oeuvres complètes : robespierre, maximilien, 1758-1794 - tomo i

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    -r

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    7/262

    UVRES

    COMPLETES

    DE

    MAXmiLIEiN

    UOI{i:SIMKIilil']

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    UVHES

    DKS

    MEMBRES

    DE LA

    SOCIT

    DES

    TUDES

    ROBESPIERRISTES

    Paul

    AiuiAsciiEKF.

    Les intendants

    de

    province

    sous

    Louis

    XVI

    tia.

    diiit

    du

    russe

    par

    Louis

    Jousseraudot).

    Un

    vol. in-8.

    Paris. Fli.x

    Alcan.

    Hippolytc

    HuKKENom. Les portraits de Robespierre.

    Etude

    iconogra-

    phique

    et historique.

    Un

    vol.

    gr. in-8

    Jsus.

    Paris,

    E.

    Leroux.

    Eugne

    W.i'ke/..

    Les

    Volontaires

    nationaux

    [1791-1793)

    (publi

    sou

    la

    direction

    de la

    section

    historinne

    de

    I

    Etat-major de l'arme).

    Un

    vol.

    in-8.

    Paris, H. Chapelet.

    Ed.

    Driault.

    Napolon

    et l'Italie (1800-1812).

    Un

    fort vol.

    in-8.

    Paris,

    F.

    Alcan.

    La

    politique orientale de

    Napolon (1806-1808). Un

    fort

    vol.

    in-8.

    Paris, F.

    Alcan.

    Hans Gl.^o.^u.

    Reformversuche

    und

    Sturz

    des Absolutismus in

    Frankreich

    (1774-1788).

    Un vol.

    in-8.

    .Munich

    et

    Berlin,

    R. Oldenbourg.

    Michel JoivE.

    Correspondance

    intime

    du

    Conventionnel

    Rovre

    avec

    GoupUleau

    ^de

    Montaigu

    aprs

    la

    Terreur

    (1794-1795

    . Un

    vol.

    in-8. Nimes, Debroas.

    ^

    D'

    Victorin Lav.\l.

    Lettres indites

    de

    J.-P.

    Rovre

    son

    frre

    Simon-Stylite.

    Un

    vol.

    in-8. Paris,

    11.

    Champion.

    Albert Mathiez.

    Les Origines

    des cultes

    rvolutionnaires (1789-

    1792).

    Un vol. in-8. Paris,

    Cornly,

    La

    Thophilanthropie et

    le culte

    dcadaire

    (1796-1802). Un

    fort

    vol. in-8. Paris,

    F.

    Alcan.

    Contributions

    l'histoire

    religieuse

    de

    la

    Rvolution

    franaise

    (avec

    une

    prface

    de

    Gabriel

    Monod).

    Un

    vol.

    in-8.

    Paris,

    K.

    Alcan.

    La

    Rvolution

    et

    l'Eglise.

    Eludes

    critiques

    et

    ilocumenlaires

    . Un

    vol.

    in-8.

    Paris,

    \.

    Colin.

    Le

    Club des

    Cordeliers pendant

    la

    crise

    de

    Varennes

    et le

    mas-

    sacre du

    Champ de

    Mars,

    documents

    en

    grande

    partie

    indits

    avec

    des

    claircissements,

    des notes et

    une

    planche. Un fort

    vol.

    in

    8. Paris,

    H.

    Champion.

    Franois

    Vkk>hi,e.

    Essai sur

    la

    rpartition

    sociale

    des

    biens

    eccl-

    siastiques

    nationaliss dans

    le dpartement du

    Rhne. Un

    vol.

    in-S,

    Paris, K.

    Alcan.

    Le Comit

    rvolutionnaire

    d'Aix-les-Bains

    (en

    collab.

    avec

    \.

    Itochel).

    In

    vol. in-S. Paris,

    F.

    .\lcnn.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

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    SOCIETE I>ES

    TUDES HO BE

    SP

    1

    E

    RRl STE S

    OKllVRES

    COMPLTES

    J3K

    MAXIMILIEN

    ROBESPIERRE

    PREMIERE

    PARTIE

    L

    T

    orne

    1

    I

    ROBESPIERRE

    A

    ARRAS

    EXJGElsrE

    DEPREZ

    ANCIEN

    KI.KVK

    IIE

    I.KI.OI.K

    HlANAl^K IIK

    IHHIK

    DOCTEC'R KS

    I.ETTIIES

    AHCIIIVISTK nPABTEMENTAI. III

    PAS-OE-l.AI.AIS

    PARIS

    ERNEST

    LEROUX,

    EDITEUR

    _

    ^

    o

    28,

    un: noNAPAmE,

    vi'

    ^

    Q

    1910

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    10/262

    R(pm

    \(\\0

    L.l

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    11/262

    AVANT-PROPOS

    Charg

    par

    la

    Socit

    des

    ludes Robespierristes

    d'uiio

    dition

    critique

    des

    uvres compltes de Maximilien

    Robespierre

    antrieures

    1789,

    je

    tiens,

    l'apparition

    du premier fascicule,

    dire trs

    brivement, mais

    trs

    hiirement, comment

    je

    l'ai

    conue.

    Pendant sept annes,

    dater

    de

    1782,

    Robespierre

    compose

    des

    posies,

    rdige

    propos des affaires qu'il plaide devant

    le

    Conseil

    d'Artois des mmoires

    et

    consultations

    judiciaires,

    improprement

    appels

    plaidoyers,

    crit pour

    les

    concours

    des discours

    et

    des

    loges acadmiques.

    Ses

    uvres de

    jeunesse seront

    donc divises

    en

    deux

    catgories,

    litt-

    raires

    en prose

    et

    en

    vers

    et

    judiciaires. Chaque

    uvre

    sera

    prcde

    d'une

    notice spciale,

    comprenant

    tous

    les ren-

    seignements

    qu'il

    aura

    t

    possible

    de

    recueillir.

    Une

    introduction gnrale,

    qui

    replacera

    Maximilien

    Robes-

    pierre dans

    le milieu arrageois o il a

    vcu et

    brill,

    permettra de

    mieux

    comprendre

    et de

    nrieux pntrer

    l'homme;

    elle

    sera

    comme

    la

    chane

    qui

    runira

    tous

    ses

    crits, si

    diffrents

    et

    de

    valeur

    ingale.

    Nous nous

    efforcerons

    d'observer

    la

    plus

    rigoureuse

    impartialit,

    d'numrer

    et

    de

    contrler toutes les

    sources,

    pour

    viter

    les

    lacunes,

    les erreurs

    et

    les

    mprises.

    Nous

    ne

    perdrons

    pas

    de vue

    que

    l'dition

    entreprise

    par

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    UVnES

    COMPLTES

    DE MAXIMILIEN

    KOUESPIERKE

    la

    Socit

    des

    KUides

    Robespierrisles

    est avant

    tout

    cri-

    tique.

    De

    mme

    qu'elle

    ne

    doit

    pas tre

    une

    uvre

    de

    vulgarisation,

    de

    mme

    l'introduction

    historique

    sur

    la

    carrire

    de

    Robespierre de

    1782

    1789

    ne

    doit

    pas

    tre

    rduite

    aux

    dimensions

    d'un

    article

    de

    dictionnaire

    biographique.

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    DISCOURS SLU

    LES

    PEINES

    INFMIAMES

    COURONN PAR

    L'ACADMIE

    DE METZ EN

    1784

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    15/262

    INTRODUCTION

    Le

    21

    avril

    1784,

    rActulmie

    royale des

    Belles Lettres

    d'Arras

    recevait

    on

    sance

    publique

    trois

    nouveaux acad-

    miciens qui

    prononcrent

    leurs

    discours

    de

    rception

    aux-

    quels

    rpondit

    du

    Quesnoy, avocat

    et

    chevin

    arrageois

    faisant

    les fonctions de

    directeur.

    Les

    trois

    rcipiendaires,

    outre

    les

    remcrciemenis

    d'usage,

    traitrent

    chacun

    un sujet

    particulier

    : Le Sage,

    avocat

    du

    roi

    la

    gouvernance

    d'Arras

    parla contre

    l'abus

    des

    talents,

    Ansart.

    mdecin,

    disserta sur

    l'air atmosphrique,

    Maximilien de

    Robespierre

    (1),

    avocat,

    entreprit

    de

    prouver l'origine,

    l'injustice

    et

    les inconv-

    niens

    du

    prjug

    qui

    fait

    rejaillir

    sur

    les

    parents

    dos

    cri-

    minels

    l'infamie

    attache

    leur

    supplice

    (2).

    Les

    archives

    de

    l'Acadmie

    d'Arras

    n'ont

    point conserv

    ni le

    manuscrit

    ni

    une

    copie du

    discours

    prononc

    par

    Kobespiorre

    lors

    de

    sa

    rception.

    Mais l'Almanach

    d'Artois

    nous

    apprend

    que

    le

    nouvel

    acadmicien

    l'envoya

    peu de

    temps

    aprs,

    avec

    quelques

    additions,

    la

    Socit

    royale

    des

    Sciences

    et

    Arts

    de

    Metz

    et

    qu'il

    y

    fut

    couronn

    le

    jour

    de

    la

    Saint Louis

    par cotte

    Compagnie

    qui avait

    propos

    le

    sujet

    pour

    le

    prix de

    l'anne

    178i

    .

    C'est,

    en

    effet,

    dans

    les

    prix

    proposs

    par la

    Socit

    de

    Metz que

    Robespierre

    (1)

    Robespierre,

    lu

    le 13

    novembre

    1783,

    avait

    remplac

    .M.

    de

    Crespiul.

    Sur

    l'Association

    littraire

    d'Arras

    fonde

    en

    1137 et

    rige

    (1773)

    en

    Aca-

    dmie, cf.

    van

    Drivai

    :

    Histoire de

    t'Aradmie

    d'Arras

    depuh

    sa

    fondation

    en

    1737 jusqu' nos

    jours.

    Arras, 1872,

    in-8.

    (2)

    Almanach

    historique

    et

    gographique

    d'Artois

    pour

    l'an

    de grce

    ITS

    contenant la

    description

    A Arras,

    chez la

    veuve

    de

    Michel

    Nicolas,

    ibraire

    et

    imprimeur

    du

    Roi,

    rue

    Saint-Gerj-,

    p.

    25a.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    16/262

    6

    (EIVRES

    COMPI.TKS DK

    MAXIMII.IKN

    HOBESPIERRK

    avait

    puis l'ide

    de son discours de rception

    ;

    la ques-

    tion

    que la

    Socit lorraine

    avait

    propose

    pour le prix

    dcerner

    le

    jour

    de la Saint

    LouivS

    1783

    lui servit

    ainsi

    dou-

    blement.

