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Christophe Texier Cours et exercices corrigés Mécanique quantique

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Mécanique_quantique_-_Cours_et_exercices_corrig_TEXIER LIBRE

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Page 1: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Christophe Texier

Cours et exercices corrigés

Mécaniquequantique

Page 2: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Illustration de couverture : Digital Vision®

© Dunod, Paris, 2011ISBN 978-2-10-056983-0

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TABLE DES MATIÈRES

Avant-propos VI

Mode d’emploi IX

Chapitre 1. Introduction 1

1.1 Qu’est-ce que la mécanique quantique ? 11.2 Brèves considérations historiques 21.3 La structure des théories physiques 181.4 Aperçu des postulats de la mécanique quantique 201.5 Premières conséquences importantes 24Annexe 1.A : Rappels de mécanique analytique 30

Chapitre 2. Équation d’onde de Schrödinger 33

2.1 Équation d’onde – Premières applications 332.2 Fonction d’onde dans l’espace des impulsions 44Annexe 2.A : Transformation de Fourier 50Annexe 2.B : Distributions 53Exercices 57

Chapitre 3. Formalisme de Dirac – Postulats (1) 61

3.1 Introduction 613.2 Prélude : espace des fonctions d’onde 613.3 Formalisme de Dirac 64Annexe 3.A : Quelques rappels d’algèbre linéaire 75Exercices 77

Chapitre 4. La mesure – Postulats (2) 79

4.1 Motivations 794.2 Les postulats de mesure 804.3 Valeur moyenne d’une observable 834.4 Ensemble complet d’observables qui commutent (ECOC) 84Exercices 85

Chapitre 5. Évolution temporelle – Postulats (3) 87

5.1 Résolution de l’équation de Schrödinger 875.2 Théorème d’Ehrenfest 925.3 Point de vue de Heisenberg 93Annexe 5.A : Matrice de diffusion (matrice S) d’une lame séparatrice 95Exercices 97©D

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Mécanique quantique

Chapitre 6. Symétries et lois de conservation 99

6.1 Symétries 996.2 Transformations en mécanique quantique 1016.3 Groupes continus – Générateur infinitésimal 1066.4 Potentiel périodique et théorème de Bloch 109Exercices 112Problème 113

Chapitre 7. Oscillateur harmonique 115

7.1 L’oscillateur harmonique classique 1157.2 Le spectre de l’oscillateur harmonique 116Exercices 123Problème 124

Chapitre 8. Moment cinétique – Spin 127

8.1 Moment cinétique 1278.2 Le spin 144Annexe 8.A : Rotation de 2π du spin d’un neutron 159Exercices 162

Chapitre 9. Addition des moments cinétiques 163

9.1 Inégalité triangulaire : valeurs de j permises 1649.2 Construction des vecteurs | j1; j2; j; m 〉 1669.3 Composition de deux spins 1/2 167Exercices 168

Chapitre 10. Introduction à la théorie des collisions 171

10.1 Ce que le chapitre discute... et ce dont il ne parle pas 17110.2 Collisions en une dimension 17410.3 Formulation générale – Équation de Lippmann-Schwinger 18310.4 Diffusion dans la situation bidimensionnelle 18510.5 Diffusion dans la situation tridimensionnelle 192Annexe 10.A : Fonctions de Green 194Exercices 197Problèmes 199

Chapitre 11. Particules identiques et permutations – Postulats (4) 207

11.1 Postulat de symétrisation 20811.2 Corrélations induites par le postulat de symétrisation 212Exercices 218Problème 219

Chapitre 12. Atome d’hydrogène 223

12.1 Atome d’hydrogène 22312.2 Atomes et classification de Mendeleïev 231Exercice 236

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Table des matières

Chapitre 13. Méthodes d’approximation 237

13.1 Méthode des perturbations – cas stationnaire 23713.2 La méthode variationnelle 24213.3 La méthode JWKB et l’approximation semiclassique 243Problèmes 248

Chapitre 14. Structures fine et hyperfine du spectre de l’hydrogène 255

14.1 Structure fine 25614.2 Corrections radiatives 26014.3 Structure hyperfine du niveau 1s1/2 261

Chapitre 15. Problèmes dépendants du temps 263

15.1 Méthode des perturbations 26315.2 Interaction atome-rayonnement 269Exercices 275Problème 276

Chapitre 16. Particule chargée dans un champ magnétique 279

16.1 Introduction 27916.2 Champ magnétique homogène 27916.3 Vortex magnétique 284Exercices 287Problème 288

Annexe A. Formulaire 291

A.1 Compléments mathématiques 291A.2 Constantes fondamentales 297

Annexe B. Solutions des exercices et problèmes 299

Bibliographie 343

Index 345

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AVANT-PROPOS

À Marie-Flore

Cet ouvrage propose un cours d’introduction à la mécanique quantique. Le cœur dutexte a été écrit pour servir de support à un cours dispensé aux étudiants d’écolesd’ingénieurs (École Centrale, Supélec et SupOptique), inscrits au magistère de phy-sique fondamentale de l’Université Paris-Sud, et qui avaient le courage d’étudier dessujets de physique fondamentale plusieurs soirs par semaine. Le cours, dont la struc-ture a été pour l’essentiel imposée afin de respecter le programme suivi par les étu-diants du magistère, a été rédigé en ayant le souci de produire un texte compactmais suffisamment complet pour pouvoir être utilisé de manière autonome (quelquesnotions mathématiques essentielles sont rappelées dans plusieurs annexes). De nom-breuses références sont données afin de fournir des pistes pour un lecteur désireuxd’approfondir les sujets présentés : vers des ouvrages de référence comme les livresd’A. Messiah [33], de L. Landau et E. Lifchitz [27] ou de C. Cohen-Tannoudji,B. Diu et F. Laloë [8]. Des références plus récentes sont les excellents ouvragesde M. Le Bellac [30], J.-L. Basdevant et J. Dalibard [5] ou encore le monumentallivre de C. Aslangul [3, 4] ; d’autres références spécialisées sont occasionnellementmentionnées.

Le cours s’ouvre sur un chapitre introductif rappelant quelques motivations his-toriques ayant conduit à la révolution quantique du début du xxe siècle. L’exposése poursuit avec une présentation de l’équation d’onde de Schrödinger, approche as-sez traditionnelle ayant l’avantage de jeter des ponts avec les acquis de physiqueclassique des ondes. Les premiers postulats sont ensuite présentés : formalisme deDirac, postulats de mesure et d’évolution temporelle. Le cadre ainsi dressé, un cha-pitre court discute succinctement le rôle des symétries et permet d’introduire desnotions qui seront très utiles pour la suite de l’exposé. Nous étudions ensuite l’oscil-lateur harmonique et le moment cinétique. Le postulat de symétrisation est présenté.La théorie quantique (non relativiste) de l’atome d’hydrogène est exposée, puis nousdiscutons des méthodes d’approximation, mises en pratique pour l’étude des correc-tions relativistes dans l’atome d’hydrogène, et finalement les problèmes dépendant dutemps (interaction atome-lumière). Ces sujets correspondent au programme du ma-gistère d’Orsay. S’il est courant de tirer de la physique atomique les illustrations d’unpremier cours de physique quantique, j’ai également choisi plusieurs applicationsinspirées par la matière condensée (résistance quantique, capacité quantique, effet

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Avant-propos

Hall, effet Aharonov-Bohm, courant permanent, antiferromagnétisme). Un très courtchapitre consacré à l’étude de la dynamique d’une particule soumise à un champmagnétique (dans les deux situations extrêmes d’un champ uniforme ou concentréen un point) s’inscrit dans cette logique et clôt l’ouvrage. J’ai également jugé op-portun d’insérer un chapitre (le 10) sur la théorie des collisions : si cette dernière ades applications évidentes et bien connues pour la physique des gaz ou la physiquedes particules, elle fournit aussi des outils puissants et assez intuitifs pour l’étudedes phénomènes mésososcopiques1 . J’ai opté pour une présentation commençant parconsidérer le cas des basses dimensions (1 et 2) ; le cas tridimensionnel usuellementdiscuté dans les ouvrages n’est que brièvement abordé. Outre que cette approcheprésente des simplifications d’un point de vue didactique, une telle présentation sys-tématique n’est à ma connaissance pas disponible dans les ouvrages, alors que laquestion de la mécanique quantique en basse dimension est tout à fait pertinente pourde nombreux développements modernes en physique atomique avec les progrès spec-taculaires dans le domaine des atomes froids, ou pour la matière condensée. Ce cha-pitre est d’un niveau plus avancé que le reste du livre, cependant il présente le cadredans lequel s’inscrit le concept de matrice S qui sera utilisé de manière intuitive dansplusieurs exercices/problèmes dans le corps de l’ouvrage.

J’ai bénéficié des conseils, remarques et encouragements de nombreuses personnesque je remercie chaleureusement : Hélène Bouchiat, Alain Comtet, Marie-ThérèseCommault, Richard Deblock, Julien Gabelli, Sophie Guéron, Thierry Jolicœur,Mathieu Langer, Alexandre Malamant, Gilles Montambaux, Nicolas Pavloff, PaoloPedri, Hugues Pothier, Guillaume Roux, Emmanuel Trizac et Denis Ullmo. Je re-mercie Alain Cordier pour la confiance qu’il m’a témoignée en m’ayant proposéd’assurer ce cours, Alain Abergel pour ses conseils initiaux, Sandra Bouneau pourles vigoureuses discussions autour de la rédaction de l’exercice 2.20.

Arthur Gossard (professeur à l’Université de Californie, Santa Barbara) et MarkTopinka ont eu la très grande gentillesse de m’autoriser à reproduire leur magnifiquefigure de diffraction obtenue dans un gaz d’électrons bidimensionnel (couverture). Jeremercie également Julien Gabelli pour m’avoir fourni l’image de la capacité quan-tique (figure 10.11).

J’adresse de profonds remerciements à Amaury Mouchet, pour ses nombreusessuggestions et conseils, et Jean-Noël Fuchs avec qui j’ai eu l’immense plaisir detravailler dans l’équipe de mécanique quantique d’Orsay, ainsi que pour ses innom-brables et toujours si pertinentes observations qui ont profondément marqué le texte ;plusieurs exercices du livre ont été rédigés avec lui.

1. La physique mésoscopique s’intéresse aux phénomènes quantiques (interférences quantiques et/oueffets de la quantification) en matière condensée.©D

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Mécanique quantique

Au moment de clôturer ce projet, j’ai une pensée pour les enseignants dont lescours lumineux m’ont permis d’entrer dans l’univers quantique : Françoise Balibar,Alain Laverne, Cécile Malegrange et Bernard Roulet.

Je remercie Caroline qui a stimulé le processus d’édition, et sans laquelle monmanuscrit dormirait peut-être encore dans mon bureau. Je suis reconnaissant àDominique Decobecq pour tous ses conseils éditoriaux et à Marie Leclerc pour sonefficacité.

Je dédie ce travail à Marie-Flore, Michel, Barbara et Andrea.

Orsay, le 22 avril 2011

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MODE D’EMPLOI

• Structure de l’ouvrage

Le schéma suivant montre la structure de l’ouvrage. Les flèches indiquent les rela-tions logiques entre les chapitres. Les flèches épaisses définissent un cheminement« naturel » (le programme du cours de mécanique quantique du magistère d’Orsay).

7. Oscillateur harmonique

8. Moment cinétique & Spin

9. Addition des moments cinétiques

12. Atome d’hydrogène

13. Méthodes d’approximation

14. Structures fine et hyperfine de l’atome H

15. Problèmes dépendant du temps

6. Symétries et lois de conservation

11. Postulat de symétrisation

1.4 & 1.5. Dualité onde−corpuscule, principe de superposition2. Equation d’onde de Schrodinger3. Formalisme de Dirac4. Postulats de mesure5. Postulat d’évolution

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10. Théorie des collisions

16. Particule chargée en champ magnétique

Les deux branches qui ne s’inscrivent pas dans le chemin principal correspondentà deux chapitres ajoutés à la version initiale des notes de cours. Le chapitre 10, quipourra être sauté sans nuire à la compréhension globale, est d’un niveau plus ardu.

• Structure des chapitres

Chaque chapitre est organisé selon le schéma suivant :

1. Le cours, au sein duquel sont insérés de petits exercices d’illustration ;

2. À la fin du chapitre, sont énoncées les idées importantes qui ont été introduites ;

3. Annexes ;

4. Exercices, dont le degré de difficulté est précisé : F, MF, D ou TD ;

5. Problèmes.

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INTRODUCTION 11.1 QU’EST-CE QUE LA MÉCANIQUE QUANTIQUE ?

Ses fondateurs considéraient la mécanique quantique comme le cadre théorique per-mettant de décrire le comportement de la matière et de la lumière aux échelles ato-miques et subatomiques. Plus tard, avec la découverte de phénomènes quantiquesmacroscopiques, cette définition est néanmoins apparue trop restrictive. Cependantla définition du domaine quantique est déjà une question très délicate, aussi nous enresterons à ce premier point de vue, qui permet de toucher du doigt assez aisémentla nécessité d’un abandon des concepts de la physique dite classique (nous enten-dons par là, la mécanique newtonienne et l’électromagnétisme) lorsque l’on s’inté-resse aux échelles atomiques et subatomiques. Les notions qui constituent le soclede la physique classique ont été forgées à partir de notre expérience immédiate, or,si nous pouvons espérer deviner les lois fondamentales qui régissent le mouvementdes corps matériels en analysant le mouvement d’une boule de billard, ou celui desplanètes à l’aide d’un télescope, il n’y a a priori pas de raison évidente pour queces lois s’appliquent encore dans le monde atomique et subatomique1. Il n’est doncpas surprenant, rétrospectivement, que la description du comportement des atomesrequiert d’autres concepts que ceux utilisés pour analyser la dynamique des corpsmacroscopiques.

Commençons par quelques considérations historiques afin de dresser un rapide ta-bleau de l’état de la physique à la fin du xixe siècle, à la veille de plusieurs grandsbouleversements. Elles nous aideront à mieux saisir les paragraphes suivants qui se-ront consacrés à une description succincte de la structure des théories physiques et dela mécanique quantique en particulier.

1. Aujourd’hui les progrès de la physique quantique nous permettent de « voir » les atomes à l’aide desmicroscopes à force atomique ou à effet tunnel (figure 2.2). C’était loin d’être le cas à la fin du xixe

siècle et les propriétés du monde atomique ne pouvaient qu’être déduites indirectement d’observationsaux échelles macroscopiques. La réalité des atomes était contestée par quelques grands noms de laphysique (par exemple Ernst Mach), tenants d’une approche « continue » opposée à la description « ato-miste ». On peut considérer que la question de l’existence des atomes fut tranchée définitivement parla validation expérimentale, en 1908, par Jean Perrin (1870-1942, prix Nobel 1926), de la descriptiondu mouvement brownien proposée par Einstein en 1905. Le mouvement erratique d’une petite particuledéposée à la surface de l’eau révèle les chocs incessants avec les molécules du liquide.©D

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Chapitre 1 • Introduction

1.2 BRÈVES CONSIDÉRATIONS HISTORIQUES

Faisons un état des lieux en cette fin de xixe siècle. Il va de soi qu’une présentationde quelques pages ne peut être que très schématique. Nous évoquons ici les grandesthéories cadres que sont : la mécanique newtonienne, l’électromagnétisme et la ther-modynamique/physique statistique.

1.2.1 La mécanique newtonienne

On peut faire remonter les premiers balbutiements de la mécanique newtonienne audébut du xviie siècle avec la formulation du principe d’inertie par Galileo Galilei(1564-1642). Les principes de la mécanique, dont la formulation fut rendue possiblepar l’invention du calcul différentiel attribuée à Gottfried Wilhelm Leibniz (1646-1716) et Isaac Newton (1642-1727), furent établis par ce dernier (I. Newton, Philo-sophiae Naturalis Principia Mathematica, 1687).

La mécanique newtonienne, en s’appuyant sur les notions de la cinématique (po-sition, vitesse, accélération,...) et celle de force, permet de prédire le mouvement descorps solides à l’aide d’un certain nombre de lois universelles :

• Le principe d’inertie : les lois de la mécanique sont les mêmes dans tous les réfé-rentiels inertiels.

• Le principe d’action-réaction.

• La relation fondamentale de la dynamique (RFD) reliant l’accélération �a, i.e. unequantité cinématique, d’une particule de masse m, à la force �F exercée sur celle-ci,i.e. une quantité dynamique2 : m�a = �F.

• On doit ajouter à ces trois principes une quatrième loi fondant la théorie newto-nienne de la gravitation : la force d’attraction, �FG = −GMm

r2 �ur, exercée par unemasse M à l’origine, sur une masse en �r = r�ur, où G � 6.67 × 10−11 m3 kg−1 s−2

est la constante universelle de gravitation (il semble exister une controverse entreNewton et Robert Hooke (1635-1703) quant à la paternité de la loi en 1/r2).

La théorie newtonienne a connu des succès éclatants, principalement pour la des-cription du mouvement des corps célestes, culminant avec la découverte de Neptunepar Urbain Le Verrier (1811-1877) grâce à l’analyse des aberrations de la trajectoired’Uranus. Communiquée le 31 août 1846 devant l’Académie des sciences de Paris,sa prédiction de l’existence d’une nouvelle planète fut confirmée le 23 septembre parune observation de Johann Galle.

2. Nous sommes tellement habitués à la RFD que nous en oublions à quel point celle-ci ne va pas desoi ! C’est si vrai que des propositions antérieures reliaient la force à la vitesse, ce qui est contredit parune analyse expérimentale précise.

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1.2. Brèves considérations historiques

1.2.2 L’électromagnétisme

Parallèlement à la théorie du mouvement des corps matériels, les phénomènes de na-tures électrique et magnétique étaient décrits par un certain nombre de lois finalementunifiées dans ce qui est aujourd’hui appelé l’électromagnétisme.

La théorie des phénomènes électriques s’est développée principalement dans laseconde moitié du xviiie siècle. On peut citer les noms de Charles Augustin Coulomb(1736-1806), d’Alessandro Volta (1745-1827) et de Denis Poisson (1781-1840).

Les phénomènes magnétiques étaient décrits depuis longtemps (les aimants furentdécouverts par les Grecs dès l’Antiquité), mais ce n’est qu’en 1820 que la relationentre les phénomènes magnétiques et électriques fut démontrée par une expérienceréalisée par Hans Christian Œrsted (1777-1851) montrant que l’aiguille d’une bous-sole est influencée par le courant électrique traversant un fil disposé à proximité. Lescontributions importantes furent apportées par André Marie Ampère (1775-1836),Jean-Baptiste Biot (1774-1862) et Michael Faraday (1791-1867). La construction dubel édifice fut parachevée par James Clerk Maxwell (1831-1879) qui donna une vi-sion unifiée de l’ensemble des phénomènes à travers les fameuses quatre équationsqui portent aujourd’hui son nom, présentées devant la Royal Society en 1864. Il estaujourd’hui considéré comme un des précurseurs de la vision moderne de la phy-sique, pour avoir donné une place centrale à la notion de symétrie dans une théo-rie physique. C’est apparemment des considérations purement esthétiques (on diraitaujourd’hui « de symétrie ») qui le conduisirent à ajouter un dernier terme dans ladernière des quatre équations. Ces quatre équations aux dérivées partielles décriventla dynamique des champs électrique �E(�r, t) et magnétique �B(�r, t) : un premier coupled’équations fixe des contraintes sur les champs div�B = 0 et �rot �E = − ∂

∂t�B (les deux

champs dérivent des potentiels scalaire et vecteur) ; un second couple d’équationsdiv �E = 1

ε0ρ et �rot�B = μ0�j + ε0μ0

∂∂t�E couple les champs à des sources les générant,

densité de charge ρ et densité de courant �j. C’est à Oliver Heaviside (1850-1925)qu’on doit cette forme élégante des équations de Maxwell, que ce dernier avaientprésentées sous la forme de vingt équations.

Mentionnons également le rôle déterminant de Heinrich Rudolf Hertz (1857-1894)qui mit en évidence expérimentalement l’existence des ondes électromagnétiques,prédites par les équations de Maxwell, et montra que la lumière est une forme derayonnement électromagnétique.

1.2.3 La physique statistique et la thermodynamique

La dernière des théories cadres est la physique statistique, à laquelle on peut attacherles noms de J. C. Maxwell (pour la théorie cinétique des gaz), J. W. Gibbs (1839-1903) et Ludwig Boltzmann (1844-1906). Basé sur l’idée d’ergodicité, le postulatfondamental de la mécanique statistique permet d’étudier les systèmes à très grand©D

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Chapitre 1 • Introduction

nombre de degrés de liberté (par exemple les gaz) en introduisant les notions d’en-tropie statistique, de température, de pression, etc. Contrairement à la mécaniquenewtonienne et à l’électrodynamique, elle ne vise pas à décrire la dynamique desobjets élémentaires, mais cherche au contraire à dégager des lois fondamentales dessystèmes à très grands nombres de degrés de liberté. La relation entre la physiquestatistique et les autres théories cadres est subtile puisque le choix de la dynamiquemicroscopique (classique ou quantique) est indépendant de l’idée maîtresse de déga-ger des lois statistiques.

1.2.4 Les impasses de la théorie classique

Si on résume la situation en cette fin de xixe siècle, il y a donc d’une part une théo-rie de la dynamique de la matière (la mécanique newtonienne), on pourrait parlerde physique corpusculaire, d’autre part la théorie électromagnétique, qui est claire-ment de nature ondulatoire puisqu’elle décrit la dynamique des champs électriqueet magnétique, ébranlements d’un milieu – le mystérieux éther ? – alors mal défini.Comme Hertz l’a démontré expérimentalement, cette théorie décrit les phénomèneslumineux : c’est une théorie du rayonnement. L’interaction entre matière et rayonne-ment est assurée d’une part par l’introduction de la force de Lorentz �F = q(�E +�v× �B)dans la relation fondamentale de la dynamique, et d’autre part par les termes desources donnant naissance aux champs, densité de charge ρ et densité de courant �j,dans les équations de Maxwell (figure 1.1). En dépit des succès remarquables de cesdeux théories, le bel édifice était remis en question à la fin du xixe siècle par uncertain nombre de problèmes, loin d’être secondaires comme nous le verrons, qui netrouvaient pas de solution dans ce cadre.

Mentionnons une première difficulté : les équations de Newton et les équations deMaxwell ne sont pas invariantes sous le même groupe de transformations d’espace-temps : le groupe de Galilée laisse les premières invariantes tandis que le groupe desymétrie des secondes est le groupe de Poincaré. Autrement dit les deux théories nesont pas affectées de la même manière par les transformations spatio-temporelles,ce qui contredit l’idée fondamentale de l’invariance des lois de la physique lors deschangements de référentiels inertiels. L’incompatibilité entre groupe de symétrie deséquations de Newton et de Maxwell fut résolue par l’élaboration, en 1905, d’unenouvelle mécanique (non quantique) permettant de décrire les corps aux très grandesvitesses (comparables à la vitesse de la lumière) : la théorie de la relativité restreinted’Einstein qui remit en cause les conceptions sur la structure de notre espace-temps.Le cœur de la théorie de la relativité restreinte, le principe de relativité, i.e. l’univer-salité des lois de la physique (mécanique et électromagnétisme) dans tous les réfe-rentiels inertiels, apparaît comme une réponse aux expériences d’Albert Michelson

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1.2. Brèves considérations historiques

et Edward Morley (entre 1881 et 1885) montrant le caractère absolu de la vitesse dela lumière.

Les problèmes profonds de la physique classique portent sur les mécanismesd’interaction matière-rayonnement. La discussion de ces questions est inextricable-ment liée à l’exploration de la structure de la matière aux échelles atomiques et sub-atomiques.

F = q( E + v B) ρ(r,t) j(r,t)&

Dynamique des milieux continusondes (acoustiques, sismiques,... )

localiséescontinudélocalisés

trajectoire (cinématique,...)secruoSztneroL ed ecroF

Mécanique newtonienne Electromagnétismedynamique des particules dynamique des champs

discret

Interaction

Figure 1.1– La dichotomie (classique) corpuscule-onde.

a) La recherche des constituants élémentaires• Les atomes

Bien que l’hypothèse atomique (de « ατoμoς », indivisible) remonte à l’Antiquitégrecque, ce n’est qu’au tout début du xxe siècle que l’existence des atomes fut miseen évidence en 1908 de manière indubitable par Jean Perrin, par son analyse du mou-vement brownien et sa mesure du nombre d’Avogadro (NA � 6.023 × 1023 atomespar mole). Les fluctuations, le mouvement erratique d’un grain de pollen à la sur-face de l’eau trouvant son origine dans les chocs incessants avec les molécules d’eau,révèlent la nature discrète de la matière.

• Les électrons

Les expériences d’ionisation des gaz raréfiés jouèrent un rôle important jusqu’à la dé-monstration, en 1897, de l’existence de l’électron par Joseph John Thomson (1856-1940, prix Nobel 1906), qui observa la déviation de rayons cathodiques (faisceauxd’électrons) d’une lampe à vide par un champ magnétique. L’expérience fournit unemesure du rapport de la charge par la masse qe/me. La mesure de la charge de l’élec-tron qe � −1.6 × 10−19 C, sera réalisée en 1910 par Robert Andrews Millikan (1868-1953, prix Nobel 1923).

• La structure de l’atome

Au début du xxe siècle, deux modèles d’atome sont proposés. D’une part un mo-dèle planétaire, proposé par Perrin en 1901, d’électrons interagissant avec un noyau©D

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Chapitre 1 • Introduction

Modèle planétaire (J.Perrin)

Modèle globulaire (J.J.Thomson)

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Figure 1.2– La structure de l’atome.

À gauche : Deux modèles d’atomes. À droite : Principe des expériences de Geiger,Marsden et Rutherford : bombardement d’une feuille d’or (épaisseur ∼ 100 μm) par desparticules α émises par une source radioactive de radium.

chargé positivement via l’interaction coulombienne, d’autre part un modèle globu-laire, proposé par Thomson en 1903, d’électrons se mouvant sur un fond continuchargé positivement assurant la neutralité électrique de l’atome (figure 1.2) [21]. Laquestion sera tranchée par une série d’expériences dues à deux étudiants d’ErnestRutherford (1871-1937, prix Nobel 1908), Hans Geiger (1882-1945) et ErnestMarsden (1889-1970) en 1909, et leur interprétation par Rutherford en 1911. Unfaisceau de particules α (des noyaux d’hélium) est envoyé sur une mince (∼ 100 μm)feuille d’or. Si la plupart des particules α ne sont pas déviées, certaines sont diffuséesavec de grands angles. L’observation de rétrodiffusion avait particulièrement frappéRutherford et invalide le modèle de J. J. Thomson : la rétrodiffusion des particules αfortement énergétiques (v ≈ 1.8 × 107 m/s, i.e. Ec ≈ 7 MeV) ne peut s’expliquerque parce qu’elles rencontrent une concentration extrêmement forte de charges, lenoyau atomique. Rutherford va plus loin et explique les données expérimentales àl’aide de son modèle théorique de diffusion d’une charge ponctuelle dans un champcoulombien (la particule α dans le champ du noyau d’or).

• Les ions et les isotopes

Francis William Aston (1877-1945, prix Nobel 1922) met au point en 1919 la tech-nique de spectroscopie de masse consistant à dévier un faisceau d’atomes ionisés (desions) par un champ magnétique et à les trier en fonction de leur masse (d’où le nomde la technique). Il montre d’une part que les masses des noyaux sont (approximati-vement) quantifiées en multiples entiers de la masse du proton (le noyau de l’atomed’hydrogène), et d’autre part que la masse du noyau d’un même élément chimiquepeut fluctuer de quelques unités. L’existence de différents isotopes est derrière cetteobservation3.

3. Le nombre de neutrons dans le noyau varie d’un isotope à l’autre, par exemple dans le carbone12 (6 protons et 6 neutrons) et le carbone 14 (6 protons et 8 neutrons). Les propriétés chimiques des

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Page 17: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.2. Brèves considérations historiques

• La radioactivité

Une découverte importante, en 1896, est le phénomène de radioactivité par HenriBecquerel (1852-1908, prix Nobel 1903). Trois types de radioactivité furent obser-vés : l’émission α (un noyau d’hélium), l’émission β (un électron) et l’émission γ

(un photon). L’origine du phénomène de radioactivité est une transition entre deuxétats du noyau atomique (ou deux noyaux de natures différentes). La découverte de laradioactivité était donc annonciatrice de la découverte du noyau atomique et son oc-currence stochastique de la nature probabiliste de la théorie quantique (cf. chapitre 2de l’ouvrage [3])

b) Impasse n◦1 : L’instabilité classique des atomes

Le problème qui paraît le plus grave est relatif à la question de la stabilité de lamatière. L’expérience de Geiger-Marsden-Rutherford fournit donc une image clairepour la structure de l’atome : des électrons tournant autour d’un noyau chargé positi-vement. Or l’électron accéléré dans le champ électrique du noyau devrait émettre unrayonnement électromagnétique et voir son énergie (mécanique) diminuer. Le rayonde l’orbite de l’électron devrait alors diminuer et l’atome s’effondrer sur lui-même.Dans le cas de l’atome d’hydrogène, on trouve une durée de vie de 10−11 s (cf. exer-cice 15.4) ! La physique classique prédit donc que les atomes ont une durée de viefinie, extrêmement courte, ce qui est (heureusement pour nous) contredit par l’expé-rience.

c) Impasse n◦2 : Absorption et émission de lumière

L’absorption et l’émission de lumière par la matière révèlent un caractère discontinuqui ne s’explique pas dans le cadre classique.

• Spectroscopie atomique

Les expériences d’absorption ou d’émission de la lumière par un gaz atomiquemontrent que la lumière n’est absorbée/émise qu’à certaines fréquences discrètes4.Cet ensemble de fréquences constitue le spectre de l’atome et joue le rôle de sa « carted’identité ».

Cette observation sera à l’origine du modèle de l’atome de Bohr : essentiellementle modèle d’atome planétaire auquel on ajoute une règle de quantification.

isotopes sont identiques, puisqu’elles dépendent de la structure électronique, i.e. du nombre de pro-tons, seule la masse varie. Pour éviter tout anachronisme, notons que le neutron, dont l’existence a étéconjecturée par Rutherford en 1920, ne sera découvert qu’en 1932 par Chadwick.4. Il est intéressant de noter que dès 1905, Henri Poincaré (1854-1912) suggérait l’analogie entre l’exis-tence des raies spectrales atomiques et les harmoniques de certaines équations différentielles apparais-sant dans d’autres domaines de la physique (acoustique, théorie de l’élasticité, électromagnétisme) [12].©D

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Chapitre 1 • Introduction

• Effet photoélectrique

Découvert par Heinrich Rudolf Hertz (1857-1894) en 1887, l’effet photoélectriqueest l’émission d’électrons par un métal soumis à un rayonnement ultraviolet.

Décrivons l’expérience : un morceau de métal est placé dans le vide et éclairépar un rayonnement ultraviolet monochromatique de pulsation ω. Une différence depotentiel V est appliquée entre le métal et une cathode. Le courant I d’électrons arra-chés de l’anode est mesuré en fonction de la tension V (figure 1.3). Lorsque la tensionest inférieure à la contre-tension V0 les électrons sont repoussés par la cathode et lecourant électrique ne passe pas. V0 fournit donc une mesure de l’énergie cinétiquemaximale des électrons arrachés : max

[Eel.

c]= −V0.

I

e−

V métal

vide

UVω

V0

V0−UV : intensité 2

UV : intensité 1ω

0 ω s0 V

I

Figure 1.3– Effet photoélectrique.

À gauche : émission d’électrons par un métal soumis à un rayonnement ultraviolet mo-nochromatique de pulsation ω. Au milieu : courant d’électrons arrachés en fonction de latension. À droite : contre-tension en fonction de la pulsation.

En augmentant l’intensité lumineuse du rayonnement monochromatique on aug-mente l’énergie déposée dans le métal. On pourrait penser qu’on augmente ainsil’énergie cinétique des électrons arrachés, cependant il n’en est rien comme l’illustrela figure, puisque la contre-tension V0 est indépendante de l’intensité lumineuse. Seulle flux d’électrons arrachés varie.

La contre-tension est tracée en fonction de la fréquence du rayonnement (fi-gure 1.3). On observe l’existence d’une fréquence de seuil ωs en-deçà de laquellela lumière n’est pas absorbée. Au-delà de cette fréquence, la relation entre contre-tension (i.e. énergie cinétique maximale des électrons) et fréquence est linéaire

Eel.c = � (ω − ωs) (1.1)

où � est une constante universelle (alors que ωs dépend du métal, � en est indé-pendante). L’existence du seuil, incompréhensible classiquement, suggère à AlbertEinstein (1879-1955, prix Nobel 1921) en 1905 que l’énergie du rayonnement mo-nochromatique ne peut être absorbée que par quanta Equantum = �ω. L’équa-tion (1.1) s’interprète comme un bilan d’énergie : l’énergie déposée par le rayonne-ment monochromatique (un multiple entier de « paquets » Equantum = �ω) se distribue

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Page 19: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.2. Brèves considérations historiques

pour partie en énergie cinétique de l’électron, et pour partie en énergie potentielle né-cessaire pour l’arracher au métal, au minimum �ωs, expliquant le seuil.

• Équilibre thermique lumière/matière

Dans une étoile, les photons émis lors de la nucléo-synthèse diffusent depuis le cœurvers les couches externes. Les multiples processus d’émission/absorption conduisentà l’existence d’un équilibre thermique entre matière et lumière. En supposant le sys-tème isolé et à l’équilibre (« corps noir »), ce qui suppose que les pertes d’énergie sontfaibles relativement, la thermodynamique prédit que la distribution des fréquencesdu rayonnement est une loi universelle, uniquement fonction de la température T(remarquons que la température correspondant au rayonnement émis par l’étoile estcelle des couches externes, quelques milliers de K, et non du cœur beaucoup pluschaud, quelques millions de K).

Notons u(ω, T )dω la densité (volumique) d’énergie des fréquences de l’intervalle[ω,ω + dω]. La physique classique prédit une densité présentant le comportementuRJ(ω, T ) ∝ Tω2 (la loi de Rayleigh-Jeans, obtenue par Lord Rayleigh en 1900puis corrigée en 1905 par James Jeans, est déduite du théorème d’équipartition del’énergie de la physique statistique). Elle conduit à une densité d’énergie infinie aprèsintégration sur les fréquences : Ehrenfest évoquera en 1911 une « catastrophe ultra-violette » pour désigner cette divergence

∫ ∞0 dω uRJ(ω, T ) = ∞. D’autre part, Whil-

helm Wien (1864-1928, prix Nobel 1911) avait obtenu en 1894 la loi portant son nomuWien(ω, T ) = ω3 f (ω/T ) ; pour rendre compte des expériences, il propose en 1896 uneforme exponentielle décroissante, f (x → ∞) � A e−Bx où A et B sont des constantesuniverselles.

En 1900, Max Planck (1858-1947, prix Nobel 1918) démontre la loi éponyme,interpolant entre les lois de Rayleigh-Jeans et de Wien et en bon accord avec l’expé-rience :

uPlanck(ω, T ) =ω2

π2c3�ω

1exp(�ω/kBT ) − 1

, (1.2)

où kB est une autre constante universelle appelée la constante de Boltzmann (cf. coursde physique statistique). Il identifie l’existence d’une nouvelle constante fondamen-tale, �. Dans sa démonstration, afin de reprendre une méthode combinatoire due àBoltzmann, Planck supposait l’énergie quantifiée. Alors qu’il ne voyait qu’un artificetechnique dans cette idée, celle-ci jouera un rôle central dans les travaux ultérieursd’Einstein [16].

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Chapitre 1 • Introduction

1.2.5 Une nouvelle constante fondamentale :la constante de Planck �

Il est remarquable de constater que l’étude de deux problèmes à première vue aussidifférents que la thermodynamique du rayonnement dans une étoile et l’irradiationd’un morceau de métal font apparaître la même constante universelle �. Analysonssa dimension : l’expression (1.2) montre que �ω est une énergie, autrement dit �permet de convertir une pulsation en énergie

[�] = [Energie] [Temps] (1.3)

= [Longueur] [Impulsion] (1.4)

= [Moment cinétique]. (1.5)

C’est aussi la dimension d’une action, une grandeur physique introduite dans le cadrede la formulation lagrangienne de la mécanique classique (cf. annexe 1.A), ce quiexplique pourquoi la constante de Planck est dénommée le quantum d’action. Savaleur,

� = 1.054 571 68(18) × 10−34 J.s (1.6)

extrêmement petite comparée aux échelles physiques caractérisant le monde qui nousentoure (∼ 1 kg, ∼ 1 m, ∼ 1 s ⇒ action∼ 1 J.s), suggère que les phénomènes quan-tiques n’émergent qu’à de très petites échelles (dans les deux exemples, les processusmicroscopiques d’interaction entre matière et rayonnement sont en jeu).

Exercice 1.1 (F)

a) Donner l’expression de l’action de la terre pendant une révolution autour du soleil,l’orbite étant supposée circulaire. Calculer S ♁ en unité de �.G � 6.67 10−11 kg−1 m3 s−1, M� � 2 1030 kg, M♁ � 6 1024 kg et Rt−s = 1 u.a �150 106 km.

b) Calculer l’action d’un électron décrivant une orbite circulaire autour d’un proton(un atome d’hydrogène) pendant une période. On rappelle que le potentiel cou-

lombien est V(r) = − q2e

4πε0r ≡ − e2

r . On considérera une orbite circulaire de rayon

a0 =�2

me2 = 0.53 Å.

1.2.6 La physique quantique en quelques dates

« Il fallait de toute évidence en arriver à fonder une nouvelle mécanique où lesidées quantiques viendraient se placer à la base même de la doctrine et non pas sesurajouter après coup comme dans l’ancienne théorie des quanta. Chose curieuse !la réalisation de ce programme eut lieu presque simultanément par deux voies très

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1.2. Brèves considérations historiques

différentes (...). Ainsi se constituèrent la mécanique ondulatoire d’une part, la mé-canique quantique d’autre part, doctrines dont l’aspect et le formalisme paraissaientd’abord tout à fait opposés. »

La physique nouvelle et les quanta, Louis de Broglie.

La mécanique quantique est née entre 1925 et 1927 de la synthèse, dans la-quelle Bohr joua un rôle important, de la mécanique des matrices (Born, Heisenberg,Jordan), de la mécanique ondulatoire (Schrödinger) et de la théorie des transfor-mations (Dirac, Jordan, von Neumann) [7, 21]. C’est l’aboutissement d’un quartde siècle d’efforts de la part de nombreux scientifiques parmi lesquels (par ordrechronologique de naissance) : Max Planck, David Hilbert, Arnold Sommerfeld, Al-bert Einstein, Paul Ehrenfest, Max Born, Niels Bohr, Erwin Schrödinger, Louisde Broglie, Wolfgang Pauli, Werner Heisenberg, Enrico Fermi, Pascual Jordan, PaulDirac, Eugène Wigner, John von Neumann. Pour avoir une idée de la genèse de lathéorie quantique, mentionnons un certain nombre d’étapes importantes, regroupéesen deux groupes (avec un certain arbitraire).

a) Fondation : de la physique des quanta à la mécaniquequantique

• 1897 : L’électron est découvert par Thomson qui obtient une valeur du rapportqe/me.

• 1900 : Loi et constante de Planck. Max Planck élabore une théorie du corps noir. Ilintroduit le quantum d’action (la constante de Planck h = 2π�).

• 1905 : Quantification de l’énergie du rayonnement. Einstein propose une théoriede l’effet photoélectrique (découvert par Hertz en 1897). Il formule l’hypothèse de laquantification de l’énergie de la lumière.

• 1907 : Einstein développe sa théorie de la chaleur spécifique des solides.

• 1909 : Einstein introduit l’idée d’une dualité des points de vue corpusculaire etondulatoire pour le rayonnement.

• 1910 : Millikan mesure la charge de l’électron (le quantum de charge).

• 1911 : Rutherford analyse la diffusion de particules α diffusées par une feuille d’or,ce qui tranche en faveur d’un modèle d’atome planétaire.

• 1913 : Atome de Bohr. Niels Bohr (1887-1962, prix Nobel 1922) fonde un premiermodèle quantique de l’atome. Sans abandonner les concepts classiques, il introduitune règle de quantification n’autorisant que les orbites dont l’action est un multipleentier de h = 2π� (cf. § 13.3.1). La théorie permet de comprendre la stabilité des©D

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Chapitre 1 • Introduction

atomes et l’existence des raies spectrales, qui correspondent aux transitions entre tra-jectoires quantifiées.

• 1915 : Règle de quantification de Bohr-Sommerfeld. Arnold Sommerfeld (1868-1951), W. Wilson et J. Ishiwara, généralisent la condition de quantification des tra-jectoires circulaires de Bohr. L’approche est suffisamment puissante pour permettre àSommerfeld d’expliquer en 1916 la structure fine de l’hydrogène (cf. chapitre 14).

• 1917 : Émission spontanée. En étudiant l’équilibre thermodynamique entre ma-tière et rayonnement, Einstein propose une description des échanges d’énergie entrematière et lumière. Il introduit les notions d’émission spontanée et stimulée (cf. cha-pitre 15).

• 1920 : Principe de correspondance. Bohr formule un principe de correspondanceassurant la transition quantique → classique. (citons [21] : l’idée que la théorie quan-tique tend vers la théorie classique dans la limite � → 0 a été exprimée dès 1906 parPlanck ; elle était déjà sous-jacente à la fondation de son modèle d’atome par Bohren 1913).

• 1921 : Pour expliquer l’effet Zeeman « anormal », Alfred Landé (1888-1976) intro-duit des nombres quantiques demi-entiers (cf. § 8.2.1).

• 1922 : Otto Stern (prix Nobel 1943) et Walter Gerlach réalisent leur célèbre expé-rience montrant le dédoublement d’un faisceau d’atomes d’argent lors de son passagedans une région où règne un gradient de champ magnétique (cf. chapitre 8).

• 1923 : Diffusion Compton. Arthur Holly Compton (1892-1962) réalise des expé-riences de diffusion de rayons X par des électrons. La diminution de la fréquencede la lumière diffusée, par rapport au rayonnement incident, est interprétée commeun transfert d’énergie entre deux particules lors d’une collision élastique. Alorsqu’Einstein avait introduit la notion de quantum d’énergie du rayonnement (ce qu’onappellera plus tard un photon), l’expérience suggère qu’on peut attribuer une impul-sion au « grain » de lumière (notons toutefois que l’électromagnétisme associe déjàune impulsion au champ, le vecteur de Poynting).

• 1924 : Nature ondulatoire des particules matérielles. Louis de Broglie (1892-1987,prix Nobel 1929), en reliant l’impulsion d’une particule à une longueur d’onde,étend5 aux particules de matière la dualité onde-corpuscule introduite par Einsteinen 1909 pour la lumière.

• Statistique de Bose-Einstein. Satyendra Nath Bose (1894-1974), un physicien in-dien inconnu, obtient une nouvelle démonstration de la loi de Planck. Il envoie son

5. Cela serait travestir sa pensée de ne pas mentionner que de Broglie avait un point de vue sur la dualitéonde-corpuscule qui diffère de celui exposé ici, comme il l’explique dans son livre [12].

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Page 23: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.2. Brèves considérations historiques

travail (rejeté par une revue) à Einstein qui recommande son article pour publication.Dans un second temps, Einstein adapte l’idée à l’étude de la thermodynamique desgaz atomiques et prédit le phénomène de condensation de Bose-Einstein. L’idée netrouvera une application qu’en 1938, lorsque Fritz London cherchera à analyser lephénomène de superfluidité de l’hélium6.

• 1925 : Principe de Pauli. Wolgang Pauli (1900-1958, prix Nobel 1945) formule son« principe d’exclusion » (chapitre 11). Pour mesurer son importance, notons que leprincipe d’exclusion de Pauli est à l’origine de la diversité des propriétés chimiquesdes atomes.

• Mécanique des matrices. Werner Heisenberg (1901-1976, prix Nobel 1932) MaxBorn (1882-1970, prix Nobel 1954) et Pascual Jordan (1902-1980) élaborent la mé-canique des matrices.

• Le spin de l’électron. George E. Uhlenbeck (1900-1988) et Samuel A. Goudsmit(1902-1978), élèves de Paul Ehrenfest à Leiden, proposent d’attribuer à l’électron unmoment cinétique intrinsèque (le spin), dont la théorie est bâtie par Pauli. Cette théo-rie permet d’analyser l’expérience de Stern et Gerlach (1922).

• 1926 : L’équation de Schrödinger. Erwin Schrödinger (1887-1961, prix Nobel1933), guidé par les idées de L. de Broglie, introduit son équation d’onde (cf. cha-pitre 2).

•Dans le cadre de l’étude du problème de la collision, menée à l’aide de l’équation deSchrödinger, Max Born propose l’interprétation probabiliste de la fonction d’onde.

• Statistique de Fermi-Dirac. Développée indépendamment par Enrico Fermi (1901-1954, prix Nobel 1938) et Paul A. M. Dirac (1902-1984, prix Nobel 1933) (cf. cha-pitre 11).

• 1927 : L’argument des « complémentarités » de Bohr assure la cohérence de l’édi-fice : la naissance de l’interprétation de Copenhague (la présentation axiomatique quenous donnons ici).

• Inégalités de Heisenberg. Heisenberg formule un « principe d’indétermination »(cf. chapitre 2).

• Quantification du champ électromagnétique par Dirac.

• Les propriétés ondulatoires de la matière sont observées dans les expériences de dif-fusion d’électrons par un cristal par C. J. Davisson (prix Nobel 1937) et L. H. Germer.

6. La superfluidité de l’hélium met en jeu un liquide de bosons fortement corrélés. La condensationde Bose-Einstein ne sera observée dans des gaz atomiques dilués que dans les années 1990, grâceaux progrès réalisés dans les techniques de refroidissement atomiques. On pourra aller voir la pagehttp://www.colorado.edu/physics/2000/bec/.©D

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Chapitre 1 • Introduction

Alors que Compton avait montré qu’on peut attribuer une impulsion au photon,Davisson et Germer confirment l’idée de L. de Broglie d’associer une longueurd’onde à l’électron7.

• 1928 : Équation de Dirac. Dirac propose une théorie quantique relativiste de l’élec-tron. Pour cela il construit une équation d’onde pour des fermions qui reproduit lespectre d’énergie relativiste (E2 = �p 2c2 + m2c4 pour la particule libre).

b) Développements

• 1928 : Théorème de Bloch. (§ 6.4 page 109) Félix Bloch développe une théoriequantique du transport électronique dans un cristal parfait (un potentiel périodique).

• George Antonovich Gamow (1904-1968), Gurney et Condon modélisent la radio-activité α comme l’effet tunnel d’une particule α traversant la barrière du potentiel laliant au noyau.

• Effet Raman : diffusion inélastique d’un photon déposant de l’énergie dans la ma-tière. Donnera naissance à une technique puissante de spectroscopie et vaudra le prixNobel en 1930 à Chandrasekhara Venkata Raman (1888-1970).

• 1929 : Rudolf Peierls (1907-1995), sur une proposition de Heisenberg, se penchesur la question de l’effet Hall anormal de certains métaux. Il comprend le changementde signe de la résistance Hall (problème 16.1) dans le cadre de la théorie de Blochcomme une manifestation de la masse effective négative.

• 1931 : Anti-particules. En cherchant à résoudre le problème posé par les solutionsd’énergies négatives dans sa théorie relativiste de l’électron, Dirac propose le conceptde « lacune » dans une mer d’états occupés, qu’il interprète comme un anti-électron(un positron) : génial retournement consistant à transformer une difficulté mathéma-tique en invention du concept d’anti-particule (notons qu’il avait dès 1930 incorrec-tement proposé d’identifier la lacune avec le proton).

• Un mois après Dirac, Heisenberg propose la notion de trou (anti-électron deconduction) pour expliquer les conclusions de Peierls de 1929 sur l’effet Hall « anor-mal ». C’est l’analogue, pour la matière condensée, de la théorie de Dirac8.

7. Cette expérience fondamentale, dont on trouvera une analyse détaillée p. 210 de l’ouvrage [32],résulte d’un accident de laboratoire ! Une bonbonne de gaz avait explosé à proximité de l’échantillon,clivant la surface du Nickel (i.e. réalisant une surface régulière à l’échelle atomique) et rendant possiblel’observation de la diffraction de Bragg. Un exemple parmi d’autres à méditer, à l’heure du pilotaged’une recherche de plus en plus « finalisée » par des financements de projets de court et moyen terme.8. L. Hoddeson & G. Baym, The development of the quantum-mechanical electron theory of metals :1928–1933, Rev. Mod. Phys. 59, 287–327 (1987).

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1.2. Brèves considérations historiques

• 1932 : Le positron est mis en évidence expérimentalement par C. D. Anderson(prix Nobel 1936) en 1932, puis par P. M. S. Blackett (prix Nobel 1948) et G. P. S.Occhialini en 1933.

• Découverte du neutron par James Chadwick (1891-1974, prix Nobel 1935).

• 1933 : Ernst August Friedrich Ruska (1906-1988) réalise le premier microscopeélectronique en transmission (TEM), utilisant des électrons au lieu de photons. Cetteinvention lui vaudra le prix Nobel cinquante ans plus tard (en 1986).

• 1934 : La première théorie de la radioactivité β (i.e. de l’interaction faible) est pro-posée par Fermi.

• 1935 : Le paradoxe EPR (Albert Einstein, Boris Podolsky & Nathan Rosen) : cri-tique de la non localité et de la non séparabilité quantiques.

• 1938 : Observation du phénomène de superfluidité par Piotr Leonidovich Kapitza(1894-1984, prix Nobel 1978)9.

• Isidor Isaac Rabi (1898-1988, prix Nobel 1944) et ses collaborateurs proposent unenouvelle méthode pour mesurer avec une grande précision le moment magnétiquedes atomes ou molécules : la résonance magnétique.

• 1941 : Théorie de la superfluidité par Lev Davidovich Landau (1908-1968, prixNobel 1962).

• 1945 : Félix Bloch et Edwards Mills Purcell (prix Nobel 1952) découvrent le phé-nomène de résonance magnétique nucléaire.

• 1946 : Invention du transistor par John Bardeen, Walter Houser Brattain et WilliamBradford Shockley (prix Nobel 1956).

• 1947 : Mesure du déplacement de Lamb par Willis Eugene Lamb (1913-2008, prixNobel 1955). Il s’agit d’un décalage en énergie dans les spectres atomiques non préditpar la théorie quantique relativiste de Dirac, expliqué dans le cadre de l’électrodyna-mique quantique (cf. § 14.2).

• 1948 : Mesure du moment magnétique anormal de l’électron (autre écart à la théo-rie de Dirac) par Polykarp Kusch (1911-1993, prix Nobel 1955) ; cf. § 8.2.3.

• 1949 : Électrodynamique quantique développée par Richard Phillips Feynman,Julian Schwinger et Shin-Ichiro Tomonaga (prix Nobel 1965). Fournit des prédic-tions quantitatives pour le déplacement de Lamb et le moment magnétique anormaldont l’origine est dans le couplage aux fluctuations quantiques du champ électroma-gnétique dans le vide.

9. L’histoire de la découverte de la superfluidité a bénéficié des contributions importantes d’autresscientifiques : cf. S. Balibar, « Qui a découvert la superfluidité ? », Bulletin de la Société françaisede physique 128, 14 (2001).©D

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Chapitre 1 • Introduction

• 1950 : Mise au point, par Alfred Kastler (1902-1984, prix Nobel 1966) et JeanBrossel (1918-2003), de la technique du pompage optique qui permettra l’étude desgaz atomiques très froids.

• 1956 : Mesure des corrélations quantiques de la lumière (« bunching » des photonsdû à leur nature bosonique) par Robert Hanbury Brown et Richard Q. Twiss.

• Violation de la parité suggérée par Tsung-Dao Lee et Chen Ning Yang (prix Nobel1957).

• 1957 : Observation de la violation de la parité (cf. chapitre 6)10.

• Théorie de la supraconductivité par John Bardeen, Leon Neil Cooper et John RobertSchrieffer (prix Nobel 1972).

• 1958 : Début de la théorie de la localisation. Alors que les états stationnairesdans un cristal parfait sont délocalisés dans tout l’espace (théorème de Bloch, § 6.4),comme des ondes planes, Philip W. Anderson (prix Nobel 1977) montre que la pré-sence de désordre statique (impuretés ou défauts structurels) est susceptible de loca-liser l’onde électronique et d’empêcher la conduction électrique.

• 1959 : Effet Aharonov-Bohm. Yakir Aharonov et David Bohm (1917-1992)montrent qu’une particule tournant autour d’un flux magnétique dans une région oùle champ magnétique est nul est sensible au flux via la phase de la fonction d’onde(cf. chapitre 16).

• Années 1960 : Unification électro-faible. L’interaction électromagnétique et l’inter-action faible (responsable de la radioactivité β) sont unifiées dans la théorie électro-faible, par Sheldon L. Glashow, Abdus Salam et Steven Weinberg (prix Nobel 1979).L’idée de brisure spontanée de symétrie est au cœur du modèle et propose une originepour la masse des particules (mécanisme de Higgs-Anderson).

• Réseau d’Abrikosov. Alexei Alexeievich Abrikosov (prix Nobel 2003) découvrel’existence d’une nouvelle phase dans certains supraconducteurs (dits de type II) :organisation d’un réseau hexagonal de vortex magnétiques.

• 1962 : Invention du laser par Charles Hard Townes (prix Nobel 1964 avecN. G. Basov et A. M. Prokhorov).

• Brian David Josephson (prix Nobel 1973) découvre l’effet éponyme : un courantélectrique est induit par une différence de phase entre deux supraconducteurs séparéspar une jonction tunnel.

10. C. S. Wu, et al., « Experimental Test of Parity Conservation in Beta Decay », Phys. Rev. 105, 1413(1957).

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Page 27: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.2. Brèves considérations historiques

• 1964 : Violation de la symétrie de renversement du temps observée par Val LogsdonFitch et James Watson Cronin (prix Nobel 1980).

• 1965 : John Stewart Bell (1928-1990) découvre les inégalités portant aujourd’huison nom.

• 1979 : E. Abrahams, P. W. Anderson, D. C. Licciardello et T. V. Ramakrishnan(dits « la bande des quatre », que le sinophile ne devra pas confondre avec la sinistrebande éponyme) montrent l’importance de la dimensionalité dans le phénomène delocalisation d’Anderson en développant une « théorie d’échelle ». Ils prédisent l’exis-tence d’une transition de localisation en dimension 3 mais la localisation complètedes états pour les dimensions 1 et 2.

• 1980 : Effet Hall quantique entier. Klaus von Klitzing (prix Nobel 1985) ob-serve la quantification de la conductivité Hall d’un gaz d’électrons bidimensionnel :σxy = ne2

h avec n ∈ N∗. Cette quantification est si précise qu’elle est maintenant uti-lisée pour définir l’étalon de résistance en métrologie (cf. chapitre 16).

• 1981 : Théorie de la mesure de Wojcieh H. Zurek.

• 1982 : Observation de la violation des inégalités de Bell à l’institut d’optiqued’Orsay11.

• Effet Aharonov-Bohm observé par une équipe japonaise12 dans une expérience dediffusion d’électrons par un petit aimant toroïdal.

• 1983 : Effet Hall quantique fractionnaire. Daniel C. Tsui et Horst L. Störmer (prixNobel 1998 avec Robert B. Laughlin) observent la quantification de la conductivitéde Hall d’un gaz d’électrons bidimensionnel pour une valeur fractionnaire σxy =

pq

e2

havec p, q ∈ N∗ (la fraction p/q = 1/3 dans cette première observation). Une expli-cation proposée par Laughlin conduit à l’idée fascinante que la physique de basseénergie (T ∼ qq10 mK) d’un gaz d’électrons fortement corrélés, en interaction cou-lombienne et soumis à un fort champ magnétique (qq T), met en jeu des excitationsélémentaires de charges fractionnaires.

• 1984 : Observation des bosons W et Z médiateurs de l’interaction électro-faible parCarlo Rubia et Simon van der Meer (prix Nobel 1984) : test de la théorie GSW desinteractions électro-faibles.

• 1985 : Invention du microscope à effet tunnel (STM) par Gerd Binnig et HeinrichRohrer (prix Nobel 1986).

11. A. Aspect, P. Grangier & G. Roger, Experimental realization of Einstein-Podolsky-Rosen-BohmGedankenexperiment : a new violation of Bell’s inequalities, Phys. Rev. Lett. 49, 91 (1982).12. A. Tonomura et al., « Observation of Aharonov-Bohm effect by electron holography »,Phys. Rev. Lett. 48, 1443 (1982).©D

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Chapitre 1 • Introduction

• Découverte des supraconducteurs à hautes températures critiques par J. GeorgBerdnoz et K. Alexander Müller (prix Nobel 1987).

• 1995 : Observation d’un condensat de Bose-Einstein dans un gaz d’atomes alcalinstrès froid (qq μK)13.

• 1996 : Observation dynamique de la décohérence pendant la mesure sur un étatdu type « chat de Schrödinger » pour le champ électromagnétique dans une cavitésupraconductrice14 .

• 1997 : Observation de la charge fractionnaire des porteurs de charge dans l’effetHall quantique fractionnaire en étudiant les fluctuations du courant15.

• 1999 : Mesure non destructrice d’un état du champ électromagnétique à photonunique16.

On peut véritablement parler de « révolution quantique » puisque les fondateurs dela mécanique quantique ont été progressivement amenés à remplacer le cadre concep-tuel et à abandonner les notions servant de socle à la mécanique classique comme cebref historique le montre. C’est une des difficultés principales de l’enseignement dela mécanique quantique : il faut laisser de côté un certain nombre de notions devenuesintuitives à l’usage.

1.3 LA STRUCTURE DES THÉORIES PHYSIQUES

De quelle remise à plat des concepts parle-t-on ? Pour apprécier cela il est bon derevenir sur la structure des grandes théories physiques. Nous considérons les théoriescadres évoquées plus haut, que nous pourrions appeler les « métathéories », danslesquelles s’imbriquent des théories plus spécifiques, au sein desquelles on construitdes modèles.

13. Qui vaudra le prix Nobel de physique à Eric A. Cornell, Wolfgang Ketterle et Carl E. Wieman en2001.14. M. Brune, E. Hagley, J. Dreyer, X. Maître, A. Maali, C. Wunderlich, J.-M. Raimond & S. Haroche,Observing the progressive decoherence of the « Meter » in a quantum measurement, Phys. Rev. Lett.77, 4887 (1996).15. Une charge q∗ = qe/3 est mise en évidence au CEA à Saclay : L. Saminadayar, D. C. Glattli, Y. Jin& B. Etienne, « Observation of the e/3 fractionally charged Laughlin quasiparticle », Phys. Rev. Lett.79, 2526 (1997) ; puis, au Weizmann Institute, une charge q∗ = qe/5 : M. Reznikov, R. de Picciotto, T.G. Griffiths, M. Heiblum & V. Umansky, « Observation of quasiparticles with one-fifth of an electron’scharge », Nature 399, 238 (1999).16. G. Nogues, A. Rauschenbeutel, S. Osnaghi, M. Brune, J.-M. Raimond & S. Haroche, « Seeing asingle photon without destroying it », Nature 400, 239 (1999).

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Page 29: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.3. La structure des théories physiques

* Etat d’une particule ponctuelle: ( r, p )

Cadre conceptuel(notions de base, outils)

Postulats(relations entre les notions)M

etat

heor

ie

Théories plus spécifiques

Modèles

EXEMPLE: Mécanique newtonienne

* Théorie de la gravitation newtonienne

* Calcul différentiel

* Principe d’inertie* Action−réaction* Relation fondamentale de la dynamique

* Modèle planétaire* etc

* Cinématique (position, vitesse, accélération,...)

Toute théorie est basée sur un certain nombre de postulats (axiomes) qui doiventobéir à quelques règles transcendantes, telles que la causalité, la conservation del’énergie-impulsion d’un système isolé. D’autres choix axiomatiques conduiraientà des conclusions différentes. C’est donc la confrontation à l’expérience qui permetde valider la pertinence du choix des axiomes. La justesse d’une théorie physiqueest donc moins dans sa construction que dans la validité de son application. Parexemple, reconsidérons la proposition aristotélicienne de décrire la dynamique descorps en mouvement en postulant la proportionnalité entre vitesse et force : λ�v = �F.On sait que cette relation est démentie par l’expérience de la chute des corps (elle aaussi la désagréable propriété de ne pas respecter le principe de relativité). Cela ne larend pas pour autant absurde et il est possible de trouver des situations décrites parcette relation : le cas d’une particule en milieu fortement visqueux.

Notons enfin que le statut d’une théorie peut varier comme le montre l’exemple dela théorie de la gravitation. Alors que dans le cadre newtonien la théorie de la gravi-tation apparaît comme une théorie spécifique décrivant l’interaction entre masses, lathéorie de la relativité générale einsteinienne intègre la gravitation au cadre général.

• La polymorphie des théories physiques

Il est intéressant de noter qu’une même théorie peut apparaître sous plusieurs formes,basées sur des concepts et des postulats différents. Les variantes de la théorie sont tou-tefois strictement équivalentes. Un exemple est fourni par la mécanique classique, quipeut être formulée dans le cadre newtonien basé sur les postulats rappelés ci-dessus.Elle peut également être formulée dans le cadre lagrangien ou encore hamiltonien ;le postulat permettant de déduire les équations du mouvement est alors le principede moindre action de Pierre Louis Moreau de Maupertuis (1698-1759). L’existence©D

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Chapitre 1 • Introduction

de plusieurs formulations équivalentes et complémentaires est une des richesses de laphysique théorique. Elles fournissent différents angles pour attaquer les problèmes.

• Les limites des théories – Le rôle des constantes fondamentales

Comme nous l’avons déjà illustré, le cadre délimite une zone hors de laquelle l’ap-plication de la théorie n’a pas de sens. Par exemple, personne ne remet en cause lessuccès de la théorie newtonienne qui est une excellente approximation, dans le do-maine classique, de théories plus générales. Elle nous apparaît aujourd’hui cernéede plusieurs côtés. En allant vers les hautes énergies, on doit lui substituer la théo-rie de la relativité restreinte einsteinienne (1905). Du côté des champs de gravitationintenses, on doit lui substituer la théorie de la relativité générale (gravitation einstei-nienne, 1916). Enfin, du côté des échelles microscopiques elle cède bien sûr la placeà la mécanique quantique (1927).

Dans la tentative de définition d’un domaine d’application des théories, lesconstantes fondamentales jouent un rôle très important. Rappelons que les constantesfondamentales associées aux quatre théories fondamentales sont : la vitesse de lalumière c (relativité restreinte et électromagnétisme), la constante de gravitation uni-verselle G, la constante de Boltzmann kB (quantum d’entropie) pour la physiquestatistique et enfin la constante de Planck (quantum d’action) � pour la mécaniquequantique.

Les constantes fondamentales permettent de définir des échelles de longueur,d’énergie, etc, qui définissent les frontières entre les théories. Par exemple, la vi-tesse de la lumière c permet de discriminer le domaine non relativiste (faible énergiecinétique Ec � mc2) et le domaine relativiste (Ec � mc2). La définition du domainequantique n’est malheureusement pas aussi simple (cf. par exemple la discussion clô-turant la section 4.2, page 82), mais puisque la constante fondamentale a la dimensiond’une action on peut proposer le critère suivant (cf. exercice 1.1) :

Action � � : classique (1.7)

Action ∼ � : quantique. (1.8)

1.4 APERÇU DES POSTULATS DE LA MÉCANIQUEQUANTIQUE

Cette section donne un aperçu de la structure de la mécanique quantique : les postulatssont rapidement énoncés, regroupés en « concepts » et « postulats ». La pédagogie estici sacrifiée afin de donner une vue d’ensemble. Les postulats seront introduits plus« en douceur » dans les chapitres 3, 4, 5 et 11.

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Page 31: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.4. Aperçu des postulats de la mécanique quantique

1.4.1 Les concepts

Dans la mécanique newtonienne, l’état d’une particule ponctuelle est défini à un ins-tant t par la donnée de sa position �r(t) et de son impulsion �p(t), ce qui détermine sonévolution ultérieure, i.e. sa trajectoire. En revanche, la notion de trajectoire disparaîtdans le cadre quantique et les notions de position et d’impulsion, qui ne peuvent plusêtre déterminées simultanément, prennent un statut assez différent comme nous leverrons. Comment décrire alors l’état d’une particule quantique (un quanton, pouremployer une terminologie chère aux auteurs de [32]) telle qu’un électron ?

• L’état d’une particule est décrit par une fonction d’onde ψ(�r, t) (chapitre 2), unefonction complexe. De manière plus abstraite, l’état est spécifié par la donnée d’un« vecteur d’état », noté |ψ 〉, élément d’un espace de Hilbert H . L’espace des états Hest un espace vectoriel, en général de dimension infinie, construit sur le corps descomplexes C et muni du produit hermitien (produit scalaire), noté 〈ϕ |ψ 〉, satisfaisantla propriété : 〈ϕ |ψ 〉 = 〈ψ |ϕ 〉∗. Il s’exprime en terme des fonctions d’onde corres-pondantes comme :

〈ϕ |ψ 〉 def=

∫d�r ϕ(�r)∗ψ(�r) (1.9)

• Interprétation probabiliste. La fonction d’onde représente une amplitude de den-sité de probabilité. |ψ(�r, t)|2 d�r mesure la probabilité de trouver la particule à l’ins-tant t dans le volume d�r autour de �r. Une conséquence immédiate est la contrainte denormalisation ∫

d�r |ψ(�r, t)|2 = 1 (1.10)

qui exprime que « la probabilité d’être quelque part vaut 1 ».

• Les quantités physiques, les observables, sont représentées par des opérateurslinéaires17 (chapitre 3) agissant dans l’espace des états H (i.e. sur les fonctionsd’onde). Par exemple, l’opérateur de position agit comme la multiplication de lafonction d’onde par �r, tandis que l’opérateur d’impulsion agit comme l’action dugradient sur la fonction d’onde : �p → −i��∇ (une justification sera proposée au débutdu chapitre 3).

17. Cette règle paraît à première vue très abstraite. Cependant on peut essayer d’en donner une jus-tification heuristique en se souvenant que les expériences mettent en évidence une quantification desgrandeurs physiques : par exemple l’existence des raies spectrales d’absorption/émission d’un gaz ato-mique s’interprète comme une quantification de l’énergie, ou l’expérience de Stern et Gerlach démontrela quantification du moment cinétique intrinsèque des atomes d’argent (§ de la section 8.2.3). Or un opé-rateur linéaire est précisément caractérisé par un spectre de valeurs (ses valeurs propres).©D

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Chapitre 1 • Introduction

1.4.2 Les postulats

• Le postulat de symétrisation. Le premier des postulats, qui sera le dernier discutédans le cours (chapitre 11), concerne les propriétés de permutabilité de la fonctiond’onde à N particules identiques. Des particules identiques sont indiscernables. Lafonction d’onde ψ(�r1, · · · ,�rN) doit donc être symétrisée.Si les particules sont des bosons (photons, mésons, etc.), la fonction d’onde doit êtresymétrique sous l’action de la permutation de deux particules :

ψbosons(· · · ,�ri, · · · ,�r j, · · · ) = +ψbosons(· · · ,�r j, · · · ,�ri, · · · ). (1.11)

Si les particules sont des fermions (électrons, protons, neutrons,...), la fonction d’ondeest antisymétrique :

ψfermions(· · · ,�ri, · · · ,�r j, · · · ) = −ψfermions(· · · ,�r j, · · · ,�ri, · · · ). (1.12)

La nature bosonique ou fermionique est déterminée par le moment cinétique intrin-sèque de la particule (son spin).

Les deux autres postulats expriment qu’il y a deux types d’évolution :

• Une évolution stochastique et irréversible : le processus de mesure (chapitre 4).Lorsque l’état d’une particule (microscopique) est sondé par un appareil de mesure(macroscopique), on conçoit que l’état de la particule n’en ressort en général pas in-demne18. Le postulat s’énonce comme suit : considérons une particule dans un état|ψ 〉 et une observable A (par exemple l’impulsion), représentée par un opérateur Aagissant dans l’espace des états (−i��∇ dans le cas de l’impulsion) et dont les valeurspropres et les vecteurs propres sont notés {an, |ϕn 〉}. Le résultat de la mesure deA estaléatoire mais ne peut être que l’une des valeurs propres de l’opérateur A : la mesuredonne la valeur propre an avec probabilité Proba[A� an] = |〈ϕn|ψ〉|2. Après la me-sure l’état du système est |ψfinal 〉 = |ϕn 〉. Pour évoquer cette altération stochastiquede la fonction d’onde, on parle de réduction du paquet d’ondes.

• Une évolution déterministe et réversible (d’un objet de nature probabiliste) : l’évo-lution temporelle (chapitre 5). L’évolution de la fonction d’onde est gouvernée parl’équation de Schrödinger :

i�∂

∂tψ(�r, t) = − �

2

2mΔψ(�r, t) + V(�r, t)ψ(�r, t) (1.13)

où Δdef= ∂2

∂x2 +∂2

∂y2 +∂2

∂z2 est l’opérateur de Laplace. L’équation de Schrödinger joue enmécanique quantique le rôle de la relation fondamentale de la dynamique en méca-nique newtonienne.

18. Des « mesures non destructives » ont pu être réalisées récemment (cf. fin du § sur les repères histo-riques).

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Page 33: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.4. Aperçu des postulats de la mécanique quantique

1.4.3 Difficultés de l’interprétation

« We have made a number of assumptions about the way in which states and dyna-mical variables are to be represented mathematically in the theory. These assump-tions are not, by themselves, laws of nature, but become laws of nature when wemake some further assumptions that provide a physical interpretation of the theory.Such further assumptions must take the form of establishing connexions betweenthe results of observations, on one hand, and the equations of the mathematicalformalism on the other. »

The principles of quantum mechanics, Paul Dirac.

Les quelques règles que nous venons d’énoncer suivent « l’interprétation de Co-penhague », en référence à la synthèse opérée par Bohr en 1927 [16]. Si elles défi-nissent un mode opératoire qui a démontré sa puissance et n’a jusque là pas été mis endéfaut, la question de leur interprétation continue à susciter des débats, plus de 80 ansaprès l’émergence de la mécanique quantique. La difficulté vient de la juxtapositiondes deux types d’évolution. Considérée isolément, l’équation de Schrödinger (1.13)pourrait suggérer que la mécanique quantique est une physique ondulatoire au mêmetitre que l’optique ou l’acoustique développées au xixe siècle, mais pour des ondesde matière. Le point délicat vient de l’interprétation probabiliste, qui implique quel’équation de Schrödinger ne sélectionne pas une « réalité » unique, mais décrit l’évo-lution cohérente de plusieurs éventualités (la superposition de plusieurs « réalités »).C’est la réduction du paquet d’ondes, au moment de la mesure, qui sélectionne demanière stochastique un résultat unique (une des « réalités » possibles) [25, 35]. Nousreviendrons sur ce point au § 4.2.b.

1.4.4 Différentes formulations

Distinguons plusieurs présentations du formalisme quantique :

• Dans celle que nous donnerons, nous analyserons l’évolution temporelle de l’étatquantique. L’analyse spectrale des opérateurs sera centrale (en particulier celui re-présentant l’énergie, qui joue un rôle particulier dans l’évolution). On peut voir cetteprésentation comme la quantification de la formulation hamiltonienne de la méca-nique analytique.

• La formulation d’intégrale de chemin, développée par R. Feynman [18]. Basée surla formulation lagrangienne de la mécanique classique. Elle s’attache plutôt à l’ana-lyse des amplitudes de probabilité de transition.

• Enfin, la théorie quantique des champs (le formalisme de « seconde quantifica-tion ») permet de traiter les problèmes dans lesquels le nombre de particules n’est pasconservé, ou lorsqu’elles se transforment, ce qui est important dans certains domainescomme la physique des particules ou la matière condensée.©D

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Chapitre 1 • Introduction

1.5 PREMIÈRES CONSÉQUENCES IMPORTANTESIl ne s’agit pas d’énumérer dans ce paragraphe toutes les conséquences des règlesapparemment simples que nous venons d’énoncer, ce qui suffirait à nous occuperpendant tout un cycle universitaire, mais plutôt de mentionner quelques points parti-culiers.

1.5.1 La dualité onde-corpuscule

La mécanique quantique ne permet pas seulement de développer une « méca-nique » des particules de matière (électron, proton, neutron,...) mais égalementune théorie de la lumière. Elle abandonne complètement la dichotomie ma-tière=corpuscule/rayonnement=onde : les deux notions corpusculaire et ondulatoirese fondent dans la dualité éponyme décrivant aussi bien matière que lumière.

Comment cette dualité se manifeste-t-elle dans le formalisme ? Rappelons quedeux notions à la base des théories ondulatoires sont celles de fréquence et de lon-gueur d’onde. Une onde plane monochromatique ei�k·�r−iωt est caractérisée par sa pul-sation ω et un vecteur d’onde �k. Or la formulation schrödingerienne montre que lamécanique quantique est une physique ondulatoire... mais pas seulement. Une parti-cule libre est caractérisée par son énergie E et son impulsion �p. La correspondanceentre les concepts corpusculaires et ondulatoires est assurée par les deux importantesrelations suivantes :

• La relation de Planck-Einstein

E = �ω (1.14)

ayant permis d’expliquer l’effet photoélectrique, l’existence de raies spectrales dansles spectres atomiques, etc.

• La relation L. de Broglie

�p = ��k (1.15)

rendant compte de l’effet Compton et des expériences de Davisson et Germer dediffraction d’électrons, etc.

• Onde plane

Une onde plane φ�k(�r, t) = A ei�k·�r−iωt décrit donc l’état quantique pour une particule

libre d’impulsion �p = ��k et d’énergie E = �ω.

Exercice 1.2 (F) Écrire la relation de dispersion (relation entre ω et �k) pour uneparticule non relativiste de masse m, puis pour une particule relativiste.

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Page 35: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.5. Premières conséquences importantes

1.5.2 Le principe de superposition

Une conséquence immédiate du premier des postulats (l’état quantique est décritpar une fonction d’onde, i.e. un élément d’un espace vectoriel) : il est possible deconstruire des combinaisons linéaires de tels états. Soient deux états normalisés ψ1(x)et ψ2(x), il est légitime de considérer

ψ(x) = αψ1(x) + βψ2(x) où α, β ∈ C. (1.16)

Discutons maintenant l’utilité de ce concept.

a) Expérience d’interférences d’Young

Le dispositif des fentes d’Young est une des expériences les plus simples permettantde mettre en évidence les phénomènes d’interférences. Réalisée au tout début du xixe

siècle par Thomas Young (1773-1829) pour démontrer le caractère ondulatoire de lalumière, l’expérience peut être répétée pour tous types d’ondes. Avec des particulesde matière dans le domaine quantique, l’expérience permet de mettre en lumière plu-sieurs questions fondamentales : le caractère ondulatoire, l’interprétation probabilisteet la dualité onde-corpuscule.

Figure 1.4– Expérienced’interférences d’Young.

détecteurD

(2)

(1)

particulesS

Le principe de superposition nous permet d’analyser l’expérience, schématisée surla figure 1.4. Un faisceau de particules, collimaté par un trou jouant le rôle de source(« S »), est envoyé sur un écran percé de deux trous. Un détecteur de particules (« D »)pouvant être déplacé verticalement compte les particules à la sortie du dispositif. Lesparticules suivent soit le chemin (1), associé à l’amplitude de probabilité ψ1(S → D),soit le chemin (2) associé à l’amplitude ψ2(S → D). Si les particules, d’impulsionp = �k = 2π�/λ, se déplacent librement (entre les fentes) les amplitudes sont donnéespar ψ1(S → D) ∝ eik�1 et ψ2(S → D) ∝ eik�2 (ondes planes), où �1 et �2 sont leslongueurs des chemins. Si aucun mécanisme ne sélectionne une des deux trajectoires(comme sur la partie gauche de la figure 1.5), l’amplitude de probabilité au niveau dudétecteur est une superposition des deux amplitudes. La probabilité correspondante,

Proba[S → D] =12|ψ1(S → D) + ψ2(S → D)|2 ∝ cos2[π(�1 − �2)/λ], (1.17)

©D

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Page 36: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 1 • Introduction

présente des franges d’interférences lorsque le détecteur est déplacé et que �1 − �2

varie. L’existence d’une figure d’interférences repose donc crucialement sur le faitque le principe de superposition s’applique aux amplitudes de probabilité et non auxprobabilités (figure 1.5).

parti

cule

s

x

P(x)+

parti

cule

s

x

P(x) � (x)

x

P

parti

cule

s

Figure 1.5– Principe de superposition.Probabilité P(x) d’observer des particules sur l’écran dans trois situations. Le principe desuperposition ne s’applique pas aux probabilités (ce qu’on aurait pu attendre classique-ment) mais aux amplitudes de probabilités d’où la figure d’interférences.

Jusque là, l’analyse ressemble banalement à l’expérience d’Young pour une ondeclassique. L’expérience devient intéressante lorsque le flux de particules est suffisam-ment faible pour détecter les particules une à une (aspect corpusculaire). Si on attendqu’un grand nombre de particules soient passées, les impacts apparaissant aléatoire-ment en différents endroits s’accumulent préférentiellement dans certaines régions,faisant ainsi apparaître la figure d’interférences (aspect ondulatoire). De telles ex-périences d’interférences ont été réalisées pour de nombreux types de particules :photons, électrons, neutrons (figure 1.6), atomes, molécules. La figure 1.6 montrele résultat récent de la très spectaculaire expérience d’interférences réalisée avec unfaible flux (au plus 4 molécules détectées par seconde) de molécules de fullerène19.

m)(μ

# de

neu

tron

s (/

125m

in.)

400 500 600 700 800

4000

3000

2000

1000

0

Position du détecteur0 100 200 300

400

150 100 50 0 50 100 150Position du détecteur μm)(

# de

mol

écul

es (

/100

s.)

100

200

300

0

Figure 1.6– Interférences de particules.

À gauche : Expérience d’Young réalisée avec des neutrons de longueur d’onde λ � 2 nm(i.e. vitesse v � 200 m.s−1). Données tirées de : A. Zeilinger, Rev. Mod. Phys. 60, 1067(1988). À droite : Diffraction de molécules de fullerène (C60) par un réseau de fentes.Longueur d’onde : λ � 4 pm (i.e. v � 130 m.s−1). Données tirées de O. Nairz, M. Arndt &A. Zeilinger, Am. J. Phys. 71, 319 (2003).

19. Articles de revue : O. Nairz, M. Arndt & A. Zeilinger, « Quantum interference experiments withlarge molecules », Am. J. Phys. 71, 319 (2003). A. Cronin, J. Schmiedmayer & D. E. Pritchard, « Opticsand interferometry with atoms and molecules », Rev. Mod. Phys. 81, 1051 (2009).

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Page 37: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.5. Premières conséquences importantes

b) Double puits de potentiel

Une autre conséquence surprenante du principe de superposition est fournie parl’exemple d’une particule dans un double puits de potentiel. Donnons nous unefonction d’onde ψG(x), respectivement ψD(x), décrivant la particule dans le puits degauche, respectivement de droite (figure 1.7). Nous pouvons concevoir une combinai-son linéaire de ces deux états, qui décrit donc une situation où la particule est à la foisdans le puits droit et dans le puits gauche. Nous verrons au chapitre 5 que lorsque lesdeux puits sont symétriques, l’état de plus basse énergie (état fondamental) est donnépar ψ0(x) = 1√

2

[ψG(x) + ψD(x)

](une telle situation se produit par exemple dans la

molécule d’ammoniac NH3, cf. exercice 6.2 page 104).

V(x)x)ψG(

x

V(x)

x

(x)ψD

V(x)

x

(x (x)+[ ]12

)ψGψD

Figure 1.7– Principe de superposition.Une particule piégée dans un double puits de potentiel. On a dessiné l’allure de la fonctiond’onde ψG (x) [resp. ψD(x)] décrivant l’état « particule dans le puits gauche » (resp. droit).Le principe de superposition autorise à considérer une fonction d’onde décrivant « laparticule à la fois dans le puits gauche et le puits droit ».

1.5.3 Particule libre dans une boîte : quantification

L’étude d’une particule confinée dans une région finie de l’espace est ce qu’on appelleun problème « d’états liés » (par exemple l’étude du mouvement d’une planète autourdu soleil ou d’un électron autour du proton). Quelles sont les conséquences d’untraitement quantique ? Pour répondre à cette question nous étudierons une situationunidimensionnelle. Nous considérons une particule libre astreinte à se déplacer dansl’intervalle [0, a] de R. Cette situation est réalisée pour un potentiel nul dans [0, a]et infini hors de l’intervalle. Classiquement la particule (de masse m) d’énergie Eeffectue des aller-retours dans le puits, à vitesse constante v = ±

√2E/m. Sa fonction

d’onde est donc soit une onde plane eikx décrivant une particule libre se déplaçantdans le sens des x > 0, d’impulsion p = mv = +�k =

√2mE, soit une onde plane

e−ikx décrivant une particule allant dans le sens opposé, d’impulsion p = −�k.

Écrivons (principe de superposition)

ϕ(x) = A eikx + B e−ikx. (1.18)©D

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Page 38: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 1 • Introduction

L’énergie de la particule est E = �2k2

2m . Hors de l’intervalle [0, a], le potentiel V = ∞impose à la fonction d’onde de s’annuler ϕ(x) = 0 (probabilité nulle de trouver laparticule hors de l’intervalle [0, a]).• Raccordement et équation de quantification. Nous raccordons ϕ(x) = 0 pour x ∈] −∞, 0] ∪ [a,+∞[ avec (1.18). Il faut donc imposer

ϕ(0) = ϕ(a) = 0. (1.19)

Nous obtenons deux relations :

A + B = 0 & A eika + B e−ika = 0. (1.20)

Ce système n’admet de solution non triviale que lorsque le déterminant est nul :∣∣∣∣∣∣ 1 1eika e−ika

∣∣∣∣∣∣ = 0 ⇒ sin(ka) = 0 (1.21)

Cette condition nous montre que les fonctions de la forme (1.18) ne sont solutionsdu problème que si k est solution de (1.21). Cette équation est appelée « équation dequantification » : seules certaines valeurs discrètes de k (et donc de E) correspondentà des solutions physiques :

kn = nπ

a, n ∈ N∗ et donc En = n2 �

2π2

2ma2(1.22)

alors que classiquement, répétons-le, toutes les valeurs de E ∈ R+ sont permises.Ce phénomène n’est pas fondamentalement nouveau : le lecteur aura probablement

déjà rencontré le phénomène analogue dans l’étude des modes propres de vibrationsde la corde vibrante pincée à ses deux extrémités.

• Les fonctions d’onde. En revenant au système (1.20) pour k = kn on obtient lescoefficients de la fonction d’onde (comme l’équation de Schrödinger est linéaire, ilreste toujours au moins un coefficient arbitraire, ce qui correspond au choix de laconstante multiplicative globale). Dernière étape importante : nous normalisons lafonction d’onde, afin qu’elle satisfasse (1.10) :

ϕn(x) =

√2a

sin(nπx

a

)(1.23)

Quelles idées générales peut-on retirer ? Premièrement : un problème d’états liés estcaractérisé par un spectre discret de valeurs de l’énergie : chaque valeur discrète del’énergie correspond à un état stationnaire. Cela explique l’existence des raies spec-trales atomiques, correspondant à des transitions entre différents états quantiques.

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Page 39: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.5. Premières conséquences importantes

Deuxièmement : l’énergie ne peut pas être inférieure à une valeur minimale, l’énergiede l’état de plus basse énergie, appelé état fondamental. Autrement dit, la particuleconfinée dans une région de dimension a acquiert au moins une énergie (cinétique,puisque V = 0) de l’ordre de

Ec ��2

ma2. (1.24)

Donnons des ordres de grandeur : (i) pour une masse m = 1kg confinée dans a = 1m,on trouve �2

ma2 � 6×10−50 eV. (ii) Pour un électron confiné dans a = 1 Å, �2

ma2 � 6 eV.

1.5.4 Spectre quantifié vs. continuum

• États liés - quantification. Nous venons de voir que l’étude des états liés conduità une quantification des différentes quantités physiques : l’impulsion, l’énergie...

• États de diffusion - continuum. Une autre situation physique courante est celleoù la particule n’est pas confinée dans une région finie de l’espace par le potentiel :les états quantiques décrivant cette situation sont délocalisés dans tout l’espace. Ilssont appelés « états de diffusion ». Nous verrons que dans ce cas l’énergie n’est pasquantifiée : de tels états existent pour des énergies variant continûment dans certainsintervalles de R. Un exemple est le problème libre : les solutions de l’équation deSchrödinger libre (éq. (1.13) pour V = 0) sur R sont les ondes planes ϕk(x) = A eikx

d’énergie Ek =�2k2

2m . L’onde plane est indicée par un paramètre continu k ∈ R. Lespectre des énergies est bien un spectre continu : E ∈ R+.

À retenir

Dualité onde-corpuscule : les relations de Planck-Einstein et de Broglie (1.14) & (1.15).

Principe de superposition.

Le problème du puits infini.

Pour en savoir plus

Un petit texte très agréable présentant les concepts quantiques (sans formule ni calcul) :[35].

Un excellent ouvrage introductif est [32].

Sur les aspects historiques, on pourra consulter : l’ouvrage [3], qui contient une fouled’informations et propose une présentation détaillée et très pédagogique des expérienceshistoriques, quelques textes de certains des principaux acteurs [7, 12, 14, 16]. Une excel-lente présentation synthétique de l’émergence des idées quantiques est l’ouvrage [36],principalement tourné vers la question de l’interprétation de la mécanique quantique.Un livre plus spécialisé est [21]. De nombreuses informations sont disponibles sur lesite internet suivant : http://nobelprize.org.

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Page 40: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 1 • Introduction

ANNEXE 1.A : QUELQUES NOTIONS DE MÉCANIQUEANALYTIQUE

Nous faisons quelques rappels de mécanique analytique qui pourront être utiles pourla suite.

• Action

On postule l’existence d’une fonctionnelle20 de la trajectoire x(t), t ∈ [t1, t2], appe-lée action, stationnaire sur les trajectoires physiques. C’est le principe de moindreaction (Pierre Louis Moreau de Maupertuis (1698-1759) et Joseph Louis, comte deLagrange (1736-1813), né à Turin et appelé Giuseppe Lodovico Lagrangia de l’autrecôté des Alpes).

Dans le cas libre, le principe d’invariance galiléenne conduit à S [x] ∝∫ t2

t1dt x(t)2.

En présence d’un potentiel V(x) l’action est donnée par

S [x] =∫ t2

t1dt

[12

mx(t)2 − V(x(t))

]. (1.25)

On vérifie que parmi toutes les trajectoires partant de x(t1) = x1 et arrivant enx(t2) = x2, celles qui rendent stationnaire l’action sont les solutions de la relationfondamentale de la dynamique. La mécanique classique peut être construite de deuxmanières équivalentes : soit en postulant la proportionnalité de l’accélération et de laforce (Newton), soit à partir du principe de moindre action (Maupertuis).

Vérifions cette assertion : notons xc(t) la solution minimisant l’action et posonsδx(t) = x(t) − xc(t). La variation de l’action δS

def= S [x] − S [xc] est calculée sans

peine :

δS =[mxc(t)δx(t)

]t2t1 −

∫ t2

t1dt δx(t)

[mxc(t) + V ′(xc(t))

](1.26)

Parmi toutes les solutions issues et arrivant en deux points donnés, i.e. ∀ δx(t) tels queδx(t1) = δx(t2) = 0, l’action est stationnaire pour xc solution de mxc(t) = −V ′(xc(t)).On a bien retrouvé la relation fondamentale de la dynamique pour un champ de forcedérivant du potentiel V(x).

• Lagrangien

On introduit le lagrangien L(x, x), fonction locale des variables cinématiques (iciL = m

2 x2 − V(x)) permettant d’exprimer l’action comme S =∫ t2

t1dt L(x(t), x(t)).

20. Une fonctionnelle F[ f (x)] est une application ayant pour entrée une fonction f (x) et pour sortie unnombre. Par exemple F[ f (x)] =

∫dx f (x)2.

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Page 41: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

1.5. Premières conséquences importantes

Le principe de moindre action conduit donc à l’équation du mouvement (équationd’Euler-Lagrange) :

δSδx(t)

=∂L∂x

− ddt

(∂L∂x

)= 0 (1.27)

où δSδx(t) est la dérivée fonctionnelle, définie par S [x + δx] = S [x] +

∫dt δx(t) δS

δx(t) +

O(δx2).

• Énergie et impulsion

Nous considérons une transformation de la coordonnée temporelle t → t′ = t + δt etde la trajectoire x(t) → x′(t′) = x(t) + δx(t). Nous déduisons la variation x à tempscoïncidents x′(t) � x(t)+δx(t)−δt x(t). Nous pouvons calculer la variation de l’action

correspondant à la transformation, δS =∫ t′2

t′1dt′ L(x′(t′), x′(t′)) −

∫ t2t1

dt L(x(t), x(t)) :

δS = δt

[L − x

∂L∂x

]t2

t1

+

[δx∂L∂x

]t2

t1

+

∫ t2

t1dt

[∂L∂x

− ddt∂L∂x

]δx(t) (1.28)

Le troisième terme s’annule si nous considérons la variation de l’action pour destrajectoires physiques solutions de l’équation d’Euler-Lagrange.

Si nous considérons une transformation δt � 0 et δx(t) = 0, la variation d’action estdonnée par δS = δt

[L − x∂L

∂x

]t2t1

. Nous obtenons l’expression de la quantité conservéelors d’une translation temporelle (l’énergie) :

H = x∂L∂x

− L. (1.29)

Lorsque L = m2 x2−V(x) on retrouve l’expression bien connue de l’énergie mécanique

H = m2 x2 + V(x).

Si nous considérons maintenant une transformation δt = 0 et δx = cste � 0, lavariation d’action est δS =

[δx∂L

∂x

]t2t1 . Dans une situation respectant l’invariance par

translation spatiale, l’action est conservée lors de la transformation. La constante dumouvement est le moment conjugué (l’impulsion) :

p =∂L∂x

. (1.30)

Nous venons ainsi de relier la conservation de l’énergie et l’impulsion à deux pro-priétés géométriques de l’espace temps : l’invariance par translation d’espace temps(théorème de Nœther).

• Équations de Hamilton

On introduit la fonction de Hamilton (le hamiltonien) des variables conjuguées x etp : H(x, p)

def= x∂L

∂x − L. Les équations du mouvement prennent la forme

x =∂H∂p

et p = −∂H∂x

. (1.31)

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Page 42: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 1 • Introduction

E

V(x)

bax

Figure 1.8– Potentiel confinant.

a et b sont les points tournants.

• Période du mouvement dans un potentiel unidimensionnel

Une fois la trajectoire classique allant de x(t1) = x1 à x(t2) = x2 déterminée, nouspouvons calculer son action, qui est donc une fonction des coordonnées de départet d’arrivée, que nous notons S cl(x2, t2|x1, t1)

def= S [xcl]. Nous exprimons maintenant

l’action, non pas en fonction de la différence de temps t2 − t1 = t mais en fonction del’énergie E de la trajectoire. Nous introduisons :

S(x2|x1; E) = S cl(x2, t|x1, 0) + E t. (1.32)

En écrivant que S cl =∫ t

0 dt′[m

2 x(t′)2−V(x(t′))]

et Et =∫ t

0 dt′[m

2 x(t′)2+V(x(t′))]

nous

obtenons S(x2|x1; E) =∫ t

0dt′ mx2 soit, en supposant que x2 > x1 et que la trajectoire

ne possède pas de point de rebroussement,

S(x2|x1; E) =∫ x2

x1

dx p(x) où p(x)def=

√2m[E − V(x)] (1.33)

Exercice 1.3 (MF) On considère une particule d’énergie E piégée par potentielconfinant (par exemple sur la figure 1.8). On note a et b > a les deux points tour-nants. Montrer que la période des oscillations est donnée par

Tcl(E) = 2∫ b

a

dx√2m[E − V(x)]

. (1.34)

Donner la relation entre cette période et l’action S(b|a; E). Appliquer le résul-tat (1.34) dans le cas d’un oscillateur harmonique.

Pour en savoir plus

On pourra trouver une présentation succincte et claire dans l’ouvrage [26].

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Page 43: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

ÉQUATION D’ONDEDE SCHRÖDINGER 2

2.1 ÉQUATION D’ONDE – PREMIÈRESAPPLICATIONS

Nous étudions l’équation de Schrödinger, gouvernant l’évolution de la fonctiond’onde pour une particule (non relativiste) de masse m soumise à un potentiel in-dépendant du temps V(x). Pour simplifier nous considérons essentiellement le casunidimensionnel.

2.1.1 Construction de l’équation d’onde

En 1926, guidé par les idées de L. de Broglie, Schrödinger a proposé une équa-tion d’onde afin de rendre compte des aspects ondulatoires de la matière. Commentconstruire une équation d’onde ? Celle-ci doit être linéaire pour permettre un prin-cipe de superposition. Nous devons donc chercher une relation linéaire entre les

dérivées partielles de la fonction d’onde ∂ψ∂t , ∂

2ψ∂t2

,..., ∂ψ∂x , ∂2ψ∂x2 ,...

• Principe de correspondance

Un fil conducteur est l’existence d’un « principe de correspondance » (Bohr) entrela théorie classique et la théorie quantique. En particulier celui-ci fait correspondre

à la relation entre énergie et impulsion classique E = p2

2m , une relation de dispersionquantique.

• Problème libre et ondes planes

Considérons tout d’abord le problème libre. Dans ce cas, l’équation d’onde doit ad-mettre des solutions de type onde plane, ψ(x, t) = ψ(k) eikx−iωt , décrivant un état dela particule d’énergie E = �ω et d’impulsion p = �k. Nous souhaitons décrire desparticules de masse m non relativistes. D’après le principe de correspondance, l’équa-

tion doit conduire à la relation de dispersion ω = �k2

2m (c’est-à-dire E = p2

2m ) ; autrementdit, lorsqu’on injecte dans l’équation d’onde l’onde plane ψ(x, t) = ψ(k) eikx−iωt , ondoit aboutir à (

ω − �k2

2m

)ψ(k) = 0. (2.1)

La prescription est donc simplement de procéder à la substitution ω −→ i ∂∂t etk −→ −i ∂∂x dans la relation de dispersion. L’équation d’onde doit finalement être©D

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Page 44: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

i∂

∂tψ(x, t) = − �

2m∂2

∂x2ψ(x, t). (2.2)

Cette construction ne donne toutefois aucune indication sur le sens que l’on doitattribuer à l’onde ψ(x, t). Nous rappelons que la fonction d’onde s’interprète commel’amplitude de densité de probabilité pour trouver la particule en x à l’instant t.L’équation de Schrödinger a la forme d’une équation de diffusion (cf. exercice 5.3sur le paquet d’ondes gaussien). Contrairement aux équations d’onde de la physiqueclassique (optique, acoustique,...), c’est une équation complexe ; la fonction d’ondeψ(x, t) est donc elle aussi en général complexe.

• Équation de Schrödinger dépendant du temps

Généralisons cette construction en présence d’un potentiel. Partons de l’expression

de l’énergie mécanique E = �p 2

2m +V(�r, t) et procédons aux substitutions E −→ i� ∂∂t et

p −→ −i��∇. Nous obtenons l’équation (1.13) :

i�∂

∂tψ(�r, t) =

(− �

2

2mΔ + V(�r, t)

)ψ(�r, t) (2.3)

qui décrit la dynamique quantique d’une particule non relativiste de masse m soumiseà un potentiel V(�r, t).

Remarque : L’équation de Schrödinger n’a pas été démontrée

Dans le raisonnement qui précède, la nature « ondulatoire » de l’objet mathématiquedécrivant l’état du système (la fonction d’onde) nous a conduit à rechercher une équa-tion d’onde. Nous avons utilisé d’une part le principe de correspondance (Bohr), quiassure une transition de la mécanique quantique à la mécanique newtonienne, etd’autre part la dualité onde-corpuscule (les relations de Planck-Einstein et de L. deBroglie). Pour le lecteur qui ne sera pas satisfait par ce raisonnement rappelons quecette démarche ne constitue pas une démonstration ; elle visait à formuler un pos-tulat d’évolution, c’est-à-dire un axiome « raisonnable » déduit de certains principesgénéraux (comme l’exigence d’invariance de la théorie sous les translations d’espace-temps et les changements de référentiels inertiels, i.e. les transformations du groupede Galilée qui seront étudiées dans la section 6.3.1 et le problème 6.1 page 113).L’amélioration du raisonnement aboutissant à l’équation de Schrödinger (2.3) estdonc à rechercher dans un choix d’autres principes, plus fondamentaux que ceuxqui nous ont servi de point de départ (cf. chapitre 6).

34

Page 45: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.1. Équation d’onde – Premières applications

2.1.2 Densité et courant de probabilité

Nous avons vu que si la particule est dans un état quantique décrit par une fonctiond’onde ψ(�r, t), le sens du module carré de cette dernière est celui d’une densité deprobabilité : ρψ(�r, t) = |ψ(�r, t)|2.

À toute densité ρψ il est naturel d’associer une densité de courant de probabilité�Jψ afin de caractériser le flot de la probabilité. Les deux quantités doivent satisfaireune équation de conservation

∂tρψ(�r, t) + �∇ · �Jψ(�r, t) = 0, (2.4)

écriture locale de la conservation de la probabilité (ou de la conservation du nombrede particules). La question est maintenant d’exprimer la densité de courant en fonc-tion de ψ(�r, t). Pour cela on calcule ∂ρψ/∂t = ∂

∂tψ∗ψ en utilisant l’équation de Schrö-

dinger. On extrait :

�Jψ =�

2mi

(ψ∗�∇ψ − ψ�∇ψ∗

)=�

mIm

(ψ∗�∇ψ

)(2.5)

Remarquons que la densité de courant fait apparaître l’opérateur de vitesse, �pm →

�mi�∇, « sandwiché » entre la fonction d’onde et sa conjuguée.

• Onde plane

L’onde plane, décrivant une particule d’impulsion �p = �k et d’énergie E = �2�k 2

2m ,

φ�k(�r, t) = A exp i(�k · �r − ��k2

2mt), (2.6)

est associée à la densité de probabilité uniforme ρφ = |A|2 et à la densité de courant

de probabilité �Jφ = ��km |A|

2. Cette dernière relation a la forme d’un produit entre la

vitesse de la particule �v = ��k/m et la densité : �Jφ = ρφ�v.

2.1.3 V (�r , t)→ V (�r) – Équation de Schrödinger stationnaire

Nous résolvons l’équation de Schrödinger pour des potentiels indépendants dutemps dans quelques situations particulières dont nous tâcherons de dégager quelquesidées générales.

Pour un problème stationnaire, l’énergie est conservée, ce qui nous suggère derechercher une solution associée à une énergie E (c’est-à-dire une fréquence ω = E/�)bien déterminée, i.e. sous une forme séparable (espace/temps)

ψstatio.(�r, t) = ϕ(�r) e−iEt/�. (2.7)©D

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Page 46: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

Un tel état est appelé « état stationnaire ». En effet, la densité de probabilité|ψstatio.(�r, t)|2 = |ϕ(�r)|2 est alors indépendante du temps (d’où la dénomination d’étatstationnaire).

• Conservation de la probabilité pour un état stationnaire

Puisque la densité ρψstatio. = |ψstatio.(�r, t)|2 = |ϕ(�r)|2 est indépendante du temps, l’équa-tion de conservation prend la forme

�∇ · �Jψstatio. = 0. (2.8)

Dans le cas unidimensionnel Jψstatio. = cste

• Équation de Schrödinger stationnaire

La partie spatiale de la fonction d’onde satisfait l’équation différentielle Eϕ(�r) =( − �2

2mΔ + V(�r))ϕ(�r), que nous écrivons dans le cas unidimensionnel :

(− �

2

2md2

dx2+ V(x)

)ϕ(x) = E ϕ(x) (2.9)

Une fois connues l’ensemble des solutions stationnaires, i.e. l’ensemble des couples{En, ϕn(x)} que nous supposons ici pouvoir être indicés par un entier n, nous pou-vons écrire la solution générale de l’équation de Schrödinger temporelle comme unecombinaison linéaire :

ψ(x, t) =∑

n

cn ϕn(x) e−iEnt/� (2.10)

où les coefficients cn dépendent des conditions initiales. Nous reviendrons plus endétail sur ce point au chapitre 5. Pour l’instant nous nous concentrons sur les solutionsstationnaires.

Pour terminer, notons que la notion d’état stationnaire n’est pas nouvelle. Ellea due être abordée dans les cours de physique ondulatoire, par exemple lorsqu’onétudie les modes propres de vibration d’une corde vibrante, ou les modes transversesd’un guide d’onde.

Exercice 2.1 (MF) Continuité de la solution de l’équation de Schrödinger

Soit K(x) une fonction connue, finie sur un intervalle [a, b] (mais pas nécessairementcontinue).

a) Question préliminaire. Montrer que la solution de l’équation différentielle y′(x)+K(x)y(x) = 0 est continue sur [a, b].

36

Page 47: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.1. Équation d’onde – Premières applications

b) Soit ϕ(x) la solution de l’équation de Schrödinger stationnaire (2.9). Montrer queϕ(x) et ϕ′(x) sont continues sur [a, b].

c) On note Cn([a, b]) l’ensemble des fonctions dérivables n fois sur l’intervalle [a, b](C0 correspond aux fonctions continues mais non dérivables). Montrer que siV(x) ∈ Cn([a, b]) alors ϕ(x) ∈ Cn+2([a, b]).

2.1.4 Potentiels constants par morceaux (d = 1)

L’équation de Schrödinger stationnaire peut être résolue analytiquement pour cer-taines familles de potentiels (on dit alors que le problème est intégrable) : le potentielharmonique que nous étudierons au chapitre 7, le potentiel de Pöschl-Teller, le po-tentiel de Morse (§23 de [27]), etc.

Une classe de potentiels pour lesquels l’équation de Schrödinger est facile à ré-soudre (du moins en principe) est le cas des potentiels constants par morceaux. Cecas constitue un système modèle qui nous permettra de dégager quelques idées gé-nérales sur la phénoménologie sous-jacente à l’équation de Schrödinger stationnaire.Au-delà du cas d’école, ils peuvent nous permettre d’approcher des potentiels conti-nus réalistes. Plus intéressant, notons qu’il est aujourd’hui possible de fabriquer desstructures semi-conductrices permettant de réaliser en pratique de tels potentiels pourles électrons.

Nous expliquons maintenant le principe de la résolution de l’équation de Schrödin-ger lorsque V(x) est constant par morceaux, puis l’illustrons sur quelques cas simples.D’autres exemples sont proposés dans les exercices.

Considérons un intervalle [a, b] dans lequel V(x) = V0.

