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MÉTHODES AGILES, COMMENT LES ENVIRONNEMENTS DE TRAVAIL SOUTIENNENT CETTE (R)ÉVOLUTION _ LIVRE BLANC 2019

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MÉTHODES AGILES, COMMENT LES ENVIRONNEMENTS DE TRAVAILSOUTIENNENT CETTE (R)ÉVOLUTION_LIVRE BLANC 2019

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SOMMAIRE

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LES MÉTHODES

AGILES

LE MONDE DU TRAVAIL

SE TRANSFORME

LE NEW

AGILE

LES 5

RÈGLES D’OR

ÉDITO

L’environnement de travail à l’épreuve des méthodes agiles

En quelques années, l’Agile a franchi un nouveau cap : réservées au départ aux projets informatiques, ces méthodes concernent désormais les entreprises dans leur ensemble. Ces pratiques novatrices sont devenues un incontournable, que ce soit à l’échelle de certains services ou de l’ensemble de l’organisation, tant elles permettent de réduire les durées de concept-to-cash et d’améliorer l’efficacité des processus, en remettant le client au centre et en assurant la transparence de chaque projet. Ce n’est pas un hasard si des milliers d’entreprises européennes les ont choisies : à titre d’exemple, 80 % des répondants d’une étude de la société allemande GPM ont déclaré que les méthodes agiles amélioraient significativement les résultats et l’efficacité des salariés.Souplesse opérationnelle, approche horizontale de la collaboration et évolution du management sont ainsi les clés du développement de ces méthodes.

Ce qu’elles impliquent amène aussi à repenser l’aménagement des espaces de travail. Afin de répondre au mieux aux attentes des entreprises utilisant les méthodes agiles et à celles qui envisageraient de les adopter, Colliers International France a mené une démarche de Recherche et Développement auprès de quelques pionniers et adeptes de cette (r)évolution. Identifier leurs demandes, leurs solutions, leur perception de l’Agile et l’application quotidienne qu’elles en font a permis la rédaction de ce livre blanc, qui fait la synthèse des principaux enjeux de l’adaptation des environnements de travail aux méthodes agiles. État des lieux concret de la mise en place de l’Agile en entreprise, ce document aborde également le contexte, et donne des clés pour comprendre les futures pratiques de ces entreprises : avec le New Agile, de nouvelles idées émergent et fondent les environnements de travail de demain.

FRÉDÉRIQUE MIRIEL

Le thème a mobilisé la cellule R&D de Colliers International France durant deux phases. Dans un premier temps, elle a analysé les fondamentaux des méthodes agiles, et le lien entre cette organisation et les espaces de travail. Elle a ensuite réalisé un benchmark international auprès d’entreprises représentatives de l’usage de l’Agile à différentes échelles : Allianz Digital Factory, AXA Belgium, ING Bank, Rabobank, Vivat, Leboncoin et Spotify. Elle a pour cela opéré des observations in situ et constitué un vaste recueil d’informations grâce à de nombreux entretiens avec des équipes travaillant selon les méthodes agiles, au sein de ces différentes structures.

MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE

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Directrice du département Conseil en environnements de travail et en accompagnement du changement

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01. LES MÉTHODES

AGILES

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Depuis qu’elles ont été formalisées en 2001, les méthodes agiles font de plus en plus parler d’elles. Mais que sont-elles véritablement ? Pourquoi ont-elles été imaginées, et pourquoi sont-elles adoptées par de plus en plus d’entreprises ? Retour sur leur évolution et sur leur mise en place dans le monde du travail.

DES DÉCENNIES DE CHANGEMENT Ces trente dernières années, les environnements de travail et les besoins ont davantage changé qu’au cours de tout le XXe siècle. La tertiarisation, l’informatisation et la digitalisation de l’économie ont tout transformé. D’où l’idée, déjà répandue dans la seconde moitié du siècle dernier, que l’organisation hiérarchique et procédurale tradition-nelle, la méthode « en cascade » (waterfall) héritée de l’industrie lourde, ne pouvait plus correspondre à cette nouvelle ère. La chasse aux « gaspillages » a précipité l’invention du Lean management, sys-tème d’organisation du travail fondé sur l’amélio-ration continue (en termes de productivité, qualité, délais et coûts), expérimenté par le groupe Toyota à partir des années 1970 et aujourd’hui considéré comme l’ancêtre de l’Agile.

UNE NÉCESSITÉ AGILE En parallèle, l’émergence des technologies de l’information, en particulier la pratique du dévelop-pement informatique, redéfinit profondément les normes d’organisation du travail dans ce secteur. Il convient alors d’adapter la gestion de projet à ces nouveaux modes de production. En 2001, le Ma-nifeste Agile est rédigé. Il condense une approche cherchant efficacité, horizontalité et réactivité. Les méthodes agiles se basent, avant tout, sur la satisfaction du client, qui constitue de fait un inter-locuteur régulier, pleinement intégré aux proces-sus. Elles préconisent l’adaptation au changement, notamment en matière de rythme :

les livraisons intermédiaires doivent être rapides et régulières. Elles se fondent non plus sur une divi-sion pyramidale des tâches, mais sur une entente entre individus, qui constituent ensuite des équipes agissant de concert. En Agile, solidarité et coopé-ration ne sont pas des vains mots ; chaque projet implique de se réunir, de converser, et par-dessus tout de comprendre ce que le client cherche. D’où une approche itérative (différents tests au fur et

LES MÉTHODES AGILES

une équipe agile-

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à mesure du développement du projet) et incré-mentale (le projet avance palier par palier), chaque nouvelle fonctionnalité étant ajoutée de façon à ne pas endommager les précédentes. Elles font appel à des cérémonies, des réunions ritualisées permet-tant de faire des points réguliers sur les phases du

projet. On compte parmi ces moments codifiés les stand-up meetings  (réunions rapides quotidiennes), les rétrospectives (effectuées à chaque fin d’itéra-tion pour que l’équipe réfléchisse en temps réel aux points à améliorer dans l’organisation), ou encore les post-mortems (réunions où l’ensemble des phases du projet sont analysées par l’équipe concernée).

Créée en 2006, l’entreprise Spotify est la première à avoir mis en place une organi-sation d’entreprise Agile. Imité par d’autres entreprises (notamment ING), Spotify prône des valeurs telles que : « une culture saine peut réparer un processus défaillant » ; « limiter au maximum la bureaucratie » ; « décider en se basant sur les données, et non sur son ego » ; « faire des erreurs pour s’améliorer ».

Toute l’entreprise est organisée en unités basées sur l’Agile :

· Squad (ou feature team) : équipe composée de 6 à 12 personnes qui regroupe des com-pétences complémentaires, et fonctionne comme une petite start-up.

· Tribu : réunion de squads travaillant sur des domaines liés, tenant un rôle d’incuba-teur, limitée à 150 personnes.

· Chapitre : il rassemble entre elles les personnes de mêmes compétences, trans-versalement aux tribus ; et s’assure de leur développement personnel.

LE PIONNIER SPOTIFY

LES MÉTHODES AGILES

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UN PRINCIPE COLLECTIF Pour éviter l’effet tunnel et les retards à la prise de décision, dus à un nombre trop important d’inter-médiaires ou à l’inertie interservices, les méthodes agiles répondent avec la constitution d’équipes transdisciplinaires. Les commanditaires-utilisateurs sont également impliqués dans toutes les étapes du processus. Via des séquences de « sprint » (ou « ité-ration »), les phases les plus importantes du projet sont condensées en une période de temps où la pro-duction est la plus soutenue. Si cette méthode était destinée en premier lieu aux développeurs informa-tiques, nombre d’autres métiers et projets impliquant une phase de recherche et de fourniture de services véritablement dédiés au client vont voir dans l’Agile un assouplissement constructif et plausible des or-ganisations traditionnelles de l’entreprise. C’est ainsi que de plus en plus de structures l’adoptent, sans cependant le faire à la même échelle. L’Agile est protéiforme, et s’utilise selon un éventail de besoins. Raison pour laquelle il n’existe pas une mais des

méthodes agiles, parmi lesquelles on peut trouver l’approche Scrum (la plus employée), Kanban, ou l’Extreme Programming. Elles peuvent s’utiliser de manière unitaire ou être combinées.

DES ÉCHELLES DIFFÉRENTES Dans certaines organisations, les méthodes agiles sont retranscrites comme des outils, par exemple lorsqu’un service décide d’organiser de brèves réu-nions quotidiennes ou des sprints durant une phase. En l’espèce, l’équipe adopte alors des cérémonies constitutives des méthodes agiles, sans forcément bouleverser toute son organisation. Quand tout un projet est développé avec l’ensemble de l’approche (travail collectif horizontal, cérémonies, relation client très affinée), il fait véritablement appel à une méthode. Ces dernières années, l’Agile peut se faire plus impactant et devenir une philosophie déployée à l’échelle de l’organisation, quels que soient les projets, les métiers et les services : il devient alors l’élément fondamental de la culture d’entreprise.

