oeuvres choisies - tome ii

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Vladimir Lénine Oeuvres choisies en deux volumes Tome II Edition électronique réalisée par Vincent Gouysse à partir de l’ouvrage publié en 1948 aux Editions en langues étrangères, Moscou. WWW.MARXISME.FR 

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  • 8/8/2019 Oeuvres Choisies - Tome II

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    Vladimir Lnine

    Oeuvres choisies en deux volumesTome II

    Edition lectronique ralise par Vincent Gouysse partir de louvragepubli en 1948 aux Editions en langues trangres, Moscou.

    WWW.MARXISME.FR

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    Sommaire : PRIODE DE PRPARATION ET D'ACCOMPLISSEMENT

    DE LA RVOLUTION SOCIALISTE D'OCTOBRE

    DES TACHES DU PROLTARIAT DANS LA PRSENTE RVOLUTION(p. 7)DE LA DUALIT DU POUVOIR (p. 10)

    LES TACHES DU PROLTARIAT DANS NOTRE RVOLUTION.Projet de plate-forme pour le Parti du proltariat (p. 12)

    Le caractre de classe de la rvolution accomplie(p. 12)La politique extrieure du nouveau gouvernement(p. 12)L'originale dualit du pouvoir et sa signification de classe(p. 13)Caractre original de la tactique, rsultat de ce qui prcde(p. 14)La dfense nationale rvolutionnaire et sa signification de classe(p. 15)Comment peut-on terminer la guerre ?(p. 16)Le nouveau type d'Etat que cre notre rvolution(p. 16)Programmes agraire et national(p. 18) Nationalisation des banques et des syndicats capitalistes(p. 19)La situation dans l'Internationale socialiste(p. 19)La faillite de l'Internationale de Zimmerwald. Il faut fonder la IIIe Internationale(p. 22)

    Quelle doit tre la dnomination de notre Parti pour tre scientifiquement exacte et contribuer clairer la conscience politique du proltariat ?(p. 24)

    LA VIIe CONFRENCE DU P.O.S.D.R.(b) (DITE CONFRENCE D' AVRIL ) 7-12 MAI (24-29 AVRIL) 1917(p. 27)

    Rsolution sur la question agraire adopte par la confrence le 11 mai (28 avril)(p. 27)Rsolution sur la question nationale adopte par la confrence le 12 mai (29 avril)(p. 28)

    PREMIER CONGRES DES DPUTS PAYSANS DE RUSSIE.Projet de rsolution sur la question agraire(p. 30)

    PREMIER CONGRS DES SOVIETS DES DPUTS OUVRIERS ET SOLDATS DE RUSSIE.Discours sur l'attitude envers le gouvernement provisoire(p. 31)

    A PROPOS DES MOTS D'ORDRE(p. 36)

    LES ENSEIGNEMENTS DE LA RVOLUTION(p. 40)

    Postface(p. 46)

    LA CATASTROPHE IMMINENTE ET LES MOYENS DE LA CONJURER (p. 47)La famine approche(p. 47)Inaction totale du gouvernement(p. 47)Les mesures de contrle sont universellement connues et faciles raliser (p. 49) Nationalisation des banques(p. 50) Nationalisation des syndicats capitalistes(p. 52)Suppression du secret commercial(p. 54)Le groupement forc en cartels(p. 56)Rglementation de la consommation(p. 57)Sabotage du travail des organisations dmocratiques par le gouvernement(p. 59)La faillite financire et les moyens de la prvenir (p. 61)Peut-on aller de l'avant si l'on craint de marcher au socialisme ?(p. 63)La guerre et la lutte contre la ruine conomique(p. 64)Dmocratie rvolutionnaire et proltariat rvolutionnaire(p. 66)

    LE MARXISME ET L'INSURRECTION.Lettre au Comit central du P.O.S.D.R. (p. 68)

    LES TACHES DE LA RVOLUTION(p. 71)

    Ce qu'a de funeste la politique d'entente avec les capitalistes(p. 72)Le pouvoir aux Soviets(p. 72)La paix aux peuples(p. 72)La terre aux travailleurs(p. 73)Lutte contre la famine et la ruine conomique(p. 73)Lutte avec la contre-rvolution des grands propritaires fonciers et des capitalistes(p. 74)Dveloppement pacifique de la rvolution(p. 74)

    CONSEILS D'UN ABSENT(p. 76)

    RUNION DU COMIT CENTRAL DU P.O.S.D.R. (b)23 (10) octobre 1917. Rsolution sur l'insurrection arme(p. 77)

    LETTRE AUX MEMBRES DU PARTI BOLCHEVIK (p. 78)

    LETTRE AUX MEMBRES DU COMIT CENTRAL(p. 80)

    L'ETAT ET LA RVOLUTION.La doctrine du marxisme sur l'Etat et les tches du proltariat dans la rvolution(p. 81)Prface la premire dition(p. 81)

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    Prface la deuxime dition(p. 81)Chapitre I. La Socit de classes et l'Etat(p. 82)

    1. L'Etat, produit des antagonismes de classes inconciliables(p. 82)2. Dtachements spciaux d'hommes arms, prisons, etc.(p. 83)3. L'Etat, instrument d'exploitation de la classe opprime(p. 84)4. Dprissement de l'Etat et rvolution violente(p. 86)

    Chapitre II. L'Etat et la rvolution. L'exprience des annes 1848-1851(p. 89)1. A la veille de la rvolution(p. 89)2. Le bilan d'une rvolution(p. 91)3. Comment Marx posait la question en 1852(p. 93)

    Chapitre III. L'Etat et la rvolution. L'exprience de la Commune de Paris (1871). Analyse de Marx(p. 94)1. Ce que la tentative des Communards a d'hroque(p. 94)2. Par quoi remplacer la machine d'Etat dmolie ?(p. 96)3. Suppression du parlementarisme(p. 98)4. Organisation de l'unit nationale(p. 101)5. Destruction de l'Etat parasite(p. 102)

    Chapitre IV. Suite. Explications complmentaires d'Engels(p. 103)1. La question du logement (p. 103)2. Polmique contre les anarchistes(p. 105)3. Lettre Bebel(p. 106)4. Critique du projet de programme d'Erfurt(p. 107)5. La prface de 1891 la Guerre civilede Marx(p. 110)6. Engels et la suppression de la dmocratie(p. 113)

    Chapitre V. Les bases conomiques du dprissement de l'Etat(p. 114)

    1. Comment Marx pose la question(p. 114)2. La transition du capitalisme au communisme(p. 115)3. Premire phase de la socit communiste(p. 118)4. Phase suprieure de la socit communiste(p. 119)

    Chapitre VI. L'avilissement du marxisme par les opportunistes(p. 122)1. Polmique de Plkhanov contre les anarchistes(p. 123)2. Polmique de Kautsky contre les opportunistes(p. 123)3. Polmique de Kautsky contre Pannekoek (p. 127)

    Postface de la premire dition(p. 131)

    DEUXIME CONGRS DES SOVIETS DES DPUTS OUVRIERS ET SOLDATS DE RUSSIE(p. 132)

    1. Aux ouvriers, aux soldats et aux paysans !(p. 132)2. Rapport sur la paix prsent le 26 octobre 1917(p. 133)3. Rapport sur la paix. Discours de clture de la discussion, 26 octobre 1917(p. 135)4. Rapport sur la terre prsent le 26 octobre 1917(p. 137)

    PROJET DE RGLEMENT SUR LE CONTROLE OUVRIER (p. 140)APPEL DU COMIT CENTRAL DU PARTI OUVRIER SOCIAL-DMOCRATE (bolchvik) DE RUSSIE.A tous les membres du Parti et toutes les classeslaborieusesde Russie! (p. 141)

    L'ALLIANCE DES OUVRIERS ET DES PAYSANS TRAVAILLEURS ET EXPLOITS.Lettre la rdaction de la Pravda(p. 143)

    THSES SUR L'ASSEMBLE CONSTITUANTE(p. 145)

    PROJET DE DCRET SUR LA SOCIALISATION DE L'CONOMIE NATIONALE(p. 148)

    QUESTIONS POSES AUX DLGUS DU Ier CONGRS GNRAL DES ARMES POUR LA DMOBILISATION DESTROUPES(p. 150)

    COMMENT ORGANISER L'MULATION ?(p. 151)

    PROJET DE DCLARATION DES DROITS DU PEUPLE TRAVAILLEUR ET EXPLOIT(p. 155)

    PROJET DE DCRET SUR LA DISSOLUTION DE L'ASSEMBLE CONSTITUANTE(p. 157)

    THSES SUR LA CONCLUSION IMMDIATE D'UNE PAIX SPARE ET ANNEXIONNISTE(p. 158)

    LA PATRIE SOCIALISTE EST EN DANGER !(p. 162)

    CHOSE TRANGE ET MONSTRUEUSE(p. 163)

    SUR LE TERRAIN PRATIQUE(p. 167)

    LEON SRIEUSE ET SRIEUSE RESPONSABILIT(p. 168)

    RAPPORT SUR LA GUERRE ET LA PAIX, PRSENT AU VIIe CONGRS DU P.C.R.(b), le 7 MARS 1918(p. 171)

    LA TACHE PRINCIPALE DE NOS JOURS(p. 180)

    LES TACHES IMMDIATES DU POUVOIR DES SOVIETS(p. 182)

    Situation internationale de la Rpublique des Soviets de Russie et tches essentielles de la rvolution socialiste(p. 182)Le mot d'ordre gnral de l'heure(p. 183) Nouvelle phase de la lutte contre la bourgeoisie(p. 184)Importance de la lutte pour le recensement et le contrle populaires(p. 188)Augmentation de la productivit du travail(p. 189)Organisation de l'mulation(p. 191)

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    LA MALADIE INFANTILE DU COMMUNISME (LE GAUCHISME )(p. 333)

    I. Dans quel sens peut-on parler de la porte internationale de la rvolution russe ?(p. 333)II. Une des conditions essentielles du succs des bolchviks(p. 334)III. Principales tapes de l'histoire du bolchvisme(p. 335)IV. Dans la lutte contre quels ennemis au sein du mouvement ouvrier le bolchvisme s'est-il dvelopp, fortifi, aguerri ?(p. 337)V. Le communisme de gauche en Allemagne. Chefs, parti, classe, masse(p. 341)VI. Les rvolutionnaires doivent-ils militer dans les syndicats ractionnaires ?(p. 344)

    VII. Faut-il participer aux parlements bourgeois ?(p. 348)VIII. Jamais de compromis ? (p. 352)IX. Le communisme de gauche en Angleterre(p. 357)X. Quelques conclusions(p. 362) Annexe

    I. La scission des communistes allemands(p. 368)II. Communistes et indpendants en Allemagne(p. 369)III. Turati et Cie en Italie(p. 370)IV. Conclusions fausses de prmisses justes(p. 371)

    PREMIRE BAUCHE DES THSES SUR LA QUESTION AGRAIRE.Pour le II e congrs de l'Internationale communiste(p. 374)

    PREMIRE BAUCHE DES THSES SUR LES QUESTIONS NATIONALE ET COLONIALE.Pour le II e congrs del'Internationale communiste(p. 379)

    LE IIe CONGRS DE L'INTERNATIONALE COMMUNISTE(p. 382)

    LES TACHES DES FDRATIONS DE LA JEUNESSE.Discours prononc au III e congrs national de la Fdration des jeunessescommunistes de Russie, le 2 octobre 1920(p. 383)LETTRE AUX CAMARADES DE TOULA(p. 393)

    PERIODE DE TRANSITION A L' UVRE PACIFIQUE DE RTABLISSEMENT DE L'CONOMIE NATIONALE

    AVANT-PROJET DE LA RSOLUTION DU Xe CONGRS DU PARTI COMMUNISTE DE RUSSIE SUR L'UNIT DU PARTI(p. 394)

