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Lanabellia

Nerougispas

Saison3–Tome3

NishaEditions

Copyrightcouverture:BranislavOstojicISBN978-2-37413-455-0

Havefun!

@NishaEditions

NishaEditions

NishaÉditions&Lanabellia

NishaEditions

www.nishaeditions.com

TABLEDESMATIERES

Présentation1.Undoubleparfait2.Laplusbelledesétoiles3.Aurevoirespoir4.Jusqu’àcequelavienoussépareÀparaîtreExtraits

Parcequelemonden’étaitdifférentqu’àtraverstesyeux.

Undoubleparfait

«Regardesonvisage,regardesonâme,c’esttondouble,unecopiepresqueconforme,commeuntoidesubstitution.»Inconnu

ROSE

Lieuinconnu,lundi28août,3h25

Jen’enmènepaslargesurlesiègepassagerdelavoituredeChad.Jelesurveilleducoindel’œil.Iln’estpasvraimentbavard,cequin’arrangepasmonétat.Etlegrandblondàl’arrièretapotefurieusementsurtontéléphone,cequim’irriteencoreplus.

MonCompliquéarecommencé!Ils’estencoreenfuietm’aplantée.

Commeavant…

Ilabeauchanger,seshabitudesreviennentaugalopdèsqu’onledéstabilise.Résultat:jesuismorted’inquiétudeparcequejenesaisnicequ’ilsepasse,nioùilestparti.

C’estquandmêmedinguequ’ilréagisseàchaquefoisaussibrutalement.Qu’ilm’écartedetout.Etenplus,çanesertàriendetenterdel’appeleroumêmedeluienvoyerdesmessages:ilnerépondrapas.Gabrielvasecouperdetoutetjen’aiplusqu’àmerongerlessangsjusqu’àcequ’ildaignemedonnersignedevie.

–Tetracassepas.

Oh,miracle!Legrandbaraquéparle!

–Ilyadequoi.Ilsecomportecommeunabruti!

Jesuishorsdemoietmesensrejetée.Encore.

–S’ilnet’apasemmenée,c’estqu’ilasesraisons.–Oui,maisilpourraitaumoinss’expliquer!

Chadmejetteuncoupd’œilavecunsourireflippant.Latêtedenotrevoisindederrièreapparaîtentrenousdeux.

–ConnaissantGab,c’estjusteunplancul.Ilreviendra,mabelle!

Mabelle?Unplancul ? Jevais lui arracher lesyeuxàcelui-là !Chad se retournebrusquementetattrapenotrepassagerpar lecoldu tee-shirt.Ohbordel !Jemeretiensaprèsmaportièrealorsque lavoiturefaituneembardéesurlavoiedegauche.

–Jeteconseilledelafermeroudanscinqminutes,tujouerasauxosseletsavectesdents!–Regardelaroute,tuvasnousfoutredanslefossé!Etpaslapeinedet’énervercommeça!C’estpas

lareined’Angleterre,cettenana!

Jemeratatinesurmonsiège.Ilsontungraincesgars…Qu’est-cequeGabrielficheaveceux?Jen’aiqu’unehâte : rentrer.Même si c’est un appartement vide quim’attend, jeme sentirai toujours plus ensûretéquedanscettevoiture.J’écarquillelesyeuxetpanique:mesclefs!Oùsont-elles?Monsacestrestédans lavoiture…Jefouilleprécipitammentmespochesetunsoupirdesoulagementm’échappe :ellessontdansmavesteavecmontéléphone.

Chadetsoncomparsemedéposentdevantl’immeuble.Jelessaluerapidement.Jen’aipasvraimentl’intentiondejouerlesprolongationsaveceux.Ilsm’observentjusqu’àcequej’aiefranchil’entréedelacaged’escaliers.Jegrimpeàtoutevitesse,maismefigeàlavuedeCamerontambourinantàlaportedemonancienappartement.Jereculededeuxpaspourmeplanquerlorsquelescrisd’Auderetentissent.

–Dégage!Jeneveuxplustevoir,espècedeconnard!–Ouvre,mapuce.Jesaisquej’aimerdé.Jemesuisemportétoutàl’heure.Jenepensaispascequeje

t’aidit.Onvaendiscuter,maislaisse-moientrer,s’ilteplaît.

JeresteimmobileenobservantCameron,désespéré,unemainsurlanuque.J’aimeraisaider,maisjerestesansvoixdevantcettesituation.Çamedépassecomplètement…

–Iln’yapasàdiscuter!J’auraiscetenfant!Avecousanstoi!Pointfinal!–Alorsceseraavecmoi…Ouvre,mapuce…

Laportes’ouvreetils’engouffreimmédiatementàl’intérieur.J’aienviedecrierdejoie!Finalement,mameilleureamieaeupeurpourrien…MaisjemedemandepourquoielleamisCamerondehors!

Jecontinuemonascensionetrentreàlamaison,soulagéed’êtreenfinentrelesmursdecetappartement.P’titgarsm’accueilleenrâlant.J’ail’impressionquecettebouledepoilsn’estcontentequequandGabrielestlà…Unpeucommemoiaufinal.Jeviremeschaussuresetenlèvemonslimquej’abandonneaumilieudusalon.Jesuisheureusepourmonamie.J’aibienl’impressionquetouts’estarrangépourelle.Mieux,soncoupleavanceetseconcrétiseavecunenfant…AlorsqueGabrieletmoi…Noustournonsenrondetrevenonstoujoursaupointdedépart.Jesoupire.Jeraconten’importequoi…Jesaisquenousavançons,queleschosesévoluentpournous,maiscequinousattendm’effraieetsoncomportementdecesoirnecalmepasmonappréhension.J’aitellementpeurqu’ilm’abandonneencoreunefois,qu’ilpaniqueetsesauve.Qu’ilmerepousse…

Arrêteavecça,Rose!Ilrentrera!

Jemebousculementalementpourfaireabstractiondesidéesquitenteencoreunefoisdepicorermonespritetjemontemedoucher.Lafatigueestbienprésente.Jem’endormiraiseule,maisdemain,ilserasûrement àmes côtés au réveil. Jemetsmon portable en charge, me glisse dans les draps et fixe leplafondenattendantquelesbrasdeMorphéem’emportent…

***

Lepetit jourapointésonnezdepuisunmomentet j’ai trèsmaldormi.Jesuisdégoûtéeet inquiète:Gabrieln’estpasrentré.Jetournedanslelitententantdésespérémentdemerendormirpourqueletempspasseplusvite,envain.J’essaiedenepasangoisseràl’idéequ’illuisoitarrivéquelquechose,maisjen’yparvienspas. J’attrapemonportable et l’allumeen tremblant : il vibre aussitôt sansdiscontinuité,signeque j’aimanquéun tasdemessages…Je les lis lesunsaprès lesautres :Aude,AudeetencoreAude.MonCompliquéestauxabonnésabsentscommejelecraignais.Jesoupire.Jerelislestextosdemonamie.Uncoupelleestpaniquée,uncoupencolère,uncoupellemesuppliederépondre…Jem’enveuxdenepasavoirétéprésente.Terriblement.Jeneparvienspasàgérerlesdeuxcôtésdemavie.Jesaisqu’Audeatoujoursétélàpourmoi,maisGabrielm’accaparetotalement.Jen’arrivepasàpenseràautrechose…Il fautque jemecalme.Monamievabien.Lascèneà laquelle j’aiassistécettenuit leprouve.Ilsontdûparler,Cameronetelle,ettoutvapourlemieuxmaintenant.JemerisqueàluienvoyerquandmêmeunpetitSMS.

Jedénicheuntee-shirtdemonCompliquéetl’enfilepourdescendreàlacuisine.Ilestdéjàmidi,cequin’arrangeenrienmoninquiétude.

Penseàautrechose!

Labouledepoilsmiauledevantsagamelle,réclamantqu’ons’occupedelui.Leproblème:jenesaismême pas où sont rangées ses croquettes. Je fouille partout, les découvre enfin sous l’évier. Le chatnourri et apparemment content, jepréparemon théhabituel etm’installe sur le canapé. Je le sirote enobservant nos cartons toujours empilés près de la porte d’entrée. Et si je les rangeais ? Ce serait unmoyendem’occuperetaupassagemontrerquejesuiscapabled’initiatives.

Jesuisplutôtperformante.Enàpeineunedemi-heure,toutesmesaffairessontrangéesetjedétaillecequireste:cellesdeGabriel.Est-cequeçaledérangeraitquejem’enoccupe?Ilrangelesmiennesaprèstout.Alorspourquoipaslecontraire.

Lepremiercartonquej’ouvremesidère:destasdemagasinesavecdesphotosdeluiencouverture.Lapresseàscandale…Jeplisselesyeux.Putain,maisc’estmoi!Ilyadesphotosdenousdeuxprisesàlavolée.Pourquoinesuis-jepasaucourant?Pourquoin’ai-je jamais remarqué lesphotographes?EtValentin!Ilestforcémentaucourantpuisqu’iladorecesjournaux…Etils’esttu,luiaussi…UnaccordavecmonCompliqué?

Netemêlepasdeça,Rose!Gabrielsaittrèsbiencequ’ilfait.

Je referme rapidement. Comment s’arrange-t-il pour gérer autant de choses sans que je n’en sacherien?Voirmonvisagedanscesjournauxmeperturbe.Noussommesépiéscommedesbêtescurieuses.Maisdansunsens,touteslesfemmesdecetteplanètesaventàprésentqu’iln’estplusuncœuràprendre.Jesouris.Est-cequ’ilvaannoncernotremariageoutenterdeledissimuler?Jerestedubitativefaceàmapropreinterrogation.Dansunsens,j’aimeraisquecesoitofficielauxyeuxdetousetd’unautrecôté,jeme demande si ce n’est pas risqué vu que j’attirerais sans doute les foudres de ses admiratrices. Jegrimace,danstouslescas,ilfaudrabiens’yhabituer:c’estcomprisdanslepackage«GabrielAlcott».

J’attaqueuncartondevêtementsetlerangedansledressing.Saufquel’enviedeliretouslesarticlesleconcernantmetaraude.

Soisraisonnable,lacuriositéneteréussitpas!

Jeredescendsetobservecettesatanéeboîteducoindel’œil.

AppelleValentin!

Il saura commentm’occuper l’esprit pour chasser toutes lesmauvaises idées qui germent dansmoncrâneaufuretàmesurequelajournéeavance.Quelqu’unfrappeàlaporteaumêmeinstant.Moncœurs’affole:c’estsûrementGabriel!Maisnon,qu’est-cequejeraconte.Ilnefrapperaitpaspuisqu’ilasesclefs!Jedeviensparano.J’ouvreetmonmeilleuramifaitirruptiondansleduplex,unsacénormedanslamain.

–Salutmapoupée!

Il tombevraimentbien, lui.Jen’aimêmepas le tempsderéagirqu’ilmetraînesur lecanapéetmepousseàm’asseoir.J’écarquille lesyeux,necomprenantpascequi luiarrive.Ilsemblecomplètementsurexcité.

–Alorsjevaiscommencerparquelquesquestions.Lesfleurs.Tuaimeraisquoi?Etpourlerepas,unbuffetouunserviceensalle?Lesgâteaux :unepiècemontéeouunemultitudedevariétés?Tuas tarobe?EtGabriel,ilaurauncostumeassortioupas?Et…

MonDieu!C’estquoitoutescesquestions?

–Stop!

Ilvientdemeretournerlecerveauendeuxminutesàmebombardercommeça.

–Rose,ledélaiestcourt!Alors,OK,jenemeplainspas,maisilfauts’ymettretoutdesuite.–Maisje…euh…Jen’ensaisrien…IlfaudraitdemanderàGabriel.

Monmeilleuramilèvelesyeuxauciel,exaspéré.Ils’empressedesortiruntasdemagazines,cherchedansl’und’entreeuxetmefourreunepagesouslenez.

J’observeavecattentionlamagnifiquerobeblancheprésentéeetrateunbattementdecœur.Jeréalisequecettefois,c’estréel.Jevaismemarier…C’est juste incroyable…Ilyaencorequelquesmois, jen’étaisrien,justeuneombredemoi-mêmepoursuivieparunexeffrayant.Jenepensaispasqu’unechosepareillepuissem’arriver,àmoi,Rose…etencoremoinsaussivite!Etpasavecn’importequi!Jem’enficheroyalementdesanotoriété.Gabrieln’estpaslemecbanal,pasceluiqu’oncroiseàtouslescoinsderues.Ilesttellementdifférent.

Lavache,jevaismemarier!

C’estunpeueffrayant…Dansmoncerveau,çasebouscule.Untasdequestionsbataillentpouravoiruneréponse…Etmoncompliquéquin’estpaslà.Jecommenceàpaniquer.Ilfautorganisertellementdechoses…

–Rose,tumeréponds?

Jedétailleunenouvellefoisl’imageetàlavueduprix,jepâlis.

–Jepensaismettremarobeblanche.

Valentinvireauvertetseredressed’uncoup.

–Non,maisn’ypensemêmepas!Tuesdingueouquoi?Enplus,silapresses’enmêle,tut’imaginesàlaunedesmagazinesenrobedevillealorsquetuépousesundesplusbeauxmecsdecetteplanète?Action/réaction,Rose!

Ilagitesonbouquindanstouslessensetjemeratatinesurlecanapé.

–Moinscheralors.

Ilsouffleunboncoup.

–Mabeauté.Les robesdemariés sont onéreuses, ce n’est pas unenouveauté ! Je veuxque tu soismagnifique!Etpuistonmecestblindédetunes,tupeuxtouttepermettre.–Je…non.Lemoinscherpossible.

Lemagazinem’arriveenpleineface.

–OùestGabriel?Jevaism’organiseravecluiparcequefranchement,toi,tuesirrécupérable!Etpuissiondoitréserver,c’estaujourd’hui!–Jenesaispas…

Ils’arrêtenetetmefixe.Monnœudàl’estomacseresserrebrutalement.

–Commentça,tunesaispas?

Jehausselesépaules.Ilestquinzeheuresetjen’aitoujoursaucunenouvelle…Monmeilleuramiserassiedetpassesonbrasautourdemesépaules.

–Pourquoitum’asriendit?Vousvousêtesprislatête?–Non,pasdutout.Ilestparticettenuitaprèsunappeletdepuis,plusrien.

Jeposematêtecontrelui.J’aitellementpeurqu’ilsoitarrivéquelquechoseàGabriel…Cen’estpasnormalqu’ilnesoittoujourspasrentré.

–Tuastentédel’appeler?

Je réponds par la négative. Il s’empare demon téléphone et cherche déjà dans le répertoire. Je lepréviendraisbienquecen’estpaslapeine,qu’ilperdsontemps,maisilesttêtu.Autantqu’ils’enrendecompteparlui-même.

–Messagerie.Jesuisdésolé,poupée.

Jehausselesépaules,cen’estpasunesurprisepourmoi.

–Écoute-moi,Rose.Teprendspas la tête.Penchons-noussur lesmagazinespourbouclerdeux-troistrucspourlemariage.Etenplus,çat’occuperal’esprit.

Jemefaisviolenceetenattrapeunauhasard.Ilaraison.

***

GABRIEL

Surlaroute,lundi28août,2h55

Jerouleendirectiondelamaisonfamiliale.Mavoitureavaleleskilomètresàgrandevitesse.Jen’aipastoutsaisidel’appeldemonfrère,maislasituationparaîturgente.Lesbruitsdevaissellebriséeetlescrisdedisputequej’aientendusderrièreluinemerassurentpas.Jesuisrodéàcetyped’esclandre.J’ail’habitudederamassermamèreenpiteuxétat…Maisj’aiégalementl’impressionaufonddemoiquelacrisedecesoirestbienplusviolentequetoutcequej’aiconnu.Jedoisinterveniretvite.Joshparaissaitcomplètementdépasséparlesévénements.J’aibiencomprisquesoncoupdetéléphoneétaitàlalimitedel’appelausecours.

Il est impensable que Rose assiste à ce spectacle, à la décadence de ma famille. Je souhaite lapréserver.Elleaétébercéeparlamort,laviolenceetdemauvaisespersonnesontabuséd’elle…Ellen’apasbesoindesubirenplusladépravationdesmiens.

Je ralentis, attrape le paquet de clopes dans la boîte à gants et en allume une avant d’accélérer ànouveau.La routedéfiledevantmesyeuxaussi rapidementque la froideur reprendpossessiondemoncorps.Monespritpréparesesarmesets’apprêteàaffronterceluiquidoitencoreêtrel’acteurprincipaldelascènedramatiquequisejouecesoir:monconnarddepaternel.

Ma migraine revient au galop, emprisonnant mon cerveau dans une douleur subtilement dosée quirisquedemefaireperdrelespédalesplusrapidementqu’àl’accoutumée.Jemegareàl’arrachedevantlademeuredemonenfanceetsorsentrombe.Jemediriged’unpasvifverslaporte.Jen’aipasletempsd’attraperlapoignéequemonfrèreapparaîtdevantmoi,blanccommeunlinge.

