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Opportunités et enjeux du développement de l’Afrique dans l’arène mondiale Actes de la Conférence économique africaine 2007

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  • Opportunits et enjeuxdu dveloppement

    de lAfriquedans larne mondiale

    Actes de la Confrenceconomique africaine 2007

  • Opportunits et enjeuxdu dveloppement

    de lAfriquedans larne mondiale

    Actes de la Confrenceconomique africaine 2007

    ECONOMICA

    49, rue Hricart, 75015 Paris

  • Ed. Economica, 2009

    Tous droits de reproduction, de traduction, dadaptation et dexcutionrservs pour tous les pays.

  • Remerciements

    Cet ouvrage regroupe une slection darticles prsents lors de la Conf-rence conomique africaine de 2007 qui sest tenue Addis-Abeba, en thio-pie, sur le thme Opportunits et enjeux du dveloppement de lAfriquedans larne mondiale . Complet et informatif, il constitue une lecture vive-ment recommande tous ceux qui veulent savoir comment lAfrique volueen raction aux nouveaux enjeux de la mondialisation.

    Si cette confrence a t une russite, cest principalement grce lexcel-lente collaboration qui a exist, au sein du comit dorganisation conjoint,entre la Banque africaine de dveloppement (BAfD) et la Commission cono-mique des Nations unies pour lAfrique (CEA). Nous souhaitons remercierles Conseils dadministration et les dirigeants de ces deux institutions pour lesoutien sans faille quils ont apport ce rapport, et en particulier MonsieurDonald Kaberuka, Prsident de la BAfD, ainsi que Monsieur Abdoulie Jan-neh, Secrtaire excutif de la CEA, pour leur aide prcieuse.

    Cet ouvrage a t rvis par divers spcialistes : le Professeur Jean-Franois Brun (Universit dAuvergne, France), le Professeur Sylvain EloiDessy (Universit Laval, Canada), le Professeur Gilles Dufrenot (Universitde Paris XII, France) et le Dr. Nama Pags (macroconomiste, Italie). Pourla version franaise de cet ouvrage, les articles ont t traduits par Architexte(Paris, France). Nous exprimons aussi toute notre gratitude Audrey Verdier-Chouchane, du Dpartement de la Recherche sur le Dveloppement de laBAfD, pour lefficacit avec laquelle elle a coordonn les travaux des rviseurs,des auteurs, des traducteurs, de lditeur et des imprimeurs. Enfin, noustenons fliciter les auteurs, dont les articles nous aident mieux cerner lesgrands dfis que doivent relever les conomies dAfrique.

    Les lecteurs sont galement invits consulter le site Web de la Conf-rence conomique africaine (http://www.afdb.org/aec).

    Louis Kasekendeconomiste en Chef

    Banque africaine de dveloppement

    Hakim Ben HammoudaDirecteur,

    Division du Commerce, de la Financeet du Dveloppement conomique

    Commission conomique pour lAfriquedes Nations Unies

  • Avant-propos

    La deuxime Confrence conomique africaine a montr que lacclra-tion du dveloppement conomique ncessite de combler le foss du savoir.En organisant cette confrence, les deux institutions phares de lAfrique (laBAfD et la CEA) prennent aujourdhui linitiative de faire en sorte que lesavoir devienne le moteur essentiel de la croissance conomique et du proces-sus de dveloppement. Cette confrence permet aux chercheurs de faire partde leur savoir aux dcideurs et de donner un retour dinformation qui orienteles priorits des politiques publiques.

    La Confrence 2007 a recommand de rinscrire la croissance surlagenda du dveloppement. Mme si chaque pays suivra sa propre voie enfonction de ses spcificits, il aura besoin de sapproprier lespace des politi-ques publiques. La mise profit des opportunits de croissance doit passer parlintgration des changes internationaux, lamlioration du climat des affai-res, le renforcement des institutions, laccumulation de capital humain, ainsique lincitation linnovation. Les pays dAfrique ont besoin dlaborer desstratgies pour mettre leurs abondantes ressources naturelles au service dunecroissance durable et plus rapide. Des institutions telles que la BAfD et laCEA, ainsi que dautres partenaires au dveloppement, peuvent contribuer defaon essentielle la ralisation de cet objectif. Ils doivent instaurer desguichets de financement innovants et revoir la hausse le financement desbiens publics rgionaux, qui jouent un rle essentiel dans lacclration de lacroissance et la promotion de lintgration rgionale.

    Cet ouvrage va susciter un dbat de qualit et contribuer combler lcartentre la recherche et la prise de dcision en matire de politique conomique.

    Donald KaberukaPrsident

    Banque africaine de dveloppement

    Abdoulie JannehSecrtaire Excutif

    Commission conomique pour lAfriquedes Nations Unies

  • Table des matires

    Remerciements....................................................................................... V

    Avant-propos .......................................................................................... VII

    Opportunits et enjeux du dveloppement de lAfriquedans larne mondiale : Introduction et vue densemble ........ XIII

    Lonce Ndikumana et Audrey Verdier-Chouchane

    Partie I : Questions commercialesAccords de partenariat conomique du Malawi et de la Tanzanie aveclUnion europenne : analyse empirique des effets de la rciprocit surles changes, les recettes douanires et le bien-tre, par ligne tarifaire ....... 1

    Evious K. Zogu & Josaphat P. Kweeka

    Les conomies sortant dun conflit et les accords de partenariatconomique UE-ACP : Le cas de la Sierra Leone ..................................... 71

    Olumuyiwa B. Alaba & Oluyemi A. Alaba

    Ententes commerciales rgionales en Afrique : conditions,exigences et implications pour lintgration rgionale............................... 93

    Babatunde Omilola

    Prparer les pays africains tirer avantage des ngociations commercialesinternationales permanentes et des accords complexes.............................. 123

    Bonapas Ongulo, Aime Murigande & Emily Nburu

    La confrence internationale de Tokyo sur le dveloppementde lAfrique (TICAD), cadre de coopration stratgique pourle commerce et linvestissement entre lAfrique et lAsie ........................... 153

    Nicholas Gouede

    Contraintes intrieures, caractristiques des entreprises et diversificationgographique des exportations manufacturires au niveau des entreprisesen Afrique................................................................................................ 167

    Yutaka Yoshino

    Partie II : Flux de capitaux, compte extrieur et detteEndettement extrieur public et Efficience Productive dans les Paysen Dveloppement................................................................................... 211

    Imed Drine & Mahmoud Sami Nabi

  • Dette extrieure et Financement du dveloppement conomiquede la Guine ............................................................................................ 231

    Bailo DialloDficits des balances courantes en Afrique subsaharienne :faut-il sen inquiter ?............................................................................... 263

    Patrick Osakwe & Sher Verick

    Cadre institutionnel et investissements des diasporas dans les paysen dveloppement.................................................................................... 283

    Georges Bertrand Tamokwe Piaptie

    Laccumulation de rserves dans les pays africains : sources, motivationset effets .................................................................................................... 309

    Adam Elhiraika & Lonce Ndikumana

    Partie III : Climat dinvestissementImpact de la fuite des capitaux sur linvestissement domestiqueen Zone Franc ......................................................................................... 344

    Ameth Saloum Ndiaye

    Le rle de linfrastructure de transport dans la capacit dattirer lIDEen Afrique................................................................................................ 385

    Jameel Khadaroo & Boopen Seetanah

    Linvestissement priv pour la transformation structurelle et la croissanceen Afrique : quelle est la place des petites et moyennes entreprises ? ......... 401

    Harry A. Sackey

    Corruption et croissance dans les pays africains :le canal de linvestissement....................................................................... 433

    Mina Baliamoune-Lutz & Lonce Ndikumana

    Partie IV : Politique macroconomique et convergenceLa convergence macroconomique en Afrique conduit-elle la croissance ? ........................................................................................ 449

    Hakim Ben Hammouda, Stephen N. Karingi, Angelica E. Njuguna& Mustapha Sadni Jallab

    Rformes commerciales et convergence relle dans la CEMAC ................ 477Daniel Gbetnkom

    Les Communauts Economiques Rgionales au Sein du NEPAD.Quelles Perspectives pour un Dveloppement conomiques et socialDurable en Afrique ?................................................................................ 501

    Septime Martin

    Espace macroconomique et conomies africaines :rhtorique ou ralit ? Une analyse empirique.......................................... 529

    Angelica E. Njuguna & Stephen N. Karingi

    X / Actes de la Confrence 2007

  • Partie V : Dveloppement humain et quitIngalits dans laccs aux services de sant pour une slectionde pays dAfrique : situation et consquences pour la politiquepublique .................................................................................................. 550

    Gladys Mutangadura, Adrian Gauci, Bartholomew Armah,Elizabeth Woldemariam, Daniel Ayalew & Biniam Egu

    Croissance, genre et quit Le NEPAD et la Renaissance de lAfrique :Mythe ou ralit ? .................................................................................... 581

    Sheila Bunwaree

    Des ingalits de genre lindice de qualit de vie des femmes ................. 599Valrie Brenger & Audrey Verdier-Chouchane

    Table des matires / XI

  • Opportunits et enjeuxdu dveloppement de lAfrique

    dans larne mondiale :Introduction et vue densemble

    Lonce Ndikumana et Audrey Verdier-Chouchane

    LAfrique est entre dans le nouveau millnaire en affichant une crois-sance conomique remarquable par rapport son niveau des annes 1980 etdu dbut des annes 1990. Cette amlioration sexplique par des facteursexternes et internes, dont lenvole des cours des matires premires, lapoursuite des rformes conomiques et larrt des hostilits dans plusieurspays de la rgion. Nanmoins, le continent se heurte toujours de srieusesdifficults dans plusieurs domaines importants : commerce, gouvernance,conflits, VIH/Sida, tuberculose et paludisme, scurit alimentaire, intgra-tion rgionale, lutte contre la pauvret, etc. De plus, la formulation de lapolitique conomique reste entrave par le manque de donnes sur lesprincipaux aspects conomiques pertinents pour le continent. Cest dans cecontexte quen 2006, la Banque africaine de dveloppement (BAfD) a dciddorganiser chaque anne une Confrence conomique africaine qui rassem-blerait des chercheurs et des dcideurs et leur permettrait de discuter desproblmes et des obstacles majeurs que rencontre le continent. La confrenceinaugurale sest tenue Tunis en 2006, conjointement avec le Consortiumpour la recherche conomique en Afrique (CREA). En 2007, la Commissionconomique des Nations Unies pour lAfrique (CEA) a co-organis laConfrence.

    Avec pour thme Opportunits et enjeux du dveloppement de lAfri-que dans larne mondiale , la deuxime dition de la Confrence conomi-que africaine sest droule du 15 au 17 novembre 2007 Addis-Abeba, enthiopie. Cette confrence a runi quelque 500 participants comprenant desconomistes, des chercheurs et des dcideurs du monde entier, qui, en chan-geant des ides sur les dfis de dveloppement de lAfrique, ont permisdamliorer laccs linformation et, par consquent, la qualit des politi-

    ques publiques dans la rgion.Le prsent ouvrage rassemble une slection de contributions prsentes

    lors de la confrence, et qui sarticulent autour de cinq grands thmes :(i) changes commerciaux ; (ii) Flux de capitaux, compte extrieur et dette ;(iii) Climat dinvestissement ; (iv) Politique macroconomique et conver-gence ; et (v) Dveloppement humain et quit.

