musique - une industrie à la dérive - sylvain lecours - 28 mars 2003

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1 Ce document est transmis à titre gratuit, pour fins d'information seulement . Les opinions émises n'engagent que son auteur. Musique : Une industrie à la dérive. Sylvain Lecours – 28 mars 2003 La musique est sans conteste un élément clé de l'identité culturelle canadienne; nous nous classons au deuxième rang des pays industrialisés en termes de consommation d'enregistrements sonores per capita, et l'écoute d'enregistrements sonores est l'activité culturelle à laquelle participe le plus fort pourcentage de Canadiens (81 pour cent) après la lecture des journaux (92 pour cent) selon Statistique Canada. 1 "Toute une industrie s'est développée et assure le financement de la production d'enregistrements et la supervision de leur fabrication, leur distribution et leur mise en marché. À l'échelle du monde, on évalue les revenus annuels de cette industrie à plus de 40 milliards de $ canadiens" 1 . Mais nous sommes actuellement les témoins silencieux du déclin de l’industrie de la musique et si nous prolongeons notre mutisme et notre inaction, il est probable que l’on assistera alors à son effondrement. J’apporte donc ici mon témoignage, espérant humblement susciter une réflexion et un échange d’idées saines et constructives quant à l’avenir d’une industrie qui est présentement à la dérive.

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Un survol de l'état de l'industrie de la musique en 2003, suite à l'émergence de technologies permettant la copie et le téchargement d'oeuvres musicales, sans l'autorisation des ayant-droits.

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Ce document est transmis à titre gratuit, pour fins d'information seulement. Les opinions émises n'engagent que son auteur.

Musique : Une industrie à la dérive.

Sylvain Lecours – 28 mars 2003 La musique est sans conteste un élément clé de l'identité culturelle canadienne; nous nous classons au deuxième rang des pays industrialisés en termes de consommation d'enregistrements sonores per capita, et l'écoute d'enregistrements sonores est l'activité culturelle à laquelle participe le plus fort pourcentage de Canadiens (81 pour cent) après la lecture des journaux (92 pour cent) selon Statistique Canada.1 "Toute une industrie s'est développée et assure le financement de la production d'enregistrements et la supervision de leur fabrication, leur distribution et leur mise en marché. À l'échelle du monde, on évalue les revenus annuels de cette industrie à plus de 40 milliards de $ canadiens" 1. Mais nous sommes actuellement les témoins silencieux du déclin de l’industrie de la musique et si nous prolongeons notre mutisme et notre inaction, il est probable que l’on assistera alors à son effondrement. J’apporte donc ici mon témoignage, espérant humblement susciter une réflexion et un échange d’idées saines et constructives quant à l’avenir d’une industrie qui est présentement à la dérive.

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Effritement de la vente au détail « Pour la première fois depuis 1983 et l’introduction dans les magasins du CD, nous observons un repli des ventes d’albums » a indiqué Jay Berman, président directeur général de l’IFPI (la Fédération Internationale de l’Industrie Phonographique regroupe 1,400 producteurs et distributeurs de musique dans 76 pays).

« En 2001, notre activité a été prise dans une véritable tempête sous l’effet du piratage de masse, de la compétition de nouveaux produits et du ralentissement de l‘activité économique... Il s’agit de l’environnement le plus difficile jamais connu par l’industrie musicale, à cause des nouvelles technologies, des nouveaux formats (CD enregistrables, MP3) et de l’Internet » poursuit le PDG de l’IFPI.2

« Il s’agit del’environnement leplus difficile jamaisconnu par l’industriemusicale »

Le disque compact a été inventé par Sony et Philips à la fin des années 1970 3 et il est apparu sur le marché au début des années 80 ; Dans le numéro de décembre 1994 de « Wired », cinq experts convenaient déjà que ce produit était appelé à disparaître d’ici à 2010 4. Il est probable que la sombre prédiction se réalisera bien avant. Les statistiques sont éloquentes. Au Canada, après avoir atteint $740 millions de ventes d'albums en 1998, les résultats de 2002 n'atteignent que $614 millions5. Les données de la CRIA (Canadian Recording Industry Association) indiquent des ventes de 52 millions d’albums au Canada en 2002, alors que Réseau Circum indique que plus d'un milliard de chansons ont été copiées au Canada.6 On calcule donc que la valeur, en dollars, des copies et téléchargements illégaux dépasse celle des albums légitimes vendus. Les impacts sont donc prévisibles. Déjà, la performance pauvre du marché canadien a entraîné une purge au sein de HMV North America, basée à Toronto. De plus, nous avons assisté à la fermeture de la majorité des magasins de la chaîne « Sam The Record Man » et à la faillite du distributeur « Song Corporation ». Préparons-nous à d’autres annonces en 2003. Aux Etats-Unis, Nielsen SoundScan rapporte une diminution de 11% des ventes d’albums en 2002. Nous avons déjà assisté, en février 2002, à la faillite du plus important grossiste distributeur de musique aux Etats-Unis, Valley Media.7 Et l’année 2003 s’amorce bien mal : Best Buy (propriétaire de « Future Shop » au Canada) vient de couper 700 emplois en fermant 107 magasins de sa division « Musicland ».8 La chaîne planifie la fermeture de 40 autres magasins, suivant ainsi les conseils d’un analyste de l’industrie de la musique qui avait recommandé à Best Buy de se retirer entièrement du marché de la musique au détail aussi tôt que possible. Pour sa part, Wherehouse Entertainment, qui avait acheté « Blockbuster Music » pour $115 millions US en août 1998, vient de se placer sous la loi de la protection de la faillite (« Chapter 11 »), invoquant une augmentation des transferts de fichiers musicaux de l’Internet et la concurrence des « détaillants à escompte ».8 Wherehouse avait déjà fermé 30 magasins; 120 autres subiront le même sort dans les

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prochains mois. Trans World Entertainment et Tower Records prévoient aussi la fermeture d’un total de près de 30 magasins.9 Au grand total, selon les prévisions d’observateurs, c’est près de 500 magasins de musique qui disparaîtront aux Etats-Unis en 2003. Le Canada pourra-t-il échapper à cette tendance, malgré les particularités de son marché? Les 5,000 canadiens (dont 1,250 au Québec) travaillant dans le domaine de la distribution et la vente au détail d'enregistrements sonores devraient-ils s'inquiéter? Sachant que "les détaillants fonctionnent selon une marge de 35à 40 pour cent et, généralement, visent à réaliser un profit de 4 à 5 pour cent sur les recettes" 10, il est facile de calculer qu'ils affichent maintenant des pertes, maintenant que les ventes baissent d'environ 10% par année. Heureusement, les ventes de DVDs montrent des progressions spectaculaires, procurant ainsi à certains détaillants des revenus qui compensent pour la diminution de la vente de disques compacts. Cependant, "la solution DVD est peut-être très temporaire" affirme Yves-François Blanchet de Diffusion YFB11.

«Le DVD nesauvera pasl’industrie»

Son confrère Mario Labbé, de la maison de disques Analekta ajoute que "le DVD ne sauvera pas l'industrie"12 À mon avis, avec l'apparition des graveurs de DVDs, il faut s'attendre à la progression du piratage de films et de vidéos sur Internet, ce qui affectera à nouveau le marché traditionnel. Copiage et piratage L'avocate française Anne-Laure Caquet exprime bien les opportunités offertes par l'avènement des nouvelles technologies, tout en soulignant le danger des utilisations illégales:

«SSii oonn aa dd''aabboorrdd ppeerrççuu llaa tteecchhnniiqquuee nnuumméérriiqquuee ccoommmmee ppeerrmmeettttaanntt ddee ffaacciilliitteerr llaaccrrééaattiioonn,, llaa cciirrccuullaattiioonn oouu llaa ddiissttrriibbuuttiioonn ddeess œœuuvvrreess,, oonn ss''eesstt ttrrèèss vviittee aappeerrççuu qquu''eelllleeffaavvoorriissaaiitt ééggaalleemmeenntt llaa ccoonnttrreeffaaççoonn.. LL''iinnffoorrmmaattiiqquuee aa ppeerrmmiiss llaa ccrrééaattiioonn mmaaiiss aauussssiillaa rreepprroodduuccttiioonn aassssiissttééee ppaarr oorrddiinnaatteeuurr eett aa ppaarr--llàà mmêêmmee mmuullttiipplliiéé lleess ooccccaassiioonnss ddeeppaarraassiittiissmmee.. LL''aaccccèèss aauuxx œœuuvvrreess eett aauuxx iinntteerrpprrééttaattiioonnss eesstt ppeeuutt--êêttrree ttrroopp ffaacciilliittéé,,eennggeennddrraanntt llaa mmuullttiipplliiccaattiioonn ddeess ooccccaassiioonnss ddee ccooppiiaaggee eett ddee ppiirraattaaggee »»1133

J’aborderai plus loin, en détail, les questions relatives au piratage sur le réseau Internet, mais pour le moment, examinons les pratiques de copies de disques compacts, à l’aide des « graveurs ». La forte prédominance de la « copie maison » est identifiée comme une menace à la viabilité économique de l’industrie de l’enregistrement sonore4 et un facteur majeur ayant contribué au déclin des ventes de disques; on prévoit d’ailleurs le maintien de la tendance actuelle.14

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Il fut un temps où les disques étaient disponibles en location, ce qui offrait alors "un précédent en matière de reproduction non autorisée de la musique de qualité numérique. Selon l'industrie, 90 pour cent des locations conduisent à la copie non autorisée chez soi".10+15 Dans le rapport final du Groupe de Travail sur l'Avenir de l'Industrie Canadienne de la Musique présenté à Sheila Copps en mars 1996, on indique que la protection résultant de modifications législatives récemment adoptées a permis à l'industrie de la musique d'obtenir un moyen de mettre fin à la pratique consistant à louer un enregistrement à faible prix pour ensuite le copier.1 Il faut savoir cependant que certaines bibliothèques continuent d'offrir ce service, mais il faut également retenir que cela permet, voire encourage, des pratiques de non-respect des droits d'auteur. Des politiques visant à restreindre la copie illégale de disques compacts ont aussi été adoptées par les disquaires. Alors qu'il était autrefois possible d'acheter un CD, de le copier à la maison et de le retourner au magasin, c'est une option qui est maintenant rarement offerte. Denis Germain, gérant du Marketing au HMV Megastore de Montréal confiait à Jean-Yves Girard de l'Actualité "C'est un privilège que nous accordons à nos clients. Ceux qui en abusent le perdent".16 HMV a depuis cessé d'accorder ce privilège, précisément le 18 janvier 2002. Précisons que la copie de CDs est rarement effectuée au Canada à des fins commerciales. La vente de copies illégales, de disques contrefaits et d'enregistrements sonores "pirates" ne représente pas ici un problème aussi aigu qu'ailleurs dans le monde. On parle d’environ 3.1 % des ventes.17 Mais on estime qu'en 2003, 40% des CD musicaux en Europe de l'Ouest seront des copies.16 Dans 25 pays, les ventes de CD piratés excèdent les ventes de CD légaux.17

Dans 25 pays,les ventes deCD piratésexcèdent lesventes de CDlégaux »

J'ai eu l'occasion de constater moi-même l'ampleur du phénomène en Espagne où de nombreux "manteros" offrent sur le trottoir un grand nombre de titres populaires qui sont visiblement des disques copiés et dont la piètre qualité de la reproduction des pochettes trahit le caractère illégal. J'ai brièvement capté la scène avec ma caméra, pour être ensuite rapidement interrompu par un de ces vendeurs qui ne souhaitait évidemment pas que son petit commerce à la sauvette soit immortalisé sur vidéo. C'est en fait le crime organisé qui contrôle là-bas la copie et la distribution de ces disques, ayant fait passer le taux de "piratage" de 5 pour cent en 1997 à plus de 30 pour cent aujourd'hui dans ce pays de la péninsule Ibérique. Nous n'en sommes pas à ce point au Canada, cependant le trafic et l'échange de CD copiés en milieu scolaire sont fort répandus. "Mais on ne va quand même pas porter plainte à la GRC pour qu'elle poursuive un jeune de 15 ans qui vend des copies de CD dans la cour d'école" confie Claudette Fortier, directrice générale de la SODRAC (Société de Droit de Reproduction des Auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada).16 "À la petite école, on enseigne aux élèves que s'approprier le crayon d'un autre, c'est du vol, mais on ne dit pas que reproduire une œuvre intellectuelle sans permission et sans payer, c'est aussi du vol" déplore Gilles Valiquette, président de la SOCAN (Société Canadienne des Auteurs et compositeurs de musique).16 (Ces 2

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témoignages sont tirés de l'article de l'Actualité "CD: Je grave, tu graves, c'est grave!" sous la plume de Jean-Yves Girard). Soyons clairs: il est illégal de donner, d'acheter ou de vendre des copies de CD à ses amis. On croit à tort que la copie et le piratage de CDs sont des "crimes sans victime". Que non! Les pertes économiques encourues sont énormes. Les victimes sont les artistes dont la créativité n'est pas récompensée, les gouvernements qui sont privés de millions de dollars de revenus de taxes, l'économie dans son ensemble qui est privée de nouveaux investissements, et finalement les consommateurs qui bénéficient de moins de diversité et de choix.18 En général, ces arguments ne font pleurer personne

et mon intention ici n'est pas d'arracher des larmes mais bien d'amorcer une réflexion sur nos comportements et leur impact. On se justifie souvent en invoquant que les artistes sont déjà assez riches. Je vous illustrerai plus tard la preuve du contraire.

Les victimes sont les artistes dont lacréativité n’est pasrécompensée.

Qu'arriverait-il si les habitudes du public concernant la copie de disques compacts étaient étendues à d'autres secteurs de consommation? Un exemple ironique se retrouve sur le site Web "Don't buy CDs" (qui encourage le boycottage des disques compacts)19: "Il devrait être parfaitement légal de faire des copies. J'aimerais bien être capable d'aller chez Sears acheter un pneu pour mon automobile et en faire trois copies. Cela réduirait certainement mes dépenses. Évidemment, les fabricants de pneus pourraient ne pas aimer cela et probablement qu'ils devraient éventuellement augmenter leurs prix, ou simplement fermer boutique" (Traduction libre).19 Il est prévisible, comme je l'ai déjà mentionné plus tôt, que le problème s'étende bientôt aux films et vidéos, alors que nous verrons progresser la pénétration dans les foyers des graveurs DVDs. L'anecdote suivante démontre que d'autres pays nous ont déjà précédés: À Singapour, le passager d'un taxi constate que le chauffeur et ses collègues transportent et vendent des centaines de copies illégales de films de Paramount et Fox Pictures. Parmi ceux-ci, Star Wars - Episode I, qui venait tout juste de sortir sur les écrans de cinéma, et ne pouvait donc être légalement en vente, sous quelque format que ce soit. Le chauffeur de taxi ignorait sans doute l'identité de son passager: il s'agissait de Rick McCallum, le producteur de Star Wars - Episode I… 20 Ici même, Laurence Jalbert a raconté un incident semblable, où un chauffeur de taxi lui communiquait son admiration, soulignant qu'il avait "gravé toutes ses chansons"… Alors que M. McCallum déplore cette "insensibilité morale", il devrait tenter

Il est prévisible que leproblème s’étende bientôtaux films et vidéos, alorsque nous verronsprogresser la pénétrationdans les foyers desgraveurs de DVDs.

d'inculquer des principes moraux à sa propre fille (une adolescente de 16 ans) qui, suprême ironie, possède sur son "Ipod" 2,000 chansons copiées.20

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"Copie privée": Les adeptes de la copie invoqueront souvent qu'ils le font pour un usage "privé" et non commercial. Cette notion mérite qu'on s'y attache plus longuement. (Attention, nous tombons ici dans quelques lignes de jargon légal dont la lecture peut être ardue) "Toute reproduction non autorisée ou copie d'un article protégé par le droit d'auteur constitue une violation du droit d'auteur".21 Mais voici que survient, en 1997, une exemption relative à la copie d'une œuvre musicale pour usage privé. La partie VIII de la Loi sur le droit d'auteur du Canada précise alors: "ne constitue pas une violation du droit d'auteur protégeant tant l'enregistrement sonore que l'œuvre musicale ou la prestation d'une œuvre musicale qui le constituent, le fait de reproduire pour usage privé [pour son propre usage] l'intégralité ou toute partie importante de cet enregistrement sonore, de cette œuvre ou de cette prestation sur un support audio".22 On ajoute que ce paragraphe ne s'applique pas à la reproduction d'une œuvre musicale pour les usages suivants: vente ou location, distribution dans un but commercial ou non, communication au public par télécommunication (j'aborderai plus tard la question de la transmission des œuvres par le réseau Internet), exécution ou représentation en public. En ce qui concerne précisément l'exécution en public, la SOCAN nous enseigne que "L’achat d’un CD ou de tout autre type d’enregistrement ne vous autorise qu’à l’écouter en privé. Toute utilisation publique est soumise à la Loi sur le droit d’auteur et, par conséquent, doit faire l’objet d’une licence de la SOCAN." 23 C'est pourquoi les magasins de disques, par exemple, sont tenus de verser à la SOCAN des frais de licence pour avoir l'autorisation de diffuser de la musique dans leurs haut-parleurs; Les montants versés par les magasins de disques ne constituent cependant qu'une infime partie des $147 millions de frais de licence et de redevances de droits d'exécution perçus par la SOCAN en 2001.24 Par contre, il est important de préciser que la SOCAN s'occupe des droits d'exécution et non des droits de reproduction qu'implique la copie privée.25 Revenons donc à nos moutons. La copie privée est donc légale et ne constitue pas une violation du droit d'auteur. Un exemple: vous possédez tous les albums d'Alanis Morissette et vous désirez construire vous-même un "Best of" réunissant les chansons que vous préférez. Vous bénéficiez donc de l'exemption conférée par la loi et vous pouvez, sans troubler votre sommeil, réunir vos pièces préférées sur un seul support audio. Vous pouvez également procéder à ce qu'on appelle, aux Etats-Unis, le "format shift" (excusez l'absence de traduction): vous copiez un CD d'Alanis sur cassette, afin de la faire jouer dans votre automobile, si elle n'est pas équipée d'un lecteur de CD. Jusque-là tout va bien. Mais là où les choses s'enveniment c'est lorsqu'une enquête révèle que seulement 10% des copistes d'enregistrements musicaux font des copies d'albums à partir de pré-enregistrements qui leur appartiennent déjà.26 "La réalisation d'une copie pour quelqu'un d'autre ou à toute autre fin autre que pour l'usage privé de la personne qui fait la copie ne constitue pas une activité de copie privée". 27 L'infraction est évidente et elle commandait un ajustement et une mise-à-jour des législations existantes, pour régir cette pratique et indemniser les artistes et créateurs lésés.