–Mamanluiatoutavoué.

Quoi?

–Qu’est-cequemamanaavoué?–Pourtoi.Elleluiaabsolumenttoutraconté.

Monsangsefige.Jeserrelespoings.Jetranspercemonfrèred’unseulregardetilreculeaussitôtde

deuxpas.J’aiunefamillededégénérés!

Je lebousculeenpénétrantdans lecouloiret foncedans le séjouravantdemestatufier.Mapauvremèreestensanglots,tremblante,tentantderamasserlesmorceauxdeporcelaineetdeverrejonchantlesol. Je balaie la pièce du regard.Rien n’a été épargné, lesmeubles sont vides et les décorations onttotalementdisparues.Jetentedecontrôlermesnerfsetenjambelecapharnaümpourrejoindremamère.Jelaforceàserelever.Elleessuiesesjouestrempéesdelarmesettentedemesourire.

–Gabriel…–Laissetoutça,jem’enoccuperai.

Jeretirecequ’elletientdanssesmains.Elletenteaussitôtdes’accrocheràmoi,maisjerecule.

Désolé,maman…Jen’ensuispascapable…

–Josh.Emmène-laenhautetdonne-luiquelquechosepourdormir.

Pasbesoindemeretournerpoursavoirqu’ilestlà,debout,entraind’observerlascène.Sesbruitsdepascraquentsurlesdébris.Jelelaisselaconduiresansunmothorsdelapièce.Mevoilàseul.

J’analyselecarnage.Ilyamêmeunetraînéedesangsurlabaievitrée.Lepaternelalittéralementpétélesplombs!Oùestpasséceconnard,d’ailleurs?Mettrelamaisondanscetétatpourunfilsdontiln’ena jamais rien eu à foutre est complètement incompréhensible. Je suppose que c’est plus son egosurdimensionnéquienaprisuncoup.Apprendrequetoutlemondeluiamentipendanttantd’annéesestcertainementdifficileàavaler.Ilestbientropfier,cetenfoiré!Cettefois,ilestallétroploin.Jerageintérieurement. Ma mère n’est pas capable de le virer alors je m’en chargerai moi-même ! Rien nem’arrêtera.Ildoitsortirdenosvies!

J’arpentelespiècesdel’immensedemeureuneparunepourtenterdeledébusquer,maisjemerendsàl’évidence:iln’estplusici.Trèsbien,jel’attends.

Jeretourneàlavoiturerécupérermescigarettes.J’ail’impressionquemavuemejouedestours:lesimagesdevantmesyeuxdérapentetsebrouillentparmoment,commeunvieuxfilmqu’onatropregardé.Il est impératif que jeme calme et reprenne le contrôle. J’allume une clope,marche un peu pourmedétendreetrentre.

J’attrapeun rouleaudesacspoubelledans lacuisineetm’attaqueaucarnage. Jemeconcentrepouréviterdecogiter.Mamèren’apasbesoindesubirmonimpulsivitéenplusdecelledelapourriturequipartagesavie.

Contrôle-toi!

Aumoinsjusqu’àcequ’ilsepointe!

–Gabriel.Toncalmenem’inspireriendebon.

JenerépondspasàJosh.Jeneluiprêtemêmepasattention.Jecontinuejustederamasser.Ils’empared’unsacetattaqueparl’autreboutdelapièce.Bientôt,lesdétrituss’empilentdansl’entrée.

–Tusais,Gabriel,jepense…–Rienàfoutredecequetupenses!

Commeàsonhabitude,monjumeaualesépaulesquis’affaissentdevantmontonsec.Aucuncourage.Quelquesfois,j’auraisaiméqu’ilserebelleplus,limitequ’ilmefouteunebonnedroitepourmeremettrelesidéesenplace,maisnon.Çanousestarrivédenousbattre,maisc’esttoujoursmoiquiailancéleshostilités.Leseuljouroùilaeuunpeudecourage,c’étaitpourRose,danslaforêt.MaRose…

Ilestcommemamère,aufinal:ilencaisseetfermesagueule.Unbongarçon,lepetitenfantmodèle,toujourspolietquin’enfreintjamaislesrègles.Luietmoisommescommelejouretlanuit.

–Gabriel.–Laferme!

Je n’ai vraiment pas besoin qu’il tente de défendre son père chéri. Je sais que s’il commence, jepartiraidansunecolèrenoireetçase termineraobligatoirementmal.Trèsmal.Jepréfèrecontenirmaragepourlalaisserexploseraumomentvenu.JedéposeunautresacsurletasetmeretourneversJosh.

–Montetecoucheretlâche-moi.–Jepréfèreresteravectoi.Jesaistrèsbienquetuvasl’attendreetçanemerassurepas.

Jemelaissetombersurunechaise,m’accoudeàlatableetletoise.

–Qu’est-cequ’ilya?Tuaspeurquejedéfoncelatronchedetonpèreadoré?

Montonironiquevireaucinglant.J’allumeuneautreclopeenattendantqu’iltrouvequoirépondre.

–Tusaisqu’onn’apasledroitdefumerici.

Fabuleuse,cetteréponse!

–Nechangepasdesujet!

Ahtient,iltentedesoutenirmonregard.Maisilseveutfuyantlasecondesuivante.

–Gabriel,c’estjustequetu…enfin…tu…–Quejevaiscrever,dis-le!Jesuisdéjàaucourant.Paslapeinedeprendredesgantsavecmoi.

Ilnevapassemettreàchialer,quandmême?Ils’assoielourdementenfacedemoi.

–Tun’aimeraispasarrangerleschosesaveclui?Jeteprometsqu’ilétaitbouleversé.

Blablabla…Conneries!

–Regarde-moibien,Josh.

J’attendsqu’ilmefixeavecsonairangoissé.

–Jamais!Tuenregistresbien,j’espère?Jamais.

J’écrasemacigarettesurlatable.Ilmefixe,lesyeuxarrondisdesurprise.Vulescoupsqu’elles’estramasséeonn’estplusàçaprêt.Joshseredressed’unseulcoup.

–Etavecmoi,c’estquoileproblème?

Jemelèvetranquillement,fouilledanslebar,sorsdeuxverresetlabouteilledewhisky.Ilfautquejefassetaireladouleurlancinantedansmacervelle.

–Posetavéritablequestion,Josh.

Jeme rassieds, nous verse une double dose chacun. Il grimace l’espace d’un instant et attrape sonverre.

–Pourquoitunepeuxpasm’encadrer?

J’avalemonverreculsecetmeressers.

–Jenesuispasunsentimental.–Foutaises!Cesonttessentimentsquitepoussentàdétesterpapa.Etcesontaussitessentimentsqui

t’ontpermisdet’ouvriràRose.

Jel’observeboireduboutdes lèvresetprendreunemicrogorgée.Ilgrimacecommesionluiavaitarrachéunedent.Jecroisquec’estlemomentdepasserauxchosessérieuses…J’avalemondeuxièmeverred’untrait.Lasuiteneserapasfacilepourmoi,maiselleestnécessaire,indispensable.Jepatienteletempsqu’ilseremettedesadeuxièmegorgéeetlefixedroitdanslesyeux.

–Est-cequetuaimesRose?

Ilsepétrifiesursachaise.

–Je…Euh…Non,elleestavectoi.Maispourquoitumedemandesuntrucpareil?

Jemeretiensetparlelepluscalmementpossible.J’aibesoinqu’ilparle.L’insulterneseraitpastrèsutile.

–Tuveuxavoiruneconversation,alorslavoilà.Maintenant,répondsfranchementetsansdétour.

Ilestmalàl’aiseetneparvientpasàmeregarderdroitdanslesyeux.Ilseressaisitd’unseulcoup.

–Situsouhaiteslavérité,jevaisteladonner.Oui,j’aimeRose.

Jenesuispasréellementsurpris.Jedevraisêtresatisfaitd’avoireularéponsequejedésirais,maisbordel, ça me fait chier quand même ! Je me ressers un whisky et allume une énième clope pourm’occuperlesmains.

–Tuseraisprêtàquoipourelle?

Jeserrelesdents.Unplis’installesursonfront.

–Oùtuveuxenvenir,Gabriel?

Jetireunelatteetlasouffletranquillement.

–Jeveuxque tuabandonnes tesprojets, que tu sois là, à chaqueminute, à chaque seconde.Rose abesoin qu’on veille sur elle. Et moi, j’ai besoin de savoir qu’il y aura quelqu’un après moi. Et cequelqu’un,c’esttoi.

Il a viré au blanc. Les minutes s’égrainent et je reste muet. J’attends qu’il assimile ce que je luidemandeetqu’ilréagisse.Sespupillessontrivéessurlatable.Lesilencenemedérangepas,maissonmanquederéactionscommenceàmegaver.

Jeremplisunenouvellefoissonverre.Ill’envisageuninstant,l’attrapeetl’ingurgiteàmoitié.Iln’apaseulecrandel’avalerenentier,maisilyaduprogrès.Ilpeineàseremettreetaviréaurouge.

–Gabriel,cequetumedemandesestinsensé.Ilyadeschancespourquetune…

Jelèvelesyeuxauciel.Ilestconouquoi?

–Bon,çasuffitlesniaiseries!Jevaiscrever,pointbarre.Maintenant,onpasseàlasuite!

Jeperdspatience.Jedétestecetteconversation,jedétestemonaveniretjedétesteencorepluscequejem’apprêteàfaire…Lepèred’Ilanm’apousséàouvrirlesyeux.Ils’estsacrifiépourlebonheurdesafemme.Alorssij’aienviequequelqu’unsoitlàpourRose,qu’ellemeremplace,autantquejechoisissemoi-même.Quejesoiscertainquecenesoitpasledernierdesconnardsquimesuccédera.Joshestlecandidatparfaitetlaressemblancefaciliteragrandementleschoses.

–Qu’est-cequetuattendsdemoiexactement?– J’attends de toi que tu passes du temps avec Rose. Que tu crées des liens avec elle le plus tôt

possible.

Ilsemblecomplètementincréduleetglissenerveusementsamainsursanuque.

–Est-cequetutefousdemoipourmetester?

Uneoncedesourires’installesurmeslèvres.

–Te tester dansquel but ? Je savais déjà ceque tu ressentais. Je sais égalementque tune tenterasjamaisquoiquecesoittantquejesuisavecelle.Maintenant,cequejeveuxestdifférent.

J’attrapel’enveloppequejegardaisprécieusementdansmaveste.Mamaintrembleimperceptiblementetsecrispesurlepapier.Jemarqueuntempsd’arrêtavantdel’extraire.Jeladéposesurleboisetlaglissejusqu’àlui.Ill’observe.

–Toutcequetuasàsavoirestlà-dedans.–Toutquoi,Gabriel?

Lemoteur d’une voitureme pousse à tendre l’oreille. Jeme redresse aussi sec. J’appuiemes deuxpaumessurlatableetfixemonfrèredroitdanslesyeux.

–Jeseraistoi,jeneresteraispasici.

***

ROSE

Appartementducouple,lundi28août,17h12

Valentinm’affole.Ilaétalédesbrochuresabsolumentpartoutautourdemoi.Jenesaisplusoùportermonattention.Jenesaispastropsic’estcorrectdechoisirsansGabriel,maisàl’heurequ’ilest,j’avouequemeconcentrerlà-dessusmepermetderefoulerquelquepeumonangoisse.Jesurveilletoutdemêmemontéléphoneducoindel’œil,aucasoù.

–Poupée,cetterobeestvraimentmagnifique.Jesuiscertainquetuseraisdivine.

J’attrape le magazine que Valentin me tend. Je les trouve toutes belles. Je suis incapable de medécider…Jelèveunregardsuppliantversmonmeilleurami.

–Arrêtedemeregardercommeça!C’estàtoidechoisir.C’esttonmariage,Rose!

J’aibeaumeconcentrersurlepapierglacé,toutcequejevois,c’estlevisagedeGabriel…

AllezRose,secoue-toi!

–Onpeutl’essayer,cetterobe?

LesouriredeValentinàmaréponseéclipseraitfacilementlesoleil.

–Bienentendu!Etjet’accompagne.

Jehausselesépaules.

–Jen’envisageaispasleschosesautrement.Ilglousseetréexamineattentivementl’imageenmejetantquelquescoupsd’œil.

–Unerobeempire!Etcesatin,ilestsublime.Tuasvucespetitsstrasssouslapoitrine?Jesavaisquetuchoisiraiscelle-ci!Elleestparfaite!Passonsauxfleurs.

Jesoupire.

–Tucroisquec’estréellementindispensable?

Sonsouriredisparaîtpourlaisserplaceàunegrimace.

–Rose.As-tudéjàmislespiedsàunmariage?–Euh…non.–Internet!

Quoi?

J’observemonamiextrairesontéléphoneets’avachirsurlecanapé.

–Viensparici.

Jemerapprocheenpoussantlesmagazinesentrenous,maisaumêmeinstant,laportes’ouvreengrand.Moncœurestdansdesmontagnesrusses:ilpassedelajoiederevoirGabrielàl’inquiétudedevantsamineaffreuse.Ilresteplantédansl’embrasuredelaporte.Jesuistétanisée:ilnenousadressemêmepasunregardetfoncejusqu’àlacuisine,unsachetàlamain.

Je tourne la tête versValentin, son front plissé et ses yeux emplis de questions.MonCompliqué avraimentl’aird’allermal.Ilsembleexténué.

–Poupée,jevouslaisse.Lebeaugosseabesoindetoi.Gardelesmagazines,ons’appelledemain.

J’acquiescemachinalementenobservantGabrielavalerdescachetsetserrer lesdents.Jeravalemasaliveavecdifficulté.J’aspireunboncouppourtenterdebalayermesangoissesetmelève.Jelerejoinsdoucement.Ilasatêteentresesbras,sescoudesappuyéscontrel’évier.Jeposedélicatementmesdoigtssursondos.J’aienviedeluihurleràquelpointj’étaisinquiète,àquelpointilm’afaitpeur,àquelpointil m’a mise en colère… Mais la douleur que je ressens pour lui en cet instant efface tous mesressentiments. Je ne supporte pas de le voir dans un tel état. Qu’est-ce qui a bien pu se passer cesdernièresvingt-quatreheures?

Jeglissemesbrasautourdeseshanchesetposematêtecontresonépaule.Ilsoupire.Unlongmoments’écouleavantqu’ilneseredresse.Sonregardrencontreenfinlemien.Gabrielparaîttellementfatigué.Ses doigts s’infiltrent dansmes cheveux et sa bouche s’empare de lamienne. Son baiser est presquedésespéré.J’ensavourechaqueseconde.Seslèvressedétachent.Ilmefixeintensémentetposesonfrontcontrelemien.Saprisedansmescheveuxseresserre.

–Disquetuesàmoi,Rose.

Ilyadel’inquiétudedanssesmagnifiquesprunellesgrises.Pourquoimedemande-t-ilça?

–Jesuisàtoi,Gabriel.Etjevaisdevenirtafemme.

Lagorgenouée,j’observeunelarmerouléelelongdesajoue.

–Jerefusedeteperdre,bébé…Jerefusedepartir…

Mesyeuxsonthumides.Jetentedeluttercontremonenvied’exploserensanglots.Àl’intérieur, toutmonêtrehurlededouleur.

–Jet’aime,Gabriel…Jet’aimeraitoujours,soisensûretcertain.

Mavoixétaittremblante.Ilmerelâcheetmesoulèvedanssesbras.Jem’accrocheàsanuqueetmeblottis contre lui alors qu’ilmemonte lentement à l’étage dans un silence religieux. J’ai l’impressionqu’ilpeineàmeporter.Monventresetorddouloureusement.Le matelas moelleux rencontre mon dos. Gabriel s’écrase à côté de moi et m’attire contre lui. Je

l’enjambe etme perds dans ses yeux sombres et tristes.Mon cœur souffre, tente de garder un rythmeconvenablepournepascéderàmonenviedepleurer.J’épousesabouchedemeslèvresavecdouceur.Ilfermesespaupières,merendmonbaiserenglissantsesdoigtssurmanuque, les laissantdévalermondos.Sesprunellesretrouventlesmiennes.Gabrielattrapel’ourletdemontee-shirt,leglissepar-dessusmatête.

–Fais-moil’amour,bébé…

Je déteste cette voix brisée. Je dois le ramener àmoi, raviver sa force… J’ai tellement peur qu’ilsombre,qu’illâcheprise.