LES MÉTHODES AGILES

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EN TANT QUE COACH AGILE, QUEL EST VOTRE RÔLE EN ENTREPRISE ? Je vois mon rôle comme celui de révélateur, au sens chimique du terme : les gens ont les ré-ponses en eux-mêmes, et souvent ces réponses sont basées sur le bon sens. Pour susciter une véritable réaction chimique, il faut être davan-tage qu’un simple observateur : il faut « agili-fier » les gens et les organisations. Il existe des obstacles liés au type de produit, mais le plus souvent ils viennent du management.

QUELS SONT LES FACTEURS D’« AGILISATION » ? Tout dépend du contexte de l’entreprise, mais cinq piliers sont fondamentaux lorsqu’on veut déployer des méthodes agiles : 1/ La digitalisation. Ouvrir les gens à la digitalisa-tion et à ce que ça implique en termes de produits et services. 2/ Les canaux de distribution. Par exemple, lorsque vous faites des produits dématérialisés, vous utilisez Internet pour les distribuer. Il faut connaître parfaitement ces canaux et travailler sur la transition entre les anciens et les nouveaux. 3/ Les canaux de communication. Une bonne communication est primordiale. 4/ L’accélération des cycles. Tout va plus vite aujourd’hui. Pour bien comprendre comment fonctionne toute la chaîne, de la création à l’usage, il faut nécessairement bien en comprendre toutes les étapes, donc mettre en place des boucles de rétroaction, des feed-back entre chacune et faire disparaître les silos. 5/ Les méthodes de travail et les processus sous-jacents, à améliorer constamment. Ces cinq piliers sont des angles d’approche simultanée qu’il faut avoir concernant l’agilité. Ils permettent de prendre en compte l’ensemble des problématiques qui se posent à l’entreprise.

LE CHANGEMENT CULTUREL AGILE

PATRICKBOENSProgramme Manager Agile Transformation Digitale et Modernisation

Patrick Boens était rompu aux méthodes agiles bien avant de mettre un nom dessus.Project manager depuis 1988 et la création de sa société d’infor-matique, il s’est naturellement tourné vers l’accompagnement agile d’entreprises telles que BNP Paribas Fortis ou ING à partir des années 2000. De quoi en tirer de nombreuses leçons.

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être fait), et leur donner le sens de l’accomplissement personnel. Cela, l’Agile le permet-il ?

LE TRAVAIL À DISTANCE EST-IL EN DÉSACCORD AVEC LES MÉTHODES AGILES ? Pas du tout. Il faut réfléchir à ce que les gens puissent travailler en AAA : anything, anywhere, anytime. Intégrer le téléphone mobile, qu’on a tout le temps sur soi, est fondamental dans la réflexion sur les méthodes agiles et les environnements de travail ; et évidemment, les moyens modernes de téléconférence sont nécessaires. Un problème possible concerne la communication ; mais ce problème concerne toute organisation, agile ou non. Par exemple, dans le cas des collaborations internationales, il faut se mettre d’accord sur une langue véhiculaire que chacun maîtrise et s’assurer qu’il y ait moins de six heures de décalage horaire pour trouver des plages de travail communes. Ensuite, je vois dans l’évolution des outils numériques de formidables initiatives, mais également une forme d’exagération. La multiplication des outils de communication peut devenir un problème en soi, parce que retrouver les informations risque de tour-ner au cauchemar.

COMMENT ÉVOLUERA L’AGILE, D’APRÈS VOUS ? L’histoire de l’agilité passe par plusieurs temps. Au départ il y a eu une prise de conscience d’autres façons de travailler et de manager les gens. Et puis en 2001, tout ceci a été formalisé par 17 experts dans le Manifeste Agile, c’était une sorte de temps de la corporation, même de « religion ». Aujourd’hui, nous sommes au temps de la conviction : il faut convaincre les grandes entreprises qu’elles doivent s’adapter à des attentes nouvelles, et cela passe par le changement. Nous allons bientôt rentrer dans une forme de temps de la conclusion, où l’on va se rendre compte que malgré toutes ses vertus, l’Agile n’est pas une recette miracle. Il y aura donc proba-blement un désenchantement suivi, je le pense, d’un temps du dépassement, où l’Agile va se réinventer.

Lorsqu’on compose un produit, il est déjà temps de se poser la question de savoir comment le distribuer, comment communiquer… Dès la conception, il faut penser à la vie du produit.

ET ÇA FONCTIONNE ? Pour passer d’un modèle waterfall traditionnel à un modèle agile, un changement culturel est néces-saire. Si l’évolution vers l’Agile est juste de surface, on retombe dans les mauvais travers quelques mois ou années plus tard. Il est rare de voir toute une organisation passer durablement en Agile si elle ne se modifie pas en profondeur.

L’AGILE, C’EST UNE MODE ? L’Agile n’est pas une mode. Bien avant le Manifeste de 2001, les fondements de l’Agile existaient déjà. Dans les années 1970 la méthode waterfall était déjà remise en question. Les fondements de Scrum proviennent d’un texte de 1986. Ce qui risque d’être une mode, c’est lorsqu’une entreprise applique ces modèles sans prendre en compte ni le changement culturel, ni le changement d’organisation.

LES MÉTHODES AGILES DOIVENT-ELLES ÊTRE LIMITÉES AUX PRODUITS INFORMATIQUES ? Tout peut être Agile, mais tout ne doit pas être Agile. Par Agile, j’entends quelque chose qui dépasse les cérémonies habituelles. Si l’Agile, c’est faire preuve de flexibilité, concevoir toute la chaîne d’un produit ou service, il n’y a aucune raison qu’il se cantonne à la sphère informatique. Il n’y a pas de contrordre à or-ganiser un événement ou un département comptable de manière agile, mais il faut se poser la question qui prévaut : gagne-t-on vraiment en efficacité en travail-lant ainsi ? Le collaborateur va-t-il être plus heureux au travail ? Le client plus satisfait ? Daniel Pink a proposé un modèle pour mettre cela en évidence, le MAP : Mastery, Autonomy & Purpose. Il faut donner aux gens la possibilité d’acquérir l’expertise nécessaire, leur donner de l’autonomie pour les laisser décider (parce que c’est souvent eux qui savent ce qui doit

LES MÉTHODES AGILES

PAYAMDJAVDANING Responsable mondial Agile

C’est lui le chef d’orchestre du déploiement des environnements agiles pour les 53 000 employés d’ING répartis dans 42 pays : Payam Djavdan, responsable Agile chez ING. Rencontre avec un expert de la transformation culturelle Agile.

ING BANK PAYS-BAS A ÉTÉ L’UN DES PION-NIERS DE LA « TRANSFORMATION CULTU-RELLE AGILE » DANS LE SECTEUR FINAN-CIER : QUELLES EN SONT LES RAISONS ? En 2014, nous voulions mettre en place un canal bancaire unique aux Pays-Bas, permettant à un client d’effectuer facilement et quand il le veut ses opérations bancaires. Mais le time-to-market dans la livraison de notre produit n’était pas très bon, nous livrions seulement 3 à 4 sor-ties de notre application bancaire chaque année. Nous sommes allés chez Spotify à Stockholm en décembre 2014, et avons décidé d’appliquer une démarche similaire chez ING Pays-Bas pour améliorer le time-to-market, améliorer la productivité et/ou la performance, et enfin engager davantage les collaborateurs.

D’UN POINT DE VUE PRATIQUE, COMMENT AVEZ-VOUS RÉUSSI À METTRE EN PLACE CETTE TRANSFORMATION ? Après la visite de Spotify, nous avons repensé la nouvelle organisation, et en 5 mois nous avions regroupé les employés des différents services en squads. On s’est aussi inspirés de Zappos, aux États-Unis. C’était en 2015. ING Pays-Bas n’avait pas été pensé comme un pilote, mais puisque ça fonctionnait, en 2016 on a décidé de déployer l’organisation à l’échelle du groupe. Nous avons donc accompagné le changement des structures de tous les pays : une équipe dédiée venait à Amsterdam puis repartait mettre en place la transformation localement.

IL EST ASSEZ AISÉ DE COMPRENDRE L’EF-FICACITÉ DES MÉTHODES AGILES DANS LE DÉVELOPPEMENT LOGICIEL ET MAR-KETING, MAIS MOINS DANS UN SERVICE COMPTABLE OU FINANCIER. COMMENT LES AVEZ-VOUS MISES EN PLACE ?

L’AGILE EST UN ÉTAT D’ESPRIT

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L’Agile est un état d’esprit. Tous les départe-ments peuvent être organisés en Agile, mais à des échelles différentes. Les principes restent les mêmes, c’est leur application qui diffère : au dé-partement IT par exemple, il faut aller très vite pour offrir une réponse au client. Ce n’est pas le cas dans d’autres services.