Si classiquement la particule est autorisée à se mouvoir dans l’intervalle, pourE > V0, l’équation de Schrödinger admet une solution de type onde plane (propa-gative) :

d2

dx2ϕ(x) = −k2ϕ(x)

(avec

�2k2

2mdef= E − V0

)⇒ ϕ(x) = A eikx + B e−ikx (2.11)

En revanche, si l’intervalle est interdit d’accès classiquement, pour E < V0, lasolution est évanescente :

d2

dx2ϕ(x) = +q2ϕ(x)

(avec

�2q2

2mdef= V0 − E

)⇒ ϕ(x) = A eqx + B e−qx (2.12)

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Page 48: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

a) Stratégie générale : quantification ou continuum ?

Pour des potentiels constants par morceaux, la stratégie générale est la suivante :

• Étape 1 : Résolution de l’équation différentielle dans chaque intervalle où V(x) =cste. Les solutions sont de la forme (2.11) ou (2.12)

• Étape 2 : Normalisabilité de la fonction d’onde. On s’assure que tous les termespermettent la normalisation de la fonction d’onde.

• Étape 3 : Raccordement. On assure la continuité de la fonction d’onde ϕ(x) (auxinterfaces entre intervalles où elle n’est pas encore assurée).Si le potentiel est fini, on impose la continuité de la dérivée de la fonction d’ondeϕ′(x) (cf. exercice 2.1).

Les problèmes avec potentiels constants par morceaux sont donc simples à ré-soudre dans le sens où nous remplaçons la résolution d’une équation différentielle dusecond ordre par un système d’équations algébriques. Même lorsque le nombre d’in-tervalles est grand, la méthode est plus simple qu’il n’y paraît car seuls sont couplésles coefficients associés à des intervalles voisins. On peut introduire un formalismede matrices de transfert qui utilise cette remarque (cf. exercice 5.2).

• Étape 4 : Pour un problème d’états liés : équation de quantification. Dans un pro-blème d’état(s) lié(s), on a obtenu autant d’équations (linéaires) qu’il y a de coef-ficients. Les équations peuvent être mises sous la forme d’un système d’équationsalgébriques : M(E)C = 0 où C est un vecteur regroupant les coefficients et M(E)une matrice (dépendant de l’énergie et des paramètres du problème). L’équation deSchrödinger n’admet donc de solution non triviale que pour des valeurs discrètes del’énergie, solutions de detM(E) = 0. Cette équation est appelée équation de quanti-fication.

• Étape 4’ : Pour un problème de diffusion. Le nombre de coefficients est supérieurau nombre d’équations. ∀ E on peut construire une solution de l’équation de Schrö-dinger. Le spectre des énergies est continu.

• Étape 5 : Les fonctions d’onde. Enfin l’ultime étape consiste à trouver les coef-ficients lorsque l’énergie appartient au spectre des énergies, puis à normaliser lesfonctions d’onde.

Nous mettons maintenant en pratique la méthode sur un problème d’états liés etun problème de diffusion.

b) Illustration n◦1 : un problème d’états liés

Nous considérons le potentiel représenté sur la figure 2.1 : V(x) = ∞ pour x < −a (cequi définit une région interdite d’accès), V(x) = −V0 pour −a < x < 0 et V(x) = 0pour x > a.

38

Page 49: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.1. Équation d’onde – Premières applications

Lorsque son énergie est inférieure à la hauteur de la barrière, −V0 < E < 0, lepotentiel confine la particule. Nous écrivons la fonction d’onde dans les différentesrégions de l’espace (étape 1) :

ϕ(x) = 0 pour x < −a (2.13)

= A e+iKx + B e−iKx pour − a < x < 0 (2.14)

= C e−qx +���D eqx pour x > 0 (2.15)

où nous avons posé E = �2

2m (K2 − k20) = − �

2q2

2m et V0 =�2k2

02m ; insistons sur le fait

que K et q ne sont pas des paramètres indépendants mais permettent de reparamétrerl’énergie E de façon commode. Nous avons éliminé le terme eqx divergeant à l’infini(étape 2).

0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0

�6

�4

�2

0

2

Ka�Π

K1 K2

Figure 2.1– Spectre discret et continuum.Le potentiel confine la particule d’énergie −V0 < E < 0 ; l’énergie est quantifiée (la résolu-tion graphique de l’équation de quantification (2.20), sur la figure de droite, donne deuxsolutions) ; l’allure des deux fonctions d’onde est représentée. Pour E > 0, la particule estlibre (sur R+) et l’énergie n’est pas quantifiée.

On raccorde les différentes solutions entre elles (étape 3). En x = −a le potentieldevient infini. On impose seulement la continuité

A e−iKa + B eiKa = 0. (2.16)

En x = 0 le potentiel présente une discontinuité mais reste cependant borné. Onimpose la continuité de la fonction d’onde et de sa dérivée :

A + B = C (2.17)

iK(A − B) = −qC. (2.18)

Les conditions de raccordement nous ont donc fourni 3 équations pour les 3 coeffi-cients A, B et C, que nous écrivons sous la forme matricielle pour illustrer la méthode©D

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Page 50: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

générale décrite ci-dessus : ⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝e−iKa eiKa 0

1 1 −1iK −iK q

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠︸�������������︷︷�������������︸M(E)

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝ABC

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠︸︷︷︸C

= 0. (2.19)

Le système n’admet de solution non triviale (i.e. différente de A = B = C = 0) quesi le déterminant de la matrice est nul. Puisque la matrice est fonction de l’énergie E,à travers K et q, et des paramètres du problème, V0 et a, la condition d’existenced’une solution normalisable se traduit donc par une équation sur l’énergie, i.e. par laquantification de celle-ci.

Maintenant que nous avons exposé l’idée générale, nous pouvons encore simpli-fier le calcul de la manière suivante. Reprenons : sur [−a, 0] nous pouvons écrireϕ(x) = A sin K(x + a) de manière à décrire l’annulation de la fonction d’onde enx = −a. Le raccordement avec ϕ(x) = C e−qx conduit en principe à deux équations.Toutefois l’équation de Schrödinger étant linéaire, elle ne nous donne aucune in-formation sur la constante multiplicative globale, qui est obtenue a posteriori parnormalisation (étape 5). Cette remarque nous permet d’éliminer une variable en im-posant la continuité de la dérivée logarithmique de la fonction d’onde : ϕ′(x) et ϕ(x)continues ⇒ [ln |ϕ|]′ continue. Nous pouvons retenir qu’il est toujours plus simpled’imposer la continuité de [ln |ϕ(x)|]′.

Dans le cas présent les dérivées logarithmiques sont [ln |ϕ(x)|]′ = K cotg K(x +a) pour −a < x < 0 et [ln |ϕ(x)|]′ = −q pour x > 0. Nous obtenons directementl’équation de quantification

K cotg Ka = −q = −√

k20 − K2. (2.20)

On pourra vérifier que l’annulation du déterminant de la matrice (2.19) conduit bienà cette équation, par un calcul plus fastidieux. Finalement nous pouvons résoudre enprincipe l’équation de quantification, au moins graphiquement (figure 2.1).

Nous pouvons facilement dénombrer les solutions de l’équation. Lorsque k0a < π2

l’équation n’admet pas de solution, i.e. l’équation de Schrödinger ne possède pasd’état lié lorsque le puits est trop peu profond. Lorsque π

2 (2N −1) < k0a < π2 (2N +1),

l’équation admet N solutions Kn avec n ∈ {1, · · · , N} correspondant aux intersections

des deux courbes. Le puits possède N états liés, d’énergies En =�2(K2

n−k20)

2m < 0. Lafigure 2.1 illustre un cas où l’équation de quantification admet deux solutions. Àgauche nous avons représenté l’allure des deux fonctions d’onde correspondantes.L’état fondamental ne s’annule qu’une fois sur le bord et décroît exponentiellementdans la barrière. L’état excité possède un nœud dans le puits et explore la région

40

Page 51: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.1. Équation d’onde – Premières applications

classiquement interdite sur une plus grande distance que l’état fondamental puisque

q2 < q1 où qndef=

√k2

0 − K2n .

Dans la limite k0a → ∞ (puits très profond) les solutions correspondent aux po-sitions des asymptotes de cotg, i.e. nous retrouvons les solutions obtenues dans lasection 1.5.3 pour le puits infini : Kn � nπ

a avec n = 1, 2, 3, · · · .

c) Illustration n◦2 : un problème d’états de diffusion

Nous étudions maintenant les états d’énergie E > 0 (toujours pour le potentiel de lafigure 2.1). La solution sur l’intervalle x ∈ [−a, 0] est toujours de la forme (2.14).Pour x ∈ [0,∞[ la solution est maintenant de type propagative : (2.15) est remplacéepar

ϕ(x) = C e+ikx + D e−ikx pour x > 0 (2.21)

où E = �2k2

2m =�2

2m (K2 + k20). La fonction d’onde dépend de quatre coefficients A, B, C

et D, pour trois équations de raccordement (2.16,2.17,2.18). Nous pouvons donc ex-primer trois des coefficients en fonction du quatrième, pour toute énergie E ∈ [0,∞[.L’équation de Schrödinger admet donc une solution ∀ E ∈ [0,∞[ ; l’énergie n’estpas quantifiée, on dit que « le spectre des énergies est continu », ou qu’il y a uncontinuum d’états.

Nous simplifions le calcul comme précédemment en écrivant ϕ(x) = A sin K(x+a).Le raccordement avec l’expression (2.21) est plus aisément réalisé en imposant lacontinuité de la dérivée logarithmique, K cotg Ka = ikC−D

C+D , ce qui conduit à

rdef=

CD= −

cos Ka + i kK sin Ka

cos Ka − i kK sin Ka

. (2.22)

Nous notons r le rapport des amplitudes. On vérifie que lorsque V0 = 0, r = −e2ika,comme il se doit. On obtient sans difficulté que le courant de probabilité pour x > 0est donné par Jϕ = �km (|C|2 − |D|2) ; les deux contributions s’interprètent comme uncourant incident et un courant réfléchi. Le rapport des courants nous donne donc la

probabilité de réflexion R = |C|2|D|2 = |r|

2. L’expression (2.22) montre que la probabi-lité de réflexion est R = 1 puisque l’onde est complètement réfléchie par le mur enx = −a. Nous verrons au chapitre 10 que l’étude de la phase de r révèle des informa-tions intéressantes.

d) Barrière de potentiel rectangulaire dans le régime tunnel

Dans ce paragraphe nous considérons la situation d’une particule envoyée depuis l’in-fini sur une barrière de potentiel : V(x) = V0 > 0 sur [0, a] et V(x) = 0 partout ailleurs.Nous discutons la situation physique où la particule est incidente de la gauche avec©D

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Page 52: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

une énergie inférieure à la barrière E < V0. Classiquement la particule serait doncréfléchie avec probabilité Rclass = 1. Quantiquement, la solution de l’équation deSchrödinger décrit une solution qui traverse la barrière, on parle « d’effet tunnel » :

ϕ(x) = eikx + r e−ikx si x < 0 (2.23)

= A eqx + B e−qx si 0 < x < a (2.24)

= t eikx si a < x (2.25)

où nous avons posé E = �2k2

2m =�2

2m (k20 −q2) avec V0 =

�2k20

2m . Une question intéressanteest donc de déterminer avec quelle probabilité la particule traverse la barrière.

Puisque l’équation de Schrödinger est linéaire, elle ne permet de déterminer lasolution qu’à une constante multiplicative globale près (fixée par la condition de nor-malisation). Ci-dessus, nous avons fixé le coefficient de l’onde incidente égal à 1 poursimplifier la discussion. r et t s’interprètent respectivement comme les amplitudes desondes réfléchie et transmise. Les quatre coefficients r, A, B et t peuvent être obtenusen appliquant les étapes de la méthode générale exposée ci-dessus.

Exercice 2.2 (F) Vérifier que le courant de probabilité associé à l’état ϕ(x) dans lestrois régions est donné par : Jϕ = �km (1 − |r|2) pour x < 0, Jϕ =

�qm 2 Im(B∗A) pour

0 < x < a et Jϕ = �km |t|2 pour x > a. Identifier les courants incident Jinc, réfléchi Jrefl

et transmis Jtrans (attention aux signes).

• Probabilités de réflexion et de transmission

Le calcul du courant de probabilité dans les différentes régions nous permet de définirdes probabilités de réflexion et de transmission :

Rdef=

∣∣∣∣∣ Jrefl

Jinc

∣∣∣∣∣ avec Tdef=

∣∣∣∣∣ Jtrans

Jinc

∣∣∣∣∣ (2.26)

Justifions ces expressions : pendant un temps Δt, le nombre moyen de particulesincidentes est Ninc = |Jinc |Δt et le nombre moyen de particules réfléchies Nrefl =

|Jrefl|Δt. La probabilité pour qu’une particule soit réfléchie est donnée par la fractiondes particules ayant été réfléchies R = Nrefl/Ninc = |Jrefl/Jinc|.

D’après le résultat de l’exercice précédent on voit donc que les probabilités sontreliées aux coefficients par R = |r|2 et T = |t|2.

Attention, en général c’est bien le rapport des courants de probabilité qui mesure laprobabilité de réflexion/transmission, et pas nécessairement le rapport des amplitudesapparaissant dans la fonction d’onde ; ici cette remarque ne joue pas de rôle (carV = 0 de part et d’autre de la barrière) mais elle est importante lorsque le potentiel

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Page 53: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.1. Équation d’onde – Premières applications

n’est pas le même à gauche et à droite (cf. exercice 2.18 sur le franchissement de lamarche de potentiel).

Exercice 2.3 (MF) Écrire les équations de raccordement pour la fonction d’onde.En déduire les amplitudes r et t en fonction de k0 et a. Donner l’expression de t dansla limite qa � 1. Vérifier que R + T = 1.

Figure 2.2– Microscope à effet tunnel (STM).

À gauche : Principe du STM. À droite : Atomes de fer sur une surface de cuivre déplacés àl’aide de la pointe d’un STM (Image originally created by IBM Corporation ; M.F. Crommie,C.P. Lutz & D.M. Eigler, Science 262 (1993), p. 218). La « taille d’un atome » est de l’ordred’1 Å= 10−10 m, ce qui indique l’échelle de la figure.

Application : microscope à effet tunnel. Dans la limite où la barrière est épaisse(k0a � 1), la fonction d’onde décroît exponentiellement en pénétrant dans la bar-rière (cf. figure 2.4) et l’amplitude de transmission se comporte comme

t ∼ e−qa = exp−a�

√2m(V0 − E) pour qa � 1. (2.27)

L’effet tunnel a des conséquences très importantes du point de vue fondamentalmais aussi technologique. Il est la base d’un type de microscopes permettant desonder les échelles atomiques : le microscope à effet tunnel (STM pour « scanningtunneling microscope »), inventé et réalisé par Binnig et Rohrer dans les années1980. C’est cette invention qui permet aujourd’hui de « voir » des atomes déposéssur des surfaces métalliques, mais aussi de les déplacer (cf. figure 2.2).Nous en expliquons brièvement le principe (illustré sur la partie gauche de lafigure 2.2) : une pointe métallique est placée à une distance h au-dessus de lasurface métallique dont on souhaite étudier le relief. Lorsqu’elle est suffisam-ment proche, une différence de potentiel entre la pointe et la surface induit unfaible courant tunnel Itunnel ∝ |t|2 ∝ e−2qh (le petit espace entre la surface et lapointe joue le rôle de la barrière tunnel pour les électrons du métal). Un cristalpiezoélectrique permet de déplacer la pointe (en hauteur et latéralement) sur deséchelles atomiques. Lorsque la pointe s’éloigne de la surface le courant tunnelvarie rapidement avec la distance Itunnel ∝ e−2qh, ce qui permet de contrôler trèsprécisément la distance pointe-surface et de la maintenir constante au cours dubalayage de la surface. Le déplacement de la pointe est enregistré.

Exercice 2.4 (D) Comment interpréter les petites ondes à l’intérieur du cercled’atomes sur la figure 2.2 ?

©D

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Page 54: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

e) Barrière de potentiel rectangulaire dans le régime E > V0

Exercice 2.5 (MF) Déduire (sans calcul) des résultats de l’exercice 2.3 les expres-sions de r et t pour E > V0. Montrer que pour certaines valeurs de l’énergie, la pro-babilité de transmission vaut exactement 1. Comparer la longueur d’onde de Broglieet la largeur de la barrière à ces énergies.

Les énergies pour lesquelles |t| = 1 et r = 0 sont appelées des transparences (onparle également de phénomène de résonance), cf. figure 2.4. Elles correspondent àqa = nπ qui exprime un accord de phase après un aller-retour dans la barrière. Noustraçons sur la figure 2.3 l’allure de l’état stationnaire pour E > V0 hors condition derésonance (au centre) et lorsque qa = nπ (à droite). La probabilité de transmission enfonction de l’énergie est représentée sur la figure 2.4.

�2 �1 0 1 2�2

�1

0

1

2

x�a

��x�

�2 �1 0 1 2�2

�1

0

1

2

x�a

��x�

�2 �1 0 1 2�2

�1

0

1

2

x�a

��x�

Figure 2.3– État stationnaire décrivant une particule arrivant sur une barrière depotentiel rectangulaire.

Fonction d’onde à trois énergies (pour k0a = 10). Ligne continue noire : Re[ϕ(x)] ; Lignebleue en tirets : Im[ϕ(x)]. À gauche : ka = 9.5, régime de l’effet tunnel ; la fonction d’ondes’amortit exponentiellement dans la barrière. Au milieu : ka = 12, l’onde est partiellementtransmise. À droite : ka =

√π2 + (k0a)2, l’onde est entièrement transmise pour la première

transparence.

8 10 12 14 16 18 200.0

0.2

0.4

0.6

0.8

1.0

ka � E

T�E� Figure 2.4– Probabilité de transmission.

Probabilité de transmission en fonction de kapour k0a = 10. Le régime tunnel correspond à

k < k0. Les transparences correspondent à T = 1.

2.2 FONCTION D’ONDE DANS L’ESPACEDES IMPULSIONS

Le lecteur pourra consulter l’annexe 2.A où sont rappelées les principales propriétésde la transformation de Fourier.

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Page 55: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.2. Fonction d’onde dans l’espace des impulsions

2.2.1 Normalisation des ondes planes

• Pour une base de fonctions {ϕn(x)} indicées par un paramètre discret n, la conditiond’orthonormalisation est : ∫ +∞

−∞dx ϕ∗n(x)ϕn′(x) = δn,n′ . (2.28)

Exercice 2.6 (F) Les états stationnaires dans un puits infini sont ϕn(x) =√2a sin

(nπxa

)avec n ∈ N∗. Vérifier que ces fonctions forment une base orthornormée

pour les fonctions continues définies sur [0, a]. I.e. vérifier que∫ a

0dx ϕn(x)ϕm(x) =

δn,m.

• Pour une base de fonctions {ψα(x)} indicées par un paramètre α variant continû-ment, l’orthonormalisation prend la forme :∫ +∞

−∞dxψ∗α(x)ψα′ (x) = δ(α − α′) (2.29)

où δ(x) est la distribution de Dirac (cf. annexe 2.B).

Exercice 2.7 (MF) Dans le cas des ondes planes eipx/�, décrivant l’état quantiqued’impulsion p, montrer, en utilisant (2.66), que la bonne constante de normalisationest :

φp(x) =1

√2π�

eipx/� (2.30)

2.2.2 Fonction d’onde dans l’espace des impulsions

Introduisons la transformée de Fourier de la fonction d’onde :

ψ(p)def=

∫ +∞

−∞

dx√

2π�ψ(x) e−ipx/�. (2.31)

Forts des considérations précédentes sur la normalisation des ondes planes, nousvoyons que la transformée de Fourier de ψ(x) peut s’interpréter comme le produitscalaire, défini par l’éq. (1.9), entre l’état ψ et l’état φp :

ψ(p) = 〈φp|ψ〉 (2.32)

Cette remarque nous aide à préciser le sens physique de ψ(p). Rappelons nous quele produit scalaire 〈χ|ψ〉 a le sens d’une amplitude de probabilité pour observer le©D

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Page 56: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

système dans l’état χ, alors qu’il se trouve dans l’état ψ. Nous en concluons queψ(p) est l’amplitude de (densité de) probabilité pour que la particule ait uneimpulsion p. C’est bien clair : ψ(p) est la composante de ψ(x) sur l’onde plane φp(x),état d’impulsion bien déterminée.

Réciproquement la fonction d’onde peut s’écrire sous la forme d’une décomposi-tion sur les ondes planes :

ψ(x) =∫ +∞

−∞

dp√

2π�ψ(p) eipx/�. (2.33)

2.2.3 Analyse dimensionnelle de la fonction d’onde

• Base discrète

Dans le chapitre d’introduction, nous avons attribué à la fonction d’onde ψ(x) lesens d’une amplitude de densité de probabilité. La condition de normalisation s’écrit∫ +∞−∞ dx|ψ(x)|2 = 1. La probabilité de trouver la particule dans l’intervalle [x, x + dx[

est |ψ(x)|2dx ; la fonction d’onde a donc la dimension [ψ] = [longueur]−1/2 (ou[ψ] = [longueur]−d/2 en dimension d).

• Base continue

Lorsqu’on considère une base continue de fonctions d’onde {ψα(x)}, indicée par unparamètre continu α, |ψα(x)|2dxdα est la probabilité de trouver la particule dans l’in-tervalle [x, x + dx[ pour une valeur du paramètre dans l’intervalle [α,α + dα[. Lafonction d’onde a alors le sens d’une densité (par unité de α) d’amplitude de densitéde probabilité. On a [ψα] = [longueur]−1/2[α]−1/2, ce qu’on vérifie aisément à l’aidede (2.29).

2.2.4 Inégalités de Heisenberg

a) Moyennes des grandeurs physiques

Considérons une particule dans un état quantique ψ(x). Une mesure de la position dela particule donne un résultat dans [x, x+ dx[ avec probabilité |ψ(x)|2dx. Si on réaliseun grand nombre de mesures, toujours à partir du même état quantique, la positionmoyenne sera donnée par

〈x〉ψ =∫

dx |ψ(x)|2 x. (2.34)

De même, la valeur moyenne quantique de toute fonction de x est donnée par

〈 f (x)〉ψ =∫

dx |ψ(x)|2 f (x). (2.35)

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Page 57: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.2. Fonction d’onde dans l’espace des impulsions

Les fluctuations des résultats de mesure sont caractérisées par l’écart-type Δxψ, laracine carrée de la variance

Δx2ψ

def=

⟨x2

⟩ψ− 〈x〉2ψ (2.36)

On peut également définir une quantité similaire caractérisant les fluctuations desrésultats de mesures de l’impulsion : Δpψ. Pour calculer 〈p〉ψ et 〈p2〉ψ il est natureld’utiliser la fonction d’onde dans l’espace des impulsions :

〈p〉ψ =∫

dp |ψ(p)|2 p. (2.37)

Il est intéressant de chercher à exprimer l’impulsion moyenne à l’aide de la fonc-tion d’onde dans l’espace réel. Pour cela on utilise la relation de Parseval-Plancherel(2.49) et la propriété (2.48) :

〈p〉ψ =�

i

∫dxψ∗(x)

dψ(x)dx

, (2.38)

ce qui revient à « sandwicher » l’opérateur jouant le rôle de l’impulsion introduit plushaut, p → �

iddx , entre ψ∗(x) et ψ(x), puis à intégrer. De même on obtient

⟨p2

⟩ψ=

�2∫

dx∣∣∣dψ(x)

dx

∣∣∣2.

b) Inégalité de Heisenberg• Théorème

Δxψ Δpψ ��

2(2.39)

Si nous modifions l’état ψ(x) afin de minimiser les fluctuations de la position dela particule (Δx → 0), celles sur l’impulsion (Δp → ∞) augmentent corrélative-ment, et vis-versa. La constante de Planck fixe une limite inférieure sur le produitdes fluctuations quantiques, i.e. des incertitudes de mesure des deux variables conju-guées (x et p). Dans la description ondulatoire de Schrödinger, c’est une simple pro-priété liant une fonction et sa transformée de Fourier, comme nous le constatons dansl’exercice qui suit dans lequel l’inégalité est démontrée. On rencontre ce type d’in-égalité dans la physique ondulatoire, quelle que soit la nature du phénomène (optique,acoustique, etc.) [34].

Démonstration de l’inégalité. Considérons une fonction normée ψ(x) (i.e.∫dx |ψ(x)|2 = 1). On suppose que ψ(x) est telle que 〈x〉ψ = 0 et 〈p〉ψ = 0 (ce

choix est assuré en considérant une fonction d’onde réelle ; pour une justificationphysique, cf. note 4, page 72). De même que la largeur de la fonction est définiepar Δx2

ψ

def=

∫dx x2|ψ(x)|2, nous introduisons la largeur de la transformée de Fourier©

Dun

od.L

aph

otoc

opie

non

auto

risé

ees

tun

délit

.

47

Page 58: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

Δk2ψ

def=

∫dk k2

∣∣∣ψ(k)∣∣∣2 = ∫

dx[ 1

idψ(x)

dx

]∗[1i

dψ(x)dx

]=

∫dx

∣∣∣dψ(x)dx

∣∣∣2 (nous avons utilisél’égalité de Parseval-Plancherel).

Nous formons le polynôme P(λ)def=

∫dx

∣∣∣xψ(x) + λdψ(x)dx

∣∣∣2. Étant défini positif, lediscriminant de ce polynôme du second degré en λ, P(λ) = Δk2

ψ λ2 + λ + Δx2

ψ , est

négatif : Discriminant= 1− 4Δx2ψΔk2

ψ � 0. Nous déduisons Δxψ Δkψ � 12 , d’où (2.39)

en utilisant p = �k. Cette inégalité exprime que, si la fonction ψ(x) est étroite, satransformée de Fourier ψ(k) est large, et vis-versa.

Interprétation énergétique. Revenons sur un point qui a été évoqué dans la sec-tion 1.5.3 : nous considérons une particule soumise à un potentiel V(x) confinant,i.e. E < V(x → ±∞), avec un unique minimum (absolu et local), comme parexemple V(x) ∝ |x|β avec β > 0. L’énergie potentielle tend à augmenter le confi-nement (Δx → 0). L’inégalité de Heisenberg nous montre que le terme d’énergiecinétique, minimisée si Δp → 0, tend à déconfiner la particule : Δx � �/Δp → ∞. Laminimisation de l’énergie mécanique conduit donc à établir un compromis entre lesdeux effets. Nous verrons dans l’exercice 7.1 ou dans un exemple traité dans la sec-tion 13.2, que ce type d’argument permet d’obtenir une bonne estimation de l’énergiedu fondamental.

À propos des malentendus sur les inégalités de Heisenberg. On parle parfois de« principe d’incertitude » pour désigner les inégalités de Heisenberg (en allemand :unbestimmtheit, i.e. indétermination). Essayons de dissiper un certain nombre deconfusions et malentendus véhiculés par cette dénomination populaire mais malen-contreuse. Tout d’abord, il ne s’agit pas d’un « principe », puisque nous le démon-trons ! Dans l’approche schrödingerienne, l’inégalité n’a rien de mystérieux et coïn-cide avec une propriété bien connue de la transformation de Fourier [cf. annexe 2.A,éq. (2.47)] : elle découle donc directement du choix d’une description ondulatoire.

L’inégalité de Heisenberg souligne que la nature des concepts quantiques (la fonc-tion d’onde décrivant l’état de la particule) ne permet pas de définir simultanémentposition et impulsion (les attributs d’une particule ponctuelle) avec une précision ar-bitrairement grande : la question de déterminer simultanément x et p n’a pas de sensdans ce cadre. Autrement dit, on ne peut pas concevoir d’expérience qui mesure-rait simultanément ces deux grandeurs physiques. Repensons à l’expérience d’Young(§ 1.5.2.a) soutenant l’idée de dualité onde-corpuscule. La nature corpusculaire estrévélée par une tache sur un écran, mais dans ce cas l’information sur l’impulsion estperdue. D’autre part la mesure de l’impulsion (i.e. de la longueur d’onde) peut êtreeffectuée par une expérience de diffraction ou d’interférence dans laquelle l’onde estdélocalisée. L’analyse de la situation expérimentale montre que les mesures des gran-deurs x et p sont incompatibles. L’exercice 2.20, page 58, propose une autre situa-tion expérimentale pour illustrer l’inégalité de Heisenberg. On touche ici aux consé-

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Page 59: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.2. Fonction d’onde dans l’espace des impulsions

quences de l’abandon du concept classique de trajectoire : l’inégalité de Heisenbergnous montre que l’image classique d’une particule ponctuelle doit être abandonnée.

Inégalité de Heisenberg temporelle. La forme la plus générale de solution del’équation de Schrödinger est une superposition d’états stationnaires. Si on oublieun instant la dépendance spatiale, ce qui veut dire que l’on étudie l’amplitude deprobabilité en un point en fonction du temps, la fonction d’onde a une dépendancetemporelle qui peut être décomposée sur des ondes planes :

ψ(t) =∫

dE ψ(E) e−iEt/�. (2.40)

Si nous appelons Δt la largeur de la fonction ψ(t) et ΔE la largeur de la fonction ψ(E),nous en déduisons l’inégalité de Heisenberg temporelle :

ΔE Δt ��

2(2.41)

Une conséquence très importante de l’inégalité sera discutée à la fin du livre(§ 15.2.3.d).

À retenir

Résolution des problèmes où le potentiel est constant par morceaux.

États liés : confinement⇒ équation de quantification & quantification de l’énergie.

États de diffusion ⇒ spectre continu (solution ∀ E).

Aspects ondulatoires dans le franchissement d’une barrière de potentiel par une parti-cule.

Le sens physique de ψ(p).

Les inégalités de Heisenberg (2.39) et (2.41).

Pour en savoir plus

Les idées présentées dans la section 2.1.4.a peuvent être généralisées pour des potentielsarbitraires : par exemple, cf. chapitre 16 de [17].

L’ouvrage [32] offre une discussion physique intéressante des inégalités de Heisenberg.

Sur les problèmes d’interprétation des inégalités de Heisenberg, on pourra se reporter auchapitre 5 de [36].

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Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

ANNEXE 2.A : TRANSFORMATION DE FOURIER

Les solutions harmoniques (ondes planes) jouent un rôle central dans un grandnombre de problèmes physiques ou mathématiques (la résolution d’équations diffé-rentielles linéaires à coefficients constants par exemple). La transformation de Fourierest l’outil mathématique permettant de décomposer une fonction quelconque commeune somme (continue) de fonctions harmoniques. Pour donner un exemple concret enphysique, si l’on mesure un signal électromagnétique E(t), une information crucialeest de connaître sa décomposition sur des ondes planes : E(t) =

∑ω Eω e−iωt. Dans

de nombreuses situations, c’est l’analyse spectrale, i.e. des Eω, qui révèle des infor-mations physiques sur le système interagissant avec le champ électromagnétique (parexemple sur la température d’une étoile émettant le rayonnement, ou sur la nature desatomes d’un gaz).

2.A.1 Séries de Fourier (transformation de Fourier discrète)

Une fonction complexe ψ(x) définie sur un intervalle [−L/2, L/2] (ou une fonctionpériodique sur R, de période L) peut être décomposée sous forme d’une série deFourier :

ψ(x) =∑n∈Z

ψn eikn x où kndef=

2πnL

. (2.42)

Les coefficients de Fourier sont donnés par :

ψn =

∫ +L/2

−L/2

dxLψ(x) e−ikn x. (2.43)

Si nous augmentons L, le spectre des fréquences kn = 2πn/L devient alorsde plus en plus dense. À la limite L → ∞ les formules précédentes corres-pondent à la décomposition d’une fonction ψ(x) définie sur R. Discutons précisé-ment cette limite : on remplace les composantes par une fonction ψ(kn)

def= L√

2πψn =

1√2π

∫ +L/2−L/2 dxψ(x) e−ikn x. La somme sur les kn est remplacée par une intégrale

∑n →

L2π

∫dkn ; la décomposition de la fonction sur ses composantes de Fourier prend la

forme ψ(x) =∑

n ψn eikn x → L2π

∫dkn

√2πL ψ(kn) eikn x = 1√

∫ +∞−∞ dkn ψ(kn) eikn x.

Exercice 2.8 (F) Calculer les coefficients de Fourier de la fonction « dents de scie »s(x) = x pour x ∈ [−L/2, L/2].

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Page 61: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.2. Fonction d’onde dans l’espace des impulsions

2.A.2 Transformation de Fourier

a) Définition

Soit ψ(x) une fonction sommable sur R 1, sa transformée de Fourier est définiecomme :

ψ(k) = F [ψ(x)]def=

1√

∫ +∞

−∞dxψ(x) e−ikx. (2.44)

La transformée de Fourier inverse

ψ(x) = F †[ψ(k)] =1√

∫ +∞

−∞dk ψ(k) eikx (2.45)

exprime la décomposition de la fonction ψ(x) sur une base d’ondes planes eikx, toutcomme un vecteur d’un espace vectoriel peut se décomposer sur une certaine base(rappelons que l’espace des fonctions forme un espace vectoriel). La transformée deFourier ψ(k) s’interprète comme la composante de ψ(x) sur le vecteur eikx.

On pourra trouver des informations sur la transformation de Fourier des fonctionset des distributions dans la référence [6, tome 2].

b) Quelques propriétés

• Linéarité : Soit α, β ∈ R et f et g deux fonctions

F [α f (x) + βg(x)] = α f (k) + βg(k). (2.46)

• Si la fonction ψ(x) a une largeur Δx, la largeur de sa transformée de Fourier estinversement proportionnelle : Δk ∼ 1/Δx. Pour a ∈ R+

F [ψ(x/a)] = a ψ(ka). (2.47)

Cette propriété joue un rôle particulièrement important en mécanique quantique(cf. § 2.2.4 sur les inégalités de Heisenberg).

Exercice 2.9 (F) Calculer les transformées de Fourier de la fonction « porte » :πa(x) = 1

a si |x| < a/2 et πa(x) = 0 si |x| > a/2. Puis de la fonction « toile detente » ta(x) = 1

2ae−|x|/a

1. Une fonction sommable, ψ(x) ∈ L1(R), est une fonction Lebesgue intégrable telle que∫ +∞−∞ dx |ψ(x)| < ∞. Cette condition assure l’existence de la transformée de Fourier et que F †[ψ(k)] =ψ(x) presque partout. La théorie des distributions, en introduisant des objets plus singuliers comme ladistribution de Dirac ou la valeur principale, permet de manipuler la transformée de Fourier de fonctionsqui ne sont pas sommables sur R.©D

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Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

• La dérivation :

F[dψ(x)

dx

]= ik ψ(k) (2.48)

Cette relation suggère l’intérêt de la transformation de Fourier pour résoudre leséquations différentielles linéaires à coefficients constants : dans l’espace de Fourier,l’équation différentielle prend la forme d’une équation algébrique. Par exemple,l’équation différentielle

∑Nn=0 anψ

(n)(x) = j(x) devient[ ∑N

n=0 an(ik)n]ψ(k) = j(k).

• Égalité de Parseval-Plancherel : Considérons deux fonctions ψ(x) et χ(x). Onnote leurs transformées de Fourier ψ(k) et χ(k). Alors∫ +∞

−∞dxψ(x)∗ χ(x) =

∫ +∞

−∞dk ψ(k)∗ χ(k) (2.49)

Nous verrons au chapitre 3 que cette relation correspond à écrire le produit scalairedans deux bases différentes.

0 1 2 3 4 5 60.0

0.5

1.0

1.5

2.0

x

�f�

g a��

x�

Figure 2.5– Convolution.Convolution de la fonction f (x), représentée

tracée en trait continu fin, par une gaussiennega(x) de largeur a pour a = 0.5 (pointillés)

0.2 (tirets) et 0.05 (ligne continue).

c) Produit de convolution

( f ∗ g)(x) = (g ∗ f )(x)def=

∫ +∞

−∞dy f (x − y) g(y) (2.50)

L’effet de la convolution est illustré sur la figure 2.5. Dans l’espace de Fourier, leproduit de convolution est remplacé par un simple produit :

F [( f ∗ g)(x)] =√

2π f (k) g(k). (2.51)

On pourra facilement démontrer toutes ces propriétés à titre d’exercice.

• Transformée de Fourier d’une gaussienne : g1(x) = 1√2π

e−x2 /2 ⇒ g1(k) =1√2π

e−k2/2 = g1(k).

Exercice 2.10 (MF) Pour illustrer l’intérêt de l’équation (2.51), calculer la convo-

lution de deux gaussiennes ga(x) et gb(x) où ga(x)def= 1√

2πa2e−x2 /(2a2).

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Page 63: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.2. Fonction d’onde dans l’espace des impulsions

ANNEXE 2.B : DISTRIBUTIONSNous introduisons dans cette annexe deux distributions qui seront utiles dans le texte :la distribution δ de Dirac et la valeur principale. Cette petite introduction ne vise pasà la rigueur mathématique mais plutôt à « faire sentir » ces notions pour une audienced’apprentis physiciens. Pour une présentation plus rigoureuse, le lecteur pourra sereporter à des ouvrages de mathématique [39, 6] ou [24] pour une présentation plusrapide.

2.B.1 Distribution δ(x) de Dirac

• Définitions

Nous introduisons une fonction ϕ(x) rapidement décroissante à l’infini, de largeurΔx ∼ 1 et de hauteur ∼ 1 telle que ∫

R

dx ϕ(x) = 1. (2.52)

Nous utilisons cette fonction pour construire une fonction de largeur ε et de hau-teur 1/ε :

δε(x)def=

1εϕ( xε

)donc

∫R

dx δε(x) = 1. (2.53)

On peut vérifier que plusieurs candidates possibles pour ϕ(x) sont : i) la fonctionporte π1/2(x) = θ(1/2 − |x|) ; ii) la fonction en toile de tente 1

2e−|x| ; iii) la fonctionsinus cardinal 1

πsin x

x ; iv) la lorentzienne L(x) = 1π

1x2+1 ; v) ou encore la gaussienne

g1(x) = 1√2π

e−x2 /2.

Exercice 2.11 (F) Dessiner l’allure de ϕ(x) et δε(x) en supposant que ϕ(x) est unefonction régulière ayant son maximum en x = a et décroissant rapidement vers zéro :limx→±∞ ϕ(x) = 0. Quelle est la position du maximum de δε(x) ?

Nous considérons maintenant une autre fonction f (x) supposée régulière à l’ori-gine (il suffit qu’elle soit continue et bornée). Nous calculons

limε→0

∫dx δε(x) f (x) = lim

ε→0

∫duϕ(u) f (εu). (2.54)

Si nous pouvons intervertir limite et intégrale2 nous obtenons f (0)∫

duϕ(u), i.e.

limε→0

∫dx δε(x) f (x) = f (0). (2.55)

2. On utilise le théorème de convergence dominée : soit fn(x), n ∈ N, une suite de fonctions. Soit unefonction sommable ψ(x), i.e. telle que

∫dx |ψ(x)| < ∞. Si | fn(x)| < |ψ(x)| ∀ n alors limn→∞

∫dx fn(x) =∫

dx limn→∞ fn(x).©D

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Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

Nous allons encore plus loin et admettons qu’il est possible de définir limε→0 δε(x)

indépendamment de l’intégrale. Nous fabriquons ainsi un objet singulier : « infinien x = 0 et nul partout ailleurs » ! Cette formulation provocatrice est toutefois im-précise : le point important est que, bien qu’elle soit nulle partout sauf à l’origine, lepoids de la distribution y est concentré

∫dx δ(x) = 1. Cet objet n’est pas une fonction

mais une « distribution », appelée la distribution de Dirac :

δ(x)def= lim

ε→0δε(x). (2.56)

L’objet de la théorie des distributions [39] est de montrer qu’il est possible de donnerun sens mathématique précis à cet objet. Pour ce qui nous intéresse il nous suffit denous souvenir de la relation fondamentale, dont toutes les propriétés découlent,∫ +∞

−∞dx δ(x) f (x) = f (0) (2.57)

Puisque la distribution de Dirac est nulle partout sauf à l’origine, notons qu’on peutomettre l’intégrale et écrire

δ(x) f (x) = δ(x) f (0). (2.58)

Une translation de l’argument de la distribution nous donne∫dx δ(x − a) f (x) = f (a). (2.59)

Cette propriété nous montre l’intérêt de la distribution de Dirac pour un physicien,et l’origine physique de la terminologie. Elle nous permet de définir la densité d’unequantité physique concentrée en un point. Par exemple si nous considérons une par-ticule ponctuelle de masse m placée sur une ligne en x = a, la densité de massecorrespondante s’écrit μ(x) = m δ(x − a) ; pour plusieurs masses mi placées en ai, ladistribution de masse est μ(x) =

∑i mi δ(x − ai).

• Propriétés

Nous discutons maintenant quelques propriétés que nous pouvons aisément prouveren utilisant (2.57). Nous vérifions que la distribution est paire

δ(−x) = δ(x). (2.60)

Lors d’une dilatation d’un facteur 1/λ, où λ ∈ R∗, la distribution est transformée selon

δ(λx) =1|λ|δ(x). (2.61)

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Page 65: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

2.2. Fonction d’onde dans l’espace des impulsions

Cette propriété nous montre que si nous attribuons une dimension à la variable x,alors la distribution a la dimension inverse[

δ(x)]=

[x]−1 (analyse dimensionnelle). (2.62)

Dans certaines situations, il peut arriver que la distribution de Dirac ait pour ar-gument une fonction f (x). Notons xi les racines de la fonction, f (xi) = 0. En utili-sant (2.61) au voisinage de chaque zéro de la fonction nous obtenons

δ( f (x)) =∑

xi t.q. f (xi)=0

δ(x − xi)| f ′(xi)|

=1

| f ′(x)|∑

xi t.q. f (xi)=0

δ(x − xi). (2.63)

Exercice 2.12 (MF) Montrer que δ(x2) = 1|x| δ(x). Indication : Considérer δ(x2− x2

0).

Vérifier que le « peigne de Dirac » peut s’écrire : δ( sin πx

π

)=

∑n∈Z δ(x − n).

Un autre intérêt de la distribution de Dirac est de permettre de donner un sensà la dérivée d’une fonction discontinue. Considérons l’exemple de la fonction deHeaviside

θ(x)def=

⎧⎪⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎪⎩1 si x > 0

1/2 si x = 0

0 si x < 0.

(2.64)

Au sens des fonctions, θ(x) n’est pas continue en x = 0 et donc a fortiori n’est pasdérivable en ce point. Nous pouvons toutefois donner un sens à sa dérivée au sens desdistributions. Pour comprendre cela nous introduisons la fonction θε (x)

def=

[e−x/ε+1

]−1

(on pourra tracer cette fonction pour différentes valeurs du paramètre ε). On peutfacilement vérifier que sa dérivée, d

dxθε (x) = δε(x), tend vers δ(x) à la limite ε → 0.

La théorie des distributions permet de permuter limite et dérivation, si bien que

θ′(x) = δ(x) (2.65)

Enfin la dernière propriété importante est obtenue en considérant la transformée deFourier de la distribution de Dirac. Pour cela nous revenons à la fonction δε(x), de lar-geur Δx ∼ ε et de hauteur 1/ε. Sa transformée de Fourier δε(k) est donc une fonctionde largeur Δk ∼ 1/ε et de hauteur 1 (on a en effet δε(k = 0) = 1√

∫dx δε(x) = 1√

2π. À

la limite ε → 0 nous obtenons δ(k) = 1√2π

, ce que nous pouvions directement déduirede la définition de la transformation de Fourier et de (2.57). Ce résultat nous montreque la distribution de Dirac se décompose sur les ondes planes 1√

2πeikx comme

δ(x) =∫ +∞

−∞

dk2π

eikx (2.66)

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Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

C’est une propriété importante et utile de la distribution de Dirac. Elle nous serviraen particulier à normaliser les ondes planes et plus généralement les bases d’étatscontinues (prochain chapitre).

Exercice 2.13 (F) À l’aide de cette dernière relation, vérifier que (2.45) est bien latransformation inverse de (2.44), c’est-à-dire : F †[F [ψ(x)]

]= ψ(x).

Exercice 2.14 (MF) La distribution de Dirac dans l’espace tridimensionnel est défi-

nie comme δ(�r)def= δ(x)δ(y)δ(z). On rappelle l’équation de Poisson reliant le potentiel

électrostatique et la densité de charges ΔV(�r) = − 1ε0ρ(�r). Déduire que

Δ−14π r= δ(�r). (2.67)

2.B.2 Valeur principale

Il arrive souvent que l’intégrale∫ +A

−Adxx apparaisse dans les calculs. L’intégrale est mal

définie : elle est divergente, cependant nous aimerions écrire que l’intégrale est nullepuisque nous intégrons une fonction impaire. La partie principale va nous permettrede donner un sens rigoureux à cette idée. Soit f (x) une fonction régulière et A, Bdeux réels positifs. Nous définissons la distribution « Partie principale » (ou « valeurprincipale ») PP 1

x (ou vp1x ) par∫ +B

−Adx f (x)PP1

xdef= lim

ε→0+

(∫ −ε

−A+

∫ +B

)dx f (x)

1x. (2.68)

La motivation de cette définition est claire : nous retranchons la contribution de l’in-tervalle [−ε,+ε] responsable de la divergence de l’intégrale. En coupant le voisinagede l’origine de manière symétrique, nous donnons un sens à l’intégrale, comme nousl’illustrons maintenant lorsque f (x) = 1 :∫ +B

−AdxPP1

x= lim

ε→0+

(∫ −ε

−A+

∫ +B

)dx

1x= lim

ε→0+

[ln(ε/A) + ln(B/ε)

]= ln(B/A).

(2.69)Pris séparemment, chaque morceau d’intégrale diverge logarithmiquement, cepen-dant les deux divergences se compensent.

En écrivant la valeur principale comme « PP1x = limε→0+

θ(|x|−ε)x » nous rappro-

chons notre définition de celle de la distribution de Dirac. De la même manière quenous avons introduit plusieurs définitions possibles de la distribution de Dirac, nouspouvons proposer d’autres définitions de la partie principale, par exemple∫ +B

−Adx f (x)PP1

xdef= lim

ε→0+

∫ +B

−Adx

f (x) x

x2 + ε2(2.70)

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Page 67: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

ce qui est une manière d’écrire que, lorsque |x| � ε on a « PP 1x � 1

x » mais pour|x| � ε, la divergence est régularisée comme «PP 1

x �xε2 ».

Exercice 2.15 (F) Vérifier que le résultat de l’intégrale∫ +B

−AdxPP 1

x est le mêmepour les deux définitions.

Nous utilisons cette nouvelle définition pour donner un sens à l’intégrale∫ ∞0 dk eikx. Pour cela nous introduisons un régulateur e−εk avec ε → 0+ :

limε→0+

∫ ∞

0dk eikx−εk = lim

ε→0+

1ε − ix

= limε→0+

(ix

x2 + ε2+

ε

x2 + ε2

). (2.71)

Nous reconnaissons deux définitions possibles pour la partie principale et la distribu-tion de Dirac. D’où ∫ ∞

0dk eikx = iPP1

x+ π δ(x) =

ix + i0+

(2.72)

où la notation assez courante « 0+ » nous rappelle le régulateur ε → 0+.

Exercices

2.16 (F) Conditions aux limites généralisées

On considère l’équation de Schrödinger libre en une dimension, Eψ(x) = − �2

2md2

dx2ψ(x)pour x ∈ R+. On souhaite interdire l’accès à R− via une condition limite généralisée

ψ′(0) = λψ(0). (2.73)

À quelle condition sur λ la particule est-elle contrainte à rester sur R+ ? Résoudrel’équation de Schrödinger et discuter les cas limites λ = 0 et λ→ ±∞.

2.17 (MF) Invariance de jauge

En présence d’un champ magnétique �B = �∇ × �A et d’un champ électrique �E =−�∇φ − ∂

∂t�A, l’équation de Schrödinger pour une particule de charge q prend la forme

i� ∂∂tψ(�r, t) =[ − �2

2m

(�∇ − iq��A)2+ qφ

]ψ(�r, t). Déduire l’expression du courant de pro-

babilité en présence des potentiels scalaire et vecteur.On fait subir la transformation suivante à la fonction d’onde ψ(�r, t) → ψ(�r, t) =ψ(�r, t) e−iχ(�r,t). Montrer que ψ(�r, t) obéit à une équation de Schrödinger de la même

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Chapitre 2 • Équation d’onde de Schrödinger

forme, pour des nouveaux potentiels �A et φ. Quels sont les champs �E et �B correspon-dants ? À quoi correspond la transformation des potentiels ?

2.18 (MF) Marche de potentiel

Soit le potentiel V(x) = V0 θ(x) décrivant une marche de potentiel.

a) Discuter la nature du spectre et les dégénérescences des états (pour E < V0 etE > V0).

b) On s’intéresse aux états de diffusion d’énergie E = �2k2

2m < V0. Montrer qu’ils sontde la forme ψ(x) = e+ikx + re−ikx pour x < 0 ; et pour x > 0 ? Calculer r et vérifieren particulier que |r| = 1, ce qu’on interprètera. Justifier physiquement que l’étatstationnaire peut être choisi réel. Tracer soigneusement l’allure de ψ(x).

c) On considère maintenant les états de diffusion d’énergie E > V0, incidents de lagauche, i.e. tels que ψ(x) = e+ikx + re−ikx pour x < 0 et ψ(x) = Be+iKx pour x > 0.Exprimer K en fonction de E. Calculer r et B (on pourra réutiliser les résultatsde la question b). Déduire les probabilités de transmission T et de réflexion R.Discuter les limites E/V0 → ∞ et E → V+0 .

2.19 (MF)

a) Soit une fonction d’onde gaussienne φ(x) = 1(πa2)1/4 e−x2/2a2

. Calculer Δxφ, Δpφpuis vérifier que le produit satisfait l’inégalité de Heisenberg.

b) Mêmes questions pour les états stationnaires du puits infini : ψn(x) =√

2a sin

(nπxa

)pour x ∈ [0, a] et nulle ailleurs.

2.20 (MF) Une expérience de pensée sur la dualité onde-corpuscule

a) Expérience d’interférences : une source ponctuelle émet de la lumière interceptéepar une plaque percée par deux trous distants de a. L’intensité lumineuse reçue surl’écran distant de L des trous est donc de la forme I(x) = |A cos kd1 + A cos kd2|2.Calculer l’interfrange i f de la figure d’interférences observée sur l’écran (on sup-posera que L � a).

b) Par quel trou passe le photon ? Dans un second temps on modifie l’expériencepour permettre une détection du chemin suivi par un photon :

On suppose maintenant la plaque montée sur des roulements pour pouvoir se dé-placer librement de haut en bas. Quelle est la variation d’impulsion δ�p du pho-ton lorsqu’il passe par le trou du haut ? Et par celui du bas ? (On supposera quex = 0 et L′ → ∞, ainsi l’impulsion du photon avant le passage par un trou est�p = �uyh/λ).

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Page 69: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

c) La variation d’impulsion du photon est transférée à la plaque. Pour savoir parquelle trou est passé le photon il faut donc mesurer si la plaque a une impulsionPp = ±δpx. Quelle est l’incertitude ΔXp minimum sur la position de la plaque (enutilisant l’inégalité de Heisenberg ΔPpΔXp > �) ?

d) Pourquoi la mesure du chemin emprunté par le photon (i.e. la localisation spa-tiale) est-elle incompatible avec l’observation des franges d’interférences (i.e. lamesure de son impulsion) ?

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FORMALISMEDE DIRAC –

POSTULATS (1)

3« The main object of physical science is not the provision of pictures, but is theformulation of laws governing phenomena and the application of these laws to thediscovery of new phenomena. »

The principles of quantum mechanics, Paul Dirac.

3.1 INTRODUCTIONAprès avoir introduit l’équation d’onde de Schrödinger, nous donnons une autre pré-sentation plus abstraite de la mécanique quantique. L’intérêt d’une telle reformulationpeut se comprendre comme suit. Nous avons déjà fait appel à différentes représenta-tions de la fonction d’onde :

• Une représentation dans l’espace physique : ψ(x) représente l’amplitude de (den-sité de) probabilité pour que la particule se trouve en x.

• Une représentation dans l’espace des impulsions : ψ(p) représente l’amplitude de(densité de) probabilité pour que la particule ait une impulsion p.

Ces deux fonctions contiennent exactement la même information. Nous pourrionsaller plus loin et chercher encore d’autres représentations... ou même nous passerd’une représentation particulière. C’est l’objet des notations de Dirac. De même qu’ilest préférable de travailler avec la notion de vecteur plutôt qu’avec la donnée deses coordonnées, ce qui suppose un choix particulier de base, nous verrons que lesfonctions d’onde ψ(x) et ψ(p) sont les « coordonnées » du vecteur d’état ψ dans desbases particulières.

Dans la première partie du chapitre nous discutons les conséquences des trois pre-miers postulats redéfinissant les concepts que nous avons énoncés dans la section 1.4.Dans le prochain chapitre, nous discuterons les postulats de mesure et dans le cha-pitre 5 le postulat d’évolution.

3.2 PRÉLUDE : ESPACE DES FONCTIONS D’ONDEL’ensemble F des fonctions complexes forme un espace vectoriel construit sur lecorps des nombres complexes C. Pour cela F est muni de la loi d’addition interneψ(�r) + χ(�r), où ψ et χ ∈ F , et de la loi de multiplication externe αψ(�r) où α ∈ C.

Par la suite nous raisonnons sur les fonctions d’onde en dimension d = 1 pouralléger les notations. La généralisation ne présente pas de difficulté.©D

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Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

• Produit scalaire

L’espace vectoriel F est muni du produit hermitien

〈ϕ |ψ 〉 def=

∫dx ϕ(x)∗ψ(x) (3.1)

• Bases discrètes

Soit {un(x)} une base discrète de fonctions d’onde orthonormées. Ses éléments satis-font la condition d’orthonormalisation∫

dx u∗n(x) un′ (x) = δn,n′ . (3.2)

La relation de fermeture (ou de « complétude »), dont nous expliquerons le sens plusbas, joue un rôle dual ∑

n

un(x) u∗n(x′) = δ(x − x′), (3.3)

où δ(x) est la distribution de Dirac (cf. annexe 2.B).

Décomposition d’un état dans la base : si on considère une fonction d’onde quel-conque ψ(x), il existe une décomposition unique ψ(x) =

∑n ψn un(x) où les compo-

santes ψn sont données par ψn = 〈un |ψ 〉 =∫

dx u∗n(x)ψ(x).

Exercice 3.1 (F) Soient deux fonctions d’onde ψ(x) et χ(x), vérifier que le produitscalaire s’exprime à l’aide de leurs composantes dans la base {un(x)} comme 〈ψ |χ 〉 =∑

n ψ∗nχn.

• Bases continues

Nous aurons également à considérer des bases orthonormées, dont les vecteurs sontindexés par un paramètre continu, que nous notons ici α. Ce cas a déjà été introduitdans la section 2.2.1. Rappelons que la normalisation s’écrit alors comme :∫

dx u∗α(x) uα′ (x) = δ(α − α′). (3.4)

L’analogue de (3.3) est bien sûr∫dα uα(x) u∗α(x′) = δ(x − x′). (3.5)

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Page 73: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

3.2. Prélude : espace des fonctions d’onde

Exemple 1 de base continue : ondes planes. Un premier exemple de bases continuesest celui des ondes planes φp(x), avec p ∈ R, introduites dans le chapitre précédent

φp(x) =1

√2π�

eipx/�, (3.6)

décrivant une particule d’impulsion p. On a montré que∫

dx φ∗p(x)φp′ (x) = δ(p− p′).

Exemple 2 de base continue : une particule localisée spatialement. On peut égale-ment considérer la base des fonctions d’onde décrivant une particule localisée enx0 ∈ R :

ξx0 (x) = δ(x − x0). (3.7)

En utilisant (2.57) on vérifie que∫

dx ξ∗x0(x) ξx′0

(x) = δ(x0 − x′0).

Exercice 3.2 (F) Donner l’expression des fonctions d’onde des deux bases précé-dentes dans l’espace réciproque : φp0(p) et ξx0 (p). Interprétation ?

• Opérateurs linéaires

Les observables physiques (quantités physiques) sont représentées par des opéra-teurs linéaires hermitiques agissant dans F . Un opérateur A fait correspondre à unétat ψ un nouvel état ψ′ = Aψ. Discutons deux exemples importants.

• L’opérateur de position x. Lorsque la particule se trouve localisée spatialement,une unique valeur x0 est associée à la position (Δxξx0

= 0). Agissant sur l’état quan-tique décrit par la fonction d’onde ξx0(x), l’opérateur x peut donc être remplacépar x0 : (xξx0 )(x) = x0 ξx0 (x) (autrement dit ξx0 (x) est un état propre de l’opérateur xpour la valeur propre x0). On a donc (xξx0 )(x) = x0 δ(x−x0) = x δ(x−x0) = x ξx0 (x).Puisque les ξx0 (x) forment une base, cette dernière égalité nous montre que l’ac-tion de l’opérateur position sur une fonction d’onde quelconque correspond à lamultiplication par x :

(xψ)(x) = xψ(x) (3.8)

• L’opérateur d’impulsion p. De la même manière, l’état « onde plane » φp(x)est caractérisé par une unique valeur de l’impulsion : p (i.e. Δpφp = 0). Agissant

sur φp, l’opérateur p peut être substitué par p : (pφp)(x) = pφp(x) = −i� ddx

eipx/�√

2π�,

d’où en général

(pψ)(x) = −i�d

dxψ(x) (3.9)

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Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

• Principe de correspondance

Maintenant que nous avons déterminé l’action des opérateurs position et impul-sion dans l’espace de Hilbert, le principe de correspondance nous permet deconstruire n’importe quelle autre fonction des variables canoniquement conjuguées.Par exemple l’opérateur répresentant l’énergie est donné en remplaçant x et p dansla fonction de Hamilton par les opérateurs H(x, p) → H(x, p). En cas d’ambiguïté,si l’énergie contient un terme du type xp qui donnerait un terme non hermitien, onsymétrisera le résultat, i.e. xp → 1

2 (x p + px).

Exercice 3.3 (F) Quelle est l’action de l’opérateur « énergie » (l’hamiltonien)

H =p2

2m + V(x) sur la fonction d’onde (Hψ)(x) ? Quelle forme prend l’équationi� ∂∂tψ(x, t) = (Hψ)(x, t) ?

Exercice 3.4 (F) Comment agissent x et p sur les fonctions d’onde dans l’espacedes impulsions ? Déduire l’équation de Schrödinger pour la fonction d’onde dansl’espace des impulsions i� ∂∂t ψ(p, t) = (Hψ)(p, t). La résoudre dans le cas libre.

3.3 FORMALISME DE DIRAC

3.3.1 Espace de Hilbert et vecteurs d’état

• Espace de Hilbert

Nous allons dorénavant nous passer du choix d’une représentation particulière. Lesétats quantiques sont décrits par des vecteurs d’un espace des états, l’espace deHilbert H . La fonction d’onde ψ(x) ∈ F doit donc être comprise comme l’en-semble des « composantes » d’un vecteur ψ ∈ H (la coordonnée spatiale x joue lerôle d’indice de la composante du vecteur).

• Produit scalaire

L’espace vectoriel des états, construit sur le corps des complexes, est muni d’un pro-duit hermitien. Soit ψ, χ ∈ H , le produit scalaire est noté 〈ψ |χ 〉 et satisfait la pro-priété

〈ψ |χ 〉 = 〈χ |ψ 〉∗ (3.10)

Autrement dit : soient α, β ∈ C et χ1, χ2 ∈ H , le produit scalaire est linéaire parrapport au second argument

〈ψ |αχ1 + βχ2 〉 = α〈ψ |χ1 〉 + β〈ψ |χ2 〉 (3.11)

et antilinéaire par rapport au premier

〈αχ1 + βχ2 |ψ 〉 = α∗〈χ1 |ψ 〉 + β∗〈χ2 |ψ 〉. (3.12)

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Page 75: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

3.3. Formalisme de Dirac

Remarquons que ces propriétés découlent de la définition (3.1). Comme tout bonproduit scalaire, il permet de définir une norme (positive) ||ψ||2 = 〈ψ |ψ 〉 et d’autrepart 〈ψ |ψ 〉 = 0 si et seulement si ψ est le vecteur nul de l’espace de Hilbert.

• Interprétation physique du produit scalaire

Le produit scalaire 〈ψ |χ 〉 s’interprète comme l’amplitude de probabilité pourqu’étant dans l’état χ, le système soit observé dans l’état ψ. Cette interprétations’éclaircira avec la présentation des postulats de mesure.Normalisation : L’interprétation physique impose de considérer des vecteurs normés〈ψ |ψ 〉 = 1. Gardons toutefois en mémoire que les bases continues sont normaliséesselon la condition : 〈uα |uα′ 〉 = δ(α − α′), où α est un paramètre continu indiçant lesétats (l’impulsion dans le cas des ondes planes).Conséquence : Considérons un système dans un état quantique |ψ 〉 = a |u1 〉 + b |u2 〉où les deux états |u1 〉 et |u2 〉 sont orthogonaux (on doit donc avoir |a|2 + |b|2 = 1).Les coefficients a et b sont les amplitudes de probabilité de se trouver respectivementdans les états |u1 〉 et |u2 〉.

• Vecteur dual – Ket et Bra

Nous avons introduit la notation 〈φ |ϕ 〉 pour le produit scalaire de deux vecteursd’état. De même que le produit scalaire V†W entre deux vecteurs colonne V et W deCN se sépare en un vecteur ligne complexe conjugé (le dual) et le vecteur colonne, lesnotations de Dirac reposent sur l’idée de noter le vecteur ϕ comme |ϕ 〉 (un « ket »)et son dual comme 〈ϕ | (un « bra »)1. Le produit scalaire est donc le produit d’un brapar un ket :

〈φ |ϕ 〉︸�︷︷�︸Bracket

≡ 〈φ |︸︷︷︸Bra

|ϕ 〉︸︷︷︸Ket

(3.13)

Il va sans dire qu’il n’y a rien à comprendre dans cette équation.

• Espace de Hilbert de dimension finie

En général l’espace de Hilbert est de dimension infinie. S’il est de dimension finie,N, il est isomorphe à CN . Introduisons une base orthonormée {|un 〉}n=1,··· ,N , alors lesopérateurs peuvent être représentés par des matrices N × N à coefficients complexesdans cette base.

1. Les termes « bra » et « ket » viennent de la section du mot anglais « bracket » (crochet) désignant leproduit scalaire. Le lecteur troublé par la notation de Dirac pourra toujours se souvenir de l’analogieavec les vecteurs colonnes de l’espace vectoriel CN , muni du produit scalaire V†W. La structure est lamême. Le symbole † désigne la conjugaison hermétique introduite plus bas.©D

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Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

3.3.2 Opérateurs linéaires et observables

• Opérateurs linéaires

Un opérateur linéaire A (qui serait représenté par une matrice dans CN) fait corres-pondre un vecteur à un autre vecteur : |ψ′ 〉 = |Aψ 〉 ≡ A|ψ 〉. Il doit satisfaire :

A(α|ψ1 〉 + β|ψ2 〉) = α A|ψ1 〉 + β A|ψ2 〉. (3.14)

Éléments de matrice. Les éléments de matrice de l’opérateur A sont obtenus en le« sandwichant » entre un bra et un ket : 〈ψ1 |A|ψ2 〉. Autrement dit, dans une based’états {|ψi 〉} l’opérateur A est représenté par la matrice :

...〈ψi |

...

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝...

· · · Ai j · · ·...

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠· · · |ψ j 〉 · · ·

où Ai j = 〈ψi |A|ψ j 〉. (3.15)

Produit d’opérateurs. L’opérateur produit entre deux opérateurs A et B se définitcomme : (AB)|ψ 〉 = A(B|ψ 〉).Dernière remarque : Un opérateur fait correspondre à un ket un autre ket. L’objetobtenu en multipliant un ket par un bra (attention à l’ordre !) |ψ 〉〈χ | est donc unopérateur (alors que 〈ψ |χ 〉 est un nombre). En effet, faisons agir |ψ 〉〈χ | sur unvecteur :

(|ψ 〉〈χ |)|ϕ 〉 = |ψ 〉 〈χ |ϕ 〉︸�︷︷�︸∈C

≡ 〈χ |ϕ 〉 |ψ 〉 (3.16)

La dernière permutation est licite car 〈χ |ϕ 〉 est un nombre. Le résultat est bien unvecteur, Qed. Cette petite manipulation suggère la puissance des notations de Dirac.

• Projecteur

Soit |ψ 〉 ∈ H , l’opérateur

Πψdef= |ψ 〉〈ψ | (3.17)

est le projecteur sur le vecteur |ψ 〉 (on peut s’en convaincre très facilement si onrepense à l’analogie avec CN). Son action sur un vecteur |χ 〉 s’écrit :Πψ|χ 〉 = 〈ψ |χ 〉|ψ 〉 =(composante de |χ 〉 sur |ψ 〉)×vecteur |ψ 〉.

On vérifie facilement que Πψ est idempotent (Π2ψ = Πψ).

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Page 77: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

3.3. Formalisme de Dirac

• Relation de fermeture

Soit {|un 〉} une base orthonormée de H , i.e. 〈un |un′ 〉 = δn,n′ , l’identité peut êtrereprésentée comme une somme de projecteurs sur les vecteurs de base :∑

n

|un 〉〈un | = 1 (3.18)

Dans le cas d’une base continue {|uα 〉}, la relation de fermeture prend naturellementla forme : ∫

dα |uα 〉〈uα | = 1. (3.19)

Ces relations, qui sont équivalentes à (3.3, 3.5), se révéleront très utiles.

Exercice 3.5 (F) Considérons un espace de Hilbert de dimension 3 dont une baseorthonormée est {|u1 〉, |u2 〉, |u3 〉}.a) Écrire le vecteur colonne associé à |ψ 〉 = N(|u1 〉 − 2i|u3 〉). Calculer N pour que

le vecteur soit normé. Quel objet est associé au bra 〈ψ | ?b) On introduit |χ 〉 = 1√

2(i|u1 〉 + |u2 〉). Calculer le produit scalaire 〈ψ |χ 〉.

c) Écrire la matrice représentant l’opérateur A = i|u1 〉〈u3 | + |u2 〉〈u2 | − i|u3 〉〈u1 |.Vérifier que la matrice est hermitique. Diagonaliser la matrice.

• Commutateur

Soient deux opérateurs A et B agissant dans H , nous définissons le commutateurcomme :

[A, B]def= AB − BA. (3.20)

Si le commutateur est nul on dit que « les opérateurs commutent » : [A, B] = 0 ⇒AB = BA.

Exercice 3.6 (F) Démontrer la relation (très utile) : [AB, C] = A[B, C] + [A, C]B.Déduire des relations analogues pour [ABC, D] puis [AB, CD].

• Conjugaison hermitique

Soit A un opérateur agissant dans H . L’opérateur conjugué hermitique est noté A†.Il est défini par :

〈ψ |Aϕ 〉 = 〈A†ψ |ϕ 〉. (3.21)

Autrement dit :〈ψ |A|ϕ 〉∗ = 〈ϕ |A†|ψ 〉 (3.22)©

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Page 78: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

Si on note 〈ψ1 |A|ψ2 〉 = A12 l’élément de matrice, la conjugaison hermitique agitcomme la transposition combinée à la conjugaison complexe : (A†)12 = (A21)∗.

• Propriétés. Soient α ∈ C, |ψ 〉, |χ 〉 ∈ H et A, B et C des opérateurs. On a :(A†)† = A, (A + B)† = A† + B†, (α A)† = α∗ A†.

• La conjugaison hermitique agit donc sur les objets suivants comme :

α↔ α∗ (3.23)

|ψ 〉 ↔ 〈ψ | (3.24)

A ↔ A† (3.25)

|ψ 〉〈χ | ↔ |χ 〉〈ψ | (3.26)

ABC ↔ C†B†A† (3.27)

Exercice 3.7 (F) Conjuguer α 〈φ |A|ψ 〉〈χ |BC.Exprimer [A, B]† comme un commutateur des opérateurs conjugués.

• Opérateur hermitique (ou auto-adjoint)

A est appelé un opérateur hermitique si A = A†. Les observables physiques sont re-présentées par des opérateurs hermitiques agissant dans l’espace de Hilbert (pour unejustification physique, cf. note de bas de page 17 de la section 4.1.1 et le chapitre 4).

• Spectre d’un opérateur

Soit A un opérateur. |ϕ 〉 ∈ H est un vecteur propre associé à la valeur propre λ ∈ Cs’il satisfait l’équation A|ϕ 〉 = λ|ϕ 〉.

Si A est hermitique, ses valeurs propres sont réelles et il est possible de choisir lesvecteurs propres afin qu’ils forment une base orthonormée. L’ensemble des couplesde valeurs propres et vecteurs propres {an, |ϕn 〉}, avec A|ϕn 〉 = an|ϕn 〉, est appelé lespectre de l’opérateur A (parfois on appelle « spectre » l’ensemble des valeurs propresseulement).

Nous faisons quelques rappels d’algèbre linéaire dans l’annexe 3.A. En particuliercomment trouver le spectre.

• Représentation spectrale d’un opérateur hermitique

Lorsque l’opérateur est hermitique, ses vecteurs propres forment une base orthonor-mée et nous pouvons écrire une relation de fermeture

∑n |ϕn 〉〈ϕn | = 1. En faisant

agir A sur les deux membres nous obtenons une représentation de l’opérateur en

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Page 79: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

3.3. Formalisme de Dirac

terme de ses valeurs propres et vecteurs propres2 :

A =∑

n

an|ϕn 〉〈ϕn |. (3.28)

Exercice 3.8 (MF) Soit f (x) une fonction. Utiliser la relation de l’exercice précé-dent pour montrer que l’opérateur f (A) admet les mêmes vecteurs propres que A.Quelles sont les valeurs propres de f (A) ?

• Retour sur les représentations en espace et en impulsion

Nous allégeons les notations introduites ci-dessus : nous notons le vecteur décrivantla particule localisée en x0 comme | x0 〉 (qui correspond à la fonction d’onde ξx0(x)).D’autre part nous notons | p 〉 le vecteur représentant l’état d’impulsion p (associé àla fonction d’onde φp(x)).

La simplification de notation consiste donc, pour l’état localisé spatialement en|ξx 〉 −→ | x 〉 , et pour l’état localisé dans l’espace des impulsions |φp 〉 −→ | p 〉 .

Cette simplification de notation se fait au prix d’une petite ambiguïté typique chezles physiciens, qui consiste à spécifier le sens physique d’une quantité (| x 〉 ou | p 〉) àl’aide de la lettre utilisée pour la variable, en principe muette (x ou p).

D’après notre interprétation physique du produit scalaire, 〈 x |ψ 〉 a le sens de« l’amplitude de probabilité pour qu’étant dans l’état |ψ 〉, la particule soit observéedans l’état | x 〉, i.e. en x. » C’est bien la fonction d’onde :

ψ(x) = 〈 x |ψ 〉 (3.29)

De même 〈 p |ψ 〉 désigne « l’amplitude de probabilité pour qu’étant dans l’état |ψ 〉,le système soit observé dans l’état | p 〉, i.e. avec une impulsion p. » C’est la fonctiond’onde dans l’espace des impulsions :

ψ(p) = 〈 p |ψ 〉 (3.30)

Donnons une relecture de la relation entre la fonction d’onde ψ(x) et sa transforméede Fourier ψ(p). Nous partons du vecteur |ψ 〉 et nous introduisons la relation defermeture

∫dx | x 〉〈 x | = 1 :

|ψ 〉 = 1︸︷︷︸∫dx | x 〉〈 x |

× |ψ 〉 =∫

dx | x 〉 〈 x |ψ 〉︸�︷︷�︸ψ(x)

. (3.31)

2. Si l’opérateur n’est pas hermitique (ou une fonction d’un opérateur hermitique comme un opérateurunitaire) mais tout de même diagonalisable, la décomposition est plus compliquée puisqu’à chaquevaleur propre est associée un couple de vecteurs propres droit et gauche : A|Dn 〉 = an|Dn 〉 et 〈Gn |A =an〈Gn | qu’on peut choisir tels que 〈Gn |Dm 〉 = δmn (ces deux vecteurs ne sont en général pas reliés parune simple conjugaison hermitique). Dans ce cas A =

∑n an|Dn 〉〈Gn |.©

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Page 80: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

Nous multiplions l’équation à gauche par 〈 p | :

〈 p |ψ 〉 =∫

dx 〈 p | x 〉 〈 x |ψ 〉 ⇔ ψ(p) =∫

dx√

2π�e−ipx/� ψ(x) (3.32)

où nous avons utilisé l’expression de l’onde plane 〈 x | p 〉 = 1√2π�

eipx/�. Dans lesnotations de Dirac, la transformée de Fourier prend bien le sens du passage des coor-données dans la base {| x 〉} aux coordonnées dans la base {| p 〉}.

• Vecteurs propres des opérateurs x et p

L’équation (3.8), (xψ)(x) = 〈 x |x|ψ 〉 = x〈 x |ψ 〉, étant vraie quel que soit le vecteur,nous pouvons simplifier par le ket |ψ 〉 : le vecteur | x 〉 est donc le vecteur propre del’opérateur x (évidemment). En procédant de la même manière à partir de (pψ)(p) =〈 p |p|ψ 〉 = p〈 p |ψ 〉 nous obtenons

x | x 〉 = x | x 〉 (3.33)

p | p 〉 = p | p 〉. (3.34)

• Représentation d’un opérateur et éléments de matrice

Un opérateur A agit sur les vecteurs |ψ 〉 de l’espace de Hilbert H . Il est repré-senté par un opérateur Ax agissant sur les fonctions d’onde ψ(x) ∈ F , ou encorepar un opérateur Ap agissant sur les fonctions d’onde dans l’espace des impulsionsψ(p) ∈ F . Par exemple, l’opérateur impulsion A → p est représenté par la dérivation,Ax → −i� d

dx , et par la multiplication par p, Ap → p, dans F .Le calcul d’un élément de matrice peut être effectué dans n’importe laquelle des

représentations. Par exemple, à l’aide des fonctions d’onde ψ(x) ou ψ(p), il fait inter-venir Ax ou Ap :

〈χ |A|ψ 〉 =∫

dx χ∗(x) Ax ψ(x) =∫

dp χ∗(p) Ap ψ(p) (3.35)

on a introduit une relation de fermeture et utilisé 〈 x |A|ψ 〉 ≡ 〈 x |Aψ 〉 = (Aψ)(x) =Axψ(x). En général on utilisera une notation unique pour A, Ax et Ap afin d’alléger.Exemple 1 : position.

〈χ |x|ψ 〉 =∫

dxχ∗(x) xψ(x) = i�∫

dp χ∗(p)dψ(p)

dp(3.36)

Exemple 2 : énergie cinétique, Hcin =p2

2m .

〈χ | p2

2m|ψ 〉 =

∫dxχ∗(x)

−�2

2md2ψ(x)

dx2=

∫dp χ∗(p)

p2

2mψ(p) (3.37)

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Page 81: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

3.3. Formalisme de Dirac

Exemple 3 : position et impulsion dans la base {| x 〉}. L’opérateur position est diagonaldans la base des états localisés spatialement, ce qui prend la forme 〈 x′ |x| x 〉 = x δ(x−x′). Les éléments de matrice de l’opérateur impulsion s’expriment comme 〈 x′ | p| x 〉 =�i δ(x − x′) d

dx , où la présence de la dérivée nous rappelle que l’opérateur p n’est pasdiagonal dans la base {| x 〉}.

Exercice 3.9 (F) Calculer 〈ψ |Hcin |ψ 〉 pour la fonction d’onde gaussienne ψ(x) =

N exp− x2

2a2 (déterminer d’abord la constante de normalisation N).

• Relation de commutation canonique

Les opérateurs x et p satisfont :

[x, p] = i� (3.38)

Tout couple d’opérateurs « canoniquement conjugués »3 vérifie une relation ana-logue. Remarquons que cette équation est incompatible avec un espace de Hilbertdes états orbitaux de dimension finie. En raisonnant par l’absurde : supposonsdim H = N < ∞ alors la trace de l’équation Tr {[x, p]} = i�Tr {1} conduit au résultatabsurde 0 = i�N. Pour une dimension N = ∞, le résultat 0 = i�∞ nous rappelleseulement que l’opération de trace est ici mal définie.

Démonstration de (3.38) : Cette relation doit être vérifiée pour toutes les représenta-tions des opérateurs. Nous avons défini plus haut leur action sur les fonctions d’onde.Faisons agir le commutateur sur une fonction d’onde quelconque :

〈 x |[x, p]|ψ 〉 = 〈 x | [x, p]ψ 〉 ≡ ([x, p]ψ)(x) = −x i�d

dxψ(x) + i�

ddx

(xψ(x)) (3.39)

= −i� xdψ(x)

dx+ i�ψ(x) + i� x

dψ(x)dx

= i�ψ(x). (3.40)

Cette relation est vraie ∀ ψ(x), ce qui permet d’en déduire l’égalité entre opérateurs.Qed.

Un bon exercice, laissé aux soins du lecteur, sera de démontrer la relation de com-mutation canonique (3.38) en utilisant les représentations des opérateurs dans l’es-pace des fonctions d’onde en impulsion ψ(p) (représentations obtenues dans l’exer-cice 3.4).

3. Une autre construction de la théorie quantique aurait pour point de départ d’imposer la relation decommutation [q, p] = i� entre variables canoniquement conjuguées (voir annexe A.1), alors que nousl’avons ici déduite dans le cadre de la description ondulatoire de Schrödinger et des considérations surles fonctions d’onde et leurs transformées de Fourier.©D

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Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

• Limite classique �→ 0

En mécanique quantique, les quantités physiques « position » et « impulsion » sontreprésentées par des objets non commutant, éq. (3.38). Toutefois lorsque nous faisons�→ 0 nous retrouvons des objets commutants, comme en physique classique (parlerde limite � → 0 est un raccourci commode ; bien entendu � est fixé dans la nature etse sont les échelles physiques du problème considéré qui seront très grandes devantle quantum d’action).

Par exemple, si nous considérons l’exemple du puits infini de largeur a (§ 1.5.3),

nous avons vu que l’impulsion est quantifiée pn = n�π/a ainsi que l’énergie En =p2

n2m ,

n ∈ N∗. Si nous prenons la limite classique � → 0, nous devons simultanément fairetendre le nombre quantique n vers l’infini pour garder pn fini ; le spectre de valeurs del’impulsion {pn} devient de plus en plus dense, autrement dit nous perdons trace dela quantification. C’est l’essence du principe de correspondance proposé par Bohr en1920 : dans la limite des grands nombres quantiques, la physique quantique coïncideavec la physique classique.

La question du passage du quantique (� fini) au classique (� = 0) est nettementplus subtile que ce petit paragraphe ne le laisse penser. La difficulté principale estde comprendre comment « raccorder » des concepts aussi différents que ceux desmécaniques quantique et classique.

Exercice 3.10 (F) Inégalité de Heisenberg (2.39)

Soit |ψ 〉 un état quantique quelconque. Pour simplifier, on suppose que4 〈x〉ψ = 0 et

〈 p〉ψ = 0. On définit le polynôme P(λ)def= ||(x+ iλ

�p)|ψ 〉||2. Exprimer P(λ) en fonction

de 〈x2〉ψ et 〈 p2〉ψ. En déduire (2.39).

• Inégalité de Heisenberg temporelle

La description ondulatoire présentée dans le chapitre précédent nous a permi d’obte-nir, à partir d’une propriété de la transformation de Fourier, aussi bien l’inégalité deHeisenberg spatiale ΔxΔp � �2 que l’inégalité temporelle ΔtΔE � �2 . Cette symétrieespace/impulsion↔temps/énergie est toutefois brisée dans le formalisme de Diracpour la raison que, bien qu’il existe un opérateur « énergie », il n’existe pas « d’opé-rateur temps ». Ce dernier apparaît comme un paramètre. Cette remarque est à l’ori-gine des difficultés que l’on rencontre parfois à interpréter l’inégalité de Heisenbergtemporelle (cf. exercice 5.7).

4. ∀ |ψ 〉, on peut toujours choisir l’origine des coordonnées de telle sorte que 〈x〉ψ = 0 (i.e. faireagir une translation d’espace permettant de réaliser cette condition). De même, il existe toujours unetransformation de Galilée permettant de se ramener à une situation telle que 〈 p〉ψ = 0.

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Page 83: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

3.3. Formalisme de Dirac

3.3.3 Produits tensoriels

Considérons deux systèmes quantiques dont les espaces de Hilbert sont notés H1

et H2. L’état des deux systèmes est défini par la donnée de deux vecteurs d’état : ce-lui du système 1, |φ 〉1 ∈ H1, ainsi que celui du système 2, |χ 〉2 ∈ H2. On construitun vecteur produit tensoriel, noté |Ψ 〉 = |φ 〉1 ⊗ |χ 〉2, décrivant l’état du systèmecomplet. Le ⊗ nous permet donc de « grouper » deux vecteurs éléments de deux es-paces distincts. L’espace des vecteurs spécifiant l’état des deux systèmes est l’espaceproduit tensoriel, que nous notons H =H1 ⊗H2.

• Intrication

Nous avons introduit la notion de vecteur produit tensoriel en considérant des vec-teurs du type |Ψ 〉 = |φ 〉1 ⊗ |χ 〉2, cependant il est clair que tous les vecteurs de Hn’ont pas cette forme factorisée. En effet, le principe de superposition nous autorise àconsidérer des combinaisons linéaires de tels vecteurs, appelées états « intriqués » :

|Ψ 〉 = α |φ 〉1 ⊗ |χ 〉2 + β |φ′ 〉1 ⊗ |χ′ 〉2. (3.41)

En général ce type d’états ne pourra pas être factorisé (cela n’est en effet pas pos-sible si 〈φ |φ′ 〉 = 0 et 〈χ |χ′ 〉 = 0). Pour comprendre plus clairement ce point noussupposons que les deux espaces de Hilbert possèdent respectivement deux bases or-thonormées {|un 〉1} et {| vn 〉2}. Un état quelconque de H sera de la forme

|Ψ 〉 =∑n,m

Ψn,m|un 〉1 ⊗ | vm 〉2. (3.42)

L’état ne peut être écrit sous une forme factorisée que dans le cas très particulieroù les composantes ont une forme factorisée Ψn,m = ψnχm ; on a alors |Ψ 〉 =( ∑

n ψn|un 〉1)⊗

(∑m χm| vm 〉2

). Autrement dit, la condition de factorisation suppose

que la « matrice » des coordonnées Ψn,m puisse être écrite comme le produit d’unvecteur colonne (les ψn) par un vecteur ligne (les χn).

• Produit scalaire

Soit |Ψ 〉 = |φ 〉1 ⊗ |χ 〉2 et |Ψ ′ 〉 = |φ′ 〉1 ⊗ |χ′ 〉2, alors

〈Ψ |Ψ ′ 〉 = (1〈φ | ⊗ 2〈χ |)(|φ′ 〉1 ⊗ |χ′ 〉2) = 〈φ |φ′ 〉 〈χ |χ′ 〉. (3.43)

• Opérateurs

Soient A1 un opérateur agissant dans H1 et A2 agissant dans H2. Nous notons 11,resp. 12, l’opérateur identité dans H1, resp. H2. À partir de A1 et A2 nous pouvons©D

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Page 84: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

construire des opérateurs agissant dans H tels que :

A1 ⊗ 12 , 11 ⊗ A2 (3.44)

A = A1 ⊗ 12 + 11 ⊗ A2 ou B = A1 ⊗ A2 etc. (3.45)

Dans la pratique on omettra les opérateurs identités.Bien sûr on a (A1 ⊗ A2)(|φ 〉1 ⊗ |χ 〉2) = (A1|φ 〉1) ⊗ (A2|χ 〉2).

Application 1 : État quantique d’une particule dans un espace bidimensionnel.H�r = Hx ⊗ Hy. Par exemple, l’état décrivant la particule en �r est |�r 〉 = | x 〉 ⊗ |y 〉(cf. section 3.3.4). L’opérateur position �r regroupe deux opérateurs agissant dans cha-cun des espaces : �r = �ux x⊗1y+�uy 1x⊗y. Par la suite on omettra les opérateurs identitéset on écrira plus simplement �r = �ux x + �uy y.

Application 2 : État à plusieurs particules. Soit H1 l’espace de Hilbert pour la parti-cule 1 et H2 l’espace des états de la particule 2. Les états à deux particules sont desproduits tensoriels |particule 1 : φ 〉 ⊗ |particule 2 : χ 〉 ou des combinaisons linéairesde tels états.

Application 3 : Degrés de liberté internes. Certaines particules possèdent des degrésde liberté internes, comme le spin (cf. chapitre 8). L’état de la particule dans l’espacephysique est décrit par un vecteur |ψ 〉 de H�r et l’état dans l’espace interne par unautre vecteur |χ 〉 de Hspin. L’espace des états est H�r ⊗Hspin.

3.3.4 Problèmes séparables

Considérons un problème dont l’espace de Hilbert a la structure H = Hx ⊗ Hy,comme par exemple l’espace de Hilbert d’une particule se mouvant dans un espacebidimensionnel. Deux opérateurs Hx et Hy agissent respectivement dans les espacesHx et Hy.

Si l’hamiltonien possède la structure :

H = Hx ⊗ 1y + 1x ⊗ Hy (3.46)

le problème est dit « séparable ». Connaissant les spectres de valeurs propres et devecteurs propres des hamiltoniens Hx et Hy, il est possible de construire une based’états propres de H (notons que la base d’états propres de H ainsi construite n’estpas toujours unique). En effet, si nous connaissons |ϕ 〉x ∈ Hx et |χ 〉y ∈ Hy telsque Hx|ϕ 〉x = Ex |ϕ 〉x et Hy|χ 〉y = Ey|χ 〉y, nous voyons immédiatement que l’état|Ψ 〉 = |ϕ 〉x ⊗ |χ 〉y est état propre de H avec la valeur propre Ex + Ey :

H|Ψ 〉 = (Hx ⊗ 1y + 1x ⊗ Hy)|ϕ 〉x ⊗ |χ 〉y (3.47)

= (Hx|ϕ 〉x) ⊗ (1y|χ 〉y) + (1x |ϕ 〉x) ⊗ (Hy|χ 〉y) = (Ex + Ey)|Ψ 〉. (3.48)

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Page 85: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

3.3. Formalisme de Dirac

Pour des hamiltoniens possédant la structure (3.46), où les variables x et y ne sont pascouplées, nous avons donc un moyen simple de fabriquer une base d’états propresfactorisés (non intriqués). Du point de vue de la fonction d’onde, cela signifie qu’ellese factorise comme :

Ψ (�r) = 〈�r |Ψ 〉 = (〈 x | ⊗ 〈y |)(|ϕ 〉x ⊗ |χ 〉y) = 〈 x |ϕ 〉x 〈y |χ 〉y = ϕ(x)χ(y). (3.49)

Nous verrons de nombreuses applications de cette idée par la suite.

À retenir

Savoir manipuler les notations de Dirac.

Interprétation physique du produit scalaire 〈φ |ψ 〉.Hermiticité des opérateurs représentant des observables physiques.

L’action des opérateurs x et p sur les fonctions d’onde.

La relation de commutation canonique [x, p] = i� (dont découle l’inégalité deHeisenberg ΔxψΔpψ � �2 ).

Les calculs de commutateurs.

Produit tensoriel. La notion de problème séparable.

Dégénérescences résultant d’une symétrie vs. dégénérescences accidentelles (exer-cice 3.13).

Pour en savoir plus

Sur l’introduction des notations de Dirac et l’interprétation probabiliste, recommandonsla lecture de l’ouvrage [32]. On pourra également consulter [14].

ANNEXE 3.A : QUELQUES RAPPELS D’ALGÈBRELINÉAIRE

Lorsque l’espace de Hilbert H d’un système physique est de dimension N finie, Hest isomorphe à CN . Les kets sont représentés par des vecteurs colonnes, |ψ 〉 ∈ H ↔ψ ∈ CN, les bras par des vecteurs lignes (conjugués des précédants), 〈ψ | ↔ ψ†, et lesopérateurs par des matrices, par exemple |ψ 〉〈χ | ↔ ψχ†. Le produit scalaire prendla forme 〈ψ |χ 〉 ↔ ψ†χ. Nous rappelons quelques résultats d’algèbre linéaire pour ladiagonalisation de matrices.

Spectre d’une matrice

Considérons une matrice A à coefficients complexes de dimension N. Le spectre dela matrice est donné en résolvant l’équation (A − λ1N)ψ = 0 où ψ ∈ CN (1N est©D

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Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

la matrice identité de dimension N). Les valeurs propres sont donc les racines dupolynôme caractéristique P(λ) = det(A − λ1N).

• Matrice hermitique

Puisque les observables physiques sont représentées par des opérateurs hermitiques,A = A†, ce cas joue un rôle particulièrement important.

• Les valeurs propres sont réelles. Démonstration : Soit λn une valeur propre et ψ(n)

son vecteur propre, i.e. Aψ(n) = λnψ(n) (notons que nous repérons le vecteur avec

un exposant pour éviter la confusion avec les indices repérant les composantes).En conjuguant cette dernière équation nous obtenons ψ(n)†A = λ∗nψ

(n)† (où nousavons utilisé A = A†). Nous pouvons multiplier la première équation par le vecteurligne, par la gauche et la seconde par le vecteur colonne par la droite : ψ(n)†Aψ(n) =

λn||ψ(n) ||2 = λ∗n||ψ(n)||2 (la norme dans CN est ||ψ(n)||2 = ψ(n)†ψ(n)). D’où λn = λ∗n.Qed.

• Il existe une base orthonormée de vecteurs propres. Démonstration : Soit λn etλm deux valeurs propres distinctes et ψ(n) et ψ(m) deux vecteurs propres leur étantassociés : Aψ(n) = λnψ

(n) et ψ(m)†A = λmψ(m)†. Multiplions la première équation par

ψ(m)† par la gauche et la seconde par ψ(n) par la droite. La différence nous donne(λn − λm)ψ(m)†ψ(n) = 0. Deux vecteurs propres associés à deux valeurs propresdistinctes sont orthogonaux. Lorsqu’une valeur propre dégénérée, il est toujourspossible de choisir les vecteurs propres associés orthogonaux. Qed.

• Une matrice hermitique est diagonalisée à l’aide d’une matrice unitaire. Démons-tration : L’orthonormalisation des vecteurs propres s’écrit ψ(m)†ψ(n) = δnm. La ma-trice regroupant tous ces vecteurs colonnes U = (ψ(1), · · · ,ψ(N)) est bien unitaire :(U†U)i j = ψ(i)†ψ( j) = δi j. Elle réalise le changement de base diagonalisant lamatrice A :

A = U DU† (3.50)

où D est la matrice diagonale D = diag(λ1, · · · , λN).

Des propriétés similaires sont discutées en exercice pour les deux cas intéressants desmatrices réelles symétriques (cas particulier de matrice hermitique) et des matricesunitaires.

• Exemple

Diagonalisons la matrice σx =

(0 11 0

), i.e. trouvons les couples (λ ∈ R,ψ ∈ C2) qui

satisfontσxψ = λψ. (3.51)

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Page 87: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

Le polynôme caractéristique est P(λ) = det(σx − λ12) = λ2 − 1. Il possède deuxracines λ± = ±1.

1. Cherchons le vecteur propre ψ+ associé à λ = λ+. Écrivons ψT = (x, y), lesystème (3.51) donne deux équations identiques (évidemment puisque det(σx−λ+12) = 0) : y = x. Le vecteur propre est donc ψT

+ ∝ (1, 1).

2. De même, pour λ = λ−, on trouve ψT− ∝ (1,−1). Les deux vecteurs sont ortho-

gonaux, ψT−ψ+ = 0, car la matrice σx est hermitique.

Finalement, on normalise les vecteurs :

ψ+ =1√

2

(11

)et ψ− =

1√

2

(−11

). (3.52)

Puisque σx est réelle symétrique, la matrice U = (ψ+,ψ−) est orthogonale :

σx =12

(1 −11 1

) (1 00 −1

) (1 1−1 1

). (3.53)

La matrice 2 × 2 la plus générale sera diagonalisée au paragraphe 5.1.4.

Exercices

3.11 (MF) Inégalité de Heisenberg généralisée

Considérons trois opérateurs hermitiques A, B et C satisfaisant la relation [A, B] =i C. En s’inspirant de la démonstration de l’exercice 3.10, démontrer la relation deHeisenberg généralisée

ΔAψΔBψ �12|〈C〉ψ|. (3.54)

3.12 (MF)

Matrices réelles symétriques. Soit S une matrice réelle symétrique, S = S T, agis-sant dans CN . Montrer que ses valeurs propres sont réelles et que ses vecteurs proprespeuvent être choisis réels. En déduire que toute matrice réelle symétrique est diago-nalisée à l’aide d’une matrice orthogonale O (i.e. telle que O−1 = OT) : S = ODOT oùD = diag(λ1, · · · , λN) est la matrice diagonale regroupant les valeurs propres réelles.

Matrices unitaires. Soit U une matrice unitaire, agissant dans CN. Montrer qu’ilexiste une autre matrice unitaire V permettant de diagonaliser la matrice. Montrerqu’il existe une matrice hermitique Θ telle que U = eiΘ.

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Page 88: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 3 • Formalisme de Dirac – Postulats (1)

3.13 (MF) Boîte quantique bidimensionnelle

Nous considérons l’équation de Schrödinger bidimensionnelle − �2

2m

( d2

dx2+d2

dy2

)ψ(x, y)+

V(x, y)ψ(x, y) = Eψ(x, y). Le potentiel est nul dans un rectangle, pour 0 � x � a et0 � y � b, et infini hors du rectangle. Donner le spectre des énergies et les vecteurspropres associés. Analyser les dégénérescences : en particulier on discutera (i) le casa = 2b et (ii) le cas a = b.

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Page 89: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

LA MESURE –POSTULATS (2) 4

Lorsqu’un système microscopique (un atome par exemple) est sondé à l’aide d’unappareil de mesure, ce dernier joue le rôle d’interface entre le monde microscopique(l’atome) et le monde macroscopique (l’expérimentateur). L’appareil de mesure esten quelque sorte un amplificateur pour le signal envoyé par le système microsco-pique (par exemple un photon émis par l’atome, qui peut être détecté à l’aide d’unphotomultiplicateur). Ces remarques suggèrent que le processus de mesure affecteviolemment l’état quantique du système : sonder le système microscopique se faiten général à travers des échanges d’énergie ou d’impulsion au moins de l’ordre deséchelles (microscopiques) caractéristiques du système. L’action exercée sur le sys-tème quantique lors de la mesure n’est donc bien souvent pas une petite perturbation.

Avant d’énoncer et discuter les postulats de mesure évoqués brièvement dans lechapitre 1, revenons sur l’analyse de l’expérience des franges d’Young et tâchons dedégager quelques idées.

Figure 4.1– Mesure :passage du quantique auclassique.

Appareil demesure

Expérimentateur

euqipocsorcam ednoMeuqipocsorcim ednoM

4.1 MOTIVATIONS

Le dispositif de l’expérience d’Young représenté sur la figure 1.4 permet d’étudierles attributs de l’état quantique dans lequel se trouvent les particules (photons, élec-trons, neutrons, atomes, molécules, etc.) à la sortie de l’interféromètre. Il est impor-tant de bien insister sur ce point : bien qu’on envoie un grand nombre de particulessur l’interféromètre, chaque détection correspond à une mesure dans une même si-tuation reproductible, puisque toutes les particules arrivent sur l’interféromètre avecune impulsion bien déterminée, i.e. dans le même état quantique, du type onde plane|ψin 〉 = |�k 〉 = |particule d’impulsion �p = ��k 〉). Nous notons |ψout 〉 l’état quantique àla sortie du dispositif (juste avant la détection).©D

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Page 90: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 4 • La mesure – Postulats (2)

Le détecteur permet de compter le nombre de particules arrivées en un point. Ilréalise donc une mesure de la position de la particule. Si une particule est détectée,nous pouvons dire qu’après la mesure la particule se trouve localisée spatialementau niveau du détecteur en �r, dans un état de type |�r 〉 et si aucune particule n’estdétectée nous savons seulement que son état quantique est orthogonal à |�r 〉. Si nousattendons un temps suffisamment long, nous détectons des particules en différentespositions, alors que chaque particule est initialement dans le même état, répétons-le. L’expérience montre qu’à un même état quantique |ψout 〉, peuvent correspondredifférents résultats de mesure : |�r1 〉 (première particule détectée), |�r2 〉 (deuxièmeparticule détectée), etc. L’observation de la position d’une particule se traduit parune projection d’un état |ψout 〉, délocalisé puisqu’il est associé à plusieurs positionspossibles, sur un état localisé de type |�r 〉. On parle de projection (ou réduction)du paquet d’ondes. Une observation importante : la nature de l’état après la mesure(un état localisé spatialement) dépend de la procédure expérimentale. Le détecteurmesurant la position projette l’état quantique dans un état propre |�r 〉 de l’opérateurposition.

Nous considérons toujours le même dispositif expérimental mais dans un régimeoù le flux de particules est important. L’observation montre que les particules ar-rivent plus souvent dans certaines régions de l’espace : les impacts des particules sedistribuent en faisant apparaître une figure d’interférences (figure 1.6). Cette mesure,toujours réalisée à partir du même état |ψout 〉, nous fournit une nouvelle informationsur l’état : l’interfrange nous renseigne sur l’impulsion des particules, via la relationde de Broglie p = h/λ. Dans ce régime, l’interféromètre fonctionne comme un ap-pareil de mesure de l’impulsion. Il ne nous donne alors plus aucune information surune localisation de l’état après la mesure. Les deux mesures (position ou impulsion)sont donc incompatibles.

4.2 LES POSTULATS DE MESURE• Observable A

Rappelons le troisième postulat : l’observable A (une quantité physique) est représen-tée par un opérateur hermitique agissant dans l’espace de Hilbert. Un tel opérateur Aest caractérisé par son spectre : l’ensemble de ses valeurs propres {an} et de ses vec-teurs propres {|ϕn 〉} ; ces derniers forment une base orthonormée.

• Postulat de mesure (1) : résultats possibles lors d’une mesure

Une mesure de A ne peut avoir pour résultat qu’une des valeurs propres de A :

Une mesure de A� Une des valeurs propres an (4.1)

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Page 91: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

4.2. Les postulats de mesure

• Postulat de mesure (2) : probabilité du résultat d’une mesure

Si le système est initialement dans un état |ψ 〉, la probabilité pour que le résultat dela mesure de A donne la valeur propre an, supposée non dégénérée, est :

Proba[mesure de A� an] = |〈ϕn|ψ〉|2 (4.2)

i.e. la probabilité de se projeter sur l’état |ϕn 〉 associé à la valeur propre an.

• Postulat de mesure (3) : réduction du paquet d’ondes

Si le résultat de mesure est an, l’état quantique après la mesure est

|ψfinal 〉 = |ϕn 〉 (4.3)

On parle de « réduction du paquet d’ondes » puisque le processus de mesure « am-pute » la fonction d’onde d’une partie de ses composantes

|ψ 〉 = · · · + ψn|ϕn 〉 + · · · −→ mesure de A donne an −→ |ψfinal 〉 = |ϕn 〉. (4.4)

a) Généralisation au cas d’une valeur propre dégénérée

Les règles {(2), (3)} s’étendent facilement au cas où la valeur propre est dégénéréedn > 1 fois. Notons |ϕn, j 〉, avec j ∈ {1, · · · , dn}, les vecteurs propres formant une baseorthonormée du sous espace propre E (an). Alors Proba[A � an] =

∑j |〈ϕn, j|ψ〉|2.

L’état après la mesure est obtenu en projetant |ψ 〉 dans le sous-espace propre E (an) :

|ψfinal 〉 = N( dn∑

j=1

|ϕn, j 〉〈ϕn, j |)|ψ 〉 (4.5)

où N assure la normalisation 〈ψfinal |ψfinal 〉 = 1. Nous pouvons rendre plus compactsces résultats en introduisant le projecteur

Πndef=

dn∑j=1

|ϕn, j 〉〈ϕn, j | (4.6)

dans le sous-espace propre E (an). On a alors

Proba[A� an] = 〈ψ |Πn|ψ 〉 et |ψfinal 〉 =1√

〈ψ |Πn|ψ 〉Πn|ψ 〉 (4.7)

Le paragraphe 4.1 nous permet de comprendre mieux la motivation physique ayantconduit à décrire les observables par des opérateurs. La quantification de certaines©D

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Page 92: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 4 • La mesure – Postulats (2)

quantités physiques suggère de les décrire par des matrices (ou plutôt des opérateurs)caractérisées par leurs spectres de valeurs propres et de vecteurs propres. Les valeurspropres de ces matrices doivent être réelles (résultats potentiels de mesure) et leursvecteurs propres orthogonaux afin de n’affecter à chaque valeur propre qu’un uniquevecteur (i.e. état quantique). Les matrices satisfaisant ces propriétés sont des matriceshermitiques.

Nous discuterons à la fin du chapitre 8 une autre situation concrète où le processusde mesure est réalisé (expérience de Stern et Gerlach, section 8.2.3).

b) Développements plus récents sur la mesure

Au-delà des quelques justifications physiques que nous avons avancées, et malgréleur efficacité dans la pratique, les postulats de mesure, dans leur interprétation dite« de Copenhague », restent un ensemble de règles de prime abord ad hoc qui n’ontpas manqué de soulever de nombreuses questions d’ordre quasiment métaphysique.Par exemple, si le schéma de la figure 4.1 suggère une frontière entre le mondequantique et le monde classique, les postulats ne nous donnent aucune informationsur « l’endroit » (l’échelle ? l’instant ?) où placer cette frontière. En principe l’appa-reil de mesure est lui même constitué d’atomes régis par les lois de la mécaniquequantique. Le point sous-jacent est la question du principe de superposition : si unsystème quantique peut se trouver dans une superposition quantique de deux états,comme |ψ 〉 = 1√

2(| ↑ 〉 + | ↓ 〉), l’appareil mesurant l’observable dont | ↑ 〉 et | ↓ 〉 sont

états propres, donne l’un ou l’autre des deux résultats. Comment comprendre que leprincipe de superposition, validé au niveau microscopique (figure 1.6), cesse d’êtreopérant pour l’appareil de mesure ?