    Elle

    lait

    nonce en

    ces

    lermes :

    (Juellc

    est l'origine

    de

    l'opinion

    lui

    tend

    sur

    tous

    les

    individus

    d'une

    mme

    famille,

    une

    partie de

    la honic atlachc aux peines

    infa-

    mantes

    que subit

    un

    coupable? Cette opinion

    est-elle

    plus

    nuisible qu'utile?

    Et

    dans

    le

    cas

    o

    l'on

    se dciderait pour

    l'alfirmalive,

    quels

    seraient

    les

    moyens

    de

    parer aux incon-

    vniens

    qui

    en rsullcnt?

    Mais aucun

    des mmoires

    prsents

    au

    concours

    de

    1783

    ne

    parut

    rpondre

    la

    ques-

    tion

    d'une

    manire

    satisfaisante. Plusieurs auteurs avaient

    soutenu

    i'ulilili

    du

    prjug

    sans nanmoins

    en

    avoir

    pes

    et

    suffisamment

    approfondi

    les causes, ainsi

    que

    ses

    avan-

    tages

    ou

    ses

    inconvniens

    pour la Socit

    en

    gnral,

    et

    pour

    cbaquc

    famille

    en

    particulier . D'autres, en lalla-

    quant,

    n'avaient

    pas fait

    usage

    de

    toutes

    les ressources

    que

    le

    sujet

    prsentait

    (1).

    Ce

    n'est

    pas

    cependant,

    ainsi

    qu'en

    fait foi

    le rapport

    sur le

    concours,

    imprim

    et

    distribu,

    que

    la

    Socit

    royale

    n'et

    distingu |)aimi les Mmoires qu'elle

    avait examins

    des

    ouvrages

    dignes d'loges

    .

    Le

    Mmoire

    inscrit sous le n 7 et portant pour

    pigraphe

    ces

    mots d'Horace, Tol/ite lmrbanii nioretn,

    est

    crit pure-

    ment

    et

    avec

    chaleur. L'auleur

    attaque vivement le prjug,

    et

    parlant

    au

    cur

    avec les

    mouvements

    d'une

    loquence

    persuasive,

    il sait

    sentir

    le mal qui en

    rsulte pour les

    familles;

    mais

    il

    ne discute pas

    sulfisammenl

    celui

    que

    peut

    prouver la

    socit

    politique, il

    n'indique

    pas

    assez

    nette-

    ment les

    sources

    de l'opinion,

    non

    plus

    que

    les

    moyens d'y

    remdier.

    (1)

    Prix

    proposs

    par la

    Socirt royale]

    des Sciences

    et

    les

    Arts

    de AJetz

    pour les

    annes

    1784 et

    llS.'i.

    A

    Melz,

    de riiiiprimerie

    de Joseph Antoine,

    imprimeur

    du

    Roi,

    etc. MDCCLXXXIII,

    in-4%

    4

    p.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    17/262

    INTRODUCTION

    7

    Lo

    Mmoire

    n

    6

    qui a

    pour

    pigraphe

    ces vers d'IIoraco

    :

    Hic

    munis

    alieneiis

    esta

    iVi7

    conseil

    e

    sihi,

    niiUd

    pallescere

    culp

    a

    mrit une

    dislinclion

    par des vues

    profondes;

    l'auteur

    est

    trs

    vers dans la

    science des

    loix

    ;

    mais

    en s'tsndant

    trop

    en

    raisonnemens mlapliysiques,

    il

    a

    vu avec

    illusion

    le systme de

    notre

    lgislation

    et

    les fondemens

    do

    nos

    moRurs.

    D'ailleurs on

    trouve

    en gnral

    plus

    do

    brillant

    que

    d'exactitude

    dans

    ses

    eprcssions;

    des

    mtaphores

    frquem-

    ment

    empruntes

    de

    la

    science des

    gomtres,

    et

    quelquefois

    employes

    sans

    justesse, offrent une

    sorte

    de

    nologisme

    qui dpare une production

    trs estimable par le

    fonds

    des

    ides, et

    par

    la sagacit qu'elle annonce

    dans

    l'esprit

    de

    son

    auteur.

    Quant au Mmoire

    n

    .'

    sous celte

    pigraphe :

    Anima

    rjiiar

    prccaieril ip.sa

    moridiir

    ;

    f'dius

    no portalnt

    iniquitaton

    patris

    et

    pater non portail

    inifjuilatcni

    fdii

    .

    On

    y

    a trouv

    un

    systme

    de

    lgislation

    propre prvenir en partie les

    mau-

    vais

    effets

    du

    prjug

    ;

    mais

    on

    ne

    voit pas

    dans

    la dduction

    des motifs une exposition suffisante des

    incon venions

    ou

    des

    avantages

    de

    l'opinion pour

    la socit. L'on

    y

    apperoit

    le

    germe de beaucoup d'ides

    justes,

    et on regrette

    qu'elles

    n'ayent pas

    t approfondies

    ni

    soutenues par une

    chane

    de raisonnemens capables

    d'oprer

    la conviction.

    D'ailleurs

    le

    style

    qui,

    dans

    ces matires,

    doit

    au

    moins

    tre

    pur

    et

    exact,

    prsente

    trop souvent des

    ngligences et des

    trivia-

    lits

    qui annoncent une

    plume

    peu exerce crire

    sur des

    matires

    de droit public et de jurisprudence.

    Ainsi

    la

    Socit

    Royale,

    dsirant

    que

    cette

    question int-

    ressante soit traite avec la profondeur

    qui

    lui

    convient,

    a

    remis

    le Prix au

    concours

    de l'anne prochaine.

    Elle

    invite

    les

    Auteurs

    des

    Mmoires

    qui

    viennent

    dtre

    indiqus,

    i

    reloucher

    leurs ouvrages

    et en

    gnral elle

    engage

    ceux qui

    se

    proposeront

    d'entrer

    en

    lice,

    examiner

    l'opinion

    dont

    i s'agit, sous toutes ses faces, h

    exposer

    avec exactitude

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    18/262

    8

    UVRES

    COMPLTES

    DE

    MAXIMILIEN

    ROBESPIERRE

    rinflucnce

    qu'elle

    a

    tant

    sur

    les

    individus

    que

    sur

    les

    murs. Il

    serait

    ncessaire

    que

    l'on

    s'attacht

    singulire-

    ment

    discuter

    les

    points

    suivans,

    qui

    drivent de

    la ques-

    tion principale,

    savoir

    :

    1

    Si nos

    lois

    donnent

    un

    Parent,

    quelque proche

    qu'il

    soit d'un

    homme

    enclin

    au

    vice,

    le

    droit

    et

    le pouvoir

    de

    mettre,

    dans

    tous

    les

    tems, obstacle

    ce

    penchant?

    2

    Si

    la

    commnnication de

    la

    fltrissure

    ne

    nuit pas plus

    l'tat

    qu'elle

    ne lui

    profite,

    en

    forant

    des familles

    s'expa-

    trier,

    et

    sotvetit en

    les

    disposant au

    erime par

    l'avilissonent'i

    3

    Si

    en rendant l'infamie

    personnelle,

    on

    n'

    assurerait

    pas

    plutt la

    punition

    des

    crimes qu'en

    laissant

    subsister

    un pr-

    jug

    qui

    oblige

    les

    familles

    honntes

    recourir

    des

    moyens

    trangers aux

    Loix,

    jjorir

    soustraire

    les

    coupables

    aux

    rigueurs

    de la

    justice?

    4

    Enfin,

    quel

    seroit le

    systme

    de

    lgislation

    le

    plus

    propre

    dtruire

    le

    prjug,

    ou

    prvenir

    ses inconvniens,

    si

    l'on

    pensoit

    qu'il

    fiU

    utile de

    conserver une

    partie

    de ses

    effets,

    ou

    qu'il

    ft

    impossible

    de

    l'anantir

    entirement

    ?

    Le

    prix

    pour

    le sujet

    propos

    tait

    une

    mdaille

    d'or de

    la

    valeur de

    400

    livres

    (1);

    les

    mmoires

    devaient tre adres-

    (1)

    CcUe

    niL'daille portait

    comme empreinte

    l'elBgie du marchal de

    Belleisle

    qui

    avait fond la Socit

    royale en

    175

    sous le

    nom

    de

    Socit

    d'tude et

    ics

    peints inruiiiaiitcs

    sont la

    mort,

    les

    galres, le baonis^ciiicut

    perp-

    tuel,

    le

    fouet,

    la marque avec

    un

    fer

    cheval,

    la

    langue

    coupe ou

    perce,

    le

    poing

    coupe, le

    carcan-ol

    le

    pilori, la

    dtention

    dans une maison de

    force.

    i

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    28/262

    18

    IVRF.S

    COMPLTKS

    DE MAXIMII.IKN

    ROBESPIKRRK

    tii

    peine

    s'excute

    publiquement

    et d'une

    manire

    ignomi-

    nieuse

    comme

    le

    carcan et le pilori. Que

    peut faire

    d'ailleurs

    ce

    condamn

    qui

    est

    dans

    les

    fers?

    il

    n'a

    plus

    de secours

    esprer que

    du

    ct

    de sa

    famille

    et

    celle

    l'aniille est-elle

    tou-

    jours en

    tat de

    faire les frais

    et

    les

    poursuites

    ncessaires

    pour

    parvenir

    jusqu'aux

    pieds

    du

    Irnc et

    y

    faire

    entendre

    sa

    voix. Les

    Lettres de

    grce excmplenl

    de

    la peine,

    mais

    lie

    lvent

    point la note dinfamie, suivant celte maxime

    vul-

    gaire

    :

    Princcps

    qtios

    absolvit nott

    .

    '

    Lacrclelle

    avait

    raison

    de dire

    que

    l'originalit

    d'un

    penseur

    ou

    d'un

    crivain ne

    peut pas

    tre

    dans ses

    princi-

    pales

    ides,

    qui peuvent se

    trouver ailleurs

    et mme

    partout,

    mais

    dans les

    conscjucnces o

    elles

    le

    mnent,

    dans le

    sys-

    tme

    o

    il les fond et les

    lie,

    dans les

    dveloppements

    qu'il

    leur

    donne. Il

    est, dans

    chaque

    sujet,

    une foule d'ides,

    qui

    ne

    peuvent

    chapper

    ceux

    qui

    les mditent; et il

    peut

    aussi

    se

    rencontrer

    des

    esprits

    de

    la

    mme nature

    qui,

    en

    procdant

    par

    les

    mmes

    recherches,

    doivent

    arriver

    aux

    mmes

    rsultais

    .