C’ÉTAIT IL Y A TROIS ANS : QUEL FEED-BACK POUVEZ-VOUS FAIRE AUJOURD’HUI ? Travailler en Agile, ça signifie apprendre constam-ment de ses erreurs. Nous avons fait face à de nombreux challenges. Notre conclusion la plus importante, c’est que les employés sur l’opération-nel adorent ça. La seule difficulté a concerné les managers, dont le travail en tant que leaders agiles est foncièrement différent. Les managers « clas-siques » sont comme des bergers, qui crient toute la journée sur le troupeau, et les moutons écoutent leur leader. En mode Agile, ils sont comme des apiculteurs : leur crier dessus ne sert à rien, les abeilles sont des expertes pour faire du miel. Ce que l’apiculteur doit faire, c’est vérifier à la fin de la journée qu’il y a bien du miel dans la ruche. Si c’est le cas, on ne touche à rien ; si ce n’est pas le cas, là il faut passer à l’action, vérifier la température, le bon fonctionnement… C’est ça, un leader agile. Ma-nager en n’étant pas là en permanence, en laissant aux personnes la responsabilité de décider. Selon les pays, il y a bien quelques petits ajustements car la culture n’est pas la même, mais le plus impor-tant, c’est de regrouper des gens d’horizons variés et de les responsabiliser pour livrer le meilleur produit au client.

QUEL CONSEIL DONNERIEZ-VOUS À UNE ENTREPRISE QUI VOUDRAIT SE LANCER DANS UNE TELLE TRANSFORMATION ? Lorsqu’une entreprise nous rend visite pour découvrir et appliquer notre modèle, je leur donne systématiquement 5 conseils : 1/ Ne recopiez pas au détail près. 2/ La communication est la clé. Même si vous ne

connaissez pas le contenu en détail, vous devez communiquer sur le processus. 3/ L’engagement total du leader local. Il doit vrai-ment comprendre ce que l’Agile signifie pour eux. 4/ Soyez rapides. Il faut changer la totalité de l’organisation locale au même moment pour que ça fonctionne, en l’espace de quelques mois. 5/ Faites le changement, puis faites en sorte que cela se concrétise. Les plans seuls ne fonctionnent pas, vous devez vous lancer quitte à ajuster un peu à la fin.

« Manager en n’étant pas là en permanence, en laissant aux personnes la responsabilité de décider. »

En savoir plus sur l’organisation agile ING :https://www.youtube.com/watch?v=pk0XR8OFrn8

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02. LE MONDE DU TRAVAIL

SE TRANSFORME

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Les méthodes agiles s’intègrent à un contexte global, qui tend vers une flexibilité nouvelle. La mobilité des collaborateurs, l’omniprésence du digital, les consi-dérations environnementales ou encore le souhait d’un meilleur équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle sont autant d’évolutions sociétales qui impactent la relation au travail. L’environnement de travail doit être considéré comme un support à ces nouvelles manières d’organiser le travail.

DE NOUVELLES FAÇONS DETRAVAILLER L’évolution s’accélère, et impacte les entreprises et organisations : de nouveaux modes de travail apparaissent et accompagnent les mouvements de la société. Autrefois le souhait de flexibilité caractérisait surtout les directions des entreprises ; aujourd’hui, les collaborateurs réclament également « leur » flexibilité, sous forme d’une plus grande liberté de temps et de lieu ; en témoigne le développement récent du télétravail.

« À mon sens, différentes tendances vont continuer à se dessiner dans les prochaines années et influencer les usages : l’envie de travailler pour une cause qui nous tient à cœur, l’envie de devenir son propre patron, la mobilité interne ou externe (et la possibilité de revenir à son poste après une courte expérience à l’extérieur), le retour aux métiers de l’artisanat… » MARIE SCHNEEGANS, cofondatrice de Workwell

En 2018, le télétravail concerne désormais 29 % des salariés du privé. 8 télétravailleurs sur 10 se disent satisfaits ou très satisfaits de ce mode d’organisation du travail.Source : Ifop 2018 pour Le Comptoir de la Nouvelle Entreprise Malakoff Médéric Humanis

89 % des jeunes actifs voudront travailler pour leurs intérêts personnels et sur des projets qui ont un impact sur la société.Source : ADP Research Institute, 2016

80 % des dirigeants pensent que leur entreprise doit se digitaliser pour pouvoir innover. Source : Étude PwC Digital IQ, 2017

QUELQUES CHIFFRES

LE MONDE DU TRAVAIL SE TRANSFORME

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En parallèle, la nécessité d’attirer des talents et d’améliorer la performance des organisations a fait émerger la volonté de transformations culturelles et managériales, centrées notamment autour de l’au-tonomie et de la confiance. Enfin, la collaboration et la transversalité sont placées au cœur des straté-gies des entreprises qui voient dans le développe-ment du mode projet un facteur clé de performance dans la course à l’innovation.

DE NOUVEAUX DÉFIS POURL’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL L’environnement de travail dans ses dimensions digitale et physique apparaît aujourd’hui comme un levier incontournable de ces transformations. La nécessité d’assurer qu’individus et équipes puissent donner le meilleur d’eux-mêmes au service du client conduit à repenser l’expérience collaborateur. Ceci en vue d’aider les salariés à réaliser leur travail dans les meilleures conditions dans un contexte changeant.

« Comment travaillerons-nous demain ? S’il n’existe pas de réponse claire, quelques grandes tendances se profilent : recherche d’autonomie, mobilité accrue, volonté d’équilibrer vie privée et professionnelle… Au regard de ces dynamiques, l’environnement de travail n’est plus pensé comme un instrument mais comme un vecteur de ces transformations. »

AUDREY ABITAN, responsable R&D Colliers International France Pour répondre à ce besoin, les espaces de travail se diversifient et intègrent plus de souplesse et de

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modularité afin de favoriser les activités des équipes et les rythmes individuels. A minima, les entreprises offrent aujourd’hui de nouveaux lieux où convivialité et travail informel se côtoient tout au long de la journée. Par ailleurs, certaines organisations font le choix de mutualiser les espaces et les postes de travail, se basant tant sur le fait que moins de 60 % des postes de travail sont réellement occupés lorsque les postes sont attribués, et que les réorganisations constantes amènent à un taux de déménagement interne des salariés d’environ 80 % (ce qui correspond à presque un déménagement par personne et par an). Dans un environnement flexible, ces réorganisations sont facilitées. Une autre tendance de fond est l’environnement par activité. Afin de permettre aux collaborateurs de trouver à chaque instant un espace adapté à la tâche qu’ils ont à accomplir, une variété d’environnements est mise à disposition (espaces collaboratifs et individuels, salle silence et lieux informels), offrant ainsi une flexibilité au bénéfice de l’entreprise et du collaborateur.

« Lorsqu’on pose la question aux gens de savoirce qui est important pour eux en termes debien-être et d’efficacité productive, on voit qu’il ya une demande croissante liée à l’aménagementdes espaces de travail. L’harmonie de vie autravail est un concept de plus en plus important.  » ALAIN D’IRIBARNE, chercheur et conseiller scientifique de l’observatoire Actineo

Cette transformation des espaces s’accompagneégalement d’une digitalisation indispensable à lamise en œuvre des nouveaux modes de travail.Les outils numériques permettent de soutenir effica-cement la mobilité et la collaboration à distance, et de façon générale répondent aux attentes générées par l’usage des outils digitaux et de mobilité dans la vie privée des collaborateurs. Ils permettent aussi de répondre au souhait d’instantanéité des colla-borateurs quant à l’accès à l’information sur leur environnement de travail (occupation des espaces de travail et de restauration, localisation des équipes, palette de services aux utilisateurs, événements in-ternes…) et à son contrôle (réglage de la température et de la luminosité, réservation de salles…).

« Les salariés veulent désormais avoir lesmoyens de travailler dans des lieux qui nesont pas forcément des bureaux mais des lieuxagréables, dans lesquels ils se sentent bien. Ilsveulent pouvoir moduler leurs horaires, faire leurtravail avec une grande autonomie, participer àla culture d’entreprise et que les services qu’ilsutilisent soient regroupés au même endroit. » MARIE SCHNEEGANS, cofondatrice de Workwell

L’avènement des méthodes agiles au sein desorganisations s’inscrit dans ces mouvements etbouscule parfois des modèles et des modes defonctionnement bien établis. Dès lors, la questionse pose de savoir comment les environnementsde travail vont soutenir ces nouvelles évolutions.

LE MONDE DU TRAVAIL SE TRANSFORME

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03. LE NEW

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Cette année dédiée à l’étude des méthodes agiles en entreprises a permis aux équipes de Colliers International de mettre en évidence l’évolution des pratiques et, en réponse, celle des environnements de travail. On débute ces observations par un retour d’expérience avec Han Paemen (directrice Workplace) et Audrey Abitan (responsable R&D) de Colliers International France.

L’AGILE : LE REGARD DE HAN PAEMEN

COMMENT LES ENTREPRISES DÉCIDENT- ELLES DE METTRE EN PLACE DES MÉTHODES AGILES ? Rares sont les entreprises qui n’intègrent aucun aspect des méthodes agiles ; charge donc aux responsables de l’environnement de travail et de la conduite du changement d’accompagner ce mouve-ment. D’après notre expérience, les deux occasions les plus courantes pour introduire les méthodes agiles sont soit top-down, généralement après un voyage de l’équipe dirigeante dans la Silicon Valley ou chez Spotify, soit bottom-up, via le middle management ou les équipes terrain : dans ce cas c’est fréquemment du côté informatique que vient l’initiative d’expérimenter ces méthodes.

