26. Lorient. Actus

Mercredi 23 mai 2012 Le Tlgramme

Plastimo. Un norme gchis Les 148 salaris de Plastimo devront attendre vendredi pour savoir si le tribunal de commerce place le groupe Navimo en redressement judiciaire. Une issue attendue avec un mlange de rsignation et de colre par ceux qui croient en la valeur de leur savoir-faire.La plupart des salaris avait fait le dplacement jusquau tribunal de commerce, hier.

que deux routes. La liquidation, qui est tout mauvais, ou le redressement qui est moins pire . Il y a des ppites dans cette bote Ce moins pire devrait tre confirm par le tribunal de commerce vendredi, mais il ne convainc pas tout le monde. Et notamment des anciens de Plastimo venus soutenir les salaris hier. Il faudrait une liquidation, que cette quipe dirigeante de m... dgage, et quun repreneur puisse proposer quelque chose. Car il y a des ppites dans cette entreprise, avec les compas, les radeaux , clame Bruno Jourden, directeur export pendant 30 ans. Albert Journo nous avait dit en arrivant quil avait une aversion pour le monde nautique. a sest vrifi. Il a peut-tre rduit la dette, mais il ny avait aucun projet industriel derrire. Il a vir tous les cadres importants en arrivant. Il y a quatre ans, cette marque avait un taux de notorit de 99 % chez les plaisanciers. a, a vaut de lor. Alors, oui, a peut intresser un repreneur, mme sil faudra quil mette la main au portefeuille pour relancer la boutique . Dj, le parvis du tribunal de commerce sest vid. Ce matin, les Plastimo seront de nouveau au boulot, la tte encore un peu plus esquinte par un feuilleton qui semble trop durer. Pas tant pour renflouer les caisses vides, mais parce quon a une conscience professionnelle, cest tout .Pierre Chapin

Le drapeau frapp du nom de lentreprise, hiss par Gilles Le Roch, dlgu syndical CGT, peine flotter au sommet du mt trnant sur le parvis du tribunal de commerce. Ptole. Comme depuis pratiquement trois ans dans le ciel de Plastimo, o rien ne semble suffire chasser les nuages. a fait quatre ans quon est dedans, et les grves nont pas empch les licenciements , commente Monique, 60 ans, 22 ans de bote dont onze en CDD. Depuis deux ans, on voit que lactivit baisse. Alors on nous demande dtre polyva-

lents, daller dans les ateliers o il y a du boulot. Mais pour moi il ny a plus despoir. Un redressement ? Mais avec une dette pareille, je ne vois pas comment en sortir, moins dun petit miracle. Avec une marque, un savoir-faire pareil, cest un norme gchis . Plein les fouilles Mme rsignation du ct de lquipe de latelier injection. La direction nous dit tous les trois mois quil ne faut pas dsesprer, quon va sen sortir. Mais dans le mme temps, Journo (le P-DG) a envoy notre

plus grosse machine et 60 moules en Italie , soufflent Olivier et Pascal, 47 ans tous deux. Comment expliquer une telle situation pour une marque considre comme une rfrence europenne sur les pontons ? Il y a eu trop de changements de P-DG, et chaque fois, ils sen mettaient dans les fouilles. Pendant ce temps-l, rien ntait fait pour loutil. Nos locaux, cest une catastrophe, on doit poser des bassines ds quil se met pleuvoir . La responsabilit dAlbert Journo est galement pointe par les salaris. Son choix de

supprimer la plateforme logistique au K2 a prcipit la chute. Le temps que la nouvelle logistique se mette en place, il a fallu plus dun an. Pendant ce tempsl, on perdait des clients , estime David (30 ans). Ple emploi quoi dautre ? Vronique (52 ans), rentre en 77 Plastimo, ne dcolre pas. Ds notre premire rencontre, il nous a dit que nous ntions que des numros ses yeux. Rsultat, il a tout cass Lorient. Cette bote a quand mme une histoire, cest un sym-

bole pour la ville et le nautisme. Alors que tous les chantiers sont venus sinstaller ici, Plastimo va doucement mourir. Quel symbole ! . Comment ces ouvriers envisagent-ils la suite ? Ple emploi, quoi dautre ? . Aprs plus dune heure daudience huis-clos, en salle du conseil, Albert Journo sort dans le sillage des organisations syndicales. Et confirme que lon se dirige vers un redressement judiciaire. Une bonne nouvelle . a dpend pour qui , rtorque schement un salari. Cigarette en main, le patron ouvre alors les bras : Il ny a

