médecine et justice face aux logiques sécuritaires

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Droit, déontologie et soin Septembre 2004, vol. 4, n° 3 330 S YNTHÈSES Médecine et justice face aux logiques sécuritaires Eytan ELLENBERG Interne de santé publique, Espace éthique Assistance publique – Hôpitaux de Paris. Résumé Trois logiques sécuritaires semblent parcourir une vision historique de l’hôpital et ces trois logiques articulent deux notions, la sécurité et l’hospitalité. Sécurité et hospitalité : deux notions qui ne sont pas si lointaines que l’on imagine. En fait, elles se regroupent si l’on prend comme définition de la sécurité cet « état d’esprit confiant et tranquille de celui qui se croit à l’abri du danger » 1 . De fait, nous distinguons trois étapes dans l’histoire que nous dressons de l’hôpital : la première, nous l’appellerons le nosocomium ou « l’hospitalité dangereuse » ; la deuxième, l’hôpital ou la « sécurité inhospitalière » et la troisième, l’espace de santé ou la « sécurité hospitalière » : trois étapes où s’articulent médecine et justice. L’hôpital était, au milieu du XVIII e siècle, un nosocomium, c’est-à-dire un hospice qui s’occupait des indigents, des pauvres et des contagieux. Point de guérison mais plutôt protection vis-à-vis des autres ; enfermement plutôt que prestations de services. Surtout, le nosocomium était dangereux, car il y régnait la « pourriture d’hôpital ». La prise en compte de ce risque et la conscience de l’impossibilité de soigner correctement et d’apprendre par cet élément surajouté, nuisible à l’examen clinique, fut déterminant dans la transformation du noso- comium en « machine à guérir » (expression de Michel Foucault dans son ouvrage collectif éponyme). Deux actions principales ont participé à ce passage : quadrillage et circulation. Quadriller l’hôpital comme un filet par la discipline, tout en laissant circuler l’air ; c’est la matrice du retiolus. La mise en place de l’hôpital dans sa version moderne relève, selon Michel Foucault, de la même mise en scène que celle de la naissance de la prison. C’est ce qui est décrit dans Surveiller et Punir (Gallimard, 1975). 1. Le petit Robert, 1988, p. 1788.

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Droit, déontologie et soin Septembre 2004, vol. 4, n° 3330

S Y N T H È S E S

Médecine et justice face aux logiques sécuritairesEytan ELLENBERG

Interne de santé publique, Espace éthique Assistance publique – Hôpitaux de Paris.

Résumé

Trois logiques sécuritaires semblent parcourir une vision historique del’hôpital et ces trois logiques articulent deux notions, la sécurité etl’hospitalité. Sécurité et hospitalité : deux notions qui ne sont pas silointaines que l’on imagine. En fait, elles se regroupent si l’on prendcomme définition de la sécurité cet « état d’esprit confiant et tranquille decelui qui se croit à l’abri du danger »1. De fait, nous distinguons troisétapes dans l’histoire que nous dressons de l’hôpital : la première, nousl’appellerons le nosocomium ou « l’hospitalité dangereuse » ; ladeuxième, l’hôpital ou la « sécurité inhospitalière » et la troisième,l’espace de santé ou la « sécurité hospitalière » : trois étapes où s’articulentmédecine et justice.

L’hôpital était, au milieu du XVIIIe siècle, un nosocomium, c’est-à-dire unhospice qui s’occupait des indigents, des pauvres et des contagieux. Point deguérison mais plutôt protection vis-à-vis des autres ; enfermement plutôt queprestations de services. Surtout, le nosocomium était dangereux, car il y régnaitla « pourriture d’hôpital ». La prise en compte de ce risque et la conscience del’impossibilité de soigner correctement et d’apprendre par cet élément surajouté,nuisible à l’examen clinique, fut déterminant dans la transformation du noso-comium en « machine à guérir » (expression de Michel Foucault dans sonouvrage collectif éponyme). Deux actions principales ont participé à ce passage :quadrillage et circulation. Quadriller l’hôpital comme un filet par la discipline,tout en laissant circuler l’air ; c’est la matrice du retiolus. La mise en place del’hôpital dans sa version moderne relève, selon Michel Foucault, de la mêmemise en scène que celle de la naissance de la prison. C’est ce qui est décrit dansSurveiller et Punir (Gallimard, 1975).