    J{ien

    que Muyart

    de

    Vouglans

    ait crit,

    en

    1780,

    son

    mmoire

    sui' les

    l'eiues

    infamantes

    que

    lohes-

    pierre a

    pu

    lire et

    dont il a

    pu

    profiter

    quatre ans

    aprs, il ne

    s'ensuit

    pas que

    ce

    dernier

    soit

    un

    plagiaire.

    Un

    avocat,

    qui

    tudie une

    question,

    consulte

    les

    livres

    o

    elle est

    traite;

    qu'il

    s'agisse de

    discours

    acadmiques

    ou

    de

    plaidoyers,

    il

    s'inspire des travaux

    de ses devanciers. C'est

    ce

    litre

    que

    Maximilien Robespierre a

    mis

    contribution le

    trait des

    Lois criminelles dont l'auteur de ce

    recueil encyclopdique

    avait

    dissert

    spcialement

    sur

    le

    prjuge

    des

    Peines

    infa-

    mantes, avant

    que l'Acadmie de

    Metz

    et

    mis

    le

    sujet

    au

    concours.

    Brillant

    lve

    du collge

    Louis-ic-Grand, couronn

    au

    Concours

    gnral

    mme

    depuis

    la

    quatrime, Hobespiorre

    donne

    dans

    ce

    discours

    la

    mesure de sa

    culture

    classi(iue.

    Le

    jeune avocat, qui

    plaidait

    ses

    premires

    causes

    dans

    le

    temps

    o

    il crivait

    ce discours

    ,

    ne

    manque ni

    de talent ni

    d'loquence. Il

    5cril

    avec chaleur

    cl

    parfois

    avec

    vigueur.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    29/262

    INTRODUCTION

    19

    L'Acadmie royale

    des

    Bcllos-Letlres

    d'Airas,

    qui avait

    pris

    pour devise

    et emblme en 1737 de

    jeunes

    aiglons qui

    essaient

    leurs

    ailes sur

    le

    bord de

    leur

    nid,

    pouvait

    s'applaudir

    du

    choix qu'elle avait fait. Et

    nul

    des

    acadmiciens d'alors,

    d'es-

    prit si cultiv,

    n'et song

    faire

    un

    grief

    leur

    nouveau

    collgue,

    pris d'ides

    philanthropiques,

    d'oser,

    avec tout

    le

    respect d la religion et au

    gouvernement,

    lever

    sa

    voix

    contre

    les

    prjugs

    les

    plus

    alTcrmis

    (1).

    (I) I.e

    discours

    de

    Robespierre

    existe

    en

    original

    dans

    les

    Archives

    de

    l'Acadmie

    de Metz; la

    prsente dition

    a

    t

    faite

    d'aprs ce manuscrit,

    qui

    a d'ailleurs

    t

    imprim

    par

    l'Acadmie

    dans

    les

    Mmoires de

    VAcadmie

    royale de

    Metz,

    lettres,

    sciences,

    arts,

    agriculture, XX anne,

    1838-1839,

    p.

    387-416.

    Les

    variantes

    ont t

    donnes

    d'aprs l'dition

    de 1783. D'aprs

    Qurard,

    dans sa

    Bibliographie de

    Robespierre

    (tir

    part de

    sa

    France

    littraire),

    une premire dition

    de

    64 pages

    aurait

    paru en

    1784

    chez Mrigot.

    Nous

    ne

    l'avons pas

    retrouve

    en dpit de nos recherches. La

    Bibliothque

    nationale

    possde

    (rserve

    263t,

    2032

    et

    4900)

    3

    exemplaires de

    ce discours,

    mais

    tous

    de

    l'dition

    de

    1783.

    La

    bibliothque de

    la

    ville

    de Metz,

    celle d'Ar-

    ras

    (n

    7349),

    celle

    du

    dpartement

    du

    Pas-de-Calais

    (collection

    Victor

    Barbier)

    n'ont que

    l'dition de 1783. L'exemplaire mis

    en

    vente

    l'HIel

    Drouot

    en

    mars 1910 collection Victorien

    Sardou

    n

    1164^

    tait

    galement

    de 1785.

    Lors-

    que Robespierre

    a publi le discours

    qui

    avait

    t

    couronn, il

    y

    a fait

    des

    additions

    si

    importantes qu'elles

    n'auraient

    pu

    trouver place

    au

    bas du

    texte

    primitif.

    Nous

    avons

    rais

    en

    notes

    au

    bas des pages les variantes de

    mots

    et

    de phrases

    et

    rejet aux

    appendices

    F, 11

    et

    III

    les

    additions. Le

    texte ori-

    ginal est publi avec

    l'orthographe

    et

    la ponctuation ruKIcmenl

    respects.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    30/262

    DiSCOLHS

    ADISS

    (1)

    A

    Messielus

    de

    la Socit

    littraire

    de

    Metz

    suit

    les

    QUESTIONS SUIVANTES

    PROPOSES

    POUR

    SUJET

    (2)

    d'un

    prix

    qu'elle

    DOIT

    DCERNER AU

    -MOIS

    d'aOUT

    1785-.

    Quelle est

    lorigine de

    lopinion

    qui

    tend

    sur tous

    les

    individus

    d'une

    mme

    famille,

    une

    partie

    de

    la

    honte

    attache

    aux

    peines

    infamantes

    que subit

    un

    coupable

    ?

    Cette

    opinion

    est-elle

    plus

    nuisible

    quutile

    .'

    et

    dans

    le

    cas o

    l'on

    se

    dcideroit

    pour

    l'affirmative,

    quels

    seroient les moiens de

    parer

    aux

    inconv-

    niensi

    qui en

    rsultent.

    Quod

    gcnus

    hoc

    hoiuinuiu :

    quacve

    huiic

    laQi

    barbara

    inoreiu

    peruiillit

    patria?

    Virg.

    .Eneid.

    Messieurs,

    C'est

    un sublime

    spectacle

    de voir les

    compagnies

    sa-

    vantes, sans

    cesse

    occupes

    d'objets

    utiles

    l'intrt

    (3)

    public, inviter

    le

    ge'nic,

    par

    Tappas des

    plus

    tlatteuses

    rcom-

    penses

    (4)

    combattre

    les abus

    qui

    troublent

    le

    bonheur

    de

    la

    socit. Ce prjug

    imprieux

    (o),

    qui

    voiie

    l'infamie

    les parens des

    malheureux,

    qui ont

    encouru

    l'animadver-

    sion

    des

    loix

    sembloit

    avoir

    chapp

    jusques

    ici

    leur

    atten-

    tion; vous

    avez

    eu

    la

    gloire. Messieurs, de

    diriger

    (6)

    les

    premiers vers

    cet

    objet

    intressant

    les

    travaux

    de

    ceux

    qui

    aspirent

    aux

    couronnes

    acadmiques.

    In

    sujet

    si

    grand

    veill

    rallcntion

    du

    public

    ;

    il a

    allum

    parmi

    les

    gens de

    lettres une

    noble

    mulation

    :

    heureux ceux qui ont reu

    de

    la nature

    les tulens

    (7)

    ncessaires pour le traiter

    d'une

    manire

    qui

    rponde

    son importance,

    et

    (8)

    digne

    de

    la

    (i)

    Edition de

    \'iS'j

    :

    couronn.

    (2)

    du

    prix

    de

    l'anne

    l^iti.

    ;3)

    au

    bien

    public.

    (4)

    frapper

    sur

    les

    prjuf/s

    qui.

    (a Celte

    opinion

    imprieuse.

    (6)

    de

    tourner.

    (7)

    le

    f/nie

    [8,

    qui

    soit

    dijrne.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    31/262

    DISCOURS SLR

    F-KS

    PF.INES

    INFAMANTES 2t

    Sot'iU' clbro qui

    la

    propos

    Jo

    suis

    loin de

    trouver

    en

    moi

    ces

    grandes ressources :

    mais

    je n'en ai

    pas moins

    os

    vous

    prsenter

    mon

    tribut

    :

    c'est le

    dsir

    d'tre utile;

    c'est

    l'amour de

    l'humanit

    qui

    vous

    l'olTre

    ;

    il

    ne seauroit

    tre

    tout

    fait indigne

    de

    vous

    (I).

    La

    premire des

    trois

    questions

    que

    (2)

    je

    dois

    examiner

    pourroit

    (3)

    paroilre, au

    premier

    coup

    d'a-ii, offrir

    des diffi-

    cults

    insurmontables.

    Comment

    dcouvrir

    l'origine

    d'une

    opinion

    qui

    remonte

    aux

    sicles

    les

    plus

    reculs?

    Comment

    dmler

    les

    rapports

    imperceptibles par

    lesquels un

    prjug

    peut

    tenir

    mille circonstances

    inconnues,

    mille

    causes

    impntrables?

    S'engager dans

    une

    pareille

    discussion,

    n'est-

    ce

    pas

    d'ailleurs s'exposer

    rendre

    raison de

    ce qui

    n'est

    peut tre

    que

    l'ouvrage

    du hazard?

    N'est-ce pas

    vouloir

    (4)

    en

    quelque

    sorte

    ciiercher des

    rgles au caprice,

    et

    des

    motifs

    la

    bizarrerie

    ? telles

    sont

    (5^ les ides qui se prsen-

    trent d'abord mon

    esprit

    :

    mais

    j'ai

    rflchi,

    qu'en pro-

    posant cette question, vous

    aviez

    jug

    par l mme qu'elle

    n'toit pas

    impossible

    rsoudre

    :

    votre

    authorit

    m'a sduit

    et

    j'ai

    os

    entreprendre cette

    tache.

    Il m'a sembl

    d'abord qu'une

    observation

    trs

    simple

    me

    dcouvroit

    les premires

    traces

    du

    pnjug

    dont

    (6)

    il est

    ici

    question.

    Quoi(|ue les

    bonnes

    et

    les

    mauvaises

    actions

    soient per-

    sonneles,

    j'ai cru remarquer

    que les

    hommes

    toient

    partout

    naturellement

    enclins

    tendre,

    on

    quelque

    sorte, le

    mrite

    ou

    les fautes

    d'un

    individu

    ceux

    qui

    lui

    sont

    unis

    par des

    liens troits

    :

    il semble

    que les

    sentimens

    d'amour et d'ad-

    miration

    que

    la vertu nous

    inspire

    se

    rpandent

    jusqu'

    un

    certain point

    sur tout

    ce

    qui tient

    elle;

    tandis

    que

    l'indi-

    gnation

    et

    le

    mpris

    qui

    suivent

    le

    vice

    rejallissent

    en

    partie

    sur

    ceux qui ont

    des

    (7)

    rapports

    avec

    lui.

