monstres sacrés

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Série Apparition Peinture sur le cyclisme de Sergio Castoldi

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Page 1: Monstres sacrés
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Second Souffle

ou La Beauté du diable

On dit souvent d’un coureur en plein effort qu’il trouve son

second souffle. Le calme respiratoire après une tempête

intérieure. Chez Sergio Castoldi, cycliste « pratiquant » (à

prendre dans le double sens de l’activité et de la dévotion), c’est

l’œuvre picturale qui passe d’un état à un autre, tout en étant

unique. Prisonnière de sa propre complexité, comme l’est lui-

même le champion d’exception. Elle trouve un « second

souffle », plus ample, plus puissant, avec l’incidence d’une

lumière renouvelée qui révèle ce que l’œil ne pouvait pas

percevoir encore, à la manière des palimpsestes sur les peintures

de maîtres.

Dans la peinture de Castoldi, les corps sont transpersés,

passés au scanner des émotions de l’artiste, jusqu’à atteindre

parfois une transparence qui offre une continuité à l’horizon

d’un public, comme si les bruits de la foule, les encouragements,

habitaient aussi le corps du champion et devenaient à leur tour

une matière organique, une huile dans les rouages de la

machine. Un corps de cycliste est fait de chahuts, d’affolements,

de cris. Les cris d’un organisme qui fixe des limites, les cris

d’un public qui en demande toujours plus. L’homme est plein de

matière et de non-matière. La peinture de Castoldi est une mise

à nu dérangeante qui ne manque pas d’interpeller à l’heure où

les cyclistes professionnels sont soumis à un passeport

biologique censé dénoncer les déviances.

Changement de lumière et voilà les coureurs de Castoldi

enveloppés d’un halo. Mais ce n’est pas un halo circulaire et

doux. Au contraire, il est tortueux, complexe, déchiré. Parfois,

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cette ombre virtuelle est tentaculaire, et met les spectateurs du

bord de route sous son emprise. (Castoldi : « Ça, c’est quand on

fait « Wouah » tandis qu’on voit passer un coureur qui dégage

de la force… ») Parfois, elle habille le coureur d’une carapace

animale, comme des êtres fantasmagoriques surgis de notre

imaginaire enfantin. Le coureur, dans l’expression exacerbée de

sa rage, de sa force et de son intelligence maligne, possède alors

la « beauté du diable ». Une aura envoûtante.

Le halo, dans ce qu’il possède de fulgurances indisciplinées,

est également une passerelle vers un autre domaine, très en

vogue dans le cyclisme actuel. Il rappelle les flux d’air observés

sur les écrans des ordinateurs quand le coureur se prête aux tests

en soufflerie pour améliorer son aérodynamisme. Les sportifs

sont-ils devenus des rats de laboratoire ? C’est peut-être une

question à laquelle nous demande de réfléchir aussi Sergio

Castoldi.

Plusieurs œuvres s’appuient sur un fond qui, au premier

abord, suggère un lacis de pneumatiques, comme un tas de

vieux boyaux que l’on laissait sécher auparavant dans les

greniers pour les rendre plus résistants. Mais quand notre œil se

perd dans ces entrelacs, on se surprend à voyager à l’échelle de

l’infiniment petit : nous voilà molécules dans les filaments des

fibres musculaires. D’ailleurs, Sergio Castoldi apporte toujours

un soin particulier à dessiner les muscles, les seuls à échapper à

une forme d’abstraction. Des muscles… humains. Vibrionnants,

élastiques, fragiles et beaux. Ils agissent en contraste avec le

reste du corps, qui tient plus de la machine que de l’homme.

C’est peint avec la précision chirurgicale d’un anatomiste,

mais le coureur est devenu un androïde, comme si les conditions

de son sport en avaient fait un être bionique, mi-homme, mi-

robot. Le mariage insensé de l’organique et de la mécanique.

Les deux univers finissent par se fondre pour donner naissance à

un organisme dont on ne sait plus s’il renvoie à la perfection ou

à la monstruosité. Seules les couleurs se risquent à offrir encore

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quelques repères. Elles imaginent des frontières. Le rouge vient

parfois se cogner contre le bleu. Le rouge, la couleur du sang, de

la chair, des muscles, de la chaleur. Le bleu, la couleur du métal,

du froid. Nous sommes dans un monde contradictoire d’hyper-

réalisme et de science-fiction. Voyez ces lunettes de sport : elles

évoquent les yeux globuleux, ovoïdes et opaques d’un

extraterrestre. Un vide abyssal et la promesse en même temps

d’une intelligence supérieure, calculatrice. Le cycliste n’est pas

un animal grégaire, c’est juste un animal mystérieux.

Étrangement, dans ce monde avant-gardiste, le vélo garde

des traits classiques. Il ne cède pas à la démesure, à

l’ultrasophistication. Le vélo est un élément d’intemporalité, un

trait d’union avec le passé. Et il nous dit ceci : oui, les

champions cyclistes sont des monstres, mais ce sont des

monstres sacrés, comme l’était Fausto Coppi dont Sergio

Castoldi garde religieusement une photo dans son atelier.

Gilles Comte

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Fuga (vue 4) – Acrylique sur toile 2010 – 65x54 cm

Page 6: Monstres sacrés

Attac (vue 1) – Acrylique sur toile 2011 – 81x65 cm

Dans APPARITION les images

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Attac (vue 3) – Acrylique du toile 2011 – 81x65 cm

sont toujours en situation de survie

Page 8: Monstres sacrés

4 in Fuga –Acrylique sur toile 2011 – 81x65 cm

Page 9: Monstres sacrés

Monstre – Acrylique sur toile – 60x60 cm

Page 10: Monstres sacrés

Spr – Acrylique sur toile 2010 – 65x54 cm

Page 11: Monstres sacrés

G2 – Pastel sur papier 2010 – 40x30 cm

Exposition Monstres Sacrés Galerie Mary-Ann – Hôtel de Ville – Mâcon- 71000

Juillet 2012

www.sergiocastoldi.com

En couverture Fuga (vue 1) – Acrylique sur toile 2010 65x50 cm

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