    AVANT-PROJET DE LA RSOLUTION DU Xe CONGRS DU PARTI COMMUNISTE DE RUSSIE SUR LA DVIATIONSYNDICALISTE ET ANARCHISTE DANS NOTRE PARTI(p. 396)

    DISCOURS PRONONC AU CONGRS DES OUVRIERS DES TRANSPORTS DE RUSSIE le 27 MARS 1921(p. 398)

    AUX CAMARADES COMMUNISTES D'AZERBADJAN, DE GORGIE, D'ARMNIE, DU DAGHESTAN ET DE LARPUBLIQUE DES MONTAGNARDS(p. 404)

    SUR L'IMPOT EN NATURE.Le rle de la nouvelle politique et ses conditions(p. 406)

    En guise d'introduction(p. 406)Sur l'conomie actuelle de la Russie. Extrait de la brochure de 1918(p. 406)Sur l'impt en nature, la libert de commerce et les concessions(p. 411)Bilan et conclusions politiques(p. 419)Conclusion(p. 422)

    THSES DU RAPPORT SUR LA TACTIQUE DU PARTI COMMUNISTE RUSSE PRSENT AU IIIe CONGRS DEL'INTERNATIONALE COMMUNISTE(Avant-projet)(p. 424)

    1. La situation internationale de la R.S.F.S.R.(p. 424)2. Le rapport des forces de classes l'chelle internationale(p. 424)3. Le rapport des forces de classes en Russie(p. 425)4. Le proltariat et la paysannerie en Russie(p. 425)

    5. L'alliance militaire du proltariat et de la paysannerie de la R.S.F.S.R.(p. 425)6. L'tablissement de rapports conomiques normaux entre le proltariat et la paysannerie(p. 425)7. Dans quelles conditions et pourquoi le pouvoir des Soviets admet le capitalisme et le systme des concessions(p. 426)8. Les succs de notre politique du ravitaillement(p. 426)9. La base matrielle du socialisme et le plan d'lectrification de la Russie(p. 426)10. Le rle de la dmocratie pure , de la IIe Internationale et de l'Internationale21 / 2 , des socialistes-rvolutionnaires et desmenchviks allis du Capital(p. 427)

    NOUVEAUX TEMPS, ANCIENNES ERREURS SOUS UNE FORME NOUVELLE(p. 428)

    SUR L'PURATION DU PARTI(p. 432)

    POUR LE QUATRIME ANNIVERSAIRE DE LA RVOLUTION D'OCTOBRE(p. 433)

    SUR LE ROLE DE L'OR AUJOURD'HUI ET APRES LA VICTOIRE COMPLTE DU SOCIALISME(p. 437)

    DU ROLE ET DES TACHES DES SYNDICATS DANS LES CONDITIONS DE LA NOUVELLE POLITIQUE CONOMIQUE. Dcision du Comit central du Parti communiste russe (bolchvik) du 12 janvier 1922(p. 441)

    1. La nouvelle politique conomique et les syndicats(p. 441)2. Le capitalisme d'Etat dans l'Etat proltarien et les syndicats(p. 441)

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    3. Les entreprises d'Etat adoptant le principe dit du rendement commercial et les syndicats(p. 441)4. La diffrence essentielle entre la lutte de classe du proltariat dans un Etat qui reconnat la proprit prive du sol, des fabriques,etc. et o le pouvoir politique est aux mains de la classe des capitalistes, et la lutte conomique du proltariat dans l'Etat qui nereconnat pas la proprit prive du sol et de la plupart des grosses entreprises, dans l'Etat o le pouvoir politique est aux mains du proltariat(p. 442)5. Le retour l'adhsion volontaire au syndicat(p. 442)6. Les syndicats et la gestion des entreprises(p. 443)7. Le rle et la participation des syndicats dans les organismes conomiques et administratifs de l'Etat proltarien(p. 443)8. La liaison avec les masses comme condition essentielle de toute activit syndicale(p. 444)9. Les contradictions dans la situation mme des syndicats sous la dictature du proltariat(p. 444)10. Les syndicats et les spcialistes(p. 445)11. Les syndicats et les influences petites-bourgeoises sur la classe ouvrire(p. 445)

    RAPPORT POLITIQUE DU COMIT CENTRAL DU PARTI COMMUNISTE RUSSE (bolchvik) PRSENT AU XIeCONGRS DU P.C.R.(b) LE 27 MARS 1922(p. 446)

    DISCOURS DE CLOTURE DU XIe CONGRS DU PARTI COMMUNISTE RUSSE (bolchvik), 2 AVRIL 1922(p. 466)

    DE LA DOUBLE SUBORDINATION ET DE LA LGALIT.Au camarade Staline pour le Bureau politique(p. 467)

    CINQ ANS DE RVOLUTION RUSSE ET PERSPECTIVES DE RVOLUTION MONDIALE.Rapport prsent au IV e Congrs del'Internationale communiste, le 13 novembre 1922(p. 469)

    NOTES SUR LES TACHES DE NOTRE DLGATION A LA HAYE(p. 475)

    FEUILLETS DE BLOC-NOTES(p. 477)

    DE LA COOPRATION(p. 480)

    SUR NOTRE RVOLUTION.A propos des mmoires de N. Soukhanov(p. 484)

    COMMENT RORGANISER L'INSPECTION OUVRIRE ET PAYSANNE ?Proposition faite au XII e Congrs du Parti(p. 486)

    MIEUX VAUT MOINS, MAIS MIEUX(p. 489)

    NOTES (p. 497)

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    PRIODE DE PRPARATION ET D'ACCOMPLISSEMENT DE LARVOLUTION SOCIALISTE D'OCTOBRE

    DES TACHES DU PROLTARIAT DANS LA PRSENTE RVOLUTION

    Arriv Ptrograd dans la nuit du 3 avril seulement, je n'ai pu naturellement faire un rapport sur les tches du proltariat rvolutionnaire, la runion du 4 avril, qu'en mon nom propre et en faisant des rserves sur ma prparation insuffisante. La seule chose que j'aie pu faire pour faciliter le travail, moi-mme et auxcontradicteurs debonne foi,c'a t de prparer des thsescrites.J'en ai donn lecture et transmis le texte aucamarade Tsrtli. Je les ai lues trs lentement et deux reprises: d'abord la runion des bolcheviks, ensuite celle des bolcheviks et des menchviks. Je prsente ici mes thses personnelles, accompagnes de trs brvesremarques explicatives ; elles ont t dveloppes avec beaucoup plus de dtails dans mon rapport :

    THSES

    1. Notre attitude envers la guerre qui, du ct de la Russie, mme sous le nouveau gouvernement de Lvov et Cie,demeure sans conteste, en raison du caractre capitaliste de ce gouvernement, une guerre imprialiste de

    brigandage, n'admet aucune concession, si minime soit-elle, la dfense nationale rvolutionnaire .A une guerre rvolutionnaire qui justifierait rellement la dfense nationale rvolutionnaire, le proltariatconscient ne peut donner son consentement qu' la condition :a) du passage du pouvoir entre les mains du proltariat et des lments pauvres de la paysannerie, proches du proltariat ;b) de la renonciation effective etnon en paroles toutes les annexions ;c) de la totale rupture de fait avec tous les intrts du Capital.

    Devant l'indniable bonne foi des larges couches de partisans de la dfense nationale rvolutionnaire dans lesmasses, partisans qui n'admettent la guerre que par ncessit, et non en vue de conqutes, et tant donn qu'ilssont tromps par la bourgeoisie, il importe de leur expliquer avec une persvrance, une patience, et un soin particuliers leur erreur, de leur expliquer le lien indissoluble du Capital et de la guerre imprialiste, de leur dmontrer que, sans renverser le Capital, il estimpossiblede terminer la guerre par une paix vraimentdmocratique et non impose par la violence.

    Organisation de la propagande la plus large de ces vues dans l'arme combattante.

    Fraternisation.

    2. Ce qu'il y a d'original dans l'actualit russe, c'est latransitionde la premire tape de la rvolution, qui adonn le pouvoir la bourgeoisie par suite du degr insuffisant de conscience et d'organisation du proltariat, sa deuximetape, qui doit donner le pouvoir au proltariat et aux couches pauvres de la paysannerie.

    Cette transition est caractrise, d'une part, par le maximum de lgalit (la Russie estaujourd'huide tous les pays belligrants, le pays le plus libre du monde) ; de l'autre, par l'absence de violence exerce sur les masses, etenfin par l'attitude de confiance inconsciente des masses l'gard du gouvernement des capitalistes, ces piresennemis de la paix et du socialisme.

    Cette situation originale exige de nous que nous sachions nous adapter aux conditionsspcialesdu travail duParti au sein des masses proltariennes immensment grandes, peine veilles la vie politique.

    3. Aucun soutien au Gouvernement provisoire ; dmontrer le caractre entirement mensonger de toutes ses promesses, et surtout de celles concernant la renonciation aux annexions. Dmasquer le gouvernement au lieu d'exiger chose inadmissible, car ce serait semer l'illusion quece gouvernement, gouvernement decapitalistes,cessed'tre imprialiste.

    4. Reconnatre que notre Parti est en minorit, et pour le moment en faible minorit, dans la plupart des Sovietsdes dputs ouvriers, devant lebloc de tousles lments petits-bourgeois opportunistes, tombs sous l'influence

    de la bourgeoisie et qui tendent cette influence sur le proltariat, depuis les socialistes populaires, en passant par les socialistes-rvolutionnaires jusqu'au Comit d'organisation (Tchkhidz, Tsrtli, etc.), Stklov, etc., etc.

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    Expliquer aux masses que le Soviet des dputs ouvriers est laseule forme possible de gouvernementrvolutionnaire, et que notre tche, par consquent, tant quece gouvernement-l se laisse influencer par la bourgeoisie, ne peut tre qued'expliquer aux masses patiemment, avec mthode et persvrance, les erreurs deleur tactique, en nous adaptant surtout aux besoins pratiques de ces masses.

    Tant que nous sommes en minorit, nous faisons un travail de critique et d'claircissement des erreurs, enaffirmant en mme temps la ncessit du passage de tout le pouvoir d'Etat aux Soviets des dputs ouvriers, afinque les masses s'affranchissent de leurs erreurs par l'exprience.

    5. Non pas une rpublique parlementaire y retourner aprs les Soviets des dputs ouvriers, ce serait un pasen arrire, mais une rpublique des Soviets des dputs ouvriers, salaris agricoles et paysans dans le paysentier, de la base au sommet.

    Suppression de la police, de l'arme [C'est--dire : remplacement de l'arme permanente par l'armement du peuple entier.] et du corps des fonctionnaires.

    Eligibilit et rvocabilit tout moment de tous les fonctionnaires ; leurs traitements ne doivent pas tresuprieurs au salaire moyen d'un bon ouvrier.

    6. Dans le programme agraire, reporter le centre de gravit sur les Soviets des dputs salaris agricoles.

    Confiscation de toutes les terres des grands propritaires fonciers.

    Nationalisation detoutesles terres dans le pays ; les terres sont mises la disposition des Soviets locaux desdputs des salaris agricoles et paysans. Formation de Soviets des dputs de paysans pauvres. Transformationde tout grand domaine (de 100 300 hectares, en tenant compte des conditions locales et autres et sur l'avis desinstitutions locales) en exploitations modles places sous le contrle des dputs salaris agricoles etfonctionnant au compte de la socit. 7. Fusion immdiate de toutes les banques du pays en une seule banquenationale place sous le contrle des Soviets des dputs ouvriers.

    8. Non pas l' introduction du socialisme, comme notre tchedirecte,mais simplement le passage immdiatau contrlede la production sociale et de la rpartition des produits par les Soviets des dputs ouvriers.

