminable faisant d’elle un « département perpétuellement

transitoire ».

La présente étude se propose donc de tracer les vicissitudes qui ont jalonné cette île

dans sa marche vers sa départementalisation, tout en montrant qu’en réalité, l’Île au Lagon, en

plus d’être un département dans les faits depuis un certain temps, va être un département qui,

malheureusement est condamnée à être sempiternellement transitoire. Dès lors ce territoire

insulaire demeure singulier puisque le régime transitoire dans lequel il se trouve est non

seulement perceptible dans le fonctionnement déguisé de Mayotte en département, mais se

trouve également prolongé par la soumission préalable de cette île au droit commun.

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Thomas M’SAÏDIE

Sommaire

Mayotte, un département perpétuellement transitoire.............................................................................. 1

Résumé de l’article ............................................................................................................................. 1 

Sommaire............................................................................................................................................ 2 

Introduction. ....................................................................................................................................... 3 

I) Un régime transitoire perceptible dans le fonctionnement déguisé de Mayotte en département..... 6 

A) Un alignement imparfait de Mayotte aux départements et régions d’outre-mer........................ 7 

B) Une précision superflue : "Département de Mayotte" ............................................................. 11 

II) Un régime transitoire prolongé par la soumission préalable de Mayotte au droit commun ......... 15 

A) Une érection au statut de département subordonnée à une mise à niveau au droit commun : Mayotte, le seul département transitoire de la République ........................................................... 16 

B) Une parfaite collectivité départementale expérimentale .......................................................... 24 

Bibliographie : .................................................................................................................................. 32 

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Thomas M’SAÏDIE

Introduction.

« Il y a des Etats où les lois ne sont qu’une volonté transitoire et capricieuse du

souverain1 ». Cette citation de Montesquieu garde toute son acuité, son actualité si l’on

analyse l’histoire institutionnelle de Mayotte depuis l’installation de la souveraineté française

sur l’Île le 25 avril 1841.

L’histoire institutionnelle de Mayotte n’a pas cessé de défrayer la chronique tant elle a

connu des bouleversements qui ont fragilisé sa construction. Cette instabilité statutaire

remonte à 1841. Il est, en effet, aisé de constater que l’Île au Lagon, avec ses 374 km2 et ses

190 000 habitants, a dès le départ été dépourvue de toute autonomie quant à sa propre

administration. Elle dépendait de l’Île Bourbon jusqu’au 29 août 1843 date à laquelle elle

deviendra une dépendance de Nosy-Be (Madagascar qui était une colonie française). Dès lors

l’Île de Mayotte va être administrée par « un Commandant supérieur résidant à Nosy-Be ».

Une solution qui se voulait avant tout provisoire, comme le constate l’ancien préfet de

Mayotte Philippe Boisadam2.

C’est l’ordonnance royale du 10 novembre 1844 qui va transférer l’administration de

l’Île à Dzaoudzi, constituant ainsi "Mayotte et dépendances". Toutefois l’Île demeure sous

l’autorité de Madagascar jusqu’à ce que le décret du 14 juillet 1877 vienne en disposer

autrement, en procédant à la séparation des deux îles.

En somme l’administration de l’île va vaciller entre l’Île de la Réunion (voir en ce

sens le décret du 23 janvier 1896 qui va à nouveau placer la colonie de Mayotte et les

protectorats sous l’administration de la Réunion) et Madagascar (voir le décret du 9 avril 1908

qui va rattacher la colonie de Mayotte et les autres îles de l’archipel des Comores, au

gouvernement général de Madagascar et dépendances). Il faut attendre la loi du 9 mai 1946

pour que Mayotte se voie confier définitivement sa propre administration. Elle héritera au

passage du statut de Territoire d’outre-mer, en prenant le nom de « territoire des Comores ».

L’île dispose donc d’une autonomie administrative dont le chef-lieu était situé à Dzaoudzi

avant d’être transféré à Moroni, pour ensuite être établi à Mayotte.

                                                             1 Montesquieu De l’Esprit des lois, Livre XXVI, Chapitre II, 2.

2 Pilippe Boisadam, Mais que faire de Mayotte ?, L’Harmattan, 2009, p.71,

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Thomas M’SAÏDIE

Ce petit rappel historique témoigne de la péripétie qui a marqué l’évolution

institutionnelle de Mayotte et permet de cerner l’intérêt de la présente étude. Suite au

référendum organisé dans l’archipel des Comores le 22 décembre 19743, le statut de Mayotte

va emprunter le chemin périlleux et tortueux menant vers le statut du département sans y

parvenir totalement.

Mayotte, avec son statut de collectivité départementale introduite par la loi de 2001,

s’écarte profondément de la famille de COM prévue par le constituant de mars 2003 pour se

rapprocher d’une manière imparfaite, mais certaine, du statut de département. Le droit

commun se trouve étendu progressivement à Mayotte depuis 1976. Dès lors un paradoxe

commence à apparaître puisqu’il est très complexe de déterminer s’il s’agit d’un département

sur le plan fonctionnel et non juridique ou s’il s’agit d’un département sur le plan juridique et

non fonctionnel, ou les deux.

Pour mieux cerner l’objet de la présente étude, il convient d’indiquer ce que l’on

entend par département, sur le plan juridique mais également sur le plan fonctionnel.

L’expression département apparaît dès sa création le 22 décembre 1789 comme une division

administrative neutre qui a pour objet premier de rapprocher les administrés de

l’administration4. En effet, le terme de département, « a été choisi pour exprimer la neutralité

de la nouvelle division qui voulait couper les liens avec le passé5 ». La loi des 26 février et 4

mars 1790 va opérer au découpage des départements6. En plus du découpage du département

en arrondissements, cantons et communes, la loi du 28 pluviôse an VIII (17 février 1800) va

procéder à la création des préfectures et sous-préfectures. Cette loi va poser le principe selon

lequel le préfet, chargé de l’administration, est « l’organe exécutif unique du département ».

Apparaît alors le Conseil général en 1800, en remplacement de conseil départemental

(introduit en 1789), qui va demeurer une assemblée délibérante.

                                                             3 Didier Maus, Jeannette Bougrab, Françsois Luchaire, un républicain au service de la République, Publications

de la Sorbonne, Coll de republica, 2005, p. 327. Voir également la loi n° 75-560 du 3 juillet 1975 relative à

l’indépendance du territoire des Comores, JORF du 4 juillet 1975, pp. 6764-6765.

4 Henri Oberdorff, Les institutions administratives, Armand Colin, 4ème édition, 2004, p. 10.

5 Michel Verpeaux, Droit des collectivités territoriales, PUF, 2eme Collection, 2008.

6 Voir le Titre II de la Constitution de 1791 qui dispose que « le royaume est un et indivisible ; son territoire est

distribué en quatre-vingt-trois départements ».

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Par conséquent on peut définir le département, sur le plan juridique, comme étant une

circonscription administrative de l’Etat et une structure administrative distincte de

l’administration de l’Etat, ayant le statut de collectivité territoriale depuis la loi du 10 août

1871, dont le but est d’assurer des missions visant à satisfaire les intérêts d’une population

d’un territoire déterminé.

Sur le plan fonctionnel, il convient de s’attacher aux organes présents dans le

département et permettant la mise en œuvre des affaires d’intérêt départemental en ce sens

que la présence de ces organes permettent de déterminer l’organisation administrative d’un

territoire de l’Etat. Il y a lieu de retenir essentiellement deux organes, la préfecture et le

Conseil général. On sait que dans le département « le représentant de l’Etat et de chacun des

membres du Gouvernement », qui « a la charge des intérêts nationaux, du contrôle

administratif et du respect des lois » est le préfet. Cependant, certains domaines sont confiés

au Conseil général qui dispose donc des compétences dans des matières à l’échelle

départementale. La loi du 2 mars 1982 va confier aux conseillers généraux de nouvelles

compétences et va transférer l’exécutif au président du Conseil général. Il en résulte donc

qu’un département sur le plan fonctionnel requiert la présence d’un préfet représentant de

l’Etat et du Conseil général dont l’exécutif est confié à son président.

Eu égard à ces définitions, comment situer la collectivité territoriale de Mayotte ?

S’agit-il d’un département au sens juridique et fonctionnel ? Il n’est hélas pas aisé de situer

Mayotte par rapport au reste de l’outre-mer tant celle-ci emprunte, comme il sera examiné un

peu plus loin, aussi bien l’allure d’un département et région outre-mer (DROM) que celui

d’une collectivité outre-mer (COM). L’Île va hériter d’un statut inédit qui ne permet pas de la

classer ni parmi les départements d’outre-mer, ni parmi les territoires d’outre-mer. La loi du

11 juillet 2001 ne fera qu’accentuer cette difficulté dès lors que Mayotte ne saurait être rangée

convenablement parmi les catégories classiques prévues par le constituant du 28 mars 2003

lequel a revu la physionomie institutionnelle de l’outre-mer. En effet, la révision

constitutionnelle du 28 mars 2003 a entendu modifier le paysage institutionnel de l’outre-mer

en créant deux catégories de collectivités territoriales, d’une part les départements et régions

outre-mer (DROM) et d’autre part les collectivités outre-mer (COM), le cas de la Nouvelle-

Calédonie reste régi par le « Titre XIII » de la Constitution. De ce fait, « il n’y a donc

juridiquement plus de place pour l’existence de collectivités sui generis ultra-marines».

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Il importe de préciser que par transitoire, il convient de comprendre le passage d’un

régime à un autre régime qui se veut beaucoup plus stable. En réalité, Mayotte a connu une

évolution institutionnelle contra-cyclique7 qui va expliquer le caractère transitoire de tous les

régimes juridiques régissant son statut. Dès lors, la spécificité statutaire de l’Île renforce l’idée

selon laquelle l’Île de Mayotte demeure soumise à un régime transitoire. Si le rapport

Bonnelle reconnait que le caractère provisoire du statut introduit depuis la loi 24 décembre

1976, est « par lui-même, créateur d’incertitudes et d’insécurité juridique », son maintien

jusqu’à ce jour n’a pas, semble-t-il, préoccupé davantage les pouvoirs publics.