  • 1. changes commerciaux

    Les articles sur les changes en Afrique abordent un large ventail desujets, dont les ngociations commerciales internationales, les accordsde partenariat conomique, les accords commerciaux, les droits de douaneet leurs effets sur lintrt gnral, la diversification des dbouchs pourles changes des entreprises africaines, la collaboration dans les changes etlinvestissement, ainsi que les groupements rgionaux. Selon la plupart deces contributions, la motivation premire de la promotion des changes etde lintgration rgionale rside dans la volont de relever la productivitafin de faciliter la ralisation des objectifs de dveloppement nationaux telsque la cration demplois, lacclration de la croissance et le recul de lapauvret.

    Les Accords de partenariat conomique (APE) conclus entre les pays ACP(Afrique, Carabes, Pacifique) et lUnion europenne (UE) constituent unaspect important cet gard. Cet aspect est trait dans les articles dEvious K.Zogu et Josaphat P. Kweeka, pour le Malawi et la Tanzanie, et par Olu-muyiwa B. Alaba et Oluyemi A. Alaba, dans le contexte de la Sierra Leone.Les accords commerciaux bilatraux tels que les APE sont censs favoriserlintgration rgionale, mais on peut redouter quils ne soient asymtriques etfinissent en fait par ralentir le processus dintgration. Les auteurs notent que,mme si ces accords peuvent se traduire par une amlioration de lexcdentcommercial et de la rente pour le consommateur, les avantages pour lintrtgnral sont en partie contrebalancs par leffet de diversion sur les changeset la baisse des recettes issues des droits de douane. Cette situation est trsproccupante, car la plupart des pays dAfrique comptent sur leurs recettesdouanires pour alimenter leur budget. Lune des mesures prconisesconsiste largir la base fiscale afin dattnuer la dpendance vis--vis desrecettes douanires.

    Dans le cas du COMESA, Babatunde Omilola souligne le fait que lesregroupements commerciaux rgionaux en Afrique saccompagnent dun cotdopportunit substantiel, car ils sont inefficients et engloutissent de grosvolumes de fonds publics. Bonapas Ongulo, Aime Murigande et EmilyNburu analysent les principaux facteurs qui entravent lintgration des paysafricains dans le systme commercial mondial. Leur argumentaire va en faveurde lassistance trangre, qui doit aider les pays dAfrique se doter decapacits de ngociation commerciale lheure o les accords commerciauxbilatraux et rgionaux complexes se multiplient, paralllement aux accordscommerciaux multilatraux de lOMC. Les pays africains doivent aussi rsou-dre le problme inhrent leur participation simultane plusieurs groupe-ments rgionaux.

    Larticle de Nicholas Gouede largit les questions commerciales au cadrede la TICAD (la Confrence internationale de Tokyo sur le dveloppementde lAfrique) et la collaboration dans le domaine des changes et de linves-tissement entre lAsie et lAfrique. Il exprime la ncessit dune aide financire

    XIV / Actes de la Confrence 2007

  • pour les petites et moyennes entreprises africaines. Enfin, Yutaka Yoshinodcrit lorientation gographique des exportations des entreprises et la diversi-fication globale des dbouchs pour les exportations de produits manufactursafricains. Le degr de diversification des dbouchs est fortement corrl lintensit des exportations au niveau de lentreprise. Des facteurs technologi-ques tels que les nouvelles gnrations de capital et laccs Internet produi-sent galement des effets considrables sur la diversification des exportations.La taille, la participation des intrts trangers et les facteurs technologiquessont les principaux lments qui expliquent les performances lexportationdes entreprises.

    2. Flux de capitaux, compte extrieur et dette

    Ce sous-ensemble englobe des aspects relatifs la dette et la croissance,au dficit du compte courant, laccumulation de rserves et la contributiondes expatris fonds envoys par eux aux investissements productifs. Lesauteurs recommandent la mise en place de mcanismes qui permettront desuivre efficacement les transferts provenant de ltranger et les envois de fondsdes migrs africains. Ils soulignent la ncessit de renforcer ltat de droit etla gouvernance politique et dentreprise, et dinstaurer un cadre institutionnelde nature faire reculer la corruption. LAfrique doit redoubler defforts dansce domaine si elle veut surmonter les obstacles qui entravent son dveloppe-ment, et en particulier lobsolescence de son infrastructure.

    Concernant les liens entre la dette et la croissance, Imed Drine et Mah-moud Sami Nabi notent que les pays trs endetts affichent les inefficiencesles plus fortes, ce qui confirme quune allocation optimale de la dette entre lesecteur public et le secteur priv joue un grand rle dans lamlioration delefficience. La dette exerce un effet ngatif sur la croissance, comme ledmontre Bailo Diallo dans une tude consacre la Guine.

    La contribution de Patrick Osakwe et de Sher Verick indique que laplupart des pays dAfrique affichent toujours un compte courant dficitaire,mme en ralisant de meilleures performances conomiques. On a observquune progression de la croissance du PIB en volume, la diversification desexportations, louverture des changes et dune gouvernance dmocratiqueconstituent autant de facteurs qui sont fortement susceptibles de rduirelenvergure du dficit du compte courant. Georges Bertrand TamokwePiaptie labore un cadre dincitations reposant sur la qualit des institutionset la crdibilit de ltat sengager dans les rformes politiques afin dedrainer les envois de fonds de la diaspora vers des projets dinvestissementpriv.

    Ltude dAdam Elhiraika et de Lonce Ndikumana fait remarquer quela rcente accumulation de rserves par certains pays dAfrique sest accompa-gne de lapprciation de la monnaie nationale sans impact significatif surlinflation, bien qu long terme, elle exerce un effet positif significatif sur le

    Introduction et vue densemble / XV

  • niveau des prix. On a donc suggr que les pays africains doivent reconsidrerleur stratgie de gestion des rserves dans un cadre de politique de dveloppe-ment conomique plus tendu, favorable une croissance base largie etprivilgiant surtout linvestissement dans linfrastructure.

    3. Climat de linvestissement

    Ce sous-ensemble aborde limpact des fuites de capitaux sur linvestisse-ment intrieur, le transport et lIDE, ainsi que les effets de la corruption sur lacroissance conomique par le biais de linvestissement.

    Dans la zone franc, Ameth Saloum Ndiaye dmontre que les fuites decapitaux psent sur linvestissement intrieur. Cette influence ngative estplus manifeste sur linvestissement priv que sur linvestissement public. Lerapatriement de capitaux nationaux qui se sont retrouvs ltranger pourraitdonc permettre de relever le niveau de linvestissement intrieur. JameelKhadaroo et Boopen Seetanah observent, quant eux, un lien positif entrela disponibilit de linfrastructure et lIDE. Lamlioration de linfrastructureest ainsi une condition importante lattraction des IDE en Afrique.

    Pour Harry A. Sackey, les PME peuvent jouer un rle important dans latransformation structurelle des conomies africaines. Laccs au financement,les allgements fiscaux, une assistance la formation et lexposition auxtechnologies encouragent la cration et la croissance des PME en Afrique.

    Mina Baliamoune-Lutz et Lonce Ndikumana estiment que la corrup-tion freine la croissance du PIB, que ce soit directement ou travers sonimpact sur linvestissement. Les donnes disponibles montrent que la corrup-tion pse diffremment sur linvestissement public et sur linvestissementpriv, son impact tant positif sur le premier et ngatif pour le second.Globalement, les pays africains doivent imprativement rformer leurs insti-tutions sils veulent acclrer la croissance tire par les investissements privs.

    4. Politique macroconomique et convergence

    Les contributions prsentes autour de ce thme sattachent aux questionsrelatives lespace de la politique macroconomique, lintgration rgionaleet la convergence macroconomique.

    Pour diverses raisons, les efforts dintgration rgionale en Afrique nedbouchent pas sur une convergence macroconomique. La lenteur de laconvergence des revenus est attribue la lenteur observe dans la progressionde la production, ainsi qu la faiblesse des changes intra-rgionaux et desentres dIDE. Lamlioration des changes grce louverture des frontiresavec les pays voisins, ainsi que le maintien dun fort taux de croissance sontconsidrs comme des pralables la convergence des revenus. Hakim BenHammouda, Stephen N. Karingi, Angelica E. Njuguna et MustaphaSadni Jallab analysent la convergence nominale des politiques macrocono-

    XVI / Actes de la Confrence 2007

  • miques dans les diffrentes communauts conomiques rgionales (CER) enAfrique (SADC, COMESA, UEMOA, CEDEAO). Ils confirment que rienne prouve lexistence dune convergence entre les pays des diffrentes CER exception faite de lUEMOA et concluent que le principal obstacle lintgration rgionale en Afrique rside dans lcart entre lengagement deshommes politiques et les mesures prises pour faire avancer le processus.Daniel Gbetnkom examine limpact des rformes dans les changes sur laconvergence relle dans les pays de la CEMAC. Il montre que la rductionunilatrale et prfrentielle des obstacles douaniers et non douaniers favorisela convergence des PIB par habitant et rduit la dispersion des niveaux du PIBpar habitant en volume dans la sous-rgion. Dans le contexte du NEPAD,Septime Martin revisite le rle des CER dans le dveloppement de lAfrique.Il prconise une extension du rle de ltat et de la Banque africaine dedveloppement dans le processus dintgration.

    Angelica E. Njuguna et Stephen N. Karingi analysent le rle de lapolitique macroconomique pour la croissance. Les auteurs concluent que lespays dAfrique devraient revoir les objectifs de leur politique montaire etbudgtaire dans lobjectif de dfinir un cadre favorable la promotion dunecroissance durable.

    5. Dveloppement humain et quit

    Les contributions rdiges sur ce thme portent sur les questions de lasant et de genre. Gladys Mutangadura, Adrian Gauci, BartholomewArmah, Elizabeth Woldemariam, Daniel Ayalew et Biniam Egu estimentque le manque dquit dans le secteur de la sant constitue un grave pro-blme en Afrique en raison des carts qui existent, dune part, entre lesniveaux de revenu, et dautre part, entre les zones rurales et urbaines, et enfin,entre les hommes et les femmes. Les mesures visant allger les contraintesdaccs tant gographique que financier la sant sont donc essentielles pouramliorer les rsultats et rduire les carts urbain-rural et homme-femme enmatire de sant et daccs aux soins.

    Sheila Bunwaree sintresse aux micro-entreprises et aux petites entrepri-ses, qui procurent un emploi aux pauvres et en particulier aux femmes. Ellerecommande des stratgies pour faciliter laccs des femmes aux ressourcesproductives. Enfin, afin damliorer la mesure des ingalits entre les genres,Valrie Brenger et Audrey Verdier-Chouchane proposent de nouveauxindices reposant sur des indicateurs sexospcifiques pour des aspects tels quela sant, lducation, la participation conomique et politique. Les paysdAfrique doivent sintresser aux gnrations venir en sattachant au bien-tre des enfants et en approfondissant lanalyse des donnes spcifiques augenre.