Dans la première moitié du xxe, même s’il était difficile de placer la frontière, laséparation entre le monde atomique (ou subatomique), régi par les lois quantiques,et le monde macroscopique de l’appareil de mesure était claire. Mais d’une part ladécouverte de phénomènes quantiques macroscopiques et d’autre part les progrès re-marquables dans les techniques expérimentales, ont mis fin à cette séparation nette.Dans les années 1980, des protocoles de mesures quantiques non destructives ontémergé, suggerant comment sonder l’intrication entre le système et un appareil demesure devant être également décrit par les lois quantiques. Le principe de ces pre-mières mesures, réalisées en optique quantique et physique atomique à la fin desannées 1980 et dans les années 1990 (cf. [19] pour une revue), a même pu être im-plémenté dans des expériences de matière condensée dans les années 2000 (boîtesà paires de Cooper, etc.)1. Du côté théorique, si les premières tentatives de descrip-tion quantique de l’appareil de mesure et de son intrication au système remontent

1. Sur ce dernier point on pourra par exemple consulter les articles récents D. Vion et al., « Manipulatingthe quantum state of an electrical circuit », Science 296, 886 (2002) ; A. Blais et al., « Cavity quantum

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Page 93: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

4.3. Valeur moyenne d’une observable

aux années 1930 (von Neumann), des avancées notables ont été réalisées dans lesannées 1980 (Zurek) avec la proposition d’un scénario à trois intervenants : le sys-tème quantique, l’appareil de mesure corrélé au système, et enfin « l’environnement »qui est responsable de la décohérence rapide à l’échelle macroscopique (le passaged’une superposition quantique d’états à un état classique, ou plus correctement pourles initiés, un « mélange statistique »). Le processus de décohérence a pu être analysédynamiquement dans une expérience de physique atomique en 1996 (cf. § 1.2.6).Bien qu’ils aient permi de déplacer la frontière classique/quantique, ces progrès re-marquables laissent toutefois entier le mystère sur l’ultime étape de la réduction dupaquet d’ondes (l’amputation d’une partie des composantes du vecteur d’état). Com-ment est-elle réalisée au cours de la mesure ? Puisqu’elle est causée par l’observation,quel est le degré de conscience de l’observateur nécessaire ? Etc.

Une autre difficulté, et non des moindres, est la question de la non localité et del’intrication. Afin de cerner le problème, considérons un cas concret : deux photons(le choix n’est pas anodin) sont émis depuis une source sous la forme d’un état depolarisation intriqué 1√

2

(| ↑ 〉⊗ | ↓ 〉− | ↓ 〉⊗ | ↑ 〉

)(nous n’écrivons pas la partie spatiale

de l’état). La mesure de l’état de polarisation du photon 1 donne | ↑ 〉 (ou | ↓ 〉) avecprobabilité 1/2. À l’instant où l’état du photon 1 est mesuré, la projection du paquetd’ondes fixe non seulement l’état de polarisation du photon 1 après mesure mais aussicelui du photon 2. Or les deux photons peuvent être très éloignés : la projection est unprocessus non local qui affecte les polarisations des deux photons au même instant,quelles que soient leurs positions. Dans un célèbre article de 1935, Einstein, Podolskyet Rosen avaient souligné la nature particulière des corrélations quantiques, formulantce que l’histoire à retenu comme « le paradoxe EPR ». Leur critique visait à appuyerl’idée que la mécanique quantique serait incomplète (à cause de son interprétationprobabiliste). Dans les années 1980, l’expérience a toutefois tranché en faveur de lamécanique quantique avec la vérification, à l’institut d’optique d’Orsay, de la natureparticulière des corrélations imposée par la mécanique quantique2.

4.3 VALEUR MOYENNE D’UNE OBSERVABLE

Si on réalise une unique mesure de l’observable A, on obtiendra aléatoirementune des valeurs propres. Une question est de savoir quel résultat on obtiendra enmoyenne, si on réalise un très grand nombre de mesures, toujours à partir du même

electrodynamics for superconducting electrical circuits : an architecture for quantum computation »,Phys. Rev. A 69, 062320 (2004).2. A. Aspect, P. Grangier & G. Roger, « Experimental realization of Einstein-Podolsky-Rosen-BohmGedankenexperiment : a new violation of Bell’s inequalities », Phys. Rev. Lett. 49, 91 (1982).©D

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Page 94: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 4 • La mesure – Postulats (2)

état |ψ 〉 :

〈A〉|ψ 〉 =∑

n

Proba[mesure de A� an] an =∑

n

|〈ϕn|ψ〉|2 an =∑

n

〈ψ|ϕn〉 an 〈ϕn|ψ〉.

(4.8)En utilisant une relation de fermeture, i.e la représentation spectrale de A donnée parl’équation (3.28), nous constatons que cette somme s’identifie à :

〈A〉| ψ 〉 = 〈ψ |A|ψ 〉 (4.9)

Le calcul de la valeur moyenne quantique ne nécessite pas la connaissance des valeurspropres et vecteurs propres, comme le laisse penser l’équation (4.8), mais simplementd’être capable de faire agir l’opérateur A sur le vecteur |ψ 〉.

4.4 ENSEMBLE COMPLET D’OBSERVABLESQUI COMMUTENT (ECOC)

Observables qui commutent. Soient deux observables A et B représentées par deuxopérateurs A et B commutant : [A, B] = 0. Dans ce cas il existe une base de vecteurspropres commune aux deux opérateurs.

Exercice 4.1 (F) Démontrer cette dernière proposition.

• ECOC

Une manière de déterminer l’état du système consiste à mesurer une observable A. Sion obtient une des valeurs propres an avec probabilité 1, cela signifie que le systèmeétait dans l’état |ϕn 〉 avant la mesure. Cependant si la valeur propre est dégénérée,obtenir cette valeur propre ne permet pas de savoir avec certitude quel était l’étatdu système : on sait seulement qu’il appartient au sous espace propre E (an) de Aassocié à la valeur propre an. C’est uniquement en réalisant la mesure d’une autreobervable B, commutant avec A, et dont les valeurs propres ne sont pas dégénéréesdans E (an) qu’on peut espérer spécifier sans ambiguïté l’état du système.

Bien entendu il est possible que davantage que 2 observables soient nécessairespour lever toutes les ambiguïtés liées aux dégénérescences. C’est le rôle d’un ECOC.

Exemple : Soit un espace de Hilbert de dimension 3 dont une base orthonormée est{|u1 〉, |u2 〉, |u3 〉}. Considérons l’exemple simple des deux opérateurs A et B repré-sentés par les matrices :

A =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝a1

a2

a2

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ et B =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝b1

b1

b3

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ . (4.10)

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Page 95: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

Si on mesure seulement A : un résultat a1 obtenu avec probabilité 1 nous indique quele système était dans l’état |u1 〉. Cependant un résultat a2 obtenu avec probabilité 1nous indique seulement que l’état est une combinaison linéaire α|u2 〉 + β|u3 〉 (sansdonner d’information sur α/β). A ne forme pas un ECOC à lui tout seul. En revanchele couple {A, B} est un ECOC : à chaque couple de résultats de mesures de A et B estassocié un unique vecteur :

mesure de A mesure de B Étata1 b1 → |u1 〉a2 b1 → |u2 〉a2 b3 → |u3 〉

Nous pouvons également donner une définition plus formelle d’un ECOC : un en-semble d’observables qui commutent admet une base commune de vecteurs propres.L’ensemble est complet si la base est unique.

À retenir

Les postulats de mesure ; la notion d’ECOC.

Pour en savoir plus

D’excellentes discussions de la question de l’intrication et de la mesure (non séparabi-lité et paradoxe EPR) : chapitre 6 de [30] ou chapitre 14 de [5]. D’autre références :[25, 31, 35].

Sur la mesure : W. H. Zurek, Decoherence and the transmission from quantum to clas-sical, Physics Today, p. 36 (october 1991). C. Cohen-Tannoudji, cours du collège deFrance de 1988-89 et 1989-90, www.phys.ens.fr/cours/college-de-france/.

Une excellente présentation des problèmes d’interprétation est [36].

Un ouvrage récent et plus avancé abordant ces questions est [19].

Exercices

4.2 (F) On considère une base orthonormée {|u1 〉, |u2 〉, |u3 〉} de l’espace de Hilbertet une observable représentée par l’opérateur A = a|u1 〉〈u1 |+b

(|u2 〉〈u3 |+ |u3 〉〈u2 |).

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Page 96: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 4 • La mesure – Postulats (2)

a) Quels sont les résultats de mesure de A si le système est dans l’état |ψini 〉 =C[|u1 〉 + 2i|u2 〉

](préciser la constante de normalisation). Dans chaque cas préci-

ser l’état |ψfin 〉 après la mesure. Calculer 〈A〉ψiniet ΔAψini .

b) Reprendre ces questions lorsque b = a.

4.3 (F) Polarisation de la lumière

Une onde plane lumineuse de vecteur d’onde �k possède un degré de liberté associé àsa polarisation �ε (le champ électromagnétique est un vecteur). La nullité de la massedu photon (ou l’invariance de jauge) conduit à deux états de polarisation possibles.Par exemple, si �k est dirigé suivant l’axe Oz, le photon peut se trouver soit dansl’état de polarisation linéaire suivant Ox, noté | x 〉, soit dans l’état de polarisation li-néaire suivant Oy, noté |y 〉. Ces deux vecteurs d’état forment une base orthonormée{| x 〉, |y 〉} de l’espace de Hilbert des états de polarisation.

Un filtre polariseur d’angle θ ne laisse passer que l’état de polarisation |θ 〉 =cos θ | x 〉 + sin θ |y 〉.a) On envoie de la lumière polarisée circulairement |G 〉 = 1√

2(| x 〉 + i |y 〉) sur un

filtre polariseur d’angle θ. Quelles sont l’amplitude de probabilité et la probabilitépour que le photon passe ?

b) Le photon dans l’état |G 〉 est envoyé sur le dispositif de la figure 4.2 (un polari-seur | x 〉, puis un polariseur |y 〉). Donner l’amplitude de probabilité pour que lephoton soit détecté après les deux filtres.

k

=0 = /2πθθ

y

z

xFigure 4.2– Deux filtres polariseurs.

Un photon polarisé circulairement estenvoyé sur deux filtres polariseurs (les

directions des flèches indiquent les étatsde polarisation que laissent passer

chacun des filtres).

c) On introduit un troisième polariseur |θ 〉 entre les deux polariseurs de la questionprécédente (figure 4.3). Donner l’amplitude de probabilité et la probabilité pourque le photon soit détecté après les trois filtres.

k

θ

xy

z

θ =0 θ = /2π

Figure 4.3– Trois filtrespolariseurs.

86

Page 97: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

ÉVOLUTIONTEMPORELLE –POSTULATS (3)

5

Nous venons de voir que le processus de mesure affecte l’état du système de façonstochastique et irréversible : c’est la réduction du paquet d’ondes. Si aucune mesuren’est réalisée sur le système, son état quantique évolue au cours du temps. Cette évo-lution, parfaitement déterministe, est gouvernée par l’équation de Schrödinger (1.13).Dans le membre de droite de cette dernière, nous reconnaissons l’opérateur hamilto-

nien, représentant l’énergie, H = �p 2

2m + V(�r) −→ − �2

2mΔ + V(�r) (cf. exercice 3.3).Nous pouvons donc écrire l’équation de Schrödinger à l’aide du formalisme de Diracprésenté au chapitre précédent :

i�ddt|ψ(t) 〉 = H |ψ(t) 〉 (5.1)

L’intérêt de cette écriture et de ne plus rien spécifier ni sur la nature de la particule(sa masse, sa charge, si la particule est relativiste ou non) ni même si le systèmeest constitué d’une ou plusieurs particules. Le rôle central joué par l’hamiltonien(l’énergie) dans l’évolution temporelle doit être mis en relation avec le fait qu’il s’agitde la quantité conservée lorsqu’un système est isolé (théorème de Nœther, annexe A.1et chapitre 6).

5.1 RÉSOLUTION DE L’ÉQUATIONDE SCHRÖDINGER

5.1.1 Méthode générale

Nous rappelons la stratégie, rapidement décrite au chapitre 2, permettant de résoudrel’équation (5.1) pour un potentiel indépendant du temps (le traitement des problèmesdépendant du temps sera abordé au chapitre 15). La résolution de ce type d’équationsa été discutée dans un cours d’algèbre linéaire ; il s’agit en effet de résoudre une équa-tion ayant la structure : d

dt vecteur(t) = matrice × vecteur(t). Projetée dans une basequelconque, l’équation (5.1) prend la forme d’un ensemble d’équations différentielles©D

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Page 98: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 5 • Évolution temporelle – Postulats (3)

linéaires du premier ordre couplées (éventuellement en nombre infini). Afin de dé-coupler ces équations on diagonalise la matrice. C’est ce que nous décrivons.

1. Caractériser la base d’états propres de H (les états stationnaires). Nous no-tons {|ϕn 〉} cette base et En les valeurs propres correspondantes i.e. H|ϕn 〉 =En|ϕn 〉.

2. Décomposer le vecteur d’état dans cette base : |ψ(t) 〉 = ∑n cn(t) |ϕn 〉. On ob-

tient alors des équations différentielles du premier ordre découplées pour lescomposantes, i�cn(t) = Encn(t), élémentaires à résoudre.

3. Finalement :

|ψ(t) 〉 =∑

n

cn(0) e−iEnt/� |ϕn 〉 (5.2)

4. Les coefficients cn(0) sont déterminés à l’aide des conditions initiales : cn(0) =〈ϕn|ψ(0) 〉.

5.1.2 Opérateur d’évolution temporelle

L’évolution temporelle peut être prise en compte par l’intermédiaire d’un opérateurd’évolution (ou de translation temporelle)

|ψ(t) 〉 = U(t) |ψ(0) 〉 (5.3)

Si H est indépendant du temps, la résolution de l’équation (5.1) montre que U(t) =e−iHt/�. Nous pouvons faire le lien avec (5.2) en utilisant la représentation spectralede l’opérateur d’évolution (en utilisant le résultat de l’exercice 3.8)

U(t) = e−i�

Ht =∑

n

e−i�

Ent |ϕn 〉〈ϕn |, (5.4)

qui nous donne immédiatement (5.2).

• Cas général

Plus généralement, si H(t) dépend du temps, l’opérateur d’évolution temporelle estobtenu en résolvant l’équation différentielle (pour des opérateurs)

i�ddt

U(t, t0) = H(t) U(t, t0) pour U(t0, t0) = 1. (5.5)

Dans ce cas U(t, t0) ne prend pas une forme simple comme (5.4).

88

Page 99: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

5.1. Résolution de l’équation de Schrödinger

• Unitarité et conservation de la probabilité

Un point très important rendu plus explicite par cette présentation en terme d’opé-rateur d’évolution est lié à l’unitarité de celui-ci. L’hermiticité de l’hamiltonien im-plique, d’après (5.5), l’unitarité de l’opérateur d’évolution d

dt

[U(t, t0)†U(t, t0)

]= 0

i.e. U(t, t0)†U(t, t0) = 1. La condition d’unitarité peut être directement reliée à laconservation de la probabilité 〈ψ(t) |ψ(t) 〉 = 〈ψ(0) |ψ(0) 〉 (ce qu’on peut aussi prou-ver directement à partir de l’équation de Schrödinger, bien sûr).

Nous illustrons maintenant la mise en œuvre de la méthode de résolution de l’équa-tion de Schrödinger sur deux exemples ; d’autres exemples seront rencontrés par lasuite.

5.1.3 Application 1 : Évolution libre

Considérons une particule libre non relativiste de masse m, dont la dynamique est

décrite par l’hamiltonien H = p2

2m .Première étape : trouver le spectre de l’Hamiltonien. Les états stationnaires sont

ici les ondes planes | p 〉, états propres de l’opérateur d’impulsion p2

2m | p 〉 =p2

2m | p 〉(attention à ne pas confondre l’opérateur p et la valeur propre p).

Dans un second temps nous décomposons la fonction d’onde à t = 0 dans la basedes états propres :

|ψ(0) 〉 =∫ +∞

−∞dp | p 〉〈 p |ψ(0) 〉 =

∫ +∞

−∞dp ψ(p, 0) | p 〉 (5.6)

où nous avons introduit la fonction d’onde dans l’espace des impulsions ψ(p, t)def=

〈 p |ψ(t) 〉. Nous déduisons immédiatement :

|ψ(t) 〉 = e−i�

Ht |ψ(0) 〉 = e−i p2

2m� t∫

dp ψ(p, 0) | p 〉 =∫

dp ψ(p, 0) e−i p2

2m� t | p 〉 (5.7)

autrement dit ψ(p, t) = ψ(p, 0) e−i p2

2m� t = ψ(p, 0) e−i�

Ept avec Ep =p2

2m (cf. exer-cice 3.4). Le problème sera approfondi dans l’exercice 5.3.

5.1.4 Application 2 : Système à deux niveaux

Considérons un système physique dont l’espace de Hilbert est de dimension 2. Unebase orthonormée est notée {|u1 〉, |u2 〉}. C’est la situation la plus simple à laquelleon peut penser.

Un exemple d’une telle situation est l’étude de l’état de spin d’une particule de spin1/2 (le spin est un moment cinétique intrinsèque, cf. le chapitre 8) : dim Hspin 1/2 = 2.Un autre exemple est discuté dans l’exercice 6.2 décrivant la molécule NH3. L’espace©D

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Page 100: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 5 • Évolution temporelle – Postulats (3)

de Hilbert de la molécule est de dimension infinie, cependant, si l’on ne s’intéressequ’à la physique de basse énergie, nous verrons qu’il est possible de considérer quel’état quantique de la molécule évolue dans un sous espace de dimension 2 de l’espacedes états.

a) Le spectre de l’hamiltonien

La première étape consiste à étudier en détail le spectre de l’hamiltonien. Dans le casprésent, celui-ci peut être représenté par une matrice 2 × 2 :

H =

(H11 H12

H21 H22

)(5.8)

où H12 = H∗21. La matrice est paramétrée par 4 paramètres réels indépendants. Nous

introduisons maintenant une nouvelle paramétrisation de H qui se révèlera commodepour le diagonaliser.

E0def=

H11 + H22

2(5.9)

Δdef=

√14

(H11 − H22)2 + |H12|2 (5.10)

eiθ def=

(H11 − H22

2+ i|H12|

)i.e. tan θ =

2|H12|H11 − H22

(5.11)

e−iϕ def=

H12

|H12|, (5.12)

avec θ ∈ [0, π] et ϕ ∈ [0, 2π], l’hamiltonien prend alors la forme :

H = E0 12 + Δ

(cos θ e−iϕ sin θ

eiϕ sin θ − cos θ

)= E0 12 + Δ · M (5.13)

où 12 est la matrice identité 2 × 2. Nous voyons aisément que la matrice M a pourvaleurs propres ±1. Les valeurs propres de H sont donc :

E± = E0 ± Δ. (5.14)

Discutons le sens physique des différents paramètres :

• E0 correspond à la valeur moyenne des deux énergies propres. Une translation desénergies pourrait ramener E0 à 0 sans changer la physique.

• 2Δ est la séparation entre les deux niveaux d’énergie.

• Le paramètre θ permet d’ajuster le couplage entre les états |u1 〉 et |u2 〉 : θ = 0correspond à l’absence de couplage (|u1 〉 et |u2 〉 sont états propres de H), θ = π/2correspond au couplage maximal (quand la différence d’énergie est nulle H11 −H22 = 0).

90

Page 101: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

5.1. Résolution de l’équation de Schrödinger

• Enfin ϕ est une phase dont le sens physique est moins clair. Notons simplementqu’elle est sensible à la symétrie par renversement du temps (ϕ↔ −ϕ). Un hamil-tonien symétrique sous le renversement temporel (en l’absence de champ magné-tique) satisfait H = HT ; dans ce cas on a donc ϕ = 0 ou π.

Figure 5.1– Système à deux états.

À gauche : Valeurs propres de l’énergie en fonction du couplage (pour la valeur de laphase ϕ = 0). À droite : Probabilité de transition de l’état |u1 〉 vers l’état |u2 〉 en fonctiondu temps.

Grâce à notre paramétrisation astucieuse on obtient facilement les vecteurs proprescorrespondants aux valeurs propres E+ et E− :

| v+ 〉 = cos(θ/2) |u1 〉 + eiϕ sin(θ/2) |u2 〉 (5.15)

| v− 〉 = − sin(θ/2) |u1 〉 + eiϕ cos(θ/2) |u2 〉. (5.16)

On vérifie qu’ils sont bien orthogonaux et normés.On trace les énergies E± en fonction du couplage sur la figure 5.1, sur laquelle

sont précisées les formes prises par les vecteurs propres dans les cas limites de faiblecouplage (θ � 0) et fort couplage (θ � π/2).

b) Évolution temporelle

Supposons que l’état initial du système est |ψ(0) 〉 = |u1 〉. Comment évolue l’état enfonction du temps ? Nous décomposons |ψ(0) 〉 sur les états propres de H [i.e nousdéterminons les coefficients cn(0) de l’équation (5.2)] :

|ψ(0) 〉 = |u1 〉 = cos(θ/2) | v+ 〉 − sin(θ/2) | v− 〉. (5.17)©D

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Page 102: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 5 • Évolution temporelle – Postulats (3)

En utilisant (5.2), nous déduisons immédiatement :

|ψ(t) 〉 = cos(θ/2) e−i�

E+t | v+ 〉 − sin(θ/2) e−i�

E−t | v− 〉. (5.18)

Nous pouvons également exprimer le vecteur dans la base initiale :

|ψ(t) 〉 = e−i�

E0t{[

cos(tΔ/�) − i cos θ sin(tΔ/�)]|u1 〉 − i eiϕ sin(θ) sin(tΔ/�) |u2 〉

}.

(5.19)La probabilité de transition de l’état |u1 〉 vers l’état |u2 〉 après un temps t est donc

Proba[|u1 〉 → |u2 〉

]= |〈u2 |ψ(t) 〉|2 = sin2 θ sin2(tΔ/�). (5.20)

La probabilité de transition oscille au cours du temps pour une période π�/Δ = h/|E+−E−|. Sa valeur maximale, sin2 θ, est d’autant plus importante que le couplage est fort(figure 5.1).

c) Limite de couplage fort

Lorsque H11 = H22 (et donc Δ = |H12| et θ = π/2) l’état quantique oscille périodique-ment entre l’état |u1 〉 et l’état |u2 〉 :

|ψ(t) 〉 = e−i�

E0t[cos(tΔ/�) |u1 〉 − i eiϕ sin(tΔ/�) |u2 〉

]. (5.21)

La probabilité de transition d’un état vers l’autre est maximale, |〈u2 |ψ(t) 〉|2 =sin2(tΔ/�). Elle oscille avec une pulsation proportionnelle à la force du couplage2Δ/� = 2|H12|/�.

5.2 THÉORÈME D’EHRENFESTLes observables physiques (position, impulsion, énergie, etc.) sont représentées pardes opérateurs linéaires agissant dans l’espace de Hilbert H . La dualité onde-corpuscule dans le cadre schrödingerien nous a permis de construire les opérateurs deposition et d’impulsion. Concernant des quantités physiques plus complexes, commel’énergie, nous avons invoqué le principe de correspondance.

Une autre approche pour définir certains opérateurs peut être de répondre à la ques-tion de savoir comment construire l’opérateur « dérivée par rapport au temps » d’unautre opérateur. Par exemple, ayant défini l’opérateur �r (par son action dans l’espacede Hilbert, sur les fonctions d’onde), quel est l’opérateur représentant la vitesse ?

À cette fin commençons par nous intéresser à l’évolution temporelle de la moyenned’une observable B. Le système est dans un état |ψ(t) 〉 solution de (5.1). Calculonsla dérivée de 〈B〉ψ(t) :

ddt〈ψ(t) |B|ψ(t) 〉 = d〈ψ(t) |

dtB|ψ(t) 〉+〈ψ(t) |Bd|ψ(t) 〉

dt=

i�〈ψ(t) |[H, B]|ψ(t) 〉. (5.22)

92

Page 103: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

5.3. Point de vue de Heisenberg

Nous aboutissons donc à la relation ddt 〈B〉ψ(t) =

i�〈[H, B]〉ψ(t). Remarquons qu’on

obtient une relation analogue pour les éléments de matrice non diagonaux, i.e. Bentre deux états solutions de l’équation de Schrödinger :

ddt〈ψ(t) |B|χ(t) 〉 = i

�〈ψ(t) |[H, B]|χ(t) 〉. (5.23)

Cette relation nous permet de répondre à la question posée ci-dessus en définissant

l’opérateur « dérivée de B par rapport au temps », que nous notons◦B (cette notation

est introduite par analogie avec la notation B qui dénote conventionnellement ddt B ;

on évite B afin de ne pas confondre la notation et l’opération). Puisque nous devons

identifier ddt 〈B〉ψ(t) ≡ 〈

◦B〉ψ(t), nous écrivons :

◦B =

i�

[H, B]. (5.24)

Dans l’exercice 5.4 on considère le cas où B → �r pour lequel◦B →

◦�r = �v.

Dans le cas général où l’opérateur possède une dépendance temporelle expliciteB → B(t) (cf. problème 6.1 pour un exemple), la dérivation de la moyenne fait éga-lement apparaître un troisième terme obtenu par dérivation de l’opérateur, ce qui

conduirait à la définition◦B(t) = i

�[H, B(t)] + ∂B(t)

∂t . La dérivée de la moyenne del’opérateur est donnée par (théorème d’Ehrenfest) :

〈◦B(t)〉ψ(t) =

ddt〈B(t)〉ψ(t) =

i�〈[H, B(t)]〉ψ(t) +

⟨∂B(t)∂t

⟩ψ(t)

(5.25)

5.3 POINT DE VUE DE HEISENBERGNous donnons un autre éclairage à la discussion précédente, et en particulier à larelation (5.24).

• Point de vue de Schrödinger

Dans la formulation développée par Schrödinger, l’information sur la dynamique dusystème est contenue dans la fonction d’onde, i.e. le vecteur d’état |Ψ (t) 〉, solutionde l’équation de Schrödinger (5.1). L’évolution temporelle des valeurs moyennesd’observables 〈A〉ψ(t) (position, impulsion, etc) est entièrement portée par le vecteurd’état :

Point de vue de Schrödinger :

⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩ |ψ(t) 〉 = U(t)|Φ 〉

A(5.26)

où nous avons introduit U(t) l’opérateur d’évolution temporelle et avons noté le vec-teur à l’instant t = 0 : |ψ(t = 0) 〉 ≡ |Φ 〉.©D

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Page 104: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 5 • Évolution temporelle – Postulats (3)

• Point de vue de Heisenberg

En développant la « mécanique des matrices », Heisenberg fait jouer un rôle centralaux opérateurs et reporte plus naturellement l’évolution temporelle sur ceux-ci, l’étatquantique restant constant :

Point de vue de Heisenberg :

⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩ |Φ 〉AH(t)def= U†(t) A U(t)

. (5.27)

Bien évidemment les deux points de vue sont totalement équivalents. Par exemple lamoyenne de l’observable est exprimée comme :

〈A〉ψ(t) = 〈ψ(t) |A|ψ(t) 〉 = 〈Φ |AH(t)|Φ 〉. (5.28)

• Équation du mouvement de Heisenberg

L’avantage du point de vue de Heisenberg est de rendre la définition d’un opérateur« dérivée par rapport au temps » plus naturelle, sans passer par l’examen des élémentsde matrice, puisque les vecteurs ne portent plus de dépendance temporelle. À partir dela définition (5.27) nous obtenons d

dt AH(t) = [ ddt U

†(t)]AU(t) + U†(t)A[ ddt U(t)] (pour

alléger la notation nous avons fait U(t, t0) → U(t), ce qui suppose que |Φ 〉 est l’étatà l’instant t0). L’opérateur d’évolution obéit à l’équation d

dt U(t) = 1i�H(t)U(t), d’où

ddt

AH(t) =i�

[HH(t), AH(t)] (5.29)

où HH(t)def= U†(t)H(t)U(t). Si H ne dépend pas du temps HH(t) = H et l’équation

prend la forme ddt AH(t) = i

�[H, AH(t)], écriture plus naturelle que (5.24).

À retenir

Résoudre l’équation de Schrödinger (5.1).

Résoudre Schrödinger pour le système à deux niveaux est un bon exercice.

Théorème d’Ehrenfest (5.25).

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Page 105: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

5.3. Point de vue de Heisenberg

ANNEXE 5.A : MATRICE DE DIFFUSION(MATRICE S) D’UNE LAME SÉPARATRICE

Dans certaines situations il peut être commode d’encoder l’effet de l’évolution tem-porelle dans une matrice, appelée la matrice de diffusion1 (appelée « scattering ma-trix » en anglais) ; nous établirons un lien plus précis entre matrice S et opérateurd’évolution au chapitre 10. Nous illustrons ici ce concept, que nous rencontrerons àplusieurs reprises, dans une situation concrète extrêmement simple. Une discussionplus approfondie de la théorie de la diffusion sera proposée au chapitre 10.

>u|in,

lame séparatrice

|out, u>

Avant Apres

>|in,d

d>|out,

lame séparatrice

Figure 5.2– Diffusion à travers une lame partiellement réfléchissante.Les états | in,u 〉 et | in,d 〉 représentent des paquets d’ondes avant diffusion par la lame.Les états |out, u 〉 et |out,d 〉 forment une base d’états localisés après diffusion par la lame.

Exercice 5.1 (MF) Diffusion par une lame séparatrice – Matrice S

Pour introduire la notion de matrice de diffusion nous discutons la diffusion d’uneparticule par une lame séparatrice (un neutron, comme dans l’annexe 8.A, des pho-tons comme dans le problème 11.1, etc.). Nous notons |ψin 〉 = ψin

u | in, u 〉+ψind | in, d 〉

l’état à l’entrée de la lame, où | in, u 〉 et | in, d 〉 représentent deux états à l’entrée (deuxpaquets d’ondes localisés juste avant la lame) et |ψout 〉 = ψout

u |out, u 〉 + ψoutd |out, d 〉

l’état à la sortie (|out, u 〉 et |out, d 〉 représentent deux paquets d’onde après la lame) ;cf. figure 5.2. Tous ces vecteurs de base sont normalisés et orthogonaux entre eux.Dans ce petit modèle, nous faisons l’hypothèse que l’évolution temporelle (le passage

1. Remarquons l’ambivalence du mot « diffusion » en français, qui peut recouvrir la notion de diffusionbrownienne d’une particule, mouvement diffusif, (« diffusion » en anglais) ou de la notion de « colli-sion » (« scattering » en anglais). La « diffusion » nécessite des « collisions » multiples.©D

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Chapitre 5 • Évolution temporelle – Postulats (3)

à travers la lame) relie le sous-espace Ein = {| in, u 〉, | in, d 〉} de l’espace de Hilbertau sous-espace Eout = {|out, u 〉, |out, d 〉}. La relation entre l’état |ψin 〉 et l’état |ψout 〉dépend des propriétés de la lame. Celles-ci sont codées dans la matrice de diffusion,matrice S , qui relie les amplitudes entrantes aux amplitudes sortantes :

Ψ out = S Ψ in où Ψ in/out =

⎛⎜⎜⎜⎜⎝ψin/outu

ψin/outd

⎞⎟⎟⎟⎟⎠ (5.30)

est le vecteur de C2 regroupant les deux composantes de |ψin/out 〉 ∈ Ein/out.

a) Montrer que la conservation de la probabilité implique l’unitarité de la matrice dediffusion S S † = S †S = 1.

b) Combien de contraintes l’unitarité de S induit-elle sur les quatre coefficients dela matrice ? Combien de paramètres réels sont-ils nécessaires pour paramétrer lesmatrices du groupe U(2) (les matrices 2 × 2 unitaires) ?

c) Vérifier que la paramétrisation suivante est satisfaisante

S = eiΘ

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎝eiϕ√

1 − τ ie−iχ √τieiχ√τ e−iϕ

√1 − τ

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎠ (5.31)

où τ ∈ [0, 1], Θ, ϕ et χ sont quatre paramètres réels. Calculer le déterminant :det S . Quel est le sens physique des différents paramètres ?

Remarque : Matrice S ou opérateur d’évolution?Pour simplifier l’ introduction de la notion de matrice S, celle-ci a été (incorrectement)confondue avec l’opérateur d’évolution : dans l’exercice précédent les états avant dif-fusion par la lame sont reliés aux états à la sortie de la lame par l’opérateur d’évolu-tion « S » = U(δt) = e−

i�Hδt où δt est le temps nécessaire pour la transmission/réflexion

de la particule. Nous verrons que la bonne définition de la matrice S montre quecelle-ci relie plutôt des états stationnaires (chapitre 10 ou exercice ci-dessous).

Exercice 5.2 (D) Matrice S et matrice de transfert

On considère un potentiel V(x) non nul seulement sur l’intervalle [x1, x2]. Nous pou-vons écrire la fonction d’onde comme

ψE(x) = A eik(x−x1 ) + B e−ik(x−x1 ) pour x < x1 (5.32)

= C eik(x−x2 ) + D e−ik(x−x2 ) pour x > x2 (5.33)

où E = �2k2

2m .

a) Matrice S . On introduit un couple d’amplitudes de réflexion/transmission r et tcaractérisant la diffusion par le potentiel d’une onde incidente de la gauche, i.e.(B, C) = (r, t) pour A = 1 et D = 0. De même on introduit un couple (r′, t′) pour

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Page 107: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

caractériser la diffusion d’une onde incidente de la droite. Exprimer la matrice Sen terme de ces coefficients [d’après l’exercice 5.1 la matrice S relie les ampli-tudes sortantes (B, C) aux amplitudes entrantes (A, D)]. Écrire explicitement lescontraintes sur les quatre coefficients traduisant l’unitarité S S † = S †S = 1.

b) Matrice de transfert. Nous introduisons la matrice de transfert M reliant les am-plitudes de part et d’autre de la barrière(

CD

)= M

(AB

). (5.34)

Cette matrice fournit une autre manière d’encoder les propriétés du potentiel V(x).

Quel est l’intérêt de la notion de matrice de transfert ? Quelle propriété de Mexprime la conservation du courant de probabilité ?

c) Montrer que la matrice de transfert s’exprime en comme

M =

(1/t∗ −r∗/t∗

−r/t′ 1/t′

). (5.35)

Calculer det M.

Exercices

5.3 (MF) Paquet d’ondes gaussien – évolution libre

Calculer la fonction d’onde ψ(x, t) pour ψ(p, 0) = ( a2

π�2 )1/4 e−a2

2�2(p−p0)2

. Vérifier la nor-malisation de ψ(p, t) et ψ(x, t). Tracer l’allure de |ψ(x, t)|2 à t = 0 et t > 0. Discuterles inégalités de Heisenberg (2.39) et (2.41) (on se placera dans la limite p0 � �/apour discuter l’inégalité de Heisenberg temporelle).

5.4 (F) Considérons un hamiltonien H = �p 2

2m + V(�r). Vérifier que l’opérateur◦�r = �v

est bien �pm . Calculer

◦�p.

5.5 (F) Nous nous intéressons à l’oscillateur harmonique unidimensionnel H =p2

2m +12mω2x2. Calculer les opérateurs ◦x et ◦p. Montrer que les valeurs moyennes

〈x〉ψ(t)def= 〈ψ(t) |x|ψ(t) 〉 et 〈p〉ψ(t) obéissent aux équations du mouvement classiques.

Quelle est l’origine de ce résultat ? Résoudre ces équations différentielles.

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Chapitre 5 • Évolution temporelle – Postulats (3)

5.6 (MF) On considère une particule libre dont la dynamique est décrite par l’Ha-

miltonien H = p2

2m . On note |ψ(t) 〉 le vecteur de l’espace de Hilbert décrivant l’étatquantique de la particule, solution de l’équation de Schrödinger.

a) Soit f (p) une fonction de l’impulsion. Justifier que 〈 f (p)〉ψ(t) = 〈 f (p)〉ψ(0).

b) Calculer [H, x] et déduire ddt 〈x〉ψ(t). Montrer que 〈x〉ψ(t) =

1m 〈p〉ψ(0) t + 〈x〉ψ(0).

c) Montrer que [H, x2] = − i�m (xp + px) et donner d

dt 〈x2〉ψ(t).

d) Vérifier que d2

dt2 〈x2〉ψ(t) =

( i�

)2〈[H, [H, x2]]〉ψ(t). Calculer le double commutateur

est en déduire que d2

dt2 〈x2〉ψ(t) = cste dont on donnera l’expression.

e) On introduit Δx2ψ(t)

def= 〈x2〉ψ(t) − 〈x〉2ψ(t). Montrer que :

Δx2ψ(t) =

1

m2Δp2

ψ(0) t2 +1m

(〈xp + px〉ψ(0) − 2 〈p〉ψ(0) 〈x〉ψ(0)

)t + Δx2

ψ(0). (5.36)

Tracer Δxψ(t) en fonction de t.

5.7 (D) Utiliser le résultat de l’exercice 3.11 pour l’équation définissant l’opérateur

« dérivée temporelle de B » :◦B = i

�[H, B]. Montrer qu’on peut interpréter cette in-

égalité comme une équation de Heisenberg temporelle.

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Page 109: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

SYMÉTRIES ET LOISDE CONSERVATION

6D’un point de vue très pratique, l’étude des symétries d’un problème physique permetd’en faciliter la résolution (en introduisant les « bonnes » variables), ce qui repose,plus profondément, sur l’identification de constantes du mouvement, i.e. de lois deconservation. Par exemple, si nous pensons au problème de champ de force cen-trale en mécanique newtonienne, le point de départ est un système de trois équationsdifférentielles non linéaires du second ordre couplées. L’existence de constantes dumouvement (l’énergie et le moment cinétique) permet de se ramener à une uniqueéquation différentielle du second ordre, parfois soluble. Bien que la question des loisde conservation et des constantes du mouvement est celle qui va principalement nousintéresser, il faut mentionner le rôle constructif des symétries : les symétries imposentdes contraintes assez strictes qui sont exploitées pour la construction des théories.Nous en donnerons une illustration extrêmement simple dans l’exercice 6.2.

6.1 SYMÉTRIES

• Symétries du système

Une transformation de symétrie est une transformation laissant un système invariant.Considérons l’exemple très simple d’un carré dont nous étudions les symétries. Huitopérations géométriques le laissent invariant : l’identité I, les trois rotations R1 ≡R(−π/4), R2 ≡ R(π/2) et R3 ≡ R(+π/4), et les quatre réflexions S 1, S 2, Π1 et Π2 parrapport aux axes représentés sur la figure 6.1. Le système est invariant sous l’action dechacune de ces transformations, ou d’un produit de ces transformations. Autrementdit, l’ensemble des transformations de symétrie forme un groupe, appelé le groupede symétrie du système. Pour illustrer ce point, nous donnons dans le tableau 6.1 latable de multiplication du groupe de symétrie du carré, appelé le groupe C4v.

S1Π1

Π2

S2

Figure 6.1– Symétries par réflexion d’un carré.

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Chapitre 6 • Symétries et lois de conservation

Tableau 6.1– Table de multiplication du groupe C4v .

Tableau des g1g2 avec g1 en ordonnée et g2 en abscisse. g2g1 n’est indiqué que lorsqueles deux transformations ne commutent pas.

g1\g2 I R1 R2 R3 S 1 S 2 Π1 Π2

I IR1 R1 R2 Π1 Π2 S 2 S 1

R2 R2 R3 IR3 R3 I R1 R2 Π2 Π1 S 1 S 2

S 1 S 1 Π2 S 2 Π1 IS 2 S 2 Π1 S 1 Π2 R2 IΠ1 Π1 S 1 Π2 S 2 R1 R3 IΠ2 Π2 S 2 Π1 S 1 R3 R1 R2 I

Un groupe G = {g} est un ensemble muni d’une loi de composition interne, i.e. ∀g1 et g2 ∈ G alors g1g2 ∈ G. La loi doit être associative : (g1g2)g3 = g1(g2g3). G doitcontenir un élément neutre e vis à vis de la loi de composition (ge = eg = g ∀g) ettout élément de G doit posséder un inverse (∀g ∈ G, ∃ g−1 tel que gg−1 = g−1g = e).

Exercice 6.1 (F) Établir la liste des sous-groupes de C4v.

• Symétries des lois physiques

Bien souvent nous sommes davantage intéressés par les symétries des lois physiques.Dans ce cas nous étudions les transformations qui laissent les propriétés physiques dusystème inchangées plutôt que le système lui-même. Pour comprendre cette distinc-tion, intéressons-nous à la molécule de benzène (C6H6) dont les 6 atomes de carbonesont répartis suivant un hexagone. Nous considérons deux configurations de la mo-lécule, distinctes par la position des doubles liaisons C-C (cf. figure 6.2). On passed’une configuration à l’autre grâce à l’action d’une réflexion par rapport à l’axe hori-zontal (réflexion par rapport à la ligne horizontale en tirets, notée Π). Ces deux étatsne sont donc pas invariants sous la réflexion, cependant les lois de la physique étantinvariantes sous la réflexion (du moins l’interaction électromagnétique), les proprié-tés physiques sont les mêmes dans les deux configurations :

• réflexion S : symétrie des deux états quantiques de la molécule (et de l’hamilto-nien)

• réflexion Π : symétrie des propriétés physiques de la molécule (i.e. de l’hamilto-nien).

• Symétries discrètes

Si le nombre d’éléments du groupe de symétrie est fini (comme dans le cas du carré)ou un infini dénombrable (comme dans le cas d’un cristal), on parle de symétriesdiscrètes.

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Page 111: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

6.2. Transformations en mécanique quantique

Figure 6.2– Symétries dans une molécule debenzène C6H6.

Le carbone forme 4 liaisons covalentes avec lesatomes voisins (C ou H). Les doubles barres indiquentles doubles liaisons entre atomes de carbone (lesliaisons avec les atomes d’hydrogène ne sont pasreprésentées).

S

Π

S

Π

• Symétries continues

Dans certains cas, les éléments d’un groupe sont indexés par un (des) paramètre(s)réel(s) variant continûment dans un certain intervalle (domaine) de R (de Rn). Onparle alors de symétrie continue. Un exemple est celui du groupe des rotations dans leplan, repérées par un angle θ ∈ [0, 2π]. Le domaine auquel appartient le paramètre θa la topologie non triviale d’un anneau, puisque les rotations d’angles θ et θ + 2πs’identifient.

6.2 TRANSFORMATIONS EN MÉCANIQUEQUANTIQUE

Pour éviter les confusions entre opérateurs et paramètres des transformations, lesopérateurs portent un chapeau dans ce chapitre.

6.2.1 Considérations générales

• Opérateurs représentant les transformations

Une transformation correspond à un changement de point de vue (un changementde base) : par exemple une translation ou une rotation (dans le raisonnement, la trans-formation ne correspond pas nécessairement à une symétrie du problème). La trans-formation associe donc à chaque état quantique |ψ 〉 un nouveau vecteur d’état |ψ′ 〉,ce qui est réalisé à l’aide d’un opérateur U :

|ψ′ 〉 = U|ψ 〉. (6.1)

Tous les vecteurs d’états (et tous les opérateurs) sont en général transformés, cepen-dant le changement de base ne change pas les probabilités de transition entre états|〈ϕ′ |ψ′ 〉|2 = |〈ϕ |ψ 〉|2. Cela impose donc que U†U = 1 (à une phase près qui pour-rait être absorbée dans U). Une transformation est représentée par un opérateurunitaire (ou anti-unitaire) agissant dans l’espace de Hilbert (théorème de Wigner).©D

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Chapitre 6 • Symétries et lois de conservation

Un opérateur unitaire U est défini par UU† = U†U = 1. Ses valeurs propressont de la forme eiθn avec θn ∈ R ; la matrice le représentant est diagonalisable àl’aide d’une autre matrice unitaire. Autrement dit, ∃ un opérateur Θ hermitiquetel que U = eiΘ (exercice 3.12).

• État ayant des propriétés de symétrie

Si le système se trouve dans un état |ψ 〉 tel que toute grandeur physique calculéepour cet état est inchangée lorsque l’on effectue la transformation U, alors U|ψ 〉 ∝|ψ 〉. Nous appellerons les états propres de l’opérateur de transformation des « étatssymétriques »

état |ψ 〉 symétrique ⇔ U|ψ 〉 = eiθψ |ψ 〉 (6.2)

Lorsque la phase est nulle, θψ = 0, l’état est invariant sous la transformation :U|ψ 〉 = |ψ 〉.

• Transformation des opérateurs (observables)

Un opérateur A est transformé selon

A′ = U A U†, (6.3)

ce qu’on vérifie en écrivant l’égalité des éléments de matrices : 〈ψ |A|χ 〉 =〈ψ′ |A′|χ′ 〉.

« Se vogliamo che tutto rimanga come è, bisogno che tutto cambi. »

Il gattopardo, G. Tomasi di Lampedusa.

• Grandeur physique invariante

Si une quantité physique est invariante sous une transformation, A′ = A, l’opérateurla représentant commute avec l’opérateur de transformation

A invariant ⇔ [A, U] = 0 (6.4)

• Symétrie et loi de conservation

Une transformation de symétrie d’un problème est une transformation qui com-mute avec le hamiltonien (qui laisse invariant le système), ce qui implique, d’aprèsle théorème d’Ehrenfest, l’existence d’une loi de conservation :

[U, H]= 0 ⇒ d

dt〈ψ(t) |U|ψ(t) 〉 = 0 (6.5)

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Page 113: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

6.2. Transformations en mécanique quantique

• Symétries et dégénérescences

Soit U une symétrie de H. Si |ψ 〉 est un état propre de l’hamiltonien, H|ψ 〉 = Eψ|ψ 〉,alors U|ψ 〉 est également état stationnaire pour la même énergie Eψ. En effet :HU|ψ 〉 = UH|ψ 〉 = Eψ U|ψ 〉. Si l’état |ψ 〉 est un état symétrique, cette obser-vation ne nous apprend rien puisque U|ψ 〉 ∝ |ψ 〉. Dans le cas contraire (|ψ 〉 nonsymétrique), nous déduisons que deux états de même énergie sont reliés par unetransformation de symétrie. Autrement dit, nous identifions l’origine physique d’unedégénérescence dans une symétrie du problème.

Une conséquence intéressante de cette remarque est la possibilité de classer lesétats propres selon leurs propriétés de symétries. [H, U] = 0 implique l’existenced’une base d’états propres communs aux deux opérateurs, i.e. d’états repérés pardes nombres quantiques associés à U et l’énergie. Une application de cette idée estdonnée ci-dessous ou dans l’exerice 6.9, ou encore pour l’étude des potentiels centro-symétriques, aux chapitres 10 et 12.

6.2.2 Parité et autres symétries discrètes

• Parité

Notons P l’opérateur de parité, défini par son action dans l’espace de Hilbert :

P |�r 〉 = | −�r 〉 (6.6)

P s’interprète géométriquement comme l’inversion �r → −�r. Il est clair queP2 = 1, d’où nous déduisons que l’opérateur possède les valeurs propres ±1. Deplus P† = P .

• Opérateurs pairs/impairs

Certains opérateurs possèdent des propriétés particulières sous la parité, commutantou anticommutant avec P

P AP = ±A

⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩+ opérateur A pair

− opérateur A impair.(6.7)

Nous montrons dans l’exerice 6.7 que les opérateurs position x et impulsion p sontimpairs.

• Application

Considérons le cas du puits de potentiel symétrique : V(x) = 0 pour |x| > a/2 etV(x) = −V0 < 0 pour |x| < a/2. La parité (dans le cas unidimensionnel, la réflexionx → −x) est une symétrie du problème : [H, P] = 0.©D

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Chapitre 6 • Symétries et lois de conservation

La conservation de la parité se formule aisément en considérant le cas d’un étatquantique ayant initialement une parité bien définie P |ψ(0) 〉 = ±|ψ(0) 〉, i.e. safonction d’onde est paire ou impaire ψ(−x, 0) = ±ψ(x, 0). La commutation de l’opé-rateur parité avec l’hamiltonien implique la commutation de la parité avec l’opérateurd’évolution temporelle (5.4) : la propriété de symétrie de la fonction d’onde est doncconservée au cours du temps : P |ψ(t) 〉 = ±|ψ(t) 〉, i.e. ψ(−x, t) = ±ψ(x, t) ∀ t.

Examinons maintenant l’implication de la présence de la symétrie sous la réflexionsur le spectre des états stationnaires.

• États liés E < 0. Le spectre est quantifié : il existe un nombre N � 1 de solutionsϕ1(x), · · · ,ϕN(x) d’énergies E1, · · · , EN . Les niveaux sont non dégénérés (propriétégénérale d’un potentiel confinant défini sur R). Les états stationnaires sont donc né-cessairement des états propres de la parité P . Les fonctions d’onde sont soit pairessoit impaires, ce que nous exploiterons dans l’exercice 6.9 pour simplifier la résolu-tion de l’équation de Schrödinger.

• États de diffusion E > 0. Dans ce cas les états stationnaires sont dégénérés. À Efixée, l’équation de Schrödinger admet deux solutions linéairement indépendantes.Il est naturel d’introduire un état ϕg(x), correspondant à une onde incidente ve-nant de la gauche : ϕg(x) = e+ikx + r e−ikx pour x < −a/2 et ϕg(x) = t e+ikx pourx > a/2. Un autre état solution de l’équation de Schrödinger est l’état ϕd(x), corres-pondant à une onde incidente venant de la droite1 : ϕd(x) = t e−ikx pour x < −a/2et ϕd(x) = e−ikx + r e+ikx pour x > a/2. Aucun de ces deux états n’est invariant sousla réflexion : P |ϕg 〉 = |ϕd 〉. La commutation de H avec P nous offre toutefois lapossibilité de construire une autre base d’états stationnaires de diffusion, repérés parleurs propriétés sous la réflexion. On introduit deux états propres de H et P , notés|Ψ± 〉, avec P |Ψ± 〉 = ±|Ψ± 〉. Bien sûr : |Ψ± 〉 ∝ |ϕg 〉 ± |ϕd 〉 (cf. chapitre 10).

Exercice 6.2 (F) Hamiltonien de basse énergie pour la molécule NH3

Les quatre atomes de la molécule d’ammoniac (NH3) forment un trièdre. Si l’ons’intéresse à la physique de basse énergie, on peut considérer que seuls deux étatsquantiques sont accessibles : les deux configurations symétriques par rapport au plandes atomes H, notées |ψG 〉 et |ψD 〉, décrivant la situation où l’atome N est à gaucheou à droite du plan des atomes H. Du point de vue de l’atome N, les deux états corres-pondent à deux minima de l’énergie symétriques par réflexion (cf. figure 1.7). Nouscherchons à construire l’hamiltonien H du système dans la base supposée orthonor-mée {|ψG 〉, |ψD 〉}, en utilisant les symétries du problème.

1. A priori on doit introduire deux nouvelles amplitudes de transmission et de réflexion t′ et r′ dansϕd(x). Toutefois on peut montrer que (i) t = t′ est une conséquence de l’invariance par renversement dutemps et (ii) r = r′ est une conséquence de l’invariance sous la réflexion PV(x)P = V(−x) = V(x).Cette deuxième propriété pourra être démontrée en exercice.

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Page 115: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

6.2. Transformations en mécanique quantique

a) La forme la plus générale pour H est une matrice hermitique 2 × 2. Combiende paramètres réels indépendants permettent de paramétrer la matrice hermitique2 × 2 la plus générale ?

b) Donner la matrice 2×2, notée R, représentant l’opération de réflexion par rapportau plan des atomes H (si l’origine du repère est placée au centre des atomes H,l’action de la réflexion R coïncide avec celle de l’inversion P).

c) Que vaut [R,H] ? Quelles contraintes pouvez-vous déduire sur la matrice H ?

d) Peut-on prédire le signe de l’élément de matrice non diagonal H12 ?

• Renversement du sens du temps

En mécanique classique, si nous considérons une trajectoire �r(t), le renversementdu temps correspond à �r(t) → �r(−t). Par conséquent l’impulsion est modifiée selon�p(t) → −�p(−t) (en l’absence de champ magnétique).

En mécanique quantique, le renversement du temps est représenté par un opé-rateur T anti-unitaire2 agissant dans l’espace de Hilbert, ce qui est à l’origine decertaines complications dans lesquelles nous ne souhaitons pas entrer ici (cf. cha-pitre xv de l’ouvrage de Messiah [33]). L’action du renversement du temps sur lafonction d’onde peut être facilement obtenue en remarquant que si ψ(�r, t) est solutionde l’équation de Schrödinger (1.13), il en est de même pour :

ψrenv(�r, t) = ψ∗(�r,−t). (6.8)

Exercice 6.3 (MF) Montrer que ψrenv(�p, t) = ψ∗(−�p,−t).

La violation de la parité. Jusqu’aux années 1950, on admettait l’ invariance deslois de la physique sous la parité (i.e. la commutation de « l’hamiltonien » dé-crivant les interactions fondamentales, électromagnétique, faible et forte, avecl’opérateur de parité), jusqu’à ce que l’analyse de la désintégration de certainsmésons suggère la non conservation de la parité au cours des processus met-tant en jeu l’interaction faible. La violation de la parité par l’ interaction faiblefut suggérée par Lee et Yang en 1956, puis démontrée expérimentalement en1957 dans une expérience de désintégration d’un noyau de cobalt polarisé. Il estremarquable de souligner qu’à l’échelle la plus élémentaire, la nature brise lasymétrie droite/gauche.

Conjugaison de charge. Introduisons la dernière des trois symétries discrètesfondamentales : l’opération de conjugaison de charge, notée C , transformantune particule en son antiparticule : C |particule 〉 ∝ |antiparticule 〉.Théorème CPT . Contrairement aux symétries P, C et T , qui sont des symé-tries de certaines des interactions, la symétrie C PT combinant les trois symé-

2. Un opérateur antilinéaire satisfait K(α|ψ 〉 + β|χ 〉) = α∗K|ψ 〉 + β∗K|χ 〉, où α, β ∈ C. Il conjugue unnombre complexe lors de la commutation Kα = α∗K. L’opérateur T est antilinéaire unitaire.©D

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Chapitre 6 • Symétries et lois de conservation

tries discrètes a une origine beaucoup plus profonde, dans la théorie quantique(des champs) elle-même. Dans le langage de l’introduction : les symétries P etC P sont des symétries des modèles d’interaction (P pour l’électromagnétiquepar exemple) alors que CPT est une symétrie de la métathéorie. L’observationde la non conservation de la parité au cours des processus d’interaction faible en1957 a remis en cause la description de ceux-ci et permis d’en affiner le modèle,en revanche une violation de la symétrie CPT remettrait tout le cadre en cause.

La violation du renversement du temps. Sous-jacente à la violation de la pa-rité par l’ interaction faible est l’existence d’un seul état d’hélicité du neutrino, unlepton émis dans les désintégrations par interaction faible : le neutrino n’existeque dans l’état d’hélicité gauche hν = −1 (la projection du spin sur l’ impulsion).Si le neutrino droit n’existe pas, l’anti-neutrino droit existe, hν = +1, ce qui pour-rait laisser supposer que la symétrie CP est respectée par l’ interaction faible, oud’après le théorème CPT , la symétrie de renversement du temps T . Toutefois,en 1964, une étude très fine de la désintégration de mésons K neutres par Fitchet Cronin a démontré la violation de la symétrie T par l’ interaction faible.

6.3 GROUPES CONTINUS –GÉNÉRATEUR INFINITÉSIMAL

Nous discutons quelques groupes continus importants. Soit un groupe de transforma-tions {U(λ)} indicées par un paramètre réel λ appartenant à R ou à un intervalle de R.La valeur λ = 0 correspond à l’identité : U(0) = 1. Il est toujours possible d’écrire(cf. remarque faite ci-dessus) :

U(λ) = e−i�λG, (6.9)

ce qui définit l’opérateur G. Cet opérateur hermitique, G = G†, est appelé le généra-teur infinitésimal du groupe de transformations.

RemarqueEn général, il y a autant de générateurs que le groupe possède de paramètres réelsindépendants indexant les éléments du groupe.

6.3.1 Quelques groupes continus

a) Translations d’espace

Nous nous intéressons au groupe des translations, i.e. à l’ensemble des transforma-tions {T (a)} avec a ∈ R. Une translation spatiale de paramètre a déplace le systèmede x en x′ (point de vue « actif ») :

x′ = x + a. (6.10)

Son action sur les vecteurs de l’espace de Hilbert est donc définie par

T (a)| x 〉 = | x + a 〉. (6.11)

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Page 117: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

6.3. Groupes continus – Générateur infinitésimal

Notons que si nous considérons l’action de la translation sur un état |ψ′ 〉 = T (a)|ψ 〉,les fonctions d’onde correspondantes sont reliées par ψ′(x′) = ψ(x), c’est-à-direψ′(x) = ψ(x − a).

Nous cherchons la loi de transformation de l’opérateur position : x′def= T (a)xT (a)†.

Pour déterminer cet opérateur, nous étudions son action sur un vecteur localisé spa-tialement : x′| x 〉 = T (a)x| x − a 〉 = (x − a)T (a)| x − a 〉 = (x − a)| x 〉 = (x − a)| x 〉.Ceci est vrai ∀ | x 〉, d’où

x′ = x − a. (6.12)

Attention aux signes ! Un système en x est translaté en x′ = x + a, mais c’est lesigne opposé qui apparaît pour la transformation de l’opérateur, afin de satisfaire〈 x1 |x| x2 〉 = 〈 x′1 |x

′| x′2 〉. Nous pouvons maintenant identifier le générateur infinitési-

mal des translations. Écrivons T (a) = e−i�

aG . Dans la limite a → 0, la transformation

prend la forme x′ = x − i�a[G, x] + 1

2!

(− i�a)2

[G, [G, x]] + O(a3). Nous comparons

ce développement à (6.12) : l’absence de terme O(a2) dans cette dernière équationmontre que [G, x] est proportionnel à l’identité. On obtient finalement que G = p. Legénérateur infinitésimal des translations spatiales est l’opérateur d’impulsion :

T (a) = e−i�

pa (6.13)

Exercice 6.4 (F) En remarquant que le développement de Taylor peut s’écrire sousla forme compacte :

f (x + a) = ea ddx f (x) (6.14)

retrouver l’expression (6.13) de l’opérateur de translation.

Dans l’espace tridimensionnel, le groupe des translations possède trois générateursinfinitésimaux correspondant aux trois composantes de l’impulsion px, py et pz. Lacommutation de ces trois opérateurs assure la commutativité de tous les éléments dugroupe : le groupe des translations T (�a) = e−

i��a·�p est un groupe abélien. La loi de

composition au sein du groupe est simple :

T (�a) T (�a ′) = T (�a ′) T (�a) = T (�a + �a ′). (6.15)

b) Translations temporelles

Pour un hamiltonien indépendant du temps, nous avons vu que l’opérateur d’évolu-tion, défini par |ψ(t) 〉 = U(t) |ψ(0) 〉, est donné par

U(t) = e−iHt/� (6.16)

L’opérateur hamiltonien (l’opérateur qui représente l’énergie) est donc le générateurinfinitésimal des translations temporelles.©D

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Page 118: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 6 • Symétries et lois de conservation

c) Rotations

Dans le chapitre 8 nous verrons que le générateur infinitésimal des rotations est lemoment cinétique. Les difficultés techniques qui vont apparaître sont liées à la naturenon abélienne du groupe des rotations.

d) Transformations spéciales de Galilée

Les transformations spéciales de Galilée (que nous appellerons plus simplement les« transformations de Galilée ») sont les translations d’espace-temps permettant dechanger de référentiel inertiel. La transformation de paramètre�v agit sur les coordon-nées d’espace-temps comme :

t′ = t (6.17)

�r ′ = �r +�v t. (6.18)

Nous montrerons dans le problème 6.1 page 113 que les transformations de Galiléesont représentées dans l’espace de Hilbert par les opérateurs

UG(�v) = ei��v·(m�r−�p t) = e

i�

m�v·�r e−i��v·�p t e−

i2�m�v 2t (6.19)

où la seconde expression est obtenue en utilisant la formule de Baker-Campbell-Hausdorff rappelée ci-dessous.

Formule de Baker-Campbell-Hausdorff. Soient deux opérateurs A et B tels que[A, [A, B]] = [B, [A, B]] = 0, alors eA+B = eAeBe−

12 [A,B].

Lemme : si [A, B] = λ1 où λ ∈ C on a [f (A), B] = [A, B]f ′(A).

Démonstration de la formule : on introduit G(t) def= etAetB où t est un paramètre

réel. ddt G(t) = AG(t) + G(t)B = (A + B + t[A, B])G(t) où l’on a utilisé le lemme. On

déduit finalement que G(t) = et(A+B)+ 12 t2[A,B]. On fait t = 1. QED.

6.3.2 Loi de conservation – Théorème de Nœther

Dans le cas d’une invariance sous un groupe continu de symétrie, la commutationde l’hamiltonien avec tous les éléments U(λ) = e−iλG/� du groupe implique la com-mutation de l’hamiltonien avec le générateur : [H, G] = 0. La quantité physique G,également appelée charge de Nœther, est donc conservée au cours du temps :

invariance sous le groupe {U(λ)} ⇒ ddt〈ψ(t) |G|ψ(t) 〉 = 0. (6.20)

Le théorème de Nœther, qui associe à toute propriété d’invariance sous un groupecontinu une charge conservée, établit un lien très profond entre symétrie et loi deconservation.

108

Page 119: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

6.4. Potentiel périodique et théorème de Bloch

La conservation de l’impulsion se comprend donc comme une conséquence del’invariance sous le groupe des translations spatiales [si H est indépendant de �r enl’absence de potentiel V(�r)] ; nous relions donc une propriété géométrique du sys-tème à la conservation d’une grandeur physique. La conservation de l’énergie estune conséquence de l’invariance sous le groupe des translations temporelles (lorsquele potentiel est indépendant du temps), etc.

Notons que nous n’avons fait qu’appliquer des concepts généraux de portée trèsgénérale dans le cadre quantique : ni la notion de groupe de transformations, oucelle de générateur ou encore le théorème de Nœther ne sont propres à la mécaniquequantique ; ces idées peuvent également être introduites en mécanique classique (onpourra en voir une illustration dans l’annexe du chapitre 1 ou [26]).

Remarque : Déduire l’équation de Schrödinger d’un principe plus fondamentalLorsque l’hamiltonien est indépendant du temps, le théorème de Nœther nous offreun moyen de déduire l’équation d’évolution d’un principe plus fondamental. Étant laquantité conservée au cours du temps, l’énergie (l’hamiltonien) est le générateur in-finitésimal des translations temporelles, i.e. l’opérateur d’évolution temporelle s’ex-prime comme (6.16). Nous obtenons alors que le vecteur |ψ(t) 〉 = U(t)|ψ(0) 〉 obéit àl’équation de Schrödinger (5.1).

6.4 POTENTIEL PÉRIODIQUE ET THÉORÈMEDE BLOCH

Nous donnons une autre illustration de l’idée que les états stationnaires peuvent êtreclassés à l’aide de leurs symétries. Étudions l’équation de Schrödinger stationnaireunidimensionnelle pour un potentiel périodique V(x) = V(x + a), i.e. nous décrivonsla dynamique d’un électron dans un cristal unidimensionnel.

Exercice 6.5 (F) Vérifier que [T (na), H] = 0 pour n ∈ Z.

6.4.1 Théorème de Bloch

Il est donc possible de trouver une base d’états stationnaires |ψK 〉 symétriques sousles translations d’un multiple entier de a :

H|ψK 〉 = E(K)|ψK 〉 (6.21)

T (a)|ψK 〉 = e−iK |ψK 〉. (6.22)

Nous avons indexé les états stationnaires à l’aide de la valeur propre e−iK de l’opéra-teur de translation, i.e. à l’aide de leurs propriétés de symétries sous les translationsT (na). Le paramètre K est appelé le paramètre de Bloch (attention, il n’est pas re-lié au vecteur d’onde défini comme k = p/� ; les états propres |ψK 〉 ne sont pas états©D

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Page 120: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 6 • Symétries et lois de conservation

propres de l’impulsion). Le paramètre de Bloch appartient à l’intervalle K ∈]−π,+π]puisque d’après l’éq. (6.22) |ψK 〉 et |ψK+2nπ 〉 décrivent le même état physique. L’in-tervalle K ∈] − π,+π] porte le nom de 1ère zone de Brillouin.

Les conséquences physiques du théorème de Bloch sont importantes :

• Si nous écrivons la relation (6.22) en représentation d’espace, nous obtenons〈 x |T (a)|ψK 〉 = ψK(x − a) = e−iKψK(x), ou encore

ψK(x + na) = einKψK(x). (6.23)

La translation par un multiple du pas du réseau n’affecte la fonction d’onde quepar un changement de sa phase. Les états stationnaires sont des états délocalisésdans tout le cristal.

• Le spectre des énergies E(K) est une fonction continue du paramètre K. Le cristalest donc caractérisé par un continuum d’états (spectre continu ↔ états délocali-sés). On peut montrer que les énergies se regroupent en bandes. Nous en verronsplusieurs illustrations : l’une dans le paragraphe qui suit (pour une bande), l’autredans l’exercice 6.10 (une infinité de bandes).

6.4.2 Illustration : un cristal unidimensionnel

Nous discutons l’application la plus simple du théorème de Bloch : une chaîned’atomes régulièrement répartis aux positions x = na avec n ∈ Z. À l’atome numéron est associé un état |an 〉 localisé, i.e. une fonction d’onde 〈 x |an 〉 localisée autour dex = na, d’énergie 〈an |H|an 〉 = E0. Un électron sur cet atome peut toutefois sautersur un des atomes voisins à cause d’un couplage tunnel (nous négligeons le couplageentre atomes plus éloignés) : 〈an |H|an+1 〉 = −A. De plus nous supposons que A ∈ R.

Nous cherchons les états stationnaires du problème. Si nous projetons l’équationde Schrödinger H|ψ 〉 = E|ψ 〉 dans la base des états localisés (i.e. nous la multiplionspar le bra 〈an |), nous constatons que les composantes 〈an |ψ 〉 ≡ ψ(n) obéissent àl’équation

−Aψ(n + 1) + E0 ψ(n) − Aψ(n − 1) = E ψ(n). (6.24)

Le théorème de Bloch nous dit qu’une base d’états stationnaires sont les états propres|ψK 〉 de l’opérateur de translation T (a)|ψK 〉 = e−iK |ψK 〉, avec K ∈] − π,+π]. Nousavons vu plus haut en multipliant cette équation par 〈an | que ψK(n + 1) = eiKψK(n).Dans cette situation simplifiée à un état par site, nous obtenons donc immédiatementla fonction d’onde3 ψK(n) = 1√

2πeinK . En injectant cette expression dans (6.24) nous

déduisons le spectre des valeurs propres de l’énergie

E(K) = E0 − 2A cos(K) avec K ∈] − π,+π] (6.25)

3. Le facteur de normalisation est trouvé en écrivant que 〈ψK |ψK′ 〉 = δ(K − K′) puisque les états sontparamétrés par un paramètre continu. On utilise la formule de Poisson 1

∑n eink =

∑n δ(K + 2nπ).

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Page 121: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

6.4. Potentiel périodique et théorème de Bloch

Nous avons montré que le spectre des énergies de l’hamiltonien du cristal unidimen-sionnel est constitué d’une bande : Spectre(H) = [E0 − 2A, E0 + 2A] (figure 6.3).

Figure 6.3– Spectre d’un cristal 1D.Relation de dispersion (6.25) : les valeurs propres del’énergie sont indicées par le paramètre de BlochK ∈ [−π, +π]. Le spectre est donc continu :Spec(H) = [−2A, +2A].

�3 �2 �1 0 1 2 3

�2

�1

0

1

2

K

E�K��

A

Exercice 6.6 (F) Masse effective

Les états de Bloch partagent la propriété avec les ondes planes d’être délocalisés danstout l’espace. Remarquons que le spectre du cristal possède une certaine similitudeavec le spectre d’une particule libre, à condition de considérer la limite K → 0. Enredéfinissant le paramètre de Bloch comme k = K/a, montrer que pour k → 0 onretrouve le spectre d’une particule libre : E(K = ka → 0) � �2k2

2m∗ . Exprimer la masseeffective m∗ en fonction du couplage A et du pas du réseau cristallin a. Commentvarie m∗ lorsque le couplage A diminue ? Interpréter physiquement.AN : Calculer m∗/me (où me est la masse de l’électron) pour A = 1 eV et a = 1 Å (leséchelles atomiques typiques).

À retenir

L’ensemble des symétries d’un système (ou d’une théorie physique) forme un groupe.

Dans l’espace de Hilbert H , une transformation est représentée par un opérateur uni-taire U.

Un état symétrique sous une transformation U est un état propre de cet opérateur.

Une quantité physique A invariante lors de la transformation est représentée par un opé-rateur qui commute avec l’opérateur de transformation [A,U] = 0.

Une symétrie du problème est une transformation telle que [H,U] = 0, ce qui impliquel’existence d’une loi de conservation 〈ψ(t) |U|ψ(t) 〉 =cste.

Pour en savoir plus

Sur les symétries C , P et T discutées dans le contexte de la physique des particules :[42].

Un texte introductif très pédagogique sur les groupes de Lie et leurs représentations(groupe de rotation et groupe de Lorentz) est [13].

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Page 122: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 6 • Symétries et lois de conservation

Sur les groupes discrets et leurs représentations, on pourra consulter le chapitre XII de[27].

Une présentation plus mathématique de la théorie des groupes est [40].

Pour une discussion plus approfondie du théorème de Bloch (en particulier du cas à plu-sieurs dimensions) le lecteur pourra se reporter à des livres de physiques du solide [43, 2](ou au cours plus introductif [23]).

Exercices

6.7 (F) Montrer que les opérateurs position �r et impulsion �p sont impairs. En déduire

la parité du moment cinétique orbital �� = �r × �p.

6.8 (F) On considère l’équation de Schrödinger unidimensionnelle pour un potentielsymétrique : V(x) = V(−x). Montrer qu’il est possible de construire une base d’étatsstationnaires qui sont aussi états propres de P .

6.9 (MF) États liés d’un puits de potentiel

On considère un puits de potentiel : V(x) = −V0 pour |x| � a/2 et V(x) = 0 pour|x| � a/2. Dans l’exercice précédent nous avons montré qu’il est possible de trouverune base d’états stationnaires états propres de la parité. Nous utilisons cette observa-tion pour simplifier la construction des états liés (E < 0) du problème. On introduit

la notation 2mE�2 = −q2 = −k2

0 + k2 où V0 =�2k2

02m .

a) Solutions paires. Donner l’expression de la fonction paire solution de l’équationde Schrödinger dans les différents intervalles. Justifier que la condition de raccor-dement est

ddx

lnψ(x)∣∣∣∣a/2−=

ddx

lnψ(x)∣∣∣∣a/2+

. (6.26)

Imposer la condition de raccordement et déduire l’équation de quantification. Larésoudre graphiquement. Tracer l’allure des premières fonctions d’onde paires.

b) Solutions impaires. Mêmes questions.

c) Que deviennent les solutions des deux équations de quantification dans la limitedu puits profond k0a → ∞ ?

d) Dans la limite inverse du puits peu profond, k0a → 0, existe-t-il toujours dessolutions paires/impaires ?

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Page 123: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problème

6.10 (D) Potentiel en peigne de Dirac – Bandes d’énergie

Nous étudions le spectre de l’hamiltonien

H =�2

2m

(− d2

dx2+ λ

∑n

δ(x − na))

(6.27)

décrivant la dynamique d’un électron soumis à un potentiel périodique en peigne deDirac.

a) Justifier que sur l’intervalle ]na, (n + 1)a[, on peut écrire la fonction d’onde del’état stationnaire comme ψ(x) = Aneik(x−na) + Bne−ik(x−na) . Comment l’énergie del’état stationnaire est-elle reliée à k ?

b) Trouver la condition de raccordement pour ψ(x) de part et d’autre part du δ.Déduire une équation de récurrence entre les couples de coefficients (An, Bn) et(An+1, Bn+1).

c) Nous utilisons le théorème de Bloch, i.e. nous cherchons des états stationnaireségalement états propres de l’opérateur de translation T (a) : ψK(x + a) = ψK(x)eiK

où le paramètre de Bloch appartient à la première zone de Brillouin (ZdB)K ∈ [−π,+π] (ne pas confondre k qui paramétrise l’énergie et K qui est la phasede la valeur propre de l’opérateur de translation T (a)|ψK 〉 = e−iK |ψK 〉). Déduireune autre équation entre (An, Bn) et (An+1, Bn+1).

d) Donner l’équation de quantification qu’on résoudra graphiquement. Montrer quele spectre des énergies est composé de bandes.

e) Densité d’états (plus difficile). Si le cristal a une taille finie L = Ma, des condi-tions aux limites périodiques conduisent à la quantification du paramètre de BlochKm =

2πM m avec m ∈ {1, · · · , M}. Déduire l’expression de la densité d’états dans

la limite L → ∞. Tracer la densité d’états intégrée.

Problème

6.1 Groupe de Galilée

On considère une particule libre de masse m dans une situation unidimensionnelle.On note |φp 〉 l’état propre de l’opérateur impulsion p associé à la valeur propre p(i.e. l’onde plane).

Transformations spéciales de Galilée

Les transformations (spéciales) de Galilée permettent les changements de référen-tiels inertiels en mécanique galiléo-newtonienne. La transformation de paramètre v

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Page 124: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 6 • Symétries et lois de conservation

agit sur les coordonnées d’espace temps comme :

t′ = t et x′ = x + v t (6.28)

a) Comment est transformée l’impulsion p → p′ ?

b) On note U(v) l’opérateur unitaire représentant la transformation dans l’espace deHilbert. L’état | x 〉 décrivant la particule en x est transformé comme U(v)| x 〉 =ei f (x,t) | x′ 〉 et l’onde plane comme U(v)|φp 〉 = eig(p,t) |φp′ 〉, où f (x, t) et g(p, t)sont deux fonctions réelles (qui ne jouent pas de rôle ici). En déduire commentsont transformés les opérateurs de position x → x′ et d’impulsion p → p′ ?

Générateur du groupe de Galilée

Le générateur G du groupe de Galilée est défini en écrivant les transformations sousla forme :

U(v) = e−i�v G = 1 − i v

�G − v2

2�2G2 + O(v3) (6.29)

a) Justifier que G est hermitique. Vérifier que dans la limite v→ 0 la transformationd’un opérateur A prend la forme

A′ = A − i v�

[G, A

] − v2

2�2

[G,

[G, A

]]+ O(v3) (6.30)

b) Justifier que G est une combinaison linéaire des opérateurs de position et d’impul-sion : G = −αx+β p. Déduire α et β en comparant avec les résultats de la premièrepartie du problème.

c) Soit |ψ(t) 〉 solution de l’équation de Schrödinger. Calculer la dérivée ddt 〈G〉ψ(t) où

〈G〉ψ(t)def= 〈ψ(t) |G|ψ(t) 〉. Donner une interprétation physique de ce résultat.

Transformation d’une onde plane

Dans cette dernière partie nous étudions l’action de U(v) sur les ondes planesΨp(x, t) = 〈 x |φp 〉 e−

i�

Ept.

a) En utilisant la formule de Baker-Campbell-Hausdorff (page 108) montrer qu’onpeut écrire U(v) = e

i�v αx e−

i�v β p eiϕ où α et β ont été calculées plus haut. ϕ est une

phase qu’on explicitera.

b) Déduire l’action de la transformation de Galilée sur l’onde plane : (U(v)Ψp)(x, t).Commenter le résultat.

114

Page 125: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

OSCILLATEURHARMONIQUE 7

L’étude de l’oscillateur harmonique est un problème transversal à de nombreux do-maines de la physique. Une des raisons d’une telle popularité est que l’étude d’unoscillateur harmonique modélise la situation très fréquente où le système est au voi-sinage de l’équilibre ; dans ce cas un développement de l’énergie potentielle autourde la position d’équilibre est de la forme

Epotent. ∝ +(écart à l’équilibre)2 (7.1)

i.e. conduit à l’étude d’un oscillateur, ou d’un ensemble d’oscillateurs couplés. Enmécanique quantique, les résultats que nous obtiendrons pour l’oscillateur harmo-nique unidimensionnel pourront s’appliquer à l’étude des vibrations d’une moléculediatomique par exemple (le cas des vibrations de molécules plus complexes ou mêmedes solides conduit à considérer des oscillateurs couplés ; cf. le cours de physique sta-tistique pour le cas des solides, ou le complément III.E de [15]). Plus généralement,ils trouveront un intérêt pour chaque situation décrite par un hamiltonien s’expri-mant comme la somme des carrés de deux variables canoniquement conjuguées (cf.la note de bas de page 3 de la page 71) : H = 1

2 (p2 + q2) lorsque le commutateur[q, p] = i Cste est proportionnel à l’opérateur identité. C’est par exemple le cas pourl’hamiltonien du rayonnement électromagnétique Hem =

∫d�r

( ε02�E 2 + 1

2μ0�B 2). La

quantification du champ électromagnétique conduit en effet à considérer un ensembled’oscillateurs harmoniques découplés associés aux différents modes du champ.

7.1 L’OSCILLATEUR HARMONIQUE CLASSIQUE

Considérons l’hamiltonien :

H =p2

2m+

12

mω2x2 (7.2)

et commençons par rappeller la dynamique classique. Les équations du mouvementde Hamilton sont :

x =∂H∂p=

pm

(7.3)

p = −∂H∂x= −mω2x. (7.4)

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Page 126: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 7 • Oscillateur harmonique

Ces deux équations différentielles couplées peuvent être résolues aisément. Une ma-nière particulièrement directe consiste à introduire une variable complexe combi-nant x et p :

A(t)def=

√mω2

x(t) + i

√1

2mωp(t). (7.5)

L’intérêt d’introduire cette nouvelle variable est double. D’une part nous pouvons in-terpréter l’espace des phases, le plan (x, p), comme le plan complexe de la variable A.D’autre part la variable A(t) obéit à une équation différentielle simplissime : en com-binant (7.3, 7.4) nous obtenons

A(t) = −iω A(t) ⇒ A(t) = A(0) e−iωt. (7.6)

La trajectoire dans l’espace des phases est un cercle parcouru dans le sens inverse ausens trigonométrique.

En utilisant x = 1√2mω

(A+ A∗) et p =√

mω2

A−A∗i , nous pouvons exprimer l’énergie

en fonction de cette nouvelle variable :

H =ω

2(AA∗ + A∗A). (7.7)

Nous ne simplifions pas l’expression comme ω|A|2 ; en développant x2 et p2 nousavons fait attention à ne pas faire commuter A et A∗. En faisant cela nous anticiponssur la prochaine section dans laquelle nous verrons que la non commutativité de xet p en mécanique quantique implique que A et A∗ ne commutent pas.

7.2 LE SPECTRE DE L’OSCILLATEUR HARMONIQUEDifférentes approches permettent de trouver le spectre de H ; l’une consiste à ré-soudre l’équation différentielle (2.9) [27], ce que nous discuterons brièvement dansun second temps. Nous lui préférons ici une approche algébrique présentée dans l’ou-vrage [8] qui utilise la symétrie de l’hamiltonien (il s’agit de la symétrie x ↔ p quijouent des rôles similaires dans l’hamiltonien, H = 1

2 (p2 + x2) si nous omettons lesfacteurs dimensionnés). Il n’y a cependant pas de différence fondamentale entre lesdeux approches : l’équation différentielle est soluble car elle possède la symétrie ex-ploitée dans « l’approche algébrique ». L’algèbre des opérateurs annihilation-créationintroduite ci-dessous apparaît naturellement dans la résolution de l’équation hyper-géométrique associée à l’équation de Schrödinger.

• Analyse dimensionnelle

La première question naturelle à laquelle nous pouvons tâcher de répondre est :quelles sont les échelles du problème ? L’hamiltonien fait apparaître deux para-mètres : la masse m et la pulsation ω. Puisque nous discutons la théorie quantique

116

Page 127: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

7.2. Le spectre de l’oscillateur harmonique

de l’oscillateur harmonique, nous pouvons ajouter la constante de Planck �. Avec lestrois quantités de dimensions [m] = M, [ω] = T−1 et [�] = ML2T−1 nous pouvonsfabriquer une longueur :

�ωdef=

√�

mω. (7.8)

Cette échelle de longueur nous permet de définir une échelle d’impulsion∼ mω�ω =√m�ω ou encore une échelle d’énergie∼ mω2�2

ω = �ω.

Exercice 7.1 (MF) En utilisant l’inégalité de Heisenberg, montrer que l’énergie del’état fondamental est de l’ordre de �ω et que l’extension de la fonction d’onde asso-ciée est �ω.

Exercice 7.2 (F) Calculer la pulsation ω et l’énergie �ω (en eV) correspondant à�ω = 1 Å (pour un électron). Déduire la raideur k = mω2 (en N/m puis en nN/Å).

• Opérateurs d’annihilation et de création

L’analyse de la dynamique classique montre que la dynamique de l’oscillateur peutêtre analysée d’une manière extrêmement simple à l’aide de la variable A, combinai-son linéaire de x et p. Ceci conduit à l’idée d’introduire deux opérateurs correspon-dants A → a = A/

√� et A∗ → a† = A†/

√� qui vont se révéler utiles pour construire

les états propres de H : l’opérateur d’annihilation (l’origine de cette dénominationest expliquée ci-dessous)

adef=

√mω2�

x + i

√1

2m�ωp (7.9)

et son opérateur conjugué

a† =

√mω2�

x − i

√1

2m�ωp (7.10)

appelé opérateur de création.

Exercice 7.3 (F) Vérifier que a est sans dimension.

Le remplacement du couple (x, p) par le couple (a, a†) conduit naturellement à laquestion : par quoi est remplacée la relation de commutation canonique [x, p] = i� ?

Le commutateur se calcule sans problème : [a, a†] =√

mω2�

1i√

2m�ω

([x, p] − [p, x]

)d’où

[a, a†] = 1 (7.11)©D

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Page 128: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 7 • Oscillateur harmonique

Puisque nous avons été attentifs à ne pas commuter A et A∗ dans la section « oscil-lateur classique », nous pouvons faire A →

√� a dans (7.7) : H = 1

2�ω(a†a + aa†),ou encore :

H = �ω

(a†a +

12

). (7.12)

• Opérateur N

Nous introduisons l’opérateur

Ndef= a†a. (7.13)

Construisons son spectre, qui nous donne immédiatement celui de H d’après l’équa-tion (7.12). Suivons la logique suivante : commençons par supposer que nousconnaissons un état propre de N, noté |ϕn 〉 pour une valeur propre n (le choix dela notation vient d’une anticipation sur le résultat : ces valeurs propres sont dans N) :

N |ϕn 〉 = n |ϕn 〉 (7.14)

puis montrons, qu’à partir d’un état |ϕn 〉 supposé connu, les opérateurs a et a† nouspermettent de construire de nouveaux états propres de l’opérateur N. Finalement, celanous permettra de montrer que Spec(N) = N.

• Action de a et a† sur les | n〉En utilisant la définition de N et (7.11) on obtient

N(a|ϕn 〉) = (n − 1) a|ϕn 〉 (7.15)

N(a†|ϕn 〉) = (n + 1) a†|ϕn 〉 (7.16)

ce qui montre que a|ϕn 〉 = C |ϕn−1 〉 et a†|ϕn 〉 = C′ |ϕn+1 〉. Les constantes denormalisation C et C′ s’obtiennent facilement : C2〈ϕn−1 |ϕn−1 〉 = 〈ϕn |a†a|ϕn 〉 =〈ϕn |N|ϕn 〉 = n, c’est-à-dire, à une phase près, C =

√n :

a |ϕn 〉 =√

n |ϕn−1 〉 (7.17)

Cette équation définit la phase relative des deux vecteurs. Par un raisonnement ana-logue :

a† |ϕn 〉 =√

n + 1 |ϕn+1 〉 (7.18)

118

Page 129: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

7.2. Le spectre de l’oscillateur harmonique

• Quantification

Montrons que n est nécessairement entier. Pour cela raisonnons par l’absurde.(i) Remarquons d’abord que, d’après sa définition, N doit posséder un spectre devaleurs propres positives : 〈ϕn |N|ϕn 〉 = 〈ϕn |a†a|ϕn 〉 = ||a|ϕn 〉||2 � 0.(ii) Or, connaissant un état propre |ϕn 〉 de N, si n � N l’équation (7.15) permet deconstruire des états propres associés à des valeurs propres négatives : pour cela ilsuffit d’appliquer a sur |ϕn 〉, un nombre de fois au moins supérieur à la partie entièrede n.

La seule manière d’éviter une contradiction entre (i) et (ii) est donc que

n ∈ N (7.19)

ce qui interdit d’accéder aux n < 0, grâce à l’équation (7.17) qui assure :

a |ϕ0 〉 = 0 (7.20)

|ϕ0 〉 est donc le vecteur associé à la plus petite valeur propre de N, donc égalementde l’énergie. |ϕ0 〉 est l’état fondamental de H. Puisque nous connaissons l’actionde a dans l’espace de Hilbert (ou plutôt l’action de x et p), cette équation définit levecteur |ϕ0 〉.

Nous vérifions que nous avons bien construit tous les états propres de N puisquen ∈ N est que les opérateurs a et a† permettent de sauter de n à n±1 (il n’est pas inutilede rappeler une propriété générale : pour un potentiel confinant unidimensionnel, lesénergies ne sont pas dégénérées).

RemarqueAttention à ne pas confondre les deux notations : |ϕ0 〉 est le vecteur propre de Hdécrivant une particule dans l’état fondamental, tandis que, dans les notations deDirac, 0 est le vecteur nul de l’espace de Hilbert décrivant l’absence de particule.

• Spectre de H

Nous avons terminé la construction des états propres de H. Les valeurs propres del’hamiltonien sont :

En = �ω

(n +

12

)pour n ∈ N (7.21)

et les vecteurs propres sont définis par les relations (7.17, 7.18). L’oscillateur harmo-nique unidimensionnel a donc un spectre très particulier de niveaux d’énergie équi-distants (séparés de �ω). Dans une expérience de spectroscopie, une telle structurerégulière sera donc caractéristique de degrés de liberté de vibration.©D

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Page 130: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 7 • Oscillateur harmonique

h 0

0

10

20

30

40

0 0.5 1 1.5 2 2.5

I=2 μ A

T=120mK

μ

fréquence (GHz)

Vol

ts)

tens

ion

(

Figure 7.1– Spectre de vibration d’une corde de nanotubes de carbone.

À gauche : Schéma de l’expérience : une corde suspendue de (≈ 200) nanotubes decarbone, dans un état supraconducteur (à T = 120 mK), est traversée par un courantI = 2μA. Les modes de vibration de la corde sont excités par un champ électromagnétiqueradio-fréquence. À droite : La tension aux bornes de la corde est mesurée en fonction dela fréquence d’irradiation f = ω/(2π). Les pics de tension séparés de ω0/(2π) � 330MHz (i.e.�ω0 � 1.3 μeV), correspondent aux modes propres de vibration (chaque pic est associé àun oscillateur). Données tirées de : B. Reulet, A. Yu. Kasumov, M. Kociak, R. Deblock,I. I. Gorbatov, V. T. Volkov, C. Journet & H. Bouchiat, Phys. Rev. Lett. 85, 2829 (2000).

L’opérateur a permet donc de passer de l’état d’énergie En à celui d’énergie En−1

et l’opérateur a† de l’état d’énergie En à celui d’énergie En+1. L’opérateur a détruitune excitation de l’oscillateur et a† en crée une (figure 7.2). Ces deux opérateurspermettent de construire les états propres de H : connaissant le fondamental |ϕ0 〉,défini par l’équation (7.20), l’application de a† nous donne tous les états excités :

|ϕn 〉 =1√

n!(a†)n |ϕ0 〉. (7.22)

Exercice 7.4 (F) Démontrer ce résultat.

• Fonctions d’onde

Pour illustrer cette dernière remarque nous construisons les fonctions d’onde, notéesϕn(x) = 〈 x |ϕn 〉. L’état fondamental est donné par (7.20) :

〈 x |a |ϕ0 〉 = 0 ⇔(mω�

x +d

dx

)ϕ0(x) = 0. (7.23)

Nous trouvons immédiatement que la fonction d’onde est une gaussienne :

ϕ0(x) =(mωπ�

)1/4exp−mω

2�x2. (7.24)

120

Page 131: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

7.2. Le spectre de l’oscillateur harmonique

Figure 7.2– Spectre de l’oscillateurharmonique.

Niveaux d’énergie et fonctions d’onde des huitpremiers états (la fonction ϕn(x) est décaléevers le haut de En = �ω(n + 1

2 )). On vérifie que lenombre de nœuds coïncide avec le degréd’excitation (théorème de Sturm-Liouville). Lesopérateurs a et a† permettent de descendre etmonter dans le spectre.

L’application de l’opérateur de création, ϕn(x) = 1√n!

(a†

)nϕ0(x) ∝ (mω�− d

dx

)nϕ0(x),

fait apparaître les polynômes d’Hermite1 Hn(ξ). La fonction d’onde est :

ϕn(x) =(mωπ�

)1/4 1√

2nn!Hn(ξ) e−

12 ξ

2où ξ

def=

√mω�

x. (7.25)

Exercice 7.5 (F) Calculer les valeurs moyennes de x, p, x2 et p2 dans un état propre|ϕn 〉. Déduire les fluctuations Δxϕn et Δpϕn puis le produit ΔxϕnΔpϕn .

• Résolution de l’équation de Schrödinger

Il est instructif de retrouver le spectre (7.21) en partant de l’équation de Schrödinger :(− �

2

2md2

dx2+

12

mω2x2)ϕ(x) = E ϕ(x). (7.26)

Nous procédons par étapes (nous retrouverons la même logique dans l’étude del’équation de Schrödinger pour le potentiel en 1/r au chapitre 12).

• Étape 1 : Il est plus clair de travailler avec des variables adimensionnées : ξ =√mω�

x et E = E/�ω : (− d2

dξ2+ ξ2

)ϕ(ξ) = 2E ϕ(ξ). (7.27)

1. La définition des polynômes d’Hermite est rappelée dans l’annexe A. Dans la variable ξ, la fonctiond’onde du fondamental est ϕ0(ξ) = 1

π1/4 e−ξ2 /2. L’opérateur de création prend la forme a† → ξ − d

dξ . Si on

écrit ϕn(ξ) ∝ Hn(ξ)e−ξ2 /2, avec H0(x) = 1, il est facile de vérifier que ϕn(ξ) = 1√

n(a†ϕn−1)(ξ) conduit à la

relation Hn(ξ) = (2ξ − ddξ )Hn−1(ξ), qui est bien la récurrence entre polynômes d’Hermite rappelée dans

l’annexe A. Qed.©D

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Chapitre 7 • Oscillateur harmonique

• Étape 2 : On analyse les comportements asymptotiques de la solution. Pour|ξ| → ∞, on peut négliger le membre de droite dans (7.27). On a alors : d2

dξ2 ϕ(ξ) �ξ2ϕ(ξ). En remarquant que d2

dξ2 e−ξ2/2 = (ξ2 − 1)e−ξ

2/2, on déduit que le comportement

dominant de la fonction d’onde à l’infini est gaussien : ϕ(ξ) ∼ e−ξ2/2.

• Étape 3 : On extrait le comportement dominant à l’infini en écrivant la fonctiond’onde sous la forme ϕ(ξ) = H(ξ) e−ξ

2/2. Un peu d’algèbre nous montre que la fonc-tion H(ξ) obéit à l’équation

H′′(ξ) − 2ξ H′(ξ) + (2E − 1) H(ξ) = 0. (7.28)

Cette équation est un cas particulier d’équation hypergéométrique ; elle porte le nomd’équation d’Hermite (annexe A page 291). Elle n’admet de solutions normalisablesau sens

∫dξ H(ξ)2e−ξ

2< ∞ que si (E − 1/2) = n ∈ N. Ces solutions sont polyno-

miales ; il s’agit précisément des polynômes d’Hermite Hn(ξ).

Figure 7.3– Densités de probabilitéquantique et classique.

Densité de probabilité |ϕn(x)|2 pour n = 40.La courbe rouge en tirets indique lerésultat classique ρcl(x) avec E = 1

2 mω2x2E ,

pour E = E40.�10 �5 0 5 10

0.00

0.05

0.10

0.15

0.20

x mΩ � �

��40�x�

2

• Relation avec la densité de probabilité classique

Certaines propriétés obtenues dans le cadre de la mécanique classique peuvent êtreretrouvées dans les fonctions d’onde. Pour cela nous introduisons une « densité deprobabilité classique », notée ρclass(x; E), que nous comparons à la densité de proba-bilité quantique, ρquant(x; En) = |ϕn(x)|2. Considérons le problème du point de vueclassique : partant de E = 1

2m(dx

dt

)2+ 1

2mω2x2 nous déduisons le temps passé dansl’intervalle dt = ± dx

ω√

x2E−x2

(les deux signes correspondent à l’aller et au retour) où

xE est l’amplitude des oscillations, donnée par E = 12mω2x2

E. En notant T = 2π/ω lapériode, nous obtenons finalement ρclass(x; E)dx = 2

T dt, i.e.

ρclass(x; E) =1

π√

x2E − x2

. (7.29)

122

Page 133: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

Sur la figure nous comparons ρclass(x; E40) et ρquant(x; E40). Nous voyons qu’à condi-tion de moyenner les oscillations rapides de la distribution quantique, les deux distri-butions coïncident globalement (d’autant mieux que En augmente). Les oscillations,qui signalent un phénomène d’interférence, sont plus serrées vers l’origine où la parti-cule est plus rapide, comparativement au voisinage des points de rebroussement où laparticule ralentit et donc la probabilité de présence est plus élevée (ce que nous com-prenons à partir de p = h/λ). Sans surprise, nous constatons que la densité quantiquepénètre dans la région interdite classiquement (effet tunnel). Nous avons retrouvéune nouvelle fois l’idée que la limite des grands nombres quantiques coïncide avecles résultats classiques (principe de correspondance).

À retenir

Connaître le spectre d’énergie (7.21).

Savoir utiliser les relations (7.11, 7.17, 7.18).

Dégénérescences résultant d’une symétrie ou dégénérescences accidentelles (exer-cice 7.6).

Pour en savoir plus

La question de la quantification du champ électromagnétique sera évoquée au chapitre 15.Des références sur la question sont les ouvrages [33, 37, 9].

Exercices

7.6 (MF) Étudions un oscillateur harmonique bidimensionnel :

H = �p 2

2m +12mω2

x x2 + 12mω2

y y2.

a) Donner le spectre des états propres et les valeurs propres de l’énergie.

b) Discuter en détail les dégénérescences (en particulier on considèrera le cas iso-trope ωx = ωy).

7.7 (MF) On considère l’équation de Schrödinger dans l’espace tridimensionnel.Donner le spectre des énergies et les dégénérescences des niveaux d’énergie d’unoscillateur harmonique isotrope.

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Page 134: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 7 • Oscillateur harmonique

7.8 (D) Énergie de vibration d’une chaîne d’oscillateurs couplés

Étudions un problème d’oscillateurs couplés : une chaîne d’atomes ayant pour posi-tions {xn} avec n ∈ {1, · · · , N}, dont la dynamique est décrite par le lagrangien

L =m2

∑n

[x2

n − ω20(xn − xn−1 − a)2], (7.30)

(pour simplifier on fera une hypothèse de conditions aux limites périodiques xN ≡x0). Le second terme de L décrit les énergies de liaison entre atomes voisins.C’est donc un modèle de « cristal unidimensionnel »2. On introduira les variablesξn

def= xn − na.

a) Variables normales et modes propres de vibration. Nous mettons le lagrangiensous une forme plus appropriée en passant des variables {ξn} aux variables {χQ}reliées par une transformation de Fourier (discrète) : χQ

def= 1√

N

∑n ξne−iQn, où N

est la longueur de la chaîne (les vecteurs Q sont quantifiés si la chaîne est finie :Q = 2πm/N avec m ∈ {1, · · · , N}). Montrer le lagrangien se met sous la forme

L =m2

∑Q

[|χQ|2 − ω2Q|χQ|2

]. (7.31)

Quelle est la variable canoniquement conjuguée πQ de χQ ? Déduire l’Hamilto-nien de la chaîne.

b) Quantification. La quantification du problème est réalisée en imposant des re-lations de commutation [q, p] = i� entre variables canoniquement conjuguées.Déduire le spectre des états propres et des valeurs propres de la chaîne.

c) Fluctuations. (plus difficile) Que vaut 〈χQχQ′ 〉, où la moyenne est prise sur unétat stationnaire quelconque ? Écrire les fluctuations de positions 〈(ξn − ξm)2〉Ωdans l’état fondamental |Ω 〉 sous la forme d’une intégrale (considérer N → ∞).Estimer cette intégrale. La chaîne peut-elle former un cristal stable ?

Problème

7.1 États cohérents

Nous avons obtenu les états stationnaires (états propres de H) pour un oscillateur har-monique. Nous étudions maintenant d’autres états intéressants, les états propres del’opérateur d’annihilation, appelés états cohérents ou états quasiclassiques.

2. Attention : dans la section 6.4 nous avons étudié l’équation de Schrödinger pour un potentiel pé-riodique, i.e. nous avons étudié la dynamique des électrons soumis au potentiel périodique des ionsformant le cristal. Dans cet exercice nous discutons les vibrations des atomes formant le cristal.

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Page 135: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problème

Afin de simplifier les calculs nous fixons m = ω = � = 1 (l’analyse de l’exercice 7.3nous permettra de rétablir les paramètres dimensionnés).

1) États cohérents : définition et propriétés. Les états cohérents sont les étatspropres de l’opérateur d’annihilation :

a |α 〉 = α |α 〉 (7.32)

L’état est reperé par la valeur propre α ∈ C (la valeur propre est complexe puisque an’est pas hermitique). Nous cherchons maintenant à caractériser l’état cohérent. Pourcela nous calculons les valeurs moyennes des différents opérateurs.

a) Calculer 〈N〉α et les fluctuations ΔNα (où N = a†a). En déduire la valeur moyennede l’énergie et ses fluctuations.

b) Calculer les valeurs moyennes 〈x〉α et 〈 p〉α. Quel sens physique donner au plancomplexe du paramètre α ? Calculer le produit Δxα Δpα. Commenter.

2) Décomposition sur les états stationnaires. Donner la décomposition de |α 〉 dansla base des états stationnaires (i.e. les écrire comme |α 〉 = ∑∞

n=0 cn|ϕn 〉). Montrer quel’état cohérent peut être obtenu par application d’un opérateur sur l’état fondamental(le vide d’excitation) :

|α 〉 = e−12 |α|

2eα a† |ϕ0 〉. (7.33)

Si on mesure N (i.e. l’énergie), quels sont les résultats de mesure possibles et avecquelles probabilités sont-ils obtenus ?

3) Base surcomplète. Calculer le produit scalaire de deux états cohérents |α 〉 et |α′ 〉.

4) Évolution temporelle

a) à l’instant t = 0, le système se trouve dans l’état |ψα(0) 〉 = |α 〉. Déduire |ψα(t) 〉.b) Rappeler le sens physique des parties réelle et imaginaire ? Reprendre la question

1.b pout t � 0. Montrer que l’évolution peut être illustrée dans le plan complexede la variable α. Comparer avec les états propres |ϕn 〉. Justifier la dénominationd’états « quasi-classiques ».

5) Fonction d’onde. L’action de l’opérateur d’annihilation sur les fonctions d’ondeest a → 1√

2( d

dx + x).

a) Montrer que la fonction d’onde ψα(x, t) = 〈 x |ψα(t) 〉 est une gaussienne.

b) Même question pour ψα(p, t).

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MOMENTCINÉTIQUE – SPIN 8

Le rôle du moment cinétique comme générateur infinitésimal des rotations a déjà étémentionné au chapitre 6 (nous le démontrerons). Dans tout problème invariant parrotation le moment cinétique est donc conservé, ce qui sert de guide pour construiredes bases d’états propres de l’hamiltonien. Ce point est particulièrement importantpour la physique atomique (chapitre 12) où les états stationnaires des atomes sontclassés à l’aide de leurs propriétés de symétrie sous les rotations. Un des objets duprésent chapitre sera donc de construire le spectre de l’opérateur moment cinétique.

8.1 MOMENT CINÉTIQUE

8.1.1 Relations de commutation - Générateur des rotations

Considérons un premier exemple d’opérateur de moment cinétique : le moment ci-nétique orbital d’une particule, défini comme le produit vectoriel (noté « × » dans lelivre) de la position �r et de l’impulsion �p

��def= �r × �p. (8.1)

Tout comme les opérateurs de position et d’impulsion, l’opérateur de moment ciné-tique est un opérateur vectoriel (ou pseudo-vectoriel, cf. exercice 6.7), cependant,à la différence de �r et �p, les trois composantes de �� ne commutent pas entre ellescomme nous le vérifions. En utilisant [AB, CD] = [A, C]DB+A[B, C]D+C[A, D]B+AC[B, D] (exercice 3.6), nous obtenons :

[�x, �y] = [ypz − zpy, zpx − xpz] = [ypz, zpx] + [zpy, xpz]

= y [pz, z] px + x [z, pz] py = i��z. (8.2)

Nous pouvons également calculer le commutateur [�x, �z]. Finalement :

[�x, �x] = 0 (8.3)

[�x, �y] = i� �z (8.4)

[�x, �z] = −i� �y. (8.5)

Les autres relations de commutation sont obtenues par permutations circulaires desindices.©D

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Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

Tenseur antisymétrique de Levi-Civita. Toute l’information peut être encodéede manière plus compacte en introduisant le tenseur antisymétrique εijk. Celui-ci est défini par les deux propriétés suivantes : (i) εijk est antisymétrique sousl’échange de n’importe quelle paire d’indices, par exemple εijk = −εjik. (ii) ε123 = +1.

En adoptant la convention d’Einstein de sommation implicite sur les indicesrépétés, nous pouvons écrire le produit vectoriel entre deux vecteurs de façonsympathique (�A × �B)i = εijkAjBk. La sommation sur les indices répétés prend parexemple la forme (�A × �B)1 = ε1jkAjBk = ε123A2B3 + ε132A3B2 = AyBz − AzBy .

Propriétés : εijkεmnk = δimδjn − δinδjm, εijkεmjk = 2δim et εijkεijk = 6.

À l’aide de ce tenseur les 9 relations de commutation peuvent être regroupées dansune unique équation

[�i, � j] = i� εi jk �k

(⇔ [�i, � j] = i�

∑k

εi jk �k

)(8.6)

avec sommation implicite sur l’indice répété1. Les relations (8.3, 8.4, 8.5), ou (8.6),peuvent encore être écrites sous la forme suggestive :

�� × �� = i���. (8.7)

À la limite classique, � → 0, on retrouve la propriété attendue pour un vecteur�� × �� = 0.

Exercice 8.1 (F) Considérons un atome à Z électrons. On note �� (i) le moment or-bital de l’électron numéro i, agissant dans l’espace de Hilbert H (i). Montrer que lemoment orbital total �L =

∑i�� (i), agissant dans l’espace de Hilbert H (1) ⊗ · · · ⊗H (Z)

des Z électrons, obéit également aux relations de commutation (8.6).

• Générateur des rotations

Montrons que l’opérateur �� d’une particule est le générateur des rotations dans l’es-pace de Hilbert. Considérons une rotation d’angle θ autour de l’axe Oz. Nous la fai-sons agir sur le vecteur �r. Celui-ci est transformé en un vecteur �r ′ (figure 8.1) :

x′ = cos(θ) x − sin(θ) y � x − θ y (8.8)

y′ = sin(θ) x + cos(θ) y � y + θ x (8.9)

où nous avons développé l’expression au premier ordre en θ.

1. Par exemple, pour i = 1 ≡ x et j = 2 ≡ y, la relation devient : [�1, �2] = i� ε12k �k = i� (ε121 �1 +

ε122 �2 + ε123 �3). D’après la définition du tenseur on a ε121 = 0, ε122 = 0 et ε123 = 1. Finalement on abien : [�1, �2] = i� �3.