Jeledébarrassedesesvêtements,tremblante,etjerejoinssapeau.Noscorpsnuss’entremêlentsousnossoupirs.Mespaumescaressentlesailestatouéessursontorse,s’yattardentalorsqu’ilmeregarde,commefascinéparmongeste.Jemepenchedoucement.Maboucheparcourtsamâchoire,soncou,sesépaules…Jem’enivredesonodeur,profitedeladouceurdesapeau.Mesrétinesenregistrentchacunedesesréactionslorsquesesdoigtsdessinentdélicatementlecontourdemescourbes.Ilsparcourentmoncorps,s’attardentsurlerebonditdemesfesses.Jefrissonne,closlespaupièrespourressentirlemoindremouvement surmonépiderme.Sesonglespénètrentbrusquementmachair et jemecambrealorsqu’ilemprisonnelapointedurciedemonseinentreseslèvres.Enmoi,c’estl’affolement:lapeur,latristesseetledésirsemélangent,mebouleversent;j’aidésespérémentbesoindelui.

Chaqueparcelledemapeaus’enflammesoussesdoigtsetsonregardorageuxmetransperce.Jenemesuis jamais sentie aussi belle, autant désirée… Ma poitrine se soulève fébrilement, le poids del’appréhensioncomprimantdouloureusementmagorgeetmespoumons.

Jeneseraijamaiscapabledetesurvivre…

Commepourmerassurer,lesbrasprotecteursdeGabrielm’entourent,merapprochentjusqu’àcequeseslèvresretrouventlesmiennes.Monventresecreusealorsquej’étalemamoiteursursonsexe.Noslanguesselient,s’aimantent.J’enperdsmonsouffle.J’insèredélicatementsonmembreenmoietmabouches’entrouvre.Ungémissementm’échappe.Mesparoisseresserrentautourdelui,lesavourentalorsquelapressions’intensifieentremescuisses.J’ondulelentement,ploielatêteenarrière,submergéeparlapuissancedemesémotions,parmondésir.Gabrielrelèvelebuste,entourematailled’unbrasets’appuiecontrelematelasdel’autre.Marespirations’entrecoupeàchaquenouveaucoupdereins.Sonétreinteseresserrealorsquenospeauxglissentl’unecontrel’autre.Sesmouvements,lentsetprofonds,intensifientmonplaisir,jusqu’àébranlermonâme.Jel’aime…tellement…Celienquinousunitestindescriptible,irréversible…Jemenoiedanssesyeux,sonsoufflesurmeslèvres…Mesterminaisonsnerveusesexplosent,traverséesparunflotd’électricité.Jecreuselesreins,gémis,m’arrimeauxmusclesdesondos.Malgrémoi,unelarmes’échappesurmajoue.Gabrieleffacelatracehumidedesonindexetmepousseàleregarder.Moncœurvalsedansmapoitrinetandisqueseslèvresépousentànouveaulesmiennesetquesonsexes’enfonceplusprofondément.Unepousséepuissantemepropulsetoutdroitdansleprécipicedemonpropreplaisir.UncrifranchitmeslèvresetlesdoigtsdeGabriels’entrelacentauxmiens.Jelesserredésespérément.Jeneveuxplusjamaisleslâcher.Sonrâlerauqueserépercutesurmapeau,sonsouffleremontantsurmagorge.Jemepressecontreluietsonvisages’enfouitaucreuxdemoncou…

Toujoursetàjamais…Monuniqueamour…

Laplusbelledesétoiles

«Tupourraisêtremonchoixinvolontairedevivremaviepluslongtemps.»Muse

GABRIEL

Appartementducouple,mercredi6septembre,14h22

Troisjours.Ilnerestequetroisjoursavantqu’ellenedeviennemafemme.Jesouriscommeunconàcette idée. Je sirote mon café, tranquillement installé sur un siège devant l’îlot pendant que MissCatastropheconstatesesdégâts.Jen’aijamaisétéaussiheureuxdetoutemavie,mêmesimesnuitssontmerdiquesetque jepasse lamajeurepartiedemon temps le crânedansunétau.Riennevautmavied’aujourd’hui.Jebalancelamèchequimetombedanslesyeuxenarrièreetmeredresse.Jem’avancepourobserverlecaférenversésurlesol.Roseaquandmêmeréussiàexploserlacafetièreàexpresso.Infernale!Jemeretiensderire.

Commeàsonhabitude,ellegrogneetpestecontreelle-même.Sympacetteposition…Àquatrepattes,ellefrottelesolpourréparersaconnerie.Vueplongeantesursesfesses.Lespectaclequiétaittordantaudépart,devientpresqueérotique.

Stop!

Nous avons des projets pour aujourd’hui. Il ne faut pas que je dévie, autrement, elle m’en voudraencore.Déjàtroisfoisquenousrepoussonscettesortie…Enfin,c’estplutôtmoi.Jen’aisimplementpasenviedemettre lepieddehors.L’extérieurneme tentepas lemoinsdumonde.Elleetmoidansnotreappart,çamesuffitamplement.Jesoupirelonguement.

–Laisseça,bébé.Jem’enoccuperaienrentrant.–J’aipresqueterminé!

Elletentepartouslesmoyensd’êtreunepetitefemmed’intérieureparfaite,maisc’estunecatastrophe:ellecauseplusdecarnagesqu’autrechose!Jegardenéanmoinscetteremarquepourmoi…J’adopteuntonplussec.

–Onyva!

Rose sursaute, relève le nez et lève les yeux au ciel. Jeme détourne pour attraper les clefs de lavoiture.Jel’entendsmesuivre.Nickel!

Attention,Roseauvolant!Nesortezpasetsurtout,protégezvospoubelles!

J’évitedesortirçaàvoixhaute,maisputain,çamebrûleleboutdelalangue!Lasortiedusous-solsepasseendouceur…Uncrissementdésagréablerésonnedansl’habitacle.Ahmerde,j’aiparlétropvite!

–Han…Jesuisdésolée!

Ellegrimaceenmordillantsalèvre.

–Quoi?–Jen’aipasrayél’aile?

J’ouvrelavitreetpasselatête.Jemeretiensdememarrer.

–Non,vas-y,continue.Sinon,àcettevitesse-là,onarriveraàlafermeture.

Elleseredresseetembraye.Jesuisbonpourretaperlabagnoleendouce!Ellen’yestpasalléedemainmorte!Cetterayurededingue…

–Gabriel,est-cequetuangoisses?

Jehausseunsourcil.

–Angoisserpourquoi?–Lemariage?–Non.

Pourquoij’angoisserais?JevaisraterlerestedemavieavecRose,çamesuffitamplementcommestress.Ellesetortillesursonsiègeaufeurouge.OK,elleabesoindeparler.

–Ettoi,pourquoituangoisses?–Jenesaispas…Etsiçasepassemal?Etsilesinvitéssontdéçus?

Jem’attendaisàcegenred’interrogations.

–Arrêtedeteprendrelatête.Toutestréglé.Etsiund’entreeuxoseseplaindre,jelevire!–Gabriel!–Oh,çava,jeplaisante.

Àmoitié…Onaréduitlesinvitésaustrictminimum,maisilrestequelquespointsnoirsautableau.Jem’intéressedeplusprèsaurétroviseur.Merde!Bandedeconnards!J’attraperapidementmontéléphoneetenvoieunmessageàDouglas.

[Ilmefautuneautrevoitureàl’arrièreducentrecommercial.]

Laréponsearriverapidement.

Douglas[Pourquand,monsieur?]

Sansdéconner,ilm’énerveàm’appeler«monsieur»…

Moi[Hier!]

Encoreuncoupd’œildanslerétro,puissurRose.

–Bébé,turestescalmeettum’écoutesattentivement.

Ellemedévisagel’espaced’uninstantavantdeserecentrersurlaroute.

–Qu’est-cequeturacontes?–Tuasconfianceenmoi?–Quoi?–Ouiounon?–Oui!

Jesavaisqueturépondraisça,monange.

–Jeprendslevolant.

Ellefreine.

–Roule,net’arrêtepas,surtout.

Elles’agite,commenceàdevenirnerveuse.

–Jenecomprendsrien!Explique-toi!–Neposepasdequestion!Jepassedetoncôté.

Ellemeregardeàdeuxfois.

–Maist’esmalade!

Jeladétache.

–Bordel,maisréponds-moi!

Mamains’emparedéjàduvolantetj’adopteunevoixautoritaire.

–Maintenant!

***

ROSE

Surlaroute,mercredi6septembre,14h48

Monpoulss’affole.LetongravedeGabrielnemerassurepas.Toutcommesonairconcentré.Noussommessuivisouquoi?J’obéis,mesoulèverapidementdusiègeetatterris jenesaiscommentsur laplacequ’occupaitGabrielquelquessecondesplustôt.

–Attache-toietaccroche-toi!

Jem’exécute leplus rapidementpossible,maispaniquedéjà.Àpeine lecliquetisa-t-il retentiqu’ilrétrogradeavantd’accélérer endonnantunbrusquecoupdevolant.Bordel,nous sommes suivis, c’estsûr!

–Despaparazzis?–J’appelleçadesrapaces.

Il fallait bien que ça arrive un jour ou l’autre !Mon souvenir d’eux à l’hôpital n’est pas des plusagréables…Tousmesmusclessetendent.MonDieu,onroulebeaucouptropvite!Danslerétroviseur,j’aperçoisdeuxmotostenterdenoussuivre.

Jeme crispe encore plus et je blêmis alors qu’un crim’échappe.Gabriel vient de prendre un sensinterdit!Jefermelesyeux,tentederespirercorrectement,lesrouvreetlesrefermeaussisec.Jen’aipasenvie de voir ça ! Mon cœur fait des loopings. Je soulève une paupière et hurle à la vue d’unemonstrueuse semi-remorque qui manque de nous emboutir en débouchant sur l’avenue. Son klaxonpuissantserépercutedanstoutmoncorps.Jeserrelespoings,unsurmonsiège,l’autreàlapoignéedelaportière.Dansmapoitrine, c’est le foutoir. J’ai l’impressionquemoncœur est en trainde lâcher.Unbrusquecoupdevolantmepropulsecontrelavitreoùmajoues’écrase.Gabriel,lesyeuxbraquéssurlaroute, est impassible. Il fautque jeme ressaisisse. J’ai confiance, il sait cequ’il fait.Non,pas le feurouge!Non!Jeveuxdescendre!Unsoupirem’échappealorsqu’iltournejusteavant.

–Détends-toi,bébé.Ilssontloin.–Alorsralentis!

Unlégersouriresedessineaucoindeseslèvres.Gabrielréduitenfinl’allureetcontournel’immensecentrecommercialducentre-villependantquejetentetantbienquemalderecouvrermesesprits.

–Demain,onpasseauxchosessérieuses.

Je le fixe alors qu’il se gare derrière l’immense bâtiment. Je reconnaisDouglas qui s’extrait d’unepetitevoiturenoire.

–Auxchosessérieuses?–Jetedonneraitonpremiercoursdeconduite.–J’aiobtenulepermis,jeterappelle!

Bon,OK,auboutdecinqfoisetsûrementparcequel’inspecteuraeupitiédemoi.J’imitemonCompliquéquidescenddelavoiture.MesyeuxtombentinéluctablementsurlarayurequibalafrelecôtédelaCadillac.Unegrimaces’installesurmonvisagequandjecroiseleregardamusédeGabriel.Jehaussenégligemmentlesépaules.

–Vapourunepetiteremiseàniveau.

Ilcontourne lavoitureetm’octroieunclind’œilavantd’apposersamainaucreuxdemesreins.Jesouris.L’échangedeclefsest rapide,pasbesoind’explication :nouspasseronsplus incognitodans lapetitevoituredeville.

Nousnousgaronsdevantunebijouterie.Ilainsistépourcelle-ci.Pourtantlesprixdecelleducentrecommercialétaientcertainementplusabordables…Unesacréeexpéditionpourunebague!Qu’ensera-t-il le jour dumariage ?Mon angoisse écrasema raison et s’empare à nouveau demoi.CommentmonCompliqué réagira-t-il avecHaleyprésent en tant que copaindu témoin de lamariée et son père qui,aprèsunebatailledeplusieursjoursavecGabriel,aobtenugaindecauseetseraluiaussidelapartie.Cequinem’enchantepaslemoinsdumonde…Jecrainsmêmelepire:uneparoledetraversetl’ouraganGabrielseraderetour.

–Bébé,jevaistetenirlaportecombiendejours?

Oups…Jel’embrasseaupassage.Iln’yapasàtortiller,jesuisvraimentdanslalune!Samainchaudese pose surma chute de reins et il enveloppema hanche enmême temps que l’on se dirige vers lesvitrines éclairées. Alors…Voyons voir… Simple et efficace. Pas la peine d’éventrer son compte enbanque pour une vulgaire bague.Ce n’est pas ce qui compte pourmoi.La seule chose que j’ai envied’exhiber, c’est cettepassion, cette forcedévastatricequi nous lie l’un à l’autre. Il n’y a riendeplusimportant.

Mon regard se dirige vers la ribambelle d’anneaux et j’avale de travers au fur et àmesure que lesmontantsexorbitantsdéfilentsousmesyeux.Merde!Ilsn’ontriendeclassique?Jenevaistoutdemêmepasenchoisiruneàunetirette…

–Laisse-moideviner.Iln’yenaaucunequiteplaît?–C’estcher,surtout.

Illèvelesyeuxauciel,limiteagacéparmaréponse.

–Onsecontreficheduprixettulesais.–Danscecas,j’ailedroitd’opterpourn’importelaquelle?Mêmelamoinschère?

Ses paupières se ferment un instant. Ses doigts sur ma hanche se crispent par intermittence, mecommuniquent une sensation étrange. Elle hérisse ma peau. Je soupire mentalement, tente de ne pasdéfaillir:Gabrielrefusetoujoursdemeparlerdesamaladie.Commesiellen’existaitpas.Commes’ilnesouhaitaitpasquecelainterfèreaveclemariage…Perdue,jefroncelessourcilsetobservesesdoigtslégèrement tremblants s’enfoncer dans sa poche. Il a l’air concentré alors qu’il effectue un signe deconnivence à l’attentiondubijoutier.Cedernier hoche la tête et se dirigevers l’arrière salle.Que sepasse-t-il?

–Gabriel,toutvabien?

Ildéglutitdifficilementetm’envoûtedesonregardsombre.

–Jesuissurlepointdememarieraveclaplusbelledesétoiles.Pourquoiçan’iraitpas?

Moncœur tremble tandisquemapaumecaresse sapeau subitementblafarde.Des sueurs froides sesontemparéesdesonfront,desestempes.

–Gabriel…

Ilposeleboutdesesdoigtssurmeslèvresfrémissantes.

–Chhh…J’ai justeunpeuchaud.Toi,parcontre, tudevrais t’asseoir.Ona l’impressionque tuvastomberdanslesvapes.

Savoixvacille.Jemecramponneàsontee-shirt,maisc’estluiquitangue.Magorgesenoue.

–Nememenspas.

Sonfrontsecollecontrelemien,sonsouffleirréguliercaressantmeslèvres.Ilfinitparm’embrasseretparmetenirfermementcontreluiavantdesedétacher.

–Net’inquiètepas.Tun’espasprêtedetedébarrasserdemoi.

Uneesquissedesourires’installesurseslèvres,n’allégeantpaslemoinsdumondemonmalaise.Lebijoutierrevientavecunpetitécrindeveloursnoir,maisjen’yprêtequasimentpasattention.Toutmonêtreestcentré surmonCompliqué.Undoigt sousmonmenton, ilm’obligeà tourner la tête et fixer labagueenorblancsertied’undiamantciseléenformed’étoile.Elleestjuste…magnifique.

– Je savais que tu serais incapable de choisir alors je l’ai dessinée pour toi, en souvenir de notrerencontre.

Jefrémisdelatêteauxpiedsalorsqu’ilglisselentementl’anneaulelongdemonannulaire.Gabrielpense vraiment à tout. Il me connaît plus que moi-même. Sans réfléchir, je me pends à son cou etm’emparedeseslèvres.Ils’écarterapidementenôtantdélicatementmesbrasdesesépaules.

–Elleestparfaite,emballez-la.Bébé,c’esttoiquiconduis,tuasdroitàtonpremiercoursgratuit.

Ilm’offreunfaiblesourirecharmeurquimeperforelapoitrine,medéchirelesentraillesendeux.Seslèvressontdevenuesd’unseulcouptellementpâles…Jevacilleetresteparalysée.J’ail’impressiondeleperdre,quesonénergievitalefuitpartouslesporesdesapeau.

Nepaspaniquer.Nepasluimontrerquejesuisterrorisée.

L’impuissancemedévoreàlapetitecuillère.Ilfautquejeréagisseetvite!Jel’obligeàmeregarder.

–Jet’emmèneàl’hôpital.

Encoresonsourire.

–C’estrien,bébé.Çavapasser…J’ail’habitude…Cemomentestimportant…–Jemefousdecettebague!

Ses pupilles s’agitent, cherchent les miennes. Sa paume tremblante tente de s’infiltrer dans mescheveux, mais elle rate sa cible. Gabriel cligne des yeux. Son tee-shirt est trempé. Je refouledésespérémentlapaniquesurlepointdes’emparerdemavolonté.

–Toutvabien,mademoiselle?Vousvoulezquej’appelleunmédecin?