    Introduction et vue densemble / XVII

  • Partie I : Questionscommerciales

  • Accords de partenariatconomique du Malawiet de la Tanzanie aveclUnion europenne :

    analyse empirique des effetsde la rciprocit sur les changes,

    les recettes douanireset le bien-tre, par ligne tarifaire

    Evious K. ZGOVUChercheur invit

    Centre for Research in Economic Developmentand International Trade (CREDIT)

    School of EconomicsUniversit de Nottingham

    Nottingham, Royaume-Uni

    et

    Josaphat P. KWEKACharg de recherche suprieur

    Fondation de recherche conomique et socialeDar es Salaam, Tanzanie

    Rsum

    Le prsent document est la premire analyse quantitative complte rela-tive au Malawi, et il compare pour la premire fois les effets de la rciprocit totale et moins que totale dans les deux pays. En outre, il fournit lesrsultats diffrents niveaux dagrgation des produits (le plus bas tant le SH six chiffres), afin de faciliter lidentification des produits et des secteurs lesplus sensibles. Contrairement aux tudes prcdentes, ce document tientcompte de la prsence de lAfrique du Sud dans la Communaut dedveloppement de lAfrique australe (SADC). En effet, en dcembre 2006,

  • avec lassentiment de lUnion europenne, lAfrique du Sud a abandonn sonaccord sur le commerce, le dveloppement et la coopration (ACDC), pourngocier un nouvel accord de partenariat conomique conjointement avec lesautres pays de la SADC, dont la Tanzanie. Cela se traduit par une baisse desdtournements dchanges et une hausse des crations dchanges qui ont defortes incidences sur le commerce et le bien-tre de la Tanzanie.

    En appliquant un modle dquilibre partiel des donnes rcentes sur leschanges et les lasticits, ltude fait apparatre que la rciprocit aura deseffets de consommation et de cration des changes qui amlioreront lebien-tre dans les deux pays. Elle montre galement que ces effets positifsseront largement supplants par des pertes nettes de bien-tre lies au dtour-nement des changes et la baisse des recettes douanires. Au Malawi et enTanzanie, la hausse des importations en provenance de lUE slvera respec-tivement 3,4 % et 2,2 % du produit intrieur brut (PIB), et les recettesdouanires de lun et lautre pays chuteront de 26 % et de 52 %. La pertenette de bien-tre reprsentera 0,4 % et 0,2 % de leur PIB, et les pertes sur lesimportations en provenance de lESA (SADC) (do une intgration rgio-nale ralentie) atteindront 0,2 % du PIB au Malawi, aux prix de 2003, et0,23 % du PIB en Tanzanie, aux prix de 2004. Lexclusion des produits ditssensibles attnue ces effets, mais elle nenraye pas lenvole des importations,la baisse des recettes douanires et les pertes nettes de bien-tre. Ces effetslaissent entrevoir lampleur des cots dajustement pour les deux pays et lancessit de les aider sengager sur la voie de rformes politiques et institu-tionnelles des fins multiples : rpondre aux contraintes de lajustement,renforcer leur efficience (par exemple, dans le recouvrement de recettes fiscalesnon commerciales) et favoriser la redistribution des ressources des secteurs endclin vers les secteurs en expansion.

    Mots cls : Afrique, Carabes et Pacifique-Union europenne ; Accord deCotonou ; Accord de partenariat conomique ; rciprocit ; Malawi ; Tanzanie

    Codes JEL : F13 ; F14 ; F15 ; O24 ; O55

    Remerciements

    Nous remercions un rapporteur anonyme pour ses commentaires et sessuggestions fort utiles. Nous exprimons notre reconnaissance envers leConsortium africain de recherche conomique (CARE), Nairobi, Kenya,pour son aide financire. Nous remercions, pour leurs observations construc-tives, le professeur Ademola Oyejide, prsident du Groupe D (Commerce etintgration rgionale), le Dr Dominique Njinkeu, spcialiste en chef, ainsique dautres personnes ressources (les professeurs Francis Mwega et AndrewMcKay) et experts indpendants. Nos remerciements sadressent galementaux collgues qui ont particip aux trois phases de la recherche la proposi-tion de projet (Johannesburg, Afrique du Sud, dcembre 2005), sa ralisation,

    2 / Actes de la Confrence 2007

  • et la rdaction du rapport final (deux phases effectues Nairobi, Kenya, enmai et dcembre 2006). Nous avons galement apprci les commentairesjudicieux du professeur Chris Milner, du professeur O. Morrissey (School ofEconomics, Universit de Nottingham) et de hauts fonctionnaires chargs ducommerce au Malawi et en Tanzanie. Nous tenons enfin saluer les dbatstrs instructifs organiss lors de la Confrence conomique africaine, coparrai-ne par la Banque africaine de dveloppement et la Commission conomiquedes Nations Unies pour lAfrique (CEA), qui sest tenue Addis-Abeba,thiopie, en novembre 2007. Les opinions exprimes dans ce document ettoute erreur ou omission relvent nanmoins de lentire responsabilit de sesauteurs.

    1. Introduction

    Le Malawi et la Tanzanie font partie du groupe des tats dAfrique, desCarabes et du Pacifique (ACP), actuellement en ngociation avec lUnioneuropenne (UE) pour tablir un nouveau cadre de coopration en faveur ducommerce et du dveloppement : laccord de partenariat conomique (APE).Les APE remplaceront lAccord de Cotonou dont lOrganisation mondiale ducommerce (OMC) a contest avec succs le caractre discriminatoire. Eneffet, cet Accord attribuait aux seuls pays ACP un accs prfrentiel nonrciproque aux marchs (franchise de droits pour la plupart des produits etprotocoles spciaux pour dautres, comme la banane, le riz et le sucre), aumpris de la Clause dhabilitation de lAccord gnral sur les tarifs douanierset le commerce (GATT). Or cette clause exige que soient traits galement lesmembres de mme niveau de dveloppement (par exemple, les pays les moinsavancs de lAmrique latine et de lAsie du Sud).

    Outre cette incompatibilit avec les rgles de lOMC, la cooprationconomique ACP-UE existante na pas rpondu entirement aux attentes. Ilsemble que les prfrences accordes au titre de la Convention de Lomnaient que modestement enray la marginalisation des pays ACP dans lesystme commercial mondial. Ainsi, Panagariya (2002) explique quune foisle rgime prfrentiel garanti, il nincite en rien les pays bnficiaires senga-ger sur la voie de la rforme. Avant toute chose, lchec des prfrences etdes mesures commerciales en gnral tient peut-tre au fait que jusqurcemment, les rigidits structurelles profondes et les contraintes sur le plande loffre qui psent sur les pays ACP et les autres pays les moins avancs nefaisaient pas lobjet dune attention suffisamment soutenue. Pour cette raison,les pays ACP apprhendent les APE sous langle du dveloppement et sontbien loigns des proccupations de lUE en matire de rgles et de questionscommerciales. Dans cet esprit, les pays ACP et les pays les moins avancs et endveloppement se sont mobiliss avec succs pour faire du Cycle de Doha le cycle du dveloppement .

    Accords de partenariat conomique... / 3

  • Les ngociations sur les APE ont t officiellement lances en 2002 etdevaient sachever en 2007. Depuis 2008, des groupes de pays ACP doiventsigner un APE avec lUE dont la mise en place devrait staler sur une priodedau moins dix ans1. Dans le cadre de cet accord, ils doivent accorder lUEle traitement prfrentiel dont eux-mmes bnficient (la franchise de droits)et former avec lUnion des zones de libre-change2. Les ngociations en coursportent sur un certain nombre de points, notamment la porte et lampleurde la libralisation (cest--dire lasymtrie dans la couverture des produits etlallongement de la priode de transition), lappui lajustement et au dve-loppement durable, les initiatives destines accrotre les capacits dexporta-tion et faciliter les changes, et le renforcement des capacits techniquesdanalyse des politiques commerciales. Au centre des ngociations figurentgalement des mesures destines protger les intrts des pays ACP enmatire dexportation et de dveloppement industriel, contenir lrosion desprfrences et rduire la porte et lutilisation de mesures ou de barrirestechniques non tarifaires au sein de lUE, qui restreignent en partie laccsdes pays ACP aux marchs de lUE, ainsi que des mesures correctives com-merciales.

    Lobjet du prsent document est de participer au dbat sur la politique mener pour que les pays ACP concluent les accords de partenariat conomi-que avec lUE dans les meilleures conditions possibles, en tudiant le cas dedeux pays africains parmi les moins avancs, le Malawi et la Tanzanie. Sonutilit rside dans quatre points essentiels. Premirement, il constitue la pre-mire analyse quantitative complte relative au Malawi3. Deuximement, ilcompare pour la premire fois les effets de la rciprocit totale et moins quetotale dans les deux pays. Troisimement, il ralise les analyses et prsenteles rsultats un niveau de produit dtaill. Cela permet didentifier certainsdes produits les plus affects en termes de pertes de recettes douanires, debien-tre net et dimportations. Certains produits ligibles au statut de pro-duit sensible peuvent tre exclus de la libralisation ou bien libraliss defaon progressive, ou avec des dispositions relatives lajustement. Quatri-mement, la diffrence des tudes prcdentes, le prsent document consi-dre lAfrique du Sud comme ngociant les APE en tant que partie intgrantede la Communaut de dveloppement de lAfrique australe (SADC).

    1. Cette priode de transition pourrait durer plus de dix ans. Les pays ACP ont propos de la porter plusde 20 ans, notamment pour disposer du temps dajustement ncessaire. LUE nest pas hostile cetteproposition et la jurisprudence relative larticle 24 du GATT na pas un caractre dfinitif. Lesngociations voques au paragraphe 29 du mandat de Doha peuvent aller dans le sens de la propositiondes pays ACP pour une plus grande flexibilit dudit article.

    2. Les pays ACP qui ngocient les APE sont organiss en six groupes rgionaux, mis en place conform-ment au programme dintgration continentale de lUnion africaine (UA) ; dans ces groupes, lesmarchs rgionaux sappuient sur linterconnectivit quoffrent le dveloppement de linfrastructure etdautres activits conjointes. Le Malawi ngocie actuellement dans le groupe de lAfrique de lEst et delAfrique australe (ESA) (sous-groupe du COMESA), et la Tanzanie fait partie du groupe de la Commu-naut de dveloppement de lAfrique australe (SADC).

    3. Ltude ralise par Imani (2005) fournissait une valuation qualitative des effets dun APE sur leMalawi.

    4 / Actes de la Confrence 2007

  • Cela constitue une avance notable pour la Tanzanie et dautres pays de laSADC non membres de lUnion douanire dAfrique australe (SACU)4 quingocient un APE. LAfrique du Sud (et par dfaut le Botswana, le Lesotho, laNamibie et le Swaziland [BLNS]) avait auparavant sign un accord bilatralavec lUE pour le commerce, le dveloppement et la coopration (ACDC),qui excluait certains membres de la SADC ; en outre, le pays ne faisait paspartie du groupe de la SADC qui ngocie les APE avec lUE. En dcembre2006, lAfrique du Sud et lUE ont convenu dabandonner lACDC, etlAfrique du Sud a pu rejoindre le groupe APE-SADC. La participation delAfrique du Sud dans les ngociations aura des incidences sur les effets lis aubien-tre et aux recettes douanires de la Tanzanie et des autres pays concer-ns. Nous commenterons ces incidences lorsque nous dcrirons les blocsconomiques rgionaux auxquels les deux pays examins appartiennent.