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Page 139: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.1. Moment cinétique

Figure 8.1– Rotation du vecteur �r autour de l’axe Oz d’un angle θ.

Nous regroupons l’information sur la direction (ici �uz) et l’angle de rotation dansun vecteur �θ. Le groupe des rotations est un groupe continu à trois paramètres : unpour l’angle θ = ||�θ|| et deux pour la direction (le vecteur unitaire �θ/θ). Aidé de cettenotation, nous pouvons généraliser (8.8, 8.9) au cas d’une rotation arbitraire :

�r ′ � �r + �θ × �r. (8.10)

Si nous considérons une fonction scalaire ψ(�r), celle-ci est par définition invariantepar rotation, ce qui s’exprime comme :

ψ′(�r ′) = ψ(�r) (8.11)

Afin d’identifier le générateur des rotations, il est utile de considérer la variationlocale de la fonction : δψ(�r) = ψ′(�r) − ψ(�r). Nous voyons sans peine que :

δψ(�r) � ψ(�r − �θ × �r) − ψ(�r) � −(�θ × �r) · �∇ψ(�r) = −�θ · (�r × �∇)ψ(�r) (8.12)

donc

ψ′(�r) �(1 − �θ · (�r × �∇)

)ψ(�r). (8.13)

Nous reconnaissons la représentation de l’opérateur moment orbital dans l’espacedes fonctions d’onde, �� = −i��r × �∇. Nous pouvons reécrire cette relation

〈�r |ψ′ 〉 � 〈�r |(1 − i��θ · ��

)|ψ 〉 i.e. |ψ′ 〉 �

(1 − i��θ · ��

)|ψ 〉 (8.14)

ce qui nous montre que l’opérateur de rotation pour un angle infinitésimal est R(�θ) �(1 − i

��θ · ��) ou encore

R(�θ) = e−i��θ·��, (8.15)

où le passage d’une rotation pour θ � 1 à un angle fini se fait à l’aide de la rela-tion limN→∞(1 + A

N )N = eA. Nous avons démontré que le moment cinétique est legénérateur infinitésimal des rotations dans l’espace de Hilbert.©D

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Page 140: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

8.1.2 Quelques considérations sur le groupe des rotations

Cette section, qui peut être sautée sans gêner la compréhension des sections suivantes,cherche a mettre en perspective l’étude du moment cinétique en mécanique quantiqueen introduisant quelques notions sur le groupe des rotations. Nous souhaitons par làsouligner que l’essentiel des propriétés des moments cinétiques en mécanique quan-tique a pour origine la théorie des groupes. Par exemple, l’équation (8.13) nous ayantpermis d’identifier le générateur infinitésimal des rotations n’a rien de quantique. Laconstante de Planck n’a été introduite que dans une ultime étape, afin d’identifierl’opérateur différentiel −i�r × �∇ avec la représentation de l’opérateur moment ciné-tique orbital dans l’espace des fonctions d’onde.

a) Préliminaire : retour sur le cas simple du groupedes translations

Notons T (�a) la translation de �a. L’ensemble de ces transformations forme un groupede transformations non compact (ici paramétrés par 3 paramètres appartenant à undomaine non compact, R3). Lorsqu’on applique plusieurs translations il est facile dese convaincre que l’ordre dans lequel sont effectuées ces opérations est indifférent,comme la figure l’illustre. Tous les éléments du groupe commutent T (�a1)T (�a2) =T (�a2)T (�a1) = T (�a1 + �a2) ∀ �a1, �a2. Le groupe est dit abélien.

a1

a2

a1

a2

y

xM

M’Figure 8.2– Commutation des translations.

Dans le chapitre 6, nous avons étudié les opérateurs représentant l’action des trans-lations dans l’espace de Hilbert ; nous avons obtenu T (�a) = e−

i��p·�a. Puisque les élé-

ments du groupe des translations sont repérés par trois paramètres indépendants (lescomposantes de �a) le groupe possède trois générateurs (les composantes de �p). Nouspouvons donc relier la nature abélienne du groupe, éq. (6.15), à la commutativité deses générateurs : [px, py] = [py, pz] = [pz, px] = 0.

Représentation d’un groupe. T (�a) désigne l’opération de translation. Celle-ciagit sur toute grandeur physique, et notamment sur les vecteurs de l’espace deHilbert par le biais d’un opérateur unitaire T (�a). L’ensemble de ces opérateursunitaires, {T (�a)} avec �a ∈ R3, forme la représentation du groupe de translation{T (�a)}, engendrée par les vecteurs de l’espace de Hilbert.

130

Page 141: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.1. Moment cinétique

b) Algèbre de Lie du groupe des rotations

Nous montrons que nous pouvons retrouver les relations de commutation (8.6) défi-nissant le groupe des rotations sans faire aucunement référence à la mécanique quan-tique. Dans le paragraphe précédent nous avons montré que l’opérateur de momentorbital est le générateur des rotations des fonctions scalaires.

Nous notons R(�θ) les rotations dans l’espace physique tridimensionnel. Chaquerotation est repérée par trois paramètres réels regroupés dans le vecteur �θ = θ �u, dontla direction �u indique l’axe de rotation et l’amplitude θ ∈ [0, π] l’angle de rotation.Le vecteur �θ appartient à une boule de rayon π dont les points opposés sont identifiéspuisque R(π�u) ≡ R(−π�u), i.e. un domaine compact. On dit que le groupe des rotationsest un groupe compact.

• Rotations des vecteurs

Reprenons l’analyse de la rotation des vecteurs de R3. Toute quantité vectorielle,ici notée �V , est affectée par une rotation infinitésimale de paramètre �θ de la mêmemanière que le vecteur position, (figure 8.1), ce qui définit sa nature vectorielle :

�V ′ � �V + �θ × �V. (8.16)

Dans l’espace R3, la rotation R(�θ) est représentée par une matrice 3 × 3 que nousnotons R(�θ). L’ensemble des matrices R(�θ) forme le groupe SO(3) : le « S », pour« spécial », indique que les matrices sont de déterminant 1, le « O » qu’elles sontorthogonales, R(�θ)−1 = R(�θ)T, et le « 3 » que la signature de la norme conservée sousles rotations, ||�r||2 = x2 + y2 + y2, est (+,+,+). Écrivons la rotation infinitésimalesous la forme :

R(�θ) � 13 − i�θ · �J (8.17)

où 13 est la matrice identité de dimension 3 et Jx, Jy et Jz sont trois matrices3 × 3 [les générateurs du groupe SO(3)]. Ces trois matrices sont obtenues en iden-tifiant (8.16) avec �V ′ � (13 − i�θ · �J)�V . Par exemple, pour la rotation selon �uz, lesrelations (8.8, 8.9) peuvent être mises sous la forme �V ′ = R(θ �uz)�V � �V − i θJz�V.Nous obtenons la matrice Jz. En considérant le cas des rotations autour des direc-tions �ux et �uy, nous obtenons les deux autres matrices :

Jx =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝0 0 00 0 −i0 i 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ , Jy =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝0 0 i0 0 0−i 0 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ et Jz =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝0 −i 0i 0 00 0 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ . (8.18)

On vérifie que �J 2 = 2 13 et [Jx,Jy] = iJz. Plus généralement les composantesde �J obéissent aux relations de commutation :[Ji , J j

]= i εi jk Jk, (8.19)©

Dun

od.L

aph

otoc

opie

non

auto

risé

ees

tun

délit

.

131

Page 142: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

analogues à celles obtenues dans la section 8.1.1 en étudiant l’opérateur de momentorbital. Ces relations forment l’algèbre de Lie du groupe. Les constantes εi jk sontappelées les constantes de structure du groupe.

La non commutation des générateurs des rotations traduit la non commu-tation de certaines rotations, ce qui n’a rien de spécifiquement quantique. (8.19)nous montre qu’en général R(�θ) R(�θ ′) � R(�θ ′) R(�θ). Cette propriété, ici démontréepour une représentation particulière du groupe de rotation, les matrices de SO(3), estvalable pour toute représentation. Si �θ et �θ ′ ne sont pas colinéaires, on a :

R(�θ)R(�θ ′) � R(�θ ′)R(�θ). (8.20)

Le groupe est dit non abélien. La non commutatition des rotations autour d’axesdifférentes est illustrée sur la figure 8.3 en considérant les rotations R(−π

2�uy)R(π2�ux)et R(π2�ux)R(−π

2�uy).

z

x

y

(a)

O

Initial

Final 1

z

x

y

(b)

O

Initial

Final 2

Figure 8.3– Non commutation des rotations.Faisons agir deux rotations sur le rectangle initialement dans le plan xOy. Suivant l’ordredans lequel les rotations agissent, le résultat est différent. (a) : rotation R(− π

2�uy )R( π2 �ux ).

(b) : rotation R( π2 �ux )R(− π2�uy ).

Ces considérations appellent quelques commentaires : nous venons de retrouver larelation de commutation (8.6) dans un cadre qui n’a rien de spécifiquement quantique.Nous avons vu qu’aussi bien les opérateurs différentiels qui font tourner les fonctionsscalaires (��/� = −i�r × �∇), que les matrices (8.23) qui font tourner les vecteurs de R3,satisfont les mêmes relations de commutation. Suivant la nature de la quantité phy-sique considérée, l’opérateur de moment cinétique, défini comme le générateur dugroupe des rotations, est représenté par différents opérateurs. Un vecteur est un objetà 3 composantes, il faut donc des matrices 3 × 3 pour le faire tourner. Les vecteursde l’espace de Hilbert (des vecteurs « à nombre infini de composantes ») subissentl’effet des rotations à travers des opérateurs unitaires (des « matrices de dimensioninfinie »). L’action des rotations sur les fonctions d’onde est caractérisée par des opé-rateurs différentiels, etc. Chaque quantité physique engendre une représentation dif-férente du groupe des rotations (i.e. les trois composantes du moment cinétique sont

132

Page 143: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.1. Moment cinétique

représentées par différents opérateurs), mais quelle que soit la représentation, les troisgénérateurs satisfont les relations de commutation (8.19) qui définissent le groupe desrotations.

Afin de rendre plus explicite l’analogie avec l’étude générale du moment cinétiqueen mécanique quantique qui sera menée dans la section suivante, nous exprimonsles générateurs de rotation dans une autre base. Les trois matrices �J agissent sur letriplet formé des composantes cartésiennes (Vx, Vy, Vz). Il est commode de regrouperdifféremment les composantes :

V0def= Vz et V±

def=∓Vx + iVy√

2. (8.21)

Autrement dit on passe des composantes cartésiennes à ces nouvelles composantes àl’aide de la transformation unitaire :⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝

V+V0

V−

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ =⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝−1/

√2 i/

√2 0

0 0 11/√

2 i/√

2 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝

Vx

VyVz

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ = U†

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝Vx

VyVz

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ . (8.22)

La représentation des générateurs dans la nouvelle base est donnée par les matricesJi

def= U†Ji U, où i ∈ {x, y, z} :

Jx =1√

2

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝0 1 01 0 10 1 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ , Jy =1√

2

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝0 −i 0i 0 −i0 i 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ et Jz =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝1 0 00 0 00 0 −1

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ . (8.23)

Ce changement de base a réalisé la diagonalisation de la troisième composante dumoment cinétique. Les matrices Ji vérifient évidemment l’algèbre de Lie (8.19).

8.1.3 Le moment cinétique en mécanique quantique

Nous avons introduit la notion de moment cinétique en considérant l’exemple précisdu moment orbital �� d’une particule, cependant nous pourrions considérer d’autresexemples physiques (par exemple nous montrons dans l’exercice 8.1 que les com-posantes du moment cinétique orbital total d’un atome obéissent à la même algèbreque celle du moment d’un unique électron). Nous étudions maintenant les propriétésgénérales de tels opérateurs en partant de la définition suivante du moment cinétique,qui sera noté �J : tout opérateur vectoriel dont les trois composantes obéissent auxrelations de commutation

[Ji, J j] = i� εi jk Jk (avec sommation implicite sur k). (8.24)©D

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Page 144: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

Une première observation importante est issue du calcul de [ �J 2, Ji] = J j[J j, Ji] +[J j, Ji]J j = i� εi jk (J jJk + Jk J j)

[ �J 2, Ji] = 0 (8.25)

Nous pouvons donner l’interprétation physique de cette relation : puisque �J estle générateur infinitésimal des rotations dans l’espace de Hilbert, cette relation decommutation traduit l’invariance de || �J|| sous les rotations, i.e. la nature scalaire dumodule carré du vecteur (voir § 8.1.5 ci-dessous).

• Objectif

D’après l’équation (8.25) nous pouvons chercher une base d’états propres communsà �J 2 et une des composantes de �J. Nous choisissons Jz.

• Opérateurs J+ et J−

Pour construire le spectre, il est commode d’introduire les deux opérateurs J± :

J±def= Jx ± iJy. (8.26)

La logique que nous adoptons est très proche de celle qui nous a permis de trouverle spectre de l’oscillateur harmonique ; ces deux opérateurs joueront des rôles simi-laires aux opérateurs création et annihilation. Commençons par étudier l’algèbre quesatisfont ces opérateurs :

[Jz, J±] = ±� J+ (8.27)

[J+, J−] = 2� Jz. (8.28)

Nous déduisons deux relations que nous utiliserons à plusieurs reprises par la suite :

J+J− = �J 2 − J2z + � Jz (8.29)

J−J+ = �J 2 − J2z − � Jz. (8.30)

• Paramétrisation des vecteurs propres de �J 2 et Jz

Les valeurs propres de �J 2 sont positives. Il est commode pour la suite d’indexerles valeurs propres comme j( j + 1)�2 où j � 0 (cette paramétrisation est licite carx �→ x(x + 1) est une fonction bijective de R+ sur R+).

Nous notons | j, m 〉 le vecteur propre des deux opérateurs :

�J 2 | j, m 〉 = �2 j( j + 1) | j, m 〉 (8.31)

Jz | j, m 〉 = �m | j, m 〉 (8.32)

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Page 145: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.1. Moment cinétique

Ces deux relations définissent le vecteur | j, m 〉. Si la paramétrisation des valeurspropres de Jz est naturelle et revient à extraire un facteur dimensionné, celle desvaleurs propres de �J 2 est guidée par.... sa commodité connaissant le résultat !

Nous montrons maintenant que j et m sont quantifiés.

• Propriété

À j fixé, les valeurs propres de Jz sont comprises entre − j et + j.

Démonstration : La norme du vecteur J+| j, m 〉 est :

||J+| j, m 〉||2 = 〈 j, m |J−J+| j, m 〉 = �2( j( j + 1) − m(m + 1)) � 0 (8.33)

où nous avons utilisé (8.30). Cette relation conduit à l’inégalité sur m :

−( j + 1) � m � j. (8.34)

D’autre part :

||J−| j, m 〉||2 = 〈 j, m |J+J−| j, m 〉 = �2( j( j + 1) − m(m − 1)) � 0 (8.35)

où nous avons cette fois utilisé (8.29). Nous obtenons l’inégalité

− j � m � j + 1. (8.36)

Les inégalités (8.34, 8.36) ne sont compatibles que si

|m| � j (8.37)

Nous donnons l’interprétation de ces inégalités : la moyenne d’une des compo-santes ne peut excéder le module (pour être plus précis : la moyenne du module,�√

j( j + 1), est toujours strictement supérieure à la plus grande des valeurs propresde Jz, � j) :

∀ |ψ 〉 ∈ H 〈|| �J||〉ψ >︸︷︷︸mais pas �

| 〈Jz〉ψ |. (8.38)

Le fait que l’inégalité soit stricte signale des contributions des fluctuations quantiquesdes composantes Jx et Jy ne pouvant pas être annulées au profit de la composante Jz

(figure 8.4) ; nous y reviendrons.

• Propriété

L’action des opérateurs J+ et J− génère de nouveaux états propres, de même j (car[ �J 2, J±] = 0) mais de m différents (car [Jz, J±] � 0).©D

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Page 146: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

Démonstration : En utilisant (8.27), nous obtenons

Jz J±| j, m 〉 = �(m ± 1) J±| j, m 〉, (8.39)

ce qui prouve que J±| j, m 〉 ∝ | j, m ± 1 〉. Nous pouvons préciser quel est le facteur :la norme de J± | j, m 〉 est donnée par (8.33, 8.35) ce qui conduit à

J± | j, m 〉 = �√

j( j + 1) − m(m ± 1) | j, m ± 1 〉 (8.40)

L’équation définit la phase relative entre les deux vecteurs.

• Quantification

Nous utilisons encore une fois (8.29) ou plutôt (8.35) pour m = − j :

J−| j,− j 〉 = 0 (8.41)

et (8.30, 8.33) pour m = j :

J+| j, j 〉 = 0. (8.42)

Par analogie avec l’étude de l’oscillateur harmonique, nous pourrions partir de la pre-mière de ces relations, qui définit | j,− j 〉, puis générer les nouveaux vecteurs propres| j, m 〉 par application de J+ : (J+)n| j,− j 〉 ∝ | j,− j + n 〉. La seule façon de ne pasvioler (8.37) est que 2 j soit un entier, ainsi la série des nouveaux vecteurs | j,− j + n 〉s’arrête après n = 2 j applications de J+ : (J+)2 j+1 | j,− j 〉 ∝ J+ | j, j 〉 = 0. Nousconcluons que le nombre j est quantifié

2 j ∈ N (8.43)

Par conséquent m est entier (si j est entier), ou demi-entier (si j est demi-entier).

• Remarque importante : entier OU demi-entier

Si on considère un moment cinétique particulier, il est quantifié soit par valeurs en-tières, soit par valeurs demi-entières (mais jamais les deux en même temps). Cetteobservation aura des conséquences très profondes. Plus bas dans ce chapitre, nousverrons que les particules portent un moment cinétique intrinsèque appelé « spin ».Les propriétés collectives de particules identiques, leurs propriétés de permutabilité,sont déterminées par leur spin (entier ou demi-entier). Ce point sera discuté dans lechapitre 11.

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Page 147: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.1. Moment cinétique

• Sous espaces E (j) stables sous les rotations

L’opérateur Jz est diagonal dans la base des | j, m 〉, d’autre part les éléments de ma-trice de Jx et Jy peuvent être obtenus à l’aide de (8.40). Nous insistons sur le faitque dans la base des | j, m 〉, les trois opérateurs ont une structure diagonale par blocs〈 j, m |Ji| j′, m′ 〉 ∝ δ j, j′ . Nous obtenons des règles de sélection sur le nombre quan-tique m en introduisant la notation Jμ pour les trois composantes du moment cinétiqueavec μ = 0, ±1 (par convention J0 ≡ Jz et J±1 ≡ J±)

〈 j, m |Jμ| j′, m′ 〉 ∝ δ j, j′ δm,m′+μ. (8.44)

Nous notons E ( j) le sous espace propre de �J 2 associé à la valeur propre �2 j( j + 1)(on a dimE ( j) = 2 j + 1). Désignons par �J( j) la restriction de l’opérateur de momentcinétique dans E ( j). En général, l’espace de Hilbert est la réunion de tous les es-paces E ( j), ce qui est noté H =

⊕j E ( j). Repétons que cette décomposition fait

intervenir soit les moments entiers H =⊕∞

n=0 E (n), soit les moments demi-entiersH =

⊕∞n=0 E (n + 1

2 ). Dans la base des {| j, m 〉}, ordonnés par ordre croissant de j,l’opérateur de moment cinétique possède la structure diagonale par blocs, soit

�J =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝0 0 0 · · ·0 �J(1) 0 · · ·0 0 �J(2) · · ·...

......

. . .

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠� dimE (0) = 1� dimE (1) = 3� dimE (2) = 5...

...

(8.45)

soit

�J =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝�J(1/2) 0 0 · · ·

0 �J(3/2) 0 · · ·0 0 �J(5/2) · · ·...

......

. . .

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠� dimE (1/2) = 2� dimE (3/2) = 4� dimE (5/2) = 6...

...

. (8.46)

Les opérateurs de rotations

R(�θ) = e−i�θ· �J/� (8.47)

ont la même structure diagonale par blocs, c’est-à-dire que les sous espaces E ( j)restent stables sous les rotations : les composantes du vecteur d’état |ψ 〉 associées àdifférents j ne sont pas mélangées. Comme E ( j) ne contient pas de plus petit sousespace stable sous les rotations autre que lui-même, dans le langage de la théoriedes groupes, on dit que E ( j) engendre une représentation irréductible du groupe desrotations.©D

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Page 148: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

Comment interpréter ces résultats dans le cadre de la discussion de la sec-tion 8.1.2 ? Comme toute quantité physique, les vecteurs d’état de l’espace de HilbertH (ou leurs représentations sous forme de fonctions d’onde) engendrent une repré-sentation du groupe des rotations. Cette représentation est réductible. En construisantles états propres de �J 2, Jz nous avons identifié les représentations irréductibles dugroupe des rotations, i.e. les plus petits sous espaces de H stables sous les rotations,classés par le nombre quantique j, la valeur propre de « l’opérateur de Casimir » �J 2.

• Exemple : sous espace E (1)

Considérons le sous espace E (1) de dimension 3 dont une base est{|1, 1 〉, |1, 0 〉, |1,−1 〉}. Nous pouvons utiliser les relations (8.32) et (8.40)pour obtenir les matrices représentant l’opérateur de moment cinétique dans le sousespace. On obtient les trois matrices :

J(1)x =

�√

2

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝0 1 0

1 0 1

0 1 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ , J(1)y =

�√

2

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝0 −i 0

i 0 −i

0 i 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ et J(1)z = �

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝1 0 0

0 0 0

0 0 −1

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ . (8.48)

On vérifie que ( �J(1))2 = 2�2. Nous retrouvons les matrices (8.23) calculées dans lasection 8.1.2 dans l’étude du groupe des rotations (i.e. n’ayant rien de quantique).Ceci nous montre que E (1) est le sous espace de H se transformant comme R3, ouinversement un vecteur de R3 est un objet de « spin » (moment cinétique intrinsèque)j = 1. Pour insister sur ce point, nous suivons la démarche inverse de celle de lasection 8.1.2 : considérons les trois vecteurs d’état

|1, x 〉 = 1√

2(−|1, 1 〉 + |1,−1 〉) (8.49)

|1, y 〉 = i√

2(|1, 1 〉 + |1,−1 〉) (8.50)

|1, z 〉 = |1, 0 〉. (8.51)

Nous vérifions sans peine que, dans la base {|1, x 〉, |1, y 〉, |1, z 〉}, les composantesde l’opérateur de moment cinétique sont données par les matrices (8.18), au facteur �près.

Autrement dit, les composantes du vecteur d’état dans la base{|1, x 〉, |1, y 〉, |1, z 〉} se mélangent lors d’une rotation exactement comme lestrois composantes cartésiennes d’un vecteur de R3. L’exercice 8.2 précisera cetteremarque.

138

Page 149: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.1. Moment cinétique

Remarque : ECOC

En général �J 2 et Jz ne forment pas un ECOC de l’espace de Hilbert, sauf si l’on ne s’in-téresse qu’aux degrés de liberté de rotation, par exemple si l’on étudie le mouvementde rotation d’une molécule rigide, ce qui revient à considèrer la mécanique quantiqued’une particule fictive sur une sphère. En revanche, le mouvement d’une particule semouvant dans l’espace tridimensionnel est caractérisé par trois degrés de liberté ; lesvecteurs d’états pourront être décomposés dans des bases d’états symétriques sousles rotations indexés par trois nombres quantiques : {| τ, j, m 〉}, où τ est un nombrequantique associé à une quantité scalaire (l’énergie par exemple) associée au degréde liberté radial. L’orthonormalisation s’écrit alors : 〈 τ, j, m | τ′, j′, m′ 〉 = δτ,τ′ δj,j′ δm,m′ ;si τ est un paramètre continu on procède à la substitution δτ,τ′ → δ(τ − τ′). Nous note-rons E (τ, j) les sous espaces propres de �J 2 de dimension 2j + 1.

Figure 8.4– Représentation des états | j, m〉.Dans l’état | j, m 〉, la composante Jz est fixée àm ∈ {j, j − 1, · · · , −j} alors que les autres composantesfluctuent : le vecteur �J est donc délocalisé sur uncercle. Chaque cône, engendré par la rotation duvecteur pour une projection Jz fixée, représente doncun état | j, m 〉. Les fluctuations transverses sontminimales dans l’état | j,±j 〉, mais ne s’annulant pas,elles sont responsables de ce que le module ||�J ||, égalà

√j(j + 1), reste toujours strictement supérieur à |m|.

...

1

−1

xJ

...yJ

zJ

j(j+1)

0

j−1j

−j

• Fluctuations des composantes du moment cinétique

Étudions les fluctuations des composantes du moment cinétique associées à l’étatpropre de Jz, donc

(ΔJz

)| j,m 〉 = 0. En écrivant J2

x + J2y =

�J 2 − J2z et en utilisant que

les états | j, m 〉 sont symétriques sous les rotations autour de l’axe Oz, R(θ�uz)| j, m 〉 =e−imθ | j, m 〉. On obtient facilement :(

ΔJx)| j,m 〉 =

(ΔJy

)| j,m 〉 =

�√

2

√j( j + 1) − m2. (8.52)

Les fluctuations minimales de Jx sont donc(ΔJx

)| j, j 〉 = �

√j/2. Nous pouvons pré-

ciser la remarque faite plus haut sur les valeurs propres �√

j( j + 1) de || �J||. La valeur�2 j( j + 1) peut être décomposée comme �2( j2 + j/2 + j/2) : dans l’état | j, j 〉 la com-posante Jz → � j ne fluctue pas, cependant, même si 〈Jx〉| j,m 〉 = 〈Jy〉| j,m 〉 = 0,les fluctuations (quantiques) de ces composantes apportent chacune une contribution�2 j/2 au module carré (figure 8.4).

8.1.4 Moment orbital et harmoniques sphériques

Revenons sur le cas du moment orbital. Nous notons | �, m 〉 les états propres de �� 2

et �z et cherchons les fonctions d’onde correspondantes. Gardons en tête que {�� 2, �z}©D

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Page 150: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

n’est pas un ECOC dans l’espace de Hilbert des états |�r 〉. L’opérateur de momentorbital (le générateur infinitésimal des rotations) n’agit que sur la partie angulairedes fonctions d’onde et les états | �, m 〉 ne caractérisent que la partie angulaire del’état quantique. Les fonctions d’onde correspondantes, appelées les harmoniquessphériques, sont notées

Ym� (θ,ϕ)

def= 〈 θ,ϕ | �, m 〉 (8.53)

où |θ,ϕ 〉 désigne l’état angulaire de la particule localisée dans la direction (θ,ϕ), i.e.l’analogue, sur la sphère, d’un vecteur |�r 〉 décrivant l’état localisé dans R3.

Partant de la représentation de l’opérateur agissant dans l’espace des fonctions,�� = −i��r × �∇, nous pouvons vérifier (le calcul est fastidieux) que les opérateursdifférentiels en coordonnées sphériques s’expriment comme :

�z = −i�∂

∂ϕ(8.54)

�± = � e±iϕ(± ∂

∂θ+

itan θ

∂ϕ

)(8.55)

�� 2 = −�2(∂2

∂θ2+

1tan θ

∂θ+

1

sin2 θ

∂2

∂ϕ2

). (8.56)

Nous reconnaissons la partie angulaire du Laplacien en coordonnées sphériques.Nous pouvons écrire le Laplacien comme :

Δ =1r∂2

∂r2r −

�� 2

�2r2=∂2

∂r2+

2r∂

∂r−

�� 2

�2r2. (8.57)

Il n’est pas surprenant de trouver que �� 2 est un « morceau » du Laplacien. En effet,à un facteur �

2

2m près, ce dernier représente l’énergie cinétique Ec =1

2m �p2 = − �2

2mΔ.Nous interprétons donc le dernier terme du Laplacien (8.57) comme un terme d’éner-gie cinétique de rotation.

• États propres de �z

Les états propres de �z sont des fonctions : Φm(θ,ϕ) = 1√2π

f (θ) eimϕ. Ces fonctionsne sont univaluées, i.e. Φm(θ,ϕ+ 2π) = Φm(θ,ϕ), que si m ∈ Z. Nous concluons quepour le moment orbital, le nombre quantique � est forcément entier :

� ∈ N (8.58)

Dans le cas des moments orbitaux, la possibilité de moments cinétiques demi-entiersest donc exclue.

140

Page 151: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.1. Moment cinétique

a) Orthonormalisation et relation de fermeture

L’orthonormalisation des états s’exprime comme :∫dΩ Ym

� (θ,ϕ) Ym′

�′ (θ,ϕ)∗ = δ�,�′ δm,m′ (8.59)

où dΩdef= d cos θ dϕ = dθ sin θ dϕ. La relation de fermeture s’écrit :

〈 θ,ϕ |θ′,ϕ′ 〉 =∞∑�=0

+�∑m=−�

Ym� (θ,ϕ) Ym

� (θ′,ϕ′)∗ = δ(cos θ − cos θ′) δ(ϕ − ϕ′). (8.60)

Notons que δ(cos θ − cos θ′) = 1| sin θ| δ(θ − θ

′) (cf. annexe 2.B, éq. (2.63)).

b) Principe du calcul des harmoniques sphériques

(i) Commençons par chercher Y−��

. Nous savons que Y−��

(θ,ϕ) = f (θ) e−i�ϕ. En écri-vant �−Y−�

�(θ,ϕ) = 0 nous voyons que (− ∂

∂θ +�

tan θ ) f (θ) = 0 d’où nous déduisonsaisément que Y−�

�(θ,ϕ) ∝ (sin θ)� e−i�ϕ. Enfin nous normalisons la fonction (le

calcul de la normalisation fait intervenir la fonction beta d’Euler, cf. annexe A) :

Y−�� (θ,ϕ) =1

2� �!

√(2� + 1)!

4π(sin θ)� e−i�ϕ (8.61)

(ii) Construisons les Ym�

pour m > −� par applications successives de �+ en utili-

sant (8.108). Par exemple : Y01 (θ,ϕ) = 1

�√

2�+Y−1

1 (θ,ϕ) =√

316π ( ∂∂θ +

1tan θ ) sin θ =√

34π cos θ. Une nouvelle application de �+ nous donne Y1

1 .

Donnons les expressions des premières harmoniques sphériques :

Y00 (θ,ϕ) =

1√

4π(8.62)

Y01 (θ,ϕ) =

√3

4πcos θ et Y±1

1 (θ,ϕ) = ∓√

38π

sin θ e±iϕ (8.63)

Y02 (θ,ϕ) =

√5

16π(3 cos2 θ − 1), Y±1

2 (θ,ϕ) = ∓√

158π

cos θ sin θ e±iϕ

et Y±22 (θ,ϕ) =

√15

32πsin2 θ e±2iϕ. (8.64)

On peut donner l’expression générale des harmoniques sphériques qui s’exprimentà l’aide des polynômes de Legendre généralisés Pm

�(x)

def= (1 − x2)m/2 dm

dxm P�(x) (où les©D

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Page 152: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

polynômes de Legendre P�(x) sont définis dans l’annexe A) [27] :

Ym� (θ,ϕ) = (−1)(m+|m|)/2

√(2� + 1)(� − |m|)!

4π(� + |m|)! P|m|�

(cos θ) eimϕ. (8.65)

c) Deux propriétés des harmoniques sphériques

• Conjugaison complexe : [Ym�

(θ,ϕ)]∗ = (−1)mY−m�

(θ,ϕ).

• Action de la parité : Ym� (π− θ,ϕ+ π) = (−1)�Ym

� (θ,ϕ). Les harmoniques sphériquessont donc états propres de l’opérateur de parité (le moment cinétique et la paritépeuvent être diagonalisés simultanément car �� est un opérateur pair, cf. exercice 6.7).On pourra avoir une intuition de cette propriété en faisant l’exercice 8.2.

d) Action des rotations sur les fonctions scalaires

Reprenons la remarque faite ci-dessus. Si nous considérons une fonction quelconque,celle-ci peut donc se décomposer comme2 :

f (θ,ϕ) =∞∑�=0

+�∑m=−�

f�,m Ym� (θ,ϕ) (8.66)

nous avons noté que les trois composantes de �� n’ont pas d’éléments de matrice entrevecteurs | �, m 〉 de � différents. Autrement dit, l’opérateur de rotation a une structurediagonale par blocs :

〈 �, m |e−i�θ·��/�| �′, m′ 〉 ∝ δ�,�′ (8.67)

ce qui indique que les composantes f�,m pour différents � ne sont pas mélangéeslors d’une rotation. Nous donnerons une illustration de la décomposition (8.66) dansl’exercice 8.8. Plus généralement la décomposition d’une fonction dépendant égale-ment de la coordonnée radiale s’écrit : f (�r) =

∑∞�=0 f�(r)

∑+�m=−� f�,m Ym

�(θ,ϕ) où f�(r)

sont des fonctions radiales (cf. exercice 8.8).

Exercice 8.2 (F) Nous introduisons Cm�

(θ,ϕ)def=

√4π

2�+1 Ym�

(θ,ϕ). Exprimer lesharmoniques sphériques Cm

1 et Cm2 en fonction des coordonnées cartésiennes

du vecteur position sur la sphère. Exprimer les fonctions d’onde associées auxétats (8.49, 8.50, 8.51).

2. Notons que cette décomposition n’est peut-être pas totalement étrangère au lecteur : c’est l’esprit desdéveloppements multipolaires en électrostatique. Si on considère une distribution de charges arbitraireon peut toujours écrire le champ électrique comme : le champ coulombien associé à la charge totale,plus les contributions d’un dipole, d’un quadrupole, etc.

142

Page 153: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.1. Moment cinétique

8.1.5 Opérateurs scalaires, vectoriels

Nous pouvons maintenant donner la définition des opérateurs scalaires, vectoriels,etc. Nous notons R(�θ) l’opérateur unitaire représentant l’action de la rotation sur lesvecteurs de l’espace de Hilbert H (dans cette section, nous spécifions la nature opé-ratorielle à l’aide du chapeau). Lors d’une rotation, un vecteur d’état est transforméselon |ψ′ 〉 = R(�θ)|ψ 〉 et un opérateur A est transformé en un opérateur A′ selon :

A′ = R(�θ) A R(�θ)†. (8.68)

a) Opérateur scalaire

Par définition un opérateur S est scalaire s’il est invariant sous les rotations : S ′ = S .Autrement dit l’opérateur doit commuter avec les générateurs du groupe :

[Ji, S ] = 0 (8.69)

b) Opérateur vectoriel

Considérons un opérateur vectoriel �V . Lors de la rotation infinitésimale, le systèmeest déplacé de�r en�r ′ avec�r ′ � �r+�θ×�r. L’opérateur vectoriel est transformé comme :

�V ′ � �V − �θ × �V. (8.70)

Comme pour les translations, nous devons prendre garde aux signes : si la transfor-mation des coordonnées est �r ′ � �r+�θ×�r, éq. (8.16), la transformation de l’opérateurfait intervenir le signe opposé �r ′ � �r − �θ × �r, éq. (8.70).

D’autre part l’opérateur est transformé à l’aide de l’opérateur unitaire :

�V ′ = R(�θ) �V R(�θ)† = �V − i�

[�θ · �J, �V] + · · · (8.71)

En identifiant les deux relations nous obtenons :

[Ji, V j] = i� εi jk Vk (8.72)

Cette relation définit l’action de la rotation infinitésimale sur l’opérateur vectoriel.On peut donc considérer (8.72) comme l’équation définissant la nature vectoriellede l’opérateur. Remarquons que les relations (8.24) et (8.72) ont des structures trèssimilaires. Nous examinerons les conséquences de cette observation dans le pro-blème 13.1 page 248.

Exercice 8.3 (F) Calculer explicitement les commutateurs [�z, x], [�z, y] et [�z, z].Puis [�i, �r 2].

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Page 154: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

Remarque : Règles de sélectionL’intérêt des relations (8.69) et (8.72) est de fournir des règles de sélection pour leséléments de matrice des opérateurs scalaire et vectoriel. Par exemple on peut montrerque dans un sous espace E (τ, j), un opérateur scalaire est proportionnel à l’ identité :〈 τ, j, m |S | τ, j′, m′ 〉 = S(τ, j)δj,j′δm,m′, où S(τ, j) est une constante dépendant du sousespace E (τ, j) (et plus généralement : 〈 τ, j, m |S | τ′, j′, m′ 〉 = 〈 τ, j, m |S | τ′, j, m 〉δj,j′δm,m′ ).

La relation (8.72) montre quant à elle qu’un opérateur vectoriel se comporte defaçon très similaire à l’opérateur de moment cinétique lui-même. Plus précisémenton peut montrer que dans E (τ, j), les deux opérateurs sont proportionnels (théorèmede projection, cf. problème 13.1).

Ce sont deux conséquences particulières d’un théorème plus général appelé théo-rème de Wigner-Eckart (§ 107 de [27] ou chapitre xiii de [33]), un résultat extrê-mement puissant fournissant des règles de sélection sur les éléments de matrice desopérateurs en fonction de leur nature (scalaire, spinorielle, vectorielle, tensorielle).

8.2 LE SPIN

Pour l’instant nous n’avons discuté que des quantités physiques engendrant les repré-sentations du groupe des rotations de dimensions impaires (pour j entier) : lesexemples concrets de moments cinétiques étudiés dans les sections 8.1.1 et 8.1.4étaient des moments cinétiques orbitaux pour lesquels nous avons montré que j estquantifié par valeurs entières. À ce stade, nous pouvons nous demander à quoi cor-respondent les sous espaces E ( j) pour j demi-entier ? Existe-t-il des réalisations phy-siques de moments cinétiques engendrant les représentations irréductibles du groupedes rotations de dimensions paires, ou ces représentations ne sont-elles que des cu-riosités mathématiques ?

8.2.1 Effet Zeeman

« How can one look happy when he is thinking of the anomalous Zeeman effect ? »

Wolfgang Pauli, Science 103, 213 (1946).

À la fin du xixe siècle, Pieter Zeeman initia une série d’études de l’influenced’un champ magnétique sur les spectres atomiques. Lorsqu’un atome est soumis àun champ magnétique, un moment magnétique apparaît dont l’origine peut se com-prendre dans le mouvement de rotation des électrons. Le couplage du champ magné-tique au moment apporte une contribution à l’énergie de l’atome se manifestant parune séparation des raies spectrales en plusieurs raies, organisées en « multiplets » etdéplacées linéairement en fonction du champ. L’apparition de multiplets pairs dans

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Page 155: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

certains atomes (sodium, etc.) ne s’expliquait pas en terme du moment cinétique or-bital des électrons, ce qui fut désigné sous le terme « d’effet Zeeman anormal ». Nousallons voir que l’existence d’un moment cinétique demi-entier est derrière ces obser-vations.

Afin de comprendre précisément l’origine de l’effet Zeeman, considérons l’hamil-tonien d’une particule de masse m et de charge électrique q soumise à un champmagnétique �B = �rot�A :

HB =(�p − q�A(�r))2

2m+ V(�r) =

�p 2

2m+ V(�r) − q

2m(�p · �A + �A · �p) +

q2

2m�A 2. (8.73)

Si on considère un champ magnétique uniforme, dans une jauge symétrique, le po-tentiel vecteur s’exprime comme �A(�r) = 1

2�B × �r. Pour un champ magnétique très

faible, nous admettons qu’il est licite de négliger le terme diamagnétique q2B2

8m �r 2 dansl’hamiltonien (pour une justification, cf. chapitre 13). Nous obtenons :

HB ��p 2

2m+ V(�r) − q

2m�B · ��. (8.74)

Cette dernière relation nous permet d’identifier le moment magnétique orbital de laparticule (l’aimantation due à la rotation des charges), l’observable couplée au champmagnétique :

Hmagn = −�B · �Morb avec �Morb =q

2m��. (8.75)

• Spectre Zeeman des atomes

Considérons maintenant un atome dont l’hamiltonien en champ magnétique nul estnoté H. Nous notons �L le moment cinétique orbital total de l’atome.

En l’absence de champ magnétique, l’invariance par rotation se traduit par[�L, H] = 0. Les états quantiques de l’atome peuvent donc être classés à l’aide desnombres quantiques L et M (valeurs propres de �L 2 et Lz), et d’autres nombres quan-tiques que nous regroupons dans la notation τ. L’invariance par rotation nous assureque les énergies sont indépendantes de M et donc au moins dégénérées 2L + 1 fois.Nous les notons Eτ,L. Si on applique un champ magnétique �B = B�uz suffisammentfaible pour pouvoir négliger le terme diamagnétique, les états propres de H, �L 2 et Lz

sont encore états propres de HB � H − qe2me

B Lz, cependant la dégénérescence en Mest levée. Nous obtenons l’expression, dont nous verrons qu’elle n’est pas correcteen général,

Eτ,L,M(B) � Eτ,L − μB B M (faux en général) (8.76)

μBdef=

qe�

2me(8.77)

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Page 156: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

est le magnéton de Bohr (qe et me sont respectivement la charge et la masse de l’élec-tron).

Ce résultat est remarquable : il montre comment révéler expérimentalement la dé-générescence 2L + 1 du niveau Eτ,L. En appliquant un faible champ magnétique, onlève la dégénérescence dans le nombre quantique M et on observe un clivage desraies spectrales en multiplets (2L + 1 sous-niveaux Zeeman). En outre il prédit quela pente des niveaux Zeeman est toujours quantifiée, donnée par un multiple entierde μB. Le spectre d’énergie ainsi obtenu, tracé en fonction du champ magnétique, estappelé un spectre Zeeman (figure 8.5).

j =1

j =0B

E

j = 3/2

= 1/2j

B

EFigure 8.5– Allure schématique de

spectres Zeeman.

À gauche : Pour deux niveaux demoments j = 0 et j = 1. À droite : Pour

deux niveaux de moments j = 1/2 etj = 3/2.

• Les deux problèmes de l’équation (8.76)

Lorsque l’expression (8.76) est confrontée avec l’expérience, deux difficultés appa-raissent :

• D’une part la pente de Eτ,L,M(B) en fonction de B n’est pas celle prédite par l’ex-pression (8.76). Un facteur (adimensionné) supplémentaire, en général différentde 1, appelé facteur de Landé gτ,L et dépendant du niveau, doit être introduit.

• Plus spectaculaire : alors que l’origine purement orbitale du moment cinétiquemontre que les sous-niveaux Zeeman apparaissent en 2L + 1-multiplets impairs(car L ∈ N), on voit apparaître des multiplets pairs pour certains atomes, commeon l’a représenté schématiquement figure 8.5 (effet Zeeman « anormal »). Plus pré-cisément, pour les atomes possédant un nombre d’électrons Z pair, les niveaux ap-paraissent en multiplets impairs (donc le moment cinétique total j est entier), alorsque si Z est impair, les niveaux ont des dégénérescences paires et j est demi-entier.

En résumé, les niveaux doivent être repérés en général par un j entier (Z pair) oudemi-entier (Z impair). La dépendance en champ magnétique des niveaux Zeemanprend la forme :

Eτ, j,m(B) � Eτ, j − gτ, j μB B m (8.78)

où gτ, j est le facteur de Landé du niveau (que nous calculerons explicitement dansle problème 13.1). Ces observations conduisent à l’idée que le moment cinétiquede l’atome contient, en sus de la contribution des moments orbitaux des électrons,

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Page 157: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

une contribution d’un moment cinétique intrinsèque des électrons, demi-entier, ap-pelé spin, que nous notons �S . Pour rendre compte des observations, nous devonsécrire l’hamiltonien de couplage au champ magnétique :

Hmagn = −�B · �M avec �M = μB

��L︸︷︷︸

�Morb

+ γ �S︸︷︷︸�Mspin

. (8.79)

où la constante de couplage γ est appelée facteur gyromagnétique.Pour comprendre physiquement l’origine du spin, on peut penser à l’analogie avec

une toupie en mécanique classique. Le mouvement de celle-ci est décrit par les coor-données �r, �p de son centre de masse, auxquelles on peut associer un moment orbital�� = �r × �p. D’autre part son mouvement de rotation sur elle-même est décrit par unsecond moment cinétique, son « spin ». L’analogie a toutefois ses limites : on attribueà l’électron un spin s = 1/2, ce qui n’a pas d’équivalent classique puisque nous avonsvu que tous les moments orbitaux sont entiers.

589.

6 nm

1/2

3p1/2

B =0 B =0

m = 1/2m = −1/2

m = 1/2

m = −1/2

m = 3/2

m = 1/2

m = −3/2

m = −1/23p3/2

E

589.

0 nm

3s

Figure 8.6– Spectre Zeeman du sodium.

À gauche : Figure de l’article de P. Zeeman de 1897 représentant une petite partie duspectre d’émission du sodium (en longueur d’onde). En haut : les deux raies D1 et D2du sodium à 589.0 nm et 589.6 nm (longueur d’onde λ en abscisse). En bas : spectre enprésence d’un champ magnétique (une sixième raie, peu visible sur la figure de gauche,est repérée par la flèche). À droite : Transitions dipolaires électriques (Δ� = ±1 et Δm =0, ±1) entre sous-niveaux Zeeman. Remarquons que la figure respecte les échelles pourles facteurs de Landé des trois niveaux, donnés dans l’exercice 8.4.

• Le spectre Zeeman du sodium

Un exemple célèbre où apparaissent des multiplets pairs dans le spectre est le cas dusodium, un atome alcalin à Z = 11 électrons (figure 12.4). En 1897, Zeeman étudial’effet, sur le spectre d’émission du sodium, de l’application d’un champ magnétique©D

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Page 158: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

sur le gaz3. L’état fondamental de l’atome de sodium est un niveau d’énergie noté3s1/2 (de moment cinétique j = 1/2). Nous nous concentrerons sur les transitionsentre les deux niveaux excités 3p1/2 ( j = 1/2) et 3p3/2 ( j = 3/2), et le fondamental.Les notations spectroscopiques seront introduites dans le chapitre 12 ; il nous suffitici de savoir que l’indice correspond au moment cinétique total j du niveau. Destransitions (dipolaires électriques) dans le domaine optique peuvent se produire entreles niveaux 3p et 3s, associées aux deux longeurs d’onde λ1 = 589.0 nm (raie D1)et λ2 = 589.6 nm (raie D2). Ces raies sont visibles sur la partie en haut à gauchede la figure 8.6. Lorsqu’un champ magnétique est appliqué, nous pouvons voir surla partie en bas à gauche de la figure 8.6 que les raies se divisent en un nombrepair de raies (la sizième raie du niveau D1, dont on peut deviner l’existence parsymétrie de la figure, est peu visible ; sa position est repérée par une flèche). Ces dixraies correspondent aux transitions entre sous niveaux Zeeman (3pj, m) et (3s1/2, m′),représentées schématiquement sur la partie droite de la figure 8.6.

Exercice 8.4 (MF) Sachant que les facteurs de Landé des trois niveaux sont res-pectivement : g3s,1/2 = 2, g3p,1/2 = 2/3 et g3p,3/2 = 4/3 (ce qui est représenté surla figure), quel champ magnétique est-il nécessaire d’appliquer pour changer la lon-gueur d’onde de la la raie correspondant à la transition (3p1/2,−1/2) −→ (3s1/2,+1/2)du sodium de δλ = 0.1 nm ?

8.2.2 Spin 1/2

Nous désignons par �S le spin (moment cinétique intrinsèque) d’une particule. Demême que la masse et la charge électrique font partie de la « carte d’identité » d’uneparticule, la valeur propre s(s + 1)�2 de �S 2 est une caractéristique intrinsèque.Contrairement au moment orbital �, le spin s ne peut pas être modifié (ou alors c’est laparticule qui est transformée en une autre particule). Par exemple, l’électron, le protonet le neutron sont des particules de spin s = 1/2 alors que le photon est une particulede spin s = 1 (le spin s = 1 du photon est lié à la nature vectorielle du potentielvecteur, le « champ des photons » ; nous avions en effet noté dans la section 8.1.3 queles vecteurs sont des objets de « spin » s = 1). Le spin est un degré de liberté interne.L’état de spin est un vecteur d’un espace de Hilbert

Hspin ≡ E (s) (8.80)

de dimension 2s + 1 dont une base orthonormée est {| s,−s 〉, · · · , | s,+s 〉}.

3. P. Zeeman, The effect of magnetisation on the nature of light emitted by a substance, Nature 55, 347(1897).

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Page 159: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

Le cas du spin s = 1/2 joue un rôle particulièrement important, aussi nous étudionscette situation en détail. Dans ce cas l’espace de Hilbert des états de spin est de di-mension deux. Les vecteurs propres de S z forment une base {|1/2, 1/2 〉, |1/2,−1/2 〉}de l’espace Hspin. Puisque s = 1/2 est une propriété intrinsèque, nous omettrons depréciser s dans les deux vecteurs et les noterons plus simplement |+ 〉 et | − 〉. Construi-sons les opérateurs de moment cinétique. En utilisant les équations (8.31, 8.40) nousexprimons les opérateurs dans la base {|+ 〉, | − 〉} (en confondant l’opérateur et sareprésentation matricielle) :

S + = �

(0 10 0

)S − = �

(0 01 0

)S z =

2

(1 00 −1

). (8.81)

Les trois composantes de l’opérateur de spin peuvent être écrites sous la forme

�S =�

2�σ (8.82)

où les trois matrices

σx =

(0 11 0

)σy =

(0 −ii 0

)σz =

(1 00 −1

)(8.83)

sont appelées les matrices de Pauli. Retenons les propriétés suivantes : elles sont decarré égal à l’identité, σ2

i = 1, et anticommutent entre elles σiσ j = −σ jσi pour i � j.Ces propriétés peuvent être écrites de manière compacte

σiσ j = δi j + iεi jkσk. (8.84)

Ces propriétés nous permettent de retrouver que �S 2 = 3�2/4 et [S i, S j] = i�εi jkS k.La relation (8.84) peut être reécrite en introduisant deux vecteurs �A et �B (si ce sont

des opérateurs, ils sont proportionnels à l’opérateur identité de Hspin) :

(�σ · �A)(�σ · �B) = �A · �B + i �σ · (�A × �B). (8.85)

Exercice 8.5 (MF) (Important) Soit �u un vecteur unitaire. On note σudef= �σ · �u.

Montrer que (σu)2 = 1. Exprimer la matrice σu en fonction des deux angles θ, ϕpermettant de repérer la direction de �u en coordonnées sphériques. Préciser les vec-teurs propres de �u · �S , notés |�u,±〉, dans la base des vecteurs propres de S z, no-tés |�uz,±〉 ≡ |± 〉. Calculer les valeurs moyennes des trois composantes du spin dansl’état |�u,+ 〉. Montrer que, dans cet état, le spin pointe en moyenne dans la directiondu vecteur

〈�S 〉| �u,+ 〉 =�

2�u (8.86)

(l’exercice sera complété par l’étude de l’exercice 8.10).

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Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

• Spineur

Un vecteur d’état général est de la forme : |ψ 〉 = ψ+|+ 〉+ψ−|− 〉. Le doublet (ψ+,ψ−)formé par les composantes du vecteur d’état est appelé un spineur.

• Rotation des spineurs

Puisque les spineurs sont des objets à deux composantes, ils engendrent une repré-sentation du groupe des rotations de dimension deux, une des représentations dontnous n’avions pas trouvé d’utilité dans le cadre de la physique classique (ce qui faitdes spineurs des objets de nature purement quantique). Dans l’espace des états despin, les matrices de rotation sont représentées par des matrices 2 × 2

R(�θ) = e−i��θ·�S = e−

i2�θ·�σ (8.87)

formant un groupe appelé le groupe SU(2) : « S » pour « spécial » det R(�θ) = 1, « U »pour « unitaire », R(�θ)−1 = R(�θ)†, et « 2 » indiquant que la norme |ψ+|2 + |ψ−|2 designature (+,+) est conservée sous la rotation.

Nous posons �θ = θ�u, où �u est unitaire, et introduisons la notation σudef= �σ · �u.

En utilisant que σ2nu = 12 nous voyons que l’action de la rotation sur le spineur est

donnée par la matrice 2 × 2 :

R(�θ) = 12 cos(θ/2) − iσu sin(θ/2) (8.88)

Exercice 8.6 (MF) Soit le vecteur �θ = θ (− sin ϕ�ux + cos ϕ�uy). Comparer le vecteurR(�θ)|+ 〉 au vecteur |�u,+ 〉 de l’exercice 8.5. Interpréter ce calcul.

Remarque : Une rotation de 2π n’est pas l’identité dans Hspin

Nous constatons que l’action d’une rotation d’un angle 2π sur un état de spin n’estpas identique à l’identité. En effet, l’équation (8.88) montre que R(2π�u) = −1. Le spi-neur ne revient dans son état initial qu’après une rotation R(4π�u) = 1. Cette remarquetrouve son origine dans la topologie particulière du groupe des rotations : le vecteur�θ indexant les rotations appartient à une sphère de rayon π et dont nous devons iden-tifier deux points opposés à la surface, R(+π�u) = R(−π�u). Les spineurs engendrent desreprésentations projectives du groupe des rotation : à chaque rotation, correspondentdeux éléments de SU(2) différant par une phase (cf. [5, 32, 13]). Dans l’annexe 8.A,nous discuterons une expérience mettant en évidence la propriété Rspin(2π�u) = −1.

8.2.3 Le modèle non relativiste de l’électron :équation de Pauli

Nous avons discuté l’existence du degré de liberté de spin dans le paragraphe précé-dent. Pour spécifier l’état quantique d’un électron, il nous faut à la fois caractériserson état de spin et son état dans l’espace physique. L’espace de Hilbert de l’électron

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Page 161: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

est donc le produit tensoriel de l’espace des états orbitaux et de l’espace des étatsde spin H = Horb ⊗ Hspin (plus haut nous avions adopté la notation H�r ≡ Horb).Une base orthonormée de H est par exemple {|�r 〉 ⊗ |σ 〉}, où |σ = ±〉 décrit les deuxétats de spin. Soit |ψ 〉 ∈ H , la fonction d’onde correspondante est donc une fonctiond’onde à deux composantes (un spineur) : ψσ(�r) = (〈�r | ⊗ 〈σ |)|ψ 〉.

L’analyse des spectres Zeeman montre que le facteur de Landé de l’électron ge esttrès proche de 2 (cf. encadrés ci-dessous). Le moment magnétique de l’électron sedécompose comme

�M = �Morb + �Mspin =qe

2me

(�� + ge�S

)où ge � 2 (8.89)

Notons qu’il n’est pas proportionnel au moment cinétique total �J = ��+�S . Le couplageentre le moment magnétique de l’électron et le champ magnétique �B = �rot�A est donnépar (8.79). En réintroduisant le terme diamagnétique et le potentiel scalaire V(�r) nousobtenons finalement l’hamiltonien

HPauli =1

2me

(�p − qe �A(�r)

)2+ V(�r) − γe�B(�r) · �S où γe =

geqe

2me(8.90)

L’équation de Schrödinger pour cet hamiltonien est appelée équation de Pauli. Plusgénéralement cet hamiltonien décrit toute particule (me → m, qe → q & γe → γ) nonrelativiste de spin s = 1/2 chargée électriquement (q � 0) ou non (q = 0 avec γ � 0en général).

Couplage minimal et supersymétrie de l’équation de Pauli pour ge = 2.La valeur du facteur de Landé électronique très proche de 2 a suscité la recherched’une explication. Une élégante approche de cette question a été proposée parJ.-M. Lévy-Leblond [Commun. Math. Phys. 6, 286 (1967)] soulignant le rôle del’invariance galiléenne. L’exigence d’invariance sous les transformations spatio-temporelles de Galilée et le choix de couplage minimal, i.e. l’ introduction du cou-plage avec le champ électromagnétique via la substitution �p → �p − qe�A dans l’ha-miltonien libre, conduisent à la valeur du facteur de Landé ge = 2. Le fait que cettevaleur apparaisse dans la théorie quantique relativiste de Dirac, moyennant deshypothèses de même nature, a engendré une certaine confusion sur l’origine rela-tiviste de la valeur ge = 2. Cette valeur permet de respecter aussi bien l’invariancesous le groupe de Lorentz (relativité einsteinienne) que l’invariance galiléenne.Nul besoin de relativité restreinte. La symétrie derrière cette observation porte lenom de « supersymétrie » [22], en référence à la structure particulière de l’hamil-tonien de Pauli pour V = 0 :

HPauli =1

2meQ2, où Q def

=2��S · (�p − qe�A) (8.91)

est appelée la « charge supersymétrique » (la quantité conservée). La relation (8.85)

nous permet en effet de vérifier que[�σ · (�p − qe

�A)]2= (�p − qe

�A)2 − qe��σ · �B.

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Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

• Facteurs gyromagnétiques et facteurs de Landé

Le coefficient de proportionnalité entre le moment magnétique et le spin �Mspin = γ�Sest appelé le facteur gyromagnétique et le facteur adimensionné g facteur de Landé.Donnons quelques facteurs gyromagnétiques :

• Pour l’électron : γe � −2.002 |qe|2me

.

• Pour le proton : γp � +5.59 |qe |2mp

(cf. annexe A.2).

• Bien qu’électriquement neutre, le neutron porte également un moment magnétique(ce qui reflète qu’il est constitué de particules portant des charges électriques, unquark u et deux quarks d) : γn � −3.82 |qe |

2mp(la définition de γn fait intervernir mp ;

cf. annexe A.2).

Rappelons-nous que les nucléons sont beaucoup plus lourds que l’électron : mn �mp � 1800me. Le couplage entre le champ magnétique et le spin de l’électron estbeaucoup plus important qu’entre le champ magnétique et le spin des nucléons :

γe � −660 γp � 960 γn (8.92)

En général, le moment magnétique d’un atome est donc largement dominé par lemoment orbital et/ou les spins électroniques. Nous discuterons une technique expéri-mentale permettant une mesure du facteur gyromagnétique dans le problème 15.1.

Moment magnétique anormal de l’électron. Les techniques expérimentales ac-tuelles permettent de mesurer ge avec une extrême précision, par l’étude du mou-vement cyclotron des électrons dans un piège de Penning. On obtient une valeurge � 2.002. Cet écart à la valeur 2 est dû au couplage de l’électron aux fluctuationsquantiques du champ électromagnétique dans le vide. L’effet est très bien préditpar la théorie de l’électrodynamique quantique. On peut en juger en comparantles valeurs expérimentale [D. Hanneke et al, Phys. Rev. Lett. 100, 120801 (2008)]et théorique pour l’anomalie du moment magnétique, définie par ge = 2(1 + ae) :

aexpe = 0.001 159 652 180 73(28) (8.93)

atheoe = 0.001 159 652 181 13(84) (8.94)

soit un écart relatif de (atheoe − aexp

e )/atheoe � 10−9 ! Cet exemple donne une idée de

la précision avec laquelle certaines prédictions de la mécanique quantique sontaujourd’hui vérifiées. La valeur théorique (8.94) est tirée de l’article expérimental[R. Bouchendira, P. Cladé, S. Guellati-Khélifa, F. Nez & F. Biraben, Phys. Rev. Lett.106, 080801 (2011)] qui propose une nouvelle détermination de la constante destructure fine, la constante fondamentale de l’électrodynamique quantique dontatheo

e est fonction (cf. chapitre 12).

152

Page 163: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

a) Dynamique d’une particule en champ magnétique

La présence d’un champ magnétique se manifeste à deux endroits dans l’hamiltoniende Pauli (8.90) : d’une part à travers le potentiel vecteur, ce qui décrit un couplagedes degrés de liberté orbitaux (positions, etc.) au champ magnétique. Si le champmagnétique est homogène, ce terme est à l’origine du mouvement de rotation (orbitecyclotron) d’une particule chargée (cf. chapitre 16). D’autre part le champ magné-tique se couple au moment cinétique de spin, ce qui génère une dynamique de celui-ci(l’évolution de la partie spinorielle de l’état quantique).

Afin de comprendre le rôle de ces deux termes, nous découplons les différentseffets et simplifions le problème en considérant le cas d’une particule électriquementneutre, portant un spin (par exemple un atome). Dans les prochains paragraphes, nousanalyserons exclusivement l’effet du terme −γ�B · �S sur la dynamique de la particuleet discuterons successivement les deux situations suivantes :

• B homogène : problème séparable spin/orbite. Dans un premier temps nousdiscutons le cas où le champ magnétique est homogène. Le degré de liberté despin est découplé des degrés de liberté orbitaux et nous pouvons essentiellementoublier ces derniers (§ 8.2.3.b).

• B inhomogène : couplage des degrés de liberté orbitaux et de spin. Dans undeuxième temps nous analysons l’effet d’une dépendance du champ magnétiquedans la position, i.e. l’effet d’un couplage entre degré de liberté de spin et degrésde liberté orbitaux. Autrement dit une situation où l’état de spin déterminera la« trajectoire » de la particule (§ 8.2.3.c).

b) Précession de Larmor

Nous abordons dans ce paragraphe la question de la dynamique du spin qui évolueen présence d’un champ magnétique. Considérons l’équation décrivant une particulede masse M non chargée et portant un spin (un neutron par exemple, ou un atome),de facteur gyromagnétique γ, soumise à un champ magnétique :

H =�p 2

2M− γ�B · �S . (8.95)

Dans la suite du paragraphe, nous étudions le cas d’un champ magnétique uniforme�B = B�uz. Nous nous concentrons uniquement sur la partie spin du vecteur d’état,que nous notons |χ(t) 〉 ∈ Hspin. Les états propres de Hmagn = −γBS z sont les vec-teurs propres de S z, | ± 〉, associés aux valeurs propres E± = ∓�γB/2. Maintenantque nous avons identifié les états stationnaires, nous analysons l’évolution d’un étatquelconque. Supposons que le spin pointe initialement dans une direction donnéepar un vecteur unitaire �u, repérée par les angles (θ,ϕ). Le vecteur d’état est donc©D

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Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

|χ(0) 〉 = |�u,+ 〉 (la notation est définie dans l’exercice 8.5). Ayant étudié l’exer-cice 8.5 avec soin, on est immédiatement en mesure de conclure que le vecteur d’étatà l’instant t est donné par :

|χ(t) 〉 = cos(θ/2) eiωLt/2 |+ 〉 + sin(θ/2) eiϕ−iωLt/2 | − 〉, (8.96)

où nous avons introduit la pulsation de Larmor

ωL = γB (8.97)

Nous pouvons donc écrire l’état de spin sous la forme

|χ(t) 〉 = eiωLt/2 |�u(t),+ 〉, (8.98)

où la dépendance temporelle a pu être ici reportée dans le vecteur unitaire in-dexant l’état de spin : le vecteur �u(t) pointe dans la direction repérée par les angles(θ,ϕ − ωLt). Autrement dit, le vecteur 〈�S 〉χ(t) tourne autour du champ magnétiquecomme nous le représentons sur la figure 8.7. Gardons bien à l’esprit que la figurene représente que la valeur moyenne du spin. En particulier les exercices 8.5 et 8.10montrent que les fluctuations des composantes de �S perpendiculaires à �u(t) sont maxi-males, égales à �/2. La précession de Larmor pour un champ magnétique appropriéfournit donc un moyen efficace de manipuler l’état de spin.

Remarquons qu’après un temps t = 2π/ωL, bien que 〈�S 〉χ(t) = 〈�S 〉χ(0) ait retrouvésa position initiale, le vecteur d’état a reçu une phase : |χ(2π/ωL) 〉 = −|χ(0) 〉 (cetteremarque a déjà été faite ci-dessus). Il faut attendre une double période pour retrouverl’état initial.

x

z

y

B

><S

Figure 8.7– Précession de Larmor.Moment magnétique (∝ spin) soumis à un champ magnétique

uniforme (le sens de rotation correspond à γ > 0).

c) Expérience de Stern et Gerlach

L’expérience de Stern et Gerlach a joué un rôle très important historiquement puisquec’est une des expériences, avec l’observation de l’effet Zeeman, qui démontre l’exis-tence du spin de l’électron. Décrivons l’expérience : on envoie un jet d’atomes d’ar-gent4 dans une région où règne un gradient de champ magnétique. L’atome étant

4. L’atome d’argent (Z = 47) est choisi car toutes les couches électroniques sont pleines sauf la dernière,occupée par un seul électron. Dans les notations spectroscopiques (cf. chapitre 12) sa configurationélectronique est notée [Kr]4d105s1.

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Page 165: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

électriquement neutre, l’hamiltonien ne contient pas de couplage au potentiel vec-teur, mais seulement un terme de couplage entre le champ magnétique et le spin del’atome (le spin total des électrons de l’atome d’argent est s = 1/2) et l’hamiltonien adonc la forme (8.95).

• Couplage entre le spin et le mouvement orbital

Jusqu’à présent nous avons discuté la situation où l’évolution du spin est découpléedes degrés de liberté orbitaux. Revenons un instant sur le cas simple d’un champ

magnétique �B homogène : les deux termes de (8.95) commutent [ �p2

2M , γ�B · �S ] = 0.Si l’état a initialement une forme factorisée |ψ(0) 〉 = |φ(0) 〉orb ⊗ |χ(0) 〉spin, il gardecette forme factorisée puisque l’évolution temporelle de la partie orbitale est indé-

pendante de celle de la partie spinorielle : |ψ(t) 〉 = e−i�

( �p2

2M−γ�B·�S )t |φ(0) 〉 ⊗ |χ(0) 〉 =(e−

i�

�p 2

2M t |φ(0) 〉)⊗(ei�γ�B·�S t |χ(0) 〉). Si |φ(0) 〉 = |�k 〉 l’état décrit un mouvement de trans-

lation rectiligne uniforme conjuguée avec une précession du spin. Si en revanche le

champ est inhomogène, �B → �B(�r), on a [ �p2

2M , γ�B(�r) · �S ] � 0 et l’opérateur d’évolu-

tion ne se factorise plus puisque le terme de couplage au champ magnétique �B(�r) · �Saffecte également l’évolution orbitale. Autrement dit il y a un couplage entre l’évo-lution du spin et les degrés de liberté orbitaux. Dans un langage semiclassique, la« trajectoire » de la particule dépend de l’état de spin.

Figure 8.8– Expérience de Stern et Gerlach.Un faisceau d’atomes d’argent passe entre deux aimants

(pôles Nord et Sud), dans une région où règne ungradient de champ magnétique. Les faisceaux sont

interceptés par un écran.

Analysons plus précisément la dynamique des atomes d’argent traversant l’appa-reil de Stern et Gerlach (figure 8.8). D’après les symétries du problème nous voyonsque Bx = 0 (sauf éventuellement sur les bords de l’aimant, ce dont nous néglige-rons l’effet). D’autre part les atomes passent dans la région centrale où par symétrie5

By = 0. On peut donc écrire que, lorsqu’ils traversent l’appareil, ils sont soumis à unchamp magnétique de la forme �B � Bz(�r)�uz ; bien entendu, cette forme n’est valable

5. L’atome passe donc sur l’axe où Bx = By = 0. En principe cela ne suffit pas à les éliminer del’équation de Schrödinger puisque la fonction d’onde est délocalisée et explore également des régionsoù ces composantes sont non nulles. Nous supposerons néanmoins qu’on peut oublier l’effet de Bx et By.©D

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Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

que dans le plan de symétrie vertical xOz de l’aimant (sinon elle violerait l’une desquatre équations de Maxwell, div�B = 0) ! Ces approximations nous permettent denous limiter à un hamiltonien approché

H � �p 2

2M− γ Bz(�r) S z. (8.99)

Nous notons |ψ(t) 〉 l’état quantique de la particule. Il sera commode pour la suite dedécomposer cet état dans la base des états propres de S z comme

|ψ(t) 〉 = |ψ+(t) 〉 ⊗ |+ 〉 + |ψ−(t) 〉 ⊗ |− 〉 (8.100)

où |ψ±(t) 〉 décrit l’état orbital. Supposons que la partie orbitale, associée à deux fonc-tions d’onde ψ±(�r, t) = (〈�r | ⊗ 〈± |)|ψ(t) 〉, décrive un paquet d’ondes envoyé sur leStern & Gerlach (en fait deux paquets d’onde, un pour chaque état de spin).

Une première observation importante est que la probabilité pour que la particulese trouve dans l’état de spin | ± 〉, notée π±, est conservée au cours du temps. Onpeut facilement le vérifier : π± = Proba[S z � ±�/2] = 〈ψ(t) |

(| ± 〉〈± |

)|ψ(t) 〉 =∫

d�r |ψ±(�r, t)|2 = cste car[H, | ± 〉〈± |

]= 0. L’origine de cette observation vient de

ce que le champ magnétique est supposé aligné avec �uz ; le spin effectue donc unmouvement de précession autour de �uz qui ne change pas sa projection selon cettedirection.

Nous étudions l’évolution de la position moyenne du paquet d’ondes que nousséparons en deux contributions 〈�r 〉ψ(t) = 〈ψ+(t) |�r |ψ+(t) 〉 + 〈ψ−(t) |�r |ψ−(t) 〉. Il estinstructif de considérer

〈�r 〉ψ±(t)def=

⟨�r ⊗ |± 〉〈± |⟩ψ(t) = 〈ψ±(t) |�r |ψ±(t) 〉 (8.101)

caractérisant le centre du paquet d’ondes pour chaque état de spin. En utilisant ànouveau que

[H, | ± 〉〈± |

]= 0 nous obtenons l’équation du mouvement (théorème

d’Ehrenfest)

Md2

dt2〈�r 〉ψ±(t) =

(i�

)2 ⟨[H,

[H,�r

]]⟩ψ±(t) � ±

�γ

2⟨�∇Bz(�r)

⟩ψ±(t). (8.102)

Supposant le gradient de champ dirigé verticalement �∇Bz � �uz∂zBz, nous consta-tons que les centres des deux paquets d’onde suivent des trajectoires symétriquespar rapport au plan xOy (figure 8.8). Notons qu’il y a un léger abus à dessiner lesdeux trajectoires sur la figure 8.8. C’est seulement lorsque l’atome est détecté (surl’écran), que l’on peut dire s’il est en haut ou en bas, au moment de la réduction dupaquet d’ondes. Supposant de plus le gradient de champ uniforme et que la particulea initialement une vitesse v0�ux, nous obtenons

〈�r 〉ψ±(t) � ±�γ∂zBz

4Mt2�uz + v0t�ux. (8.103)

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Page 167: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

Le paquet d’ondes décrivant un atome d’argent suit la trajectoire du haut avec proba-bilité π+ ou celle du bas avec probabilité π−.

À ce stade il est plus intéressant de reprendre cette analyse dans le point devue d’Heisenberg dans lequel l’évolution temporelle est reportée sur les opéra-teurs (section 5.3) : �rH(t)

def= U(t)†�r U(t). Nous avons vu dans ce paragraphe que

ddt�rH(t) = i

�[H,�rH(t)]. En faisant les mêmes hypothèses que précédemment (gradient

de Bz dirigé suivant �uz et constant) nous obtenons d2

dr2�rH(t) � ∂zBz2M Mz d’où

�rH(t) � ∂zBz

2MMzt

2�uz + v0t�ux ⇒ z(tsortie) � ∂zBz

2Mt2sortie Mz , (8.104)

où tsortie = L/v0 est le temps de traversée de l’appareil de longueur L. Nous avons doncétabli une relation entre l’opérateur de position de l’atome, au moment où son impactsera observé sur l’écran, et la composante de son moment magnétique z � κMz.

Pour bien apprécier le résultat quantique, revenons d’abord dans le cadre classique.En supposant que la direction de �M est distribuée de manière isotrope à l’entrée duStern & Gerlach, l’atome sera dévié de z ∈ [+zmax,−zmax] où zmax = κ|| �M||. Lamécanique classique prédit que les atomes sont détectés le long d’un petit segmentsur l’écran.

La mécanique quantique fait une tout autre prédiction : le moment magnétique desélectrons de l’atome d’argent étant quantifié, sa composante selon �uz, qui est mesuréeavec le dispositif, ne peut prendre que deux valeurs Mz � ±γ�/2 et par conséquentles atomes ne sont détectés qu’en deux positions possibles sur l’écran : z� ±κγ�/2.L’existence des deux taches est donc une démonstration de la quantification duspin s = 1/2 de l’électron.

Exercice 8.7 (F) On fait passer un faisceau d’atomes de spin s dans un Stern &Gerlach. Combien de taches sont observées ? Pour s � 1, comparer avec le résultatattendu classiquement.

Appareil à mesurer Sz. Nous venons d’analyser pour la première fois un appareilde mesure réaliste qui procède à une mesure d’une observable physique, ici Sz :un atome d’argent initialement dans un état de spin |χ 〉 = α|+ 〉+β| − 〉 arrivera avecprobabilité π+ = |α|2 en haut sur l’écran (si γ∂zBz > 0), et probabilité π− = |β|2 enbas (rappelons que seules les phases des composantes α et β sont affectées parla traversée de l’appareil).

Polariseur de spin. Le Stern et Gerlach peut également être utilisé pour prépa-rer les particules dans un état de spin particulier. À la sortie de l’appareil, il y aséparation spatiale des particules en fonction de leur état de spin. Il suffit doncd’intercepter la partie du faisceau associée à un des états de spin pour fabriquerune source de particules dans un état de spin donné. Autrement dit, l’appareilpermet de polariser le spin des atomes du faisceau (en perdant une partie de

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Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

l’ intensité). Nous venons donc de décrire une situation expérimentale permettantde fixer l’état quantique (de spin) de l’atome : préparer un système dans un cer-tain état quantique (ce qui était une condition implicite de bien des discussionsdes chapitres précédents) n’est donc pas une simple vue de l’esprit.

À retenir

Résumé des propriétés importantes :

[Ji, J j] = i� εi jk Jk. (8.105)

Les états propres de �J 2 et Jz sont {| j, m 〉} avec

�J 2 | j, m 〉 = �2 j( j + 1) | j, m 〉 avec j = 0, 1, 2, ... OU j = 1/2, 3/2, · · · (8.106)

Jz | j, m 〉 = �m | j, m 〉 avec m = − j, − j + 1, · · · , j − 1, j (8.107)

J± | j, m 〉 = �√

j( j + 1) − m(m ± 1) | j, m ± 1 〉. (8.108)

Gardons en tête que la diagonalisation de �J 2 conduit soit à des valeurs de j entières soità des valeurs demi-entières, mais jamais les deux en même temps.

La structure diagonale par blocs de l’opérateur �J et des rotations dans la base des | j, m 〉,i.e. les relations (8.44).

Dans un sous espace E ( j), un opérateur scalaire est proportionnel à la matrice identité.

Le moment cinétique orbital est quantifié par valeurs entières � ∈ N.

La notion de spin.

Très utile : les propriétés des matrices de Pauli, équation (8.84).

La précession de Larmor. Un champ magnétique constant induit une rotation du spin, cequi fournit un moyen de manipuler l’état de spin.

L’expérience de Stern et Gerlach. L’appareil réalise une mesure d’une composante duspin. Il peut être utlisé comme polariseur de spin, ce qui permet de fixer l’état de spin.

Pour en savoir plus

Sur l’étude détaillée du groupe des rotations, recommandons le texte très pédago-gique [13]. Parmi les nombreux ouvrages mathématiques : [40].

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Page 169: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

ANNEXE 8.A : ROTATION DE 2π DU SPIND’UN NEUTRON

Nous discutons une expérience démontrant l’effet de la phase eiπ lorsque un spinS = 1/2 est tourné d’un angle 2π. L’expérience a été réalisée avec des neutrons(référence donnée dans la légende de la figure).

0 40 80 120 1602300

2500

2700

2900

3100

Champ magnétique (Gauss)

# de

neu

tron

s (/

40m

in.)

Figure 8.9– Interféromètre de Mach-Zender.

À gauche : Principe de l’expérience. Un neutron (particule de spin S = 1/2) est envoyésur un interféromètre. Le chemin supérieur traverse une zone de champ magnétique. Lesneutrons sont détectés par deux détecteurs D1 et D2. À droite : Résultat expérimental :différence P(1) − P(2) en fonction du champ magnétique (chaque point correspond à uneacquisition prenant environ 40min). Données tirées de : R. Colella, A. W. Overhauser &C. F. Eagen, « Observation of the Phase Shift of a Neutron Due to Precession in a MagneticField », Phys. Rev. Lett. 35(16), 1053 (1975).

• Évolution de l’état de spin sous l’effet du champ magnétique

Nous notons |χ 〉 l’état de spin du neutron (on rappelle que celui-ci a un spin S =1/2). Le neutron traverse la zone de champ magnétique en un temps T durant lequella dynamique de son état de spin est gouvernée par l’hamiltonien

H = −�μ · �B = ωBS z (8.109)

où �S est l’opérateur de spin et ωBdef= −gn

|qe |B2mp

(la définition de γn fait intervernirmp). Ce problème a été étudié dans le cours : nous avons vu que l’opérateur d’évo-lution s’interprète comme un opérateur de rotation du spin d’un angle θB (précessionde Larmor). Si on note |χin/out 〉 l’état de spin à l’éntrée/sortie de la zone de champmagnétique, on a

|χout 〉 = e−i�ωBT S z |χin 〉 où θB

def= ωBT . (8.110)©

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.

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Page 170: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

Si le neutron est initialement dans l’état de spin |χin 〉 = α|+ 〉 + β| − 〉, l’état de spin àla sortie est |χout 〉 = α′|+ 〉 + β′| − 〉 avec(

α′

β′

)= R(θB)

β

)(8.111)

où la matrice 2 × 2

R(θB) = e−i2 θBσz = 12 cos(θB/2) − iσz sin(θB/2) (8.112)

décrit la rotation du spin sous l’effet du champ magnétique.

• Traversée de l’ interféromètre

Nous proposons maintenant une formulation du problème reposant sur la notion dematrice de diffusion, qui a été introduite dans l’annexe 5.A et sera rediscutée en détaildans le chapitre 10.

Dans l’interféromètre de Mach-Zender de la figure 8.9, les neutrons ne sont pasrétrodiffusés et se propagent uniquement vers l’avant. Cette observation simplifiela discussion : nous pouvons découper le dispositif expérimental en « tranches »,connectées entre elles par des matrices de diffusion. Remarquons qu’à un instantdonné, le neutron peut se trouver dans quatre états différents (on parle de « canauxde diffusion ») : dans la partie supérieure ou inférieure du dispositif et avec un spin +ou −. Nous pouvons donc écrire que le vecteur d’état a quatre composantes que nousregroupons dans deux paires de spineurs :

Ψdef=

(χu

χd

)où χu,d =

(χu,d+

χu,d−

)(8.113)

χu,d± ∈ C est l’amplitude de probabilité pour être en haut(bas) avec un spin +(−), à un

certain niveau du dispositif. L’état |Ψ 〉 caractérise à la fois l’état orbital (u/d) et l’étatde spin (+/−).

Dans l’expérience les neutrons sont injectés par en bas et l’état initial (à gauche,avant de rentrer dans l’interféromètre) :

Ψinitial =

(0χ

)où χ =

β

)(8.114)

où nous avons repris la notation introduite plus haut pour les deux composantes com-plexes du spineur. Le passage à travers la première lame semi-réfléchissante affectel’état orbital en mélangeant les amplitudes u et d, mais laisse l’état de spin inchangé.La lame fait donc passer la particule de l’état Ψinitial à l’état⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝− 1√

212

1√212

1√212

1√212

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠Ψinitial. (8.115)

160

Page 171: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

8.2. Le spin

les coefficients sont les amplitudes de probabilité (figure 8.10). La conservation dela probabilité est manifeste : cette matrice, reliant des canaux entrant aux canauxsortant, est une matrice de diffusion (scattering matrix) unitaire, comme on peut levérifier aisément : S †S = S S † = 14.

Figure 8.10– Amplitudes de probabilité detransmission/réflexion à travers les lamessemi-réfléchissantes.

−1/

1/ 2

1/ 2ou

1 2

1 1/ 2

La traversée de l’interféromètre est décrite par une autre matrice de diffusion décri-vant la précession du spin si le neutron emprunte le chemin u, alors que l’état de spinest invariant s’il emprunte le chemin d. Cette fois la matrice de diffusion n’affecte pasl’état orbital mais seulement l’état de spin.

Enfin le neutron est diffusé par la seconde lame semi-réfléchissante. L’état final,au niveau des détecteurs, est finalement donné par

Ψfinal =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝− 1√212

1√212

1√212

1√212

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠︸������������︷︷������������︸lame 2

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎝R(θB) 0

0 12

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎠︸�������︷︷�������︸champ �B

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝− 1√212

1√212

1√212

1√212

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠︸������������︷︷������������︸lame 1

Ψinitial. (8.116)

Un calcul élémentaire donne l’état final en fonction du bi-spineur décrivant l’état despin du neutron injecté :

Ψfinal =

(χfinal

uχfinal

d

)=

12

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎝[12 − R(θB)]χ

[12 + R(θB)]χ

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎠ . (8.117)

Le bi-spineur χfinalu regroupe les deux amplitudes au niveau du détecteur D2 et χfinal

dau niveau du détecteur D1. La conservation de la probabilité est une conséquence del’unitarité des différentes matrices de diffusion et se traduit par

Ψ †finalΨfinal = Ψ

†initialΨinitial = 1. (8.118)

En l’absence de polariseur de spin, les deux probabilités de détection du neutronmesurées par les détecteurs D1 et D2 sont donc données par

P(1) =(χfinal

d)†χfinal

d (8.119)

P(2) =(χfinal

u)†χfinal

u . (8.120)

Le calcul se fait simplement : P(1, 2) = 14χ

†[12 ± R(θB)†][

12 ± R(θB)]χ =

12χ

†[12 ± 12 {R(θB) + R(−θB)}]χ. En utilisant que 1

2 {R(θB) + R(−θB)} = 12 cos(θB/2) et©D

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Page 172: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 8 • Moment cinétique – Spin

χ†χ = |α|2 + |β|2 = 1, on trouve finalement P(1, 2) = 12

[1 ± cos(θB/2)], i.e.

P(1) = cos2(θB/4) et P(2) = sin2(θB/4) (8.121)

Puisque nous mesurons un signal non polarisé en spin, les probabilités sont indépen-dantes de l’état de spin du neutron injecté (i.e. de χ).

En l’absence de champ magnétique (θB = 0) le neutron est détecté avec probabilitéP(1) = 1 au niveau du détecteur D1 (la diffusion au niveau des lames, figure 8.10,montre que la somme des amplitudes associées aux deux chemins arrivant au détec-teur D1 est 1√

21√2+ 1√

21√2= 1 alors que celle arrivant en D2 est − 1√

21√2+ 1√

21√2= 0).

Si le champ magnétique est tel que le spin tourne d’un angle θB = 2π, cette rotationgénère une interférence destructive au niveau du détecteur D1. C’est une manifesta-tion de la phase de R(θB = 2π) = −12. C’est ce que montre le résultat expérimentalde la figure 8.9.

Notons toutefois que le contraste des oscillations obtenues expérimentalementn’est pas 1 comme notre calcul le prédit. Pour comprendre ce point, on pourra re-prendre l’analyse pour des amplitudes de probabilité arbitraires au niveau des lamessemi-réfléchissantes, i.e. remplacer les coefficients ±1/

√2 par des coefficients com-

plexes assurant l’unitarité des matrices ; un premier pas dans cette direction serait desubstituer ⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎝− 1√

212

1√212

1√212

1√212

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎠ −→ ⎛⎜⎜⎜⎜⎝−12 cos θl 12 sin θl

12 sin θl 12 cos θl

⎞⎟⎟⎟⎟⎠ , (8.122)

où θl contrôle la probabilité de transmission/réflexion à travers la lame.

Exercices

8.8 (MF) Décomposer la fonction f (�r) = a + b[√

2 (x + iy) + 2z]+ c

[i√

6 xy +√3(x − iy)z + 3z2] sur les harmoniques sphériques.

8.9 (MF) L’énergie des électrons de l’atome de numéro atomique Z est : H =∑Zi=1(

�p2i

2me− Ze2

ri)+

∑i> j

e2

ri joù �ri et �pi sont respectivement la position et l’impulsion de

l’électron i et ri j la distance entre les deux électrons i et j. Le moment orbital totalest �L =

∑i�ri × �pi. vérifier que [H, �L] = 0.

8.10 (F) Soit�v un vecteur unitaire. Nous notons la composante du spin sur ce vecteur

S vdef= �S · �v. Montrer que, dans l’état |�u,+ 〉, les fluctuations ΔS v | �u,+ 〉 sont maximales

lorsque les deux vecteurs sont orthogonaux.

162

Page 173: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

ADDITIONDES MOMENTSCINÉTIQUES

9

L’étude du moment cinétique est dictée par l’analyse des propriétés des systèmesphysiques sous les rotations, comme l’invariance par rotation d’un atome. Or denombreuses situations mettent en jeu plusieurs moments cinétiques ; c’est le cas d’unatome dont le moment cinétique est construit à partir des contributions des momentsorbitaux des électrons et de leurs spins (en oubliant le noyau). Dans ce cas l’inva-riance par rotation doit être formulée en terme du moment cinétique total. Même dansle cas simple de l’atome d’hydrogène, l’étude de ce problème à un électron fait inter-venir deux moments cinétiques : alors que nous verrons qu’il est possible d’oublier lespin pour l’étude du régime non relativiste puisque le problème reste séparable spin-orbite (chapitre 12), l’analyse des corrections relativistes (chapitre 14) nous amèneraà considérer l’effet d’un couplage spin-orbite. La base d’états propres de l’hamilto-nien de l’atome sera donc construite à l’aide des états propres du moment cinétiquetotal, alors que la base construite naturellement à partir des résultats du chapitre pré-cédent serait une base d’états propres des moments cinétiques individuels. L’objet duchapitre est de discuter la relation entre ces deux bases d’états.

• ECOCs

Considérons deux moments cinétiques représentés par des opérateurs �J1 et �J2 agis-sant dans deux espaces de Hilbert H1 et H2. Nous avons montré dans l’exercice 8.1que le moment cinétique total, agissant dans H1 ⊗H2,

�J = �J1 + �J2 (9.1)

est encore un opérateur de moment cinétique, c’est-à-dire que les composantes de�J obéissent aux relations de commutation (8.24). Nous admettons que les quatreopérateurs { �J1

2, J1z, �J22, J2z} forment un ECOC de H1 ⊗ H2 (en faisant cette hy-

pothèse nous mettons de côté les éventuels degrés de liberté radiaux qui ne jouentaucun rôle dans ce chapitre). Les vecteurs propres des quatre opérateurs sont notés| j1, m1; j2, m2 〉 ≡ | j1, m1 〉 ⊗ | j2, m2 〉. En remarquant que

[ �J, �J12] = [ �J, �J2

2] = 0 (9.2)

nous constatons qu’un autre ECOC acceptable est { �J12, �J2

2, �J 2, Jz}. Autrementdit une autre base possible est celle des vecteurs propres de cette seconde série©D

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Page 174: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 9 • Addition des moments cinétiques

d’opérateurs, que nous notons | j1; j2; j, m 〉. Bien que l’addition de deux momentscinétiques s’interprète de manière intéressante dans le cadre plus général de la théo-rie des groupes, la pratique que nous en aurons se limitera à la possibilité d’effectuerun changement de base :

base {| j1, m1; j2, m2 〉} ↔ base {| j1; j2; j, m 〉} (9.3)

Comme nous l’avons expliqué en introduction, c’est la seconde base qui se révèlera laplus adaptée à la classification des états propres de l’hamiltonien dans de nombreuxproblèmes.

• Coefficients de Clebsch-Gordan

Dans le chapitre nous considérons que j1 et j2 sont fixés. Ainsi nous pouvons omettreles deux indices dans le vecteur : nous allègerons la notation | j1; j2; j, m 〉 ≡ | j, m 〉,ce qui limitera également les confusions entre les deux bases. La décomposition duvecteur | j, m 〉 dans la base des | j1, m1; j2, m2 〉 s’écrit sous la forme :

| j, m 〉 =∑

m1,m2

C j,mj1,m1; j2,m2

| j1, m1; j2, m2 〉 (9.4)

elle fait intervenir des coefficients C j,mj1,m1; j2,m2

def= 〈 j1, m1; j2, m2 | j, m 〉, choisis dans

R par convention et appelés des « coefficients de Clebsch-Gordan ». Un des objets dece chapitre est de développer la méthode permettant de déterminer systématiquementces coefficients.

9.1 INÉGALITÉ TRIANGULAIRE :VALEURS DE j PERMISES

Considérons un sous espace E ( j1) ⊗ E ( j2). Cet espace est un espace stable sous lesrotations. Nous en déduisons qu’il se décompose comme la réunion de sous espacespropres de �J 2, ce que nous écrivons : E ( j1) ⊗ E ( j2) =

⊕ jmaxj= jmin

E ( j). Une premièrequestion à laquelle nous devons répondre est de savoir sur quelles valeurs de j portela somme. La deuxième question sera de décomposer les vecteurs | j, m 〉 d’un sousespace E ( j) sur les | j1, m1; j2, m2 〉.• Le nombre quantique m1 varie entre − j1 et + j1 et m2 varie entre − j2 et + j2. PuisqueJz = J1z + J2z nous déduisons que ses valeurs propres m varient entre −( j1 + j2) etj1 + j2, i.e. jmax = j1 + j2.

•Nous analysons la dégénérescence des valeurs propres m. Si nous considérons la va-leur de m maximum, celle-ci n’est pas dégénérée puisque seul | j1, j1; j2, j2 〉 possède

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Page 175: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

9.1. Inégalité triangulaire : valeurs de j permises

cette valeur propre. Nous déduisons notamment que | j = j1 + j2, m = j1 + j2 〉 =| j1, m1 = j1; j2, m2 = j2 〉. D’autre part nous constatons que la dégénérescence maxi-male est donnée par dmax = 2 j2+1 si j2 � j1 (on peut s’en convaincre aisément aprèsun rapide examen de la figure 9.1 : par exemple la valeur propre m = 0 est dégénérée3 = 2 × 1 + 1 fois).

m

2

m1

m= −3

m= −2

m= −1

m= 0

m

= 1m

= 2

m= 3

maxd

m

d

−2 −1 0 1 2 3

J−j

j

m

min

jmax

max

−3

Figure 9.1– Deux bases de l’espace E (2) ⊗ E (1) = E (3) ⊕ E (2) ⊕ E (1).

À gauche : Représentation des états | j1, m1; j2, m2 〉. À droite : Représentation des états| j, m 〉. Le long d’une ligne correspondant à une valeur de m donnée, les états en étoilessont des combinaisons linéaires des états ronds.

• La dégénérescence maximale dmax des valeurs propres m de Jz correspond aunombre de sous espaces E ( j) :

jmax − jmin + 1 = dmax = 2 j2 + 1 si j1 � j2. (9.5)

Nous en déduisons que jmin = j1 − j2. Finalement nous obtenons l’encadrement :

| j1 − j2| � j � j1 + j2 (9.6)

Cette inégalité est parfois appelée « règle du triangle ». Si j1, j2 et j satisfont l’in-égalité on note parfois Δ( j1, j2, j). Nous pouvons écrire que l’espace se décomposecomme :

E ( j1) ⊗ E ( j2) =j1+ j2⊕

j=| j1− j2 |E ( j) (9.7)

Cette relation montre que l’espace E ( j1) ⊗ E ( j2) se décompose comme une sommede sous espaces E ( j), plus petits et stables sous les rotations. Dans un langage dethéorie des groupes : le produit tensoriel de deux représentations irréductibles dej � 0 est une représentation réductible, pouvant être décomposée comme somme dereprésentations irréductibles.

On vérifie que les dimensions des espaces reliés par l’équation (9.7) coïncident :(2 j1 + 1)(2 j2 + 1) =

∑ j1+ j2j=| j1− j2 |(2 j + 1).©

Dun

od.L

aph

otoc

opie

non

auto

risé

ees

tun

délit

.

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Page 176: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 9 • Addition des moments cinétiques

9.2 CONSTRUCTION DES VECTEURS | j1, j2; j,m 〉Nous cherchons maintenant comment mettre en correspondance les vecteurs des deuxbases. Nous considérons les sous espaces E ( j) successivement à partir de la plusgrande valeur de j.

• Sous espace E (j = jmax)

Nous avons déjà vu que :

| j = jmax, m = jmax 〉 = | j1, m1 = j1; j2, m2 = j2 〉. (9.8)

Des applications successives de l’opérateur J− = J1− + J2− permettent d’exprimertous les vecteurs | j = jmax, m 〉 (l’action de J− est représentée par une flèche en traitcontinu sur la figure 9.1). Par exemple :

J− | jmax, jmax 〉 = (J1− + J2−) | j1, m1 = j1; j2, m2 = j2 〉. (9.9)

Nous connaissons l’action des opérateurs sur les vecteurs dans les deux membres,équation (8.40) : √

jmax( jmax + 1) − jmax( jmax − 1) | jmax, jmax − 1 〉 (9.10)

=√

j1( j1 + 1) − j1( j1 − 1) | j1, j1 − 1; j2, j2 〉

+√

j2( j2 + 1) − j2( j2 − 1) | j1, j1; j2, j2 − 1 〉.

Finalement nous trouvons :

| jmax, jmax−1 〉=

√j2

j1 + j2| j1, j1; j2, j2 − 1 〉+

√j1

j1 + j2| j1, j1 − 1; j2, j2 〉. (9.11)

En continuant à appliquer J− nous trouvons l’expression de tous les vecteurs deE ( j = jmax).

• Sous espace E (j = jmax − 1)

Nous suivons la même logique : nous partons du vecteur associé à la valeurmaximale de m puis appliquons l’opérateur J− plusieurs fois pour construire lesautres vecteurs au sein du sous espace E ( j = jmax − 1). Nous remarquonsque le vecteur | jmax − 1, jmax − 1 〉 s’exprime comme une combinaison linéaire de| j1, j1 − 1; j2, j2 〉 et | j1, j1; j2, j2 − 1 〉. D’autre part il doit être orthogonal au vec-teur (9.11). Ces deux remarques permettent de déterminer le vecteur (l’utilisation

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Page 177: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

9.3. Composition de deux spins 1/2

de la condition d’orthogonalité est représentée par la flèche en pointillés sur la fi-gure 9.1) :

| jmax − 1, jmax − 1 〉 =

√j1

j1 + j2| j1, j1; j2, j2 − 1 〉

√j2

j1 + j2| j1, j1 − 1; j2, j2 〉. (9.12)

Nous lui appliquons ensuite l’opérateur J− (flèche en trait continu de la figure 9.1)pour construire les autres états de E ( j = jmax − 1).

La procédure consiste donc à parcourir les lignes horizontales de la partie droitede la figure 9.1, à partir du haut, comme l’indiquent les flèches.

9.3 COMPOSITION DE DEUX SPINS 1/2Pour illustrer la procédure exposée dans la section précédente nous considérons le casde la composition de deux spins s1 = s2 = 1/2 : �S = �S 1+ �S 2. Le spin total est noté S .Il satisfait |s1 − s2| � S � s1 + s2, i.e. S = 0 ou 1. Nous notons |++ 〉, |+−〉, | −+ 〉 et| −− 〉 les quatres vecteurs propres de S 1z et S 2z en terme desquels nous construisonsles états propres de �S 2 et S z.

• Sous espace E (S = 1)

Le point de départ est le vecteur

|1, 1 〉 = |++ 〉. (9.13)

L’application de S − = S 1− + S 2− sur |++ 〉 donne successivement :

|1, 0 〉 = 1√

2(|+−〉 + | −+ 〉) (9.14)

|1,−1 〉 = | −−〉. (9.15)

Ces trois états portent le nom « d’état triplet ».

• Sous espace E (S = 0)

Le vecteur |S = 0, M = 0 〉 est orthogonal à |S = 1, M = 0 〉. Nous déduisons l’ex-pression du dernier vecteur :

|0, 0 〉 = 1√

2(|+−〉 − |−+ 〉) (9.16)

appelé « état singulet ».©D

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Page 178: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 9 • Addition des moments cinétiques

RemarqueBien que les états |1, 0 〉 et |0, 0 〉 aient des expressions ne différant que par le signe re-latif des deux termes, soulignons qu’ils caractérisent deux situations très différentes.|1, 0 〉 représente un état pour lequel ||�S || =

√2 � et la projection du spin sur l’axe Oz

est nulle (cet état est représenté par le disque dans le plan xOy sur la figure 8.4). Enrevanche |0, 0 〉 est un état tel que ||�S || = 0.

À retenir

Le plus important : la règle du triangle, i.e. l’encadrement (9.6) et le principe de la dé-composition (9.7).

La logique pour trouver la relation entre les deux bases (9.3), résumée sur la figure 9.1.

Dans la pratique, le contenu du chapitre est souvent utilisé pour diagonaliser des hamil-toniens du type de celui de l’exercice 9.3. Le même truc est toujours employé !

Pour en savoir plus

Les résultats de ce chapitre se comprennent directement à partir de considérations sur laclassification des représentations irréductibles du groupe de rotation ; sur cette questionon pourra consulter le texte très pédagogique [13].

Exercices

9.1 (F) À quelle(s) condition(s) C j,mj1,m1; j2,m2

� 0 ?

9.2 (MF) E (1) ⊗ E (1/2)

Nous considérons deux moments cinétiques j1 = 1 et j2 = 1/2 (nous verrons une réa-lisation de ce cas pour l’étude des corrections relativistes dans l’atome d’hydrogènechapitre 14). Calculer les coefficients de Clebsch-Gordan permettant de passer auxétats propres du moment cinétique total.

9.3 (MF) Soit deux moments cinétiques �J1 et �J2 (par exemple les deux spins de deuxparticules). On note �J = �J1 + �J2 le moment cinétique total. L’hamiltonien est1

H = A �J1 · �J2. (9.17)

1. Ce type d’hamiltonien apparaît fréquemment dans les problèmes : forme du couplage spin-orbite dansl’étude de la structure fine de l’atome d’hydrogène (§ 14.1). C’est aussi l’hamiltonien effectif décrivant

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Page 179: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

a) Montrer que [H, �J1] = i�A �J1 × �J2 et [H, �J] = 0. Interpréter physiquement cesrelations.

b) Déduire une base d’états stationnaires. Analyser (physiquement) les dégénéres-cences des niveaux d’énergie.

Figure 9.2– Collision entre deux particules.

|+>

T|−>

d’interactionzone

temps

9.4 (MF) Collision entre deux spins 1/2

Nous étudions l’évolution de l’état de spin d’un proton et d’un neutron entrant encollision. Les spins des deux particules sont notés �S 1 et �S 2. Nous modélisons l’inter-action sous la forme

Hint = α(t) �S 1 · �S 2. (9.18)

La fonction α(t) n’est non nulle que sur l’intervalle de temps [0, T ] correspondant àla durée de la collision (cf. figure 9.2). Elle est choisie constante sur cet intervalle.

a) Pour α(t) = α donner les états propres et les valeurs propres de Hint.

b) Initiallement les deux spins sont dans l’état |ψinitial 〉 = |+−〉. Calculer l’état despin |ψfinal 〉 après la collision.

c) Déduire la probabilité de retournement des deux spins Proba[|+−〉 → |−+ 〉] aucours de la collision. Tracer cette probabilité en fonction du temps d’interaction.

9.5 (MF) Tenseurs

Nous avons discuté la nature scalaire ou vectorielle des grandeurs physiques en termede leurs propriétés sous les rotations. Certains problèmes physiques font toutefois in-tervenir des objets plus complexes appelés tenseurs, repérés par leurs composantesTi1i2 ···ik (pour un tenseur de rang k) et caractérisés par une loi de transformation ana-logue à celle d’un produit tensoriel de vecteurs (�V ⊗ �W ⊗ · · · )i1i2 ···ik = Vi1Wi2 · · · :T ′

i1i2 ···ik = Ri1 j1(�θ)Ri2 j2(�θ) · · · Rik jk (�θ)T j1 j2 ··· jk .

Concentrons-nous pour simplifier sur le cas des tenseurs de rang 2 : des exemplesphysiques sont le tenseur des contraintes en théorie de l’élasticité, le tenseur deconductivité, etc. Un tenseur Ti j de rang 2 est un objet à 9 composantes se comportantsous les rotations comme un produit tensoriel de deux vecteurs (�V ⊗ �W)i j = ViW j.

l’interaction dipolaire magnétique entre les spins du proton et de l’électron lorsque l’atome d’hydrogèneest dans son état fondamental (§ 14.3).©D

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Page 180: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 9 • Addition des moments cinétiques

a) Montrer qu’il est toujours possible de décomposer un tenseur Ti j comme

Ti j =C3δi j + Ai j + S i j (9.19)

où Ai j est un tenseur antisymétrique et S i j un tenseur symétrique de trace nulle.Quelles sont les nombres de composantes indépendantes de chacune des compo-santes ? Montrer que cette décomposition est stable sous les rotations, i.e. que lescomposantes des trois parties ne sont pas mélangées par une rotation.

b) Revenons au problème de composition des moments cinétiques. Si on considèreE (1) ⊗ E (1) =

⊕j E ( j), sur quelles valeurs de j porte la somme ? Quelles sont

les dimensions des sous espaces correspondants ? À quelles quantités physiquespeut-on associer les différents sous espaces E ( j) ?

Remarque : Tenseurs irréductibles

La décomposition (9.19) est un cas particulier de la décomposition en tenseurs irré-ductibles. Autrement dit, dans l’espace des tenseurs de rang 2, nous avons identifiéles plus petits sous espaces de tenseurs stables sous les rotations (par exemple untenseur antisymétrique ne sera jamais transformé en tenseur symétrique par une ro-tation). L’intérêt de cette décomposition est que les tenseurs irréductibles ont des loisde transformation « simples » sous les rotations, identiques aux vecteurs des sous es-paces E (j), ce qui fournit des règles de sélections (théorème de Wigner-Eckart) (surce sujet renvoyons au chapitre XIII de l’ouvrage de Messiah [33]).

170

Page 181: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

INTRODUCTIONÀ LA THÉORIE

DES COLLISIONS

10

10.1 CE QUE LE CHAPITRE DISCUTE...ET CE DONT IL NE PARLE PAS

La théorie des collisions (ou théorie de la diffusion, « scattering » en anglais) est unaspect très important du formalisme quantique1 visant à dégager un certain nombred’idées et propriétés générales dans la situation où une particule (une onde) subit unecollision avec une cible, figure 10.1, i.e. d’autres particules (ou des collisions entreparticules dans un accélérateur, figure 11.1).

Figure 10.1– Onde (lumière, électrons,neutrons, particules α...) envoyée surune cible.Les ronds représentent les centresdiffuseurs de la cible (les atomes parexemple).

Source

Détecteur

Cible(a)

λ

Cette situation a déjà été rencontrée dans des domaines extrêmement variés et ilest presqu’inutile de souligner son importance : par exemple dans l’introduction àplusieurs reprises (expérience de Rutherford, expériences de collisions dans les ac-célérateurs de particules, etc.). Notons que le concept de collision fournit des outilspuissants pour étudier la thermodynamique des gaz faiblement en interaction (déve-loppement du viriel [29], etc.) par exemple très utile dans le cadre de la physique desgaz atomiques (milieux dilués). Enfin, un dernier contexte dans lequel se déploie lapuissance de cette idée est fourni par la matière condensée où la notion de collisionest utilisée pour décrire le transport électronique dans des structures de dimensionsmicrométriques cohérentes (les problèmes 10.1 et 10.2 illustrent ce dernier point ainsique la figure de la couverture) : c’est l’approche de Landauer-Büttiker (pour un texteintroductif on pourra consulter [11]).