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"Pour compenser les pertes pécuniaires, un régime de droits à payer sur tout support audio vierge fabriqué ou importé a été mis sur pied" 28, dans le cadre de la Phase II du projet de loi C-32.29 Les titulaires de droits d'auteur se voient alors reconnaître un droit à la rémunération sous la forme de redevances pour copie privée, ce qui fait dire à Claude Brunet, avocat chez Ogilvy Renault: "On ne peut plus dire que notre loi sur le droit d'auteur est désuète"30.

Seulement 10% descopistes d’enregistrementsmusicaux font des copiesd’albums à partir de pré-enregistrements qui leurappartiennent déjà.

On comprendra que ces redevances sont "nécessaires pour leur permettre de continuer de créer et d'investir dans la musique que nous aimons". 27 L'impérieuse nécessité de mettre en place un tel système était illustrée par des statistiques évocatrices: "Selon le rapport du Groupe de travail sur l'avenir de l'industrie canadienne de la musique, environ 44 millions de cassettes vierges ont été vendues au Canada en 1995, dont 39 millions auraient servi à la copie privée d'enregistrements sonores de compositeurs ou d'artistes qui comptent sur la vente de leurs enregistrements pour gagner leur vie".31+1 À ce moment, on estimait à $325 millions par an le montant de recettes perdues par l'industrie canadienne.1 Nous étions alors en 1995, avant la prolifération des graveurs de CD qui permettent des copies parfaites. Il était donc prévisible que ces pertes allaient aller en augmentant.

L'industrie du disque réclamait une redevance depuis des années puisqu'elle était déjà applicable dans plus de 20 pays du monde. Elle risquait d'ailleurs d'être bien accueillie ou acceptée par les Canadiens puisqu'un sondage Gallup avait révélé que 77 pour cent des répondants sont sensibilisés aux pertes d'argent occasionnées par l'enregistrement sonore à domicile et

77 pour cent descanadiens sontsensibilisés auxpertes d’argentoccasionnées parl’enregistrement sonore àdomicile.

"56,5 pour cent des Canadiens ayant émis une opinion à ce sujet ont indiqué qu'ils étaient d'accord avec le principe d'une compensation des pertes attribuables aux enregistrements à la maison". 1 [Cependant] "depuis l’instauration du régime de la copie pour usage privé, il y a eu d’importants changements technologiques. Les cassettes audio sont pratiquement désuètes et les Canadiens utilisent les cédéroms, les DVD, les technologies de cartes flash MP3 et Internet pour échanger des dossiers." 32

Depuis le début de ce nouveau millénaire, chaque fois que nous achetons une cassette vierge de plus de 40 minutes, le prix payé inclut une redevance de $0.29. Assez étrangement, la redevance incluse dans le prix d'un CD-R n'est que de $0.21 alors qu'il s'agit pourtant du support prédominant sur le marché. On étudie actuellement la possibilité d'augmenter ces redevances à $0.60 pour les cassettes et $0.59 sur les CD-R et CD-RW. 26 C'est la SCPCP qui est chargée de percevoir et de redistribuer les redevances. Établie en 1999, la Société Canadienne de Perception de la Copie Privée est un organisme à but non-lucratif qui représente les auteurs-compositeurs, les

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artistes-interprètes, les éditeurs de musique et les maisons de disques, c'est-à-dire l'ensemble des ayants droit au nom desquels les redevances sont perçues. La SCPCP n'est pas une agence gouvernementale. L'organisme a commencé ses premiers versements en février 2003 30. Environ $28 millions, représentant les redevances de 2000 et 2001, sont disponibles pour la distribution, auxquels s'ajouteront environ $26 millions perçus en 2002. "La répartition sera fondée sur des échantillons représentatifs des diffusions radiophoniques des œuvres musicales et des ventes d'enregistrements, ces deux éléments se voyant accorder une pondération égale pour les fins de la distribution. L'échantillon ne tient pas compte de l'Internet, étant donné qu'aucune documentation sur cette activité n'existe".27 Quoique ce système innovateur représente une compensation pour les pertes de revenu imputables aux copies de disques compacts, il est permis de se demander si cela suffira vraiment à combler le manque à gagner de dizaines de milliers d'ayants droit... De plus, les nouvelles propositions de la SCPCP soulèvent l'ire de nombreux opposants. Costco (Club Price) invoque que les tarifs proposés sont "excessifs et exorbitants"33; Bryan Levy, président de InterTAN (Radio Shack) allègue que les Canadiens seront alors encouragés à acheter des supports audio aux Etats-Unis34, les redevances n'étant pas perçues sur les supports vierges importés pour usage personnel32 et les taxes imposées sur ce genre de produits étant nettement moins élevées aux États-Unis; On craint donc l'éclosion d'un marché noir en supports d'enregistrement "qui aurait des répercussions sur le marché des fournisseurs canadiens et sur les rémunérations des titulaires de droits"32; Paul Tsaparis, président de Hewlett-Packard Canada ajoute que "ceux qui procèdent au téléchargement de contenu protégé à partir de sites Web autorisés devront payer deux fois" et seront donc "injustement taxés" 34; Diane J. Brisebois, présidente du Conseil Canadien du Commerce de Détail argumente que ceux qui recevront des redevances perçues dans le cadre de ce programme sont principalement des artistes déjà établis et connus (souvent étrangers) et que les petits groupes et ensembles musicaux qui luttent pour leur survie vont rarement en retirer un bénéfice. "Il y a de meilleures façons de compenser les musiciens" affirme Mme Brisebois34... Le débat est ouvert. Avons-nous de meilleures suggestions?

Au départ, ce système de redevances et de gestion collective des droits avait été perçu comme "une admission d'impuissance devant la copie privée".35 Malgré cela, son application me semble nécessaire, incontournable, et constitue un point de départ intéressant. Cependant, il ne peut représenter à lui seul la réponse aux problèmes actuels de l'industrie et aux pertes de revenus causées par les copies, légales ou non, d'œuvres musicales protégées par des droits d'auteur. Il faut aller plus loin encore. Sinon, ces artistes que nous aimons tant

LL''eexxpprreessssiioonn dduu ttaalleennttaarrttiissttiiqquuee nnee ssaauurraaiitt êêttrreeeennccoouurraaggééee eett rrééccoommppeennssééee ssiilleess œœuuvvrreess mmuussiiccaalleess qquuiimmeeuubblleenntt nnoottrree qquuoottiiddiieenn ffoonnttll''oobbjjeett ddee ccooppiieess iinntteemmppeessttiivveesseett ssoonntt uuttiilliissééeess àà ttoouutt eesscciieenntt,,ssaannss ééggaarrdd aauu ttrraavvaaiill ddeessccrrééaatteeuurrss..

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- paroliers, compositeurs et interprètes - devront se résoudre à s'orienter vers une autre carrière où leur aptitude naturelle ne sera plus d'aucune utilité. L'expression du talent artistique ne saurait être encouragée et récompensée si les œuvres musicales qui meublent notre quotidien font l'objet de copies intempestives et sont utilisées à tout escient, sans égard au travail des créateurs. "Les artistes sont riches!" J'ai souvent entendu des copistes qui tentent de justifier rationnellement leur conduite en argumentant que "les artistes sont déjà assez riches comme ça". Cette affirmation mérite d'être confrontée puisque la réalité canadienne est toute autre. La phase I de l'Étude de l'Industrie Canadienne de l'enregistrement sonore21 nous apprend qu'environ 50,000 auteurs et éditeurs appartiennent à la SOCAN (société chargée de gérer les droits d'exécution au Canada), mais "un grand nombre d'entre eux ne touchent pas de droits... moins de 5 pour cent de ces personnes tirent un revenu appréciable de l'industrie.

La plupart ont d'autres emplois et sources de revenus".21 "Certes, quelques artistes qui connaissent beaucoup de succès ont des revenus astronomiques, mais les revenus de la grande majorité sont relativement modestes.

«« NNoouuss rrééccoommppeennssoonnss lleess aarrttiisstteessqquuii mmeeuurreenntt ddee ffaaiimm »»

Pour situer le succès dans son contexte, reprenons les paroles d'un cadre supérieur de l'industrie qui a dit : Nous récompensons les artistes qui meurent de faim".21 L'étude de Ernst & Young révèle qu'au Canada, "moins de 500 artistes et compositeurs gagnent raisonnablement bien leur vie dans cette industrie et probablement moins de 100 en tirent d'excellents revenus".21

LL''iimmmmeennssee mmaajjoorriittéé ddeess aarrttiisstteessddooiitt ttrraavvaaiilllleerr aaiilllleeuurrss ppoouurrssuurrvviivvrree.. VVooiillàà llaa rrééaalliittéé..

Moins de 100 ! Ce sont donc les Céline Dion, Shania Twain et autres méga-stars qui ornent quotidiennement les pages des magazines et occupent un espace médiatique considérable qui s'accaparent une partie significative de l'ensemble des revenus générés par l'industrie. Mais elles sont l'exception qui confirme la règle. On ne doit donc pas généraliser en affirmant que les "artistes sont riches" puisque plus de 90% d'entre eux tirent moins de la moitié de leur revenus en exerçant leur talent artistique. J'insiste: l'immense majorité des artistes doit travailler ailleurs pour survivre. Voilà la réalité. Elle est d'ailleurs soulevée par Gilles Guénette, éditeur du magazine Internet "Le Québécois Libre": "Nous dirigeons-nous vers un univers où les produits culturels seront gratuits - les artistes faisant leur argent ailleurs?".36 Dan Bigras vous dira sans doute que ce n'est pas en vendant 12,000 copies d'un CD qu'on met du beurre sur son pain. Ce n'est pas pour rien que, bravant les commentaires sarcastiques de son entourage, il a accepté de prêter sa voix à une publicité d'un marchand de pneus bien connu.

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D'autre part, serez-vous surpris d'apprendre qu'un grand nombre de travailleurs de l'industrie de la musique ne paient pas ou peu d'impôts? La raison en est simple: "relativement peu de membres de l'industrie sont assez bien rémunérés pour payer beaucoup d'impôt" .21 Et Vlan! Un autre préjugé qui vient d'éclater. Qu'en est-il maintenant des maisons de disques? Précisons tout de suite que seulement "un enregistrement sur dix rapporte de l'argent" 37 "et c'est rarement le premier disque d'un artiste."21 Deux sur dix réussissent tout juste à couvrir les coûts d'enregistrement et de promotion.4 C'est donc le revenu généré par 10% des nouvelles parutions qui sert à éponger les pertes subies sur les autres4 et permet l'investissement dans de nouveaux talents. Ajoutons que "Les coûts et les risques rattachés à la production d'enregistrements à partir de bandes originales canadiennes sont considérablement plus élevés que ceux associés aux enregistrements faits à partir de bandes maîtresses importées".1 C'est sans doute ce qui explique que le pourcentage de bénéfice moyen des maisons de disque sous contrôle canadien est 5 fois moins élevé que celui des entreprises sous contrôle étranger.1 De toute évidence, on ne roule pas sur l'or. Existe-t-il vraiment une industrie "canadienne" de la musique? "L'industrie canadienne de l'enregistrement sonore est une des industries canadiennes dont les recettes sont les plus contrôlées par les étrangers"21 puisque qu'elle est dominée par cinq entreprises multinationales (Universal, Sony, AOL Time Warner, EMI-Virgin et BMG) qui accaparent 80 pour cent à 90 pour cent du marché canadien; les entreprises indépendantes d'appartenance canadienne occupent le reste. À ce chapitre, le Québec fait vraiment figure de "société distincte" puisque les étiquettes indépendantes occupent environ 30% du marché1, en termes de ventes. Le caractère spécifique du marché québécois est encore plus évident lorsqu'on constate que "80 à 85 pour cent de tous les enregistrements produits au Québec sont réalisés par des maisons de production indépendantes, et la plupart sont distribués par des distributeurs québécois indépendants".10 Incidemment, la diminution des ventes qui a été observée au pays fait encore plus mal au Québec, "l'industrie étant largement dominée par des producteurs locaux indépendants, tels Audiogram, Musi-Art (maintenant disques Atlantis) et Tacca… Ils n'ont pas les reins aussi solides que des multinationales comme Sony ou Universal" de confiait Solange Drouin, vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale de l'ADISQ, à Jean-Yves Girard de l'Actualité.16 Au Québec, on estime que 4,000 personnes travaillent dans l'industrie, la plupart en tant que distributeurs et détaillants, artistes-interprètes, chanteurs et musiciens, compositeurs et auteurs, fabricants et employés de producteurs de disques.21 L'industrie indépendante de l'enregistrement souffre de sous-financement chronique. (J'expliquerai plus tard que le soutien financier public est inadéquat). La situation financière des maisons canadiennes indépendantes s'est détériorée depuis une quinzaine d'années et le niveau de leurs bénéfices est tellement mince,

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comparativement à celui des entreprises sous contrôle étranger, que les étiquettes indépendantes ne peuvent pas générer de capitaux suffisants pour assurer leur expansion, voire leur survie. Dans l'étude de Ernst & Young réalisée pour le Groupe de travail sur l'avenir de l'industrie canadienne de la musique, par exemple, on fait remarquer que "le Royaume-Uni, dont la population est légèrement plus que le double de celle du Canada, nourrit plus de sept fois plus d'entreprises indépendantes".1 La même étude révèle que les sociétés indépendantes canadiennes "n'ont pas les ressources financières nécessaires pour se livrer à des activités d'envergure en ce qui concerne le marketing, la mise en valeur des artistes et du répertoire, la formation des cadres, la planification à long terme et d'autres activités essentielles".1 La concurrence envers les grandes multinationales est donc d'autant plus difficile, vu leur solidité financière relative, « les grandes maisons tendent à dépenser plus que les indépendants au chapitre de l’enregistrement, des vidéos, de la publicité et de la promotion commerciale, de l’encouragement à la radiodiffusion des compositions et de l’appui des tournées. »

Le niveau de bénéfice des maisonscanadiennes indépendantes esttellement mince qu’elles ne peuventgénérer de capitaux suffisants pourassurer leur expansion, voire leursurvie.