Au même titre que le président de la République Nicolas Sarkozy clamait avec

intonation que « Mayotte, c’est la France, Mayotte restera française », l’on ne peut résister à

l’envie de répliquer avec force et par un aphorisme résumant bien la situation de ce territoire :

« Mayotte, c’est un département transitoire, Mayotte restera un département perpétuellement

transitoire ». Dès lors, comment ce territoire, qui, à la base, devait acquérir le statut de

« département français » depuis la loi de 1976, s’est-il retrouvé confiner dans un statut

perpétuellement transitoire, nonobstant la récente loi organique ?

Tenter de répondre à cette question, c’est s’engager à démontrer que le régime

transitoire est particulièrement perceptible dans le fonctionnement déguisé de Mayotte en

département (I), en ce sens que ce territoire connait un fonctionnement quasi-similaire aux

DROM. Mais aussi, ce régime transitoire va être prolongé par la soumission préalable de

Mayotte au droit commun (II).

I) Un régime transitoire perceptible dans le fonctionnement déguisé de Mayotte en

département

Si l’on s’en remet au fonctionnement des institutions locales de Mayotte, il est aisé

d’identifier la présence du statut de département. En effet, le statut dont jouit l’Île au Langon,

ainsi que le fonctionnement des institutions locales sont autant des faisceaux d’indices

permettant de reconnaître l’existence pratique du statut du département, alors que

juridiquement il n’en est point. Dès lors Mayotte constitue un « faux » département d’outre-

                                                             7 Fred Constant, Des statuts à la carte pour les Outre-mer français. Vers de nouveaux schémas de partage des

responsabilités ?, La documentation française, Regards sur l’actualité n°355, Novembre 2009, p.28.

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mer dont le fonctionnement relève d’un « vrai » département d’outre-mer. Il s’agit en réalité

d’un alignement imparfait de Mayotte aux départements et régions d’outre-mer (A).

Ce sentiment se précise d’autant que le législateur, en érigeant l’Île au Lagon en

qualité de département, a apporté une précision particulièrement superflue (B), renforçant

l’idée selon laquelle Mayotte serait un département qui se veut avant tout différent des autres.

A) Un alignement imparfait de Mayotte aux départements et régions d’outre-mer

Français depuis le traité du 25 avril 1841, Mayotte, n’a pas cessé de fonctionner

comme un département. La loi n°1871-08-10 du 10 août 1871 relative aux conseils généraux

a été, en effet, étendue à Mayotte par l’ordonnance n°77-449 du 29 avril 19778. On peut y

lire : « Pour l’application à Mayotte des dispositions de la loi du 10 août 1871 les expressions

« collectivité territoriale de Mayotte » et « commission restreinte » sont substituées aux

expressions « département » et « commission départementale »9 ». Même si dans les

départements le pouvoir qui en principe est dévolu au préfet est ici exercé par le représentant

du Gouvernement, les cloches de la départementalisation ont sonné, et le fonctionnement des

institutions locales n’en est pas neutre.

En vertu des ordonnances n°77-449 et n°77-450 du 29 avril 1977, Mayotte est

résolument assimilée à un département et connait un fonctionnement administratif similaire

aux autres départements. Cela se traduit, in concreto, par la création d’un conseil général élu

dans 17 cantons et un représentant de l’Etat. Cette situation, somme toute particulière pour

une collectivité territoriale non départementalisée, a été orchestrée par le législateur ordinaire

qui a transformé le statut de Mayotte en collectivité territoriale. Un statut qui se voulait avant

tout théoriquement provisoire, mais qui s’est révélé, dans la pratique10, durable, jusqu’à

l’érection éventuelle de l’île au Lagon en département11.

                                                             8 Ordonnance n°77-449 du 29 avril 1977 portant extension et adaptation à la collectivité territoriale de Mayotte

de la loi du 10 août 1871 relative aux conseils généraux, JORF du 30 avril 1977, p.2489.

9 Voir l’article 2 de l’ordonnance n°77-449 du 29 avril 1977.

10 Voir en ce sens, le rapport Bonnelle. « Réflexions sur l’avenir institutionnel de Mayotte : rapport au secrétaire

d’Etat à l’outre-mer », La documentation Française, p. 15.

11 Voir l’article 1 de la loi n°76-1212 de 24 décembre 1976.

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En dépit de l’épisode d’atermoiement du législateur12 qui va laisser cette Île sans statut

constitutionnel stable pendant quelques décennies, le fonctionnement administratif va

demeurer inchangé, quand bien même le décret n°94-41 du 13 janvier 1994 va porter le

nombre de cantons à 19. Henry Jean-Baptiste, ancien député de Mayotte avait souligné le 8

novembre 1997 à l’occasion des cérémonies marquant le 20ème anniversaire de la création du

Conseil général de Mayotte, devant le secrétaire d’Etat à l’outre-mer qui était Jean-Jack

Queyranne, que « le conseil général fut dès l’origine considéré certes comme un emprunt à

l’institution départementale de droit commun, mais déjà comme un premier pas dans

l’évolution de Mayotte vers le statut de DOM ».

Sous l’impulsion de l’accord sur l’avenir de Mayotte du 27 janvier 200013, approuvé

par référendum à plus de 72% du suffrage exprimé le 2 juillet 2000, le législateur va

reconnaître, ce qui était qu’une réalité pratique sur l’île depuis quelques temps. En effet, tout

                                                             12 La population mahoraise devait être consultée conformément à l’article 1, alinéa de la loi n°76-1212 du 24

décembre 1976 dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de cette loi. Cette disposition sera

abrogée par la loi n°79-1113 du 22 décembre 1979 relative à Mayotte. La consultation qui devait intervenir trois

ans après, soit en 1979, va être ainsi prorogée en cinq ans (v. la loi n°79-1113 du 22 décembre 1979 relative à

Mayotte, JORF du 23 décembre 1979, p. 3254).

Cependant, l’alinéa 2 du premier article de la loi n°76-1212 du 24 décembre 1976 a été abrogé par la loi n°79-

1113 du 22 décembre 1979 relative à Mayotte, prorogeant le délai de la consultation cinq ans après la

promulgation de la loi. Il convient également de noter, comme le constate Patrick Schultz, que « le 12 mai 1976,

sur le bureau de l’Assemblée nationale, un projet de loi qui, dans son article 1er disposait que « Mayotte constitue

au sein de la République française un département d’outre-mer » » (voir Fasc. 131, JurisClasseur Administratif).

Mais le projet sera avorté.

13 Accord du 27 janvier 2000 relatif à l’avenir de Mayotte, JORF du 8 février 2000. En réalité, cet accord

découle des propositions du rapport Bonnelle (voir en ce sens François Bonnelle, Réflexions sur l’avenir

institutionnel de Mayotte : rapport au secrétaire d’Etat à l’outre-mer, La documentation Française, 128p.). Parmi

les cinq propositions présentes dans ce rapport, toutes aspiraient à l’évolution de statut de l’île au Lagon en tant

que département, même si la dernière proposition suggérait le maintien du caractère sui generis. C’est donc à la

suite du rapport Bonnelle qu’une mission interministérielle s’est rendue à deux reprises à 1998 et juillet 1999

pour mener des négociations avec les élus locaux afin d’aboutir à un « accord sur l’avenir de Mayotte ».

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en voulant rompre avec la « longue période d’incertitude liées à un statut provisoire14 », il va

ériger l’île en « collectivité départementale15 ».

Derrière cette appellation se cache en réalité, une manière bien modérée et insidieuse

pour le législateur de reconnaître que l’Île au Lagon fonctionne comme un département. « Il

ne s’agit donc pas d’un département, mais d’une collectivité territoriale spécifique, dont

l’appellation montre cependant qu’elle est déjà doté de certains caractères des

départements16 ». Ainsi, cette appellation entend amorcer le statut du département et rompre

avec le rattachement de Mayotte à la « fausse17 » famille de COM depuis la révision

constitutionnelle de mars 2003.

Quand bien même il a fallu attendre en 2007 pour que les actes pris par le Conseil

général deviennent exécutoires18, il convient de relever que la loi n°2001-616 du 11 juillet

2001 n’a pas seulement érigé Mayotte en collectivité départementale, elle a aussi transféré

l’exécutif au Président du Conseil général après les élections cantonales de mars 2004. Dès

lors Mayotte flotte entre spécialité législative et identité législative. Du point de vue pratique,

l’île reste soumise, depuis la révision constitutionnelle de 2003, à la « spécialité législative

avec des exceptions relevant de l’identité législative ». Il s’agit ici de « garder la spécialité

législative tout en bénéficiant des éléments départementaux ».

Mais la loi organique n°2007-223 du 21 février 2007 va réellement reconnaître cette

île comme relevant de l’identité législative à partir du 1er janvier 2008, mais assorties des

exceptions relevant de la spécialité législative. L’île est donc soumise au régime de

                                                             14 Accord du 27 janvier 2000 relatif à l’avenir de Mayotte, JORF du 8 février 2000.

15 Voir les stipulations du premier article alinéa 3 de la loi n°2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte,

JORF n°161 du 13 juillet 2001, p.11199.

16Jean-Yves Faberon, Jacques Ziller, Droit des collectivités d’outre-mer, LGDJ, 2007, p.301.

17 Michel Verpeaux, Droit des collectivités territoriales, PUF, 2eme Collection, 2008, p.56.

18 Michel Verpeaux, Droit des collectivités territoriales, PUF, 2eme Collection, 2008, p.56. Voir aussi en ce sens

l’article 2, alinéa 3 de la loi n°2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, JORF n°161 du 13 juillet 2001,

p.11199.