    Tous les

    jours,

    on

    dit

    de cet

    homme,

    qu'il est

    l'honneur de sa famille;

    et de

    cet

    Hi

    Edition

    de 1785

    : PRE.MIKUE

    PAKTIE.

    (2)

    Jai

    discuter.

    [3]

    pourra.

    (4)

    en

    quelque

    sorte deest

    (5)

    Messieurs.

    ,6)

    dont je parle.

    (7,

    quelques.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    32/262

    22

    UVRES

    COMPLTKS

    DK

    MAXIMH.IKN

    ROBESPIERRE

    autre,

    qu'il

    en est

    la

    honte.

    On

    applique mme

    cette ide

    des

    liaisons

    plus gnrales,

    et

    parconsquent

    plus

    foiblcs

    ;

    on

    intresse quelquefois,

    pour

    ainsi

    dire,

    la

    conduite d'un

    particulier

    la

    gloire

    d'une

    nation

    ;

    que

    dis-je?

    celle

    de

    l'hu-

    manit entire

    ;

    n'appelle-t-on pas

    un

    Trajan, un

    Antonin,

    l'honneur de

    l'espce humaine? ne

    dit-on

    pas

    d'un Nron,

    d'un

    Caligula

    qu'il en est l'opprobre ?

    Ces

    expressions

    (i)

    sont

    de

    toutes les

    langues, de

    tous les

    temps et

    de

    tous les

    pays

    ;

    elles

    annoncent

    un

    sentiment

    commun tous

    les peuples; et c'est

    dans

    cette

    disposition

    naturelle, que

    je

    trouve

    le

    premier

    germe de

    l'opinion

    dont

    je

    cherche

    l'origine.

    Modifi chez

    les

    diffrens

    peuples par

    des circonstances

    diffrentes elle a

    acquis

    plus ou

    moins

    d'empire

    :

    ici elle est

    reste

    dans les bornes que

    lui

    prescrivoient

    la

    nature

    et la

    raison; l

    elle

    a

    prvalu

    sur

    les

    principes

    de

    la

    justice

    et de

    l'humanit, elle a

    enfant

    ce

    prjug

    terrible,

    qui

    fltrit

    une

    famille entire pour

    le crime

    d'un

    seul

    et

    ravit

    l'honneur

    l'innocence

    mme.

    Vouloir expliquer

    en

    dtail toutes les raisons

    particulires

    qui

    auroient

    (2)

    pu

    influer

    sur

    les

    progrs

    de

    cette

    opinion

    (3),

    ce

    seroit un projet

    aussi

    immense que

    chimrique;

    je

    me bornerai

    dans cette recherche l'examen

    des causes

    gnrales.

    La

    plus

    puissante

    de

    toutes

    me paroit

    tre la

    nature

    du

    gouvernement.

    Dans

    les

    tats despotiques, la

    loi

    n'est

    autre

    chose

    que la

    volont

    du

    prince,

    les peines

    et

    les

    rcompenses

    semblent

    elre plutt les

    signes

    de

    sa

    colre

    o

    de

    sa

    bienveillance

    que

    les

    suites

    du

    crime

    o

    de

    la vertu : lorsqu'il

    punit,

    sa

    justice mme ressemble toujours la violence

    et

    l'op-

    pression.

    Ce n'est

    point la loi

    incorruptible,

    inexorable,

    mais sage.

    (1)

    Ed. de 1785

    :

    manires

    de

    s'exprimer

    (2)

    qui ont.

    (3)

    sur ses

    pro-

    grs.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    33/262

    DISCOURS SLR

    LES

    PEINES

    INFAMANTES

    23

    juste,

    quitable,

    qui

    procoilo au

    jugement des

    accuss

    avec

    l'appareil de

    ces

    formes salulaires,

    qui

    atteslent

    son respect

    pour

    [ honneur et

    pour

    la

    vie

    des hommes;

    qui ne dvoue

    un

    citoien au

    supplice, que

    lorsqu'elle

    y

    est

    force

    par

    l'vi-

    dence

    des

    preuves, et (t)

    qui par

    cette

    raison mnie im-

    prime

    (2)

    celui qu'elle

    condamne

    une

    fltrissure

    ineffa-

    able

    :

    c'est un

    pouvoir

    irrsislible,

    qui

    frappe

    sans discerne-

    ment et sans

    rgle

    ;

    c'est

    la

    foudre,

    qui tombe,

    brise, crase

    tout ce

    qu'elle

    rencontre :

    dans

    un

    tel

    (2)

    gouvernement, la

    honte

    attache

    au

    supplice

    est

    trop

    foiblepour

    rejallir

    jusques

    sur la famille de

    celui qui

    l'a subi.

    D'ailleurs

    ce

    prjug suppose

    des

    ides

    d'honneur pousses

    jusqu'au

    rafinemcnt; mais

    qu'est-ce

    que

    l'honneur dans

    les

    tais

    despotiques

    ? on

    sait

    qu'il

    est

    tellement

    inconnu

    dans

    ces

    contres,

    que dans

    quelques

    unes,

    en

    Perse

    par

    exemple,

    la

    langue

    n'a

    pas mme

    de

    mot

    pour

    exprimer

    cette ide; et

    comment

    des

    mes

    dgrades

    par

    l'esclavage

    pour'roient

    elles

    oulrer la

    dlicatesse

    en ce

    genre?

    Au

    reste

    ces

    raisonnemens sont

    assez

    (4)

    justifis

    par

    l'ex-

    prience

    ;

    puisque,

    non

    seulement

    en Perse; mais

    la

    Chine,

    en

    Turquie,

    au Jappon

    et

    chez

    les

    autres

    peuples

    soumis

    au

    despotisme,

    on

    ne

    trouve

    aucune trace

    de

    l'opinion

    dont

    (o)

    je cherche

    l'origine.

    Ce

    n'est

    pas

    non

    plus

    dans

    les

    vrilables

    rpubliques

    qu'elle

    exercera

    sa tirannie;

    L

    l'tat d'un

    citoien est

    un objet

    trop

    important,

    pour

    (6)

    qu'il

    puisse tre

    en

    quehiue

    sorte

    (7)

    abandonn

    la discr-

    tion

    d'autrui

    :

    chacjue

    particulier

    ayant part au

    gouverne-

    ment, tant

    membre

    de la

    souverainet,

    (8)

    il

    ne peut

    tre

    dpouill

    de

    celle auguste

    prrogative par la faute d'un

    autre,

    et, tant

    qu'il la

    conserve,

    l'intrt

    et

    la

    dignit de

    l'tat

    ne

    souffre

    pas

    qu'il

    soit

    lltri

    si

    lgrement

    par

    les

    prjugs :

    la libert

    rpublicaine se

    rvolteroit contre

    ce

    {i) Ed. de

    nSj :

    mais.

    2)

    toujours.

    (3)

    pareil.

    li]

    assez

    deesl.

    (5)

    il

    s'af/il

    ici.

    (6)

    qu'il

    puisse deesl.

    (7)

    eu

    quelque sorte deest.

    (8;

    il

    deesl.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    34/262

    21

    IYKKS

    f.O.MPI.TF.S

    T)K

    MAXIMII.ICN

    UOBESPIKRRK

    despotisme

    de

    l'opinion;

    loin de permellrc l'honneur

    de

    sacrifier

    ses

    fantaisies

    les droits

    des citoiens,

    elle

    l'oblige

    de

    les

    soumettre

    la force des

    loix et

    l'influence dos

    murs

    qui

    les

    protgent.

    D'ailleurs chez

    des

    peuples,

    o

    la

    carrire de la gloire

    et

    des

    dignits

    est

    toujours ouverte

    aux talens, la

    facilit

    de

    faire

    oublier des

    crimes

    qui nous

    sont

    trangers

    par des

    actions

    clatantes, qui nous

    sont

    propres

    ne

    laisse

    point

    lieu

    au

    genre de tltrissuro

    dont

    (1)

    il s'agit ici

    :

    l'habilude

    de

    voir

    des

    hommes

    illustres

    dans

    les

    parons

    d'un

    coupable

    sufiroit

    seule pour

    anantir

    ce

    prjug.

    On

    pourroit ajouter

    une

    autre

    raison

    qui

    tient au

    principe

    fondamental de l'espce de

    gouvernement

    dont

    je

    parle. Le

    ressort essentiel

    des rpubliques,

    est

    la

    vertu,

    comme

    l'a

    prouv

    l'autheur

    de l'esprit des

    loix,

    c'est

    dire la

    vertu

    politique,

    qui

    u'est

    autre

    chose

    que

    l'amour

    des

    loix

    et

    de la

    patrie

    :

    leur

    constitution

    mme

    exige

    que

    tous

    les

    intrts

    particuliers, toutes

    les

    liaisons

    personnelles

    cdent

    sans

    cesse au bien gnral. Chaque

    citoien

    fesant

    partie

    de

    la

    sou-

    verainet,

    comme

    je

    l'ai dj

    dit; il est

    oblig

    ce

    lilre

    de

    veiller

    la

    sret

    de

    la

    patrie dont

    les droits

    sont

    remis

    entre

    ses mains; il

    ne doit pas pargner

    mme

    le

    coupable

    le

    plus

    cher, quand le

    salut

    de la rpublique demande

    sa

    punition;

    mais comment

    jjourroit-il

    observer ce

    pnible

    devoir,

    si le

    deshonneur

    pouvoit

    (2)

    tre

    le

    prix do sa fidlit

    le remplir?

    (3)

    Ne

    seroit-il pas

    au

    contraire

    forc

    trahir

    lui

    mme

    les

    loix,

    en cherchant

    leur arracher

    leur

    viclime?

    soumettez Brutus

    celte terrible preuve;

    croiez

    vous

    qu'il

    aura

    le triste

    courage

    de cimenter la

    libert romaine

    parle

    sang

    de

    deux (ils

    criminels?

    Non. Une

    grande ame

    peut

    immoler

    l'tat

    la fortune,

    la

    vie, la

    nature

    mme

    ;

    mais

    jamais

    l'honneur.

    Ici

    j'ai encore l'avantage de voir que mon

    systme

    n'est

    (1)

    Ed.

    de nS :

    je parle.

    (2)

    Dcuoil.

    (3'

    Depuis ne

    seroit-il

    jusqu'

    viclime

    nianriue

    dans l'dition

    de

    178. .