Selon le rapport final du Groupe de Travail sur l'avenir de l'industrie canadienne de la musique, la viabilité de l'industrie canadienne de l'enregistrement sonore est très sérieusement compromise par son absence de contrôle sur la distribution et la protection inadéquate offerte par la législation sur le droit d'auteur.1 Quant aux disquaires indépendants, on observait en France que plus de 90 pour cent d'entre eux avaient fermé leurs portes, entre 1979 et 1997, indiquant "l'ampleur de la concentration de la distribution pour l'essentiel assurée par quelques grandes enseignes".38 Je ne possède pas de statistiques précises qui me permettraient d'évaluer la situation des disquaires indépendants au Québec et au Canada, mais je présume que les données doivent être du même ordre. Il serait toutefois opportun de souligner qu’ici, « à l'exception de HMV, (qui est sous contrôle de la société mère britannique d’EMI), les magasins spécialisés sont principalement de propriété canadienne ».21 Selon les données de la CRIA (Canadian Recording Industry Association), le Canada occupe la sixième place dans le monde pour la vente d’enregistrements sonores légitimes.5 Mais, pour évaluer la performance de l’industrie canadienne il est égale- ment intéressant d’interroger les statistiques pour voir quel est le volume de ventes attribuable à des artistes canadiens et de comparer les résultats à ceux qui sont observés ailleurs dans le monde. Dans son Profil de l’industrie de l’enregistrement sonore39, Statistiques Canada indique pour 1998 que 17 pour cent des ventes d’enregistrements sont "à contenu canadien". Quoique ce résultat représente une amélioration comparativement à des taux inférieurs observés précédemment40, les données ne se comparent pas favorablement à celle de d’autres

« On pirate moins laproduction nationale »

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pays. « D'après une étude menée en 1994 pour la Fédération internationale de l'industrie phonographique (FIIP), en moyenne 30 p. cent des albums vendus dans chaque pays sont des albums d'artistes nationaux. La Finlande, la France, la Grèce, l'Irlande, l'Italie et le Royaume-Uni ont tous déclaré que plus de 40 p. cent des recettes proviennent de la vente d'enregistrements nationaux. ».1 Il est donc clair que nous sommes loin derrière. J'ouvre une parenthèse ici pour spécifier que les internautes semblent avoir plus de respect pour les artistes de leur propre pays. "On pirate moins la production nationale" souligne Hervé Rony du Syndicat National de l'Édition Phonographique (France)41. Une autre statistique où le Canada fait piètre figure : les ventes de « Singles ». Alors qu’elles comptent pour 15 pour cent des ventes en Europe, le pourcentage observé au Canada n’était que de 1 pour cent.42 On imputait alors cette contre-performance à la non-disponibilité de Singles à bas prix au Canada. Afin de « ré-énergiser » le marché canadien, on annonçait en novembre 2002 une offensive pour accroître radicalement la disponibilité des « Singles »42, les grands distributeurs s’étant apparemment concertés pour offrir un grand nombre de titres, à prix inférieur. Les résultats n’ont pas tardé à témoigner du succès de cette initiative : des données publiées en février 2003 par Nielsen SoundScan indiquent une augmentation de 134% des ventes de « singles ». À lui seul, le géant HMV a vendu au Canada 117,000 singles depuis le 1er octobre 2002, dont 28,000 dans les 17 magasins du Québec43. Le prix des disques compacts, spécifiquement celui des albums, a justement été invoqué par des internautes pour justifier le recours à la copie, au piratage et aux téléchargements illégaux. Qu’en est-il exactement au Canada ? Quoique la tendance actuelle soit à la hausse, il est important de retenir que « le prix des disques... est un des plus bas au monde ».21 Nous allons étudier ci-dessous cette question qui en irrite plusieurs. Le prix des disques compacts est-il trop élevé? Assez étrangement, le prix des disques compacts ne s’ajuste pas de façon conventionnelle à la loi de l’offre et de la demande. En effet, dès sa sortie en magasin, il n’est pas rare de constater qu’un disque compact est offert carrément au prix coûtant par certains marchands (qui profitent cependant d’un « escompte de volume »), d’autres allant même jusqu’à le vendre à un prix inférieur au prix coûtant, pour un temps limité, utilisant ainsi la vieille technique du

Le prix des disquescompacts ne s’ajustepas de façonconventionnelle à laloi de l’offre et de lademande.

« loss leader » (c’est à dire annoncer et vendre une marchandise à perte, pour attirer le consommateur en espérant qu’il profitera de sa présence pour se procurer un autre produit sur lequel le vendeur bénéficie d’une marge plus élevée, rendant ainsi profitable l’ensemble de la transaction). À ce titre, le consommateur canadien est donc choyé. Les prix de gros exigés au Canada pour des disques compacts se situent au troisième rang parmi les plus faibles

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au monde. On constate aussi que les prix de vente au détail, au Royaume-Uni et dans d’autres pays d’Europe, sont parfois presque le double de ceux qui sont pratiqués au Canada.21 Même lorsqu’ils sont offerts « à prix d’aubaine », le prix des disques compacts en Europe dépasse largement le nôtre. On n’aurait pas idée de vendre ici « en spécial » le nouveau CD de Robbie Williams à $26 plus taxes ! Il ne faut donc pas s’étonner lorsqu’on prend connaissance des résultats d’une étude de « Music Industry News Network – Mi2N » en mai 2000 : 74% des répondants considèrent que les prix des CDs sont « déraisonnables » et 70% considèrent qu’ils sont «excessifs comparés à d’autres formes de divertissement ».44 Heureusement ce n’est pas le cas ici ! ? Le Japon, pour sa part, représente un cas unique, à ma connaissance. Lors d’un séjour là-bas – il y a quand même quelques années de cela - j’ai pu constater des pratiques commerciales qui n’ont pas leur équivalent sur notre continent. Le prix, en général assez élevé, est imprimé en usine sur le « obi strip », une bande amovible de la pochette originale du disque compact. Le prix de détail est donc uniforme, identique d’un magasin à l’autre et il est en vigueur pour les 2 années suivant la parution de l’album (les dates de mise en vigueur sont d’ailleurs inscrites sur cette même bande amovible). Ce qui permet de faire prospérer et coexister un grand nombre de marchands, dont plusieurs indépendants et marchands hyper-spécialisés, puisque les détaillants ne sont pas réellement en concurrence pour la vente de nouveautés. Le marché du détail est donc autrement plus vigoureux au Japon et c’est en offrant un service personnalisé que les marchands doivent se démarquer de leur concurrent. Il importe cependant de préciser que dans le cas de nouveautés « étrangères » (un nouveau Céline Dion par exemple), on offrira simultanément sur les tablettes du disquaire la version « américaine », souvent moins chère, et la version japonaise, à un prix fixe et plus élevé. C’est la raison pour laquelle, des pièces supplémentaires sont souvent offertes en boni sur la version japonaise, pour faire concurrence à la contrepartie « américaine » et faire accepter plus facilement la différence de prix. Il faut reconnaître que l’application d’une telle politique ici serait impensable, les occidentaux ayant été habitués à des pratiques beaucoup plus libérales en termes de fixation de prix. Pourquoi s’offusque-t-on alors du prix des disques compacts au Canada ? Je comprends la frustration de ceux qui me disent « fabriquer un disque compact, ça coûte 1 dollar, pourquoi dois-je payer 20 fois ce prix en magasin ? ». Tout d’abord, précisons que si on appliquait le même raisonnement à tous les produits de consommation, on aurait des surprises ! . Il n’est pas rare que le coût de fabrication ne représente qu’une partie négligeable du prix de détail (combien ça coûte une paire de lunettes de soleil ?!). Il est vrai que, près de 20 ans après leur introduction, les CD sont très peu coûteux à fabriquer.

Le coût unitaire de fabrication d’un CD, avec un boîtier et une impression quadrichrome, de $4.50 qu’il était à une époque est maintenant inférieur à $1.50 10 Le chiffre exact se rapproche sans doute de $1.

« Fabriquer un disque compact,ça coûte 1 dollar... »

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De quoi est donc composé le prix final d’un disque compact ? pressage et emballage (boîtier de plastique pour le CD, paiement au producteur, en plus du matériel imprimé et du travail artistique), paiements versés aux interprètes, droits mécaniques remis au

« Les marges dont jouissentles détaillants canadiens sontinférieures à celles que l’onconnaît en Europe ».

compositeur et à l’auteur, droits d’autorisation si l’œuvre est déjà produite pour un autre territoire, coûts de la production originale, vidéo de promotion, dépenses de marketing et d’administration, frais de stockage, logistique, distribution, livraison, coût des invendus (qui sont en général détruits), marge du point de vente, 45+10 etc... auxquels s’ajoutent évidemment les taxes à la consommation (TPS et TVQ) qui, à elles seules, dépassent largement le profit net que peut espérer en tirer le détaillant. D’ailleurs, encore une fois, les marges dont jouissent les détaillants canadiens sont inférieures à celles que l’on connaît en Europe21 Il est donc normal que les détaillants outre-mer fassent état de résultats moins catastrophiques que ceux que l’on affiche ici. Vous brûlez sans doute de savoir quelle est la part de l’artiste dans tout ça? Entre $0.50 et $2.10, selon l’étude de Durlacher Research effectuée en 2001.44 On pourrait souhaiter que le prix de détail diminue dans les prochains mois, ce qui contribuerait sûrement à ramener les amateurs de musique vers les circuits traditionnels et légaux de distribution et de vente de disques compacts. Malheureusement, la tendance observée récemment laisse croire le contraire, en tous cas en ce qui concerne les nouvelles parutions d’artistes ou de groupes établis. Qu’en pensent les analystes ? Price Waterhouse Coopers prévoit une augmentation du coût unitaire des disques compacts, entraînant une nouvelle diminution des ventes et encourageant la transition vers des sites d’abonnement numérique14 et sans doute le recours aux sites d’échange de fichiers numériques où se transigent quotidiennement des millions de pièces musicales, sans frais aucun et sans égard aux législations relatives aux droits d’auteur. Les pertes qui en découlent pourraient logiquement être invoquées par les maisons de disques pour justifier l’augmentation du prix des CDs. Vous comprendrez que l’industrie se plonge alors dans un « cercle vicieux » qui pourrait se révéler suicidaire. Pour terminer sur cette question du prix des disques compacts, je vous cite ici l’opinion de la Fédération Internationale de l’Industrie Phonographique (traduction libre)46 :

««La proportion du prix d’un CD représentée par le coût de fabrication est minime. Saréelle valeur se trouve dans les droits et la créativité qu’il protège ».

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Piratage sur Internet: "L'industrie du disque est menacée de mort par la consommation en ligne".47 C'est du moins ce qu'on pouvait lire dans le journal "Le Monde" en octobre 1999. Philippe Le Roux, associé chez VDL2, une boîte de conception, réalisation et hébergement de sites Web, va plus loin encore: "L'industrie de la musique est morte..." déclarait-il l'an dernier devant des représentants de ce secteur 48. Selon une étude réalisée par Ernst & Young, les sites Web où se trouvent des fichiers musicaux sont les plus visités sur le Net dans le monde, après les sites pornographiques. (Toutefois, les sondages effectués ici indiquent que moins de 1% des Québécois avouent visiter des sites pour adultes49; nous serions donc peu friands de sites « XXX ». Ou peut-être encore sommes-nous simplement un peu menteurs?) La popularité croissante de réseaux gratuits de partage de fichiers complique la tâche des grandes multinationales de la musique qui tentent de mettre en place des canaux de distribution payante en ligne (Pressplay, mis en place par SONY et Universal, ainsi que MusicNet, résultat d’une collaboration entre AOL Time Warner, BMG et EMI).47+50 "Il est impossible de se mesurer au gratuit et les services légaux ne peuvent concurrencer les services illégaux" affirme un porte-parole de la RIAA,

Amy Weiss.51 L'industrie du disque ne s'oppose donc pas à la mise en ligne de la musique, mais nous comprendrons ici qu'elle "veut en maîtriser la diffusion et le prix".52 Je commenterai plus tard cette volonté inébranlable des "Majors" de s'assurer le monopole de la distribution, peu importe la forme qu'elle adopte.

L’industrie du disque ne s’oppose pas à lamise en ligne de lamusique mais elle veuten maîtriser ladiffusion et le prix

Le Canada n'est pas totalement absent de ce marché puisque eworldmusic.com existe depuis 5 ans et revendique fièrement le titre de "premier site de distribution légale de musique numérique au Canada"53 Alors qu'on aurait pu croire que les disquaires traditionnels allaient être sérieusement affectés par les vendeurs de musique en ligne et les réseaux légaux de distribution de fichiers numériques, les résultats indiquent que ces derniers souffrent autant, sinon plus, que leurs confrères qui ont pignon sur rue. Une étude américaine révèle que la vente de musique en ligne aurait accusé une baisse de 25% pendant les trois premiers trimestres de l'an 2002, comparativement à la même période de l'année précédente. On attribue cette dégringolade principalement à l'utilisation de logiciels P2P ("Peer-to-Peer") d'échange de fichiers54. Parmi ceux-ci: Kazaa, qui compte maintenant plus de 190 millions d'adeptes, selon l'Institut Français d'Opinion Publique.55 Napster est à l'origine de ce mode de partage de fichiers musicaux.56 L'entreprise a fait la manchette pendant 2 ans, jusqu'à sa fermeture en avril 2001.14 Quoique la RIAA (Recording Industry Association of America) ait porté plainte contre Napster en décembre

99% des fichiers musicauxdisponibles sur le Net lesont sans autorisation deleurs créateurs originaux.

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1999, le site avait attiré, en octobre 2000, plus de 38 millions d’internautes à travers le monde.57 Les statistiques relevées avant et après la fermeture du site en indiquent bien la popularité: alors qu'on avait recensé 7.8 milliards de téléchargements pendant le premier trimestre de l'année 2001, ce nombre est tombé à 2.6 milliards pendant le deuxième trimestre.14 (On estime qu'à lui seul, Napster avait orchestré 3 milliards de téléchargements dans le seul mois de février 2001).58 Les internautes ayant rapidement identifié des alternatives (Morpheus, Kazaa, Grokster, Aimster, FastTrack, Gnutella...), de nouveaux sites obtiennent un succès d'achalandage comparable, sinon supérieur, à celui qui les avait précédé. Les recherches de l'ADISQ indiquent que "de mars 2001 à octobre 2001, l'achalandage des sites Internet offrant des téléchargements gratuits de musique a augmenté de 492%".57 Vous avez bien lu: ils ont pratiquement quintuplé! Quoique tout estimé du nombre de fichiers disponibles ou reproduits sur Internet soit forcément spéculatif, on évalue que 99% des fichiers musicaux disponibles sur le Net le sont sans autorisation de leurs créateurs originaux.18 Ce qui dérange, ce n'est pas vraiment la présence de fichiers musicaux sur le Web, mais bien le caractère illégal de leur partage sur le réseau.

Il serait hypocrite de croireque les CDs vierges serventtous à enregistrer l’homéliedominicale du curé de laparoisse...