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l’application de plein droit des lois et règlements19, ce qui n’est pas une nouveauté en soi. Un

« faux » département qui hérite là des mécanismes régissant un « vrai » département20, telle

est la particularité de l’île de Mayotte. Autrement dit, Mayotte se trouve aligné d’une manière

totalement imparfaite aux départements et régions d’outre-mer en ce sens qu’elle va hériter du

principe d’identité législative régissant donc les DROM (art. 73) tout en conservant certains

éléments relevant de la spécialité législative (art. 74).

Cette observation se vérifie d’autant plus que les lois n°2001-616 du 11 juillet 2001 et

n°2007-223 du 21 février 2007 ont entendu doter l’Île d’un certain nombre de mécanismes

régissant un département au sens de l’article 73 de la Constitution. De ce fait l’Île de Mayotte

est manifestement assimilée, du point de vue fonctionnelle, à un département au sens de

l’article 73, mais sur le plan juridique, elle demeure ranger parmi la famille des COM

jusqu’en mars 2011.

Pour s’en convaincre, il suffit de faire une lecture attentive des dispositions relatives à

la collectivité départementale de Mayotte figurant dans le Code général des collectivités

territoriales (CGCT). En vertu de l’article L. 3531-3, « les articles L. 3121-3 à L. 3121-26

sont applicables à la collectivité départementale de Mayotte, sous réserve des dispositions du

1° de l’article L. 3571-1 ». Ces articles régissant les organes du département et qui sont

étendus à Mayotte encadrent principalement la démission des conseillers généraux et la

dissolution du conseil général.

La présence du conseil général sur l’Île de Mayotte qui a été soulignée à l’article

L3531-1 du CGCT et deux organes chargés d’assister le conseil général rappelle clairement le

fonctionnement des DROM. D’une manière identique que dans les DROM, il y a un conseil

économique et social ainsi qu’un conseil de la culture, de l’éducation et de l’environnement à

Mayotte. L’existence de ces organes rappellent des pratiques antérieurs qui consistent, « en

l’absence de textes explicites, à appliquer les dispositions en vigueur en métropole » sur ce

territoire ultra-marin. En conséquence, la présence à Mayotte des organes propres à un

                                                             19 Loi organique n°2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à

l’outre-mer, JORF du 22 février 2007, p.3121.

20 Ainsi que le constate à juste titre Rakotondrahaso Faneva, il s’agirait ni plus ni moins que d’un « Canada-

dry », Rakotondrahaso Faneva « Mayotte, le statut de pays et territoire d’outre-mer de l’Union : un pis-aller ? »

Revue juridique de l’Océan Indien, Novembre 2009, p. 74.

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département permet d’affirmer que cette collectivité départementale (jusqu’au 31 mars 2011)

se trouve irréfutablement alignée aux autres départements français, sans l’être réellement du

point de vue juridique.

Bien qu’il ne s’agisse aucunement d’un alignement parfait de Mayotte au DROM, il

faut admettre, ainsi que l’a fait Olivier Gohin, que son particularisme est « juridiquement plus

subtil et politiquement plus innovant21 », ce qui offre, par conséquent aux autorités politiques

centrales plus de marge de manœuvre, produisant ainsi un statut à la carte pour Mayotte

appelé « Département de Mayotte ».

Tirant, en effet, les conséquences de la consultation de mars 2009 à laquelle les

mahorais avaient derechef exprimé massivement leur attachement à la République française

(95,2% des suffrages exprimés), les lois organique n°2010-1486 du 7 décembre 2010 et

ordinaire n°2010-1487 du 7 décembre 2010 ont érigé ce territoire en « Département de

Mayotte », avec une précision déroutante.

B) Une précision superflue : "Département de Mayotte"

A la suite du référendum organisé le 29 mars 2009, la loi organique n°2010-1486 du 7

décembre 2010 répond enfin aux demandes itératives des mahorais, en érigeant l’Île au

Parfum au statut de « Département de Mayotte ». On serait presque tenté de pousser un cri de

soulagement, tant la population mahoraise s’est évertuée pendant plus d’une trentaine

d’années à demander ce statut de département. Enfin le statut de département est reconnu ! A-

t-on envie de clamer.

Fort malheureusement ce statut n’est guère satisfaisant, comme il conviendra de le

démontrer, dès lors, on ne peut laisser l’enthousiasme guidé notre plume. A compter du

renouvellement du conseil général de Mayotte, c’est-à-dire le 31 mars 2011, l’Île au Lagon

devient « Département de Mayotte ». On se souvient de la loi précitée de 1946 qui parlait de

« département français », s’agissant de la Guadeloupe, Guyane, Martinique et la Réunion et

non de département « de la Guadeloupe », « de la Guyane » etc. ou de la loi du 19 juillet 1976                                                              21 Voir Olivier Gohin, Groupe de réflexion sur l’évolution institutionnelle de Mayotte, Réunion du vendredi 27

juin 1997, « Note relative à Mayotte, version DOM », inédit, p. 6. Voir également Emmanuel Roux, L’octroi des

compétences à la collectivité départementale de Mayotte : alignement ou transfert ?, in Laurent Sermet, Jean

Coudray (Dir.), Mayotte dans la République, Montchrestien, 2004, p. 148.

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relative à l’organisation de Saint-Pierre-et-Miquelon qui mentionnait seulement le mot

« département22 » ou enfin du projet de loi avorté du 12 mai 1976 qui stipulait que « Mayotte

constitue au sein de la République française un département d’outre-mer ».

A la lumière de ces exemples, une question mérite d’être soulevée. En effet, pourquoi

le législateur organique a-t-il ressenti le besoin inexpliqué de préciser soigneusement

« Département de Mayotte » ? Les deux lois qui régissent le « Département de Mayotte », à

savoir la loi organique n°2010-1486 et la loi ordinaire n°2010-1487 du 7 décembre 2010 ne

mentionnent pas « de façon simple et franche, que Mayotte est enfin classée ou érigée, à son

tour, en un département français, voire en tant que sous-catégorie constitutionnelle, en un

département d’outre-mer23 ». Dès lors, il ne serait pas impertinent de comprendre par

« Département de Mayotte » qu’il s’agit là d’un prolongement du statut sui generis dont ce

territoire bénéficiait auparavant, dans la mesure où seule la notion de "collectivité" a été

retirée du statut de « collectivité départementale de Mayotte » introduit par la loi n°2001-616

du 11 juillet 200124.

L’expression « Département de Mayotte » renvoie donc à un département qui est

propre à Mayotte. Autrement dit, comme le faisait autrefois Aimé Césaire25 en jouant avec les

mots, Mayotte ne serait pas « un département à part entière », mais « un département

entièrement à part ». De ce point de vue Mayotte ne serait pas un département en tant que tel,

comme entendu par les dispositions de l’article 73 de la Constitution, mais un département

remodelé sur mesure et propre à Mayotte. Ce qui justifierait pleinement les nombreuses

exceptions et adaptations découlant de son application effective dès le 31 mars 2011. Ces

adaptations, à première vue, vont bien au-delà des celles précisées par le juge constitutionnel

                                                             22 Loi n°76-664 du 19 juillet 1976 relative à l’organisation de Saint-Pierre-et-Miquelon, JORF du 20 juillet 1976,

p. 4323.

23 Olivier Gohin, « La départementalisation de Mayotte », La Semaine Juridique Administration et Collectivités

territoriales n°3, 17 janvier 2011, p.2.

24 Loi n°2001-616 du 11 juillet 2001 relative à Mayotte, JORF n°161 du 13 juillet 2001, p.11199.

25 Aimé Césaire faisait valoir, pour souligner la lenteur du processus d’assimilation de la Martinique, que

Martinique est un « département à part entière et entièrement à part ».

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dans sa décision n°84-174 DC du 25 juillet 198426. A cet égard la ministre de l’outre-mer

Marie-Luce Penchard, reconnaissait que « la départementalisation de Mayotte est

historiquement et juridiquement un processus progressif et adapté ». De ce fait l’emploi de

l’expression « Département de Mayotte » laisse une large marge d’intervention au

gouvernement pour « bricoler » un département pour Mayotte qui ne correspond pas

nécessairement aux attentes de la population et des élus.

C’est sans doute ce qui a incité les élus locaux à rejeter à l’unanimité les projets de loi

organique et ordinaire soumis à l’assemblée générale de l’Île au début du mois de juillet 2010.

Ils ont désapprouvé les deux projets de loi, au motif que « des nombreuses dispositions

législatives et règlementaires ne contribuent qu’imparfaitement à mettre en place une

départementalisation réellement adaptée à la situation mahoraise ». Pour ces raisons, l’ancien

président du Conseil général Ahmed Attoumani Douchina, dont la fidélité au Président de la

République n’est plus à démontrer faut-il le souligner, a demandé aux conseillers généraux

d’émettre un avis défavorable contre les projets de loi. Ce qui a eu pour conséquence de

précipiter un déplacement de la ministre de l’outre-mer Marie-Luce Penchard à Mayotte pour

tenter de lever toute ambiguïté relative aux deux projets de lois.

La loi organique de décembre 2010 prescrit avec itération l’expression « Département

de Mayotte ». Ne devrait-elle pas mentionner simplement département, ou département

français, comme l’avaient fait les lois de 1946 et de 1976 ? Car, sans cette précision superflue,

Mayotte aurait retrouvé le statut tant convoité par la population, puisqu’il s’agirait d’un

« département français », alors qu’ici, il s’agit seulement d’un « Département de Mayotte ».

L’absence de précision aurait également suggéré une parfaite intégration, voire assimilation

de Mayotte aux autres départements français et donc un fonctionnement analogue. Ou,

s’agirait-il de faire entrer Mayotte « dans une catégorie inédite et particulière au sein de

l’ensemble des collectivités territoriales » ? Ce qui serait, dans cette hypothèse, en total

désaccord avec la décision du juge constitutionnel n°82-147 DC du 2 décembre 1982 qui

exige, hormis les adaptations prévues dans le texte fondamental, l’alignement parfait des

statuts des départements d’outre-mer au département métropolitains27 ? Une interprétation

                                                             26 Décision n°84-174 DC du 25 juillet 1984, journal officiel du 28 juillet 1984, p.2493 (Cons.5) ; Voir également

la décision n°82-152 DC du 14 janvier 1983.

