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91 BIS RUE DU CHERCHE MIDI75006 PARIS - 01 53 63 55 55

04 MARS 13Hebdomadaire Paris

Surface approx. (cm²) : 680N° de page : 28-29

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DS6738945300506/LBO/OTO/3

Eléments de recherche : DS AVOCATS ou CABINET DS AVOCATS : droit des affaires, toutes citations

Entreprise et expertise Juridique

«Détourage», «carve-out», «spin-off»... la fin de l'exception française ?

2012 a été riche en jurisprudence sur lesopérations de détourage et ses modalités

pratiques, notamment les opérationsd'apports partiels d'actifs. Il n'a, par ailleurs,échappé à personne que la fiscalité des plus-

values a été et reste un sujet de vif débat etde profondes évolutions. Sommes-nous à laveille d'un retour en force des «asset deals»

ou cessions d'actifs, qui marquerait la find'une exception française privilégiant les

«share deals» ou cessions d'actions ?

Par Bernard Tézé,avocat associé,DS avocat

1. Cession d'actifs vs. cession d'actionsLes groupes d'entreprises sont des organismes vivants etdoivent se séparer d'activités qui nentrent plus dans le cadrede leur stratégie pour en acquerir des nouvelles ou pourreduire le volume Les operations de détourage au sens largesont donc fréquentes et inévitablesNotons au passage lAccord national interprofessionnel dull janvier 2013, dans la tourmente de l'affaire Florange, quipourrait rendre impossible la fermeture d'un site ou dunefiliale sans rechercher au préalable un repreneurLarncle 12 prevoit «Lorsque lentreprise envisage, rndepen

damment de tout projet de cession, sa fermeture, celle d'unetablissement, d'un site ou dune filiale, il convient denvisagerlarecherche de repreneurs des l'annonce du projet de fermeture»Le Comite dentreprise peut se faire assister par des expertsLes entreprises devront montrer quelles ont cherché des>repreneurs des l'annonce du projet, et les fermetures motivéespar des réductions de surcapacités seront plus compliquéesII existe plusieurs moyens juridiques de se séparer d une acti-vite («carve-out») il peut s'agir dune cession d'actifs, d'unecession dactions ou encore d'apports d'actifs a une nouvelleentité dont les actions sont cédées («sprn off»)D est demblée intéressant de noter que la pratique françaiseest sensiblement différente de celle en cours ailleurs Alors

que dans la plupart des autres pays les operations de cession

dactifs sont prédominantes, elles sont nettement moins

fréquentes en France que les operations de cession dactions(précédées le cas échéant d'apports dactifs à une societenouvelle) Cela constitue une sorte «deception française»

2. Vers une normalisation de l'exception française ?Plusieurs facteurs pourraient aboutir a un rééquilibrage entreles cessions dactifs et les cessions dactions, et à une «normaksanon de la pratique française»

On se rappelle qu'il y a 20 ans, les cessions de fonds de

commerce supportaient des droits d'enregistrement de 16,6 %sur le «goodwill» et sur les actifs immobilisés.Cette taxation fort élevée, couplée au lourd formalisme dela cession de fonds de commerce, avec ses mentions obli-gatoires, publications, formalités de séquestre et annexesenumerant chaque element dactif, suscitait letonnement denos partenaires étrangers Expliquer a une multinationaleaméricaine que le «deal» négocie pour le monde entier doitêtre soumis juste pour la France à un formalisme datant de1909 et 1935, est un moment de bravoure 'Pour autant, il est plus naturel et moins risque juridiquementd'acquérir des actifs plutôt que devoir reprendre un passifsocial, source d'incertitudes et de garanties a négocier Deplus, dans certains pays, le «goodwill» est amortissable etgénère pour l'acquéreur des déficits fiscaux compensables surdes profits futursIbbstacle ke au coût des droits d'enregistrement a ete progres-sivement résorbe, puisque ces derniers sont passes de 16,6 %a 11,4 %, et sont actuellement de 3 % jusqu'à 23 DOO euros et5 % au-delà, ce qui est comparable au droit applicable en casde cession de parts sociales, cest-a-dire 3 % (avec abattementde 23 DOO euros) Les cessions dactions autres que celles desocietes a prépondérance immobiliere sont désormais taxées

a 0,1 % sans plafond. De nombreux pays prélèvent des «stamp

duties» comparables et ces droits ne sont plus un obstacle

insurmontable

3. Une originalité française, l'effet TURLe regime juridique des cessions de fonds de commerce n'a

pourtant pas éte simplifie et pâtit de la comparaison avec unmécanisme, cette fois tres novateur du droit français, leffet trans-

mission universelle de patrimoine («effet IUP») résultant dapports partiels dactifs soumis au regime des scissions («APA»)

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04 MARS 13Hebdomadaire Paris

Surface approx. (cm²) : 680N° de page : 28-29

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Eléments de recherche : DS AVOCATS ou CABINET DS AVOCATS : droit des affaires, toutes citations

Il faut savoir que cet effet IUP des APA est ignore auRoyaume-Uni et aux Etats-Unis où, en cas de transfert d'acti-vité, les contrats doivent être transférés un a un sous la formede cession ou de novaùon, avec accord du cocontractant dansla plupart des cas Cela est source de lourdeurs (et de «fées»conséquents ')