    9. Tches du Parti :

    a) Convoquer sans dlai le congrs du Parti ;b) Modifier le programme du Parti, principalement :

    1. sur l'imprialisme et la guerre imprialiste ;2. sur l'attitude envers l'Etat etnotrerevendication d'un Etat-Commune [C'est--dire d'un Etat dont laCommune de Paris a t la prfiguration.];3. corriger le programme minimum, qui a vieilli ;

    c) changer la dnomination du Parti[Au lieu de social-dmocratie , dont les chefs officiels (partisans de la dfense nationale et kautskistes hsitants) ont trahi le socialisme dans le monde entier et sont passs labourgeoisie, il faut s'appeler Parti communiste.],

    10. Rnover l'Internationale.

    Initiative de la cration d'une Internationale rvolutionnaire, d'une Internationale contre lessocial-chauvinsetcontre le centre .[On appelle centre dans la social-dmocratie internationale la tendance qui hsite entreles chauvins (partisans de la dfense nationale ) et les internationalistes, savoir : Kautsky et Cie en Allemagne, Longuet et Cie en France, Tchkhidz et Cie en Russie, Turati et Cie en Italie, MacDonald et Cie en Angleterre, etc.]

    Afin que le lecteur puisse comprendre pourquoi j'ai d spcialement souligner comme une exception rare le cas des contradicteurs de bonne foi, je l'invite comparer ces thses l'objection suivante de monsieur Goldenberg

    : Lnine a plant l'tendard de la guerre civile au sein de la dmocratie rvolutionnaire (cit dans le journal Edinstvo1 de M. Plkhanov, n 5).

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    N'est-ce pas une perle, en vrit ?

    J'cris, je dclare, je ressasse : Devant l'indniable bonne foi deslarges couches de partisans de la dfensenationale rvolutionnaire dans lesmasses ..., tant donn qu'ils sont tromps par la bourgeoisie, il importe de leur expliquer avec une persvrance, unepatienceet un soinparticuliersleur erreur ...

    Or, ces messieurs de la bourgeoisie, qui se disent social-dmocrates, quine font partie ni deslarges couches, nides massesde partisans de la dfense nationale, exposent avec un front serein mes vues comme suit : L'tendard (!) de la guerre civile [dont il n'est pas dit un mot dans les thses, ni dans le rapport!] est plant (!) ausein (!!) de la dmocratie rvolutionnaire...

    Qu'est-ce donc ? En quoi cela diffre-t-il de l'agitation des fauteurs de pogroms ? de laRousskaa Volia2 ?

    J'cris, je dclare, je ressasse : Les Soviets des dputs ouvriers sont laseuleformepossiblede gouvernementrvolutionnaire et, par consquent, notre tche ne peut tre qued'expliquer aux masses patiemment, avecmthode et persvrance, les erreurs de leur tactique, en nous adaptant surtout aux besoins pratiques de cesmasses ...

    Or, des contradicteurs d'un certain acabit prsentent mes ides comme un appel la guerre civile au sein de ladmocratie rvolutionnaire !!

    J'ai attaqu le Gouvernement provisoire parce que, se bornant des promesses, il n'a fix aucun terme rapproch,ni aucun terme en gnral, la convocation de l'Assemble constituante. Je me suis appliqu dmontrer que sansles Soviets des dputs ouvriers et soldats, la convocation de l'Assemble constituante n'est pas assure etson succs est impossible.

    Et l'on me prtend adversaire de la convocation la plus prompte de l'Assemble constituante !!!

    Je qualifierais ces expressions de dlirantes , si des dizaines d'annes de lutte politique ne m'avaient pasappris considrer la bonne foi des contradicteurs comme une exception rare.

    M. Plkhanov a qualifi dans son journal mon discours de dlirant . Fort bien, monsieur Plkhanov ! Maisvoyez comme vous tes gauche, maladroit et peu perspicace dans votre polmique. Si pendant deux heures j'ai prononc mon discours dlirant, comment des centaines d'auditeurs ont-ils pu supporter mon dlire ? Ensuite, pourquoi votre journal consacre-t-il toute une colonne pour exposer ce dlire ? Cela ne tient pas, cela ne tient pas du tout.

    Certes, il est beaucoup plus facile de clamer, d'injurier, de pousser les hauts cris, que d'essayer de raconter,d'expliquer, d'voquer ce que Marx et Engels disaient en 1871, 1872, 1875, de l'exprience de la Commune deParis et dece quedevait tre l'Etat ncessaire au proltariat.

    L'ex-marxiste M. Plkhanov ne veut vraisemblablement pas se souvenir du marxisme.

    J'ai cit Rosa Luxembourg qui, le 4 aot 1914, qualifiait la social-dmocratieallemandede cadavre puant . Etmessieurs les Plkhanov, les Goldenberg et Cie s'offensent ... pour qui ? pour les chauvinsallemandsqualifis de chauvins !

    Les voil bien emptrs, les pauvres social-chauvins russes, socialistes en paroles, chauvins en fait.

    N. Lnine. Publi dans la Pravda, n 26, du 20 (7) avril 1917.

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    DE LA DUALIT DU POUVOIR

    Le problme fondamental de toute rvolution est celui du pouvoir dans l'Etat. Tant que ce problme n'est paslucid, il ne saurait tre question de participer consciemment la rvolution, et encore moins de la diriger.

    Notre rvolution a ceci d'minemment original, qu'elle a cr ladualit du pouvoir.C'est l un fait dont ilimporte de se rendre compte avant tout ; sans l'avoir compris, il est impossible d'aller de l'avant. Les vieilles formules , par exemple, du bolchvisme, il faut savoir les complter et les corriger. Car si elles se sont rvles justes dans l'ensemble, leur application concrte s'estrvlediffrente.Personneautrefois ne songeait et ne pouvait songer la dualit du pouvoir.

    En quoi consiste la dualit du pouvoir ?

    C'est qu' ct du Gouvernement provisoire, du gouvernement de labourgeoisie,s'est form un autre gouvernement,faible encore, embryonnaire, mais qui nanmoins existe en fait, incontestablement, et grandit.Savoir : les Soviets des dputs ouvriers et soldats.

    Quelle est la composition sociale de cet autre gouvernement ? Le proltariat et la paysannerie (sous l'uniforme desoldat). Quel en est le caractre politique ? C'est une dictature rvolutionnaire, c'est--dire un pouvoir quis'appuie directement sur un coup de force rvolutionnaire, sur l'initiative immdiate des masses populaires initiative venant d'en bas etnon sur la loidicte par un pouvoir d'Etat centralis. Ce pouvoir est d'un toutautre genre que celui qui existe gnralement dans la rpublique dmocratique bourgeoise parlementaire du typehabituel, et qui prdomine jusqu' ce jour dans les pays avancs d'Europe et d'Amrique. On oublie souvent cettecirconstance, on n'y rflchit pas assez. Or, c'est l l'essentiel. Ce pouvoir est dumme typeque la Commune deParis de 1871. Voici les indices caractristiques de ce type : 1. la source du pouvoir n'est pas dans la loi pralablement discute et vote par un Parlement, mais dans l'initiative venant d'en bas, directe et locale, desmasses populaires, dans un coup de force , pour employer une expression courante ; 2. la police et l'arme,institutions spares du peuple et opposes au peuple, sont remplaces par l'armement direct du peuple entier ;sous ce pouvoir, ce sont les ouvriers et les paysans armseux-mmes,c'est le peuple en armeslui-mmequimaintient l'ordre dans l'Etat ; 3. le corps des fonctionnaires, la bureaucratie, sont eux aussi remplacs par le pouvoir direct du peuple lui-mme, ou du moins placs sous un contrle spcial ; ils deviennent non seulementde simples mandataires lus, mais ils sont encorervocables la premire demande du peuple. De corps privilgi jouissant de bonnes sincures traitements levs, bourgeois, ils deviennent des ouvriers d'une arme spciale , dont les traitementsne sont pas suprieursau salaire habituel d'un bon ouvrier.

    L, et lseulement,est l'essence de la Commune de Paris, type particulier d'Etat. C'est cette essence qu'ontoublie et dforme MM. les Plkhanov (chauvins avous qui ont trahi le marxisme), les Kautsky (hommes du centre , c'est--dire qui balancent entre le chauvinisme et le marxisme), et d'une faon gnrale tous les social-dmocrates, les socialistes-rvolutionnaires et leurs pareils qui dominent aujourd'hui.

    On s'en tient quitte avec des phrases, on se cantonne dans le silence, on se drobe, on se congratule mille fois l'occasion de l'avnement de la rvolution, et l'on ne veut pasrflchir ce que sont les Soviets des dputsouvriers et soldats. On ne veut pas voir cette vrit vidente que, pour autant que ces Soviets existent,pour

    autant qu'ils sont Je pouvoir, il existe en Russie un Etatdu typede la Commune de Paris.J'ai soulign : pour autant . Car ce n'est qu'un pouvoir embryonnaire. Par un accord direct avec leGouvernement provisoire bourgeois, et par diverses concessions de fait, il alivr lui-mme, et ilcontinue delivrer des positions la bourgeoisie.

    Pourquoi ? Serait-ce que Tchkhidz, Tsrtli, Stklov et Cie commettent une erreur ? Allons donc ! Un philistin pourrait le penser, mais non un marxiste. La raison en est dans ledegr insuffisant de conscienceetd'organisation des proltaires et des paysans. L' erreur des leaders susdits, c'est leur position petite- bourgeoise, c'est qu'ilsobscurcissent la conscience des ouvriers au lieu de l'clairer, qu'ilsinculquent desillusions petites-bourgeoises au lieu de les rfuter, qu'ilsaffermissent l'influence de la bourgeoisie sur les masses,au heu de les soustraire cette influence.

    Cela seul doit suffire faire comprendre pourquoi nos camarades, eux aussi, commettent tant d'erreurs en posant simplement la question : faut-il renverser tout de suite le Gouvernement provisoire ?

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    Je rponds : 1. il faut le renverser, car c'est un gouvernement oligarchique, bourgeois, et non populaire ; ilrte peut donner ni la paix, ni le pain, ni la libert complte ; 2. on ne peut pas le renverser en ce moment, car ilrepose sur unaccord direct et indirect, formel et de fait, avec les Soviets des dputs ouvriers et, tout d'abord,avec le Soviet principal, celui de Ptrograd ; 3. on ne peut, en gnral, le renverser par la mthode habituelle, parce qu'il prend appui sur la bourgeoisie que soutient le second gouvernement, le Soviet des dputsouvriers ; or, ce dernier gouvernement est le seul gouvernement rvolutionnaire possible, le seul qui exprime

    directement la conscience et la volont de la majorit des ouvriers et des paysans. L'humanit n'a pas encorelabor, et nous ne connaissons pas jusqu' ce jour de type de gouvernement meilleur, suprieur aux Soviets desdputs ouvriers, salaris agricoles, paysans et soldats.

    Pour devenir le pouvoir, les ouvriers conscients doivent conqurir la majorit :aussi longtempsqu'il n'y a pas deviolence exerce sur les masses il n'est point d'autre chemin conduisant au pouvoir. Nous ne sommes pas des blanquistes3, des partisans de la prise du pouvoir par une minorit. Nous sommes des marxistes, partisans de lalutte de classe proltarienne contre les entranements petits-bourgeois, le chauvinisme dfensiste, la phrase, ladpendance vis--vis de la bourgeoisie.

    Crons un parti communiste proltarien ; les meilleurs partisans du bolchvisme en ont dj cr les lments.Groupons-nous pour une action de classe proltarienne ; et les proltaires, les paysanspauvresse rallieront nous, toujours plus nombreux. Car la vie dtruira chaque jour davantage les illusions petites-bourgeoises des social-dmocrates , des Tchkhidz, Tsrtli, Stklov et autres, des socialistes-rvolutionnaires , des petits bourgeois plus purs encore, etc., etc.