AUJOURD’HUI, COMMENT L’AGILE S’INTÈGRE-T-IL DANS LES ENVIRONNEMENTS DE TRAVAIL ? Certaines entreprises démarrent un projet de nouveaux bureaux pour les années à venir en omettant de mentionner qu’elles font de l’Agile : c’est souvent à nous qu’il appartient de l’identifier. Le lien avec les environnements de travail n’est pas toujours clair pour ces entreprises, c’est pourquoi les méthodes agiles sont aujourd’hui systématique-ment sur notre « check-list » : il ne s’agit pas uni-quement de noter ce qui se passe aujourd’hui, mais d’aider l’entreprise à anticiper ce qui a de fortes chances de venir demain en mode future-proofing.

L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL EST STRATÉ-GIQUE POUR LA CULTURE AGILE ? Intégrer le sujet en amont, et sur toutes ses di-mensions, est nécessaire. Télétravail ou non pour les équipes agiles ? Si oui, comment organiser les cérémonies ? Il faut, également, profiter de l’expérience d’autres entreprises, de leurs échecs comme de leurs réussites. C’est un des objectifs de la collaboration avec notre équipe R&D, avec laquelle nous notons les fondamentaux et « trucs et astuces » tant organisationnels que pragmatiques. Par exemple le bon positionnement et le choix des caméras dans les salles pour les « télé-dailies », ou la bonne distance entre les bureaux des zones solo ou calmes et des équipes en mode Scrum.

LE RETOUR DES UTILISATEURS JOUE UN RÔLE PRIMORDIAL ? Par essence, l’Agile doit pouvoir bénéficier de test and learn. Ce qui n’équivaut pas à dire que « chacun fait ce qui lui plaît » au détriment des voisins. Tout cela se réfléchit, se construit avec l’ensemble des acteurs concernés et en lien avec la vision stratégique des dirigeants, pour arriver à des solutions concrètes, idéalement mixtes : digital/en-vironnement de travail physique/accompagnement. Des solutions qui semblent finalement évidentes, mais auxquelles l’entreprise ne serait pas arrivée sans cette réflexion transverse en amont.

LE NEW AGILE

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UNE ANNÉE DE RECHERCHES : LE REGARD D’AUDREY ABITAN

Nous avons pris en compte plusieurs facteurs, dont l’importance varie d’une entreprise ou d’un projet à l’autre. Ils sont principalement au nombre de quatre :

1. La perception des méthodes et les caractéris-tiques projets. Lorsque les équipes ne sont pas encore suffisamment matures vis-à-vis de l’Agile, celles-ci peuvent conserver un fonctionnement hiérarchique et en partie waterfall. La sensibilité du management et de l’équipe aux méthodes agiles est alors déterminante pour l’appropriation et le bon déploiement de ces nouvelles pratiques.

Sur le terrain, le maintien d’une méthode waterfall s’explique par la complexité de projets constitués de sous-projets et de sous-équipes agiles interdépendantes qui ont un fort besoin de s’aligner de manière régulière pour gérer leurs sprints.

2. L’organisation des équipes et outils. Le temps passé sur le projet (plein ou partiel), la technologie et les outils mis à disposition, la durée du projet, les cérémonies appliquées, le télétravail, la présence d’un coach agile ou non, sont autant de facteurs influençant la mise en place des méthodes. Sur le terrain, nous avons observé que le temps pas-sé par une personne sur les projets agiles n’est pas toujours le même selon qu’on soit du côté IT (géné-ralement 100 %) ou business. Par ailleurs, l’exter-nalisation courante des équipes de développement impacte directement la coordination des collabora-teurs et l’organisation des cérémonies communes.

3. Les phases du projet. Selon les phases du projet, les besoins des équipes évoluent. À titre d’exemple, les moments de brainstormings en démarrage de projet nécessitent particulièrement de se regrouper afin d’assurer la cohésion des membres et installer cet esprit de « mêlée ».

4. La typologie d’environnements de travail.En fonction des organisations, les équipes agiles travaillent au sein d’espaces très variés (ex. : bureaux attribués, bureaux partagés, flex office, es-paces ouverts…) dont la configuration et les usages associés peuvent impacter leur façon de collaborer.

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LE NEW AGILE

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Nous avons tiré de ces mesures 3 principaux enjeux de l’adaptation de l’environnement de travail aux méthodes agiles : la co-localisation, la visualisation partagée et le time management.

1. La co-localisation et son rôle sur :• la fluidité de la communication entre les acteurs du projet. Elle est l’un des fondements des méthodes agiles. Depuis le Manifeste initial, de nombreux praticiens ont intégré le travail à distance mais en assurant des échanges fluides, le prérequis étant une équipe « mature ».

Sur le terrain, on a constaté que les cérémonies et notamment les daily meetings constituent des moments phares de la vie des équipes, c’est là qu’une grande partie des échanges se fait. En dehors des phases d’échanges planifiées, les collaborateurs semblent se satisfaire des outils de communication digitaux.

• Le sentiment d’appartenance et la cohésion, éléments structurants du fonctionnement en Agile.

Sur le terrain, il apparaît que les membres d’une équipe agile avancent soudés, d’où l’importance de la co-localisation en démarrage de projet pour favoriser cet « esprit d’équipe ».

2. La visualisation partagée. Elle soude l’équipe via la construction collective et « physique » des objectifs, elle accélère la réflexion et l’efficacité.

Sur le terrain, tous proposent des endroits d’affi-chage ou des murs low-tech, mais ces solutions sont imparfaites étant donnée la collaboration à distance régulière. Malgré cela, les solutions digitales ne sont pas encore assez intuitives pour remplacer entièrement l’affichage papier.

3. Le time management. En Agile, les pratiques associées au time management sont basées sur la reconnaissance de deux facteurs clés : d’abord, les moments de partage sont à planifier et à alterner avec des moments de travail individuel. Ensuite, l’entreprise doit éviter que les équipes agiles deviennent les nouveaux silos : elles doivent donc interagir avec le reste de l’entreprise.

Sur le terrain, plusieurs pratiques ont été obser-vées pour des équipes agiles au sein d’environ-nements de travail flexibles, c’est-à-dire sans poste de travail attribué, et notamment :• L’accès prioritaire à certains postes de travail

pour les équipes agiles jusqu’à 9h30, puis ils sont ouverts à tous.

• L’utilisation des zones collaboratives à la demi-journée ou la journée ; pendant ces plages, les équipes s’engagent à ne pas utiliser d’autres zones d’activité.

• L’utilisation par les collaborateurs d’utiliser d’autres zones que le « port d’attache » dès lors qu’ils ne sont pas en interaction avec leurs collègues.

• Des accords d’équipe déterminent les besoins présentiels.

LE NEW AGILE

ALEXANDREMAHÉDigital Factory – PSA Project Management Officer

Pour accélérer la transformation digitale du groupe, PSA a créé en 2016 un espace collaboratif pour des équipes agiles au service du client et de la stratégie du groupe. Rencontre avec le Project Management Officer et instigateur de la Digital Factory de Madrid, Alexandre Mahé.

QUELLE EST L’AMBITION DE LA DIGITAL FACTORY ? La Digital Factory est basée sur deux sites, un à Poissy et l’autre à Madrid. À sa création, les bureaux de Madrid étaient vétustes. Nous avions besoin d’un changement que les collaborateurs puissent voir et vivre au quotidien, un espace moderne qui porte la vision de la Digital Factory, et de mettre en œuvre un centre de compétences reposant sur trois piliers : l’innovation, la technologie et le business. Avec l’appui fort de la direction RH, nous avons construit des espaces permettant de répondre à cette vision via une collaboration étroite entre les équipes Implantation et Informatique.

EN PRATIQUE, COMMENT AVEZ-VOUSAMÉNAGÉ L’ESPACE ? On a transformé les premiers 400 m2 de la Digital Factory, qui ont consisté en un espace sans murs, sans bureaux fermés, sans place dédiée. Un espace de travail collaboratif, pensé en fonction de la méthodologie agile, sans salles de réunion mais qui facilite la circulation des personnes. On voulait que les gens passent plus de temps à discuter en direct de façon informelle, afin de prendre des décisions rapides et de livrer de la valeur business le plus vite possible.

CE PREMIER AMÉNAGEMENT A DYNAMISÉ LA PERFORMANCE ? Ca a tout changé ! Non seulement les équipes concernées par ces 400 m2 ont efficacement travaillé dans cet espace-là, mais elles ont surtout donné envie aux autres d’y travailler. C’est devenu une référence. Il y avait dès lors une vision, un espace, une méthodologie, et un management bienveillant avec notamment un aplatissement des couches hiérarchiques.