    Le reste du document sorganise comme suit : Aprs la prsente introduc-tion, nous prsentons les questions centrales des ngociations des APE, puis lapolitique commerciale et la libralisation au sein de lAfrique orientale etaustrale (ESA) et de la SADC, dont le Malawi et la Tanzanie font respective-ment partie. La section 3 examine brivement les analyses empiriques sur leseffets probables des APE, et la section 4 dcrit la structure des importations etdes recettes douanires dans chacun des deux pays. La mthodologie empiri-que et les donnes employes dans ce document sont exposes dans la sec-tion 5. La section 6 nonce les rsultats et leur interprtation. Enfin, la sec-tion 7 prsente les principales conclusions et les enseignements tirer desrsultats.

    2. Prsentation des questions centralesdes ngociations APE, des blocs conomiquesrgionaux, et des autres accords prfrentielspossibles de lUE avec les pays ACP

    Pour les pays ACP, les ngociations APE obissent aux principes noncsdans le communiqu Orientations ACP pour les ngociations des accords departenariat conomique (Secrtariat ACP, 2002). Le Malawi, la Tanzanie etdautres pays ACP soulignent limportance daboutir un APE durable quigre les problmes suivants : les cots dajustement (notamment les baisses derecettes douanires, qui peuvent se rpercuter lourdement sur les dpensespubliques et donc sur la rduction de la pauvret) ; la dsindustrialisation quipeut faire progresser le chmage et la pauvret) ; et les crises de la balance despaiements qui surviennent lorsque la croissance des importations devance celle

    4. LUnion douanire dAfrique australe (SACU) comprend lAfrique du Sud et ses quatre tats voisins, leBotswana, le Lesotho, la Namibie et le Swaziland (BLNS). LAfrique du Sud et les pays BLNS fontgalement partie de la SADC. Les autres membres de la SADC sont lAngola, la Rpublique dmocrati-que du Congo, le Malawi, Maurice, le Mozambique, les Seychelles, la Tanzanie, la Zambie et leZimbabwe.

    Accords de partenariat conomique... / 5

  • des exportations, en raison de linsuffisance des capacits de certains pays ACP.Dautres problmes se posent quant aux incidences sociales et politiques, auxcapacits humaines et institutionnelles, et la stabilit des pays ACP.

    En outre, les autres formes daccord semblent moins applicables que lesAPE, car ils imposent des rgles dorigine trs strictes (exigeant, par exemple,que les produits soient effectivement fabriqus dans le pays potentiellementbnficiaire ou imposant une proportion dintrants locaux excessive, commer-cialement parlant) et dautres spcifications techniques, pour que les produitsdes pays les moins avancs puissent bnficier dun traitement prfrentiel enfranchise de droits.

    LUE examine aussi la libralisation sous langle dautres questions (mar-chs publics et investissements, droits de proprit intellectuelle, politique dela concurrence, commerce et normes de travail, rglementation de la politiquede consommation et protection de la sant). Or les pays ACP rechignent aborder ces questions tant quelles ne sont pas traites au niveau de lOMC.

    Les pays ACP soulignent galement la ncessit dattnuer la perte destransferts de revenus associs aux prfrences actuelles. LUE a conclu (etcontinue de conclure) un grand nombre daccords commerciaux bilatrauxavec des rgions et des pays non ACP. Il en rsulte une rosion des margesprfrentielles dont les pays ACP bnficient au titre de leur accord prfren-tiel avec lUE. Les marges de certains produits tant trs leves, leur rosionpnalise dautant plus les recettes dexportation des pays ACP (notamment laCommunaut de lAfrique de lEst [CAE]) que ces derniers concentrent pourla plupart leurs exportations sur une gamme trs troite de produits. Les paysACP ngocient galement pour supprimer les droits de douane levs delUE, les crtes tarifaires, la progressivit tarifaire et la nouvelle gnrationdobstacles non tarifaires, connus sous le nom dobstacles techniques au com-merce, qui incluent des rgles dorigine restrictives (dcrites ci-aprs), descontrles sanitaires et phytosanitaires et des normes de qualit. Si les droits dedouane ont t rduits par une srie dinitiatives de libralisation unilatrales,rgionales et multilatrales, les obstacles non tarifaires ont pris de lampleur.Par consquent, tant quils ne seront pas rduits ou levs autant que faire sepeut, la seule baisse des droits namliorera pas suffisamment laccs auxmarchs. Enfin, les pays ACP tentent dobtenir une aide pour renforcer leurscapacits de mise en conformit.

    En mars 2005, lUE a publi un Livre vert destin rendre les nouvellesrgles dorigine (RdO) plus simples et plus favorables au dveloppement (Commission europenne, 2005 :1). La majorit des parties consultes5 esti-ment que les rgles existantes traduisent des vises mercantilistes dpasses etne correspondent ni au modle de production mondial du march ni aux

    5. Elles comprenaient 4 groupes de conseil, 1 centre de recherche, 7 organisations rgionales ou internatio-nales, 10 experts de pays tiers, 13 experts des tats membres, 19 entreprises prives, 28 associationsprofessionnelles ou commerciales locales ou nationales, 17 associations professionnelles ou commercialeseuropennes, et 1 organisation non gouvernementale au total, 100 contributions ont t reues.

    6 / Actes de la Confrence 2007

  • oprations de fabrication et douvraison qui se pratiquent actuellement. Dansce sens, les RdO ne tiennent pas compte des avances technologiques et desconditions relles du march, du commerce, de lindustrie et de lagriculture.En outre, elles sont trop complexes et manquent de transparence6. La princi-pale transformation consistera dterminer lorigine des importations laidedun test de la valeur ajoute. De plus, un degr limit de diffrenciation estprvu entre les secteurs et par rapport aux PMA, mme sil sera nettementmoindre que celui dfini par les RdO actuelles, qui peuvent varier dunsous-secteur ou dun produit lautre.

    Dans la plupart des cas, la valeur ajoute est trs faible (nettement inf-rieure aux seuils actuels des RdO de lUE) et varie considrablement enfonction du produit ou du pays. Par consquent, des RdO fondes sur levieux modle vertical des diffrentes tapes de fabrication dans un pays igno-rent les ralits de la production contemporaine : aujourdhui, les composantsproviennent de plusieurs pays et les multiples oprations dassemblage finalet/ou de finition prennent une part de plus en plus importante dans la valeurdu produit final (Cerrex, 2002). Dans ce contexte, il sera difficile de crer denouvelles RdO simples, uniformes et favorables au dveloppement. Mmelorsque luniformit est applique, elle est compromise par la disparit crois-sante de mcanismes prfrentiels. En outre, la tche se complique en raisondu cumul dorigine, destin renforcer lintgration conomique rgionale, etdes conditions de son application. Pour toutes ces raisons, les pays ACPdoivent ngocier en faveur des RdO simples et flexibles qui permettraientdappliquer le critre de changement de position tarifaire (CPT), et de seuilsde la valeur ajoute suffisamment bas pour soutenir la cration demplois,mme dans un nombre limit de pays ACP7.

    Blocs conomiques rgionaux et politiques commerciales

    Le Malawi et la Tanzanie sont membres de la SADC, qui fut institue parun trait sign en 19928. Le Malawi fait galement partie du March com-mun de lAfrique de lEst et de lAfrique australe (COMESA), qui inclut legroupe APE de lESA au sein duquel le pays ngocie un APE. De son ct, la

    6. Le Livre vert de lUnion europenne reconnat les difficults lies aux RdO existantes en observant que ...les pays qui sont les bnficiaires potentiels des prfrences nen tirent pas pleinement avantage pourune multitude de raisons, parmi lesquelles la difficult dobir certaines rgles dorigine. Le plussouvent, ils ne disposent pas des installations de production, des instruments de placement ou delorganisation administrative requis pour remplir les conditions exiges... (Commission europenne,2003 : 8).

    7. Les rgles dorigine visent prvenir les dtournements dchanges et renforcer le dveloppementindustriel du pays qui dispose dun accs prfrentiel au march. LUE soumet la qualit de produitoriginaire un certain niveau de production locale dans les pays ACP, ou de transformation dintrantsimports, ou encore de proprit locale (ou de coproprit avec des producteurs de lUE). Ce sont cesseuils qui posent problme, lorsquils sont complexes, fixs des niveaux si levs quils deviennent desinstruments de protection, et peu favorables au dveloppement.

    8. Les autres pays de la SADC sont lAngola, le Botswana, la Rpublique dmocratique du Congo (RDC),le Lesotho, le Malawi, Maurice, le Mozambique, la Namibie, les Seychelles, lAfrique du Sud, leSwaziland, la Zambie et le Zimbabwe.

    Accords de partenariat conomique... / 7

  • Tanzanie est membre de la CAE, qui a dj tenu deux sommets de chefsdtat (en avril 2002 et aot 2007), pour ouvrir la voie une ngociationcommune des APE avec lUE, en tant que bloc indpendant. La CAE estdevenue une union douanire en janvier 2005. Malgr la dcision prise lorsdu sommet de 2002, la CAE ne sest pas rellement lance dans les ngocia-tions APE, ce qui a permis la Tanzanie de poursuivre ses discussions APEsous lgide de la SADC. En dcembre 2006, lUE a accd la demande delAfrique du Sud de se rallier la SADC pour ngocier les APE et dans lemme temps, d abandonner lACDC. prsent que lAfrique du Sudsinsre dans la SADC, le remplacement de ses exportations en Tanzanie nesassimile plus un dtournement dchanges, mais il contribue en crer (silest retenu comme hypothse de modlisation que la SADC est gnralementmoins efficiente que lUE9), do des effets sur le bien-tre et dautres inciden-ces. Si lon considre que lAfrique du Sud est le deuxime importateur de laTanzanie aprs lArabie saoudite (principalement parce que cette dernire luifournit des produits ptroliers), cette nouvelle donne est importante et najamais t examine dans les tudes prcdentes. Elle ne concerne pas leMalawi qui ne ngocie pas lAPE dans le cadre de la SADC. Par consquent,lappartenance de lAfrique du Sud cette entit ne renforce pas dans ce paysla substitution des sources dimportation dcoulant dun APE.

    Soucieuse de promouvoir lintgration conomique, notamment par lebiais du commerce intrargional, la SADC gre un certain nombre de proto-coles, dont un protocole de commerce destin encadrer la libralisation deschanges rgionaux et lharmonisation des politiques. Ce protocole prvoyaitle lancement dune zone de libre-change ds 1996 mais en 2000, seuls 11membres sur 14 lavaient ratifi ; lheure o la prsente tude est mene, laSADC nest pas encore une zone de libre-change. Malgr cela, des avancesimportantes ont t observes dans lharmonisation des douanes et des docu-ments commerciaux (par exemple, les dclarations en douane et les certificatsdorigine) et les obstacles non tarifaires ont t allgs. La lenteur des progrssexplique en partie par le manque de capacits techniques permettant demener bien des rformes commerciales.

