os territoires le mur de soutènement 3 | la maçonnerie en ... · le mur de clôture le mur de...

3
La technique de construction en pierre sèche qui consiste à assembler sans mortier est ancestrale. En traversant les siècles, elle a prouvé sa résistance et son efficacité. Aujourd’hui, elle se révèle innovante et support de développement durable. Montée sans liant, sa solidité ne dé- pend que de l’équilibre entre les pierres. Un agencement extrême- ment soigneux est la condition d’une bonne tenue dans le temps. Il faudra être attentif à bien harper le mur, c’est-à-dire liaisonner les pierres de l’avant à celles de l’arrière à l’aide des boutisses* (et de bien suivre la règle de croise- ment des joints. MATERIAUX En Pays Sud Creusois, on trouve essentiellement du granite du gneiss et du schiste. Les pierres utilisées pour la construction des murs viennent en grande partie de l’extraction. En surface la pierre quand elle est faillée, peut presque s’extraire à la main. Au-delà, on utilise des coins, une barre à mine ou de l’explosif. Suivant la nature du sous-sol, les pierres peuvent également pro- venir de l’épierrage des champs. TYPOLOGIES A l’état naturel, la pierre est presque prête à poser. C’est cette matière première qui conditionne le mur et la technique que l’on va utiliser, en fonction de la grosseur du grain et de sa dureté. On rencontre donc différentes typologies de mur adaptées à chaque situation. Du plus simple au plus perfectionné, on distingue trois grands types de murs : le mur de clôture, le mur à double parement, le mur de soutènement. Le mur de clôture Le mur de clôture est le plus souvent constitué d’un simple em- pilement, amoncellement de pierres. Le mur à double parement Le mur à double parement est un ouvrage bien plus minutieux qui présente deux faces soignées. Le mur de soutènement Ce type de mur permet de retenir les terres. Il est qualifié de mur poids. C’est-à-dire que la fonction de soutènement est assurée par le poids propre du mur qui équilibre la poussée des terres en imposant de fortes contraintes au premier tiers de la hauteur. Dans la partie haute du mur, la poussée est moins importante, on peut donc légèrement en réduire l’épaisseur. Au fur et à mesure que l’on monte, le mur sera moins épais, faisant apparaître un léger fruit* sur le parement extérieur. Restaurer, Réhabiliter, Rénover sur le Pays Sud Creusois 3 | La maçonnerie en pierre sèche, pratique durable pour nos territoires *Boutisses : Les boutisses sont des pierres qui montrent leur plus petite face et traverse une grande partie du mur, afin d’en assurer la cohésion. Une boutisse qui traverse le mur de part en part s’appelle un parpaing.. *Fruit : pour renforcer la stabilité d'un mur, on déplace son centre de gravité vers l'arrière; pour cela on fait pencher le mur légèrement vers l'intérieur. C'est cette inclinaison que l'on appelle le fruit.

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Page 1: os territoires Le mur de soutènement 3 | La maçonnerie en ... · Le mur de clôture Le mur de clôture est le plus souvent constitué d’un simple em- pilement, amoncellement de

La technique de construction en pierre sèche qui consiste

à assembler sans mortier est ancestrale.

En traversant les siècles, elle a prouvé sa résistance et son

efficacité. Aujourd’hui, elle se révèle innovante et support

de développem

ent durable. M

onté

e sa

ns li

ant,

sa s

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ité n

e dé

-

pen

d qu

e de

l’é

quili

bre

entr

e le

s

pie

rres

. Un

agen

cem

ent

extr

ême-

men

t so

igne

ux

est

la

cond

itio

n

d’un

e bo

nne

tenu

e da

ns le

tem

ps.

Il fa

udra

êtr

e at

tent

if à

bien

har

per

le m

ur,

c’es

t-à-

dire

lia

ison

ner

les

pie

rres

de

l’a

vant

à

celle

s de

l’arr

ière

à l’

aide

des

bou

tisse

s *(e

t

de b

ien

suiv

re l

a rè

gle

de c

rois

e-

men

t des

join

ts.

MATE

RIA

UX

En P

ays

Sud

Cre

usoi

s, o

n tr

ouve

ess

enti

elle

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t du

gra

nite

du

gnei

ss e

t du

schi

ste.

Les

pie

rres

util

isée

s po

ur la

con

stru

ctio

n de

s

mur

s vi

enne

nt e

n gr

ande

par

tie d

e l’e

xtra

ctio

n. E

n su

rfac

e la

pie

rre

quan

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le e

st f

aillé

e, p

eut

pres

que

s’ex

trai

re à

la m

ain.