ADAPTER L’ESPACE AUX USAGES

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COMMENT TRAVAILLEZ-VOUS EN MODE AGILE ? Au début, nous n’avions qu’une seule équipe agile ; aujourd’hui on va passer à 9 équipes agiles sur le plateau, organisées en feature teams de 8 à 12 personnes, équipées d’un tableau blanc et réparties sur des petits îlots en L, pour avoir un espace creux permettant des stand-up meetings quotidiens. On a aussi des tables hautes au milieu de l’espace afin de pouvoir se réunir et traiter un sujet ponctuel en limitant les déplacements et la logistique, et en dernier recours parce que c’est là qu’on perd du temps, quelques salles de réunion. L’idée est de renforcer l’esprit d’équipe, l’efficacité, la prise de décision rapide.

LE PLATEAU CONTINUE D’ÉVOLUER ? Oui, il s’adapte complètement en fonction des phases. L’idée, c’est que personne n’ait une place fixe. De toute façon, les tables sont vidées chaque soir, chacun a simplement un casier dans lequel il range son ordinateur. On peut modifier la configu-ration de l’espace aussi vite que change la confi-guration du projet. L’espace est pensé pour être efficace. C’est un outil de travail, un moyen d’at-teindre nos objectifs.

AVEZ-VOUS INTÉGRÉ LA COLLABORATION À DISTANCE AU SEIN DE LA DIGITALFACTORY ? Bien sûr. Les équipes s’auto-organisent et dé-cident du mode de fonctionnement qui leur permet d’être le plus efficace dans la semaine, en intégrant notamment le télétravail : c’est une autonomie organisée et responsabilisée. Nous utilisons Jira, l’outil de référence pour les programmes et projets, mais une équipe peut aussi choisir d’utiliser Trello ou un autre outil, c’est pos-sible. On a également 6 ou 7 écrans mobiles sur le plateau. Enfin, les écrans Toc-Toc nous permettent d’être connectés en permanence aux équipes loca-lisées sur d’autres sites.

ADAPTER L’ESPACE AUX USAGES

COMMENT EST PERÇUE LA DIGITAL FACTORY AU SEIN DU GROUPE PSA ? Pour l’instant, je ne crois pas que d’autres entités aient mis en place de telles initiatives, mais je sais que ce qu’on fait est regardé. Ça accompagne la démarche d’agilisation et de transformation du groupe.

QUELLES VONT ÊTRE VOS PROCHAINES ÉVO-LUTIONS DE L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL ? On est en permanence en recherche d’améliora-tion, on est en permanence en construction. Une des difficultés aujourd’hui, ce sont les problèmes sonores. Nous manquons d’espaces silence, les équipes se servent donc du télétravail pour réaliser des tâches individuelles, de gestion, ou faire des réunions qui nécessitent une audio à distance avec d’autres sites administratifs. Nous avons actuel-lement des réflexions sur le son dans l’espace : par exemple nous allons changer le revêtement au sol pour qu’il absorbe beaucoup plus le bruit sur le plateau. On verra le résultat : la meilleure façon d’adapter l’espace de travail aux usages, c’est de se jeter à l’eau, d’essayer, de rencontrer des difficultés et de s’améliorer.

« L’espace est pensé pour être efficace. »

LE NEW AGILE

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7 IDÉES REÇUES SUR L’AGILE

Tout le monde en a entendu parler, mais peu les connaissent vraiment. Depuis leur définition jusqu’à leur avènement, les méthodes agiles ont beaucoup évolué. Mais les clichés ont la peau dure : on fait le point sur les idées reçues de l’Agile en entreprise.

LES MÉTHODES AGILES C’EST... TOUJOURS ÊTRE TOUS ENSEMBLE FAUX. La co-localisation (c’est-à-dire le fait pour une équipe agile de se rassembler physiquement au même endroit) est précieuse pour certaines phases d’un projet. Nos observations ont montré qu’elle est surtout fondamentale au démarrage pour renforcer la cohésion de l’équipe en construction et à certains moments clés, mais elle n’est pas systématique, notamment pour répondre au besoin des membres de l’équipe de s’isoler ou de travailler à distance.

PAS COMPATIBLE AVEC LE TÉLÉTRAVAIL FAUX. Le Manifeste Agile date de 2001 ; depuis, le télétravail s’est largement développé et les équipes sont de plus en plus souvent distantes (par exemple via le offshoring). Les modes de commu-nication digitaux ont évolué pour permettre à des collaborateurs distants d’accéder aux outils de suivi mis en place sur un projet agile et de participer aisément aux réunions quotidiennes sans difficulté (par exemple via Skype). Aujourd’hui, les équipes agiles plébiscitent largement le télétravail, élément important de la performance et de la qualité de vie au travail.

DES POST-IT AFFICHÉS PARTOUT OUI… MAIS pas seulement et pas toujours. Les post-it favorisent l’appropriation et peuvent être fa-cilement modifiés, déplacés au gré de l’avancée du

projet, remplacés, et sont visuellement ultra- pertinents. Mais aujourd’hui les outils des mé-thodes agiles sont à la fois constitués de low et de high-tech, permettant ainsi la collaboration avec les équipes à distance. Post-it et fiches cartonnées côtoient des outils de suivi en ligne accessibles à tous les collaborateurs.

DU TRAVAIL COLLABORATIF AVANT TOUT PAS AUTANT QU’ON LE PENSE. Les mesures montrent que 60 % du temps de travail des équipes agiles est individuel, et 40 % est collaboratif.

LE NEW AGILE

NÉCESSAIREMENT UN POSTE DETRAVAIL PAR PERSONNE FAUX. Si les méthodes agiles classiques prévoyaient (au minimum) 1 poste de travail par collaborateur, les entreprises en flex office ayant pris le virage de l’Agile ont conservé le principe d’une quantité de postes inférieure au nombre de personnes. Enpratique, ING Bank Pays-Bas a opté pour un taux de0,75 poste/personne.

LA MÊME CHOSE QUE LE FLEXOFFICE FAUX. Le terme « agile » étant très en vogue, il est utilisé pour désigner de nombreux concepts, plus ou moins proches de sa définition originelle. Il dé-

crit parfois les environnements de travail flexibles. Mais tout environnement flexible baptisé « agile » ne fournit pas forcément les conditions du travail en méthodes agiles. Cette confusion peut engen-drer quelques déconvenues !

SEULEMENT POUR LES PROJETS IT FAUX. Aujourd’hui encore, les méthodes agiles évoluent et essaiment bien au-delà des projets informatiques, faisant d’elles des méthodologies de plus en plus impactantes : l’Agile peut être un outil favorisant la performance de projets, ou même deve-nir le fondement d’une nouvelle culture d’entreprise. Ainsi, dans les entreprises étudiées, des projets RH ou Achats sont désormais menés en Agile.

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ALEXANDRECOLLINETLeboncoinDirecteur général adjoint

Avec Antoine Jouteau, directeur général, Alexandre Collinet incarne le dynamisme d’un site à la réputation établie. Leboncoin, une réussite qui passe par de nombreuses étapes et une remise en question permanente. Rencontre avec un acteur charismatique du digital en France.

COMMENT LES MÉTHODES AGILES SONT-ELLES MISES EN PLACE CHEZ LEBONCOIN ? On utilise les méthodes agiles issues de l’Extre-me Programming pour le développement produit depuis longtemps. Ce mindset s’est développé et s’est élargi à l’ensemble de l’entreprise, qui travaille beaucoup en mode projet sur du fonctionnement itératif. On essaie de cultiver une culture du changement, notamment dans la façon dont on communique avec les collabo-rateurs. Beaucoup de feed-back, de partages post-projet et l’utilisation de logiciels de suivi (Jira, Confluence…).

COMMENT S’EST MATÉRIALISÉE CETTE CULTURE DU CHANGEMENT ? Avec Antoine [Jouteau, ndr], on s’est dit que de ne pas avoir le même voisin tous les jours, pas la même luminosité, pas le même environne-ment ni la même position… favorise une culture du changement, une réactivité. Leboncoin évo-lue dans un univers digital qui change tellement vite qu’il faut rester attentif et ne pas se reposer sur ses lauriers. On pousse les collaborateurs à sortir, à assister à des conférences, on veut qu’ils aient un environnement qui casse la rou-tine et favorise le bien-être. Ca nous semblait donc logique de basculer sur un environnement dynamique de travail [sans poste attribué et amé-nagé par activité, ndr].

L’ENVIRONNEMENT DYNAMIQUE A FACILITÉ LE TRAVAIL EN MÉTHODES AGILES ? Oui, parce qu’on l’a vraiment conçu comme ça. Nous avons mis en place des espaces projet qui n’étaient pas des espaces occupés par des équipes au quotidien, mais qui pouvaient être réquisitionnés pour travailler en mode projet avec des équipes pluridisciplinaires. Il y a éga-

L’ADAPTABILITÉ AVANT TOUT

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lement deux agoras, qui permettent d’organiser des réunions d’équipe ou des présentations de pro-jets en cours, des feed-back collectifs... Des lieux pensés pour l’Agile, auxquels s’ajoutent au rez-de-chaussée les « docks », un espace de 500 m2 totalement flexible : il peut passer de 0 à 4 salles de réunion. On y tient des workshops pléniers, des conférences. Un vrai plus qui permet d’accueillir de façon extrêmement simple, flexible et rapide de tels événements.