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    35/262

    IlISCOUKS

    SIH

    r.KS

    PKI.NES

    INFAMANTKS

    2o

    point dnionti

    par

    les

    faits.

    Un

    coup

    d'il

    jette

    sur l'histoire

    des

    anciennes

    ropiibliquos

    sutlit

    pour

    me

    convaincre

    que

    le

    pr(^jug dont

    je parle

    en

    toit banni.

    A Rome, par exemple,

    le

    dcemvir Appius

    Claudius

    con-

    vaincu

    d'avoir opprim

    la libert publique,

    souill

    du

    sang

    innocent

    de

    Virginie,

    meurt dans les

    fers

    (1

    )

    sur le point do

    subir la

    peine

    due

    tant

    de forfaits. La famille

    des

    (2)

    Clau-

    dius

    fut-elle

    deshonore?

    Non.

    Immdiatement

    aprz

    sa

    mort,

    je

    vois

    Gains

    TJaudius

    son

    oncle

    briller

    encoie

    aux

    premiers rangs des ciloiens, soutenir

    avec hauteur les

    pr-

    rogatives

    du

    Snat, s'lever

    contre

    les entreprises

    des

    tri-

    buns avec cette fiert

    hrditaire

    que

    ses anctres

    avoient

    toujours dploic dans

    les

    affaires publiques.

    Ce

    qui

    me

    paroit surtout caractriser l'esprit

    de

    la

    nation

    relativement

    l'objet

    dont il est ici question; c'est que dans

    les discours

    que les

    historiens

    de

    la rpublique

    prtent

    Claudius

    dans

    ces occasions,

    ce romain ne craint

    pas

    de

    rappeler

    au peuple

    le

    souvenir

    de

    ces

    nn'^mes

    dcemvirs

    dont

    son

    neveu

    avoit

    t le

    chef.

    Il

    y

    a plus;

    je vois

    le

    (ils

    mme

    de cet

    Appius

    gouverner

    aprez son

    perc

    (3)

    en

    qualit

    de

    tribun militaire

    la

    rpu-

    blique dont

    ce

    dernier

    (i)

    avoit t

    l'oppresseur et la

    vic-

    time.

    La

    punition

    des autres

    dcemvirs

    ne

    ferma

    pas

    non

    plus

    le chemin

    des

    honneurs

    leurs

    familles.

    A

    peine

    le

    peuple

    a-t-il

    condamn

    Duillius,

    qu'il

    choisit

    pour

    tribun un

    citoien

    de son

    sang

    et

    de

    son nom.

    Les jugemens

    qui

    fltrirent

    Fabius

    Vibulanus,

    M.

    (5)

    Servilius

    et M. Cornlius

    ne

    pr-

    cdent

    que de

    quelques

    annes

    l'lvation

    de

    leurs

    descen-

    dans

    (6)

    ou

    de leurs

    proches

    au

    tribunal

    (7)

    militaire

    et

    au

    consulat.

    M. Manlius

    accus

    d'avoir conspir

    contre

    la

    rpublique

    est

    condamn

    tre prcipit

    du

    haut

    de

    la roche

    tarpeienne

    ;i; K(l. lie

    ns

    :

    la prison

    il'oii

    il

    allait sortir

    pour

    subir...

    (2)

    de,

    (3]

    aprs

    son

    pre deesl.

    (i) dont

    son pre

    avoit.

    (5)

    Marcus.

    (6)

    de

    leurs

    descendans

    deexi.

    I'

    Tribunal.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    36/262

    26

    (El

    VUES COMFLTKS

    DK

    MAXIMILIEX ROBESPIERBK

    a

    O

    15

    ans

    aprz

    son

    supplice,

    les

    Romains

    dcfcrenl

    :i

    l'ubiius

    Manlius,

    lun

    de

    ses

    descendans

    (1),

    avec

    le titre

    de

    diclateur, la

    puissance

    la

    plus

    absolue

    laquelle

    un ciloien

    pt

    (2)

    aspirer.

    Je

    ne

    finirois

    pas

    si

    je

    voulois

    puiser

    tous

    les exemples

    de ce

    genre

    que l'histoire me

    prsente

    ;

    je

    me contenterai

    de

    rappeler

    encore ici

    celui

    dune nation voisine

    dont les murs

    sont

    une

    nouvelle

    preuve

    de

    mon

    systme. 'J'out le monde

    scait

    que

    l'Angleterre,

    qui

    malgr le

    nom

    de

    monarchie,

    n'en est pas

    moins

    par

    sa

    constitution

    (3)

    une vritable

    rpir

    bliquo

    a

    secou le

    joug

    de

    l'opinion

    qui

    fait l'objet

    de

    nos

    recherches.

    Quels sont

    donc les lieux

    o

    elle

    domine?

    ce sont

    les

    mo-

    narchies.

    C'est l

    que

    seconde

    par la nature du gouverne-

    ment,

    soutenue

    par les mo'urs, nourrie

    par l'esprit

    gnral,

    elle semble

    tablir

    son

    empire sur une base inbranlable.

    L'honneur,

    comme

    (4)

    l'a

    prouv

    le

    grand

    homme

    que

    j'ai

    dj

    cit,

    l'honneur

    est l'ame

    du

    gouvernement monar-

    chique

    : non

    pas cet honneur

    philosophique,

    qui

    n'est autre

    chose que

    le

    sentiment exquis

    qu'une

    ame

    noble

    et pure

    a

    de

    sa

    propre

    dignit;

    qui

    a

    la

    raison

    pour base

    et

    se

    confond

    avec

    le

    devoir;

    qui

    xisteroit,

    mme

    loin des

    regards des

    hommes,

    sans

    autre

    tmoin que le ciel

    et

    sans

    autre

    juge

    que

    la

    conscience

    :

    mais

    cet

    honneur

    politique dont la

    nature

    est

    d'aspirer

    aux

    prfrences

    et aux distinctions; qui

    fait que

    l'on

    ne

    se

    contente

    pas d'tre estimable; mais que

    l'on

    veut

    surtout

    tre

    estim,

    plus

    jaloux

    de mettre dans

    sa conduite

    de

    la

    grandeur

    que de

    la justice,

    de

    l'clat

    et

    de

    la

    dignit

    que de

    la

    raison;

    cet honneur qui tient au

    moins

    autant

    lo)

    la vanit

    qu'a

    la

    vertu

    :

    mais qui, dans

    l'ordre politique,

    supple la

    vertu

    mme;

    puisque, par

    le plus

    simple

    de

    tous

    les ressorts,

    il force

    les citoiens

    marcher

    vers

    le

    bien

    (1)

    Ed.

    de nSS

    : l'un

    de ses

    proches

    parens.

    (2)

    puisse.

    (3)

    par

    sa

    constitution

    deesf.

    (4)

    comme

    on

    l'a

    souvent

    remarqu.

    ( j)

    qui tient

    plus

    ;'i la.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    37/262

    .'

    DISCOURS

    SUR

    LES

    PEINES INFAMANTES

    27

    oC'

    /u>rtfU,^,

    yu>^^^

    U

    ^y^u.-^,:

    ^^^r^.^^

    /.^^

    McH^^cAcyi^

    ,

    ^,^

    ^^^

    i^

    i^^ytccc^

    vAcL/i>^A.ytc.

    ,

    yi^

    H'orf

    cuZt^yH^

    ;

    ^u*

    ycr yux.

    t

    ...

    a

    ayyas

    \

    1

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    38/262

    28

    ivnKs

    r.oMPi.TKs

    m:

    maximii.ikn robkspierrf,

    public;

    lorsqu'ils

    ne

    pensent

    aller qu'au but

    flo

    loiiis pas-

    sions

    particulires;

    cet

    honneur

    enfin,

    souvent

    aussi bizarre

    dans ses

    loix que grand

    dans

    ses elTets; qui produit tant

    de

    sentimens

    sublimes

    et

    tant

    d'absurdes prjugs,

    tant

    de

    traits

    broiques

    et tant

    d'actions

    draisonnables

    (1);

    qui

    se

    pique

    ordinairement de respecter

    les

    loix,

    et

    qui

    (2)

    quelques

    fois

    aussi

    se fait

    un devoir de

    les

    enfreindre; qui prescrit

    imprieusement

    l'obissance

    aux

    volonts

    du prince; et

    cependant

    permet de

    lui

    (3)

    refuser

    ses

    services,

    qui-

    conque

    se

    croit

    bless

    par une

    injuste

    prfrence;

    qui

    or-

    donne

    en

    mme

    temps

    de

    traiter

    avec

    gnrosit

    les

    enne-

    mis

    de

    la

    patrie,

    et de

    laver

    un

    alTrout

    dans le sang

    du

    cito'icn.

    Ne

    cherchons

    point

    ailleurs

    que

    dans ce

    sentiment,

    tel

    que

    nous

    venons

    de

    le peindre

    la

    source

    du

    prjug

    dont

    nous

    parlons

    (4).

    Si

    l'on

    considre la

    nature

    de

    cet

    honneur,

    fertile

    en

    ca-

    prices,

    toujours

    port

    une

    excessive

    dlicatesse,

    appr-

    ciant

    (5)

    les

    choses

    par

    leur

    clat

    plutt

    que

    par

    leur

    valeur

    intrinsque,

    les

    hommes

    par

    des

    accessoires,

    par des

    titres

    qui

    leur

    sont

    trangers

    autant

    que

    par

    leurs

    qualits

    per-

    sonnelcs,

    on

    concevra

    facilement,

    comment

    il

    a pu

    livrer au

    mpris

    ceux qui

    tiennent

    un

    sclrat

    fltri

    par la

    socit.

    II

    pouvoit

    tablir

    ce

    prjuge

    d'autant

    plus

    aisment,

    qu'il

    toit

    encore

    favoris

    par

    d'autres

    circonstances

    relatives

    la

    nature du

    gouvernement

    dont

    je

    parle.

    L'tat

    monarchique

    exige

    ncessairement

    des

    prmi-

    nences, des

    distinctions de

    rangs,

    surtout

    un

    corps

    de

    noblesse,

    regard

    comme

    essentiel

    sa

    constitution,

    suivant

    ce

    principe

    que Hacon a

    (6)

    dvelopp

    le

    premier

    :

    sans

    nobles

    point de

    monarque;

    sans

    monarque,

    point de

    nobles.

    Dans

    ce

    gouvernement

    l'opinion

    publique

    attache

    avec

    rai-

    son

    un

    prix infini

    l'avantage

    de

    la

    naissance :

    mais

    cette

    (1)

    dition

    de 1785:

    &cl\on3

    extravagantes.

    {2)

    qui

    deest.

    '3;

    lui deest.