Au-

delà

,

on u

tilis

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s co

ins,

une

bar

re à

min

e ou

de

l’exp

losi

f.

Suiv

ant l

a na

ture

du

sous

-sol

, les

pie

rres

peu

vent

éga

lem

ent p

ro-

veni

r de

l’ép

ierr

age

des

cham

ps.

TYPOLO

GIES

A l’

état

nat

urel

, la

pie

rre

est

pre

sque

prê

te à

pos

er. C

’est

cet

te

mat

ière

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miè

re q

ui c

ondi

tionn

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mur

et l

a te

chni

que

que

l’on

va u

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n fo

nctio

n de

la g

ross

eur

du g

rain

et d

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dur

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On

renc

ontr

e do

nc d

iffér

ente

s ty

pol

ogie

s de

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ada

pté

es à

chaq

ue s

ituat

ion.

Du

plus

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ple

au p

lus

perf

ecti

onné

, on

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ingu

e tr

ois

gran

ds

type

s de

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s :

• le

mur

de

clôt

ure,

• le

mur

à d

oubl

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rem

ent,

• le

mur

de

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ènem

ent.

Le m

ur de clôture

Le m

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ôtur

e es

t le

plu

s so

uven

t co

nstit

ué d

’un

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em-

pile

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t, am

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llem

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erre

s.

Le m

ur à dou

ble pa

remen

tLe

mur

à d

oubl

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rem

ent

est

un o

uvra

ge b

ien

plus

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utie

ux

qui p

rése

nte

deux

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s so

igné

es.

Le m

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emen

tC

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pe d

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erm

et d

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teni

r le

s te

rres

. Il e

st q

ualif

ié d

e m

ur

poid

s. C

’est

-à-d

ire

que

la fo

nctio

n de

sou

tène

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t est

ass

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par

le p

oids

pro

pre

du

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qui

équ

ilibr

e la

pou

ssée

des

ter

res

en

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sant

de

fort

es c

ontr

aint

es a

u pr

emie

r tie

rs d

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hau

teur

.

Dan

s la

par

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aute

du

mur

, la

pous

sée

est m

oins

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rtan

te, o

n

peut

don

c lé

gère

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t en

réd

uire

l’ép

aiss

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Au fu

r et

à m

esur

e

que

l’on

mon

te, l

e m

ur s

era

moi

ns é

pai

s, f

aisa

nt a

pp

araî

tre

un

lége

r fr

uit *

sur

le p

arem

ent e

xtér

ieur

.

Re

sta

ur

er

, R

éh

ab

ilite

r, R

én

ov

er

s

ur

le

P

ay

s S

ud

C

re

us

ois

3 | La

maço

nnerie en p

ierre sèch

e, pra

tique d

ura

ble

pour nos te

rritoires

*Bo

uti

sses

: Les

bou

tiss

es son

t des

pie

rres

qui m

ontr

ent l

eur

plus pe

tite

face

et t

rave

rse

une

gran

de p

artie

du m

ur,

afin

d’e

n a

ssure

r la

coh

ésio

n.

Une

boutiss

e qu

i tra

vers

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mur

de p

art e

n p

art s

’app

elle

un p

arpa

ing.

.

*Fru

it: p

our

renfo

rcer

la st

abili

té d

'un m

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épla

ce so

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entr

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gra

vité

ver

s l'a

rriè

re; p

our

cela

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it p

ench

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légè

rem

ent v

ers l

'inté

rieu

r. C'e

st c

ette

incl

inai

son q

ue

l'on a

ppel

le le

fruit.

Page 2: os territoires Le mur de soutènement 3 | La maçonnerie en ... · Le mur de clôture Le mur de clôture est le plus souvent constitué d’un simple em- pilement, amoncellement de

PLU

SIEU

RS TY

PES

D’A

PPAREILL

AGE

Que

l qu

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it l

e ty

pe

de m

ur,

on r

enco

ntre

diff

éren

ts t

ypes

d’ap

pare

illag

e.

Opu

s incertum

Le m

ur d

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ôtur

e ou

mur

de

cham

ps e

st s

ouve

nt c

onst

itué

d’un

empi

lem

ent d

e pi

erre

s pl

us o

u m

oins

sav

amm

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osée

s. L

a rè

gle

de b

ase

est l

a po

se d

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ais,

cha

que

pier

re v

enan

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coin

cer e

ntre

deux

aut

res.