27 Décision n°82-147 DC du 2 décembre 1982 sur la loi portant adaptation de la loi n°82-213 relative aux droits

et libertés des communes, des départements et régions à la Guadeloupe, à la Guyane, à la Martinique et à la

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littérale de l’expression « Département de Mayotte » permet de soulever utilement cette

interrogation et d’y apporter, par là-même, une réponse affirmative. D’autant que le

gouvernement souhaitait manifestement une différenciation tranchée entre le « Département

de Mayotte » et les autres départements.

Cette idée se trouve entretenue par l’utilisation d’un « D » majuscule sur l’expression

« Département de Mayotte ». L’emploi de « D » majuscule, comme l’observe finement

Olivier Gohin, demeure ambigu28. Cet emploi de majuscule, qui d’ailleurs a été repris par le

Conseil constitutionnel dans sa décision n°2010-619 DC du 2 décembre 2010, démontre

particulièrement qu’il s’agit là d’un statut atypique exclusivement réservé à Mayotte, telle une

identité, tel un signe de nom propre. Autrement dit Mayotte serait une collectivité nommée

« Département de Mayotte », et par conséquent une sous-catégorie de DROM.

Cette différence se ressent également au niveau de son fonctionnement puisque l’Île au

Lagon va être la première Collectivité unique, quand bien même la Martinique et la Guyane

connaîtront une évolution similaire.

Néanmoins, si l’on opère une interprétation téléologique de l’expression

« Département de Mayotte », l’on peut déduire qu’il s’agit bel et bien, d’un Département

similaire aux autres départements de la métropole, malgré l’écart matériel qui peut y subsister

et malgré cette précision superflue.

Au demeurant, la référence faite à l’expression « Département de Mayotte » ne doit

pas cacher la réalité juridique qui considère, comme le suggère Olivier Gohin, que « Mayotte

est bien un département d’outre-mer – et cela seulement – et on s’en tiendra là, sans recours,

désormais à une Majuscule inutile et provocante, au surplus inconstitutionnelle à la lecture de

l’article 73 et illégitime au regard du résultat du référendum de 2009 ».

En définitive, le fonctionnement déguisé de Mayotte en département, qui se constate

aussi bien dans l’alignement imparfait de ce territoire au DROM, que dans son appellation

ambiguë introduite par le législateur organique, prolonge le régime transitoire dans lequel ce

                                                                                                                                                                                              Réunion, JO du 4 décembre 1982, p. 3666 (cons.4). Voir l’analyse de cette décision par Louis Favoreu, RDP,

1983, p. 333 et Pierre Avril, Jean Gicquel, Pouvoirs, 1983 (25), p. 183.

28 Olivier Gohin, « La départementalisation de Mayotte », La Semaine Juridique Administration et Collectivités

territoriales n°3, 17 janvier 2011, p. 4.

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territoire est inextricablement enlisé depuis quelques décennies. Un régime transitoire qui est

particulièrement visible dès lors que Mayotte est soumise, d’une manière totalement inédite,

au respect préalable du droit commun avant l’accès au statut de département.

II) Un régime transitoire prolongé par la soumission préalable de Mayotte au droit

commun

Depuis la première constitution écrite de 1791 laquelle excluait les colonies et

possessions françaises dans l’Asie, l’Afrique et l’Amérique de son champ d’application,

l’outre-mer française est essentiellement marquée par des changements institutionnels.

Mayotte n’a pas dérogée à cette règle dans la mesure où elle s’est vue imposer des

particularités statutaires inédites faisant d’elle et la Nouvelle-Calédonie les territoires

insulaires ayant hérité le plus de statuts depuis l’instauration de la Ve République par De

Gaulle. Ces deux territoires constituent des vraies « cobayes » statutaires permettant

l’expression de l’imagination juridique et politique des différents gouvernements de la

République française. Mayotte constitue, à cet égard, la seule collectivité territoriale soumise

à un régime transitoire avant son accession au statut de département. Dit autrement l’Île au

Lagon est l’unique collectivité territoriale dont l’érection au statut de département demeure

subordonnée à une mise à niveau au droit commun départemental (A), et donc au respect

rigoureux d’une période transitoire.

Le régime transitoire initié par le comportement du législateur du 24 décembre 1976

justifie certainement que ce territoire ait bénéficié du « sur-mesure » sur le plan institutionnel

jusqu’à ce jour. Ce régime semble être le corollaire de toute une série de mesures émanant

aussi bien des pouvoirs publics que du législateur lui-même et applicables à ce territoire. A la

lumière de l’histoire institutionnelle de ce territoire ultra-marin, il y a lieu de constater que sa

soumission à une mise à niveau, ou du reste, à une période transitoire relève en réalité d’une

multiplication d’expériences juridiques, faisant de Mayotte une véritable terre

d’expérimentation juridique (B).

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A) Une érection au statut de département subordonnée à une mise à niveau au droit

commun : Mayotte, le seul département transitoire de la République

L’on se souvient de la fameuse loi du 19 mars 1946 qui a érigé les "quatre vieilles"

colonies en « département français d’outre-mer29 ». Celle-ci a, en effet, entendu mettre fin à

l’application du principe de la spécialité législative qui était en vigueur sur ces quatre

territoires. « Les textes législatifs et réglementaires de la République n’étaient applicables

qu’après promulgation locale par le gouverneur dans la colonie30 ».

Cette loi du 19 mars 1946 va donc rompre avec le régime des "décrets-coloniaux" en

instaurant le principe dit "d’assimilation ou d’identité législative"31 en vertu duquel « les lois

et les règlements sont applicables de plein droit32 ». Le passage du statut de colonie en statut

de département s’est fait sans à-coups, sans transition, sans besoin d’établir un quelconque

pacte. Le législateur a érigé la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique et la Réunion en

département français sans qu’il y ait lieu d’observer une période transitoire.

Le cas de Mayotte est particulièrement inédit, en ce sens qu’il y a eu plusieurs phases

avant l’attribution du sésame tant attendu par les mahorais, à savoir la départementalisation de

l’île. C’est l’accord sur l’avenir de Mayotte signé à Paris le 27 janvier 2000 qui va déclencher

cette longue et interminable période transitoire avant l’accès de l’Île au statut de département.

La signature de cet accord soulève deux observations. D’une part, l’Île se voit promise

à un avenir institutionnel instable durant une décennie (à laquelle il faut rajouter les deux

décennies précédentes), d’autre part elle doit répondre à une sorte de cahier de charges pour

pouvoir être éligible au statut tant demandé par la population. De ce fait l’Île se voit soumise à

une sorte de "critère de Copenhague" version française qui est loin d’être issue d’une

interprétation d’un texte réglementaire, législatif ou constitutionnel. Il s’agit simplement

d’une volonté politique que d’instaurer des conditions à l’accès au statut de département. La

                                                             29 Voir l’article 1er de la loi n°46-451 du 19 mars 1946 tendant au classement comme départements français de la

Guadeloupe, de la Martinique, de la Réunion et de la Guyane française, JORF du 20 mars 1946 p.2294

30 Jean-Yves Faberon, Jacques Ziller, idem. p.41

31 Jacques Ziller, Les DOM-TOM, L.G.D.J., 1996, p.27.

32 Art. 73 de la Constitution du 4 octobre 1958.

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seule légitimité de cet accord est qu’il a été approuvé par référendum. Une énième

consultation à laquelle les mahorais ont répondu massivement "oui".

Mais peut-on réellement voir une vraie légitimité derrière cette approbation massive

de la population mahoraise de l’accord sur l’avenir de Mayotte du 27 janvier 2000 ?

L’expérience du passé (les différentes consultations qui ont succédé l’accès des Comores à

l’indépendance) nous incite à plus de circonspection. En effet, la motivation des mahorais a

été telle qu’ils n’ont jamais réellement hésité à manifester leur amour pour la République,

voyant donc dans chaque consultation, une occasion renouvelée de crier haut et fort leur

attachement aux valeurs de la République, pour ne pas tomber sous le joug de l’ennemi juré

(les Comores). De ce point de vue, le gouvernement n’encourait aucun risque réel de voir

l’accord rejeté par les mahorais, d’autant que celui-ci semble laisser naître l’espoir de voir

l’Île au Lagon s’éloigner définitivement d’une éventuelle intégration aux Comores.

Il est, en effet, impensable pour les mahorais d’être un jour dans le giron de l’Union

des Comores, ce qui serait synonyme d’absence de liberté si l’on se réfère à la fameuse phrase

prononcée par les « chatouilleuses » aux termes de laquelle les mahorais veulent « être

français pour être libres ». Dès lors toute consultation populaire se solde nécessairement par

une majorité spectaculairement écrasante pour le maintien de Mayotte au sein de la

République, conférant ainsi au gouvernement une grande latitude quant à ses agissements. Par

conséquent, les mahorais, à part approuver les mesures prises par le gouvernement, même si

l’assemblée générale a eu l’audace de rejeter les deux projets de lois organiques au début de

mois de juillet 2010, ils ne se sentent pas tellement dans une position dans laquelle ils peuvent

entamer des négociations ou discussions équilibrées avec Paris, par crainte de voir le projet de

département s’éloigner encore davantage. D’où l’adhésion sans faille de tous les élus à tout

projet qui leur est soumis.

En tout état de cause, les mahorais répondront oui à toute question qui a un lien direct

ou non à leur avenir institutionnel. A partir de ce constat, pourquoi ne pas leur soumettre des

actes présentant des conditions contraignantes et inédites que le gouvernement sait d’avance

que la population acceptera ? Rien ne semblait, en effet, s’opposer à cette tentation qui s’est

soldée par deux accords, à savoir l’accord sur l’avenir de Mayotte signé à Paris le 27 janvier

2000 et le Pacte pour la départementalisation du 8 janvier 2009.