1. Le petit Robert, 1988, p. 1788.

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L’hôpital moderne va s’imposer et rien ne semble arrêter le progrès et ledéveloppement d’une médecine curative : l’hôpital en se médicalisant, s’est tech-nicisé. D’un lieu d’hospitalité dangereuse, l’hôpital est devenu un lieu de soins,prestataire de services, qui a des comptes à rendre. En a-t-on fini, malgré tout,avec le risque ? L’hôpital moderne serait-il sans failles ? Le risque refait parlerde lui et l’on ne peut que constater la faillibilité du progrès technologique : larationalité techno-scientifique affronte dès lors une rationalité sociale quiaccepte de moins en moins les défaillances du système. Face au risque, la sécuritésanitaire a créé un hôpital morcelé en structures auto-organisées qui gèrent, cha-cune, un risque technique. On ne peut que constater le morcellement et la vul-nérabilité aux risques d’un hôpital constitué de telles structures. Si des sommesimportantes sont dépensées afin de protéger du risque exceptionnel lié au prion,ce n’est pas le cas pour les erreurs médicales et autres défaillances de la relationsoignant-soigné. Le risque clinique – le risque que fait porter le médecin à lapersonne malade dans l’exécution d’un acte – est encore peu abordé mais dom-mageable tant pour les personnes hospitalisées que pour l’hôpital.

Face à ce constat d’une sécurité inhospitalière qui a oublié de s’intéresserà l’humain, l’hôpital moderne doit se « refonder » sur ses valeurs d’hospitalité.Il doit devenir un espace de santé avec comme objectif la définition donnée parl’Organisation mondiale de la santé : « état de complet bien être physique, men-tal et social, qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infir-mité. »2 Pour y parvenir, il faut redéfinir une « sécurité hospitalière » – celle quifait ressentir à la personne hospitalisée qu’elle est à l’abri du danger.

I – L’hospitalité au XVIIIe siècle, la prégnance de la pourriture d’hôpital

A – Des constats

L’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert, éditée entre 1751 et 1772, nousprésente l’hôpital comme un nosocomium à l’instar de la dénomination desmembres de l’Église à l’origine de ces « maisons publiques où les voyageursétrangers recevaient les secours de l’hospitalité ». Partant de cette conception,l’hôpital devint un lieu de refuge et d’abri pour les plus pauvres, les plus vulné-rables, les indigents (du latin indigens : qui manque de). Cependant, le cas dela pourriture d’hôpital – entité bien définie à l’époque – nous informe de l’exis-tence d’une réflexion, déjà fertile au XVIIIe siècle, voire avant, sur les risques hos-pitaliers. Diderot et d’Alembert ne peuvent que constater la dangerosité de ce

2. Préambule à la Constitution de l’Organisation Mondiale de la santé, tel qu’adopté par la conférenceinternationale sur la santé, New York, 19-22 juin 1946 ; signé le 22 juillet 1946 par les représentants de61 États. 1946 ; (Actes officiels de l’Organisation mondiale de la santé, n° 2, p. 100) et entré en vigueurle 7 avril 1948.

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type d’hospitalité et, corollairement, la nécessité de réformer ces établissements :« Il ne faut pas que les hôpitaux soient des lieux redoutables aux malheureux,mais que le gouvernement soit redoutable aux fainéants. ». Blandine Barret-Kriegel parle ainsi de « lieux de la mort ». Lavoisier dira également de l’Hôtel-Dieu qu’il représente « la plus vaste et la plus inquiétante des habitations qu’ily ait, peut-être de tout l’univers ». Tenon (1724-1816) prône, en 1788, dans sesMémoires sur les hôpitaux de Paris3, pour des mesures d’hygiène hospitalièreface aux « fièvres putrides », en soulignant les conditions de délabrement de cesinstitutions sales et surpeuplées. La dangerosité de l’hôpital est interne mais aussiexterne. Finalement, dans le nosocomium : « la charité publique qui reçoit lepauvre ne doit pas lui dire : Ou tu ne seras pas secouru, ou tu courras ce dan-ger »4.