1. Notons également l’existence d’une « théorie des collisions classiques », développée dans tous lesbons livres de mécanique classique (par exemple [26] ou le premier chapitre de l’ouvrage [41]).©D

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Page 182: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

Le sujet serait suffisamment vaste pour occuper un ouvrage complet et ce cha-pitre ne vise qu’à introduire quelques idées. Pour en toucher du doigt la richesse,considérons une situation physique précise que nous avons évoquée dans le chapitred’introduction : l’expérience de Geiger, Marsden et Rutherford de bombardementd’un film d’or par des particules α (figure 1.2). Cette expérience historique, qui dé-montra l’existence du noyau atomique, est bien analysée en considérant que chaqueparticule α (portant une charge +2|qe|) est déviée par un unique noyau d’or (de charge+79|qe |) via l’interaction coulombienne. Ce régime de diffusion simple (figure 10.1),où chaque particule α rencontre un unique centre diffuseur, reproduit le résultat ex-périmental. L’intensité mesurée est une somme incohérente des amplitudes associéesà une collision :

Isimple ∝∑

diffuseur i

∣∣∣Aune coll. sur i

∣∣∣2. (10.1)

En général l’amplitude dépend des directions incidentes et diffusées et l’intensité pré-sente une dépendance angulaire non triviale (ce qui sera discuté aux § 10.4 et 10.5).

Plusieurs complications intéressantes pourraient se produire :(A) Si le paquet d’ondes décrivant la particule α était suffisamment étendu spatia-lement (à l’échelle du réseau cristallin selon lequel s’arrangent les atomes d’or), leprocessus de diffraction de la particule α serait sensible à la structure cristalline (enpratique cela se produit pour d’autres types d’onde incidentes, comme des rayons Xou des électrons). C’est un régime de diffusion de Bragg (figure 10.2.b). Contrai-rement au cas de la diffusion simple, l’intensité est donnée en ajoutant de manièrecohérente les amplitudes associées à une collision :

IBragg ∝∣∣∣ ∑

diffuseur i

Aune coll. sur i

∣∣∣2. (10.2)

On observe une figure de diffraction, analogue à celle obtenue en optique lors de ladiffraction de lumière par un réseau.(B) Si la cible est plus épaisse (figure 10.2.c), l’onde incidente pourrait interagir avecplusieurs centre diffuseurs avec une forte probabilité, avant de sortir de la cible : c’estun régime de collisions multiples. On peut d’abord considérer un régime incohérent :les amplitudes associées aux chemins de diffusion, notés C = (i1, i2, · · · , iN), sontajoutées de manière incohérente

I(incoh.)Mult. ∝

∑chemin C

∣∣∣AC∣∣∣2. (10.3)

Si la séquence de collisions est très longue, l’onde diffusée perd la mémoire de ladirection incidente et est diffusée de manière isotrope (à l’entrée et à la sortie). Celacorrespond au régime de diffusion de la lumière dans un nuage ou dans un verre de

172

Page 183: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.1. Ce que le chapitre discute... et ce dont il ne parle pas

Cible(b)

λ

Cible(c)

λ

Figure 10.2– Autres régimes de diffusion.(b) : Régime de diffusion de Bragg : l’onde diffuse de manière cohérente sur plusieurscentres diffuseurs. (c) : Régime de diffusion multiple : l’onde diffuse de manière cohérentesur plusieurs diffuseurs et subit des processus de diffusion multiple. Remarque : Sur leschéma, la direction des ondes diffusées par la cible correspond à celle du détecteur pourindiquer la nature des chemins de diffusion détectés ; bien entendu la cible diffuse l’ondedans toutes les directions spatiales a priori, ce qui n’est pas représenté.

lait [20, 1]. Enfin il existe également un régime de diffusion multiple cohérent danslequel les amplitudes sont ajoutées de façon cohérente :

I(coh.)Mult. ∝

∣∣∣ ∑chemin C

AC∣∣∣2. (10.4)

Ces effets d’interférences, plus difficiles à observer, peuvent donner lieu à des phé-nomènes très intéressants de localisation de l’onde par un milieu désordonné : loca-lisation d’Anderson ou sa version légère, la localisation faible [1].(C) La formule de Rutherford décrit la collision de deux particules dont l’énergiecinétique (totale) ne change pas au cours de la collision. On parle de diffusion élas-tique. Si les particules entrant en collision possèdent des degrés de liberté internes(un spin, un degré d’excitation, etc.), l’énergie cinétique peut être transférée vers cesautres degrés de liberté : la diffusion est inélastique.

Cette petite liste vise simplement à délimiter le champ de la discussion qui vasuivre. Nous nous intéressons dans ce chapitre à une situation où toutes les complica-tions (A-C) sont absentes et considérons le régime de collision simple élastique : nouspouvons alors nous ramener à un problème à deux particules (la particule incidente etla particule cible), i.e. à l’étude d’une particule fictive envoyée sur une cible décritepar un potentiel V(r), décroissant vite à l’infini pour permettre de définir un pro-blème de diffusion. Nous commencerons par analyser la situation undimensionnelle(déjà abordée brièvement dans les chapitres antérieurs) qui permet déjà de présentersimplement un certain nombre de concepts : matrice S , déphasages, résonance,...©D

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Page 184: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

10.2 COLLISIONS EN UNE DIMENSION

Bien que notre approche de la situation unidimensionnelle est davantage motivée pardes buts didactiques, notons qu’elle peut se révéler utile pour décrire de situationsphysiques concrètes : les progrès réalisés ces dernières décennies dans le domainede la fabrication de micro et nano-structures conductrices permettent aujourd’hui deconfiner les électrons dans des structures de basse dimension et de réaliser ainsi des« guides d’onde » pour l’onde électronique (la couverture du livre en donne une illus-tration). Lorsqu’un unique mode transverse est excité, le système est dans une situa-tion effectivement unidimensionnelle. Des exemples physiques précis sont discutésdans les problèmes 10.1 page 199 et 10.2 page 201.

10.2.1 Un problème de diffusion sur une ligne semi-infinie– déphasage

Commençons par nous placer dans la situation la plus simple qui soit : nous étu-dions le problème d’une particule envoyée depuis x = +∞ sur un potentiel décrois-sant « vite » à l’infini, V(x → ∞) = 0, et totalement réfléchissant à l’origine, i.e.V(x < 0) = +∞ (figure 10.3). Nous pouvons écrire l’état stationnaire de diffusiond’énergie E dans la région de potentiel nul comme :

ψ(x; E) �x→∞

e−ikx︸︷︷︸incident

+ r(E) e+ikx︸�����︷︷�����︸réflechi

où r(E) = ei2η(E). (10.5)

La présence du mur réfléchissant à l’origine impose que la probabilité de réflexionsoit |r|2 = 1. Dans cette situation simple, l’onde réfléchie ne peut être affectée que parune phase, appelée déphasage η(E). Bien que caractérisant le comportement asymp-totique de la fonction d’onde, cette phase encode de nombreuses informations phy-siques intéressantes sur la région de diffusion (i.e. sur le potentiel), comme nous lediscutons maintenant.

Figure 10.3– Diffusion par un potentiel avec un puitsde largeur finie et une barrière.

Considérons un exemple précis de potentiel présentant un puits de profondeur

V0 =�2k2

02me

et de largeur L, et une barrière modélisée par un potentiel δ en x = L

174

Page 185: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.2. Collisions en une dimension

(figure 10.3) :

�2

2me

(− d2

dx2− k2

0 θ(L − x) + λ δ(x − L)

)ψ(x) =

�2k2

2meψ(x) pour x > 0. (10.6)

L’étude de cette situation, qui généralise le cas étudié dans la section 2.1.4 est déjàassez instructive.

Tout d’abord il est utile pour la discussion de trouver l’équation de quantificationdonnant les énergies des états liés. Posons E = − �2k2

2me< 0. La fonction d’onde est

de la forme ψ(x) = sin Kxsin KL pour x ∈ [0, L], où K =

√k2

0 − k2, et ψ(x) = e−k(x−L)

pour x ∈ [L,∞[. L’équation de quantification est obtenue en imposant la conditionde raccordement2 de part et d’autre du potentiel �

2λ2me

δ(x − L) :

[ ddx

ln |ψ(x)|]L+

L−= λ ⇒ K cotg KL = −(k + λ) (10.7)

dont nous notons l’ensemble des solutions {En}n=1,··· ,NB . Cette équation peut être ré-solue graphiquement. Par exemple il est facile de voir qu’en l’absence de la barrière(λ = 0) un nouvel état lié apparaît chaque fois que k0L = π(n + 1

2 ), n ∈ N.

Exercice 10.1 (F) Vérifier cette dernière assertion.

Tournons nous maintenant vers notre principal objet d’étude, à savoir les proprié-tés de la diffusion, pour E = + �

2k2

2me> 0. La fonction d’onde dans le puits s’écrit

ψ(x) = [e−ikL + re+ikL] sin Kxsin KL où K =

√k2

0 + k2 (le préfacteur est choisi afin d’as-surer la continuité avec (10.5)). Le raccordement des deux expressions nous donnel’expression du coefficient de réflexion

r(E)e2ikL = e2iη(E)+2ikL = −K cotg KL + ik + λK cotg KL − ik + λ

. (10.8)

Nous retrouvons le résultat du problème libre en faisant k0 = 0 et λ = 0 (ou demanière équivalente k → ∞) le membre de droite est alors −e2ikL, i.e. η(E → ∞) =π2 mod π.

• Relation entre coefficient de réflexion et spectre d’états liés

Définissant la solution d’une équation différentielle (l’équation de Schrödinger), lecoefficient de réflexion (l’amplitude de probabilité de réflexion) possède des proprié-tés d’analyticité nous permettant d’établir une correspondance entre cette propriété

2. Pour trouver la condition d’accordement (10.7), on intègre (10.6) sur l’intervalle [L − ε, L + ε] :−[ψ′(L + ε) − ψ′(L − ε)

] − k2o

∫ L

L−ε dxψ(x) + λψ(L) = k2∫ L+ε

L−ε dxψ(x). Puis on prend la limite ε→ 0+.©D

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Page 186: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

des états stationnaires de diffusion (E > 0) et les états liés du problème. Ce pointse comprend en écrivant la fonction d’onde ψ(x; E = +k2) ∝ 1

r(E) e−ikx + eikx. Cette

solution est également une solution de l’équation de Schrödinger pour E < 0 à condi-tion de procéder à un prolongement analytique, k =

√E + i0+ → ik ; on obtient

ψ(x; E = −k2) ∝ 1r(E=−k2+i0+) e

kx + e−kx. La normalisabilité est assurée dans ce cas enécrivant r(E + i0+) = ∞. Autrement dit : les états liés du problème sont les solutionsde l’équation

r(E) = ∞ pour E ∈ {En}n=1,··· ,NB (10.9)

ce qui est manifeste sur l’exemple étudié ici en notant que les pôles de l’équa-tion (10.8) coïncident avec les solutions de l’équation de quantification (10.7), aprèssubstitution k → ik.

Cette relation entre propriétés de la diffusion (i.e. du continuum d’états pour E > 0)et les états liés (i.e. le spectre discret pour E < 0) s’illustre notamment à travers lethéorème de Levinson (1949) qui montre que le déphasage permet de compter lesétats liés :

NB = # d’états liés =η(0) − η(∞)

π(10.10)

où il est entendu que la fonction η(E) est une fonction continue de l’énergie. Nousillustrons cette observation sur la figure 10.4 dans le cas du potentiel de la figure 10.3.Le théorème est démontré plus bas (l’équation (10.8) ne donne le déphasage η(E)que modulo π ; une autre formulation du théorème de Levinson est : NB = [# dediscontinuités de η(E) modulo π]).

0 1 2 3 4 50.0

0.5

1.0

1.5

2.0

kL�Π

�Η�k

2 ������Рk00

Λ�0

0 1 2 3 4 50

2

4

6

8

10

kL�Π

dΗ dk

L

k0�0

Λ�10�L

Figure 10.4– Théorème de Levinson – Résonances.

À gauche : Illustration du théorème de Levinson donnant le nombre d’états liés dans lepuits : NB =

1π [η(0) − η(∞)]. Déphasage en fonction de k pour différentes profondeurs de

puits de largeur L = 1 en l’absence de barrière (pour λ = 0, les états liés apparaissentdans le puits pour k0 = π(n + 1

2 )) : k0 =π2 − 0.1 (ligne continue), π

2 + 0.1 (tirets) et 3 π2 + 0.1

(pointillés). À droite : dηdk + L pour k0 = 0 et λ = 10/L.

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Page 187: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.2. Collisions en une dimension

• Résonances

Nous simplifions maintenant le problème et considérons la situation en l’absence dupuits, k0 = 0, avec une barrière λ � 0.

r(E) = e2iη(E) = −e+ikL + λ

k sin kL

e−ikL + λk sin kL

e−2ikL. (10.11)

La présence de la barrière nous permet de varier le « couplage » entre la région[0, L] et la région semie-infinie, x > L. En particulier pour λ = ∞ les deux ré-gions sont découplées : sur [0, L] nous sommes ramenés à un problème d’états liés(ψ(0) = ψ(L) = 0) dont la solution est le spectre d’états liés de la boîte quantique,

En =�2k2

n2me

et φn(x) =√

2L sin knx avec kn =

nπL pour n ∈ N∗. Sur [L,∞[ nous retrou-

vons les solutions libres ψk(x) =√

2π sin k(x − L) avec k ∈ R+.

Nous pouvons maintenant montrer que lorsque λ est fini mais grand, le problèmede diffusion garde la trace des états liés obtenus à la limite λ→ ∞.

Exercice 10.2 (D) On analyse la limite λ→ ∞ (en pratique λ � k)a) Montrer que le coefficient de réflexion admet un développement de la forme

e2iη(E)+2ikL �k∼kn

− k−kn−iγn

k−kn+iγnau voisinage de la résonance (k ∼ kn).

b) Une analyse en énergie conduit au comportement générique, dit de Breit-Wigner

e2iη(E)+2ikL �E∼En

−E − En − i�Γn/2

E − En + i�Γn/2(10.12)

Donner l’expression de En et �Γn. Analyser le mouvement de r(E) dans le plan com-plexe lorsque E varie.

Les résonances (pics de largeurs δE ∼ �Γn de la figure 10.4) signalent des étatsquasi-liés, de grande durée de vie 1/Γn. Ceci est illustré sur la figure 10.5 : lorsquel’énergie ne coïncide pas avec l’énergie d’un état quasi-lié, la fonction d’onde estquasiment nulle dans la « région de diffusion », l’intervalle [0, L], (à gauche) alorsqu’elle est très importante si E = En (à droite).

Nous montrerons précisément dans le problème 10.2 que τ(E)def= 2� dη

dE =me�k

d2ηdk

s’interprète comme le temps de retard de l’onde à la réflexion dû à la présence dupotentiel d’interaction. Une résonance se signale par un pic lorentzien de la fonctionτ(E), centré sur En et de largeur �Γn, et signale qu’une particule d’énergie E ∼ En

passe un temps τ(En) ∼ 1/Γn très long dans la région d’interaction, ici [0, L] (partiedroite de la figure 10.4). C’est une « nouvelle version » de l’inégalité de Heisenberg©D

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Page 188: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

temporelle reliant une largeur en énergie �Γn (la largeur de la résonance) à un temps(un temps de retard ou de « piègeage »).

Dans le contexte d’une collision de deux particules (dans un accélérateur de par-ticules par exemple), une résonance, i.e. un état quasi-lié des deux particules, estinterprétée comme une nouvelle particule instable, de durée de vie finie.

0 2 4 6 8 10

�1

0

1

2

3

4

x�L

Ψ�x� k�Π �2L

k0�0 & Λ�10�L

0 2 4 6 8 10

�1

0

1

2

3

4

x�L�x� k�k

�1�0.916Π �L

k0�0 & Λ�10�L

Figure 10.5– État stationnaire de diffusion.

À gauche : L’énergie E est loin d’une résonance, k = π/2L À droite : L’énergie coïncideavec la première résonance, k = k1. La probabilité pour que la particule soit sur [0,L] estimportante, ce qui suggère qu’elle y passe un temps long.

10.2.2 Diffusion unidimensionnelle – Matrice S

Nous considérons dans ce paragraphe la situation légèrement plus riche de la diffu-sion d’une particule par un potentiel V(x) défini sur R et supposé décroître « rapide-ment » à l’infini V(x → ±∞) = 0. Cette analyse nous permet d’introduire le conceptde matrice S et de comprendre comment se généralise la notion de déphasage intro-duite au pragraphe précédent.

• États gauches/droits

Pour toute énergie positive E = + �2k2

2me> 0, l’équation de Schrödinger admet deux

solutions linéairement indépendantes. Une base de solutions dont nous donnons aisé-ment une interprétation physique est formée des deux solutions présentant les com-portements asymptotiques suivants (représentées sur le haut de la figure 10.7) :

ψ+G(x; E) �⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩e+ikx + r(E) e−ikx pour x → −∞

t(E) e+ikx pour x → +∞(10.13)

ψ+D(x; E) �⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩t′(E) e−ikx pour x → −∞

e−ikx + r′(E) e+ikx pour x → +∞(10.14)

(le sens de l’exposant + sera expliqué plus bas). La première de ces solutions décritla situation physique où la particule incidente depuis −∞ est diffusée vers la gauche,

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Page 189: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.2. Collisions en une dimension

resp. la droite, avec une amplitude de probabilité r, resp. t (nous sous-entendrons ladépendance en énergie). L’état stationnaire ψ+D(x; E) décrit une particule incidente de+∞ et met en jeu les amplitudes de probabilité r′, t′ (figure 10.7).

V(x)ψ(x;E) : A

AD,in

D,out

G,out

G,inAA

Figure 10.6– État stationnaire de diffusiongénéral.

Nous regroupons ces quatre coefficients complexes dans la matrice 2 × 2, appeléematrice de diffusion (matrice S ) :

Sdef=

(r t′

t r′

). (10.15)

Cette notion a été introduite dans l’annexe 5.A page 95. Son intérêt peut se com-prendre en considérant la solution générale de l’équation de Schrödinger, que nouspouvons écrire comme une combinaison linéaire des deux états :

ψ(x; E) = AG,in ψ+G(x; E) + AD,in ψ

+D(x; E). (10.16)

Cet état décrit la situation physique où la particule est injectée à la fois depuis lagauche et depuis la droite ; la matrice S permet alors de relier les amplitudes entrantesAG,in, AD,in aux amplitudes sortantes (figure 10.6) :(

AG,out

AD,out

)= S

(AG,inAD,in

). (10.17)

Exercice 10.3 (F) Écrire explicitement la solution (10.16) dans les deux régionsasymptotiques. Comparer avec l’équation (10.17).

Exercice 10.4 (F) Montrer que la conservation de la probabilité (i.e. JG,D(x →−∞) = JG,D(x → +∞) où JG,D(x) = �

meIm

[ψ∗G,D

dψG,Ddx

]) est assurée si la matrice

est unitaire S S † = S †S = 1 (notons que la réciproque est moins facile à prouver :l’orthonormalisation de la base d’états {ψG, ψD} implique l’unitarité de S ).

• États sortants/entrants et matrice S

Les deux états étudiés précédemment forment une base des états d’énergie E :{|ψ+G,E 〉, |ψ

+D,E 〉}. Ces états, appelés « états sortants », décrivent la situation physique

d’une onde incidente d’un côté ou de l’autre et diffusée des deux côtés du diffuseur(figure 10.7). Une autre base d’états intéressante est constitutée des états de diffusiondécrivant la situation symétrique où l’onde est sortante uniquement d’un des côtés©D

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Page 190: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

V(x)

)x(V)x(V

V(x)Sorta

ntEn

trant − −

r’*

+

t’*t*r*

+

t1

1

1

1

r’t’

ψD(x;E):

r

ψG(x;E):

ψG(x;E): ψ

D(x;E):

Figure 10.7– Deux bases d’états stationnaires de diffusion.

En haut les états « sortants » (+) et en bas les états « entrants » (−).

du diffuseur (figure 10.7) : ces états sont appelés les « états entrants » et seront notés{|ψ−G,E 〉, |ψ

−D,E 〉}.

Nous établissons maintenant la relation entre les deux bases d’états. En compa-rant les comportements asymptotiques pour x → +∞ nous voyons que l’onde sor-tante vers la gauche est éliminée en considérant la combinaison linéaire : ψ−G(x; E) ∝−r′ψ+G(x; E) + tψ+D(x; E). Le préfacteur est fixé par inspection du comportement pourx → −∞ en imposant que le coefficient de l’onde sortante vers la gauche soit 1. Ilvient

ψ−G(x; E) =r′ ψ+G(x; E) − tψ+D(x; E)

rr′ − tt′= r∗ ψ+G(x; E) + t′∗ ψ+D(x; E) (10.18)

�⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩r∗ e+ikx + e−ikx pour x → −∞

t′∗ e−ikx pour x → +∞(10.19)

où nous avons utilisé les relations entre coefficients issues de la condition d’unitaritéS −1 = S †. Une analyse similaire nous fournit ψ−D(x; E) = t∗ ψ+G(x; E) + r′∗ ψ+D(x; E).

La matrice S nous permet donc de relier les deux bases d’états :(ψ+G(x; E)ψ+D(x; E)

)= S T

(ψ−G(x; E)ψ−D(x; E)

). (10.20)

La matrice S ne relie pas seulement les amplitudes associées aux comportementsasymptotiques de la fonction d’onde, eq. (10.17), mais les deux bases d’états, ∀ x. Enfaisant un choix de normalisation approprié3 assurant 〈ψ±α,E |ψ

±β,E′ 〉 = δαβδ(E − E′),

nous obtenons

〈ψ−α,E |ψ+β,E′ 〉 = S βα δ(E − E′) avec α, β ∈ {G, D}. (10.21)

3. On doit multiplier les expressions de la section, eqs. (10.13,10.14,...), par 1/√

hv(E) où v(E) est lavitesse E = 1

2 mv(E)2 (cf. problème 10.1).

180

Page 191: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.2. Collisions en une dimension

• Ondes partielles et déphasage

Nous montrons maintenant comment nous pouvons retrouver la notion de déphasagedans cette situation. Le déphasage η est une phase relative entre une onde incidentee−ik|x| et une onde réfléchie e+ik|x|+2iη . Puisque l’équation de Schrödinger unidimen-sionnelle admet deux solutions dégénérées à toute énergie, afin de définir des dépha-sages, il est naturel d’introduire la base d’états stationnaires d’énergie E :

Ψσ(x) �|x|→∞

[aσ θ(x) + bσ θ(−x)] cos(k|x| + ησ(E)) (10.22)

où σ = ± est un indice discret repérant les deux états et ησ(E) sont les deux dé-phasages. Nous cherchons à établir une relation entre les deux bases d’états. Pourcela nous décomposons chaque état dans la base de départ Ψσ(x) = Cσ ψ

+G(x; E) +

ψ+D(x; E). En comparant les comportements asymptotiques en x → +∞ nous obte-nons r′ + Cσ t = e2iησ et en x → −∞ : t′ +Cσ r = Cσe2iησ . En éliminant Cσ les deuxéquations conduisent à e4iησ − (r+ r′)e2iησ − tt′ + rr′ = 0. Autrement dit, nous venonsde montrer que les deux états Ψ+(x) et Ψ−(x) sont les deux états propres de la matricede diffusion. Ils sont appelés les ondes partielles. Les déphasages correspondent auxphases des valeurs propres de la matrice S :

det(S − e2iησ 1) = 0 (10.23)

Nous retrouverons cette idée générale (dans la situation semi-infinie analysée dans leparagraphe précédent, le coefficient de réflexion a joué le rôle de matrice de diffusionS = r = e2iη).

Remarque : potentiel pairC’est seulement lorsque le potentiel est symétrique V (x) = V (−x) que les deux étatsstationnaires (10.22) possèdent une symétrie sous la parité. Dans ce cas aσ = σbσ etΨ+(x) et Ψ−(x) sont respectivement les états pair et impair.

• Règle de somme de Krein-Friedel

Nous discutons une relation entre matrice S et spectre du problème. Pour cela noussupposons un moment que le système est dans un volume fini, sur un intervalle[−R;+R] sur les bords duquel nous imposons des conditions de Dirichlet ψ(±R) = 0.L’équation de quantification prend une forme sympathique dans la base des ondes

partielles : Ψσ(±R) = 0 i.e. knR + ησ(En) + π/2 = nπ, où En =�2k2

n2me

. La distance entre

niveaux δEn = En+1−En � dEndknδkn, avec δkn = kn+1−kn, s’interprète comme l’inverse

de la densité d’états ρ(En) � 1/δEn (cette notion est définie dans l’annexe 10.A). Dansla limite R → ∞ les niveaux se resserrent et nous pouvons développer l’équation dequantification 1

δkn� R

π +1π

dησ(En)dkn

. Le premier terme est relié à la densité d’états en©D

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Page 192: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

l’absence du potentiel diffusant, dans le canal σ : R/π = 1/δk(0)n = ρ0(En) dEn

dkn. Nous

avons donc obtenu une relation entre déphasages et la variation de densité d’étatsinduite par l’introduction du potentiel diffusant, δρ(E)

def= ρ(E) − ρ0(E) :

δρ(E) =1π

∑σ=±

dησ(E)dE

=1

2iπd

dEln det S (E) (10.24)

(où nous avons utilisé que tr ln = ln det).

Remarquedans la limite de volume infini, δρ(E) est la différence de deux quantités infinies.Nous avons donné un sens précis à « ρ(E) − ρ0(E) » en considérant le problème dansun volume fini, 2R, puis en prenant la limite R → ∞. Les densités d’états divergentchacune linéairement avec R, cependant la différence reste finie. Une autre manièrede définir précisément δρ(E) consiste à introduire la densité d’états locale ρ(x; E) =∑

n |ϕn(x)|2δ(E − En). La variation de densité d’états peut être calculée en volume infini :δρ(E) =

∫ +∞−∞ dx [ρ(x; E) − ρ0(x; E)].

• Démonstration du théorème de Levinson

(10.24) fournit une expression de δρ(E) dans la partie positive du spectre (continuum)où le problème de diffusion est défini. En admettant que l’introduction du potentielne change pas le nombre total d’états mais ne fait que redistribuer leur répartition(éventuellement en envoyer dans R−, i.e. faire apparaître des états liés), nous pouvonsécrire

NB +

∫ ∞

0dE δρ(E) = 0, (10.25)

où NB est le nombre d’états liés. Nous utilisons maintenant la relation (10.24) pourexprimer l’intégrale

∫ ∞0 dE δρ(E) = 1

π

∑σ

∫ ∞0 dE dησ(E)

dE , i.e.

NB =1π

∑σ

[ησ(0) − ησ(∞)

](10.26)

qui apparaît donc comme une règle de somme sur la règle de somme deFriedel (10.24).

10.2.3 Conclusion provisoire

Nous pouvons déjà dresser une petite liste des enseignements de l’étude du cas unidi-mensionnel. Tout d’abord, soulignons que la théorie de la diffusion repose sur l’étudedu comportement asymptotique des états quantiques, dont on extrait des informationscaractérisant le potentiel diffuseur. Nous avons introduit les notions de déphasage etde matrice S , entre lesquelles nous avons précisé la relation : les déphasages sont

182

Page 193: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.3. Formulation générale – Équation de Lippmann-Schwinger

les phases des valeurs propres e2iησ(E) de la matrice S (E). Sur l’exemple très simplede la figure 10.3, nous avons introduit le concept de « résonance » : l’amplitude dediffusion, i.e. la matrice S , signale l’existence d’états quasi-liés (correspondant à dessauts de π du déphasage ou des pics lorentziens de τ(E)

def= 2� dη

dE ). Enfin nous avonsmontré que l’étude de l’amplitude de diffusion, i.e. de ψ(x → ∞; E) pour E > 0,permet de remonter au spectre des états liés, i.e. aux fonctions d’onde au niveau dupuits de potentiel pour E < 0.

Ces progrès ont été possibles en analysant les états stationnaires de diffusion, i.e.les solutions de l’équation de Schrödinger unidimensionnelle. Nous discutons main-tenant quelques résultats généraux permettant de construire les états stationnaires.

10.3 FORMULATION GÉNÉRALE – ÉQUATIONDE LIPPMANN-SCHWINGER

Le paragraphe suivant utilise la notion de fonction de Green introduite dans l’an-nexe 10.A. Une étude des exercices 10.6 et 10.8 est conseillée à ce stade.

Séparons l’hamiltonien en une partie libre, notée H0, et le potentiel donnant lieuau processus de diffusion, noté V (cette séparation est nécessaire afin de définir desétats asymptotiquement libres) : H = H0 + V . Nous cherchons à résoudre l’équa-tion de Schrödinger stationnaire dans une situation de diffusion (spectre continu) :(E − H)|ψE 〉 = 0, que nous pouvons écrire (E − H0)|ψE 〉 = V |ψE 〉. Nous sommesmaintenant tentés de diviser membres de gauche et de droite par l’opérateur E − H0

afin d’obtenir une équation pour l’état stationnaire. Ce faisant nous devons prendregarde à deux choses : le premier point (le plus délicat) est que l’opérateur (E − H0)n’est pas toujours inversible. Nous étudions ici les états de diffusion appartenantau continuum d’états de H, or Spec(H0) = R+ ⊂ Spec(H). Pour E ∈ R+, l’inver-sion de (E − H0) est bien définie en décalant les pôles sous l’axe réel des éner-gies (respectivement au-dessus), ce qui fait apparaître la fonction de Green retardéeG+(E) = (E − H0 + i0+)−1 (respectivement avancée G−(E) = (E − H0 − i0+)−1) (cf.annexe 10.A). Le deuxième point est que nous pouvons ajouter à |ψE 〉 une solution|ψ(0)

E 〉 du problème libre, (E − H0)|ψ(0)E 〉 = 0. Finalement nous aboutissons à l’équa-

tion de Lippmann-Schwinger pour les états stationnaires sortants (+) ou entrants (−)(introduits dans la section 10.2.2) :

|ψ±E 〉 = |ψ(0)E 〉 +G±

0 (E)V |ψ±E 〉 (10.27)

La nature sortante ou entrante se déduit des comportements asymptotiques des fonc-tions de Green retardée et avancée (ce point est discuté dans l’annexe 10.A ; on pourraégalement étudier l’exercice 10.7). Écrite en représentation d’espace, cette équation©D

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Page 194: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

est une équation intégrale pour les états stationnaires :

ψ±E(�r) = ψ(0)E (�r) +

∫d�r ′ G±

0 (�r,�r ′; E) V(�r ′)ψ±E(�r ′). (10.28)

La situation physique représentée sur la figure 10.8 correspond à l’état sortant ψ+E(�r).La fonction de Green est particulièrement adaptée à l’écriture d’un développement

en puissances du potentiel. Écrivant 1z−H −

1z−H0= 1

z−H0V 1

z−H , nous déduisons l’équa-tion

G(E) = G0(E) +G0(E) V G(E), (10.29)

appelée équation de Dyson. Nous pouvons ainsi écrire G = G0 + G0VG0 +

G0VG0VG0 + · · · . En procédant de manière analogue dans l’équation de Lippmann-Schwinger, |ψ±E 〉 = |ψ

(0)E 〉 + G±

0 V |ψ(0)E 〉 + G±

0 VG±0 V |ψ±E 〉 = (1 + G±

0 V + G±0 VG±

0 V +

· · · )|ψ(0)E 〉, nous aboutissons à l’équation

|ψ±E 〉 = (1 +G±(E)V)|ψ(0)E 〉 (10.30)

qui nous fournit en principe un moyen de construire l’état de diffusion |ψ±E 〉, à partir

de l’état libre |ψ(0)E 〉. Notons toutefois que nous n’avons fait que repousser la difficulté

(résoudre une équation intégrale, (10.28)) dans le calcul de la fonction de Greenexacte du problème avec potentiel. L’exercice 10.8 analyse un cas simple pour lequelcette équation peut être résolue exactement.

• Approximation de Born

Lorsque le potentiel diffusant est suffisamment faible (ou que l’énergie de la particuleindicidente est grande), une bonne approximation qui simplifie la construction del’état stationnaire de diffusion peut être de remplacer l’état stationnaire par l’état libredans le membre de droite de l’équation de Lippmann-Schwinger (10.27) ou (10.28) :

|ψ±E 〉(Born 1)� (1 +G±

0 (E)V)|ψ(0)E 〉. (10.31)

On parle d’approximation de Born d’ordre 1.

• Matrice T

On introduit parfois la matrice T définie par G(E)V = G0(E)T (E), i.e. T (E)def= V +

V G(E) V . L’état stationnaire s’exprime alors comme |ψ±E 〉 = (1+G±0 (E)T±(E))|ψ(0)

E 〉,ce qui montre que la matrice T remplace, dans l’état stationnaire exact, le potentiel Vdans l’approximation de Born.

184

Page 195: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.4. Diffusion dans la situation bidimensionnelle

10.4 DIFFUSION DANS LA SITUATIONBIDIMENSIONNELLE

L’analyse de la situation en dimension supérieure à 1 nous permet d’introduire unenouvelle notion centrale de la théorie de la diffusion : la notion de section efficace. Laremarque que nous avons faite dans le cas 1D s’applique encore : l’étude de la situa-tion bidimensionnelle est loin d’être académique puisqu’il est possible de réaliser desgaz d’électrons piégés à l’interface de deux semi-conducteurs. À suffisamment bassetempérature (qq K) la physique de ces électrons est effectivement bidimensionnelle(on pourra voir la discussion du chapitre 16).

10.4.1 Deux bases d’états libres

La théorie des collisions a pour objet de comprendre comment les états asymptoti-quement libres sont couplés par un potentiel diffuseur. Il convient donc de discuterprécisément des bases libres adaptées.

Une base naturelle introduite dans les chapitres précédents est celle des ondesplanes ψ(0)

�k(�r) = 1

2πei�k·�r. Il est aussi utile de discuter une base d’états libres classés

par leur moment orbital (i.e. leurs propriétés sous les rotations) : les φk,m(�r), fonc-tions propres de l’énergie −Δφk,m(�r) = k2φk,m(�r), et du moment orbital −i∂θφk,m(�r) =m φk,m(�r), où l’opérateur de moment orbital est �z = −i�(x∂y − y∂x) = −i�∂θ.

Le Laplacien bidimensionnel s’exprimant comme Δ = ∂2

∂r2 +1r∂∂r +

1r2

∂2

∂θ2 , les φk,m(�r)sont donc des fonctions cylindriques (fonction de Bessel, cf. annexe A) :

φk,m(�r) = u(0)k,m(r) eimθ =

√k

2πJm(kr) eimθ avec k ∈ R+ et m ∈ Z. (10.32)

En utilisant les formules de l’annexe A nous obtenons le comportement asymptotiquede la partie radiale

u(0)k,m(r) � 1

π√

rcos

(kr − π

2|m| − π

4

)∝ 1√

re−ikr +

1√

rei(kr−π|m|− π

2 ) (10.33)

que nous interprétons comme la superposition d’une onde convergente et d’une ondedivergente.

Discutons la relation entre les deux bases d’états libres, {ψ(0)�k

(�r)} et {φk,m(�r)}. Pour

cela nous introduisons une relation qui sera utile pour la suite. Écrivons l’onde planepour le vecteur �k = k�ux comme eikr cos θ =

∑m am eimθ. Les coefficients sont don-

nés par am =∫ 2π

0dθ2π e−imθ+ikr cos θ. Nous reconnaissons la représentation intégrale des

fonctions de Bessel, éq. (A.30),

ei�k·�r = eikr cos θ =∑m∈Z

im Jm(kr) eimθ. (10.34)

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Page 196: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

Une rotation nous permet de décomposer les ondes planes pour un �k ayant une direc-tion θk arbitraire sur les ondes « sphériques » (10.32) : il suffit de faire θ → θ − θk

dans (10.34).

10.4.2 Amplitude de diffusion et section efficace

Dans une expérience de collision, une particule d’impulsion ��k, qu’on choisira dansla direction �k = k�ux, est envoyée depuis l’infini sur une cible (figure 10.8) qui diffuseune onde sortante. Revenons un instant sur la situation unidimensionnelle : la fonc-tion d’onde (10.13) est décomposée en une onde indidente ψinc(x → −∞) � e+ikx etune onde sortante, de part et d’autre du potentiel diffuseur ψref(x → −∞) � re−ikx etψtrans(x → +∞) � te+ikx. Vu de l’infini, le potentiel agit comme une source à l’ori-gine répartissant le courant incident, + �kme

, dans les différentes directions de l’espace

(−|r|2 �kmeà gauche et |t|2 �kme

à droite). Revenons maintenant à la situation bidimen-sionnelle et écrivons la fonction d’onde, asymptotiquement libre, décrivant la mêmesituation :

ψ�k(�r) �r→∞

ei�k·�r︸︷︷︸incidente

+f (θ)√

reikr︸���︷︷���︸

diffusée

. (10.35)

Le second terme décrit une onde divergente émise depuis le centre diffuseur (commedans la situation 1D le diffuseur joue le rôle de source effective). Nous calculonsmaintenant le courant �Jψ = �

meIm

[ψ∗�k�∇ψ�k

]associé à cet état (utilisons �∇ = �ur

∂∂r +

1r�uθ

∂∂θ )

�Jψ(�r) � ��kme︸︷︷︸�Jinc

+��k ′

me

| f (θ)|2

r︸�������︷︷�������︸�Jdiff (�r)

+1√

rRe

⎡⎢⎢⎢⎢⎢⎣��k ′mef (θ) ei(�k ′−�k)·�r +

��kme

f (θ)∗ e−i(�k ′−�k)·�r⎤⎥⎥⎥⎥⎥⎦︸��������������������������������������������������������︷︷��������������������������������������������������������︸

�Jinterf (�r)

(10.36)

où nous avons posé �k ′def= k�ur pour désigner le vecteur d’onde des particules détectées

(le point �r = r�ur où nous calculons le courant correspond à la position du détecteur).Pour aboutir à cette expression, nous avons négligé tous les termes décroissant plusvite que 1/r à l’infini (puisque nous mesurons un flux à l’infini limr→∞ r

∫dθ|| �J||). Le

courant se décompose donc en trois contributions : la contribution associée à l’onde

incidente �Jinc =��kme

, la contribution associée à l’onde diffusée �Jdiff(�r) � �kme

1r | f (θ)|2�ur

et enfin une contribution oscillante décrivant l’interférence entre les deux ondes, dontnous discuterons plus tard le rôle et dont nous montrerons qu’elle n’est significativeque pour θ ∼ 0. La fonction f (θ) caractérisant la distribution angulaire de l’ondediffusée par la cible est appelée amplitude de diffusion. Elle permet donc de calculer

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Page 197: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.4. Diffusion dans la situation bidimensionnelle

la probabilité pour que la particule soit diffusée par la cible, donnée par le rapport ducourant total diffusé r

∫ +π−π dθ || �Jdiff || et du courant incident �Jinc. Cette quantité (qui a

la dimension d’une longueur en 2D) est appelée la section efficace totale

σdef= lim

r→∞

r∫ +π−π dθ || �Jdiff(�r)||

|| �Jinc ||=

∫ +π

−πdθ | f (θ)|2. (10.37)

Une autre quantité intéressante qui encode non seulement la probabilité pour quela particule soit diffusée, mais en plus la distribution angulaire du courant diffusé,est la section efficace différentielle ; elle mesure le rapport du courant de particulesdétectées dans un détecteur d’ouverture angulaire dθ placé à distance r de la cible(figure 10.8), r dθ || �Jdiff(�r)||, et de la densité de courant incident �Jinc (en sous entendantlimr→∞)

dσdθ

def=

courant mesuré dans la direction θdensité de courant incident

=r dθ || �Jdiff(�r)||

|| �Jinc||⇒ dσ

dθ= | f (θ)|2

(10.38)

a) Conservation du courant et théorème optique

À ce stade de la discussion la question de la conservation du courant n’est pas claire.

Le courant est uniquement injecté dans l’onde incidente, �Jinc =��kme

. Puisqu’une partie

de l’onde a été diffusée dans les différentes directions r∫

dθ �ur · �Jdiff(�r), cette contri-bution doit être nécessairement compensée par le dernier terme d’interférence afinde satisfaire la conservation du nombre de particules. Ainsi le flux total à travers uncercle de rayon r doit être nul :

r∫ +π

−πdθ �ur · �Jdiff(�r) + r

∫ +π

−πdθ �ur · �Jinterf (�r) = 0. (10.39)

Par définition le premier terme est donné par la section efficace totale r∫

dθ �ur · �Jdiff =�kmeσ. Étudions plus en détail le second terme, partant de (10.36). La présence des

termes oscillants e±i(�k ′−�k)·�r = e±i(1−cos θ)kr montre que l’intégrale angulaire est do-minée par les petits angles θ � 1/

√kr. C’est le premier point important : le terme

d’interférence n’apporte une contribution significative au flux de particules que dansle cas de la diffusion vers l’avant. On obtient (en utilisant l’approximation de la phasestationnaire, expliquée plus bas)

r∫

dθ �ur · �Jinterf � 2√

r�kme

Re

[f (0)

∫dθ ei(1−cos θ)kr

]�

kr→∞2�kme

Re

⎡⎢⎢⎢⎢⎢⎣√

2iπk

f (0)

⎤⎥⎥⎥⎥⎥⎦(10.40)©

Dun

od.L

aph

otoc

opie

non

auto

risé

ees

tun

délit

.

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Page 198: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

On vérifie que la contribution de la rétrodiffusion, θ ∼ π, qui est aussi un point station-naire de l’argument des exponentielles du terme d’interférence de (10.36), s’annule.En imposant la condition de conservation du courant, éq. (10.39), nous obtenons fi-nalement le théorème optique

σ = −Re

⎡⎢⎢⎢⎢⎢⎣√

8iπk

f (θ = 0)

⎤⎥⎥⎥⎥⎥⎦ (10.41)

qui exprime que le terme d’interférence, �Jinterf , apporte une contribution à la diffusionvers l’avant exactement opposée au courant total diffusée.

Approximation de la phase stationnaire. Considérons l’intégrale I(λ) def=∫ b

a dθ eiλf (θ) où la fonction f (θ) possède un unique extremum dans l’intervalle, enθ0 ∈ ]a, b[. Dans la limite λ→ ∞, l’ intégrale est dominée par le voisinage de θ0. On

déduit (intégrale gaussienne) I(λ→ ∞) �√

2π−iλf ′′(θ0) eiλf (θ0).

b) Approximation de Born

Appliquons l’approximation (10.31) pour obtenir une forme approchée de l’ampli-

tude de diffusion. Nous injectons l’état libre ψ(0)�k

(�r) = ei�k·�r dans (10.31) et obtenonsl’état (sortant) :

ψ+�k

(�r)(Born 1)� ei�k·�r +

∫d�r ′ G+0 (�r,�r ′; E) V(�r ′) ei�k·�r ′. (10.42)

Nous avons besoin de la fonction de Green retardée libre calculée dans l’annexe,éq. (10.67). Dans l’équation (10.42), si V(�r) a une portée r0, l’intégrale sur �r ′ estdominée par ||�r ′|| � r0. D’autre part, le point �r se trouve dans la région asymptotique,au niveau du détecteur : ||�r|| � ||�r ′|| ∼ r0. Nous pouvons donc utiliser le développe-ment limité ||�r − �r ′|| = r − �ur · �r ′ + O(r′2/r) où �ur

def= �r/r. En insérant cette expression

dans (10.42) nous obtenons∫d�r ′ G+0 (�r,�r ′; E) V(�r ′) ei�k·�r ′ �

r→∞

me

�2i√

2iπkreikr

∫d�r ′ V(�r ′) ei(�k−k�ur)·�r ′ . (10.43)

En introduisant la notation �k ′def= k�ur pour désigner le vecteur d’onde des particules

détectées, nous identifions l’expression approchée de l’amplitude de diffusion, quenous notons plus suggestivement f (�k ′,�k) ≡ f (θ)

f (�k ′,�k)(Born 1)� me

�2i√

2iπkV(�k ′ − �k) (10.44)

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Page 199: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.4. Diffusion dans la situation bidimensionnelle

où V(�q) =∫

d�r V(�r) e−i�q·�r est la transformée de Fourier du potentiel (notons queme�2 V(�q) est sans dimension en 2D). f (�k ′,�k) est proportionnelle à l’amplitude de pro-

babilité pour que l’onde incidente d’impulsion ��k soit diffusée dans un état d’impul-sion ��k ′.

• Validité de l’approximation

L’équation (10.42) est le début d’un développement perturbatif de la fonction d’ondeen puissances du potentiel, que nous écrivons ψ�k(�r) = ψ(0)(�r) + ψ(1)(�r) + O(V2). Lavalidité de l’approximation suppose donc que |ψ(1)(�r)| � |ψ(0)(�r)|. L’examen du termed’ordre 1 décrivant la diffusion laisse penser que celui-ci est maximum à l’origine,puisque la fonction de Green décroît à grande distance. Nous prendrons donc comme

critère de validité de l’approximation de Born d’ordre 1 : |ψ(1)(0)| � 1 . Supposons

que le potentiel ait une portée r0 et une amplitude V0. L’estimation du terme ψ(1)(0) =∫d�r ′ G+0 (0,�r ′) V(�r ′) ei�k·�r ′ requiert de considérer deux cas limites.Si kr0 � 1 (particule faiblement énergétique) l’intégrale fait intervenir essentiel-

lement le comportement de la fonction de Green à l’origine, donné par (10.67) etl’éq. (A.35) de l’annexe A. Le critère adopté prend la forme V0 � �2

mer20

1| ln(kr0)| . À V0

et r0 fixés, cette inégalité sera donc nécessairement violée en allant vers les bassesénergies.

Si kr0 � 1 (particule très énergétique), l’analyse de l’intégrale, qui fait alors in-tervenir le comportement de la fonction de Green pour kr′ � 1, est plus délicateet conduit à V0 � �2k

mer0. Cette condition peut toujours être satisfaite à condition de

considérer des énergies suffisamment élevées.

10.4.3 Diffusion par un potentiel radial – ondes partielleset déphasages

a) Relation entre les déphasages et la section efficace

L’analyse de la situation 1D a montré que les déphasages sont associés aux ondespartielles, i.e. aux états propres de la matrice S . Dans la situation invariante parrotation que nous considérons dans ce paragraphe, ces états propres sont des étatssymétriques sous les rotations (rappelons nous que les états propres de S sont aussides états propres de l’hamiltonien). Pour le potentiel radial, Les ondes partielles sontdonc les états propres de H et de �z, que nous notons Ψk,m(�r) = uk,m(r) eimθ.

La partie radiale de la fonction d’onde est solution de l’équation différentielle(− d2

dr2− 1

rddr+

m2

r2+

2me

�2V(r)

)uk,m(r) = k2 uk,m(r) (10.45)

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Page 200: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

(ne pas confondre la masse, notée ici me, avec le moment orbital m !)Si le potentiel décroît suffisamment vite, la solution se comporte asymptotique-

ment comme

uk,m(r → ∞) � 1√

rcos

(kr − π

2|m| + ηm(E) − π

4

)(10.46)

où le déphasage ηm(E) de l’onde partielle est mesuré relativement au comportementde la solution libre (10.33) (i.e. ηm = 0 si V(r) = 0) : la présence du potentiel induitun déphasage supplémentaire 2ηm entre l’onde partielle convergente 1√

re−ikr et l’onde

divergente 1√re+ikr+2iηm .

Nous pouvons identifier le comportement asymptotique de l’état stationnaire dediffusion avec sa décomposition sur les ondes partielles

ψ�k(�r) =∑

m

cm Ψk,m(�r) =∑

m

cm uk,m(r) eimθ �r→∞

eikr cos θ +f (θ)√

reikr. (10.47)

Les coefficient cm sont obtenus en imposant que∑

m cm uk,m(r) eimθ − eikr cos θ soitune onde sortante, ∝ 1√

reikr. En utilisant la relation (10.34), nous obtenons cm =√

2πk imeiηm . Nous déduisons l’expression de l’amplitude de diffusion et de la section

efficace totale en terme des déphasages :

f (θ) =1

√2iπk

∑m∈Z

(e2iηm(E) − 1

)eimθ (10.48)

et, en intégrant dans toutes les directions σ =∫ +π−π dθ| f (θ)|2,

σ =4k

∑m∈Z

sin2 ηm(E) (10.49)

On peut vérifier que (10.48) et (10.49) vérifient le théorème optique (10.41).

b) Intérêt de l’analyse en termes des déphasages

L’intérêt de l’analyse en déphasages est qu’en pratique la section efficace pour unpotentiel de portée finie r0 ne fait seulement intervenir qu’un nombre fini de dé-phasages (autrement dit ceux-ci décroissent avec m). Pour le comprendre, revenonssur l’équation différentielle satisfaite par la partie radiale uk,m(r) de l’onde partielle.L’analyse du comportement pour r → 0 montre que la fonction se comporte commeuk,m(r) ∼ r|m|, i.e. plus le moment cinétique augmente, moins la solution est sen-sible à la présence du potentiel. En remarquant que la position du premier maxi-mum de la fonction de Bessel Jν→∞(z) se comporte comme zmax ∼

√ν, nous dé-

duisons que lorsque√|m| � kr0, la solution radiale coïncide avec la solution libre

190

Page 201: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.4. Diffusion dans la situation bidimensionnelle

uk,m(r) � Jm(kr) et le déphasage est nul. Autrement dit, à une énergie E = �2k2

2me, seuls

les déphasages ηm(E) tels que |m| � Mmax ∼ (kr0)2 contribuent significativement àl’amplitude de diffusion.

Dans la limite de basse énergie E → 0, plus précisément kr0 � 1, la diffu-sion ne sonde que les propriétés de grande échelle du potentiel et la diffusion estbien caractérisée uniquement par l’onde s (le terme de moment orbital m = 0).Dans ce cas la diffusion est isotrope, i.e. l’amplitude de diffusion indépendante del’angle, f (θ) �

k→0

1√2iπk

(e2iη0(E) − 1

). On montre sur un exemple dans l’exercice 10.11

que le comportement attendu génériquement pour le déphasage de basse énergie estη0(E → 0) ∼ 1/ ln(kr0) où r0 est la portée du potentiel, si bien que l’amplitude dediffusion diverge à basse énergie en deux dimensions (la diffusion par le potentieldevient très importante) :

f (θ) ∼k→0

1√

k ln(kr0)→ ∞ (10.50)

Ce comportement sera également obtenu dans le problème 10.3 sur l’analyse de ladiffusion sur un potentiel localisé. Ce résultat est à rapprocher de la discussion sur lavalidité du développement de Born, qui nous a montré que, quelle que soit l’ampli-tude du potentiel, la diffusion devient forte (non perturbative) en allant vers les bassesénergies.

Ceci est assez différent du cas tridimensionnel, qui sera discuté dans la sectionsuivante, pour lequel l’amplitude de diffusion sur un potentiel de portée finie tendvers une limite finie, éq. (10.58). Cette remarque illustre que l’effet de la diffusionsur un potentiel est renforcé aux basses dimensions.

L’analyse de la diffusion en terme des déphasages offre donc une manière d’étu-dier le problème efficacement dans la limite de basse énergie, complémentaire del’approche perturbative (approximation de Born) valable pour V0 → 0 et/ou k →∞.

c) Règle de somme de Krein-Friedel

La relation de Krein-Friedel a été démontrée plus haut dans la situation unidimen-sionnelle. Le résultat reste vrai dans chaque canal de diffusion, donc nous pouvonsécrire la version bidimensionnelle :

δρ(E) =1π

∑m∈Z

dηm(E)dE

=1

2iπd

dEln det S (E). (10.51)

La matrice S a maintenant une dimension infinie puisque le problème est caractérisépar une infinité de canaux de diffusion repérés par le moment orbital m ∈ Z.©D

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Page 202: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

10.5 DIFFUSION DANS LA SITUATIONTRIDIMENSIONNELLE

La situation tridimensionnelle est une variation du cas bidimensionnel (avec un de-gré de liberté supplémentaire). Cette situation est celle couramment décrite dans lesouvrages [33, 27, 8, 5], aussi serons nous beaucoup plus bref.

λ

x

y

z

détecteur

Figure 10.8– Diffusion d’uneonde plane par un potentiel

localisé à l’origine.

• Diffusion d’une particule par un potentiel – états stationnaires de dif-fusion et section efficace

Nous étudions l’état stationnaire de diffusion superposition d’une onde incidenteψinc(�r) = ei�k·�r (des particules d’impulsion ��k = �k�uz) et d’une onde diffusée parla cible supposée décrite par un potentiel concentré autour de l’origine :

ψ(�r) �r→∞

eikz +f (θ, φ)

reikr. (10.52)

L’amplitude de diffusion f (θ, φ) dépend maintenant de deux angles. Le flux de par-

ticules incidentes (le courant calculé à partir de l’onde incidente) est �Jinc =��km . À

grande distance, le flux diffusé est dominé par la contribution radiale du courant4�Jdiff � �km

�urr2 | f (θ, φ)|2. Nous introduisons la section efficace différentielle, mesurant le

rapport du courant de particules mesuré par un détecteur d’ouverture angulaire dΩ

divisé par le flux incident dσdΩdΩ

def=

|| �Jdiff ||r2dΩ|| �Jinc ||

. On obtient finalement

dσdΩ= | f (θ, φ)|2 (10.53)

Dans le cas tridimensionnel la section efficace a la dimension d’une surface (d’où ladénomination) ; elle mesure la probabilité pour que la particule soit diffusée dans ladirection (θ, φ). La section efficace totale, σ =

∫dΩ dσ

dΩ mesure la probabilité pourque la particule interagisse avec l’obstacle. Elle donne une estimation de la surface

4. En coordonnées sphériques �∇ = �ur∂r +�uθr ∂θ +

�uφr sin θ ∂φ.

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Page 203: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.5. Diffusion dans la situation tridimensionnelle

du faisceau interceptée par l’obstacle. Notons qu’elle peut diverger si le potentiel està longue portée, comme le potentiel coulombien.

Le théorème optique exprimant la conservation du courant relie section efficace etdiffusion vers l’avant (à θ = 0). Il prend la forme

σ =4πk

Im f (0, φ) (10.54)

• Approximation de Born

Nous pouvons reprendre l’analyse de l’amplitude de diffusion à l’approximation deBorn en suivant les lignes du cas bidimensionnel. Partant de (10.42), la fonction deGreen est donnée dans l’annexe, éq. (10.68). Nous obtenons l’amplitude de diffusionde Born :

f (�k ′,�k)(Born 1)� − me

2π�2V(�k ′ − �k) (10.55)

En suivant la discussion du cas 2D, la condition de validité de ce résultat estV0 � �2

mer20

si kr0 � 1 ; à la différence du cas bidimensionnel, la condition ne fait

pas intervenir l’énergie, et peut être satisfaite si l’amplitude du potentiel V0 et sa por-tée sont suffisamment petits. Dans la limite inverse kr0 � 1, on obtient une conditionsimilaire à celle obtenue dans le cas bidimensionnel V0 � �2k

mer0[27, 33, 5].

• Potentiel à symétrie sphérique – déphasages

Si le potentiel est à symétrie sphérique V(�r) → V(r), la symétrie par rotationdu potentiel n’est brisée dans l’équation de Schrödinger stationnaire qu’en impo-sant la direction �k = k�uz du faisceau de particules incidentes. La solution ne doitdonc dépendre que de r et θ, mais pas de φ pour respecter l’invariance par rota-tion résiduelle autour de l’axe �uz : la fonction d’onde se comporte asymptotique-ment comme ψ(r, θ) � eikz +

f (θ)r eikr. Les déphasages sont définis par l’analyse du

comportement asymptotique des ondes partielles Ψk,�,m(�r) = uk,�(r)Ym� (θ,ϕ) avec

uk,�(r → ∞) � 1r sin(kr − π

2� + η�). En suivant les lignes des calculs faits dans le casbidimensionnel, nous obtenons [27] :

f (θ) =1

2ik

∞∑�=0

(2� + 1)(e2iη�(E) − 1

)P�(cos θ) (10.56)

où P�(x) est un polynôme de Legendre. En utilisant∫

d(cos θ) P�(cos θ)P�′(cos θ) =2

2�+1δ�,�′ (tableau de l’annexe A), l’intégration angulaire nous donne la section effi-cace totale

σ =4π

k2

∞∑�=0

(2� + 1) sin2 η�(E). (10.57)

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Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

Le cas de la diffusion de basse énergie est également intéressant. L’amplitude dediffusion est isotrope, dominée par l’onde s. On peut montrer que, pour un potentielde portée finie, l’amplitude de diffusion tend vers une limite finie, appelée longueurde diffusion [27]

asdef= − lim

k→0f (θ) = − lim

k→0

η0

kd’où σ �

k→04πa2

s (10.58)

(la convention pour le signe est telle que as soit positive pour une sphère dure). Cerésultat montre que le faisceau est intercepté par une surface typique σ ∼ a2

s . Notonsque cette échelle peut être très différente de la dimension géométrique associée audiffuseur (portée de l’interaction) comme on le verra dans les exercices.

À retenir

Notions de déphasage, résonance (état quasi-lié), matrice S , amplitude de diffusion etsection efficace.

Les propriétés d’analyticité de la solution permettent d’établir des relations entre com-portement asymptotique des états de diffusion et densité d’états dans la région de diffu-sion, voire avec les états liés.

Pour en savoir plus

Les ouvrages [8, 30, 5] proposent des présentations pédagogiques (du cas 3D).

Des références plus avancés sont : les chapitres x et xix de [33] et le chapitre xviide [27].

ANNEXE 10.A : FONCTIONS DE GREEN

10.A.1 Opérateur d’évolution

Nous avons introduit dans les chapitres antérieurs l’opérateur d’évolution U(t)def=

e−i�

Ht (l’expression suppose un hamiltonien indépendant du temps). Nous introdui-sons les opérateurs

K+(t)def= − i�θ(t) e−

i�

Ht et K−(t)def=

i�θ(−t) e−

i�

Ht (10.59)

décrivant l’évolution vers le futur ou vers le passé (bien sûr, les particules ne se pro-pagent que vers le futur en pratique, cependant rien n’interdit, au niveau du forma-lisme, de considérer la propagation vers le passé). Nous vérifions sans peine que cesdeux opérateurs sont des fonctions de Green de l’équation de Schrödinger dépendantdu temps, i.e. (

i�∂

∂t− H

)K±(t) = δ(t). (10.60)

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Page 205: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

10.5. Diffusion dans la situation tridimensionnelle

Dans le cas du problème libre, H = 12m �p

2, on peut montrer facilement (c’est uneintégrale gaussienne) que l’expression des éléments de matrice de l’opérateur K+(t)est

K+(�r, t|�r0, 0)def= 〈�r |K+(t)|�r0 〉 = −

i�θ(t)

( m2iπ�t

)d/2exp

i m(�r − �r0)2

2�t, (10.61)

où d est la dimension. Au facteur − i�

près, cette fonction s’interprète comme l’ampli-tude de probabilité pour qu’une particule initialement en�r0 soit en�r après un temps t.Elle décrit donc la propagation de la particule vers le futur, d’où le nom de propaga-teur parfois donné à K+(�r, t|�r0, 0). Finalement remarquons que la phase coïncide avecl’action classique S class de la particule : le propagateur libre est de la forme eiS class/�.

10.A.2 Fonction de Green de l’équation de Schrödingerstationnaire

Nous introduisons l’opérateur résolvante G(z)def= [z − H]−1 de la variable complexe z.

Cet objet s’interpète comme la fonction de Green de l’équation de Schrödinger sta-tionnaire, pour une énergie complexe E → z : (z − H)G(z) = 1. En le sandwichantentre un bra et un ket nous obtenons la représentation spectrale de la résolvante :

G(�r,�r ′; z)def= 〈�r |G(z)|�r ′ 〉 =

∑n

ϕn(�r)ϕ∗n(�r ′)

z − En, (10.62)

où {En, ϕn(�r)} désigne le spectre de H. L’intérêt de cette quantité est explicite : ellecontient toute l’information sur le spectre de H de manière compacte, dans une fonc-tion de z et des positions. Si nous sommes capables de calculer cette fonction, alorsles valeurs propres de l’énergie correspondent aux pôles deG(�r,�r ′; z) ∝

z∼En

1z−En

, et les

fonctions d’onde aux résidus correspondants, Résidu [G(�r,�r ′; z); En] = ϕn(�r)ϕ∗n(�r ′).Lorsque le spectre est continu, la résolvante présente une coupure dans le plan com-plexe (ligne de discontinuité).

• Relation avec l’opérateur d’évolution

Nous pouvons maintenant établir le lien entre les fonctions de Green de l’équationde Schrödinger en temps et l’opérateur résolvante. Pour cela nous utilisons quelquesrésultats de la théorie des distributions introduits dans l’annexe 2.B. Nous calculonssans difficulté les transformées de Fourier des deux propagateurs∫ +∞

−∞dt e

i�

Et K±(t) =1

E − H ± i0+= G(E ± i0+), (10.63)

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Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

où nous avons introduit la notation (2.72). Nous définissons les fonctions de Greenretardée (+) et avancée (−) :

G±(E)def= G(E ± i0+). (10.64)

On peut facilement vérifier que ces deux opérateurs correspondent à deux fonc-tions de Green particulières de l’équation de Schrödinger stationnaire

[E + �

2

2mΔ −V(r)

]G±(�r,�r ′; E) = δ(�r − �r ′) où G±(�r,�r ′; E)

def= 〈�r |G±(E)|�r ′ 〉. Puisque nous avons

vu que K+(�r, t|�r ′, 0) décrit l’amplitude de probabilité pour qu’une particule injectéeen�r ′ se propage dans le futur jusqu’en�r en un temps t, nous interprétons G+(�r,�r ′; E)comme l’amplitude de probabilité pour que la particule injectée en �r ′ avec une éner-gie E se propage jusqu’en �r, d’où le nom de fonction de Green retardée. A contrarionous avons vu que K−(�r, t|�r ′, 0) décrit la propagation vers le passé, ce que nous as-socions à une fonction de Green avancée G−(�r,�r ′; E).

• Fonction de Green libre

Le calcul explicite de la fonction de Green libre se fait en développant la fonction deGreen sur le spectre des ondes planes :

G±0 (�r,�r ′; E) =

∫d�q

(2π)d

ei�q·(�r−�r ′)

E − �2�q2

2m ± i0+. (10.65)

En dimension d = 1 et 3 le calcul ne présente pas de difficulté, et peut être mené àl’aide du théorème des résidus (il est alors plus simple de commencer par le cas oùE < 0 puis de prolonger analytiquement le résultat, comme cela est proposé dansl’exercice 10.7). Le cas bidimensionnel est plus délicat et conduit à une fonction deHankel (Bessel de troisième espèce, cf. annexe A). Nous obtenons :

En d = 1 : G+0 (x, x′; E) =me

i�2keik|x−x′ | (10.66)

En d = 2 : G+0 (�r,�r ′; E) =me

2i�2H(1)

0 (kR) �R→∞

me

�2i√

2iπkReikR (10.67)

En d = 3 : G+0 (�r,�r ′; E) = − me

2π�2ReikR (10.68)

où l’on a posé Rdef= ||�r − �r ′|| et E

def= �

2k2

2m .

• Densité d’états

La densité d’états, notée ρ(E) est une fonction permettant le comptage des états quan-tiques : ρ(E)dE

def=# d’états ∈ [E, E + dE[. Autrement dit nous pouvons écrire :

ρ(E) =∑

n

δ(E − En) (10.69)

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Page 207: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

où la somme porte sur tous les états (et non les niveaux d’énergie). En utilisant δ(E −En) = 1

2iπ

( 1E−En−i0+ −

1E−En+i0+

), nous constatons qu’elle est reliée à la fonction de

Green par

ρ(E) = ∓1π

∫d�r Im

[G±(�r,�r; E)

]= ∓1

πIm Tr

{G±(E)

}. (10.70)

Il est parfois commode de considérer la densité d’états locale

ρ(�r; E) =∑

n

|ϕn(�r)|2δ(E − En). (10.71)

Les deux quantités sont reliées l’une à l’autre par∫

d�r ρ(�r; E) = ρ(E).

Exercice 10.5 (F) Calculer la densité d’états par unité de volume dans le cas librepour les dimensions d = 1, 2 et 3.

Exercices

10.6 (D) Fonction de Green de l’équation de Schrödinger 1D

On considère l’équation de Schrödinger unidimensionnelle Hψ(x) = Eψ(x) oùH = − d2

dx2 + V(x) (nous fixons �2/(2m) = 1 pour alléger).

a) Vérifier que la fonction de Green obéit à l’équation différentielle

(z − H)G(x, x′; z) = δ(x − x′).

En déduire une condition de raccordement : dG(x,x′)dx

∣∣∣x=x′+

− dG(x,x′)dx

∣∣∣x=x′− = ?

b) Supposons que E n’appartient pas au spectre de H (par exemple dans le cas duproblème libre on se place à énergie E < 0). Dans ce cas l’équation différen-tielle (E − H) f (x) = 0 admet deux solutions indépendantes non normalisables.Nous notons f±(x) les solutions de l’équation différentielle décroissant à l’infini :f±(x → ±∞) = 0 et W = W[ f+, f−] = f+ f ′− − f ′+ f− le wronskien de ces deuxsolutions. Montrer que W est indépendant de x.

c) Montrer que la fonction de Green est donnée par

G(x, x′; E) = − 1W

f+(x>) f−(x<) (10.72)

où x>def= max (x, x′) et x<

def= min (x, x′).

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Page 208: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

10.7 (D) Fonction de Green libre 1D

Nous appliquons le résultat de l’exercice précédent au cas du problème libre.

a) Donner les deux fonctions f±(x). Déduire que la fonction de Green libre est

G0(x, x′; E) = − 1

2√−E

e−√−E|x−x′ | pour E ∈ R−. (10.73)

b) Lorsque E ∈ R+, i.e. lorsque E appartient au spectre de l’opérateur, la fonctionde Green présente une singularité (une coupure, i.e. une ligne de discontinuité).Exprimer la fonction de Green juste au-dessus et juste au-dessous de la coupureG0(x, x′; E ± i0+).

c) Calculer la discontinuité G0(x, x′; E − i0+) − G0(x, x′; E + i0+). Plus difficile :interpréter le résultat.

10.8 (MF) Fonction de Green pour une impureté δ

Nous déterminons la fonction de Green de l’hamiltonien H = H0 + V , où H0 estl’hamiltonien libre et V décrit une impureté localisée, i.e. V(r) = λ δ(r) (oublions lesflèches sur les vecteurs). Écrire l’équation de Dyson G = G0 +G0VG en représenta-tion d’espace, i.e. pour G(r, r′). Déduire que

G(r, r′) = G0(r, r′) +G0(r, 0)1

1/λ −G0(0, 0)G0(0, r′) (10.74)

Remarque

Ce résultat est de portée générale : sa démonstration n’a utilisé aucune hypothèsesur H0. En particulier il s’appliquerait en présence de degrés de liberté internescomme dans une théorie relativiste (G serait une matrice ainsi que λ).

10.9 (MF) États de diffusion et matrice T pour une impureté δ

En reprenant le résultat de l’exercice 10.8, donner l’expression de l’état stationnaireet de la matrice T pour une impureté δ. Comparer l’expression de l’etat stationnaireavec le résultat de l’approximation de Born d’ordre 1.

10.10 (MF) Diffusion sur un potentiel sphérique dans l’approximation deBorn

On considère le potentiel (en 3D) V(r) = V0 pour r < r0 et V(r) = 0 sinon. Calculerl’amplitude de diffusion dans l’approximation de Born d’ordre 1. Discuter la limitede basse énergie.

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Page 209: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problèmes

10.11 (D) Diffusion par une sphère dure en 2D : déphasages

Nous étudions les déphasages décrivant la diffusion sur une sphère dure en 2D :V(r < r0) = ∞ et V(r > r0) = 0.

a) La solution générale de l’équation différentielle (10.45) pour r > r0 peut êtreécrite comme une combinaison linéaire de fonctions de Bessel : uk,m(r) =A Jm(kr) + B Nm(kr) (cf. annexe A). Quelle valeur de A/B satisfait les conditionsaux limites ?

b) En déduire que le déphasage est donné par tan ηm(E) = Jm(kr0)Nm(kr0) .

c) En utilisant les formules de l’annexe A, montrer que ηm�0(E → 0) ∼ (kr0)2|m| etη0(E → 0) � π

2 ln−1(kr0/2).

10.12 (MF) Diffusion de basse énergie par une sphère dure en 3D

Nous considérons la diffusion par un potentiel V(r < r0) = ∞ et V(r > r0) = 0 en 3D,dans la limite de basse énergie kr0 � 1. On peut dans ce cas se limiter à l’onde s.Calculer explicitement l’onde partielle. Déduire la longueur de diffusion.

10.13 (MF) Diffusion de basse énergie en 3D

Nous nous intéressons à la diffusion de basse énergie dans la situationtridimensionnelle.

a) Montrer que dans la limite de basse énergie E → 0, le théorème optique (10.54)conduit à la relation Im[1/ f ] � −k.

b) On peut déduire de la relation précédente que l’amplitude de diffusion est de laforme f � − 1

κ+ik . Interpréter physiquement le paramètre κ (en particulier sonsigne). Établir la relation avec le déphasage dans l’onde s.

c) Quel est l’ordre de grandeur de la section efficace totale lorsque k ∼ κ ? Quelle estla relation entre ce résultat et la portée du potentiel ?

Problèmes

10.1 Résistance d’un fil quantique unidimensionnel

Nous étudions la résistance électrique d’une barrière de potentiel en considérant unesituation strictement unidimensionnelle.

1) Préliminaire : normalisation des ondes planes. Au lieu de repérer les ondesplanes par le vecteur d’onde k, nous choisissons de les indicer par l’énergie

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Page 210: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

E = �2k2/(2m) et la direction de propagation σ = ± =sign(k) : ϕE,σ(x) (atten-tion à ne pas confondre σ = ± avec l’indice introduit dans le cours repérant lesétats entrants/sortants ; le problème considère uniquement des états sortants). Calcu-ler la constante de normalisation correspondant à la condition d’orthonormalisation〈ϕE,σ |ϕE′,σ′ 〉 = δσ,σ′ δ(E − E′) (cf. sections 2.2.1 et 3.2).

Dans toute la suite du problème, nous étudions la transmission à travers une barrièrede potentiel dans la situation unidimensionnelle : H = − �2

2md2

dx2 + V(x). Le potentielest tel que V(x → ±∞) = 0.

Le problème de diffusion est décrit par deux états stationnaires (10.13) et (10.14)(ceux-ci ne sont pas normalisés). Nous notons ϕE,+(x) = Nψ+G(x; E) et ϕE,−(x) =Nψ+D(x; E) les états normalisés. Nous admettons que la constante de normalisationN de ces états est la même que celle des états du problème libre (question 1)5.

2) Courants de probabilité. Nous notons JE,σ(x) le courant de probabilité associé àϕE,σ(x).

a) Calculer le courant de probabilité JE,±(x) pour x → −∞ puis pour x → +∞.Quelle relation pouvez-vous déduire entre |r| et |t| ? Puis entre |t′| et |r′| ?

b) Wronskien. Soient f1(x) et f2(x) deux solutions linéairement indépendantes del’équation de Schrödinger stationnaire H f1,2(x) = E f1,2(x) pour une même éner-

gie E. Montrer que le wronskien W[ f1; f2]def= f1(x) d f2(x)

dx − d f1(x)dx f2(x) est constant

sur R.

c) Relation entre t et t′. Calculer le Wronskien W[ϕE,−;ϕE,+] pour x → −∞ puispour x → +∞. En déduire une relation entre t et t′.

3) Résistance de Landauer. Nous considérons un fil quantique unidimensionnel sé-parant deux gaz d’électrons. Ces derniers jouent le rôle de deux réservoirs d’électronsdont les énergies de Fermi sont EF et EF + qe V , où qe est la charge de l’électron. Ladifférence entre les énergies de Fermi est ajustée en appliquant une tension V auxbornes du fil (cf. figure 10.9). Nous admettons que le courant dans le fil est donné par(pour une justification, cf. [11])

I(V) = qe

(∫ EF+qeV

0dE JE,+ +

∫ EF

0dE JE,−

). (10.75)

Cette expression décrit l’injection d’électrons depuis la gauche (resp. la droite) danstous les états ϕE,+(x) (resp. ϕE,−(x)) de [0, EF + qeV] (resp. [0, EF]). Le choix denormalisation fait plus haut nous assure que la sommation des courants doit être ef-fectuée avec la mesure dE.

5. La relation (10.24) nous prouve que c’est bien le cas.

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Page 211: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problèmes

Fil quantique e2 /h)

Con

duct

ance

8

q (

−1.0 −0.8 −0.6(Volts)Vg

0

2

4

6

Figure 10.9– Constriction traversée par un courant électronique.Constriction realisée dans un gaz d’électrons bidimensionnel à l’interface de deux semi-conducteurs. Si la constriction est suffisamment fermée, ce qui est le cas en appliquantune tension Vg assez négative sur les grilles latérales, elle se comporte comme un fil uni-dimensionnel. À droite : Conductance (inverse de la résistance) d’une telle constrictionen fonction de la tension Vg (« gate voltage ») ; données tirées de M. A. Topinka et al.,Nature 410, 183 (2001) (expérience de la couverture du livre).

a) Exprimer I(V) en fonction des coefficients de transmission.

b) On s’intéresse au régime linéaire I(V → 0) � V /R. Montrer que la résistanceélectrique est donnée par

1/R =q2

e

h|t(EF)|2. (10.76)

c) On note RK la valeur de la résistance pour un fil parfait (sans barrière de poten-tiel), appelée constante de von Klitzing. Si on prend en compte la dégénérescencede spin des électrons, le courant est doublé et le quantum de résistance qui inter-vient est RK/2.Commenter le résultat expérimental (cf. partie droite de la figure 10.9).

10.2 Temps de Wigner et capacité quantique

En étudiant un problème de diffusion unidimensionnel, nous montrons que le dépha-sage η(E), plus précisément sa dérivée par rapport à l’énergie τ(E)

def= 2�dη(E)

dE , est di-rectement relié à une quantité mesurable dans de petites structures conductrices de di-mensions microscopiques à basse température : la capacité quantique (figure 10.11).

Nous considérons l’équation de Schrödinger sur R+(− �

2

2md2

dx2+ V(x)

)ψk(x) = Ek ψk(x) avec Ek =

�2k2

2m(10.77)

(pour k > 0) où le potentiel est nul pour x > L (figure 10.10). Le potentiel est totale-ment réfléchissant à l’origine : ψk(0) = 0.

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Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

é

Figure 10.10– Diffusion sur une ligne semi infinie.

Deux exemples de potentiels.

1) Rappeler pourquoi la solution prend « asymptotiquement » la forme

ψk(x > L) = e−ik(x−L) + eik(x−L)+2iη(Ek ) pour η ∈ R. (10.78)

2) Temps de Wigner. On définit le temps de Wigner par

τ(E)def= 2�

dη(E)dE

. (10.79)

Nous cherchons une interprétation physique de τ(E). Pour cela, considérons un pa-quet d’ondes, i.e. une combinaison linéaire d’états stationnaires solutions de (10.77) :

Φ(x, t) =∫ ∞

0dk g(k − k0)ψk(x) e−iEkt/� (10.80)

où la fonction g(k−k0) est une fonction « étroite » centrée sur k0 et de largeur δk � k0.

a) Pour x > L, on peut séparer Φ(x, t) en une partie incidente et une partie réfléchieΦ(x, t) = Φinc(x, t)+Φref(x, t). Que peut-on dire de la largeur spatiale de Φinc(x, t)et Φref(x, t) ?

b) Par un développement au voisinage de k0 montrer que τ(E) s’interprète commeun retard du paquet d’ondes réfléchi d’énergie ∼ E, dû au temps passé dans larégion [0, L] d’interaction.

3) Illustrations. Nous calculons le temps de Wigner dans différentes situations.

a) Tout d’abord si V(x) = ∞ sur [0, L] (et toujours nul pour x > L).

b) Si V(x) = 0 sur [0, L].

c) Enfin nous supposons que le potentiel est tel qu’existent des états quasi-liés (ré-sonants). Au voisinage d’une résonance le déphasage présente le comportementgénérique de Breit-Wigner

e2iη(E) �E∼En

E − En − i�Γn/2E − En + i�Γn/2

. (10.81)

Calculer le τ(E) correspondant et tracer soigneusement la courbe. Préciser la va-leur de τ(En). Intégrer l’expression obtenue 1

∫ +∞−∞ dE τ(E).

202

Page 213: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problèmes

4) Relation de Krein-Friedel et capacité quantique. Nous avons vu dans le coursque le déphasage fournit une mesure de la densité d’états de la région [0, L].

a) Discuter la relation avec le 3.c. Déduire la relation entre τ(E) et la densité d’états.

b) Nous considérons la petite structure conductrice représentée sur la figure 10.11 :une cavité de dimension microscopique est réalisée dans un gaz d’électrons bi-dimensionnel. L’énergie des N électrons de la cavité peut être décomposée en

énergie de Fermi et énergie électrostatique : Etot =1

2ρ(εF ) N2+q2

e2Cgeo

N2 où ρ(εF) estla densité d’états et Cgeo la capacité « géométrique » (du problème d’électrosta-tique) ; qe est la charge de l’électron. Ceci explique que le terme de densité d’états(donc le temps de Wigner) peut être interprété comme une contribution quantique

à la capacité Cq =q2

e2π�τ(εF ), en série de la capacité géométrique. La capacité totale

est notée 1/Cμ = 1/Cq + 1/Cgeo ⇒ Etot = (qeN)2/2Cμ. Dans l’expérience on me-sure l’impédance dynamique du dispositif ; sa partie imaginaire est directementproportionnelle à la capacité Cμ. La tension de grille VG appliquée au niveau dela constriction ferme la cavité (donc agit sur la largeur des résonances) et modifiel’énergie de Fermi : la relation entre les deux est donnée par |qe|VG = A εF + csteoù A � 100 est un rapport de capacités. On peut voir que la largeur des pics est del’ordre de ΔVG ≈ 1 mVolt. En déduire la valeur du temps de Wigner au sommetdes pics et interpréter physiquement cette valeur. Comparer ce temps au tempstypique passé dans la cavité (la vitesse des électrons est vF � 0.3 106 m/s).

= 1fFCμ

)( h

/qe2

)

8

G (Volts)

Im( Z

2

4

6

V−0.85 −0.84 −0.83

Figure 10.11– Capacité quantique.

À gauche : Vue d’artiste de la cavité quantique réalisée dans un gaz d’électrons bidimen-sionnel (électrons piégés à une interface de GaAs/GaxAl1−xAs). La cavité (le domaine sousla grille) est fermée à l’aide d’une constriction contrôlée par la tension de grille VG . Unetension alternative est appliquée entre les deux fils de contact visibles aux deux extré-mités du système. © D. Darson (LPA, ENS). À droite : Mesure de la partie imaginaire del’impédance, donnant la capacité « mésoscopique » Cμ, à une température de T = 30 mK.Données tirées de : J. Gabelli, G. Fève, J.-M. Berroir, B. Plaçais, A. Cavanna, B. Etienne,Y. Jin & C. Glattli, Violation of Kirchhoff’s laws for a coherent RC circuit, Science 313, 499(2006).

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Page 214: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

10.3 Interaction ponctuelle en dimension d � 2

Nous étudions le problème d’une impureté localisée en dimension d � 2. Nous se-rions tentés de généraliser le calcul unidimensionnel et de reprendre l’analyse pourun potentiel V(�r) = �2λ

2meδ(�r), cependant nous serions confronté à une difficulté : la

formule, éq. (10.74), donnant la fonction de Green en présence d’une impureté δ faitapparaître un G0(�0,�0) au dénominateur. Or G0(�0,�0) = ∞ en dimension d � 2, cequi conduit au résultat trivial que le potentiel n’a aucun effet sur l’onde ! Soulignonsqu’en considérant un potentiel V(�r) = �2λ

2meδ(�r), nous avons en tête de modéliser le

problème physique d’une impureté générant un potentiel de courte portée (dans unvrai problème physique le potentiel aurait une portée petite mais finie : par exempleune impureté dans un réseau cristallin est responsable d’un potentiel ayant une portéeau moins égale au pas du réseau ; l’interaction écrantée entre électrons d’un métal a laportée de la longueur d’écran, de l’ordre de quelques Å dans les bons métaux, commel’argent). C’est la modélisation du problème physique de l’impureté localisée qui estici en question. Deux approches (donnant le même résultat) sont possibles.

Approche 1 : Pseudo-potentiel (cas 3D)

La première approche, proposée par Fermi en 1936, consiste à remplacer la distribu-tion δ(�r) en 3D par une autre distribution localisée ne posant pas de problème. Nousintroduisons

δ(�r)def= δ(�r)

∂rr. (10.82)

1) Calculer l’action de δ sur une fonction régulière (finie) à l’origine.

2) Nous introduisons une fonction ψ(�r) divergeant comme 1/r à l’origine, et contenantune partie régulière : ψ(�r) = ψreg(�r) + A

r . Montrer que

δ(�r)ψ(�r) = ψreg(�0) δ(�r). (10.83)

3) Nous étudions la diffusion sur un tel potentiel (fixons �2/(2m) = 1 pour simplifier)

H = −Δ + λ δ(�r). (10.84)

Calculer Δψ(�r) (on rappelle que Δ1r = −4πδ(�r), cf. annexe 2.B). Montrer que l’état

stationnaire

ψ�k(�r) = ei�k·�r +fr

eikr (10.85)

est solution de l’équation de Schrödinger stationnaire et déduire l’amplitude de dif-fusion f . Commenter la limite k → 0.

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Page 215: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problèmes

Approche 2 : Renormalisation du poids de l’impureté(cas 3D)

Reprendre le raisonnement suivi en d = 1 pose un problème provenant de la diver-gence de la fonction de Green à points coïncidants :

G+0 (�r0, 0) =r0→0

− 14πr0

− ik4π+ O(r0). (10.86)

Le point de départ de la procédure de renormalisation consiste à remplacer G+0 (0, 0)par G+0 (�r0, 0) dans l’équation (10.74). Cette substitution trouve sa justification phy-sique dans la remarque que l’équation intégrale pour la fonction de Green (équationde Dyson discutée dans la section 10.3 ou l’exercice 10.8) fait intervenir des inté-grales du type

∫dr V(r) G+0 (r, 0). Si le potentiel a une portée finie r0, l’intégration

moyenne le comportement divergent de la fonction de Green sur une échelle typiquer0. La deuxième étape consiste à absorber la divergence de G+0 (r0, 0) en « renormali-sant » le poids de l’impureté :

1λ−G+0 (0, 0)

regularisation−→ 1

λ−G+0 (r0, 0) � 1

λ+

14πr0

+ik4π=

1λR+

ik4π

(10.87)

où on a introduit le poids « renormalisé » 1λR

def= 1

λ +1

4πr0. La limite r0 → 0 et λ → 0−

est donc bien définie (en revanche la limite λ → 0+ conduit à un résultat trivial :f = 0). Notons que si nous n’obtenons un résultat non trivial que pour λ < 0, lesigne du poids renormalisé λR est arbitraire. La philosophie derrière cette procédureest la suivante : l’équation de Schrödinger pour V(�r) = λ δ(�r) est un problème maldéfini. On régularise la divergence de

∫dr V(r) G+0 (r, 0) en introduisant le régulateur

r0 → 0. On peut donner un sens au calcul en absorbant la divergence dans le pa-ramètre « nu » λ (non physique) de la théorie de départ. Les résultats physiques nedépendent que du paramètre renormalisé λR (physique).

4) Calculer l’amplitude de diffusion f en utilisant la procédure de renormalisation.Montrer que l’on obtient le même résultat qu’avec le pseudo-potentiel.

Cas bidimensionnel

Dans la situation bidimensionnelle la fonction de Green présente une divergence lo-garithmique d’après l’équation (10.67)

G+0 (r0, 0) �r0→0

12π

ln kr0 −i4. (10.88)

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Page 216: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 10 • Introduction à la théorie des collisions

La procédure de renormalisation conduit à introduire le poids renormalisé 1λR=

1λ −

12π ln(a/r0) où a est une échelle arbitraire5.

5) Calculer l’amplitude de diffusion renormalisée. Analyser le comportement debasse énergie. Comparer avec le résultat 3D.

État lié du potentiel δ en dimension arbitraire

Le sens du paramètre λR introduit par la procédure de renormalisation n’est pas clair.Nous montrons qu’il peut être relié à une grandeur physique.

6) En vous aidant du résultat de l’exercice 10.9, discuter l’existence d’état lié du po-tentiel δ pour les différentes dimensions (pour les dimensions 2 et 3 on utilisera lesrésultats donnés ci-dessus par la procédure de renormalisation).

5. Le cas bidimensionnel est particulier cas le poids de l’impureté est adimensionné (en général onvérifiera que [λ] = Ld−2). La procédure de renormalisation qui élimine une échelle, r0 → 0, doit doncintroduire une nouvelle échelle « physique », ici a.

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Page 217: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

PARTICULESIDENTIQUES ET

PERMUTATIONS –POSTULATS (4)

11

Jusqu’à présent, nous avons essentiellement rencontré des problèmes à une particule.Nous discutons dans ce chapitre comment traiter les problèmes quantiques faisantintervenir plusieurs particules identiques, i.e. des particules ayant les mêmes carac-téristiques intrinsèques (masse, charge électrique, spin, etc.), comme par exempleplusieurs électrons.

Classique :

1 2

θ

2

π − θ

1

θ

21 ?

Quantique:

λ

Figure 11.1– Collision de deux particules identiques.Les deux particules identiques sont détectées par deux appareils. Classiquement il estpossible, au moins en principe, de suivre les trajectoires et de distinguer les deux confi-gurations ; quantiquement le problème est décrit par une fonction d’onde et il n’y a pasde sens à distinguer les deux situations.

Afin de comprendre l’origine de la difficulté posée par le traitement quantique d’untel problème, nous analysons une expérience de collision à deux corps (figure 11.1) :deux particules en interaction sont envoyées l’une sur l’autre et sont détectées pardeux appareils. Dans le cadre de la mécanique classique, nous pouvons numéroter lesparticules par la pensée et suivre leurs trajectoires, du moins en principe. Les deuxsituations à gauche de la figure 11.1 correspondent à deux situations distinctes pourlesquelles chaque détecteur reçoit une particule. La notion classique de trajectoiredonne aux particules une individualité (discernabilité) de principe.

Quantiquement la situation est différente. L’état du système est décrit par une fonc-tion d’onde ψ(�r1,�r2), i.e. l’amplitude de probabilité pour observer une particule en �r1

et l’autre en �r2. Si les particules sont identifiées à un certain instant, rien ne per-met d’associer ultérieurement une particule donnée avec l’une des deux détectéesprécédemment. L’état quantique étant décrit par une fonction d’onde, les particules©D

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Page 218: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 11 • Particules identiques et permutations – Postulats (4)

perdent leur « individualité », ce qui conduit à postuler un principe d’indiscernabilité :les particules identiques sont indiscernables. Cette proposition a des conséquencesextrêmement importantes sur la nature des fonctions d’onde à plusieurs particulesidentiques, que nous examinons maintenant.

11.1 POSTULAT DE SYMÉTRISATION

Nous commencerons par analyser un problème à deux particules identiques dont lesétats quantiques appartiennent à deux espaces de Hilbert H1 et H2. Nous montre-rons que seule une partie des vecteurs de l’espace produit tensoriel H1 ⊗ H2 sontphysiquement acceptables.

11.1.1 Opérateur de permutation (d’échange)

Notons une fonction d’onde du système de deux particules ψ(ξ1, ξ2), où ξ regroupe lesnombres quantiques, ou « coordonnées », permettant de repérer l’état d’une particule.Par exemple pour une particule portant un spin, il peut s’agir de sa position et de sonétat de spin : ξ ≡ (�r,σ), où σ indexe les 2s+1 valeurs propres d’une des composantesdu spin. Nous introduisons l’opérateur de permutation (d’échange) P12 qui intervertitles deux particules :

ψ(ξ1, ξ2) −→ (P12ψ)(ξ1, ξ2) = ψ(ξ2, ξ1). (11.1)

En remarquant que (P12)2 = 1, nous déduisons que les valeurs propres de P12 sont±1 (+1 pour une fonction d’onde symétrique, ou plutôt « invariante », et −1 pour unefonction d’onde antisymétrique).

Le principe d’indiscernabilité des particules conduit à l’idée que ψ(ξ1, ξ2) etψ(ξ2, ξ1) doivent décrire la même situation physique. De plus, à cause du principede superposition, il ne suffit pas qu’un état particulier soit état propre de l’opéra-teur de permutation P12, mais que cette propriété reste vraie lorsqu’on considère descombinaisons linéaires d’états. Finalement, nous sommes conduits à postuler que lesétats physiques du problème à 2 particules sont, soit tous symétriques, soit tousantisymétriques sous l’échange. Cette observation conduit à la question : quel choixdevons-nous faire ?

11.1.2 Bosons/fermions

Les particules peuvent être classées en deux catégories suivant leur propriétés depermutabilité :

La fonction d’onde est symétrisée pour les particules appelées des bosons.

La fonction d’onde est antisymétrisée pour les particules appelées des fermions.

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Page 219: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

11.1. Postulat de symétrisation

Comment déterminer la nature bosonique/fermionique des particules ? C’est le ré-sultat d’un théorème démontré dans le cadre de la théorie quantique des champs,appelé théorème spin-statistique : les propriétés de permutabilité d’un ensemblede particules identiques dépendent de leur spin (entier ou demi-entier).

Les particules de spin entier sont des bosons.

Les particules de spin demi entier sont des fermions.

Faisons un rapide tour d’horizon du côté des particules élémentaires. On distinguedeux grandes familles : d’une part les hadrons, qui subissent les interactions forte,faible et électromagnétique s’ils portent une charge électrique, et d’autre part les lep-tons sensibles uniquement aux interactions électromagnétique et faible. Les hadronssont subdivisés en deux familles : les baryons (proton, neutron, Δ, Λ0, etc.) qui sontdes fermions, et les mésons (π, K, etc.) qui sont des bosons. Les hadrons sont consti-tués de quarks (u, d, s, c, t, b) et d’antiquarks. Les quarks sont des fermions de spins = 1/2. Les leptons (électron, νe, μ, νμ, τ, ντ) sont également des fermions de spins = 1/2. Enfin, en plus de ces deux familles, les médiateurs des interactions (photonpour l’interation électromagnétique, bosons Z0 et W± pour l’interation faible, gluonspour l’interation forte) sont des bosons.

11.1.3 Particules élémentaires/particules composites

La notion d’élémentarité (d’une particule) est relative et dépend de notre degré deconnaissance : par exemple, au début du xxe siècle on pensait que le proton étaitune particule élémentaire alors qu’on le sait aujourd’hui constitué de quarks. Elledépend aussi de l’échelle d’énergie considérée : le physicien atomique qui sonde desénergies ∼eV peut légitimement considérer le noyau comme une particule sans degréde liberté interne (autre que la projection du spin), alors que le physicien nucléairesonde la structure interne du noyau à de hautes énergies (∼MeV) et le considèrecomme un état lié, éventuellement excité, de Z protons et A − Z neutrons. Lorsqueplusieurs particules sont liées par une interaction on peut considérer cette nouvelleentité comme une particule avec des degrés de liberté internes. Tant que les énergiesmises en jeu dans le problème restent petites devant l’énergie d’excitation des degrésde liberté internes, ceux-ci ne jouent aucun rôle.

Revenons à la question importante du spin des particules « élémentaires », ce quidéterminera leurs propriétés de permutabilité. Le moment cinétique d’une particulecomposite vient de la somme des spins (entiers ou demi-entiers) de ses constituantset comprend également une composante orbitale (entière) caractérisant la rotation deces derniers. D’après les résultats du chapitre 9 nous pouvons dire que :©D

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Page 220: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 11 • Particules identiques et permutations – Postulats (4)

• Plusieurs bosons liés forment un boson.

• Un nombre pair de fermions forment un boson.

• Un nombre impair de fermions forment un fermion.

Donnons quelques illustrations :

(i) Les mésons (π±, π0, K±, etc.), constitués d’une paire quark-antiquark, sont desbosons.

(ii) Les baryons (p, n, Δ, etc.), formés de 3 quarks, sont des fermions.

(iii) L’atome d’hydrogène (1H), un proton (s = 1/2) et un électron (s = 1/2), est unboson.

(iv) En revanche, le deutérium (2H), un isotope de l’hydrogène dont le noyau estconstitué d’un proton et d’un neutron (s = 1/2), est un fermion.

(v) L’hélium-4 (l’isotope 4He), formé de 2 neutrons, 2 protons et 2 électrons, est unboson.

(vi) L’hélium-3 (l’isotope 3He), plus rare, est un fermion.

(vii) L’atome d’argent (l’isotope 107Ag est présent naturellement à 52% et l’isotope109Ag à 48%). L’argent contient Z = 47 électrons. Son noyau est constitué de107 nucléons. L’atome d’argent est donc un boson.

Remarque sur l’argent : L’expérience de Stern et Gerlach (§ 8.2.3.c) montre un dé-doublement du faisceau d’atomes d’argent, ce qui pourrait laisser penser que ceux-ciportent un spin s = 1/2, en contradiction avec la remarque précédente. L’explica-tion vient de ce que le couplage du champ magnétique aux spins électroniques est∼ 1000 fois plus important que le couplage aux spins nucléaires (|γe| � γp, |γn|). Lecouplage des spins nucléaires ne se manifeste que sur de très petites échelles d’éner-gie, ce qui n’a pas d’incidence dans l’expérience de Stern et Gerlach (on en discuteraune conséquence dans la section 14.3).

11.1.4 Postulat de symétrisation pour 2 particulesidentiques

Le postulat s’énonce comme suit : toutes les fonctions d’onde de deux bosons iden-tiques sont symétriques sous l’échange.

ψbosons(ξ1, ξ2) = +ψbosons(ξ2, ξ1) ⇒ Hbosons =[H1 ⊗H2

]sym. (11.2)

Toutes les fonctions d’onde de deux fermions identiques sont antisymétriques :

ψfermions(ξ1, ξ2) = −ψfermions(ξ2, ξ1) ⇒ Hfermions =[H1 ⊗H2

]antiysm. (11.3)

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Page 221: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

11.1. Postulat de symétrisation

L’espace des états de deux bosons (respectivement deux fermions) est obtenu à partirde l’espace produit tensoriel H1 ⊗ H2 en retenant les états symétriques (respecti-vement antisymétriques). L’espace de Hilbert de particules indiscernables est doncune restriction, de l’espace produit tensoriel qui correspondrait à deux particules dis-cernables, ce que nous notons

[H1 ⊗ H2

]sym/antiysm. Le postulat de symétrisation

détermine la structure même de l’espace de Hilbert de plusieurs particules iden-tiques, notamment sa dimension (cf. exercice 11.2).

11.1.5 Généralisation pour N particules identiques

La généralisation au cas de N particules est élémentaire. L’état est caractérisé par unefonction d’onde à N particules : ψ(ξ1, ξ2, · · · , ξN). L’échange entre particules corres-pond à une permutation P des N indices : nous notons P(i) le résultat de la permuta-tion de l’indice i. Une permutation peut toujours être décomposée comme un produitde transpositions, chaque transposition correspondant à l’échange de deux particules(notons NP le nombre de transpositions nécessaires). Le postulat de symétrisationprend donc la forme :

ψ(ξP(1), ξP(2), · · · , ξP(N)) = (±1)NP ψ(ξ1, ξ2, · · · , ξN) (11.4)

avec le signe + pour des bosons et − pour des fermions.L’espace de Hilbert des N bosons est constitué de tous les états produits tensoriel

symétrisés, ce que nous notons

Hbosons = [H1 ⊗ · · · ⊗HN]sym . (11.5)

De même, l’ensemble des états de H1 ⊗ · · · ⊗ HN , antisymétriques sous l’échangeconstitue l’espace de Hilbert du système de N fermions

Hfermions = [H1 ⊗ · · · ⊗HN]antisym . (11.6)

RemarqueEn symétrisant ou antisymétrisant les états de l’espace produit tensoriel, nousn’avons pas épuisé toutes les manières de construire des vecteurs (dans un langagede théorie des groupes [40] : le groupe des permutations de N > 2 éléments ad-met d’autres représentations irréductibles que celles engendrées par les états symé-triques et les états antisymétriques). En général :

H1 ⊗ · · · ⊗HN = [H1 ⊗ · · · ⊗HN]sym ⊕ [H1 ⊗ · · · ⊗HN]antisym ⊕ [H1 ⊗ · · · ⊗HN]autre (11.7)

où [H1 ⊗ · · · ⊗HN]autre regroupe tous les vecteurs produits tensoriels ni totalementsymétriques ni totalement antisymétriques (cf. § 63 de l’ouvrage [27]).

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Page 222: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 11 • Particules identiques et permutations – Postulats (4)

11.2 CORRÉLATIONS INDUITESPAR LE POSTULAT DE SYMÉTRISATION

Les bases d’états construites à l’aide des états individuels jouent un rôle très im-portant. D’une part elles fournissent des bases d’états stationnaires naturelles pourles problèmes sans interaction. D’autre part, dans le cas des problèmes nettementplus complexes mais plus réalistes où des interactions entre particules sont présentes,elles donnnent un point de départ de l’analyse de ces problèmes : ces états symé-trisés inclueront au moins les effets des corrélations quantiques dues au postulat desymétrisation, à défaut d’inclure les corrélations dues aux interactions.

11.2.1 Problème à 1 particule : notations

Nous notons |λn 〉 une base de l’espace des états à une particule (états individuels).

11.2.2 Construction des états à N particules identiques

Considérons maintenant une situation où N particules identiques occupent N étatsindividuels. Pour des particules discernables, un état décrivant cette situation est|λ1 〉1 ⊗ |λ2 〉2 ⊗ · · · ⊗ |λN 〉N . L’état de N bosons est obtenu en applicant à l’étatprécédant un opérateur de symétrisation (notons qu’il est équivalent de permuter lesindices repérant les états individuels, |λP(i) 〉i, ou les particules, |λi 〉P(i)) :

|Ψbosons 〉 =√

nλ1! · · · nλN !

N!

∑P|λP(1) 〉1 ⊗ |λP(2) 〉2 ⊗ · · · ⊗ |λP(N) 〉N (11.8)

où nλi désigne le nombre de bosons dans l’état individuel |λi 〉. Dans le cas de Nfermions, nous devons appliquer à l’état non symétrisé un opérateur d’antisymétrisa-tion :

|Ψfermions 〉 =1√

N!

∑P

(−1)NP |λP(1) 〉1 ⊗ |λP(2) 〉2 ⊗ · · · ⊗ |λP(N) 〉N (11.9)

qui peut être écrit sous la forme d’un déterminant (« de Slater ») :

|Ψfermions 〉 =1√

N!

∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣|λ1 〉1 |λ1 〉2 · · · |λ1 〉N|λ2 〉1 |λ2 〉2 · · · |λ2 〉N

......

. . ....

|λN 〉1 |λN 〉2 · · · |λN 〉N

∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣. (11.10)

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Page 223: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

11.2. Corrélations induites par le postulat de symétrisation

11.2.3 Fermions identiques : principe de Pauli

Dans le cas des fermions, une conséquence assez élémentaire est que si deux étatsindividuels coïncident, ∃ i et j t.q. λi = λ j, alors |Ψfermions 〉 = 0. Autrement dit : unétat individuel ne peut pas être occupé par plus d’un fermion. Il est remarquablede noter que la diversité des propriétés chimiques des atomes repose sur ce « prin-cipe » (en fait déduit d’un postulat plus fondamental) : parce que les électrons nepeuvent pas être plus que 2 par orbitale atomique, les atomes ont des configurationsélectroniques variées et des propriétés chimiques très diversifiées.

11.2.4 Facteurs d’occupation

Par rapport à la situation où les particules sont discernables, caractériser l’état quan-tique de particules indiscernables requiert moins d’information (figure 11.2). En effet,un état de N particules discernables est défini en précisant que la particule i est dansl’état |λ 〉i. En revanche, pour des particules indiscernables, seul importe de savoirque l’état |λ 〉 contient nλ particules (nλ ∈ N pour des bosons et nλ ∈ {0, 1} pour desfermions). L’état quantique est entièrement spécifié par la donnée des facteursd’occupation {nλ} des états individuels :

|Ψbos/ferm 〉 =√

nλ1 ! · · · nλN !

N!

∑P

(±1)NP |λP(1) 〉1 ⊗ |λP(2) 〉2 ⊗ · · · ⊗ |λP(N) 〉N ≡ | {nλ} 〉.

(11.11)Cette remarque, qui sera peu exploitée ici sinon pour représenter les états (fi-gures 11.2 et 11.4), joue un rôle important dans le cours de physique statistique [15].

bosons fermions1 2a| >b| >

discernables

1 2

2

1

1

2

Figure 11.2– Remplissage de 2 états individuels par 2 particules.

Cas discernable, bosonique et fermionique.

Exemples : Pour illustrer ces considérations nous étudions 2 particules dans unesituation où l’espace de Hilbert à une particule est de dimension 2. Nous notons |a 〉et |b 〉 les deux états individuels et construisons une base d’états à 2 particules.

• Particules indiscernables. Nous pouvons construire 4 états : |a 〉1⊗|a 〉2, |a 〉1⊗|b 〉2,|b 〉1 ⊗ |a 〉2 et |b 〉1 ⊗ |b 〉2. Si on note Hdisc l’espace de Hilbert des deux particulesdiscernables, alors dimHdisc = 22 = 4.©D

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Page 224: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 11 • Particules identiques et permutations – Postulats (4)

• Bosons. Le problème à deux bosons est caractérisé par 3 états indépendants :|a 〉1⊗|a 〉2, 1√

2[|a 〉1⊗|b 〉2+ |b 〉1⊗|a 〉2] et |b 〉1⊗|b 〉2. Nous pouvons également dé-

signer ces états à l’aide des facteurs d’occupation : respectivement |na = 2, nb = 0 〉,|na = 1, nb = 1 〉 et |na = 0, nb = 2 〉. L’espace de Hilbert à deux bosons est donc dedimension dimH2 bosons = 3.

• Fermions. Nous trouvons 1 état antisymétrique : 1√2[|a 〉1 ⊗ |b 〉2− |b 〉1 ⊗ |a 〉2], que

nous pourrions noter |na = 1, nb = 1 〉. On a dimH2 fermions = 1.

Ces résultats sont illustrés sur la figure 11.2. Remarquons que la propriété H1 ⊗H2 = [H1 ⊗H2]sym ⊕ [H1 ⊗H2]antisym n’est valable que dans le cas de N = 2particules, cf. éq. (11.7).