Cet

app

arei

llage

irré

gulie

r, di

t op

us in

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um, a

une

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aren

ce

quel

que

peu

chao

tique

et r

espe

cte

la fo

rme

brut

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extr

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n.

Un ap

pareillag

e lité

A l’i

ntér

ieur

des

vill

ages

, le

mod

e co

nstr

uctif

est

dav

anta

ge s

oign

é.

On

parl

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ors

de m

ur li

té. C

ompo

sé d

e m

oello

ns a

ssis

és, u

n gr

and

soin

est

ap

por

té d

ans

le p

arem

ent.

Les

pie

rres

pos

ées

par

lit

néce

ssite

nt u

n ca

libra

ge d

e ch

acun

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entr

e el

les.

Un ap

pareillag

e cyclop

éen

Parm

i ces

mur

s ce

rtai

ns o

nt u

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pare

illag

e cy

clop

éen,

ave

c de

s

pier

res

de g

ros

volu

mes

, dép

assa

nt p

arfo

is la

tonn

e.

C’e

st l

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s de

cet

ouv

rage

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arqu

able

qui

se

situ

e su

r la

com

mun

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la V

illet

elle

, au

villa

ge d

e M

urze

ix. I

l acc

ueill

e un

sen

-

tier

d’in

terp

réta

tion

sur

l’h

isto

ire

des

maç

ons

et l’

hér

itag

e bâ

ti

qu’il

s no

us o

nt t

rans

mis

. (p

lus

de r

ense

ign

emen

t au

près

de

l’ass

ocia

tion

Bât

i et

Sav

oir-

Fair

e en

Lim

ousi

n e

t de

s of

fice

s de

touri

sme)

Re

sta

ur

er

, R

éh

ab

ilite

r, R

én

ov

er

s

ur

le

P

ay

s S

ud

C

re

us

ois

3 | La

maço

nnerie en p

ierre sèch

e, pra

tique d

ura

ble

pour nos te

rritoires

Extrait de

«LU

I BATIR UN PALA

IS» - Berna

rd BLO

T«E

lle d

emeu

ra a

baso

urd

ie e

n d

écou

vran

t le

mu

r cy

clop

éen

de

Murz

eix.

Elle

inte

rrog

ea le

s ge

ns du

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sinag

e. Il

s lu

i affi

rmèr

ent

que

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uvr

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tita

nes

que,

de

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de

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s ce

nts

cou

dées

de

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gueu

r, dr

essé

en u

n a

ppar

eilla

ge d

e bl

ocs i

rrég

ulie

rs, c

erta

ins f

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gros

, im

pecc

able

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t en

cast

rés

les

uns

dans

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autr

es, à

join

ts

vifs

, n’é

tait p

as le

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’un c

hantier

hum

ain.

Un p

auvr

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ysan

, voy

ant s

es te

rres

em

port

ées p

ar le

s ora

ges d

’au-

tom

ne

jusq

ue

dans l

a ch

arri

ère

qui l

e lo

nge

ait,

se se

rait

cru m

au-

dit d

u C

iel e

t aura

it d

eman

dé l’

aide

de

l’Em

mal

icia

t (c’

est a

insi

que

l’on d

ésig

nai

t le

diab

le, i

ci, é

vita

nt d

e pr

onon

cer

son n

om d

e

peur

qu’il

ne

surg

isse

!) p

our

érig

er c

e fo

rmid

able

con

tref

ort.»

Page 3: os territoires Le mur de soutènement 3 | La maçonnerie en ... · Le mur de clôture Le mur de clôture est le plus souvent constitué d’un simple em- pilement, amoncellement de

La te

chni

que

des

mur

s de

sou

tène

men

t en

pier

re s

èche

pré

sent

e

de m

ultip

les

inté

rêts

:

DES

QUALITE

S HYDRAULIQUES Le

s m

urs

de

sout

ène-

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t en

pie

rre

sèch

e as

-

sure

nt u

ne f

onct

ion

de

drai

n na

ture

l. En

l’abs

ence

de

m

orti

er,

l’eau

s’é

coul

e à

trav

ers

les

inte

rstic

es, d

imin

uant

d’au

tant

la

pou

ssée

des

terr

es e

t p

erm

etta

nt d

e

négl

iger

le

s cy

cles

gel/

dége

l qu

i fr

agili

sent

les

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res.