Michael Greene, président de la NARAS (National Academy of Recording Arts and Science), avait déclaré, lors de la remise des Grammy Awards en 2002 que l'échange et la copie illégale de fichiers musicaux étaient "hors de contrôle et criminels". M. Greene citait également les estimés de la RIAA

qui évaluait alors à 3.6 milliards le nombre de chansons illégalement téléchargées chaque mois.59 Personne ne surprendra donc d'apprendre que la vente de CD vierges a connu une augmentation spectaculaire, si bien qu'aujourd'hui il se vend plus de CD vierges (en majorité fabriqués à Taiwan)18 que de disques compacts déjà enregistrés.60 Nous savons tous que les CDs vierges ont d'autres usages que la copie illégale de pièces musicales, mais tout comme cela avait été évoqué pour leur ancêtre, la cassette vierge, il serait hypocrite de croire qu'ils servent tous à enregistrer l'homélie dominicale du curé de la paroisse... Il est donc regrettable de constater que les nouvelles technologies numériques, qui représentaient pourtant d'extraordinaires opportunités, constituent maintenant une menace envers le talent créateur et que l'usage premier des réseaux "P2P" est le piratage débridé d'œuvres protégées par des droits d'auteur; les créateurs de ces œuvres voient leur travail distribué sur la planète entière, mais ne bénéficient d'aucune compensation.61 Peu d'artistes ont osé manifester leur opposition à l'usage effréné de leurs œuvres à des fins pour lesquelles ils ne reçoivent aucune rémunération. Ceux qui l'ont fait jusqu'à présent ont fait l'objet d'un boycottage. D'autres ont même été jusqu'à soutenir et encourager le recours aux sites gratuits d'échange de fichiers. D’autres encore dont les Beastie Boys, Tom Petty et Alanis Morissette s’étaient opposés à leur maison de disques, manifestant l’intention de diffuser gratuitement certaines de leurs chansons sur le Net.47 "On peut toutefois se demander si les artistes qui se positionnent comme défenseurs invétérés de la gratuité

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sur le net ne jouent pas un double jeu : une façade démagogique qui vise à s'approprier un capital sympathie en soutenant les jeunes contre le pouvoir de ces "multinationales" du disque. C'est le cas de Courtney Love, qui derrière ses prises de position publiques en faveur de la gratuité de la musique, avait exprimé ses craintes de ne pas toucher un sou des produits de la lutte Universal-MP3.com, lutte faite au nom des artistes."62 D'autre part, quelques groupes avaient soutenu Napster dans sa bataille contre les grandes compagnies du disque, notamment Public Enemy, Limp Bizkit et The Offspring. Ironiquement, The Offspring avait été attaqué par Napster pour avoir imprimé des t-shirts aux couleurs de leur site Web... Quoique ma connaissance des réseaux "Peer-to-Peer" soit relativement limitée, je sais qu'ils reposent sur l'hypothèse qu'une proportion significative des usagers adhèrent à "l'idée post-capitaliste de sacrifier ses propres ressources pour le bien commun du réseau".56 Mais je serais curieux de savoir combien d'utilisateurs téléchargent allègrement des fichiers mais refusent que l'on puise dans le contenu de leur ordinateur! De plus, il faut savoir que les utilisateurs de réseaux comme Gnutella et Kazaa ne bénéficient pas d'un anonymat absolu et ne sont donc pas totalement à l'abri de poursuites légales, théoriquement.56 De plus, les sociétés qui animent de tels réseaux ne sont pas non plus invulnérables. On croyait à tort que la configuration du Net rendait la répression à toute fin impossible, puisque "les échanges de fichiers ne se font plus à partir d'un point central et facilement repérable" 36 mais des précédents sont actuellement créés prouvant qu'on ne peut impunément participer à la violation massive et systématique des droits d'auteur sans s'exposer au long bras de la justice de l'Oncle Sam. Le siège de Kazaa, par exemple, est situé au Pays Bas51 et la firme qui en est propriétaire, Shaman Networks, est australienne et enregistrée dans une île du Pacifique.63 Cela ne suffira pas cependant à la soustraire aux lois américaines, puisqu'un juge fédéral de la Californie a décrété qu'elle "pouvait être poursuivie en justice aux Etats-Unis puisque son logiciel a été téléchargé et utilisé par des millions de Californiens... "63 Un premier pas est donc franchi. Mais aucune démarche légale ne pourra mettre fin au piratage généralisé, tant que les utilisateurs eux-mêmes n'auront pas compris le formidable impact destructif de leur comportement. Si des milliards d'œuvres musicales sont illégalement utilisées chaque mois, il faudrait que des millions de voix s'élèvent pour susciter un examen de conscience. C'est ce que j'essaie de faire actuellement... élever la voix, briser le silence passif. Comme je l'ai déjà mentionné précédemment, le phénomène risque aussi de s'étendre aux films et vidéos, et des difficultés du même ordre que celles qui affligent actuellement l'industrie de la musique risquent de se présenter.40 Aux Etats-Unis le représentant Démocrate Howard L. Berman avait déclaré devant la "Computer and Communications Industry Association", le 25 juin 2002, que "400,000 à 600,000 versions pirate de films sont téléchargées chaque jour sur Internet".61 (Les données provenaient de Viant, un consultant Internet de Boston). Ce politicien américain, un avocat de 62 ans représentant le 26e district de Californie, ne préconise toutefois pas la fermeture de tous les systèmes "P2P" qui, à son avis, pourraient bénéficier aux créateurs qui choisissent de les utiliser. La fermeture des réseaux "P2P" étoufferait l'innovation. "Il faut les nettoyer, pas les éliminer". Il

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encourage également le congrès américain à permettre aux créateurs et titulaires de droits d’auteurs de développer et déployer des outils technologiques pour prévenir la distribution non–autorisée de leurs œuvres sur les réseaux « P2P » et contrer le piratage en ligne.61 Selon les estimations, ce fléau représentera une perte de 4.6 milliards d’ici 2005 62 Les commentaires suivants sont tirés d’un rapport de la Gendarmerie Royale du Canada, faisant suite à une recherche terminée en octobre 2000:

« On oublie que l'achat de logiciels, de musique et de films sous licence sert àfinancer la recherche et le développement et à couvrir les coûts de mise en marchéet de production. Le piratage prive les secteurs du divertissement et de la hautetechnologie de sommes qui pourraient autrement être investies à des finsd'innovation... Les personnes qui se livrent au piratage logiciel et à lareproduction illicite de musiques et de films nuisent aux industries légitimes.64

L’usage illégal et le vol de la propriété intellectuelle semblent faire partie de la culture Internet. Répétons que l’industrie de la musique et les artistes en sont les plus grandes victimes.65 Il n’y a aucune justification pour le piratage sur Internet; Comme on nous l’a souvent répété dans des annonces télévisées : « pirater, c’est voler ». Et nous ne pouvons plus plaider l’ignorance... L’heure est à la prise de conscience de l’impact de nos comportements. Même si les gestes reprochés sont souvent commis dans l’anonymat relatif que nous procure notre foyer, ils n’en demeurent pas moins condamnables et répréhensibles. Et s’il faut encore insister :

« Toute diffusion non autorisée est un acte de piraterie, et ce n’est pas parce qu’unetechnologie rend une opération possible que le procédé est moralement légitime ».62

État actuel de la législation canadienne relative aux droits d'auteur Il serait risqué de se lancer ici dans une analyse poussée et exhaustive des textes législatifs, règlements, ententes, traités, conventions, arrangements et accords qui concernent la propriété intellectuelle. D’autant plus que leur adoption, signature ou ratification n’est pas nécessairement synchrone d’un pays à l’autre. Des gens plus compétents que moi en cette matière se sont déjà donné le défi d’étudier les législations canadiennes. C’est le cas de René Pépin, professeur à la faculté de droit de l’Université de Sherbrooke à qui on doit le document «Piratage, musique et Internet : la solution se trouve-t-elle dans le modèle américain ? »28, que je vous invite à consulter. Le document est publié intégralement dans l'édition Printemps 2002 de Lex Electronica (www.lex-electronica.org).

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Je me permets quand même de vous communiquer certains renseignements recueillis au fil de mes laborieuses recherches. Ils me semblent pertinents et sont de nature à jeter un peu de lumière sur cette question complexe. Le Plan d'action Libéral pour le Canada, plus communément appelé "Livre Rouge", promettait, avant les élections de 1993, "d'aider les enregistrements sonores canadiens à accroître leur part du marché intérieur, en adoptant des politiques et des lois relatives à la commercialisation, à la distribution et à la présentation de ces œuvres". Le Livre Rouge spécifiait d'ailleurs que "La culture est l'essence même de l'identité nationale".

C'est donc cette année que nousserons en mesure de constater sil'engagement du gouvernementfédéral aura porté fruit et donneralieu aux ajustements rendusnécessaires par l'émergence detechnologies dont l'usage abusifconstitue une menace au travail descréateurs.

Mais de toute évidence, la technologie progresse beaucoup plus rapidement que les lois qui devraient en régir l’usage. Sheila Copps s’est fait dire, en 1996, que « les lois canadiennes sur le droit d’auteur évoluent avec une lenteur exceptionnelle ».1 Toutefois, en 2001, des promesses ont été formulées pour rassurer les intervenants : « Le gouvernement fédéral s’est engagé à veiller à ce que le régime canadien du droit d’auteur demeure un des plus modernes et avant-gardistes du monde ».29 Le Ministre de l'Industrie a présenté en octobre 2002 son "Rapport sur les dispositions et l'application de la Loi sur les droits d'auteur", conformément aux exigences de l'article 92 de la Loi sur le droit d'auteur (projet de loi C-32).32 Un comité parlementaire a été chargé d'étudier ce rapport et de présenter ses conclusions au Parlement en 2003 32. C'est donc cette année que nous serons en mesure de constater si l'engagement du gouvernement fédéral aura porté fruit et donnera lieu aux ajustements rendus nécessaires par l'émergence de technologies dont l'usage abusif constitue une menace au travail des créateurs. La Loi sur le droit d'auteur est entrée en vigueur en janvier 1924 66 De rares modifications y ont été apportées au fil des années, mais un véritable processus de modernisation a été amorcé en 1988. Depuis ce moment, la première révision d'envergure (le projet de loi C-32) a reçu la sanction royale le 25 avril 1997 et donnait lieu, le 4 juin 1998 32 à la ratification de la Convention de Rome sur la protection des artistes-interprètes exécutants, des producteurs d'enregistrements sonores et des organismes de radiodiffusion.31 Nous simplifierons ici en parlant de "droits voisins"67 et il convient d'ouvrir une parenthèse à ce sujet, puisqu'une telle disposition, promise depuis plusieurs années1, était réclamée à grands cris. L'adoption de mesures relatives aux "droits voisins" a été faite avec un peu de retard: Sophie Bernard, cite Robert Pilon (alors Vice-Président aux affaires publiques de l'ADISQ) dans le numéro du 15 janvier 1997, du Journal du Barreau: "Le dernier pays en date ayant adopté une loi sur le droit d'auteur comprenant les droits voisins est la République de Moldavie... Si le Canada ne peut pas faire ce que la Moldavie a réussi à faire, il y a un problème!".31 (Le Canada était alors le seul pays de l'OCDE - sauf les Etats-Unis - n'ayant pas ratifié la Convention de Rome, qui constitue "la

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base du droit moderne concernant les droits voisins." D'ailleurs, en date du 16 janvier 2003, les Etats-Unis n'avaient toujours pas apposé leur griffe). La législation canadienne antérieure reconnaissait le droit des auteurs-compositeurs et des paroliers d'œuvres musicales de toucher des redevances, mais elle ne prévoyait aucune rémunération pour les interprètes et les producteurs d'enregistrements sonores. Un exemple pour illustrer la chose: k.d. Lang et Michel Rivard touchent des redevances lorsque les chansons qu'ils ont écrites sont interprétées sur scène ou sur les ondes. Les artistes-interprètes canadiens qui ne composent pas eux-mêmes leur matériel ne recevaient aucun paiement pour ces mêmes utilisations, pas plus que les maisons de disques canadiennes ayant produit leurs albums.68 Ces iniquités allaient donc être corrigées par l'adoption de dispositions relatives au "droit voisin", découlant de la Convention de Rome, et les artistes interprètes et producteurs canadiens allaient donc être rémunérés pour l'exécution en public ou la radiodiffusion de leurs enregistrements sonores dans tous les pays ayant ratifié cette convention (actuellement plus de 70, selon l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle). Le Canada peut donc se vanter maintenant d'avoir précédé les Etats-Unis dans l'adoption de mesures législatives s'attaquant au "problème" des droits-voisins. Mais nos puissants voisins du Sud sont connus pour leurs fâcheuses habitudes. Déjà leur industrie culturelle pénètre et domine la planète entière, voici maintenant que l'industrie canadienne de l'enregistrement sonore est, à mon humble avis, menacée d'affaiblissement par l'Accord de Libre Échange et l'ALENA. Nous avons été témoins de la faiblesse du Canada à faire valoir sa souveraineté dans le dossier du

bois d'œuvre; nous risquons à nouveau des frictions dans celui de l'enregistrement sonore. Le Canada désire maintenir et renforcer ses mesures législatives, exercer un contrôle des investissements étrangers et assurer une forme de soutien financier à l'industrie de l'enregistrement sonore (quoique ce rôle soit souvent assumé par les provinces), mais nous nous buterons à la position ferme des Etats-Unis qui considère qu'il s'agit d'une industrie "comme toutes les autres" .4 Nous entretenons

Le Canada peut se vantermaintenant d’avoirprécédé les Etats-Unis dans l’adoption demesures législativess’attaquant au« problème » des droitsvoisins.

l'illusion que l'industrie de l'enregistrement sonore sera exemptée de l'ALENA, à titre d'instrument d'expression culturelle.4 Cette interprétation sera à coup sûr contestée par les Etats-Unis qui "sont partisans d'une libéralisation quasi absolue de la circulation des produits culturels et de l'abolition des mesures nationales de protection et de soutien". Une autre guerre s'annonce donc, peu meurtrière mais néanmoins dommageable. On peut facilement imaginer, par exemple, que les exigences imposées par le CRTC pour assurer un minimum de contenu canadien sur les ondes seront considérées par les Etats-Unis comme une barrière à la libre circulation du produit culturel et un obstacle à la pénétration déjà envahissante de la culture américaine sur les palmarès canadiens. Il est important que le Canada défende farouchement sa position et se prépare à repousser systématiquement toute tentative du voisin américain visant la désintégration des mesures nationales que nous

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avons adoptées pour protéger et soutenir l'industrie canadienne de l'enregistrement sonore. Il faut applaudir aux efforts de nos législateurs pour conférer aux artistes-interprètes les droits qui n'étaient pas reconnus jusqu'à présent mais il importe, pour le bénéfice des artistes interprètes, des auteurs et compositeurs, de clarifier la Loi sur le droit d'auteur pour assurer que la communication (particulièrement sur le réseau Internet) et la reproduction d'œuvres protégées ne puissent se faire sans l'autorisation des détenteurs de droits. La technologie « MP3 » qui permet de comprimer un fichier pour son téléchargement dans un rapport 12 : 1 « pose de manière aiguë le problème du transfert dans le cyberespace des modèles traditionnels de droit d’auteur et de rémunération à la pièce des auteurs et éditeurs.40 « La Loi sur le droit d'auteur doit préciser clairement que l'acheminement d'un enregistrement sonore par des moyens électroniques est un exercice du droit de reproduction, sans égard à la question de savoir si une copie est stockée dans la mémoire de l'ordinateur de l'utilisateur ou si une copie matérielle distincte est réalisée. »1 Afin de décourager les utilisations illégales d'enregistrements sonores originaux, des mesures technologiques sophistiquées sont déjà utilisées au Canada sur de nouveaux disques compacts pour en "contrôler" la copie. De joyeux lurons arriveront sûrement à contourner toute nouvelle technologie visant à "encrypter" les disques compacts; à mon avis, les lois doivent prévoir un recours contre ceux et celles

Le Digital MilleniumCopyright Act risque deperdre tout son mordantet d'être rendu caduc parles nouvelles proposi-tions visant à enamoindrir la portée.

qui déjoueraient ou aideraient à déjouer ces nouveaux systèmes de protection. Je reviendrai plus tard en détail sur ce sujet, mais je précise ici que le gouvernement canadien devra éviter de tomber dans le même piège que les Américains: le Digital Millenium Copyright Act (adopté en 1998) 69, en vertu duquel il est désormais illégal de tenter de contourner les procédés implantés pour prévenir les copies illégales19 ou encore de fournir à d'autres des outils pour ce faire70, est déjà mis au défi. Des modifications ont été proposées en janvier 2003 pour l'assouplir.71 Nos voisins du sud, champions des libertés civiles (?) tolèrent mal que des lois viennent restreindre leur droit de faire un "usage approprié" (fair use) d'enregistrements sonores. Le Digital Millenium Copyright Act risque donc de perdre tout son mordant et d'être rendu caduc par les nouvelles propositions visant à en amoindrir la portée. J'y reviendrai plus tard. Un autre aspect de la révision de la Loi sur le droit d'auteur touche les redevances relatives à la "copie privée". J'ai déjà abordé longuement ce sujet. Je rappellerai simplement ici que de nouveaux tarifs sont présentement à l'étude et visent à augmenter les redevances perçues sur les supports vierges afin de bonifier les compensations monétaires versées aux créateurs pour la réalisation, à domicile et pour "usage privé", de copies de leurs œuvres musicales. Prenons aussi un moment pour évaluer l'efficacité des lois actuelles visant à contrer la contrefaçon et la vente au détail d'enregistrements "pirates" dont les ventes mondiales

