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Jimmy ROUSSEL OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE Cours Accessible en ligne : https://femto-physique.fr/optique/ Dernière mise à jour : 13 juin 2019

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Jimmy ROUSSEL

OPTIQUE GÉOMÉTRIQUECoursAccessible en ligne : https://femto-physique.fr/optique/

Dernière mise à jour : 13 juin 2019

Table des matières

1 LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE 3

2 LES MIROIRS 11

3 LES LENTILLES MINCES 22

4 QUELQUES INSTRUMENTS 31

A PRINCIPE DE FERMAT 42

2

1 LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE

Ce premier chapitre rappelle les bases de l’optique géométrique : la notion de rayon lumineux, d’indicede réfraction, les lois de la réflexion, de la réfraction et de la dispersion.

Sommaire1.1 Nature de la lumière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

1.1.1 Aspects historiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41.1.2 Notion de rayon lumineux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51.1.3 Indice de réfraction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6

1.2 Lois de Snell-Descartes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71.2.1 Réflexion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71.2.2 Réfraction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81.2.3 Dispersion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

Ce chapitre est accessible en ligne à l’adresse :

https://femto-physique.fr/optique/lois-de-descartes.php

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1. LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE. 1.1. Nature de la lumière.

1.1 Nature de la lumièreLa question de la nature de la lumière fut probablement l’une des interrogations les plus fécondes en

physique : elle est, en quelque sorte, à l’origine des théories géométrique, ondulatoire, électromagnétique,relativiste et quantique de la lumière.

1.1.1 Aspects historiques

La question de la nature de la lumière remonte à l’antiquité. Pythagore, Démocrite, Aristote et les autresavaient déjà construit une théorie de la lumière et la propagation de la lumière en ligne droite était déjàconnue d’Euclide (300 ans av. J.C.). La chute de l’empire romain (475 ap. J.C) a ensuite fortement freiné ledéveloppement scientifique et il faudra attendre la fin du 16ème siècle pour voir renaître la physique. C’està cette période que l’on enregistre de grands progrès en optique, tant du point de vue expérimental quethéorique.

Au niveau théorique, deux conceptions s’affrontent. Newton, père de la mécanique classique, défend unedescription corpusculaire de la lumière. Pour lui, le phénomène de diffraction de la lumière rapporté dansl’ouvrage du père Grimaldi (publié à titre posthume en 1665) s’explique par une inflexion de la lumière parla matière : on voit ici une vision purement mécaniste. À la même époque, Huygens défend une descriptionondulatoire de la lumière. Mais le succès des Principia Mathematicæ et le rayonnement de Newton dans lemonde scientifique ont certainement freiné le développement de la théorie ondulatoire. Il faudra attendreplus d’un siècle pour que les idées d’Huygens soient reconnues.

Citons quelques repères historiques relatifs aux progrès en optique géométrique :

1590 Zacharias Janssen invente le microscope

1609-1610 Galileo Galilei construit une lunette astronomique avec laquelle il découvrira les taches solaireset 3 satellites de Jupiter (Callisto, Europe, Ganymède)

1611 Johannes Kepler découvre la réflexion totale interne, une loi de la réfraction pour de petits angles etles lois des lentilles minces.

1613 Galileo Galilei démontre la rotation du soleil grâce à l’observation des taches solaires.

1621 L’astronome néerlandais Willebrord Snell découvre les lois de la réfraction.

1637 René Descartes démontre mathématiquement que les angles des arcs-en-ciel primaires et secondairesdépendent de l’angle d’élévation du soleil.

1657 Pierre de Fermat introduit le principe du temps minimal en optique.

1665 Le Père Grimaldi constate qu’au contour des obstacles ou au bord d’un trou, la lumière subit unéparpillement, et appelle ce phénomène diffraction.

1676 L’astronome danois Ole Rømer compile les orbites des lunes de Jupiter pour mesurer la vitesse de lalumière qu’il estime à un diamètre de l’orbite terrestre en 22 minutes.

1678 Christian Huygens introduit le principe de sources de front d’ondes.

1704 Isaac Newton publie Opticks, ouvrage dans lequel il expose une théorie corpusculaire de la lumière.

4

1. LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE. 1.1. Nature de la lumière.

1.1.2 Notion de rayon lumineux

Postulat de l’optique géométriqueLa lumière (l’énergie lumineuse) est décrite par un ensemble de rayons lumineux indépendants. Ces rayonslumineux sont caractérisés par une direction de propagation −→u et une vitesse de propagation v.Ces rayons lumineux se propagent en ligne droite dans tout milieu homogène à une vitesse qui dépend dumilieu. Dans le vide, toute lumière se propage en ligne droite à la vitesse

c ≃ 3 · 108 m.s−1

L’optique géométrique s’intéresse au trajet qu’empreinte la lumière à partir des propriétés des milieuxqu’elle traverse.

Le spectre électromagnétique

Bien que ce cours ne traite pas des aspects ondulatoires de la lumière, il faut toutefois rappeler que lalumière est une vibration électromagnétique qui se caractérise par une longueur d’onde λ – déplacement del’onde pendant un cycle de vibrations – et par une fréquence ν – nombre de cycles par seconde. La fréquenceet la longueur d’onde sont liées par la relation

λ = c

ν♡ (1.1)

Le spectre électromagnétique est quasi-totalement invisible pour un œil humain (Fig. 1.1), sauf une petiteportion dite spectre visible qui s’étend du rouge au violet en passant par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel(communément divisé en rouge, orange, jaune, vert, bleu, indigo et violet). La couleur de la lumière est avanttout une question de perception par l’œil et d’interprétation par le cerveau. On retiendra que le spectre visiblecorrespond à l’intervalle

400 nm < λvisible < 750 nm

La lumière est dite polychromatique quand elle est constituée de plusieurs longueurs d’onde, monochroma-

γ Rayons X Ultra Violet Infra Rouge Micro ondesOndes Radio

(UHF,VHF, HF)

λ (m)

ν (Hz)

10−12 10−11 10−10 10−9 10−8 10−7 10−6 10−5 10−4 10−3 10−2 10−1

1021 1020 1019 1018 1017 1016 1015 1014 1013 1012 1011 1010 109 108

101

Fig. 1.1 – Spectre électromagnétique.

tique quand elle est constituée d’une seule. Les sources monochromatiques au sens strict du terme n’existentpas, mais certains lasers produisent une lumière dont le spectre est très étroit. On les considère donc générale-ment comme des sources monochromatiques. Ainsi, la très grande majorité, sinon la totalité, des phénomèneslumineux qu’on observe implique une lumière polychromatique.

Fig. 1.2 – Spectre de raies du mercure (à gauche) et spectre visible (à droite).

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1. LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE. 1.1. Nature de la lumière.

Limitations des lois de l’optique géométrique

Les lois de l’optique géométrique permettent de traiter la lumière dans un cadre approximatif dans lequelles aspects ondulatoires et quantiques peuvent être négligés. Tant que les propriétés des milieux varient peuà l’échelle de la longueur d’onde λ, l’approximation de l’optique géométrique est valide. La notion de rayonest par exemple purement conceptuelle et toute expérience cherchant à isoler un rayon lumineux est vouéeà l’échec à cause du phénomène de diffraction (Fig. 1.3). Si l’on note N le nombre de photons mis en jeu

Fig. 1.3 – Lumière recueillie sur un écran après avoir traversé un plan opaque percée d’un orifice circulaire.La dimension de la tache centrale et la présence des anneaux concentriques sont en contradiction avec lapropagation en ligne droite (matérialisée par le cercle blanc).

dans un phénomène optique, D la dimension caractéristique des obstacles (miroirs, trous, lentilles...) et λ lalongueur d’onde, l’approximation de l’optique géométrique est bonne si

N ≫ 1 et D ≫ λ

1.1.3 Indice de réfraction

Dans le vide, la lumière se propage en ligne droite à la vitesse c. C’est en 1676 que Rømer réussit àestimer cette vitesse grâce aux éclipses de quatre satellites de Jupiter (à différentes périodes de l’année : plusla Terre est éloignée de Jupiter, plus la durée entre deux éclipses successives augmente). Il obtint alors unrésultat astronomique qui fut confirmé en 1728 par Bradley qui utilisa l’influence de la vitesse de la Terre surson orbite autour du Soleil (phénomène d’aberration des étoiles qui lui permit, indirectement, d’estimer lavitesse de la lumière). Il obtint alors environ 280 000 km.s−1. En 1849 Fizeau obtint environ 315 000 km.s−1

en utilisant un système mécanique de miroirs et une roue dentée en rotation (la vitesse de la roue était ajustéepour permettre le passage du rayon lumineux à l’aller, puis au retour après une réflexion sur un miroir).Ensuite, Foucault reprit le même genre d’expérience (la roue dentée fut remplacée par un miroir en rotation)et sa mesure la plus précise, en 1862, s’approcha de la valeur actuelle (avec moins de 1 % de différence : soitenviron 300 000 km.s−1). On pourra retenir que cette vitesse correspond à environ 7,5 circonférences de laTerre parcourues en 1 s !

Dans un milieu transparent, homogène et isotrope, la lumière se propage en ligne droite mais à une vitesse

v = c

n< c ♡ (1.2)

où le scalaire n est une grandeur sans dimension, appelé indice de réfraction. Il est caractéristique dumilieu. Le tableau 1.1 donne quelques valeurs d’indice. On retiendra que n est de l’ordre de l’unité pour lesmilieux transparents les plus courants.

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1. LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE. 1.2. Lois de Snell-Descartes.

Tab. 1.1 – Quelques indices de réfraction

Milieu air eau verre diamant

Indice n 1,0003 1,33 1,5-1,8 2,42

Remarque : la lumière est une onde et, à l’instar des ondes acoustiques qui ont besoin d’un milieu élastiquepour se propager, la question du support de propagation s’est naturellement posée. Cet hypothétique milieufut appelé Ether. Deux physiciens, Michelson et Morley tentèrent de mettre en évidence expérimentalement unmouvement terrestre par rapport à l’éther à l’aide d’un interféromètre. Leurs expériences furent négatives. Peuaprès, Einstein va s’inspirer de ces expériences négatives et osera formuler le postulat selon lequel l’Ether n’existepas et la lumière se propage dans le vide à la vitesse c quel que soit le référentiel d’observation. C’est pourquoi,à l’heure actuelle, la vitesse de la lumière dans le vide est une constante fondamentale de la Physique :

c ≜ 299 792458 m.s−1 ≃ 3.108 m.s−1

1.2 Lois de Snell-Descartes1.2.1 Réflexion

Lorsqu’un rayon arrive à l’interface entre deux milieux isotropes et homogènes différents, il donne nais-sance à un rayon réfléchi et à un rayon transmis (réfracté). On distingue deux types de réflexion :

• La réflexion diffuse est produite par une surface irrégulière. Elle ne produit pas d’image discernable.C’est cependant cette sorte de réflexion qui nous permet de voir le monde qui nous entoure.

• La réflexion spéculaire est produite par une surface très lisse (ex. : miroir ou surface d’eau très calme).Elle produit une image discernable d’un objet.

On s’intéresse ici à la réflexion spéculaire. On définit le plan d’incidence comme le plan contenant le rayonincident et la normale à l’interface (Fig. 1.4). L’angle d’incidence i1 est l’angle que forme le rayon incidentavec la normale.

plan d’i

ncide

nce

norm

ale

i1

i′1indice n1

indice n2

Fig. 1.4 – Réflexion d’un rayon sur une interface.

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1. LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE. 1.2. Lois de Snell-Descartes.

Lois de la réflexion

1. Le rayon réfléchi est dans le plan d’incidence. On définit alors l’angle de réflexion i′1.

2. Le rayon réfléchi est symétrique du rayon incident par rapport à la normale :

i1 = i′1 ♡ (1.3)

Pouvoir Réflecteur

La lumière réfléchie n’emporte pas entièrement l’énergie incidente. On définit le pouvoir réflecteur R

d’une interface comme étant le rapport de l’énergie lumineuse réfléchie sur l’énergie lumineuse incidente. Enincidence normale (i1 = i′

1 = 0), on a

R =(

n1 − n2n1 + n2

)2

Pour une interface verre-air R vaut 4%. En déposant une couche mince métallique sur l’interface on ramènele pouvoir réflecteur très proche de 100% : on parle alors de miroir. On peut aussi déposer une couche mincede MgF2 pour réduire le pouvoir réflecteur ; on parle alors de couche anti-reflet 1.

1.2.2 Réfraction

La réfraction est la déviation de la lumière lorsqu’elle traversel’interface entre deux milieux transparents d’indices optiques dif-férents (Fig. 1.5).

