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ORNEMENT ET SUBLIME Qu’en est-il de l’ornementation et de sa fonction dans l’architecture contemporaine? Master Théorie et Projet /Jacques Lucan /2011 Elsa Pichon Ecole d'architecture de la ville & des territoires à Marne-la-Vallée Document soumis au droit d'auteur

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ORNEMENT ET SUBLIME

Qu’en est-il de l’ornementation et de sa fonction dans l’architecture contemporaine?

Master Théorie et Projet /Jacques Lucan /2011

Elsa Pichon

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SOMMAIRE

INTRODUCTION 2

POURQUOI ADOLF LOOS COMBATTAIT-IL L’ORNEMENT ? 5

Pourquoi rejette-t-il l’ornement? 6

Otto Wagner 8

LA FONCTION DE L’ORNEMENT DANS L’ARCHITECTURE CONTEMPORAINE 13

La réhabilition de l’ornement comme symbole dans l’architecture contemporaine 14

L’apport de l’ornement contemporain à une riche tradition, celle du revêtement 22

La recherche d’unité entre structure et ornement 28

LES AMBITIONS DE L’ORNEMENT DANS L’ARCHITECTURE CONTEMPORAINE 33

L’ornement inhérent à la recherche de la forme unitaire 34

L’ornement, outil pour parler de la mémoire 40

A quoi correspond l’ornement dans la société contemporaine? 44

CONCLUSION 48

LES AMBITIONS DE L’ORNEMENT DANS L’ARCHITECTURE CONTEMPORAINE

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La question de l’ornement dans l’architecture contemporaine est survenu lors d’un questionnement autour de la conception d’un projet. Comment aboutir à une expression forte d’un bâtiment, inhérente à la culture locale et à son contexte, notamment urbain?C’est en regardant l’architecture traditionnelle des villes et l’architecture plutôt moderne et d’après-guerre que j’ai trouvé un élément de réponse qui serait l’ornementation.Réutiliser un élément architectural qui renouerait avec une tradition vieille de 2000 ans, oublié au vingtième siècle durant les années du modernisme.

Adolf Loos explicite dès 1908 dans son ouvrage Ornement et crime les arguments du refus de l’ornement moderne fermement opposé à des mouvements de l’époque comme l’Art Nouveau. De nombreux architectes, dits modernes, adopteront, jusque dans les années 80, sauf exceptions et nuances faites, cette position critique qui considère l’ornementation comme superflue.

Mais exultons! De nombreux architectes contemporains ornementent et s’affranchissent ainsi des refus ou des non-dits hérités de l’époque moderniste. Ma première démarche a donc été de regarder en quoi consiste l’ornementation dans l’architecture contemporaine et comment elle se manifeste.L’ornement répond à trois fonctions, symbolique, de revêtement et structurelle. A quoi correspondent-elles?

Les caractéristiques qui spécifient ces bâtiments nous informe sur les raisons et les ambitions que sert cet emploi de l’ornement dans l’architecture contemporaine. A quoi correspond-t-il dans l’actualité des formes? Renvoie-t-il à une volonté d’exprimer des valeurs de la tradition? Et à quoi peut-il correspondre dans l’évolution de notre société?

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POURQUOI ADOLF LOOS COMBATTAIT-IL L’ORNEMENT ?

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Adolf Loos est né à Brunn en 1870 et mort à Vienne en 1933. On s’intéresse ici à cet architecte car il a pris position sur la question de l’ornement autour de 1908 avec un ouvrage, Ornement et crime. Il s’y oppose violemment à l’emploi de l’ornement dans l’architecture moderne et notamment à des courants tels que la Sécession viennoise, variante autrichienne du Jugendstil et de l’Art nouveau et à des associations comme le Werkbund où artistes et artisans se rejoignent pour développer en commun le domaine mixte des arts dits appliqués. Sa position contre l’ornement moderne est révélateur d’un combat éthique sur la société du début du vingtième siècle.

Pourquoi rejette-t-il l’ornement?

Tout d’abord, il estime qu’il faut vivre avec son temps et son époque est le temps du modernisme et donc du pragmatisme et du progressisme. Pour illustrer son propos Loos compare l’habillement à l’architecture. « Mais jamais on ne déambula dans des vêtements aussi beaux, aussi solides et aussi pratiques qu’aujourd’hui, c’est l’habillement originel» (Ornement et crime, p.216). Il choisit l’habit sobre et sans ornement moderne contrairement à l’armoire ornementé, il le choisit car il est créé dans l’esprit de son temps. Il pense que l’époque dans laquelle il vit n’a pas d’ornements et il veut être en concordance avec ça. Pour lui, les architectes sont en marge de cette nouvelle société, « Si vous désirez avoir un travail manuel conforme au temps, si vous voulez des objets d’usage conformes au temps, eh bien, empoisonnez les architectes.» (Ornement et crime, p.210).

Ensuite, il prône l’économie. « L’ornement signifie un surcroît de travail.» (Ornement et crime, p.245). Pour lui, l’ornementation signifie gaspillage. «L’ornement est de la force de travail gaspillée, et par de là de la santé gaspillée. Il en fut toujours ainsi. Mais de nos jours, l’ornement signifie

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aussi du matériau gaspillé, et les deux choses réunies veulent dire du capital gaspillé.» (Ornement et crime, p.80) L’homme du vingtième siècle fait des économies et l’autre, l’homme du dix-huitième siècle, des dettes; infliger à l’homme un travail superflu est selon lui non moderne.