Le gouvernement semble avoir toute sa liberté pour imposer des conditions

particulièrement rigoureuses aux mahorais à l’accès au statut de département. L’ancien

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Président de la République Jacques Chirac, lors de son discours à Mayotte sur la place des

marchés à Mamoudzou le 19 mai 2001, le reconnaissait sans équivoque que l’accession de

Mayotte au statut de département ne saurait être opérée que sous le respect de deux

conditions : « le respect des principes et de l’unité de la République, la consultation des

populations ». La première condition qui a une portée générale suggère une extension des

règles de droit commun sur l’Île avant son accès au statut de département. Dans le

prolongement du discours de Jacques Chirac, le Président de la République Nicolas Sarkozy

indiquait à la veille du référendum du 29 mars 2009 que « l’évolution institutionnelle se fera

donc progressivement sur la base du Pacte pour la départementalisation, accepté par les élus

de Mayotte, qui décrit le chemin qui reste à parcourir ».

Si l’un des deux accords a eu l’approbation populaire, l’autre (Pacte pour la

départementalisation) a été imposé d’une manière unilatérale. Rédigé sous un ton

particulièrement péremptoire, le Pacte pour la départementalisation, qui n’a fait l’objet

d’aucune publication officielle et dont l’auteur n’est pas identifiable, est un cahier de charges

bien fourni qui doit être observé pendant et après la période transitoire. Il entend, en effet,

tracer les grandes lignes relatives à l’accession de Mayotte au statut de département.

Globalement, le pacte prévoit que « les transferts de compétences, là où la

décentralisation n’a pas été complète, seront engagés ». Il prévoit également la substitution de

la justice locale à la justice républicaine (l’ordonnance du 3 juin 2010 met fin à la justice

« cadiale »). Il impose, à moindre mesure, la maîtrise de la langue française aux mahorais, et à

plus forte mesure l’acquisition d’une « identité incontestable »33 avant l’accès au statut de

département. Ce dernier élément, qu’il conviera de gloser ci-après, a nécessité la création

d’une administration de mission (Commission de Révision de l’Etat-Civil = CREC) qui doit

disparaître à l’aune du département. L’idée étant ici de rompre avec le statut personnel dont

jouissent certains mahorais.

En imposant la disparition du statut personnel comme un préalable à l’érection de

Mayotte en département, n’est-il pas là un moyen d’aller à l’encontre des dispositions des

articles 72-3 et 75 de la Constitution. Rappelons en effet que l’article 75 dispose que « les

citoyens de la République qui n’ont pas le statut civil de droit commun, seul visé à l’article                                                              33 Le choix des mots peut être sujet à débat dès lors que l’expression « identité incontestable » suggère

indubitablement que l’identité locale est contestable. Or celle-ci est tout simplement différente de celle

classiquement utilisée dans l’Hexagone.

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34, conservent leur statut personnel tant qu’ils n’y ont pas renoncé ». Le Conseil

constitutionnel avait jugé dans sa décision n°2003-474 DC du 17 juillet 2003 « qu’il résulte

de la combinaison de ces dispositions que les citoyens de la République qui conservent leur

statut personnel jouissent des droits et libertés de valeur constitutionnelle attachés à la qualité

de citoyen français et sont soumis aux mêmes obligations34 ».

La position du juge constitutionnel rend très contestable les raisons motivant les

pouvoirs publics à remettre en cause le statut civil de droit local en ce sens qu’ils imposent le

changement de l’état-civil aux mahorais avant l’accès de leur île en DROM. Ils indiquaient

que « cette situation est inacceptable pour l’Etat ». En effet, afin d’inciter les mahorais à

procéder à la modification de leur état-civil, le Pacte pour la départementalisation mettait en

cause la fiabilité du statut personnel des mahorais en mentionnant effectivement que ces

derniers ne disposaient pas « d’un état-civil fiable », et par conséquent ne pouvaient jouir des

droits fondamentaux résultant de la nationalité française. Une telle affirmation méconnait

incontestablement la position du juge constitutionnel dans sa décision du 17 juillet 2003

précitée et par conséquent demeure incompatible à la Constitution.

Il convient de relever par ailleurs que cette période transitoire s’étale, si l’on se réfère

au fameux Pacte pour la départementalisation du 8 janvier 2009, de 1 à 25 ans suivant le

développement économique de l’Île au Parfum. Comme il sera étudié ci-après, le législateur

(organique et ordinaire) reconnait à Mayotte le statut de département à partir du 31 mars

2011, mais ne lui dote pas de tous les moyens juridiques et financiers pour connaître un

fonctionnement analogue aux autres départements. Ainsi, par définition et conformément à

l’article 72-3 de la Constitution un DROM est régi par l’article 73. Bien que le constituant lui-

même prévoie des « adaptations tenant compte aux caractéristiques et contraintes particulières

de ces collectivités » il n’en demeure pas moins que le principe étant l’application de plein

droit des lois et règlements, et donc l’identité législative. Or l’effectivité de ce principe à

Mayotte demeure assez discutable sur le plan fonctionnel tant il y a plus d’exceptions que

d’applications de plein droit des textes législatifs et réglementaires. Autrement dit, il y a plus

que des simples adaptations au sens de l’article 73 qui sont mis en pratique dans ce nouveau

département.

                                                             34 Décision n°2003-474 DC du 17 juillet 2003 sur la loi de programme pour l’outre-mer, JO du 22 juillet 2003, p.

12336 (Cons. 29).

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Une situation similaire a déjà nécessité l’intervention du juge constitutionnel dans sa

décision n°82-147 DC du 2 décembre 1982 qui a pris le soin de préciser que « le statut des

départements d’outre-mer doit être le même que celui des départements métropolitains sous la

seule réserve des mesures d’adaptation que peut rendre nécessaires la situation particulière de

ces départements d’outre-mer ». Le Conseil constitutionnel souligne que « ces adaptations ne

sauraient avoir pour effet de conférer aux départements d’outre-mer une organisation

particulière, prévue par l’article 74 de la Constitution pour les seuls territoires d’outre-mer35 ».

Le principe d’identité législative s’applique sur l’Île d’une manière progressive et

adaptée. Mayotte demeure donc régie, dans certains domaines, par les dispositions de l’article

74 de la Constitution36. Or l’article 74 entend encadrer seulement et essentiellement les autres

territoires ultra-marins non-départementalisés conformément à l’article 72-3 de la

Constitution. Par conséquent Mayotte reste soumise au principe de spécialité législative alors                                                              35 Décision n°82-147 du 2 décembre 1982 sur la loi portant adaptation de la loi n°82-213 relative aux droits et

libertés des communes, des départements et régions à la Guadeloupe, à la Guyane, à la Martinique et à la

Réunion, JO du 4 décembre 1982, p. 3666 (cons.4).

36 Voir le Considérant 4 de la décision n°2010-619 DC du 2 décembre 2010 sur la loi organique relative au

Département de Mayotte. « Considérant que l'article 2 de la loi organique abroge les dispositions organiques du

code général des collectivités territoriales relatives à la procédure de référé−suspension ouverte aux membres du

conseil général de Mayotte ou des conseillers territoriaux de Saint−Barthélemy, de Saint−Martin et de

Saint−Pierre−et−Miquelon ; qu'il abroge également, à compter de la première réunion suivant le renouvellement

partiel de l'assemblée délibérante de la collectivité départementale de Mayotte en 2011, les dispositions

organiques du même code prises sur le fondement de l'article 74 de la Constitution ; que, s'il maintient en

vigueur, jusqu'au 1er janvier 2014, certaines de ces dispositions, cette mesure transitoire, dérogeant au

droit commun, a pour seul objet de permettre à la collectivité de Mayotte de passer du régime de l'article

74 à celui de l'article 73 sans interruption de sa gestion ; qu'eu égard à sa portée limitée et à son caractère

non renouvelable, elle n'est pas contraire à la Constitution ; que, conformément à l'article 72 de la Constitution,

les dispositions en cause pourront être modifiées par le législateur ordinaire dès la mise en place du Département

de Mayotte ; que l'article 2 n'est pas contraire à la Constitution ». En condensé, même si l’article 2 de la loi

organique du 7 décembre 2010 abroge les dispositions organiques prises sur le fondement de l’article 74C, il

n’en demeure pas moins que certaines de ces dispositions sont tout bonnement maintenues. Ce qui contredit

sensiblement la position d’Olivier Gohin qui soutient que « dans une collectivité territoriale de l'article 73,

comme Mayotte, à partir du 31 mars 2011, il n'y a pas de principe d'identité et des exceptions de spécialité : il y a

l'identité et des adaptations, voire des dérogations plus ou moins fortes à cette identité (…) » ; Olivier Gohin,

« La départementalisation de Mayotte », La Semaine Juridique Administration et Collectivités territoriales n°3,

17 janvier 2011, p.5. Il y a réellement des exceptions relevant de la spécialité législative qui restent en vigueur

dans ce nouveau département.

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même qu’il s’agit là d’un département sur le plan juridique à partir du 31 mars 201137. Le

juge constitutionnel dans sa décision n°2010-619 DC du 2 décembre 2010, justifie cette

                                                             37 Pour être exact, l’idée avancée par les autorités publiques locales et nationales selon laquelle Mayotte serait un

département depuis le 31 mars 2011 présente quelques failles qu’il convient de gloser. En effet, elle semble en

décalage avec la pratique effective de la règle du quorum. La règle du quorum impose la présence physique de

deux tiers de ses membres pour pouvoir délibérer, sans quoi la réunion « se tient de plein droit trois jours plus

tard ». (art. L 3122-1 du CGCT). Or tous les élus de la majorité présidentielle (UMP) n’étaient pas présents lors

de la réunion du 31 mars 2011. Leur absence a eu pour conséquence l’impossibilité de constituer le quorum. Le

doyen d’âge, conformément aux règles prévues dans le CGCT, après avoir constaté que le quorum n’était pas

atteint au début de la séance a mis fin à celle-ci. Les élus de l’opposition ont continué la réunion élisant ainsi à

titre symbolique le plus jeune membre qui faisait, par ailleurs office de secrétaire.