    (4)

    dont

    t7 est

    ici

    question.

    (5)

    apprciant

    souvent

    les

    choses.

    (6

    avait

    dvelopp avant

    Montesquieu,

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    39/262

    DISCOLRS

    Slll

    LES

    PJINKS

    IM'AMANTES

    29

    habitude

    mme

    do

    faire

    dpendre

    l'estime

    que

    ion accorde

    un citoien

    de

    l'anciennet

    de

    son

    origine,

    de

    l'illublralion

    de

    sa

    famille,

    de

    la

    grandeur

    de

    ses

    alliances

    a

    dj

    des

    rap-

    ports assez

    sensibles

    avec le

    prjug

    dont

    je

    parle

    (i). La

    mme

    tournure

    d'esprit

    qui

    fait que

    l'on

    respecte

    un

    homme,

    parce qu'il

    est n

    d'un

    pre

    noble;

    qu'on

    le ddaigne

    parce

    qu'il sort de

    parens

    obscurs

    conduit

    naturellement

    le

    mpriser,

    lorsqu'il a

    reu

    le

    jour d'un

    homme

    tllri,

    o

    qu'il

    l'a

    donn

    un

    sclrat.

    Combien

    d'autres

    circonstances

    particulires ont pu

    aug-

    menter l'inlluence de

    ces causes

    gnrales

    dans les

    monar-

    chies

    modernes et

    particulirement

    (2)

    en France.

    Les anciennes

    loix

    franoises ne

    punissoient

    les

    crimes

    des nobles

    ([ue par

    la perte de

    leurs privilges

    :

    les peines

    corporelles

    (;jj

    toient

    rserves

    pour

    le roturier

    o

    vilain.

    Dans la

    suite

    le clerg

    fut

    aussi

    affranchi

    par

    ses prroga-

    tives

    de

    celle

    dernire

    espce

    de

    punition

    :

    quel

    obstacle

    pouvoit trouver

    alors

    le

    prjug

    qui deshonoroil

    les

    familles

    de

    ceux qui

    toient

    condamns

    au

    supplice?

    il

    ne

    s'altachoil

    qu'

    celle

    partie

    de

    la nation, avilie pendant

    tant

    de

    sicles

    (4)

    par la plus

    dure et

    la plus

    honteuse

    servitude.

    S'il

    eut

    attaqu les

    deux corps qui dominoient dans l'tat;

    s'il

    eut

    mis

    en

    danger l'honneur des

    seuls

    ciloiens dont

    les

    droits

    parussent

    alors dignes d'tre

    respects; il est probable

    qu'il

    auroil

    t

    bientt

    ananti.

    Nous avons d'autant

    plus

    de raison de le croire, qu'il n'a

    jamais

    pu

    tendre

    son

    empire

    jusqu'aux

    grandes

    maisons

    du

    royaume

    :

    aujourd'hui

    que

    les

    nobles

    sont

    (5)

    sou-

    mis

    aux

    peines

    (6)

    corporelles, la

    famille

    d'un

    illustre

    cou-

    pable

    chappe

    encore

    au deshonneur; tandis

    que

    le gibet

    tletril

    pour

    jamais

    (7)

    les parens

    du

    roturier, le

    fer

    qui

    abbat

    la

    tle

    d'un

    grand

    n'imprime

    aucune

    tache

    sa postrit.

    Mais

    pur

    une

    (8)

    raison

    contraire

    celle opinion

    cruelle

    I

    Kil.

    Je 17So

    :

    ilmit

    il est

    quculion.

    Ji et

    sur

    lout.

    ,3)

    les

    pciues

    al/ticlives.

    (i; peaJaut des

    sieles.

    (3)

    oui

    t.

    (6)

    punitions.

    (1)

    jamais.

    8

    la.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    40/262

    30

    LVRES

    COMPLTES

    DE

    MAXIMILIEX ROBESPIERRE

    s'est

    tablie sans poino,

    dans

    des

    sicles

    (1)

    de barbarie,

    o

    elle

    frappoit

    loisir

    sur

    un

    peuple

    esclave,

    si

    mprisable

    aux

    yeux

    de ce

    clerg

    puissant

    el

    de

    celle

    superbe

    noblesse

    qui

    ropprimoienl.

    Je ne

    dirai

    plus

    qu'un mot sur ce

    sujet, pour observer que

    ce

    mme prjug

    pouvoil

    (2)

    tre encore fortifi par une

    coutume

    bizarre,

    qui rgna lontems chez plusieurs nations

    di; l'curope.

    Je

    parle

    du

    combat judiciaire.

    Lorsque celle

    absurde

    inslilution

    dcidoit

    de toutes les

    affaires civiles

    et

    criminelles,

    les

    parens

    de

    l'accus toient

    quelques

    fois

    (3)

    obligs

    de devenir

    eux

    mmos

    parties

    dans

    le

    procz d'o

    dpendoit

    son sort

    :

    lorsque

    sa

    foiblesse,

    ses

    infirmits, son

    sexe

    surtout

    ne

    lui

    permeltoit

    pas de prouver

    son

    inno-

    cence

    lpc

    la

    main, ses

    proches

    (i)

    embrassoient

    sa

    querelle

    et

    combatloienl

    sa

    place

    :

    le

    procz

    devenoit donc

    en

    quelque

    sorte

    pour eux une affaire

    personnelle;

    la puni-

    lion

    (5)

    de l'accus

    toil

    la suite de leur

    dfaite, el doz lors

    il

    toil

    moins

    tonnant

    qu'ils

    en

    partageassent

    la

    honte,

    surtout

    (6)

    chez

    des

    peuples qui ne connoissoient d'autre

    mrite

    que les

    qualits guerrires

    (7).

    Aprez

    avoir

    cHerch l'origine

    du

    prjug

    qui

    fait

    l'objet

    de

    nos

    rflexions,

    j'ai

    a

    discuter une seconde

    (jucslion

    pcut-

    elre plus

    intressante

    (8)

    encore.

    Ce

    prjug

    est-il plus

    utile

    que

    nuisible

    (9)?

    J'avoue que

    je

    n'ai jamais pu concevoir

    comment

    les sen-

    limens

    (10)

    pouvoient

    tre

    partags

    sur

    un

    point que

    le

    bon

    sens

    (11)

    et

    l'humanit

    dcident

    si

    clairement.

    Aussi

    quand

    j'ai

    vu

    une

    des

    compagnies littraires les

    plus

    distingues

    du

    royaume

    (12)

    proposer celle

    question

    je

    n'ai

    jamais

    pens

    (13)

    que son intention

    fut

    d'offrir un

    problme

    rsou-

    dre; mais seulement

    une

    erreur

    funeste

    combattre, un

    (1)

    Eil.

    de

    nSa

    :

    dans

    des

    temps.

    (2)

    a

    pu.

    (3)

    Souvent.

    (4)

    ils.

    (5)

    la

    condamnation.

    (6)

    Surtout deesl.

    (7)

    Seconde

    Partie.

    (8)

    ques-

    tioa

    plus

    importante

    encore.

    (9)

    plus

    nuisible qu'utile.

    (10)

    les

    avis.

    (U)

    que la l'aison

    et.

    (12)

    j'ai vu

    une Socit savante

    aussi distingue

    pro-

    poser.

    ^13)

    jamais cru que.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    41/262

    Drscouiis srii les

    peines

    infamantes

    31

    usage

    barbare

    dliuiro, une

    tics

    plaies

    de

    la

    socit

    gurir.

    Uii'uno

    ^1)

    opinion dont

    l'efFct

    est

    de

    faire

    porter

    l'inno-

    cence ce

    que

    la

    peine

    du

    crime a

    de plus

    accablant

    soit

    injuste,

    c'est une

    vril,

    ce

    me

    semble qui n'a

    pas

    besoin

    de

    pr'cuve

    :

    mais co

    point rsolu, la

    question

    est

    dcide;

    si elle

    est

    injuste, elle n'est

    donc

    pas

    utile.

    De

    toutes les maximes de

    la

    morale, la plus

    profonde,

    la

    plus

    sublime peut

    tre,

    et en

    mme

    Icras

    la plus certaine

    est

    celle

    ([ui

    dit

    :

    que

    rien

    n'e.it

    utile,

    que

    ce

    qui

    est

    bonnete.

    Les

    loix

    de

    l'tre supi'cme n'ont pas

    besoin d'autre sanc-

    tion,

    que

    des suites naturelles

    qu'il

    a

    lui mme

    attaches

    l'audace

    qui

    les

    enfreint

    o

    la fidlit

    qui

    les respecte.

    La

    vertu produit le bonheur, comme

    le

    soleil produit

    la

    lumire, tandis (jue le

    malheur

    sort

    du

    crime, comme

    l'insecte

    impur nait

    du

    sein

    de la corruption

    (2).

    Itien

    n'est

    utile

    (jue

    ce qui

    est

    honnte;

    cette

    maxime

    vraie

    en

    morale

    ne l'est

    pas moins en politique : les

    hommes

    isols

    et

    les

    hommes

    runis

    on

    corps

    de

    nations

    sont gale-

    ment

    soumis

    cette

    loi

    :

    la prosprit des socits

    {'i)

    poli-

    tiques

    repose

    ncessairement

    sur

    la

    base

    immuable

    de

    l'ordre, de la justice et

    de

    la

    sagesse :

    toute

    loi injuste

    ;

    toute institution

    cruelle qui oITense

    le

    droit

    naturel

    ;

    contrarie

    directement

    (4)

    leur

    but, qui

    est

    la

    conservation dos

    droits

    de

    l'homme,

    le

    bonheur

    et

    la

    tranquillit

    des

    citoiens.

    Si les

    politiques

    paroissent avoir souvent

    mconnu

    ce

    |)rinci|)e, c'est

    qu'en

    gnral

    les

    politi(iues

    ont

    beaucoup

    de

    mpris

    pour

    la

    morale; c'est

    que la force, la tmrit, l'igno-

    rance et

    l'ambition

    ont trop

    souvent gouvern

    la

    terre.

    (1

    Ed.

    de

    ns.j :

    li'ahuiU

    qu'une.

    [2)

    de

    la

    corruption.

    Le

    jour

    es l

    arriv

    oit

    Csar

    saisit

    enfin

    le

    prix

    de ses travaux, de ses victoires

    et

    de

    ses

    forfaits;

    il

    triomphe,

    il

    rr/iie,

    il

    est

    assis

    sur

    le

    trne

    de

    l'univers.

    Csar

    est-il

    heu-

    reux'.'

    Son.