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ont atteint environ 4.3 milliards $ US en 2001.72 Quoique ce commerce parallèle n'accapare que 3% du marché au Canada, il risque de progresser si les lois ne sont pas appliquées sévèrement. Voyons ici deux preuves de l'existence de ce marché illicite. En décembre 2001, trois résidents de la région de Toronto ont été accusés d'importer, de fabriquer et de vendre des milliers d'enregistrements contrefaits (ils ont été condamnés à $25,000 d'amende et à deux ans de probation). Plus de 30,000 enregistrements d'artistes tels que Shania Twain, Céline Dion et Pavarotti avait été saisis, ainsi que l'équipement requis pour leur fabrication.46 À Montréal, une enquête a conduit à la saisie de 28,000 disques compacts sur lesquels se trouvaient des enregistrements illicites. Dans ce cas, des milliers de CDs provenaient régulièrement d'Europe de l'Ouest et du Japon et étaient adressés à un magasin de disques de Montréal64, bien connu pour son approvisionnement généreux en disques "pirates". L'ennui, comme le souligne la Gendarmerie Royale sur son site Web, c'est que "Les peines minimales et les amendes peu élevées qui sont imposées n'incitent pas vraiment les organismes d'application de la loi à pousser ce dossier à fond; elles encouragent plutôt les criminels à poursuivre leurs activités de piraterie. Certains faussaires ont signifié à la police leur intention de continuer de vendre de la marchandise contrefaite parce que les mesures de dissuasion qui sont prises ne les incitent pas à mettre fin à leurs activités. Selon des représentants de détenteurs de droits de propriété intellectuelle, certaines personnes constituent une « réserve » pour payer leurs amendes, ce qui montre qu'elles sont conscientes qu'une amende peut leur être imposée à un moment donné, mais qu'elles n'ont pas vraiment l'intention de cesser leurs activités. [De plus], les personnes qui se livrent à la vente au détail de marchandises contrefaites paient rarement sinon jamais la taxe de vente provinciale ou la taxe sur les produits et services. Cette pratique prive l'économie canadienne des taxes liées à la vente de produits autorisés. »64 La GRC se plaint avec raison du peu de ressources qui sont attribuées pour lutter contre ce genre de crimes. Les directives auxquelles doivent se plier les agents fédéraux de police ont pour résultat que les marchés aux puces ou les commerces de détail sont rarement importunés puisqu'on veut éviter que des les ressources fédérales ne soient affectées à des saisies de "petite échelle".64 Diverses manœuvres sont d'ailleurs utilisées, notamment dans les marchés aux puces, pour s'assurer que la vente d'enregistrements contrefaits ne donnera pas lieu à des saisies ou des poursuites. On peut donc conclure que les forces policières sont au parfaitement au courant d'opérations illicites en violation des droits d'auteur, mais elles ont les mains liées et ne bénéficient pas des ressources suffisantes pour nous permettre de croire à l'éradication éventuelle de la contrefaçon. Des criminels peuvent donc dormir sur leurs deux oreilles et continuer d'exercer impunément leur trafic, plantant ainsi une autre épine dans le pied de l'industrie canadienne dont l'existence dépend pourtant d'une législation adéquate et de son application sévère. Pour conclure sur ces questions législatives, je vous transmets ici un commentaire de M. David A. Basskin, directeur général de l'ACEM (une association professionnelle fondée en 1949 qui représente les intérêts de la majorité des éditeurs de musique en affaires au Canada; Les membres de l'ACEM et les 30,000 éditeurs clients de l'ACDRM représentent environ 85 pour cent de la musique utilisée au Canada). Dans

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son témoignage devant le Comité Permanent du Patrimoine Canadien, le 7 novembre 1996, M. Basskin soulignait:

"Le droit d'auteur est notre seule richesse. En l'absence de lois sévères sur le droitd'auteur, qui permettent aux créateurs d'exploiter de manière équitable et de protégerde façon efficace et abordable leurs œuvres, on écrirait très peu de chansons. Lesseules paroles que la plupart des auteurs produiraient seraient des chansonnettespublicitaires ".73

Dans leur examen de la législation, des politiques et des programmes actuels applicables à l'industrie canadienne de l'enregistrement sonore datant de mars 1995, les associés de recherche Ekos Inc tirent des conclusions semblables: " faute de protection légale et faute aussi d'application efficace de la loi, les créateurs et les interprètes ne pourraient pas développer leur talent si ce n'est comme passe-temps; ainsi, leur industrie ne pourrait pas exister."4 Depuis, les Ministères de l'Industrie et du Patrimoine, chargés de formuler et d'appliquer une politique intégrée du droit d'auteur68, ont reconnu l'urgence d'agir.29 Maintenant, agissons! Combattre le feu par le feu : technologie versus technologie Il est déjà acquis que les technologies numériques ont provoqué une augmentation constante des utilisations non autorisées et incontrôlables des enregistrements sonores, dont découlent des pertes de revenu pour les créateurs.1 Parmi les solutions envisagées par l’industrie se trouve justement l’utilisation de nouvelles technologies de « codage » des disques compacts pour en empêcher la copie. Ces procédés qui ont été mis en place d’abord en Europe74 ont eu des résultats mitigés et ont été particulièrement mal accueillis (l’épisode concernant le CD de Céline Dion a été largement couvert par les médias). Au Canada, nous commençons déjà à voir apparaître sur de nouveaux disques compacts un petit sigle (un cercle contenant un triangle rappelant vaguement celui d’AOL !) accompagné de la mention « Copy Controlled ». Le sigle a été adopté dans des dizaines de pays pour aviser le consommateur de l'usage d'une technique de contrôle de la copie, sans toutefois en divulguer la nature exacte. Parmi les procédés susceptibles d'être utilisés, on trouve le "CDS-300" (une nouvelle génération du Cactus Data Shield) mis au point par la firme californienne Macrovision, qui avait présenté son système aux représentants de l'industrie au Midem en janvier 2003. Disques RSB, manufacturier canadien autorisé, en a fait la présentation lors des Rencontres de l'ADISQ en mars 2003. Le concept offre, dit-on, une efficacité maximale75. L’utilisation de ces procédés innovateurs limitant les possibilités de copie soulève à nouveau des questions d’ordre juridique. À ma connaissance, la loi canadienne ne prévoit pas actuellement de recours contre ceux qui tentent de déjouer les nouvelles technologies de protection alors qu’aux Etats-Unis le Digital Millenium Copyright Act de 1998 établit déjà clairement qu’il est illégal de le faire. Cependant, des modifications ont récemment été proposées pour permettre de « contourner les systèmes d’encryption si l’intention est d’en faire un usage qui n’enfreint pas la loi ».

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Pour justifier ces nouveaux ajustements, Rick Boucher, membre du Congrès Américain, clame que « la doctrine du « fair use » est menacée aujourd’hui comme jamais auparavant. ».71 Sean Bersell, vice-président de

L’utilisation de cesprocédés innovateurslimitant les possibilitésde copie soulève ànouveau des questionsd’ordre juridique.

la Video Software Dealers Association apporte un son de cloche différent: "Nous supportons les droits du consommateur de faire un "usage approprié", mais nous voulons nous assurer que toute loi permettant un contournement ne devienne pas une invitation ouverte à la piraterie"71 Il convient d'examiner brièvement ce concept de « fair use ». Il est en effet légal au Canada, comme nous l’avons déjà vu auparavant, de faire une copie d’un disque compact « pour usage privé », ce que certains interpréteront comme un « usage adéquat » correspondant à la notion de « fair use ». Mais si de nouveaux procédés viennent empêcher sans discernement les copies de disques compacts, il est vrai que le consommateur risque de perdre le privilège ou le droit que lui confère la loi de faire un « usage adéquat » du produit qu’il achète. Tout un débat se prépare alors, sans doute de nature semblable à celui qui avait été soulevé en 1984 dans la célèbre « affaire Betamax » où la légalité des appareils vidéo était contestée. «Les juges ont estimé que l’utilisation d’un appareil vidéo était du « fair use » et ne constituait pas une violation indirecte du droit d’auteur ».28 C’est pourquoi aujourd’hui nous possédons tous un « VCR » à la maison... (quoique le format VHS ait fait tomber le « Beta » dans l’oubli). L’affaire Betamax aura-t-elle créé un précédent qui serait applicable au phénomène de la copie de disques compacts ou du contournement des méthodes qui visent à en prévenir la copie?

Une étude du département de sciences informatiques de l’Université de Princeton conclut que l’Industrie devrait reconsidérer le déploiement des techniques de prévention de la copie de disques compacts, puisqu’elles bloquent indistinctement toute forme de copie (légale ou illégale), menacent de causer des dommages aux ordinateurs, et ne réussiront pas - à long terme - à décourager ou empêcher totalement les infractions. Tout cela pourrait même se retourner contre les grandes compagnies de disques dont la

Les techniques deprévention de lacopie ne réussirontpas à découragerou empêchertotalement lesinfractions.

clientèle pourrait s’aliéner et, considérant tous les inconvénients que les CDs protégés sont susceptibles de produire, les consommateurs seront tentés de se retourner vers la copie illégale, plutôt que l’achat de CD légitimes... 3 D’autres techniques ont été expérimentées pour contrôler l’usage et la circulation d’œuvres musicales, par exemple, le « Fingerprinting » et le « Watermarking ». Il s’agit d’un code invisible et indélébile – une forme de tatouage numérique – qui permet d’identifier l’œuvre (et parfois son propriétaire!)56 et d’en suivre la trace si elle se retrouve dans l’univers virtuel d’Internet.76 Des spécialistes de la corporation

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Microsoft prévoient cependant qu’il est peu probable que de tels systèmes deviennent des outils efficaces pour contrer la piraterie. Ils seraient plutôt condamnés à l’échec, « aucun système ne constituant une barrière impénétrable ». 56 Ironiquement, malgré cette dernière affirmation, le géant Microsoft a annoncé en janvier 2003 le lancement d’une nouvelle méthode de protection contre la copie de fichiers musicaux appelée « Windows Media Data Session Toolkit ».77 Ce système autorise la lecture dans les lecteurs de disques compacts et les ordinateurs mais rend impossible la conversion en un fichier MP3 et par conséquent son partage sur le réseau Internet.77 La réponse globale de l'industrie mondiale de la musique prend des formes diverses. À notre insu, des petits robots de haute technologie appelés "Web Crawlers" scrutent constamment l'univers Internet à la recherche de sites où se trouvent des copies non autorisées d'œuvres protégées par des droits d'auteur. L'objectif premier est d'identifier et localiser leurs opérateurs et les Fournisseurs de Service Internet potentiellement fautifs.5 Ainsi 28,000 sites contenant 5.6 millions de fichiers illicites ont été supprimés en 2001. De plus, 997 clones de Napster ont été démantelés dans une douzaine de pays, ce qui représenterait environ 350 millions de fichiers que s'échangeaient 1.2 millions d'usagers simultanés.18 La prochaine étape pourrait être le blocage de réseaux P2P comme Kazaa ou Morpheus et même la suppression, directement sur le disque dur de votre ordinateur personnel, des fichiers incriminants.78 Impossible? C'est ce que nous allons voir!

Les tentatives pourentraver, bloquer,interrompre, détourner ouautrement mettrehors d'usage lesréseaux diffusantdes fichiers piratéspourraient donc sefaire en toutelégalité... Lesréseaux « P2P » nesont pas à l’abri.

Un projet de loi déposé aux Etats-Unis le 25 juillet 2002 par le sénateur Howard L. Berman vise à protéger les titulaires de droits d'auteur et restreindre leur responsabilité lorsqu'ils tentent, par divers moyens, d'empêcher la distribution non autorisée ou la reproduction de leurs œuvres sur les réseaux P2P.14 Les tentatives pour entraver, bloquer, interrompre, détourner ou autrement mettre hors d'usage les réseaux diffusant des fichiers piratés pourraient donc se faire en toute légalité.79+80+81 À ce sujet, des inquiétudes avaient été soulevées lorsque des étudiants français avaient annoncé la mise au point d'un "arsenal censé combattre l'échange de fichiers sous copyright". Le projet avait été baptisé RETSPAN (une anagramme de NAPSTER...) et prévoyait disséminer des fichiers dégradés sur des réseaux tels que Gnutella et Kazaa. La véritable source d'appréhension et d'affolement était la distribution éventuelle d'un "logiciel capable d'étudier le contenu d'un ordinateur afin de détecter la présence éventuelle de fichiers piratés".78 Une levée de boucliers n'a pas tardé et c'est maintenant une éventualité qui semble peu réaliste, d'autant plus que le projet de loi du sénateur Berman interdirait d'utiliser des méthodes qui seraient de nature à détériorer les ordinateurs personnels des individus qui échangent des fichiers.80 Mais sachons que les réseaux P2P ne seront pas à l'abri. L'avenir pourrait prouver que les chercheurs de Microsoft se sont trompés lorsqu'ils affirmaient, en novembre 2002, qu'il n'existe pas d'entrave technique aux

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technologies d'échanges "peer-to-peer".56 La SOCAN faisait preuve de plus d'optimisme, dans un mémoire soumis en septembre 2001 aux Ministères de l'Industrie et du Patrimoine canadien: "On peut affirmer sans risque d'erreur que l'évolution rapide de la technologie fournira aux titulaires de droits d'auteur les dispositifs nécessaires à la protection de leurs œuvres dans l'environnement en ligne."82 La mise en place d'outils technologiques destinés à combattre la piraterie sera-t-elle véritablement utile et efficace? Il est peu probable que cela soit suffisant pour prévenir l'éclatement de l'industrie de la musique. Il faudrait que cette offensive soit assortie d'une vaste campagne de sensibilisation des utilisateurs des réseaux P2P. Information et sensibilisation Il semble que plusieurs utilisateurs de réseaux d'échange de fichiers musicaux ne savent même pas qu'ils commettent fréquemment un acte illégal. Adéquatement informés, pourraient-ils être persuadés de modifier leurs habitudes immorales? Peut-être est-ce exagérément optimiste. Connaissant la nature humaine, nous savons qu'il subsistera toujours des irréductibles qui continueront sciemment de déjouer le système, niant ainsi aux créateurs leur droit d'exercer un contrôle sur la distribution de leurs œuvres. Des étudiants de la Faculté de Génie de l'Université de Sherbrooke ont avancé que "

la plupart des étudiants sont d'accord pour dire que c'est immoral de pirater, mais... ils n'arrêteront pas de le faire... 83 Pour enrayer le problème, le meilleur moyen serait de changer la mentalité du public de manière à ce que celui-ci prenne conscience de tout le tort qu'il peut causer à l'industrie de même qu'aux artistes. Malheureusement, un tel changement de mentalité de la part du public n'est vraiment pas envisageable".84

Il subsistera toujours des irréductiblesqui continueront sciemment dedéjouer le système, niant ainsi auxcréateurs leur droit d'exercer uncontrôle sur la distribution de leursœuvres.

Yves-François Blanchet de (Diffusion YFB) constate que la concertation fait défaut au sein de l'industrie:

"Il manque un joueur... les artistes n'iront pas sur la place publique pour en parler"11

Souhaitons alors que le silence des artistes soit brisé alors que s'amorce - en mars 2003 - la campagne "la valeur de la musique". Cette campagne, lancée par la Coalition Canadienne pour la Valeur de la Musique (CCVM) s'adresse aux jeunes de 9 à 17 ans et propose "une réflexion sur l'idée que celui ou celle qui achète un enregistrement musical encourage les artistes à continuer à créer de la musique et aide la relève à se faire entendre"6.

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Il faut alors garder espoir et ne pas baisser les bras. Il me semble évident qu'une partie de la solution du problème qui ébranle actuellement l'industrie réside dans l'information et la sensibilisation. Comme le constate l'ADISQ: "ces actions de sensibilisation constituent le premier jalon d'un plan global visant à assurer le développement de notre musique".57

La responsabilité d’informer etsensibiliser la populationn’incombe pas exclusivement àl’industrie mais aussi augouvernement.