11.2.5 Corrélations spatiales

Classiquement, les corrélations entre les positions d’un ensemble de particules dé-coulent de l’existence d’interactions. Sans interaction, les particules classiques ne se« voient » pas. Même en l’absence d’interaction, la symétrisation ou l’antisymé-trisation de l’état quantique induit des corrélations entre particules identiques.Pour illustrer cette remarque, considérons deux particules identiques sur un axe, dontla fonction d’onde est Ψ (x1, x2). Étudions les corrélations entre les positions des par-ticules. À cette fin nous introduisons la corrélation

Cdef= 〈x(1) x(2)〉 − 〈x(1)〉〈x(2)〉, (11.12)

où x(i) est l’opérateur de position de la particule i ∈ {1, 2}. Calculons C lorsque lesdeux particules occupent deux états individuels décrits par les fonctions d’onde à uneparticule ϕ(x) et χ(x).

• Particules discernables : la fonction d’onde du système lorsque la particule 1 estdans l’état |ϕ 〉 et la particule 2 dans l’état |χ 〉 est Ψdisc(x1, x2) = ϕ(x1)χ(x2). Onvérifie facilement que ce choix conduit à Cdisc = 0.

• Particules indiscernables : la fonction d’onde de deux bosons/fermions est donnéepar Ψ (x1, x2) = 1√

2[ϕ(x1)χ(x2) ± χ(x1)ϕ(x2)]. Le calcul de la corrélation conduit à

Cbosons/fermions = ±|〈ϕ |x|χ 〉|2 −(〈ϕ |x|ϕ 〉 − 〈χ |x|χ 〉

2

)2

. (11.13)

Supposons pour simplifier que les deux états sont centrés sur l’origine 〈ϕ |x|ϕ 〉 =〈χ |x|χ 〉 = 0. La corrélation positive, dans le cas des bosons, indique que les deuxparticules sont plus favorablement du même côté de l’origine : soit sur R+ soit sur R−

(i.e. x1 ∼ x2), ils se « regroupent ». Inversement, la corrélation négative dans le casdes fermions indique qu’ils sont plus favorablement de part et d’autre de l’origine(x1 ∼ −x2), ils se « repoussent ». Ceci est illustré sur la figure 11.3.

214

Page 225: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

11.2. Corrélations induites par le postulat de symétrisation

� 2 � 1 0 1 2

� 2

� 1

0

1

2

x1

x2

� 2 � 1 0 1 2

� 2

� 1

0

1

2

x1x

2� 2 � 1 0 1 2

� 2

� 1

0

1

2

x1

x2

Figure 11.3– Fonctions d’onde à deux particules.

Densité de probabilité |Ψ(x1, x2)|2 pour deux particules occupant les deux premiers ni-veaux excités de l’oscillateur harmonique : cas discernable (fonction factorisée), boso-nique, fermionique (fermions polarisés en spin).

Alors que les particules discernables sont indépendantes, tel n’est plus le cas pourles particules indiscernables : la nature bosonique/fermionique est à l’origine decorrélations spatiales (déjà en l’absence d’interaction).

11.2.6 État fondamental de N particules identiquessans interaction

Étant donné un spectre d’états propres de l’hamiltonien h à une particule {ελ, |λ 〉}(états individuels), il est facile de construire des états propres de l’hamiltonien à Nparticules sans interaction H =

∑Ni=1 h(i). Les états introduits plus haut, indexés à

l’aide des facteurs d’occupation, forment une telle base : H| {nλ} 〉 = E{nλ}| {nλ} 〉 oùE{nλ} =

∑λ nλελ. Examinons plus en détail la nature de l’état fondamental des N

particules identiques sans interaction, noté |Ω 〉.

• Condensation de Bose-Einstein

Analysons tout d’abord le cas bosonique. L’énergie du système est minimisée lorsquetoutes les particules se trouvent dans l’état individuel de plus basse énergie : |Ω 〉 =|λ0 〉1⊗· · ·⊗ |λ0 〉N . On parle de condensation de Bose-Einstein pour désigner ce phé-nomène où un nombre potentiellement macroscopique de particules se « condensent »dans un état individuel. Si le spectre des énergies est celui de particules libres{εn} → {ε�k}, l’état fondamental est d’énergie nulle ε�0. L’énergie totale est égalementnulle1 (figure 11.4)

EbosonsΩ = Nε�0 = 0. (11.14)

1. Si la particule est confinée dans un volume de dimension L, son énergie fondamentale est ε0 ∼ �2

mL2 .

L’énergie de confinement d’un gaz de N particules est EΩ = Nε0 ∼ N�2

mL2 . Par exemple, considérons lecas de l’hydrogène : N ∼ 1023, L ∼ 10 cm, nous obtenons Ebosons

Ω ∼ 10−16 J.©D

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Page 226: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 11 • Particules identiques et permutations – Postulats (4)

... ...

Bosons Fermions

E

Figure 11.4– État fondamental de particules identiques sans interaction.Remplissage du spectre à une particule par N = 7 particules : bosons de spin S = 0 etfermions polarisés (tous dans le même état de spin).

• Blocage de Pauli

Dans le cas fermionique la situation est très différente. Le principe de Pauli interditaux particules d’occuper toutes l’état individuel de plus basse énergie. Les particulesdoivent « s’empiler » dans les états individuels, jusqu’à un état d’énergie maximale,notée εF et appelée « énergie de Fermi » (figure 11.4). L’énergie totale du système estdonnée par

EfermionsΩ =

∑n t.q. εn�εF

εn ∼ N εF. (11.15)

Lorsque le nombre de particules est macroscopique (∼ 1023) cette énergie peut êtretrès importante. Nous pouvons donner une illustration de cette conséquence du prin-cipe de Pauli : les électrons d’un métal s’empilent dans des états quantiques de type« onde plane » jusqu’à une énergie typique de l’ordre de εF ∼ 1 eV. L’énergie to-tale de l’état fondamental est donc énorme Efermions

Ω∼ N εF (∼ 1023 eV∼ 104 J pour

une mole d’électrons à température nulle, qu’on pourrait comparer à l’énergie d’ungaz parfait classique monoatomique à température ambiante 3

2 NkBT ∼ 100 J). Uneconséquence particulière du principe de Pauli est que les électrons d’un métal à tem-pérature nulle sont très énergétiques et donc très rapide : en écrivant εF =

12mev

2F on

obtient vF ∼ 106 m/s ! Corrélativement une pression importante est générée dans legaz (cette pression assure par exemple la stabilité des étoiles « naines blanches » etétoiles à neutrons [15]).

11.2.7 Deux fermions : symétriser séparemment les partiesorbite et spin

Considérons deux fermions identiques, de spin 1/2 pour simplifier, occupant des étatsindividuels |ϕa 〉⊗ |σ 〉 et |ϕb 〉⊗ |σ′ 〉 (|ϕa,b 〉 désigne la partie orbitale et |σ 〉 l’état de

216

Page 227: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

11.2. Corrélations induites par le postulat de symétrisation

spin). Un état à deux particules peut être obtenu en antisymétrisant le produit d’étatsindividuels :

|Ψintriqué 〉 =1√

2

[(|ϕa 〉 ⊗ |σ 〉)part. 1 ⊗

(|ϕb 〉 ⊗ |σ′ 〉)part. 2

− (|ϕb 〉 ⊗ |σ′ 〉)part. 1 ⊗ (|ϕa 〉 ⊗ |σ 〉)part. 2

]. (11.16)

Les parties orbitales et de spin des états sont alors intriquées.Une autre façon commode de construire des états antisymétriques consiste à sy-

métriser ou antisymétriser séparemment la partie orbitale et la partie de spin. Nousinsistons sur le fait que cette procédure n’est nullement obligatoire ; elle facilite néan-moins l’étude de certains problèmes. Cherchons l’état sous la forme factorisée :

|Ψfactorisé 〉 = |Φ 〉orb ⊗ |χ 〉spin. (11.17)

L’état |Ψ 〉 doit être globalement antisymétrique sous l’échange. Nous pouvons sy-métriser la partie orbitale |Φ 〉orb et antisymétriser la partie spin |χ 〉spin, ou l’inverse.Rappelons que les états propres de l’opérateur de permutation sont aussi états propresdu spin total �S 2 (chapitre 9), nous choisissons donc |χ 〉spin → |S , M 〉.

• État singulet de spin

On symétrise la partie orbitale et antisymétrise la partie de spin.

|Ψ0,0 〉 = |ΦS 〉 ⊗ |0, 0 〉 avec

⎧⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎩|ΦS 〉 =

(|ϕa 〉1 ⊗ |ϕb 〉2 + |ϕb 〉1 ⊗ |ϕa 〉2)

|0, 0 〉 = 1√2

(|+ 〉1 ⊗ |− 〉2 − |− 〉1 ⊗ |+ 〉2

) .

(11.18)L’état de spin |0, 0 〉 est appelé « état singulet ».

• État triplet de spin

On antisymétrise la partie orbitale et symétrise la partie de spin.

|Ψ1,M 〉 = |ΦA 〉 ⊗ |1, M 〉 (11.19)

avec

⎧⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎩

|ΦA 〉 = 1√2

(|ϕa 〉1 ⊗ |ϕb 〉2 − |ϕb 〉1 ⊗ |ϕa 〉2)

|1, M 〉 =

⎧⎪⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎪⎩|+ 〉1 ⊗ |+ 〉2 pour M = 1

1√2

(|+ 〉1 ⊗ |− 〉2 + | − 〉1 ⊗ |+ 〉2

)pour M = 0

| − 〉1 ⊗ |− 〉2 pour M = −1

.

Pour désigner les trois états |1, M 〉 on parle « d’état triplet ».©D

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Page 228: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 11 • Particules identiques et permutations – Postulats (4)

Notons que si ϕa = ϕb, l’état est nécessairement singulet (principe de Pauli) :l’orbitale |ϕa 〉 est occupée par les deux électrons formant un état singulet de spin :|Ψ 〉 = |ϕa 〉1 ⊗ |ϕa 〉2 ⊗ |0, 0 〉.

Les problèmes 13.2 et 13.3 illustrent l’intérêt de la base d’états factorisés.

• Généralisation

L’idée de fabriquer des états factorisés spin/orbite se généralise au cas de N fer-mions. Dans ce cas la construction d’un état globalement antisymétrique fait inter-venir des états orb/spin qui ne sont, séparemment, pas nécessairement totalementsymétriques/antisymétriques (§63 de [27]).

À retenir

Les particules identiques sont indiscernables.

Les fonctions d’onde sont soit toutes symétriques sous l’échange de 2 particules (bo-sons), soit toutes antisymétriques (fermions).

Les bosons ont un spin entier et les fermions un spin demi-entier.

Pour des particules indiscernables, seules les occupations des états quantiques caracté-risent l’état quantique du système.

Le postulat de symétrisation induit des corrélations entre particules (déjà en l’absenced’interaction).

Pour en savoir plus

Sur le groupe de permutation et ses représentations : [33], §63 de [27] ou [40].

Anyons. Dans le cas 2D, il est possible d’échapper au choix boson/fermion et d’intro-duire des « statistiques intermédiaires » pour des « any-ons », une idée ayant des applica-tions dans le contexte de l’effet Hall quantique ou de la supraconductivité à haute Tc. Cf.A. Comtet, J. MacCabe & S. Ouvry, Vers de nouvelles statistiques quantiques, Imagesde la physique, CNRS, p. 21 (1992).

Exercices

11.1 (F) Soit un système de N = 3 particules identiques pouvant occuper 4 étatsindividuels. Calculer la dimension des espaces de Hilbert pour des particules discer-nables, des bosons identiques et des fermions identiques de spin 1/2 polarisés.

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Page 229: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problème

11.2 (MF) La nature bosonique/fermionique d’un noyau peut être déterminée expé-rimentalement par une expérience de collision, comme nous l’avons expliqué dansle chapitre. Avant la découverte du neutron en 1932 par James Chadwick, les physi-ciens ont un temps pensé que les noyaux étaient constitués de protons et d’électrons.Montrer que cette hypothèse est incompatible avec la nature bosonique/fermioniquedes noyaux ayant un nombre de protons et de nucléons ayant des parités différentes,par exemple comme 13

6C ou 147N.

Problème

11.1 Diffusion de deux particules par une lame séparatrice

Nous étudions la diffusion de deux particules identiques par une lame séparatrice.L’exercice illustre que le postulat de symétrisation est responsable de corrélationsspatiales pouvant être mises en évidence expérimentalement.

• Notation

On notera |φ 〉 les états à une particule et |Ψ 〉 les états à deux particules.

• Diffusion d’une seule particule

La lame semi-réfléchissante est décrite en utilisant le formalisme de l’annexe 5.Ade la page 95 : une particule peut être envoyée sur la lame par deux « canaux d’en-trée » φ1 ou φ2, puis en ressort par deux « canaux de sortie » φ3 ou φ4 (figure 11.5).Autrement dit nous supposons que, juste avant de rencontrer la lame séparatrice,la particule est soit dans un état quantique |φ1 〉, soit dans un état quantique |φ2 〉.L’évolution temporelle correspondant à la traversée de la lame connecte ce sous es-pace, |φinitial 〉 ∈ {|φ1 〉, |φ2 〉}, à un autre sous espace : |φfinal 〉 ∈ {|φ3 〉, |φ4 〉} (lesquatre vecteurs sont normés). Cette évolution est décrite par un opérateur unitaire :|φfinal 〉 = U|φinitial 〉. Si |φinitial 〉 = |φ1 〉, on peut alors écrire :

|φfinal1 〉 = U|φ1 〉 = r |φ3 〉 + t |φ4 〉 (11.20)

où r et t sont respectivement des amplitudes de probabilité de réflexion et de trans-mission.

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Page 230: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 11 • Particules identiques et permutations – Postulats (4)

φ

φ3

φ1

lame s

épara

trice

4 φ

φ3

φ2

lame s

épara

trice

4

Figure 11.5– Diffusion par une lame semi-réfléchissante.Gauche : Diffusion d’une particule dans l’état |φ1 〉. Les ellipses représentent des paquetsd’onde. La figure de droite représente la superposition quantique (11.20). Droite : Particuleinitialement dans l’état |φ2 〉.

La particule peut également être injectée dans l’état |φinitial 〉 = |φ2 〉, supposé ortho-gonal au précédent : 〈φ1 |φ2 〉 = 0. L’état final est alors

|φfinal2 〉 = U|φ2 〉 = t′ |φ3 〉 + r′ |φ4 〉 (11.21)

où r′ et t′ sont un autre couple d’amplitude de probabilité de réflexion et de transmis-sion.

1) En admettant que 〈φ3 |φ4 〉 = 0 montrer que la matrice S =

(r t′

t r′

)est unitaire

S †S = 1.

Par la suite nous considérons le problème à deux particules identiques. Soit deuxbosons de spin nul. Soit deux fermions polarisés en spin (de même état de spin), cequi nous autorise à oublier le degré de liberté de spin.

L’etat initial décrit une particule dans l’état |φ1 〉 et l’autre dans l’état |φ2 〉.2)

a) Soit |ΨB/Fin 〉 l’état initial à deux bosons/fermions. Donner son expression en terme

des états individuels.

b) Déduire l’état final |ΨB/Ffin 〉 = U|ΨB/F

in 〉.

Remarque

Nous avons gardé la même notation, mais bien évidemment, l’opérateur d’évolutionU agit sur les deux bosons de l’état |ΨB/F

in 〉 (on aurait pu écrire U = U(1) ⊗ U(2) où U(i)

agit sur le boson numéro i et dont l’action dans l’espace de Hilbert d’un boson estdéfinie par les eqs. (11.20) et (11.21)).

Mesure en coïncidence. On place deux détecteurs aux niveaux des canaux φ3 et φ4

et on procède à une mesure de coïncidence, i.e. on mesure la probabilité de détecterdeux particules en même temps, l’une dans l’état |φ3 〉 et l’autre dans l’état |φ4 〉, l’état

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Page 231: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problème

avant la mesure étant |Ψ 〉. Le signal mesuré par le couple de détecteur est

πΨB/F

fin=

∣∣∣∣∣∣ 〈φ3 | ⊗ 〈φ4 | ± 〈φ4 | ⊗ 〈φ3 |√2

|ΨB/Ffin 〉

∣∣∣∣∣∣2⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩+ pour des bosons

− pour des fermions.

(11.22)

c) Cas fermionique. Calculer πΨFfin

. Interpréter ce résultat.

d) Cas bosonique. Calculer πΨBfin

. Expliquer la différence entre les cas bosonique etfermionique. Dans quel cas la coïncidence est-elle minimale ? Discuter les caslimites.

3) Lorsque les deux paquets d’onde arrivent à des instants trop éloignés, on peutoublier l’effet des corrélations quantiques et traiter les deux particules de manièreclassique.

a) Analyser dans ce cas les différentes histoires possibles pour les deux particules etdéduire la valeur de la probabilité classique d’une coïncidence πclass.

b) L’expérience a été réalisée il y a quelques années avec des photons. Commenterla courbe obtenue expérimentalement (figure 11.6 ; explications dans la légende).Tracer l’allure de la courbe qu’on attendrait avec des fermions.

UV

semi réfl.

Ampli.

Ampli.D1

D2

Lame

cristal

Compteur

coincidencesdeω 0 ω 2

ω1

0

200

400

600

800

1000

100806040200(μm)

# de

coi

ncid

ence

s

Position de la lame

Figure 11.6– Détection en coïncidence de deux photons.

À gauche : Dispositif expérimental. Un rayonnement UV de fréquenceω0 est envoyé sur uncristal non-linéaire. Un photon incident donne naissance à deux photons, t.q. ω0 = ω1+ω2,diffusés par une lame semi-réfléchissante. Les signaux à la sortie des détecteurs de pho-tons sont dirigés vers un analyseur de coïncidences comptant les arrivées simultanées.À droite : Nombre de coïncidences détectées pendant 10 min en fonction de la positionde la lame semi-réfléchissante. Données tirées de Hong et al., Phys. Rev. Lett. 59, 2044(1987).

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Page 232: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE
Page 233: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

ATOMED’HYDROGÈNE 12

Dans ce chapitre, nous présentons la théorie quantique (non relativiste) de l’atomed’hydrogène. Parmi les problèmes de la théorie classique, nous avions mentionné laquestion de la stabilité des atomes ; dès le début du cours nous avons montré, en ana-lysant le problème du puits quantique, comment la mécanique quantique résout ceproblème. Cela nous avait conduit à l’idée de quantification du spectre des énergiesdans les problèmes d’états liés. Dans le présent chapitre nous dépasserons cette ana-lyse qualitative pour faire des prédictions quantitatives (spectre des énergies, fonc-tions d’onde). Étudier l’atome d’hydrogène correspond à étudier les états liés d’unsystème proton-électron (notons que l’étude du problème de diffusion, que nous nemènerons pas, serait également très intéressante). En se plaçant dans le référentieldu centre de masse (qui correspond à peu de chose près au référentiel du proton) leproblème se ramène à l’étude d’une particule fictive soumise à un champ de forcecentrale en 1/r2. Nous verrons que l’équation de Schrödinger peut être résolue exac-tement dans ce cas. Ces résultats jouent un rôle très important : ils permettent notam-ment d’introduire des idées et le vocabulaire (notations spectroscopiques) utilisés enphysique atomique.

12.1 ATOME D’HYDROGÈNE

12.1.1 Séparation des variables

L’espace de Hilbert du système est un produit tensoriel Hproton ⊗ Helectron (nousoublierons le spin qui jouera peu de rôle dans ce chapitre). Nous notons �r1, �p1 (resp.�r2, �p2) la position et l’impulsion de l’électron (resp. du proton). L’hamiltonien dusystème est donné par :

Hatome =�p1

2

2m1+�p2

2

2m2+ V(r) où r = ||�r1 − �r2|| (12.1)

V(r) = − q2e

4πε0r ≡ −e2/r est le potentiel coulombien.La première étape consiste à rendre le problème séparable. Pour cela nous intro-

duisons deux couples de variables : d’une part la position et la vitesse du centre demasse

�R =m1�r1 + m2�r2

m1 + m2et �V =

m1�v1 + m2�v2

m1 + m2(12.2)

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Page 234: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 12 • Atome d’hydrogène

et d’autre part la coordonnée relative et la vitesse relative

�r = �r1 − �r2 et �v = �v1 −�v2. (12.3)

Nous voyons que l’énergie cinétique s’exprime comme 12 m1�v1

2+ 12 m2�v2

2 = 12 M�V 2+

12μ�v

2 où M = m1 + m2 et1μ

def=

1m1+

1m2

(12.4)

sont respectivement la masse totale et la masse réduite. Nous introduisons les mo-ments conjugués correspondant

�P = �p1 + �p2 et�pμ=�p1

m1− �p2

m2. (12.5)

On vérifie que les couples de nouvelles variables satisfont des relations de commu-tation canoniques : [Ri, P j] = [ri, pj] = i�δi j et [Ri, pj] = [ri, P j] = 0. Finalementl’hamiltonien prend la forme :

Hatome =�P 2

2M+�p 2

2μ+ V(r) (12.6)

c’est-à-dire que les nouvelles variables sont découplées (le problème est séparable).

12.1.2 Les échelles atomiques

Il est important d’avoir en tête les ordres de grandeur caractérisant l’atome d’hydro-gène. Écrivons le potentiel coulombien comme V(r) = − e2

r . Avant même de résoudrel’équation de Schrödinger, on peut chercher quelles seront les échelles caractéris-tiques du problème. Utilisons l’analyse dimensionnelle pour cela. L’objet du chapitreest de développer une théorie quantique de l’atome d’hydrogène. Le problème faitdonc intervenir trois paramètres : �, la masse de l’électron me et la constante de cou-plage coulombienne e2. Nous « fabriquons » des échelles de longueur, énergie, etc.,à partir de ces trois ingrédients.

• Constante de couplage

La constante de couplage :

e2 def=

q2e

4πε0= 14.399 644 (1) eV Å (12.7)

Il est utile de se souvenir que :

�c = 1973.269 68 (17) eV Å (12.8)

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Page 235: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

12.1. Atome d’hydrogène

(il est commode de retenir �c � 200 eV.nm). Nous pouvons introduire la quantitéadimensionnée :

αdef=

e2

�c=

1137.035 999 11 (46)

(12.9)

Cette combinaison des constantes fondamentales joue un rôle important et porte lenom de « constante de structure fine » (l’origine de cette dénomination apparaîtraultérieurement, au § 14.1). Elle caractérise l’intensité de l’interaction électromagné-tique. Sa faible valeur montre que l’interaction électromagnétique est dans un régimedit de couplage faible.

Notons que la vitesse de la lumière ne devrait pas intervenir dans une théorie nonrelativiste. C’est un ingrédient hors du cadre que nous nous sommes fixés. Nousl’avons fait apparaître afin de définir une constante de couplage sans dimension.

• Longueur

Fabriquons une longueur, que nous noterons aB, à partir de �, me et e2. Cette dernièreà la dimension [e2] = E L. Écrivons aB = �

ambee2c et cherchons quels exposants réa-

lisent une longueur. Le membre de droite a la dimension [�ambee2c] = (ET )a Mb(EL)c,

qui coïncide avec une longueur ssi a = 2 et b = c = −1. Cette échelle est appelée lerayon de Bohr

aBdef=�2

mee2= 0.529 177 2108 (18) Å (12.10)

Nous verrons qu’elle donne l’échelle typique sur laquelle la fonction d’onde s’étale,i.e. la distance typique entre le proton et l’électron (dans le modèle atomique de Bohr,aB est le rayon de l’orbite circulaire de plus basse énergie).

• Énergie

À partir de l’échelle de longueur on peut facilement construire une énergie : e2/aB.Rajoutons un facteur 1/2 par commodité pour la suite. Cette échelle d’énergie inter-viendra dans le spectre des énergies ; elle est appelée le Rydberg. On peut l’écrire enfonction du rayon de Bohr ou de l’énergie de masse de l’électron (mec2 � 511 keV) :

Rdef=

mee4

2�2=

e2

2aB=

12α2mec2 = 13.605 6923 (12) eV (12.11)

Nous verrons que cette énergie correspond à l’énergie minimum nécessaire pour io-niser l’atome initialement dans son état fondamental. On parle d’énergie d’ionisationEI = E∞ − E1 = R (ici nous ne faisons plus de distinction entre μ et me ; notons quela définition du Rydberg fait bien intervenir me et non la masse relative μ).©D

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Page 236: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 12 • Atome d’hydrogène

• Vitesse

Les valeurs moyennes des énergies cinétique et potentielle sont simplement reliées àl’énergie totale (mécanique) : E = −〈Ec〉 = 1

2〈Ep〉 (théorème du viriel). En écrivant〈Ec〉 = 1

2 me�v2, nous déduisons que la vitesse quadratique moyenne de l’électron dans

l’état d’énergie En est v ∼ α c ≈ 2200 km/s. L’électron tourne vite.

• Impulsion

Nous pouvons obtenir une impulsion, soit en partant d’une longueur et en utilisantl’équation de Broglie, soit à partir de la vitesse. Nous aboutissons à p ∼ �/aB = αmec.

12.1.3 Résolution de l’équation de Schrödingerpour un potentiel coulombien

Revenons à la résolution de l’équation de Schrödinger. Nous connaissons les états

propres de l’énergie du centre de masse Hcm =�P 2

2M : il s’agit des ondes planes. Il nousreste à déterminer les états propres de l’hamiltonien relatif :

H =�p 2

2μ+ V(r) avec V(r) = −e2

r. (12.12)

Par la suite nous nous intéressons à l’atome, i.e. à une situation où le proton et l’élec-tron sont liés. Nous nous concentrerons donc sur l’étude des états liés d’énergiesE < 0.

La commutation de H avec l’opérateur de moment cinétique �� = �r × �p (l’inva-riance par rotation) [��, H] = 0 nous permet de chercher des états propres communsaux trois opérateurs H, ��2 et �z (qui forment un ECOC dans l’espace de Hilbert descoordonnées relatives). Nous cherchons donc des fonctions d’onde de la forme :

ψ(�r) = R(r) Ym� (θ,ϕ). (12.13)

En utilisant l’expression (8.57) du Laplacien, nous voyons que la fonction R(r) estsolution de l’équation(

− �2

2μd2

dr2+�2�(� + 1)

2μ r2− e2

r

)r R(r) = E r R(r). (12.14)

Grâce à l’invariance par rotation, nous avons pu nous ramener à un problème effecti-

vement unidimensionnel, pour un potentiel effectif V�(r) = �2�(�+1)2μ r2 − e2

r , caractérisépar une partie répulsive à r → 0 (pour � � 0) et une partie attractive à r → ∞.

226

Page 237: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

12.1. Atome d’hydrogène

a) Discussion qualitative et approximation harmonique

Avant de rentrer dans le vif (des calculs) analysons qualitativement le problème. Pourchaque valeur de �, nous nous sommes ramenés à une équation de Schrödinger uni-dimensionnelle pour le potentiel effectif V�(r), représenté sur la figure 12.1. Pourchaque valeur de �, celle-ci admet un spectre de valeurs propres (non dégénérées)que nous notons Ep,� où p ∈ N∗ est un nombre quantique repérant les différents ni-veaux (représentés sur la figure 12.1). L’exercice ci-dessous propose d’obtenir uneestimation de ce spectre en utilisant une approximation harmonique (chapitre 7).

Figure 12.1– Potentiel effectif V�(r).

À chaque valeur de � correspond un spectre de valeurspropres Ep,� avec p ∈ N∗.

V (r)

r

l

EE

1, l2,

...

l

...

Exercice 12.1 (D) On note r∗ la position du minimum du potentiel V�(r). Déve-lopper V�(r) au voisinage de son minimum. Utiliser une approximation harmoniquepour trouver les premiers niveaux d’énergie. Discuter la validité de l’approximationet montrer que les niveaux sont donnés par

Ep,� �μe4

2�2

[− 1�2+

2p

�3+ · · ·

]avec p ∈ N∗. (12.15)

Comparer avec le résultat exact obtenu plus bas.

b) Équation de quantification

Revenons à la résolution de l’équation différentielle (12.14). Nous suivons la dé-marche présentée pour résoudre l’équation de Schrödinger pour l’oscillateur harmo-nique.

• Étape 1 : Nous introduisons des variables adimensionnées. La longueur caractéris-tique est

a0def=�2

μe2. (12.16)

Rappelons que la définition du rayon de Bohr fait intervenir la masse de l’électronaB

def= �2

mee2 . Comme la masse du proton est beaucoup plus grande que celle de l’élec-tron, mp � 1800me, la masse réduite est très proche de me et donc a0 � aB. Nous©D

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227

Page 238: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 12 • Atome d’hydrogène

définissons donc ρdef= r/a0 et κ2 def

= − 2�2E/μ e4. Dans la nouvelle variable, nousnotons la fonction d’onde : χ(ρ) = r R(r). Elle obéit à l’équation :(

d2

dρ2− �(� + 1)

ρ2+

)χ(ρ) = κ2 χ(ρ). (12.17)

• Étape 2 : Nous étudions les comportements asymptotiques de la solution. D’abordle comportement à l’origine. Dans ce cas c’est le terme répulsif qui domine et l’onpeut écrire que (

d2

dρ2− �(� + 1)

ρ2

)χ(ρ) � 0 pour ρ→ 0. (12.18)

Nous déduisons que χ(ρ) ∝ ρ�+1. La fonction radiale se comporte donc comme1

R(r) ∝ r�.Si l’on considère le comportement à l’infini, on peut négliger les termes potentiels

dans (12.17), donc χ(ρ) ∝ e−κρ.

• Étape 3 : Ces deux remarques nous conduisent à poser χ(ρ) = ρ�+1 y(ρ) e−κρ. Lanormalisabilité impose que la fonction y(ρ) croisse à l’infini moins vite que eκρ. Nousaboutissons à l’équation de Laguerre (cf. annexe A)

ρ y′′(ρ) + 2 (� + 1 − κρ) y′(ρ) + 2[1 − κ(� + 1)

]y(ρ) = 0. (12.19)

Elle n’admet de solutions normalisables au sens∫ ∞

0 dρ ρ2�+2 y(ρ)2 e−2κρ < ∞ que si∃ p ∈ N∗ t.q. κ(p + �) − 1 = 0. La solution est un polynôme de Laguerre : yp,�(ρ) =L2�+1

p−1 (2ρ/(p + �)).

• Méthode alternative pour obtenir l’équation de quantification

La structure de l’équation différentielle linéaire, une combinaison linéaire de poly-nomes (de degré 1) que multiplient des dérivées de y, suggère de chercher la solu-tion de (12.19) sous la forme d’une série entière y(ρ) =

∑∞s=0 asρ

s ; ayant extrait lecomportement ρ� à l’origine, la fonction doit tendre vers une constante à l’origine,a0 � 0 ; d’autre part nous avons extrait de χ(ρ) le comportement exponentiel e−κρ cequi impose à y(ρ) de croître moins vite qu’une exponentielle à l’infini. En injectantla série y(ρ) =

∑∞s=0 asρ

s dans l’équation différentielle (12.19), nous obtenons une

1. La solution de (12.18) conduit à deux solutions χ(ρ) ∝ ρ�+1 et χ(ρ) ∝ ρ−�. Pour � > 0 la deuxièmesolution correspond à une fonction non normalisable (il faut que

∫ ∞0

dρ χ2(ρ) < ∞). Dans le cas� = 0, la solution χ(ρ) → cste pour ρ → 0 est normalisable. Un examen plus attentif montre quecette solution n’est pas acceptable. En effet, χ(ρ) → cste correspond à R(r) ∝ 1/r. Or l’action du Lapla-cien sur 1/r génère un δ de Dirac absent dans l’équation de Schrödinger (rappelons que Δ 1

r = −4π δ(�r),cf. annexe 2.B).

228

Page 239: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

12.1. Atome d’hydrogène

E

n

= 2n

= 3n= 4n

= 3= 2= 1 = 4... ... ... ... ... ......= 0

...

1s

2s 2p

...

3s 3p 3d

4s 4p 4d 4f

E : énergied’ionisation

Iétatsliés

0

diffusionétats de

= 1

Figure 12.2– Spectre des états liés de l’atome d’hydrogène.Chaque barre représente les 2� + 1 états quantiques ψn,�,−�, ..., ψn,�,+�. La partie E > 0correspond aux états de diffusion (spectre continu), que nous n’étudions pas ici (étationisé de l’atome).

relation de récurrence sur les coefficients : as = 2 κ(s+�)−1s(s+2�+1) as−1. L’analyse du com-

portement à s → ∞ donne as � 2κs as−1 ⇒ as ∼ (2κ)s

s! ⇒ y(ρ) ∼ e+2κρ. Ceci nousmontre que la solution n’est normalisable que si la série s’arrête : as = 0 pour s � poù p ∈ N∗. L’équation de quantification donc ici ap = 0 , i.e. κ(p + �) = 1. Le pa-ramètre κp,� = 1/(p + �) est quantifié, et donc l’énergie est également quantifiée :

Ep,� = − μe4

2�21

(p+�)2 pour p ∈ N∗ et � ∈ N. Nous remarquons toutefois que les éner-gies ne dépendent pas des deux nombres quantiques p et � indépendamment, maisuniquement de leur somme n = p + �.

c) Nombres quantiques, dégénérescences et notationsspectroscopiques

Nous introduisons n = � + p, appelé nombre quantique principal. Nous écrivons :

En = −μe4

2�2

1

n2pour n ∈ N∗ et � = 0, · · · , n − 1 (12.20)

Le spectre des énergies est représenté sur la figure 12.2.Nous analysons maintenant les dégénérescences des niveaux d’énergie. Tout

d’abord les énergies sont indépendantes du nombre quantique m, ce qui traduit l’in-variance par rotation du problème. La dégénérescence des niveaux selon le nombre©D

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Page 240: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 12 • Atome d’hydrogène

quantique � trouve son origine dans une symétrie propre au cas du potentiel centralen 1/r (et de l’oscillateur harmonique 3D). Cette symétrie est associée à la conserva-tion du vecteur de Laplace-Runge-Lenz �K = 1

μ �p × �� − e2 �rr . L’existence de cette loi

de conservation était connue en astronomie (elle est liée à l’intégrabilité du problèmedans un champ de force en 1/r2, i.e. à l’existence de trajectoires elliptiques fermées ;le vecteur de Lenz peut en effet être relié à l’excentricité de la trajectoire elliptique).La symétrie complète de l’hamiltonien est générée par les six opérateurs �� et �K dontles composantes satisfont à l’algèbre de Lie du groupe SO(4) (le groupe des rotationsdans R4).

Finalement, la dégénérescence du niveau En est donnée par

dn =

n−1∑�=0

(2� + 1) = n2, (12.21)

au plutôt dn = 2n2 si on prend en compte la dégénérescence de spin de l’électron.Les fonctions d’onde complètes sont étiquetées par trois nombres quantiques :

ψn,�,m(�r) = Rn,�(r) Ym� (θ,ϕ) (12.22)

où la partie radiale de la fonction d’onde est

Rn,�(r) =2�+1

n�+2

√(n − � − 1)!

a30 (n + �)!

(r

a0

)�L2�+1

n−�−1(2r/na0) e−r/na0. (12.23)

Celle-ci est normalisée comme∫ ∞

0dr r2 R2

n,�(r) = 1. On peut calculer les premières

fonctions radiales : R1,0(r) = 2e−r, R2,0(r) = 1√2(1 − r/2)e−r/2, R2,1(r) = 1

2√

6re−r/2

(on a fait a0 = 1).Pour désigner les différents niveaux (n, �), on utilise couramment les notations

spectroscopiques données dans le tableau 12.1.

Tableau 12.1– Notations spectroscopiques.

Dans la dernière colonne, nous indiquons le nombre maximal d’électrons occupant unniveau pour n et � fixés.

moment � notation 2(2� + 1)0 −→ s 21 −→ p 62 −→ d 103 −→ f 14...

......

230

Page 241: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

12.2. Atomes et classification de Mendeleïev

12.2 ATOMES ET CLASSIFICATIONDE MENDELEÏEV

Dans un atome à Z > 1 électrons, la résolution de l’équation de Schrödinger né-cessite des méthodes d’approximation dont la discussion dépasse le cadre de cecours (on pourra consulter les ouvrages [38, 27, 33]). Chaque électron est sensiblenon seulement au potentiel −Ze2/r du noyau, mais aussi au potentiel des autres élec-trons (cf. l’hamiltonien donné dans l’exercice 8.9). Le problème devient extrêmementcompliqué ; une première approximation, dite de champ moyen, consiste à supposerque chaque électron est soumis à un potentiel effectif moyen Veff(r) qui prend encompte les deux contributions.

Figure 12.3– Spectre du potentiel effectif Veff(r).

Allure schématique du spectre des états liés del’hamiltonien pour le potentiel effectif vu parl’électron d’un atome.

1s

.. ... ...... 4f0 .

E

2s 2p3s 3p4s 4p5s 4d

3d

Aux très courtes distances un électron est sensible au potentiel du noyau Veff(r) ≈−Ze2/r, mais aux grandes distances à un potentiel écranté par les Z − 1 autres élec-trons Veff(r) ≈ −e2/r. Ce potentiel, qui décrit la distribution moyenne des chargesélectriques dans l’atome (noyau et les Z − 1 autres électrons), n’a pas un comporte-ment simple en 1/r, ce qui induit une levée de dégénérescence selon le nombre �. Unargument simple nous conduit à l’idée que l’énergie est une fonction croissante de �,toutes choses égales par ailleurs. En effet, la fonction d’onde associée au potentiel en1/r se comporte comme ψn,�,m(�r) ∝ r� à l’origine. La probabilité de trouver l’électronà l’origine, où se trouve le noyau, décroît lorsque � croît. En augmentant �, l’électronsonde des régions de l’espace où le potentiel est plus important et son énergie totaleaugmente. On s’attend donc à un spectre ayant l’allure représentée sur la figure 12.3.Les électrons remplissent des niveaux d’énergie En,� dégénérées 2(2� + 1) fois (lefacteur 2 correspond à la dégénérescence de spin). Nous avons représenté sur la fi-gure 12.3, le niveau 4s en dessous du niveau 3d ; le remplissage des orbitales se faitdonc dans l’ordre : 1s, 2s, 2p, 3s, 3p, 4s, 3d, 4p, etc., comme on le voit sur le tableaupériodique des éléments (figure 12.4).

Par exemple, l’atome d’hélium (Z = 2 électrons) correspond au remplissage com-plet de la couche 1s, ce que nous notons 1s2. Pour le lithium (Z = 3 électrons), letroisième électron occupe l’orbitale suivante 1s22s1, etc.

Classification de Mendeleïev. La classification périodique des atomes a été propo-sée en 1869 par Dmitri Ivanovich Mendeleïev (1834-1907), bien avant la naissance©D

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Page 242: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 12 • Atome d’hydrogène

de la mécanique quantique, sur la base de l’observation de similarités entre les pro-priétés chimiques des atomes2,3. Lorsque l’on considère les différents atomes, lesélectrons remplissent les niveaux par ordre croissant d’énergie. La structure du ta-bleau de Mendeleïev fait clairement apparaître les dégénérescences 2(2� + 1) desniveaux En,� : les nombres « magiques » 2, 6, 10, 14 correspondant au remplissagecomplet des « couches » et à des configurations plus stables. La figure 12.5, qui repré-sente l’énergie de première ionisation (énergie pour arracher un électron) en fonctiondu numéro atomique, illustre ce point : l’énergie d’ionisation est maximale pour descouches pleines, par exemple pour les gaz nobles He, Ne, Ar, Kr, Xe. A contrario,juste après les gaz rares, les atomes alcalins de la première colonne, Li, Na, K, Rb,Cs, sont caractérisés par des énergies d’ionisation très basses : l’électron de la couches est peu lié à l’atome.

On peut donc lire la configuration électronique sur le tableau de Mendeleïev.Par exemple, l’atome de carbone contient Z = 6 électrons qui occupent les orbi-tales 1s22s22p2. Il est standard d’abréger la description de la structure électroniqueen utilisant le gaz rare4 précédent l’élément. La structure du carbone sera notée[C]=[He]2s22p2.

U

ZnNiTi V Cr Mn CoKNaLi

RbCs

Sc

NeArKrXe

B FAlGa Ge As

BeMgCa

LaAc

10

Cl

14

2 6

BrI

PbHgPtRa

P S

Pu

Ag

103

5

13

31

49

81

70

102

11C N O

H He

Fe Cu

92

Si

Au71

57

1 2

3

18

10

36

54

86

89

19

37

55

87

21

39

6d6s

3p4p5p6p

2p3d

4d5d

4f5f

4s

7s

2s3s

5s

Figure 12.4– Structure du tableau de Mendeleïev.Le petit numéro est le numéro atomique Z (le nombre d’électrons de l’atome). La placede quelques éléments est précisée.

2. On pourrait arguer que je n’ai pas rendu assez hommage à la chimie dans ces notes. On peut direque la découverte des éléments, la classification périodique, le formulation atomistique des réactionschimiques et l’existence de coefficients stoechiométriques entiers constituent des éléments qui ont forte-ment milité en faveur de la description atomiste de la matière et tout autant de symptômes annonciateursde la refondation quantique.3. On trouvera le tableau à l’adresse : http://www.webelements.com/webelements/index.html4. Les premiers gaz rares sont : hélium [He]=1s2, néon [Ne]=[He]2s22p6, argon [Ar]=[Ne]3s23p6, kryp-ton [Kr]=[Ne]3d104s24p6, etc.

232

Page 243: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

12.2. Atomes et classification de Mendeleïev

Exceptions. Notons toutefois que le remplissage des couches électroniques en aug-mentant Z peut réserver des surprises, conséquences subtiles de l’interaction entreélectrons. Suivons par exemple la première ligne des métaux de transition (le bloccentral) sur le tableau 12.2. Le chrome et le cuivre présentent deux anomalies parrapport à la règle simple : tout comme le cuivre, l’argent et l’or présentent un rem-plissage partiel de la couche s, [Ag]=[Kr]4d105s1 pour l’argent, plus favorable éner-gétiquement que le remplissage 4d95s2 auquel nous pourrions penser à la lecture dutableau de Mendeleïev. On peut tâcher d’en percevoir l’origine de la manière sui-vante. Pour décrire simplement les interactions entre les électrons nous avons évoquéla substitution du vrai potentiel par un potentiel effectif Veff(r) vu par un électron,i.e. le remplacement du problème à Z + 1 corps par un problème approché à 2 corps.Le potentiel effectif détermine les niveaux d’énergie En,�. Cependant, il dépend de ladistribution des électrons dans l’atome, i.e. du remplissage des états qui est lui-mêmedicté par la hiérarchie des En,�. Un tel problème qui se mord la queue est ce qu’onappelle un problème auto-cohérent. Lorsque des niveaux sont très proches, comme 4set 3d, il se peut que de petits effets plus subtils conduisent à l’inversion de leur hiérar-chie dans le spectre, au fur et à mesure du remplissage des orbitales. De plus, au-delàde cette approche de champ moyen, peuvent encore subsister d’autres effets des inter-actions entre électrons. Deux exemples de l’effet des corrélations électroniques sontdiscutés dans les problèmes 13.2 et 13.3.

On trouvera des discussions détaillées dans les ouvrages [27, 17] où d’autres effetstrès intéressants sont discutés.

Tableau 12.2– Première ligne des métaux de transition.

Structures électroniques de quelques métaux de transition : remplissage de la couche 3d.

Z nom symbole structure21 scandium Sc [Ar]3d14s2

22 titane Ti [Ar]3d24s2

23 vanadium V [Ar]3d34s2

24 chrome Cr [Ar]3d54s1 *25 manganèse Mn [Ar]3d54s2

26 fer Fe [Ar]3d64s2

27 cobalt Co [Ar]3d74s2

28 nickel Ni [Ar]3d84s2

29 cuivre Cu [Ar]3d104s1 *30 zinc Zn [Ar]3d104s2

Pour clore ces remarques notons que l’uranium (Z = 92) est le dernier élémentà l’état naturel sur terre. Les éléments suivants (zone grisée de la figure 12.4), ap-pelés transuraniens, produits lors des transmutations (lors d’une réaction nucléaire)possèdent un noyau ayant une durée de vie finie. Un des plus connus est le pluto-©D

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Page 244: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 12 • Atome d’hydrogène

nium (Z = 94), qui existe sous la forme de plusieurs isotopes, dont le plus stable est244Pu, avec une demie-vie de 80 millions d’années (c’est l’isotope 239Pu (demie-viede 24000 ans) qui est produit dans les centrales nucléaires).

Exercice 12.2 (MF) Comment définir la taille d’un atome ? Dépend-t-elle fortementdu numéro atomique Z ?

• Propriétés chimiques des atomes

Les propriétés chimiques sont essentiellement déterminées par le remplissage de ladernière couche électronique. Par exemple les métaux alcalins de la première colonne(lithium, sodium, potassium, rubidium, césium, etc.) possèdent un électron peu lié surleur couche externe et réagissent facilement avec les halogènes de l’avant dernièrecolonne (fluor, chlore, etc.) et forment des sels ioniques comme par exemple NaCl(le sel de table). Les atomes de la dernière colonne (hélium, néon, argon, krypton,xénon etc.) sont appelés gaz rares ou gaz nobles ; le remplissage complet de toutesles couches électroniques les rend très peu réactifs chimiquement (voire pas du toutdans les cas de l’hélium, du néon et de l’argon).

Il est tout à fait remarquable que ce cours élémentaire sur l’atome d’hydrogènenous ait permis de comprendre l’origine de la classification périodique (notammentl’apparition des nombres « magiques » 2, 6, 10, etc., cf. figure 12.5). Rappelons quecette classification résulte de 100 ans ( ?) d’études des propriétés chimiques des élé-ments.

Numéro atomique Z10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 80 85 90

0

5

10

15

20

25He

H

Li

B

BeCO

N

F

Ne

NaAl

SiS

P

Cl

Ar

Se

RbSr

Ge

ZnAs

Br

Kr

K

MnNi

Fe

CoTi

CrVCaSc

YSn

I

AgNb

Mo

Zr

Pd

Cs

La

Ba

Gd

Eu Lu

TaAu

Hg

TlBi

Pb Po

Rn

Ac

Ra

U

Mg

Cu

Ga In

Cd

Xe

Éner

gie

de p

rem

ière

ioni

satio

n (e

V)

1 5

Figure 12.5– Énergies de première ionisation des atomes.Les pics correspondent aux atomes dont les couches sont pleines, donc plus stables.Données tirées de la référence [27].

234

Page 245: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

12.2. Atomes et classification de Mendeleïev

• Une idée sur l’origine de la liaison chimique

Lorsque des atomes s’approchent, ils peuvent avoir intérêt, énergétiquement, à mettrecertains de leurs électrons en commun. En se délocalisant sur plusieurs atomes, lesélectrons forment la liaison covalente ou liaison chimique stabilisant la molécule.

Par exemple, considérons l’ion moléculaire H+2 . Très grossièrement, dans la si-tuation où l’électron est localisé autour du proton de gauche, l’électron possède uneénergie E ∼ −R. En se délocalisant sur les deux protons, on peut supposer que sonénergie potentielle est peu modifiée puisqu’il explore des régions où le potentiel estdu même ordre de grandeur, cependant il abaisse son énergie cinétique. La configu-ration de droite est donc plus favorable énergétiquement. Bien que très incomplète,cette discussion simplissime nous donne une idée de l’origine de la liaison chimique.Notons toutefois qu’une discussion plus satisfaisante devrait au moins prendre encompte le fait que la distance entre les protons est un paramètre du problème. Si lesprotons sont trop éloignés, l’état non lié sera plus favorable énergétiquement (sinonl’électron devrait se délocaliser dans une région de potentiel « élevé » V � 0). Si lesprotons sont trop proches, la répulsion coulombienne élève l’énergie.

Figure 12.6– Liaison chimique.

À gauche : état non lié. À droite : état lié(ion H+

2). La zone grise représente la régionexplorée par l’électron (l’extension de lafonction d’onde).

+ + + +− −

À retenir

Échelles atomiques typiques.

Le spectre de l’atome d’hydrogène : énergies En = − EI

n2 avec n ∈ N∗ et dégénérescencesen � = 0, · · · , n − 1 (propre au potentiel en 1/r) et m (invariance par rotation) : dn = n2

(ou 2n2 avec la dégénérescence de spin).

La structure des fonctions d’onde : ψn,�,m = r� × polynôme× e−r/na0 Ym� (θ,ϕ).

Pour en savoir plus

Pour une analyse détaillée des fonctions d’onde des états liés et les états de diffusion :chapitre 19 de [4].

©D

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Page 246: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 12 • Atome d’hydrogène

Exercice

12.3 (F) Ions hydrogénoïdes

Nous considérons l’atome du numéro atomique Z ionisé Z − 1 fois. L’énergie del’électron s’écrit H = 1

2μ �p2 − Ze2

r . Donner le spectre des énergies. À partir de quellevaleur de Z les effets relativistes ne pourront-ils plus être négligés ?

236

Page 247: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

MÉTHODESD’APPROXIMATION 13

Jusqu’à présent nous avons étudié l’équation de Schrödinger dans des cas où il exis-tait une solution analytique : boîte quantique, oscillateur harmonique, états propresdu moment cinétique, atome d’hydrogène. Pour le mécanicien quantique cette si-tuation est toutefois plutôt exceptionnelle et l’étude d’un problème réaliste nécessitebien souvent d’avoir recours à des méthodes d’approximation. Dans ce chapitre, nousdécrivons plusieurs méthodes d’approximation : la méthode des perturbations, dansle cas d’une perturbation stationnaire (le cas où la perturbation dépend du temps seradiscuté au chapitre 15). Dans une très brève section, nous donnons l’idée de la mé-thode variationnelle. Enfin nous décrivons rapidement la méthode JWKB (approxi-mation semiclassique).

La méthode des perturbations, qui sera discutée le plus en détail, trouvera plusieursapplications (problèmes en annexe et chapitres ultérieurs).

13.1 MÉTHODE DES PERTURBATIONS– CAS STATIONNAIRE

13.1.1 Principe de la méthode

Elle trouve son intérêt lorsqu’on connait une solution d’un problème « proche » duproblème considéré. Par exemple, nous cherchons les solutions de l’équation

f (x, ε) = 0 (13.1)

où ε est un paramètre. Supposons que nous ne soyons pas capable de résoudrel’équation, sauf pour la valeur du paramètre ε = 0 : nous notons x0 la solution def (x, 0) = 0. L’idée est de chercher la solution de (13.1), notée xε , sous la forme d’undéveloppement en puissance du paramètre xε = x0+x1+x2+· · · (où xn = O(εn)). Nousl’injectons dans (13.1) : f (x0 + x1 + · · · , ε) = f (x0, 0) + [x1

∂ f∂x (x0, 0) + ε ∂ f

∂ε (x0, 0)] +O(ε2) = 0. En assurant que l’équation est satisfaite à chaque ordre en ε, on trouverécursivement les corrections perturbatives. Terme d’ordre 0 : f (x0, 0) = 0. Termed’ordre 1 : x1

∂ f∂x (x0, 0) + ε ∂ f

∂ε (x0, 0) = 0. On trouve x1 :

xε = x0 − ε∂ f∂ε (x0, 0)∂ f∂x (x0, 0)

+ O(ε2). (13.2)

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Page 248: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

L’annulation du terme d’ordre 2 de f (x0 + x1+ · · · , ε) = 0 nous donnerait x2 en fonc-tion de x0 et x1. Etc. Si le développement de xε est convergent, on peut en principes’approcher autant qu’on le souhaite de la solution exacte.

Exercice 13.1 (F) Résoudre l’équation ε x3 + x2 − 1 = 0 dans la limite ε → 0 enutilisant la méthode des perturbations. La méthode permet-elle ici d’obtenir toutesles solutions ?

13.1.2 Position du problème

La méthode des perturbations s’applique lorsqu’on connait la solution d’un problèmeproche de celui qui nous intéresse. Par exemple, supposons que l’on cherche les étatspropres d’un hamiltonien H = H0 +W où le spectre de H0 est connu et où W est une« petite perturbation » (il faudra préciser ce que nous entendons par là). Il paraît rai-sonnable de supposer que les états propres et les valeurs propres de H sont très voisinsde ceux de H0. Nous exploitons cette remarque pour chercher états propres et valeurspropres de H sous la forme d’un développement en puissances de la perturbation W .

Nous notons |ϕn 〉, E0n les vecteurs propres et les valeurs propres de H0. Tous ces

vecteurs propres et valeurs propres sont supposés connus. Nous cherchons l’étatpropre et la valeur propre de H sous la forme de développements :

|ψ 〉 = |0 〉 + |1 〉 + |2 〉 + · · · (13.3)

E = ε0 + ε1 + ε2 + · · · (13.4)

où « |n 〉 = O(Wn) » et « εn = O(Wn) » Nous utiliserons la notation « O(Wn) » pourdésigner un terme d’ordre n dans la perturbation W (plus précisément dans un échellecaractérisant la perturbation). Nous injectons ces développements dans l’équation auxvaleurs propres H|ψ 〉 = E|ψ 〉 :

(H0 +W)(|0 〉 + |1 〉+ |2 〉 + · · · ) = (ε0 + ε1 + ε2 + · · · )(|0 〉 + |1 〉+ |2 〉 + · · · ) (13.5)

et identifions les termes d’ordre n dans la perturbation :

H0 |0 〉 = ε0 |0 〉 (13.6)

W |0 〉 + H0 |1 〉 = ε1 |0 〉 + ε0 |1 〉 (13.7)

W |1 〉 + H0 |2 〉 = ε2 |0 〉 + ε1 |1 〉 + ε0 |2 〉 (13.8)...

...

L’idée de la résolution est récursive : on résout l’équation à l’ordre 0. On utilise cettesolution pour résoudre celle à l’ordre 1, etc.

238

Page 249: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

13.1. Méthode des perturbations – cas stationnaire

La première équation nous montre que |0 〉 et ε0 sont respectivement valeur propreet vecteur propre de H0 (évidemment). Nous examinons successivement le cas où lavaleur propre est non dégénérée, puis le cas où elle est dégénérée.

Normalisation. La condition de normalisation 〈ψ |ψ 〉 = 1 conduit à un ensembled’équations sur les |n 〉. Puisque |0 〉 est vecteur propre de H0, il est normalisé〈0 |0 〉 = 1. Nous obtenons donc les équations suivantes 〈0 |1 〉 + 〈1 |0 〉 = 0,〈0 |2 〉 + 〈1 |1 〉 + 〈2 |0 〉 = 0, etc.

13.1.3 Valeur propre de H0 non dégénérée

Nous choisissons une des valeurs propres de H0 : ε0 = E0n et |0 〉 = |ϕn 〉. La multipli-

cation par la gauche de (13.7) par le bra 〈ϕn | nous donne immédiatement :

ε1 = 〈ϕn |W |ϕn 〉. (13.9)

Si maintenant nous multiplions par 〈ϕm | l’équation (13.7) avec m � n, nous obtenonsl’expression de la composante du vecteur |1 〉 sur le vecteur propre |ϕm 〉 de H0 :

〈ϕm |1 〉 =〈ϕm |W |ϕn 〉

E0n − E0

m(13.10)

ce qui conduit à1

|ψn 〉 = |ϕn 〉 +∑

m t.q. m�n

|ϕm 〉〈ϕm |W |ϕn 〉

E0n − E0

m+ O(W2) (13.11)

En l’absence de dégénérescence, et puisque l’état propre de H est « proche » de celuide H0, nous pouvons indicer les états propres de H par le même nombre quantique(ici n).

Nous pouvons facilement obtenir la correction d’ordre 2 à l’énergie. Pour cela nousmultiplions par le bra 〈ϕn | l’équation (13.8), ce qui conduit à ε2 = 〈ϕn |W |1 〉. Nousutilisons l’expression de |1 〉 trouvée ci-dessus. Finalement :

En = E0n + 〈ϕn |W |ϕn 〉 +

∑m t.q. m�n

|〈ϕm |W |ϕn 〉|2

E0n − E0

m+ O(W3) (13.12)

1. Remarquons que la condition de normalisation nous a donné la condition Re〈0 |1 〉 = 0. Nous jus-tifions maintenant qu’il est toutefois possible de choisir le vecteur de telle sorte que 〈0 |1 〉 = 0. Ima-ginons que l’équation (13.11) contienne un terme iα|ϕn 〉 d’ordre W1. La normalisation impose α ∈ R.Un tel terme peut toujours être éliminé grâce à la multiplication du vecteur par une phase globale :e−iα[|ϕn 〉 + iα|ϕn 〉 + |1 〉 + O(W2)] = |ϕn 〉 + |1 〉 + O(W2). Qed.©D

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Page 250: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

• Qu’est-ce qu’une petite perturbation ?

Cette expression nous permet de constater que le développement précédent n’a unsens que lorsque les éléments de matrice 〈ϕm |W |ϕn 〉, i.e. les couplages, sont pluspetits que les différences d’énergies E0

n − E0m.

• Illustration

Considérons l’hamiltonien représenté par la matrice :

H =

(E0

1 00 E0

2

)+

(W1 W12

W∗12 W2

)(13.13)

Nous supposons que les éléments de matrice de W sont beaucoup plus petits que ladifférence E0

1 − E02. En utilisant (13.12) nous obtenons :

E1 = E01 +W1 +

|W12|2

E01 − E0

2

+ · · · (13.14)

Ce résultat peut être comparé avec les expressions obtenues au chapitre 5 :

E± =E0

1 +W1 + E02 +W2

√√⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎝E01 +W1 − E0

2 − W2

2

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎠2

+ |W12|2. (13.15)

Nous vérifions que pour E01 > E0

2, le développement de E+ coïncide avec (13.14).

13.1.4 Valeur propre de H0 dégénérée

Supposons maintenant que la valeur propre ε0 = E0n est dégénérée, associée à dn vec-

teurs propres |ϕn, j 〉. Notons le sous espace propre E (E0n). Le vecteur |0 〉 appartient à

ce sous-espace. Introduisons le projecteur dans le sous espace :

Πndef=

dn∑j=1

|ϕn, j 〉〈ϕn, j |. (13.16)

La multiplication par Πn de (13.7) conduit à ΠnW |0 〉 + ΠnH0|1 〉 = ε1Πn|0 〉 +E0

nΠn|1 〉, i.e.ΠnWΠn|0 〉 = ε1|0 〉. (13.17)

Cette équation est une équation aux valeurs propres, correspondant à la diagonalisa-tion de la restriction de l’opérateur W au sous espace propre E (E0

n). Par rapport à laquestion initiale de diagonalisation de H0 +W dans l’espace de Hilbert complet (engénéral de dimension infinie), nous avons simplifié le problème en nous ramenant

240

Page 251: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

13.1. Méthode des perturbations – cas stationnaire

au problème de la diagonalisation d’une matrice de dimension dn. Nous obtenonsdn valeurs propres, notées ε1, j associées à des vecteurs propres | ϕn, j 〉, combinaisonslinéaires des |ϕn, j 〉. Les énergies à l’ordre 1 dans la perturbation sont données par :

En, j = E0n + ε1, j + O(W2) (13.18)

et les vecteurs propres | ϕn, j 〉 à l’ordre 0. On parle de levée de dégénérescence (par-tielle ou totale).

• Illustration

Pour bien insister sur la simplification que constitue la résolution de (13.17) (plutôtque l’équation exacte (H0 +W)|ψ 〉 = E|ψ 〉), considérons l’hamiltonien

H =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝

E01 0 0 0 · · ·

0 E01 0 0 · · ·

0 0 E02 0 · · ·

0 0 0 E03

......

.... . .

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠+

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝

0 W12 W13 W14 · · ·W∗

12 0 W23 W24 · · ·W∗

13 W∗23 0 W34 · · ·

W∗14 W∗

24 W∗34 0

......

.... . .

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠(13.19)

où nous supposons que E01 est la seule valeur propre dégénérée de H0. La restriction

Π1WΠ1 de la perturbation dans le sous espace propre E (E01) correspond au premier

bloc 2 × 2 sur la diagonale. En utilisant la méthode des perturbations on obtientimmédiatement les valeurs propres à l’ordre W1 et les vecteurs propres correspondant(à l’ordre W0)

E1,1 = E01 − |W12| + O(W2) −→ | ϕ1,1 〉 =

1√

2

[|ϕ1,1 〉 − e−iϕ|ϕ1,2 〉]

(13.20)

E1,2 = E01 + |W12| + O(W2) −→ | ϕ1,2 〉 =

1√

2

[|ϕ1,1 〉 + e−iϕ|ϕ1,2 〉

](13.21)

E2 = E02 + O(W2) −→ |ϕ2 〉 (13.22)

......

...

où W12 = |W12|eiϕ.

• Conclusion

À l’ordre 1, la méthode des perturbations consiste donc à négliger tous les élémentsde matrice de W couplant des vecteurs propres de H0 associés à des valeurs propresdifférentes. On comprend mieux que ceci ne peut être valable que dans la limite où|〈ϕn |W |ϕm 〉| � |E0

n − E0m|.©

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délit

.

241

Page 252: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

A contrario, l’étude d’une perturbation dans un sous-espace propre E (E0n) montre

quel est l’effet d’une « forte perturbation » (au sein de E (E0n) l’effet de W est for-

cément fort puisqu’il n’y a pas d’autre échelle d’énergie) : levée de dégénérescenced’ordre W et mélange important des vecteurs propres.

13.2 LA MÉTHODE VARIATIONNELLE

Afin de comprendre l’idée de la méthode, reprenons l’analyse de l’équation (13.1).On propose une forme approchée pour la solution xapprox

ε = χ(ε; {λ1, · · · , λn}), oùla fonction test χ peut être une fonction simple paramétrée par un ou plusieurs para-mètres {λ1, · · · , λn} choisi(s) afin d’optimiser la solution. La mise en œuvre de la mé-thode variationnelle requiert de faire un choix « raisonnable » de fonction test d’unepart, et de définir un critère permettant d’optimiser la solution d’autre part. Le critèrepeut par exemple être la minimisation de f (xapprox

ε , ε). À première vue il peut ne passembler très clair ce qu’on gagne à injecter la forme xapprox

ε = χ(ε; {λ1, · · · , λn}) dansl’équation : notons simplement que la recherche de la solution xε correspond à cher-cher une fonction de ε (un élément d’un espace fonctionnel de dimension infini) alorsque la recherche de xapprox

ε = χ(ε; {λ1, · · · , λn}) correspond à chercher quelles valeursdes paramètres optimisent la solution approchée, i.e. à chercher une(des) solution(s)dans un espace de dimension n fini. La méthode variationnelle cherche donc une so-lution dans un espace fonctionnel tronqué. Donnons- en une application concrète enmécanique quantique.

Application : état fondamental pour un potentiel quartique

Nous cherchons l’énergie E0 de l’état fondamental de l’équation de Schrödinger pourun potentiel quartique

H = − d2

dx2+

13α x4 (13.23)

(on a fait �2/(2m) = 1 pour alléger ; dans ce cas une énergie a la dimension de[E] = 1/[Long]2). Nous devons proposer une forme approchée. Son choix reposesur des considérations physiques : La fonction d’onde du fondamental est concen-trée autour de zéro, d’autre part elle ne doit pas posséder de nœud. Proposons unefonction d’onde test sous la forme d’une gaussienne ψtest(x) ∝ e−

12 (x/a)2

, dépen-dant d’un unique paramètre a. Le critère assez naturel consiste à minimiser l’éner-gie de cet état Eψtest (a) = 〈ψtest |H|ψtest 〉 (le théorème de Ritz nous assure queE[ψ] = 〈ψ |H|ψ 〉 � E0 ∀ |ψ 〉 normalisé, où E0 est l’énergie fondamentale que l’oncherche à approcher).

Il est facile de montrer que l’énergie de l’état est Eψtest (a) = 12a2 +

14αa4. Le premier

terme cinétique est minimal lorsque l’état est délocalisé (a → ∞) ; à l’inverse, le

242

Page 253: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

13.3. La méthode JWKB et l’approximation semiclassique

terme de confinement (énergie potentielle) est minimal lorsque l’extension de l’étatest réduite (a → 0). La valeur optimale de a qui minimise Eψtest (a) correspond doncà un compromis entre ces deux contraintes : on obtient a = α−1/3, ce qui nous donnela valeur approchée de l’énergie

Evar0 =

34α1/3. (13.24)

On peut la comparer à la valeur trouvée numériquement E0 � 0,7352α1/3.

13.3 LA MÉTHODE JWKB ET L’APPROXIMATIONSEMICLASSIQUE

Une autre méthode d’approximation assez utile en mécanique quantique est la mé-thode semiclassique, ou méthode BKW ou WKB ou JWKB ou WKBJ, etc, du nomde quatre de ses promotteurs2 Léon Brillouin (1889-1969), Harold Jeffreys (1891-1989), Hendrik Anthony Kramers (1894-1952) et Gregor Wentzel (1898-1978). Laméthode cherche une solution approchée de l’équation de Schrödinger dans la limitesemiclassique, i.e. en considérant formellement la limite �→ 0. Elle est assez facile àmettre en œuvre en dimension 1, toutefois sa généralisation en dimension supérieureest plus délicate.

Intéressons nous à l’equation de Schrödinger stationnaire dans une situation uni-dimensionnelle

E ψ(x) = − �2

2md2

dx2ψ(x) + V(x)ψ(x) (13.25)

dans une limite où � → 0 (plus correctement : dans une limite où l’action caracté-ristique du problème est � �). Nous commençons par effectuer le changement devariable :

ψ(x) = ei�

S (x). (13.26)

Nous obtenons facilement l’équation satisfaite par S (x) :

[S ′(x)]2 − i� S ′′(x) = 2m[E − V(x)]. (13.27)

Il est commode d’introduire pour la suite la notation

p(x)def=

√2m[E − V(x)] si E > V(x) ⇒ [S ′(x)]2 − i� S ′′(x) = +p(x)2

(13.28)

p(x)def=

√2m[V(x) − E] si E < V(x) ⇒ [S ′(x)]2 − i� S ′′(x) = − p(x)2.

(13.29)

2. La méthode a des origines mathématiques plus anciennes datant de la première moitié du xixe siècle :elle est alors appelée méthode de Liouville-Green. La contribution originale de Wentzel, Kramers etBrillouin est le traitement du raccordement des solutions propagatives aux solutions évanescentes (trai-tement des points tournants).©D

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Page 254: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

Nous cherchons maintenant la solution de l’équation différentielle non li-néaire (13.27) sous la forme d’un développement en puissances de � : S (x) = S 0(x)+S 1(x)+S 2(x)+· · · où S n = O(�n). À l’ordre 0 nous obtenons (S ′

0)2 = 2m[E−V(x)] i.e.

S 0(x) = ±∫ x

dx′ p(x′) si E > V(x) (13.30)

S 0(x) = ±i∫ x

dx′ p(x′) si E < V(x). (13.31)

À l’ordre 1 nous obtenons 2S ′1 = i�S ′′

0 /S′0 i.e S 1 =

12 i� ln S ′

0

S 1(x) =12

i� ln p(x) si E > V(x) (13.32)

S 1(x) =12

i� ln p(x) si E < V(x). (13.33)

Finalement, dans une région autorisée classiquement, la solution approchée del’équation de Schrödinger est donnée par la superposition de deux fonctionspropagatives

ψWKB(x) � 1√p(x)

[A e+

i�

∫ xdx′ p(x′) + B e−

i�

∫ xdx′ p(x′)

]si E > V(x) (13.34)

alors que dans les régions interdites classiquement elle prend la forme de deux solu-tions évanescentes

ψWKB(x) � 1√p(x)

[C e+

1�

∫ xdx′ p(x′) + D e−

1�

∫ xdx′ p(x′)

]si E < V(x) (13.35)

• Validité

La recherche d’une solution sous forme d’un déveleppoment S (x) = S 0(x) + S 1(x) +S 2(x) + · · · se justifie si S 0 � S 1 � S 2 � · · · . En écrivant plutôt S ′

1 � S ′0, nous

obtenons �p′(x)/p(x) � p(x), i.e. [�/p(x)]′ � 1. Nous reconnaissons la longueurd’onde de Broglie λdB(x)

def= h/p(x), ce qui permet d’obtenir la forme suggestive :∣∣∣∣∣dλdB(x)

dx

∣∣∣∣∣ � 1. (13.36)

Cette condition nous indique que le potentiel doit varier sur une échelle de longueurplus grande que l’échelle caractérisant les oscillations de la fonction d’onde (c’estune hypothèse adiabatique).

En particulier, les solutions semiclassiques ne permettent pas de discuter la dyna-mique de la particule au voisinage des points de rebroussement, ce qui est illustré surun exemple sur la figure 13.1.

244

Page 255: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

13.3. La méthode JWKB et l’approximation semiclassique

• Principe du raccordement des solutions propagatives et evanescentes

Nous expliquons le principe de raccordement des solutions propagatives (13.34) etévanescentes (13.35). Au voisinage du point tournant, xE tel que V(xE) = E, le po-tentiel peut être linéarisé. L’équation différentielle d2

dx2ψ(x) � V ′(xE)(x − xE)ψ(x)est l’équation d’Airy. Considérons par exemple le cas d’un bord réfléchissant (parexemple le potentiel de la figure 1.8 au voisinage de x = b). La solution de l’équationd’Airy décroissant pour x → ∞ doit être retenue, notée ψ(x) � Ai

[V ′(b)1/3(x − b)

].

Le comportement Ai(z → +∞) � 1√2π z1/4

exp− 23 z3/2 s’identifie avec (13.35) pour

C = 0. L’analyse du comportement asymptotique de la fonction d’Airy (du côtéautorisé classiquement), Ai(z → −∞) � 1√

π(−z)1/4 cos(23 (−z)3/2 − π

4 ) s’identifie avec(13.34) et nous montre que la phase relative entre les deux termes de (13.34) (phasedue à la réflexion sur la barrière de potentiel) est π/2, i.e. B = i A.

Figure 13.1– Approximation JWKB.

Pour le potentiel V (x) = �2

2ma2 e2x/a,comparaison de la solution donnée parl’approximation JWKB (en tirés) avecl’état stationnaireψk(x) = 1

π

√2ka sh(πka) Kika(ex/a)

d’énergie �2k2

2m (où Kν(z) est une fonctionde Bessel modifiée). L’écart entre lesdeux solutions est visible au voisinagedu point de rebroussement en x/a � 1.6.

�2 �1 0 1 2�1.0

�0.5

0.0

0.5

1.0

1.5

x�a

Ψ�x�

WK

B�x�

13.3.1 Applications

a) Règle de quantification semiclassique

Une application importante de la méthode JWKB, i.e. des formules (13.34) et (13.35)est de fournir une règle de quantification (la règle de quantification de Bohr-Sommerfeld). Considérons un potentiel confinant du type de celui de la figure 1.8et cherchons une condition permettant de déterminer le spectre des états liés. L’ex-pression (13.34) décrit la superposition d’une onde propagative vers la droite et d’uneonde propagative vers la gauche : elle suggère que la phase de la fonction d’onde évo-

lue de ΔΦaller =1�

∫ b

adx p(x) pour aller de a à b puis de la même quantité ΔΦretour =

ΔΦaller pour aller de b à a. On doit ajouter à ces deux phases une phase associée auxréflexions : celle-ci dépend de la nature des bords (figure 13.2). Par exemple nous ve-nons de voir que la réflexion sur un bord « mou » produit une phase π/2. Lorsqu’uneparticule se réfléchit sur un bord dur, l’annulation de la fonction d’onde au niveau©D

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Page 256: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

du bord, ψ(a) = 0 s’interprétè comme une phase à la réflexion Φreflexion = π. Dansla situation de la figure 1.8 on a donc ΔΦreflexions =

π2 +

π2 . Au total, au cours d’une

période, la phase accumulée est donc ΔΦtot = ΔΦaller + ΔΦretour + ΔΦreflexions. L’étatlié correspond à une condition de résonance, i.e. ΔΦtot = 2nπ avec n ∈ N.

Figure 13.2– Déphasage par uneréflexion.

La phase à la réflexion est π/2 pour unbord « mou » et π pour un bord « dur »

(cette dernière condition assurel’annulation de la fonction d’onde au

point tournant).

Finalement nous obtenons la condition de quantification semiclassique :

2∫ b

adx p(x) = 2π�

(n +

ν

4

)où

⎧⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎩ν = 2 pour deux bords mous

ν = 0 pour deux bords durs

ν = 1 pour un bord dur et un bord mou(13.37)

(ν est appelé « indice de Maslov »). Le lecteur ayant fait l’exercice 1.3 aura identifiéle sens physique du membre de gauche. Nous pouvons reécrire cette équation d’unefaçon plus suggestive :

2∫ b

adx

√2m[En − V(x)] = 2S(b|a; En) = Action sur une période = h

(n +

ν

4

)(13.38)

i.e. les valeurs propres de l’énergie sont telles que l’action de la trajectoire classiquecorrespondante est un multiple entier de la constante de Planck h = 2π� (à l’indicede Maslov près).

Nous pouvons illustrer ce résultat sur l’exemple très simple de l’oscillateur harmo-nique V(x) = 1

2mω2x2 : l’action d’une période est donnée par 2S(b|a; E) = 2πE/ω

(on utilise∫ 1

0dx

√1 − x2 = π/4). L’indice de Maslov est dans ce cas ν = 2 et l’équa-

tion (13.38) conduit bien au spectre En = �ω(n + 1/2) (dans ce cas l’approximationsemiclassique est exacte car le potentiel est quadratique).

b) Densité d’états semi-classique

Nous pouvons utiliser (13.38) pour obtenir une expression de la densité d’états dansl’approximation semiclassique. En écrivant ρ(En) ≈ 1/δEn où δEn

def= En+1 − En

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Page 257: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

13.3. La méthode JWKB et l’approximation semiclassique

est l’écart entre niveaux, nous voyons que la densité d’états est obtenue en déri-vant (13.38) par rapport à l’énergie. Nous reconnaissons la période classique dontl’expression a été obtenue dans l’exercice 1.3 :

ρWeyl(E) =1h

Tcl(E) (13.39)

Ce terme lisse de la densité d’états (en principe une superposition de δ) est appelé« terme de Weyl ».

Ce résultat est réminiscent de l’inégalité de Heisenberg temporelle (2.41) : l’équa-tion (13.39) se reécrit δEn Tcl(En) = h, et relie la période classique à la distance entreniveaux.

c) Transmission tunnel

Soit un potentiel V(x) présentant une barrière tunnel pour une particule d’énergie E,i.e. tel que V(x) > E pour x ∈ [a, b] (figure 13.3). En raccordant les solutions WKBpropagatives et évanescentes, nous obtenons l’amplitude de transmission à travers labarrière tunnel

tWKB ∼ exp−1�

∫ b

adx

√2m[V(x) − E] (13.40)

Figure 13.3– Transmission d’une particuled’énergie E à travers une barrière tunnel.

ba x

E

V(x)1

r

t

Exercice 13.2 (F) Calculer explicitement la transmission à travers une barrièrequadratique V(x) = − 1

2mω2x2 pour E < 0.

À retenir

Méthode des perturbations : les résultats (13.11, 13.12, 13.18).

Pour en savoir plus

Sur la méthode WKB : le chapitre 8 de [38] ou le chapitre vii de l’ouvrage [27].

Sur la méthode variationnelle : le chapitre 8 de [38] ou le chapitre 14 de [30].

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Page 258: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

Problèmes

13.1 Théorème de projection et facteurs de Landé atomiques

Dans la première partie du problème on démontre le théorème de projection. La se-conde partie en montre une application pour l’étude de l’effet Zeeman des atomes.

Commençons par énoncer le théorème. Soit �J l’opérateur de moment cinétique et �Vun opérateur vectoriel, i.e. dont les composantes obéissent aux relations de commu-tation (Chapitre 8) : ⎧⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎩

[Jz, Vx] = i�Vy

[Jz, Vy] = −i�Vx

[Jz, Vz] = 0

(13.41)

(les autres relations de commutation s’obtiennent par permutations circulaires des in-dices). Ces neuf relations peuvent être écrites de manière plus compacte [Ji, V j] =i�εi jkVk où εi jk est le tenseur totalement antisymétrique (chapitre 8). On note {| j, m 〉}la base d’états propres de �J 2 et Jz. Le sous espace de l’espace de Hilbert des vecteurspropres de �J 2 associés à la valeur propre �2 j( j + 1) est noté E j.

• Théorème de projection

Dans le sous espace E j, les deux opérateurs �V et �J sont proportionnels :

�V (E j) =〈�V · �J 〉 j

〈 �J 2〉 j

�J(E j) (13.42)

〈· · ·〉 j ≡ 〈 j, m | · · · | j, m 〉 désigne la moyenne de l’opérateur dans E j (pour un opé-rateur scalaire, la moyenne est indépendante de m). A(E j) désigne la restriction del’opérateur A dans le sous espace E j.

Autrement dit, tout opérateur vectoriel se comporte, dans E j, comme l’opérateur demoment cinétique lui-même.

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Page 259: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problèmes

A. Démonstration du théorème

1) On introduit la notation V± = Vx ± iVy. Montrer que :

[Jz, Vz] = 0 (13.43)

[Jz, V±] = ±�V± (13.44)

[J+, V+] = [J−, V−] = 0 (13.45)

[J+, V−] = −[J−, V+] = 2 �Vz (13.46)

2) Règles de sélection.Déduire à quelle(s) condition(s) sur m et m′ les éléments de matrice 〈 j, m |Vz| j′, m′ 〉et 〈 j, m |V±| j′, m′ 〉 sont différents de zéro.

3) Dans cette partie on démontre le théorème. Pour cela on utilse les relations decommutation (13.43,13.44,13.45,13.46).

a) Montrer que :

〈 j, m |V+| j, m′ 〉 = α+( j) 〈 j, m |J+| j, m′ 〉 ∀ m, m′ (13.47)

et

〈 j, m |V−| j, m′ 〉 = α−( j) 〈 j, m |J−| j, m′ 〉 ∀ m, m′ (13.48)

b) Montrer successivement que 〈 j, m |Vz| j, m 〉 = m�α+( j) et 〈 j, m |Vz| j, m 〉 =m�α−( j).

c) Déduire le théorème (13.42).

B. Application : effet Zeeman et facteurs de Landé atomiques

On considère un atome de numéro atomique Z. L’énergie des électrons s’exprimecomme :

H0 =

Z∑i=1

(�pi

2

2me− Ze2

ri

)+

∑i> j

e2

ri j(13.49)

où les �ri et les �pi sont les positions et les impulsions des électrons. On a introduit lesnotations ri = ||�ri ||, ri j = ||�ri−�r j|| et e2 = q2

e /(4πε0) où qe est la charge de l’électron. Lemoment orbital total de l’atome est la somme des moments de chacun des électrons :�L =

∑Zi=1��i. De même pour l’opérateur de spin �S =

∑Zi=1 �si.

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Page 260: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

1) a) Justifier physiquement que H0 commute avec �L et �S .

On note �J = �L + �S le moment cinétique total. Les valeurs propres de �L 2, �S 2 et�J 2 sont notées respectivement �2L(L+1), �2S (S +1) et �2J(J+1). Les valeurspropres de Jz sont notées �MJ .

b) Quelles sont les valeurs permises pour S ?

2) Corrections relativistes. Nous notons H1 = H0 + Wrel l’hamiltonien incluantles termes de corrections relativistes. Dans ce cas les valeurs propres de H1, notéesEnLS J , sont repérées par quatre nombres quantiques : un nombre quantique principal,noté n, puis les nombres L, S et J. On note EJ le sous espace propre associé. Pourquoiles valeurs propres de l’énergie ne dépendent-elles pas du nombre quantique MJ ?

3) Effet Zeeman. Dans cette question on traite l’effet d’un terme Zeeman (un champmagnétique dirigé suivant Oz) par la méthode des peturbations. L’hamiltonien com-plet est Htot = H1 +WZ avec

WZ = −γ B(Lz + 2S z) = ωB(Lz + 2S z). (13.50)

On a introduit γ = qe2me

(< 0) et ωB = −γ B > 0.

a) À l’aide du théorème de projection montrer que, dans le sous espace propre EJ ,l’opérateur �L est proportionnel à �J et calculer la constante de proportionnalité.Même question pour �S .

b) Montrer que les valeurs propres de Htot sont

EZnLS ;JMJ

(B) = EnLS J + gLS J �ωB MJ (13.51)

où gLS J est le facteur de Landé du niveau EnLS J , qu’on exprimera en fonction deL, S et J.

c) Calculer gLS J pour S = 0 et justifier le résultat. Même question pour S fini etL = 0.

d) Spectre Zeeman. On considère le cas L = 2 et S = 1. Préciser les valeurs de J per-mises et calculer les facteurs de Landé g21J associés aux différents niveaux En21J .Représenter soigneusement l’allure du spectre des énergies en fonction du champmagnétique B.

13.2 Mécanisme d’échange – Interaction coulombienne dans l’atomed’hélium

Nous montrons que le principe de Pauli et l’interaction coulombienne sont respon-sables d’une interaction effective ferromagnétique entre les spins des deux électronsde l’atome d’hélium.

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Page 261: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problèmes

L’hamiltonien

H =∑

i=1, 2

(�pi

2

2me− Ze2

||�ri||

)︸�����������������︷︷�����������������︸

H0

+e2

||�r1 − �r2||︸����︷︷����︸W

avec Z = 2 (13.52)

décrit l’énergie des électrons dans l’atome d’hélium. Nous notons φa(�r) un état sta-

tionnaire de l’ion He+ Hion =�p 2

2me− Ze2

||�r|| , et Ea l’énergie correspondante.

1) États propres de H0. Dans cette question nous étudions le spectre des deux élec-trons, sans prendre en compte le terme d’interaction mutuelle W .

a) Nous supposons que les deux électrons occupent deux orbitales |φa 〉 et |φb 〉 (unélectron dans chaque orbitale). Construire les états stationnaires de H0 factori-sés orbite⊗spin. Quel est l’intérêt de tels états ? Pourrait-on considérer des étatsstationnaires non factorisés ?

b) Donner le spectre des valeurs propres de H0. Discuter les dégénérescences desdeux premiers niveaux d’énergie.

2) État fondamental (1s2). Exprimer la correction apportée par le terme d’inter-action W à l’énergie du fondamental de H0. Estimer l’ordre de grandeur de la cor-rection perturbative. Comparer le résultat perturbatif avec le résultat expérimental :la première ionisation (He→He+) correspond à une transition de longueur d’ondeλ = 1/19.831 μm. Que pensez-vous de la validité de l’approche perturbative ?

3) Premier niveau excité (1s2s). Bien que les orbitales 2s et 2p soient dégénérées,les états 1s2s ont une énergie légèrement plus basse que les états 1s2p pour des rai-sons que nous ne discuterons pas. Nous oublierons donc ces derniers.

Montrer que l’énergie coulombienne lève la dégénérescence entre certains des étatsde 1s2s. On exprimera les corrections perturbatives en terme de l’intégrale de Cou-lomb

Cab =

∫d�r1d�r2 |φa(�r1)|2 e2

||�r1 − �r2|||φb(�r2)|2 (13.53)

et de l’intégrale d’échange

Jab =

∫d�r1d�r2 φa(�r1)φb(�r1)∗

e2

||�r1 − �r2||φa(�r2)∗φb(�r2). (13.54)

On admet que l’intégrale d’échange Jab > 0 (on pourra essayer de le justifier). Faireun diagramme d’énergie. Donner un ordre de grandeur pour la différence d’énergie(l’expérience donne 0.796 eV). Justifier physiquement pourquoi l’état triplet de spinest l’état de plus basse énergie.

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Page 262: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

4) Hamiltonien effectif. Montrer que, dans le sous-espace E (1s2s), l’interaction cou-lombienne peut être décrite de manière effective par l’Hamiltonien

Heff = B + A �S 1 · �S 2. (13.55)

Exprimer A et B en fonction de Cab et Jab. Pourquoi parle-t-on d’interaction ferro-magnétique ? Comparer l’ordre de grandeur de cette interaction effective avec celuide l’interaction dipolaire magnétique.

13.3 Mécanisme de super-échange – Isolant de Mott et antiferromagné-tisme

Au milieu des années 1980, la découverte par Berdnoz et Müller de céramiques pré-sentant des propriétés supraconductrices à beaucoup plus haute température que dansles supraconducteurs conventionnels a constitué une avancée majeure de la matièrecondensée des trente dernières années. Cette découverte a relancé la recherche d’unétat supraconducteur à haute température, passant l’année même de cette découvertede Tc � 35 K dans les oxydes de barium-lanthane-cuivre (LaBaCuO) étudiés parBerdnoz et Müller, à Tc � 93 K dans YBaCuO. Outre leurs propriétés supraconduc-trices fascinantes, observées à basse température et fort dopage (en trous ou en élec-trons), ces matériaux présentent une phase isolante de Mott et antiferromagnétique(pour des températures allant jusqu’à quelques 100 K) à dopage nul (un électron parsite).

L’origine de la phase antiferromagnétique (i.e. de l’interaction entre moments ma-gnétiques voisins tendant à les anti-aligner) n’est pas l’interaction dipolaire magné-tique, qui est caractérisée par une échelle d’énergie beaucoup trop petite (∼ 10−5 eV)comparativement aux échelles de température auxquelles est observée la phase an-tiferromagnétique. Elle trouve son origine dans plusieurs ingrédients : l’interactioncoulombienne, le principe de Pauli et la délocalisation des électrons sur plusieurssites du réseau cristallin.

L’objet du problème est de comprendre l’origine de cette interaction effective entrespins. Pour cela nous nous intéresserons à un problème beaucoup plus simple : deuxélectrons pouvant se déplacer sur deux sites voisins équivalents. Nous pouvonsd’ores et déjà expliquer la physique du phénomène que nous étudierons en détail.À cause de l’interaction coulombienne (∼qq eV), la configuration où les deux élec-trons occupent des sites distincts est favorisée : c’est la raison pour laquelle le cristalest dans une phase isolante (on parle d’isolant de Mott pour désigner cette propriétéinduite par l’interaction coulombienne). Si les électrons sont dans un état triplet despin, ils ne peuvent pas se placer sur la même orbitale (i.e. le même site), à causedu principe de Pauli. En revanche, lorsqu’ils se trouvent dans un état singulet despin, un électron peut se délocaliser sur les deux orbitales. Cette faible délocalisation

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Page 263: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problèmes

(faible, afin de ne pas augmenter l’énergie coulombienne) suffit à abaisser légèrementl’énergie de l’état singulet, qui sera donc favorisé énergétiquement, comparativementà l’état triplet. Ce mécanisme, proposé en 1934 par Kramers, porte le nom de super-échange3.

Espace de Hilbert d’un électron. L’espace de Hilbert d’un électron est He− =

Horb ⊗ Hspin. Les deux états orbitaux possibles sont l’état |φa 〉 et l’état |φb 〉 dé-crivant respectivement un électron localisé sur le site a et b (deux atomes voisinséquivalents du cristal).

1) Espace de Hilbert de 2 électrons. Construire une base d’états factorisés (non in-triqués) orbite⊗spin. Justifier l’introduction de tels états pour la recherche des étatsstationnaires du problème.

2) Construction du hamiltonien. L’hamiltonien H = Hcin+Hint comprend un termeHcin pour l’énergie cinétique des électrons et l’interaction ion-électron, ainsi qu’unterme Hint décrivant l’interaction coulombienne entre les deux électrons.

a) Justifier que le sous espace associé aux états triplet de spin n’est pas couplé à celuides états singulet.

b) Hamiltonien Hcin. En l’absence d’interaction entre électrons le problème est sé-parable : Hcin = h(1) + h(2) où h(i) est l’hamiltonien de l’électron i agissant sur lesorbitales comme ⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩h(1)|φa 〉 = −t|φb 〉

h(1)|φb 〉 = −t|φa 〉avec t ∈ R+ (13.56)

Calculer l’action de Hcin sur les vecteurs de base construits à la question 1.

c) Hamiltonien Hint. Nous faisons l’approximation que Hint est diagonal dans labase des orbitales localisées, {|φi 〉 ⊗ |φ j 〉} avec i, j ∈ {a, b}. L’énergie d’interac-tion vaut U > 0 lorsque deux électrons sont sur le même site et est nulle autre-ment. Déduire la matrice représentant Hint dans la base de vecteurs construits à laquestion 1.

3) Spectre de H = Hcin + Hint.

a) Analyse perturbative. En pratique U � t. Discuter physiquement cette condi-tion. Nous analysons le spectre de H en traitant le terme cinétique non diagonalpar perturbation. Calculer la correction à l’énergie du fondamental de Hint. Don-ner la forme approchée du vecteur propre correspondant.

3. Le super-échange implique en principe une transition par un ion intermédiaire, complication iciéludée.©D

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Page 264: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 13 • Méthodes d’approximation

b) Calcul exact. Nous introduisons l’opérateur de réflexion, défini par son action surles orbitales R |φa 〉 = |φb 〉 et R |φb 〉 = |φa 〉. Justifier que [R, H] = 0. Montrerque les états de parité différentes ne sont pas couplés par H. Utiliser cette obser-vation pour simplifier la recherche du spectre de H. Tracer les valeurs propres del’énergie en fonction du couplage t et analyser les dégénérescences.

4) Interaction effective. Lorsqu’on s’intéresse à la physique de basse énergie (� U)on peut oublier les états d’énergie d’ordre E ∼ U. Montrer que l’hamiltonien suivant,décrivant une interaction effective entre spins électroniques, présente le même spectreque les états de basse énergie de H :

Heff = B + A �S 1 · �S 2 (13.57)

Préciser les valeurs de A et B permettant d’assurer la coïncidence des spectres desdeux problèmes. Quelle est la nature de cette interaction effective (ferromagnétique,tendant à aligner les spins ou antiferromagnétique tendant à les anti-aligner) ?

5) Échange vs. Super-échange. Notons que le problème que nous avons étudié iciest analogue à l’étude des états de basse énergie de la molécule d’hydrogène H2 (deuxions équivalents auxquels sont liés, par interaction coulombienne, deux électrons in-teragissant eux-mêmes).Dresser la liste des similitudes/différences entre la physique décrite dans le problèmesur l’échange dans l’atome d’hélium et celui sur le super-échange pour la moléculed’hydrogène.

Pour en savoir plus

Sur le magnétisme quantique, on pourra consulter l’ouvrage : L.-P. Lévy, Magnétismeet supraconductivité, CNRS-InterÉditions, Paris (1997).

P. W. Anderson, « Antiferromagnetism. Theory of superexchange interaction », Phys.Rev. 50, 350–356 (1950).

P. Fazekas, Lecture notes on electron correlation and magnetism, World scientific, 1999.

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Page 265: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

STRUCTURES FINEET HYPERFINEDU SPECTRE

DE L’HYDROGÈNE

14

Nous avons présenté dans le chapitre 12 une première théorie quantique de l’atomed’hydrogène. Lorsque les résultats de ce modèle (le spectre En = −R/n2, n ∈ N∗) sontconfrontés aux expériences, on constate que les niveaux se scindent en sous niveauxsur des échelles d’énergies très inférieures au Rydberg. Notre modèle d’atome d’hy-drogène doit donc être affiné et prendre en compte d’autres phénomènes physiquesnégligés jusque là :

• La théorie de Schrödinger est une théorie quantique non relativiste, or nous avonsvu que la vitesse typique de l’électron dans l’atome est très grande, de l’ordre dev ∼ αc, où α � 1/137 est la constante de structure fine. En nous rappelant quel’expression de l’énergie d’une particule libre donnée par la relativité restreinteest E = mc2/

√1 − v2/c2, nous pouvons attendre des corrections relatives d’ordre1

(v/c)2 ∼ α2 ∼ 10−4. La prise en compte des effets relativistes donne naissance àune levée de dégénérescence partielle du spectre En = −R/n2 appelée « structurefine » et qui sera étudiée dans la prochaine section.

• Lorsque la nature quantique du champ électromagnétique est prise en compte (dansle cadre de l’électrodynamique quantique), le couplage du champ électromagné-tique à l’atome conduit à des déplacements des niveaux de l’atome, appelés « cor-rections radiatives ». Pour les états de moment � = 0 la correction est du mêmeordre de grandeur que la structure fine, mais beaucoup plus petite si � � 0.

• Le proton et l’électron sont deux particules de spin 1/2 dont les moments ma-gnétiques sont couplés. Cette petite contribution à l’énergie est responsable d’unelevée de dégénérescence appelée « structure hyperfine », qui sera discutée plus bas.

• Le proton et l’électron ont été jusqu’à présent traités comme deux particules ponc-tuelles. Nous savons aujourd’hui que le proton est un objet composite (composéde 3 quarks) qui a une extension de l’ordre du fermi (10−15 m). La distribution decharge du proton n’est donc pas localisée en un point et l’électron est soumis à unpotentiel qui diffère du potentiel coulombien aux distances inférieures au fermi.Ceci affecte essentiellement l’énergie des ondes s. Cet effet ne sera pas discuté ici(cf. chapitre xi de [8]).

1. Dans les atomes, les électrons de cœur sont caractérisés par des vitesses v ∼ Zαc. Pour les grandsnuméros atomiques Z, les effets relativistes peuvent donc devenir très importants.©D

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Page 266: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 14 • Structures fine et hyperfine du spectre de l’hydrogène

14.1 STRUCTURE FINE

La théorie quantique relativiste de l’électron a été développée en 1928 par Dirac.L’étude de l’équation de Dirac est très intéressante mais dépasse le cadre de ce cours.Nous décrivons ici les effets relativistes de façon approchée en étudiant les termescorrectifs à l’énergie non relativiste, obtenus par un développement en puissance de1/c de l’hamiltonien de Dirac. Ce développement prend la forme (cf. §33 et §34de [28] ou chapitre XII de [8]) :

H = mec2 +�p 2

2me+ V(r)︸��������︷︷��������︸H0

− �p 4

8m3ec2︸�︷︷�︸

Wm

+1

2m2ec2

1r

dV(r)dr

�� · �S︸�������������������︷︷�������������������︸Wso

+�2

8m2ec2ΔV(r)︸���������︷︷���������︸

WD

+O(1/c4)

(14.1)où V(r) = −e2/r est le potentiel coulombien. Discutons brièvement le sens physiquedes différents termes et estimons l’ordre de grandeur des corrections qu’ils apportent.

• Correction de masse

Le terme Wm est appelé terme de « correction de masse » et correspond au terme en1/c2 du développement de la relation de dispersion relativiste E =

√m2

ec4 + �p 2c2 =

mec2 +�p 2

2me− �p 4

8m3ec2 + O(1/c4).

Pour donner une estimation de la contribution du terme Wm aux énergies,souvenons-nous que l’impulsion de l’électron dans l’atome est de l’ordre de :p ∼ αmec. Nous déduisons que Wm ∼ α4 mec2.

• Couplage spin-orbite

Lorsqu’on procède à un changement de référentiel, nous savons que les champs élec-trique et magnétique sont mélangés. Dans le référentiel du proton, le champ est unchamp électrique radial qe �E = − e2

r2�ur. En passant dans le référentiel de l’électron, le

champ électromagnétique acquiert une composante magnétique �B′ � − 1c2�v × �E où �v

est la vitesse de l’électron. Ce champ magnétique se couple au moment magnétiquede l’électron �Me = γe�S :

Wso ∼ −γe�B′ · �S = − 1

mec2

dV(r)dr

(�v × �ur) · �S =1

m2ec2

1r

dV(r)dr

�� · �S . (14.2)

Notons que cet argument simple rate un facteur 1/2 ; des références discutant ce pointsont données dans [8]. Par commodité nous introduisons la notation :

Wso = ξ(r)�� · �S avec ξ(r)def=

1

2m2ec2

1r

dV(r)dr=

e2

2m2ec2

1r3

. (14.3)

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Page 267: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

14.1. Structure fine

L’estimation de la contribution de ce terme est obtenue en remplaçant r par le rayonde Bohr : Wso ∼ e2

m2ec2�2

a3B∼ α4 mec2 (nous avons également utilisé que le moment

cinétique est d’ordre �).

• Terme de Darwin

L’interprétation physique de ce terme peut se comprendre de la manière suivante :l’interaction électromagnétique entre le proton et l’électron n’est pas instantanée maisse propage à vitesse c. Un photon fait un aller-retour entre le proton et l’électron enun temps aB/c pendant lequel l’électron s’est mû de aBv1/c = α aB = �/mec. Cettelongueur est appelée longueur de Compton et notée λc

def= �/mec. Au niveau d’une

description phénomènologique, nous sommes donc tentés de remplacer l’interactionlocale entre le proton et l’électron par une interaction non locale, effective sur cetteéchelle de longueur : le potentiel V(�r) dans l’équation de Schrödinger est alors rem-placé par

∫d�r ′ f (�r ′) V(�r + �r ′) où f (�r) est une fonction normalisée, de largeur λc.

On peut toujours donner un développement d’une fonction étroite sous la forme2 :f (�r) = δ(�r) + bλ2

cΔδ(�r) + · · · (où b est un coefficient sans dimension, dépendant duchoix de la fonction). Le deuxième termeλ2

cΔV(�r) coïncide avec le terme de DarwinWD.

Pour le potentiel coulombien, nous utilisons Δ1r = −4π δ(�r), ce qui conduit à :

WD =π�2e2

2m2ec2

δ(�r). (14.4)

Seules les ondes s (de moment � = 0), qui ont une valeur finie à l’origine, sontdonc affectées par le terme de Darwin. En calculant les éléments de matrice de WD,la distribution de Dirac est remplacée par la valeur de la densité de probabilité àl’origine 〈δ(�r)〉n00 = |ψn00(�0)|2 ∼ 1/a3

B et nous trouvons WD ∼ �2e2

m2ec2a3

B∼ α4 mec2.

Finalement nous constatons que les trois termes sont du même ordre de grandeur :

Wm ∼ Wso ∼ WD ∼ α4 mec2. (14.5)

Si nous comparons cet ordre de grandeur à l’énergie de liaison, d’ordre R = 12α

2mec2,nous obtenons des corrections relatives très petites, de l’ordre de W/R ∼ α2 ∼ 10−4.Ceci justifie un traitement perturbatif des trois termes correctifs.

Commençons par revenir sur l’hamiltonien H0. L’espace de Hilbert de la particuleest Horb ⊗ Hspin. Les valeurs propres de H0 sont En = −R/n2, dégénérées 2n2 fois,

2. Un exemple d’un tel développement est celui de la fonction fa(x) = 12a e−|x|/a de largeur a. Considérons

l’intégrale par une fonction ϕ(x) régulière à l’origine. La limite a → 0 nous donne :∫

dx fa(x)ϕ(x) =ϕ(0) + a2ϕ′′(0) + O(a4). Nous pouvons écrire fa(x) = δ(x) + a2δ′′(x) + O(a4).©D

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Page 268: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 14 • Structures fine et hyperfine du spectre de l’hydrogène

associées aux états |n, �, m 〉 ⊗ |± 〉. L’application de la méthode des perturbationsnous conduit donc à diagonaliser les restrictions des opérateurs Wm, Wso et WD dansles sous espaces propres E (En).

• Trois éléments de matrice utiles

Nous aurons besoin de calculer les valeurs moyennes de r−k dans un état proprede H0 pour k = 1, 2, 3. Grâce à l’invariance par rotation, cette valeur moyenne nedépend que des nombres quantiques n et � (autrement dit : 〈n, �, m |r−k |n, �, m 〉 =∫

d�r r−k |ψn,�,m(�r)|2 =∫ ∞

0 dr r2−k Rn,�(r)2) :⟨aB

r

⟩n,�=

1n2

(14.6)⟨(aB

r

)2⟩

n,�=

1

n3

1� + 1/2

(14.7)

⟨(aB

r

)3⟩

n,�=

1n3

1�(� + 1)(� + 1/2)

pour � > 0 (14.8)

Le premier de ces éléments de matrice n’est rien d’autre que l’énergie potentiellemoyenne, à un facteur près : 〈Ep〉n,� = 〈− e2

r 〉n,� = 2En = − e2

aB

1n2 .

14.1.1 Termes de correction de masse et de Darwin

Les termes de correction de masse et de Darwin sont faciles à traiter. Puisque Wm

et WD sont scalaires, la restriction des opérateurs dans le sous espace E (En) est pro-portionnelle à l’identité : autrement dit 〈n, �, m |Wm|n, �′, m′ 〉 = Cn,�δ�,�′δm,m′ oùCn,� est une constante. Les restrictions de Wm et WD sont déjà diagonales dans lessous espaces E (En). Nous déduisons que la correction est simplement : ΔEm

n,� =

〈n, �, m |Wm|n, �, m 〉.En écrivant que Wm = − 1

2mec2 (H0 +e2

r )2, on montre que :

ΔEmn,� = −

12α4mec2

(1n3

1� + 1/2

− 34n4

). (14.9)

Le terme de Darwin est aisément traité en perturbation en notant que la valeur dela fonction d’onde s à l’origine est : |ψn00(�0)|2 = 1/(π n3a3

B) (on utilise l’expression dela fonction radiale (12.23) et l’annexe A). On obtient :

ΔEDn,� = δ�,0

12α4mec2 1

n3. (14.10)

258

Page 269: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

14.1. Structure fine

14.1.2 Couplage spin-orbite

Nous montrons qu’au sein du sous espace E (En), l’opérateur Wso est diagonal dans labase des états propres |n, �; j, m 〉 de {H, �� 2, �J 2, Jz} : 〈n, �; j, m |Wso|n, �′; j′, m′ 〉 ∝δ�,�′δ j, j′δm,m′ . Ce résultat est démontré à l’aide des considérations (règles de sélec-tion) suivantes :

• Invariance par rotation. Wso = ξ(r)�� · �S est un scalaire pour les ro-tations engendrées par le moment cinétique total �J, ce qui conduit à〈n, �; j, m |Wso|n, �′; j′, m′ 〉 ∝ δ j, j′δm,m′ .

• Nature vectorielle de ��. Le moment cinétique orbital �� ne génère pas de rotationdu spin. Du point de vue des rotations orbitales (rotations engendrées par ��), Wso

est une combinaison linéaire des composantes d’un opérateur vectoriel. Nous endéduisons que 〈n, �; j, m |Wso|n, �′; j′, m′ 〉 est non nul ssi �−�′ = 0, ±1 (théorèmede Wigner-Eckart).

• Parité. �� est un opérateur pair, une condition nécessaire de non nullité de l’élémentde matrice est � − �′ pair.

Qed.En utilisant la relation �� · �S = 1

2

( �J 2 − �� 2 − �S 2) nous obtenons immédiatement lesvaleurs propres de la restriction de Wso dans le sous-espace propre

ΔEson,�, j =

�2ξn,�

2[j( j + 1) − �(� + 1) − 3/4

](14.11)

où ξn,�def= 〈n, �, m |ξ(r)|n, �, m 〉 =

∫ ∞0

dr r2ξ(r) Rn,�(r)2. On aboutit finalement àΔEso

n,0,1/2 = 0 et, en utilisant (14.8),

ΔEson,�, j =

12α4mec2 1

2n3

j( j + 1) − �(� + 1) − 3/4�(� + 1)(� + 1/2)

pour � > 0. (14.12)

14.1.3 Conclusion

Nous regroupons les différentes corrections :

ΔEn, j = ΔEmn,� + ΔEso

n,�, j + ΔEDn,� (14.13)

où l’absence de dépendance en � est brièvement commentée plus bas.Dressons un petit tableau précisant les valeurs des différentes contributions pour

les états des niveaux n = 1 et n = 2. Nous utilisons les notations spectroscopiques :on précise la valeur de j en indice. Par exemple, le niveau fondamental est noté 1s1/2.Les différents états de n = 2 sont 2s1/2, 2p1/2 et 2p3/2, etc.©D

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Page 270: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 14 • Structures fine et hyperfine du spectre de l’hydrogène

Tableau 14.1– Corrections relativistes aux niveaux. n = 1, n = 2 et n = 3 (en unitéα2R = 1

2α4mec2).