Àmoitiésourdeetl’espritenfusion,jenerépondspas.Jenepensequ’àsortird’ici,àsauverGabriel.L’effroi me grignote alors que je le tire derrière moi sans qu’il n’émette aucune résistance. Nousfranchissonsleseuildelabijouterieetilbaisselesyeux.Ilsecourbeenavant,lesmainsenappuisursesgenoux.

–Gabriel…Parle-moi…Jet’enprie.

Sontorsesesoulèveavecforce,auborddelarupture.J’aicesséderespireretpourtant,jemebats.Jeravalecettepeurdémesuréequiravagemaconscience.Jeravaleceslarmesacidesquicherchentàfranchirlabarrièredemescils.Mesdoigtssaisissentsonvisage.Celui-cin’exprimeplusquedouleuretperdition.

Nem’abandonnepas,tuavaispromis!Jet’aime…

Sonregardvoilésembleperdu.Gabrielsombre,s’enfonce.Sansmoi…

Jelepousseàs’adossercontrelemuretappellelesurgences.Jecroisquemoncœurs’arrêtedebattreletempsquel’ondaignemerépondre.Jehurleintérieurementmadétresse.Jen’aipasledroitdecraquer.Jedois rester forte.Mais jen’yparviensplus…Lechaosm’aspire, enterremon âme enmême tempsqu’ilextirpecelledeGabrieldesoncorps.

Unevoixàl’autreboutdufil…Deslarmescoulentlelongdemesjoues.

Respire,ilvas’ensortir!

Gabrielm’échappe,seretientaumuràboutdebras…

Un cri déchirant, le mien, alors que j’assiste au ralenti à la scène. À sa chute alors qu’il perdconnaissance. Ses yeux se ferment. Jeme jette sur son corps étalé sur le sol. Je palpe son visage, sabouche…Moncœurpercuteviolemmentmapoitrinetandisquesonsoufflesurmapaumes’estompepeuàpeu.

Aurevoirespoir

«Lavieestunerosedontchaquepétaleestuneillusionetchaqueépineuneréalité.»AlfreddeMusset

ROSE

Àl’hôpital,mercredi6septembre,17h48

Ilvas’ensortir!Respire…

J’erre,arpentelasalled’attente,lesoufflecoupé.Jem’arrêteetchercheencoreunefoisl’horlogedesyeux.Deuxheuresinterminablesettoujourspasdenouvelles…

Lespersonnesautourdemoidoiventmeprendrepourunefolle.Maisjem’encontrefiche.Totalement.Je l’aime… Désespérément… Avant lui, je ne savais pas ce que c’était que « vivre ». Alors quemaintenant… Cette douleur qui m’éventre la poitrine est insupportable. Je fixe toujours et encorel’aiguille,mesmainsjointesdevantmabouchefrémissante.Jetournesurmoi-même,nesupportantplustous cesmurs blancs assiégeantmes yeux baignés de larmes. Il faut que je sorte d’ici, que je sache.Pourquoipersonneneme tient aucourant ? Ilsveulentme laisser creverdansce silencedeplombouquoi?Mespoumonssecompriment,matrachéemebrûle.

Neperdspasespoir.

Jefermemespaupièresleplusfortpossible,commesicelam’empêcheraitdecraquercomplètementetirrémédiablement.Quand je les rouvre, j’ai l’impression qu’un pic de glace transpercemon cœur.Ceregardgris…Cevisage…Jegrimace,hurleintérieurementavantquel’explosionjaillissesurmonvisageenunepluiedelarmesettransfiguremadétresse.Jenesuisplusqu’unmasquededouleur,unebouilliehumaine.Jerefusaisd’ycroire.JepensaisqueGabrielétaitplusfortqueça…J’espéraisdetoutesmesforcesquecelan’arriveraitjamais,quetoutçaétaittoutbonnementimpossible.Pourtant,laréalitéesttoutautre.Ellemefoudroietoutentière.

Pourquoi?Pourquoi?Pourquoi?

Cemots’emparedemoncerveau,saccagemaraison.JefoncedroitsurJosh,sacopieconforme,soncorpssain.J’yabatsmespoings,frappesontorse.Lejumeaus’emparedemescoudes,maisnem’arrêtepas.J’aitellementpeur,peurdessecondesquis’égrainentetmepriventdecequej’aideplusprécieuxaumonde…Jeréclameplusdetemps!J’enaibesoin!

–Ilavaitpromis!

Jem’étouffe,enproieàdesspasmes.Joshmecollecontrelui,meretientdesesbrasalorsquejen’aiplusaucunespoir.Jecrispemespoingssursachemise,trembledetoutmonêtre.Mesonglesfinissentpars’enfoncer dans sapeau.Si j’en étais capable, je la lui arracherais tellement j’aimal, tellement je nesupportepluslasituation.Pourquoiluiestenvie?Pourquoin’est-ilpasdanscettechambre,àsaplace.Je ne parviens même pas à percevoir l’horreur de mes pensées. Je suis incapable de raisonnercorrectement.C’estimpossible,impensable.Jenesuispasprête.J’aimenti.

Gabriel,jesuisdésolée,jenesuispasassezforte!

Joshresserresonétreinte.Ilsait.Ilmecomprendetjeluienveuxdemepermettredemedéfoulersurlui.Pourquoinemerejette-t-ilpas?Àtraversmonregardvoilé,j’entrevoislabeautédesestraits;jevoissamâchoiresecontracter.ToutcequimerenvoieàmonCompliqué.Jemeurs,effleurelapeaudecevisage.Elleme brûle les doigts tant c’est atroce.Le voir sans l’avoir…Le toucher sans le ressentir.Respirersansvivre.L’ombredemavie,demonamour.Unabyssedanslequeljem’abîmeetm’enfonce,meurtriejusqu’auplusprofonddemesentrailles.

JenerésistepaslorsqueJoshmeguidejusqu’àunsiège.Ilsemblepresqueaussiperduquemoi.Jel’aiappeléausecourslorsqueGabriels’esteffondré.Jenevoyaisquecettesolution…Mesamisnesaventrien.Sesparents,jenepréfèrefranchementpas.Alorsoui,Joshestlaseulepersonnequicomprenne.Laseuledontj’aibesoin.Samâchoirenesedesserrepas.Ilaleregarddanslevide.Jemecollecontrelui,m’accroche, le cœur au bord de l’implosion.Des doigts s’immiscent dansmes cheveux. Je ferme lesyeux.

–Ilnelâcherapasaussifacilement.

Jerelèvelenez,renifledisgracieusement.

–C’esttroptôt,jeneveuxpas…

Sesmainss’emparentdemesjoues,essuientmonvisagebaignédelarmes.Sessourcilssefroncent.Sadéterminationsoudainemepercutedepleinfouet.

–Regarde-moi,Rose.Tusais trèsbienquec’estunemmerdeur fini,unbattant,et rienquepour ça,crois-moi,iltereviendra.

Uneoncedesourires’installesurmeslèvresqu’ilcaressedupouce.

–J’aimemieuxça.

Jedéglutis.

–Commentfais-tupournepascraqueralorsquejesuisaufondduseau?

Saboucherencontremonfront.Seslèvress’étirent lorsqu’ilplanteànouveausesprunellesdanslesmiennes.

–Commes’ilavait lechoix. Il teconnaît suffisammentpour savoirque tu seraiscapabledecramerl’hôpitals’ilneseréveillaitpas.Et…detebrûleraupassage.Cepetitconestfoutuetamoureux.

Un rire nerveux s’échappe dema gorge. Je collema tempe contre la joue de Josh, glisse unemaindésespéréedanssescheveuxpendantquelasiennecheminelelongdemondosetm’apaiseautantqu’elleaggravemadouleur.

N’ypensepas…TuasbesoindeJosh,desaprésence,detoutcequ’ilreprésente…

Monégoïsmemetueàpetitfeu,agranditletroubéantdansmapoitrine.Oserluienvouloirderespireralorsquemonamoursemeurt…Lesjumeauxsemblenttellementdifférentsauxpremiersabords,maisaufinal, ils ont beaucoup de points communs. Leur rapprochement ces derniers jours m’a beaucoupbouleversée.JoshpassebeaucoupdetempsàlamaisonetGabriel,malgrésatendanceàresterenretrait,sembleenêtrel’investigateur.J’ail’impressionquelaprogressiondesamaladieluiaouvertlesyeux,qu’iltentedefairepardonnersoncomportementenverssonfrère.Mesyeuxrestentfixersurlaportedelasalled’attented’oùlesgensentrentetsortentsansarrêt.

Jevousenprie,nemeleprenezpas…Pastoutdesuite…

Jedonnerain’importequoi…Maiss’ilvousplaît…

***

GABRIEL

Àl’hôpital,mercredi6septembre,17h54

Untraitdelumières’invitesousmescils.Jefroisseletissuprésentsousmamain.Quesepasse-t-il?

J’ailanauséeetmespaupièresluttentpours’ouvrir…Envain.Jesuiscomateux,maisdevaguesbridesdevoixmeparviennent,deplusenplusfortes.Jenecomprendsabsolumentrien.Oùsuis-je?Jenemerappelleplus…

Rose…

Je me bouge mentalement, me force à me concentrer sur les paroles, à essayer de soulever mespaupièrespourm’assurerqu’elleestbienlà.Jesuisfatigué…Tropfatigué…Jelâcheprise…

Un coup m’arrive en plein plexus et j’aspire brusquement l’air qui s’infiltre en moi et brûle mespoumons.Moncœurpiqueunsprintetunbipétrangefusillemestympans.Jemecrispeetenfoncemesonglesdansmespaumes,foudroyéparladouleur.Jepeineàretenirlecriquitentedes’échapperdemagorge.

–Calme-toi,Gabriel.Jevaist’injecterunantidouleur.

Toutd’uncoup,monpoulsralentit.Jem’apaise…DocteurDévraux?Devaguesimagesembrouilléesmereviennent : lavoiture,Douglas, labijouterie,moiquivacille…Rose.J’ouvremesyeuxengrand,maislesrefermerapidementetgrimace.

Bordel,ilfautquejemelève!

Laconnaissant,elledoitêtretoussesétats.Moncorpsnesemblepascoopéreralorsquejetentedemeredresser.Putain,j’aiunmaldechien!C’estdepireenpire!

–Resteallongé,mongarçon.Çanesertàriendelutter.

Cettesaloperienem’aurapasaussifacilement!Qu’elleaillesefairefoutre!Jetenteunenouvellefoisd’ouvrirlesyeuxetdistinguetroissilhouettes.JereconnaisvaguementlesvisagesduDocteurDévrauxetdeLouise,safemme.L’autre,jeneconnaispas.Uneblouseblanche?Uneinfirmière,sûrement.

–Sortez,s’ilvousplaît.Jedoisparlerseulàseulaveclui.

Louisefrôlemamaind’ungestebienveillant.Puislesdeuxfemmess’éloignent.

Ohc’estbon,jesuisencorelà!Nechialezpastoutdesuite!

Jerégulemarespiration.Jenecomptepasrestersurcelitcommeunmourant.Ilmeresteencoretropde chose à faire. Je rassemblemes forces etme soulève.Mes pupilles se sont adaptées à la lumièreambianteetj’observeducoindel’œillaperfusiondansmonbras.C’estquoicemachin?Jetâtonnemonvisage.Putain,ilsm’ontfourréuntrucdanslenez!

–Enlevez-moiça!

Mavoixérailléeetsècherésonnedanslapetitepièce.

–Nebougepas.

Jack, ledoc,medélivrede sonmachinet jeme frotte lenez. Ilme sourit.Saufque son sourireestlimitepincé.Ilglisseunemaindanssescheveuxgrisonnant.

–Gabriel,noussommesentrenous,alorsparlonsfranchementpourunefois.Commenttesens-tu?

Tuparles, ilsaitsurtoutque je l’aimitonnéhier.Pourunefoisque jeviensàmonrendez-vous, j’aimentidudébutàlafin.MaisDévrauxn’estpasdupe,ilmeconnaîtdepuisquej’aidouzeans.Safemmeetluisontunpeudelafamille,àforce.

–Cettequestionest-ellevraimentutile?Sij’étaisenpleineforme,jeneseraispasentraindetaperunesiestedanscelit.

Unlégerrireluiéchappe.

–Arrête de jouer au con avecmoi et parle-moi de tes symptômes. J’ai besoin d’une échelle pourévaluertesdouleurs.Est-cequetuboissuffisammentpourtesreins?–OK.J’aieuunpetitpiqued’adrénalineendébutdematinée.Jepensequec’estcequiacompliqué

les choses.Autrement, c’est gérable.Pas besoinque je reste là.Ah…et oui, je bois ce qu’il faut.Etquandjedisça,jeparled’eaubienentendu.

Sonairsoudainementsérieuxmepousseàleverlesyeuxauciel.

–Annoncezlacouleuraulieudetournerautourdupot!

Ilmetendmondossiermédical.

–Cen’estpasbon,regardepartoi-même.

Je soulève le feuillet bleu et lit rapidement mes résultats d’analyse. Je déglutis, tente de resterimpassibledevant l’évidencequimecloue aumatelas.Chutevertigineusedesplaquettes, lymphocytespresque inexistants,concentrationélevéedecréatininedans lesang…J’aidéjàunpieddans la tombe.J’inspireprofondément,maismespoumonsmerappellentàl’ordreetunequintedetouxm’assaille.

–Gabriel,jesuisnavré.Jenesaispassituserasremispourtonmariage.

Jelefoudroieduregard.

–Jeleserai!

Jackacquiesce.

– Nous allons tout mettre en œuvre. Mais repose-toi. Et pas seulement jusqu’à samedi. Ladégénérescencedetesorganesvitauxestbienplusrapidequenousl’avonsdernièrementprévu.L’étatdetesreinsetdetespoumonsestplusqu’alarmant.–Combiendetemps?–Unmoisoudeux,situteménages.Troisàlarigueursitoncœurtientbon.Cequiestlecaspourle

moment:ilnemontreaucunsigned’insuffisance.Etnenégligepaslesdialyses,d’accord?

Jefermelesyeuxuninstant.Dansmesprojetsinitiaux,ilétaitquestiond’unefinmagistrale.Macaisseetmoi,undernierduo,enhautd’unefalaisepourunmagnifiquesautdel’ange.Ilétaithorsdequestionquecettesaloperiechoisissel’heuredemamort,maismaintenant…Toutestdifférent.

Laportes’ouvre.J’aperçoisRoseducoindel’œiletbalancenégligemmentlelivretdefeuillessurlatablede chevet endardantmon regardpleinde sous-entendus sur leDocteurDévraux. Il s’emparedudossieretseredresse.

–Jevouslaisse.J’aiterminépourlemoment.Gabriel,jerepassetoutàl’heure.

IldisparaîtettoutemonattentionsedirigeversRosequisejettedansmesbras.Ellemeserretellementfortquec’enestdouloureux,maisjem’encontreficheetjeluirendssonétreinte.J’emplismespoumonsduparfumdesescheveux…Ilfautabsolumentquejesorted’ici!

–J’aieutellementpeur!–Bébé,tut’esinquiétéepourrien,commetoujours.

Mon sourire ne semble pas la convaincre. Elle me scanne, glisse ses doigts sur ma joue en seredressant.

–Gabriel,arrêtedemementir.Jedétesteça!Tuéludesmesquestionsdepuisdessemaines.J’enaiassezmaintenant.J’ailedroitdesavoir!Etneprendspasdegants.Jesuisprêteàtoutentendre!

Monange,tavoixquitremblesurtesderniersmotsmontrequetuesloind’êtreprête…Etmoinonplus.

Jefrôleseslèvresduboutdesdoigtsalorsquesesyeuxcherchentdesréponsesdanslesmiens.Roses’est accrochée à son idée que tout était encore possible, qu’il y avait encore de l’espoir et j’ai étéincapabledel’enempêcher.Jem’apprêteàtoutdémoliretcettedouleurestencoreplusbrutaleetplusinsidieusequecellequimebouffedepuisdesmois.J’auraisaiméévitertoutça…Maisilesttroptardpourreculer.– Mon ange, il est temps d’arrêter de te bercer d’illusions. Je suis désolée de ne pas t’en avoir

empêchéplus tôt. J’ai reculé cemoment aumaximumparceque je n’avais pas assezde couragepourt’avouerlavéritéetteblesser.Maiscettefois,jeseraihonnête.J’aiunemaladiegénétiquetrèsrare,maispasassezrarepourqu’ellem’aitépargné.Unesaleté,uncroisemententrelamyopathiedeDuchenneetlesyndromedeMarfan.Cen’estpasvraimentl’éclate…Jel’aiapprisaudébutdel’adolescenceetc’estdéjàunmiraclequejesoisencoreenvieàl’heureactuelle.

Rosesourit,unsourirecrispé.Sespupilless’agitentnerveusement.

– Il y a certainement quelque chose à faire ! Il y a bien des spécialistes… Quelque part, il y aforcémentquelqu’un?