    Le COMESA sapplique consolider et tendre lintgration de sesmembres, en adoptant des mesures gnrales de libralisation des changes :leve de tous les obstacles tarifaires et non tarifaires et cration dune uniondouanire, associe la libre circulation des marchandises et des facteurs de

    9. En ralit, lAfrique du Sud est au moins aussi efficiente que lUE pour plusieurs lignes de produits,comme le prouve sa position dominante de fournisseur dans la rgion en termes de cot unitaire, et passeulement du fait de sa proximit gographique avec les pays de lESA. En labsence de donnesdtailles sur les cots unitaires au niveau dagrgation requis, il na pas t possible disoler prcismentles produits pour lesquels lUE est moins comptitive que lAfrique du Sud. La part des produitsimports depuis ces deux sources pourrait tre utilise, mais ce serait ignorer certains paramtresfondamentaux (cot unitaire) qui expliqueraient en grande partie ces proportions.

    8 / Actes de la Confrence 2007

  • production, etc10. En avril 2007, 13 pays faisaient partie de la zone delibre-change du COMESA ; les six pays restants avaient abaiss les droits dedouane pour leurs partenaires de 60 90 % (COMESA, 2007). Au terme dusommet des chefs dtat du COMESA, tenu Nairobi (Kenya) en mai 2007,le tarif extrieur commun (TEC) de sa future union douanire a t diminuet align sur celui de lunion douanire de la CAE, soit 0 % pour les biensdquipement et les matires premires, 10 % pour les biens intermdiaires, et25 % pour les biens de consommation finale11. Aux fins de ngocier un APEavec lUE, tous les pays du COMESA ne se sont pas engags sur ces bases, carcertains ont dj conclu dautres accords commerciaux avec lUE.

    Comme indiqu prcdemment, la Tanzanie est membre de la CAE et dela SADC. Rinstitue par le Trait dArusha sign en novembre 1999, qui apris effet en juillet 2000, la CAE comprend trois membres fondateurs laTanzanie, le Kenya et lOuganda et depuis 2007, le Burundi et leRwanda12. Le protocole tablissant lunion douanire de la CAE est entr envigueur en janvier 2005 et depuis cette date, ses membres ont amorc lalibralisation progressive des changes intrargionaux et adopt un TEC etdes rgles dorigine communes. Le TEC de la CAE a trois tranches tarifairesdiffrentielles : 0 % (pour les biens dquipement et ceux pour lesquels laCAE na pas davantage comparatif), et respectivement 10 et 25 % pour lesbiens intermdiaires et ceux de consommation finale. La libralisation deschanges au sein de la CAE seffectue sur une base asymtrique, en fonctiondu degr de dveloppement industriel, des recettes et du niveau gnral dedveloppement de ses membres : le Kenya est un pays en dveloppement,contrairement aux autres membres qui font partie des pays les moins avancs.Les biens provenant de tous les autres pays de la CAE sont exports vers leKenya en franchise de droits, mais certains biens exports par le Kenya verslesdits pays restent soumis des droits dimportation. La Tanzanie etlOuganda ont libralis tous leurs changes entre eux, et lensemble des droitsappliqus aux exportations kenyanes sera progressivement supprim dici 2010. Le Rwanda a libralis la quasi-totalit de ses changes avec le Burundiet le Kenya dans le cadre de la zone de libre-change du COMESA. Ce pays aconclu un accord commercial bilatral avec lOuganda, afin de rduire lesdroits de douane entre les deux pays de 80 %, et la Tanzanie sest vu proposerune offre similaire sur la base du principe de la nation la plus favorise (NPF)(Zgovu, 2007). Ses autres changes avec lOuganda et la Tanzanie serontlibraliss dans le cadre de lunion douanire du COMESA (union douanirede la CAE prvue pour juin 2009). Il est clair que la CAE devance largement

    10. Vingt pays composent le COMESA : lAngola, le Burundi, les Comores, la Rpublique dmocratiquedu Congo, Djibouti, lgypte, lrythre, lthiopie, le Kenya, Madagascar, le Malawi, Maurice, laNamibie, le Rwanda, les Seychelles, le Soudan, le Swaziland, lOuganda, la Zambie et le Zimbabwe.

    11. Lunion douanire du COMESA devrait tre lance le 8 dcembre 2008. Avant que le COMESA nedcide de labaisser, le TEC propos avait un taux maximal de 30 %.

    12. Le premier trait de la CAE a t sign en 1967 et appliqu jusquen 1977.

    Accords de partenariat conomique... / 9

  • le COMESA et la SADC en matire de libralisation du commerce et dint-gration rgionale.

    Pour linstant, les pays de la CAE participent aux ngociations sur les APEpar le biais de deux communauts conomiques rgionales diffrentes : laSADC pour la Tanzanie et lESA pour les autres pays de la CAE. Il estintressant de noter que le sommet du COMESA de mai 2007 a align le TECdu COMESA sur celui de lunion douanire de la CAE. En outre, lors duSixime sommet extraordinaire de la CAE (Arusha, 20 aot 2007), les chefsdtat ont rappel la dcision prise lors du sommet davril 2002 et convenuque la CAE envisagerait la possibilit de ngocier un APE avec lUE. Lasignature dun tel accord aura des incidences importantes sur les programmes etles ressources du Fonds europen de dveloppement (FED) mis la dispositionde lESA, la SADC et la CAE, mesure que les pays de la CAE se retireront desAPE de lESA et de la SADC. Plus important encore, eu gard lobjet de notretude, les incidences de la rciprocit sur la Tanzanie (notamment au niveaudes produits) rsultant dun APE avec lUE seront diffrentes. Ces incidencesont dj t tudies (voir Milner et al. 2005 ; Zgovu et Milner, 2007). ladiffrence de Milner et al., Zgovu et al. incluent le Burundi et le Rwanda dansla CAE et appliquent les donnes aux produits sensibles, analysant ainsi leseffets dune libralisation totale et moins que totale .

    Le Malawi et la Tanzanie appartiennent donc plusieurs communautsconomiques rgionales, chacune voluant vers une union douanire et parti-cipant la construction de lintgration continentale, sous lgide de lUnionafricaine (UA). Cette multiplicit de blocs conomiques rgionaux entre encontradiction avec la vision europenne de lintgration rgionale. Il sembleen effet que lUE considre les rgles comme le fondement de toute intgra-tion rgionale. Bien que les APE concernent les pays ACP et pas uniquementles pays africains, il serait souhaitable quils soutiennent linfrastructure exis-tante en matire dintgration rgionale et continentale, car elle a dj franchides tapes cls et accompli dimpressionnantes ralisations (par exemple, auniveau de la croissance du commerce).

    Autres accords prfrentiels proposs par lUE aux pays ACP

    Compte tenu des lourdes pertes et des frais dajustement que les APEtendent engendrer, les pays ACP peuvent envisager dautres types de dispo-sitifs. Pour faire leur choix en connaissance de cause, les responsables politi-ques doivent soupeser les avantages et les inconvnients des APE et des autresdispositifs prfrentiels mis leur disposition. La prsente tude tente doffrirdes lments dapprciation prendre en compte. LUE propose actuellementaux pays ACP dautres mcanismes prfrentiels, parmi lesquels le Systme deprfrences gnralises (SPG) originel13 , le SPG amlior (galement

    13. Le SPG a t institu par la Rsolution 21 (II) de la deuxime Confrence des Nations Unies sur lecommerce et le dveloppement (CNUCED) qui sest tenue New Delhi en 1968. Il a pour principal

    10 / Actes de la Confrence 2007

  • nomm SPG+), et linitiative Tout sauf les armes (TSA). Ces rgimes nerequirent pas la rciprocit du traitement prfrentiel et sadressent tous lespays en dveloppement, conformment aux rgles de lOMC (sous rserve durespect de certains critres dadmissibilit et autre). Seule linitiative TSA estrserve aux pays les moins avancs14.

    LUE propose le SPG depuis 1971 et le systme compte aujourdhui 179bnficiaires. lorigine, le SPG se distinguait par des contingents et desplafonds appliqus en fonction du produit ou du pays ; depuis 1995, lescontingents dimportation ont t remplacs par des prfrences tarifairesgnralises qui varient selon le degr de sensibilit du produit, cest--direselon lexistence de produits concurrents dans lUE. Le SPG+ constitue uneversion amliore du SPG initial, car il couvre un nombre de produits sup-rieur, dont certains sont considrs comme sensibles par les pays en dvelop-pement vulnrables, et il offre de meilleures marges de prfrence15. Outre lescritres dligibilit au SPG, le SPG+ exige que les pays bnficiaires faiblerevenu ou revenu intermdiaire ratifient et appliquent effectivement 27conventions internationales sur des questions telles que la protection desdroits du travail et de lenvironnement, la lutte contre les trafics de drogues, etla bonne gouvernance.

    Linitiative TSA permet aux pays les moins avancs dexporter tous leursproduits dans lUE en franchise douanire, lexception des armes et desmunitions16. En fait, tant donn que depuis lAccord de Cotonou, les paysACP avaient accs en franchise de droits au march de lUE pour presque tousles produits (sauf ceux soumis un protocole, tels que le sucre, les bananes etle buf et certains produits agricoles sensibles de lUE), la TSA se limite tendre la liste des lignes tarifaires.

    Les tudes qui valuent limpact des autres accords commerciaux possi-bles aboutissent des conclusions contradictoires. Certaines indiquent quemalgr leurs failles, les autres rgimes susdcrits coteraient moins cher queles APE la plupart des pays ACP. En utilisant le modle GTAP (GlobalTrade Analysis Project Global), Perez (2006) et Perez et Karingi (2007) ontmontr que ces rgimes engageaient des cots dajustement bien infrieursaux cots potentiels des APE en termes de dsindustrialisation, de pertes derecettes budgtaires et de charges sociales. Perez (2006 : 1014) considrequun APE standard entranerait une perte de bien-tre de 851 millionsdUSD pour tous les sous-groupes ACP (except la SADC qui nest pas

    objectif daugmenter les recettes dexportation, de promouvoir lindustrialisation et dacclrer le tauxde croissance conomique des pays bnficiaires. Pour ce faire, les pays qui octroient les prfrencesconcdent des droits de douane nuls ou rduits, infrieurs aux taux de la nation la plus favorise (NPF).

    14. Linitiative TSA est entre en vigueur en mars 2001 et concerne actuellement 49 pays parmi les pluspauvres du monde.

    15. Les rgimes SPG et SPG+ couvrent environ 6 400 lignes tarifaires. Toutefois, le SPG+ exclut certainsproduits phare tels que la banane (except la banane sche), le sucre et le riz.

    16. Trois produits agricoles importants la banane, le riz et le sucre nentraient pas dans le cadre de laTSA lorsque cette dernire a t lance, mais leurs tarifs douaniers font lobjet dune baisse progressiveet seront compltement supprims dici 2009.