1s1/2 2s1/2 2p1/2 2p3/2 3s1/2 3p1/2 3p3/2 3d3/2 3d5/2

ΔEmn,� −

54

−1364

−7

192−

7192

ΔEson,�,j 0 0 − 1

24+

148

0

ΔEDn,� +1 +

18

0 0 0 0 0 0

ΔEn,j −14

− 564

− 564

− 164

− 136

− 136

− 7108

− 7108

− 1324

Nous remarquons sur le tableau que, bien que chacune des contributions dépendedu nombre quantique �, le résultat ne dépend que des nombres quantiques n et j. Onpeut vérifier que cela reste vrai pour tous les niveaux. La somme des trois contribu-tions est indépendante de � et donnée par :

ΔEn, j = −12α4mec2 1

n3

(1

j + 1/2− 3

4n

)(14.14)

Cette propriété trouve son origine dans les symétries de l’équation de Dirac (l’inva-riance sous les rotations générées par le moment cinétique total �J = ��+�S ), qui ont étépartiellement perdues de vue en séparant les corrections d’ordre 1/c2 en trois termesdans le développement (14.1).

L’ordre de grandeur des corrections relativistes est donné par 12α

4mec2 = α2R �0.724 meV, bien inférieur au Rydberg, d’où la dénomination de « structure fine ». Lespectre est représenté sur la figure 14.1.

14.2 CORRECTIONS RADIATIVES

Lorsque la nature quantique du champ électromagnétique est prise en compte, lesfluctuations quantiques sont responsables de corrections aux énergies données parla théorie de Dirac, appelées corrections radiatives (ou déplacement de Lamb). Cescorrections sont importantes pour les états de moment orbital � = 0, du même ordrede grandeur que celles obtenues dans l’étude de la structure fine. Une estimationgrossière donne [10] ΔEradiat

n,� ∼ α3 Rn3 ln(1/α) δ�,0. On obtient en particulier une levée

de dégénérescence entre les niveaux 2s1/2 et 2p1/2, la valeur précise étant E(2s1/2) −E(2p1/2) � 1058 MHz (cf. figure 14.1).

260

Page 271: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

14.3. Structure hyperfine du niveau 1s1/2

Figure 14.1– Premiers niveaux de l’atome d’hydrogène.La première colonne correspond aux valeurs données par la théorie non-relativiste (équa-tion de Schrödinger). La deuxième colonne représente les corrections relativistes (sec-tion 14.1). La troisième colonne montre les corrections radiatives dues à la quantificationdu champ électromagnétique (déplacement de Lamb). La dernière colonne représente lastructure hyperfine (section 14.3). Attention, les échelles ne sont pas respectées.

14.3 STRUCTURE HYPERFINE DU NIVEAU 1S1/2Nous discutons dans cette section une dernière correction ayant pour origine le cou-plage entre les moments magnétiques �Me = γe�S e de l’électron et �Mp = γp�S p du pro-ton. L’hamiltonien d’interaction a une forme assez compliquée (donnée par exempledans le chapitre 27 de l’ouvrage [4]), cependant il se simplifie lorsque l’atome setrouve dans un état de symétrie s :

W (�=0)hf = −2

3μ0γeγpδ(�r) �S e · �S p (14.15)

où μ0 est la permittivité du vide (ε0μ0c2 = 1).Commençons par estimer l’ordre de grandeur du couplage hyperfin. Comme nous

l’avons déjà discuté plus haut (pour le terme de Darwin) la fonction δ peut être rem-placée par la densité électronique à l’origine ∼ 1/a3

0. En remplaçant les spins par �,nous obtenons

Whf ∼ gegpme

mpα2R (14.16)

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Page 272: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 14 • Structures fine et hyperfine du spectre de l’hydrogène

où R = 12α

2mec2 est le Rydberg. Le produit des facteurs gyromagnétiques nous faitperdre un facteur gegp

memp

≈ 0.006 par rapport à la structure fine, caractérisée par

l’échelle α2R.Nous discutons la levée de dégénérescence au sein du niveau 1s1/2. Dans le sous

espace propre on peut remplacer la fonction δ par sa moyenne : 〈δ(�r)〉1s = |ψ100(�0)|2 =1/π a3

B. Finalement on doit traiter un hamiltonien de la forme : 〈Whf〉1s =A�2�S e ·

�S p où A = 43gegp

mempα2R. Si on introduit le moment cinétique total, �F = �S e + �S p,

nous voyons que, dans le sous espace propre, Whf est diagonal dans la base des états|S e, S p; F, M 〉. Nous obtenons la correction perturbative :

ΔE1s1/2,F =A2

(F(F + 1) − 3

2

). (14.17)

L’état singulet (F = 0) est l’état fondamental et l’état triplet a une énergie A au-dessus. La valeur de cette différence d’énergie est ΔE1s1/2,F=1 − ΔE1s1/2,F=0 = A �6 μeV (rappelons la structure fine est caractérisée par l’échelle α2R � 700 μeV).

Cette sous structure du niveau 1s1/2 joue un rôle très important en astrophysique.En effet, le milieu interstellaire est occupé par d’immenses gaz d’hydrogène trèsfroids. À cause de la température très basse, seuls des niveaux de faible énergiepeuvent être excités et émettre de la lumière qu’on détectera dans les télescopes.La transition entre les deux niveaux hyperfins fournit une raie bien identifiable, delongueur d’onde λ � 21 cm, et a permis des observations très importantes (on pourraconsulter [5] qui contient une discussion intéressante).

À retenir

Le problème sur la structure hyperfine du niveau 1s1/2 est un exercice simple et impor-tant.

Pour en savoir plus

Sur la théorie quantique relativiste (équation de Dirac) on pourra consulter le chapitreXX de [33] ou [28].

Sur les corrections radiatives on pourra consulter le chapitre III de l’ouvrage [10]. Lecalcul précis du déplacement de Lamb dans l’atome d’hydrogène est décrit dans la cha-pitre 7 de : C. Itzykson & J.-B. Zuber, Quantum Field Theory, McGraw-Hill (1980).

262

Page 273: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

PROBLÈMESDÉPENDANTS

DU TEMPS

15

Dans de nombreuses situations physiques, le système d’intérêt est sondé en étu-diant sa réponse à une perturbation extérieure. C’est par exemple le cas dans lesexpériences de spectroscopie : on étudie alors comment le système, un atome parexemple, absorbe et émet du rayonnement. Si nous avons jusqu’à présent admis quel’atome peut effectuer des transitions entre états stationnaires par absorption/émissiond’énergie, nous n’avons pas encore dressé le cadre permettant de décrire le proces-sus d’absorption/émission lui-même. Nous donnons ici une présentation simplifiéedu problème.

15.1 MÉTHODE DES PERTURBATIONS

Une approche des problèmes dépendant du temps est fournie par la méthode desperturbations. Considérons un problème décrit par un hamiltonien décomposé sousla forme

H(t) = H0 +W(t). (15.1)

L’hamiltonien H0 décrit par exemple un atome isolé ; son spectre, noté {|ϕn 〉, En},est supposé connu. W(t) est supposé être « petit » de façon à pouvoir être traité parla méthode des perturbations (ce pourra être par exemple l’hamiltonien décrivant lecouplage à une onde lumineuse). Dans le cas où l’hamiltonien dépend du temps,l’analyse spectrale perd de son intérêt : déterminer le spectre des valeurs propreset vecteurs propres de H(t) à un instant t ne nous permet pas d’obtenir l’opérateurd’évolution. Nous revenons à l’analyse du comportement temporel de l’état quan-tique. Nous supposons que le système se trouve initialement dans un état propre deH0 : |ψ(0) 〉 = |ϕi 〉. En l’absence de la perturbation, l’évolution de l’état quantique estdonnée par |ψ(t) 〉 = e−

i�

Eit |ϕi 〉, i.e. |〈ϕi |ψ(t) 〉|2 = 1. Comprendre comment la pré-sence du terme W(t) affecte la dynamique du système sera formulé commodément enterme de probabilité de transition : quelle est la probabilité pour effectuer une tran-sition de l’état |ϕi 〉 vers un autre état |ϕ f 〉 sous l’effet de la perturbation après untemps t ? L’objectif du prochain paragraphe est donc de déterminer la probabilité detransition entre deux états propres de l’hamiltonien non perturbé :

Pi→ f (t) = |〈ϕ f |ψ(t) 〉|2 pour |ψ(0) 〉 = |ϕi 〉. (15.2)©D

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Page 274: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 15 • Problèmes dépendants du temps

La logique est la même que celle exposée dans la section 13.1, mais cette fois ap-pliquée à l’équation de Schrödinger temporelle (5.1), au lieu de l’équation de Schrö-dinger stationnaire. Nous décomposons le vecteur propre sur la base des états propresde l’hamiltonien non perturbé :

|ψ(t) 〉 =∑

n

cn(t) |ϕn 〉 (15.3)

et résolvons l’équation de Schrödinger avec la condition initiale cn(0) = δn,i. Si nousprojetons l’équation de Schrödinger sur le vecteur |ϕn 〉 nous obtenons

i� cn(t) = En cn(t) +∑

m

〈ϕn |W(t)|ϕm 〉 cm(t) (15.4)

i.e. un ensemble d’équations différentielles linéaires du premier ordre pour les com-posantes cm(t), couplées par la perturbation W(t). Écrivons le coefficient sous la formed’un développement

cn(t) = c(0)n (t) + c(1)

n (t) + c(2)n (t) + · · · (15.5)

où le terme c(k)n (t) est d’ordre Wk. En injectant cette forme dans l’équation (15.4) et

en identifiant les contributions aux différents ordres nous obtenons les équations :

i� c(0)n (t) = En c(0)

n (t) (15.6)

i� c(k)n (t) = En c(k)

n (t) +∑

m

〈ϕn |W(t)|ϕm 〉 c(k−1)m (t) pour k � 1. (15.7)

La résolution de ces équations différentielles peut être mise en œuvre assez sim-plement de manière récursive, au moins en principe. Nous insérons la solution àl’ordre 0,

c(0)n (t) = δn,i e−

i�

Eit, (15.8)

dans l’équation différentielle pour c(1)n (t). Nous obtenons l’amplitude de probabilité

pour observer une transition après un temps t vers un état |ϕn 〉 :

c(1)n (t) = − i

�e−

i�

Ent∫ t

0dt′ 〈ϕn |W(t′)|ϕi 〉 e

i�

(En−Ei)t′ (15.9)

L’amplitude de probabilité a donc la forme d’une transformée de Fourier de l’élémentde matrice de la perturbation, à la fréquence de Bohr ωni = (En−Ei)/�. La probabilitéde transition à l’ordre le plus bas est donnée par Pi→ f (t) � |c(1)

f (t)|2.

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Page 275: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

15.1. Méthode des perturbations

15.1.1 Cas d’une perturbation constante

Il sera utile pour la suite de considérer le cas où la perturbation est « branchée » àl’instant initial W(t) = W0 θ(t), où θ(t) est la fonction de Heaviside. L’intégrale sur letemps de (15.9) se calcule facilement :

c(1)f (t) = − i

�e−

i�

E f t ei2ω f i t

sin(ω f it/2)

ω f i/2W f i où W f i

def= 〈ϕ f |W0|ϕi 〉 (15.10)

où ω f idef= (E f − Ei)/�. La probabilité de transition vers l’état final |ϕ f 〉 est donc

Pi→ f (t) = |c f (t)|2 �|W f i|2

�2f (t,ω f i) (15.11)

où nous avons introduit la fonction (figure 15.1)

f (t,ω)def=

(sin(ωt/2)ω/2

)2

. (15.12)

La probabilité de transition est d’autant plus importante que l’écart d’énergie �ω f i

est faible.

15.1.2 Cas d’une perturbation sinusoïdale

Le cas où la dépendance temporelle est une fonction harmonique est important. Ilcorrespond par exemple à la situation d’un atome soumis à une onde lumineuse mo-nochromatique. Écrivons

W(t) = W0 cos(ωt) (15.13)

Le calcul de l’intégrale temporelle dans (15.9) conduit cette fois à

c(1)f (t) = − i

�e−

i�

E f t 12

(e

i2ω+t sin(ω+t/2)

ω+/2+ e

i2ω−t sin(ω−t/2)

ω−/2

)W f i (15.14)

ω±def=

E f − Ei

�± ω . (15.15)

La probabilité de transition est donc donnée par

Pi→ f (t) �|W f i|2

�2

14

[f (t,ω+) + f (t,ω−)

](15.16)

où nous avons négligé le terme croisé sin(ω+t/2) sin(ω−t/2) du développement de|e i

2ω+t sin(ω+t/2)ω+/2

+ ei2ω−t sin(ω−t/2)

ω−/2|2, ce que nous justifions plus bas et ce qui explique

que l’on ne retrouve que la moitié de (15.11) en faisant ω = 0 dans (15.16).©D

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Page 276: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 15 • Problèmes dépendants du temps

• Règles de sélection

L’examen de (15.11) et (15.16) montre que la transition |ϕi 〉 → |ϕ f 〉 n’est possibleque si l’élément de matrice W f i est non nul, ce qui donne lieu à des règles de sélec-tion, nous en verrons une illustration concrète plus bas.

�4 �2 0 2 40.0

0.2

0.4

0.6

0.8

1.0

1.2

1.4

E

�t��E��

f�t

,E���

2Π�

t

t�2Π�

4Π��tFigure 15.1– Fonctions f (t,ω) et δ( t)(E).

• Résonance : émission et absorption

La probabilité de transition (15.16) est une fonction oscillante du temps. L’analyse dela fonction f (t,ω±), comme fonction de ω (figure 15.1) fait apparaître des conditionsde résonance : choisissant ω > 0 par convention, le terme f (t,ω+) = f (t,ω f i+ω) estrésonant pour �ω = Ei − E f (si Ei > E f ). On interprète la transition entre les deuxétats stationnaires comme un processus d’émission d’un quantum d’énergie �ω. Leterme f (t,ω−) = f (t,ω f i − ω) est résonant pour �ω = E f − Ei (si E f > Ei), i.e. unprocessus d’absorption. Nous comprenons maintenant la raison pour laquelle nousavons négligé le terme croisé sin(ω+t/2) sin(ω−t/2) puisqu’il ne peut satisfaire à lafois les deux conditions de résonance.

La condition de résonance est imposée par les fonctions f (t,ω±) qui, étant delargeur finie δω ∼ 1/t, autorisent un léger désaccord entre E f − Ei = �ω f i et �ω,inversement proportionnel au temps d’observation δE ∼ �/t. Nous retrouvons icil’inégalité de Heisenberg temporelle.

• Validité de (15.16)

Nous pouvons écrire la condition de validité du développement perturbatif|c(1)

n (t)| � 1. Hors résonance, nous obtenons la condition

|W f i|�|ω ± ω f i|

� 1 si ω � |ω f i|. (15.17)

Si la fréquence de la perturbation coïncide avec la fréquence de la transition entredeux niveaux, ω = |ω f i|, une des deux fonctions f (t,ω±) croît comme t2 et l’approche

266

Page 277: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

15.1. Méthode des perturbations

perturbative ne peut être valable que pour des temps suffisamment courts

|W f i| t�

� 1 si ω = |ω f i|. (15.18)

15.1.3 Couplage de |ϕi 〉 à un continuum d’états |ϕf 〉 :règle d’or de Fermi

Une situation intéressante (et courante) est celle où l’état final |ϕ f 〉 appartient à uncontinuum d’états. Un exemple de situation physique est l’ionisation d’un atome :si un atome d’hydrogène dans son état fondamental est éclairé avec un rayonnementd’énergie supérieure à son énergie d’ionisation, l’état final appartient au continuumdes états de diffusion, proton-électron non liés.

Nous commençons par considérer le cas de la perturbation indépendante du temps(la généralisation au cas d’une perturbation sinusoïdale ne présente aucune difficulté).Intéressons-nous à la probabilité Pϕi(t)

def= 1 − |ci(t)|2 pour que le système quitte son

état initial :

Pϕi(t) =∑f (�i)

Pi→ f (t) � 1

�2

∑f (�i)

|W f i|2 f

(t,

1�

(E f − Ei)

). (15.19)

La somme (15.19) est dominée par les états d’énergies E f ∼ Ei, lorsque la condi-tion de résonance est satisfaite, ce qui maximise la fonction f (t,ω f i) → f (t, 0) =t2. Toutefois le nombre d’états pour lesquels la condition de résonance est sa-tisfaite (approximativement) est proportionnel à la largeur en énergie de la fonc-tion f (t, (E f − Ei)/�), donnée par δE f ∼ �/t (figure 15.1). La sommation sur lesétats finals conduit donc à une probabilité qui croît linéairement avec le temps :Pϕi (t) =

1�2

∑f (�i) |W f i|2 f

(t, 1�(E f − Ei)

) ∼ 1�2 |W f i|2 f (t, 0) δE f ∼ |W f i|2t/�. Pour

rendre plus précis l’argument, nous introduisons la fonction

δ(t)(E)def=

f (t, E/�)2π�t

=t

2π�

(sin(Et/2�)

Et/2�

)2

−→t→∞

δ(E). (15.20)

Cette fonction de largeur �/t et de hauteur t/� (figure 15.1) vérifie la propriété∫ +∞−∞ dE δ(t)(E) = 1 (d’après (A.3) de l’annexe A). La probabilité pour quitter l’état

s’exprime donc comme

Pϕi (t) �2π�

t∑f (�i)

|W f i|2 δ(t)(E f − Ei). (15.21)

Puisque les états finals appartiennent à un continuum, nous admettons que le temps test assez long pour que nous puissions substituer δ(t)(E) par δ(E). La probabilité dequitter l’état se comporte linéairement avec le temps

Pϕi(t) � Γϕi t pour t � 1/Γϕi, (15.22)©D

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Page 278: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 15 • Problèmes dépendants du temps

où le taux de probabilité pour quitter l’état |ϕi 〉 est donné par

Γϕi =2π�

∑f (�i)

|W f i|2 δ(E f − Ei) (15.23)

Ce résultat porte le nom de « règle d’or de Fermi »1. On peut montrer que pour lestemps plus longs Pϕi (t) � 1 − e−Γϕi t, i.e. |ci(t)|2 � e−Γϕi t [10].

a) Illustration : modèle très simplifié de désintégration

Nous revenons sur le problème étudié en entrée du chapitre 10 : considérons deuxparticules intéragissant par l’intermédiaire du potentiel radial représenté sur la fi-gure 10.3, présentant un puits, assurant l’existence d’état(s) lié(s) stable(s) d’éner-gie(s) E < 0, et une barrière de potentiel, responsable de l’existence d’états méta-stables d’énergies E > 0. Notons que le problème n’est pas complètement acadé-mique. Gamov a proposé en 1929 un tel modèle afin de décrire la désintégration α decertains noyaux : un puits modélisant l’interaction forte entre le noyau et la particuleα, et une barrière coulombienne (cf. [41] par exemple).

Nous nous intéressons dans le paragraphe uniquement aux états métastables duproblème, aussi nous simplifions encore le problème en considérant uniquement l’ef-fet de la barrière et étudions l’équation de Schrödinger sur R+ avec une barrière enx = L :(

− d2

dx2+ λ δ(x − L)

)ψ(x) = k2ψ(x) pour x > 0 avec ψ(0) = 0. (15.24)

Lorsque λ → +∞, le segment [0, L] est découplé du demi-axe infini [L,∞[. Pourλ = ∞ nous avons donc deux problèmes découplés :

• L’intervalle [0, L] associé au spectre de la boîte quantique En =(nπ

L

)2 et ϕn(x) =√2L sin(nπ

L x) avec n ∈ N∗ (en posant � = 2m = 1 pour simplifier).

• Le demi-axe infini associé à un continuum d’états ψk(x) =√

2π sin k(x−L) d’éner-

gie Ek = k2 avec k ∈ R+.

Lorsque λ est fini, les états discrets du puits se couplent au continuum d’états. Nousappliquons la règle d’or de Fermi (15.23) afin de déterminer avec quelle probabilitéla particule, initialement dans le puits dans un état |ϕn 〉, sort du puits vers un état|ψk 〉 du continuum. L’amplitude de probabilité pour traverser la barrière se comporte

1. Règle d’or de Dirac ? La règle d’or de Fermi est en fait due à Dirac : P. A. M. Dirac, The quantumtheory of the emission and absorption of radiation, Proc. Roy. Soc. London A114, 243 (1927). Voiraussi [14].

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Page 279: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

15.2. Interaction atome-rayonnement

comme tδ � −2ik/λ dans la limite λ → ∞, nous attendons donc un couplage entreles états liés et les états du continuum de la forme 〈ψk |W |ϕn 〉 ≈ χ(Ek, En)/(λ

√L), où

χ(Ek, En) est une fonction des deux énergies (la présentation est heuristique : strictosensu les deux états |ψk 〉 et |ϕn 〉 vivent dans deux intervalles distincts, ce qui rend lecalcul de l’élément de matrice difficile à définir ici). L’application de (15.23) conduità l’expression du taux de fuite

Γϕn ∼∑ψk

|〈ψk |W |ϕn 〉|2 δ(Ek−En) ∼∫ ∞

0dk

χ(Ek, En)2

Lλ2δ(Ek−En) =

1

Lλ2

χ(En, En)2

2√

En.

(15.25)Si nous n’avons pas déterminé la dépendance du taux dans l’énergie, nous avons aumoins identifié les dépendances en L et dans le couplage λ. Cette expression peutêtre comparée au résultat de l’exercice 10.2 dans lequel nous avions obtenu Γϕn �4E3/2

n /(Lλ2).

b) Forme généralisée de la règle d’or de Fermi

En général, l’état final |ϕ f 〉 est repéré par plusieurs nombres quantiques : son énergieE f mais aussi d’autres nombres quantiques, que nous regroupons sous la notationΩ f : |ϕ f 〉 ≡ |E f ,Ω f 〉. Par exemple, si nous pensons au problème de désintégrationα, le paramètre Ω f représente la direction dans laquelle la particule α est émise.

Nous considérons le taux de probabilité pour aller de l’état |ϕi 〉 vers n’importelequel des états |E f ,Ω f 〉, pour Ω f fixé. Nous sommons (15.11) sur les énergies :Γϕi→Ω f =

1t

∑f avec Ω f fixe Pi→ f (t) → 1

t

∫dE f ρ(E f ,Ω f )Pi→ f (t), où ρ(E f ,Ω f ) est la

densité d’états, à Ω f fixé. Finalement :

Γϕi→Ω f =2π�|〈E f = Ei,Ω f |W0|ϕi 〉|2 ρ(E f = Ei,Ω f ) (15.26)

15.2 INTERACTION ATOME-RAYONNEMENT

Nous discutons quelques aspects du problème de l’interaction entre un atome et lechamp électromagnétique. Dans un premier temps le champ électromagnétique seradécrit classiquement. Puis nous terminerons ce chapitre par l’analyse du problèmed’émission spontanée, qui requiert une description quantique du champ électroma-gnétique.

Considérons un atome soumis à une onde électromagnétique monochromatique.Plaçons nous dans une jauge telle que le potentiel vecteur est donné par �A(�r, t) =Re

[�A0ei�k·�r−iωt] où �A0 est un vecteur perpendiculaire à �k. L’hamiltonien d’un atome©D

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Page 280: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 15 • Problèmes dépendants du temps

d’hydrogène soumis à cette onde est

H(t) =1

2me

(�p − qe �A(�r, t)

)2− e2

r� Hatome −

qe

me

�A(�r, t) · �p. (15.27)

En général l’amplitude de l’onde électromagnétique est extrêmement faible compa-rée à l’échelle du champ du proton auquel est soumis l’électron dans l’atome, ce quijustifie de négliger le terme quadratique (diamagnétique) dans le potentiel vecteur(cf. exercice 15.1). Notons que nous avons fait implicitement une autre hypothèsesimplificatrice en oubliant les degrés de liberté associés aux variables du centre demasse : en particulier nous oublions que l’absorption/émission de lumière s’accom-pagne non seulement d’échange d’énergie mais aussi d’échange d’impulsion (cetteobservation est importante : elle est utilisée pour manipuler des atomes avec de lalumière, par exemple dans les techniques de refroidissement et de confinement desgaz atomiques).

15.2.1 Approximation dipolaire électrique

Nous nous intéressons au problème d’interaction entre l’atome et la lumière pourdes fréquences comparables aux énergies de liaison des atomes, i.e. typiquementquelques eV. Dans ce cas la longueur d’onde typique du rayonnement est donnée

par λ ∼ �c/R, où R = mee4

2�2 � 13.6 eV est le Rydberg. Nous obtenons λ ∼ a0/α oùα � 1/137 est la constante de structure fine et a0 le rayon de Bohr. Autrement dit lalongueur d’onde associée aux transitions entre niveaux de l’atome d’hydrogène estbeaucoup plus grande que la distance typique électron-proton, kr ∼ α � 1, ce quijustifie de négliger la dépendance en �r de l’onde plane dans le terme de perturbation.Cette approximation porte le nom d’approximation dipolaire-électrique. Finalement,l’hamiltonien de perturbation se simplifie en

W(t)(approx. DE)

� − qe

me�p · Re

[�A0 e−iωt

]. (15.28)

La discussion se généralise aisément au cas d’un atome de numéro Z > 1 : l’impul-sion dans l’équation (15.28) doit être remplacée par la somme des impulsions de tousles électrons �p →

∑i �p

(i).Nous écrivons l’amplitude du champ sous la forme �A0 =

1iωE0 �ε�k où �ε�k est un vec-

teur unitaire spécifiant l’état de polarisation et E0 l’amplitude du champ électrique.En utilisant 1

me�p = i

�[H,�r] nous pouvons écrire l’élément de matrice sous la forme

suggestive

W f i(approx. DE)

� −qeE0ω f i

ω〈ϕ f |�ε�k · �r |ϕi 〉. (15.29)

L’expression permet de discuter les règles de sélection associées aux transitions dipo-laires électriques : la nature vectorielle de l’opérateur de perturbation, �p dans (15.28)

270

Page 281: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

15.2. Interaction atome-rayonnement

ou �r dans (15.29), nous montre que les moments orbitaux des deux états intial etfinal doivent satisfaire Δ� = 0, ±1, où Δ� = �ϕ f − �ϕi désigne la différence des mo-ments orbitaux associés aux deux états. De plus puisque, l’opérateur de position (etl’impulsion) est un opérateur impair, nous obtenons finalement

Δ� = ±1 (15.30)

Une illustration de ces règles de sélection a été discutée lors de l’étude du spectre desodium (cf. figure 8.6).

15.2.2 Absorption et émission stimulée

En pratique l’atome n’est jamais irradié par une onde strictement monochromatique,mais soumis à un rayonnement ayant une certaine largeur spectrale Δω finie. Nousnotons ν(ω) la distribution spectrale du rayonnement incident, reliée à l’intensité àfréquence ω comme ν(ω) = I(ω)/

∫dω′I(ω′). Le taux de probabilité de transition est

donnée par intégration de (15.16) :

Γi→ f =1t

∫dων(ω)Pi→ f (t)

� 2π�

∫dων(ω) |W f i |2

14

[δ(t)(�ω + �ω f i) + δ

(t)(�ω − �ω f i)]

(15.31)

où ω f idef= (E f − Ei)/�. Nous pouvons supposer le temps d’irradiation suffisamment

long, t � 1/Δω, afin de remplacer les fonctions δ(t)(E) par des distributions δ(E) de

Dirac. Si Ei > E f , nous obtenons le taux d’émission Γem.stim.i→ f � π

2�2 ν(ωi f )|W f i|2. Cetaux est proportionnel à l’intensité lumineuse (à fréquence ω = ωi f ) c’est pourquoion parle d’émission stimulée (par le champ électromagnétique). Si Ei < E f , nous

obtenons un taux d’absorption Γabsi→ f � π

2�2 ν(ω f i)|W f i|2. En utilisant (15.28), et ensuposant le vecteur de polarisation réel, nous aboutissons finalement à

Γem.stim.i→ f = Γ

absf→i �

π

2�2ν(ωi f )

(ωi f

ω

)2(qeE0)2

∣∣∣〈ϕ f |�ε�k · �r|ϕi 〉∣∣∣2 (15.32)

Cette description semi-classique de l’interaction atome-rayonnement (le champ a étédécrit classiquement) montre qu’il y a donc équilibre entre absorption et émission(stimulée). Nous allons maintenant voir que la nature quantique du champ électro-magnétique est responsable d’un déséquilibre entre absorption et émission2.

2. Einstein avait observé en 1917 que la cohérence avec la physique statistique impose un déséquilibre

entre les processus d’émission et d’absorption : Γemi→ f > Γ

absf→i (afin d’assurer que le rapport des popu-

lations des atomes dans les deux états satisfasse πi/π f = e−�ωi f /kBT ). Einstein introduit alors la notiond’émission spontanée et obtient le taux d’émission spontanée en utilisant la condition d’équilibre entrematière et rayonnement (et la loi de Planck) ; cf. chapitre 17 de [5] ou chapitre 21 de [4].©D

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Page 282: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 15 • Problèmes dépendants du temps

15.2.3 Émission spontanée

Dans le paragraphe précédent, nous avons montré que la présence d’un champ élec-tromagnétique permet d’induire des transitions entre niveaux atomiques. Nous mon-trons dans ce paragraphe que l’atome dans le vide initialement dans un état excitéretombe nécessairement dans un état de plus basse énergie en émettant un photon,à cause du couplage au champ électromagnétique. Ce phénomène, appelé émissionspontanée, est une conséquence de la quantification du champ électromagnétique.

a) Quantification du champ électromagnétique

Dans l’introduction du chapitre 7, nous avions observé que la nature quadratique del’énergie du champ électromagnétique, Hem =

∫d�r

( ε02�E 2 + 1

2μ0�B 2), suggère un pro-

blème d’oscillateurs harmoniques. La « quantification » du champ électromagnétiqueconduit à remplacer le potentiel vecteur par un opérateur de champ (re-chapeautonsles opérateurs un instant) :

�A(�r) =∑�k,σ

√�

2ε0 Volω�k

[a�k,σ �ε�k,σ ei�k·�r + a†

�k,σ�ε ∗�k,σ

e−i�k·�r]. (15.33)

La somme porte sur tous les modes du champ électromagnétique et sur les deuxétats de polarisation, indicés par σ (avec �ε�k,σ ⊥ �k). La pulsation du mode est notée

ω�k = ||�k||c. Le volume au dénominateur vient de la condition de normalisation des

ondes planes. À chaque mode (�k,σ) est associé un couple d’opérateurs de création etd’annihilation satisfaisant les relations de commutation : [a�k,σ, a†

�k′,σ′] = δ�k,�k′ δσ,σ′ . Le

champ électromagnétique se comporte donc comme un ensemble d’oscillateurs har-moniques indépendants. Un photon est défini comme une excitation du mode (�k,σ) :un état du champ pour lequel « l’oscillateur » de pulsation ω�k est dans son nième état

excité s’interprète comme un état à n photons. L’opérateur a†�k,σ

crée un photon (�k,σ)

et a�k,σ en détruit un. Nous utiliserons en particulier (cf. chapitre 7) :

〈n photons �k |(a†�k,σ

)n|vide 〉 =√

n!. (15.34)

b) Taux d’émission spontanée

Nous considérons un atome dans un état excité |atome e 〉 en l’absence de tout rayon-nement électromagnétique. L’hamiltonien décrivant le couplage atome-champ a laforme (15.28) :

W0(approx. DE)

� − qe

me�p · �A(�0); (15.35)

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Page 283: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

15.2. Interaction atome-rayonnement

le potentiel vecteur est maintenant représenté par l’opérateur (15.33). D’après (15.34)l’état |ϕi 〉 = |atome e 〉 ⊗ |vide de photon 〉 est couplé à l’état désexcité de l’atome enprésence d’un photon |ϕ f 〉 = |atome g 〉 ⊗ |photon �k 〉. Les énergies des deux étatssont Ei = Ee et E f = Eg + �||�k||c. Nous pouvons calculer explicitement l’élément dematrice couplant les deux états

〈ϕ f |W0|ϕi 〉 = −qe

me〈g;�k |�p · �A(�0)|e; vide 〉 � iqeωeg

√�

2ε0 Volω�k〈g |�r · �ε ∗

�k,σ|e 〉.

(15.36)où ωeg

def= (Ee − Eg)/�. L’état du photon appartient à un continuum d’états pour une

densité d’états finals donnée par la densité de modes du photon :

ρ(E f ,Ω f ) =1

∑�k,σ

δ(ε − �||�k||c) = Volε2

4(π�c)3(15.37)

où le facteur 1/(4π) tient compte du fait que la direction est fixée. L’applicationde (15.26) nous donne le taux de probabilité pour que l’atome retombe dans sonfondamental par émission d’un photon dans la direction Ω ≡ (θ,ϕ) :

Γe→(g,Ω) =e2ω3

eg

2π�c3

∑σ

∣∣∣∣〈e |�r · �ε�k,σ|g 〉∣∣∣∣2 (15.38)

c) Transition 2p→1s de l’atome d’hydrogène

Nous considérons spécifiquement la transition 2p→1s de l’atome d’hydrogène. Poursimplifier nous choisissons un état initial tel que m = 0. En remarquant, d’une partque 〈2, 1, 0 |ri|1, 0, 0 〉 ∝ δi,3 et d’autre part que

∑σ(�ε�k,σ)i(�ε ∗�k,σ

) j est le projecteur

δi j −kik j

�k 2, nous obtenons la relation∑σ

∣∣∣∣〈2, 1, 0 |�r · �ε�k,σ|1, 0, 0 〉∣∣∣∣2 = |〈2, 1, 0 |z|1, 0, 0 〉|2 sin2 θ , (15.39)

où θ repère la direction du vecteur �k. L’élément de matrice peut être calculé exacte-ment à l’aide des fonctions d’onde données dans le chapitre 12 : 〈2, 1, 0 |z|1, 0, 0 〉 =

28

35√

2aB où aB est le rayon de Bohr. Finalement nous obtenons le taux de probabilité

d’émission du photon dans la direction Ω ≡ (θ,ϕ) :

Γ2pz→(1s,Ω) =25

37π

mee10

�6c3sin2 θ =

26

37πα3 R�

sin2 θ où Rdef=

mee4

2�2(15.40)

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Page 284: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 15 • Problèmes dépendants du temps

est le Rydberg et α = e2

�c la constante de structure fine. Nous constatons que, lorsquel’état initial est |2, 1, 0 〉 (noté 2pz), le photon est émis plus probablement dans ladirection θ = π/2. Le taux de probabilité de désexcitation d’un des états de 2p estdonné par :

Γ2p =

∫dΩΓ2pz→(1s,Ω) =

(23

)8

α3 2R�

(15.41)

(l’intégrale s’exprime à l’aide de la fonction beta d’Euler, cf. annexe A). Unatome dans son état excité 2p retombe dans son état fondamental après un tempsd’ordre 1/Γ2p. L’application numérique donne Γ2p � 0.66×109 s−1. L’atome d’hydro-gène dans le vide a donc typiquement besoin d’une nanoseconde pour se désexciter.

d) Largeur intrinsèque des niveaux d’énergie

Puisque l’électron ne reste jamais plus longtemps que Δt ∼ 1/Γϕn dans le niveau, oùΓϕn est le taux de probabilité donné par la règle d’or de Fermi, la relation d’incertitudetemporelle nous montre que l’énergie du niveau En ne peut pas être définie avec uneprécision supérieure à δEn ∼ �Γϕn . On appelle �Γϕn la largeur du niveau En. Il s’agitd’une largeur intrinsèque : dans une expérience de spectroscopie les transitions entreniveaux d’énergie se manifestent par des raies spectrales de largeurs finies en énergie.La largeur est également due à plusieurs phénomènes extrinsèque (par exemple l’effetDoppler dans un gaz atomique) mais ne peut pas être réduite en-deça de la largeurintrinsèque �Γϕn .

À retenir

Éq. (15.9). La règle d’or de Fermi.

Absorption et émission stimulée, émission spontanée.

Pour en savoir plus

Les ouvrages [8] (chapitre 13), [5] (chapitre 17), [38] (chapitre 11), [30] (chapitre 14),discutent la question de l’interaction atome-lumière. Un ouvrage plus avancé est [10].

On trouvera de nombreux ouvrages sur la quantification du champ électromagnétique :[38, 9, 28, 33] ou des ouvrages de théorie quantique des champs, par exemple l’ouvragetrès pédagogique [37].

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Page 285: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

Exercices

15.1 (F) Donner l’ordre de grandeur du champ électrique « vu » par l’électron d’unatome d’hydrogène dans son état fondamental. Comparer avec l’amplitude du champproduit par un laser de 1 Watt (on suppose que le faisceau a une section de 1 mm2).

15.2 (F) Comparer le temps de vie du niveau 2p à la période de rotation de l’électrondans le niveau n = 2.

15.3 (TD) Si l’atome est initialement dans son état 2s, les règles de sélection in-terdisent la transition dipolaire électrique (〈2s |�r · �ε�k,σ|1s 〉 = 0). Quel mécanismepeut assurer la transition 2s→1s ? Sur quelle approximation doit-on revenir ? Estimerl’ordre de grandeur de Γ2s→1s et comparer à Γ2p→1s.

15.4 (D) Rayonnement par un dipôle classique

On considère un dipôle classique �d(t) = Re[�dω e−iωt]. Dans l’approximation dipo-

laire électrique, le champ rayonné est donné par �A(�r, t) � −iω μ04πr

�dω eiωr/c−iωt et les

champs électrique et magnétique �E = Re[iω�A

]et �B � 1

c�ur × �E. On note �Πmoy la

moyenne temporelle du vecteur de Poynting �Π = 1μ0�E × �B.

a) Calculer la puissance rayonnée dans la direction Ω ≡ (θ,ϕ) par unité d’angle so-lide, dP

dΩ = r2�ur · �Πmoy, pour un dipôle aligné sur l’axe vertical, �dω = qea�uz, où aest une longueur.

b) Déduire l’expression de la puissance totale rayonnée Pray =∫

dΩ dPdΩ en fonction

de l’accélération �r 2 ≡ ω4a2.

c) Atome de Rutherford. On donne une analyse classique de la désexcitation del’atome d’hydrogène. Sans prendre en compte l’émission, l’électron décrit uneorbite fermée, que nous supposerons circulaire. Nous admettons que l’énergierayonnée pendant une révolution est très petite devant l’énergie (mécanique), i.e.que l’électron spirale « doucement », de façon à pouvoir considérer que l’orbitereste quasiment circulaire pendant un tour. Déduire une équation différentiellepour le rayon de l’orbite. Calculer le temps nécessaire pour que le rayon varie der(0) = 4a0 à r(τclass

2p→1s) = a0. Comparer au résultat quantique obtenu dans le cours(à 1/Γ2p). Quel est le problème de ce modèle ?

15.5 (MF) Oscillations de Rabi dans un atome

On considère un atome irradié par un champ monochromatique ayant une fréquenceproche d’une des transitions atomiques ω ∼ ωab. On modélise l’atome comme un

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Page 286: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 15 • Problèmes dépendants du temps

système à deux niveaux, |a 〉 et |b 〉. On suppose que les deux états sont coupléspar un terme de la forme W(t) = W0 cosωt où W0 est réelle symétrique dans labase {|a 〉, |b 〉} et n’a pas d’élément sur la diagonale. En utilisant les résultats duproblème 15.1 sur la résonance magnétique, exprimer la probabilité de transitionPa→b(t). Comparer au résultat perturbatif (15.16).

Problème

15.1 Résonance magnétique

Nous étudions la dynamique d’un spin soumis à un champ magnétique �B(t) tournantà pulsation ω :

�B(t) = B1

(�ux cosωt + �uy sinωt

)+ B0 �uz, (15.42)

(figure 15.2). Ce problème est au cœur d’un dispositif expérimental proposé dansles années 1930 par Rabi, permettant une mesure très précise du facteur gyroma-gnétique γ (la constante de couplage entre le spin et le champ magnétique) par unphénomène de résonance.

Figure 15.2– Résonance magnétique : schéma expérimental.Un Stern et Gerlach est suivi d’une cavité de longueur L dans laquelle règne un champmagnétique tournant. On dispose un second Stern et Gerlach à la sortie de la cavité.

1) Préliminaire. Décrire qualitativement la dynamique d’une particule soumise à unchamp magnétique uniforme et constant (on discutera les cas d’une particule portantune charge électrique et d’une particule neutre).

Dans la suite du problème, nous étudions une particule neutre de spin S = 1/2 (atomeou molécule par exemple) et nous nous concentrons sur la dynamique de son spin.

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Page 287: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problème

2) Hamiltonien pour un champ magnétique tournant. La dynamique du spin �S dela particule est décrite par l’hamiltonien

H(t) = −�B(t) · �M (15.43)

où �M = γ�S est le moment magnétique de l’atome et γ est le rapport gyromagné-tique. Nous écrivons le vecteur d’état dans la base {|+ 〉, | − 〉} des états propres deS z : |χ(t) 〉 = χ+(t) |+ 〉 + χ−(t) | − 〉, où le doublet (χ+, χ−) est appelé un spineur.Écrire les équations d’évolution pour les deux composantes χ±(t) du spineur.

3) Référentiel tournant.

a) Donner l’interprétation physique du changement de variables

ϕ±(t)def= χ±(t) e±iωt/2. (15.44)

b) Montrer que les nouvelles variables obéissent à un système d’équations différen-tielles

i�ddt

(ϕ+(t)ϕ−(t)

)= H

(ϕ+(t)ϕ−(t)

)(15.45)

où H est indépendant du temps. Pourquoi H est-il indépendant du temps ?

4) Diagonalisation de H. Calculer les valeurs propres et vecteurs propres de H.

5) Oscillations de Rabi. L’état de spin de l’atome est initialement |χ(0) 〉 = |+ 〉.a) Calculer ϕ±(t), puis χ±(t).

b) Donner l’expression de la probabilité P+→−(t) pour que le spin se retourne à l’ins-tant t.

c) Étudier la probabilité hors résonance |ω − ω0| � ω1 et à résonance ω = ω0. Surune même figure, représenter le résultat dans ces deux cas limites. Commentaire ?

6) Résonance magnétique. On envoie un jet de particules de vitesse v dans le dis-positif représenté sur la figure 15.2. La longueur L de la zone où règne le champmagnétique tournant est telle que ω1

Lv = (2n + 1)π.

a) Quels rôles jouent les deux appareils de Stern & Gerlach dans le dispositif ?

b) On mesure le nombre d’atomes détectés en fonction de B0, à ω et B1 fixés ; lerésultat est représenté sur la figure 15.3. Expliquer l’allure de cette courbe. À quoicorrespond le pic ?

c) La résonance se produit pour ω = 59 GHz et B0 = 1 T. Calculer γ et déduire lefacteur de Landé g de l’atome défini par γ = g qe

2meoù qe et me sont respectivement

la masse et la charge de l’électron.

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Page 288: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 15 • Problèmes dépendants du temps

Figure 15.3– Nombre d’atomes détectésen fonction de la composante Bz = B0.

Pour en savoir plus

Une discussion détaillée du problème, des motivations expérimentales et des repèreshistoriques, peuvent être trouvés dans le chapitre 12 de l’ouvrage [5].

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Page 289: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

PARTICULE CHARGÉEDANS UN CHAMP

MAGNÉTIQUE

1616.1 INTRODUCTION

Le champ magnétique a été introduit dans l’équation de Schrödinger au chapitre 8afin d’induire une dynamique non triviale pour l’état de spin (section 8.2). Nousavons toutefois essentiellement éludé l’effet du couplage entre le champ magnétiqueet les degrés de liberté orbitaux de la particule (lorsque celle-ci est chargée), à l’ex-ception très notable de l’analyse semi-classique (en termes de force et de trajectoire)de l’expérience de Stern et Gerlach (§ de la section 8.2.3).

L’objet du présent chapitre est de discuter l’effet du champ magnétique sur lesdegrés de liberté orbitaux d’une particule chargée, i.e. d’étudier les propriétés del’hamiltonien

H =12

me�v2 =

12me

[�p − q �A(�r)

]2. (16.1)

Dans un premier temps nous analysons la dynamique d’un électron soumis à unchamp magnétique uniforme �B. Contrairement au cas des équations du mouvementclassiques, qui ne dépendent que des champs électrique et magnétique, la dynamiquequantique est gouvernée par les potentiels scalaire et vecteur. Cette remarque soulèvediverses questions. La première, d’ordre fondamental, est de savoir si la dynamiquede la particule est sensible au potentiel (comme les équations du mouvement) ouseulement au champ. Nous étudierons dans la section 16.3 une situation dans la-quelle la particule explore des régions où le champ magnétique est nul mais où lepotentiel vecteur ne l’est pas, ce qui induit une dynamique non triviale (notons quecela ne signifie pas que les propriétés physiques dépendent du choix de jauge ! Laphysique est invariante de jauge).

16.2 CHAMP MAGNÉTIQUE HOMOGÈNE

Nous discutons dans cette section la physique de l’électron soumis à un champ ma-gnétique homogène. Classiquement, la particule chargée est soumise à la force deLorentz, perpendiculaire à la vitesse. Celle-ci induit donc un mouvement de rotationuniforme de l’électron perpendiculairement au champ magnétique, de pulsation

ωc =qBme

(16.2)

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Page 290: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 16 • Particule chargée dans un champ magnétique

oùωc/(2π) est appelée la fréquence cyclotron. Puisque un champ magnétique �B = B�uz

n’a pas d’effet sur la dynamique selon la direction �uz ; nous nous limiterons à l’étudedu mouvement d’un électron dans un plan perpendiculaire au champ magnétique.Du point de vue des propriétés de transport électroniques, qui seront abordées dansla deuxième section, la dimension 2 est tout à fait particulière et donne naissanceau phénomène de quantification de la conductivité (on parle d’« effet Hall quan-tique ») observée à basse température (T ∼qq K) et fort champ magnétique (B ∼1T),une manifestation remarquable de la mécanique quantique découverte au début desannées 80 et à l’origine de deux prix Nobel : en 1985 à Klaus von Klitzing pour ladécouverte de l’effet Hall quantique entier et en 1998 à Robert Laughlin, Horst Stör-mer et Daniel Tsui pour l’étude de l’effet Hall quantique fractionnaire. C’est un sujetfascinant posant des questions fondamentales sur le rôle du désordre ou sur le com-portement d’un gaz d’électrons fortement corrélés soumis à un champ magnétique.Sa découverte a également conduit à une application très importante en métrologiepuisque l’effet Hall quantique entier, en fournissant un moyen de mesurer le quan-tum de conductance q2

e /h avec une extrême précision, permet aujourd’hui de définirle standard de résistance.

16.2.1 Problème de Landau bidimensionnel

Nous étudions dans cette section le spectre de l’Hamiltonien (16.1) pour un champmagnétique homogène : on parle de « problème de Landau ».

a) Analyse classique

La dynamique classique de la particule est analysée en résolvant la relation fonda-mentale de la dynamique pour la force de Lorentz est �F = q�v × �B. La force étantperpendiculaire à la vitesse, ||�v|| =cste et l’accélération est purement normale me

v2

R =

qvB. Le mouvement est circulaire uniforme pour une pulsation ωc = v/R = qB/me.L’énergie cinétique Ec étant donnée, le rayon cyclotron est donc

Rc =

√2meEc

qB= �B

√2Ec

�ωcoù �B

def=

√�

qB; (16.3)

l’introduction de la constante de Planck nous a permis de définir une longueur carac-téristique associée au champ magnétique, la longueur magnétique �B (nous supposonsque qB > 0).

280

Page 291: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

16.2. Champ magnétique homogène

b) Spectre des énergies

Nous commençons notre étude par le calcul du commutateur des composantes de la

vitesse �v = �p−q�Ame

. En utilisant B = ∂xAy − ∂yAx, nous obtenons :

[vx, vy

]=

i�q

m2e

B(�r). (16.4)

Remarquons que la relation est valable très généralement pour un champ magnétiqueinhomogène B(�r). Lorsque le champ est homogène B(�r) = B =cste elle nous rappellela relation de commutation entre variables canoniquement conjuguées (i.e. l’analoguede [x, px] = i�). Puisque l’Hamiltonien est quadratique dans les deux composantesde la vitesse H = 1

2me(v2x + v

2y), la remarque nous suggère assez directement la forme

du spectre des énergies : celui d’un oscillateur harmonique. Pour rendre la remarqueplus précise, nous introduisons les opérateurs adimensionnés �V

def= me

1√�qB

�v en terme

desquels l’hamiltonien s’exprime comme

H =12�ωc(V2

x + V2y ) avec [Vx, Vy] = i. (16.5)

En reprenant l’analyse du problème de l’oscillateur harmonique (chapitre 7), nousobtenons immédiatement que le spectre des énergies est

En = �ωc

(n +

12

)avec n ∈ N (16.6)

Les niveaux d’énergie sont appelés les « niveaux de Landau ».

c) États stationnaires pour la jauge asymétriqueet dégénérescences

Pour déterminer précisément le spectre de l’hamiltonien quantique nous choisissonsune jauge asymétrique (dite jauge de Landau) : �A = (0, Bx). Puisqu’il ne dépend pasde la coordonnée y, l’hamiltonien H = 1

2mep2

x +1

2me(py − qBx)2 commute avec py.

Les états propres sont de la forme

ψ(x, y) = φ(x) eiky. (16.7)

Nous vérifions facilement que la fonction φ(x) obéit à une équation de Schrödingerpour un oscillateur harmonique unidimensionnel[

− �2

2me

d2

dx2+

12

meω2c (x − xc)2

]φ(x) = E φ(x) avec xc

def=�kqB= k�2

B (16.8)

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Page 292: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 16 • Particule chargée dans un champ magnétique

dans lequel le vecteur d’onde k de l’onde plane dans la direction �uy joue le rôle ducentre de l’oscillateur harmonique xc selon �ux.

Nous pouvons faire appel aux résultats du chapitre 7 : nous trouvons à nouveauque le spectre des énergies est donné par (16.6). Les fonctions propres sont φn,k(x) =ϕn(x − xc) où ϕn(x) =gaussienne × (polynôme d’Hermite) sont les fonctions propresde l’oscillateur harmonique unidimensionnel centré sur l’origine, équation (7.25).Finalement les fonctions d’onde du problème bidimensionnel sont

ψn,k(x, y) = ϕn(x − k�2B)

eiky

√2π

avec n ∈ N et k ∈ R (16.9)

Nous avons assuré la condition d’orthonormalisation des états 〈ψn,k |ψn′,k′ 〉 =δn,n′δ(k − k′). Notons que les fonctions d’onde ont une structure très asymétrique,complètement délocalisées dans la direction �uy, fortement localisées sur une distance∼√

n �B autour de xc dans la direction �ux.

Les niveaux de Landau (16.6) sont donc infiniment dégénérés puisque les éner-gies ne dépendent que du nombre quantique n mais pas du paramètre continu k.L’origine physique de cette dégénérescence provient de l’invariance par translationdu problème : une orbite cyclotron de rayon Rc donné peut être déplacée sans coûténergétique, i.e. deux états ψn,k(x, y) et ψn,k′ (x, y) centrés sur xc = k�B et x′c = k′�B

ont la même énergie En. Nous pouvons caractériser plus précisément cette dégé-nérescence en considérant que la particule se déplace dans un rectangle de surfacefinie Surf= LxLy. Par simplicité nous imposons des conditions aux limites pério-diques selon la direction �uy, ce qui conduit à la quantification du nombre quantiquek = 2πm/Ly avec m entier. Cet entier est toutefois borné : le centre de la fonctiond’onde doit se trouver dans le plan, i.e 0 � xc =

2πmLy�2

B � Lx d’où m = 1, 2, · · · , dLL

où la dégénérescence du niveau est

dLL =LxLy

2π�2B

=B Surfφ0

où φ0def=

hq

(16.10)

est le quantum de flux magnétique. La dégénérescence correspond donc au flux to-tal en unité de quantum de flux. Ce résultat est un cas particulier du « théorèmeAharonov-Casher » : l’hamiltonien de Pauli (8.90) pour ge = 2 avec V = 0 et uneconfiguration de champ magnétique quelconque possède un nombre d’états d’énergienulle donné par la partie entière de 1

φ0

∫d�r B(�r). Ce théorème trouve son origine dans

la supersymétrie du problème, éq. (8.91).

282

Page 293: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

16.2. Champ magnétique homogène

16.2.2 Pourquoi la dimension d = 2 est-elle intéressante?

a) Physique en deux dimensions

Expérimentalement, on sait aujourd’hui geler le degré de liberté des charges selon unedirection, ce qui conduit à une physique de dimension effective d = 2. Le principe estde piéger un gaz d’électrons à une interface entre deux semi-conducteurs. La tech-nique d’épitaxie par jet moléculaire permet de faire croître un cristal sur un substrat,couche atomique par couche atomique. On peut ainsi réaliser une interface extrême-ment régulière entre deux semi-conducteurs de natures différentes. Un cas impor-tant (utilisé dans les diodes lasers) est celui de l’interface entre un semi-conducteurd’Arseniure de Gallium (GaAs) et le même dopé en aluminium (GaAlxAs1−x). Ladifférence de nature entre ces deux semi-conducteurs est responsable d’un puits depotentiel à l’interface, dans la direction perpendiculaire à celle-ci, alors que le pro-blème reste invariant par translation dans le plan de l’interface. L’hamiltonien dé-crivant la dynamique d’un électron est alors H = − �2

2meΔ + Vconf(z), dont les états

propres sont de la forme ψ�k⊥,n(�r) = ei�k⊥·�rφn(z), où �k⊥ = (kx, ky) est un vecteur d’ondedans le plan de l’interface. φn(z) désigne un état lié du potentiel unidimensionnel :[ − �2

2me

d2

dz2 + Vconf(z)]φn(z) = εnφn(z), avec n ∈ N. Si la température du système est

assez basse, plus petite que l’énergie du premier état excité du puits, kBT � ε1 − ε0,le degré de liberté dans la direction �uz est gelé, l’électron ne peut être que dans des

états ψ�k⊥,0(�r) = ei�k⊥·�rφ0(z). La physique est donc effectivement bidimensionnelle.

b) Champ magnétique en 2D

Revenons à la question : « en présence du champ magnétique, pourquoi la dimensiond = 2 est-elle particulière ? » Le lecteur a probablement noté que l’introduction duchamp magnétique dans la situation bidimensionnelle nous fait échapper à la règleque nous avions édictée dès le début du cours : « états liés = spectre discret et étatsde diffusion = spectre continu ». Nous avons en effet montré que le spectre (de Lan-dau) est un spectre de niveaux discrets, bien que les électrons ne soient pas liés àun potentiel puisque l’orbite cyclotronique peut se translater librement dans le plan.Cette propriété est propre à la dimension d = 2 : nous vérifions que dans la situationtridimensionnelle nous retrouvons un spectre continu (exercice 16.2).

En présence d’un champ magnétique homogène, la dimension d = 2 offre doncceci de particulier que le spectre présente des gaps entre états infiniment dégénérés,ce qui permet de fixer l’énergie cinétique des électrons (si la température est petitedevant le gap).©D

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Page 294: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 16 • Particule chargée dans un champ magnétique

16.3 VORTEX MAGNÉTIQUE

« À moi, Vortex ! Giaour ! »

La damnation de Faust, H. Berlioz.

Après avoir considéré la situation où le champ est uniforme, nous considérons lasituation opposée où le champ magnétique est concentré en un point

B(�r) = φ δ(�r), (16.11)

ce qui décrit un solénoïde infiniment fin traversé d’un flux φ. Dans cette section nousconsidérons toujours la dynamique d’une particule se déplaçant dans un plan ; lechamp magnétique est alors représenté seulement par sa composante perpendiculaireau plan B(�r) ≡ Bz(�r). Puisque B(�r) = 0 partout (sauf à l’origine), classiquementles trajectoires sont les trajectoires libres, rectilignes uniformes et la présence dusolénoïde n’affecte pas la dynamique de la particule. Si le champ magnétique est nul,le potentiel vecteur ne l’est en revanche pas. En faisant un choix de jauge symétrique1

nous obtenons :�A(�r) =

φ

2πr�uθ (16.12)

où �uθ est le vecteur unitaire perpendiculaire à �r en ce point. Nous pouvons vérifierque la circulation est

∮C d�r · �A(�r) = φ, lorsque le circuit C entoure une fois l’origine

dans le sens direct.

φ(2)

(1)

détecteur

2/

1

a

0123

Champ magnétique (Gauss)

B=

12000 1300011000

0

R(m

)

Figure 16.1– Effet Aharonov-Bohm.

À gauche : Principe d’une expérience d’interférence d’Young en présence d’un flux ma-gnétique φ. La figure d’interférence est sensible au flux. À droite : Oscillations Aharonov-Bohm de la résistance électrique d’un réseau métallique carré de fils d’argent en fonctiondu champ magnétique (à T = 400 mK). La période des oscillations correspond à un quan-tum de flux par plaquette, δB = φ0/a2 (pas du réseau a = 0.64 μm). Données tirées de :F. Schopfer, F. Mallet, D. Mailly, C. Texier, G. Montambaux, L. Saminadayar & C. Bäuerle,Phys. Rev. Lett. 98, 026807 (2007).

1. Notons que nous pourrions aussi choisir une jauge asymétrique �A = φ θ(x) δ(y)�uy.

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Page 295: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

16.3. Vortex magnétique

16.3.1 Effet Aharonov-Bohm

Nous avions vu dans l’exercice 2.17 que lors d’un changement de jauge la fonctiond’onde est affectée par une phase. Autrement dit, si ψ(�r) obéit à l’équation de Schrö-dinger pour un potentiel vecteur �A(�r), la fonction transformée ψ(�r) = ψ(�r)e−iχ(�r) obéit

à l’équation de Schrödinger pour un potentiel vecteur �A(�r) = �A(�r) − �q�∇χ(�r). Notonsqu’à première vue il semblerait possible d’éliminer le potentiel vecteur (16.12) enchoisissant χ(�r) = α θ, où

αdef=

φ

φ0(16.13)

est le flux en unité de quantum de flux φ0 = h/q. En effet, �A(�r) − φ2π�∇θ = 0 si �r � 0.

Toutefois cette transformation n’est autorisée que pour α ∈ Z, sinon la fonction ψ(�r)est « multivaluée » : eiχ(�r) = eiα θ ne reprend pas sa valeur après un tour. Nous retironstoutefois l’idée que lorsque la particule chargée fait un tour autour du flux, elle accu-mule une phase proportionnelle au flux magnétique q

∮C d�r · �A(�r) = qφ/� = 2πα. Le

problème est donc périodique en fonction du flux magnétique. La phase magné-tique de la fonction d’onde peut être mise en évidence par une expérience d’interféro-métrie du type expérience d’Young (figure 16.1) : bien que la particule n’explore quedes régions de l’espace où le champ magnétique est nul, les deux trajectoires repré-sentées sur la figure sont déphasées de eiqφ/� = e2iπα. Il est donc possible de déplacerla figure d’interférences en variant le flux magnétique. On appelle ce phénomènel’effet Aharonov-Bohm. Cette expérience a été réalisée dans un anneau métallique detaille micrométrique2 dans les années 1980 (cf. figure 16.1).

16.3.2 Diffusion d’un électron par le vortex

Nous pouvons étudier plus avant l’effet du vortex magnétique en obtenant le spectrede l’Hamiltonien (16.1) pour le potentiel vecteur (16.12). La dérivée covariante prendla forme �p − q�A(�r) → −i�

[�ur

∂∂r + �uθ

1r

( ∂∂θ − iα

)]. Le choix de la jauge symétrique

nous permet de rechercher les états stationnaires états propres du moment orbital�z, i.e de la forme ψ(�r) = φ(r)eimθ La fonction radiale obéit donc à une équationdifférentielle très similaire à celle obtenue dans le problème libre (équation (10.32)de la section 10.4.3) : (

− d2

dr2− 1

rddr+

(m − α)2

r2

)φ(r) = k2 φ(r) (16.14)

2. Sean Washburn & Richard A. Webb, Aharonov-Bohm effect in normal metal. Quantum coherenceand transport, Adv. Phys. 35 (1986) 375.©D

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Page 296: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 16 • Particule chargée dans un champ magnétique

où nous avons posé E = �2k2

2me, avec k ∈ R+. Nous reconnaissons l’équation de Bessel

(annexe A). Finalement les états propres associés au spectre continu sont donnés par3

ψk,m(�r) =

√k

2πJ|m−α|(kr) eimθ, (16.15)

où le préfacteur assure la condition de normalisation 〈ψk,m |ψk′,m′ 〉 = δ(k − k′) δm,m′ .Ces états nous permettent de définir les déphasages caractérisant le problème de diffu-sion par le vortex magnétique : en utilisant le comportement asymptotique des fonc-tions de Bessel, nous obtenons

ηm =π

2(|m| − |m − α|) . (16.16)

Ces déphasages sont indépendants de l’énergie, ce qui traduit l’invariance d’échelledu problème. Ils nous permettent d’obtenir l’amplitude de diffusion (10.48) carac-térisant la diffusion d’une onde plane par le vortex. Un calcul simple nous donne4

fAB(θ) = − eiθ/2

√2iπk

sin παsin(θ/2)

. (16.17)

Nous retrouvons la périodicité du problème en fonction du flux magnétique. La sec-tion efficace totale diverge, conséquence de la portée infinie du potentiel.

Bien que la présence du flux magnétique brise la symétrie par réflexion où parrenversement du temps5 la section efficace est symétrique sous θ → −θ ou α→ −α :

dσdθ=

sin2 πα

πk(1 − cos θ). (16.18)

Il est toutefois possible de trouver des quantités physiques sensibles à l’asymétrie duproblème sous le renversement du champ magnétique α → −α ou α → 1 − α (cf.exercice 16.4).

3. En écrivant ces solutions nous avons fait un choix implicite de fonctions régulières à l’origine. Parexemple lorsque 0 < α < 1, la fonction J−α(kr) est une solution normalisable, divergeant à l’originecomme r−α. Le choix de ne retenir que la solution régulière J|α| correspond à la physique d’un vorteximpénétrable (ou pourra trouver davantage d’information dans A. Comtet, S. Mashkevich & S. Ou-vry, Magnetic moment and perturbation theory with singular magnetic fields, Phys. Rev. D 52, 2594(1995) et une petite revue dans : C. Texier, Quelques aspects du transport quantique dans les systèmesdésordonnés de basse dimension, thèse de l’université Paris VI (1999)).4. Ce résultat a été obtenu pour la première fois dans l’article historique Y. Aharonov & D. Bohm,Significance of electromagnetic potentials in the quantum mechanics, Phys. Rev. 115, 485 (1959).5. x → x & y→ −y est équivalent à changer le signe du flux magnétique.

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Page 297: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Exercices

Exercices

16.1 (F) Calculer le quantum de flux en Gauss.μm2 (1 T = 10000 Gauss).Il est possible de piéger les électrons dans un plan à l’interface de deux semi-conducteurs GaAs et GaAlAs. Dans cette situation, la masse dans l’Hamiltonien estune « masse effective » m∗ = 0.067me où me � 10−30 kg est la masse d’un électron« nu ». Pour B = 1 T, calculer la valeur de �B (en nm) et �ωc (en eV). Exprimer cetteénergie en Kelvin.

16.2 (MF) Calculer la densité d’états ρ(3D)(E) de l’Hamiltonien décrivant une chargesoumise à un champ magnétique uniforme dans l’espace tridimensionnel. Tracer l’al-lure de ρ(3D)(E) et la comparer à celle du problème bidimensionnel ρ(2D)(E).

16.3 (MF) Problème de Landau dans la jauge symétrique

Nous reprenons l’analyse du problème d’une particule chargée dans un plan et sou-mise à un champ magnétique uniforme perpendiculaire au plan, en nous plaçant dansla jauge symétrique. L’intérêt de cette étude est de souligner le rôle de la symé-trie sous les rotations. On considère l’Hamiltonien (16.1) pour le potentiel vecteur�A(�r) = 1

2�B × �r.

a) Montrer que le Hamiltonien peut se mettre sous la forme : H = �p 2

2m +m2

(ωc2

)2�r 2 −ωc2 �z où �z = xpy − ypx est le moment cinétique.

b) Nous introduisons deux couples d’oscillateurs création/annihilation ax, a†x, ay, a†y,

définis de la manière usuelle : axdef=

√mωc4� x + i√

m�ωcpx, etc. Écrire �z puis H en

terme de ces opérateurs.

c) On introduit deux nouveaux couples, combinaisons linéaires des précédents :a

def= 1√

2(ax+iay) et b

def= 1√

2(ax−iay). Montrer que ces opérateurs satisfont bien des

relations de commutations : [a, a†] = 1, [b, b†] = 1, tous les autres commutateursétant nuls [a, b] = 0, etc. Exprimer �z puis H en terme de ces opérateurs.

d) Montrer que les fonctions d’onde du premier niveau de Landau sont de la forme :ψ0(z, z) = f (z) e−

mωc4� zz où f (z) est une fonction holomorphe quelconque de la

variable complexe z = x + iy. Si f (z) = z�, vérifier que � est le moment orbital.

16.4 (TD) Courant permanent induit par un vortex magnétique

a) Calculer le courant à travers une ligne semi-infinie issue de l’origine associé àl’état stationnaire (16.15) : Im(k)

def= q

∫ ∞0

dr �uθ · �Jψk,m(�r). On utilisera l’intégrale

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Page 298: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Chapitre 16 • Particule chargée dans un champ magnétique

∫ ∞0

dxx J2

ν (x) = 12ν (formule [6.574].2 de Gradshteyn & Ryzhik, Table of integrals,

series and products).

b) Le courant total des états d’énergie dans [E, E + dE[ est dI(E;φ) =∑+∞m=−∞ Im(k)dk. Une estimation naïve de la somme pourrait être ∞ − ∞ = 0...

ou −1 si on singularisait la contribution de m = 0. Ces deux résultats sont in-corrects : différentes régularisations de la somme dans ce contexte conduisent à∑+∞

m=−∞ sign(m − α) = 2α − 1. Déduire le courant total d’un gaz d’électrons dégé-néré IεF (φ) =

∫ εF

0 dI(E;φ).

c) Dans cette dernière question on discute une relation avec les propriétés de diffu-sion. Vérifier que Im(E)

def= Im(k) dk

dE = − 1π∂∂φηm où ηm est le déphasage obtenu

dans le cours. En utilisant la règle de somme de Krein-Friedel, déduire une re-lation entre le courant permanent des états d’énergie E, dI(E;φ), et la matrice S(i.e. les déphasages).

Problème

16.1 Conductivité Hall d’un gaz d’électrons 2D

Nous étudions des électrons confinés dans un plan et étudions l’effet d’un champélectrique E�ux (dans le plan) en sus du champ magnétique (perpendiculaire au plan),cf. figure 16.2.

−eyL

Lx

E

B

V

I

Ax

y

Champ magnétique (Tesla)

(k)

xy(k

)xx

2

4

6

8

10

12

0.8

0.4

0 1 2 3 4 5 60

0

Figure 16.2– Effet Hall quantique.

À gauche : schéma du dispositif pour la mesure de ma résistivité Hall ρxy : un gaz d’élec-trons dans un plan est soumis à un champ magnétique B �uz et à un champ électriqueE �ux . On mesure le courant transverse. À droite : Résistivités transverse (ρxy ) et longitudi-nale (ρxx ) d’un gaz d’électrons bidimensionnel (à une température de T � 8mK). Donnéestirées de la conférence Nobel de Klaus von Klitzing, Rev. Mod. Phys. 58, 519 (1986).

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Page 299: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Problème

1) Champ magnétique et champ électrique perpendiculaires. La particule est sou-mise à un champ électrique dans la direction �ux. L’hamiltonien est :

HE =p2

x

2m+

(py − qeBx)2

2m− qeEx. (16.19)

On reprend l’analyse du cours : montrer que les états propres de HE sont encore dela forme (16.7) et déduire comment l’équation (16.8) est modifiée. Trouver les nou-velles valeurs propres de l’énergie, notées εn,k, qui dépendent maintenant du nombrequantique k.

2) Courant. La densité de courant moyennée spatialement est donnée par l’opérateur�j = qe

S �v où S est la surface du plan. On introduit le courant moyen associé à l’étatpropre de HE :

j(n,k)y

def=

qe

S〈ψn,k |vy|ψn,k 〉. (16.20)

a) En écrivant que εn,k = 〈ψn,k |HE|ψn,k 〉, montrer que (théorème de Feynman-Hellmann)

j(n,k)y =

qe

S �

∂εn,k

∂k=

1S B

∂εn,k

∂xc(16.21)

où xc a été défini dans le cours. En déduire le courant j(n,k)y en fonction de B et E.

b) Conductivité Hall et quantum de conductance. On introduit la conductivitéHall :

σxy = − limE→0

jyE . (16.22)

Calculer la contribution de l’état quantique |ψn,k 〉, notée σ(n,k)xy . Déduire la contri-

bution de tous les états d’un niveau de Landau à la conductivité : σLLxy

def=

∑k σ

(n,k)xy .

Donner la valeur de 1/σLLxy en kΩ (en dimension 2 la conductivité a la dimension

de l’inverse d’une résistance). Commenter la partie droite de la figure 16.2.

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Page 300: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE
Page 301: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

FORMULAIRE AA.1 COMPLÉMENTS MATHÉMATIQUES

A.1.1 Quelques intégrales

L’intégrale gaussienne ∫ +∞

−∞dx e−ax2

=√π/a. (A.1)

L’intégrale de la lorentzienne ∫ +∞

−∞dx

1

x2 + a2=π

a. (A.2)

L’intégrale du sinus cardinal et de son carré :∫ +∞

−∞dx

sin xx=

∫ +∞

−∞dx

(sin x

x

)2

= π. (A.3)

A.1.2 Fonction Γ, Digamma ψ et fonction β d’Euler

Il est très utile d’avoir en tête quelques propriétés des fonctions spéciales. Cela permetbien souvent une meilleure efficacité dans les calculs.

• Fonction Gamma

Toutes les intégrales du type∫ ∞

0dx xa e−xb

peuvent être reliées à la fonction Γ. Il estdonc très utile d’avoir quelques propriétés en tête. Une définition :

Γ(z)def=

∫ ∞

0dt tz−1 e−t pour Re z > 0. (A.4)

Dont on déduit facilement la propriété :

Γ(z + 1) = zΓ(z) (A.5)

qui permet d’étendre la définition à l’autre partie du plan complexe, i.e. pour Re z � 0.Donnons les deux valeurs (faciles à retrouver) :

Γ(1) = 1 et Γ(1/2) =√π (A.6)

[la seconde valeur correspond à l’intégrale (A.1)]. On déduit immédiatementΓ(n + 1) = n!.©D

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Page 302: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe A • Formulaire

• Fonction Digamma

La fonction Digamma est définie comme la dérivée logarithmique de la fonction Γ :

ψ(z)def=Γ′(z)Γ(z)

. (A.7)

On déduit immédiatement la relation fonctionnelle ψ(z + 1) = ψ(z) + 1z . Donnons la

valeur ψ(1) = C � −0.577215 (constante d’Euler-Mascheroni).

• Fonction Beta

D’autres intégrales très utiles s’expriment à l’aide de la fonction β d’Euler

B(μ, ν) =∫ 1

0dt tμ−1(1 − t)ν−1 = 2

∫ π/2

0dθ sin2μ−1 θ cos2ν−1 θ =

Γ(μ)Γ(ν)Γ(μ + ν)

. (A.8)

A.1.3 Polynômes orthogonaux

Reprenons brièvement quelques éléments de la théorie des polynômes orthogonaux.L’équation hypergéométrique1

σ(z) y′′(z) + τ(z) y′(z) + λ y(z) = 0 (A.9)

où σ(z) et τ(z) sont des polynômes de degrés au plus 2 et 1 respectivement, est uneéquation différentielle qui apparaît dans de très nombreux contextes.

Cette équation admet des solutions polynômiales, que nous noterons y(z) → pn(z),pour des valeurs discrètes du paramètre λ :

λn = −n τ′(z) − n(n − 1)2

σ′′(z) avec n ∈ N. (A.10)

Ces solutions peuvent être construites systématiquement de la manière suivante. Sinous introduisons

ρ(z)def=

1σ(z)

exp∫ z

dz′τ(z′)σ(z′)

, (A.11)

les polynômes sont donnés par la formule de Rodrigues

pn(z) =1ρ(z)

dn

dzn

[σ(z)nρ(z)

]et pn(z) = Bn pn(z) (A.12)

1. La forme générale de l’équation hypergéométrique est u′′(z)+ τ(z)σ(z) u′(z)+ σ(z)

σ(z)2 u(z) = 0 où σ(z) et σ(z)sont des polynômes de degré au plus égal à 2 et τ(z) un polynôme de degré au plus égal à 1. Parmi lestransformations u(z) → y(z) laissant la forme de l’équation invariante, il est possible d’en choisir unetelle que σ(z) → λσ(z) (le polynôme de degré 1 est alors changé τ(z) → τ(z)), i.e. l’équation (A.9).

292

Page 303: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

A.1. Compléments mathématiques

où Bn est une constante choisie conventionellement. Chaque famille de polynômesorthogonaux est définie sur un intervalle [a, b] t.q. σ(z)ρ(z)zk s’annule pour z = a etz = b ∀ k ∈ N. Ils satisfont une condition d’orthonormalisation sur cet intervalle∫ b

adz ρ(z) pn(z) pm(z) = δn,m ||pn||2, (A.13)

où ||pn|| est une constante désignant la norme du polynôme.Une dernière remarque intéressante est qu’il est possible de construire la fonction

génératrice, ce qui offre une manière alternative (mais équivalente) de la formule deRodrigues pour les polynômes pn(z) calculer :

Φ(z, t)def=

∞∑n=0

tn

n!pn(z) =

1ρ(z)

∮C

ds2iπ

ρ(s)s − z − σ(s)t

(A.14)

où le contour C entoure z dans le plan complexe de la variable s (mais pas d’autresingularité). Le théorème des résidus nous fournit l’expression explicite de la fonctiongénératrice :

Φ(z, t) =ρ(s0)ρ(z)

11 − σ′(s0) t

où s0 est solution de s − z − σ(s) t = 0. (A.15)

Une fois cette fonction connue, ses dérivées successives de Φ(z, t) donnent les poly-nômes pn(z) (i.e. pn(z) à la constante arbitraire Bn près).

Nous pouvons appliquer ces résultats généraux à trois familles particulières quijouent un rôle en mécanique quantique :

1. Les polynômes d’Hermite, solutions de

H′′n (z) − 2z H′

n(z) + 2n Hn(z) = 0. (A.16)

Cette équation apparaît dans l’étude de l’oscillateur harmonique unidimension-nel.

2. Les polynômes de Legendre, solutions de

(1 − z2) P′′n (z) − 2z P′n(z) + n(n + 1) Pn(z) = 0, (A.17)

interviennent dans le calcul des harmoniques sphériques (fonctions propres dumoment orbital dans R3).

3. Les polynômes de Laguerre, solutions de

z [Lαn (z)]′′ + (1 + α − z) [Lαn (z)]′ + n Lαn (z) = 0, (A.18)

apparaissent dans le problème d’un oscillateur bidimensionnel isotrope, oudans le problème de Landau (particule en champ magnétique uniforme). Ilspermettent également de résoudre l’équation de Schrödinger pour un potentielen −1/r (atome d’hydrogène).©

Dun

od.L

aph

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opie

non

auto

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ees

tun

délit

.

293

Page 304: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe A • Formulaire

Nom (pn) σ(z) τ(z) λn ρ(z) [a, b] Bn ||pn||2

Hermite Hn 1 −2z 2n e−z2] −∞,+∞[ (−1)n 2nn!

√π

Legendre Pn 1 − z2 −2z n(n + 1) 1 [−1,+1] (−1)n/(2n n!) 22n+1

Laguerre Lαn z −z + α + 1 n zαe−z [0,+∞[ 1/n! Γ(n+α+1)n!

Énonçons explicitement certaines des propriétés données dans le tableau.

Polynômes d’Hermite

La formule de Rodrigues prend la forme

Hn(z) = ez2(− d

dz

)n

e−z2= n!

#n/2$∑k=0

(−1)k

k!(2z)n−2k

(n − 2k)!. (A.19)

Nous déduisons de cette expression la relation de récurrence

Hn(z) =

(2z − d

dz

)Hn−1(z). (A.20)

Nous pouvons calculer la fonction génératrice

∞∑n=0

tn

n!Hn(z) = e2zt−t2 . (A.21)

Calculons les premiers polynômes : H0(z) = 1, H1(z) = 2z, H2(z) = 4z2 − 2, etc.

Polynômes de Legendre

La formule de Rodrigues prend la forme

Pn(z) =1

2n n!dn

dzn (z2 − 1)n =12n

#n/2$∑k=0

(−1)k(2n − 2k)!k!(n − k)!(n − 2k)!

zn−2k. (A.22)

La fonction génératrice des polynômes de Legendre est

∞∑n=0

tn Pn(z) =1

√1 − 2zt + t2

. (A.23)

Les premiers polynômes sont : P0(z) = 1, P1(z) = z, P2(z) = 3z2−12 , etc.

294

Page 305: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

A.1. Compléments mathématiques

Polynômes de Laguerre

La formule de Rodrigues prend la forme

Lαn (z) =1n!

z−αez dn

dzn (zn+αe−z) =n∑

m=0

(−1)m(

n + αn − α

)zm

m!(A.24)

(np

)= n!

p!(n−p)! [si n et p ne sont pas entiers, la factorielle n! est remplacée par la

fonction Γ(n + 1)]. La fonction génératrice de ces polynômes est

∞∑n=0

tn Lαn (z) =1

(1 − t)α+1exp− zt

1 − t. (A.25)

Les premiers polynômes sont : Lα0 (z) = 1, Lα1 (z) = 1 + α − z, Lα2 (z) = 12 [(1 + α)(2 +

α) − 2(2 + α)z + z2], etc.On donne Lαn (0) = Γ(n+α+1)

Γ(n+1)Γ(α+1) , qui sera utile.

A.1.4 Fonctions cylindriques

L’équation de Bessel apparaît naturellement dans les problèmes bidimensionnels àsymétrie de révolution : (

d2

dz2+

1z

ddz+ 1 − ν2

z2

)Zν(z) = 0. (A.26)

Elle admet différentes bases de solutions. Une première base est fournie par les fonc-tions de Bessel (régulière à l’origine si ν � 0)

Jν(z) =∞∑

n=0

(−1)n (z/2)2n+ν

n!Γ(ν + n + 1)(A.27)

et la fonction de Neunmann (Bessel de seconde espèce, singulière à l’origine)

Nν(z) =cos πν Jν(z) − J−ν(z)

sin πνpour ν � N. (A.28)

Lorsque ν = n ∈ N :

Nn(z) =1π

{2 Jn(z) ln

z2− (1 − δn,0)

n−1∑k=0

(n − k − 1)!k!

(2z

)n−2k

−∞∑

k=0

(−1)k(z/2)n+2k

k!(n + k)![ψ(n + k + 1) + ψ(k + 1)

] }. (A.29)

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Page 306: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe A • Formulaire

Pour des indices entiers, la représentation intégrale est utile

Jn(z) = i−n∫ 2π

0

dθ2π

einθ+iz cos θ. (A.30)

Remarquons que pour un indice entier J−n(z) = Jn(z).Les comportements asymptotiques de ces fonctions sont

Jν(z → ∞) �√

2πz

cos(z − π

2ν − π

4

)(A.31)

Nν(z → ∞) �√

2πz

sin(z − π

2ν − π

4

)(A.32)

ce qui laisse suggérer qu’une autre base de fonctions intéressantes est donnée par lafonction de Hankel (Bessel de troisième espèce)

H(1)ν (z) = Jν(z) + i Nν(z) (A.33)

et H(2)ν (z) = Jν(z)− i Nν(z) (sa conjuguée si z, ν ∈ R). Le comportement asymptotique

est

H(1)ν (z → ∞) �

√2πz

ei(z− π2 ν−

π4 ). (A.34)

Le comportement limite de la fonction de Hankel d’indice ν = 0 est égalementutile :

H(1)0 (z → 0) � 2i

πln

(zeC /2

)+ 1 (A.35)

où C � −0.577215 est la constante d’Euler-Mascheroni.

Pour en savoir plus

Pour une présentation pédagogique de la théorie des fonctions hypergéométriques etl’étude des fonctions spéciales et des polynômes orthogonaux :A. Nikiforov & V. Ouvarov, Fonctions spéciales de la physique mathématique, Mir,Moscou (1983).

D’autres références classiques sur les fonctions spéciales :

M. Abramowitz & I. A. Stegun (editors), Handbook of Mathematical functions, Dover(1964).

I. S. Gradshteyn & I. M. Ryzhik, Table of integrals, series and products, Academic Press(1994).

296

Page 307: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

A.2. Constantes fondamentales

A.2 CONSTANTES FONDAMENTALESLes valeurs sont tirées du site http://www.nist.gov/.

Constantes universelles

• Constante de Planck � = 1.054 571 68(18) × 10−34 J.s• Constante de Boltzmann kB = 1.380 6505(24) × 10−23 J.K−1

• Vitesse de la lumière c = 299 792 458 m.s−1

• �c = 197.326 968(17) eV.nm

Masses

• Électron me = 9.109 382 15(45) × 10−31 kg

Longueur Compton de l’électron λcdef= �

mec = 0.386 159 × 10−12 m

ou λcdef= 2πλc = 2.426 310 2175(33) × 10−12 m

• Muon mμ = 1.883 531 30(11) × 10−28 kg

Longueur Compton du muon λC,μ = 11.734 441 04(30) × 10−15 m• Proton mp = 1.672 621 637(83) × 10−27 kg

Longueur Compton du proton λC,p = 1.321 409 8446(19) × 10−15 m• Neutron mn = 1.674 927 211(84) × 10−27 kg

Longueur Compton du neutron λC,n = 1.319 590 8951(20) × 10−15 m

Constantes de couplage

• Interaction gravitationnelle : G = 6.674 2(10) × 10−11 kg−1m3s−2

• Interaction électromagnétique :

qe = −1.602176487(40) × 10−19 C

e2 def=

q2e

4πε0= 1.439 964 4(1) eV.nm

Constante de structure fine αdef= e2

�c =1

137.035 999 11 (46)

• Quantum de résistance h2q2

e= 12 906.403 7787(88) Ω

• Facteur de Landé de l’électron : ge = −2.002 319 304 3622(15)• Facteur de Landé du proton : gp = 5.585 694 713(46)• Facteur de Landé du neutron : gn = −3.826 085 45(90)

Rydberg

• Rdef=

mee4

2�2 =12α

2mec2 = 13.605 6923 (12) eV

©D

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Page 308: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE
Page 309: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

SOLUTIONSDES EXERCICESET PROBLÈMES

B

CHAPITRE 1Exercice 1.1 Considérons une particule soumise à un potentiel V(r) = −k/r. Étudions unetrajectoire circulaire ; la RFD nous donne v =

√k/(mr) et donc la période T = 2π

√mr3/k

(troisième loi de Kepler). L’action pendant une période est S = T( 1

2 mv2 − kr

)= −π

√mkr. On

applique ce résultat aux deux situations.

a) Terre autour du soleil : S ♁ = −πM♁ √GM�Rt−s, soit S ♁ ≈ −1075�.

b) S electron = −π�.

Exercice 1.2 Pour une particule non relativiste de masse m la relation entre énergie etimpulsion est E = p2/(2m). En utilisant les relations d’Einstein et de Broglie nous obtenons larelation de dispersion ω = �k2/(2m). Dans le cas relativiste en partant de E =

√p2c2 + m2c4

nous obtenons ω =√

k2c2 + m2c4/�2.

Exercice 1.3 Considérons le mouvement sur une demie période, lorsque la particule vad’un point de rebroussement à l’autre (de x = a à x = b) : à partir de E = 1

2 mx2 + V(x)

nous obtenons dt = dx/√

2m [E − V(x)] que nous intégrons Tcl/2 =

∫ b

adx/

√2m [E − V(x)].

Qed. Nous remarquons que Tcl(E) = ∂∂ES(b|a; E), ce qui est la relation symétrique de

E = − ∂∂t S cl(x2, t|x1, 0). Dans le cas de l’oscillateur harmonique, V(x) = 1

2 mω2 x2 on re-trouve facilement que la période est indépendante de l’énergie, T = 2π/ω, en utilisant∫ +1

−1dx/

√1 − x2 = π (éq. (A.8)).

CHAPITRE 2Exercice 2.1

a) La solution est y(x) = y(0) exp−∫ x

0dx′ K(x′). Si V(x) est discontinue mais bornée

sur [a, b], alors∫ x

0dx′ K(x′) et donc y(x) sont continues sur l’intervalle. De même si

K(x) ∈ Cn([a, b]), alors y(x) ∈ Cn+1([a, b]).

b&c) Nous considérons l’équation différentielle ϕ′′(x) = V(x)ϕ(x), où V(x)def= V(x)−E. Nous

pouvons reécrire l’équation différentielle du second ordre comme un couple d’équa-tions différentielles du premier ordre : ϕ′(x) = χ(x) & χ′(x) = V(x)ϕ(x). D’après lapremière question, si V(x) ∈ Cn([a, b]), alors χ(x) ∈ Cn+1([a, b]) et ϕ(x) ∈ Cn+2([a, b]).Conclusion : si le potentiel est borné (mais pas forcément continu), alors ϕ(x) et ϕ′(x)sont continues partout.

RemarqueSi V (x0) = ∞, ϕ′(x) est discontinue en x0 mais ϕ(x) est continue.©D

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Page 310: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

Exercice 2.2 Nous appliquons la formule Jϕ = �m Im[ϕ∗

dϕdx

].

Nous appliquons cette formule pour x < 0 : Jϕ = �m Im

[(e−ikx + r∗ eikx)ik(eikx − r e−ikx)

]=

�km Re

[1− |r|2− r e−2ikx+ r∗ e2ikx] = �km (1− |r|2). Chaque terme est du type vk × |amplitude|2, où

vkdef= �km est la vitesse. Nous idenfions donc la somme de deux contributions, Jϕ = Jinc + Jrefl :

un courant incident Jinc = vk et un courant réfléchi Jrefl = −vk|r|2.Dans l’intervalle 0 < x < a le courant prend la forme : Jϕ = �m Im

[(A∗ eqx + B∗ e−qx)q(A eqx −

B e−qx)]=�qm Im

[|A|2 e2qx − |B|2 e−2qx + B∗A − A∗B

]=�qm 2 Im[B∗A].

Pour x > 0 on obtient le courant transmis Jϕ = Jtrans =�km |t|

2.Les coefficients sont tels que les trois expressions doivent être égales, i.e. 1 − |r|2 =2qk Im[B∗A] = |t|2.

Exercice 2.3 On impose la continuité de ϕ(x) et ϕ′(x) en x = 0 et x = a. On obtient :{1 + r = A + B

ik(1 − r) = q(A − B)

{A eqa + B e−qa = t eika

q(A eqa − B e−qa) = ik t eika (B.1)

On élimine A et B pour obtenir un couple d’équations pour r et t. La solution de ce systèmenous donne les amplitudes des ondes transmise et réfléchie

t =e−ika

ch qa + i2

( qk −

kq

)sh qa

et r =− i

2

( qk +

kq

)sh qa

ch qa + i2

( qk −

kq

)sh qa

(B.2)

On peut vérifier que dans la limite k0 → ∞ le coefficient de réflexion tend vers r → −1décrivant un mur impénétrable. On vérifie sans problème que R + T = |r|2 + |t|2 = 1 enutilisant

( qk +

kq

)2=

( qk −

kq

)2+ 4.

Finalement lorsque la barrière est haute/épaisse, qa � 1, nous obtenons une amplitude de

probabilité exponentiellement petite t � 2(1 − ik2

0

2kq

)−1e−qa−ika, i.e. |t| � 1.

Exercice 2.4 Le microscope à effet tunnel mesure le relief d’une surface sur laquelle ladensité électronique est constante. Lorsque le cercle d’atomes de Fer est formé à la surface,ils confinent les électrons de surface du cuivre dans un disque. Les « vagues » correspondentaux ventres d’un bel état stationnaire à symétrie circulaire du disque.

Exercice 2.5 Lorsque E > V0, la fonction d’onde dans la région [0, a] est du type pro-pagative ϕ(x) = A e+iKx + B e−iKx où l’on a posé E = �2k2

2m =�2

2m (K2 − k20). En partant de la

solution obtenue pour E < V0, il suffit donc de procéder à la substitution q → iK dans lafonction d’onde, donc également dans les expressions de r et t obtenues dans l’exercice 2.3.La transmission est donc dans ce cas :

t =e−ika

cos Ka +ik2

02Kk sin Ka

(B.3)

Nous vérifions que la probabilité de transmission tend vers T → 1 à haute énergie E/V0 → ∞(Fig. 2.4).

300

Page 311: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

D’autre part lorsque K = Kn = n πa , avec n ∈ N∗, l’amplitude de transmission est

t = (−1)ne−ikna où k2n = K2

n + k20. À ces énergies la particule est transmise avec probabi-

lité T = 1. On parle de « transparence » (ou de « résonance ») : figure 2.4. Ces valeurs del’énergie correspondent à une situation où l’onde est en phase après un allez-retour au ni-veau de la barrière. Un phénomène analogue se produit en optique lorsqu’on considère latransmission d’une onde lumineuse à travers un film d’indice différent de celui de l’air.

Exercice 2.6∫ a

0dxϕn(x)ϕm(x) = 2

∫ 1

0dy sin nπy sin mπy =

∫ 1

0dy

[cos(n−m)πy−cos(n+

m)πy]= δn,m − δn,−m = δn,m puisque n, m ∈ N∗. Qed.

Exercice 2.7 L’onde plane d’impulsion p est φp(x) = Neipx/�. Calculons le produit sca-laire de deux ondes planes 〈φp |φp′ 〉 = |N|2

∫R

dx ei(p′−p)x/� = |N|22πδ( p−p′

�) = 2π�|N|2δ(p −

p′). La condition d’orthonormalisation est satisfaite pour N = 1/√

2π�.

Exercice 2.8 Les coefficients de Fourier sont sn = (−1)ni L2πn , d’où s(x) =

−2∑∞

n=1(−1)n sin kn xkn

, où kn = 2nπ/L.

Exercice 2.9 La transformée de Fourier de la fonction porte est un sinus cardinal πa(k) =1√2π

sinc(ka/2) où sinc(u)def= sin u

u .

La fonction « toile de tente » a pour transformée de Fourier une Lorentzienne : ta(k) =1√2π

11+(ka)2 .

Les deux fonctions sont de largeur Δx ∼ a et de hauteur fa(0) ∼ 1/a de telle sorte que∫dx fa(x) = 1. Par conséquent leurs TF fa(k) sont de largeur Δk ∼ 1/a et de hauteur

fa(k = 0) = 1√2π

.

Exercice 2.10 On souhaite calculer ga ∗ gb. Fouriérisons, F [ga ∗ gb] =√

2πga(k)gb(k),puis utilisons que la gaussienne est stable sous la transformation de Fourier g1 = g1, ou

encore ga =1ag1/a. Finalement F [ga ∗ gb] = 1√

2πe−

12 k2(a2+b2) = 1

cg1/c avec cdef=√

a2 + b2. Nousfouriérisons inverse et arrivons à la loi de composition des gaussiennes sous la convolutionga ∗ gb = g√a2+b2 .

Exercice 2.11

x~1

x0 a

~1

ε~

εa

~1/ε(x)δϕ

ε(x)

Exercice 2.12 Considérons δ(x2 − x20). Écrivons f (x) = x2 − x2

0. Cette fonction s’annulepour x = ±x0 et f ′(x) = 2x, donc δ(x2− x2

0) = 12|x|

[δ(x− x0)+δ(x+ x0)

]. Dans la limite x0 → 0

on obtient δ(x2) = 1|x|δ(x).

Nous appliquons la formule précédant l’exercice pour f (x) = 1π

sin πx. Les zéros sont xn = nπavec n ∈ Z ; f ′(xn) = (−1)n, d’où la formule.©D

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Page 312: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

Exercice 2.13 F †[F [ψ(x)]] =∫

dk√2π

eikx∫

dx′√2π

e−ikx′ψ(x′) =∫

dx′ δ(x − x′)ψ(x′) = ψ(x).

Exercice 2.14 On se propose d’utiliser un résultat bien connu de l’électrostatique : unecharge placée à l’origine, i.e. une densité de charge ρ(�r) = Q δ(�r) crée un potentiel électrosta-tique V(�r) = Q

4πε0r . Puisque V et ρ satisfont l’équation de Poisson, nous obtenons l’équationdésirée.

Une autre manière de démontrer cette propriété est d’utiliser le théorème de Green-Ostrogradsky pour Δ(− 1

r ) = �∇ · �ur

r2 . Nous intégrons la divergence dans un boule de rayon

R centrée sur l’origine∫

bouled3v �∇ · �ur

r2 =∫

sphered2�σ · �ur

r2 = 4πR2 1R2 = 4π indépendemment du

rayon de la sphère. Par conséquent �∇ · �ur

r2 = 4πδ(�r).

Exercice 2.15∫ +B

−AdxPP 1

x = limε→0

∫ +B

−Adx x

x2+ε2 = limε→012 ln B2+ε2

A2+ε2 = ln(B/A). Qed.

Exercice 2.16 Le courant de probabilité à l’origine, Jψ = �m Im

[ψ∗(0)ψ′(0)

]=

�m |ψ(0)|2 Im(λ), s’annule si λ ∈ R. Dans ce cas la particule reste sur R+.Écrivons la solution stationnaire sous la forme ψ(x) = A

(eikx+2iη + e−ikx). En imposant

ψ′(0) = λψ(0) on obtient tan η = −λ/k. La solution est ψk(x) =√

2/π cos(kx + η), nor-malisée pour que

∫ ∞0

dxψk(x)ψk′(x) = δ(k − k′). La limite λ = 0 correspond à une conditionde Neunmann (η = 0 et ψ′(0) = 0) et λ = ±∞ à une condition de Dirichlet (η = π/2 etψ(0) = 0).

Exercice 2.17 On introduit la « dérivée covariante » �Ddef= �∇− i q

��A. En suivant la démons-

tration du cours nous obtenons la densité de courant

�Jψ =�

mIm

[ψ∗�Dψ

]=�

2mi[ψ∗(�Dψ) − (�Dψ)∗ψ

]=�

mIm

[ψ∗�∇ψ

]− q

m�A|ψ|2. (B.4)

Transformation de jauge ψ(�r, t) = ψ(�r, t) e−iχ(�r,t) donc ∂tψ(�r, t) = e+iχ(�r,t)[∂tψ(�r, t) +i∂tχ(�r, t) ψ(�r, t)

]et �∇ψ(�r, t) = e+iχ(�r,t)[�∇ψ(�r, t)+i�∇χ(�r, t) ψ(�r, t)

]. En injectant ces deux expres-

sions dans l’équation de Schrödinger, nous constatons que ψ(�r, t) est solution de l’équation

de Schrödinger pour des potentiels modifiés : φ = φ+ �q∂tχ et �A = �A− �q �∇χ, ce qui s’interprêtecomme une transformation de jauge des potentiels électromagnétiques. On vérifie aisémentque la transformation laisse les champs électrique et magnétique invariants.

Remarque

la dérivée �D est appelée « dérivée covariante » car elle varie de la même manière que

la fonction d’onde : �Dψ = e+iχ �Dψ où �D = �∇ − i q��A.

Exercice 2.18

a) Le potentiel est non confinant, le spectre des énergies est donc continu, E ∈ R+. Pourchaque énergie de E ∈ [0, V0] l’état stationnaire décrit une onde incidente de la gaucheet entièrement réfléchi. En revanche pour E ∈ [V0,∞[ il est possible de construire deuxsolutions à chaque énergie (par exemple un état incident de la gauche et un état incidentde la droite).

302

Page 313: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

b) En posant E = �2k2

2m = V0 − �2q2

2m nous obtenons ψ(x) = e+ikx + re−ikx pour x < 0 etψ(x) = Be−qx pour x > 0. Nous assurons la continuité de [ln |ψ|]′ en x = 0 : ik 1−r

1+r = −q et

donc r = k−iqk+iq . L’autre coefficient est donné par ψ(0) = B = 1 + r = 2k

k+iq . Nous vérifionsque |r| = 1, ce qui traduit que l’onde est entièrement réfléchie sur la marche de potentiel,dans laquelle elle pénètre sur une longueur δx ∼ 1/q. L’onde étant entièrement réfléchie,l’état stationnaire décrit une situation où le courant est Jψ = 0 : la fonction d’onde peutdonc être choisie réelle.

c) Pour E > V0 nous posons E = �2k2

2m =�2K2

2m −V0. L’état stationnaire est ψ(x) = e+ikx+ re−ikx

pour x < 0 et ψ(x) = Be+iKx pour x > 0. Les coefficients r et B sont donnés en faisantiq → K dans les expressions obtenues au b) : r = k−K

k+K et B = 2kk+K . Nous calculons

le courant de probabilité associé à cet état stationnaire : pour x < 0 nous obtenons Jψ =�km (1−|r|2) = Jinc+Jrefl. Pour x > 0 : Jψ = �Km |t|

2 = Jtrans. Les probabilités de réflexion et de

transmission sont données par (2.26), i.e. T = Kk |B|

2 = 4kK(k+K)2 et R =

( k−Kk+K

)2. On vérifie queR + T = 1. Dans la limite E/V0 → ∞ la particule est insensible à la marche de potentiel,R → 0 et T → 1. La limite E → V+0 est plus intéressante à discuter : classiquement laparticule est transmise avec probabilité Tclass = 1 dès que E > V0. Quantiquement nousvoyons que lorsque E → V+0 , nous obtenons R → 1 et T → 0. La particule est totalementréfléchie contrairement au cas classique.C’est l’analogue de la réflexion d’une onde électromagnétique à l’interface entre milieuxd’indices différents.

Exercice 2.191) Une intégrale gaussienne nous donne Δx2

ϕ =∫

dx x2 |ϕ(x)|2 = a2/2, i.e. Δxϕ = a/√

2. Enutilisant que la fonction d’onde dans l’espace des impulsions est également une gaussienneϕ(x) =

( a2

π�2

)1/4e−p2a2/2�2, nous obtenons Δpϕ = �/a

√2. La fonction d’onde gaussienne est

donc un état de dispersion minimale ΔxϕΔpϕ = �/2.2) Nous obtenons 〈x〉ψn = a/2. L’intégrale apparaissant dans le calcul de 〈x2〉ψn peut être

calculée par dérivation sous le signe∫

:∫ 1/2

0du u2 cos(2nπx) =

[− ∂2

a

∫ 1/2

0du cos(ax)

]a=2nπ.

On obtient finalement Δxψn = a√

112 −

12n2π2 . À la limite n → ∞ le résultat correspond à

une distribution de probabilité uniforme dans la boîte. Le calcul de Δpψn est plus simple : laparticule est confinée, 〈p〉ψn = 0. D’autre part dans le problème libre 〈p2〉ψn =

(n� πa

)2. Fina-

lement le produit ΔxψnΔpψn = n�π√

112 −

12n2π2 croît avec n (i.e. avec l’énergie), ce qui vient

du comportement de 〈p2〉ψn . Ce point se comprend en analysant la structure de la fonctiond’onde : ψn(x) est la superposition de deux ondes planes eikn x et e−ikn x dans la boîte, i.e. ψn(p)est donnée par deux pics centrés sur ±�kn et de largeur �/a. Donc 〈p2〉ψn = (�kn)2 est dominépar la valeur de la position des pics et non par leur largeur.

Exercice 2.20

a) L’intensité reçue est |u(x)|2 = 4A2 cos2 k d1+d22 cos2 k d1−d2

2 � 4 cos2 kL cos2 ( πaLλ x

),

i.e. i f = λL/a.

b) Si le photon passe par le trou du haut/bas, son impulsion varie de Δpγx � ∓ hλ

aL . L’impul-

sion est transférée à la plaque : si elle se déplace vers le haut cela signale le passage du©D

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Page 314: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

photon par le trou du haut. Réciproquement si la plaque se déplace vers le bas, le photonest passé par le trou du bas.

c) Le principe de l’expérience requiert de mesurer l’impulsion de la plaque avec précisionΔPp � h

λaL . D’après l’inégalité de Heisenberg, la position de la plaque est alors connue à

ΔXp � �/ΔPp � λL/a = i f près.

d) Conclusion. (1) Point de vue corpusculaire : si on peut détecter par quelle trou est passé lephoton (questions b&c), la figure d’interférence est brouillée. (2) Point de vue ondulatoire(question a) : si on souhaite mesurer la longueur d’onde du photon, i.e. son impulsion, onbloque la plaque, on déduit la longueur d’onde de l’interfrange, mais on ne sait plus parquel trou est passé le photon.

CHAPITRE 3Exercice 3.1 Soient ψ(x) =

∑n ψn un(x) et χ(x) =

∑n χn un(x). Le produit scalaire est

〈ψ |χ 〉 =∫

dx∑

n ψ∗nun(x)∗

∑m χmum(x) =

∑n,m ψ

∗nχmδn,m =

∑n ψ

∗nχn.

Exercice 3.2 L’onde plane d’impulsion p0 est φp0 (p) = δ(p − p0), i.e. localisée dansl’espace des impulsions. L’état localisé spatialement est en revanche complètement délocalisédans l’espace des impulsions : ξx0 (p) = 1√

2π�e−ipx0 /�.

Exercice 3.3 L’action des opérateurs position et impulsion sur les fonctions d’onde estrespectivement x → x× et p → �

iddx . Donc (Hψ)(x) = − �2

2md2

dx2ψ(x) + V(x)ψ(x). L’équationi� ∂

∂tψ(x, t) = (Hψ)(x, t) est donc une écriture de l’équation de Schrödinger (2.3).

Exercice 3.4 L’action des opérateurs position et impulsion dans l’espace des impulsionsest x → i� d

dp et p → p×. L’équation de Schrödinger dans l’espace des impulsions est donc

explicitement i� ∂∂t ψ(p, t) = p2

2m ψ(p, t) + V(i� ∂

∂p

)ψ(p, t). Dans le cas libre (V = 0) nous obte-

nons aisément la solution ψ(p, t) = ψ(p, 0) exp− ip2t�2m .