De plus, il milite pour une vérité du matériau c’est-à-dire pour son expression la plus pure et la plus simple. Il se sent proche de l’artisan qui travaille les qualités esthétiques propres au matériau non gâché par des dessins graphiques inutiles. « N’oublions pas que le noble matériau et le bon travail ne font pas que compenser l’ornementation manquante, mais qu’ils la dépassent de loin en délicatesse. [...] Les temps passés ne savaient point apprécier le matériau comme nous le ressentons, nous.» (Ornement et crime, p.213)

Il rejette aussi l’ornement car c’est selon lui un effet de mode qui ne dure pas, cinq ans après la livraison du bâtiment ce n’est déjà plus au goût du jour. « Les produits de fantaisie du style Sécession et du style Jeunesse de cette époque-là sont disparus et oubliés. Matériau et travail ont le droit de ne pas être dépréciés tous les ans par de nouveaux courants de la mode.» (Ornement et crime, p.214)

Et enfin et c’est la raison qui révèle toute la subtilité de Loos et un point fondamental à saisir dans son discours; il rejette l’ornement moderne par respect pour la tradition. Loos vit selon lui dans une époque à l’apogée du pragmatisme, du sobre, de l’économie. L’évolution logique des choses nécessite que l’architecte moderne n’invente pas de nouveaux ornements. On se doit de vivre dans l’esprit de son temps et l’époque moderne n’implique pas l’ornement. « L’ornemaniste moderne est un attardé ou une figure pathologique» (Ornement et crime, p.81). Il dit: « Mais je n’ai jamais voulu dire par là ce que les puristes ont poussé à l’absurde, à savoir qu’il fallait abolir l’ornement systématiquement et implacablement. C’est seulement là où il a disparu nécessairement avec le temps qu’on ne pourra pas le réappliquer. De même que jamais l’homme ne

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reviendra au tatouage sur le visage.» (Ornement et crime, p.247). L’évolution de l’architecture doit être logique, issue de la tradition du style de construction locale en y associant les inventions nouvelles de son temps. Le renouvellement par rapport aux habitudes ancestrales ne doit être permis que s’il représente une amélioration. « La meilleure forme est toujours déjà disponible et que personne ne craigne de l’utiliser, quand bien même elle émanerait, en son fond, d’une autre personne. Assez des génies originaux! Reproduisons-nous sans cesse nous-mêmes! Qu’une maison ressemble à l’autre! On n’entrera sans doute pas alors dans L’art et la Décoration en Allemagne, et on ne deviendra pas professeur à l’Ecole des arts appliqués, mais on aura le mieux servi son temps, son peuple et l’humanité. Et avec cela, sa patrie!» (Ornement et crime, p.168)

Il exprime bien sa position sur la distinction entre ornement moderne et ornement traditionnel en s’appuyant sur l’oeuvre d’un architecte, Otto Wagner.

Otto Wagner

Otto wagner est né à Vienne en 1841 et y est mort en 1918. En 1894, il se tourne vers la Sécession viennoise aux côtés de Josef Olbrich et Josef Hoffmann.

Pour la première partie de l’oeuvre de Wagner, Adolf Loos éprouve une grande admiration. Il est fasciné par l’inventivité des espaces qu’il crée et qui luttent selon lui pour la grande expression monumentale. Il est sans nul doute un des grands architectes de son temps.

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(fig.1) OTTO WAGNER, Villa Wagner, Vienne, 1886

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En 1894, Wagner est appelé à l’Académie pour succéder à Hasemann. Il reçut la tâche de fournir un vêtement architectural au projet du métropolitain et c’est dans ces années là que survient un tournant dans son parcours que Loos regrette. « Il s’éloigna délibérément du langage formel de l’Antiquité pour tenter de parler un langage formel à lui. Ce fut et c’est encore une erreur. [...] Otto Wagner commit la faute de se joindre avec véhémence aux recherches belges en vue d’inventer un nouvel ornement.» (Ornement et crime, p.178)

« Je suis un adepte de la tradition, Wagner la renie.» et pourtant: « Dans l’évolution historique de l’architecture au dix-neuvième siècle, les repères marquants s’appellent: Schinkel, Semper, Wagner. [...] Les défauts des grands sont plus importants pour l’évolution de l’humanité que les vertus des petits.» (Ornement et crime, p.180)

Une maison qu’a construit Wagner en 1986 (fig.1) illustre ce que Loos approuve dans son emploi de l’ornement, « La maison n’a de ressemblance avec aucune autre et elle constitue donc, en dépit de l’ornement baroque, une construction moderne. Mais plus curieuse encore, malgré l’effet d’étrangeté, est son profond rapport avec la tradition viennoise» (Ornement et crime, p.176). A contrario une maison qu’il a construit en 1912 (fig.2) montre ce que Loos rejette totalement dans une partie de son oeuvre.

Loos, tout comme une partie des architectes modernes, combattait l’ornement, et aujourd’hui on ne le combat plus. Ce n’est non seulement plus un tabou dans l’architecture contemporaine mais c’est aussi un élément récurrent utilisé par de nombreux architectes. Il se manifeste à travers trois fonctions, symbolique, de revêtement et structurelle.Nous allons donc voir maintenant comment et pourquoi l’ornement contemporain passe par de telles fonctions.