Lettre ouverte des cadres en colre leur P-DGLes cadres de lentreprise Plastimo Navimo sont particulirement remonts contre leur P-DG et ont souhait sexprimer sur la situation du groupe, dans un communiqu. Une lettre ouverte leur P-DG Albert Journo, o la rage, teinte de dsespoir transpire. Des multiples mesures ont t prises sans discernement, dplorent-ils. Il ny a jamais eu aucun souci de M. Journo, ni des dirigeants actuels de faire fructifier la culture de lentreprise. Toute la gestion a t mene avec pour objectif prioritaire la rduction des cots au dtriment dautres. Nous avons dplor une course aux profits qui a rduit de manire inconsidre des actions de plus long terme . Nombreux signaux ngatifs Les nombreux signaux ngatifs extrieurs nont pas t pris en compte par M. Journo et son quipe. Un fait symptomatique, symbolique, rvlateur des choix aberrants pris, reste limplantation des bureaux de direction rue du Faubourg Saint-Honor, qui est lune des plus chres de Paris. Les locaux de Lorient sont eux vtustes. Une prsence soutenue sur Lorient de toute la direction dans des locaux rnovs aurait t un symbole fort de notre appartenance au secteur du nautisme, et un signal fort reconnu par les employs et la profession. Nous avons le sentiment dun horribleAlbert Journo a pris le micro pour annoncer un probable redressement judiciaire. Il est la cible de critiques trs dures de son encadrement qui lui ont adress, via un communiqu, une vritable lettre ouverte.

Les salaris doivent attendre vendredi pour connatre la dcision du tribunal.

Norbert Mtairie. Sauver lemploi sur Lorient Invit ragir aux difficults de Plastimo, Norbert Mtairie, prsident de Lorient Agglomration, insiste sur limportance de maintenir les emplois et le savoir-faire Lorient. Jattends dsormais la dcision du tribunal de commerce, qui permettra dapprcier prcisment la situation du groupe et de ses filiales, les conditions de la cessation de paiement, et la ralit des comptes et des dettes. Ensuite, il nous faudra uvrer pour trouver une solution de reprise, en lien avec ltat, la Prfecture . Il sagit tout de mme dune marque de renomme mondiale, cre Lorient, et qui a de rels atouts: la comptence de ses salaris et son savoir-faire. En cas doffre de reprise, nous serons attentifs viter tout dmantlement ou dlocalisation. On regardera les montages possibles si lon peut tre utile, mais lenjeu est dabord de sauver lemploi et les comptences sur Lorient . Sur la filire : Ne pas tout mlanger Interrog sur la crise qui frappe le secteur nautique, et donc sur la fragilisation du tissu industriel lorientais aprs la liquidation dAlliaura marine, llu se veut rassurant. Il ne faut pas tout mlanger. Alliaura a souffert dune situation bien spcifique, qui na rien voir avec celle de Plastimo. Pour le reste, a va bien avec des activits industrielles bien ancres dans le territoire. Certes, la crise est l, mais pour laccastillage et les fournisseurs, la filire est en plein dveloppement. Et pour Plastimo, encore une fois, la situation nest pas nouvelle et pas uniquement lie la crise .

gchis. Il est ainsi dsesprant davoir vu tant de nos collgues nous quitter de manire volontaire ou force pour en arriver l. Lquipe de direction sest accord des salaires trs importants, poursuit le communiqu. Les cadres dans leur large majorit ont d eux, rduire leurs congs, et taler leurs rmunrations sur treize mois. Les contraintes et la charge de travail se sont accrues chaque jour de manire plus importante. La direction a men diverses pressions, dont certaines morales trs

dures. Elle na cess de remettre en cause nos actions . Des erreurs de stratgie La crise du secteur bien relle nexplique pas elle seule notre situation, expliquent les cadres. Elle nest que le rvlateur de la faiblesse actuelle de notre organisation, et derreurs de stratgie qui ont t commises. Nous nous rappelons ainsi la dcision de centraliser notre stock sur Lyon en urgence, une mauvaise priode, et sans prparation. Nous

nous rappelons le dpart de nos savoir-faire, celui de notre activit dinjection et celle dune presse vers lItalie, celui de nos fabrications vers la Roumanie. Nous nous rappelons le transfert de notre image de marque Plastimo, pourtant connue de tous, vers celle de Navimo manquant de renomme. Nous nous rappelons deux douloureux plans de restructuration avec la sparation des socits de distribution et de fabrication, mens ici aussi sans prparation. Nous nous rappelons la suppression des postes et le dpart de collgues deux ans de la retraite, aussitt remplacs par des intrimaires. Nous rappelons aussi de ces dparts imposs sans discernement, sans plan de route, sans consultation, conduisant la plus complte dsorganisation de nos services. Nous nous rappelons le catalogue unique qui a vu le jour beaucoup trop vite, et sans que son contenu ait pu tre rationalis. Nous nous rappellerons de ces erreurs et de bien dautres encore . Nous pouvons rebondir Et de conclure : Mais nous voulons aussi exprimer notre confiance dans nos atouts. Nous avons toujours su nous adapter, et participer au changement. Nous pouvons rebondir, et retrouver notre place de leader europen de lquipement nautique .