B – Des propositions d’actions, la matrice du retioluspour les « machines à guérir »

Face à ce constat, Diderot et d’Alembert proposent que « l’hôpital de maladesest [soit] un édifice où l’architecture doit subordonner son art aux vues du méde-cin (…). La partie fondamentale de la méthode curative est d’éloigner le maladedu mauvais air. (…) » Diderot et d’Alembert ne font que précéder le vaste mou-vement de fondation de l’hôpital moderne qui opte pour ordre et disciplinemédicale d’une part ; circulation de l’air d’autre part. Quadrillage et circulationsont les deux types d’actions entreprises pour la création de l’hôpital dans laforme que nous connaissons : elles constituent la matrice du retiolus (filet, enlatin). En effet, le filet présente cette ambivalence de capturer la proie mais ausside la laisser respirer. Par quadrillage, on entend : « organiser en fonction d’unestratégie thérapeutique concertée »5, c’est-à-dire l’organisation d’une disciplinede contrôle et de traitement des malades. Michel Foucault définit la disciplinedans Surveiller et punir : « le contrôle minutieux des opérations du corps, quiassurent l’assujettissement constant de ses forces et leur imposent un rapport dedocilité-utilité »6. Cette discipline n’est pas pur contrôle du corps de l’autre maisbien « anatomie politique » ou « mécanique du pouvoir », c’est-à-dire « commenton peut avoir prise sur le corps des autres, non pas simplement pour qu’ilsfassent ce qu’on désire, mais pour qu’ils opèrent comme on veut, avec les tech-niques, selon la rapidité et l’efficacité qu’on détermine. »7 Quant à la circulation

3. TENON (Jacques), Mémoires sur les hôpitaux de Paris, Reprod. de l’éd. de Paris ; de l’impr. de Ph.-D.Pierres, premier impr. ordinaire du Roi, Royez libraire, 1788, LXXIV-472 p. (Collection [Les] archives dela Révolution ; 9.5.92).4. Examen d’un projet de translation de l’Hôtel-Dieu de Paris et d’une nouvelle construction d’hôpitauxpour les malades, Histoire et Mémoires de l’Académie Royale des Sciences, 1785 (M. Bailly, rapporteur).5. FOUCAULT (Michel), Barret Kriegel (Blandine) et al., Les machines à guérir ; aux origines de l’hôpitalmoderne, Mardaga 1995 p. 16.6. FOUCAULT (Michel), Surveiller et punir : naissance de la prison, Gallimard, Collection Tel, Paris, 1975,p. 161.7. FOUCAULT (Michel), ibid., p. 162.

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de l’air, l’objectif est de : « supprimer tous les facteurs qui le rendent périlleuxpour ceux qui y séjournent »8. Plus d’un siècle avant Pasteur, la tradition hip-pocratique du traité Des airs, des eaux et des lieux, rend nécessaire, aux penseursde l’époque, une réflexion sur la purification de l’air. Face à la confusion, à lasouillure, il s’agit de remettre l’ordre à l’image de ce que peut nous dire parexemple Mary Douglas : « La saleté est une offense contre l’ordre. En l’élimi-nant, nous n’accomplissons pas un geste négatif ; au contraire, nous nous effor-çons, positivement, d’organiser notre milieu »9.

Parallèlement, les fibres fondent l’image du corps de l’époque. Ainsi, dansLe rêve de d’Alembert de Diderot, le docteur Bordeu est au chevet de d’Alem-bert, accompagné de la fraîche Mademoiselle de l’Espinasse, et nous éclairequant à l’image du corps de cette époque. L’organisme n’est qu’un grand réseaude fibres : « Tous ses organes (…) ne sont, à proprement parler, que les déve-loppements grossiers d’un réseau qui se forme, s’accroît, s’étend, jette une mul-titude de fils imperceptibles »10. C’est donc une perspective anthropologiqueintéressante. Dans une époque où la médecine emploie la matrice du réseau,l’hôpital – pour se médicaliser – utilise la métaphore du filet. De plus, la disci-pline et le quadrillage, selon la conception foucaldienne, se trouvent égalementaux origines de la naissance de la prison.