Suite à cette réunion du 31 mars 2011, Marie-Luce Penchard, ministre de l’outre-mer, et Hubert

Derache, préfet de Mayotte, ont déclaré que le département était bel et bien effectif. Cette information sera

relayée par les médias locaux et nationaux notamment Le Figaro du 31 mars 2011 qui mentionne que « l’île

devient officiellement le 101ème département français ce jeudi, malgré le report de l’élection du président de son

conseil général ». Une telle affirmation peut-elle être justifiée par le seul fait que la réunion a eu lieu ?

Autrement formulé, l’ouverture de la réunion suffit-elle à rendre effectif le « Département de Mayotte »?

Ces questions ne peuvent recevoir nécessairement qu’une réponse négative étant donné que le quorum

conditionne le déroulement de la réunion suivant le renouvellement de l’assemblée délibérante. Autrement dit

une réunion ne peut avoir lieu sans la présence de ce quorum et ce d’autant que ce dernier doit être vérifié avant

celle-ci. La régularité d’une telle réunion est remise en cause (TA, Amiens, 9 février 1988, Gainec c/ Cne de

Oissy : Lebon T.653). Le Conseil d’Etat a en effet, estimé que « le quorum doit être atteint au début de la séance

qui ne peut être régulièrement déclarée ouverte qu’après vérification du quorum » (CE, 23 mars, 1988, Lefèvre,

req. n° 89992 : Lebon 293 ; Voir également CE, ass., 11 décembre 1987, Election du président du Conseil

régional de Haute-Normandie, le Vern c/ Fossé, req. n°77054 : Lebon 415). L’analyse menée par Jean-Pierre

Courtejaire et Michel Verpeaux va également dans ce sens ; Jean-Pierre Courtejaire et Michel Verpeaux,

« L’élection des présidents des assemblées locales et le quorum », AJDA 2004, p. 954.

Cette exigence est d’autant plus importante qu’en cas de suspension de séance, le juge impose la

vérification du quorum à la reprise de celle-ci (CE 4 novembre 1936, El. De Plestant : Lebon 956), « sauf s’il ne

s’agit que d’une courte interruption de séance de pur fait » (CE, 18 novembre 1931, Leclert et Lepage).

Dans la mesure où la présence de 2/3 des Conseillers généraux est la condition sine qua non pour que le

doyen d’âge puisse procéder à l’ouverture régulière de la séance, en vertu de la règle du quorum, on peut

considérer, à juste titre que la réunion qui s’est déroulée le 31 mars 2011 à l’hémicycle Younoussa BAMANA

n’a pas permis de rendre effectif le « Département de Mayotte ». En effet, celle-ci ne pouvait valablement être

déclarée au regard des jurisprudences Lefèvre, le Vernc/Fossé. Par conséquent, il convient de répondre à

Monsieur le Préfet Hubert Derache et Mme la Ministre de l’outre-mer Marie-Luce Penchard, que le

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particularité en indiquant que le maintien en vigueur, jusqu’au 1er janvier 2014, de certaines

dispositions organiques du CGCT qui sont censées être abrogées « à compter de la première

réunion suivant le renouvellement partiel de l’assemblée délibérant de la collectivité

départementale de Mayotte en 2011 » constitue « une mesure transitoire, dérogeant au droit

commun » ayant « pour seul objet de permettre à la collectivité de Mayotte de passer du

régime de l’article 74 à celui de l’article 73 sans interruption de sa gestion38 ».

L’Île de Mayotte continue donc à hériter de la spécialité législative en dépit de la

reconnaissance juridique de son statut de département. Elle se trouve en effet, dans une

situation d’ « hermaphrodisme » constitutionnel en ce sens qu’elle est soumise aussi bien au

principe d’identité législative qu’au principe de spécialité législative. Le système fiscal reste

particulièrement révélateur puisqu’il est soumis au principe de spécialité législative, ce qui est

en totale contradiction avec ce que prévoyait l’accord de 2000. Ainsi l’accord sur l’avenir de

Mayotte de 2000 mentionnait la modernisation du système fiscal et douanier en se

rapprochant de celui de l’Hexagone et des autres DROM dès le 1er janvier 2008. Or le Pacte

pour la départementalisation de Mayotte relève qu’il existe des difficultés pratiques, justifiant

donc que « la loi, en 2007, a dû repousser l’échéance de l’identité fiscale au 1er janvier

2014 ». L’article 11 de la loi n°2010-1487 du 7 décembre 2010 relative au Département de

Mayotte dispose que « le code général des impôts et les autres dispositions de nature fiscale

en vigueur dans les départements et régions d’outre-mer sont applicables à Mayotte à compter

du 1er janvier 2014 ». Le code des douanes est également « applicable à Mayotte à compter du

1er janvier 2014 ».

Plusieurs domaines sont par conséquent soumis à une phase transitoire, notamment les

« domaines de la fiscalité, de la propriété immobilière et de l’urbanisme, de la protection

                                                                                                                                                                                              département n’est valablement effectif qu’à partir du 3 avril 2011 lors de l’élection du président du Conseil

général.

En définitive, le « Département de Mayotte » n’a pas pu être légalement constitué lors de cette première

réunion qui a suivi le renouvellement de l’assemblée délibérante en date du 31 mars 2011. En réalité, bien que

matériellement la réunion ait eu lieu, elle ne saurait être regardée comme étant régulière à la lumière des

jurisprudences précitées dès lors que son déroulement demeure profondément subordonné au respect de la règle

du quorum.

38 Décision n°2010-619 DC du 2 décembre 2010 sur la loi organique relative au Département de Mayotte (Cons.

4).

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sociale, du droit syndical, du droit de travail, de l’entrée et du séjour des étrangers, ainsi que

des finances communales ».

En définitive, force est de convenir qu’aucun territoire n’a à ce jour été soumis à un

régime transitoire avant son accession effective au statut de département. Les différents

exemples du passé nous permettent d’appuyer cette thèse. En effet, la loi de 1946 a érigé les

quatre villes colonies en département sans conditions préalables, tout comme la loi du 19

juillet 1976 avait érigé Saint-Pierre-et-Miquelon en statut de département39, là aussi sans

conditions préalables. On peut également évoquer l’exemple des Saint-Martin et Saint-

Barthélemy qui ont vu leur statut constitutionnel évolué sans conditions préalables. Ces deux

territoires sont passés du statut de département au statut de collectivité outre-mer régis par

l’article 74 en vertu de la loi organique du 21 février 200740 sans observer une quelconque

période transitoire. Mayotte constitue, en n’a pas douté, la seule collectivité qui reste soumise

à un régime transitoire. A cet égard le rapport Jacques Foch du 29 mars 2001 est synonyme de

limpidité en ce qu’il mentionne que « la mise en œuvre du statut de collectivité

départementale doit ouvrir une période transitoire pendant laquelle Mayotte aura la possibilité

de se rapprocher le plus possible du droit commun de la République dans tous les secteurs41 ».

Par conséquent elle demeure soumise au respect d’un calendrier particulièrement critiqué (par

les élus locaux) et critiquable, eu égard à l’analyse qui précède. La CREC, à qui revient la

lourde tâche de doter la population de Mayotte d’une « identité incontestable » doit, par

exemple, achever ses travaux de révision de l’état-civil avant la fin du mois d’avril 201142.

                                                             39 Loi n°76-664 du 19 juillet 1976 relative à l’organisation de Saint-Pierre-et-Miquelon, JORF du 20 juillet 1976,

p. 4323.

40 Loi organique n°2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à

l’outre-mer, JORF du 22 février 2007.

41 Voir le rapport (AN) n°2967 de Jacques Floch du 29 mars 2001 sur le projet de loi n°2932 relatif à Mayotte, p.

19.

42 Afin de s’assurer que la CREC pourra honorer ses travaux dans le délai qui lui est imparti, le législateur a

assoupli les règles relatives au fonctionnement de cette administration de mission, tout en insérant une limitation

dans le temps de la possibilité de la saisir. Cette possibilité fait obstacle à toute saisie de la CRECE depuis le 31

juillet 2010. Voir en ce sens, l’article 57 de la loi n°2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement

économique des outre-mer (LODEOM), JORF n°0122 du 28 mai 2009, p. 8816.

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Au demeurant la soumission de cette île au respect d’un programme particulier avant

son érection au statut de DROM, prolonge le régime transitoire dans lequel ce territoire est

inextricablement enlisé depuis quelques décennies. Le maintien et la mise en vigueur d’un

certain nombre de mesures qui ne sont plus appliquées ou qui n’ont encore jamais été

appliquées dans une autre collectivité territoriale en font une parfaite collectivité

départementale expérimentale.

B) Une parfaite collectivité départementale expérimentale

L’un des éléments les plus frappants pour un juriste, une fois à Mayotte, c’est la

particularité remarquable dont hérite cette île d’un point de vue fonctionnel. Il faut remonter à

la période marquée par les vicissitudes qui ont jalonné cette île à la suite de l’accession des

îles voisines à la pleine souveraineté internationale pour mieux cerner en quoi Mayotte

demeure une terre d’expérimentation juridique. En effet, suite à l’accession des Comores à

l’indépendance, la loi n°75-1337 du 31 décembre 1975 prévoit la consultation des mahorais si

une majorité des suffrages exprimés manifestait son maintien au sein de la République. La

consultation interviendra le 8 février 1976, et conformément à la loi du 31 décembre 1975, les

mahorais manifestent leur souhait (63,8%) de voir l’île au Lagon érigé en statut de

département, en refusant le maintien du statut de territoire d’outre-mer hérité de la IVème

République.