    La bourgeoisie est pour un pouvoir bourgeois unique.

    Les ouvriers conscients sont pour le pouvoir unique des Soviets des dputs ouvriers, salaris agricoles, paysanset soldats, pour un pouvoir unique prpar non par des aventures, mais enclairant la conscience du proltariat,en l'affranchissant de l'influence de la bourgeoisie.

    La petite bourgeoisie social-dmocrates , socialistes-rvolutionnaires, etc., etc. entrave par seshsitations cet claircissement, cet affranchissement.

    Tel est le vritable rapport de forces entre lesclassesen prsence. C'est lui qui dtermine nos tches.

    N. Lnine. Publi dans la Pravda, n 28, du 22 (9) avril 1917.

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    LES TACHES DU PROLTARIAT DANS NOTRE RVOLUTION

    PROJET DE PLATE-FORME POUR LE PARTI DU PROLTARIAT

    Le moment historique que traverse actuellement la Russie est caractris par les traits essentiels que voici :

    LE CARACTRE DE CLASSE DE LA RVOLUTION ACCOMPLIE

    1. L'ancien pouvoir tsariste, qui ne reprsentait qu'une poigne de propritaires fodaux commandant toute lamachine de l'Etat (arme, police, bureaucratie), est vaincu et renvers, mais il n'est pas achev. La monarchien'est pas anantie formellement. La bande des Romanov continue ses intrigues monarchistes. L'immense proprit terrienne des grands fodaux n'est pas supprime.

    2. Le pouvoir en Russie est pass entre les mains d'uneclasse nouvelle, savoir : bourgeoisie et grands propritaires embourgeoiss.Pour autant,la rvolution dmocratique bourgeoise est acheve en Russie.

    Une fois au pouvoir, la bourgeoisie a fait bloc (alliance) avec les lments manifestement monarchistes, quis'taient signals, de 1906 1917, par leur zle inou soutenir Nicolas le Sanguinaire et Stolypine le Pendeur 4

    (Goutchkov et les autres hommes politiques placs droite des cadets). Le nouveau gouvernement bourgeois deLvov et Cie a tent et commenc de ngocier avec les Romanov la restauration de la monarchie en Russie. Sousle couvert d'une phrasologie rvolutionnaire, il nomme, aux postes de commande, les partisans de l'ancienrgime. Il s'attache rformer le moins possible tout le mcanisme de l'appareil d'Etat (arme, police, bureaucratie), qu'il a remis entre les mains de la bourgeoisie. A l'initiative rvolutionnaire de l'action des masseset la prise du pouvoir par en bas,par le peuple, seule garantie des succs rels de la rvolution, lenouveau gouvernement met dj toute sorte d'obstacles.

    Il n'a pas encore fix mme la date de la convocation de l'Assemble constituante. Il ne touche point la grande proprit foncire, cette base matrielle du tsarisme fodal. Il ne songe mme pas enquter sur les agissementsdes tablissements financiers monopoleurs, des grandes banques, des syndicats et cartels capitalistes, etc., divulguer leurs agissements, contrler ces tablissements.

    Les principaux postes ministriels, les postes dcisifs du nouveau gouvernement (ministre de l'Intrieur,ministre de la Guerre, c'est--dire le commandement de l'arme, de la police, des fonctionnaires, de toutl'appareil d'oppression des masses), appartiennent des monarchistes avrs et des partisans de la grande proprit foncire. Les cadets, rpublicains d'hier, rpublicains malgr eux, se sont vu attribuer des postessecondaires, n'ayant pas de rapport direct aucommandement exerc sur le peuple et l'appareil du pouvoir. A.Krenski, reprsentant des troudoviks, et, socialiste-lui-aussi , ne joue absolument aucun rle, si ce n'est qu'ilendort par des phrases retentissantes la vigilance et l'attention du peuple.

    Pour toutes ces raisons le nouveau gouvernement bourgeois ne mrite, mme en politique intrieure, aucuneconfiance de la part du proltariat, et celui-ci ne saurait lui donner aucun appui.

    LA POLITIQUE EXTRIEURE DU NOUVEAU GOUVERNEMENT

    3. En ce qui concerne la politique extrieure, que les conditions objectives situent maintenant au premier plan, lenouveau gouvernement est un gouvernement de continuation de la guerre imprialiste en alliance avec les puissances imprialistes, Angleterre, France, etc. pour le partage du butin capitaliste, pour l'tranglement des peuples, petits et faibles.

    Soumis aux intrts du capital russe et de son puissant protecteur et matre, le capital imprialiste anglo-franais,le plus riche du monde, le nouveau gouvernement, malgr les v ux formuls de la faon la plus prcise, aunom de l'indniable majorit des peuples de Russie, par le Soviet des dputs soldats et ouvriers, n'a entreprisrien de concret pour mettre fin au massacre des peuples, visant assurer les intrts des capitalistes. Il n'a pasmme publi les traits secrets de spoliation manifeste (sur le partage de la Perse, le pillage de la Chine, le pillage de la Turquie, le partage de l'Autriche, le rapt de la Prusse orientale et des colonies allemandes, etc.), qui

    lient manifestement la Russie aux forbans du capital imprialiste anglo-franais. Il aconfirmces traits, conclus par le tsarisme qui, pendant des sicles, a pill et opprim plus de peuples que les autres tyrans et despotes,

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    par le tsarisme qui, non content d'opprimer, dshonorait et corrompait le peuple grand-russe, dont il avait fait le bourreau des autres peuples.

    Ayant confirm les traits d'infamie et de brigandage, le nouveau gouvernement, contrairement la volont de lamajorit des peuples de Russie, clairement exprime par les Soviets des dputs ouvriers et soldats, n'a pas propos l'armistice immdiat tous les peuples en guerre. Il s'est born prodiguer des dclarations et des phrases solennelles, sonores et pompeuses, mais absolument vides, qui, dans la bouche des diplomates bourgeois, ont toujours servi et servent encore tromper les masses confiantes et naves du peuple opprim.

    4. Aussi le nouveau gouvernement ne mrite pas la moindre confiance en politique extrieure ; bien plus, lesommer nouveau de proclamer la volont de paix des peuples de Russie, de renoncer aux annexions, etc., etc.,c'est au fond duper simplement le peuple, lui faire concevoir des esprances irralisables, retarder sa prise deconscience, lui faire accepter indirectement la prolongation d'une guerre dont le vrai caractre social n'est pasdtermin par des souhaits pieux, mais par la nature de classe du gouvernement qui la fait, par le lien qui rattachela classe reprsente par ce gouvernement au capital financier imprialiste de Russie, d'Angleterre, de France,etc., par lapolitique relle et effectivepratique par cette classe.

    L'ORIGINALE DUALIT DU POUVOIR ET SA SIGNIFICATION DE CLASSE

    5. La particularit essentielle de notre rvolution, celle qui sollicite le plus imprieusement une attentionrflchie, c'est ladualit de pouvoir qui s'est tablie ds le lendemain de la victoire de la rvolution.

    Cette dualit de pouvoir se manifeste par l'existence dedeux gouvernements : le gouvernement principal,vritable, effectif de la bourgeoisie, le Gouvernement provisoire de Lvov et Cie, qui dtient tous les organesdu pouvoir, et un gouvernement supplmentaire, accessoire, un gouvernement de contrle , reprsent par leSoviet des dputs ouvriers et soldats de Ptrograd, qui ne dlient pas les organes du pouvoir d'Etat, mais qui prend directement appui sur la majorit indniable du peuple, sur les ouvriers et les soldats en armes.

    L'origine sociale de cette dualit de pouvoir et sa signification de classe, c'est que la rvolution de mars 1917,non seulement a balay toute la monarchie tsariste et remis tout le pouvoir la bourgeoisie, mais qu'elletouchede prs la dictature dmocratique rvolutionnaire du proltariat et de la paysannerie. C'est justement cettedictature (c'est--dire un pouvoir appuy non sur la loi, mais sur la force directe des masses armes de la population), c'est justement la dictature des classes ci-dessus mentionnes que reprsentent le Soviet des dputsouvriers et soldats de Ptrograd et les autres Soviets en province.

    6. Une autre particularit minemment importante de la rvolution russe, c'est que le Soviet des dputs ouvrierset soldats de Ptrograd, qui, tout porte le croire, jouit de la confiance de la majorit des Soviets locaux, remetvolontairement le pouvoir la bourgeoisie et sonGouvernement provisoire,cdevolontairement ce dernier la primaut, aprs entente avec lui pour le soutenir, se borne au rle d'observateur contrlant la convocation del'Assemble constituante (dont la date n'a mme pas t publie jusqu'ici par le Gouvernement provisoire).

    Cette situation extrmement originale, jamais vue sous cet aspect dans l'histoire, a donn lieu cetentrelacs,cet amalgame de deuxdictatures : la dictature de la bourgeoisie (car le gouvernement de Lvov et Cie est une

    dictature, c'est--dire un pouvoir appuy non sur la loi et non sur l'expression pralable de la volont populaire,mais sur un coup de force, coup de force opr par une classe dtermine, en l'occurrence, la bourgeoisie) etla dictature du proltariat et de la paysannerie (le Soviet des dputs ouvriers et soldats).

    Il ne fait pas le moindre doute que cet entrelacs ne peut tenir longtemps. Deux pouvoirsne sauraient exister dans un Etat. L'un des deux doit tre rduit nant, et ds maintenant toute la bourgeoisie de Russie travaille detoutes ses forces, par tous les moyens et en tous lieux, supprimer et dbiliter, rduire nant les Soviets desdputs soldats et ouvriers, et crer l'unit de pouvoir de la bourgeoisie.

    La dualit de pouvoir ne reflte qu'une priodetransitoiredu dveloppement de la rvolution, lorsque cettedernire est alle au del d'une rvolution dmocratique bourgeoise ordinaire, maisn'est pas encore arrive la pure dictature du proltariat et de la paysannerie. La signification de classe (et l'explication de classe) de cettat de transition instable est celle-ci : notre rvolution a, comme toute autre rvolution, exig des massesqu'elles fassent preuve du plus grand hrosme et d'abngation pour la lutte contre le tsarisme ; en outre, elle ad'un coupentran dans le mouvement une quantit incroyable de simples habitants.

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    Un des principaux caractres scientifiques, politiques et pratiques detoute rvolution vritable, c'estl'augmentation extraordinairement rapide, subite et brusque du nombre d' habitants qui commencent d'eux-mmes participer activement la vie politique, l'organisation de l'Etat.

    De mme la Russie. La Russie est aujourd'hui en bullition. Des millions et des dizaines de millions d'hommesen lthargie politique depuis dix ans, politiquement ploys sous le joug pouvantable du tsarisme et accabls par leur labeur de forat au profit des grands propritaires fonciers et des fabricants, sesont veills et aspirent lavie politique. Que sont ces millions et ces dizaines de millions d'hommes ? Pour la plupart, des petits patrons,des petits bourgeois, des gens tenant le milieu entre les capitalistes et les ouvriers salaris. La Russie est le paysle plus petit-bourgeois de l'Europe.

    Une formidable vague petite-bourgeoise submerge tout ; elle crase non seulement par son nombre, mais aussi par son idologie, le proltariat conscient, c'est--dire qu'elle a contamin de trs larges milieux ouvriers en leur communiquant ses conceptions petites-bourgeoises en politique. La petite bourgeoisie dfend dans son existencede la bourgeoisie, parce que vivant elle-mme en patron et non en proltaire (par laplacequ'elle occupe dans la productionsociale). Par sa faon de penser, elle suit la bourgeoisie.