Lois de la réfraction

1. Le rayon réfracté est dans le plan d’incidence. On définitalors l’angle de réfraction i2.

2. Le rayon réfracté est tel que :

n1 sin i1 = n2 sin i2 ♡ (1.4) plan d’i

ncide

nce

norm

ale

i1

i2

indice n1

indice n2

Fig. 1.5 – Réfraction d’un rayon lumineux.Il s’en suit plusieurs conséquences :

• Principe du retour inverse de la lumière. Tout trajet suivi par la lumière dans un sens peut l’être ensens opposé.

• Réflexion totale. Lorsque le milieu 2 est moins réfringent que le milieu 1(c’est-à-dire n2 < n1), le rayonréfracté s’éloigne de la normale. Il existe alors un angle limite d’incidence iℓ tel que

sin iℓ = n2n1

♡ (1.5)

et tel que si i > iℓ le rayon réfracté disparaît ; seul le rayon réfléchi existe : on parle alors de réflexiontotale car toute l’énergie se retrouve dans le rayon réfléchi.

1. Voir cours optique ondulatoire - 2ème année.

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1. LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE. 1.2. Lois de Snell-Descartes.

iℓ

Réfraction : i < iℓ

n1

n2 < n1

i

Réfraction limite : i = iℓ

iℓ

Réflexion totale : i > iℓ

i

iℓ

Fig. 1.6 – Phénomène de réflexion totale.

1.2.3 Dispersion

En 1660, Newton réalisa ses fameuses expériences autour de la décomposition de la lumière par unprisme. Lorsque l’on envoie un pinceau de lumière blanche à travers un prisme, on voit apparaître en sortiedu prisme un faisceau divergeant et irisé 2. Chaque composante spectrale est déviée différemment ; on ditqu’il y a dispersion.

Fig. 1.7 – Dispersion de la lumière à la traversée d’une goutte d’eau (Simulation ©J.Roussel).

Ce phénomène provient du fait que l’indice de réfraction dépend de la longueur d’onde de la lumière.La relation n(λ) s’appelle relation de dispersion. Dans la plupart des milieux transparents, dans le domainevisible, l’indice suit la loi de Cauchy :

n(λ) = A + B

λ2

avec A et B des paramètres propres à chaque matériau. En général, ces paramètres sont tous les deux positifs ;la lumière rouge est alors plus rapide que la lumière bleue : on parle de dispersion normale.

2. qui présente les couleurs de l’arc-en-ciel

9

1. LOIS DE L’OPTIQUE GÉOMÉTRIQUE. 1.2. Lois de Snell-Descartes.

Exemple – Le phénomène d’arc-en-cielL’observation d’un arc-en-ciel est possible quand le soleil éclaire une zone humide constituée par un ensemblede fines gouttelettes d’eau et que l’observateur se situe entre le soleil et la zone humide. C’est Descartes qui, lepremier, a donné une explication satisfaisante du phénomène en s’appuyant sur les lois de l’optique géométrique.Lorsqu’un rayon lumineux arrive sur une gouttelette, une partie de l’énergie lumineuse (98%) y pénètre puis ensort, soit directement (98%), soit après avoir subit une réflexion interne (2%). On montre alors que chaque gouttese comporte comme un réflecteur déviant la lumière d’un angle D fonction de l’incidence et de l’indice de réfractionmais indépendant de la taille des gouttes. Si l’on effectue un lancer de rayons sur une goutte d’eau, la lumièrediffusée se répartie essentiellement le long d’un arc. Le phénomène de dispersion donne alors naissance à des arcsirisés (cf. simulation à l’adresse https://femto-physique.fr/simulations/opt_simu6.php)Un observateur attentif remarquera la présence d’un arc secondaire moins intense dont les couleurs sont inverséespar rapport à l’arc primaire : cet arc provient d’une double réflexion à l’intérieur.

10

2 LES MIROIRS

Ce chapitre est consacré à l’étude des miroirs et plus particulièrement du miroir plan ainsi que des miroirssphériques. On montre comment ces systèmes permettent la formation des images.

Sommaire2.1 Généralités sur les systèmes optiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

2.1.1 Stigmatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122.1.2 Aplanétisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

2.2 Le miroir plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152.2.1 Stigmatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152.2.2 Aplanétisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

2.3 Le miroir sphérique dans l’approximation de Gauss . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162.3.1 Description . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162.3.2 Notion de foyers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172.3.3 Construction des rayons lumineux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182.3.4 Formule de conjugaison . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

Ce chapitre est accessible en ligne à l’adresse :

https://femto-physique.fr/optique/miroirs-spheriques.php

11

2. LES MIROIRS. 2.1. Généralités sur les systèmes optiques.

2.1 Généralités sur les systèmes optiques2.1.1 Stigmatisme

Sources de lumière

On distingue usuellement les sources primaires qui sont des sources autonomes de lumière (comme parexemple le soleil, une lampe, une flamme etc.) des sources secondaires qui renvoient la lumière par réflexion,diffraction ou diffusion (comme par exemple la lune, la plupart des objets de notre environnement, etc.).L’optique géométrique s’intéressant au trajet de la lumière, la nature de la source n’a pas d’importance.

Une source de lumière peut se décomposer en une infinité de sources ponctuelles émettant des rayonslumineux, a priori, dans toutes les directions de l’espace. La figure 2.1 illustre quelques types de faisceauxissus d’un point source.

Source ponctuelleisotrope

Source ponctuelleanisotrope

Source ponctuelle àl’infini

Fig. 2.1 – Quelques exemples de sources ponctuelles.

Système optique centré

On appelle système optique centré tout système constitué d’éléments transparents (dioptres) ou réfléchis-sants (miroirs) et possédant un axe de symétrie de révolution appelé axe optique. Ce système transformeun rayon lumineux incident en un rayon émergeant dans une direction, a priori différente de la directionincidente. Si le rayon émergeant ressort par la face d’entrée, on parle de système catadioptrique, sinon onparle de système dioptrique.

Par la suite, tous les systèmes optiques seront considérés centrés.

Stigmatisme

Considérons un point source A envoyant des rayons lumineux sur un système optique. On dira que A estun objet ponctuel réel. Le système est stigmatique si les rayons émergeant ou leurs prolongements secoupent tous en un même point. Deux cas de figure se présentent :

1. Les rayons émergeants convergent en un point A’. Ce point lumineux peut être enregistré sur une plaquephotosensible sans nécessiter de système optique annexe. On dit qu’il s’agit d’une image réelle.

2. Les rayons émergeants semblent provenir d’un point A’ (leurs prolongements se coupent en A’). Dansce cas, on ne peut pas capturer A’ sur une plaque photosensible mais on peut le voir à l’œil nu : eneffet, pour l’œil, tout se passe comme s’il y avait un point lumineux en A’ de telle sorte que si l’œilfait la mise au point en A’, un point lumineux sera produit sur la rétine. on dit que A’ est une imagevirtuelle.

12

2. LES MIROIRS. 2.1. Généralités sur les systèmes optiques.

Système Optique

Objet réel Image réelle

•A

•A’

Objet réel Image virtuelle

Système Optique

•A

•A’

Fig. 2.2 – Formation de l’image d’un objet ponctuel réel par un système optique stigmatique.

Focalisons maintenant un faisceau sur un système optique de telle sorte que le point de convergence A desrayons se trouve dans ou derrière le système (cf. Fig. 2.3). Dans ce cas on dit que A est un objet virtuel.Là encore, si les rayons émergeants ou leurs prolongements se coupent tous en un même point A’, on diraque le système est stigmatique.

Objet virtuel Image réelle

Système Optique

•A

•A’

Objet virtuel Image virtuelle

Système Optique

•A

•A’

Fig. 2.3 – Formation de l’image d’un objet ponctuel virtuel par un système optique stigmatique.

Relation de conjugaison

Lorsqu’un système donne d’un point objet A une image A’, on dit qu’il conjugue A et A’ ou que A’ estle conjugué de A. La relation de conjugaison est la relation mathématique qui relie la position de A aveccelle de A’ :

f(A, A′) = 0

Pour schématiser le fait qu’un système optique (SO) conjugue un objet A et une image A’ on écrit

A (SO)−−−→ A’

Exemples

Mis à part le miroir plan que nous étudierons en détail dans la partie 2.2, il n’existe pas de systèmeoptique rigoureusement stigmatique pour tout point. Par contre il est, en général, possible de trouver laforme que doit avoir un système optique pour conjuguer deux points particuliers. Par exemple, le miroirparabolique est rigoureusement stigmatique pour le couple (∞,F) : l’image d’un point à l’infini sur l’axe derévolution est le foyer de la surface parabolique. De même, l’ellipse conjugue parfaitement ses deux foyers(Fig. 2.4)

13

2. LES MIROIRS. 2.1. Généralités sur les systèmes optiques.

FF’

miroir elliptique

F

miroir parabolique

Fig. 2.4 – Exemples de stigmatisme rigoureux.

Grandissement longitudinal

Considérons un segment lumineux AB sur l’axe optique. L’imageest nécessairement un segment A’B’ sur l’axe optique puisque lasymétrie de révolution oblige tout rayon incident confondu avecl’axe optique à sortir en restant sur l’axe optique. On définit alorsle grandissement longitudinal

γℓ = A’B’AB

Système Optique

•A B

•A’ B’ +

2.1.2 Aplanétisme

Un système optique est le plus souvent destiné à donner d’un objet étendu une image la plus nettepossible que l’on peut recueillir sur un capteur généralement plan et perpendiculaire à l’axe optique. Aussi,il est souhaitable que l’image d’un objet plan soit également plane.

AplanétismeUn système optique est aplanétique s’il donne de tout objet lumineux situé dans un plan perpendiculaireà l’axe optique une image plane également perpendiculaire à l’axe optique.

Le système optique présentant un axe de révolution, on peut étu-dier le système dans un plan contenant l’axe optique. Dans cecas il suffit que l’image d’un segment droit soit un segment droitpour parler d’aplanétisme. Cependant le segment image n’a pasnécessairement la même taille que le segment objet. On définitalors le grandissement transversal γt :

γt ≜A’B’AB

Système Optique

•A

B

•A’

B’

+

+

• Si γt > 1, l’image est droite et agrandie.

• Si 0 < γt < 1, l’image est droite et rétrécie.

• Si −1 < γt < 0, l’image est renversée et rétrécie.

• Enfin, si γt < −1, l’image est renversée et agrandie.

14

2. LES MIROIRS. 2.2. Le miroir plan.

Remarque : La définition des grandissements fait intervenir des mesures algébriques ce qui suppose d’orienterles axes. Les résultats ne dépendent pas du choix de cette orientation mais il est d’usage d’orienter l’axe horizontalde gauche à droite (comme le sens de la lumière) et l’axe vertical de bas en haut.

2.2 Le miroir planLe miroir plan est une surface plane dont le pouvoir de réflexion est proche de 1. C’est le seul type de

miroir qui soit rigoureusement stigmatique et aplanétique, comme nous allons le voir.

2.2.1 Stigmatisme

Considérons un point source A envoyant des rayonslumineux sur un miroir plan. Une simple constructiondes rayons réfléchis montre que tous les rayons émer-geants semblent provenir d’un point A’, image virtuellede A. De la même manière, si l’on inverse le sens dela lumière, on constate que l’image d’un objet virtuelplacé en A’ est une image réelle placée en A. En résuménous avons

Objet réel Miroir plan−−−−−−−→ Image virtuelleObjet virtuel Miroir plan−−−−−−−→ Image réelle

+

+

•A

•A’

On voit donc sur ces deux exemples que le miroir est un système qui donne d’un point objet lumineux unpoint image que l’on peut, soit capturer directement sur un écran (image réelle), soit capturer à l’aide d’unsystème optique (œil, appareil photo, etc.). Le miroir plan est donc rigoureusement stigmatique. La relationde conjugaison qui lie la position de l’objet A à celle de l’image associée A’ s’écrit

AH = HA’ ♡ (2.1)

où H est le projeté orthogonal de A sur le miroir : l’image de A est le symétrique orthogonal de A.

2.2.2 Aplanétisme

Gauche

Droite

Droite

Gauche

Fig. 2.5 – Formation d’une image avec un miroir plan. L’image est inversée (gauche/droite) mais pas renversée(haut/bas).

15

2. LES MIROIRS. 2.3. Le miroir sphérique dans l’approximation de Gauss.

La symétrie orthogonale étant une isométrie, l’image que donne un miroir plan conserve ses dimensions.Il n’y a donc aucune déformation. Plus précisément, pour un objet AB perpendiculaire à l’axe optique, on a

γt = A’B’AB

= 1

et pour un objet AB sur l’axe optique,

γℓ = A’B’AB

= −1

Dans le cas du miroir, on a γℓ = −1 ce qui traduit l’inversion gauche-droite.