Jelacouped’undoigtsurseslèvresfrémissantes,lescaresse.

–J’aidéjàvutouslesspécialistesdecettefichueplanète,bébé.Ilsn’ontpasbeaucoupd’informationssurlesujet.Déjàqu’ilsontdumalàcernerlesdeuxpathologies,alorslamutationdesdeuxn’estpasunebonnenouvelle.Ilfautquetucomprennesquec’estterminé.Iln’yaaucuneautreissuepossible.

Elles’offusque,panique,s’agite.

–J’aivutesrecherches,Gabriel!Jesuiscertainequetuescapabledetrouver!TuesGabrielAlcott!Turéussistout!Rienneterésiste!Cen’estpascetrucquit’abattra!Tuasjustebesoindetemps!

Jesaisissespoignetset lesabatssur lacouverturepour lacouperdanssonélan.Jeplongemesirisdanssadétresse.

–Bébé,stop.C’estterminé,jevaismourir.

Leslarmesquipointentàlalisièredesesyeuxetsonvisagequisetordsouslasouffrancemefusillentlittéralement. Je savais que ce serait difficile,mais là, tout de suite, je préférerais être déjàmort qued’avoiràaffronterceregarddésespéréetaffolé.

–Je…jenepleureraipas.Je…

J’attrapeRoseetlaserredansmesbrasoùelles’effondre.

Jesuistellementdésolé,monange…

Son corps émet de petits soubresauts qui me sont insupportables. Je referme mon poing dans sescheveux.

–J’auraisaiméquetoutsoitdifférent…

Jeme hais. Je hais cette partie demoi qui détruitma vie, qui détruit celle demon ange…Onm’atoujours dit que j’étais pourri de l’intérieur, que j’étais un sale gamin incapable et uniquement bon àdétruirelesautres…Enfindecompte,monpaternelnesavaitpasàquelpointilavaitraison…

***

ROSE

L’appartement,vendredi8septembre,22h43

Unenterrementdeviedejeunefille?Gabrielesttoujoursenfermédanssachambred’hôpitaletmoi,jesuislà,surcecanapé,àtenterdefairebonnefiguredevantmesamis.Aude,ValentinetHaleytrinquentàmasantétandisqueJoshsupervise.J’aiunénormepincementaucœur.Mameilleureamiesepencheversmoi.

–OùsontpartisCameronetGabrieldéjà?

Luimentir estpireque tout,mais jen’aipas ledroitde lui révéler lavérité.Soncopain tient justecompagnieaumien…

–Tusaisbien,leurspetitsdéliresàeux.Sûrementunecoursedevoiture.

Lemensongeestdevenuunesecondepeaudeplusenplusdifficileàporter.J’avaled’untraitmacoupedechampagne,necomptemêmeplus lesverresquejemesuisenfilée.Demain, jememarie…Jevaisêtredansunbelétat!Haleym’observeducoindel’œil.Joshetluisontlesseulsàsavoiretchacundeleurregardaccentuecettedouleurquinequitteplusmapoitrine.Jefixemalgrémoilejumeauunpeutropsouvent.PourquoiGabriel?Apprendrequ’aucundesesfrèresn’estatteintparlamaladieaétéunénormesoulagement,maisenmêmetemps,uneporteouverteàdespenséesaffreusesetinhumaines.Jemedétestedenepasparveniràrefoulerleshorreursquim’assaillent.J’aibeauaimerJoshdetoutmoncœur,jen’yparvienspas…Jemedétested’oserluienvouloirdenepasêtrelejumeaumalade.Jesuisunepersonnehorrible!

Unautreverre,vite!

Audem’attrapeparlebrasetécrasesabouchesurmajoue.

–Jesuistellementheureuse!Quellerevanchesurlavie,machérie!

Jesuissurlepointdem’écroulertotalement…J’aimeraisdisparaître,mefondredanslecoussinquej’aiabattusurmesgenoux.Magorgeestcomplètementnouéeetmonestomacretourné.

Toutvabien,ilsortdemain…

Jemerépèteenbouclecemantra,relèvelatêteetaffronteleregarddeValentinposésurmoidepuisquelquesminutes.Lesourireque je luiadresseest loind’êtreconvainquantpuisqu’il se lèveet tombelourdementàcôtédemoipourm’attirercontrelui.Ilapprochesabouchedemonoreille.

–Qu’est-cequiteperturbe?Lemariage?Saviréeencélibataire?Oubienest-ceautrechosequetonmeilleurpotedevraitsavoiretquetuluicaches?

Safaçondeparlermepousseàcomprendrequ’ilsedoutedequelquechose.Jepuiseunenouvellefoisdansmoncouragepourmentir.

–J’angoissepourdemain.

Sesdoigtsseresserrentsurmonépaule.

–Jedétestequandtumeracontesdessalades…Tujouesdemoinsenmoinsbienlacomédie,poupée.Mais comme c’est ton enterrement de vie de jeune fille, on verra ça plus tard. En attendant, j’ai unesurprisequirisquedeteredonnerlesourire!

Unesurprise?Cen’estpasuncadeauquirisqued’arrangerleschoses…Aucontraire,jeculpabiliseencoreunpeuplusquemonValentin ait encoredépenséde l’argentpourmoi. Jebalaiedu regard lesenvirons,àlarecherchedepaquets.

–Paslapeinedetefatiguer,iln’estpasici.

Mes yeux s’écarquillent. Il se redresse d’un bond et Aude le rejoint aussitôt, plus que complice.Qu’est-cequ’ilsmepréparent,cesdeux-là?Unsourirefendenfinmeslèvresalorsqu’ilstendentchacununemainversmoi.Jelesattrapeetunesecondeplustard,jesuispropulséesurmespieds.Jetangue:l’alcool que j’ai ingurgité me chauffe soudainement les joues. Où est-ce qu’ils me traînent ? Je meretourneversJosh.Ilestbizarrecesoir.Ilnousobservealorsquemesamiss’arrêtentnetdevantl’entrée.Audes’empressed’apposersespaumessurmesyeux.J’entendsquelqu’unouvrirlaporteetlesdoigtsde

mameilleureamiedisparaissentdemavue.

–Surprise!

Jeresteclouéesurplace.Lucas?Jevacilleentrejoieetmalaise.Ilestvenupourmonenterrementdeviedejeunefille?Pourêtreunesurprise…Jen’auraisjamaisimaginéça!Sonsourirefinitd’abattrelavilaine angoisse qui tentait de s’inviter enmoi. Son étreinte est des plus agréables. J’ai l’impressionqu’onnes’estpasvusdepuisdessiècles…

–Qu’est-cequetufaislà?–Tucroisréellementquej’allaisratertadernièrejournéedecélibataire?

Sonrireretentitdanslapièce,détendchacundemesmusclesjusque-làcrispés.Ilfautquejeprofitedecettesoirée.CesontlesmotsdeGabriel.C’estbienpourçaquej’aiacceptél’invitationdemesamis.Sinon,jeseraissûrementdansmonlitàmemorfondre…Ilm’ainterditdeleharcelerdemessage.Etcen’estpasl’enviequimemanque!Jemeursd’enviedesavoircommentilva,deluidirequ’ilavaitencoreunefoisraison,quej’avaisgrandbesoindemesamis.Jemedemandes’ilestaucourantpourLucas?J’observecederniersaluerlesinvités.Lecomitéestpetit,maisamplementsuffisant.

Jesourisenfindeboncœur,attrapeunverreettrinqueavecmesamis.Joshnousrejoint.Iln’estpastrèsbavard.Unfrissonmetraverse:j’ail’impressionquesonattitudeserapprocheétrangementdecelledemonCompliqué.

Arrêteavecça!JoshestJosh,etGabrielest…l’amourinconditionnelpourlequeljesuiscapabledetoutetn’importequoi.

Je me perds dans mes pensées et dans mes souvenirs quand le ricanement d’Aude me ramènebrutalementsurTerre.

–Biensûrqueceseraunefille!

Valentinlèvelesyeuxauciel.

–Benvoyons!Etsic’estunp’titmec,tufaisquoi?Tulecastres?

Lucasexplosederireetmameilleureamieleurtirelalanguecommeunegamine.Jesurenchéris.

–Qu’enpenseCameron?–Ons’enfoutdecequ’ilpense!

Elle appuie sa réponse avec un clin d’œil. Haley s’empare de la bouteille pour nous resservir etm’offreunsourire.

–Ilss’embrouillentpresqueàchaquefoisquejelesvois.Luipréféreraitungarçon.Ilsont intérêtàchoisirunprénommixteautrementjesensqu’uneguerrefroiderisqued’exploseràl’étagedudessous.

Valentinglissesonbrasautourdesonpetitamietmefixeenriant.

–Onleslaisseras’engueuleretnous,onembarquelemôme!

Jeguetteinstinctivementlaréactiond’Haley: ilpinceleslèvrespourretenirsonsourire.Moncœureffectueunpetitbonddansmapoitrine:ilssemblentvraimentcomplicesetheureux.Pourmesamis,toutroule.Lucass’installeàmescôtés.Sesyeuxnoisettem’étudientaveclaplusgrandeattention.

–T’escuite,toi!

J’étouffeunrire.

–Jecroisbien…

Je terminemacoupeet laposesur la tablebasse.Unbruitdecristalqui se fracasse résonneàmesoreilles.J’aipourtantbienvisélatable?Jefroncelessourcilsenpenchantlatêteenavantpourregarderlesdégâts.Oups…Maconsciencememontredudoigtensetordantderireavantquemaraisonneluiassèneunetapederrièrelatête.Waouh…Jeperdsleciboulot.Lamusiquerejointnoséclatsderires.Lasoiréeestbeaucoupmieuxquecedontj’avaisenvisagé.Parcontre,j’ailatêtequitourne,mêmeassise.AudedanseavecValentin.Enfin,danserestungrandmot.Ilsfontsurtoutlescons.Lucasm’obligeàmeleverpourme traîner sur lapiste improvisée. Je croisquenous sommes tousdansun sale état. Je riscommeuneidiote.

–Moi,entoutcas,demain,jeprendsuneblindephénoménale!

JemetourneversValentinquilèvesonverreenl’air.Haleys’enemparerapidement.

–Jepensequetun’aspasattendudemain!

Monmeilleuramigrimaceententantderécupérersonbreuvagesouslesyeuxhilaresd’AudeetLucas.

–Bordel,rends-moiça!

Etvoilà,ilsselancentdansunecoursepoursuitedesplusdrôles.Valentinestcuitetsetapetouslesmeubles.Haleyjubile,savictoireétantplusqueprobable.Soncopains’arrêtetoutàcoupenfacedemoi,

m’attrapeparlatailleetécrasemajouesousseslèvresmaladroites.

–Jet’aime,poupée!Commej’aihâtequetumepondesunbeaubébétoiaussi!

Sesmotspénètrentmonespritteluneflècheenflamméeetserépercutentdansmoncorps,medétruisantcomplètement.Ilseffacenttoutetraced’alcooletannihilemabonnehumeur.

Celan’arriverajamais…

J’ail’impressiond’êtrelâchéedanslevide,dansuntrousansfond.Moncœuretmoncorpssetordent,muesparuneaffreusedouleur. J’explosed’uncoupalorsquemesbarrières tombentetque les larmescoulententorrentlelongdemesjoues.

–Gabrielvamourir!

Silence.Seulelamusiquecontinuecommesiderienétait.Qu’est-cequim’apris?Toutlemonderestepétrifié,saufAudequicherchedésespérémentdesréponsessurnosvisages.Haleysedétournequandellearrive sur lui, Josh acquiesce, triste et impuissant.Valentin, subitement dessaoulé, tombe le cul sur latable basse, la bouche entrouverte. La fête est terminée. Retour brutal à la réalité… Les questionscommencent à s’enchaîner. Je suis incapable de répondre. Je recule, terrorisée par l’idée de devoirexpliquer,dedevoirreplongerencoredansmondésespoir.

–Stop!Toutlemondedehors!Foutez-luilapaix,elleabesoindedormir!Demain,ellesemarie!

Josh?Sontonsecnelaisseaucuneplaceàladiscussion.Haleysechargeduresteetpousselapetitetroupeà le suivre.SeulLucas tenteuneapprocheviteavortéeparmonnouveaugardeducorpsqui ledissuade en quelques paroles. Je porte rapidement une main à ma bouche. Je crois que je vais êtremalade.

***

JOSH

Appartementducouple,samedi9septembre,00h20

Merde,jenesaispascommentréagir.Rosevomitetpleure.J’ail’impressionquejesuisentraindelaperdre…

Bonsang,secoue-toi!

Gabriel!Commentréagirait-ilàmaplace?Ilgarderaitsonsang-froidetanalyserait lasituation.Le

souciestquejenesuispascapabled’anticipercommelui.

Arrêtedecogiter,utilisetoninstinct!

Jetentedefaireabstractiondemontéléphonequivibredansmapoche.Maisçacommenceàmetapersurlesystème.Jel’extraispourvoirleprénomdemonfrèresurl’écran.Rose,latêtedanslacuvette,necalcule plus rien. J’étais censé la surveiller…Que tout se passe bien pour elle, qu’elle profite de sasoirée…Ehbien,pourunplantage,c’enestun.Magnifique,d’ailleurs!J’ouvreledernierSMS.

Gabriel[Putain,répondsoujedébarque!]

Jeregardelesprécédents.Ilsouhaiteforcémentsavoirsielles’amuseetquelestsonétatd’esprit.OK,jesuismal.Qu’est-cequejeluiraconte?Jeneréfléchispasetphotographielapetiteblondeau-dessusdestoilettesenajoutantunpetitmot.

[Elleaprofitéunpeutrop.]

Jesais,c’estnaze,mais jeneprendraipas lerisquequ’ilsebarreenpleinenuit.Laréponsearrivequelquessecondesplustard.

Gabriel[Tuesunhommemort!Remets-lasurpiedsimmédiatement!]

Jesensquemaréponserisquedenepasluiplaire.

Moi[Etalors?T’avaispasenviequ’elles’amuse?Fautsavoir.]

Bon,çasuffit !J’éteinsmonportableet leglissedansmapoche.Jefouille les tiroirsde lasalledebains et dénicheun élastique. Je retourne le truc unmoment. Je n’ai jamais attaché les cheveux d’unefemme, mais là, je n’ai pas le choix : ceux de Rose tentent une plongée dans la cuvette. J’attrapedélicatementsalonguechevelureblondeetessaietantbienquemalderegrouperletout.

Concentre-toi!

Bon,c’est àpeuprèsça.Aumoins, ça tient.Étape suivante…Je la soulèved’unbras.Elle tangue,s’accrocheetmedévisage.

Non,Rose.Jenesuispaslui!

Jebloquesamainquitentedes’appropriermajoue.Jecontractelesmâchoires.Enréalité,jedétesteautantceregardquejel’aime.Jemesecouementalement.Unedouche!Voilàcequ’illuifaut.

–Gabr…

Jelacoupeaussisec.

–Rose,c’estJosh.Allez,ilfauttenettoyer.Jevaistedéshabiller.OK?

Elleacquiescebizarrement.Jenesuispascertainqu’ellecomprennecequejeluiraconte.Sonvisagesecrispe,leslarmesdéferlentànouveaulelongdesesjouesetsatêtes’aplatitbrutalementcontremontorse.Sesdoigtsseserrentsurmontee-shirt.

Moiaussij’aimal,Rose.Situsavais…

Jel’enlace, luipermetsdedéversersapeine.Soncorpstrésailleencoretandisquej’ôtesarobe.Jerefusedeluienleversessous-vêtements:elleirasouslejetdansl’état.Inconsciemment,jerepenseaujouroù j’aiprofitéde lasituation.Lesoirdemonanniversaire.Ellepenseque rienn’a jamaisexisté,maislaculpabilitéestbienlà,aufonddemoi,bienplanquée.Jedétourneleregard.Rosecommenceàréagir,àsefrotter.

Je l’aideensuiteàs’essuyeret jemeretournepour luipermettrederetirersesvêtements trempésetd’enfilerunpyjama.Jelaconduisaulit.Elleestépuisée.Sesgrandsyeuxgrisluttentàpeinequelquessecondesavantdesefermer.Jeresteplantédevantlelitàlacontempler.Jesuisconscientquejen’enaipasréellement ledroit.Enfinpasentièrement.Gabrielm’offre leplusbeaudescadeaux,maisaussi leplusterrifiant:resterauprèsdeRose.Àsaplace.Veilleretm’occuperd’elletoutensachantqu’ellenesera jamaismienne.Jeserai justeun leurre,unpansement.Cettesituationesten traindemeboufferetmêmesijeferain’importequoipourRoseetmonfrère,jeneparvienspasàmerésoudreàcetteissuedéchirante.