    Crdulit inconsciente envers les capitalistes, ces pires ennemis de la paix et du socialisme, voil ce quicaractrise la politique actuelle desmassesen Russie ; voil ce quia surgiavec une rapidit rvolutionnaire sur le terrain conomique et social du pays le plus petit-bourgeois d'Europe. Voil la base declassede l'accord (je souligne que je parle moins de l'accord formel que du soutiende fait,de l'accord tacite, de la crdulitinconsciente avec laquelle on cde le pouvoir) entre le Gouvernement provisoire et le Soviet des dputsouvriers et soldats, accord qui a livr aux Goutchkov le gros morceau, le vritable pouvoir, et au Soviet les promesses, les honneurs (momentanment), les flatteries, les phrases, les assurances, les salamalecs desKrenski.

    L'insuffisance numrique du proltariat russe, son degr insuffisant de conscience et d'organisation, voil l'autreface de la mdaille. Tous les partis populistes, socialistes-rvolutionnaires y compris, ont toujours t petits- bourgeois ; de mme le parti du Comit d'organisation (Tchkhidz, Tsrtli et autres) ; de mme lesrvolutionnaires sans-parti (Stklov et autres) ont cd la vague, ne l'ont pas surmonte, n'en ont pas eu letemps.

    CARACTRE ORIGINAL DE LA TACTIQUE, RSULTAT DE CE QUI PRCDE

    7. Pour un marxiste, qui doit tenir compte des faits objectifs, des masses et des classes, et non des individus, etc.,l'originalit marque plus haut de la situation relle dtermine ncessairement l'originalit de la tactique aumomentprsent.

    Cette originalit met au premier plan la ncessit de verser du vinaigre et du fiel dans l'eau sucre des phrasesdmocratiques rvolutionnaires (selon l'expression remarquablement juste employe hier Ptrograd par Thodorovitch, mon camarade du Comit central de notre Parti, au congrs des employs et ouvriers deschemins de fer de Russie). Travail de critique ;explicationdes erreurs des partis petits-bourgeois, socialiste-rvolutionnaire et social-dmocrate ; prparation et groupement des lments d'un parti proltarienconscient,communiste ;affranchissement du proltariat de la griserie petite-bourgeoise gnrale .

    Cela semblen'tre simplement que de la propagande. C'est en ralit un travailrvolutionnairedes plus pratiques; car il n'est pas possible de faire progresser une rvolution qui s'est arrte, grise par la phrase et qui marque le pas ,non point causedes obstacles extrieurs,non point cause de la violenceexerce par la bourgeoisie (Goutchkov ne fait encore que menacer d'user de la violence contre la masse des soldats), mais causede la crdule inconscience des masses.

    Ce n'est qu'en combattant cette crdulit inconsciente (on ne peut et on ne doit la combattre que sur le terrain desides, par la persuasion fraternelle, par un rappel de l'exprience vcue),que nous pouvons nous dgager del'emprise de laphrase rvolutionnaire dchaneet stimuler rellement la conscience proltarienne, comme laconscience des masses, comme leur initiativelocale,audacieuse et dcide ; stimuler la ralisation spontane, ledveloppement et la consolidation des liberts, de la dmocratie, du principe de la possession de toutes les terres par le peuple tout entier.

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    8. Dans le monde entier, l'exprience des gouvernements de la bourgeoisie et des grands propritaires fonciers alabordeuxprocds pour maintenir le peuple dans l'oppression. D'abord la violence. Nicolas Romanov Ier Nicolas la Trique, et Nicolas II le Sanguinaire, ont montr au peuple russe le maximum de ce qui est possibleet impossible avec ce procd de tortionnaire. Mais il est un autre procd, pouss la perfection par la bourgeoisie anglaise et la bourgeoisie franaise, instruites par une srie de grandes rvolutions et demouvements rvolutionnaires des masses. C'est le mensonge, la flatterie, la phrase, les promesses sans nombre,

    les aumnes d'un sou, les concessions futiles, pour garder l'essentiel.Ce qui fait l'originalit du moment actuel en Russie, c'est le passage vertigineux du premier procd au second,de la violence exerce sur le peuple auxflatterieset aux promesses mensongres lui prodigues. Comme lechat de la fable5, Milioukov et Goutchkov coutent et n'en font qu' leur tte. Ils dtiennent le pouvoir, prservant les profits du Capital, font la guerre imprialiste dans l'intrt du capital russe et anglo-franais et se bornent rpondre avec des promesses, des dclamations, des phrases effet, aux discours des cuisiniers comme Tchkhidz, Tsrtli, Stklov, qui menacent, exhortent, conjurent, supplient, exigent, proclament... Lechat coute et n'en fait qu' sa tte.

    Or, la crdule inconscience et l'inconsciente crdulit s'en iront chaque jour davantage, principalement chez les proltaires et les paysanspauvres, qui la vie (leur situation conomique et sociale) apprend ne pas croire lescapitalistes.

    Les chefs de la petite bourgeoisie doivent enseigner au peuple la confiance en la bourgeoisie. Les proltairesdoivent lui enseigner la mfiance.

    LA DFENSE NATIONALE RVOLUTIONNAIRE ET SA SIGNIFICATION DE CLASSE

    9. Ladfense nationale rvolutionnairedoit tre considre comme la manifestation la plus srieuse, a plusclatante de la vague petite-bourgeoise qui a presque tout submerg. C'est elle le pire ennemi de la progression et du succs de la rvolution russe.

    Quiconque a cd sur ce point et n'a pas su se dgager, est perdu pour la rvolution. Mais les masses cdentautrement que les chefs ; et elles se dgagentautrement,par une autre voie de dveloppement, par d'autres procds.

    La dfense nationale rvolutionnaire est, d'une part, le fruit de la duperie des masses par la bourgeoisie, le fruitde la crdule inconscience des paysans et d'une partie des ouvriers ; d'autre part, elle est l'expression des intrtset de la mentalit du petit patron, intress jusqu' un certain point aux annexions et aux profits bancaires, pieux gardien des traditions du tsarisme qui a corrompu les Grands-Russes, dont il avait fait des bourreaux pour les autres peuples.

    La bourgeoisie trompe le peuple en spculant sur la noble fiert de la rvolution ; elle cherche faire croire quele caractrepolitique et social de la guerre s'est modifi pour la Russie depuis cette tape de la rvolution, du faitque la monarchie tsariste a t remplace par la quasi-rpublique de Goutchkov-Milioukov. Et le peuple a cru momentanment par suite surtout des prjugs de l'ancien temps, qui font ses yeux des autres nationalits de

    la Russie une sorte de proprit, d'apanage des Grands-Russes. Cette infme corruption du peuple grand-russe par le tsarisme, qui lui a appris considrer les autres peuples comme quelque chose d'infrieur, appartenant dedroit la Grande-Russie, ne pouvait se dissiper d'emble.

    Ce qu'il nous faut, s'estsavoir expliquer aux masses que le caractre politique et social de la guerre n'est pasdtermin par la bonne volont des individus et des groupes ou mme des peuples, mais par la situation o setrouve laclassequi fait la guerre, par lapolitiquede cette classe, politique dont la guerre est le prolongement, par lesrelations du Capital, force conomique dominante de la socit d'aujourd'hui, par lecaractreimprialistedu capital international, par la dpendance financire, bancaire, diplomatique de la Russie l'gard de l'Angleterre, de la France, etc. Savoir l'expliquer aux masses de faon intelligiblen'est pas chose facile,et nul d'entre nous n'aurait pu du premier coup s'acquitter de cette tche sans commettre d'erreurs.

    Mais l'orientation ou plus exactement le contenu de notre propagande doit tre celui-l, et celui-l seul. Lamoindre concession la dfense nationale rvolutionnaire est unetrahison du socialisme,l'abandon complet del'internationalisme,quelles que soient les belles phrases et les considrations pratiques dont on le justifie.

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    Le mot d'ordre A bas la guerre ! est videmment juste, mais il ne tient pas compte des tches particulires dumoment, de la ncessitd'aborder autrement les grandes masses. A mon avis, il ressemble au mot d'ordre A bas le tsar ! qu'un agitateur maladroit du bon vieux temps apportait tout bonnement au village... et se faisaitrosser. Les partisans de la dfense nationale rvolutionnaire dans les masses sont debonne foi,non point en tantqu'individus, mais au point de vue de classe, car ils appartiennent auxclasses(ouvriers et paysans pauvres) quin'ont rellement rien gagner aux annexions ni l'tranglement des autres peuples. Autre chose sont les

    bourgeois et MM. les intellectuels ; ceux-l savent fort bien qu'il estimpossiblede renoncer aux annexionssans renoncer la domination du Capital, et ils trompent cyniquement les masses avec de belles phrases, des promesses sans mesure, des assurances sans nombre.

    Les partisans de la dfense nationale dans les masses considrent la chose sans malice, en simples habitants : Je ne veux pas d'annexions, l'Allemandmetombe dessus, je dfends donc une cause juste et pas du (ont desintrts imprialistes. A ces gens-l il faut expliquer sans cesse qu'il ne s'agit pas de leurs dsirs personnels,mais des rapports et conditions politiques, de masse et declasse,du lien de la guerre avec les intrts du capitalet le rseau bancaire international, etc. Cette faon de combattre l'ide de la dfense nationale est la seulesrieuse et promet le succs, un succs qui ne sera peut-tre pas trs rapide, mais certain et durable.

    COMMENT PEUT-ON TERMINER LA GUERRE ?

    10. On ne peut terminer la guerre quand on veut . On ne peut pas la terminer sur dcision d'une des parties.On ne peut pas la terminer en fichant la baonnette en terre , pour employer l'expression d'un soldat partisande la dfense nationale.

    On ne peut pas terminer la guerre par une entente entre socialistes de divers pays, par une action des proltaires de tous les pays, par la volont des peuples, etc. Toutes les phrases de ce genre, qui foisonnentdans les articles des journaux de-fensistes, semi-dfensistes et semi-internationalistes, ainsi que dans lesinnombrables rsolutions, appels et manifestes, dans les rsolutions du Soviet des dputs ouvriers et soldats, nesont que souhaits bien intentionns, innocents et vains de petits bourgeois. Rien de plus nocif que ces phrases sur 1' affirmation [de la volont! de paix chez les peuples , sur letour de l'action rvolutionnaire du proltariat(aprs le proltariat russe, c'est le tour du proltariat allemand), etc. Tout cela, c'est du louis-blancisme6, dedoux rves, c'est jouer aux campagnes politiques , mais en fait c'est rpter la fable du chat et du cuisinier.

    La guerre n'est pas ne de la mauvaise volont des rapaces capitalistes, bien que, sans aucun doute, elle se fasseuniquement dans leur intrt et n'enrichisse qu'eux-mmes. Elle a t engendre par un demi-sicle dedveloppement du capitalisme mondial, par la multitude infinie de ses liens et de ses attaches. Il estimpossiblede s'arracher la guerre imprialiste,impossibled'obtenir une paix dmocratique, non impose par la violence,sans renverser le pouvoir du Capital, sans faire passer le pouvoir uneautreclasse, au proltariat.

    La rvolution russe de fvrier-mars 1917 a marqu le dbut de la transformation de la guerre imprialiste enguerre civile.

    Cette rvolution a fait lepremier pas vers la cessation de la guerre. Seul lesecond pas le passage du pouvoir au proltariat peut enassurer la cessation. Ce sera dans le monde entier le dbut de la rupture du front , dufront des intrts du Capital, et ce n'est qu'en rompantce front que le proltariatpeut soustraire l'humanit auxhorreurs de la guerre et lui dispenser les bienfaits d'une paix durable.

    Et c'est en crant les Soviets des dputs ouvriers que la rvolution russe adj amen le proltariat de Russietout prs de cette rupture du front du Capital.