Cette opinion est partagée par le Comité consultatif sur l'autoroute de l'information d'Industrie Canada. Dans son rapport final déposé en septembre 1995, le sous-comité sur le droit d'auteur faisait la recommandation suivante: "le gouvernement doit également assumer un meilleur leadership pour sensibiliser la population en général, et notamment les utilisateurs, à l'importance du droit d'auteur dans la culture, l'économie et la création d'emplois au Canada".1 Cette responsabilité n'incombe donc pas exclusivement à l'industrie, qui prend maintenant des initiatives de cette nature, mais aussi au gouvernement. Maintenant que la démonstration est faite, passons à l'action: D'abord, informons la population; ensuite, punissons ceux qui perpétueront les comportements abusifs. Pour un soutien public adéquat Non seulement le gouvernement doit-il participer au déploiement d’une vaste campagne de sensibilisation et d’information auprès du public, il doit aussi reconsidérer son niveau actuel d’appui financier à l’industrie de la musique. C’est ce qu’indiquent les études. Mais je dois signaler que les statistiques qui concernent le soutien public sont rares, peu récentes et semblent approximatives. Ernst & Young avait d’ailleurs signalé en 1995 une « grave pénurie de renseignements publiés sur l’industrie »21 et déplorait qu’on « ne dispose pas de données cohérentes et de haute qualité qui autorisent une évaluation sûre des tendances... ». C’est donc à partir du recoupement d’informations fragmentaires que cette partie de mon analyse est effectuée, mais je n’ai pris connaissance d’aucun renseignement qui soit de nature à me persuader que des changements importants ont été apportés au financement gouvernemental de ce secteur d’activité économique depuis la publication d’importantes études au milieu des années 1990. Je ne vais donc pas me noyer ici dans un océan de statistiques. Il devrait être suffisant de mentionner que l’industrie de la réalisation cinématographique canadienne reçoit environ 40 fois plus d’aide fédérale que l’industrie de l’enregistrement sonore. Le secteur des arts littéraires reçoit pour sa part environ 30 fois plus que les producteurs de disques. Ces derniers reçoivent en fait moins de 1% des dépenses fédérales directes pour la culture.21+1+10+4

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La démonstration est donc faite que « l’industrie de l’enregistrement sonore n’a jamais bénéficié d’un soutien financier public semblable à celui des industries du cinéma et du livre. [elle] reçoit beaucoup moins d’aide financière des pouvoirs publics, par rapport à sa taille, que les autres industries culturelles »21 comme le précisait le rapport du Groupe de Travail sur l’avenir de l’industrie canadienne de la musique. L'étude du Groupe Nordicité Ltée tire des conclusions semblables: "son niveau d'appui accuse un important retard sur celui qui est offert à d'autres industries culturelles."10 Les Associés de recherche Ekos Inc opinent qu'il "n'y a pas de raison manifeste qui justifie cette grande différence. Les Canadiens dépensent autant sinon plus pour écouter de la musique que pour lire ou pour voir des films".4 Ils ajoutent également que "l'aide est si modeste qu'elle ne permet pas à l'industrie de s'attaquer à ses problèmes. Il n'est pas difficile de comprendre les raisons d'une telle observation. L'entreprise d'enregistrement sonore viable doit lancer au moins dix enregistrements pour être sûre d'avoir un succès".4 Les Associés de recherche Ekos Inc parlent d’un financement « très limité », par l’intermédiaire de FACTOR, MUSICACTION et le Conseil des arts du Canada et de « prêts modestes d’un secours limité pour des entreprises qui supportent déjà des dettes excessives ». Ils qualifient l’enregistrement sonore de « parent pauvre au chapitre de l’aide financière du gouvernement » et ajoute que le niveau actuel d’appui est « terriblement insuffisant. Il suffit à peine pour permettre au secteur canadien de survivre ».4 Les entreprises sous contrôle canadien font face à des problèmes fondamentaux de coût et de concurrence1 et on a accordé peu d'attention à leur viabilité ou à l'infrastructure qui les soutient.4 Cela constitue une lacune importante "qui limite le succès actuellement et qui risque de le limiter de plus en plus avec le progrès technologique".4 Les transformations dont nous sommes actuellement les témoins exigent une réaction immédiate de l'industrie et des gouvernements pour que des ressources financières adéquates soient allouées.21 D'un côté, puisque les investisseurs traditionnels ne croient pas que la propriété intellectuelle constitue une valeur sûre21, l'industrie a intérêt à générer des profits pour s'autofinancer, ce qui représente actuellement un défi dans l'environnement hostile que nous connaissons, d'autant plus qu'il a été démontré que les profits avant impôts des entreprises basées au Canada sont 18 fois moins élevés que ceux des entreprises basées à l'étranger.4 De l'autre côté, on souhaiterait que les gouvernements triplent, sinon quadruplent, leur aide financière. "Le déploiement stratégique de ces ressources amorcerait une mutation fondamentale".1 Le gouvernement fédéral reconnaît d'ailleurs la contribution du secteur des arts et de la culture au maintien de l'unité canadienne et convient que "des mesures visant à protéger et à promouvoir ce secteur sont indispensables".66 La lutte pour la survie de l'industrie canadienne de la musique se fait "à l'ombre de la plus grande source de produits culturels du monde... le marché canadien est inondé d'une abondance de produits américains qu'appuient de puissantes machines de commercialisation".21 La lutte est donc inégale, les forces ne sont pas équilibrées. Il reste maintenant à espérer que notre voisin du Sud n'invoque pas l'ALENA pour

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bloquer toute tentative du gouvernement canadien d'intervenir financièrement pour supporter les producteurs canadiens.

Il faudra aussi s'interroger sur la forme que doit prendre l'aide gouvernementale. Doit-on soutenir individuellement les artistes? (Le Premier ministre Bernard Landry avait évoqué en février 2003 la possibilité d'une couverture

Les artistes devront-ils recourir àla Loi de lutte à la pauvreté et àl’exclusion?

sociale spécifique pour les artistes, dans le cadre de sa Loi de lutte à la pauvreté et à l'exclusion) Doit-on plutôt diriger l'aide vers les entreprises, sachant que les artistes profiteront directement des améliorations de la viabilité des entreprises? Chose certaine, "une industrie faible en situation précaire est mauvaise pour tout le monde, y compris les artistes".4 Le passé et l'avenir Il suffit de retourner 8 ans en arrière pour constater qu'on nageait alors dans l'inconnu et qu'on sous-estimait la rapide progression des techniques numériques: "Une ligne téléphonique normale accepterait la musique, mais il faudrait trois jours pour télécharger un album de 72 minutes"10. Cette affirmation nous apparaît aujourd'hui risible. La prospective a donné lieu à d'autres hypothèses qui se révèlent maintenant peu plausibles. Parmi les "scénarios de l'avenir", on envisageait le "remplacement progressif de la distribution physique traditionnelle par la distribution électronique... au détaillant qui fabrique le CD sur mesure pour le consommateur".10 Ayant alors accès à des milliers de titres disponibles, grâce à des lignes sur fibre optique et un système de pressage sur place, le détaillant traditionnel allait pourvoir produire des disques et des compilations correspondant exactement aux demandes du consommateur.1 Un projet en ce sens avait d'ailleurs été annoncé en mai 1993 par Blockbuster Entertainment et IBM. Malgré certaines questions de droits et de paiements qu'il restait à résoudre, on prédisait que cette méthode allait devenir la "forme de diffusion

La vente au détail disparaîtra-t-elle pendant que les dirigeants del'industrie de l'enregistrementcalculent comment contournerentièrement les magasins?

dominante" avant l'an 2000. Comme on pouvait s'y attendre, ce concept de "CD sur demande" qui contournerait le fabricant a été mal accueilli par les grandes maisons de disques qui préfèrent maintenir l'exclusivité de la distribution.10 Les lois américaines semblent donner raison aux géants de l'industrie du disque qui désirent interdire à une tierce partie la redistribution de copies électroniques d'une œuvre musicale, opposant ainsi leur veto aux détaillants qui désiraient se lancer dans le commerce du téléchargement numérique.85 Le robinet est donc fermé pour les détaillants traditionnels qui ne pourront compter sur l'usage des technologies numériques pour compenser les pertes de revenus qui ont été observées partout sur la planète. La question est clairement posée par le Groupe Nordicité dans son Étude sur

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les incidences des nouvelles technologies sur l'industrie de l'enregistrement sonore au Canada: "La vente au détail disparaîtra-t-elle pendant que les dirigeants de l'industrie de l'enregistrement calculent comment contourner entièrement les magasins?"10 La réponse me semble cruellement évidente... Les études qui concluent que "les détaillants qui suivent l'évolution survivront" n'arrivent pas à me consoler, surtout lorsqu'elles invoquent que "la fréquentation des points de vente au détail est une activité sociale. Les magasins jouent un rôle communautaire dans l'ensemble de la culture des admirateurs".10 L'ennui c'est qu'en général ceux qui assument un "rôle communautaire" dans la société le font souvent bénévolement! Je serais donc porté à donner raison à Ernst & Young qui conclut que "les nouvelles formes de distribution électronique représentent une menace à long terme pour le secteur de la vente au détail dans sa structure actuelle".21 Cela me semble plus réaliste. Il me semble donc clair que la distribution physique, telle que nous la connaissons aujourd'hui, est vouée à disparaître au profit des deux grandes plates-formes légales de distribution électronique (Pressplay et Musicnet) mises en place par les cinq grandes maisons de disque. Je n'ai que peu d'espoir pour la survie des magasins spécialisés. Il faut vraiment se rendre à l'évidence: l'avenir appartient à la distribution électronique, à condition qu'on arrive à aplanir certains obstacles menaçants. Un rapport publié en novembre 2002 par Informa Media prévoit que ce n'est pas avant l'an 2005 que les maisons de disques réussiront à développer des méthodes pour contrôler la copie de masse par les pirates et les consommateurs et pour restreindre la pratique populaire de télécharger des chansons à partir de sites Web illégaux.86 Les études de Price Waterhouse et de Durlacher Research 44 évoquent aussi une forte progression de la distribution numérique, qui deviendra la forme dominante de distribution de la musique, à partir de l'an 2005 (on prévoit que le chiffre d'affaires de Presplay et MusicNet, comparativement à 2002, sera multiplié par vingt!)14; le résultat sera une profonde transformation de l'industrie, qui bénéficiera des économies provenant de l'élimination de la distribution physique.10

La distribution physique, telle que nousla connaissons aujourd'hui, est vouée àdisparaître au profit des deux grandesplates-formes légales de distributionélectronique (Pressplay et Musicnet)mises en place par les cinq grandesmaisons de disque... Je n'ai que peud'espoir pour la survie des magasinsspécialisés.

D'ici là, dit-on, le piratage se poursuivra alors que les technologies sophistiquées continuent d'évoluer. Mais, contrairement à ce qu'avance Informa Media, les analystes de Durlacher croient qu'il sera impossible d'imposer de nouveaux standards qui empêcheraient la copie et l'échange de fichiers illégaux. Les efforts et initiatives de l'industrie pour supplanter et éliminer le format "MP3" seraient alors voués à l'échec.44

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La distribution numérique offre de nouvelles possibilités. Actuellement, les consommateurs sont souvent forcés de payer pour un album complet, comportant des chansons superflues. Il sera maintenant possible d'offrir à l'amateur de musique de choisir uniquement les chansons qu'il désire se procurer, et de payer seulement pour les pièces sélectionnées. Cette option est intéressante, à condition qu'elle soit offerte à des conditions qui puissent persuader un utilisateur de tourner le dos aux sites qui offrent le même produit illégalement mais dont la qualité ne peut être garantie.44 L'industrie se doit donc d'offrir une combinaison d'avantages pour attirer les consommateurs: prix alléchant, qualité irréprochable, flexibilité, commodité et valeur ajoutée. Vraisemblablement, nous nous dirigeons vers une disparition des supports audio pré-enregistrés. Le disque compact survit encore, pour le moment, mais la cassette audio est déjà victime de l'univers numérique. Des détaillants, tels HMV et Music World (et je partage leur opinion) ont affirmé que l'on assiste à une disparition prématurée du format "cassette". Plusieurs titres parus en 2001 l'on été exclusivement en disque compact. En 2002, les nouveautés disponibles en cassette faisaient figure d'exception. 2003 s'annonce encore pire, alors qu'un grand nombre de titres existants seront supprimés des catalogues, accélérant l'évanouissement de ce format. Alors que les distributeurs canadiens avaient expédié 15 millions de cassettes en 1997, ce nombre est tombé à 1 million en 2002, selon Solutions Research Group87. Les détaillants estiment que la rareté relative des cassettes peut avoir contribué au déclin général des ventes, tous formats combinés.14 Certains consommateurs préfèrent encore la cassette, notamment en raison de son prix inférieur, et plusieurs utilisent encore exclusivement ce format dans leur automobile. La conversion forcée au disque compact et le retrait hâtif des cassettes existantes, loin d'aider à apaiser les troubles actuels de l'industrie, semble au contraire en accélérer la chute. Parmi les interventions des "majors" de l'industrie du disque pour assurer leur avenir, on trouvera sans doute un "lobbying" étroit auprès des législateurs pour l'adoption de lois plus précises et sévères - assez pour avoir un effet dissuasif 84 - à l'endroit des contrevenants. Le Canada devra faire sa part en poursuivant la modernisation de son cadre du droit d'auteur et remplir son engagement d'assurer "un équilibre approprié entre la protection du droit d'auteur et l'accès aux œuvres dans le nouvel environnement technologique"29 La prospérité de l'industrie de la musique en dépend. "Ce n'est que si les compositeurs de chansons et de musique, les interprètes, les éditeurs et les sociétés d'enregistrement sonore peuvent contrôler l'utilisation qui est faite de leurs œuvres ou peuvent à tout le moins exiger de recevoir un remboursement lorsqu'elles sont utilisées, que l'industrie de la musique peut réussir et que les créateurs et les interprètes peuvent connaître des carrières professionnelles intéressantes."1 Des préoccupations ont récemment été soulevées quant à la responsabilité des fournisseurs d'accès ou de services Internet (FSI). Par exemple, Verizone s'est vu forcé de "révéler l'identité d'un gros utilisateur des réseaux d'échange de fichiers qui aurait téléchargé plus de 600 pièces musicales en un seul jour".88 Au Canada, le Comité Consultatif sur l'Autoroute de l'Information a reconnu "qu'en vertu de la

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législation actuelle, les prestataires de services pourraient être tenus responsables des infractions au droit d'auteur... Cela dit, les ministères ne connaissent aucune jurisprudence qui ait tranché la question expressément dans le cas des FSI".69 Le rapport du groupe Nordicité ajoute: "L'entité à réglementer est le fournisseur de services, c'est-à-dire le diffuseur électronique responsable du contenu. [Ils] doivent être tenus responsables de la comptabilisation et des systèmes de paiement de redevances pour la musique distribuée par moyen électronique".10 Mais le document de consultation sur le droit d'auteur à l'ère numérique, publié par Industrie Canada et Patrimoine Canada en juin 2001, souligne que "sur un plan pratique, il est probablement impossible pour les FSI de tenter de surveiller ce contenu".69 Leur responsabilité n'est donc pas encore clairement établie et l'avenir nous dira si les FSI se verront obligés de policer leurs utilisateurs.

J'ouvre une parenthèse ici quant à la situation de la "vente directe", cette forme spécialisée de vente au détail dominée par Columbia House. Il y a dix ans, la Maison Columbia accaparait 18% des ventes totales au détail au Canada (15% en 1996 aux États Unis) et constituait donc un joueur important.

Je n'ai pas de statistiques récentes qui me permettraient de faire une projection juste, mais on faisait état d'un "sérieux déclin" en 2000.89 Les propriétaires de la Maison Columbia étaient Warner et Sony (à parts égales) jusqu'en mai 2002, alors que le Groupe Blackstone - une firme privée d'investissements de New-York - fit l'acquisition de la majorité des actions pour la somme de 420 Millions de $ US.90 Warner et Sony91 ne conservent que chacun 7.5% des actions. Après l'échec de la fusion de la Maison Columbia et de CD Now en mars 2000, AOL Time Warner avait imputé à ses états financiers une perte de 220 millions de $ US afin de refléter la valeur réelle son investissement dans Columbia House.92 Incidemment, pour répondre à la question de ceux qui se demandent comment la Maison Columbia peut se permettre de faire des offres apparemment très alléchantes, il faut savoir qu'elle bénéficie de privilèges spéciaux, notamment des droits de reproduction mécanique inférieurs à la normale et des paiements inférieurs à la moyenne pour l'utilisation des bandes maîtresses.21 Elle est en fait un "producteur" de disques qui vend directement au public, et non un distributeur. Je reste perplexe quant à l'avenir de cette forme de vente. Il est sans doute possible qu'elle puisse survivre en concentrant ses opérations sur le Web, mais ma boule de cristal est un peu floue quant à l'avenir de la "vente directe". Le fait que Sony et Warner se soient pratiquement retirées de ce marché me laisse des doutes quant à la viabilité de cette forme de commerce. Quant à BMG Music Service, propriété de Bertelsmann93 et concurrent de la Maison Columbia, elle rapporte des ventes de 300 millions d'albums en 14 ans; néanmoins, sa succursale canadienne est fermée depuis mai 2000.94

La Maison Columbia bénéficie deprivilèges spéciaux, notamment desdroits de reproduction mécaniqueinférieurs à la normale et des paiementsinférieurs à la moyenne pourl'utilisation des bandes maîtresses.