COMMENT INTÉGREZ-VOUS LE TRAVAIL À DIS-TANCE DANS VOS MÉTHODES ? On a été très longs, volontairement, avant de mettre en place le télétravail. Pour moi le télétravail a longtemps été antinomique avec les notions de proximité. Mais c’est quelque chose qui nous était très demandé en entretien ou par les collaborateurs en poste, donc on a commencé à autoriser le home office sans vraiment le réguler, avant de le mettre en place un jour par semaine, le mardi ou le jeudi, par souci d’équité depuis le 1er janvier 2019. 20 à 25 % des équipes l’utilisent, il y a un comité de suivi trimestriel. Fin 2019, on décidera de rester comme ça, de reculer, ou au contraire d’ouvrir encore plus.

DIRIEZ-VOUS QUE VOTRE UTILISATION DE L’AGILE EST PROCHE DE L’EXTREME PRO-GRAMMING D’ORIGINE ? Non. On l’a adapté à notre sauce. Ce qui est super, c’est que nos équipes se sont emparées du projet et ont décidé d’utiliser certaines parties ou pas. Mais ça va plus loin. À un moment, on trouvait qu’on ne développait pas assez vite, donc on a de-mandé aux équipes de réfléchir aux problématiques d’équipes pluridisciplinaires. Et ce sont les équipes qui ont proposé 90 % de notre organisation produit et tech actuelle. On s’est inspirés un peu de Spo-tify, notamment en s’organisant autour de feature teams : on en a bientôt 25. Les feature teams sont indépendantes avec des tribus, etc. On a vraiment accéléré nos développements depuis qu’on a mis en place cette organisation. De la même manière,

on a interrogé les équipes il y a peu sur les évo-lutions à venir, ce qui pourrait a priori surtout concerner les équipes produit, mais les équipes finance elles-mêmes se sont demandées comment elles pouvaient participer. Quand tous les services, sans exception, se demandent comment ils peuvent aider le reste des équipes, c’est qu’on a réussi. On est vraiment dans l’esprit de l’Agile. Les concepts ont été intégrés puis adaptés aux problématiques du Boncoin, et j’en suis très heureux. Cela corres-pond à une autre de nos valeurs : le pragmatisme. J’ai pu échanger avec des papes de l’agilité, c’est très enrichissant mais pas forcément adapté aux contraintes d’entreprises telles que la nôtre avec ses besoins d’évolution, sa volatilité d’utilisateurs qui veulent des services rapides et de qualité.

« Quand tous les services se demandent comment ils peuvent aider le reste des équipes, c’est qu’on a réussi. »

LE NEW AGILE

HÉLÈNEVALENTINAVEMDirectrice de la Transformation du Groupe / DSI

Expert des métiers de la monétique, le groupe AVEM évolue dans un monde qui change très vite. Directrice de la Transformation du Groupe et DSI, Hélène Valentin travaille à la fois sur la stratégie et la construction de la feuille de route de la transformation. Elle partage sa vision de l’Agile, une vision à la fois orientée business et pleine de bon sens et d’humanisme...

QUELLE STRATÉGIE POURSUIT LEGROUPE AVEM ? Elle est construite autour de deux piliers : d’abord, le développement de nos activités historiques, dans lequel on imagine les métiers de la monétique de demain pour une croissance durable et locale. Ensuite, la transformation : devenir l’acteur d’un monde qui change, en cherchant systématiquement le meilleur pour nos trois parties prenantes que sont les colla-borateurs, clients et actionnaires. C’est du bon sens : le collaborateur qui comprend l’entreprise et en partage les valeurs donne le meilleur de lui-même, donc anticipe et répond aux besoins du client, ce qui rend l’entreprise performante dans la durée, et donc l’actionnaire satisfait. C’est le cercle vertueux de la transformation. Notre réussite repose sur notre capacité à développer toujours plus d’efficience dans nos méthodes de travail, et une expérience client sans couture. C’est la raison pour laquelle nous investissons notamment dans le développement de l’Agile et du Lean.

EN PRATIQUE, Y A-T-IL UN « BON USAGE » DES MÉTHODES AGILES ? Je ne crois pas qu’on puisse dissocier la méthode du sens associé. On parle d’Agile à toutes les sauces, on considère souvent que c’est une fin en soi : « Nous devons devenir agiles. » Mais cela veut dire quoi ? Chacun met un sens différent derrière ce terme. L’Agile (ou le Lean) n’est pas qu’une méthode, il s’agit d’une pratique scientifique indissociable d’un style de management. Le management qu’on vise dans l’Agile rejoint ce qu’on entend aujourd’hui par le manager-coach, le management 3.0... Mais au- delà des concepts et des mots à la mode, l’ob-jectif est de passer du contrôle à l’autonomie et à la responsabilité, dit autrement, tout simplement

ÊTRE AGILE OU NE PAS ÊTRE ?

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considérer que les collaborateurs et managers sont des adultes et doivent se parler entre adultes.

QUELS SONT POUR VOUS LES POINTSD’ATTENTION ? La croyance que les choses sont simples, qu’il suffit d’appliquer les méthodes, c’est l’obsta-cle le plus important : on reproduit ce qui nous paraît facile, on laisse l’essentiel de côté et on se demande pourquoi on n’a pas obtenu le même résultat. C’est la même chose avec le flex office : certaines entreprises ont copié des éléments des « New Ways of Working » du nord de l’Europe, en mettant moins de bureaux que de personnes. Mais en oubliant le fondamental : ces démarches ne visaient pas les économies de coûts, elle visaient à donner de la liberté aux collaborateurs, pour que le style de management soit plus partagé, que les gens se sentent mieux dans leur environnement de travail et délivrent le meilleur service aux clients. Le piège est d’oublier que ce qui est important est ce qui ne se voit pas. Si on copie-colle le résultat sans la culture, ça ne fonctionne pas ; et pourtant de nombreuses entreprises font ce raccourci, concluant d’ailleurs parfois qu’Agile et environne-ments flexibles sont incompatibles, alors qu’ils sont complémentaires. Il y a un autre point fondamental : l’IT. Il faut en faire un élément facilitateur pour les collaborateurs, qui doivent pouvoir travailler indé-pendamment du temps et du lieu. Les outils doivent également être un levier à la collaboration, c’est en particulier important pour soutenir le télétravail, le nomadisme et une utilisation optimale des environ-nements ouverts et flexibles. Au fur et à mesure que la technologie deviendra plus intuitive, on verra certainement moins de tableaux blancs et de post-it sous leur forme actuelle.

LA LIBERTÉ DES COLLABORATEURS EST L’UN DES PRÉREQUIS DE L’AGILE ? Oui. Passer à l’autonomie et la responsabilité impose que le management laisse une partie de son contrôle et s’appuie sur d’autres styles de

reconnaissance. À cela s’ajoute l’importance de travailler sur un cadre méthodologique qui res-semble à l’entreprise et ne se laisse pas influencer par certains consultants qui ne proposent que des boîtes à outils toutes faites. Il faut que chaque entreprise s’empare de la méthode pour en faire la sienne. Et il faut aussi considérer en cohérence le style de leadership et de management d’une part, et le cadre méthodologique d’autre part. L’entreprise doit développer le potentiel et la capacité d’initiative des collaborateurs.

ALORS COMMENT FAIRE POUR QUE TOUTCELA SE METTE EN PLACE EN BONNEINTELLIGENCE ? Le changement repose sur le fait d’accepter de perdre une chose pour en gagner une autre. Quand il commence à prendre conscience de tout ce qu’il faut faire, le management a tendance à résister, à voir ce qu’il risque de perdre, mais pas ce qu’il pourra gagner. Cela rejoint la logique de l’écologie : on sait tous ce qu’on devrait faire pour sauver la planète, mais on ne sait pas ce qu’on va y gagner individuellement. Mais comme pour l’écologie, la situation du monde de l’entreprise qui évolue très vite oblige au changement. Des entreprises comme AVEM, aux premières loges du monde qui évolue, ont la responsabilité de montrer la voie.

« Il faut que chaque entreprise s’empare de la méthode pour en faire la sienne. »

LE NEW AGILE

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LE NEW AGILE

Avant de proposer 5 règles d’or essentielles concernant l’environnement de travail pour les méthodes agiles, dressons un bilan de nos analyses en 3 constats clés.