    LE NOUVEAU TYPE D'TAT QUE CRE NOTRE RVOLUTION

    11. Les Soviets des dputs ouvriers, soldats, paysans et autres sont incompris non seulement en ce sens que la plupart des gens ne se font pas une ide nette de la porte sociale, du rle des Sovietsdans la rvolutionrusse.Ils ne sont pas compris non plus en tant que forme nouvelle, ou plus exactement en tant que nouveautype d'Etat.

    Le type le plus parfait, le plus volu d'Etat bourgeois, c'est larpublique dmocratique parlementaire :le pouvoir y appartient au Parlement ; la machine de l'Etat, l'appareil administratif sont ceux de toujours : arme permanente, police, bureaucratie pratiquement non rvocable, privilgie, placeau-dessusdu peuple.

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    Mais ds la fin du XIXe sicle, les poques rvolutionnaires offrent un typesuprieur d'Etat dmocratique, unEtat qui, selon l'expression d'Engels, cesse dj, sous certains rapports, d'tre un Etat, n'est plus un Etat au sens propre du terme . C'est l'Etat du type de la Commune de Paris : ilsubstitue la police et l'arme spares de lanation, l'armement direct et immdiat du peuple. L est l'essence de la Commune, vilipende et calomnie par lescrivains bourgeois, et laquelle, entre autres choses, on a attribu tort l'intention d' introduire immdiatement le socialisme.

    C'est prcisment un Etat de ce type que la rvolution russe acommencde crer en 1905 et en 1917. LaRpublique des Soviets des dputs ouvriers, soldats, paysans et autres, unis au sein d'une Assembleconstituante des reprsentants du peuple de Russie, ou dans un Conseil des Soviets, etc., voil ce quinat aujourd'hui, l'heure actuelle, sur l'initiative des masses innombrables du peuple qui cre spontanment ladmocratie, sa manire,sans attendre que MM. les professeurs cadets aient rdig leurs projets de loi pour unerpublique parlementaire bourgeoise, ni que les pdants et les routiniers de la social-dmocratie petite- bourgeoise, tels que M. Plkhanov ou Kautsky, aient renonc falsifier la doctrine marxiste de l'Etat.

    Le marxisme se distingue de l'anarchisme en ce qu'il reconnat lancessitde l'Etat et du pouvoir d'Etat pendantla priode rvolutionnaire en gnral, et pendant l'poque de transition du capitalisme au socialisme, en particulier. Le marxisme se distingue du social-dmocratisme petit-bourgeois, opportuniste de MM.Plkhanov, Kautsky et Cie, en ce qu'il reconnat la ncessit, pour ces priodes, d'un Etat quine soit pasunerpublique parlementaire bourgeoise ordinaire, mais tel que fut la Commune de Paris.

    Les principaux traits qui distinguent ce type d'Etat de l'ancien sont les suivants :

    Le retour est des plus faciles de la rpublique parlementaire bourgeoise la monarchie (l'histoire l'a prouv), toutl'appareil d'oppression demeurant intact : arme, police, bureaucratie. La Commune et les Soviets des dputsouvriers, soldats, paysans, etc.brisent et suppriment cet appareil.

    La rpublique parlementaire bourgeoise entrave, touffe la vie politique autonome desmasses,leur participationdirecte l'organisationdmocratiquede toute la vie de l'Etat, de bas en haut. Les Soviets des dputs ouvriers etsoldats font le contraire.

    Ils reproduisent le type d'Etat labor par la Commune de Paris, et que Marx a appel la forme politique enfintrouve opeut s'accomplir l'affranchissement conomique des travailleurs .

    On objecte d'ordinaire que le peuple russe n'est pas encore prpar pour l' instauration de la Commune. C'estl'argument des fodaux qui prtendaient que les paysans n'taient pas prpars pour la libert. La Commune,c'est--dire les Soviets des dputs ouvriers et paysans, n' instaure , n'a l'intention d' instaurer et ne doitinstaurer aucunetransformation avant que celle-ci ne soit venue pleine maturit, et dans la ralit conomique,et dans la conscience de l'immense majorit du peuple. Plus la dbcle conomique et la crise engendre par laguerre sont graves, et plus la ncessit s'impose d'une forme politique aussi parfaite que possible,facilitant lagurison des horribles blessures que la guerre a faites l'humanit. Moins le peuple russe a d'exprience enmatire d'organisation, et plus rsolument il fautentreprendrel' uvre d'organisationpar le peuple lui-mme,aulieu de l'abandonner aux seuls politiciens bourgeois et aux fonctionnaires pourvus de sincures lucratives .

    Plus tt nous aurons dpouill les vieux prjugs du pseudo-marxisme, du marxisme dnatur par MM.Plkhanov, Kautsky et consorts, plus nous mettrons de zle aider le peuple former ds aujourd'hui et partoutdes Soviets des dputs ouvriers et paysans, et prendre en maintoute la vie, plus longtemps MM. Lvov etconsorts reculeront la convocation de la Constituante, et plus il sera facile au peuple de faire son choix (par l'Assemble constituante ou sans elle, si Lvov ne la convoque pas de longtemps) en faveur de la Rpublique desSoviets des dputs ouvriers et paysans. Des erreurs sont invitables au dbut, quand le peuple lui-mmeorganise cette uvre d'dification nouvelle, mais mieux vaut commettre quelques erreurs et aller de l'avant qued'attendreque les professeurs en droit runis par M. Lvov aient rdig des lois sur la convocation de l'Assembleconstituante et la perptuation de la rpublique parlementaire bourgeoise, sur l'tranglement des Soviets desdputs ouvriers et paysans.

    Si nous nous organisons, et si nous savons faire notre propagande avec intelligence, non seulement les proltaires, mais les neuf diximes de la paysannerie seront contre le rtablissement de la police, contre la

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    bureaucratie non rvocable et privilgie, contre l'arme spare du peuple. Or, c'est en cela uniquement queconsiste le nouveau type d'Etat.

    12. Le remplacement de la police par une milice populaire est une rforme qui, dicte par toute la marche de larvolution, est en voie de ralisation dans la plupart des rgions de la Russie. Nous devons expliquer aux massesque dans la plupart des rvolutions bourgeoises du type ordinaire, cette rforme a t trs phmre, et que la bourgeoisie, mme la plus dmocratique et rpublicaine, a toujours rtabli la police du vieux type tsariste,spare du peuple, commande par des bourgeois et capable d'opprimer le peuple de toutes les manires.

    Pour empcher le rtablissement de la police, il n'est qu'un seul moyen : c'est de crer une milice populaire,fondue avec l'arme (armement gnral du peuple, la place de l'arme permanente). Feront partie de cettemilice tous les citoyens et citoyennes sans exception de 15 65 ans (s'il est permis, par ces limites d'geapproximatives, d'indiquer la participation des adolescents et des vieillards). Les capitalistes payeront auxouvriers salaris, aux domestiques, etc., les journes consacres au service civique dans la milice. Tant que lesfemmes ne seront pas appeles participer librement la vie politique en gnral, mais aussi s'acquitter d'unservice civique permanent et universel, il ne peut tre question de socialisme, ni mme d'une dmocratieintgrale et durable. Les fonctions de police, telles que l'assistance aux malades et aux enfants abandonns, lecontrle de l'alimentation, etc., ne peuvent en gnral tre assures de faon satisfaisante tant que les femmesn'auront pas obtenu l'galit non point nominale, mais effective.

    Empcher le rtablissement de la police, appliquer les capacits organisatrices du peuple entier la crationd'une milice dont le service est exerc par toute la population, voil les tches que le proltariat doit porter dansles masses pour la sauvegarde, l'affermissement et le dveloppement de la rvolution.

    PROGRAMMES AGRAIRE ET NATIONAL

    13. A l'heure actuelle nous ne pouvons savoir exactement si une puissante rvolution agraire va se dvelopper d'ici peu dans les campagnes russes. Nous ne pouvons savoir quelle est exactement la profondeur de ladiffrenciation de classe qui s'opre dans la paysannerie, et qui s'est coup sr accentue ces derniers temps, et la divise en ouvriers agricoles, saisonniers ou permanents, et paysans pauvres ( semi-proltaires ), d'une part, et paysans aiss et moyens (capitalistes grands et petits), de l'autre. L'exprience seule peut rsoudre etrsoudra ces questions.

    Mais notre devoir absolu, en tant que parti du proltariat, est non seulement de prsenter ds aujourd'hui un programme agraire, mais aussi de prconiser des mesures pratiques immdiatement ralisables, et commandes par l'intrt de la rvolution agraire paysanne en Russie.

    Nous devons exiger la nationalisation detoutesles terres dans le pays, c'est--dire leur remise en toute propritau pouvoir central. Ce dernier dterminera l'importance, etc. du fonds de migration, promulguera des lois pour la protection des forts et l'amendement des terres, etc. ; il interdira expressment toute mdiation entre le possesseur des terres l'Etat, et leur locataire le cultivateur (interdiction de toute sous-location de la terre).Par contre, ce sont lesSovietsrgionaux et locauxdes dputs paysans et nullement la bureaucratie, lesfonctionnaires quidisposeront,entirement et exclusivement, de la terre et fixeront lesconditions localesde possession et de jouissance.

    Afin d'amliorer la technique de la production de bl et d'augmenter celle-ci ; afin de dvelopper la grandeexploitation rationnelle et d'en assurer le contrle public, nous devons travailler, au sein des comits paysans, faire de tout grand domaine expropri une grande exploitation modle, place sous le contrle desSoviets desdputs salaris agricoles.

    Contrairement la phrase et la politique petites-bourgeoises qui rgnent chez les socialistes-rvolutionnaires etsurtout dans leurs bavardages sur la norme de consommation ou de travail , sur la socialisation de laterre , etc., le parti du proltariat doit s'attacher prouver que le systme de la petite exploitation, en rgime de production marchande,ne peut pasaffranchir l'humanit de la misre des masses, de leur oppression.

    Le parti du proltariat doit dmontrer, sans oprer immdiatement et obligatoirement la scission dans les Sovietsdes dputs paysans, la ncessit de Soviets distincts de dputs des salaris agricoles et de Soviets distincts dedputs des paysans pauvres (semi-proltaires), ou tout au moins de confrences permanentes des dputs

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    appartenant ces catgories sociales,confrences qui seraient organises sous la forme de fractions ou de partisdistincts au sein des Soviets communs des dputs paysans. Faute de quoi, la doucereuse phrasologie petite- bourgeoise des populistes sur la paysannerie en gnral ne fera que voiler la duperie de la masse non possdante par la paysannerie aise, simple varit decapitalistes.

    Contrairement la prdication librale bourgeoise ou purement bureaucratique laquelle se livrent nombre desocialistes-rvolutionnaires et de Soviets des dputs ouvriers et soldats, qui recommandent aux paysans de ne pas s'emparer des terres des grands propritaires fonciers et de ne pas entreprendre la rforme agraire avant laconvocation de l'Assemble constituante, le parti du proltariat doit appeler les paysans raliser immdiatement, et de leur propre autorit, la rforme agraire et procder, sur dcision des Soviets locaux desdputs paysans, la confiscation immdiate des terres appartenant aux grands propritaires fonciers.

    Ce faisant, il importe tout particulirement d'insister sur la ncessitd'augmenter la production de denresalimentaires pour les soldats du front et pour les villes, de souligner que tout prjudice, toute dtrioration du btail, des outils, machines, btiments, etc., etc. est absolument inadmissible.

    14. Dans la question nationale, le parti proltarien prconisera avant tout la proclamation et l'applicationimmdiate de la libert absolue de se sparer de la Russie, pour toutes les nations et nationalits opprimes par letsarisme et rattaches par la force ou maintenues par la force dans le cadre de l'Etat russe, c'est--dire annexes.