2.3 Le miroir sphérique dans l’approximation de Gauss2.3.1 Description

FC+

F C+

Fig. 2.6 – Miroirs sphériques : miroir concave (à gauche) et miroir convexe (à droite).

Un miroir sphérique est une calotte sphérique de centre C et de sommet S rendue réfléchissante. L’axede symétrie est l’axe optique du miroir. Cet axe est habituellement orienté de la gauche vers la droite car lalumière arrive de la gauche (par convention). On distingue deux types de miroirs sphériques :

le miroir concave est un miroir sphérique tel que SC < 0,

le miroir convexe est un miroir sphérique tel que SC > 0.

Une simulation (cf. Fig-2.7) du trajet des rayons provenant d’un point A situé à l’infini sur l’axe montre queles rayons réfléchis ne se coupent pas en un seul point : il n’ y a pas stigmatisme rigoureux ! En revanche, sil’on se limite aux rayons proches de l’axe optique et de faible inclinaison par rapport à celui-ci (ces rayonssont dit paraxiaux), les rayons se coupent quasiment tous en un même point image : il y a stigmatismeapproché. Cela constitue l’approximation de Gauss.

De la même manière, on montre que si l’on se limite aux rayons paraxiaux, l’image d’un segment droitest aussi un segment droit. Ainsi, le miroir sphérique présente un aplanétisme approché.

Approximation de GaussSi les rayons sont peu inclinés de l’axe optique et peu écartés, on se trouve alors dans le cadre des conditionsde Gauss. Dans ces conditions, on admettra que le miroir sphérique est aplanétique et stigmatique : L’imaged’un segment droit est un segment droit.

Remarque : Le miroir sphérique n’est rigoureusement stigmatique que pour un point lumineux situé en C (objetréel dans le cas du miroir concave et virtuel dans le cas convexe). En effet, tout rayon issu de C est réfléchi enrebroussant chemin de telle sorte que l’image de C est lui même.

16

2. LES MIROIRS. 2.3. Le miroir sphérique dans l’approximation de Gauss.

FC FC

Fig. 2.7 – Conditions de stigmatisme approché : L’image d’un point est un point (ici un point à l’infini surl’axe) si les rayons font des angles faibles et sont proches de l’axe optique (rayons paraxiaux).

2.3.2 Notion de foyersDeux points jouent un rôle particulier dans tout système optique centré : le foyer objet F et image F’.

Définitions

Foyer image : l’image d’un point à l’infini sur l’axe est le foyer image F’. La distance focale image f ′ estla mesure algébrique SF’.

Foyer objet : un point à l’infini sur l’axe est l’image du foyer objet F. La distance focale objet f est lamesure algébrique SF.

Dans le cas des miroirs sphériques, le principe du retour inverse de la lumière implique

F = F’

La position des foyers s’obtient grâce aux relations de Descartes. Dans les conditions de Gauss, on montreque le foyer est le milieu de [CS] :

SF’ = SF = SC2 = f = f ′ ♡ (2.2)

Démonstration

Démontrons ce résultat dans le cas particulier du miroir concave.

I

α

F’C S

y

Un rayon parallèle à l’axe optique coupe l’axe optique suite à la réflexion en I. Les lois de la réflexionpermettent de montrer que le triangle CF’I est isocèle et donc que :

cos α = R/2CF’ =

√1 − sin2 α

17

2. LES MIROIRS. 2.3. Le miroir sphérique dans l’approximation de Gauss.

de plus, si l’on note y la distance entre le rayon incident et l’axe optique, on a

sin α = y

R

Ainsi, on aCF’ = R

2√

1 −(

yR

)2

Cette formule montre que la position du foyer dépend de la position du rayon par rapport à l’axe optique :ainsi le miroir sphérique n’est pas rigoureusement stigmatique. Par contre, dans l’approximation de Gauss,c’est-à-dire pour y ≪ R on obtient à l’ordre 1 en y/R :

CF’ = R

2 + O( y2

R2 )

F’ est donc le milieux de [CS].

2.3.3 Construction des rayons lumineuxPour construire les images d’un objet étendu on obéira à ces quelques principes :

• On se placera dans l’approximation de Gauss : il y a donc stigmatisme approché et aplanétisme ap-proché. Pour trouver l’image d’un point il suffit de considérer deux rayons issus de ce point ; tous lesautres issus du même point passeront nécessairement par le point image. De plus, l’image d’un pointsur l’axe optique étant sur l’axe optique, pour trouver l’image d’un objet droit vertical AB (A est surl’axe optique et B est l’extrémité de l’objet) il suffit de trouver B’ l’image de B ; on sait alors quel’image est A’B’ où A’ est le projeté orthogonal de B’ sur l ’axe optique.

• Avant toute chose il faut placer l’objet.Si l’objet AB est réel, il est forcément à gauche du miroir (là où la lumière peut se propager) et lesrayons sont issus de chaque point de l’objet.Si l’objet est virtuel, il se situe à droite du miroir et les rayons “objets” se dirigent vers l’objet maissont réfléchis avant d’atteindre l’objet.

• Pour trouver l’image d’un point il faut choisir des rayons dont on connait le comportement.

– un rayon horizontal arrivant sur un miroir sphérique convergera en F’ s’il est concave et divergeraen semblant provenir de F’ si le miroir est convexe.

– un rayon passant par C (cas concave) ou dont le prolongement passe par C (cas convexe) rebroussechemin.

– un rayon arrivant en S est réfléchi de façon symétrique par rapport à l’axe optique.

• Une fois les rayons tracés on détermine si l’image est réelle ou virtuelle. Si les rayons issus de B secoupent effectivement en B’, alors B’ est une image réelle. On pourra la capturer sur un écran. Si lesrayons issus de B divergent après réflexion en semblant provenir de B’, alors B’ sera une image virtuellevisible à l’œil nu mais que l’on ne pourra pas capturer sur un écran.

Les figures 2.9 et 2.8 montrent différents cas de figure pour le miroir concave et convexe.

18

2. LES MIROIRS. 2.3. Le miroir sphérique dans l’approximation de Gauss.

F

CF

CF

Objet Image construction

rétrécie

agrandie

réel

réelle

renverséevirtuelle

virtuelle

virtuelle

droite

virtuelle

droite

Fig. 2.8 – Construction des images pour un miroir convexe.

19

2. LES MIROIRS. 2.3. Le miroir sphérique dans l’approximation de Gauss.

FC

F

C F

C F

Objet Image construction

droiterétrécie

droite

agrandie

virtuelle

réellevirtuel

réel

réel

réel

renverséeagrandie réelle

renverséerétrécieréelle

Fig. 2.9 – Construction des images pour un miroir concave.

20

2. LES MIROIRS. 2.3. Le miroir sphérique dans l’approximation de Gauss.

2.3.4 Formule de conjugaisonLa formule de conjugaison est la relation qui relie la position objet A avec la position de l’image A’.

On l’obtient rigoureusement à l’aide des lois de Descartes, mais on peut l’obtenir à l’aide de considérationsgéométriques (les notions de foyers objet et image étant admises). Pour cela nous allons calculer le gran-dissement transversal de deux manières différentes. Aidons nous de la formation d’une image réelle par un

• •A C F

A’

B

B’

S

Fig. 2.10 – Construction d’image avec un miroir concave.

miroir concave ; les résultats se généraliseront à toutes les situations et pour tous les miroirs sphériques.La figure 2.10 permet d’écrire, à l’aide des formules de Thales,

γt = A’B’AB

= −SA’SA

= FSFA

= FA’FS

On pose f ′ = SF’ et f = SF . Bien sûr ici, f = f ′. Les formules du grandissement permettent d’obtenirdeux relations :

• Relation avec origine aux foyers (relation de Newton) :

F’A’ × FA = ff ′ ♡ (2.3)

• En développant FA = FS + SA et FA’ = FS + SA’, on obtient la relation avec origine au sommet :

1SA

+ 1SA’

= 2SC

= 1f

= 1f ′ ♡ (2.4)

21

3 LES LENTILLES MINCES

Cette fiche de cours porte sur les lentilles minces. L’approche est essentiellement descriptive et repose surla maîtrise de la construction des rayons lumineux.

Sommaire3.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23

3.1.1 Description . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 233.1.2 Notion de foyers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 243.1.3 Plans focaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

3.2 Formation des images . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263.2.1 Construction des rayons lumineux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 263.2.2 Formules de conjugaison . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 283.2.3 Projection d’une image . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 293.2.4 Lentilles accolées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

Ce chapitre est accessible en ligne à l’adresse :

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22

3. LES LENTILLES MINCES. 3.1. Généralités.

3.1 Généralités3.1.1 Description

Une lentille mince est formée par l’association de deux dioptres sphériques de grand rayon de courburepar rapport à l’épaisseur de la lentille.

R2

R1

axe optique

C1C2 S1 S2

e

n

Fig. 3.1 – Lentille optique.

Plus précisément, si l’on note R1, R2 les rayons de courbure, C1, C2 les centres de courbure et e l’épaisseurde la lentille, on a

e ≪ R1 e ≪ R2 et e ≪ C1C2

Dans l’approximation des lentilles minces, les sommets S1 et S2 sont considérés confondus en un point Oappelé centre optique.

On considèrera que les lentilles sont plongées dans l’air d’indice n′ ≃ 1. On distingue deux types delentilles :

• les lentilles à bords minces qui sont convergentes,

• les lentilles à bords épais qui sont divergentes.

Lentilles convergentes Symbole Lentilles divergentes Symbole

Fig. 3.2 – Les différentes formes de lentilles minces.

Aberrations géométriques

La lentille n’est pas un système rigoureusement stigmatique. On dit que la lentille présente des aberrationsgéométriques.

La figure 3.3 montre qu’une lentille plan-convexe donne d’un point à l’infini sur l’axe une image ponctuelleà condition que son épaisseur soit faible devant son rayon de courbure ou, ce qui est équivalent, que les rayons

23

3. LES LENTILLES MINCES. 3.1. Généralités.

eR2

= 20%

eR2

= 3%

Fig. 3.3 – Aberrations géométriques : simulation du trajet de la lumière traversant deux lentilles convergentesplan-convexe de même rayon de courbure et d’épaisseur différente.

considérés soient peu éloignés de l’axe optique. On pourrait montrer qu’il faut également que l’inclinaisondes rayons soit faible ;

Approximation de GaussLes défauts des lentilles s’observent surtout quand les rayons sont très inclinés par rapport à l’axe optiqueou très éloignés de l’axe optique. L’approximation de Gauss ou l’approximation paraxiale consiste à selimiter aux rayons peu inclinés et peu éloignés de l’axe optique. Dans ce cadre, on admettra que

1. Les lentilles sont stigmatiques : l’image d’un point est un point. C’est ce qui permet la formation desimages.

2. Les lentilles sont aplanétiques : l’image d’un objet perpendiculaire à l’axe optique est perpendiculaireà l’axe optique.

Aberrations chromatiques

L’indice variant avec la longueur d’onde (phénomène de dispersion), la lumière rouge n’aura pas le mêmecomportement que la lumière bleue. Ainsi, en lumière polychromatique, l’image que donne une lentille serairisée 1. On parle alors d’aberrations chromatiques. On lutte contre ce défaut en ajoutant des lentilles quipermettent de compenser la dispersion chromatique (cf. § 3.2.4).

3.1.2 Notion de foyersDans le cadre de l’approximation de Gauss, l’image d’un point est un point. Deux points jouent un rôle

particulier dans les lentilles : il s’agit des foyers objet et image.1. Irisé : Qui a les couleurs de l’arc-en-ciel.

24

3. LES LENTILLES MINCES. 3.1. Généralités.

milieu dispersif

Fig. 3.4 – Aberrations chromatiques : le trajet des rayons lumineux dépend de la longueur d’onde.

Foyer image

Par définition, l’image d’un point à l’infini sur l’axe est le foyer image F’. Dans le cas d’une lentilleconvergente, le foyer image est réel alors qu’il a le statut d’image virtuelle pour une lentille divergente.

On définit la distance focale imagef ′ ≜ OF’

F’

Lentille convergente

F’

Lentille divergente

Foyer objet

Par définition, un objet lumineux placé au foyer objet F aura pour image un point à l’infini sur l’axe.Dans le cas d’une lentille convergente, le foyer objet est réel alors qu’il a le statut d’objet virtuel pour unelentille divergente.

De façon analogue, on définit la distance focale objet

f ≜ OF

F

Lentille convergente

F

Lentille divergente

On montre que dans le cas des lentilles minces dont les milieux extrêmes sont identiques, on a

f = OF = −OF’ = −f ′ ♡ (3.1)

25

3. LES LENTILLES MINCES. 3.2. Formation des images .

Cette relation est évidente pour les lentilles symétriques (principe du retour inverse de la lumière) ; dansce cas O est le centre de symétrie de la lentille. Elle est valable pour les lentilles asymétriques parce que l’onse place dans l’approximation des lentilles infiniment minces. Pour une lentille convergente, f ′ > 0 ; pourune lentille divergente f ′ < 0.