Gabrielprendtellementd’ampleurdansnosvies…Ilnes’enestjamaisrenducompte,maisc’estluilemeilleurdenous tous. Il en impose. Il émanede lui cequemoi etmêmeHaleyaurionsaiméêtre : laforce, la détermination, le pouvoir de refuser et de transgresser, la volonté d’imposer tout ce qui luisemble bon ou pas… J’ai l’impression d’avoir la cage thoracique comprimée dans un étau.Commentavancersansmonjumeau,mondouble,lapartiedemoilaplussolideetlaplusforte?Jerefouletrèsloinlespenséesquitententdetenaillermonesprit.Cen’estpaslemomentdem’apitoyer.Ilyaplusimportantquemoi.

J’allumedenouveaumontéléphoneetenvoieunnouveauclichédeRoseàmonfrère.Ilnerestequequelques heures avant son réveil. Comme Gabriel me l’a expressément recommandé, je prépare lesaffairesdeRosepourqu’ellenepaniquepasencherchantquelquechosequ’ellenetrouveplus.J’espère

aumoinsqu’elleneserapasmaladeouçameretomberadessus.

JepensequetoutestOK.Jetirelefauteuildubureauetm’yinstallepourobserverdanslapénombrececorpsétenduetenfinpaisible…

Jusqu’àcequelavienoussépare

« Sois unique, sois vrai, sois libre, sois toi-même, parce que la vie est trop courte pour êtrequelqu’und’autre.»JadeCaissy

ROSE

Appartement,samedi9septembre,10h02

C’est pas possible ! Je cours partout, Audeme poursuit, la main dansmes cheveux en tentant d’yinsérersespinces.

–Jelesai!

Valentinbranditmeschaussures.Jelesattrapeetlesenfilerapidement.HeureusementqueJoshatoutpréparéautrement, jeseraisenretard!J’aieuunmaldechienàmeleveret j’ai lecrânesensdessusdessous.Mameilleureamiesoupire.

–Rose,remetslespochesdeglacesoustesyeux!

Minceoùest-cequejelesaiposées?Jesuisangoisséeetmesamisencoreplus.Heureusement,ilsnem’ontpasinterrogéesurlamaladiedeGabriel…Jemedemandecequ’aracontéHaleypourlescalmer.J’avalelecacheteffervescentqueJoshmetendetj’obéisensaisissantlespoches.Jesuisdégoûtée,j’aiunetêteaffreuselejouroùjevaisdevenirlafemmeduplusbeaumannequindelaplanète!Ehmerde!Jerâle,pesteàtortetàtravers.Jemedétested’avoirétéaussistupide.D’une,jemesuismisedansunétatplusqueminableetdedeux,j’aigâchélasoiréedetoutlemonde…Unemains’emparedemonépauleetm’obligeàarrêterdegigoter.

–Assise!

LavoixtranchantedeValentinnemedonnepaslechoix.Jem’avachissurlachaise.Ducoindel’œil,j’observe la maquilleuse professionnelle s’emparer de son matériel tandis que mon meilleur ami lui

imposesesdirectives.Ilesttellementimpliquéqu’ilm’arracheunsourire.

–Enbref,faites-nousunmiraclesurcettetêtedemule!

Je grimace,maisme tais. Je croisemême les doigts en souhaitant qu’elle réussisse à dissimuler lemassacrequiornemonvisage.J’entrelacemesdoigtsàceuxdemonmeilleurami.J’aibesoindeluiplusquejamais.Moncœurbatlachamade.Jesuisnerveuse,angoissée,maiscequimetortureleplus,c’estl’impatience de retrouvermonCompliqué. Ne pas savoir où se déroulera lemariage est encore plusstressant. Gabriel a pris les choses en mains, mais à un tel point que finalement, c’est devenu unesurprise.Jemordillenerveusementmalèvre.

Camerondébarqueendégommantpresquelaporte.Nousnousretournonstoussurlui,surpris.Maislamaquilleusedétournepresqueimmédiatementmonvisagepourcontinuersontravail.Jetentedecomprendrelepourquoidecettearrivéefracassante.Mince,maisqu’est-cequ’ilsontàparleràvoixbasse?Forcément,monmeilleuramim’alâchementabandonnéepourassouvirsacuriosité.Ellemestresse,lanana,àmechatouilleraveccestrucs!Leurattitudecommenceàm’angoisser.LetatoueurestapparemmentdéjàrepartietValentinestderetour.Ilsourit…

–Qu’est-cequisepasse?–Çaneteregardepas.

Je grogne une énième fois et lève les yeux au ciel. La sonnerie de l’interphone retentit dansl’appartementetAudeseprécipiteenlâchantun«Jevousouvre»avantdeseretournerversmoietdememimerduboutdeslèvresun«Tabelle-mère»enappuyantd’unsouriremoqueur.C’estvraiqu’Èveaétéassezenvahissantecesderniersjours…DepuisqueGabrielestàl’hôpitalpourêtreexact.Avant,elleétaitplutôtdiscrète,maisdepuis,elleacommencéàm’appeleretàdébarquerentrouvantn’importequelprétexte.Jesupposequ’elleesttoutsimplementinquièteetc’estsafaçondecalmersonappréhension.Àpeineest-elleentréequ’ellesedirigeversmoi,leslarmesauxyeux.

Ahnon,pasdepleures!

–Tuesmagnifique,machérie!Jen’enrevienspasquemonfils…

Elleportesesdeuxmainsdevantsabouche.Joshintervientrapidement.

–Maman,laisse-lasepréparersinononfiniraparêtreenretardetlà,Gabrielrisquedenepasmâchersesmots.

Unpetitrireluiéchappe.

–Tuasraison.

Ilscomptenttousdébarquer?Noussommescombiendanscetappartement?Laportes’ouvreencore,maisjesuisdansl’incapacitédetournerlatête.Onenestaurougeàlèvres.Douglasseglissedansmonchampdevision.

–Mademoiselle,votrebouquetestarrivé.Jeledéposesurlatable.

Desrosesroses,j’auraispresquemiséunbilletsurça!

Tudeviendraispresqueprévisible,Gabriel.

Jesourispuisattrapemontéléphoneavecl’irrésistibleenviedeletaquinerunpeu,maisunmessagedesaparts’affichesurl’écranaumêmeinstant.

Gabriel[Franchement,bébé.Lacravate,c’estobligé?Ps:Jeluitrouveraisbienunetouteautreutilité…]

Jeretiensunrire,maisjesuisdansl’obligationd’attendrequelabruneapposemonrimmelavantderépondre.

[Ons’enfichedelacravate!PS:Enfin,pourlacérémonie…]

C’estfoutu,jesuisdansmabulle.

Gabriel[Oui,c’estcommelapetiteculotte,c’estfacultatif…PS:Cen’estenaucuncaspourqueturougisses,mêmesijesuiscertainquec’estdéjàlecas.]

J’apposemamainsurmajouerosie,maisl’autresangsuelarepousse,brisantaussitôtmonbien-êtresoudain.C’estpasencoreterminé?

–J’aifini.Vousvoulezvousvoir?

Ehbien,ilétaittemps!Jerépondsparlanégative.Jeregardebrièvementautourdemoietmesauvediscrètementavantquequelqu’und’autrememettelamaindessus.

–Roseoùest-cequetuparscommeça?

Valentinmerattrape.

–Auxtoilettes!–Tuvasfroissertarobe!

C’estbienledernierdemessoucis!JeluifourremontéléphonesouslenezetilécarquillelesyeuxfaceaumessagedemonCompliqué.Ils’approchedemonoreille.

–Sérieusement?

Jehausserapidementlesépaules.

–Jepèselepouretlecontre.

Ilm’emboîtelepas.Jem’arrêtenetetmeretourne.

–Tunecomptespasveniravecmoi,quandmême?–Non.Jepèselepouretlecontremoiaussi.

Ilestsérieux?Jerestedubitative,presquedansl’attentedesonapprobationoujenesaisquoi.

–Putain,foncepoupée!Fais-moirêver!

Jefroncelessourcils.Lefairerêver?

–Enfin,fais-lerêveretmoiparprocuration!

Jecalemespoingssurmeshanches,curieuse.

–Disdonc,toi.C’estsafutureréactionquit’exciteàcepoint?

J’ailedroitàunsouriretoutesdentsdehors.Jen’ycroispas!IlfantasmeencoresurmonCompliqué!Jem’apprêteàouvrirlabouche,maisilm’interromptencollantbrusquementundoigtdessus.Jelouchesursonongle.

–Necommencepasàt’offusquer.J’aidesyeux,c’estpourregarder.Çanesignifiepaspourautantqueçanevaplusaveclebeaugossederrièremoiqui,d’ailleurs,écoutelaconversationendouce…

IlseretourneetsalueHaleyquisemblegênéd’avoirétégrillé.

–Niquejecompteletromper.Enfinbref,mabeauté.Jevoulaisjustetedire…

Ilcalesespaumesdechaquecôtédemonvisage.

–T’emmerdepasaveclesprincipes.Visaujourlejouretarrêtedepenseràdemain.OK?Situascetatouage,cen’estpaspourrien.

Ilpointemacuissedudoigtetjesecouelégèrementlatêtedehautenbas,lesyeuxplongésdanslessiens.

–Etfilem’enlevercettefoutueculotte!

J’ai la vilaine sensation que tout lemonde nous regarde. Je risque un coup d’œil vers le troupeauéparpillédansmonsalon,etsurtoutversmabelle-mèreenadmirationdevantlebouquet.Jesoupiredesoulagement:faussealerte.

Jecoursm’enfermerdanslestoilettesettapoteavecfrénésiesurmontéléphone.

[Paslejourdenotremariage,quandmême!]

J’entendsalorslavoixdeDouglasrésonnerderrièrelaporte.

–Mademoiselle,l’heuretourne.

Oui,oui,jesais!Sérieusement,laissez-moiletempsderespirer!

–J’arrive!Deuxminutes.

Gabriel[Etpourquoipas…]

Ilestdingue,complètementdingue.

***

GABRIEL

Lieuinconnu,samedi9septembre,10h38

–T’esstressé?–Tut’esdéjàmarié?–Bennon.Tueslemieuxplacépourlesavoir.–Alorsferme-la!

Cameron abandonne son interrogatoire. À peine est-il arrivé qu’il me tape déjà sur le système. Ilallumesonjointets’adossecontrelemur.Lesquelquesvoituresprésentessurleparkingsontcellesdesemployés.Rosevoulaituntrucsimpledoncelleauracequ’ellesouhaite.Pastropdemonde,cérémonierapide et pas de niaiserie.Bordel, pourquoi est-ce que je suis angoissé comme ça ?Moi qui pensaismaîtriserparfaitementlasituation…J’ail’impressiondepartirenvrille.

–File-moitonmachin.–Jecroyaisquetuavaisarrêté?–Jet’enposedesquestions?

Ilmeletendetjem’enempareaussisec.

–Tupourraisaumoinsêtredebonnehumeur.T’aspaschangéd’avis,quandmême?–Sij’avaischangéd’avis,pourquoijeseraislà,ducon?

Iltapotenerveusementdupied.

–Gab,tum’emmerdes,là.Tuarrivesàmettremesnerfsenpelote!J’ail’impressionquec’estàmoiquetuvasenfilercettefoutuebague!–C’estmonpoing…

LacaissedeChadquifranchitlagrillemecoupedansmaréplique.

Là,monpote,prépare-toiàavoirlesnerfsauborddelarupture!

LepetitminoisdeMariasurlesièged’àcôténerisquepasdepasserinaperçueauxyeuxdesonfrère.Cameronseredressed’uncoup.Samâchoiresecontracteetlesveinesdesoncousontd’unseulcouplaseulechosequejeremarque.Jesavaisqueceseraitunemauvaiseidée,maisMariaestunevéritabletêtedemule.

–Putain,Gabriel.Retiens-moi,jevaislemassacrer!

–Calme-toi.Plustuserascontre,plusçaamuseratasœur.

Ilsembletoutàcoupnerveux,sefrottelecrâneetrespirebruyamment.

–Etjesuiscenséréagircomment?

Cameronm’épie comme si j’avais réponse à tout. Je l’ignore.Mais il neme lâche pas du regard.Celui-cidevientmêmeinsistant.

–Soisplusmalin.–Vas-y,petitgénie.Déballetascienceetvite!

Marias’extirpedelavoitureavecsonnouveaucompagnonqu’elles’empressed’attraperparlebras.Elleabuse!JehausseunsourcilàlavuedeChad.C’estlapremièrefoisquejelevoisbiensapé.Ilamêmeosé lepantalonnoir et la chemise. J’ai enviede rire,mais le coupdecoudedemonvoisinmeramèneànotreconversation.

–Comments’appelait le typequi luiabrisé lecœuretquetuasmenacédetuerquandila tentéderevenir?

UnsourireencoinsedessinesurlabouchedemonpoteetsonregardseposesurMariaavecunetelleassurancequejecroisquejen’airienbesoind’ajouterd’autre.Ilmurmure:

–Onestvraimentdeuxenfoirés.

Bon,çasuffitlesconneries!J’attrapemonportablepourm’assurerquetoutsepassecommeprévu.

Moi[J’espèrepourtoiquetoutestprêt!]

Josh[Ouais,jusqu’àlamoindrelignedetafichueliste!Etarrêteavectesmessages,tumesaoules!]

Jesouris.Cepetitconcommenceàavoirdurépondant.

Finalement,ilsepourraitbienquetusoismonjumeau.

Jeserre lesdents,rangemontéléphone,etm’octroieunepausedétente.Cettepetitemerveilleestentraindemefaireplaner.Putain,c’est l’extase!D’un,j’enfermecettemerdequiestentraindemetuerdans une cellule capitonnée et de deux… jememarre. Comme un idiot, j’observe le joint entremes

doigts.Unemains’agitedevantmonvisage.

–Gab?T’esavecnous?

Hein?Chadm’arrachelefiltredeslèvresetleglisseentrelessiennes.

–Assezrigolé.Tuviresbizarre.T’esflippant.

Cameron serre sa sœur contre lui. Cette petite teigne se débat pour retrouver l’autre taré dans soncostumetroispièces.Sansdéconner,etc’estmoiquisuisflippant?Qu’ilssedémerdent!Jemetourneversmonmeilleurpote.

–T’asapportélematos?

Ilhausseunsourcil.

–Jenesuispassuicidaire.Tum’assuffisammentharcelé,voiremenacé,pourquejen’oubliepas.

Jesourisencoreunefois.Toutfileàlaperfection…Uncoupd’œilàmamontre.EncoretrenteminutesàtueravantqueRosearrive.L’effetduproduitcommenceàsedissiper…Àmoinsquecettegarcesoitplusfortequedespsychotropes.Çamériteunepetiteexpérience…Jeredressemonvisage,déterminé,souslesregardsattentifsetcurieuxdestroisabrutis.Cameron,ayantdéjàenvisagémafutureréclamation,froncedéjàlessourcilsalorsqueChadsemarre.

–Jenelesenspas…–Çatombebien,onnet’apasdemandétonavis!Roule.

Ilsouffleets’exécuteenmarmonnant.

–Rosevametuer…

Quinzeminutesplustard,jesuisvautrésurunechaisesurleparkingàmemarreravecmespotes.Mamigrainegrillemesneuronesenarrière-plan,maismonautomédicationsupplanteletout.Enbref,c’estladescente aux enfers,mais jem’en rends à peine compte. J’observe encore une fois le joint entremesdoigtsetcapteleregarddeCam.

–Merde,qu’est-cequetufouslà-dedans,sérieux?–DesCrackers!

Cameronestcomplètementallumé:ilrigolependantqueMariaenfoncesalanguedanslabouchede

Chad.Toutvabien!

Unemainseposesurmonépauletandisquemonpoterepartdanssondélire.Jemeconcentresurlesdoigtsresserrantleurprise.Quoi?J’aioubliélemariage?Jesursaute,retrouvantsubitementlaraison.Sic’estRose,jesuisunhommemort.Jetournelégèrementmonvisage.Pastropvite,nonplus:toutsedistordsousmesyeux.

–Gabriel,tapetitefêteprivéeestterminée.Suis-moi.

DocteurDévraux…

–Mouais.

Jeglisseunemainsurmamâchoire.Il fallaitbiens’endouter :cettepetitefouineestpartout.Jemesoulèvetantbienquemaletilm’embarqueàsasuiteenplaçantunbrasdansmondos.Uneportes’ouvresousmonnezetJackm’inviteàenfranchirleseuil.Jem’assoissurunfauteuilqui,jelepressens,vasetransformerenchaisedetorture.

–Gabriel,mongarçon,ressaisis-toi.

Jesuisdocile,nerâlepaslorsqu’ilrelèvemamanchepourprendrematensionalorsqu’ilfroncelessourcils.Ildéboutonneaussitôtmachemiseetm’ausculte.

–Regarde-toi,turessemblesàunzombie.

Ildégaineuneseringue.Jelefoudroieduregard.

–Horsdequestion!Mêmeautrente-sixièmesous-sol,t’auraspasmoncul!

Dévrauxrigoleetplantesonaiguilledansmonventrepouryinjectersonproduit.