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(fig.2) OTTO WAGNER, Seconde Villa, Vienne, 1912

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LA FONCTION DE L’ORNEMENT DANS L’ARCHITECTURE CONTEMPORAINE

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La réhabilition de l’ornement comme symbole dans l’architecture contemporaine

Aujourd’hui, on utilise un ornement qu’on pourrait qualifier de symbolique dans l’architecture contemporaine. Pour traiter de cette question un premier exemple est assez remarquable. C’est la maison des musiciens (fig.1) de l’architecte suisse Valerio Olgiati; elle arbore un ornement symbolique. C’est un seul et même motif qui est multiplié sur toute la façade répartit de façon homogène, seule sa taille varie. Olgiati reprend un motif traditionnel de charpentier mais l’applique sur une surface en béton. Il va chercher un modèle de symbolisme venant d’une époque antérieure qui fait partie des sources matérielles d’inspirations qu’il va répliquer dans son dessin pour la façade.

La bibliothèque Eberswalde (fig.2) d’Herzog et de Meuron est aussi un exemple fameux. Le principe de la façade est un empilement en bandes horizontales d’images, reproduites de façon sérielle, gravées sur des blocs de béton et serigraphiées sur des panneaux de verre. C’est l’artiste Thomas Ruff qui en a choisi le contenu. Il tira les images de ses archives ( histoire de l’après-guerre en Allemagne, étudiants, forêts, architecture et, d’une façon très générale rapport de l’homme avec la nature) en tenant compte de l’emplacement et de la fonction du bâtiment. La bibliothèque entretient des liens étroits avec les photomontages qu’il travaille depuis 1996. Pour Ruff, Eberswalde est elle même fondamentalement un photomontage.Le travail de Ruff repose sur un examen critique de la nature et de l’histoire de la photographie.Sur les façades, chaque registre porte une image reproduite plusieurs fois. De haut en bas, des bandeaux de blocs de béton de mêmes dimensions alternent avec des panneaux de verre légèrement plus grands. Les trois bandeaux de verre alternant

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(fig.1) VALERIO OLGIATI, La maison du musicien à Scharans, Suisse,

(fig.1) VALERIO OLGIATI, motif de la façade

2007

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avec ceux en béton portent des images translucides de Vénus, d’un memento mori et d’un portrait d’Alexander Humboldt et de son assistant Aimé Bompland. A la différence des autres images qui sont des photographies, celles-ci sont des représentations de tableaux. La façade du bâtiment est extrêmement homogène, les différentes types d’images sont traités de la même façon, aucune image ne prédominent seul leur support matériel change. En ce sens le langage symbolique de ce bâtiment est extrêmement élaboré car ces images tirent leur qualité optique des substances matérielles dans lesquelles elles existent. C’est pour cette raison que les tableaux allégoriques, qui semblent flotter sur les panneaux de verre, acquièrent une profondeur optique tandis que les images d’actualité restent des empreintes de surface sur le béton.(1)

On a vu dans une première partie la position de Loos. Il serait maintenant intéressant de réagir à son propos ainsi qu’à l’architecture moderne qui a rejeté l’élément ornemental symbolique, avec Robert Venturi, au travers de son étude faite à Las Vegas publiée en 1977 dans un manifeste Learning from Las Vegas. On tenterait ainsi d’expliquer pourquoi aujourd’hui on réutilise l’ornement comme symbole en architecture.

« Bien qu’en grande partie oubliés par les architectes modernes, les antécédents historiques du symbolisme en architecture existent bel et bien et les complexités de l’iconographie ont gardé une importance majeure dans les disciplines de l’histoire de l’art. Les premiers architectes modernes méprisèrent la remémoration dans l’architecture. Ils refusèrent que l’éclectisme et le style fussent des éléments d’architecture tout comme l’historicisme qui eût minimisé le caractère révolutionnaire plutôt qu’évolutif de leur architecture fondée presque exclusivement sur la technologie.» (Robert Venturi Learning from Las Vegas, p.113)

« On peut imaginer que les symboles, outre le fait d’être étrangers dans leur contenu, étaient d’une échelle et d’un degré de complexité trop subtils pour des sensibilités meurtries et pour le train de vie agité

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(fig.2) HERZOG ET DE MEURON, Bibliothèque Eberswalde, Allemagne, 1999

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d’aujourd’hui. Ceci explique peut-être le fait ironique que le retour à l’iconographie de quelques-uns de nous, architectes de cette génération, se fit à travers les sensibilités des pop’ artistes du début des années 60 et grâce au canard et au hangar décoré sur la Route 66: de Rome à Las Vegas, mais aussi, en retour, de Las Vegas à Rome.» (Robert Venturi Learning

from Las Vegas, p.114)

Venturi met en exergue le rejet de l’époque moderniste du symbole et de l’iconographie dans l’architecture, pourtant traditionnellement utilisé dans les époques antérieures, et il révèle le début de la réutilisation de ces éléments notamment au travers du «hangar décoré» et de l’expérience de la ville de Las Vegas. (De plus, Venturi questionna la validité des formes modernistes qui étaient dessinées par leur fonction, sa position était de dire qu’en rejetant le symbolisme et l’ornement, ils ont dessinés inconsciemment des bâtiments qui étaient eux-mêmes des «canards».(2)Et il est intéressant de relever ce qu’il dit de Loos, « Adolf Loos condamna l’ornement, mais intégra dans ses projets de beaux dessins; il aurait érigé, s’il avait gagné le concours pour le Chicago Tribune, le plus magnifique, bien qu’ironique, symbole de toute l’histoire du gratte-ciel.» (Robert Venturi Learning from Las Vegas, p.144))La bibliothèque Eberswalde peut, d’ailleurs être définit par cette phrase, « It transformed the building from a monolithic entity into an act of communication - a symbol, a message-bearer.» (Gerhard Mack

Eberswalde Library Herzog et de Meuron, p.42).