On définit la vergence V d’une lentille par

V ≜n′

f ′ = 1f ′ si n′ = 1 ♡ (3.2)

Il s’agit donc d’une quantité algébrique qui a la dimension de l’inverse d’une longueur. dans le SI, on l’exprimeen dioptrie (δ) : 1 δ = 1 m−1. Plus V est grand plus la lentille est convergente.

Remarque : On montre que V = k(n − 1), où n est l’indice du matériaux dans lequel est taillée la lentille et k

un facteur géométrique qui dépend des courbures des dioptres formant la lentille. On comprend ainsi l’origine desaberrations chromatiques : le foyer rouge n’est pas au même endroit que le foyer bleu à cause de la dispersion.

3.1.3 Plans focauxOn appelle plan focal image, le plan perpendiculaire à l’axe optique passant par F’. De même, on appelle

plan focal objet, celui perpendiculaire à l’axe optique et passant par F.Du fait de l’aplanétisme supposé des lentilles minces, on peut affirmer que l’image d’un point à l’infini se

situe dans le plan focal image. Il découle de la même façon que toute objet situé dans le plan focal objet ason image située à l’infini (pas nécessairement sur l’axe optique).

3.2 Formation des images3.2.1 Construction des rayons lumineux

Pour construire l’image d’un objet étendu on obéira à ces quelques principes :

• On se placera dans l’approximation de Gauss : il y a donc stigmatisme approché et aplanétisme ap-proché. Pour trouver l’image d’un point il suffit de considérer deux rayons issus de ce point ; tous lesautres issus du même point passeront par le point image. De plus, l’image d’un point sur l’axe optiqueétant sur l’axe optique, pour trouver l’image d’un objet droit vertical AB (A est sur l’axe optique et Best l’extrémité de l’objet) il suffit de trouver B’ l’image de B ; on sait alors que l’image est A’B’ avecA’ situé sur l’axe optique tel que A’B’ est perpendiculaire à l’axe optique.

• Avant toute chose il faut placer l’objet. Si l’objet AB est réel, il est forcément à gauche de la lentille etles rayons sont issus de chaque point de l’objet. Si l’objet est virtuel, il se situe à droite de la lentilleet les rayons “objets” se dirigent vers l’objet mais sont réfractés avant d’atteindre l’objet.

• Pour trouver l’image d’un point il faut choisir des rayons dont on connait le comportement.

– un rayon horizontal arrivant sur une lentille convergera en F’ si elle est convergente et divergeraen semblant provenir de F’ si la lentille est divergente.

– un rayon passant ou se prolongeant en F ressortira horizontalement.– un rayon passant par O n’est pas dévié.

• Une fois les rayons tracés on détermine si l’image est réelle ou virtuelle. Si les rayons issus de B secoupent effectivement en B’, alors B’ est une image réelle. On peut la capturer sur un écran. Si lesrayons issus de B divergent après réfraction en semblant provenir de B’, alors B’ est une image virtuellevisible à l’œil nu mais que l’on ne peut pas capturer directement sur un écran.

26

3. LES LENTILLES MINCES. 3.2. Formation des images .

+

A

B

A’

B’

L

O F’F

Objet Imageréel réelle

renversée

+

A

B

A’

B’ L

O F’F

Objet Imageréel virtuelle

agrandiedroite

+

A

B

A’

B’

L

O F’F

Objet Imagevirtuel réelle

rétréciedroite

Fig. 3.5 – Construction des images pour une lentille convergente

+

A

B

A’

B’

L

OF’ F

Objet Imageréel virtuelle

rétréciedroite

27

3. LES LENTILLES MINCES. 3.2. Formation des images .

+

A

B

A’

B’L

OF’ F

Objet Imagevirtuel réelle

droiteagrandie

+

A

B

A’

B’

L

OF’ F

Objet Imagevirtuel virtuelle

renversée

Fig. 3.6 – Construction des images pour une lentille divergente

3.2.2 Formules de conjugaisonLes formules de conjugaison sont des relations qui relient la position objet A avec la position de l’image

A’. On les obtient rigoureusement à l’aide des lois de Descartes, mais on peut les obtenir en utilisant lesconstructions géométriques (les notions de foyers objet et image étant admises). Pour cela nous allons calculerle grandissement de deux manières différentes.

+

A

B

A’

B’

L

O F’F

La figure ci-dessus permet d’écrire, à l’aide des lois de Thales

γ = A′B′

AB= OA’

OA= FO

FA= F’A’

F’O

On pose f ′ = OF’ et f = OF . Les formules du grandissement permettent d’obtenir la relation de conjugaisonavec origine aux foyers (dite formule de Newton) :

F’A’.FA = ff ′ Relation de Newton ♡ (3.3)

On peut aussi préférer une relation qui exprime les positions de l’image et de l’objet par rapport aucentre. Partant de la relation précédente on peut écrire

28

3. LES LENTILLES MINCES. 3.2. Formation des images .

(F’O + OA’)(FO + OA) = ff ′

Si les milieux extrêmes sont identiques on a f = −f ′ = OF = −OF’ de sorte que la relation devient

(OA’ − f ′)(OA + f ′) = −f ′2

Développons puis divisons par f ′OA’ OA. On trouve

1OA’

− 1OA

= 1f ′ Relation de Descartes ♡ (3.4)

Relation avec origine au centre (dite loi de Descartes). Notez que cette relation est moins générale que larelation de Newton puisqu’elle suppose f ′ = −f .

Remarque : Bien que le raisonnement s’appuie sur la figure ci-dessus, les résultats obtenus sont valables pourtoutes les lentilles minces.

3.2.3 Projection d’une imageIl est courant de vouloir agrandir un objet pour en apprécier les détails en projetant l’objet réel sur un

écran. Les constructions géométriques précédentes montrent que la relation

objet réel L−→ image réelle

n’est possible qu’avec une lentille convergente. La technique de projection consiste alors à éclairer un objetréel puis à placer une lentille convergente et enfin à placer un écran pour recueillir l’image réelle. Notons D

la distance objet–écran, x la distance objet–lentille et f ′ la distance focale image de la lentille. D’après laformule de conjugaison on a

1D − x

+ 1x

= 1f ′

ce qui donne l’équation du second degré suivante

x2 − Dx + f ′D = 0

équation qui a deux solutions réelles à condition que le discriminant soit positif :

∆ = D2 − 4f ′D ≥ 0 ⇒ D ≥ 4f ′

Il faut donc une distance objet–écran supérieure à 4 fois la distance focale de la lentille.Lorsque D = 4f ′ la racine est double et vaut x = D

2 : la lentille est donc au milieu entre l’objet et l’écran.On parle d’un montage 2f-2f. Dans ce cas le grandissement vaut -1 ; l’image est donc simplement inversée.

Lorsque D > 4f ′ il y a deux positions possibles : x± = D2

(1 ±

√1 − 4f ′

D

). Lorsque la lentille est proche

de l’objet (x = x−), le grandissement γ− est -en valeur absolue- supérieur à 1 : l’image est renversée etagrandie. Lorsque la lentille est placée loin de l’objet (x = x+), le grandissement γ+ est -en valeur absolue-inférieur à 1 : l’image est renversée et rétrécie. Il est facile de montrer que

γ−γ+ = 1

On retiendra que si l’ on veut agrandir un objet en le projetant sur un écran à l’aide d’unelentille convergente on aura intérêt à utiliser une lentille de petite focale, à placer l’objet prèsde la lentille mais à une distance supérieure à f ′ puis à placer un écran assez loin de telle sorteque D > 4f ′. Il suffit ensuite de jouer sur la position de la lentille pour voir apparaître uneimage nette sur l’écran.

29

3. LES LENTILLES MINCES. 3.2. Formation des images .

3.2.4 Lentilles accoléesConsidérons deux lentilles L1 et L2, de vergence V1 et V2 et montrons qu’en les accolant on constitue unsystème optique qui se comporte comme une lentille mince.

Considérons un point lumineux A sur l’axe optique. La lentille L1 en donne une image A1 qui devientobjet pour L2 laquelle en donne une image finale A’. Relions la position de A’ avec celle de A par rapportau centre optique commun, appelé O. On a

1OA1

− 1OA

= V1 et 1OA’

− 1OA1

= V2

d’où l’on déduit en sommant ces relations :1

OA’− 1

OA= V1 + V2

Ainsi, deux lentilles minces accolées se comportent comme une lentille mince de centre optiquele centre des deux lentilles et de vergence équivalente

Veq = V1 + V2 ♡ (3.5)

Application : lentille achromatiquePour corriger les défauts chromatiques d’une lentille on accole en général une lentille très dispersive de faible vergenceet de signe opposé pour former un système achromatique (on dit un achromat).Considérons une lentille convergente d’indice n1 et de vergence V1 et une lentille divergente d’indice n2 (tailléedans un matériau différent) que l’on accole à la lentille convergente. La vergence de l’ensemble est V = V1 + V2 =k1(n1 −1)+k2(n2 −1) où k1 et k2 sont des facteurs géométriques. Lorsque la longueur d’onde varie, la vergence varie(dispersion) de dV = k1dn1 +k2dn2. On cherche par exemple à ce que la vergence soit la même pour deux longueursd’ondes extrêmes du spectre visible : l’une bleue l’autre rouge. On doit donc avoir k1(n1B −n1R)+k2(n2B −n2R) = 0.Ainsi il faut choisir un matériaux telle que

k2

k1= −n1B − n1R

n2B − n2R

Ainsi un rayon rouge convergera au même endroit que le rayon bleu. Pour un rayon jaune, le foyer sera peu éloigné.Cette correction modifie la vergence de l’ensemble. En effet, on obtient

V = k1[(n1 − 1) − n1B − n1R

n2B − n2R(n2 − 1)]

Notons au passage que si l’on choisit deux matériaux identiques, alors l’achromat est forcément afocal (V = 0 sin2 = n1). En général on souhaite que la correction modifie peu la focale de la lentille que l’on corrige, c’est pourquoion utilise un matériaux telle que n2B − n2R ≫ n1B − n1R : il faut donc choisir un matériau correcteur très dispersifcomme par exemple du Flint extra dense.

Verre Indice Dispersion nB − nR

Fluorine CaF2 1,4895 7, 2.10−3

Crown C 1,5125 8, 5.10−3

Light Flint (LF1) 1,5731 13, 4.10−3

Flint (LaK10) 1,720 14, 3.10−3

Flint Extra Dense (SF6) 1,8052 31, 6.10−3

30

4 QUELQUES INSTRUMENTS

Ce chapitre aborde quelques applications courantes.

Sommaire4.1 L’œil humain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32

4.1.1 L’œil normal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 324.1.2 Quelques défauts de l’œil . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

4.2 La loupe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 334.2.1 Principe d’une loupe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 334.2.2 Grossissement d’une loupe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34

4.3 La lunette astronomique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 344.3.1 Principe de la lunette astronomique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 344.3.2 Grossissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35

4.4 L’appareil photographique réflex . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 364.4.1 Principe du Réflex . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 364.4.2 Champ angulaire d’un appareil photo . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 374.4.3 Profondeur de champ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

4.5 Le microscope . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 394.5.1 Principe du microscope . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 394.5.2 Grossissement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

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31

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.1. L’œil humain.

4.1 L’œil humain

4.1.1 L’œil normal

L’œil est l’organe de la vision. Il est constitué par une cavité sphérique contenant un corps transparent,l’humeur vitrée. La lumière pénètre dans l’œil par un orifice circulaire situé au centre de l’iris, la pupille.Le cristallin constitue avec la cornée et l’humeur aqueuse une lentille qui projette sur la rétine une imagerenversée des objets situés devant l’œil. La rétine est le capteur des informations visuelles qu’elle convertiten message nerveux destiné au cerveau.

Le cristallin est plus qu’une simple lentille. En effet il se déforme pour faire varier sa vergence et ainsifaire la mise au point sur l’objet observé : on dit que l’œil accommode.

Punctum remotum

Un œil normal (dit emmétrope) au repos (pas d’accommodation) perçoit une image nette d’un pointéloigné à l’infini. Ce point, le plus éloigné pour une vision nette, est appelé punctum remotum.

Punctum proximum

dm

θ

Le point le plus proche qui puisse être vu nettement est le punctumproximum. Pour un jeune adulte, le punctum proximum est situé à unedistance dm ≈ 20 cm.