– Toujours autant d’humour à ce que je vois… C’est bien, mais n’oublie pas l’essentiel. Ce jourt’appartient.Commebiend’autres.Vis-lesàfond,profite,maisarrêtedejoueraucon.

Marespirationestirrégulièreetdessueursfroidesmecollentsubitementàlapeau.Ledocpinceleslèvresenm’observantm’enfoncer.Ilfinitparmetendreunebouteilled’eau.

–Tupensaissincèrementt’ensortirenfumantcettecochonnerie?Tuestropfaiblepourça.EtRose,tuyaspensé?Nousavonsbesoindetoi.

Desgouttesde sueurglissent surmon torsequi se soulève et s’affaissedouloureusement. Je détestequandJackmesortsamoraleàdeuxballes,maismerde,ilaraison.Jedéglutisaprèsplusieursgorgées.

–Elleestarrivée?

Ilsourit.

–Elleestsublime.

Jecontractelesmâchoires.J’aiautantenviedetoutfoutreenl’airquandjevoisl’étatdanslequeljemesuisfichuquedemebarrerenkidnappantRose.Jefermelesyeuxenl’imaginantsedirigerversmoi,danssarobe…Jel’imagineplusquesublimemêmesic’estcarrémentflippant.J’ail’impressiond’avoirunflashdecequivasepasser.Ledocacarrémentcassémondélire…Laportes’ouvrebrusquementsurmonjumeau.Ilétudierapidementmacarcasseavantdesecrisper.

–Merde,qu’est-cequisepasse?–Rien,jeprenaisunbaindesoleilauclubMed.

Il serre les poings pendant que je me redresse. Il interroge du regard le pro de la seringue. C’estvraiment pénible ! Jeme casse. J’envoie la porte valsée d’un coup de pied et fonce aux toilettesmerafraîchiretréajustermoncostume.Roseestici…J’aibesoindemecalmer,queriennetransparaisse:jerefusequ’elles’inquièteaujourd’hui.Jesouffledevantlemiroir,observeuninstantl’autreabrutihyperstressé qui me toise. Tout est OK, pas la peine de me saouler. Je m’appuie sur la faïence, j’ail’impressionquemoncœurdérailleparinstant.

Toi,cen’estpaslemomentdemejouerunsaletour!

Jeserrelesdents,relèvelatêteetobservemonteintblafard.Lescernessousmesyeuxetmesjouescreuséesreflètentmadestinée.

Putainmec,t’espresquemortoualorst’enastoutl’air!

Unesaloperiedebouleseformedansmagorgeetm’empêchededéglutircorrectement.L’airdevientoppressant. Je clos les paupières, cherche une image en particulier, un visage… Un seul sourire…J’ouvrebrusquementlesyeuxetmonrefletmefixeintensément.

–Tunechoisiraspasàmaplace!Aujourd’hui,t’aspasintérêtàm’emmerder!

Undoigtd’honneuràcetteputequimebouffeetmevoilàdehors.Déterminé,jefonceoccuperlaplacequiestlamienne.

***

Postésurl’espèced’estrade,j’envisagelasalleetlesinvités.Jen’ycroispas.Mamèrepleuredéjà!Variantentreréalitéetdéliredûàmesexcès,jeremarquelesticsnerveuxdechacun.Ceuxdemesdeuxtémoinspostésàmagauchepourcommencer.JoshréajustesacravatepourlacinquièmefoisetCameronsouritcommes’ilyavaitunestrip-teaseuseenfacedelui.Mesyeuxnaviguentsurlerendudecettesalle,surlesfleursetleslumièresétincelantesrendantledécorpresqueirréel.

Commedansunrêve…

Valentinabienbossé!Jem’arrêtesurHaley,installéàcôtédemamèrequimâchouillenerveusementsajoue.Plusçava,moinsjeledétesteetçam’emmerdeprofondément.JecontinueetretiensunrireàlavuedeChadobservantlesjambesnuesdeMariaavecgrandintérêt.Quelconcelui-là!J’ail’impressionquec’estlanuitdenocequil’intéresseleplus!

C’estlong,qu’est-cequ’ilsfichent?

Valentin,àmadroite,guettelaporteensetordantlecou.Aude,colléeàlui, triturenerveusementsarobe. Je jette un coup d’œil derrièremoi. Le gars censé nousmarier tient fermement son bouquin deprièresentresesdoigtsplusraidesqu’unbalai.S’iloseprononcerlaphrasefatale,jeluifaisboufferlespagesuneparune!Jel’aibrieféavantlacérémonieetilaintérêtderespecterledeal!

Jemereconcentresurnosinvités.Suruninvitéindésirablepourêtreexact.Lemeilleurpourlafin:mon saloparddepère, droit, engoncédans son complet noir comme s’il était déjà àmon enterrement,discuteavecladoctoresse.Jen’enreviensmêmepasqu’ilaitosésepointerici.Mêmesij’aiacceptéàcausedemamèreetaussipouravoirlibreaccèsauSaphir,jemesuisimaginéqu’ilresteraitenretrait.Quand je repense à l’autre soir, une subite bouffée de chaleur m’assaille et je resserre les poings.L’affrontementaétéplutôtbrutal.J’étaiséméchéetluiaussi.Satentatived’avoiruneconversationm’amishorsdemoi.Dequeldroit?Surtoutaprèsavoirsaccagélamaisondemamèreetl’avoirencoreunefoisdepluslaisséedansunétatpitoyable.Jeluiaicrachémahaineauvisage,j’auraisétécapabledeletuerdemespropresmainssiJoshn’étaitpasintervenu…

Bonsang,calme-toi!

Lamusiqueannonçantenfinl’arrivéedeRosemeramènerapidementlespiedssurterreetmepousseàimitersonmeilleuramiet fixer laporte.Çayest, jesuishypernerveux.Cequiestassezrarepour lesouligner.Sensationétrange…

Laportes’ouvreenfin…

Merde…

J’aiuneputaind’hallucination!Monpalpitantmartèlecommeundiabledansmacagethoracique.C’estinsensé,j’ail’impressiondevoirRosepourlapremièrefois!Jechercheàenfoncermesmainsdansmespoches,abandonneetglissefinalementl’uned’entreellessurmanuque.Monangeestsublimedanssarobeblanche,simpleetsatinéeavecsescheveuxtresséssurlecôté.Mesyeuxneratentabsolumentrien.Chacundesesgestes,labeautéangéliquedesestraits,sonmagnifiquesourire…AccrochéeàDouglas,elleavance,neregardeabsolumentquemoi…Unfrissonextrêmementagréableglissesousmapeau,s’infiltrejusqu’àmesos.Çayest,j’aiabsolumentzappétoutlemonde.Iln’yaplusqu’elle…Sonsourireencemomentprécisvauttouslessacrificesdumonde.Jeseraiscapabledetoutetn’importequoipourqu’ilresteainsi,éblouissant,transfigurantl’éclatdesonbonheur.Elleestdivine,rayonnante…

Jeseraismêmecapablededétruiretouteslesétoilespourquetusoislaseuleàbrillerdansleciel,monange…

***

ROSE

LeSaphir,samedi9septembre,11h30

Douglasetmoiattendonsdevantlesportesquelamusiquelancelesignalpourentrer.Quandjeluiaidemandédem’accompagnerjusqu’aupieddel’autel,j’aibiencruquej’allaistirerunelarmeàceroc.Luietmoisommesunisparunlieninvisible,malgréqu’iln’yaitjamaiseudediscussionsapprofondiessurnosvies.Nousavonschacunperduénormémentdechoses.Jeresserremonbrasautourdusien.

–Pastropangoissée?–Jenesaispasexactementcequejeressens,maismesjambestremblent.Ellesnem’écoutentplus.

Ilm’offreunmagnifiquesourireetréajusted’unemainunedemesfleursblanchesdansmachevelure.J’observesonairsérieuxalorsqu’ils’affaire.Jem’attardesursestempesgrisonnantesetsursonregardquejepensaismarron.Aufinal,d’aussiprès,sesyeuxtirentunpeusurlevert.

–Toutsepasserabien.

SemarierauSaphir,quil’eutcru?Jepensequesij’avaisdûchoisirunendroitpeuconventionnel,j’auraisoptépourlemême…Aprèstout,c’esticiquenousnoussommesrencontrés…Lespremièresnotesbrisentmaconcentration.

–Jenesuispastroprouge?

J’ailesjouesbrûlantes!

–Justeunpeu,maiscelavousdonnebonnemine.Vousêtesprête?

Est-ceque je suisprête?À traverser sans trébucher, ça, je n’en suis pas certaine.Mais à rejoindreGabriel,oh,çaoui!J’iraismêmeencourantsic’étaitpossible.

–Aprèsvous,MadameAlcott.

MadameAlcott…

Jesouris,inspireprofondémentenlissantmamagnifiquerobeetacquiesceenmeraccrochantunpeuplusàmongardeducorps.

Lesportess’ouvrentdevantmoi.MonDieu,c’estsplendide!J’enprendspleinslesyeux…Ilyadesfleurs blanches absolument partout, le tapis rouge qui conduit jusqu’à l’autel est entouré de petiteslumièresscintillantes.Desdrapésblancetgrisperlerecouvrentlesmursetonttotalementtransforméslasalle.Jenereconnaisabsolumentrien…Jeneprêteattentionàaucuninvité,meconcentresurchaquepas.Monregarddévieinconsciemmentversunpoint,faceàmoi.Surlui,monCompliqué.HeureusementqueDouglasmepousse à avancer parceque la brusque chaleur qui s’infiltre sousmapoitrine est intense.J’espèrequejen’aipaslaboucheentrouverte.Aupire,tantpis…

Gabrieldanssoncostumegrisanthraciteestjuste…Jenetrouvepasmesmots…Jerespiretantbienquemal.Moncorpsaimeraitvraimentavancerplusvite,justepourletoucher,maisnousdevonsnousentenir aux règles.Lesprunellesgrisesd’unedouceur incroyabledeGabriel nequittentpas lesmiennesjusqu’àcequesesdoigtss’emparentdemamainetlaserrentfermement.Nousnousobservonspendantunlongmoment.Intensément.Commes’iln’yavaitplusquenousdeuxaumonde.Jeremarquesachemisenégligemment déboutonnée, son tatouage ressortant magnifiquement sur sa peau plus pâle qu’àl’accoutumée.Ilsembleàl’aise,commetoujours…Lavoixduprêtrenoussortdenotretranse.

Monattentions’attardesurmesamisquim’encouragentavecleurssourires.Jen’entendsriendecequeracontel’ecclésiastique.Jenesaispas…Jesuissurunnuage,loind’ici…Gabrielsembledanslemêmeétat.Letempsestcommesuspendu.Jen’arrivepasàcroirequ’onyestenfin,quecemomentestréel…

–Bébé,c’estàtoi.

Hein?Quoi?Qu’est-cequiestàmoi?Mince,jemesensidiote,d’uncoup.Gabrielseretientderireets’inclineversmoi:

–Un«jeleveux»suffira.–Jeleveux!

C’estsortidufondducœur!

Rose,iln’yaquetoipourêtredanslalunedansunmomentaussiimportant!

Maraisonlèvelesyeuxaucieletsesépauless’affaissentpardépit.Joshapparaîtdansmonchampdevisionetdonnemabagueàsonfrèrequirelèvemonvisageversluiduboutdesdoigts.Legrisclairdesesyeuxmefoudroie,glissesurmonvisage.Jesuisplusqu’attentive.

J’ailoupélamoitiédelacérémonie,maisjenerateraipourrienaumondeunseuldesmotsquetut’apprêtesàprononcer.

–Rose,tuesarrivéedansmaviecommeunbouletdecanon.Jenet’attendaispas,netevoulaispas,mais tu as tout bouleversé d’un simple regard… J’aimerais te promettre tant de choses, te dire qu’onpartageranotrevieensemble…

L’amouretladouleursemélangentsursestraits,bouleversanttoutmonêtreaupassage.

–Qu’onauradestasdeprojets…Maisceneserapaslecas…

Sontons’affermitd’uncoup,sespaumesencadrantdésormaismonvisage.

–Tueslaseuleàavoirfaitbattremoncœur.J’iraisjusqu’àdirequetuluiaspermisderevivre.Monange…Jeteprometsdeuxchosesdontjesuiscertain…

Magorgesenoue.Jeboischacunedesesparoles,autantréconfortantesquedestructrices.Leslarmesbuttentcontremescils.Jesuissubmergéepartellementd’émotionsquemalèvretremble.

–Lapremièreseradet’aimercommeundinguequoiqu’ilsepasse,mêmesijenesuisplusauprèsdetoi.Laseconde…Jeteprometsquetuserasheureuse,quejenet’abandonneraijamais…

Jelâcheprise.Unepluies’abatsurmesjouesetmonregardnequittepaslesien.

–Nepleurepas,s’ilteplaît.Tuverras,jeseraitoujourslà.Ici…

Ilapposedélicatementsamainsurmapoitrine.Moncœurtambourinecontremescôtes,répondàcetappel,aimetellementcethomme…Sesdoigtstententd’effacerlestracessurmesjoues.

–Je t’aime…commepersonnen’enest capableet je tedonne tout.Absolument tout ceque je suis.Sansconcession.Tonbonheurseralemien.

Ilmesourit,s’emparedemamain,glisseàmondoigtlesymboledesonamourpourmoi.Ilposeseslèvressurmonfront.Jetremblecommeunefeuille:l’émotionaraisondemoi.Sonfrontsecollecontrelemien.Sonregardmerassure,m’apaise.

–Monunique…Ilfautteressaisir,c’estàtontour.

Sonpetitclind’œilmepousseàlâcherunlégerriretroublé.Jen’arrivepasàquittersesyeuxplongésdans les miens. C’est la plus belle chose qui m’ait été donnée de voir… Gabriel me repousse etm’encouraged’unsignedetête.

OK.Cettefois,c’estàmoi.

J’inspire profondément et bombe la poitrine, sûre demoi.Ma raison etma conscience enrubannéesdans des robes de soirée lèvent leur pousse en l’air etm’incitent àme lancer. Jeme tourne vers lesinvités:c’estàl’assembléequejedécidedem’adresser.

–Vousvoyezcethommeprèsdemoi?Certainsontunehauteestimedelui,quoiqu’ilenpense…

Un coup d’œil vers mon Compliqué, très attentif. Un échange de sourires discrets et je reprendsposition.

–D’autresn’ontpassulejugeràsajustevaleur…

Jem’attardesurlevisaged’Alessandroetlefoudroieduregard.Ilpincesubrepticementleslèvresetseredressesursonsiège.

Oui,c’estengrandepartieàvousquejem’adresse!

–Gabrielestlaplusbellepersonnequecetteplanèteaitjamaisportée.Quiestenmesuredesevanterdeleconnaîtreréellement?Pourmoi,ilvautplusquen’importequi.

Lesilenceestlepluscomplet,seulemavoixrésonne.

–Jesuisconscientequec’estnotremariage,quecen’estpaslemoment,maisçamepèseet j’enaimarre de la fermer ! Il y a des choses que je ne suis pas censée savoir, d’autres que je n’apprendraisûrementjamais.Pourmoi,c’estamplementsuffisant.Iln’yaaucuneexcuse,aucunpardonàtraitersonpropreenfantdelasorte.Maisjevousapprendsquelquechose:vousavezbeautenterdelerabaisser,deledétruirepsychologiquement,iln’enestdevenuqueplusfort,plusmerveilleux…

Letoussotementd’Audedansmondosmepousseàréaliserquej’yvaisunpeufort…Touslesyeuxsont braqués surmoi, la surprise sur les visages est bienprésente.Régler ses comptes le jour de son

mariage…Est-cequejesuisfolle?

J’espèrequ’iln’estpasencolère…

Jemetournelentement,presqueauralenti,versGabriel.J’appréhendetellementsaréaction…L’oncedesourireinstalléesurseslèvresetlafascinationquejelisdanssesirismerassurentinstantanément.Samains’emparedemachutedereins,merapprochedelui,m’électrise.Mapoitrinesesoulèveavecforceavantquejeterminemoncouplet.

–Gabriel… Je t’aime…Tel que tu es, en intégralité. Tout ce que tu es, ce que tu caches.Tout. Jel’accepteentièrement.Jeteprometsdet’aimerjusqu’àmonderniersouffle.

Mespupilless’échappentdessiennes,naviguent,cherchentautourdemoi,envain.Jechuchote:

–Oùesttonalliance?–Elleestlà!

Camerondéboule,s’imposeentrenousdeux,unemallettedanslesmains.Maisqu’est-cequisepasse?Je reculed’unpas.MonCompliquém’offreunsourireagrémentéd’unhaussementd’épaule.Qu’est-cequ’ilprépareencore?Lasalleseremplitdechuchotementsalorsquel’amideGabrielsortsamachineàtatouer.Jerestemuettefaceàlascèneetécarquillelesyeuxquandilallumesonappareil.Complètementahurie, jecherchedes réponsesà traversAudeetValentin.Envain. Ils sontconcentrés, enadmirationdevantlespectacle.JeregardeJoshquiimitesonfrèreenm’offrantunclind’œil.Jemerapproche,tented’apercevoirquelquechose,une fois,deux fois,mais lacarruredeCameronneme lepermetpas.Auboutd’uncertaintempsjemerésigneàpatienter.