Tout d’abord, l’ensemble des acteurs rencontrés lors de cette étude, quel que soit le secteur d’activité de leur entreprise ou leurs fonctions, s’accorde sur la valeur de l’Agile en tant qu’outil stratégique et de terrain, pour faire face aux défis business et humains des entreprises actuelles.Tous prédisent alors un développement accéléré de l’Agile dans les prochaines années, ainsi que le résume Hélène Valentin (groupe AVEM) : « De plus en plus d’entreprises vont s’emparer de ces méthodes et en faire une pratique liée à leur culture. »

Deuxième constat clé de nos analyses, si selon leur stratégie les entreprises déclinent comme elles l’entendent le concept Agile – ces méthodes étant affaire d’adaptabilité avant tout, comme le souligne Alexandre Collinet (Leboncoin) – et si l’esprit Agile compte davantage que le processus comme le rappelle Spotify, déployer ces méthodes implique tout de même quelques fondamentaux à respecter. Selon Payam Djavdan (ING) : « Le plus important, c’est d’utiliser une structure, en donnant aux gens le pouvoir de décider. »

Le troisième constat concerne l’environnement de travail propice à l’Agile. D’une part, l’époque pionnière de l’équipe agile en « camp retranché » où tout doit toujours être collectif et collaboratif, est révolue. Aujourd’hui, l’équation Agile/espaces de travail doit prendre en compte d’autres besoins des équipes : « Nous sommes conscients que les gens ont aussi besoin de concentration, d’intimité, de calme. Il faut le prévoir dans l’environnement », affirme Payam Djavdan.

D’autre part, le développement de l’Agile au sein des entreprises nécessite une approche fine pour répondre aux nombreux défis que cela pose. Selon Alexandre Mahé (PSA), « l’espace est un moyen de répondre à une nouvelle façon de travailler ». Premier défi, faciliter la souplesse et l’évolutivité tout en assurant les fondamentaux exigés, notamment sur les qualités acoustiques souhaitées et en intégrant les inévitables contraintes bâtimentaires. Autre défi pour les environnements de travail, donner toute sa place à l’affichage physique, tout en favorisant le digital tant que possible, nécessaire pour soutenir la collaboration à distance. Selon Patrick Boens, coach agile : « Il faut réfléchir à ce que les gens puissent travailler en AAA : anything, anywhere, anytime. »

Par ailleurs, par cohérence et pour permettre l’appropriation nécessaire, l’environnement de travail des équipes agiles doit idéalement bénéficier d’une approche dans l’esprit de ces méthodes : une démarche transverse et « test and learn », dans laquelle acteurs de l’environnement de travail et utilisateurs partagent objectifs et contraintes.

Pour conclure, gageons que l’expansion de l’Agile aura une incidence sur les environnements de travail en général, au-delà de solutions circonscrites pour quelques équipes. Dans ce cas, un nouveau cahier des charges devra être envisagé pour les environnements de travail de demain : dans un principe de flexibilité répondant aux évolutions permanentes des entreprises aujourd’hui, tous les espaces de travail de l’entreprise devront pouvoir favoriser les méthodes agiles.

ET DEMAIN ?

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LE NEW AGILE

Ceci d’autant plus si l’on considère les entreprises qui ont déjà généralisé le modèle (ING, Spotify) : les espaces agiles devront être compatibles avec tous les métiers, sans exception.

D’une méthode réservée aux spécialistes, codifiée en 2001 par dix-sept experts dans un Manifeste, l’Agile s’est étendu pour être aujourd’hui présent,

sous une forme ou une autre, dans la majorité des grandes entreprises. Le nouveau challenge pour les environnements de travail est à la mesure de cette (r)évolution New Agile.

Merci à tous nos contributeurs externes pour leur tempset leur participation à cette étude de fond.

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04. LES 5

RÈGLES D’OR

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N°1ASSURER LES FONDAMENTAUX DE LA FLEXIBILITÉ AU

BÉNÉFICE DES COLLABORATEURS DES ÉQUIPES AGILES

N°2OFFRIR UNE DIVERSITÉ ERGONOMIQUE ESSENTIELLE

À LA PERFORMANCE

N°3RENDRE POSSIBLE ET RÉGULER

L’AFFICHAGE PHYSIQUE

N°4FACILITER LA COLLABORATION DIGITALE,

ENJEU DE PERFORMANCE POUR LES ÉQUIPES AGILES

N°5OPTIMISER LE FONCTIONNEMENT EN AGILE

VIA DES ACCORDS D’ÉQUIPE

LES 5 RÈGLES D’OR

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RÈGLE D’OR

N°1

FLEXIBILITÉ ET MÉTHODES AGILES : UN ÉQUILIBRE À TROUVER Aujourd’hui, le télétravail s’accélère et de plus en plus d’entreprises font le choix de déployer des environ-nements de travail sans poste attribué, dont les aménagements « par activité » permettent de répondre aux différents besoins des individus et des équipes, à savoir créer, se concentrer, échanger de façon formelle ou informelle. Ces nouveaux modes de travail flexibles offrent aux collaborateurs certains bénéfices qu’il s’agira de conserver pour les équipes travaillant en méthodes agiles. Pour cela, il est nécessaire de se laisser la possibilité d’expérimenter la combinaison Agile/flexibilité en prenant soin de maintenir certains fondamentaux afin de conserver les bénéfices et particularités propres aux environnements de travail flexibles.

FACTEURS CLÉS DE SUCCÈS POUR UNE COMBINAISON AGILE/MODESDE TRAVAIL FLEXIBLES

Continuer à rendre possible le télétravail.

Privilégier la diversité des postes de travail pour faciliter aussi bien le travail individuel que collaboratif.

Penser les espaces d’affichage physique requis par les méthodes agiles comme des solutions temporaires et mobiles.

Encourager l’usage des outils digitaux : les solutions favorisant la collaboration à distance sont à privilégier.

POUR ALLER PLUS LOIN Assurer les fondamentaux, c’est aussi accompagner les collaborateurs dans cette nouvelle façon de pratiquer l’Agile, à travers notamment un onboarding poussé des nouveaux arrivants, et du coaching.

À ÉVITER L’usage de salles projet par les équipes agiles doit se faire en cohérence avec les phases du projet dans une logique temporaire, ciblée et dynamique. Il faut donc éviter de réserver de tels espaces de façon systématique ou prolongée.

LES 5 RÈGLES D’OR

ASSURER LES FONDAMENTAUX DE LA FLEXIBILITÉ AU BÉNÉFICE DES COLLABORATEURS

DES ÉQUIPES AGILES

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LES 5 RÈGLES D’OR

RÈGLE D’OR

N°2

LA DIVERSITÉ DES ESPACES ET DES POSTES, POUR SOUTENIR L’EFFICACITÉ Dans les équipes agiles observées, 40 % du temps est consacré au travail collectif. Reste donc 60 % du temps des collaborateurs dédié aux tâches individuelles dont dépend aussi la réussite de la démarche. Il faut donc mettre à leur disposition différents espaces adaptés aux interactions comme au travail individuel de concentra-tion. La diversité des positions de travail est un point capital pour soutenir l’efficacité d’une équipe agile.

COMMENT IMAGINER CET ENVIRONNEMENT ?

L’espace dédié aux interactions et collaborations doit être bien dimensionné selon la taille des équipes, et d’un seul tenant, sans discontinuité.

Les postes solo, ou les zones « calmes », doivent être identifiés précisément. Ils génèrent plus d’efficacité en étant placés à l’écart des espaces collaboratifs.

Il est important de penser en amont les zones d’affichage type tableau blanc, idéalement placées de manière à permettre une réunion debout devant.

Pour intégrer les collaborateurs à distance, des salles avec dispositifs de visioconférence sont nécessaires (idéalement : en disposition informelle et avec écran tactile). Les équipes agiles interrogées préfèrent bénéficier de ces équipements mutualisés à proximité de leur zone de travail. Ces espaces participent par ailleurs à favoriser l’évolution vers un mode de fonctionnement plus digital.

Les équipes agiles apprécient également d’avoir à proximité immédiate de petits locaux fermés à usage spontané pour 1 à 4 personnes (bulles), à la fois pour s’isoler ou pour collaborer en équipe restreinte, sans sollicitation extérieure parasite.

• Certaines méthodes agiles en multi-équipes, comme l’approche SAFe (Scaled Agile Framework), requièrent parfois de grandes salles (environ 150 personnes) pouvant combiner idéalement mode digital et post-it en sous-groupes.

• Certaines équipes font, elles, appel à des « digital lab » ou des salles de créativité mettant l’accent sur l’informel et le digital. Elles combinent affichage physique, outils numériques et convivialité.

DEUX CAS SPÉCIFIQUES

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LES 5 RÈGLES D’OR

OFFRIR UNE DIVERSITÉ ERGONOMIQUE ESSENTIELLE À LA PERFORMANCE

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RÈGLE D’OR

N°3

POURQUOI L’AFFICHAGE PHYSIQUE ? Les méthodes agiles reposent, entre autres, sur la transparence. L’affichage physique permet d’indiquer, sur des post-it ou des fiches cartonnées, l’ensemble des tâches d’un projet, puis de les classer et de les déplacer par étape. Ainsi, par un affichage clair et visible de tous, chacun est informé en permanence du déroulement complet des travaux. L’affichage visuel contribue également à la réflexion collective : chaque intervenant du projet peut le modifier, et les daily meetings peuvent se réaliser devant. Plus concret qu’un texte, il a un aspect visuel plus simple à mémoriser.

En affichant au mur l’état du travail, on ne dissimule ni aux équipes ni aux clients et collaborateurs de passage les différents points de blocage ou au contraire les phases déjà terminées.