L’influence de cette pensée se fait ressentir aujourd’hui, chez des architectes, et se poursuit par l’utilisation de l’ornement comme symbole. Il offre un modèle pour réinterpréter les principes du passé. La ville est chargée de symboles qui renvoient eux-mêmes à l’histoire du lieu. L’ornement utilisé comme symbole ne cherche pas à tendre vers un langage universel mais plutôt vers un langage spécifique à un bâtiment, à un contexte.

Le projet de Caruso St John pour le Museum of childhood (fig.3) à

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(fig.3) CARUSO ST JOHN, Museum of childhood, Angleterre, 2006

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Londres porte sur le réaménagement et l’extension d’un bâtiment de la fin du dix-neuvième siècle. Le projet oscille entre discours contemporain et prise en compte de la sensibilité victorienne. Caruso St John apportent ici une contribution au débat contemporain sur l’ornement. Plutôt que d’adopter la position critique du modernisme qui considère l’ornementation comme décadente, les architectes ont cherché à satisfaire la demande originale de façade représentative. Le projet répond à un bâtiment qui, comme beaucoup de réalisations éclectiques de son époque anticipe les «hangars décorés» de Venturi. Chez Venturi, la façade et le contenu devraient être idéalement détachées.« Le hangar décoré le plus pur serait, en quelque sorte, un hangar d’un système de construction conventionnel qui correspondrait étroitement à l’espace, à la structure et aux exigences programmatiques de l’architecture et sur lesquels serait posée une décoration contrastante et selon les circonstances, contradictoire.» (Robert Venturi Learning from Las

Vegas, p.103)Ici, le décor fait, au contraire, partie intrinsèque du programme. Des motifs classiques, dérivés des sources victoriennes et des Arts and Crafts, sont utilisés et ils soulignent la vocation publique de l’édifice.Le projet de Caruso St John est significatif d’un emploi de l’ornement presque didactique, révélateur du musée en tant que bien culturel et social.

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(1) voir MACK Gerhard, LIEBERMANN Valeria, Eberswalde Library Herzog et de Meuron,

Architectural association London, 2000

(2) « Le crawford Manor, comme l’architecture qu’il représente, s’est appauvri en rejetant

l’ornementation dénotative et la riche tradition iconographique de l’architecture

historique et en négligeant- ou plutôt en l’utilisant inconsciemment- l’expression

connotative qu’il a substituée à la décoration. Quand l’architecture moderne a rejeté

l’éclectisme, les symbolisme a été submergé. En remplacement, elle a favorisé un

expressionnisme centré sur l’expression des éléments architecturaux propres: sur

l’expression de la structure et de la fonction. Elle a suggéré, à travers l’image du bâtiment,

des buts sociaux et industriels réformistes-progressistes qu’elle est rarement parvenue

à atteindre dans la réalité. En se limitant aux articulations aigües des purs éléments

architecturaux d’espace, de structure et de programme, l’expression de l’architecture

moderne est devenue un expressionisme sec, vide et ennuyeux- et, en fin de compte,

irresponsable. Ironiquement, l’architecture moderne d’aujourd’hui, tout en rejetant le

symbolisme explicite et l’ornementation frivole appliquée, a transformé le bâtiment

tout entier en un grand ornement. En substituant l’«aticulation» à la décoration, il est

devenu canard.» (Robert Venturi Learning from Las Vegas, p.112)

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L’apport de l’ornement contemporain à une riche tradition, celle du revêtement

De nos architectes contemporains, Herzog et de Meuron (qui fondèrent leur bureau d’architecture en 1978) apparaissent comme les représentants les plus fameux d’une thématique de «peau» dans leur architecture. Ces architectes prolongent une tradition qui est celle du revêtement, du placage et de l’ornementation, déja énoncé par Gottfried Semper au dix-neuvième siècle.

Semper a développé une théorie qui consistait à minimiser la fonction porteuse du mur (le Mauer) et à l’envisager plutôt comme un écran, une paroi, une enveloppe (le Wand) (3). Le mur possèderait un revêtement de surface, un habillage. « Je pense que l’action consistant à revêtir et masquer est aussi vieille que la civilisation elle-même et que la joie qu’elle procure est identique à ce plaisir de créer qui conduisit les hommes à être sculpteurs, peintres, architectes, poètes, [...]» (Gottfried Semper, Du style et de l’architecture Ecrits 1834-1869, p.333)

A l’inverse de Loos, « Semper ne franchira jamais le pas consistant à bannir l’ornement dont il le fait au contraire, avec le jeu, l’un des «besoins primaires de l’humanité»» (Jacques Soulillou Du style et de l’architecture