Ainsi un maximum de détails est perçu si l’objet est placé au punctumproximum. Un détail de dimension h est vu sous un angle maximum (on

32

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.2. La loupe.

considère un petit objet de telle sorte que θ est petit)

θ ≃ h

dm

Pouvoir de résolution

La rétine est pavée de nombreuses cellules 1 qui jouent le même rôle que les pixels d’un capteur d’appareilphoto. La différence réside dans le fait que la répartition n’est pas homogène : la densité de cellules est plusimportante au centre d’où un maximum d’acuité visuelle au centre 2. Lorsque deux points lumineux donnentlieu à deux images ponctuelles reçues par la même cellule, ces deux images ne sont pas distinguées mais aucontraire perçues comme un point unique. On retiendra qu’un œil normal arrive à distinguer deux pointslumineux séparés de 1 mm à la distance de 3 m ce qui correspond à un pouvoir de séparation angulaire

θmin = 1′ d′arc = 1/60 °

En France, on dit que l’œil normal a une acuité visuelle de 10 dixième.

4.1.2 Quelques défauts de l’œil

Le fonctionnement de l’œil peut présenter quelques anomalies par rapport à l’œil emmétrope. Citons enquelques une :

• Myopie : anomalie de l’œil dans laquelle l’image d’un objet éloigné se forme en avant de la rétine.L’œil est trop convergent. On peut corriger la myopie en plaçant devant l’œil une lentille divergente.

• Hypermétropie : anomalie de l’œil dans laquelle l’image d’un objet éloigné se forme en arrière dela rétine. L’œil n’est pas assez convergent. En plaçant une lentille convergente adaptée on corrigel’hypermétropie.

• Astigmatisme : anomalie de l’œil dans laquelle un même point d’un objet donne une tache imageentraînant une vison floue, de loin comme de près. La cornée (et parfois le cristallin) présente uneforme irrégulière que l’on corrige en plaçant devant l’œil un verre présentant deux courbures différentessuivant deux axes perpendiculaires.

• Presbytie : La presbytie n’est pas à proprement parler une anomalie de l’œil, il s’agit d’un vieillisse-ment normal du cristallin qui l’empêche d’accommoder de manière satisfaisante. Le punctum proximums’éloigne avec l’âge.

4.2 La loupeL’invention de la loupe se perd dans la nuit des temps et il est difficile d’attribuer un inventeur de la

loupe. Par exemple Sénèque (4 av. JC, 65 ap. J.C) notait déjà que : “une écriture mince et embrouillée paraîtplus grosse et plus distincte à travers une boule remplie d’eau”.

4.2.1 Principe d’une loupe

1. Il existe deux types de cellules : les bâtonnets sensibles aux faibles luminosités et les cônes sensibles aux couleurs2. Pour être plus précis, il existe une région appelée la fovea où l’on ne trouve que des cônes extrêmement serrés. C’est là

que l’acuité visuelle est maximum en pleine lumière

33

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.3. La lunette astronomique.

L

f ′

θ′

La loupe est un instrument d’optique simple puisqu’elle se com-pose d’une seule lentille convergente. Son intérêt est double :

1. Elle permet de ne pas faire travailler l’œil ;

2. Chaque détail est vu sous un angle plus grand ; on dit qu’il ya grossissement (à ne pas confondre avec le grandissement).

La loupe se place de telle sorte que l’objet soit dans le plan focalobjet de la lentille, ainsi la loupe en donne une image virtuelle à−∞. Cette image virtuelle est donc vue par un œil normal sans accommoder.

4.2.2 Grossissement d’une loupeLe grossissement G d’un appareil est défini par

G = θ′

θ♡ (4.1)

où θ′ est l’angle sous lequel on voit un détail dans l’image alors que θ est l’angle maximum sous lequel l’œilnu peut le voir. Ici l’image est virtuelle et vu à l’infini sous l’angle

θ′ = h

f ′

alors qu’un œil nu verrait ce détail sous l’angle

θ = h

dm

Ainsi, une loupe présente un grossissementG = dm

f ′

On aura donc intérêt à choisir une lentille de petite focale si l’on veut un fort grossissement.Dans le commerce, on indique les grossissement en prenant dm = 25 cm. Par exemple une loupe de

grossissement commercial Gc = 5 présentera une focale f ′ = 5 cm.

4.3 La lunette astronomiqueLa lunette astronomique permet d’observer les détails d’objets lointains (considérés à l’infini) ; son inven-

tion est probablement due à un artisan opticien hollandais, Hans Lippershey (1570-1619) à la fin du XVIe

siècle.

4.3.1 Principe de la lunette astronomiqueDans son principe, la lunette est constituée de deux parties :

1. Un objectif dont le rôle est de ramener l’image d’un astre sur Terre. L’objectif est une lentille conver-gente de grande focale f ′

1 qui projette l’astre dans son plan focal.

2. Un oculaire qui joue le rôle d’une loupe. L’oculaire permet de grossir l’image que donne l’objectif.

La lunette donne donc d’un objet considéré à l’infini, une image virtuelle à l’infini. Le système ne présentedonc pas de foyer (ses foyers sont à l’infini) : on dit que la lunette est afocale. Pour qu’il en soit ainsi, il suffitde placer le foyer image de l’objectif dans le plan focal objet de l’oculaire. L’encombrement d’une lunettevaut donc ℓ = f ′

1 + f ′2.

34

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.3. La lunette astronomique.

à l’infiniobjet étendue ’θ

oculaire de focale f’2Objectif de focale f’1

θ

f’

plan focal image de l’objectif

Fig. 4.1 – Principe de la lunette astronomique

Le disque oculaire

Une construction des rayons entrant dans la lunette montre que le faisceau sortant se présente sous laforme d’un tube dont le diamètre rétrécit puis augmente. La zone où le diamètre est minimum est appelédisque oculaire. L’étude des rayons permet de montrer que le disque oculaire est l’image de la pupilled’entrée (entrée de l’objectif) par l’oculaire. On aura intérêt à placer son œil dans le cercle oculairepour recevoir le maximum de lumière.

Quelques inconvénients

La lunette présente quelques défauts. Pour une observation précise, il faut une optique irréprochable (lesaberrations géométriques et chromatiques doivent être corrigées). De plus, pour avoir un fort grossissement ilfaut un objectif de grande focale, d’où un encombrement important. Le télescope (instrument d’observationdes astres construit à partir de miroirs) présente l’avantage de produire des grossissements supérieurs avecmoins d’aberrations et moins d’encombrement.

4.3.2 Grossissement

Si l’on note θ le diamètre apparent de l’astre, c’est-à-dire l’angle sous lequel est vu l’astre depuis la Terre,on a :

θ ≃ h

f ′1

avec h la taille de l’image intermédiaire. L’image est virtuelle vue sous l’angle

θ′ = h

f ′2

Le grossissement de la lunette vaut alors

G = θ′

θ= f ′

1f ′

2♡ (4.2)

On aura donc un fort grossissement si f ′1 ≫ f ′

2 ce qui explique qu’une lunette puissante est forcémentencombrante. Par exemple pour la lunette Lunar 70 800 on a f ′

1 = 800 mm et f ′2 = 4 mm d’où un

grossissement G = 200.

35

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.4. L’appareil photographique réflex.

4.4 L’appareil photographique réflex

4.4.1 Principe du Réflex

1 2 3 4

567

©J. Roussel – Sept.2012

1. Objectif

2. Diaphragme

3. Penta-prisme

4. Viseur

5. Capteur

6. Miroir pivotant

7. Trajet de la lumiére

L’appareil photo Réflex est constitué de trois éléments :

1. L’objectif. C’est par là que rentre la lumière. La quantité de lumière est contrôlée par un diaphragmede rayon variable R. L’objectif est un système centré convergent contenant plusieurs lentilles. Dans unsoucis de simplification, on réduira ce système à une lentille mince convergente de focale f ′.

2. Le miroir et le pentaprisme. La lumière venant de l’objectif est réfléchie (reflex) par un miroir puispar un penta-prisme permettant de redresser l’image que voit le photographe à travers le viseur.

3. Le capteur. Lors du déclenchement, le miroir pivote pour laisser passer la lumière qui arrive alors surun film photosensible s’il s’agit d’un appareil argentique, ou d’un capteur CCD s’il s’agit d’un Réflexnumérique.

La mise au point consiste à déplacer l’objectif par rapport au capteur de façon à conjuguer un certain planobjet avec le capteur. En fonction de la quantité de lumière rentrante, le temps de capture est calculé. Unlong temps de capture (en général au dessus de 1/30 s) nécessitera l’utilisation d’un pied si l’on veut éviterle “flou de bougé” ; pour fixer une image d’un objet en mouvement il est crucial d’avoir un court temps decapture.

Appelons do la distance objet-lentille et di la distance lentille-capteur. Pour faire l’image d’un objet àphotographier sur le capteur il faut vérifier

1di

+ 1do

= 1f ′

En général, la focale est de l’ordre de quelques cm alors que do est de l’ordre du mètre de sorte que dans laplupart des situations courantes, on a

do ≫ f ′ ⇒ di ≃ f ′

36

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.4. L’appareil photographique réflex.

4.4.2 Champ angulaire d’un appareil photoLe champ angulaire ∆θ correspond au champ de vision de l’objectif. On définit un champ angulaire

horizontal et vertical.

∆θ

≃ f ′

Supposons l’appareil réglé à l’infini de sorte que le capteur est placé dans le plan focal image de l’objectif.Appelons ℓ la dimension du capteur (en largeur ou en hauteur). C’est cette quantité qui limite l’angle devue de l’appareil photo. En effet, on a

tan ∆θ

2 = ℓ

2f ′

On voit donc qu’adopter un objectif de grande focale diminue le champ de vision (et agrandie l’image). Onnote aussi qu’adopter un petit capteur impose des objectifs de petite focale à champ angulaire constant :c’est la stratégie des compacts numériques.

Exemples – Champ angulaire de différents appareils

• Appareil argentique avec un film 24 × 36 mm et un objectif de 35 mm de focale : on trouve

∆θh = 54° et ∆θv = 38°

• Compact numérique équipé d’un capteur de 7, 18 × 5, 32 mm et doté d’une focale 7,4 mm (caractéristiquesdu Canon G7) : on trouve

∆θh = 52° et ∆θv = 33°

Autrement dit, ce compact possède un champ angulaire similaire à un objectif 35 mm sur un Réflex.

• Téléobjectif de 135 mm de focale en 24 × 36 : on trouve

∆θh = 15° et ∆θv = 10°

4.4.3 Profondeur de champCette notion joue un rôle importante dans la prise de vue photographique. Il s’agit de la longueur de

l’intervalle dans lequel tout objet donne une image que l’on peut considérer net. On considère généralementqu’une tache sera perçue comme un point si son diamètre ϕ est inférieur à ϕ0 = 100 µm. Supposons qu’unpoint A ait pour image A’ situé à la distance algébrique x du capteur. Se formera alors sur le capteur, unetache de diamètre ϕ donné par le théorème de Thales :

ϕ

2R= ± x

OA’Si l’on fait l’approximation OA’ ≃ f ′, on en déduit que l’intervalle de netteté dans le plan image vaut

∆′ = 2|x| ≃ f ′ϕ0R

37

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.4. L’appareil photographique réflex.

+

Objectif capteur

• •A A’

O

Fig. 4.2 – Construction associée au calcul de la profondeur de champ.

Cet intervalle est associé à un intervalle de netteté ∆ dans le plan objet dont la dimension s’obtient à l’aidedu grandissement longitudinal :

∆′

∆ = γℓ

Rappelons que pour une lentille, le grandissement longitudinal est relié au grandissement transversal

γℓ = γ2t =

(OA’OA

)2≃ f ′2

OA2

In fine, l’intervalle de netteté objet, dite profondeur de champ, vaut

∆ ≃ ϕ0OA2

Rf ′ (4.3)

Que nous dit ce résultat ?

1. La profondeur de champ augmente quand la focale diminue. Ainsi, les appareils numériques compactsdonnent des photos avec une grande profondeur de champ ce qui est intéressant pour les photos despaysage mais l’est moins pour le portrait.

2. La profondeur de champ augmente lorsque la distance de mise au point augmente.

3. On peut jouer sur la profondeur de champ en agissant sur l’ouverture. Réduire l’ouverture augmentea profondeur de champ. En effet, lorsque l’on réduit le diamètre du diaphragme d’ouverture, on réduitdu même coup le diamètre ϕ de la tache sur le capteur.

Exemple – Calcul de la profondeur de champ pour un objet situé à 10 m

• Téléobjectif de 135 mm de focale et une ouverture N = f ′/R = 2, 8 :

∆ = 102 × 2, 8 × 100.10−60, 1352 = 1, 5 m

• Compact numérique de focale 7,4 mm de même ouverture :

∆ = 102 × 2, 8 × 100.10−60, 00742 = 510 m

38

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.5. Le microscope.