COMMENT LE METTRE EN PLACE ET LE RÉGULER ? Il convient d’utiliser l’affichage physique en veillant à l’usage dynamique des espaces. Il doit donc être géré dans le temps : il est très utile au démarrage et lors de certaines étapes au cours d’un projet, par exemple lorsqu’une partie des tâches se termine ou que l’itération oblige à en définir de nouvelles. On doit donc toujours considérer cet affichage comme éphémère. Outre les cloisons ou panneaux écrits-murs, il est aussi possible d’utiliser un film électrostatique inscriptible facile à positionner, à déplacer ou à plier en fonction des besoins (ex. : Magic Whiteboard™).

Si l’Agile utilise le « tableau à post-it » comme emblème, ces solutions sont en principe des préambules à d’autres outils digitaux afin de permettre le partage de l’avancement du travail avec les collaborateurs à distance ou de déplacer ses supports d’un espace à l’autre.

À ÉVITER Les solutions mobiles (type panneau à roulettes), qui sédentarisent les équipes et finissent par rester au même endroit et à poser des problèmes de circulation dans les espaces.

LES 5 RÈGLES D’OR

RENDRE POSSIBLE ET RÉGULER L’AFFICHAGE PHYSIQUE

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POUR ALLER PLUS LOIN

L’Obeya Room : C’est une salle dédiée à l’échange et à la rencontre entre tous les services à l’œuvre sur un même projet agile. Chaque pan de mur peut y être dédié à une action, de manière à ce qu’ensemble, ils affichent toutes les informations indispensables à la conduite d’un projet. Les Obeya Rooms accueillent alors les réunions d’équipes, de préférence courtes et périodiques.

L’UX Tunnel : Dans les projets où l’on travaille sur l’expérience utilisateur (ou UX), ce nom désigne une pièce ou un espace spécialement dédié au sujet. C’est dans cette pièce que les équipes font un point collectif et apportent leurs idées, avec sous les yeux l’ensemble des chartes qu’ils doivent respecter, la synthèse des souhaits des clients et l’état en temps réel d’avancement.

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RÈGLE D’OR

N°4

POURQUOI FAVORISER LE DIGITAL ? Les coachs agiles le disent eux-mêmes : le jour où l’affichage et la manipulation sur écran seront optimaux et aussi intuitifs que des post-it, l’affichage papier passera au second plan. Sans nier le rôle encore fondamental de l’affichage papier aujourd’hui dans certaines phases des projets, les outils de collaboration numériques comme Jira, Trello, Microsoft Teams, font partie de nos nouveaux modes de travail et sont donc l’avenir, comme semble en attester le fonctionnement d’équipes agiles internationales 100 % digitales.

COMMENT LE METTRE EN PLACE ? Pour l’heure, la grande majorité des équipes agiles déplore encore que les solutions digitales ne soient pas aussi faciles d’usage que les post-it et les affichages physiques. Même si certaines solutions existent (comme les tableaux interactifs), elles sont parfois coûteuses. En attendant, la plupart des équipes agiles utilisent de manière complémentaire l’affichage physique et les solutions numériques.

L’appropriation des outils digitaux est assez inégale dans les équipes agiles observées,et certains membres affirment préférer manipuler physiquement les post-it, ou y voient des occasions d’échanges en équipe essentiels. Des formations, des tests ou encore une phase de « mentorat » poussée peuvent être organisés pour pallier ces freins et accompagner les collaborateurs vers l’usage de ces solutions numériques.

LES 5 RÈGLES D’OR

FACILITER LA COLLABORATION DIGITALE, ENJEU DE PERFORMANCE POUR

LES ÉQUIPES AGILES

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RÈGLE D’OR

N°5

À QUOI SERVENT LES ACCORDS D’ÉQUIPE ? Les accords d’équipe permettent de définir de façon concrète comment les membres de l’équipe agile souhaitent organiser leur collaboration. On y décide en particulier des modalités de travail, de gestion du temps et de l’espace. Ces accords permettent à l’équipe d’instaurer un fonctionnement optimisé et pérenne sur la durée du projet.

QUELQUES-UNS DES POINTS À ABORDER

La co-localisation fonctionnelle... Le travail en mode agile au sein d’un environnement flexible peut né-cessiter l’instauration d’un fonctionnement spécifique facilitant le regroupement des membres de l’équipe au sein d’une même zone. Chez Vivat, par exemple, les équipes agiles ont deux benchs réservés en prio-rité pour se regrouper le matin. Après 9h30, ces bureaux sont remis à disposition de la communauté.

Le télétravail... Le passage aux méthodes agiles n’exclut pas le télétravail des possibilités laissées aux collaborateurs. Mais les accords d’équipe permettent de l’encadrer en fonction des besoins de l’organi-sation dans son ensemble. Il faut ainsi décider si les collaborateurs sont tous en télétravail le(s) même(s) jour(s), afin que l’équipe soit ensemble, physiquement, à d’autres moments. Les modalités peuvent égale-ment s’adapter aux phases du projet : à certains moments « critiques », il se peut que les équipes agiles doivent convenir des cérémonies agiles pouvant se dérouler à distance, par exemple les daily meetings, et celles nécessitant la présence physique de tous (ex. : sessions de planification de sprint).

Les retrouvailles... Les accords d’équipe fixent également les moments où les membres de l’équipe ont besoin de se retrouver physiquement dans le même lieu, de manière formelle ou informelle. Ces retrou-vailles sont importantes pour la vie et la cohésion de l’équipe, notamment lors de moments clés d’un projet ou pour certaines cérémonies (ex. : rétrospectives ou post-mortems).

LES 5 RÈGLES D’OR

OPTIMISER LE FONCTIONNEMENT EN AGILE VIA DES ACCORDS D’ÉQUIPE

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À PROPOSDE COLLIERS INTERNATIONAL

CONTRIBUTEURS

CONTACTS

CYRIL SIMONOTArchitecte et illustrateur

HAN PAEMENDirectrice Conseil

en environnements de travail

SÉBASTIEN MÉTAYERConsultant en

environnements de travail

AUDREY ABITANResponsable R&D

FRÉDÉRIQUE MIRIELDirectrice du département Conseil

en environnements de travail et accompagnement du changement

[email protected] 80 06 88 07

HAN PAEMENDirectrice Conseil en

environnements de travail, spécialiste du NWoW

[email protected] 85 03 42 50

Dans un contexte de mutations profondes du marché immobilier et de transfor-mation des entreprises, Colliers International France imagine, avec et pour ses

clients, l’immobilier des entreprises de demain. Nous accompagnons nos clients sur toute la chaîne de valeur immobilière, de la définition de leur stratégie à la mise en

œuvre de leurs projets. Notre approche collaborative se structure autour de trois grands métiers : le conseil, la transaction, la gestion de projets.

À PROPOS

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CYRIL SIMONOTArchitecte et illustrateur

LE PÔLE CONSEIL DE COLLIERSINTERNATIONAL Le pôle Conseil de Colliers International France accompagne la transformation des entreprises et organismes publics en l’appuyant sur une stratégie, une organisation et des projets immobiliers. Son ambition est de développer la contribution directe de l’immobilier à la performance des organisations. Cela peut passer par exemple par de l’innovation dans la valorisation immobilière, l’amélioration de l’expérience salarié, la mobilisation des technologies et des données. Sa démarche

centrée sur l’humain et sa veille permanente pour anticiper les évolutions sociétales, permettent d’élargir le champ des réflexions. Le pôle Conseil rassemble des compétences diverses et complémentaires : urbanistes, coachs, consultants en management, chercheurs, experts immobiliers, experts en flex et NWoW, experts en conduite du changement. Maîtrisant toutes les techniques du conseil, ils travaillent ensemble à votre service dans un esprit collaboratif, créatif, entrepreneurial et avant tout humain.

COLLIERS INTERNATIONAL EN 2018

2,83 MILLIARDS

DE CHIFFRE D’AFFAIRES

14 000 COLLABORATEURS

68 PAYS

COLLIERS FRANCE EN 2018

72,2 MILLIONS

DE CHIFFRE D’AFFAIRES

270 COLLABORATEURS

9 BUREAUX

Paris, Lyon, Toulouse, Marseille, Bordeaux, Aix-en-Provence, Lille, Reims, Nancy

LE DÉPARTEMENT R&D Le département R&D de Colliers International France réunit chercheurs et experts en ergonomie, psycho-logie et sociologie du travail. L’équipe investigue plusieurs sujets tout au long de l’année centrés notam-ment sur l’analyse des tendances et impacts des nouveaux environnements de travail, et sur le dévelop-pement d’expérimentations de nouvelles méthodes et outils permettant de délivrer un accompagnement toujours plus expert à nos clients. Le département publie chaque année des études innovantes autour de 4 grands axes : immobilier, performance et environnement de travail, prospective, conception. En partenariat avec de nombreux acteurs issus du monde académique et de l’innovation, l’équipe se donne pour objectif d’être à la pointe des évolutions liées au travail et à l’immobilier d’entreprise.

À PROPOS

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