    Il

    clui/iperoii

    en vain

    au

    frr

    de ses

    ennemis

    qui

    vont

    l'immoler

    lu libert; la

    peine

    qui

    le poursuit ne

    l'atleindroit

    pas

    moins'silrement :

    il

    ne

    vivro'U

    que

    pour

    apprendre tous

    les

    jours

    par

    de

    terribles

    leiMus,

    que

    ce

    qui

    n'est point honnte

    ne

    sauroit

    tre

    juste.

    Cette

    ina.xiiiie,....

    (:))

    des Etats

    repose.

    4)

    ouvertement.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    42/262

    32

    LVUKS

    COMPLTKS

    ])E JIAXIMILIEN ROBESPlKIlKK

    Au

    reste si j'avois

    ou dmontrer la vrit

    do la

    maxime

    que

    je

    viens

    d'exposer (I),

    par

    un

    exemple

    frappant,

    j'aurois

    choisi

    prcisment

    celui ([ue me fournit le prjug dont

    il est

    ici

    question.

    Mais

    ici j'enlcns des voix

    s'lever

    en

    sa faveur;

    je

    crois

    rencontrer dz

    le premier

    pas

    un

    sophisme accrdit, qui lui

    a

    donn

    un assez grand nombre de

    partisans.

    11

    est, dit-on,

    salutaire

    au

    genre humain

    (2);

    il

    prvient

    une

    inlinit

    de

    crimes; il force les parons

    veiller

    sur la

    con-

    duite

    des

    parons; il rend les

    familles garantes des

    membres

    qui

    les

    composent.

    Des citoiens

    garansdes

    crimes d'un

    autre

    citoien

    (3)

    con-

    damns

    l'infamie

    qu'un

    autre a

    mrite...

    eh c'est

    prcis-

    mont

    ce

    monstre

    de

    l'ordre

    social

    que

    j'attaque. C'est

    par

    des loix sages,

    c'est

    par le

    maintien

    des

    murs

    plus

    puis-

    santes que

    les

    loix,

    qu'il

    faut

    arrter

    le crime

    ;

    et

    non

    par

    des usages

    atroces toujours

    plus

    contraires

    (4)

    au bien

    de

    la

    socit

    que

    les

    dlits

    mme

    qu'ils

    pourroient

    prvenir.

    A

    la Chine on a

    imagin

    un

    moien assez

    frappant

    d'tablir

    cette

    espce de

    garantie

    dont

    on

    nous

    vante les avantages.

    L,

    les loix

    condamnent

    mort

    les

    pores

    dont

    les onfans ont

    commis

    un crime

    capital,

    que

    n'adoptons

    nous

    cotte loi?

    cette

    ide

    nous

    fait

    frmir ... et

    nous

    l'avons ralise.

    Ne

    nous

    prvalons pas

    de

    la

    circonstance

    que

    nous

    n'avons

    pas t

    jusqu'

    oter

    la vie aux

    parons des

    (S)

    coupables :

    nous avons

    fait

    plus,

    mme

    dans

    nos

    propres

    principes,

    puisque nous

    rougirions de

    mettre la

    vie

    mme en

    concur-

    rence avec

    l'honneur.

    Mais

    aprz tout ce

    prjug

    nous

    donne-t-il on

    efl'ct

    le

    ((i)

    foible

    ddommagement qu'on nous

    promet?

    Comment

    dimi-

    nue-l-il

    le

    nombre das crimes? estoc do

    la part do

    ceux

    qui

    sont

    capables de les

    commettre?

    je

    n'ai pas

    l'ide

    d'un

    homme

    assez

    sclrat

    pour

    fouler

    aux

    pieds

    les

    loix

    les

    plus

    ;i)

    Ed.

    lie

    nSo

    :

    ([uc

    j'ai

    criss

    par

    un

    cxoiiiplc.

    [2

    salutaire

    /

    Socit;

    il.

    (3)

    de condannis

    ...

    mrite

    deesl.

    \i)

    plus funestes

    la

    Socit.

    (aj du

    coupable.

    ^6)

    ce.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    43/262

    DISCOURS

    SIU

    LKS

    PKIMCS

    IiNFAMANTES

    33

    sacres,

    el

    cependant

    assez

    sensible,

    assez

    gnreux,

    assez

    dlical

    pour

    craindre

    d'imprimer

    sa famille

    le deshonneur

    qu'il

    ne

    redoute pas

    pour

    lui

    mme.

    Le

    prjug produira

    l-ii

    plus

    d'efTet

    de la

    part des parens?

    rendra-l-il

    les

    pcres

    (1)

    plus

    attentifs

    l'ducation

    de

    leurs

    (2^

    enfans?

    Quand

    leur

    (3)

    esprit

    pourroit se fixer sur

    les horribles

    images

    qu'il

    lui

    prsentcroit

    ;

    quand

    la

    tendresse

    pater-

    nelle

    (4),

    si

    prompte

    se

    flatter pourroit

    penser srieuse-

    ment qu'elle

    caresse

    peut

    tre

    des monstres capables

    de

    m-

    riter un jour

    tonte

    la

    rigueur

    (o)

    des

    loix;

    cet

    trange

    (6)

    mo-

    bile seroit

    au

    moins

    superflu

    ;

    car

    il n'est

    un

    seul

    pre

    dont

    les soins

    ne se

    proposent

    (7)

    quelque

    chose

    de

    plus

    que d'em-

    pcher

    que

    ses enfans

    n'expirent

    un jour sur un

    cchaffaut.

    On m'objectera peut-tre

    que ce

    motif

    peut

    au moins enga-

    ger

    les

    iiarens

    rclamer

    le

    secours de

    l'anthorif

    contre des

    enfans

    |)ervers

    qui

    les

    menacent

    d'un deshonneur

    prochain.

    Mais

    outre

    que

    la

    dernire

    classe

    dos citoiens

    n'a

    pas

    les

    ressources

    ncessaires

    pour

    se

    |)rocurer ce

    remde

    violent :

    quand les

    pres

    (8)

    se

    dterminent-ils

    en

    faire

    usage?

    lorsque

    le mal

    est

    devenu incurable;

    lorsque la

    corruption

    de

    celui

    (9)

    qui les

    rduit

    l'emploier est

    parvenue

    son

    der-

    nier

    priode

    ;

    lorsque

    des carts

    multiplis

    qu'ils

    connois-

    senl

    (tO)

    souvent les

    derniers

    (II), et qui ont dj mrit

    l'animadversion

    de la

    justice

    les

    (12)

    forcent une

    dmarche

    cruelle

    (13)

    qui

    laisse

    toujours

    une

    tache sur

    l'objet

    de

    leur

    (14)

    tendresse.

    Souvent mme

    (1.

    ,

    a peine

    lauront-ils

    (16)

    priv

    do

    la

    libeit

    dont

    il

    abuse,

    que

    sduits

    par l'espoir d'un

    change-

    ment dont

    eux seuls

    (17)

    peuvent se flatter,

    ils

    obtien-

    dront

    (18)

    la rvocation de l'ordre

    fatal qu'ils

    avoienl

    (19)

    (I)

    Eil.

    lie

    ns.'i

    : le

    pre.

    (2)

    de

    ses.

    (3j

    son.

    (4)

    toujours

    si

    prompte.

    ( ))

    svrit.

    (6'

    a/freux.

    {V,

    pre

    qui

    ne

    se propose.

    (Si

    quainl

    un

    pi're.

    9)

    la

    corruption de

    son

    fils

    est

    djn parvenue.

    (10)

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    44/262

    34

    UVRES

    COMPLTES

    DK

    MAXIMILIEX

    ROBESPIEURE

    sollicit.

    Le

    coupable

    (1)

    dj corrompu

    avant sa

    dtention,

    aigri

    peut-tre

    encore par le

    chtiment

    rentrera dans le sein

    de

    la

    socit

    o

    il

    rapporlera des

    dispositions

    funestes

    tous

    les

    crimes qui peuvent la troubler.

    Voil

    donc

    les

    avantages

    que

    nous procure le

    prjuge

    dont

    je

    parle

    (2)

    :

    c'toit

    bien

    la

    peine

    d'tre

    injustes

    cl barbares

    Mais

    dailleurs

    pour avoir au

    moins

    (3)

    un

    prtexte

    do

    rendre

    le

    pcre

    responsable

    ce

    point

    des

    actions

    de ses

    eufans,

    il

    faudroit

    lui laisser

    tous

    les moiens

    ncessaires pour

    les

    diriger.

    Les Chinois

    sont en

    cela plus

    consquens

    que

    nous :

    leurs

    loix leur

    donnent un

    pouvoir

    sans bornes sur

    leurs

    familles;

    elles les

    punissent,

    dit-on, de n'en

    avoir pas us

    :

    mais

    nous

    qui

    avons

    presqu'entierement

    soustrait

    l'authorit

    pater-

    nelle la

    personne

    et

    les

    biens

    des

    enfans;

    nous qui

    fixons

    un ge

    si

    peu

    avanc

    le

    terme de

    leur

    indpendance; com-

    ment

    imputerions-nous aux

    pres

    tant

    de

    fautes

    qu'ils

    ne

    peuvent

    empcher?

    Avant

    (i)

    d'exercer

    contr'eux

    cette

    odieuse

    rigueur ren-

    dons

    leur du

    moins

    tous

    les droits

    qui leur

    appartien-

    nent

    (S);

    rtablissons

    ce

    (G)

    tribunal

    domestique

    que les

    anciens peuples

    regardoient avec

    raison

    comme

    la sauve-

    garde des murs; ou

    plutt

    cette

    sage

    (7)

    institution nous

    prouveroit bientt que

    pour

    diminuer

    le

    nombre des coupa-

    bles

    (8),

    il

    n'est

    pas

    ncessaire d'accabler

    (9)

    l'innocence

    et

    d'outrager l'humanit.

    Mais

    (10)

    quand nous

    pourrions

    couvrir

    de

    quoique

    motif

    (I) Ed.

    de 1783

    :

    Le

    coupable,

    donl

    les

    iiicliiialions fiiiiesles

    auront t

    fortifies

    encore par

    la

    compar/uie

    des

    hommes vicieux,

    que

    la

    mme punition

    aura

    rassembls

    dans

    sa j/rison, ou

    par

    la

    solitude non

    moins

    dangereuse

    pour

    les

    mes perverses

    que le commerce des mdians,

    rentrera

    dans

    le

    sein

    de

    la Socit,

    oit

    il

    rapporlera de

    funestes

    dispositions,

    tous

    les

    ciiiues.

    (2)

    que

    nous procure

    ce prjug

    {3)

    au moins

    deesl

    (4)

    .)/(.'

    si

    nous

    vou-

    lons e.M'rcer

    envers

    eux.