    Accords de partenariat conomique... / 11

  • couverte), alors que le SPG et le SPG+ engendreraient des pertes respectivesnettement infrieures, soit 459 millions et 51 millions dUSD. Selon ses esti-mations, le SPG et le SPG+ dboucheraient chacun sur des gains nets positifsde 60 et de 7 millions dUSD pour les changes rgionaux, tandis que lAPEdplacerait les changes rgionaux pour une valeur de 407 millions dUSD.En outre, lUE na pas engag de ressources supplmentaires pour soutenir lesAPE et insiste sur le fait que les questions dajustement lies aux APE devronttre rgles laide des ressources du FED (sur la base de lenveloppe dudixime FED, fixe 22,6 milliards dEUR pour la priode 2008-2013)17.LUE napprouve pas non plus les clauses de rvision proposes par les paysafricains, qui leur permettraient de suspendre la libralisation (par exemple,aprs dix ans) si les promesses daide lajustement de lUE ne se concrti-saient pas. Il convient dobserver que le dixime FED est suprieur au neu-vime de 7,4 milliards dEUR, mais il dpasse peine la part de 0,38 % durevenu national brut (RNB) qui constitue le niveau historique moyen de sonaide au dveloppement. Le neuvime FED na t dcaiss qu hauteur de28 % des 15,2 milliards dEUR promis sur une priode de cinq ans. Lalenteur des taux de dcaissement, jointe la lourdeur des procdures, expliqueles problmes de mise en uvre de laide du FED. En labsence damliora-tions, le FED ne pourra pas faire face et rpondre aux demandes daide lajustement des pays ACP signataires dAPE.

    Lestimation empirique des autres rgimes qui prcde sappuie sur desconditions de modlisation et des hypothses que Curran (2007), de la Direc-tion gnrale du Commerce de la Commission europenne, conteste surcertains points. Par exemple, Curran remarque que Perez (2006) modliselextension du SPG 250 nouveaux produits pour les seuls pays ACP et nonpour tous les pays en dveloppement, comme lexigent les rgles de lOMC.En vertu de la Clause dhabilitation, tous les pays en dveloppement, exceptles PMA, doivent disposer du mme niveau daccs. Curran (2007) notegalement que les analyses ne prennent pas en compte certaines exportationsphare dans les pays ACP (notamment le sucre et la banane) ; elles ne mesurentdonc pas certains effets potentiels importants quun changement de rgimepourrait exercer sur ces filires. Entre autres tudes empiriques, celle deStevens, Kennan et Meyn (2007) fait apparatre que les pays ACP pourraienten tre pour leurs frais sils optaient pour dautres mcanismes prfrentiels.LInstitut britannique de dveloppement outre-mer (ODI) affirme que lespays ACP les moins avancs seraient plus avantags par un APE que parlinitiative TSA, et que les bnficiaires du SPG+ seraient favoriss par rapportaux bnficiaires du dispositif SPG standard.

    17. Il faut ajouter quen dehors du FED, lUE sest engage renforcer laide au commerce en faveur despays en dveloppement, aide qui devrait fournir, aux pays ACP en particulier, des ressources suppl-mentaires pour couvrir les cots dajustement. Toutefois, la stratgie daide au commerce de lUEmanque de clart, notamment en ce qui concerne lampleur et le calendrier des ressources mises disposition de chaque pays ACP. Il convient de sassurer que laide au commerce offre un niveau desoutien adquat et que sa mise en uvre sappuie sur des mcanismes et des procdures efficaces.

    12 / Actes de la Confrence 2007

  • Les autres dispositifs prsentent galement des inconvnients supplmen-taires. Par exemple, ils constituent une offre unilatrale de lUE excluant toutedisposition contractuelle entre lUnion et les pays bnficiaires. De plus, ilscomprennent des clauses de sauvegarde qui prvoient de suspendre ou deretirer18 des prfrences, si lUE juge cela ncessaire. Il faut observer que lUEa rejet la proposition des pays africains dinclure des clauses de rvision leurpermettant dinterrompre le processus de libralisation (par exemple, au boutde dix ans) si les promesses daide de lUE lies aux APE naboutissaientpas. Le SPG, le SPG+ et linitiative TSA ne sont pas dots de fonds dedveloppement comme lest lAPE dans le cadre du FED19. Il convient gale-ment de mentionner que le SPG tout comme le SPG+ offre des marges deprfrence nettement infrieures celles obtenues dans le cadre de lAccord deCotonou et de lAPE. Les marges de certaines exportations cls pour les paysACP, en particulier la banane, le cacao, lhorticulture, laluminium et lebuf, seraient considrablement diminues, tandis que les pays ACP qui nefont pas partie des moins avancs devraient verser plus de 750 millionsdEUR de droits de douane par an, si lon sen tient aux chiffres de 2005.

    3. tude de la littrature empirique

    Un certain nombre darticles inspirs par Viner (1950) prsentent uneanalyse thorique des effets des accords commerciaux prfrentiels dans le casdun petit pays en dveloppement. Parmi les tudes les plus rcentes, il fautaussi citer celles de Panagariya (1998), de Greenaway et Milner (2003), et deMilner et al. (2005). Notre papier ne sappuie pas sur des fondements thori-ques, mais sur la somme croissante de preuves empiriques des effets probablesdes APE sur les pays ACP en gnral, et sur les pays couverts par notre tudeainsi que leurs rgions environnantes. Avant de prsenter ces donnes empiri-ques, il convient de dcrire les mthodologies mises en uvre.

    Le tableau 1 rsume certaines tudes sur les effets dynamiques et statiquesde la libralisation. Les tudes qui analysent les effets dynamiques sont indi-ques par un e et un f ; les tudes sur les effets statiques sont indiques

    18. Les prfrences peuvent tre suspendues, voire retires si certaines conditions (par exemple, les rglesdorigine) ne sont pas observes ou lorsquun pays bnficiaire rpond progressivement des critrescls, en atteignant un certain niveau de dveloppement ou un certain degr de comptitivit, parexemple, si les exportations dun secteur donn ont reprsent plus de 15 % des importations prfren-tielles vers lUE au cours des trois dernires annes. Labsence de dispositions contractuelles associe ces clauses de sauvegarde ne peut que freiner les investissements directs trangers dans les paysbnficiaires pour les secteurs potentiellement bnficiaires de ces rgimes.

    19. Le FED constitue au sein de lUE la principale source de financement de laide (tant technique quefinancire) en faveur de la coopration au dveloppement dans les pays ACP et les pays et territoiresdoutre-mer (PTOM). Il a t cr en 1957 par le Trait de Rome, et bien que le budget de lUE luirserve une ligne budgtaire depuis 1993, suite la demande du Parlement europen, le FED ne relvepas encore du budget gnral de lUE. Il est financ par les contributions des tats membres, et laideaccorde continuera de couvrir au moins la priode 2008-2013, qui correspond au dixime cycle decinq ans et slve 22,682 milliards dEUR.

    Accords de partenariat conomique... / 13

  • Tableau 1. Effets des APE sur les pays ACP

    Rgion/source

    Crationdchanges (CE) /dtournementdchanges (DE)

    Effets fiscaux Effetssur le bien-tre

    Principaux gagnantset perdants

    Afriquesubsahariennea

    Ngatifs (APEsans intgrationrgionale) Positifs(suppression desbarrires intra-ASS ou zone delibre-changeUE-ASS)

    Afrique delOuestb

    CE suprieureau DE

    Ngatifs Positifs Nigeria et Ghana(gagnants) ; Cap-Vertet Gambie (perdants)

    Afrique delOuest(Gambie)c

    CE infrieureau DE

    Ngatifs Pertes nettes debien-tre

    Gambie perdante

    Afriquecentralea

    CE suprieureau DE

    Ngatifs Positifs Cameroun, Gabonet RDC (gagnants)

    CAEd CE infrieureau DE enTanzanie etgale au DEen Ouganda

    Importantset ngatifs

    Lgrementngatifs enTanzanie ;ngligeables pourlOuganda

    Tanzanie (perdante)

    CAEe CE infrieure auDE pour tous lespays de la CAE

    Importants etngatifs pourtoute la CAE

    Pertes nettes debien-tre impor-tantes pour tousles pays de laCAE

    Tous les pays de laCAE perdants (Kenya,Tanzanie et Ouganda)

    COMESAa CE suprieure auDE

    Ngatifs Positifs Kenya, Maurice,Soudan et thiopie(gagnants)

    SADCf CE suprieure auDE

    Importants etngatifs

    Importants etpositifs (APEavec intgrationrgionale) Lgerset positifs (APEsans intgrationrgionale)

    Afrique du Sud,Zimbabwe et Maurice(gagnants) ; Zambie,Tanzanie, Mozambi-que, Swaziland(perdants)

    Carabesg CE infrieure auDE (abaissementstarifaires NPFsimultans 50 %)

    Faibles et ngatifs Lgers et ngatifs(abaissementstarifaires NPFsimultans< 20 %) ; lgerset positifs (abais-sements tarifairesNPF simultans< 20 %)

    Pacifiqueh CE suprieure auDE

    Faibles et ngatifs Lgers et positifs Papouasie-Nouvelle-Guine et Fidji(gagnantes)

    Source : adapt de Cal et D. te Velde (2006 : tableau 1).Notes : a Karingi et al. (2005) ; b Busse et al. (2004) ; c Zgovu et al. (2005) ; d Milner et al. (2005) ; e Zgovu etMilner (2007) ; f Tekere et al. (2003) et Keck et al. (2005) ; g Gasiorek et Winters (2004), et Greenaway et Milner(2003) ; h Roza et al. (2003).

    14 / Actes de la Confrence 2007

  • par un c et un g ; celles qui couvrent les deux sont indiques par un a . Leur objectif tait de dterminer les gains et les pertes des pays ACP souslangle des changes crs, des changes dtourns, des recettes douanires, etdes effets sur le bien-tre. quelques exceptions prs, les analyses sont princi-palement axes sur les effets sectoriels et conomiques. Selon plusieurs tudes,limpact commercial probable dun APE est largement positif (cest--dire quela cration des changes lemporte sur leur dtournement) ; certains payssubiront des effets fiscaux ngatifs et des pertes nettes de bien-tre, et dautresenregistreront des gains.

    Milner et al. (2005) ont examin la possibilit dun APE entre lUE et laCAE et ils en ont conclu que les trois pays africains accuseraient dnormespertes de recettes publiques. Seul lOuganda connatrait probablement ungain net de bien-tre ; de son ct, le Kenya perdrait des parts sur les marchstanzaniens et ougandais. Zgovu et Milner (2007) prsentent une analysedtaille des effets de la rciprocit (et de la libralisation multilatrale desproduits non agricoles) sur les changes et le bien-tre en Tanzanie. Ilsconsidrent quun APE entre la CAE et lUE augmenterait les importationsen provenance de lUE de 84 %, en grande partie sous leffet du dtourne-ment des changes provenant du reste du monde qui dans ce cas inclutlAfrique du Sud. Daprs leurs estimations, les recettes douanires devraientplonger de 54 %, accompagnes dune perte nette de bien-tre de 35 659 mil-lions de TZS.