4.5 Le microscope

4.5.1 Principe du microscope

Le microscope, à l’instar de la lunette astronomique, se compose de deux éléments :

• Un objectif convergent dont le rôle est d’agrandir l’objet observé. Pour cela on cherchera à rapprocherl’objet du plan focal objet de l’objectif.

• Un oculaire qui se comporte comme une loupe et qui permet de grossir l’image intermédiaire.

Par construction, l’objectif et l’oculaire sont solidaires dans un tube que l’on peut translater minutieuse-ment à l’aide d’une molette. On note ∆ = F′

1F2 l’intervalle optique.Le réglage consiste à placer l’objet suffisamment proche du plan focal objet afin que l’image se forme

dans le plan focal objet de l’oculaire. Ce dernier en donne alors une image à l’infini évitant à l’œil un effortd’accommodation. La construction des rayons montre que l’image virtuelle est retournée par rapport à l’objetétudié.

+

A

B

L1 L2

A

BA’

B’

F’1F2

∆θ′

Fig. 4.3 – Principe du microscope optique.

Limitations

À cause du phénomène de diffraction, on ne peut pas voir des détails de l’ordre de λ ≃ 0, 5 µm dansle domaine visible. Pour observer des détails plus petits il faut utiliser des ondes de longueur d’onde pluscourtes. C’est le principe du microscope électronique qui utilise des faisceaux électroniques dont la longueurd’onde associée est donnée par la relation de DeBroglie

λ = h

mvdualité onde-corpuscule)

et permet d’obtenir des résolutions allant jusqu’à mille fois celle d’un microscope optique.

39

4. QUELQUES INSTRUMENTS. 4.5. Le microscope.

4.5.2 GrossissementLa propriété essentiel d’un microscope est son grossissement. Calculons son grossissement dit grossisse-

ment commercial en considérant un punctum proximum standard de 25 cm.L’angle maximum sous lequel un œil normal standard peut voir l’objet AB vaut, dans l’approximation

des petits anglesθ = AB

dm

Alors que l’image virtuelle A’B’ située à l’infini est vue sous l’angle

θ′ = A’B’f ′

2

De sorte que le grossissement commercial vaut

Gc = θ′

θ= A’B’ dm

AB f ′2

= |γt| × Goc (4.4)

où l’on reconnait le grandissement transversale de l’objectif |γt| = A’B’/AB ainsi que le grossissement del’oculaire Goc. Le grandissement de l’objectif est lié à l’intervalle optique puisque

|γt| = F′1A′

f ′1

= ∆f ′

1⇒ Gc = ∆ dm

f ′1 f ′

2

Remarque : La valeur de |γt| est gravée sur l’objectif, celle de Goc sur l’oculaire, d’où l’utilité de la relation (4.4).Par exemple, un microscope muni d’un objectif x16 et d’un oculaire x10 possède un grossissement commercial

Gc = 10 × 16 = 160

40

Compléments

41

A PRINCIPE DE FERMAT

La nature agit toujours par les voies les plus courtes – Pierre de Fermat

Pierre de Fermat proposa que les rayons lumineux répondaient à un principe très général auquel on donnason nom. Ce principe, de nature variationnelle, permet à lui seul de retrouver toutes les lois de l’optiquegéométrique. Après une présentation de ce principe tel qu’il a été formulé par Fermat, on met en évidence lanécessité d’un énoncé plus général. On passe en revue différentes applications allant des lois de Snell-Descartesà l’équation fondamentale de l’optique géométrique.

Les deux premières parties de ce cours sont d’un accès facile et peuvent suffire pour une première approchedu principe de Fermat. En revanche, la dernière partie est plus exigeante, car elle demande une certainemaîtrise du calcul variationnel.

SommaireA.1 Le principe de moindre temps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

A.1.1 Énoncé de Fermat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43A.1.2 Propagation dans un milieu homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43A.1.3 Réflexion sur un miroir plan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43A.1.4 Réfraction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

A.2 Énoncé moderne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45A.2.1 La durée est-elle toujours minimale ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45A.2.2 Relation avec le chemin optique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47A.2.3 Stigmatisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48

A.3 Calcul de trajet lumineux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49A.3.1 Calcul variationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49A.3.2 Équation du rayon lumineux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50A.3.3 Exemple 1 : mirage optique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52A.3.4 Exemple 2 : mirage gravitationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53

Ce chapitre est accessible en ligne à l’adresse :

https://femto-physique.fr/optique/principe-de-fermat.php

42

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.1. Le principe de moindre temps.

A.1 Le principe de moindre tempsA.1.1 Énoncé de Fermat

En 1637, René Descartes (1596-1650) publie, en complément deson célèbre Discours de la méthode, un traité d’optique. Il y ex-plique notamment le phénomène de réfraction et prévoit la loi dessinus :

sin i1sin i2

= Cte

Les conceptions de Descartes reposent essentiellement sur l’ana-logie avec la mécanique et sa description prévoit notamment quela lumière va plus vite dans l’eau que dans l’air. Ces considéra-tions suscitent un débat au sein de la communauté scientifique,et des savants tels que Pierre de Fermat (1601-1665) contestentl’approche de Descartes. Fermat adopte un point de vue différent,reposant sur un principe d’économie.Il étend le principe de Héron d’Alexandrie relatif à la réflexion 1. Imaginez un rayon lumineux partant

d’un point A et se dirigeant jusqu’à un autre point B. Fermat propose que parmi tous les chemins possiblesentre A et B, la lumière emprunte seulement le chemin le plus rapide.

Principe de Fermat (1657)La lumière se propage d’un point à un autre de façon à minimiser son temps de trajet.

Il publiera ses résultats en 1662 dans synthèses pour les réfractions. Son principe est le premier principevariationnel de la physique ; il présente en outre l’intérêt d’être d’une très grande généralité, et nous verronsque son énoncé moderne contient en elle toute l’optique géométrique. De surcroît, ce point de vuevariationnel sera très fécond en physique puisqu’il mènera à la mécanique analytique jusqu’aux théoriesquantiques des champs[1].

A.1.2 Propagation dans un milieu homogèneIllustrons les premières conséquences élémentaires de ce principe.Dans un milieu homogène, la lumière se propage à la même vitesse partout. Dans ce cas, le trajet qui

minimise la durée entre deux points A et B correspond à la courbe de longueur minimale, c’est-à-dire ausegment [AB] si l’espace est euclidien 2. Ainsi, dans tout milieu homogène, la lumière se propage en lignedroite. Inversons le sens du parcours et –bien entendu– cela n’affecte pas la durée du trajet qui reste minimale.En conséquence, le chemin suivi est indépendant du sens de parcours.

En résumé, le principe de propagation rectiligne et celui du retour inverse de la lumière découlent natu-rellement du principe de Fermat.

A.1.3 Réflexion sur un miroir planConsidérons un rayon lumineux issu d’un point source A se propageant dans un milieu homogène en

direction d’un miroir plan. Après réflexion sur celui-ci, le rayon atteint le point B. Cherchons quel trajetdoit suivre la lumière. Pour cela, définissons le repère Oxyz de sorte que le plan xOz matérialise le miroir

1. Héron d’Alexandrie (1er siècle avant notre ère) avait déjà prouvé que la lumière qui se réfléchit sur un miroir plan empruntele chemin le plus court.

2. Dans un espace non euclidien, la courbe recherchée est appelée géodésique ; notion qui généralise la notion de droite dansles espaces courbes.

43

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.1. Le principe de moindre temps.

•A(x1, y1, 0)

I(x, 0, z)

•B(x2, y2, 0)

v1

u⃗x

u⃗y

⊙u⃗z

i1i2

Fig. A.1 – Réflexion sur un miroir plan.

plan. Plaçons A et B dans le plan xOy : on note (x1, y1, 0) et (x2, y2, 0) leurs coordonnées avec y1 > 0 ety2 > 0. Calculons la durée TAB du trajet d’un rayon qui se réfléchit en un point I de coordonnées (x, 0, z) àdéterminer. Notez que I n’est pas nécessairement dans le plan d’incidence, pour l’instant. La durée du trajetvaut

TAB = AI + IBv1

où v1 est la vitesse de la lumière. En vertu du théorème de Pythagore, on obtient

TAB(x, z) = 1v1

(√(x − x1)2 + y2

1 + z2 +√

(x − x2)2 + y22 + z2

)

La fonction TAB(x, y) présente un minimum si ∂T

∂x= 0 et ∂T

∂z= 0, c’est-à-dire si

⎧⎪⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎪⎩

(x − x1)√(x − x1)2 + y2

1 + z2+ (x − x2)√

(x − x2)2 + y22 + z2

= 0

etz√

(x − x1)2 + y21 + z2

+ z√(x − x2)2 + y2

2 + z2= 0

La dernière relation aboutit à z = 0. En d’autres termes, A, I et B appartiennent au plan perpendiculaireau miroir, qu’on appelle le plan d’incidence. On retrouve donc ici la première loi de la réflexion.

Quant à l’autre relation, elle donne(x − x1)

AI = (x2 − x)IB

égalité qui n’est possible que si x est compris entre x1 et x2 : le rayon réfléchi passe donc de l’autre côté dela normale. Si l’on appelle i1 et i2 les angles de chaque côté, la relation précédente se réécrit sin i1 = sin i2,soit

i1 = i2

Et la deuxième loi de la réflexion est ainsi prouvée.Remarque : un calcul de dérivée seconde permet de vérifier que la durée TAB(x, z) présente bien un mi-nimum local lorsque i1 = i2. Pour s’en convaincre, on pourra consulter la simulation située à l’adressehttps://femto-physique.fr/simulations/principe-de-fermat.php

A.1.4 RéfractionDe la même manière, le principe de Fermat permet de retrouver les lois de Snell-Descartes en y apportant

un éclairage nouveau. En effet, imaginons deux milieux transparents homogènes séparés par un dioptreplan. Appelons v1 et v2 les vitesses respectives de la lumière dans chacun de ces milieux. Pour simplifier,supposons le problème plan (on pourrait montrer comme précédemment que le rayon optimal reste dans le

44

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.2. Énoncé moderne.

v2

v1

•A(x1, y1)

I(x, 0)•

B(x2, y2)

u⃗x

u⃗y

i1

i2

Fig. A.2 – Réfraction à travers un dioptre plan.

plan d’incidence). Considérons A un point fixe du milieu 1 de coordonnées (x1, y1) et un point B du milieu 2de coordonnées (x2, y2) puis cherchons le trajet qui minimise le temps de parcours entre A et B. On comprendaisément que si la lumière se déplace plus vite dans le milieu 1, elle « aura intérêt » à allonger son parcoursdans ce milieu et à le raccourcir dans l’autre ce qui explique la réfraction. La durée TAB du trajet ne dépendalors que de la position du point incident I de coordonnées (x, 0) :

TAB = AIv1

+ IBv2

=√

(x − x1)2 + y12

v1+√

(x − x2)2 + y22

v2

Cette durée présente un extremum (minimum ici) si sa dérivée s’annule :dTAB

dx= 1

v1

(x − x1)√(x − x1)2 + y12

− 1v2

(x2 − x)√(x − x2)2 + y22

= 0

Par conséquent, (x − x1) et (x2 − x) sont de même signe, ce qui signifie que x est entre x1 et x2 et que lerayon se réfracte en passant de l’autre côté de la normale (comme pour la réflexion). Si l’on fait intervenirles angles d’incidence et de réfraction i1 et i2, la dernière relation se ramène simplement à

sin i1v1

= sin i2v2

Non seulement on retrouve la loi de Snell-Descartes, mais on donne un sens physique aux indices de réfractionen prévoyant qu’ils doivent varier comme l’inverse de la vitesse de la lumière dans le milieu. La lumière doitdonc voyager moins vite dans l’eau que dans l’air car on sait que l’angle de réfraction diminue lors du passageeau-air. Il fallut attendre l’année 1850 pour confirmer cette prévision à l’origine du désaccord entre Fermatet Descartes. C’est Léon Foucault qui fournira la preuve mettant définitivement fin au dogme cartésien selonlequel la lumière se propage plus vite dans les corps denses.

En adoptant la convention que l’indice du vide vaut un, on obtient n ≜ cv et la relation de réfraction

s’écritn1 sin i1 = n2 sin i2 avec n1 = c

v1et n2 = c

v2

Remarque : un calcul de dérivée seconde permet de vérifier que la durée TAB présente bien un minimumlocal lorsque n1 sin i1 = n2 sin i2. On peut aussi s’en convaincre en jouant avec l’animation située à l’adressehttps://femto-physique.fr/simulations/principe-de-fermat.php.

A.2 Énoncé moderneA.2.1 La durée est-elle toujours minimale ?

Selon Fermat, la durée du trajet lumineux est supposée présenter un minimum local. Or, il existe dessituations simples où, à l’évidence, le principe initial de Fermat est invalidé. Analysons deux cas particuliers.

45

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.2. Énoncé moderne.