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Conclusion Il me faut conclure que l'industrie de la musique est à la dérive. Son sort pourrait être celui du Titanic; alors qu'elle semblait promise à un bel avenir, naviguant sur une source apparemment inépuisable de dollars, l'industrie voguait allègrement sans se soucier de la présence d'un écueil géant. Elle a donc été éventrée par l'émergence d'Internet et des technologies numériques. Alors que le bateau prend l'eau, les officiers affolés courent dans toutes les directions, tentent par tous les moyens de limiter les dégâts, sortent précipitamment les bateaux de sauvetage et réalisent qu'ils n'ont aucune chance d'être tous sauvés. Dans le froid et l'obscurité auxquels ils sont confrontés, les membres de l'équipage constatent qu'ils devront faire des sacrifices. Leurs cris et leurs pleurs ne seront pas entendus. Il est trop tard pour revenir en arrière et la brèche est trop importante pour être colmatée. L'histoire se répète: le vaisseau est condamné et il y aura peu de survivants.

Les amateurs demusique réclament,avec raison, uneamélioration de laqualité du produitmusical offert, un prixplus équitable, unediversité accrue, unaccès facile et pratiqueà l'univers musical etune assurance que lesartistes et créateurssont adéquatementtraités par les maisonsde disques.

Le scénario est apocalyptique mais néanmoins plausible. Le sauvetage de l'industrie de la musique passe d'abord par une prise de conscience et un auto-examen sérieux. Elle devra se transformer, s'adapter aux nouvelles réalités dont elle n'a pas su prévoir l'impact, dans sa maladresse et son insouciance. Un effort synergique est urgent pour d'abord se réconcilier avec les amateurs de musique. Ces derniers réclament, avec raison, une amélioration de la qualité du produit musical offert, un prix plus équitable, une diversité accrue, un accès facile et pratique à l'univers musical et une assurance que les artistes et créateurs sont adéquatement traités par les maisons de disques. Pour ma part, j'ajouterai que les grandes maisons de disques doivent rétablir et maintenir le support qu'ils ont accordé dans le passé aux disquaires qui constituent encore le dernier chaînon entre l'artiste et le consommateur et un circuit privilégié de con- tact direct avec l’amateur de musique. La Coalition Canadienne pour la Valeur de la Musique entreprend une campagne de sensibilisation auprès de jeunes. Elle réclame pour cette campagne l'appui des disquaires en affirmant que "la voix des détaillants est essentielle au succès..."6 Je souhaite que cet appui soit mutuel et que l'industrie réalise que les efforts actuels de déploiement des plates-formes de distribution de musique numérique contournent les circuits traditionnels de vente au détail et menacent la survie des disquaires.

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Les artistes et créateurs doivent aussi faire entendre leur point de vue. Cela exigera une dose de courage. Les plus riches d'entre eux vont sans doute maintenir leur mutisme, laissant croire à une approbation tacite; les plus pauvres (la majorité) ont peur de perdre leur image "cool". De grâce, chers artistes, ne laissez pas aux autres la tâche ingrate de rappeler à votre auditoire que la musique c'est votre gagne-pain. Les gens comme moi vont vite se lasser de prendre la défense d'une prétendue victime qui se confine dans un inexplicable silence.

Les artistes etcréateurs doivent aussifaire entendreleur point devue.

Quant aux gouvernements, il faut féliciter les législateurs pour les efforts visant la modernisation des textes de loi relatifs au droit d'auteur et la propriété intellectuelle. Mais la partie n'est pas gagnée. Après avoir accusé un retard gênant, nos lois cheminent maintenant vers une harmonisation planétaire mais il faut désormais prendre les devants et s'assurer que la législation ne vise pas uniquement à corriger les lacunes du passé mais bien à devancer les événements et créer des lois qui précèdent l'émergence de nouvelles potentialités de violation des droits. Il serait également opportun de répondre aux besoins criants de l'industrie en offrant un support accru aux producteurs indépendants, non seulement pour assurer leur survie mais aussi pour offrir aux nouveaux talents une opportunité de pénétrer un marché qui s'avère actuellement plus hostile qu'accueillant. Et je garde le dessert pour la fin: les amateurs de musique, les consommateurs, ceux-là même qui ont assuré jusqu'à présent le formidable développement de la musique. J'étais présent lors des 8e Rencontres de l'ADISQ tenues à Montréal en mars 2003. Les intervenants de l'industrie de la musique ont alors dû constater avec grand désarroi que les jeunes, qui sont pointés du doigt comme responsables du déclin de l'industrie de la musique, sont insensibles à tout discours moralisateur et imperméables aux plaidoiries braillardes des magnats de l'industrie. De toute évidence, une nouvelle approche, plus conciliante et moins accusatrice, doit être envisagée pour regagner la faveur des amateurs désabusés. Leur soutien est indispensable. Pourtant, une clôture s'est élevée entre les membres de l'industrie et ceux qui les font vivre. Et la bonne

De toute évidence, une nouvelle approche,plus conciliante et moins accusatrice, doitêtre envisagée pour regagner la faveur desamateurs désabusés. Leur soutien estindispensable

volonté semble être absente dans les deux camps. D'un côté l'industrie joue à la police constatant que les internautes manifestent la ferme volonté de continuer à fréquenter, tant qu'ils existeront, les sites où se partagent illégalement des milliards de fichiers musicaux; de l'autre côté les consommateurs méprisent les compagnies qui assurent la production des œuvres musicales et soutiennent que la musique devrait être gratuite. C'est ce que l'on appelle une impasse.

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Je crois que l'argument des amateurs de musique ne doit pas être totalement et immédiatement rejeté. Je propose ici une solution qui devrait stimuler la réflexion: Oui! La musique devrait être gratuite! Mais il y a une condition essentielle et incontournable: l'artiste doit être d'accord! Si un créateur décide, pour des raisons qui lui sont propres, d'autoriser la diffusion gratuite de son œuvre sur Internet, qu'il en soit ainsi. Mais si au contraire il choisit de gagner sa vie en composant de la musique, en écrivant ou en interprétant des chansons, acceptons de payer pour jouir du fruit de son travail, comme nous le faisons pour tous les autres biens de consommation. Respectons ce droit des créateurs de disposer de leurs œuvres comme ils l'entendent. Cela n'empêchera sans doute pas le Titanic de couler, mais au moins nous n'aurons pas poussé les passagers et l'équipage à l'eau...

Respectons le droit des créateurs de disposer de leurs œuvres comme ils l’entendent.

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RÉFÉRENCES: 1 - Le Temps d'agir - Rapport final du Groupe de Travail sur l'Avenir de l'Industrie Canadienne de la Musique - mars 1996 (Document disponible sur le site du Patrimoine Canadien: http://www.pch.gc.ca/pc-ch/pubs/ic-ci_f.cfm) (présenté à l'hon. Sheila Copps, Min. du Patrimoine Canadien). - Brian Chater, Coprésident du Groupe de Travail (est aussi président de la CIRPA "Canadian Independant Recording Producers Association) & Brian Robertson, Coprésident du Groupe de Travail (est aussi président de la CRIA "Canadian Recording Industry Association". Les autres membres: Rosaire Archambault (PDG du Groupe Archambault Inc.); David A. Basskin (Président de la CMRRA "Canadian Musical Reproduction Agency Ltd"); Claudette Fortier (DG de la SODRAC "Société de Droit de Reproduction des Auteurs, compositeurs et éditeurs au Canada"); Gisèle Fréchette, (Présidente de la Guilde des Musiciens du Québec) ; Robert Pilon (Vice-président exécutif de la Coalition pour la diversité culturelle) ; Michel Sabourin (Président de la Commission du disque et du spectacle de variété); Jason Sniderman (VP Sam The Record Man); Paul Spurgeon (VP Services Juridiques - SOCAN "Société Canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique"); Serge Turgeon (Président de l'Union des Artistes). 2 - Baisse des ventes mondiales de CD en raison du piratage - Agence France-Presse (Londres) - 16 avril 2002 Tiré du site Web Cyberpresse.ca (http://www.cyberpresse.ca/reseau/ados/0204/ado_102040088128.html) 3 - Evaluating New Copy-Prevention Techniques for Audio CDs - John Alexander Halderman - Princeton University -Department of Computer Science (Présenté le 18 novembre 2002 à Washington, à la 9ième conférence de l'ACM [Association for Computing Machinery] - 2002 ACM workshop on Digital Rights Management). Copyright © 2002 by the Association for Computing Machinery, Inc. Abstracting with credit is permitted. (http://www.acm.org/pubs/copyright_policy/) 4 - Examen de la législation, des politiques et des programmes actuels applicables à l'industrie canadienne de l'enregistrement sonore - Les associés de recherche Ekos Inc. - 31 Mars 1995 (Document disponible sur le site de Patrimoine Canada: http://www.pch.gc.ca/pc-ch/pubs/ic-ci_f.cfm). 5- Canadian Recording Industry Association (http://www.cria.ca/main.htm). Avec permission. 6 - Mise à jour de la campagne "La valeur de la musique" - EMI Music Canada - Release Book 03-08. Le lecteur est invité à consulter le site keepmusiccoming.com 7 - Annonce publicitaire: Bankruptcy Auction - Valley Media, Inc - Videobusiness - 4 Fev. 2002 8 - Wherehouse files for Chapter 11 - 21 janvier 2003 - Source: cnn.com, publié sur le site de AudioRevolution.com (http://www.audiorevolution.com/news/0103/21.wherehouse.shtml) . Avec permission. 9 - Rough year predicted for music industry as retail music stores close - 3 Jan. 2003 - Music Business Canada.com - (http://www.cirpa.ca/mbccore.cfm?Page=News&NewsID=294&mark=Newsid&value=294) (Article dégagé de: U.S. Music Sales Down in 2002, by Jeff Leeds, Los Angeles Times, January 3, 2003; Record Retailers Face Music, Plan Closures, by Jeff Leeds, Los Angeles Times, January 8, 2003; and Sprint, Warner Offer Cell Phones Music Service, by Sue Zeidler, Reuters, January 8, 2003) 10 - Étude sur les incidences des nouvelles technologies sur l’industrie de l’enregistrement sonore au Canada – Groupe Nordicité Ltée - 12 juin 1995 (Document disponible sur le site de Patrimoine Canada: (http://www.pch.gc.ca/pc-ch/pubs/ic-ci_f.cfm) 11 - Présentation de Yves-François Blanchet, Diffusion YFB, aux 8e Rencontres de l'ADISQ - mars 2003 - Des initiatives pour ramener l'amateur de musique dans les magasins de disques - Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.diffusionyfb.com

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12 - Présentation de Mario Labbé, Analekta, aux 8e Rencontres de l'ADISQ - mars 20023 - Des initiatives pour ramener l'amateur de musique dans les magasins de disques. Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.analekta.com/ 13 - Ludiciel, droit d'auteur et copyright - - Anne Laure Caquet - (Thèse soutenue en 1998). Document disponible au centre de documentation virtuel de l'Institut de Recherche en Propriété Intellectuelle Henri Desbois - Paris, France) (http://www.ccip.fr/irpi/documentation/theses/resume/1998.htm) 14 - Recorded Music (extrait du document "Global Entertainment and Media Outlook 2002-2006") - Price Waterhouse Coopers 15 - Canadian Recording Industry Decides not to Authorize Commercial Rental of Sound Recordings - Brian Robertson, communiqué de la Canadian Recording Industry Association -9 février 1994. (Extrait de: Étude sur les incidences des nouvelles technologies sur l’industrie de l’enregistrement sonore au Canada – Groupe Nordicité Ltée - 12 juin 1995 (Document disponible sur le site de Patrimoine Canada: (http://www.pch.gc.ca/pc-ch/pubs/ic-ci_f.cfm) 16 - CD: Je grave, tu graves, c'est grave! - Jean-Yves Girard, L'actualité (Tiré du site Web de L'Actulité - décembre 2001) - Avec la permission de l'auteur. 17 - Global Music Disc Piracy continues to grow - Canadian Music Network, No. 55 - Juin 2002. Avec permission. 18 - Music Piracy Report - IFPI - June 2002. 19 - http://www.dontbuycds.org/index.html 20 - Producer rattles the sabers - Videobusiness - 21 Octobre 2002. 21 - Rapport soumis au Groupe de Travail sur l’avenir de l’industrie canadienne de la musique – Phase I – Ernst & Young - mars 1995 (Document disponible sur le site de Patrimoine Canada: http://www.pch.gc.ca/pc-ch/pubs/ic-ci_f.cfm). 22 - Loi sur le droit d'auteur - Chapitre C-42 Document disponible sur le site de la Commission du Droit d'Auteur du Canada (http://www.cb-cda.gc.ca/info/act-f.html#rid-30442). 23 - Un aperçu de la loi sur le droit d'auteur. Tiré du site Web de la SOCAN (Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique): http://www.socan.ca/jsp/fr/music_users/copyright_intro.jsp 24 - Rapport Financier 2001 de la SOCAN - Le Rythme de vos affaires (publication de la SOCAN) - Printemps 2003 25 - Pour des détails supplémentaires, le lecteur est invité à consulter: Le droit d'auteur: ce que vous devez savoir. Disponible sur le site Web de la SODRAC (Société du droit de reproduction des auteurs compositeurs et éditeurs au Canada) (http://www.sodrac.com/francais/droit_auteur.html) 26 - Énoncé provisoire des prétentions de la SCPCP (Société Canadienne de Perception de la Copie Privée). Avec permission. 27 - La Société Canadienne de Perception de la Copie Privée (http://www.cpcc.ca/francais/index.htm). Avec permission. 28 - Piratage, musique et Internet : la solution se trouve-t-elle dans le modèle américain ? René Pépin - Professeur, Faculté de droit, Université de Sherbrooke. (Paru dans Lex Electronica, Vol. 7, No 2, Printemps 2002) - document disponible sur le site Web: (http://www.lex-electronica.org/articles/v7-2/pepin.htm). Avec la permission de l'auteur

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29 - Cadre de révision du droit d'auteur – 22 juin 2001 – Direction de la Politique de la propriété intellectuelle (Industrie Canada); Direction de la politique du droit d’auteur (Patrimoine Canada) (http://strategis.ic.gc.ca/SSGF/rp01101f.html) Sauf indication contraire, l’information contenue sur ce site peut être reproduite, en totalité ou en partie, et par tout moyen, sans frais et sans autre autorisation de l'Industrie Canada, pourvu qu’une diligence raisonnable soit exercée dans le but d’assurer l’exactitude de l’information reproduite, que l'Industrie Canada soit identifié comme étant la source de l’information et que la reproduction ne soit pas présentée comme une version officielle de l’information reproduite ni comme ayant été faite en association avec l'Industrie Canada ou avec l’approbation de celui-ci 30 - Présentation de Claude Brunet, avocat chez Ogilvy Renault, aux 8e Rencontres de l'ADISQ - mars 2003 - Le bouleversement dans le monde de la musique commande de nouvelles mesures législatives et réglementaires: quelles sont-elles? 31 - L'industrie du disque et de la radio - Le Canada et ses droits voisins - Sophie Bernard - Le Journal du Barreau, Vol. 29, No. 1 - 15 Janvier 1997 (http://www.barreau.qc.ca/journal/vol29/no1/adisq.html). Avec permission. 32 - Rapport sur les dispositions et l’application de la loi sur les droits d’auteur – Oct. 2002. Document disponible sur le site du gouvernement canadien: (http://strategis.ic.gc.ca/epic/internet/incrp-prda.nsf/vwGeneratedInterF/rp00863f.html) Sauf indication contraire, l’information contenue sur ce site peut être reproduite, en totalité ou en partie, et par tout moyen, sans frais et sans autre autorisation de l'Industrie Canada, pourvu qu’une diligence raisonnable soit exercée dans le but d’assurer l’exactitude de l’information reproduite, que l'Industrie Canada soit identifié comme étant la source de l’information et que la reproduction ne soit pas présentée comme une version officielle de l’information reproduite ni comme ayant été faite en association avec l'Industrie Canada ou avec l’approbation de celui-ci 33 - Oppositions formelles au tarif de la SCPCP. Document disponible sur le site Web de la Canadian Coalition for Fair Digital Access (http://www.ccfda.ca/subsections/eng_resources.html) 34 - Coalition Of Manufacturers, Retailers, Tech Firms Formed To Battle Recording Levies - 11 Décembre 2002. Document disponible sur le site de Marketnews.ca (http://www.marketnews.ca/newsarchive.cgi?1039632721). Avec permission de l'éditeur. 35 - Changements majeurs proposés à la loi sur le droit d'auteur - Jacques E. Labrèche, LÉGER ROBIC RICHARD, Avocats. /réf. 185.10F - © 1996 LEGER ROBIC RICHARD / ROBIC (http://www.robic.ca/publications/185-10f.shtml). Avec permission. 36 - LIBRE EXPRESSION - LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE: UNE AFFAIRE DE GROS SOUS? par Gilles Guénette - 5 août 2000 (http://www.quebecoislibre.org/000805-4.htm). Avec permission de l'auteur. 37 - The Investors Guide to the Music Industry in Canada (CIRPA - Canadian Independent Record Production Association, 1994). Cité dans "Examen de la législation, des politiques et des programmes actuels applicables à l'industrie canadienne de l'enregistrement sonore" - Les associés de recherche Ekos Inc. - 31 Mars 1995 (Document disponible sur le site de Patrimoine Canada: http://www.pch.gc.ca/pc-ch/pubs/ic-ci_f.cfm) 38 - Discours d'ouverture des États Généraux du Disque - Catherine Trautmann - Ministre de la culture et de la communication (France) - 29 juin 1999. Document disponible sur le site du Ministère (http://www.culture.fr/culture/actualites/conferen/egp99.htm) 39 - Profil de l'industrie de l'enregistrement sonore - Source: Site Internet de Statistique Canada (http://www.statcan.ca/francais/Pgdb/arts27_f.htm) Les visiteurs du site ont droit de faire un usage raisonnable de son contenu à des fins de recherche personnelle, organisationnelle ou de politique gouvernementale ou à des fins éducatives. Cette permission comprend l'utilisation du contenu dans des