    Toutes les dclarations, proclamations et manifestes sur la renonciation aux annexions, non accompagns del'application effective de la libert de sparation, ne sont que mensonges bourgeois destins tromper le peuple,ou souhaits innocents de petits bourgeois.

    Le parti proltarien aspire la cration d'un Etat aussi vaste que possible, car tel est l'intrt des travailleurs ; ilaspire aurapprochement, la fusiondes nations, mais il veut atteindre ce but non par la violence, maisuniquement par l'union libre et fraternelle des masses d'ouvriers et de travailleurs de toutes les nations.

    Plus la Rpublique de Russie sera dmocratique, mieux elle s'organisera en Rpublique des Soviets des dputsouvriers et paysans, et plus puissante sera la force d'attraction qui porteralibrement vers elle les masseslaborieuses detoutesles nations.

    Entire libert de sparation, autonomie locale (et nationale) aussi large que possible, garanties minutieusementlabores des droits des minorits nationales, tel est le programme du proltariat rvolutionnaire.

    NATIONALISATION DES BANQUES ET DES SYNDICATS CAPITALISTES

    15. Le parti du proltariat ne peut en aucune faon se proposer d' introduire le socialisme dans un pays de petits paysans, tant que l'immense majorit de la population n'aura pas pris conscience de la ncessit d'unervolution socialiste. Mais seuls des sophistes bourgeois, qui s'abritent derrire des formules quasi-marxistes , peuvent dduire de cette vrit la justification d'une politique ajournant les mesures rvolutionnaires urgentes, parfaitement mres dans la pratique,ralises souventpendant la guerre par maints Etats bourgeois,etabsolument indispensables pour combattre la dsorganisation conomique totale et la famine imminentes.

    Des mesures comme la nationalisation du sol, de toutes les banques et de tous les syndicats capitalistes ou, dumoins, la subordinationimmdiatede ces tablissements aucontrledes Soviets des dputs ouvriers et autres,sans tre aucunement l' instauration du socialisme, doivent tre prconises absolument et ralises dans lamesure du possible par la voie rvolutionnaire. Sans ces mesures, parfaitement ralisables du point de vueconomique et qui ne reprsentent que les premiers pas vers le socialisme, il est impossible de gurir les blessures causes par la guerre et de prvenir la catastrophe imminente : quant reculer devant une atteinte aux profits exorbitants des capitalistes et des banquiers qui s'enrichissent de faon particulirement scandaleuse justement grce la guerre , le parti du proltariat rvolutionnaire ne le fera jamais.

    LA SITUATION DANS L'INTERNATIONALE SOCIALISTE

    16. Les obligations internationales de la classe ouvrire de Russie, aujourd'hui surtout, s'inscrivent avec force au premier plan.

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    On ne jure plus notre poque que par l'internationalisme. Jusqu'aux chauvins-dfensistes, jusqu' MM.Plkhanov et Potressov, jusqu' Krenski qui se disent internationalistes.

    D'autant plus imprieux est le devoir qu'a le parti du proltariat d'opposer, avec une clart, une prcision, unenettet parfaites, l'internationalisme en fait l'internationalisme en paroles.

    Appels platoniques aux ouvriers de tous les pays ; vaines assurances d'attachement l'internationalisme,tentatives directes ou indirectes d'tablir un tour pour l'action du proltariat rvolutionnaire dans les divers pays belligrants ; recherche laborieuse d'une entente entre les socialistes des pays belligrants proposde lalutte rvolutionnaire, organisation tapageuse de congrs socialistesen vued'une campagne pour la paix, etc., etc.: tout cela n'est, par sa valeur objective,si sincres que soient les protagonistes de ces ides, de ces tentatives, oude ces plans, tout cela n'est que verbiage ou, dans lemeilleur des cas, souhaits innocents et bien intentionns, propres uniquement voiler laduperiedes masses par les chauvins. Les social-chauvinsfranais,qui sont les plus habiles, les plus rompus aux filouteries parlementaires, ont depuis longtemps battu le record dans l'art de prononcer des phrases pacifistes et internationalistes infiniment grandiloquentes et sonores,tout en trahissantavec un cynisme inou le socialisme et l'Internationale,tout en faisant partie des ministres qui mnent la guerreimprialiste,tout en votant les crdits oules emprunts(comme Tchkhidz, Skoblev, Tsrtli, Stklov l'ontfait rcemment en Russie),tout en s'opposant la lutte rvolutionnaire dans leur propre pays,etc., etc.

    Les bonnes gens oublient souvent la cruaut et la frocit de la guerre imprialiste mondiale. Cette situation nesouffre pas la phrase, elle se moque des souhaits innocents et sucrs.

    Il n'est qu'un seul et unique internationalisme de fait : travailler avec abngation au dveloppement dumouvement rvolutionnaire et de la lutte rvolutionnairedans sonpays, soutenir (par la propagande, par lasympathie, par une aide matrielle)cette mme lutte,cette mme ligne etelle seule,dans tous les pays sansexception.

    Le reste n'est que mensonge et manilovisme7.

    Trois tendances se sont dessines dans le mouvement ouvrier et socialiste international, depuis plus de deux ansde guerre, danstousles pays. Quiconque s'carte du terrain de laralit,se refuse constater ces trois tendances, les analyser, lutter de faon consquente pour la tendance qui dfend l'internationalisme en fait, se condamne l'inertie, l'impuissance et l'erreur.

    Ces trois tendances sont les suivantes :

    1) Les social-chauvins, c'est--dire socialistes en paroles, chauvins en fait, gens qui admettent la dfense dela patrie dans la guerre imprialiste (et, avant tout, dans la guerre imprialiste actuelle).

    Ce sont nos adversaires declasse.Ils sont passs la bourgeoisie.

    Tels sont la plupart des chefs officiels de l'officielle social-dmocratie danstous les pays. MM. Plkhanov etconsorts en Russie, les Scheidemann en Allemagne ; Renaudel, Guesde, Sembat en France ; Bissolati et consortsen Italie ; Hyndman, les fabiens et les labouristes (chefs du parti travailliste ) en Angleterre ; Branting etconsorts en Sude ; Troelstra et son parti en Hollande ; Stauning et son parti au Danemark ; Victor Berger etautres dfenseurs de la patrie aux Etats-Unis, etc.

    2) La deuxime tendance est ce qu'on appelle le centre qui hsite entre les social-chauvins et lesinternationalistes en fait.

    Ceux du centre jurent leurs grands dieux qu'ils sont marxistes, internationalistes, qu'ils sont pour la paix, pour toutes pressions et revendications tendant obliger les gouvernements exprimer la volont de paix du peuple , pour toutes les campagnes possibles en faveur de la paix, pour la paix sans annexions, etc., etc.,et pour la paix avec les social-chauvins.Le centre est pour l' unit , le centre est adversaire de la scission.

    Le centre , c'est le rgne de la phrase petite-bourgeoise dbonnaire, de l'internationalisme en paroles, d'unopportunisme pusillanime et de la complaisance pour Ses social-chauvins en fait.

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    Le fond de la question, c'est que le centre n'est pas convaincu de la ncessit d'une rvolution contre son propre gouvernement ; il ne la prconise pas ; au lieu de mener une lutte rvolutionnaire dcide, il invente, pour s'y soustraire,les faux-fuyantsles plus plats, bien qu' rsonance archi- marxiste .

    Les social-chauvins sont nosadversaires de classe,ce sont desbourgeoisinstalls dans le mouvement ouvrier.Ils y reprsentent une couche, des groupes, des milieux ouvriersobjectivement achets par la bourgeoisie(meilleurs salaires, postes honorifiques, etc.), qui aidentleur bourgeoisie piller et trangler les peuples petitset faibles, faire la guerrepour le partage du butin capitaliste.

    Le centre , ce sont des hommes de routine, rongs par une lgalit pourrie, corrompus par l'atmosphre du parlementarisme, etc., des fonctionnaires habitus aux sincures et au travail de tout repos . Historiquement etconomiquement parlant, ils ne reprsentent pas une couche socialedistincte,ils reprsentent simplement latransitionentre une phase rvolue du mouvement ouvrier, celle de 1871-1914, fconde bien des gards, surtoutdans l'art ncessaire au proltariat de l'organisation lente, soutenue, mthodique une grande et trs grandechelle, et laphase nouvelle, devenueobjectivement ncessaire depuis la premire guerre imprialistemondiale, qui a inaugur l'rede la rvolution sociale.

    Le principal leader et reprsentant du centre est Karl Kautsky : il jouissait dans la IIe Internationale (1889-1914) de la plus haute autorit. Depuis aot 1914 il offre un exemple de reniement complet du marxisme, deveulerie inoue, d'hsitations et de trahisons lamentables. La tendance du centre , c'est Kautsky, Haase,Ledebour, ce qu'on appelle la ligue ouvrire ou la ligue du travail au Reichstag ; en France, Longuet,Pressemane et les minoritaires (les menchviks) en gnral ; en Angleterre, Philip Snowden, RamsayMacDonald et nombre d'autres leaders de l' Independent Labour Party et, partiellement, du Parti socialiste deGrande-Bretagne ; Morris Hilquitt et nombre d'autres aux Etats-Unis ; Turati, Trves, Modigliani, etc., en Italie ;Robert Grimm, etc. en Suisse ; Victor Adler et Cie en Autriche ; le parti du Comit d'organisation, Axelrod,Martov, Tchkhidz, Tsrtli et les autres, en Russie, etc.

    Sans doute, certains individus passent parfois, sans s'en rendre compte, de la position du social-chauvinisme celle du centre et vice versa. Cela se conoit. Tout marxiste sait que les classes demeurent distinctes, bienque des individus passent aisment d'une classe l'autre. De mme lestendancesdans la vie politique sedistinguent entre elles, bien que des individus passent aisment d'une tendance l'autre, malgr les tentatives et

    les efforts prodigus pour amener lafusionde ces tendances.3) La troisime tendance est celle des internationalistes en fait, reprsents le plus fidlement par la Gauche deZimmerwald 8 (nous reproduisons en annexe son manifeste de septembre 1915, afin que le lecteur puisse prendre connaissance, dans un document authentique, de la faon dont cette tendance est ne). Caractredistinctif essentiel : rupture complte et avec les social-chauvins, et avec le centre . Lutte rvolutionnaire outrance contresongouvernement imprialiste et sa bourgeoisie imprialiste. Principe : l'ennemi principal estdans notre propre pays . Guerre sans merci la phrase sucre des social-pacifistes (le social-pacifiste est unsocialiste en paroles, un pacifiste bourgeois en fait ; les pacifistes bourgeois rvent d'une paix ternellesansrenversement du joug et de la domination du capital) et auxfaux-fuyantsde toutes sortes tendant nier la possibilit, la ncessit ou l'opportunit de la lutte rvolutionnaire du proltariat et de la rvolution proltariennesocialiste,en liaisonavec la guerre actuelle.

    Les reprsentants les plus marquants de cette tendance sont : en Allemagne, le groupe Spartacus ou groupede l'Internationale , auquel appartient Karl Liebknecht. Karl Liebknecht est le reprsentant le plus notoire decette tendance et de lanouvelle,de la vritable Internationale proltarienne.

    Karl Liebknecht a appel les ouvriers et les soldats d'Allemagne tourner leurs armescontre leur gouvernement. Il l'a fait ouvertement, du haut de la tribune du Parlement (Reichstag). Puis, muni de proclamations clandestinement imprimes, il s'est rendu sur la place de Potsdam, l'une des plus vastes de Berlin, une manifestation, en lanant l'appel : A bas le gouvernement ! Arrt, il a t condamn auxtravaux forcs.Il est maintenant enferm dans un bagne, ainsi que descentainessinon des milliers devrais socialistesd'Allemagne emprisonns pour avoir lutt contre la guerre.