Tout

en

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etta

nt a

ux e

aux

de s

’éco

uler

, les

mur

ets

en p

ierr

e

sèch

e ra

lent

isse

nt le

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hem

inem

ent.

Les

ter

rass

es d

’un

mêm

e

vers

ant f

ont a

insi

offi

ce d

e ba

ssin

de

réte

ntio

n, li

mita

nt le

s ri

sque

s

d’in

onda

tion.

A l’

inve

rse

en c

as d

e sé

cher

esse

, elle

s se

rven

t de

ré-

serv

e d’

eau,

se

com

port

ant c

omm

e un

e gr

osse

épo

nge,

qui

res

ti-

tue

alor

s l’e

au e

mm

agas

inée

.

DES

PROPRIETE

S TE

CHNIQ

UES

Ce

type

de

mur

pré

sent

e de

s qu

alité

s de

sou

ples

se e

t de

déf

or-

mab

ilité

non

nég

ligea

bles

. Il e

ncai

sse

les

choc

s, e

t pe

ut s

ubir

de

lége

rs m

ouve

men

ts s

ans

être

dés

truc

turé

. D’o

ù sa

long

évité

.

UNE REP

ONSE

AUX P

REO

CCUPATIONS

DU D

EVEL

OPPEM

ENT DURABLE

Que

ce

soit,

pou

r la

fabr

icat

ion,

le tr

ansp

ort,

la m

ise

en œ

uvre

ou

enco

re l

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cycl

age,

ces

mur

s sa

ns l

iant

, né

cess

iten

t tr

ès p

eu

d’én

ergi

e gr

ise*

et o

nt u

n éc

obila

n*de

s pl

us fa

vora

bles

.

Par

aille

urs,

ce

type

de

mur

,

joue

un

rôle

dan

s la

bio

di-

vers

ité.

La

jour

née,

il a

ccu-

mul

e la

cha

leur

qu’

il re

stitu

e

la n

uit,

fav

oris

ant

le r

efug

e

dans

les

mul

tip

les

cavi

tés

qu’il

com

por

te à

une

vie

anim

ale.

Po

ur

les

mêm

es

rais

ons

ils s

ont à

l’or

igin

e de

la p

rése

nce

de n

ombr

eux

vég

étau

x

Not

ons

enco

re, q

ue le

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urs

en p

ierr

e sè

che

frei

nent

l’ér

osio

n et

limite

nt la

pro

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des

ince

ndie

s.

UNE VALE

UR EST

HET

IQUE ET

PAYSA

GER

ED

es

géné

rati

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de

pays

an-m

açon

ont

édi

fiés

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mur

s en

pie

rre

sèch

e

afin

d’a

mén

ager

les

pen

tes,

de fr

eine

r l’é

rosio

n, d

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oté-

ger c

erta

ines

cul

ture

s.

Ils c

ontr

ibue

nt à

la q

ualit

é

de

nos

pay

sage

s et

au

cara

ctèr

e id

enti

tair

e de

notr

e pa

ys d

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tiss

eurs

.

Ils

sont

un

co

mp

osan

t

esse

ntie

l de

notr

e pa

ysag

e

rura

l, et

en

cons

éque

nce

un

outi

l to

uris

tiqu

e

port

eur

de

déve

lopp

e-

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t loc

al.

Pou

r de

plu

s am

ples

ren

seig

ne-

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ts, u

n D

VD su

r le

s maç

onner

ies

en p

ierr

e sè

che

et l

eur

mis

e en

oeu

vre

est

disp

onib

le a

upr

ès d

e

l’ass

ocia

tion

Bât

i et S

avoi

r Fa

ire

en

Lim

ousi

n.

Re

sta

ur

er

, R

éh

ab

ilite

r, R

én

ov

er

s

ur

le

P

ay

s S

ud

C

re

us

ois

3 | La

maço

nnerie en p

ierre sèch

e, pra

tique d

ura

ble

pour nos te

rritoires

*En

ergi

e gr

ise

: co

rres

pond

à la

som

me

de to

ute

s le

s én

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es n

éces

sair

es à

la p

rodu

ctio

n, à

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abri

cation

, à l’

utilis

atio

n e

t au r

ecyc

lage

d’u

n p

rodu

it.

*Eco

bil

an

: p

erm

et d

e m

esure

r l’i

mpa

ct d

’un p

rodu

it sur

l’envi

ronnem

ent à

trav

ers l’a

nal

yse

de son

cyc

le d

e vi

e.