    Busse et al. (2004) ont valu limpact potentiel dun APE sur les paysCEDEAO. Selon eux, ces pays subiraient un repli spectaculaire de 2,2 mil-lions dUSD en valeur absolue. Outre de lourdes pertes de bien-tre pour leGhana et le Nigeria, la Gambie et le Cap Vert essuieraient les pertes derecettes douanires les plus leves. Tekere et Ndlela (2003) ont examin leseffets dun APE avec lUE sur les pays de la SADC, en sappuyant sur uneanalyse dquilibre partiel. Ils ont mis en vidence quun APE engendreraitune baisse massive des recettes fiscales des tats, tant donn limportance desdroits de douane gnrs par les importations provenant de lUE. Leur tudea galement soulign que le taux de recouvrement des recettes douaniresreculerait de 37 % en Tanzanie, et de 24 % en Namibie. Il est toutefoisressorti de cette tude que la cration dchanges lemporterait sur le dtour-nement dchanges. Keck et Piermartini (2005) ont employ un modledquilibre gnral calculable (EGC) couvrant quinze rgions et neuf secteurs,et bas sur le Projet danalyse du commerce mondial (GTAP), afin de simulerlimpact des APE sur les pays de la SADC. Les rsultats de leur simulationmontrent quun APE conclu entre la SADC et lUE amliorerait le bien-treen augmentant le PIB rel et engendrerait dautres gains, en raison dunelibralisation intra-SADC accrue. La plupart de ces gains concerneraient lessecteurs de llevage et de lindustrie alimentaire.

    Accords de partenariat conomique... / 15

  • Toutes les tudes saccordent prvoir des pertes de recettes douaniressubstantielles pour les deux pays, mais Karingi et al. (2005) font tat de gainsde bien-tre au Malawi (2,1 millions dUSD) et en Tanzanie (8,2 millionsdUSD). En revanche, selon notre tude, la cration dchanges cdant le pas leur dtournement, les effets seront considrables et entraneront dans leursillage des pertes de recettes douanires et des pertes nettes de bien-tre auMalawi comme en Tanzanie. Pour les petites conomies qui ont un commerceintrargional quasi inexistant et dpendent davantage des importations du restedu monde que de lUE, les perspectives de cration dchanges sont plusquincertaines ; les probabilits vont plutt dans le sens dun dtournement deschanges : les importations en provenance de lUE se substitueront aux impor-tations de producteurs non-UE, lorsque les prix relatifs favoriseront lUE.

    4. Structures des importations et des recettesdouanires

    Le tableau 2 dcrit la structure des importations des deux pays. Le totaldes importations compte pour 44 % du produit intrieur brut (PIB) duMalawi, contre seulement 13 % en Tanzanie (pour une moyenne de 25 %dans les pays ACP). Les deux pays enregistrent des taux levs de concentra-tion sur quelques produits de base : 5 % des 3 609 (4 236) lignes tarifaires du

    Tableau 2. Importations par fourchette de taux de recouvrementdes droits dentre (droits effectifs)(en millions de monnaie nationale)

    Fourchettede tauxde droits DE lUE

    Part(%) De la rgion

    Part(%) du RdM

    Part(%) Total

    Part(%)

    Malawi0 % 4 885,6 53 5 888,1 65 14 116,2 24 24 889,9 320,014,99 % 3 502,4 38 3 027,9 33 21 383,0 37 27 913,2 365,09,99 % 358,6 4 103,0 1 15 343,2 26 15 804,8 211019,9 % 158,8 2 26,5 0 4 137,5 7 4 322,8 62029,9 % 332,9 4 63,1 1 3 296,1 6 3 692,1 530 % et plus 1,8 0 1,8 0 23,8 0,04 27,4 0,04Total 9 240,0 100 9 110,4 100 58 299,7 100 76 650,1 100

    Tanzanie0 % 115 190,7 33 52 010,4 26 143 287,5 14 310 488,6 200,014,99 % 106 421,7 30 53 977,9 27 433 575,6 42 593 975,2 385,09,99 % 57 267,4 16 28 808,2 15 132 141,6 13 218 217,2 141019,9 % 40 128,5 11 46 286,4 23 190 791,2 19 277 206,1 182029,9 % 29 202,0 8 14 238,5 7 118 941,0 12 162 381,6 1030 % et plus 936 0,3 1 720,8 1 9 263,8 1 11 920,6 1Total 349 146,2 100 197 042,2 100 1 028 000,7 100 1 574 189,1 100

    Source : simulations des auteurs.

    16 / Actes de la Confrence 2007

  • Systme harmonis six chiffres comptent pour 73 % des importations auMalawi et 72 % des importations en Tanzanie. Les produits imports pro-viennent principalement du reste du monde (RdM) pour les deux pays, maisla Tanzanie affiche une proportion dimportations en provenance de lUE(22 %) suprieure celle du Malawi (12 %). Par consquent, dans le cadredun APE, la Tanzanie disposera dun plus grand potentiel de gains deconsommation (hausse des importations moins chres en provenance delUE), mais le dtournement des changes devrait tre plus tendu au Malawi.Pour la Tanzanie, les principaux pays RdM (dans le contexte dun APE) sontle Kenya (membre de lunion douanire de la CAE) et lArabie saoudite,tandis que lAfrique du Sud (qui ne fait pas partie du groupe ESA) est leprincipal importateur du Malawi. LAfrique du Sud et le Kenya ont desavantages comparatifs sur plusieurs produits exports dans ces rgions ; tanttous deux plus proches du Malawi et de la Tanzanie que lUE (do des cotsde transport moindres), ils pourraient conserver une large part de march.

    Pour les deux pays, une grande part des importations sont admisesmoyennant des droits de douane nuls ou minimes ; 91 % des importations duMalawi et 63 % de celles de la Tanzanie en provenance de lUE sont soumises des droits de douane infrieurs 10 %. Cela signifie que lincidence de larciprocit sur les importations et les recettes douanires de lUE resteralimite, notamment pour le Malawi. Toutefois, limportance relative du restedu monde en tant que principale source dimportation (et de recettes doua-nires) engendrera un plus grand potentiel de dtournement (au dtriment dubien-tre) que de cration des changes (au profit du bien-tre).

    Le tableau 3 montre quen dpit des faibles droits de douane appliqus de nombreuses importations (infrieurs 10 %), il est clair que la progressi-vit tarifaire existe, en particulier en Tanzanie (45 % des biens de consomma-tion finale sont assujettis des droits de douane modrs levs). Certaineslignes tarifaires soumises des droits levs peuvent ventuellement entrerdans la liste des produits sensibles, qui prvoit des taux levs pour les biensdont la production subit la concurrence des importations. La valeur totale desimportations de diffrents types de produits montre que dans les deux pays,elles sont en grande partie utilises dans la production, en tant que biensdquipement, matires premires et biens intermdiaires. Un examen pluspouss fait apparatre que lUE est le principal fournisseur des rgions (ESA etSADC) qui ngocient des APE pour toutes les catgories dimportations,except les matires premires et les biens intermdiaires au Malawi et lesmatires premires en Tanzanie. Les rgions ESA et SADC disposent davan-tages comparatifs dans lapprovisionnement des matires premires et desbiens intermdiaires, surtout dans lindustrie agroalimentaire. Si lUEdtourne ces changes intrargionaux dans le cadre dun APE, il en rsulteraun gain de bien-tre pour le Malawi et la Tanzanie (cration dchanges),mais une perte pour le Kenya et lAfrique du Sud, qui sont respectivement lesprincipaux exportateurs vers la Tanzanie et le Malawi.

    Accords de partenariat conomique... / 17

  • Les taxes prleves sur les changes comptent pour 41 % des recettesbudgtaires totales en Tanzanie, et 39 % au Malawi. Toutefois, les recettesdouanires ne reprsentent une forte proportion des recettes fiscales quenTanzanie : les recettes douanires de 106 milliards de TZS (soit 97,3 millionsdUSD aux prix de 2004) contribuent pour 26 % aux recettes provenant destaxes sur les changes et pour 10 % aux recettes budgtaires totales. Lesrecettes douanires du Malawi, soit 3 044 millions de kwacha de Malawi(MWK) (lquivalent de 39,7 millions dUSD aux prix de 2003), assurent21 % des recettes provenant des taxes sur les changes, et 8 % des recettesbudgtaires totales. Les recettes douanires sur les importations en prove-nance de lUE fournissent peine 5 % des recettes douanires totales auMalawi mais 18 % en Tanzanie. Lassiette des recettes douanires de la Tan-zanie pourrait donc subir des incidences ngatives plus lourdes que celle duMalawi. Dans les deux pays, les importations provenant du reste du mondefournissent la plus grande part de recettes douanires ; cela signifie que le pluslourd impact sur les recettes douanires sera vraisemblablement associ audtournement des changes. La Tanzanie tire une proportion non ngligeablede ses recettes douanires (12 %) de ses partenaires rgionaux.

    Tableau 3. Rpartition des catgories dimportations slectionnespar fourchette de taux de recouvrement des droits dentre

    (droits effectifs)

    Fourchette de taux de droits Biensdquip.

    Matirespremires

    Biensintermd.

    Biensfinals

    Total

    Malawi0 % 25 23 45 37 320,014,99 % 45 32 31 37 365,09,99 % 19 43 12 6 211019,9 % 8 2 7 5 62029,9 % 3 0 4 15 530 % et plus 0 0 0 0 0Total 100 100 100 100 100Valeur des importations(en millions de MWK)

    22 063,7 18 752,8 21 355,0 14 478,5 76 650,1

    Part de la catgorie ( %) 29 24 28 19 100Tanzanie0 % 25 23 19 4 200,014,99 % 39 68 23 16 385,09,99 % 17 2 13 25 141019,9 % 15 3 34 14 182029,9 % 4 1 11 40 1030 % et plus 0 3 0 1 1Total 100 100 100 100 100Valeur des importations(en millions de TZS)

    619 569,9 319 018,1 408 901,3 226 699,9 1 574 189,1

    Part de la catgorie ( %) 40 20 26 14 100

    Source : simulations des auteurs.

    18 / Actes de la Confrence 2007

  • 5. Mthodologie empirique

    En vertu des accords commerciaux passs et prsents entre lUE et lespays ACP, la plupart des exportations ACP (mais pas toutes) entraient sur lemarch europen en franchise de droits ; dautres taient soumises des droitsprfrentiels infrieurs aux droits NPF, au titre de protocoles sur des produitsspciaux, comme le sucre. Les APE introduiront la rciprocit des prfrencescommerciales entre les deux parties afin de respecter les rgles de lOMC.Loctroi de la franchise de droits aux importations de lUE concernes, associau maintien des droits pour le reste du monde, rduira le prix des biensimports de lUE par rapport ceux des biens similaires produits dans largion ou imports depuis le reste du monde, toutes choses gales par ailleurs.Sagissant des produits que lUE exporte dj dans la rgion, lintroductiondun APE conduira au dveloppement de leur importation par les membresvoisins (ESA et la SADC). Ceux qui entraient dans la rgion moyennant desdroits de douane seront admis en franchise de droits au titre de lAPE. Lesconsommateurs bnficieront du prix rduit de ces importations : ils pour-ront acheter plus, moindre prix. Cet effet sur le commerce augmenteraindniablement le bien-tre pour le Malawi et la Tanzanie. Nanmoins, lesgains des consommateurs se feront aux frais des gouvernements, qui perdronttoutes les recettes douanires lies aux importations actuelles et ne bnficie-ront plus de celles issues des importations que lAPE pourrait engendrer.