    Karl Liebknecht a men une lutte implacable dans ses discours et dans ses lettres, non seulement contre les

    Plkhanov et les Potressov dechez lui(les Scheidemann, les Legien, les David et Cie

    ), mais aussi contre leshommes du centre,contre les Tchkhidz, les Tsrtli de chez lui (Kautsky, Haase, Ledebour et Cie).

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    Karl Liebknecht et son ami Otto Ruhle ont, seuls sur cent dix dputs, rompu la discipline, bris l' unit avecle centre et les chauvins, ils ontmarch contre tous.Liebknechtseul reprsente le socialisme, la cause proltarienne, la rvolution proltarienne.Tout le restede la social-dmocratie allemande n'est, selon la justeexpression de Rosa Luxembourg (elle aussi membre et l'un des chefs du groupe Spartacus ), qu'uncadavre puant.

    Un autre groupe d'internationalistes en fait, en Allemagne, est celui du journalArbeiterpolitik de Brme.

    En France, Loriot et ses amis (Bourderon et Merxheim sont tombs au social-pacifisme) se rapprochent le plusdes internationalistes en fait, ainsi que le Franais Henri Guilbeaux qui publie Genve la revueDemain.EnAngleterre, le journalThe Trade-Unionist et certains membresdu Parti socialiste britannique et delIndependent Labour Party(William Russell, par exemple, qui a appel ouvertement rompre avec les chefstratres ausocialisme), le socialiste cossaisMacLean,instituteur condamn auxtravaux forcspar le gouvernement bourgeois anglais pour sa lutte rvolutionnaire contre la guerre. Des centaines de socialistes anglais sont en prison pour ces mmes crimes. Eux, et eux seuls, sont des internationalistesen fait.Aux Etats-Unis, ie PartiOuvrier Socialiste et ceux des lments du Parti Socialiste opportuniste qui publient depuis janvier 1917 le journalThe Internationalist ; en Hollande, le parti des tribunistes qui dite le journalDe Tribune(Pannekoek,Hermann Gorter, Wijnkoop, Henriette Roland-Holst), qui reprsenta le centre Zimmerwald et qui maintenantest venu nous ; en Sude, le parti des jeunes ou des gauches avec des leaders comme Lindhagen, Ture Nermann, Carlsson, Stroem, Z. Hooglund, qui prit part personnellement, Zimmerwald, la fondation de la gauche zimmerwaldienne et est actuellement condamn la prison pour sa lutte rvolutionnaire contre laguerre. Au Danemark, Trier et ses amis, qui ont quitt le parti social-dmocrate danois, devenu entirementbourgeois,avec leministreStauning sa tte ; en Bulgarie, les tesniaki ; en Italie, les plus proches sont lesecrtaire du parti Constantin Lazzari et Serrati, rdacteur en chef de l'organe centralAvanti!En Pologne, Radek,Hanecki et les autres leaders de la social-dmocratie groupe autour duKravo Pravlni; Rosa Luxembourg,Tyszka et les autres leaders de la social dmocratie groupe autour duGlavno Pravlni; en Suisse, ceux de lagauche qui ont rdig les considrants du rfrendum (de janvier 1917) pour la lutte contre les social-chauvins et le centre deleur pays et qui ont prsent au congrs socialiste du canton de Zurich, tenu le 11fvrier 1917 Toess, une motion inspire de principes rvolutionnaires et dirige contre la guerre ; en Autriche,les jeunes amis de gauche de Frdric Adler, dont plusieurs ont milit au clubKarl Marxde Vienne, aujourd'huiferm par le gouvernement ultraractionnaire d'Autriche, qui toiture Frdric Adler pour le coup de revolver hroque, quoique peu rflchi, qu'il a tir sur un ministre, etc., etc.

    Peu importent les nuances qui existent aussi entre ces gauches. L'essentiel est dans latendancegnrale. Lavrit c'est qu'il n'est pas facile d'tre internationaliste en fait, en cette poque d'horrible guerre imprialiste. Ceshommes ne sont pas nombreux, mais tout l'avenir du socialisme est eneux seuls; euxseulssont leschefs desmasses,et non leurs corrupteurs.

    Les distinctions entre rformistes et rvolutionnaires, parmi les social-dmocrates, parmi les socialistes engnral, devaient ncessairement se modifier dans les conditions de la guerre imprialiste. Quiconque secontente de prsenter des revendications aux gouvernements bourgeois pour qu'ils signent la paix ou expriment la volont de paix des peuples , etc., glisseen fait vers le rformisme.Car, objectivement,le problme de la guerrene se pose quesur le plan rvolutionnaire.

    On ne saurait se tirer de la guerre pour tablir une paix dmocratique non impose par la violence, pour affranchir les peuples de la servitude desmilliardsd'intrts payer messieurs les capitalistes qui se sontenrichis grce la guerre, on ne saurait en sortir autrement que par la rvolution du proltariat.

    On peut et l'on doit rclamer des gouvernements bourgeois les rformes les plus diverses ; mais on ne peut, sansverser dans le manilovisme et le rformisme, exiger de ces hommes et de ces classes enserrs par mille liens aucapital imprialiste, qu'ilsrompent ces liens. Or, sans cette rupture, tous les propos sur la guerre la guerre nesont que phrases vides et trompeuses.

    Les kautskistes , les centristes sont des rvolutionnaires en paroles, des rformistes en fait ; desinternationalistes en paroles, des auxiliaires du social-chauvinisme en fait.

    LA FAILLITE DE L'INTERNATIONALE DE ZIMMERWALD. IL FAUT FONDER LA IIIINTERNATIONALE

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    17. L'Internationale de Zimmerwald a adopt ds le dbut une attitude hsitante, kautskiste , centriste , etc'est ce qui a oblig aussitt lagauche zimmerwaldienne s'en dsolidariser, s'en sparer et lancer unmanifeste elle (imprim en Suisse en langues russe, allemande et franaise).

    Le principal dfaut de l'Internationale de Zimmerwald, la cause de safaillite(car elle a dj fait faillite sur leterrain idologique et politique), ce sont ses flottements, son indcision dans la question essentielle, quidterminepratiquementtoutes les autres :celle de la rupture totale avec le social-chauvinisme et la vieilleInternationale social-chauvine, dirige par Vandervelde et Huysmans la Haye (Hollande), etc.

    On ne sait pas encore chez nous que ce sont leskautskistes prcisment qui forment la majoritzimmerwaldienne. C'est pourtant un fait capital, dont il importe de tenir compte et que tout le monde connatmaintenant en Europe occidentale. Mme le chauvin, l'ultra-chauvin allemand Heilmann, directeur de l'archi-chauvineChemnitzer Zeitung et collaborateur de laClochearchi-chauvine de Parvus (videmment Heidmann est social-dmocrate et partisan effrn de l' unit de la social-dmocratie), a d reconnatre dans la presseque le centre ou le kautskisme et lamajorit zimmerwaldiennene font qu'un.

    La fin de 1916 et le dbut de 1917 ont tabli ce fait dfinitivement. Malgr la condamnation au social-pacifisme par le Manifeste de Kienthal9, toutela droite zimmerwaldienne,toutela majorit de Zimmerwald a gliss vers lesocial-pacifisme : Kautsky et Cie, dans une srie d'interventions de janvier fvrier 1917 ; Bourderon etMerrheim en France, en votant,unanimesavec les social-chauvins, les motions pacifistes du Parti socialiste(dcembre 1916) et de la Confdration Gnrale du Travail (c'est--dire de l'organisation nationale dessyndicats de France, galement en dcembre 1916) ; Turati et Cie en Italie, o le parti tout entier a adopt uneattitude social-pacifiste et o Turati lui-mme a gliss (pas par hasard, bien sr), jusqu' laisser tomber, dansson discours du 17 dcembre 1916, des phrasesnationalistesservant masquer la hideur de la guerreimprialiste.

    Le prsident de Zimmerwald et de Kienthal, Robert Grimm, a fait bloc, en janvier 1917, avec les social-chauvinsde sonparti (Greulich, Pflger, Gustav Mller, etc.)contreles internationalistes en fait.

    Au cours des deux confrences tenues par leszimmerwaldiensdes diffrents pays en janvier et fvrier 1917, ce jeu double et quivoque de la majorit zimmerwaldienne a t formellement stigmatis par les internationalistesde gauche de plusieurs pays : Mnzenberg, secrtaire de l'organisation internationale des Jeunes et directeur del'excellent journal internationalisteL'Internationale des Jeunes; Zinoviev, reprsentant du Comit central denotre Parti ; K. Radek, du parti social-dmocrate polonais(Kra-vo Pravlni); Harstein, social-dmocrateallemand, membre du groupe Spartacus .

    Au proltariat russe il a t beaucoup donn ; nulle part au monde la classe ouvrire n'a pu dployer autantd'nergie rvolutionnaire qu'en Russie. Mais qui il est beaucoup donn, il sera beaucoup demand.

    Il est impossible de tolrer davantage le marais de Zimmerwald. Il est impossible de rester plus longtemps, cause des kautskistes de Zimmerwald, en demi-liaison avec l'Internationale chauvine des Plkhanov et desScheidemann. Il faut rompre tout de suite avec cette Internationale. Il faut rester Zimmerwalduniquement auxfins d'information.

    C'est nous, et prcisment l'heure actuelle, qu'il appartient de fonder sans retard unenouvelleInternationale,rvolutionnaire, proltarienne, ou plutt de ne pas craindre de proclamer hautement qu'elle estdj fonde,etqu'elle agit.

    C'est l'Internationale des internationalistes en fait que j'ai soigneusement dnombrs plus haut. Eux, et euxseuls, sont les reprsentants des masses internationalistes rvolutionnaires, et non les corrupteurs de ces masses.

    Ces socialistes sont peu nombreux, niais que chaque ouvrier-russe se demande si, la veillede la rvolution defvrier-mars 1917, il y avait beaucoup de rvolutionnaires conscients en Russie.

    Ce n'est pas le nombre qui importe, mais l'expression fidle fies ides et de la politique du proltariatvritablement rvolutionnaire. L'essentiel n'est pas de proclamer l'internationalisme ; c'est de savoir tre,mme dans les temps les plus difficiles, ds internationalistes en fait.

  • 8/8/2019 Oeuvres Choisies - Tome II

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    Ne nous faisons pas d'illusions sur des ententes et congrs internationaux. Tant que dure la guerre imprialiste,les relations internationales sont enserres dans l'tau de fer de la dictature militaire bourgeoise et imprialiste. Simme le rpublicain Milioukov, contraint de tolrer le gouvernement accessoire qu'est le Soviet des dputsouvriers, n'apas laiss entrer en Russie, en avril 1917, le socialiste suisseFritz Platten,secrtaire du partiinternationaliste, participant de Zimmerwald et de Kienthal, bien que celui-ci ft mari une Russe et se rendtauprs de la parent de sa femme ; bien qu'il ait pris part, Riga, la rvolution de 1905, qu'il ait t enferm,

    pour ce fait, dans une prison russe ; bien que, pour tre largi, il ait vers au gouvernement tsariste une cautiondont il a rclam le remboursement, si le rpublicain Milioukov a puse comporter de la sorte en Russie,en avril 1917, on imagine ce que valent les promesses et assurances, les phrases et dclarations de la bourgeoisiesur la paix sans annexions, etc.

    Et l'arrestation de Trotski par le gouvernement anglais ? Et le refus de laisser Martov quitter la Suisse ? Etl'espoir de l'attirer en Angleterre, o l'attend le sort de Trotski ?

    Ne nous faisons pas d'illusions. Ne nous leurrons pas. Attendre des congrs internationaux ou confrences,c'esttrahir l'internationalisme, puisqu'il est dmontr que mme de Stockholm on ne l