–J’aiterminé.

Cameronseredresse,seretourneversmoi,puissepencheprèsdemonoreille.

–Bienjoué,tulesasmouchépetitefleur.

Ildisparaîtderrièremoiet j’observelamaintendueversmoi.Monprénomgravésur l’annulairedeGabrielàlaplacedel’alliance.Jeplaquemesmainscontremeslèvresetétouffeunpetitcouinementdesurprise.

–Tuvoisça,bébé,c’estpourlavie.Onnemel’enlèverajamais.

Un«jevousdéclareofficiellementmarietfemme»avaguementletempsd’arriveràmesoreillesqueleslèvresdeGabrielsontdéjàsurlesmiennes.Moncœurbonditdansmapoitrinealorsquemesdoigtscherchentàs’accrocheràlanuquedemonépoux.

Monépoux…

Jepensaisquelapesanteurdemoncoupletauraiteuraisondelamajoritédesinvités,maisnon:lesapplaudissementsetsifflementsrésonnentautourdenous.LaprisedeGabrielsedesserre.

–Rose,tuseraisprêteàfaireuntrucdedingueavecmoi?

Jeleregardeàdeuxfois.Lesdrapéstombent tousaumêmemoment.Desflashsnousassaillent.Descrisrésonnentdetoutepartetunemusiquepuissanteenvahitlasalle,pulsedansmesveines.Bonsang,d’oùsortenttouscesgens?Mescollègues, lesamisdeGabriel,despersonnesdontjenemesouvienspasouquejeneconnaispas.Lasalledevantmoiseremplitàunevitessedingue.

–Alorsbébé,tun’aspasréponduàmaquestion?–Maintenant?–D’aprèstoi.

Jeluioffremonplusbeausourire.

–Cours!

Quoi?Jen’aipasletempsderéaliserqu’ilm’entraîneàsasuite.Nouszigzaguonsentrelafouleamasséeautourdenous.Desfélicitationsfusentsurnotrepassageetjerisalorsquenousfranchissonsd’unseulpaslaportebattante,maindanslamain.Jepeine,soulèved’unemainlebasdemarobe.

–Tuescomplètementdingue!–Oui.Detoi,bébé!

Retrouvezletome4dèsle17mars!

Quelquesextraits

GetHigh

AvrilSinner

Raphaëlle, surfeusebretonneexiléeàParis, contrôle savieavec rigueur.Mais lorsqu'elle rencontreEdern et Jean, deux amis sombres et mystérieux, notre héroïne perd tous ses moyens et se laisseembarquerdansunerelationsulfureuse.Raphaëllearrivera-t-elleàsurvivreàcetriangleamoureuxsansoublierquielleest?

ParAvrilSinner.

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Extrait

Presque19heures…Bougerdececanapédanslequeljemevautredepuisaumoinscinqheures,voilàcequ’ilfaudraitquejefasse!Maisnoussommeslundi.Jenetravaillepasaujourd’huietalternealorsentremonlitetmoncanapé.Fumer,lire,refumer,regarderunesérieetéventuellementmanger.C’estàçaqueressemblentmesweek-endsdepuisaumoinssixmois.Messemainesnesontpastrèsdifférentesnon

plus.Saufqu’ilmefautsortirpouralleraucentremédicaldanslequelj’aimoncabinetdepsychologuedepuisunan.

Jem’extirpe enfin demon refuge et quitte le salon en direction dema chambre. Le regard perdu àtraverslafenêtre,jescrutelesgensmarcher,latêterentrée,lesmainsenfoncéesdanslespoches.Ildoitfairefroid.Noussommesennovembre,j’ailaflemmedequitterlachaleurdemonappartement.

Installéedanscedeux-piècesparisiendepuismaruptureavecMarc,jepensesouventàlui…Tropàmongoût.Noussommesrestésamis,maiscelafaitsixmoisquejenel’aipasvu.Depuisqu’iladécidédevivresonrêve:surferdanslesplusbeauxspotsdumonde.Lui,aumoins,ilasufairequelquechosede cette rupture.Moi, jeme demande parfois si c’était la bonne décision et commence à croire qu’ilresteramonseulgrandamour…Jel’aiconnuàdix-huitansetmisfinànotrerelationàvingt-six.Huitansà vivre une histoire au début passionnelle, compliquée, devenue progressivement confortable… Noscaractères forts et indépendants conjugués ànotrepassionpour le surfnousont rapprochés,mais celanousaaussiamenésàsouventnousaffronter.Jenesaispluscombiendefoisnousnoussommesséparéspourtoujoursrevenirl’unversl’autre.Cettefois,c’estdifférent.

Quandnousavonsaménagéensemble,nos affrontements sontdevenusdes compromis.Disonsplutôtqu’incapablesdenousquitternousavonsoptépourle«onnes’imposerien,onn’exigerien».Toutestalorsdevenucalmeentrenous.Tropcalme.Commeunemersansvagues.J’aifiniparnepluslevoir,neplus rien ressentir, juste savoir qu’il était là. Nous avons vite basculé dans l’ennui, le rien. À rêverd’avant… Deux surfeurs, natifs des côtes escarpées de Bretagne, échoués sur une plage de la Côted’Azur.

Jesuispartieunsamedisanschercherleconflit,ensilence.Unsursautdeviem’afaitprendrecettedécisiondansl’espoirderéveillermesémotionséteintes.Provoquerunetempêtesurcetocéansansvie.C’estcequ’ils’estpassé.Dumoinslapremièreannée.

Ilyad’abordeulasouffrance,lemanque.Uneprofondetristessemêléeàl’angoissed’êtreloindelui.Mais,aumoins,jeressentaisquelquechose.Puis,avecl’aidedemestroisamiescélibataires,jemesuisréinséréedans laviesociale, lemondedesvivants.Leréveil futbrutal.J’aimalnégocié lavague.Ledésirdesortir,parler,manger,baiserm’aexploséeenpleinefiguretombantalorsdansl’excèsinverse:j’airencontrétropdegens,tropbu,tropfumé,tropcouchéàdroiteetàgaucheavecdesmecsquejenesupportaispasplusdequarante-huitheures.Mêmesicettepériodeaétéintenseetriched’enseignements,j’enressorsaujourd’huifatiguée,blasée.Celan’afaitqu’accentuerl’idéeden’êtrepluscapabled’aimercommej’aiaiméMarcautrefois.Suis-jecondamnéeàl’ennuisurleplansentimental?

Aujourd’hui,mevoilàrevenueaupointdedépart.Depuisquelquesmois,jesuisdenouveauélectro-encéphalogrammeplat,commeanesthésiée.Plusaucunressenti,nienvie,nidouleurs,niexcitation.Maispourl’instant,çameplaît.J’enarriveàcroirequejem’auto-suffisetsouhaitequepersonneneviennetroublermaquiétude.Jenelepermettraipas.Vivreseule,totalementindépendantemeravitmêmesijeflirteparfoisavecl’isolement.

Nefermepastaporte

Lanabellia

EmilyvitavecsasœurTracy.Depuispeu,latranquillitédelajeunefemmeestremiseenquestionparDévinDaney,lepetitamidesonaînée.Emilynelesupportepasetils’amuseàlarendredingue.Elleestintrovertie,ilestdévergondé.Elleaimelire,ilpassesontempsàjouerdansunbaravecsongroupe.Ellecherchequelqu’undedouxetattentionné,c’estunbadboy.Emilyn’arienàvoiraveclui,alorspourquoisesent-elleautantattirée?Finira-t-elleparsuccomberàsoncharme?

ParLanabellia.

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Extrait

1.Lapinsmouillés

Ah!

Ma sœur arrive avec son horrible et tout autant détestable petit ami : Dévin Daney. J’attrapemonromanetmeplongedansmalecturepourévitertoutediscussioninutile.Tracyestdéjàentraind’arpenterlesalondelongenlargeenhurlantaprèssonDévin.Jel’observediscrètementpar-dessusmonbouquin:elleesténervée.Seslongscheveuxblondsflottentderrièreelleetsescourbesvoluptueusess’agitentdans

touslessens.

– Tuesunenfoiré,Dévin!Jen’arrivepasàcroirequetuaiesosérecommencer!

Etc’estreparti!

L’incriminé,quantàlui,s’esttranquillementinstallésurl’accoudoirducanapéetal’airdesefoutrecomplètementdelaénièmecrisedejalousiedemasœur.Jenecomprendspascommentelleréussitàlesupporter. Ils sont ensemble depuis sixmois et il l’a déjà trompée cinq ou six fois, sans compter sesroulagesdepellesintempestifsàdroiteetàgauche…

Ellepoursuitsapetitecriseetnil’unnil’autrenes’intéressentàmoi,cequim’arrange.Sij’aibiencompris, cette fois, elle l’a chopé dans les toilettes d’un bar en train de draguer une des serveuses.Connaissantmasœur,draguersignifieplutôtqu’ilavaitsalanguedanslabouchedeladiteserveuse.

Il faut avouerqueDévin est vraimentun trèsbel homme. Il est grand et sublimementbienbâti.Sescheveux,d’unbeauchâtainfoncé,sontcoiffésunpeun’importecomment,maiscelan’entacheenriensonstyledebadboyténébreux.Etpourneriengâcher,sesyeuxgrissontunepuremerveille.Maisc’estsanscomptersoncôtéinsupportable,désagréableetgrossier.Dévinestimbudelui-même,ilnerespecteriennipersonne.

Jenelesupportepas!

Ma sœur fonce à l’étage, excédée par le comportement léthargique de son petit ami.Ce dernier sevautresurlecanapé,justeàcôtédemoi.J’aidéjàenviequ’ilquittelamaison.

– Salutdindon,tulisquoi?

Enquoiçaleregarde,sérieux?IldoitavoirleQId’unehuître.

– Rien.

Je me recule et tente de reprendre ma lecture, mais c’est peine perdue, car le livre m’échappesoudainementdesmains.

– Dracula!

Ilexplosederire.

– Rends-moiça,Dévin!

Ilselèveetfeuillettelebouquinensedandinantdevantmoidanssonjeansnoir.

– Alorscommeça,tuaimeslessuceursdesang?

Rienquelesondesavoixm’irriteauplushautpoint.

– Tun’esqu’uninculte!Tun’yconnaisrien!

Ilretournelelivre.

– C’estdequicemachin?BramStoker?Hum…

Ilreplongelenezdedansens’installantàcôtédemoi.

– Allez,rends-le-moi,s’ilteplaît.– Non,jelegarde!

Illerangeàl’intérieurdesavesteencuiretsemetàrireunpeutropexagérémentàmongoût.

Quelcon!

Lespiaillementsdemasœuremplissentdenouveaulapièce.

– Dévinqu’est-cequetufabriques?Laisse-latranquille.Tuestoujoursentraindel’emmerder!Fermemarobeplutôt!

Ilselèveets’exécuteavecunsourireaucoindeslèvres.

– Tunepréfèrespasquejetel’enlève?

Ellegloussecommeuneidiote.Sacolèreestdéjàbienloin.Elleestfolledelui,commelaplupartdesfillesde lavilled’ailleurs. Jeneme fatiguemêmepasàessayerde récupérermon livre. Je saisdéjàqu’ilnemelerendrapas.Masœurattrapesavesteavecgrâceetl’enfile.

– Emily,onrentrerasûrementtard,est-cequ’Edpassecesoir?– Non,jenepensepas.

Edward est mon copain depuis trois mois. C’est un garçon charmant et très gentil que j’appréciebeaucoup, mais ce n’est que le début de notre relation et nous ne souhaitons pas nous étouffer

mutuellement.

– Tuasenviedenousaccompagner?Ilyaunconcertcesoir.– Nonmerci,jepréfèrelire.– Emily,sorsunpeu!Tuesunvrairatdebibliothèque!Éclate-toi,bonsang!

Elle n’insiste pas face à mon désintérêt. Je jette un regard noir à Dévin qui me toise plus quenécessairedel’autrecôtédelapièce,unsouriresatisfaitfichésurlevisage.Ilsedétournesubitementetfonceendirectiondelasortie,Tracyluiemboîtantlepas.

Quandj’entendsenfinlemoteurdesaFordMustangShelby,jesoupiredesoulagement.

Vivreencolocationavecmasœurétaitunebonneidée…audépart,avantqu’elleneparvienneàmettrelamainsurDévin.Cequiluiaprisaumoinsdeuxansetluiavaluunnombreincalculablededéceptions.

Maintenant,jedonneraistoutpourhabiterseule.Maishélas,mesmoyenssontlimités;jesuisvendeusedechaussuresdanslagalerieducentrecommercialdelaville.Masœurytravailleégalement,maisdanslaboutiquedecosmétique.Ellearéussiàdécrocherunplein-tempsetmoiseulementunmi-temps,cequilimitemonirrésistibleenviededéménager.

C’estdommage,parceque lapetitemaisonquenousavonsdégotéeestvraimentsympa.Nousavonsdeuxchambresàl’étage,pastrèsgrandes,maissuffisantes,plusunequinoussertdedébarras.Lesalonestplutôtspacieux,bienqu’unpeuvide.Nousavonsquelquesmeublesderécupération,maisl’avantagec’estqueleménageestrapide.Lacuisine,parcontre,esttoutepetite.Ilyajustelaplacepourunetableetdeuxchaises.Alors,laplupartdutemps,nousmangeonssurlatablebassedusalon,ons’ysentmoinsàl’étroit.Etlepetitbonus:laterrasse!

Jesoupireetfixelaporte,désespéréedenepasavoirmonlivre.Frustrée,jedécidedemecoucher,histoiredenepasm’ennuyer.

***

Unbruitfracassantmetireviolemmentdemonsommeil.Qu’est-cequ’ilsepasseencore?Jejetteunœilauréveil:quatreheuresdumatin.J’enfilemeschaussonsetsorsdemachambre.

– Qu’est-cequevousfaites?

Dévinestallongéàplatventredanslesescaliersetmasœuressaiedeletirerparsaveste.

– Aide-moiaulieudemeregarder!

Jedescendsàcontrecœuretobserveuninstantlecorpsétalédetoutsonlongsurlesmarches.

– Onneréussirajamaisàlemonter,Tracy.Vusonétat,ceseraitmoinscompliquédeletraînersurlecanapé.

Dévingrogneententantdeserelever,maissoneffortnesertstrictementàrien.Ilesttellementbourréqu’ils’écroulelamentablementaumêmeendroit.

Cen’estpaspossible.Quelboulet,sérieux!

Collection«Nisha’sSecret»

Obsessionsinsoumises,Mael–AngelArekin

Obsessionsinsoumises,Rory&Max–AngelArekin

Obsessionsinsoumises,Yano–AngelArekin

Jeuvespéral–AngelArekin

Àpleinesmains,Elsa–EvadeKerlan

Dévorerduregard,Milia–EvadeKerlan

Irrésistible,Natalia–EvadeKerlan

Semettreauparfum,Josh–EvadeKerlan

Frissonsdenuit–CindyLucas

Joueaveclefeu–CindyLucas

Pactesensuel–CindyLucas

Ungoûtd’interdit–CindyLucas

Déclencheurdeplaisir–TwinyB.

L’artiste–TwinyB.

Orgasmesnocturnes–TwinyB.

Plaisirsmasqués–TwinyB.

Pariàtrois–OlyTL

SoumiseAïko–OlyTL

Soumissionaquatique–OlyTL

Yoga&supplices–OlyTL

ZeusDating–EvadeKerlan

Songed’unenuittorride–JoyMaguene

Lilas–OlyTL

Collection«DiamantNoir»

LaChute,saisons1et2–TwinyB.

BlackSky–TwinyB.

Nerougispas,saisons1et2–Lanabellia

Nefermepastaporte–Lanabellia

Play&Burn–FannyCooper

Alia,lesvoleursdel’ombre–SophieAuger

Betrayed–SophieAuger

Journald’ungentleman,saisons1et2– EvadeKerlan

LoveonProcess– Rachel

GetHigh–AvrilSinner

LoveBusiness–AngelArekin

Surtonchemin–MikkySophie

Collection«FeelGood»

HollywoodenIrlande–ElisiaBlade

Séduire&Conquérir–ElisiaBlade

LeGoûtduthé,celuiduvent–EveBorelli

Aprèsl’obscurité–EveBorelli

L’Étreintedesvagues–OliviaBillington

Collection«Nisha’sDream»

Olympe–CindyLucas

Auteure:Lanabellia

Suiviéditorial:ValentinMoulinetLaëtitiaHerbaut

NishaEditions

21,ruedestanneries

87000Limoges

N°Siret82113207300015

N°ISSN2491-8660