Le miroir elliptique

Considérons une surface elliptique de révolution dont la face interne est rendue parfaitement réfléchissante.Raisonnons dans le plan contenant l’axe de révolution. Dans ce plan, le miroir est représenté par une ellipse.On peut montrer que pour tout point M situé sur l’ellipse, on a

FM + F’M = Cte

où F et F’ sont deux points –que l’on appelle les foyers– placés sur l’axe de révolution de part et d’autre ducentre O.

I M

F’F O

Fig. A.3 – Miroir elliptique.

Prenons maintenant un rayon lumineux issu de F que l’on dirige vers le point I situé à l’intersection dumiroir et du plan de symétrie perpendiculaire à l’axe optique (Fig. A.3). Compte tenu des lois de la réflexion,le rayon se réfléchit en se dirigeant vers F’. La durée du trajet [FIF’] vaut donc

TFF’ = FI + IF’v

où v est la vitesse de la lumière dans l’air. Si maintenant on considère un point M sur l’ellipse, voisin de I,on a par construction,

FI + IF’ = FM + MF’

de sorte que le trajet [FIF’] n’est pas de moindre durée mais de durée stationnaire. Ici tous les rayons issusde F se réfléchiront en passant par F’ avec la même durée constante.

Le miroir sphérique concave

Imaginons maintenant un miroir sphérique concave de rayon R et de centre C. Fixons un point B dansla sphère mais ailleurs qu’en C et cherchons quel(s) trajet(s) peut parcourir un rayon lumineux s’il part deC et arrive en B après une réflexion.

Tout rayon issu de C arrive sur la surface sphérique en un point I avec un angle d’incidence nul, car [CI]est un rayon de la sphère. Par conséquent, le rayon doit se réfléchir avec également un angle nul, c’est-à-direrebrousser chemin. En conclusion, il n’existe que deux trajets possibles : ceux pour lesquels I, C et B sontalignés.

Intéressons nous de plus près au cas où C est entre I et B (Fig. A.4). Envisageons un trajet virtuel [CMB]avec M voisin de I sur la sphère et comparons sa longueur avec celle du trajet réellement emprunté par lalumière. Pour cela, définissons le point N comme l’intersection de la droite (BM) avec le cercle de centre Bet de rayon [BI]. On a

CI + IB = CM + NB > CM + MB

car NB > MB par hypothèse. Ainsi, le trajet [CIB] présente une durée localement maximum.

46

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.2. Énoncé moderne.

•N

I

•M

C B

Fig. A.4 – Miroir sphérique concave.

Comme on le voit, il existe des situations où la lumière choisit des trajets qui présentent des duréeslocalement maximales voire constantes, en contradiction avec l’énoncé de Fermat. On peut montrer 3 qu’ilfaut changer la formulation initiale en remplaçant le terme « durée minimale » par « durée stationnaire ».

Principe de FermatLors de son parcours entre deux points A et B, la lumière suit un trajet qui rend la durée de celui-cistationnaire par rapport à tout trajet infiniment voisin.

Précisons ce que le terme « stationnaire » signifie mathématiquement. Imaginons que C représente lacourbe effectivement suivie par la lumière entre A et B. Lorsque l’on modifie de façon infinitésimale C, touten fixant A et B, alors le temps de trajet TAB varie également de façon infinitésimale. Cependant, dans le casd’une durée stationnaire, sa variation est nulle au premier ordre. Une durée minimale ou maximale sont desdurées stationnaires mais la réciproque n’est pas vraie. Mathématiquement, cela signifie que la différentiellede TAB est nulle.

•A

•Bds

CdTAB = 0 avec A et B fixes

Fig. A.5 – Principe de Fermat.

A.2.2 Relation avec le chemin optiquePar définition, le chemin optique d’un rayon lumineux partant de A et arrivant en B est la quantité

LAB ≜ˆ B

An(M) ds avec M ∈ C ♡ (A.1)

c’est-à-dire l’indice de réfraction intégré le long du trajet lumineux C (ds est l’élément d’arc infinitésimal). Lechemin optique étant homogène à une longueur, il s’exprime en mètre. Notez que dans le vide, cette notionse confond avec la longueur d’arc

)

AB.

3. Un des résultats importants de l’optique ondulatoire stipule que le parcours de la lumière respecte le principe de Fermatdans son énoncé moderne lorsque λ → 0, c’est-à-dire dans la limite de l’optique géométrique.

47

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.2. Énoncé moderne.

Le temps de parcours est lié au chemin optique. En effet, en un point M de C, la lumière se propage à lavitesse v = c/n de sorte que la durée du trajet s’écrit

TAB =ˆ tB

tA

dt =ˆ B

A

ds

v(M) = 1c

ˆ B

An(M) ds

On trouve donc la relation simpleLAB = c TAB ♡ (A.2)

Le chemin optique est tout simplement proportionnel à la durée du trajet. On peut donc reformuler leprincipe de Fermat en terme de chemin optique :

Principe de FermatLors de son parcours entre deux points A et B, la lumière suit un trajet qui rend le chemin optique decelui-ci stationnaire par rapport à tout trajet infiniment voisin.

A.2.3 StigmatismeConsidérons un système optique constitué de dioptres et/ou de miroirs. Si tout rayon issu d’un point A

arrive, après avoir traversé le système optique, en un point A’, on dit que A’ est l’image de A, et le systèmeoptique est rigoureusement stigmatique vis à vis des points A et A’.

En vertu du principe de Fermat, un rayon lumineux issu de A et traversant le système optique, parviendraen A’ s’il existe un trajet qui présente un chemin optique stationnaire. Aussi, tous les rayons issus de Aarriveront en A’ si le chemin optique LAA’ est une fonction partout stationnaire, c’est-à-dire constante.

Condition de stigmatismeUn système optique est stigmatique vis à vis du couple objet-image (A,A’) si, et seulement si le cheminoptique LAA’ est constant pour tous les rayons lumineux joignant A à A’ à travers le système optique.

Excepté le miroir plan, il n’existe pas de système optique rigoureusement stigmatique pour tout point.En revanche, de nombreux systèmes présentent un stigmatisme rigoureux pour certains points particuliers.Par exemple :

• le miroir sphérique conjugue son centre avec lui même ;

• le miroir elliptique conjugue un foyer avec l’autre foyer ;

• la parabole conjugue un point à l’infini sur son axe optique avec son foyer.

Le stigmatisme est évidemment une propriété très recherchée si l’on souhaite former des images. Laplupart du temps, cette propriété n’est vérifiée que dans un cadre approximatif pour un ensemble restreintde rayons ; on parle alors de stigmatisme approché.

Application : lentille plan-convexe dans l’approximation paraxiale

Plaçons entre deux points A et A’ une lentille mince plan convexe, d’indice n. Appelons d1 et d2 lesdistances qui séparent ces points de la lentille. On souhaite déterminer le profil de la lentille, c’est-à-dire lafaçon dont l’épaisseur locale e(z) varie avec la coordonnée z, qui garantisse que A et A’ soient conjugués,ceci dans l’approximation paraxiale (Fig. A.6).

Prenons un rayon issu de A arrivant sur la lentille à la hauteur z et convergeant ensuite vers A’. Le cheminoptique se décompose en deux termes LAA’ = Lvide + ∆L où Lvide représente le chemin optique du rayondans le vide et ∆L, celui introduit par la lentille. D’après le théorème de Pythagore, on a

Lvide =√

d12 + z2 +

√[d2 − e(z)]2 + z2 ≃ d1 + d2 − e(z) + z2

2D

48

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.3. Calcul de trajet lumineux.

+

A A’

d1 d2

ze0

e(z)

Fig. A.6 – Lentille mince plan-convexe entre deux points conjugués.

à condition de poser D = d1d2/(d1 + d2) et de considérer z et e(z) petit devant d1 et d2.Le terme supplémentaire vaut simplement

∆L ≃ n e(z)

Pour ces deux calculs, on a utilisé l’approximation paraxiale puisque l’on a considéré le rayon dans la lentillequasi parallèle à l’axe optique. Finalement, le chemin optique vaut

LAA’ ≃ d1 + d2 + z2

2D+ (n − 1) e(z)

A et A’ seront conjugués (dans l’approximation paraxiale) si, et seulement si LAA’ est constant. Cetteconstante peut être obtenue en prenant z = 0 :

d1 + d2 + z2

2D+ (n − 1)e(z) = d1 + d2 + (n − 1) e0 soit e(z) = e0 − z2

2(n − 1)D

La lentille doit donc présenter un profil parabolique.Renversons maintenant le raisonnement. Donnons-nous une lentille plan-convexe de profil parabolique

e = e0 − az2 ; on sait alors que tout point A et A’ seront conjugués à condition que

a = 12(n − 1)D c’est-à-dire 1

d1+ 1

d2= 2a(n − 1) = V

On retrouve ainsi la formule de conjugaison des lentilles minces où V désigne la vergence. Notez que, comptetenu de l’approximation paraxiale, on peut approcher la surface parabolique par une sphère de rayon R =1/(2a). On retrouve alors le résultat des lentilles minces sphériques, notamment V = (n − 1)/R pour unelentille plan-convexe.

A.3 Calcul de trajet lumineuxLe principe de Fermat, en tant que principe variationnel, montre toute sa puissance lorsqu’il est associé

aux techniques mathématiques inventées par Euler et Lagrange au 19e siècle. La présentation qui suit reposesur ces techniques de calcul variationnel qui devraient faire parti du bagage de fond de tout bon physicien.

A.3.1 Calcul variationnelFixons deux points A et B dans le plan xOy et considérons une courbe d’équation y(x) passant par ces

deux points. Définissons l’intégrale

IAB[y] =ˆ xB

xA

f(x, y(x), y′(x)) dx

49

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.3. Calcul de trajet lumineux.

où f(x, y, y′) est une fonction connue à 3 variables de classe C1 et y′(x) la dérivée de y par rapport à x.Cette intégrale est un nombre dont la valeur dépend de la fonction y(x). On appelle ce type d’objets, unefonctionnelle. Le calcul variationnel permet de trouver la fonction y(x) qui rend IAB[y] stationnaire. C’estEuler le premier qui a établit le résultat suivant :

dIAB[y] = 0 ⇐⇒ ∂f

∂y= d

dx

(∂f

∂y′

)C’est l’équation d’Euler-Lagrange.

Exemple –Cherchons la courbe du plan qui relie deux points A et B et qui minimise la longueur d’arc

)

AB le long de la courbe.Cette longueur s’obtient en intégrant l’élément de longueur ds =

√dx2 + dy2 entre A et B. On obtient

)

AB =ˆ xB

xA

f(x, y(x), y′(x)) dx avec f(x, y, y′) =√

1 + y′2

Cherchant la courbe qui rend la longueur d’arc minimale (et donc stationnaire), on peut écrire l’équation d’Euler-Lagrange : ∂f

∂y= d

dx

∂f

∂y′ . Or, f ne dépend pas de y, par conséquent on trouve

∂f

∂y′ = Cte = y′√1 + y′2

Il en découle y′ = a, c’est-à-dire y(x) = ax + b, avec a et b deux constantes obtenues à l’aide des conditions auxlimites yA = y(xA) et yB = y(xB). Ainsi, comme attendu, le chemin qui rend stationnaire la longueur

)

AB est laligne droite. Ce chemin est de longueur minimale, car tout déformation du segment AB augmente la longueur

)

AB .

L’équation d’Euler-Lagrange s’étend également au cas où la fonction f dépend, non pas d’une seulefonction inconnue y(x), mais de n fonctions y1(x), . . . , yn(x). On retiendra le résultat suivant.

Équation d’Euler-LagrangeLa fonctionnelle

I[y1, . . . , yn] =ˆ xB

xA

f(x, y1(x), y′1(x), . . . , yn(x), y′

n(x)) dx

est stationnaire si∂f

∂yi= d

dx

(∂f

∂y′i

)pour i = 1 . . . n

A.3.2 Équation du rayon lumineuxAppliquons maintenant le calcul variationnel à la recherche du rayon lumineux dans un milieu transparent

inhomogène d’indice optique n(x, y, z) où x, y et z désignent les coordonnées cartésiennes. Le chemin optiqued’un trajet quelconque entre A et B s’écrit

LAB ≜ˆ B

An(x, y, z) ds

Le théorème de Pythagore permet de relier l’élément d’arc ds avec les déplacements cartésiens dx, dy et dz,via

ds =√

dx2 + dy2 + dz2 =√

1 + y′2 + z′2 dx

où y′ et z′ désignent les dérivées par rapport à x. Finalement, le chemin optique s’écrit

LAB =ˆ xB

xA

f(x, y(x), y′(x), z(x), z′(x)) dx avec f(x, y, y′, z, z′) = n(x, y, z)√

1 + y′2 + z′2

50

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.3. Calcul de trajet lumineux.