    (j)

    du

    moins

    toutes

    leurs prrogatives.

    (6)

    ce.

    (7)

    sage

    deest.

    (8)

    que pour

    mettre un

    frein

    au

    crime

    il

    n'est.

    ,0,

    d'op-

    primer.

    (10)

    mais

    enfin.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    45/262

    DISCOlUS SLll LES l'IilNES INFAMANTES

    35

    spcieux

    (1)

    notre

    injustice l'gard

    les pres

    (2);

    com-

    ment pourrions nous l'excuser envers l( s autres

    parcns

    des

    coupables

    (3)?

    quelle

    authorit

    le

    frre

    a-l-il

    pour

    corriger

    le

    frre?

    quelle

    puissance

    le fils

    xcrce-t-il

    sur son pre? et

    la

    tendre,

    la

    timide,

    la

    vertueuse

    pouse, est-elle criminelle

    (4)

    pour

    n'avoir pas rprim les excs

    du

    mailre,

    auquel

    la

    loi

    l'a

    soumise?

    de quel droit portons

    nous le dsespoir

    dans

    son

    cur

    abattu?

    de quel droit

    la forons-nous

    cacher,

    comme

    un

    douloureux

    tmoignage

    de sa

    honte, les

    pleurs

    mmes

    que

    lui

    arrache l'excs de

    son

    infortune?

    J'ai

    cherch

    vainement

    de

    quelle

    apparence

    d'utilit,

    on

    pouvoit

    colorer

    l'injustice du prjug

    que je

    combats;

    mais

    je

    suis moins

    embarrass

    dcouvrir les maux innombra-

    bles

    qu'il traine

    aprz

    lui.

    Pour bien les

    apprcier,

    il

    faudroit pouvoir suspendre

    un

    moment

    l'impression

    de

    l'habitude

    qui nous l'a rendu

    trop

    familier,

    et le considrer

    en

    quelque sorte dans un

    point

    de

    viie

    plus

    loign.

    Je

    suppose donc qu

    un

    habitant de

    quehjue

    contre loin-

    laine, o nos usages sont

    inconnus,

    aprz

    avoir

    voyag

    parmi

    nous,

    retourne vers

    ses compatriotes

    et

    leur tienne

    ce

    discours :

    J'ai vu

    des pays

    o

    rgne

    une coutume

    singulire

    ;

    toutes

    les fois

    qu'un criminel est

    condamn

    au

    supplice,

    il faut

    que

    plusieurs

    autres

    (5)

    ciloiens

    soient

    deshonors

    :

    ce

    n'est

    pas

    qu'on

    leur reproche

    aucune

    faute;

    ils peuvent

    tre

    justes,

    bicnfaisans, gnreux; ils

    peuvent

    possder

    mille

    talens

    et

    mille vertus; mais

    ils

    n'en

    sont

    pas moins des gens

    infmes

    :

    avec l'innocence,

    ils ont encore les

    droits

    les plus

    louchans

    la

    commisration

    de

    leurs concitoicns;

    c'est,

    par exem-

    ple, une

    famille dsole,

    qui

    l'on

    arrache

    son

    chef

    et

    son

    appui,

    pour le

    Irainer

    l'chalfaut

    : mais

    (6)

    on

    juge

    qu'elle

    (I,

    Ed. de

    n8.'i

    :

    nous

    pourrions /)a//i>/-

    /Kic

    ce frivole

    prlexle.

    (2)

    injus-

    tice envers

    les

    pres.

    (3)

    comment

    la

    jualifierons-nous

    l'gard

    des

    autres

    parens du coupa'/le.

    (t)

    coupable.

    (.j)

    autres

    deest.

    (6)

    mais

    deest.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    46/262

    36

    LVRES COMPLTES

    DE

    MAXIMILIEN

    UOBESPrERRE

    seroit

    ti'op heureuse,

    si elle

    n'avoil que ce malheur

    pleurer;

    un

    la dvoue elle mme

    un

    opprobre

    lernel.

    Les

    infor-

    tuns, avec

    toute

    la sensibilit

    d'une

    ame honnte

    (1),

    sont

    rduits

    porter tout le poids

    de celte peine horrible,

    que

    le

    sclrat peut

    seul soulenir.

    Ils

    n'osent

    plus

    lever

    les

    yeux,

    de peur

    de

    lire le mpris

    sur

    le

    visage

    de tous

    ceux

    qui

    les

    environnent;

    tous

    les

    tats les ddaignent; tous les

    corps

    les

    repoussent; loules les

    familles

    craignent de

    se souiller

    par

    leur alliance;

    la

    socit entire

    les abandonne

    et les

    laisse

    dans une solitude affreuse; la bienfaisance

    mme

    qui

    les

    soulage

    se

    dfend

    peine

    du

    sentiment

    superbe

    et

    cruel

    qui

    les

    outrage;

    l'amiti...

    j'oubliois

    que l'aniiti ne peut

    plus

    exister

    pour

    eux. Kiilin

    leur

    situation est si

    tcriible,

    quelle

    fait piti

    ceux

    mmes

    qui en sont les

    aulhcurs; on

    les

    plaint... du mpris

    que

    l'on

    se sent pour eux

    ;

    et

    on

    continue

    de les tlti'ir;

    on plonge le

    couteau

    dans

    le

    cieur

    de

    ces

    vic-

    times

    innocentes

    ;

    mais ce n'est

    pas sans

    tre

    un

    peu mu

    de

    leurs

    cris.

    A cet

    tonnant, mais fidle rcit, que

    diroient

    les

    peuples

    dont

    je parle

    ;

    ne

    croiroient-ils

    pas d'abord qu'un

    tel

    pr-

    jug

    ne

    peut

    rgner

    que

    dans

    (juelqae

    contre sauvage?

    on

    auroit beau ajouter

    que

    les peuples qui

    l'ont

    adopt sont

    d'ailleurs,

    justes,

    humains, clairs;

    qu'ils

    ont des

    murs

    polies,

    des loix sages,

    des

    institutions

    sublimes

    ;

    qu'ils saveut

    mieux qu'aucun autre

    respecter

    les

    droits

    de

    l'humanit

    et

    connoitre les

    principes

    du

    bonheur social;

    qu'ils

    ont

    port

    les

    arts et

    les

    sciences

    un

    degr

    de perfection inconnu au

    reste de

    l'univers

    :

    ils

    ne voudroient

    jamais

    croire

    (2)

    des

    contradictions si

    inconcevables; ignorant

    tous

    les avantages

    qui nous

    ddommagent

    de

    ces restes

    Je

    l'ancienne

    barbarie,

    ils nous

    rcgarderoient

    peut

    eire

    comme les plus malheureux

    des

    hommes; ils

    s'applaudiroient

    de

    ne

    pas vivre

    dans

    des

    pays

    (3)

    o

    l'innocence

    n'est

    point

    en

    sret

    ;

    o

    les

    ciloicns

    ([}

    K(J.

    de

    nSj

    : honnte

    ils

    sont

    rduits.

    2;

    ces

    inconcevables

    con-

    tradictions.

    (3j

    dans itn

    pays

    ot.

  • 7/25/2019 Oeuvres compltes : Robespierre, Maximilien, 1758-1794 - Tomo I

    47/262

    DISCOURS SIR LES

    PKINES INFAMANTES

    37

    sont

    sans

    cosse

    exposes

    anx

    dangers

    affreux

    (1)

    do perdre le

    plus

    |)rcieux do

    tous les

    biens par des

    vcnemens

    qui

    leur

    sont

    trangers.

    Tel

    est

    le

    premier inconvnient attach

    cet

    absurde

    pr-

    jug;

    il est

    fait

    pour

    nous efraier. Nous regardons tout ce

    qui porto

    alleinle

    la stabilit

    de

    nos

    proprits,

    comme

    un

    coup

    funeste qui

    branle

    les

    fondemens de la

    flicit

    pu-

    blique

    2);

    quelle ide nous

    formerons-nous donc

    d'un

    pr-

    jug

    qui

    souniet

    aux

    caprices

    du

    ha/ard

    Ihonneur

    mme,

    sans

    lequel

    tous

    les

    autres biens

    sont

    sans

    prix et la

    vie

    nest

    qu'un

    supplice?

    Nous

    rptons

    tous

    les

    jours

    cette

    maxime

    quitable,

    qu'il

    vaut mieux

    pargner

    cent

    (3)

    coupables que de

    sacrifier un

    seul innocent: et

    nous

    ne

    punissons

    pas

    un

    coupable,

    sans

    perdre

    plusieurs

    innocensi

    la punition

    d'un

    sclrat, disons-

    nous, n'est

    qu'un

    exemple pour d'autres

    sclrats; mais

    le

    supplice d'un

    homme

    de

    bien est l'effroi de la socit

    en-

    tire : et

    tous les

    jours

    nous

    donnons

    la

    socit

    ce

    spectacle

    horrible,

    qui

    doit porter

    la

    terreur dans

    l'ame

    de

    chacun

    de

    nous,

    puisque rien no

    nous garantit que nous

    n'en

    serons

    jamais les

    dplorables

    objets

    et qu'oppresseurs

    aujourd'hui,

    nous

    pouvons

    demain

    tre

    opprims

    notre

    tour.

    Kl

    quel

    tort pense-t-on

    que

    cause

    l'tat

    la

    tltrissure

    imprime

    a

    tant

    de

    citoiens?

    Les

    lgislateurs

    clairs

    se

    sont

    toujours

    montrs avares

    du

    sang mme le plus vil,

    lorsqu'ils

    ont

    pu

    le

    conserver

    la

    patrie;

    ils n'ont pas voulu

    lui

    oter(4) les

    moindres avantages

    qu'elle

    pouvoit

    tirer

    de la

    punition

    des

    criminels

    qui

    auroient

    viol

    SOS loix

    (5).

    De

    l

    les

    peines qui

    vouent

    (6)

    aux tra-

    vaux publics les

    autheurs

    de

    certains

    dlits

    :

    nos loix

    mme

    ont

    adopt

    ces

    sages

    (7)

    prin\;ipes;

    et

    nos

    prjugs

    les

    bles-

    sent ouvcrtemout

    on

    londanl inutiles

    l'tat

    (8)

    les

    citoiens

    (1)

    Ed. de nS'i

    : au

    (lanr/er

    a/f'reuj:.

    (2)

    les fondeuiens du bonheur

    public.

    (3)

    mille.

    (4;

    voulu la priver des

    uioiiidres.

    (5)

    des criminels

    qu'ils

    n'ont

    pa. cru

    devoir

    c