    Naturellement, lheure o lAPE nest pas encore appliqu, le Malawi etla Tanzanie importent des biens qui ne proviennent pas de lUE, mais departenaires rgionaux et du reste du monde. Supposons, sans tomber danslirralisme, que les producteurs de la rgion (ESA et SADC) soient moinsefficients que lUE, et que les producteurs RdM soient plus efficients que ceuxde lUE. Dans ce cas, le dplacement de la source des importations de lESA etde la SADC vers lUE savrera conome en ressources (augmentation dubien-tre) ds lors quil dtournera les importations (et la production int-rieure) de lESA et de la SADC au Malawi et en Tanzanie ; en revanche, ilsavrera consommateur de ressources (abaissement du bien-tre), sildtourne les importations en provenance du RdM. Ce dplacement desimportations en provenance de lESA et de la SADC nentranera pas depertes de recettes douanires pour le Malawi et la Tanzanie, si aucun droit dedouane nexistait avant lAPE. En revanche, ce sera le cas si des droits dedouane (mme taux rduit ou prfrentiel) taient appliqus sur le marchintrargional avant lAPE. Pour les importations dont la source est dtournedu RdM vers lUE en raison de lAPE, il ny a aucun doute sur leffet produitsur les recettes douanires : il est ngatif, puisque les importations en prove-nance du RdM soumises des droits de douane sont remplaces par des cellesde lUE en franchise de droits.

    Les APE produiront des effets statiques et des effets dynamiques lint-rieur des pays impliqus, et entre eux. Dans ce contexte, le cadre de modlisa-tion le mieux adapt est le modle dquilibre gnral. Lun des modles

    Accords de partenariat conomique... / 19

  • dquilibre gnral les plus employs pour ce type danalyse est le GTAP, unmodle EGC multinational et multiproduits. Cependant, en raison du man-que de dsagrgation des donnes, la plupart des pays africains ne sont pasinclus (Karingi et al., 2005). Cela signifie qu lintrieur dun bloc commer-cial rgional, les informations concernant certains pays peuvent tre regrou-pes comme reprsentant le reste du bloc ; dans ce cas, il est naturellementimpossible dintgrer correctement les effets intrargionaux secondaires dansles modles GTAP. Milner et al. (2005) observent juste titre que la base dedonnes concernant les EGC ne contient pas les dtails relatifs aux produitsqui permettraient de tenir compte des produits sensibles et particuliers quiintressent la fois les pays ACP et lUE dans le cadre des APE. tant donnle niveau de dtail de la prsente tude (ligne tarifaire SH six chiffres), il estclair que les modles EGC ne conviennent pas.

    Forts de ce constat, nous adoptons un cadre de modlisation dquilibrepartiel, car il est moins exigeant en donnes et peut inclure les effets surlimportation, les recettes douanires et le bien-tre au niveau du produit,entre autres. Le principal inconvnient des modles dquilibre partiel rsidedans leur incapacit mesurer les effets dynamiques ou secondaires, tels queles interactions entre les secteurs. Les analyses commerciales empiriquessappuient sur deux modles dquilibre partiel : le modle World Integra-ted Trade Solution (WITS/ SMART) appliqu par Karingi et al. (2005), etle modle Milner et al. (2005). Les deux modles reposent sur des fondementsthoriques inspirs de Viner. Notre tude sappuie sur la mthode de Milneret al. (2005), mais nous fournissons des gnralisations pour mesurer les effetslorsquil existe plusieurs cas de rduction des droits de douane20. Les effets surles importations et les recettes douanires sont gnralement mesurs de lamme faon dans les deux modles ; en revanche, dans Karingi et al. (2005),les effets sur le bien-tre sont uniquement valus en fonction de la variationdu bien-tre, associe aux effets sur la consommation, do des prvisionssouvent optimistes. Dans Milner et al. (2005), les effets sur le bien-trersultent, selon toute attente, dun cumul de facteurs plus quambivalent :sont dune part pris en compte, la consommation accrue dimportations basprix (bnfique pour le bien-tre) et le dplacement des sources dimporta-tions, de partenaires rgionaux inefficients des producteurs de lEU plusefficients (conome en ressources), et dautre part, la perte de ressources quirsulte de la substitution des sources dimportation issues de producteurs bas cots du reste du monde par des producteurs de lUE relativementinefficients.

    Milner et al. (2005) examinent les effets dun APE sur un petit pays, j,qui fait partie lorigine dune zone dchanges prfrentiels (ZEP) entre deuxpays. On suppose que les marchs sont parfaitement concurrentiels, que lesarticles produits dans le pays j peuvent tout fait se substituer aux importa-

    20. Pour plus de dtails sur les postulats et les hypothses du modle, se reporter au travail original deMilner et al. (2005).

    20 / Actes de la Confrence 2007

  • tions, et quil existe une substituabilit parfaite entre les importations dautressources extrieures de remplacement (dans ce cas, lUE et le reste du monde).Dans cette ZEP, le pays partenaire approvisionne le pays j cot croissant,tandis que les pays extrieurs (lUE et le RdM) utilisent diffrentes techniquesde cots constants, le RdM tant le producteur plus bas cot. La figure 1illustre limpact de la rciprocit.

    La ligne DJ reprsente la fonction de demande dimportations du pays jet la ligne OZEP la fonction doffre (exportations) de la ZEP destination dupays j. La fonction doffre en libre-change du RdM est reprsente par laligne ORdM (une fonction doffre en libre-change pour lUE se situantnimporte o, au-dessus de la ligne ORdM). Dans un contexte autre que lelibre-change, le pays j applique des taux de douane NPF aux importationsoriginaires de lUE et du RdM, si bien que P tUE = PUE(1+d

    NPF) etP tRdM = P

    RdM(1+d NPF). Les conditions de cot initiales assurent que P tRdM< P tUE. (Par souci de clart, nous nincluons pas P

    tUE dans le graphique.)

    Cet cart de prix subira aussi bien des effets de cration dchanges que dedtournement dchanges, si le pays j a adopt des politiques commerciales prfrentielles discriminatoires en faveur de lUE. La ligne doffre appli-cable, incluant des droits de douane, est O tRdM, et le rsultat total desimportations du pays j est 0M2, soit la somme des importations 0M1 origi-naires de la ZEP et M1M2 originaires du RdM. La capacit doffre du pays jest exclue des fins de simplification. Nous pouvons donc tudier les effetssur le bien-tre du pays j en utilisant le surplus du consommateur par

    Figure 1. limpact de la rciprocit dans un APE

    Accords de partenariat conomique... / 21

  • rapport la demande dimportations Dj reprsent par le triangle ABPtRdM

    auquel il faut ajouter les recettes douanires issues des importations extrar-gionales (zone (a+b)).

    Supposons prsent que le pays j et ses partenaires de la ZEP adoptent unAPE avec lUE. Conformment aux modalits de cet accord, les biens impor-ts dans la ZEP originaires de lUE sont admis en franchise de droits, et ceuxoriginaires du RdM demeurent assujettis aux droits dimportation. Suppo-sons que lAPE rduise le prix des importations en provenance de lUE aupoint que PUE se trouve systmatiquement en dessous de P

    tRdM (mais

    au-dessus de PRdM en libre-change). Aprs la signature de lAPE, PUE devientla ligne doffre applicable qui permet aux importations totales de stendre de0M2 0M3, cette hausse provenant uniquement de lUE. Le volume total desimportations peut tre ventil en trois composantes distinctes : laugmenta-tion du volume des importations M2M3, qui est directement attribuable lessor de la consommation ; les importations M1M2 dtournes du RdM ; etles importations 0M1 dtournes de la ZEP. En termes techniques, 0M1reprsente la cration dchanges rsultant de la substitution de biens de laZEP produits de faon relativement inefficiente par des biens de lUE pro-duits de faon relativement efficiente (bien que globalement, lUE ne soit pasla plus efficiente). M1M2 illustre le dtournement dchanges , car il repr-sente le volume des importations provenant de producteurs de lUE relative-ment inefficients qui remplacent celles provenant de producteurs du RdMrelativement efficients (cot constant le plus bas). Il y a dtournement entreles fournisseurs extrargionaux.

    Au niveau des prix PUE, on constate une perte de ressources gale auxrecettes douanires potentielles maximales (a+b), car les biens imports delUE sont admis en franchise de droits. La cration dchanges entrane uneffet global dconomie de ressources reprsent par la zone c, et le dplace-ment de la zone d de surplus des producteurs de la ZEP vers les consomma-teurs, ces deux facteurs augmentant le surplus des consommateurs repr-sent par la zone (c+d ). Si lon ajoute, dune part, laccroissement du surplusdu consommateur et donc, du bien-tre, le pur effet de consommation (zonee) et la cration dchanges, et, dautre part, les effets du dtournementdchanges qui rduisent le bien-tre, soit (c+d+e-b), leffet net sur le bien-tre savre ambigu et variable, selon les forces relatives des deux valeurs. Ilest clair que plus lUE est efficiente, plus le dtournement dchanges estrduit, et donc plus la probabilit dun APE bnfique pour le bien-tre estforte.

    Les effets exposs ci-dessus, concernant les importations, les recettesdouanires et le bien-tre, peuvent tre estims comme suit. La composante effet de consommation des effets sur les importations peut tre mesure enutilisant llasticit de la fonction de demande dimportations ; dans ce cas, lesvariations de prix des importations sont supposes rsulter des changementsdes droits ad valorem sur les importations :

    22 / Actes de la Confrence 2007

  • (1)

    o tUEn dsigne le taux de droits NPF impos sur les importations originairesde lUE pour la priode prsente n, eDM est llasticit de la demande dimpor-tations, et MUEn reprsente les importations originaires de lUE.

    Les effets de la substitution des sources dimportation peuvent tre esti-ms en se fondant sur lhypothse dune substituabilit imparfaite :

    (2)

    o 0 rUEk 1 dsigne llasticit de substitution entre les importations delUE et celles de la ZEP (k = ZEP, auquel cas lquation 2 mesure le remplace-ment (positif pour le bien-tre) dimportations de fournisseurs relativementpeu efficients de la ZEP par des importations de fournisseurs plus efficients delUE) et du reste du monde (k = RdM, o lquation 2 mesure le basculementdes sources (ngatif pour le bien-tre) de lUE relativement peu efficientes verscelles du RdM relativement plus efficientes)21. Mk est la quantit dimporta-tions provenant de la rgion k. Le dtournement des sources de la ZEP ou duRdM implique que DMk 0.

    Leffet total sur les recettes douanires quivaut la somme des pertes derecettes douanires dues la suppression des droits sur les importationsexistantes en provenance de lUE et des pertes de recettes douanires sur lesimportations soumises des droits qui provenaient de sources de la ZEP et duRdM, et qui ont t dtournes vers des sources europennes. Cela peutscrire comme suit :

    DR = tUEn ( MUEn + DM

    ZEP + MRdM ) (3)

    Les effets sur le bien-tre, associs aux effets sur les importations et les recettes,sont estims par lexpression :

    DW = tUEn (. W DMc + DMZEP + DMRdM ) (4)

    dont le premier terme mesure les effets positifs sur le bien-tre dune consom-mation accrue des produits admis en franchise de droits, et donc moins chers.Le deuxime terme value les effets positifs sur le bien-tre du dplacement

    21. Il peut exist