Le chemin optique est donc une fonctionnelle qui dépend de la forme du trajet via les fonctions y(x) et z(x).Le rayon lumineux étant de chemin optique stationnaire, on doit avoir⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩

∂f

∂y= d

dx

∂f

∂y′

∂f

∂z= d

dx

∂f

∂z′

soit

⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩∂n

∂y

√1 + y′2 + z′2 = d

dx

ny′√1 + y′2 + z′2

∂n

∂z

√1 + y′2 + z′2 = d

dx

nz′√1 + y′2 + z′2

utilisant le fait que ds =√

1 + y′2 + z′2 dx, on trouve

∂n

∂y= d

ds

(n

dy

ds

)et ∂n

∂z= d

ds

(n

dz

ds

)On obtient également la même équation pour x, à savoir

∂n

∂x= d

ds

(n

dx

ds

)Pour cela, il suffit d’exprimer le chemin optique en choisissant y comme variable d’intégration à la place dex. Ces trois équations aux dérivées partielles permettent d’obtenir l’équation du rayon lumineux dans toutmilieu. On peut les résumer par la relation vectorielle :

−−→gradn = dds

[n

(dx

ds−→ux + dy

ds−→uy + dz

ds−→uz

)]Or, le vecteur dx

ds−→ux + dy

ds−→uy + dz

ds−→uz représente le vecteur unitaire tangent au rayon, que nous noterons −→u .

Finalement, l’équation du rayon se met sous la forme

−−→gradn = dds

(n−→u ) ♡ (A.3)

Courbure des rayons

La relation (A.3) nous confirme bien que dans un milieu homogène (n = Cte) le rayon se propage en lignedroite (−→u =

−→Cte). À l’inverse, dans un milieu inhomogène, l’existence d’un gradient d’indice fait courber

les rayons lumineux. Voyons plus précisément comment se courbent les rayons. Par définition du rayon decourbure R, on a (cf. https://femto-physique.fr/mecanique/meca_C1.php)

−→u⊥

R≜

d−→uds

où −→u⊥ représente le vecteur normal au rayon et dirigé vers le centre de courbure. Or, d’après l’équation(A.3), on a

d(n−→u )ds

= nd−→uds

+ −→u dn

ds= −−→gradn

En prenant le produit scalaire avec le vecteur normal on aboutit à la relation

n

R=

−→u⊥ ·−−→gradn

n

Étant donné que le rayon de courbure est une quantité positive, l’angle formé par les vecteurs −→u⊥ et −−→gradn

est nécessairement aigu. Autrement dit :

Le vecteur gradient de l’indice est orienté dans le sens de la concavité du trajet

51

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.3. Calcul de trajet lumineux.

A.3.3 Exemple 1 : mirage optiqueLe phénomène du mirage le plus apparent, le mieux constaté, et qui a le plus attiré l’attentiongénérale, est celui que M. Monge a décrit et expliqué dans les Mémoires de l’Institut du Caire :lorsque les soldats français entrèrent dans le désert de l’Égypte, toute l’armée fut témoin d’uneffet d’optique aussi nouveau que remarquable : le pays qui forme une vaste plaine horizontaleparut tout couvert d’eau ; les villages bâtis sur de petits tertres... présentaient de loin, outre leurimage directe, une image renversée ; les soldats, séduits par l’illusion, couraient vainement verscette eau imaginaire pour étancher la soif qui les dévorait,... — Biot, Instit. Mém. sciences,1809, p. 5

Que ce soit sur une route surchauffée en été ou –comme nous le rapporte Gaspard Monge dans sesmémoires– dans une zone désertique, il peut nous arriver d’avoir l’impression que le sol réfléchit un coinde ciel bleu nous faisant croire à l’existence d’une plus ou moins grande étendue d’eau présente sur le sol.Ces mirages 4 sont liés à la courbure des rayons à proximité du sol surchauffé. En effet, l’air chaud étantmoins dense que l’air froid, l’indice optique augmente avec l’altitude ce qui fait naitre un gradient d’indicevertical. Par conséquent, les rayons se courbent comme indiqué sur la Figure A.7. L’observateur voit uneimage virtuelle du ciel en surimpression du sol.

••

BA

A’

B’

−→ux

−→uy

−→∇n

Air chaud

Air froid

Fig. A.7 – Courbure des rayons au voisinage d’un sol surchauffé.

Établissons l’équation différentielle du rayon en supposant que l’indice ne varie qui suivant l’altitude y

du lieu. Le chemin optique s’écrit, dans le plan xOy,

LAB =ˆ B

An(y) ds =

ˆ B

An(y)

√dx2 + dy2

On a le choix entre deux variables d’intégration : y ou x. Il se trouve que les calculs sont grandement simplifiéssi l’on choisit la variable y. Nous allons donc décrire la courbe de lumière par la relation à déterminer x(y).On obtient

LAB =ˆ yB

yA

n(y)√

1 + x′(y)2 dy

Selon le principe de Fermat, le rayon lumineux est le trajet qui rend stationnaire´ yB

yAf(y, x(y), x′(y)) dy avec

f(y, x, x′) = n(y)√

1 + x′2. L’équation d’Euler-Lagrange donne

∂f

∂x= d

dy

(∂f

∂x′

)c’est-à-dire 0 = d

dy

(n x′√1 + x′2

)on en déduit

n x′√1 + x′2

= a avec a = Cte

4. mirage : du latin miror, mirari : s’étonner, voir avec étonnement.

52

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.3. Calcul de trajet lumineux.

On notera que la constante d’intégration a représente l’indice de réfraction au sommet de la courbe C (lorsquex′ → ±∞). Si l’on note (x0, y0) les coordonnées du sommet, on a donc a = n(y0). Séparons maintenant lesvariables :

dx = ±a√n2 − a2

dy

Prolongeons le calcul en choisissant un modèle d’atmosphère. Pour simplifier notre propos, adoptons unmodèle linéarisé de n2 :

n2 = a2 + α(y − y0) avec α > 0

En substituant dans l’équation différentielle, on trouveˆ x

x0

dx = ± a√α

ˆ y

y0

dy√y − y0

L’intégrale se calcule aisément ; on obtient x−x0 = ±2a√

y − y0/√

α. Élevant au carré, on aboutit à l’équationdu rayon lumineux :

y = y0 + α

4a2 (x − x0)2

Le rayon lumineux adopte donc une trajectoire parabolique dont la courbure est d’autant plus prononcéeque le gradient d’indice est important.

A.3.4 Exemple 2 : mirage gravitationnelOn peut montrer, à partir des équations de la Relativité Générale, que la présence d’un champ de

gravitation déforme l’espace temps et allonge la durée d’un trajet lumineux par rapport au trajet dans unespace vide 5. Plus précisément, en présence d’un astre à symétrie sphérique de masse M , le temps que metla lumière pour aller d’un point A vers un point B vaut

TAB = 1c

ˆ B

A

(1 − 2ϕ

c2

)ds avec ϕ = −GM

r

où ϕ désigne le potentiel gravitationnel et r la distance entre l’astre et un point du rayon lumineux. Ainsi,tout se passe comme si la présence d’un astre modifiait l’indice de réfraction de l’espace. On peut écrire

n(r) = 1 − 2ϕ

c2 = 1 + 2GM

rc2

Notez que le terme 2GM/(rc2) est très faible pour une étoile. Par exemple, à la surface du Soleil ce termevaut environ 4.10−6. Il existe donc au voisinage des étoiles un faible gradient d’indice qui courbe les rayonslumineux. Ce phénomène, prévu dès 1915 par A. Einstein, fut observé la première fois par Eddington en1919 lors d’une éclipse solaire.

Cherchons à déterminer l’angle de déviation θ que subit un rayon lumineux au passage d’un astre demasse M à partir de l’équation (A.3). On a

−−→gradn = dds

(n−→u ) =⇒ [n−→u ]BA =ˆ B

A

−−→gradn ds

Prenons deux points A et B suffisamment éloignés de l’astre pour considérer que n = 1 en ces points. Deplus, une construction géométrique (cf. Figure A.8) fait apparaître que

∥−→u B − −→u A∥ = 2 sin θ

2 ≃ θ

5. C’est l’effet Shapiro prévu par Irwin Shapiro en 1964 et mis en évidence dès 1967 par l’étude de l’écho radar émis depuisla Terre et réfléchi par Mercure. Lorsque l’alignement Terre-Mercure se rapproche du Soleil, on mesure un retard de plus enplus important.

53

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.3. Calcul de trajet lumineux.

⋆A’

⋆A

•B −→u B

−→u Aθ

−→u A

−→u B

∆−→uθ

−→∇n

Fig. A.8 – Déviation d’un rayon lumineux au voisinage d’un astre massif.

Par ailleurs, −−→gradn = − 2c2

−−→gradϕ de sorte que l’on trouve, pour les faibles déviations

θ ≃ 2c2

ˆ B

A

−−→gradϕ ds

Cette relation ne nous aide guère, car l’intégrale nécessite de connaître l’équation du rayon. Cependant,puisque 2ϕ/c2 ≪ 1, on s’attend à ce que la déviation soit faible. On peut procéder à une approximationcouramment utilisée en théorie de la diffusion, et qui consiste à intégrer sur le chemin non perturbé, c’est-à-dire ici la ligne droite. Ce rayon non perturbé passe à la distance b de l’astre. Le calcul de l’intégrale donnealors ˆ ∞

−∞

−−→gradϕ ds =ˆ ∞

−∞−GM

r3−→r ds

=ˆ ∞

−∞− GM

(b2 + s2)3/2 (b−→u ⊥ + s−→u ) ds

=ˆ ∞

−∞− GM

(b2 + s2)3/2 (b−→u ⊥) ds

= −GMb −→u ⊥

[s

b2(b2 + s2)1/2

]∞

−∞ˆ ∞

−∞

−−→gradϕ ds = −2GM

b−→u ⊥

r

•M

bds −→u

−→u ⊥

s

Fig. A.9 – Schéma correspondant au calcul de l’angle θ.

Finalement, on trouve une déviation angulaire

θ = 4GM

b c2 (A.4)

Cet angle vaut 1,75" pour un rayon rasant le Soleil ; résultat qui fut confirmé en 1919 par Eddington. Uneconséquence immédiate est que si l’alignement A-B passe par le centre de l’étoile, on s’attend à observer,par symétrie de révolution, un anneau lumineux dit anneau d’Einstein. En 1936, Albert Einstein publia unarticle[einstein:1936aa] dans lequel il émettait des réserves sur notre capacité à observer ce type de miragesgravitationnels 6.

6. Dans son article sur l’effet de lentille gravitationnelle, A. Einstein écrit « Of course, there is no hope of observing this

54

A. PRINCIPE DE FERMAT. A.3. Calcul de trajet lumineux.

Fig. A.10 – Anneau d’Einstein presque complet suite à l’effet mirage produit par une galaxie rouge sur unegalaxie lointaine bleu.© ESA-Hubble-NASA.

En revanche, si le centre de l’astre déflecteur n’est pas dans l’alignement, le phénomène de déflexiongravitationnelle fait apparaître deux images (dues aux rayons passant par dessus et par dessous), en plus del’image due au trajet direct (visible si l’astre déflecteur est transparent). C’est d’abord ce type de mirageque l’on découvrit en premier. En effet, en 1979, l’équipe qui étudiait le quasar double Q0957+561 s’aperçutqu’il s’agissait, en réalité, d’un seul et même quasar dédoublé à cause de la présence d’une grosse galaxiesituée sur la ligne de visée. Depuis, de nombreux mirages gravitationnels furent observés. De nos jours, ceseffets dit de lentille gravitationnelle sont couramment utilisés pour sonder le cosmos et même pour détecterdes exoplanètes.

Remarque : Il est d’usage de parler d’effet de lentille gravitationnelle (gravitational lens effect) bien que, contrai-rement aux lentilles, ces systèmes gravitationnels ne présentent pas de foyers.

phenomenon directly. First we shall scarcely ever approach closely enough to such a central line. Second, the angle will defythe resolving power of our instruments ». Son pessimisme fut démenti à partir des années 80 où on a commencé à détecterquelques mirages gravitationnels en forme d’anneau.

55

POUR EN SAVOIR PLUS ...

Ouvrages1. Basdevant, J.-L. Le principe de moindre action et les principes variationnels en physique (Vuibert,

2010).3. Born, M. & Wolf, E. Principles of Optics : Electromagnetic Theory of Propagation, Interference and

Diffraction of Light 7e éd. isbn : 0521784492 (Cambridge University Press, 2000).

Autres sources2. Nandor, M. J. & Helliwell, T. M. Fermat’s principle and multiple imaging by gravitational lenses.

American Journal of Physics 64, 45–49 (1996).

56