La France est en avance depuis la loi de 1966 (article 387devenu L 236-22 du Code de commerce) qui a permis l'op-tion en cas d'apport partiel dactifs pour le régime des scis-sions, l'article 210 B du CGI et une suite de décisions de laChambre commerciale validant leffet IUP le 16 février 1988Même dans un cas ou une personne morale survit, une IUP«partielle» d'une personne juridique qui reste «vivante» à une

autre peut être organisée valablementlèffet TUP est un peu «magique» en ce qu'il transmet despassifs sans accord du créancier, fl s'appuie sur le concept de«branche autonome et complète d'activité», défini par aucuntexte légal, qui donne heu à une importante jurisprudencefiscale, commerciale, pénale et sociale visant à déterminerce qui est réellement transmis - le périmètre de l'apport - encas de silence ou d'ambiguïté fl est usuel de stipuler l'absencede solidarité entre l'apporteur et le bénéficiaire Les passifs

connus ou non sont donc censés suivre la «branche»

4. Remise en cause jurisprudentielleCet effet TUP semble cependant remis en question par desdécisions récentes. Le ll septembre 2012, la Cour de cassa-tion a par exemple annulé une TUP régulièrement publiée aumotif quelle aurait eu un caractère frauduleux (voir l'articledans ce numero). Dans un avis du 13 juillet 2012, le Conseild'Etat a considère que dans le cas où certains membres dupersonnel nécessaires a la poursuite de lexploitation refu-saient le transfert il convenait d'apprécier au cas par cas si letransfert de la branche avait un caractère «complet» ou pasDans un arret GDF Suez Energie Services du 16 mai 2012, leConseil d'Etat a considère «qu'en s'abstenant d'examiner si...la détention de parts de GIE en permettait le contrôle et silactivite du GIE était susceptible de faire lobjet d'une exploitaùon autonome, la Cour a commis une erreur de droit et sonarrêt doit être annule» La notion de branche autonome etcomplète est donc vérifiée de maniere plus attentivePlusieurs decisions de la Cour, 11 mars et 7 avril 2011 notam-ment, en matiere de maladies professionnelles, ont remis en

cause leffet TUP afin de mieux protéger les salariés La sociétéapporteuse BP France a dû nonobstant les stipulations d'untraite dAPA garantir la caisse des conséquences financières

d'une faute «inexcusable». Le salarié n'a pu se voir opposer

la TUP et pourra agir contre le cédant et le cessionnaire de

la brancheLes contrats intuitu personae ne sont par ailleurs pas transmis,et les autorisations administratives sont rarement transmisesautomatiquement Leffet TUP est-il vraiment si avantageuxpar rapport a une cession d'actifs?

La rétroactivité comptable et fiscale peut être un atout deleffet TUP (maîs la rétroactivité juridique est une fiction).Un inconvénient est le transfert de passifs inconnus, non

mesurés, parfois de nature pénale, qui incite à des audits plus

approfondis et coûteux. Un transfert plus «rustique» des actifset de contrats pourra s'avérer sécurisant, surtout pour desinvestisseurs étrangers.

5. L'alourdissement de la taxation des cessionsde titresDu point de vue fiscal, les «share deals» étaient traditionnelle-ment préférés car en général nettement plus avantageux,fl est cependant patent que la taxation des plus values réalisees par les personnes physiques sur les cessions de titresest en forte augmentation Elle est passée de 27 % fin 2007 a30.1 % fin 2010, puis a 32,5 % fin 2011 (19 % de prélèvementforfaitaire plus 13,5 % de CSG/CRDS), et enfin à 39,5 % fin2012 (24% de prélèvement forfaitaire plus 15,5 % de CSG/GRDS)A compter du 1er janvier 2013, ces plus-values sont impo-sables, sauf cas particuliers (régime de faveur des «créateursdentreprise», PEA, non-résidents, départs à la retraite, etc.),

au barème progressif de TIR, apres abattement de 20 % pourles titres détenus entre 2 et 4 ans, 30 % entre 4 et 6 ans et 40 %depuis plus de 6 ans Soit des taux respectivement d'environ

44.2 %, 48,7 % et 53,2 % (dans le meilleur des cas, au tauxmarginal maximal, en forfaitisant la déduction de la CSGet en comptant la contribution exceptionnelle sur les hautsrevenus) Le taux global sans abattement est de 62,2 %Pour les cessions d'actions entre sociétés, la situation est plussereine, maîs on constate une augmentation sensible de laquote-part de frais et charges qui est passée de 5 % à 10 %puis 12 % cette année Cela aboutit à une taxation effectivede lordre de 4 % au heu de 1,7 % environ auparavant, avec untaux dis de 33 1/3%fl nes! plus aberrant pour une personne physique cédant sonentreprise d'envisager une cession dactifs de sa societe a unacquéreur, voire une location-gérance, plutôt que de lui céderdirectement les titres qu'il détientLe calcul doit être fait attentivement avec laide de fiscalistes,en évaluant lensemble des hypothèsesL'idée d'une cession (ou location-gérance) dactifs est de trans-mettre lentreprise et le risque économique ke à lactivité enrecevant a la place une plus value ou un revenu fixe dans lasociete cédante, qui les fera fructifier ou les réinvestira, en profi-tant d'un taux d'IS resté entre 33 1/3 % et 36 % selon les cas

Cela revient a se constituer une «cagnotte» en ne distribuant

pas ou peu les revenus ou plus values perçus par la sociétécédante Les dividendes sont quant à eux soumis au barèmeprogressif de TIR après abattement de 40 % (sous conditionsd'application prévues par la loi) Le montant brut est égale

ment soumis, en plus des prélèvements sociaux applicables,

à un prélèvement obligatoire forfaitaire non libératoire de21 %, maîs imputable sur le montant de TIR progressif Letaux global d'imposition serait alors compris entre 44,2%et 62,2 % selon que l'abattement est applicable ou non (et

toujours au taux marginal maximal, en forfaitisant la déduc-tion de la CSG et en comptant la contribution exceptionnellesur les hauts revenus)Cette cagnotte permet d'investir en attendant des jours fisca-lement meilleurs, les lendemains qui chantent ! •