L’Île de Mayotte se voit donc dotée d’un statut provisoire par la loi du 24 décembre

1976 après la consultation de février 1976 qui s’est soldée par une majorité de 99,4% en

faveur du maintien de l’Île au sein de la République. Dès lors vont se succéder une série

d’expérimentation faisant de ce territoire ultra-marin une terre d’expérimentation par

excellence43.

In globo, il s’agit des textes ou institutions qui ont montré leur faille dans l’Hexagone

et de ce fait ne sont plus appliqués, mais qui trouvent une autre vie à Mayotte. Ce qui a pour

conséquence de sombrer cette île, tant protégée par Younoussa Bamana, Zaïna M’déré et bien

d’autres figures emblématiques, dans la situation qu’était la France dans les années soixante-

                                                             43 On peut évoquer, en guise d’illustration, le seul cas connu sous la Vème république d’un préfet élu et non

nommé par décret présidentiel. En effet, Younoussa Bamana a été le seul préfet élu qu’a connu l’histoire de la

Vème République.

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dix. Il peut s’agir également des textes et institutions inédits qui sont appliqués seulement à

Mayotte dont certaines sont justifiées par le principe de la spécialité législative. On peut, en

guise d’illustration, évoquer l’existence à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon d’un

Tribunal supérieur d’appel qui dispose des compétences comparables à celles des cours

d’appel situées dans le reste de la France, y compris l’outre-mer. Pourquoi ne pas l’appeler

simplement une cour d’appel, comme les autres, d’autant que la définition donnée par le

ministère de la justice semble admettre que cette juridiction correspond « en métropole à la

cour d’appel »? On peut également se référer à la création de la Commission de révision

d’état-civil (CREC), qui a pour objet de revoir en profondeur l’identité locale des mahorais.

Il existe donc une kyrielle d’expérimentations qui sont toujours d’application à

Mayotte, mais dans le cadre de cette étude, nous retiendrons trois séries d’expérimentation.

Première expérimentation notable, c’est le statut lui-même qui n’a jamais existé

auparavant. Un statut sur mesure dont le fondement est l’article 72 de la Constitution va être

octroyé à cette collectivité. La loi n°76-1212 du 24 décembre 1976 précitée va en effet doter

Mayotte d’un statut sui generis, qui va connaître un fonctionnement administratif atypique.

On notera au passage la précision du législateur du 22 décembre 1979 selon laquelle « l’île de

Mayotte fait partie de la République française et ne peut cesser d’y appartenir sans le

consentement de sa population ». Une antienne qui sonne bien à Mayotte et qui a le mérite de

rasséréner la population locale, tout en permettant au gouvernement d’adopter une attitude

très critiquable dans l’absolue mais qui ne sera pas décriée par les mahorais.

Cette précision introduite par le législateur semble particulièrement superfétatoire dès

lors que l’appartenance de Mayotte à la République a été verrouillée par le constituant de

1958. En effet, l’article 53 de la Constitution verrouille définitivement l’appartenance des

outre-mers au sein de la République dans la mesure où il dispose que « nulle cession, nul

échange, nulle adjonction de territoire n’est valable sans le consentement des populations

intéressées ». Le Conseil constitutionnel souligne sans équivoque dans sa décision n°75-59

DC du 30 décembre 1975 que « l'île de Mayotte est un territoire au sens de l'article 53 ». Et

par conséquent, ainsi qu’a jugé le Conseil des sages, « cette île ne saurait sortir de la

République française sans le consentement de sa propre population44 ».

                                                             44 Décision n°75-59 DC du 30 décembre 1975, sur la loi relative aux conséquences de l’autodétermination des

îles des Comores, JO du 3 janvier 1976, p. 182.

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Mais comme à l’accoutumée, dire au mahorais que Mayotte ne cessera d’appartenir à

la France sans leur consentement ou pour reprendre la formule du président de la République

Nicolas Sarkozy qu’ils sont « français depuis 1841, c’est-à-dire depuis plus longtemps que

Nice ou que la Savoie » et qu’il faille pour cela « faire la départementalisation », constitue

une éloquence tribunitienne et donc un moyen subtile pour les gouvernements d’haranguer la

population. Derrière ce laïus on peut y voir une manœuvre politicienne visant à assurer une

majorité de suffrages lors des prochaines échéances électorales, comme le démontre assez

clairement le discours du sénateur Soibahadine Ibrahim. Celui-ci martelait sans ambages, en

parlant de la départementalisation de Mayotte initiée par le président de la République, que

« Nicolas Sarkozy n’était pas obligé de le faire si l’on se réfère à la pratique de ses

prédécesseurs depuis la présidence de Valéry Giscard d’Estaing, aucun d’entre eux n’a

respecté les termes de la loi de 1976 et de 1979. S’il l’a fait c’est qu’il attend le retour de

l’ascenseur ». Il faut que les « mahorais lui accordent majoritairement leurs suffrages en 2012,

s’il est candidat à sa propre succession à la Présidence de la République ».

Une deuxième expérimentation peut être soulevée, il s’agirait du fonctionnement

atypique des administrations mahoraises et l’instauration des mesures qui ne sont plus

d’application dans l’Hexagone. Sans prétendre à l’exhaustivité, on peut évoquer deux

exemples patents, la patente et le SMIG (salaire minimum interprofessionnel garanti).

S’agissant de la patente, elle constitue une taxe issue de l’article 7 des lois du 2-17 mars 1791,

connu sous le nom du décret d’Allarde instituant le principe de la liberté du commerce et de

l’industrie. Ce texte, de portée fiscale, va établir le droit de la patente qui sera supprimé par la

suite par la loi du 29 juillet 1975. Or cette loi sera ressuscitée à Mayotte et connaîtra une

application effective pendant quelques temps, puisqu’elle est toujours en vigueur à ce jour. En

ce qui concerne le SMIG, celui-ci a été instauré le 11 février 1950 et remplacé par le SMIC

(Salaire minimum interprofessionnel de croissance) le 2 janvier 1970 lequel s’applique sur

tout le territoire métropolitain, dans les DROM et dans les collectivités d’outre-mer de Saint-

Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Il ne s’applique donc pas à

Mayotte. Cette dernière se voit imposer le SMIG qui constitue un régime obsolète et

particulier justifiant ainsi les écarts des salaires entre l’Hexagone et l’Île au Parfum.

Troisième expérimentation, il conviendra d’évoquer le statut transitoire introduit en

2001 qui va, certes aboutir à un statut stable, mais qui là encore va constituer une première

pour la République française. En effet, si la loi organique du 7 décembre 2010 érige cette

collectivité territoriale en « Département de Mayotte », il n’en est pas moins vrai que l’Île va

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constituer la première collectivité territoriale unique substituant ainsi à un département et à

une région d’outre-mer. L’Île de Mayotte « sera la première à devenir département et région

sous forme d’une collectivité unique ». Une manœuvre qui est prévue par la révision

constitutionnelle du 28 mars 2003 et la loi organique du 1er août 2003 relative à

l’expérimentation par les collectivités territoriales. Mais c’est essentiellement la loi n°2010-

1563 du 16 décembre 2010 (Art. L. 4124-1) sur la réforme des collectivités territoriales qui

va encadrer cette possibilité en ce qu’elle précise qu’ « une région et les départements qui la

composent peuvent, par délibérations concordantes de leurs assemblées délibérantes,

demander à fusionner en une unique collectivité territoriale exerçant leurs compétences

respectives ». Il s’agit ici des régions et départements métropolitains. S’agissant de l’outre-

mer c’est l’article 73, dernier alinéa qui va encadrer cette faculté. En effet, aux termes de

l’article 73 de la Constitution, « la création par la loi d’une collectivité se substituant à un

département et une région d’outre-mer ou l’institution d’une assemblée délibérante unique

pour ces deux collectivités ne peut intervenir sans qu’ait été recueilli, selon les formes prévues

au second alinéa de l’article 72-4, le consentement des électeurs inscrits dans le ressort de ces

collectivités45 ».

Il résulte de ces dispositions que la transformation d’un DROM en collectivité unique

est strictement subordonnée au consentement de la population. Que s’est-il passé pour

Mayotte ? Comment s’est-elle retrouvée à expérimenter en avant-première cette réforme sur

les collectivités territoriales ? Pour mieux répondre à ces questions, il convient de situer le

propos dans le contexte du 29 mars 2009. Il s’agit là d’une date fatidique, historique pour les

mahorais puisqu’elle marque la dernière consultation de la population sur la transformation de

Mayotte en département.

Conformément à l’accord sur l’avenir de Mayotte et au Pacte pour la

départementalisation, les mahorais ont été appelés à se prononcer sur l’avenir institutionnel de

leur île. Il s’agit tout simplement de la mise en œuvre de l’article 72-4 de la Constitution qui

prévoit qu’ « aucun changement, pour tout ou partie de l’une des collectivités mentionnées au

deuxième alinéa de l’article 72-3, de l’un vers l’autre des régimes prévus par les articles 73 et

74, ne peut intervenir sans que le consentement des électeurs de la collectivité ou de la partie

                                                             45 Voir également la décision n°2010-618 DC du 9 décembre 2010 sur la loi de réforme des collectivités

territoriales, JO du 17 décembre 2010, p. 22181 (cons. 18).

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de collectivité intéressée ait été préalablement recueilli dans les conditions prévues à l’alinéa

suivant. Ce changement de régime est décidé par une loi organique ».