Ecrits 1834-1869, Introduction p.8). Semper basa son raisonnement sur l’ornementation, où suite à un séjour en Grèce, grâce à l’analyse de pigments retrouvés sur les constructions classiques, il constata que l’architecture se donnait comme corps peint plutôt que comme squelette blanchi par les siècles. « Il remet donc en cause l’esthétique immaculée du classicisme en reconstituant la décoration et la palette de couleurs des temples et des statues» (Carrie Asman Histoire naturelle, p.404). C’est alors surprenant de constater que Loos, qui voulait bannir l’ornementation prônait, en même temps la grandeur de

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(fig.4) HERZOG ET DE MEURON, Entrepôt Ricola à Laufen, Suisse, 1987

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l’architecture antique, « Notre culture s’édifie sur la reconnaissance de la grandeur de l’Antiquité classique qui surpasse tout.» (Adolf Loos Ornement

et crime, p.116)

Mais revenons à Herzog et de Meuron, ils sont dans le prolongement de la pensée de Semper car ils ont réussi à mettre à jour la relation complexe entre la surface et l’espace comme dans la Dominus Winery en Californie ou la Bibliothèque Eberswalde en Allemagne. Ces bâtiments prolongent le dialogue entre surface et espace dont Semper avait posé les bases théoriques.

Dès les années 80, ils expérimentent cette problématique d’enveloppe avec l’entrepôt Ricola (fig.4), à Laufen, ils veulent qualifier l’espace extérieure grâce à celle-ci. Jacques Herzog dit: « Pour l’entrepôt Ricola, par exemple, nous avons compris que nous pouvions inventer un nouvel espace à l’extérieur entre la roche et le bâtiment. Nous avons essayé par n’importe quels moyens, de créer une relation entre l’espace et la peau. [...] c’était de créer une relation basée sur une analogie structurelle entre la stratification visible de la roche et celle de la façade du bâtiment.» (Interview Ornament, structure, space par Jean-

François Chevrier, 2006))

Plus tard, en 2005 avec le Walker Art Center (fig.5) aux Etats-Unies, ils donnent à lire une peau qui apparaît comme une texture, support d’expression du bâtiment, qui se percoit différemment selon les points de vues, la lumière, le climat. Ce bâtiment à la morphogie d’un énorme rocher, est revêtu d’une fine peau de panneaux carrés en aluminium froissé. La peau devient alors ornementale.

« Herzog et de Meuron démontrent à quel point l’enveloppe extérieure du bâtiment fonctionne comme une image, indépendamment de la structure porteuse, et est, comme le dit Jacques Herzog «véritablement imprégnée» d’images» (Philip Ursprung Histoire naturelle, p.13)

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(fig.5) HERZOG ET DE MEURON, Walker Art Center, USA, 2005

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Pour Herzog et de Meuron la question de la peau en architecture est intimement liée à celle de l’ornementation. On pourrait parler du revêtement architectural en termes de textiles comme le fit Semper au dix-neuvième siècle. Avec l’enveloppe homogène, l’impact esthétique de cette dimension ornementale est alors très fort et extrêmement caractérisant.

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(3)« [...] comme avec le mot Wand, qui chez Semper désigne la paroi, par opposition

au Mauer, le mur porteur. Le Wand est cette enveloppe née d’un geste archi-technique

qui confère à l’espace ses qualités premières; le Wandbereiters, littéralement «celui

qui apprête le mur» est cet artisan originel - Urhandwerker - qui met en application

le principe de revêtement, soit tel quel, de manière pure, avec le matériau tissé, soit en

habillant le Mauer, qui n’incarne que des qualités spatiales secondaires (porter, soutenir,

défendre).» (Jacques Soulillou Du style et de l’architecture Ecrits 1834-1869, Introduction p.19)

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La recherche d’unité entre structure et ornement

Herzog et de Meuron, depuis les années 80, se sont toujours intéressé à la thématique de la peau dans leurs bâtiments en y introduisant une dimension ornementale mais ils ont aussi, depuis une dizaine d’années, pour but de créer des bâtiments où la structure devient ornementale.L’ornement est pour eux bien plus que de la décoration. Ce n’est pas quelque chose de rajouté, c’est une part des données qui va produire la forme. Pour le bâtiment prada (fig.6) à Tokyo, la façade est auto-porteuse, c’est donc la structure elle-même qui gènère une dimension ornementale. Les conditions ornementales et structurelles doivent être pensées en même temps, réunies dans un même processus de conception, pour aboutir à une unité.Ici, l’ornement ne doit pas être appliqué à l’architecture, il doit en procéder.

« Quand l’ornement et la structure deviennent une seule et même chose, naît étrangement un nouveau sentiment de liberté. Soudain, vous n’avez plus besoin de vous expliquer de tel ou tel détail décoratif: c’est structurel, c’est un espace. Je ne suis pas particulièrement intéressé par une certaine structure, ornement ou espace. Les choses commencent à être intéressantes quand vous apportez tous ces éléments ensemble dans une seule chose [...]» (Jacques Herzog dans interview Ornament, structure, space

par Jean-François Chevrier, 2006)

Au-delà de créer une relation entre la structure et l’ornement, Herzog et de Meuron ont aussi la volonté d’établir une relation entre ornement, structure et espace car la structure doit être vue dans sa profondeur. A propos du stade à Pékin (fig.7), Jacques Herzog dit « the idea that the skin creates unity and that it has depth» (interview Ornament,

structure, space par Jean-François Chevrier, 2006). L’ornement doit être le résultat

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(fig.6) HERZOG ET DE MEURON, Bâtiment Prada à Tokyo, Japon, 2003

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d’une expérimentation tridimensionnelle. Dans le «nid d’oiseaux» le programme tout entier est inclus dans une forme unitaire générée par la structure qui devient elle-même ornementale.