L’hôpital devient ainsi le lieu de la discipline médicale, institution de décou-vertes « cliniques » sur les malades, un espace médicalement utile. Il se constituecomme un terrain de développement du progrès technologique. L’hôpital, danssa profonde modification du XVIIIe siècle, se technicise.

II – L’hôpital d’aujourd’hui : morcelé et vulnérable

Réglé sur le progrès technologique, l’hôpital prend conscience, timidement,des risques qu’il est encore capable de produire.

A – Un exemple de faillibilité du progrès technique, l’infection nosocomiale

Le facteur qui semble avoir précipité une prise de conscience collective,face aux infections nosocomiales, fut, sans aucun doute, l’apparition des pre-mières résistances aux antibiotiques. Dans les années 1940 et 1950, de nom-breuses publications rapportent ainsi une proportion croissante de germesrésistants. Si l’étiologie des infections, même hospitalières, ne faisait plus dedoute depuis la révolution pastorienne, l’apparition des antibiotiques avait radi-

8. Ibid.9. DOUGLAS (Mary), De la souillure : essai sur les notions de pollution et de tabou, La Découverte & Syros,2001, p. 24.10. DIDEROT (Denis), Le rêve de d’Alembert, Garnier – Flammarion, 1769, p. 97.

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calement modifié les perceptions. On pouvait simplement réagir aux maladies,leur proposer une thérapeutique et ainsi se conformer au souci de soin. Maisl’apparition de ce phénomène de résistance obligea les centres de soins et lessoignants à réfléchir sur des actions plus préventives. Les instances de contrôledes infections se développèrent ainsi en Grande-Bretagne, mais aussi Aux États-Unis. En France, les premières inquiétudes, quant à ce phénomène, ont débutélors du premier colloque européen sur l’hospitalisme du Conseil supérieur del’hygiène publique de France qui s’est tenu les 2 et 3 décembre 1966. Une cir-culaire émanant du ministère de la santé publique et de la sécurité sociale du18 octobre 1973, relative à la prévention des infections hospitalières, préconisela mise en place de comités de lutte contre les infections dans les seuls établis-sements publics mais ce texte n’a que peu d’effets à l’époque.

B – La crise du Sida, une rupture épistémo-sociologique

Il a fallu attendre 1988 et le drame du Sida pour que, en France, les éta-blissements de santé publics et privés (participant au service public hospitalier)constituent des Comités de lutte contre les infections nosocomiales ou CLIN.La crise du Sida se révèle comme une rupture épistémo-sociologique en ce sensoù ce qui devait soigner – le sang – devient, du jour au lendemain, dangereux :des virus pouvant être transmis. Mais s’opère surtout une rupture sociologiqueimportante : il y eut, pour les décideurs de santé publique, un avant et un aprèsSida. Le drame du Sida révélant les faiblesses de l’organisation en place et despossibilités de contrôle a engendré une demande de plus en plus forte de trans-parence et de responsabilité.

C – La sécurité sanitaire à l’hôpital, ou la construction d’une auto-organisation

L’hôpital, machine à guérir, n’est donc pas vierge de risques technologiqueset la législation, menacée par des drames sanitaires, a encouragé le développe-ment de structures spécialisées, d’une petite gestion éparpillée des risques. Desarticles de lois, des décrets, des circulaires et autres documents dessinent ainsi« une sécurité » à l’hôpital. Les différentes unités, individualisables dans unhôpital, sont construites en secteur autour d’un risque spécifique – essentielle-ment des risques techniques – ou en tuyaux d’orgue, transversalement dansl’hôpital, autour d’une famille de risques (avec comme modèle les vigilances san-guines, médicamenteuses ou matérielles). Cette dernière approche est autanthorizontale dans l’hôpital, autour d’une famille de risques spécifiques que ver-ticale, partant du local vers le national. Ces unités ont pour rôle, comme leurdénomination l’indique, d’alerter les autorités sanitaires des évènements récur-rents qui surviendraient avec l’utilisation d’un produit thérapeutique ou dia-gnostique. Les deux types d’unités se structurent en auto-organisation : ellesutilisent chacune leurs propres moyens et méthodes spécifiques. L’hôpital semble

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ainsi morcelé et vulnérable par le fait même de cette auto-organisation. Un floupersiste ainsi aux interfaces mais aussi dans ces risques hospitaliers oubliés,parce que non techniques et, du coup, si hétérogènes et si difficiles à appréhen-der. On constate surtout une très grande hétérogénéité sans politique générale,cohérente et structurée de gestion des risques.