La difficulté qui s’est présentée pour le cas de Mayotte est que le gouvernement s’est

certes plié au respect de la volonté du constituant en consultant les mahorais sur leur avenir

institutionnel, mais a introduit adroitement une autre question en même temps. En sachant

pertinemment que les mahorais allaient massivement approuver le statut de département (plus

de 95% ont dit oui), le gouvernement a saisi l’occasion pour faire d’une pierre deux coups, en

leur soumettant en même temps à la question sur la transformation du DROM en collectivité

unique. Ainsi, en répondant oui au changement de Mayotte en département, ils répondent

également oui à la transformation de ce nouveau département en collectivité unique. La

question du référendum est ainsi formulée : « approuvez-vous la transformation de Mayotte

en une collectivité unique appelée « Département », régie par l’article 73 de la Constitution,

exerçant les compétences dévolues aux départements et aux régions d’outre-mer ? ».

Une lecture stricte des dispositions de l’article 72-4 (al.1 et 2) sur lesquelles se fondent

le référendum de mars 200946, permet de remettre en cause ce choix de regrouper deux

questions en une seule en ce sens qu’il semble souffrir d’incompatibilité à la Constitution. En

effet, l’article 72-4 subordonne le passage d’un régime à un autre au consentement de la

population, mais prévoit une seule consultation qui doit porter sur une seule des matières

visées à l’alinéa 2 (« une question relative à son organisation, à ses compétences ou à son

régime législatif »). A cet égard le passage précisant que « lorsque la consultation porte sur un

changement prévu à l’alinéa précédent », conforte cette idée selon laquelle la consultation de

mars 2009 est incompatible à la Constitution, au regard des dispositions de l’article 72-4,

nonobstant l’avis du Conseil d’Etat du 8 juillet 2009.

L’opportunité d’un tel choix peut également être remise en cause. Si, l’avis du Conseil

d’Etat du 8 juillet 2009 souligne qu’« aucune règle, ni aucun principe de valeur

constitutionnel, ne fait cependant obstacle à ce que ce double consentement soit recueilli au

travers d’une question unique portant sur celui des régimes d’application de l’article 73 retenu

par le Président de la République en application du second alinéa de l’article 72-4 de la

Constitution », il aurait été, en effet, plus judicieux et opportun de soumettre à la population

                                                             46 Il ne pouvait en être autrement puisque le dernier alinéa de l’article 73 n’encadre que la procédure référendaire

réservée exclusivement aux DROM.

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mahoraise à « deux questions distinctes, la première portant sur le passage à l’article 73 de la

Constitution et la seconde sur l’organisation institutionnelle proposée47 ». Certains élus locaux

à l’instar de l’ancien président du Conseil général Saïd Omar Oili n’ont pas eu le sentiment

que « le respect des exigences de clarté et de loyauté régissant toute consultation

référendaire » ait été rempli, nonobstant la position du Conseil d’Etat qui estime l’inverse.

D’ailleurs la campagne électorale était catégoriquement et strictement axée sur le statut de

département, aucun élu (local ou national) ne soulevait l’autre partie de la question, comme si

elle était inexistante48.

Ce choix de regrouper les deux questions en une seule est d’autant plus

incompréhensible pour les mahorais que le gouvernement, dans des conditions analogues, a

soumis à la Martinique et à la Guyane à deux référendums distincts. L’un portant sur leur

passage à l’article 74 de la Constitution, l’autre sur la transformation de ces deux DROM en

collectivité unique49.

Au-delà de ces considérations, les pouvoirs publics n’en ont pas moins entendu

imposer à Mayotte une expérimentation de nouveau genre. La nouvelle collectivité unique de

Mayotte soumise au régime de l’article 73, portant le nom de « Conseil général de Mayotte »

se veut être précurseur (Martinique et Guyane vont devenir Collectivité unique suite au

                                                             47 Voir l’avis du Conseil d’Etat sur la Consultation de Mayotte, du 8 janvier 2009, qui soulevait cette

interrogation.

48 Seul le statut de département faisait la « une » dans les médias locaux. On notera également qu’il n’y a eu

aucun débat contradictoire durant cette campagne électorale. A cet égard, la position du président du Conseil

général Ahmed Attoumani Douchina devant les médias locaux, à la suite du dépôt de la résolution du Conseil

général du 18 avril 2008 à Paris visant à la transformation de Mayotte en département, peut extrêmement

surprendre. Celui-ci martelait en effet, que « la campagne pour le oui est déjà lancée ».

49 Le 10 janvier 2010 la Guyane et la Martinique devaient répondre à la question « Approuvez-vous la

transformation de la Guyane (ou Martinique) en une collectivité d’outre-mer régie par l’article 74 de la

Constitution, dotée d’une organisation particulière tenant compte de ses intérêts propres au sein de la

République ? ». La population de ces deux collectivités territoriales a répondu massivement "non" à cette

question (plus de 70% en Guyane et plus de 78% en Martinique pour le non). Le Gouvernement, à la suite de la

réponse négative à ce référendum, a soumis à ces deux DROM un autre référendum portant cette fois-ci sur leur

transformation en collectivité unique. « Approuvez-vous la création en Guyane d’une collectivité unique

exerçant les compétences dévolues au département et à la région tout en demeurant régie par l’article 73 de la

Constitution ». A cette question la population des deux Île de l’Océan Atlantique ont répondu oui.

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référendum de janvier 2010) et exercera les compétences dévolues au Conseil général (au

département) mais également au Conseil régional (à la région).

La difficulté insurmontable qui se pose dans ce dernier cas est qu’à la lecture des

dispositions de l’article 73 de la Constitution, la transformation de deux collectivités, que sont

le département et la région, en une collectivité unique suggère que ces deux collectivités aient

existé auparavant. Or Mayotte n’a jamais été un département et encore moins une région pour

pouvoir être soumise d’une manière drastique à la procédure prévue au dernier alinéa de

l’article 73C. Par conséquent d’un point de vue purement juridique la « Collectivité

départementale » ne pouvait se substituer à un département et une région à travers la création

d’une collectivité unique sans être frappée d’incompatibilité à la Constitution.

Mayotte demeure donc une sempiternelle terre d’expérimentation juridique, qui

parvient parfois à inspirer les autres collectivités ultra-marines, mais dont la structure incite à

rester dans l’expectative.

Nonobstant qu’elle connaisse un fonctionnement identique à celui réservé aux autres

départements, Mayotte demeure une collectivité départementale jusqu’au 31 mars 2011. Une

collectivité territoriale qui a l’apparence d’un département sans réellement avoir la

fonctionnalité d’un département, telle se résume la situation particulière de Mayotte jusqu’au

31 mars 2011. On peut même indiquer sans crainte qu’il s’agit en réalité d’une collectivité

départementale expérimentale, qui doit à terme laisser place à un département au sens de

l’article 73 de la Constitution.

En définitive la situation assez inédite dans laquelle se trouve Mayotte permet non

seulement d’affirmer que ce territoire se trouve dans une phase perpétuellement transitoire,

mais aussi d’avancer que la particularité territoriale peut imposer (à une moindre mesure) au

constituant un comportement adapté. La particularité du « Département de Mayotte », qui

peut résider dans son appellation, ne gomme pas totalement le sentiment mitigé que ce statut

provoque. D’une part l’on a tendance à assigner un dessein autre que celui qui doit être celui

d’un département français, comme l’a fait maladroitement Michèle Alliot-Marie à la veille du

référendum du 29 mars 2009 en précisant « que la départementalisation avait pour but de

conforter la place de Mayotte dans la République ». Une place, rappelons-le, qui est garantie

d’une manière infrangible par le constituant, indépendamment du statut constitutionnel de

l’Île. D’autre part les élus locaux se sont longuement laissé émouvoir, sinon bercer par les

effets d’une sorte de "main invisible", pour reprendre l’expression d’Adam Smith, qui

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pourrait résorber les difficultés (juridiques, politiques, économiques et sociales) existant

actuellement sur le territoire, par un geste automatique, naturel provoqué par la seule

départementalisation de Mayotte. Autant admettre, une telle attitude conduirait probablement

ce 101ème département et 5ème DROM à une apoplexie foudroyante et donc à un échec

regrettable rappelant les mauvais souvenirs de l’expérience de Saint-Pierre-et-Miquelon50

(1976-1985).

Si le statut de département conféré à ce territoire ultra-marin marque irréfragablement

« la fin d’un combat souvent difficile, tout en ouvrant une phase nouvelle », il n’est dès lors

pas surprenant que sa réussite demeure tributaire à l’implication nationale et locale dans sa

construction. Seule, en effet, une implication accentuée et appropriée des uns et des autres

pourrait sortir Mayotte de sa perpétuelle phase de transition en permettant à cette Île de

conquérir une place louable sur le plan national voir même sur le plan de l’Union (Mayotte

étant l’un des 6 PTOM51 les plus pauvres). Ce faisant, il conviendra, en définitive de tirer

profit des mécanismes juridiques et économiques prévus en droit national et sortir ce territoire

de sa phase transitoire, pour pouvoir prétendre tirer profit des mécanismes, pour le moins

contraignants, prévus en droit de l’Union, lors de l’éventuelle érection de Mayotte en statut de

RUP52 (région ultrapériphérique).

                                                             50 Ce territoire ultra-marin a été érigé en département d’outre-mer par la loi du 17 juillet 1976 malgré

l’opposition de la population locale. Un statut qui s’est avéré inadapté aux réalités locales et qui a été mal

accueilli par la population locale parce qu’il suggérait l’application contraignante du régime douanier de l’Union,

rendant donc improbable la relation de cette Île avec le Canada. L’échec de ce statut a précipité le gouvernement

à doter ce territoire de l’ancien statut de TOM dont il héritait auparavant.

51 Les Pays et territoires outre-mer (PTOM) désignent les territoires qui sont seulement associés à l’Union et

relevant de la souveraineté d’un Etat membre.

52 Une possibilité qui est ouverte par l’article 355, paragraphe 6 TFUE qui introduit une clause passerelle

permettant le passage du statut de PTOM au statut de RUP et inversement, sans la révision du traité. Voir

également Rakotondrahaso Faneva, « Mayotte, le statut de pays et territoire d’outre-mer de l’Union : un pis-

aller ? » Revue juridique de l’Océan Indien, Novembre 2009, pp. 73-91.

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