Ceci explique sans doute la grande admiration vouée à ces architectes. Ils ont repris le thème traditionnel de la peau, parfois oublié dans l’architecture moderne, en y introduisant une dimension ornementale et en s’inscrivant dans la question marquante de la forme unitaire dans l’architecture contemporaine.Et au fur et à mesure des années ils aboutissent leur pensée en la rendant plus novatrice et plus riche de sens. Ils ajoutent la structure et la notion de profondeur dans une volonté d’unité, créant ainsi de nouvelles perspectives comme, finalement, est-ce qu’on peut «habiter» l’ornement?Une des formes les plus abouties est le «nid d’oiseaux». La forme est pensée comme un tout intégrant les données programmatiques, ornementales, structurelles et spatiales. La structure n’est plus simplement une enveloppe qui abrite l’intérieur comme le bâtiment prada, elle crée l’espace, elle le sature dans les trois directions. La dimension ornementale de l’architecture est alors une seule et même entité qui est le bâtiment lui-même, imprégnant ainsi toute l’atmosphère du lieu.

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(fig.7) HERZOG ET DE MEURON, Stade à Pékin, Chine, 2008

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LES AMBITIONS DE L’ORNEMENT DANS L’ARCHITECTURE CONTEMPORAINE

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L’ornement inhérent à la recherche de la forme unitaire

Dans les années 60, la question de la forme unitaire va émerger dans le domaine de l’art au travers de figures telles que Frank Stella (peintre), Carl Andre, Robert Morris et Donald Judd. Elle est évoquée dans deux évènements majeures; deux expositions et deux textes. L’exposition Shape and structure à New-York de 1965 pose la question de la forme et de la structure qui lui serait intrinsèque. Lors de la seconde exposition Primary structure, Donald Judd y expose Untitled. Judd est un artiste qui se consacra dès 1963 exclusivement à un travail dans et avec l’espace et en 1965 il explicite son concept dans Specific objects. Les principes qui définissent les « objets spécifiques» de Judd sont des lignes claires, évidentes, l’usage de matériaux industriels, l’absence de l’empreinte de l’artiste et le sentiment d’unicité.Dans le texte Notes on sculpture (1966), Robert Morris écrit « volumes simples [...] leurs parties si unifiées qu’elles offrent un maximum de résistance à toute perception séparée.»

« Les éléments individuels d’un système ne sont pas importants en tant que tels; seule importe la façon dont ils sont utilisés dans la logique interne de l’ensemble.» (Dan Flavin)

Et il semblerait que l’architecture contemporaine ait admis la forme unitaire comme paradigme formel.En effet, l’art minimal a influencé de nombreux architectes et la forme unitaire est récurente dans les projets contemporains. Ils apparaissent souvent comme des objets autonomes, compacts avec une enveloppe très homogène et unitaire.C’est le cas de la bibliothèque Eberswalde. Herzog et de Meuron, en collaboration avec Remy Zaugg, connaissent bien le travail artistique de Judd.

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(fig.1) HERZOG ET DE MEURON, Bibliothèque Eberswalde, Allemagne, 1999Photo de Thomas Ruff

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« More than any other building by Herzog and de Meuron, the library belongs to that category of « spécific objects» through which Donald Judd sought to open up the pictorial space of painting into the real space of the spectator.» ( Gerhard Mack Eberswalde Libray, p.2)

Ce bâtiment, par le traitement homogène de l’enveloppe, en utilisant l’ornementation, aboutit à une forme unitaire. En ce sens, la volonté d’aboutir à une forme unitaire justifierait l’emploi de l’ornement dans l’architecture contemporaine.Un moyen pour parvenir à la forme unitaire est de traiter l’enveloppe de façon homogène. Et pour y parvenir, les architectes utilisent, dans la majorité des cas, une ornementation all-over sur une surface mono-matière ou monochrome. La maison des musiciens est un bâtiment qui en est un parfait exemple.Ces modalités de conception entrent aussi en résonnance avec le travail d’ artistes tels que Pierre Soulages.

En 1979, Soulages commence ses expériences de l’ «outrenoir» fondées sur la réflexion de la lumière sur les états de surface du noir. «Soulages le métamorphose (le noir) en un quatrième type, absolument nouveau, de traitement de la surface, par lequel le pigment noir se donne à voir comme lumière.» (Pierre Encrevé Soulages L’exposition)

Les effets que ces tableaux produisent sont intrinsèques à la matière. Soulages ne cherche pas à transmettre un message dans sa peinture, elle est dédiée à faire naître chez le spectateur les sens qu’il lui prête.« Mon émotion naissait, avec et par la lumière, par l’espace; par le rythme qui se créaient sous mon regard.» (Pierre Soulages Soulages L’exposition)

On pense immédiatement au Walker Art Center, sa peau est constituée d’un seul et même matériau mais qui par son traitement de surface, produit une texture qui va se donner à voir de façon inédite selon son inclinaison, la lumière et le point de vue. Comme chez Soulages, l’enveloppe de ce bâtiment est pensée selon

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Pierre Soulages, Peinture 324 * 362 cm, Huile sur toile, 1986Paris, musée d’Art moderne de la ville de Paris

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la relation qu’elle va entretenir avec le spectateur, selon sa position sa perception du bâtiment change.