D – Un oubli, le risque clinique

Du constat de l’hôpital actuel, on peut retenir l’absence de structure opé-rationnelle de gestion des risques cliniques. Par risque clinique, nous entendonsune situation dangereuse constituée par la vulnérabilité de la personne, provo-quée par sa maladie, son immaturité ou son grand âge, et un acte dangereux –l’acte médical n’étant jamais inoffensif ni bénin. Il s’agirait donc d’instaurer, danstous les hôpitaux, une structure de retour d’expérience, à l’instar de l’aviation,afin de repenser les événements malheureux. Diverses méthodologies existent etnous pensons que des espaces de réflexion multidisciplinaire, associant soignantset soignés sur ce sujet, dans les hôpitaux, seraient d’un apport important. Cetype de réflexion se heurte souvent à la peur du blâme de la part des soignants.La sécurité ne doit plus être une contrainte mais un principe d’action.

III – La sécurité à l’hôpital entre sûreté et confiance

Les objectifs que peut se fixer une organisation de gestion des risques sontau nombre de quatre :

• La prévention, c’est-à-dire agir en amont pour diminuer la fréquence desévénements indésirables.

• La protection, c’est-à-dire agir en aval pour diminuer la gravité poten-tielle des événements indésirables.

• La réduction des plaintes et contentieux• L’augmentation de la sécurité des patients par l’augmentation de leur

confiance. La sécurité du patient est un concept qui présente deux dimensions.La première est la sécurité objective ou technique, celle qui nécessite des actionsde prévention et de protection, c’est finalement la sûreté ; la seconde est la miseen confiance du patient et celle-ci passe fondamentalement par l’information etla communication. C’est l’instauration d’un état d’esprit où la personne hospi-talisée se sentirait à l’abri du danger. Apparaît ainsi le concept de « sécuritéhospitalière ».

A – La sécurité, un principe dynamique

Une telle organisation doit se situer dans une boucle de progrès permanentou d’amélioration continue. Face aux objectifs précités, la gestion des risquesprésente généralement quatre étapes :

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• Identifier les risques et les caractériser.• Évaluer et hiérarchiser les risques en fonction de leurs impacts sur la

structure.• Définir un plan d’action face aux risques évalués comme non acceptables.• Gérer les risques résiduels. Il existe, comme dans toute institution, ce

que l’on peut appeler une « corrosion sociale du risque ».

La gestion des risques à l’hôpital pourrait être définie comme la fonctionqui vise à identifier, évaluer, éviter ou réduire des risques. Manager les risquesrevient, par contre, à mettre en place une organisation pour gérer les risquesqui pourraient compromettre la réalisation des objectifs de l’établissement.

B – La sécurité, un principe d’hospitalité

Cette nouvelle mise en perspective permet à chacun de ne plus se sentirisolé, face à l’adversité de l’hôpital, mais bien de s’engager dans une logique desécurité plutôt valorisante. Cette logique de sécurité doit s’appuyer sur une véri-table culture de sécurité, définie comme l’ensemble des caractéristiques et atti-tudes d’une organisation établissant comme priorité la sécurité du patient11. Àl’instar du domaine hautement sensible aux risques qu’est le nucléaire, la cultureest un point fondamental dans l’élaboration d’un programme de managementdes risques. L’objectif principal de l’espace de santé serait alors de permettre àchacun de se sentir à l’abri du danger. La sécurité devrait être notre principeguidant notre action à l’hôpital.

Conclusion

Le risque est une bonne grille de lecture de l’hôpital : symptôme souventrévélateur de son fonctionnement mais également un concept opérant dans sonpassé, son présent et probablement dans son futur : une invitation, voire unplaidoyer pour une sécurité hospitalière.

11. Adaptée de la définition donnée par l’International Safety Advisory group, INSAG-1.