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analyses et dans la communication interne et externe de résultats et conclusions, y compris la citation de quantités limitées de renseignements complémentaires extraits du site dans de tels documents et/ou sites Internet. L'information de Statistique Canada est utilisée avec la permission de Statistique Canada. Il est interdit aux utilisateurs de reproduire les données et de les rediffuser, telles quelles ou modifiées, à des fins commerciales sans le consentement exprès de Statistique Canada. On peut se renseigner sur l'éventail des données de Statistique Canada en s'adressant aux bureaux régionaux de Statistique Canada, en se rendant sur le site Web de l'organisme à http://www.statcan.ca ou en composant sans frais le 1-800- 263-1136. 40 - Une compagnie de disques adopte le MP3 "copiable" - 3 novembre 1998 - Source: Reuters - Document disponible: (http://vianet.infinit.net/Nouvelle/Breves/br-9811.htm) 41 - Présentation de Hervé Rony, Syndicat National de l'Édition Phonographique (France) aux 8e Rencontres de l'ADISQ - mars 2003 - Des initiatives pour ramener l'amateur de musique dans les magasins de disques - Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.disqueenfrance.com/snep/ 42 - HMV Joins With Major Music Labels To Increase Availability Of CD Singles - 19 Nov. 2002. Document disponible sur le site de Marketnews.ca (http://www.marketnews.ca/news_retail.cgi#1037716060). Avec permission de l'éditeur. + Capsule "Info-Culture" sur la première chaîne de Radio-Canada 43 - Présentation de Jean-Claude Dumesnil, HMV Canada, aux 8e Rencontres de l'ADISQ - mars 2003 - Des initiatives pour ramener l'amateur de musique dans les magasins de disques. Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.hmv.com/ 44 - Impacts of Digital Distribution on the Music Industry - Durlacher Research Ltd. - 26 Jan 2001 45 - Pascal Goubereau ("The Incredible Melting Man") (http://www.djouls.com/edito/edito6.html) 46 - What is Copyright? - Fédération Internationale de l'Industrie Phonographique (http://www.ifpi.org/) + Global anti-piracy watch 2 (http://www.ifpi.org/site-content/antipiracy/piracy_watch_02.html) 47 - Votre musique (gratuite) par l'Internet - Document didactique disponible sur le site de "Les Éditions Van In", éditeur scolaire belge (http://www.vanin.be/nl/html/sec/uitgaven/frans/internetactuel/musinternet.htm) Source: Articles de Stéphane Davet et Véronique Mortaigne, Le Monde, 15.10.99 (textes adaptés) 48 - Présentation de Philippe Le Roux, V(DL)2, aux 7e Rencontres de l'ADISQ - mars 2002 - Des solutions d'affaires. Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.vdl2.com/ 49 - Internet au Québec: davantage de musique et de transactions bancaires. - Jean Charles Condo - Branchez-vous.com - 23 janvier 2003 (http://www.branchez-vous.com/actu/03-01/07-136302.html) (Depuis plus de trois ans, Léger Marketing et le Cefrio mènent une enquête sur l'utilisation d'Internet à laquelle plus de 75.000 Québécois adultes ont participé. Voici les principales conclusions de NETendances 2002). Avec permission de Branchez-vous.com 50 - La libre circulation du MP3 en danger - 27 juillet 2001 (Commentaire de "Max" sur ID Son.com) (http://www.idson.com/html/article.php?sid=301) 51 - Les services d'échange de musique se multiplient - Andy Sullivan (Reuters Washington) Cyberpresse.ca - 5 septembre 2001. 52 - http://www.ospnewsletter.com/ index_e.asp?let_num=2&rub_num=5

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53- Présentation de Olivier Trudeau, eworldmusic.com, aux 8e Rencontres de l'ADISQ - Mars 2003 - La solution eworldmusic.com / Disques RSB: un modèle d'affaires Internet québécois pour les producteurs de disques - Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.eworldmusic.com 54 - Vente de CD en ligne en chute libre à cause de Kazaa - Jean-Charles Condo - Branchez-vous.com - 5 novembre 2002 (http://www.branchez-vous.com/actu/02-11/06-332501.html). Avec permission de Branchez-vous.com 55 - Présentation de Paolo Galli, Institut Français d'Opinion Publique, aux 8e Rencontres de l'ADISQ - mars 2003 - Le profil de l'amateur de musique est-il le même ici comme à l'étranger - Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.ifop.com/europe/index.asp 56 - The Darknet and the future of content distribution Peter Biddle, Paul England, Marcus Peinado, and Bryan Willman Microsoft Corporation - 18 Nov. 2002 (http://crypto.stanford.edu/DRM2002/darknet5.doc) Copyright © 2002 by the Association for Computing Machinery, Inc. Abstracting with credit is permitted. (http://www.acm.org/pubs/copyright_policy/) 57 - Développement des Technologies – Mise en œuvre d’un plan mobilisateur. Bref Compte rendu des recherches de l’ADISQ sur l’impact du développement des technologies sur l’Industrie musicale (http://www.adisq.com/adisq2000/adisq_profil/html/adisq_profil.html). Avec permission de l'ADISQ 58- Replacement Attack on Arbitrary Watermarking Systems- Darko Kirovski and Fabien A.P. Petitcolas (Microsoft Research) (Présenté le 18 novembre 2002 à Washington, à la 9ième conférence de l'ACM [Association for Computing Machinery] - 2002 ACM workshop on Digital Rights Management). Copyright © 2002 by the Association for Computing Machinery, Inc. Abstracting with credit is permitted. (http://www.acm.org/pubs/copyright_policy/) 59 - Downloading music from unauthorised Web sites is theft, says Songwriters Association of Canada - 8 Mars 2002 - Document disponible sur le site de GoodMedia.com (http://www.goodmedia.com/sac/news/pressreleases.htm) 60 - Le téléchargement et la copie font baisser les ventes de musique (BMG Company Statement on Copy Control (http://www.bmgcopycontrol.com/france/index.html) 61 - Speech by the Honorable Howard L. Berman to the Computer and Communications Industry Association Regarding Solutions to Peer to Peer Piracy - 25 juin 2002 (M. Berman, avocat né en 1941, est sénateur démocrate, à la chambre des Représentants, pour le 26e district de Californie - incluant Los Angeles). (http://www.house.gov/berman/p2p062502.html) 62 - Le contentieux autour de la musique en ligne - des arguments révélateurs de conceptions antagonistes - (http://www.ifrance.com/evrmusic/argumentsacteurs.html) 63 - Kazaa: bientôt un procès - Jean Charles Condo - Branchez-vous.com – 12 janvier 2003 (http://www.branchez-vous.com/actu/03-01/07-133901.html). Avec permission de Branchez-vous.com 64 - Évaluation de la piraterie des droits d'auteur et de la contrefaçon de marques de commerce à l'échelle commerciale au Canada. Préparé pour : Sous-direction des affaires fédérales et d'immigration. La recherche ayant servi à la rédaction du présent rapport a pris fin en octobre 2000. - Document disponible sur le site de la Gendarmerie Royale du Canada (http://www.rcmp-grc.gc.ca/crim_int-f/copyright_privacy_f.htm) L'information présente sur ce site y a été affichée afin qu'elle y soit facilement disponible pour une utilisation personnelle ou publique non commerciale et peut être copiée, en tout ou en partie et par quelque moyen que ce soit, sans frais ou autre permission. 65 - Music and the Internet - RIAA (Recording Industry Association of America) (www.riaa.org)

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66 - Historique des modifications législatives - Document disponible sur le site de Patrimoine Canada (http://www.pch.gc.ca/progs/ac-ca/progs/pda-cpb/legislation/hist_f.cfm). 67 - Entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur les droits d'auteur - 25 juillet 1997 - Document disponible sur le site de Industrie Canada (http://www.ic.gc.ca/cmb/welcomeic.nsf/92adade4459b5d32852564e4006736be/9a07a4694d15a0de8525661200779c65!OpenDocument). 68 - Direction Générale de la politique du droit d'auteur - Patrimoine Canada (http://www.pch.gc.ca/progs/ac-ca/progs/pda-cpb/index_f.cfm?nav=2). 69 - Document de consultation sur le droit d’auteur à l’ère numérique – 22 juin 2001 - Disponible sur le site du Gouvernement du Canada (http://strategis.ic.gc.ca/epic/internet/incrp-prda.nsf/vwGeneratedInterF/rp01099f.html). Sauf indication contraire, l'information contenue dans cette publication peut être reproduite, en totalité ou en partie et par tout moyen, sans frais et sans autre autorisation d'Industrie Canada ou du Patrimoine canadien, pourvu qu'une diligence raisonnable soit exercée de manière à assurer l'exactitude de l'information reproduite, qu'Industrie Canada et le Patrimoine canadien soient identifiés comme étant les sources de l'information et que la reproduction ne soit pas présentée comme une version officielle de l'information reproduite ni comme ayant été faite en association avec Industrie Canada ou le Patrimoine canadien ou avec l'approbation de ceux-ci. 70 - Implementing Copyright Limitations in Rights Expression Languages - Deirdre Mulligan and Aaron Burstein (UC Berkely School of Law) (Présenté le 18 novembre 2002 à Washington, à la 9ième conférence de l'ACM [Association for Computing Machinery] - 2002 ACM workshop on Digital Rights Management). Copyright © 2002 by the Association for Computing Machinery, Inc. Abstracting with credit is permitted. (http://www.acm.org/pubs/copyright_policy/) 71 - DMCA Challenges back in Congress - Videobusiness - 20 Jan. 2003. 72 - Saisie de disques compacts piratés - 10 juillet 2002 - Document disponible sur le site Web de la Gendarmerie Royale du Canada - (http://www.rcmp-grc.gc.ca/on/french/press/2002/2002_july_10.htm). L'information présente sur ce site y a été affichée afin qu'elle y soit facilement disponible pour une utilisation personnelle ou publique non commerciale et peut être copiée, en tout ou en partie et par quelque moyen que ce soit, sans frais ou autre permission. Également reproduit sur "MesNouvelles.com" (Branchez-vous) (http://mesnouvelles.branchez-vous.com/communiques/cnw/DIV/2002/07/c4192.html) 73 - Audiences du COMITE PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN - Document disponible sur le site du Parlement du Canada (http://www.parl.gc.ca/committees352/heri/evidence/37_96-11-07/heri37_blk201.html) Reproduit avec permission des services juridiques de la Chambre des Communes. 74 - Reproductive cycle - Paul Sweeting - Video Business - 11 Nov. 2002. 75- Présentation de Richard Bélanger, Disques RSB, aux 8e Rencontres de l'ADISQ - mars 2003 - La solution eworldmusic.com / Disques RSB: un modèle d'affaires internet québécois pour les producteurs de disques - Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.rsbdisc.com/fr/02/02s05.html 76 - La boîte à musique - Reportage du journaliste Barclay Fortin diffusé le : 16 novembre 2000 à l'émission "Branché" (Commentaire de Olivier Trudeau, président de eWorld Music) Transcription disponible: (http://www.radio-canada.ca/branche/v6/162/trans-eworld.html)

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77 - Microsoft lance une nouvelle protection contre la copie de fichiers musicaux - Michel Dumais - Branchez-vous.com - 20 janvier 2003 (http://www.branchez-vous.com/actu/03-01/07-135501.html). Avec permission de Branchez-vous.com 78 - LES POLLUEURS DE RÉSEAUX P2P SE BOUSCULENT AU PORTILLON -Estelle Dumout, ZNET France - 29 juillet 2002 (http://news.zdnet.fr/story/0,,t118-s2119972,00.html) 79 - Un projet de loi américain contre le piratage "peer-to-peer" - Jean Charles Condo - Branchez-vous.com - 26 juillet 2002 (http://www.branchez-vous.com/actu/02-07/06-256701.html). Avec permission de Branchez-vous.com 80 - A BILL - To amend title 17, United States Code, to limit the liability of copyright owners for protecting their works on peer-to-peer networks - (www.songwriters.org/berman.bill.hr.5211.txt.pdf) 81 - Infection des réseaux P2P par la RIAA : un canular - Michel Dumais - Branchez-vous.com - 15 janvier 2003 (http://www.branchez-vous.com/actu/03-01/07-134501.html). Avec permission de Branchez-vous.com 82 - SOCAN - Mémoire préliminaire soumis aux Ministères de l'Industrie et du Patrimoine Canadien (dans le cadre du processus de réforme du droit d'auteur) - 15 septembre 2001 - Document disponible sur le site du Gouvernement du Canada: http://strategis.ic.gc.ca/SSGF/1/rp00735f.html 83 - MP3 et Piratage - Rapport - Équipe No. 09 - Gabriel Hébert, Mathieu Viau, François Duhaime (étudiants, Faculté de Génie de l'Université de Sherbrooke - Automne 99) (http://www.sca.usherb.ca/gin555/ex_them/1999-AUT/4A-EQ09R.HTM) 84 - MP3 et Piratage - Rapport - Équipe No. 04 - Steve Lessard, Jimmy Turmel, Pascal Picard (étudiants, Faculté de Génie de l'Université de Sherbrooke - Automne 99) (http://www.sca.usherb.ca/gin555/ex_them/1999-AUT/4A-EQ04R.HTM) 85 - Legal Tender - Paul Sweeting - Video Business - 7 Jan. 2002 86 - Report predicts continuous decline in music sales until 2007 - 12 Novembre 2002 - Music Business Canada.com - (http://www.cirpa.ca/mbccore.cfm?Page=News&NewsID=275&mark=Newsid&value=275) (Résumé de "Net Piracy Will Extend Record Industry’s Recession", by Raymond Snoddy, The Times). Avec permission de la CIRPA. 87 - Présentation de Kann Ygit, Solutions Research Group Consultants Inc, aux 8e Rencontres de l'ADISQ - mars 2003 - Le profil de l'amateur est-il le même ici comme à l'étranger? - Le lecteur est invité à consulter le site Web: http://www.inthenameofcool.com 88 - FAI forcé de révéler l'identité d'un utilisateur de Kazaa - Jean-Charles Condo - Branchez-vous.com - 21 janvier 2003 (http://www.branchez-vous.com/actu/03-01/07-135702.html). Avec permission de Branchez-vous.com 89 - Bertelsmann, Time Warner discuss clubs merger - 21 avril 2000 - Indian Express Newspapers (Bombay) Ltd . - Reproduit sur le site Web de "The Financial Express" (http://www.financialexpress.com/fe/daily/20000422/fco22064.html) 90 - Napster's end may be near - Jim Bessman - 16 mai 2002 (http://www.bandname.com/magazine/articles/display_article.asp?article=benear) 91 - États financiers consolidés de SONY pour le premier trimestre terminé le 30 juin 2002 (www.sony.net/SonyInfo/IR/financial/ fr/2002-7-25/pdf/03_ophb.pdf)

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92 - AOL TIME-WARNER - Résultats financiers pour le trimestre financier terminé le 31 Mars 2001 (http://biz.yahoo.com/e/010419/aol8-k.html) 93 - Music On the Internet - A topographic tour of the Online Music World (http://www.minidisc.org/music_internet.html). Avec permission 94 - Canadian Music Network, No. 86, 27 Fév. 2003 au 5 mars 2003. Avec permission. ____________________________________________________________________