L’emploi de l’ornement dans l’architecture contemporaine est révélateur de la volonté d’aboutir à la forme unitaire, une des obsessions formelles de la fin du vingtième siècle juqu’à nos jours. Les modalités de conception de l’ornement qui découlent de cette recherche, s’accordent aussi avec des thèmes contemporains tel que le all-over, le monomatière, le monochrome.

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L’ornement, outil pour parler de la mémoire

L’intention du projet de réhabilitation d’une façade à Berlin (fig.2) par les architectes HildundK était de réinterpréter la façade d’avant guerre du bâtiment. Après la guerre, la façade a été restaurée à l’aide d’un simple enduit épais alors qu’initialement elle était richement ornementée.La question de recréer à l’identique les conditions originales de la façade ont été rejetées pour des raisons architectoniques et théoriques. Mais ils voulaient inclure l’expression de l’ancien bâtiment dans leur nouveau dessin. Ils se sont donc basés sur le dessin ornemental de la façade originale pour créer leur nouveau dessin en le scannant et en gardant ainsi les grandes lignes de la forme de l’ancien ornement. Ils ont ensuite appliqués leur dessin dans la façade existante en l’incisant dans l’enduit, entraînant ainsi un effet de relief.L’intervention contemporaine tend à définir le traitement et renvoie ainsi à l’appropriation de l’ancien bâtiment par les architectes. Ce projet pose la question de la difficulté de concevoir aujourd’hui de nouveaux ornements en l’absence d’une tradition correspondante. De plus, il réintroduit l’ornement d’une tradition passé de façon un peu littérale mais il s’en sert comme d’un outil pour parler de la mémoire.Et cette question est relevante dans une ville car elle est chargée de la mémoire collective et rend compte de son histoire au travers de l’expression des bâtiment.La mémoire est quelque chose qui se construit. Et cette mémoire passe par le symbole et la ville est un réservoir chargé de symboles.Les symboles sont un système de représentation qui sert d’outils de communication à l’intérieur d’une société. C’est un système hérités de formes et de conventions du passé et nous ne pouvons nous en affranchir complètement. C’est en ce sens qu’on peut critiquer

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(fig.2) HILDUNDK ANDREAS HILD, DIONYS OTTL, Réhabilitation d’une façade à Berlin Allemagne, 1999

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la position de l’architecture moderne qui souhaitaient une rupture avec cette tradition (1) et ainsi expliquer ainsi la volonté à un retour à l’ornement aujourd’hui.

De plus, utiliser l’ornement fait appel à des traditions et des conventions architecturales déjà établies, ce qui peut rendre, en les ajustant, en les distanciant et en les insérant dans un contexte particulier, très riche une architecture actuelle.L’ornement peut par exemple servir à atteindre une architecture «étrangement familière», notion empruntée à Bruno Marchand (2).

« La richesse peut provenir d’une architecture conventionnelle. Pendant 300 ans, l’architecture européenne a produit des variations sur une norme classique - un riche conformisme. Mais c’est également d’un ajustement de l’échelle et du contexte fourni à des éléments familiers et conventionnels pour lui faire produire des significations inhabituelles que peut provenir la richesse. [...] Le familier, légèrement désitué, a un pouvoir étrange et révélateur.» ((Robert Venturi Learning from Las Vegas, p.139)

(1)« Le mouvement moderne en architecture a été une tentative de modifier les systèmes

de représentation hérités du passé pré-industriel qui ne paraissaient plus opérants dans

le contexte d’une technologie en évolution rapide.» (Alan Colquhoun Typology and Design

Method, p.14)

(2) Bruno Marchand, Etrangement familières..., Matières numéro 7, 2004

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(fig.2) HILDUNDK ANDREAS HILD, DIONYS OTTL, Réhabilitation d’une façade à Berlin Allemagne, 1999

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A quoi correspond l’ornement dans la société contemporaine?

« La forme et l’ornement sont le produit d’un travail collectif, inconscient, des hommes à tout un milieu culturel.» (Adolf Loos Ornement et éducation,

Ornement et crime, p.244)

Loos s’appuyait sur une analyse critique de la société de son époque pour justifier son combat contre l’ornement. Il estimait que l’utilisation de l’ornement n’était pas en accord avec la société dans laquelle il vivait.Mais alors notre société contemporaine lui est-elle plus propice?

Nous pourrions définir notre société comme l’ère de l’image, de la communication, de la vitesse, de la technologie informatique, de la globalisation. Et des bâtiments contemporains qui ont recours à l’ornementation parlent de leur position dans ce contexte général. Les architectes Bearth et Deplazes ont eu recours à une assistance numérique pour construire le bâtiment viticole à Flasch (fig.3). En effet, une machine assistée par ordinateur a posé les briques pour construire le mur car chaque brique avait un emplacement très précis et calculé pour que le mur forme au final un motif (une grappe de raisin). L’effet est inédit et aurait été impossible sans les moyens dont on dispose aujourd’hui.C’est une architecture pensée et construite avec les moyens de son temps et c’est d’ailleurs ce que Loos préconisait, finalement.

« Mais toutes les formes de techniques appliquée sont dictées par le progrès de la pratique.» (Adolf Loos Ornement et éducation, Ornement et crime, p.251)

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(fig.3) BEARTH ET DEPLAZES, Exploitation viticole à Flasch, Suisse, 2008

(fig.3) BEARTH ET DEPLAZES, Exploitation viticole à Flasch, détail de la paroi en briques

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Dans une société où la valeur de l’image tient une place fondamentale, la bibliothèque Eberswalde de Herzog et de Meuron est, finalement, une figure qui atteint le paroxysme de ce phénomène. Ce bâtiment se donne-t-il à lire comme une revendication ou comme une simple expression qui s’affirme pleinement et sans complexes aujourd’hui?Nous sommes dans une époque où nous sommes habituer à être sollicité en permanence par des images qui inondent notre environnement, nous sommes au courant de la moindre nouveauté, de l’actualité pratiquement en temps réel grâce aux outils de communication dont on dispose. Les murs blancs paraissent alors ennuyeux et on demande aux architectes de faire sensation et de proposer quelque chose de novateur pour ainsi faire évènement.La dimension ornementale en architecture participe à la capacité d’un bâtiment à faire évènement.

« Maintenant que les musées et les entreprises mondialisées remplacent les produits et oeuvres d’art par un mode de vie et une atmosphère, on recherche de plus en plus des architectes qui, pour le dire carrément, ont autre chose à proposer que des vitrines et des cubes blancs. On s’étonnera donc pas que Prada ou la Tate Modern aient choisi de faire appel à Herzog et de Meuron.» (Philip Ursprung Histoire naturelle, p.33)

Et aujourd’hui la société est tournée vers un phénomène de globalisation qui tend à une homogénéisation de l’esthétisme et à une culture qui s’impose partout. On aurait donc plus tendance à s’orienter vers la différenciation et non vers la croissance et un langage universel (comme le pensait à l’époque Loos, il disait notamment « N’avais-je pas un jour créer la formule: s’habille moderne celui qui se remarque le moins.» (Adolf Loos

Architecture, Ornement et crime, p.110)).L’ornement pourrait alors être un nouveau souffle dans notre société. On pourrait l’utiliser comme un support d’expression de la culture en faisant appel aux traditions architecturales, aux iconographies,

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aux coutumes inhérentes à chaque lieu, chaque ville et chaque pays. Qu’on est la sensation de se situer à un endroit et nul part ailleurs.

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L’étude de ces bâtiments nous conduit à répondre à une question fondamentale pour nous, architectes: quelles sont les modalités de conception de l’ornement, aujourd’hui, qui permettent de le rendre intelligible et non complètement arbitraire?On peut constater la mouvance d’aujourd’hui qui pousse les bâtiments à faire évènements en utilisant l’ornementation. Mais par définition un évènement ne dure pas, alors qu’est-ce qui fait que les qualités d’un bâtiment ornementé subsistent dans le temps et qu’un autre pas.

Premièrement, quand l’ornement fait partie intégrante d’un processus.Il est déterminé par un processus derrière lequel l’architecte disparaît en tant que « créateur». Ce qui renvoi à l’art minimal qui voulaient supprimer l’empreinte de l’artiste dans ses oeuvres.L’ornement n’est pas issu d’un choix en tant que tel, il découle du procédé de fabrication de l’objet. Herzog et de Meuron cherchent, en apportant dans une seule et même entité l’ornement, la structure et l’espace à fermer un «processus naturel» de création.

Deuxièmement, quand la fabrication de l’ornement est lié à la mise en oeuvre du matériau.C’est notamment le cas avec la construction viticole de Bearth et Deplazes. C’est la mise en oeuvre de la brique, qui par son agencement produit un jeu d’ombres et de relief et aboutit ainsi à l’effet ornemental.

Troisièmement, quand l’ornement fait appel à une tradition correspondante. Le projet de Caruso St John s’inspire directement de motifs issus de coutumes inhérentes au contexte. Faire appel à une tradition architecturale en la désituant légèrement et en l’ajustant de manière à s’inscrire dans notre époque, révèle de réelles qualités de projet.

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Quatrièmement, quand l’effet ornemental offre plusieurs possiblités de perceptions du projet.Avec la bibliothèque Eberswalde, on peut lire verticalement un programme imagé qui dévoile une histoire narrative, et horizontalement la répétition en série d’un même motif qui forme une frise d’images. Le point de vue et la lumière détermine si c’est la continuité du mouvement ou l’image individuelle qui prédomine.

Outre la rupture de l’architecture moderne (même si on sait qu’elle n’a pas été totale) avec l’ornement dans l’histoire, les fonctions de l’ornement dans l’architecture contemporaine restent globalement les mêmes. L’ornement se manifeste cependant différemment car les problématiques auquelles il répond ont changées. Par exemple, au dix-neuvième siècle l’ornement était appliqué sur des éléments structurels (linteaux par exemple) aujourd’hui la dimension ornementale de la structure ne se manifeste plus de la même façon car les techniques de constructions ne sont plus les mêmes. Ce ne sont plus des éléments appliqués sur des parties mais la structure qui devient-elle même ornementale.

Les bâtiments ornementés contemporains sont le plus souvent des formes unitaires, on peut alors se demander comment on procèdera de l’ornement quand la forme unitaire ne sera plus le paradigme formel prédominant dans l’architecture.

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