Exercice 3.5 Nous discutons l’analogie entre une espace de Hilbert de dimension 3 et C3.

a) La normalisation est donnée par N2[|1|2 + | − 2i|2]= 1 d’où N = 1/

√5. Au ket nous

faisons correspondre un vecteur colonne |ψ 〉 ↔ 1√5

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝ 10−2i

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ et au bra le vecteur ligne dual

〈ψ | ↔ 1√5

(1 0 +2i

).

b) 〈ψ |χ 〉 = 1√5

(1 0 +2i

)1√2

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝ i10

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ = i√10

.

c) L’opérateur est associé à la matrice : A ↔

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝ 0 0 i0 1 0−i 0 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠. La première valeur propre est λ− =

−1 associée au vecteur propre |ϕ− 〉 = 1√2

[|u1 〉 + i|u3 〉

]. La valeur propre λ+ = +1 est

dégénérée, associée aux deux vecteurs propres |u2 〉 et |ϕ+ 〉 = 1√2

[|u1 〉 − i|u3 〉

].

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Page 315: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Exercice 3.6 La propriété de distributivité du commutateur se démontre aisément :[AB, C] = ABC −CAB = A[B, C] + ACB −CAB = A[B, C] + [A, C]B.Nous déduisons [ABC, D] = [A, D]BC + A[B, D]C + AB[C, D] et [AB, CD] = [A, C]DB +A[B, C]D +C[A, D]B + AC[B, D].

Exercice 3.7 Le bra devient un ket : α 〈φ |A|ψ 〉〈χ |BC†↔ α∗〈ψ |A†|φ 〉C†B†|χ 〉 ;

[A, B]† = [B†, A†].

Exercice 3.8 Si |ϕn 〉 est vecteur propre de A, il est vecteur propre de toute fonction de A :f (A)|ϕn 〉 = f (an)|ϕn 〉, d’où f (A) = f (A)

∑n |ϕn 〉〈ϕn | =

∑n f (an)|ϕn 〉〈ϕn |.

Exercice 3.9 Puisque l’extension de la fonction d’onde est Δx ∼ a l’énergie cinétique est

Ecin ∼ �2/(ma2). Le calcul précis donne N = (πa2)−1/4 et 〈ψ |Hcin|ψ 〉 = �2

2m

∫dx

∣∣∣ dψdx

∣∣∣2 = �2

4ma2 .

Exercice 3.10 P(λ) = 〈ψ |(x − i λ�

p)(x + i λ�

p)|ψ 〉 = 〈x2〉ψ − λ + λ2〈p2〉ψ/�2. Puisquele polynôme est positif, son discriminant est négatif ou nul 1 − 4〈x2〉ψ〈p2〉ψ/�2 � 0. D’oùΔxψΔpψ � �/2. Qed.

Exercice 3.11 Les deux opérateurs Adef= A − 〈A〉ψ et B

def= B − 〈B〉ψ satisfont [A, B] = iC.

On introduit le polynôme P(λ) = ||(A + iλB)|ψ 〉||2 = λ2〈B2〉ψ − λ〈C〉ψ + 〈A2〉ψ. Puisqu’il estpositif son discriminant est négatif ou nul 〈C〉2ψ − 4〈A2〉ψ〈B2〉ψ � 0, d’où la relation (3.54).

Exercice 3.121) Une matrice réelle symétrique est un cas particulier de matrice hermitique. D’après l’an-nexe (page 75) il existe une base orthonormée de vecteurs propres de CN : Sψ(n) = λnψ

(n).Puisque la matrice est à coefficients réels on peut prendre la partie réelle de l’équation pourconstruire une base de vecteurs de RN : S Reψ(n) = λn Reψ(n). La matrice de changement debase U étant à coefficients réels, elle est orthogonale.2) Le cas des matrices unitaires est traité en suivant la logique de l’annexe pour des matriceshermitiques. Partant de Uψ = λψ on conjugue l’équation ψ†U† = λ∗ψ†. En utilisant l’uni-tarité U† = U−1 on obtient λ−1 = λ∗, d’où λ = eiθ avec θ ∈ R. L’orthonormalisation desvecteurs propres est démontrée comme dans le cas des matrices hermitiques.Puisque les valeurs propres de la matrice unitaire sont de la forme λn = eiθn on peut écrireU =VDUV† = VeiDΘV† = eiVDΘV†

où DU = diag(eiθ1 , · · · , eiθN ) et DΘ = diag(θ1, · · · , θN ).Toute matrice unitaire peut donc s’écrire U = eiΘ où Θ = VDΘV+.

Exercice 3.13 Nous devons résoudre l’équation de Schrödinger libre bidimensionnelle− �2

2m

( d2

dx2 +d2

dy2

)ψ(x, y) = Eψ(x, y) dans le rectangle [0, a] × [0, b] avec des conditions aux

limites ψ(0, y) = ψ(a, y) = 0 ∀ y et ψ(x, 0) = ψ(x, b) = 0 ∀ x. L’examen des conditionsaux limites montre que le problème est séparable (les conditions aux limites dans la direc-tion Ox sont indépendantes de y, etc). D’après le § 3.3.4 nous pouvons donc chercher lesétats stationnaires sous la forme ψ(x, y) = ϕ(x) χ(y). Il est alors facile de vérifier que chaquefonction, ϕ(x) et χ(y), doit être solution d’un problème de boîte quantique unidimensionnelle(§ 1.5.3). Les états sont repérés par deux nombres quantiques (pour un problème bidimen-sionnel) ψn,m(x, y) = 2√

absin

( nπxa

)sin

(mπyb

)et En,m =

�2π2

2m

[( na

)2+

(mb

)2] pour n, m ∈ N∗.

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Page 316: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

Dégénérescences.

(i) Le cas a = 2b. Nous obtenons le spectre En,m =�2π2

8ma2

(4n2 + m2) avec n, m ∈ N∗. Cer-

taines valeurs propres sont dégénérées, par exemple E2,2 = E1,4. Ces dégénérescencesne sont liées à aucune propriété physique particulière, on parle de dégénérescences ac-cidentelles.

(ii) Le cas a = b. Dans le cas de la boîte carrée le spectre est donné par En,m =�2π2

2ma2

(n2 +m2)

avec n, m ∈ N∗. Nous obtenons dans ce cas un ensemble de dégénérescences En,m = Em,n

dont nous voyons immédiatement l’origine physique : la symétrie du problème sous laréflexion x ↔ y. En sus de ces dégénérescences liées à la symétrie de réflexion lespectre possède également des dégénérescences accidentelles, par exemple E5,5 = E1,7(=E7,1).

CHAPITRE 4Exercice 4.1 Soit {an, |ϕn 〉} le spectre de A. Si [A, B] = 0 ⇒ (an − am)〈ϕn |B|ϕm 〉 = 0.

• Si aucune des valeurs propres de A n’est dégénérée : n � m ⇒ 〈ϕn |B|ϕm 〉 = 0, i.e. B estdiagonale dans la base {|ϕn 〉}. Qed.

• Si les valeurs propres an sont dégénérées : notons E (an) le sous espace propre et dn sadimension. an � am ⇒ 〈ϕn |B|ϕm 〉 = 0, i.e. B n’a pas d’éléments de matrice entre sousespaces propres associés à des valeurs propres différentes, autrement dit B est diagonalepar blocs dans la base des vecteurs propres de A. Dans un sous espace propre, A est propor-tionnelle à la matrice identité A(E (an)) = an1dn . Toute combinaison linéaire de vecteurs deE (an) est vecteur propre de A, donc il est toujours possible de choisir une base de vecteurspropres qui soient en même temps vecteurs propres de B. Qed.

Exercice 4.2

a) La première chose consiste à préciser le spectre de A : les trois valeurs propres sont aet ±b, associées respectivement aux vecteurs propres |u1 〉, | v± 〉 = 1√

2

(|u2 〉 ± |u3 〉

). Le

vecteur initial est |ψini 〉 = 1√5

[|u1 〉 + 2i|u2 〉

]. Il y a trois résultats de mesure possibles :

1) Proba[A� a] = |〈u1 |ψini 〉|2 = 15 , l’état après la mesure est |ψfin 〉 = |u1 〉.

2&3) Proba[A � ±b] = |〈 v± |ψini 〉|2 = | 1√2

2i√5|2 = 2

5 , l’état après la mesure est |ψfin 〉 =| v± 〉.En moyenne 〈A〉ψini

= 〈ψini |A|ψini 〉 = a5 . Les fluctuations sont ΔAψini =

25

√a2 + 5b2.

b) Lorsque b = a, l’observable a deux valeurs propres dont une dégénérée : +a est associéeaux deux vecteurs propres |u1 〉 et | v+ 〉 = 1√

2

(|u2 〉 + |u3 〉

). La valeur propre −a a pour

vecteur propre | v− 〉 = 1√2

(|u2 〉 − |u3 〉

). Les deux résultats de mesure sont :

1) Proba[A� −a] = 25 (il est plus facile de commencer par la val. propre non dég.), l’état

après la mesure est |ψfin 〉 = | v− 〉.2) Proba[A � +a] = 3

5 . L’état final est obtenu en projetant |ψini 〉 dans le sous espacepropre, i.e. |ψfin 〉 ∝

[|u1 〉〈u1 | + | v+ 〉〈 v+ |

]|ψini 〉. En écrivant |ψini 〉 ∝ |u1 〉 + i

(|u2 〉 +

|u3 〉 + |u2 〉 − |u3 〉), nous voyons facilement que |ψfin 〉 = 1√

3

(|u1 〉 + i|u2 〉 + i|u3 〉

)=

1√3

(|u1 〉 + i

√2| v+ 〉

).

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Page 317: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Exercice 4.3

a) L’amplitude est 〈θ |G 〉 = 1√2eiθ. Le photon a donc une probabilité |〈θ |G 〉|2 = 1

2 de traver-ser le filtre.

b) L’amplitude de probabilité pour que le photon traverse le premier polariseur est 〈 x |G 〉 =1√2

(proba = 12 ). Après être passé le photon est dans l’état | x 〉. L’amplitude de probabilité

pour passer le deuxième polariseur est 〈y | x 〉 = 0.

c) En introduisant un polariseur entre les deux polariseurs de la question précédente, onpermet au photon de traverser le dispositif (ce qui semble paradoxal du point de vue de laphysique classique). Amplitude pour passer le premier polariseur et état après : 〈 x |G 〉 =

1√2

et | x 〉. Amplitude pour passer le deuxième polariseur et état après : 〈θ | x 〉 = cos θ et| θ 〉. Amplitude pour passer le troisième polariseur et état après : 〈y | θ 〉 = i sin θ et |y 〉. Autotal, la probabilité pour que le photon traverse le dispositif est Pθ = |i sin θ cos θ 1√

2|2 =

18 sin2 2θ. On vérifie que P0 = Pπ/2 = 0 (ce qui nous ramène dans la situation de la questionb). Lorsque θ = π/4 le signal de sortie est maximum.

CHAPITRE 5Exercice 5.1

a) La conservation de la probabilité prend la forme de la conservation de la norme du vec-teur : (Ψout)†Ψout = (Ψ in)†S †SΨ in = (Ψ in)†Ψ in. Ceci doit être vrai ∀ Ψ in, ce qui impliquedonc l’unitarité de la matrice S †S = 1, i.e. S −1 = S †. On a aussi S S † = 1.

b) Une matrice 2×2 à coefficients complexes met en jeu 8 paramètres réels. L’unitarité S †S =1 conduit à 2 équations réelles et une équation complexe, ce qui implique 4 contraintes.Le groupe U(2) est donc un groupe à quatre paramètres réels.

c) On vérifie très facilement que S †S = 1. La phase Θ est la phase globale de la matriceS : en particulier det S = e2iΘ. Le paramètre τ ∈ [0, 1] a le sens d’une probabilité detransmission. La phase ϕ contrôle l’asymétrie u ↔ d. Plus difficile à ce stade : la phaseχ contrôle l’asymétrie sous le renversement temporel (cela peut être une phase d’originemagnétique).

Exercice 5.2

a) La matrice S relie les amplitudes sortantes aux amplitudes entrantes

(BC

)= S

(AD

), donc

S =

(r t′

t r′

). La conservation du courant |B|2+ |C|2 = |A|2+ |D|2 impose l’unitarité S †S = 1,

i.e. |r|2 + |t|2 = |r′|2 + |t′|2 = 1 et r′

t′ = −( r

t

)∗. L’équation S S † = 1 conduit à |r|2 + |t′|2 =|r′|2 + |t|2 = 1 et r

t′ = −( r′

t

)∗.Remarque

l’ensemble de ces matrices (satisfaisant S†S = 1) forme un groupe noté U(2), legroupe des matrices unitaires 2 × 2 conservant la norme ayant pour signature(+, +).

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Page 318: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

b) Les matrices de transfert possèdent la loi de composition simple M = M1 M2 où M1 etM2 caractérisent le potentiel sur deux intervalles successifs. On peut ainsi construire fa-cilement la solution de l’équation de Schrödinger (par des manipulations algébriques),à condition de connaître les matrices de transfert associées aux différents intervalles (onpourra par exemple obtenir M pour un potentiel V(x) = V0 sur [x1, x2] en utilisant l’exer-cice 2.3 ou 2.5).La conservation du courant de probabilité est |C|2 − |D|2 = |A|2 − |B|2. On regroupe

les amplitudes dans des vecteurs AG =

(AB

)et AD =

(CD

). En introduisant la matrice

σzdef=

(1 00 −1

), on peut écrire la conservation du courant comme A†

DσzAD = A†GσzAG, ce

qui implique M†σzM = σz.

Remarque

l’ensemble des matrices satisfaisant cette condition forme le groupe U(1,1), legroupe des matrices unitaires 2 × 2 conservant la norme ayant pour signature(+,−).

c) Pour obtenir la relation entre matrices S et M il suffit de partir de B = rA + t′D et C =tA + r′D. Quelques manipulations conduisent à

M =

(t − r′r/t′ r′/t′

−r/t′ 1/t′

)(B.5)

En utilisant les équations du a) on obtient (5.35). On déduit det M = t/t′. En particulier| det M| = 1.

Exercice 5.3 La normalisation de ψ(p, t) = ψ(p, 0)e−i p2 t2m� est immédiate. Dans l’espace

réel, le calcul de ψ(x, t) =∫ +∞−∞

dp√2π�

ψ(p, 0)ei px�−i p2t

2m� est sans difficulté (encore une intégralegaussienne). On aura intérêt à translater la variable d’intégration de p0. On obtient

ψ(x, t) ∝ eip0 x�−i

p20 t

2m� exp−(x − p0t/m)2

2(a2 + i �tm )(B.6)

Cette expression montre que la fonction d’onde est gaussienne, centrée sur 〈x〉ψ(t) =1m p0t et

de largeur Δxψ(t) =

√a2 +

( �tma

)2.

Remarque : Diffusion quantique?Il serait tentant d’interpréter l’équation de Schrödinger comme une équation de diffu-sion classique pour une « constance de diffusion complexe D = i�

2m ». Rappelons que

la diffusion classique libre est décrite par l’équation ∂∂t P(x; t) = D ∂2

∂x2 P(x; t) où P(x; t)est la densité de probabilité. Remarquons toutefois que l’étalement de la densité deprobabilité au cours du temps n’est pas le même dans les deux cas : Δxclass(t) =

√2Dt

dans le cas classique, alors que l’étalement est plus rapide dans le cas quantiqueΔxquant(t) ∝ �t

ma , où a est la largeur initiale du paquet d’ondes.

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Page 319: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Exercice 5.4 Nous avons ◦ri =

i�[H, ri] = i

2�m [�p 2, ri] = 1m pi et ◦

pi =i�[H, pi] =

i�[V(�r), pi] = −∇iV(�r). Nous retrouvons les équations de Hamilton-Jacobi de la mécanique

classique (annexe 1.A page 30).

Exercice 5.5 Nous appliquons les résultats de l’exercice 5.4 à l’oscillateur harmonique :◦x = 1

m p et ◦p = −mω2 x. Ces équations sont linéaires dans les opérateurs : ceci nous permet

d’obtenir un système d’équations différentielles pour les valeurs moyennes des opérateurs,qui coïncident donc avec les équations du mouvement classique : d

dt 〈x〉ψ(t) =1m 〈p〉ψ(t) et

ddt 〈p〉ψ(t) = −mω2 〈x〉ψ(t). Ces équations sont élémentaires à résoudre : 〈x〉ψ(t) = x0 sin(ωt + φ)et 〈p〉ψ(t) = mωx0 cos(ωt + φ).

Exercice 5.6

a) L’impulsion est conservée, i.e. [H, p] = 0 et donc [H, f (p)] = 0 quelle que soit f .ddt 〈 f (p)〉ψ(t) =

i�〈[H, f (p)]〉ψ(t) = 0, donc 〈 f (p)〉ψ(t) = 〈 f (p)〉ψ(0).

b) [H, x] = − i�m p, d’où d

dt 〈x〉ψ(t) =1m 〈p〉ψ(0). Une intégration donne donc 〈x〉ψ(t) =

tm 〈p〉ψ(0) +

〈x〉ψ(0).

c) [H, x2] = − i�m (xp + px) d’où d

dt 〈x2〉ψ(t) =

1m 〈xp + px〉ψ(t) (le membre de droite n’est pas

constant).

d) [H, [H, x2]] =(− i�

m

)22p2. En utilisant à nouveau la question a : d2

dt2 〈x2〉ψ(t) =2

m2 〈p2〉ψ(0).

e) Une double intégration nous donne 〈x2〉ψ(t) =t2

m2 〈p2〉ψ(0) +1m 〈xp + px〉ψ(0)t + 〈x2〉ψ(0). Le

résultat demandé s’en déduit trivialement.

Exercice 5.7 Partant de [H, B] = −i�◦B nous appliquons (3.54) : ΔBψ ΔHψ � �

2 |〈◦B〉ψ|.

En remarquant que ΔBψ/|〈◦B〉ψ | = τB

ψ définit une échelle de temps caractérisant l’évolution

de l’observable B, l’inégalité prend la forme τBψ ΔHψ � �

2 . Cette approche, proposée par

Mandelstamm & Tamm en 1945, n’a de sens que si 〈◦B〉ψ est non nulle et relativement « bien

définie » Δ◦Bψ � |〈

◦B〉ψ|.

Pour en savoir plus

Y. Aharonov & D. Bohm, Time in the quantum theory and the uncertainty relation bet-ween time and energy, Phys. Rev. 122, 1649 (1961).

CHAPITRE 6Exercice 6.1 Sous groupes : {I, R2}, {I, S 1}, {I, S 2}, etc. {I, R1, R2, R3}, {I, S 1, S 2, R2} et{I,Π1,Π2, R2}.

Exercice 6.2

a) Une matrice hermitique 2 × 2 est repérée par deux paramètres réels (H11 et H22) et unparamètre complexe (H12 = H∗

21), i.e. quatre paramètres réels.©D

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Page 320: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

b) R |ψG 〉 = |ψD 〉 et R |ψD 〉 = |ψG 〉 d’où R =

(0 11 0

)(à une phase ±1 près).

c) Le problème est symétrique sous la réflexion, donc [H , R] = 0. On déduit H11 = H22

et H12 = H21 i.e. H12 ∈ R. Des considérations de symétrie nous ont permis de réduire lenombre de paramètres réels indépendants du modèle.

d) L’état de plus basse énergie est l’état symétrique |S 〉 = 1√2

[|ψG 〉+ |ψD 〉

](fonction d’onde

sans nœud) alors que l’état antisymétrique |A 〉 = 1√2

[|ψG 〉 − |ψD 〉

]est un état de plus

haute énergie (fonction d’onde avec un nœud), i.e. H12 ∈ R−. Pour un choix approprié del’origine des énergies, on peut écrireH = − 1

2�ω0 R où ω0 ∈ R+ est la fréquence associéeà la transition entre l’état fondamental et l’état excité.

Exercice 6.3 L’équation de Schrödinger pour la fonction d’onde dans l’espace des im-

pulsions est (exercice 3.4) i� ∂∂t ψ(�p, t) = �p 2

2m ψ(�p, t) + V(i��∇p)ψ(�p, t). Il est facile de voir queψrenv(�p, t) = ψ∗(−�p,−t) est solution de la même équation différentielle. Qed.

Exercice 6.4 〈 x |ψ′ 〉 = ψ′(x) = ψ(x − a) =∑∞

n=01n!

(− a d

dx

)nψ(x) = e−a d

dxψ(x) =

〈 x |e− i�

ap|ψ 〉 d’où |ψ′ 〉 = e−i�

ap|ψ 〉. Qed.

Exercice 6.5 p commute avec les translations. Nous avons vu que T (a)xT (a)† = x−a d’oùT (na)HT (na)† = 1

2m p2 + V(x − na). Puisque V(x) est une fonction périodique, l’hamiltonienest bien invariant sous les translations d’un multiple entier de a.

Exercice 6.6 Les états de plus basse énergie correspondent aux petites valeurs du pa-ramètre de Bloch, K → 0. Nous avons noté la similitude entre le paramètre de Bloch et un

vecteur d’onde. Pour obtenir une quantité dimensionnée, nous introduisons kdef= K/a. Lorsque

k → 0 l’énergie est quadratique E(ka) � (E0 − 2A) + A (ka)2 : nous avons retrouvé la rela-tion de dispersion pour une particule libre de vecteur d’onde k pour une masse (effective)

m∗ def= �2/(2Aa2). Lorsque le couplage diminue A ↘ la probabilité pour que la particule saute

d’un site au voisin diminue, et donc la particule devient effectivement plus « lourde » m∗ ↗.AN : Pour A = 1 eV et a = 1 Å, on obtient m∗ � 3me � 3 × 10−30 kg.

Exercice 6.7 Nous avons vu que la définition P |�r 〉 = | −�r 〉 implique P�rP = −�r. Nousremarquons que 〈�r |P | �p 〉 = 〈−�r | �p 〉 = 〈�r | −�p 〉 d’où P | �p 〉 = | −�p 〉 et donc P �pP = −�p.Puisque les opérateurs position et impulsion sont impairs, il s’ensuit immédiatement que le

moment orbital est pair P��P = +��.

Exercice 6.8 p2x est pair. PV(x)P = V(−x). Si V(x) = V(−x) alors PHP = H. Puisque

[P, H] = 0 il existe une base d’états propres communs aux deux opérateurs, i.e. il existe unebase d’états stationnaires décrits par des fonctions d’onde paires ou impaires, ϕ(−x) = ±ϕ(x).

Exercice 6.9 Nous étudions les états liés (E < 0) du problème. Rappelons la contrainteentre les paramètres du problème q2 = k2

0 − k2.

a) Solutions paires. La solution paire, normalisable, est ψ(x) = A cos(kx) pour x ∈[−a/2,+a/2] et ψ(x) = Be−q|x| pour |x| ∈ [+a/2,+∞[ (la normalisabilité conduit à éli-miner les exponentielles croissant à l’infini e+q|x|). Le potentiel est borné, donc ψ et ψ′

sont continues partout (cf. exercice 2.1). Il nous reste à imposer ces conditions où elles

310

Page 321: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

sont pas encore satisfaites : en ±a/2. Puisque la solution est paire, les conditions de rac-cordement prennent la même forme en a/2 et −a/2. D’autre part la continuité de ψ et ψ′

implique la continuité de ψ′/ψ = [ln |ψ|]′. Cette unique condition est plus simple à ma-nipuler car elle élimine les constantes de normalisation. Nous obtenons très directementl’équation de quantification pour les solutions paires

k tan(ka/2) = q =√

k20 − k2 (B.7)

Cette équation peut être résolue graphiquement (on cherche les intersections de k tan(ka/2)avec un arc d’ellipse, comme représenté sur la figure B.1) : on trouve un nombre fini de

solutions {k1, · · · , kNp } auxquelles correspondent des énergies quantifiées En = −V0+�2k2

n2m .

Remarquons que quelle que soit la profondeur du puits (i.e. la valeur du paramètre sansdimension k0a) il existe au moins une solution.

b) Solutions impaires. ψ(x) = A sin(kx) pour x ∈ [−a/2,+a/2] et ψ(x) = B sign(x)e−q|x| pour|x| ∈ [+a/2,+∞[. Le raccordement des deux expressions en a/2 nous donne l’équation dequantification pour les solutions impaires

k cotg(ka/2) = −q = −√

k20 − k2 (B.8)

Cette fois il n’existe de solution (impaire) que si k0a � π (figure B.1).

c) Dans la limite du puits profond k0a → ∞, l’ellipse intersecte tan et cotg au niveau desasymptotes, i.e. pour kn � n π

a avec n ∈ N∗ (les solutions paires/impaires correspondentsaux n impairs/pairs). Nous avons retrouvé les énergies quantifiées du puits infini (boîte detaille a, cf. § 1.5.3), comme on pouvait s’y attendre.

d) Dans la limite inverse du puits peu profond, k0a → 0, nous avons noté que seule existeune solution paire. Notons que l’extension de la fonction d’onde est beaucoup plus grandeque la taille du puits dans ce cas, q1a � 1. Conclusion : aussi peu profond soit le puits,il piège toujours au moins un état lié. Cette propriété est propre à la situation unidimen-sionnelle et se généralise pour tout potentiel de courte portée, globalement attractif, i.e.t.q.

∫dx V(x) < 0.

0 5 10 15 20 25

�20

�10

0

10

20

ka

k1 k3 k5 k7

0 5 10 15 20 25

�20

�10

0

10

20

ka

k2 k4 k6

Figure B.1– Résolution graphique des équations de quantification pour le puitssymétrique.

À gauche, énergies des solutions paires ; à droite : solutions impaires. Pour la valeur dek0a = 20 on trouve donc quatre solutions paires et trois solutions impaires.

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Page 322: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

Exercice 6.10

a) Entre deux impuretés on résout l’équation de Schrödinger libre. La solution est la combi-naison de deux ondes planes ψ(x) = Aneik(x−na) +Bne−ik(x−na) avec E = �

2k2

2m . Avec ce choixψ(na+) = An + Bn.

b) Le raccordement entre les expressions sur deux intervalles successifs assure la continuitéen x = (n + 1)a : An+1 + Bn+1 = Aneika + Bne−ika. La présence du potentiel δ(x − (n + 1)a)induit une discontinuité de la dérivée ψ′((n + 1)a+) − ψ′((n + 1)a−) = λψ((n + 1)a) d’oùAn+1 − Bn+1 = Aneika(1 − iλ

k

)− Bne−ika(1 + iλ

k

). Ce couple d’équations est mis sous forme

matricielle (An+1

Bn+1

)= M

(An

Bn

)où M

def=

(1 − iλ

2k − iλ2k

iλ2k 1 + iλ

2k

) (eika 00 e−ika

)(B.9)

est la matrice de transfert de l’intervalle ]na, (n + 1)a] (cf. exercice 5.2 page 96).

c) Si x ∈]na, (n + 1)a[ alors ψK(x) = Aneik(x−na) + Bne−ik(x−na) et ψK(x + a) = An+1eik(x−na) +

Bn+1e−ik(x−na). Nous obtenons donc (An+1, Bn+1) = (An, Bn)eiK , d’après le théorème deBloch.

d) La compatibilité des deux systèmes d’équations fournit l’équation de quantification

det(M − 1eiK

)= 0 ⇒ cos K = cos ka +

λ

2ksin ka (B.10)

qui correspond à l’équation aux valeurs propres de la matrice de transfert. Rappelons nousque k paramétrise l’énergie, donc nous avons obtenu l’équation de quantification sous la

forme |K| = f (E)def= arccos

(cos ka + λ

2k sin ka). Celle-ci admet des solutions lorsque

| cos ka+ λ2k sin ka| � 1, ce qui est satisfait sur un ensemble d’intervalles de E (des bandes

d’énergie), ainsi que le montre la figure B.2 (en haut à gauche). Le spectre des énergiesest continu par morceaux : il est constitué d’une infinité de bandes En(K) avec n ∈ N∗ etK ∈ [−π,+π].

e) Si le cristal est fini et contient M mailles, le paramètre de Bloch est quantifié Km = m 2πM

où m ∈ {1, · · · , M} pour assurer ψK(x + Ma) = ψK(x)eikM = ψK(x). La densité d’étatspar unité de volume est "(E) = 1

Maρ(E) = 1Ma

∑n,Km

δ(E − En(Km)). En prenant la limite

M → ∞ nous obtenons "(E) = 1a

∫ +π−π

dK2π

∑n δ(E − En(K)). Les bandes En(K) sont les

solutions de |K| = f (E) d’où∑

n δ(E−En(K)) =∣∣∣ d fdE

∣∣∣[δ(K− f (E))+δ(K+ f (E))]. Finalement

la densité d’états est donnée par "(E) = 1aπ | f

′(E)|. À une constante près la fonction f (E)

introduite plus haut correspond à la densité d’états intégrée∫ E

0dE′ "(E′) = 1

aCn ± 1aπ f (E)

(la constante Cn ∈ N et le signe dépendent de l’intervalle d’énergie).

6.1 Problème : Groupe de Galilée

1. a) p′ = p + mv.

b) Partons de U(v)| x 〉 = ei f (x,t) | x + vt 〉. Déterminons l’action de U(v)† = U(−v) surl’état localisé spatialement. Pour satisfaire U(v)†U(v) = 1 il faut que U(v)†| x 〉 =e−i f (x−vt,t)| x − vt 〉. Nous déduisons l’action de x′ sur un état localisé x′| x 〉 =U(v)xU(v)†| x 〉 = (x − vt)| x 〉 = (x − vt)| x 〉 d’où x′ = x − vt. Une démarche simi-laire conduit à p′ = p − mv.

312

Page 323: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Figure B.2En haut : Résolution graphique de l’équation de quantification : les zones grisées cor-respondent aux bandes d’énergie. En bas : Relation de dispersion (tournée de 90◦) lescinq premières bandes d’énergie En(K) : on a tracé K = ±f (E) en fonction de ka ∝

√E . À

droite : Densité d’états par unité de volume (comparée à la densité d’états libre en tirés).Les divergences sont appelées « singularités de van Hove ».

2. a) Aucune difficulté.

b) Nous avons vu à la question 1. b) que la transformation des opérateurs position etimpulsion est lineaire en v. Il faut donc que [G, [G, x]] = 0 et [G, [G, p]] = 0, cequi est possible si G est une combinaison linéaire des deux opérateurs. En écrivantG = −αx + βp, nous obtenons x′ = x − i

�vβ[ p, x] = x − vβ d’où β = t. De même

p′ = p − vα d’où α = m.

c) Le générateur du groupe de Galilée est donc G = pt − mx . D’après le théorème

d’Ehrenfest ddt 〈G〉ψ(t) =

i�〈[H, G]〉ψ(t) + 〈 ∂G

∂t 〉ψ(t). On obtient i�[H, G] = −V ′(x) t − p.

En utilisant ∂G∂t = p nous obtenons d

dt 〈G〉ψ(t) = −t 〈V ′(x)〉ψ(t). Lorsque V(x) = 0(particule libre), G est bien une quantité conservée : d

dt 〈G〉ψ(t) = 0. L’invariance sousle groupe de Galilée (i.e. le principe d’inertie) implique donc que le mouvement estrectiligne uniforme x = 1

m pt+cste où cste = −G.

3. a) On obtient U(v) = ei�v(mx−pt) = e

i�

mvxe−i�vt pe−

i2�mv2t. Cette expression montre, qu’à une

phase près, la transformation de Galilée combine une translation spatiale Tx(vt) =e−

i�vt p et une translation d’impulsion de mv : T p(mv) = e

i�

mvx.

b) Cette dernière expression nous permet d’obtenir facilement l’action de la trans-formation sur l’onde plane |Ψp(t) 〉 = |φp 〉e−

i�

Ep t où Ep =p2

2m . L’action sur

les fonctions d’onde est 〈 x |U(v)|Ψp(t) 〉 = 〈 x |e i�

mvxe−i�vt p|φp 〉e−

i�

(Ep+12 mv2)t =

1√2π�

ei�

(p+mv)xe−i�

( p2

2m+vp+12 mv2)t = 〈 x |φp+mv 〉e−

i�

Ep+mv t. On obtient bien la loi attendue©D

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Page 324: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

U(v)|Ψp(t) 〉 = |Ψp+mv(t) 〉 ; au passage nous avons obtenu l’expression de la phaseintroduite au début de l’exercice g(p, t) = − 1

�( 1

2 mv2 + vp)t.

CHAPITRE 7Exercice 7.1 À une échelle d’énergie E le potentiel harmonique confine la particule surδx ∼ 1

ω

√E/m. Puisque la particule fait des aller-retours dans le puits δp ∼

√mE. En utilisant

δxδp � � on obtient 1ωE � �. L’énergie du fondamental est donc E0 ∼ �ω.

Exercice 7.2 �ω = 1Å⇒ω � 1016s−1 et �ω � 6eV. La raideur est k = 100N/m= 10nN/Å.

Exercice 7.3 Analyse dimensionnelle :[�/mω

]= ML2T−1T /M = L2. Ok.

[mω�

]=

MT−1 ML2T−1 = (ML/T )2 = [impulsion]2. Qed.

Exercice 7.4 |ϕn 〉 = 1√na†|ϕn−1 〉 = 1√

n(n−1)

(a†

)2|ϕn−2 〉 = · · · = 1√n!

(a†

)n|ϕ0 〉. Qed.

Exercice 7.5 Pour simplifier le calcul nous faisons m = ω = � = 1. Les moyennes sont〈x〉ϕn =

1√2〈a + a†〉ϕn = 0 (conséquence du confinement par un potentiel symétrique) et

〈x2〉ϕn =12 〈aa† + a†a〉ϕn = 〈H〉ϕn = n + 1

2 . Nous pouvions nous attendre à ce résultat puisque12 〈x

2〉ϕn =12 En (moyenne de l’énergie potentielle d’après le théorème du viriel). De même

〈p〉ϕn = 0 (conséquence du confinement) et 〈p2〉ϕn = n + 12 (l’énergie cinétique moyenne est

12 〈p

2〉ϕn =12 En). En rétablissant m, ω et � (cf. exercice 7.3) : Δx2

ϕn= 〈x2〉ϕn =

�mω

(n + 1

2

)et

Δp2ϕn= mω�

(n + 1

2

). D’où ΔxϕnΔpϕn = �

(n + 1

2

). La dispersion des états stationnaires dans

l’espace des phases classique, minimale pour l’état fondamental |ϕa 〉, croît avec l’énergie.

Exercice 7.6

a) Le problème est séparable : l’hamiltonien est de la forme (3.46) (cf. § 3.3.4). Connaissantles résultats pour un oscillateur harmonique unidimensionnel, nous déduisons immédia-tement le spectre de valeurs propres : En,n′ = �ωx

(n + 1

2

)+ �ωy

(n′ + 1

2

)avec n, n′ ∈ N.

Les fonctions d’onde correspondantes sont Ψn,n′ (�r) = ϕωxn (x) ϕ

ωyn′ (y) où la fonction ϕωn (x)

est donnée par (7.25).

b) • Si le rapport ωx/ωy � Q, le spectre ne présente aucune dégénérescence.

• Dégénérescences accidentelles : ωx/ωy ∈ Q. Des dégénérescences apparaissent lorsquele rapport des pulsations est un rationnel : ωx/ωy = p/q où p, q ∈ N∗. Écrivons dans cecas ωx = pω0 et ωy = qω0. Les énergies prennent la forme : En,n′ = �ω0(np + n′q) +cste. Nous notons la dégénérescence des niveaux : Ekq,k′p = Ek′q,kp, avec k, k′ ∈ N.De telles dégénérescences sont dites accidentelles car elles ne résultent de l’existenced’aucune symétrie particulière dans le problème (nous avons déjà discuté ce point dansl’exercice 3.13).

• Dégénérescences résultant d’une symétrie : le cas ωx = ωy ≡ ω. Dans ce cas lesénergies prennent la forme En,n′ = �ω(n + n′ + 1). Les états propres de l’hamiltonien|n 〉x ⊗ |n′ 〉y sont repérés par deux indices mais les niveaux d’énergie peuvent êtreindicés par un unique entier

EN = �ω(N + 1) pour N ∈ N (B.11)

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Page 325: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

à chacune de ces énergies sont donc associés tous les états |n 〉x ⊗ |n′ 〉y tels queN = n+n′. La dégénérescence de EN est donc donnée par le nombre de façons de parti-tionner l’entier N comme la somme de deux entiers : dN =

∑∞n=0

∑∞n′=0 δN,n+n′ = N + 1.

Contrairement au cas ωx/ωy ∈ Q, ces dégénérescences résultent d’une symétrie duproblème (la symétrie de rotation dans le plan xOy).

Remarque

Au lieu de considérer les états propres de H sous la forme |n 〉x ⊗ |n′ 〉y , il peut serévéler plus intéressant de construire des états propres communs à H et l’opérationde symétrie1 (c’est ce qui sera fait dans l’exercice 16.3). Les nouveaux états propressont des combinaisons linéaires des |n 〉x ⊗ |n′ 〉y , et n’ont plus cette forme factorisée,cependant la nouvelle classification (en fonction du moment orbital) montre explici-tement la relation entre l’ invariance par rotation et les dégénérescences.

Exercice 7.7 Le problème est séparable. Une base d’états stationnaires est donnée par lesétats ϕnx (x)ϕny(y)ϕnz (z) où ϕn(x) sont les états stationnaires du problème unidimensionnel.Le spectre des énergies est donc EN = �ω(N + 3

2 ) : les énergies ne dépendent que d’unnombre quantique principal N = nx + ny + nz ∈ N. La dégénérescence du niveau est dN =∑∞

nx, ny, nz=0 δN,nx+ny+nz =∑N

nx=0∑N−nx

ny=0 1 =∑N

nx=0(N − nx + 1) = 12 (N + 1)(N + 2). Le calcul

pourrait se généraliser pour les dimensions supérieures.

Exercice 7.8 Chaîne d’oscillateurs couplés

La transformée de Fourier inverse est ξn =1√N

∑Q χQeiQn (on pourra utiliser 1

N

∑n eiQn = δQ,0

pour Q ∈ [−π,+π]).

a) Le terme cinétique est∑

n ξ2n =

1N

∑n∑

Q,Q′ χQχQ′ei(Q+Q′)n =∑

Q |χQ |2. De même leterme potentiel s’exprime en fonction des nouvelles variables ω2

0

∑n(ξn − ξn−1)2 =

ω20

∑Q |χQ|2|1 − e−iQ |2 =

∑Q ω

2Q |χQ|2 où nous avons introduit ωQ

def= 2ω0| sin(Q/2)| avec

Q ∈ [−π,+π]. Finalement le lagrangien décrit un ensemble d’oscillateurs découplés enterme des variables (χQ, χQ). Ces variables décrivent les modes propres de vibration etωQ est le spectre de fréquences propres de vibrations (pour l’instant tout est classique).

Le moment canoniquement conjugué de la coordonnée χQ est πQdef= ∂L

∂χQ= mχ−Q. L’ha-

miltonien est donc H =∑

Q( 1

2m |πQ|2 + 12 mω2

Q |χQ|2).

b) La quantification du problème est réalisée en imposant [χQ, πQ′ ] = i�δQ,Q′ . Le spectredes N oscillateurs indépendants est aisément obtenu : les états quantiques de H sont dela forme | {nQ} 〉 où nQ ∈ N est l’excitation du mode Q (le nombre de « phonons » dans lemode). L’énergie de cet état est E[{nQ}] =

∑Q �ωQ(nQ +

12 ).

c) Puisque les oscillateurs sont découplés on a 〈 {nQ} |χQχQ′ | {nQ} 〉 = δQ,−Q′ 2�mωQ

(nQ +12 )

(le facteur 2 supplémentaire, par rapport au résultat de l’exercice 7.5, vient de ce que|χQ|2 est relié à l’énergie potentielle de deux oscillateurs indépendants, χQ et χ−Q).L’état fondamental de la chaîne (le vide d’excitation) est |Ω 〉 = | {nQ = 0} 〉. On obtient

1. Toute combinaison lineaire des états propres associés à la valeur propre dégénérée EN est encore étatpropre avec la même valeur propre.©D

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Page 326: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

〈Ω |(ξn − ξm)2|Ω 〉 = 2�mω0

1N

∑Q

sin2[Q(n−m)/2]| sin(Q/2)| . Si on considère la chaîne infinie, N → ∞, on

remplace la somme sur les modes par une intégrale d’où

〈Ω |(ξn − ξm)2|Ω 〉 = 2�mω0

∫ +π

−π

dQ2π

sin2[Q(n − m)/2]| sin(Q/2)|

�|n−m|�1

2�mω0π

ln |n − m| (B.12)

Cette expression décrit l’effet des fluctuations quantiques des oscillateurs dans leur étatfondamental. La limite de grande distance est analysée en remarquant que l’intégrale estdominée par le voisinage de Q → 0 dans ce cas : −

∫ +π0

dQπ

1Q eiQ(n−m) � 1

πln |n − m|. Les

fluctuations de positions des atomes de la chaîne croissent logarithmiquement avec ladistance. Les fluctuations quantiques détruisent l’ordre à longue portée : dans l’état fon-damental, seuls un nombre fini Ncristal d’atomes semblent ordonnés, Ncristal ≈ exp mω0a2

2π�(l’absence d’ordre cristallin en d = 1 et 2, à cause des fluctuations quantiques ou ther-miques, est une conséquence du théorème de Mermin-Wagner). L’exercice est l’ar-chétype d’un problème de quantification d’un champ (ici le champ des déplacements dematière).

7.1 Problème : États cohérents

1. a) On utilise a|α 〉 = α|α 〉 et 〈α |a† = α∗〈α |. On obtient 〈N〉α = |α|2 et 〈N2〉α =〈α |a†aa†a|α 〉 = 〈α |a†(a†a + 1)a|α 〉 = |α|4 + |α|2 d’où ΔNα = |α|. On déduit〈H〉α = �ω(|α|2 + 1

2 ) et ΔHα = �ω|α|. Si |α| � 1 les fluctuations relatives de l’énergiesont petites ΔHα/〈H〉α � 1/|α|.

b) En utilisant x = (a+a†)/√

2 et p = (a−a†)/i√

2 on obtient 〈x〉α =√

2 Re[α] et 〈p〉α =√2 Im[α]. Le plan complexe de la variable α s’interprète donc comme le plan de

(〈x〉, 〈p〉), i.e. comme l’espace des phases classiques. Le calcul des fluctuations donneΔx2

α = Δp2α =

12 d’où ΔxαΔpα = �/2 : les états cohérents ont une dispersion minimale

dans l’espace des phases classique (alors que la dispersion des états stationnaires croîtavec l’énergie, exercice 7.5).

2. En écrivant |α 〉 =∑∞

n=0 cn|ϕn 〉 et en utilisant la définition de l’état cohérent nous obtenons√n cn = α cn−1, d’où, après normalisation (

∑∞n=0 |cn|2 = 1), |α 〉 = e−

12 |α|

2 ∑∞n=0

αn√

n!|ϕn 〉 =

e−12 |α|

2eα a† |ϕ0 〉 ; la seconde représentation est obtenue en utilisant (7.22). Si le système

se trouve dans l’état cohérent, la probabilité qu’il soit observé dans l’état stationnaire estProba[N � n] = |〈ϕn |α 〉|2 = |α|2n

n! e−|α|2

(distribution de Poisson).

3. Le produit scalaire de deux états cohérents est 〈α |α′ 〉 = exp− 12 (|α − α′|2 − α∗α′ + αα′∗),

i.e. |〈α |α′ 〉|2 = e−|α−α′ |2 . Les états cohérents étant états propres d’un opérateur non hermi-

tique, ils ne sont pas orthogonaux. Ils forment une base dite « surcomplète ».

4. a) On utilise à nouveau la décomposition de la question 2. On déduit immédiatement|ψα(t) 〉 = e−

12 |α|

2e−

i2ωt ∑∞

n=0αn√

n!e−inωt |ϕn 〉. On remarque que cet état est encore un

état cohérent, de paramètre complexe α(t)def= αe−iωt. Autrement dit la dépendance

temporelle peut être absorbée dans le paramètre complexe : |ψα(t) 〉 = e−i2ωt|α(t) 〉.

b) Les propriétés de |ψα(t) 〉, i.e. de l’état cohérent |α(t) 〉 sont immédiatement obte-nues (question 1) : 〈x〉ψα(t) =

√2|α| cos(ωt − η) et 〈p〉ψα(t) = −

√2|α| sin(ωt − η) où

316

Page 327: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

α = |α|eiη. Nous remarquons que ces valeurs moyennes suivent la trajectoire clas-sique 〈x〉ψα(t) = xclass(t) et 〈p〉ψα(t) = pclass(t) où xclass(t) et pclass(t) sont les solutionsdes équations du mouvement classiques (cf. exercice 5.5). La dispersion de l’étatdans l’espace des phases classique reste minimale Δxψα(t)Δpψα(t) = �/2. Les états co-hérents suivent « au plus près » la solution classique, d’où la dénomination de « quasi-classique ».

5. La fonction d’onde est solution de ( ddx + x)ψα(x; t) =

√2α(t)ψα(x; t) = [xclass(t) +

ipclass(t)]ψα(x; t). L’équation différentielle est résolue sans difficulté. Après normalisation onobtient une gaussienne centrée sur la trajectoire classique (idem dans l’espace des impul-sions) :

ψα(x, t) =1π1/4

e−12 [x−xclass(t)]2+i pclass(t) x et ψα(p, t) =

1π1/4

e−12 [p−pclass (t)]2−i xclass(t) p. (B.13)

CHAPITRE 8Exercice 8.1 Les Z moments agissent dans des espaces de Hilbert disctincts, donc com-mutent. Donc [Li, L j] =

∑Zn=1[�(n)

i , �(n)j ] =

∑Zn=1 i�εi jk�

(n)k = i�εi jkLk. Qed.

Exercice 8.2 Nous exprimons les résultats en fonction des Cm�= A� Ym

�où A� =√

4π/(2� + 1). L’intérêt de ces fonctions est qu’elles satisfont la relation de normalisation∑�m=−� |Cm

� (θ,ϕ)|2 = 1.En utilisant x = cosϕ sin θ, y = sin ϕ sin θ et z = cos θ, nous obtenons

C01(θ,ϕ) = z et C±1

1 (θ,ϕ) = ∓ 1√

2(x ± iy). (B.14)

D’où 〈θ,ϕ |1, x 〉 = A1 x, 〈θ,ϕ |1, y 〉 = A1 y et 〈θ,ϕ |1, y 〉 = A1 z, avec A1 =√

3/(4π).Pour � = 2 :

C02 =

12

(3z2 − 1) , C±12 = ∓

√32

(x ± iy)z et C±22 =

√38

(x2 − y2 ± 2ixy). (B.15)

Exercice 8.3 En utilisant [ri, p j] = i�δi j on verifie explicitement que [�i, r j] = i�εi jkrk etdonc [�i, �r 2] = i�εi jk(r jrk + rkr j) = 0.

Exercice 8.4 La différence d’énergie entre niveaux Zeeman est ΔE = E3p1/2,−1/2 −E3s1/2,+1/2 = Cste−(g3p1/2

12 + g3s1/2

12 )|μB|B =Cste− 4

3 |μB|B. Posons ΔE = hc/λ2, on obtientδλλ2=

4|μB |B3ΔE . Il faut donc un champ B = δλ3πmec

λ22 |qe |

= 4.6 T, ce qui suggère que Zeeman avait

besoin d’électro-aimant puissants.

Exercice 8.5 En utilisant (8.85) on obtient σ2u = 1. Les valeurs propres de toute compo-

sante de �σ sont donc ±1. La matrice est donnée par σu = cosϕ sin θ σx + sinϕ sin θ σy +cos θ σz :

σu =

(cos θ e−iϕ sin θ

eiϕ sin θ − cos θ

)(B.16)

©D

unod

.La

phot

ocop

ieno

nau

tori

sée

estu

ndé

lit.

317

Page 328: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

Nous reconnaissons la matrice étudiée au chapitre 5 dont les vecteurs propres sont donc

|�u,+ 〉 = cos(θ/2) |+ 〉 + eiϕ sin(θ/2) | −〉 (B.17)

|�u,−〉 = − sin(θ/2) |+ 〉 + eiϕ cos(θ/2) | −〉. (B.18)

Le calcul du spin moyen est aisé, par exemple 〈S z〉| �u,+ 〉 = 〈�u,+ |S z|�u,+ 〉 = cos(θ/2)2 −sin(θ/2)2 = cos θ, etc. Lorsque l’état de spin est |�u,+ 〉, le spin pointe en moyenne dans ladirection �u :

〈�S 〉| �u,+ 〉 =�

2�u. (B.19)

Exercice 8.6 Notons �v = �θ/θ = − sinϕ�ux + cosϕ�uy. En calculant explicitement R(�θ) =cos(θ/2) − iσv sin(θ/2) où σv = − sinϕσx + cosϕσy, on vérifie facilement que R(�θ)|+ 〉 =|�u,+ 〉, ce qu’on attendait puisque la rotation R(�θ) envoie le vecteur �uz dans la direction(θ,ϕ) ≡ �u.

Exercice 8.7 L’opérateur de position de l’atome sur l’écran est proportionnel à la compo-sante du moment z � κMz. On obtient donc (2s + 1) taches. À la limite s � 1 on détecte lesatomes le long d’un segment sur l’écran : on retrouve l’idée que la limite des grands nombresquantiques coïncide avec les résultats classiques.

Exercice 8.8 On utilise le résultat de l’exercice 8.2. En terme des Cm� = Ym

√4π/(2� + 1)

on obtient : f (�r) = (a + c r2)C00 + 2b r

[C0

1 −C11

]+ c r2 [2C0

2 +√

2 C−12 +C2

2 −C−22

].

Exercice 8.9 On a évidemment[��i,

�p2i

2me− Ze2

ri

]= 0 puisque ||�ri|| et �p2

i sont deux opérateurs

scalaires. On obtient[��i, f (ri j)

]= i��ri × �r j

1ri j

f ′(ri j) (le commutateur n’est pas nul puisque ��i

ne génère les rotations que dans l’espace de Hilbert de la particule i mais pas dans l’espacede Hilbert des autres particules). Toutefois nous voyons que

[��i + �� j, f (ri j)]= 0 : f (ri j) est un

scalaire du point de vue des rotations engendrées par ��i + �� j.

Exercice 8.10 D’après (B.19) on obtient 〈S v〉| �u,+ 〉 =�2�u·�v. Puisqueσ2

v = 1 on a 〈S 2v 〉| �u,+ 〉 =

�2

4 et finalement

ΔS v | �u,+ 〉 =�

2

√1 − (�u ·�v)2. (B.20)

Lorsque le spin pointe (en moyenne) dans la direction �u, les composantes du spin perpendi-culaires au vecteur, si �u ·�v = 0, présentent les fluctuations maximales.

CHAPITRE 9Exercice 9.1 C j,m

j1,m1; j2,m2� 0 ssi Δ( j1, j2, j) et m = m1 + m2.

Remarque : Coefficients 3JIl existe une autre notation pour caractériser le changement de base. On introduit lescoefficients 3J reliés aux coefficients de Clebsch-Gordan comme

Cj,mj1,m1;j2,m2

= (−1)j1−j2+m√

2j + 1(

j1 j2 jm1 m2 −m

)(B.21)

318

Page 329: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

L’intérêt de cette nouvelle notation est d’être plus symétrique par rapport aux troiscouples (ji, mi) : (

j1 j2 j3m1 m2 m3

)(B.22)

est non nul si Δ(j1, j2, j3) et m1 + m2 + m3 = 0. Le coefficient 3J est invariant parpermutation circulaire des couples (ji, mi). La permutation de deux colonnes introduitun signe (−1)j1+j2+j3 tout comme le changement de signe de tous les mi.

Exercice 9.2 On applique la méthode du § 9.2 ⇒ j ∈ {1/2, 3/2}. Les vecteurs de j = 3/2sont : ⎧⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎪⎩

|3/2, 3/2〉 = |1, 1; 1/2, 1/2〉|3/2, 1/2〉 = 1√

3|1, 1; 1/2,−1/2〉 +

√23 |1, 0; 1/2, 1/2〉

|3/2,−1/2〉 =√

23 |1, 0; 1/2,−1/2〉 + 1√

3|1,−1; 1/2, 1/2〉

|3/2,−3/2〉 = |1,−1; 1/2,−1/2〉

(B.23)

et ceux de j = 1/2 sont :⎧⎪⎪⎪⎪⎨⎪⎪⎪⎪⎩|1/2, 1/2〉 =

√23 |1, 1; 1/2,−1/2〉 − 1√

3|1, 0; 1/2, 1/2〉

|1/2,−1/2〉 = 1√3|1, 0; 1/2,−1/2〉 −

√23 |1,−1; 1/2, 1/2〉

(B.24)

Les coefficients de Clebsch-Gordan sont donnés dans les tables.

Tableau B.1– Table des coefficients de Clebsch-Gordan Cj,m1,m1;1/2,m2permettant de

passer des états | j1; j2; j,m 〉 aux vecteurs | j1,m1 〉 ⊗ | j2,m2 〉, ou l’inverse.

m = 3/2 j3/2

m1, m2 1, 1/2 1

m = 1/2 j →3/2 1/2

m1, m2 1, −1/2 1/√

3√

2/3↓ 0, 1/2

√2/3 −1/

√3

m = −1/2 j →3/2 1/2

m1, m2 0, −1/2√

2/3 1/√

3↓ −1, 1/2 1/

√3 −

√2/3

m = −3/2 j3/2

m1, m2 −1, −1/2 1

Exercice 9.3

a) En utilisant la convention de sommation implicite des indices répétés : [H, J1i] =A[J1 j, J1i]J2 j = i�Aε jik J1k J2 j = i�Aεik j J1k J2 j = i�A( �J1 × �J2)i. Par symétrie [H, �J2] =i�A �J2 × �J1. Finalement [H, �J] = 0.Interprétation : �J1 est le générateur des rotations dans l’espace de Hilbert H1. Il ne faitpas tourner les états de H2 donc �J1 · �J2 n’est pas un scalaire du point de vue des rota-tions engendrées par �J1. En revanche �J est le générateur des rotations dans H1 ⊗ H2 :l’opérateur �J1 · �J2 est bien un opérateur scalaire du point de vue des rotations engendréespar �J.©

Dun

od.L

aph

otoc

opie

non

auto

risé

ees

tun

délit

.

319

Page 330: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

b) (Important) Puisque H est scalaire, il peut être diagonalisé simultanément avec �J 2 et Jz.Les états | j1, j2; j, m 〉 sont donc des états stationnaires. Pour obtenir le spectre de valeurspropres on écrit

H = A �J1 · �J2 =12A

( �J 2 − �J12 − �J2

2). (B.25)

Ce qui nous donne immédiatement H| j1, j2; j, m 〉 = E j1, j2; j| j1, j2; j, m 〉 avec E j1, j2; j =12�

2A[ j( j+1)− j1( j1+1)− j2( j2+1)]. Les valeurs propres sont indépendantes du nombrequantique m à cause de l’invariance par rotation. Les niveaux sont donc au moins dégéné-rés (2 j + 1) fois.

Exercice 9.4

a) Pendant la collision : les vecteurs propres de Hint sont les états |S , M 〉 pour ES =12�

2α[S (S + 1) − 32 ] (exercice 9.3).

b) |ψinitial 〉 = |+−〉 = 1√2

[|1, 0 〉+ |0, 0 〉

]donc |ψfinal 〉 = 1√

2

[e−iE1T /�|1, 0 〉+ e−iE0 T /�|0, 0 〉

]=

ei4 �αT [ cos(�αT /2) |+−〉 − i sin(�αT /2) | −+ 〉

].

c) Au cours de la collision le spin total S z est conservé : soit les spins restent dans l’état |+−〉,soit ils se retournent tous les deux. La probabilité de retournement est Proba[|+−〉 →|−+ 〉] = sin2(�αT /2).

Exercice 9.5

a) Avec la convention de sommation implicite sur les indices répétés, la trace du tenseur estnotée Tii. Nous écrivons Ti j =

13δi j Tll+

12

(Ti j−T ji

)+ 1

2

(Ti j+T ji− 1

3δi j Tll). Le tenseur est un

objet à 9 composantes. Dans la décomposition proposée, la trace encode un paramètre, letenseur antisymétrique 3 paramètres. Un tenseur symétrique est décrit par 6 paramètres−1pour la contrainte de trace nulle, soit 5 paramètres indépendants. L’identité est invariantesous les rotations, donc 1

3δi j Tll → 13δi j Tll. La transformée de la partie antisymétrique

Ai j =12

(Ti j − T ji

)est encore antisymétrique A′i j = Rii′R j j′Ai′ j′ = −R j j′Rii′A j′i′ = −A′ji.

Qed. De même on prouve que la transformée du tenseur symétrique de trace nulle S i j =12

(Ti j + T ji − 1

3δi j Tll)

est encore symétrique de trace nulle.

b) j ∈ {0, 1, 2}. Les dimensions des sous espaces E ( j) sont respectivement 1, 3 et 5, cequi correspond précisément aux nombres de composantes des trois parties du tenseur,13δi j Tll, Ai j et S i j. On pourrait en effet montrer que ces trois grandeurs engendrent cesreprésentations irréductibles.

CHAPITRE 10Exercice 10.1 En l’absence de barrière (λ = 0) l’équation de quantification est

K cotg KL = −√

k20 − K2. Puisque (n + 1

2 ) πL sont les zéros de cotg KL, lorsque k0 passe par

une valeur (n+ 12 ) πL (en croissant) les deux courbes K cotg KL et −

√k2

0 − K2 ont une nouvelleintersection.

Exercice 10.2 Dans la limite λ � k les résonances se trouvent au voisinage de k = kn =

nπ/L. Pour développer (10.11) il est commode d’écrire eikL + λk sin(kL) =

(i + λ

k

)[sin(kL) +

320

Page 331: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

cos(kL)i+λ/k

]. Nous posons δk = k − kn. Le développement du crochet donne [· · · ] = 1

λ+ikn

[kn + (1+

L(λ+ikn))δk+O(δk2)]. Nous obtenons bien la structure proposée pour kn = kn

(1− kn(λ+1/L)

L[(λ+1/L)2+k2n]

)et γn =

k2n/L

(λ+1/L)2+k2n. Le développement n’a de sens que si λ→ ∞ (i.e. si la résonance est proche

de k = kn). Finalement kn � kn(1 − 1

λL

)et γn � k2

n/(λ2L). La position de la résonance est

légèrement plus basse que celle du niveau du puits infini. Notons que plus l’énergie augmente,plus les résonances sont larges puisque la particule traverse plus facilement la barrière depotentiel.b) En � �2kn

mekn et Γn � 2�kn

meγn. Lorsque l’energie augmente, le coefficient de réflexion décrit

un cercle de rayon 1 dans le sens direct dans le plan complexe. La phase du coefficient deréflexion fait un tour de cercle d’une résonance à la suivante.

Exercice 10.3 On obtient ψ(x → −∞; E) � AG,ineikx+(rAG,in+t′AD,in)e−ikx. Le coefficientde l’onde sortante est donc AG,out = rAG,in+ t′AD,in. En procédant de la même façon pour x →+∞ on obtient AD,out = tAG,in+r′AD,in. I.e. nous avons précisément obtenu le système (10.17).

Exercice 10.4 Le courant obtenu à partir de (10.13) est JG(x → −∞) = �km (1 − |r|2) et

JG(x → +∞) = �km |t|

2. L’égalité des deux expressions (conservation de la probabilité) nousdonne |r|2 + |t|2 = 1. En procédant de même pour l’état droit on obtient |r′|2 + |t′|2 = 1. Cesdeux équations coïncident avec les termes diagonaux de S †S = 1 (exercice 5.2).

Exercice 10.5 On note "(E) = ∓ 1π

Im G±(r, r; E) la densité d’états par unité de volume. Àpartir de (10.66, 10.67, 10.68) on obtient "(1D)(E) = me

π�2k , "(2D)(E) = me

2π�2 (en utilisant (A.35))

et "(3D)(E) = mek2π2�2 , où E = �

2k2

2me.

Exercice 10.6a) La fonction de Green a été définie comme G(x, x′; z) = 〈 x | 1

z−H | x′ 〉, donc (z + d2

dx2 −V(x))G(x, x′; z) = 〈 x | x′ 〉 = δ(x − x′). En intégrant l’équation sur x de part et d’autre dex′ nous obtenons (pour un potentiel fini) dG(x,x′)

dx

∣∣∣x=x′+

− dG(x,x′)dx

∣∣∣x=x′− = +1.

b) W′ = f+ f ′′− − f ′′+ f− = f+(V(x) − z) f− − (V(x) − z) f+ f− = 0.

c) La fonction de Green décroît à l’infini (comme les fonctions d’onde). On peut donc écrireG(x, x′) = A f+(x) pour x > x′ etG(x, x′) = B f−(x) pour x < x′. En imposant la continuité[G(x, x′)

]x′+

x′− = 0 et la condition de raccordement obtenue plus haut,[ dG(x,x′)

dx

]x′+

x′− = 1, nousobtenons A = B = −1/W. Qed.

Exercice 10.7

a) On utilise le résultat de l’exercice 10.6. Considérons le cas des énergies E < 0 Dans lecas libre f±(x) = e∓

√−Ex d’où W = 2

√−E. On obtient G0(x, x′; E) = − 1

2√−E

e−√−E(x>−x<).

En remarquant que x> − x< = |x − x′| on obtient le résultat demandé.

b) La fonction de Green présente une coupure sur R+ (le spectre de H0). En utilisant√−E ∓ i0+ = ∓i

√E pour E ∈ R+, on obtient les fonctions de Green retardée/avancée

G±0 (x, x′; E) = G0(x, x′; E ± i0+) = ± 1

2i√

Ee±i

√E |x−x′|, équation (10.66).

c) La fonction de Green est discontinue de part et d’autre de la coupure. On obtientG+0 (x, x′; E) −G−

0 (x, x′; E) = − i√E

cos(√

E(x − x′)) = −2iπ 14π√

E

[ei√

E(x−x′) + e−i√

E(x−x′)].©D

unod

.La

phot

ocop

ieno

nau

tori

sée

estu

ndé

lit.

321

Page 332: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

Nous reconnaissons le produit de fonctions d’onde libres ψE,±(x) = 1√4π√

Ee±i

√Ex [le pré-

facteur coïncide précisément avec la constante de normalisation assurant 〈ψE,σ |ψE′ ,σ′ 〉 =δσ,σ′δ(E − E′)]. Finalement nous interprétons la discontinuité comme G+0 (x, x′; E) −G−

0 (x, x′; E) = −2iπ〈 x |δ(E − H0)| x′ 〉 = −2iπ∑σ=± ψE,σ(x)ψ∗E,σ(x′). À points coïncidants

la discontinuité correspond à la densité d’états par unité de longueur.

Exercice 10.8 Équation de Dyson (10.29) prend la forme G(r, r′) = G0(r, r′) +G0(r, 0)λG(0, r′). En posant r = 0 nous obtenons G(0, r′) = G0(0, r′)/[1 − λG0(0, 0)], d’où(10.74).

Exercice 10.9 La solution de l’équation de Lippmann-Schwinger (10.30) prend la formeψ+(r) = ψ(0)(r) +G+(r, 0)λψ(0)(0). En utilisant (10.74) on obtient

ψ+(r) = ψ(0)(r) +G+0 (r, 0)1

1/λ −G+0 (0, 0)ψ(0)(0) (B.26)

où ψ(0)(r) est une onde plane.Nous étudions la matrice T+ = V + VG+V . Toujours à l’aide de (10.74) on obtient

T+(r, r′; E)def= 〈 r |T+(E)| r′ 〉 = δ(r) 1

1/λ−G+0 (0,0)δ(r′). À l’ordre le plus bas T+(r, r′; E) �λ δ(r) δ(r′) = λ 〈 r |δ(r)| r′ 〉.L’approximation de Born d’ordre 1, éq. (10.42), nous donne ψ+(r)

(Born 1)� ψ(0)(r) +G+0 (r, 0)λψ(0)(0), ce qui est bien le premier terme d’un développement de (B.26) en puis-sances de λ.

Exercice 10.10 On calcule facilement la transformée de Fourier du potentiel V(�q) =4πV0

sin qr0−qr0 cos qr0

q3 où �q = �k ′ − �k. Son module s’exprime en terme de l’angle de diffusion

comme q = 2k sin(θ/2). On déduit l’amplitude à l’approximation de Born 1 : f (�k ′,�k) �− 2meV0

�21q3

[sin qr0 − qr0 cos qr0

]. Dans la limite de basse énergie (valable si V0 � �2

mer20) on

obtient f (�k ′,�k) � −meV0r20

3�2 r0 � r0. Ce qui donne une section efficace totale σ� r20.

Exercice 10.11

a) La solution doit satisfaire uk,m(r0) = 0 donc uk,m(r) = Nm(kr0) Jm(kr) − Jm(kr0) Nm(kr).

b) Le comportement asymptotique de cette solution est (annexe A)uk,m(r → ∞) ∼ 1√

r

[Nm(kr0) cos(kr − |m| π2 −

π4 ) − Jm(kr0) sin(kr − |m| π2 −

π4 )]. En posant

cos ηm = Nm(kr0)/D et sin ηm = Jm(kr0)/D avec D =√

Jm(kr0)2 + Nm(kr0)2, la solution sereécrit uk,m(r → ∞) ∼ 1√

rcos(kr − |m| π2 − ηm − π

4 ). Ce qui montre que tan ηm(E) = Jm(kr0)Nm(kr0) .

c) En utilisant les formules de l’annexe A, nous obtenons ηm�0(E → 0) � − π|m|(|m|!)2 (kr0/2)2|m|

et η0(E → 0) � π2 ln−1(kr0/2). Nous retrouvons le comportement (10.50) attendu généri-

quement.

RemarqueNous nous attendons à ce que ces résultats décrivent assez génériquement la dif-fusion de basse énergie sur un potentiel localisé : en effet, lorsque E → 0 l’onde

322

Page 333: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

ne sonde que des propriétés globales du potentiel, comme∫

dr V (r), mais n’est passensible aux détails particuliers comme la forme précise du potentiel.

Exercice 10.12 En 3D, la partie radiale de l’onde partielleΨk,�,m(�r) = R�(r)Ym� (θ,ϕ) obéit

à l’équation[− d2

dr2 +�(�+1)

r2 +V(r)− k2]rR�(r) = 0. Considérons le cas de l’onde s : on obtientR0(r) = 1

r sin k(r − r0). Nous avons vu dans le cours que les déphasages sont définis sur lecomportement asymptotique des ondes partielles comme R�(r → ∞) � 1

r sin(kr − π2 � + η�)

d’où η0(E) = −kr0. Dans la limite de basse énergie l’amplitude de diffusion est dominée par

la contribution de l’onde s, d’où asdef= − limk→0 f = − limk→0

1kη0 (vrai en général). Dans le

cas de la sphère dure nous obtenons une longueur de diffusion as = r0. La section efficacecorrespondante est donc limk→0 σ = 4πr2

0, i.e. 4 fois la section du diffuseur πr20 (ce facteur 4

est un effet de la diffraction).

Exercice 10.13

a) Dans la limite de basse énergie la diffusion est isotrope, donc f est indépendant des angles.La section efficace totale est donc simplement σ � 4π| f |2. En utilisant (10.54) nous dé-duisons | f |2 � 1

k Im[ f ] i.e. Im[1/ f ] � −k.

b) Le théorème optique donne une contrainte très forte sur l’amplitude de diffusion de basseénergie : en toute généralité 1/ f � −κ− ik où κ ∈ R. Le signe de κ est corrélé à l’existenceou non d’un état lié (cf. problème 10.3 corrigé ci-dessous). On peut relier κ au déphasage

en le paramétrant comme κdef= k cotg η0. On obtient bien f = 1

2ik (e2iη0 − 1). Nous pouvonsainsi analyser la dépendance en énergie du déphasage η0 � arctan(k/κ).

c) Lorsque k ∼ κ la section efficace est σ � 1/κ2. Il n’y aucun rapport entre κ et la portéedu potentiel r0. Dans la limite de basse énergie r0 n’est en général pas l’échelle pertinentecaractérisant σ (dans le problème 10.3 nous verrons qu’on peut avoir r0 = 0 mais σ finie).

La diffusion de basse énergie sur un état peut lié (κ → 0) a été discutée par E. Wigner en1933 puis H. Bethe et R. Peierls en 1935 (cf. [27], § 133).

10.1 Problème : Résistance de Landauer

1. ϕE,σ(x) = Neiσk(E)x où k(E) = 1�

√2mE. On déduit 〈ϕE,σ |ϕE′ ,σ′ 〉 = N22πδ(σk(E) −

σ′k(E′)). L’argument de δ(· · · ) doit s’annuler, donc σσ′ = +. D’autre part on utilise (2.61) :〈ϕE,σ |ϕE′ ,σ′ 〉 = N22πδσ,σ′

( dk(E)dE

)−1δ(E − E′). Nous reconnaissons la vitesse de groupe

v(E) = 1�

dEdk(E) . Finalement N = 1/

√hv(E) où h = 2π� (notons que N2 est la densité d’états

unidimensionnelle par unité de volume).2. a) Dans les régions asymptotiques JE,+(x → −∞) = 1

h (1−|r|2) et JE,+(x → +∞) = 1h |t|

2 :la normalisation compense exactement la vitesse apparaissant par dérivation de lafonction d’onde. La conservation du courant conduit donc à 1 − |r|2 = |t|2 (la den-sité de courant de l’état stationnaire est constante en dimension d = 1). De même1 − |r′|2 = |t′|2.

b) W′ = f1 f ′′2 − f ′′1 f2 = f1(V − E) f2 − (V − E) f1 f2 = 0.

c) On calcule le Wronskien dans les deux régions asymptotiques hv(E) W[ϕE,−;ϕE,+]= 2ikt′ = 2ikt d’où t = t′ (en 1D on trouve très généralement égalité des amplitudeset pas seulement des modules).

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Page 334: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

3. a) On obtient le courant I(V) = qe

h

∫ EF+qeV

EFdE′ |t(E′)|2, où nous avons utilisé t = t′. La

contribution nette au courant provient des états de l’intervalle E ∈ [EF, EF + qeV]dont le courant des états gauches n’est pas compensé par celui des états droits. EF estappelée l’énergie de Fermi (cf. chapitre 11 ou le cours de physique statistique).

b) Dans la limite V → 0 on obtient une relation courant-tension linéaire I(V →0) � q2

eh |t(EF)|2V , ce qui permet de définir la résistance associée à la barrière :

1/R = |t(EF )|2/RK où RK = h/q2e.

c) Si on prend en compte la dégénérescence de spin, le courant est doublé : 1/R =2|t(EF)|2/RK . L’application numérique donne RK /2 � 12.9 kΩ. La figure montre laconductance d’une constriction (inverse de la résistance) lorsque celle-ci est pro-gressivement ouverte. Celle-ci se comporte comme un guide d’onde en électro-magnétisme, avec des modes de transmission. En augmentant Vg on augmente lenombre de modes qui transmettent. La conductance est approximativement quantifiéeG = 1/R ≈ 2Nc/RK où Nc est le nombre de modes transmis. Le premier « plateau »correspond en effet à G ≈ 2q2

e/h (un mode dégénéré en spin transmis), le second àG ≈ 4q2

e/h (deux modes transmis), etc.

Pour en savoir plus

On pourra consulter l’ouvrage introductif [11].

10.2 Problème : Temps de Wigner et capacité quantique

1. Dans la région « asymptotique » (où V(x) = 0) la solution générale est de la forme ψk(x) =e−ikx + re+ikx, décrivant la superposition d’une onde incidence et d’une onde réfléchie. Lecourant associé est Jψk =

�m Im

[ψ∗k

dψk

dx

]= − �km +

�km |r|

2 = 0 à cause du mur réfléchissant àl’origine, d’où |r| = 1.2. a) Si x > L les deux paquets d’onde prennent la forme Φinc(x, t) =

∫ ∞0

dk

g(k − k0) e−ik(x−L)−iEk t/� et Φref(x, t) =∫ ∞

0dk g(k − k0) eik(x−L)+2iη(Ek )−iEk t/�. Si g(k) est

de largeur δk, les deux paquets d’onde sont de largeur au moins δx ∼ 1/δk (la largeurspatiale du paquet d’ondes croît avec le temps si on tient compte de la dispersion, cf.exercice 5.3).

b) L’intégrale sur k est dominée par le voisinage de k0 :

Φinc(x, t) = e−ik0(x−L)−iEk0 t/�∫

dκ g(κ) e−iκ[x−L+vk0 t]−i �κ2t

2m � e−ik0(x−L)−iEk0 t/�

ϕ(−x + L − vk0 t) où vk = �k/m est la vitesse de groupe et ϕ(x)def=

∫dk g(k) eikx. Dans

la dernière étape, nous avons négligé la dispersion, i.e. le terme �κ2t2m dans l’expo-

nentielle, responsable de l’étalement du paquet d’ondes (cf. exercice 5.3). Nousprocédons de la même manière pour le paquet d’ondes réfléchi : nous négligeons lestermes quadratiques en κ = k − k0 du développement de Ek mais aussi de η(Ek).

Φinc(x > L, t) � e−i[k0(x−L)+Ek0 t/�] ϕ(−x + L − vk0 t) (B.27)

Φref (x > L, t) � ei[k0(x−L)−Ek0 t/�+2η(Ek0 )] ϕ(x − L − vk0 [t − τ(Ek0 )]). (B.28)

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Page 335: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Les deux paquets d’onde sont centrés sur des positions respectives xinc(t) = L − vk0 tet xref (t) = L+ vk0[t− τ(Ek0)]. Cette dernière expression montre que le paquet d’ondesréfléchi est en retard d’un temps τ(Ek0 ). Le retard est dû au potentiel.

3. a) η = π donc τ = 0. Ce cas définit une situation de référence.

b) Si on écrit la solution libre, ψk(x) ∝ sin kx sur R+, sous la forme (10.78) on obtient2η(Ek) = 2kL + π d’où τ(Ek) = 2L/vk, qui est bien le temps nécessaire pour effectuerl’aller-retour dans [0, L].

c) On obtient facilement le profil de Breit-Wigner (lorentzienne) caractéristique d’unphénomène de résonance, τ(E) � 2π� �Γn/2π

(E−En )2+(�Γn/2)2 . L’intégrale du pic est donc∫dE τ(E) � 2π�. Si l’énergie de l’onde incidente coïncide avec la résonance, le

temps passé dans la région d’interaction est τ(En) � 2/Γn (inverse de la largeur derésonance).

4) a) L’intégrale du temps de Wigner compte les pics de résonance. Puisque chaque piccompte pour 2π�, nous pouvons interpréter le temps de Wigner comme la densitéd’états dans la région d’interaction ρ(E) ≈ 1

2π�τ(E) [cette relation est l’essence decelle discutée dans le cours, équation (10.24) ; les différences entre les deux formulesviennent de différentes conventions sur les phases des ondes ; dans le problème le

temps de Wigner mesure l’intégrale de la densité d’états locale∫ L

0dx ρ(x; E)].

b) Les pics observés expérimentalement dans la capacité mésoscopique correspondentaux pics de résonance du temps de Wigner τ(E). La largeur des pics est donc|qe|ΔVG ≈ AΓn. La valeur maximale du temps de Wigner au niveau d’un pic τ(En) �2/Γn ∼ A�/(|qe|ΔVG) donne donc le temps passé par l’électron dans la cavité mésosco-pique (de taille L � 1μm). Nous obtenons τ(En) ∼ A�/(|qe|ΔVG) � 60×10−12s= 60ps,ce qui est relativement long comparativement au temps typique passé dans la cavitéL/vF � 3 ps (pour vF � 0.3 106 m/s).Cette mesure requiert une très basse température pour que les pics ne soient pasbrouillés par moyennage thermique, i.e. il faut que En+1 − En � kBT . Sur la figurenous voyons en effet que En+1 − En ≈ 30 μeV alors que T = 30 mK correspondent à3 μeV.

Pour en savoir plus

La relation entre matrice S et capacité mésoscopique a été discutée dans plusieurs travauxde Markus Büttiker : M. Büttiker, H. Thomas & A. Prêtre, Mesoscopic capacitors, Phys.Lett. A 180, 364 (1993).

10.3 Problème : Interaction ponctuelle en d � 2. Pseudo-potentiel (3D)

L’action du Dirac modifié est définie par δ(�r)def= δ(�r) ∂

∂r r.

1) Une fonction régulière peut être développée à l’origine comme ψreg(�r) = ψreg(�0) +

�r · �∇ψreg(�0) + · · · donc δ(�r)ψreg(�r) = δ(�r) (ψreg(�r) + r∂ψreg

∂r ) = ψreg(�0)δ(�r).2) ψ(�r) = ψreg(�r) + A

r . On a δ(�r) Ar = δ(�r) ∂

∂r (r Ar ) = 0. La distribution δ élimine la partie singu-

lière.©D

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Page 336: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

3) On peut écrire l’état stationnaire sous la forme : ψ�k(�r) = ψreg(�r) + fr où ψreg(�r) =

ei�k·�r +fr (eikr − 1). On vérifie sans peine que −Δψreg = k2ψ. En utilisant que −Δ 1

r = 4πδ(�r)

on a finalement −Δψ = k2ψ + 4π f δ(�r). D’autre part δ(�r)ψ = ψreg(�0)δ(�r) = (1 + ik f )δ(�r). Eninjectant ces deux dernières relations dans l’équation de Schrödinger, nous obtenons

f = − λ

4π + ikλ(B.29)

La limite de basse énergie nous donne la longueur de diffusion fk→0 = − λ4π = −as (la longueur

de diffusion est en effet plus grande que la portée du potentiel (ici nulle) !

Remarque : Portée générale de ces résultatsIl est intéressant de remarquer que ces résultats coïncident précisément avec ceux del’exercice 10.13 dans lequel l’amplitude de basse énergie a été obtenue à l’aide duthéorème optique, sans aucune hypothèse sur le potentiel. Cette remarque souligneque les propriétés de basse énergie ne sont pas sensibles aux détails du potentiel.Autrement dit « vu de loin, tout potentiel ressemble à un potentiel δ ».

4) Procédure de renormalisation. Nous appliquons la procédure de renormalisation surl’état stationnaire obtenu dans l’exercice 10.9. En utilisant (10.68), G+0 (�r, 0) = − 1

4πr eikr,l’équation (B.26) nous donne immédiatement :

f =− 14π

11/λ −G+0 (0, 0)

regularisation−→ −−1

4π1

1/λ −G+0 (r0, 0)renormalisation−→ −−1

4π1

1/λR + ik/(4π).

(B.30)Nous avons précisément retrouvé le résultat donné par le pseudo-potentiel. Le poids renor-malisé coïncide avec le poids du pseudo-potentiel, (B.29).

5) Cas bidimensionnel. Nous suivons la même logique : 1λ−G+0 (r0, 0) = 1

λ− 1

2π ln(kr0)+ i4 →

1λR− 1

2π ln(ka) + i4 . Nous obtenons l’amplitude de diffusion

f =1

2i√

2iπk

1

1/λR − 12π ln(ka) + i

4

. (B.31)

L’amplitude de diffusion diverge à basse énergie, selon le comportement (10.50). Cecicontraste avec la situation 3D où l’amplitude de diffusion tend vers une limite finie. L’ef-fet de la diffusion par un potentiel localisé est renforcé en allant vers les basses dimensions.

6) État lié en dimensions d = 1, 2, 3. Nous partons du résultat (B.26) de l’exercice 10.9.Nous voyons que l’amplitude de diffusion décrivant la diffusion sur un potentiel δ présentela structure f ∝ 1/

[ 1λ− G+0 (r0, 0)

]. Pour déterminer l’existence ou non d’état lié (i.e. une

propriété à E < 0) nous utilisons les propriétés d’analyticité de la solution de l’équation deSchrödinger (i.e. l’amplitude de diffusion f ). Celle-ci est une fonction analytique de l’éner-gie avec une coupure sur l’axe réel positif. Dans le problème nous avons paramétré l’énergiecomme E = +k2 + i0+. Le prolongement analytique de l’amplitude de diffusion f (E) pour

E ∈ C − R+ est donc réalisé en procédant à la substitution ik → −√−E . L’existence d’un

pôle de f (E) pour E ∈ R− signale un état lié.

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Page 337: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

i) Cas d = 1. Dans ce cas nous pouvons simplement utiliser (10.66) : nous obtenons f (k2) =λ/[2ik−λ]. Le prolongement analytique nous donne f (E) = −λ/[λ+2

√−E] pour E ∈ C−R+.

Nous retrouvons que le potentiel δ en dimension d = 1 possède un état lié d’énergie E0 =

− 14λ

2 si λ < 0 (potentiel attractif).

ii) Cas d = 2. Nous procédons au prolongement analytique de l’expression obtenue plushaut : nous obtenons f (E) ∝ 1/

[1/λR− 1

2π ln(√−Ea)

]pour E ∈ C−R+. Nous constatons qu’il

existe un état lié d’énergie E0 = − 1a2 exp 4π

λR∀ λR (il existe toujours un état lié en d = 2, que

l’impureté soit attractive, λ < 0, ou répulsive, λ > 0). Puisque le sens physique de l’échellea et du poids renormalisé n’est pas très clair, nous exprimons l’amplitude de diffusion en

fonction du paramètre physique E0 : f (k2) =√

2iπk

1ln(k2/|E0 |)+iπ avec E0 = − 1

a2 e4π/λR .

iii) Cas d = 3. En suivant la même logique que dans le cas bidimensionnel nous obtenonsf (E) = −λR/

[4π − λR

√−E

]pour E ∈ C − R+. Nous constatons qu’il existe un état lié

d’énergie E0 = −( 2πλR

)2 pour λR > 0. Il peut sembler paradoxal que l’état lié apparaisse dansle cas répulsif λR > 0 (et non dans le cas attractif λR < 0). Cela nous rappelle uniquement quele sens physique des paramètres microscopiques introduits dans l’hamiltonien n’est pas clair,c’est pourquoi il est plus judicieux d’exprimer l’amplitude de diffusion en terme de l’énergie|E0| (qui correspond à l’énergie de l’état lié pour λR > 0) f (k2) = − 1√

|E0 |+i kavec |E0| =

( 2πλR

)2.

Remarque sur le cas 3DLe résultat obtenu en 3D est surprenant (un état lié si l’ impureté est répulsive, λR > 0,et pas d’état lié si elle est attractive, λR < 0). Puisque nous avons remarqué que le sensphysique des paramètres microscopiques ne va pas de soi, nous pourrions imaginerdéfinir la nature « attractive/répulsive » par l’existence d’un état lié, ce qui sembleraitlever le « paradoxe ». Toutefois la nature « attractive/répulsive » du diffuseur en 3Dest définie conventionnellement par comparaison du signe de la longueur de diffu-

sion asdef= − limk→0 f avec le résultat obtenu pour une sphère dure (potentiel répulsif).

Nous avons obtenu dans l’exerice 10.12 que a(sphere dure)s > 0. Ce qui confirme l’inter-

prétation « paradoxale » que l’état lié existe dans le cas où l’impureté est répulsive,λR > 0, puisque as = λR/(4π).

Pour en savoir plus

Sur le Pseudo-potentiel, cf. § 10.5 de : K. Huang, Statistical mechanics, John Wiley &Sons (1963).

La procédure de renormalisation a été discutée dans la référence : R. Jackiw, δ-functionpotentials in two- and three-dimensional quantum mechanics, in M. A. B. Bég memorialvolume, edited by A. Ali & P. Hoodbhoy, p. 1, World Scientific, Singapore (1991).

Pseudo-potentiel en 2D : M. Olshanii & L. Pricoupenko, Rigorous Approach to the Pro-blem of Ultraviolet Divergencies in Dilute Bose Gases, Phys. Rev. Lett. 88(1), 010402(2001).

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Page 338: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

CHAPITRE 11Exercice 11.1 On construit les états en faisant des dessins analogues à ceux de la fi-gure 11.2. On trouve dimHdisc = 43 = 64, dimHbosons = 20 et dimHfermions = 4.

Exercice 11.2 Hypothèse (fausse) pre-1930 : Un noyau de numéro A avec Z protonscontient (A−Z) paires proton-électron et Z protons. Le nombre de fermions serait 2(A−Z)+Zet aurait donc la parité de Z. Selon cette hypothèse 13

6C serait un boson et 147N un fermion.

Nous savons aujourd’hui que le noyau est constitué de (A − Z) neutrons et Z protons, i.e.A fermions. C’est donc la parité de A qui détermine la nature bosonique/fermionique. Si Aest impair (comme 13

6C) le noyau est un fermion. Si A est pair (comme 147N) le noyau est un

boson.

11.1 Problème : Diffusion de deux particules identiques par une lameséparatrice1. L’orthonormalisation des vecteurs initiaux est 〈φi |φ j 〉 = δi, j où i, j ∈ {1, 2}. Cette pro-priété est préservée par l’évolution temporelle : 〈φfinal

i |φfinalj 〉 = 〈φi |U†U|φ j 〉 = δi, j, d’où

S †S = 1 (S est la matrice qui représente l’opérateur U dans la base considérée).

2. a) |ΨB/Fin 〉 = 1√

2

[|φ1 〉 ⊗ |φ2 〉 ± |φ2 〉 ⊗ |φ1 〉

](+ pour les bosons et − pour les fermions).

b) En appliquant l’opérateur d’évolution nous obtenons

|ΨB/Ffin 〉 =

1√

2

[(1 ± 1)

(rt′ |φ3 〉 ⊗ |φ3 〉 + r′t |φ4 〉 ⊗ |φ4 〉

)+ (rr′ ± tt′)

(|φ3 〉 ⊗ |φ4 〉 ± |φ4 〉 ⊗ |φ3 〉

)]c) Cas fermionique. Le cas fermionique est facile à analyser. Nous obtenons |ΨF

fin 〉 =det S√

2

[|φ3 〉 ⊗ |φ4 〉 − |φ4 〉 ⊗ |φ3 〉

](rappelons que | det S | = 1). Par conséquent la coïn-

cidence est πΨFfin= 1 ∀ S , i.e. quelle que soit la nature de la lame séparatrice, ce que

nous interprétons facilement : les deux particules doivent se trouver à la sortie dansles deux états |φ3 〉 et |φ4 〉. L’antisymétrisation ne nous laisse pas d’autre possibilitépour construire le vecteur.

d) Cas bosonique. Dans ce cas |ΨBfin 〉 =

√2[rt′ |φ3 〉⊗|φ3 〉+r′t |φ4 〉⊗|φ4 〉

]+ rr′+tt′√

2

[|φ3 〉⊗

|φ4 〉+ |φ4 〉⊗|φ3 〉]. On peut vérifier que le vecteur est normalisé en utilisant l’unitarité

de S . Il est plus simple et plus suggestif d’introduire la paramétrisation (5.31) :

|ΨBfin 〉 = e2iΘ

{i sin 2θ√

2

[ei(ϕ−χ)|φ3 〉 ⊗ |φ3 〉 + ei(χ−ϕ) |φ4 〉 ⊗ |φ4 〉

]+ cos 2θ

|φ3 〉 ⊗ |φ4 〉 + |φ4 〉 ⊗ |φ3 〉√2

}où sin2 θ = T est la probabilité de transmission à travers la lame. Le résultat est pluscompliqué dans le cas bosonique que dans le cas fermionique car nous avons plusde liberté pour fabriquer un état symétrique (trois possibilités au lieu d’une, cf. fi-gure 11.2). La coïncidence est donc πΨB

fin= cos2 2θ = (R − T )2 où T = |t|2 = 1 − R.

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Page 339: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Elle est donc maximisée, πΨBfin= 1, pour une lame totalement transparente/

réfléchissante T = 1 ou 0. Dans ce cas les bosons restent de part et d’autre de lalame. L’état est toutefois symétrisé. Lorsque la transmission et la réflexion sont équi-probables, R = T = 1/2, la coïncidence est minimisée πΨB

fin= 0. La nature bosonique

des deux particules tend donc à les faire se regrouper spatialement.

3) Cas R = T = 1/2.

a) Si les deux particules sont classiques, nous pouvons distinguer différentes histoires :initialement l’état est Ψinitial = (φ1 : part. 1 & φ2 : part. 2) et l’état final est (1)Ψfinal = (φ3 : part. 1 & φ3 : part. 2) ; (2) Ψfinal = (φ4 : part. 1 & φ4 : part. 2) ; (3)Ψfinal = (φ3 : part. 1 & φ4 : part. 2) ; (4) Ψfinal = (φ4 : part. 1 & φ3 : part. 2). PuisqueT = 1/2 les quatre histoires sont équiprobables. Seules les histoires (3) & (4) donnent lieuà une coïncidence ; nous déduisons πclass = 1/2.

b) Dans le problème nous n’avons pas pris en compte, qu’en pratique, les deux particulessont décrites par des paquets d’onde ayant une certaine largeur temporelle τc (due à l’in-certitude sur l’énergie des deux photons). On ne peut observer l’interférence à deux pho-tons que si l’intervalle de temps séparant l’arrivée des deux photons est inférieur à τc.En déplaçant la lame on fait varier les chemins optiques. Lorsque les deux chemins op-tiques diffèrent trop, on obtient le résultat classique (partie plate de la courbe). Lorsqueles deux photons arrivent « en même temps » sur la lame, on est dans la situation décritedans le problème et la probabilité d’observer une coïncidence s’annule (creux). La largeurdu creux nous permet d’estimer le temps de cohérence τc � 30 μm/c � 0.1 ps. Le fait quele nombre de coïncidences observées ne tombe pas exactement à zéro peut être attribué àun écart à la condition R = T (Hong et al donnent R/T = 0.95).

Pour des fermions polarisés en spin on aurait un pic (symétrique du creux) atteignant unevaleur double de celle au niveau du plateau πΨF

fin= 2πclass.

Pour en savoir plus

L’expérience est relatée dans l’article : C. K. Hong, Z. Y. Ou & L. Mandel, « Measure-ment of subpicosecond time intervals between two photons by interference », Phys. Rev.Lett. 59, 2044 (1987).

CHAPITRE 12Exercice 12.1 Le minimum du potentiel a pour position r∗ = �(� + 1)a0 où a0 =

�2

μe2 .

Le développement au voisinage du minimum est V�(r) � R[− 1

�(�+1) +1

[�(�+1)]3a20(r − r∗)2 −

2[�(�+1)]4 a3

0(r − r∗)3] où R = μe4

2�2 = e2/(2a0). Nous écrivons le terme quadratique sous la forme12μω

2∗(r − r∗)2 en posant ω∗ = 2

[�(�+1)]3/2 R/�. En utilisant le résultat du cours sur l’oscillateur

harmonique, nous pouvons écrire les niveaux d’énergie comme Ep,� � − R�(�+1) + �ω∗(p − 1

2 )avec p ∈ N∗ (notons que nous avons choisi d’indicer les niveaux par un entier strictementpositif par commodité pour la suite, d’où le p − 1/2).©D

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Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

Ce résultat n’est valable que si nous pouvons négliger l’anharmoniticité du potentiel, no-tamment Vcub(r) = − 2R

[�(�+1)]4a30(r − r∗)3. L’approximation harmonique est valable si le terme

cubique est négligeable devant le terme quadratique Vcub(δr) � p�ω∗ où δr ∼ √p√�/μω∗.

Nous obtenons la condition � � p � 1. Le résultat obtenu plus haut n’a de sens que dans

cette limite : Ep,� � μe4

2�2

[− 1

�2 +2p�3

], qui est le développement pour � � p du résultat exact

Ep,� = − μe4

2�21

(p+�)2 .

Exercice 12.2 À grande distance, le potentiel de l’atome ionisé une fois est dû à la charge+Z du noyau et −(Z − 1) des autres électrons : Veff(r) � e2/r. L’échelle caractérisant leconfinement du dernier électron est donc encore le rayon de Bohr aB. Les atomes ont tousune taille, définie comme l’extension de la densité de probabilité électronique, de l’ordre de1 Å, ∀ Z.

Exercice 12.3 L’hamiltonien de l’ion hydrogénoïde est obtenu à partir de l’hamiltoniende l’atome d’hydrogène en procédant à la substitution e2 → Ze2. Nous déduisons un rayonde Bohr Z fois plus petit aZ

0 = a0/Z et des énergies Z2 fois plus grandes EZn = − Z2

n2 R.Dans son état fondamental l’électron a une énergie EZ

1 = −Z2R. Cette énergie devient del’ordre de l’énergie de masse, EZ

1 ∼12 mec2 pour Z ∼ 1/α � 137.

CHAPITRE 13

Exercice 13.1Solutions perturbatives. On cherche la solution sous la forme d’un développement en puis-sances du petit paramètre : ε (x0+ x1+ · · · )3+(x0+ x1+ · · · )2−1 = 0. Les termes d’ordre ε0 del’équation sont x2

0−1 = 0 i.e. x0 = ±1. L’ordre ε1 nous donne ε x30+2x0x1 = 0 i.e. x1 = − 1

2 ε x20.

L’ordre ε2 conduit à 3ε x20x1 + x2

1 + 2x0x2 = 0 i.e. x2 = − 12x0

(3ε x20x1 + x2

1). Etc. Finalement

les premiers termes du développement de la solution sont xε = ±1 − 12 ε ±

58 ε

2 + O(ε3).

Solution non perturbative. Remarquons que la méthode ne nous permet ici de trouver quedeux des trois solutions. La raison se comprend aisément : la troisième solution n’admet pasun développement de Taylor en puissance du petit paramètre, mais diverge pour ε → 0 (elleest « non perturbative »). Parce que le problème est simple nous pouvons identifier la naturede la divergence de la solution non perturbative, xε � −1/ε, et adapter la méthode en cher-chant la solution sous la forme d’un développement xε = − 1

ε+ x0 + x1 + · · · . En identifiant

les équations à chaque ordre dans le petit paramètre, nous obtenons finalement la troisièmesolution xε = −1/ε + ε + O(ε3).

Exercice 13.2 L’application de la formule (13.40) conduit à tWKB ∼exp−mω

∫ xE

−xEdx

√x2

E − x2 où E = − 12 mω2 x2

E conduit à tWKB ∼ exp− π|E|�ω

.

RemarqueIl est intéressant de noter que la nature quadratique du potentiel permet de résoudreexactement l’équation de Schrödinger pour obtenir la probabilité de transmission ∀E .La solution a été obtenue il y a longtemps par E. C. Kemble, Physical Review 48, 549(1935) : T = |t|2 = 1

1+exp− 2πE�ω

. Dans la limite −E � �ω cette expression coïncide avec le

résultat WKB.

330

Page 341: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

13.1 Problème : Théorème de projection et facteurs de Landé atomiques

A. 1. Les calculs de commutateurs ne présentent pas de difficulté. Par exemple [Jz, V±] =[Jz, Vx] ± i[Jz, Vy] = i�(Vy ± i(−Vx)) = �(iVy ± Vx) = ±�V±.2. [Jz, Vz] = 0 ⇒ (m − m′)〈 j, m |Vz| j′, m′ 〉 = 0. Donc 〈 j, m |Vz| j′, m′ 〉 � 0 ssi m = m′. Demême on obtient 〈 j, m |V±| j′, m′ 〉 � 0 ssi m = m′ ± 1.3. a) [J+, V+] = 0 ⇒ 〈 j, m + 2 |J+V+| j, m 〉 = 〈 j, m + 2 |V+J+| j, m 〉. Introduisons une re-

lation de fermeture. Nous déduisons

〈 j, m + 2 |V+| j, m + 1 〉〈 j, m + 2 |J+| j, m + 1 〉

=〈 j, m + 1 |V+| j, m 〉〈 j, m + 1 |J+| j, m 〉

(B.32)

En itérant nous voyons que 〈 j, m + 1 |V+| j, m 〉 = α+( j)〈 j, m + 1 |J+| j, m 〉 et puisquetous les autres éléments de matrice sont nuls 〈 j, m |V+| j, m′ 〉 = α+( j)〈 j, m |J+| j, m′ 〉∀m, m′. Les deux opérateurs V+ et J+ sont donc proportionnels dans E j. En procédantde manière analogue à partir de [J−, V−] = 0 on démontre la seconde relation.

b) Toujours suivant la même logique, en partant alternativement de [J−, V+] =−2�Vz puis [J+, V−] = +2�Vz on montre successivement que 〈 j, m |Vz| j, m′ 〉 =α+( j)〈 j, m |Jz| j, m′ 〉 puis 〈 j, m |Vz| j, m′ 〉 = α−( j)〈 j, m |Jz| j, m′ 〉. On déduit α+( j) =α−( j) ≡ α( j).

c) Nous venons de voir que, dans E j, les trois composantes de �V sont proportionnellesaux trois composantes de �J : �V (E j) = α( j) �J(E j). Le produit scalaire avec �J nous donne�J(E j) · �V (E j) = α( j)�2 j( j + 1)1(E j). En introduisant la notation proposée 〈 �J · �V〉 j =

α( j)〈 �J 2〉 j. Qed.B. 1.

a) L’invariance par rotation impose [H0, �L] = [H0, �S ] = 0

b) Si Z est pair S ∈ {0, 1, · · · , Z/2}. Si Z est impair S ∈ {1/2, 3/2, · · · , Z/2}.2. Invariance par rotation.3. a) On utilise �L · �J = �L 2 + �L · �S = 1

2

( �J 2 + �L 2 − �S 2), d’où �L(EJ ) =J(J+1)+L(L+1)−S (S+1)

2J(J+1)�J(EJ ).

De même �S (EJ ) =J(J+1)−L(L+1)+S (S+1)

2J(J+1)�J(EJ ).

b) La méthode des perturbations nous dit de diagonaliser WZ dans le sous espace propreEJ. Puisque dans EJ, les trois moments cinétiques sont proportionnels, WZ est éga-lement proportionnel à Jz. Les vecteurs |nLS ; JMJ 〉 sont donc vecteurs propres deH(EJ )

tot . On obtient finalement

gLS J =32+

S (S + 1) − L(L + 1)2J(J + 1)

(B.33)

Les pentes des niveaux Zeeman sont donc des nombres rationnels fonctions des troisnombres quantiques L, S et J. L’analyse du spectre Zeeman permet donc de remonterà ces nombres quantiques.

c) Pour vérifier notre résultat nous étudions les cas limites. Si S = 0 alors J = L etgL0L = 1 (ce que nous obtenons en effet en écrivant WZ = ωBLz). De même, si L = 0alors J = S et g0S S = 2 (ce que nous déduisons de WZ = 2ωBS z).

d) Si L = 2 et S = 1 ⇒ J ∈ {1, 2, 3}. On obtient les facteurs de Landé g211 = 1/2,g212 = 7/6 et g213 = 4/3.

©D

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.La

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331

Page 342: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

13.2 Problème : Mécanisme d’échange – Atome d’hélium

1) Hamiltonien H0. Les deux électrons occupent deux orbitales φa et φb. À partir de ces deuxétats nous construisons des états antisymétriques. À ce stade il est commode de considérerdes états factorisés orbite⊗spin. Dans ce cas chaque partie doit être état propre de l’opérateurd’échange. Cela impose que la partie spin soit un état propre de �S 2, le spin total (rappelonsque l’état singulet de spin, S = 0, est antisymétrique alors que l’état triplet, S = 1, estsymétrique).

• Cas a = b. Nous pouvons construire un état propre de H0 d’énergie 2Ea. La partie or-bitale |φa 〉 ⊗ |φa 〉 étant symétrique, l’état complet est nécessairement singulet de spin|φaφa; 0, 0 〉 = |φa 〉 ⊗ |φa 〉 ⊗ |0, 0 〉spin.

• Cas a � b. Nous pouvons construire quatre états propres de H0 d’énergie Ea + Eb.

Nous avons le choix entre (1) symétriser la partie orbitale (état singulet) :

|φaφb; 0, 0 〉 = 1√

2

(|φa 〉 ⊗ |φb 〉 + |φb 〉 ⊗ |φa 〉

)⊗ |0, 0 〉spin. (B.34)

(2) Antisymétriser la partie orbitale (état triplet) :

|φaφb; 1, M 〉 = 1√

2

(|φa 〉 ⊗ |φb 〉 − |φb 〉 ⊗ |φa 〉

)⊗ |1, M 〉spin (B.35)

Ces quatre états sont antisymétriques sous l’échange (postulat de symétrisation).Dans la situation a � b nous aurions aussi bien pu construire des états globalement antisy-

métriques mais intriqués spin-orbite. L’intérêt des états factorisés est qu’ils sont états propresdu spin total (conservé) : cette propriété les rendra utiles pour le traitement perturbatif.Valeurs propres de l’énergie. Les valeurs propres de H0 sont E(0)

n,m = En+Em avec n, m ∈ N∗,où En = −Z2R/n2 (R est le Rydberg). L’état fondamental a une énergie 2E1 = −8R ; c’est unétat singulet de spin, non dégénéré. Le premier état éxcité a une énergie E2+E1 = −5R ; nouspouvons construire 4 états 1s2s et 4 × 3 états 1s2p. La dégénérescence totale est 16.

2) L’état fondamental |1s2; 0, 0 〉 est non dégénéré. L’interaction apporte une correctiond’ordre 1 en W donnée par l’intégrale coulombienne 〈1s2 |W |1s2 〉 = C1s,1s. Le niveau d’éner-gie est E(1)

1s2 = −8R +C1s,1s à l’ordre 1 en W. Nous pouvons estimer l’intégrale de Coulomb :C1s,1s ∼ R puisque les deux électrons sont typiquement à distance a0/Z = a0/2 du noyau(donc à distance ∼ a0 l’un de l’autre). En utilisant �c � 197 eV.nm nous voyons que l’énergiede la première ionisation est EHe+ − EHe = hc/λ � 24.6 eV (figure 12.5 page 234). On ajoutel’énergie EHe++ − EHe+ = Z2R � 54.4 eV pour ioniser complètement l’atome ; l’énergie duniveau (donnée par l’expérience) est donc E1s2 � −79 eV � −5.8 R. Notre approche perturba-tive ne peut pas donner mieux que le bon ordre de grandeur (∼ −8R+ R = −7R) : la méthodeest peu précise puisque l’échelle caractérisant la perturbation W ∼ R est du même ordre queles écarts entre niveaux de H0 (la perturbation n’est pas « petite »).

3) Nous considérons les deux orbitales 1s2s. Puisque le spin est conservé on a〈1s2s; S , M |H|1s2s; S ′, M′ 〉 ∝ δS ,S ′δM,M′ . La perturbation est donc diagonale dans cettebase du sous espace propre E (1s2s). On trouve

〈1s2s; 0, 0 |H|1s2s; 0, 0 〉 = C1s,2s + J1s,2s (B.36)

〈1s2s; 1, M |H|1s2s; 1, M 〉 = C1s,2s − J1s,2s (B.37)

332

Page 343: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Le produit des orbitales 1s et 2s est essentiellement positif φ1s(�r)φ2s(�r) ∝ (1 − r/2)e−3r/2

(chapitre 12) ; on attend donc J > 0. On peut juste estimer que J ∼ R qui est assez loindes 0.796 eV. L’état triplet (ortho-hélium) a donc une énergie E(1)

1s2s,S=1 � −5R + C − J

plus basse que l’état singulet (para-hélium) E(1)1s2s,S=0 � −5R + C + J. L’expérience donne

E1s2s,S=1 − E1s2 � 19.820 eV et E1s2s,S=0 − E1s2 � 20.616 eV.Ceci est une conséquence particulière de la règle (empirique) de Hund (cf. [27], chap. x,§67) : étant donné un ensemble d’orbitales atomiques occupées par des électrons, la configu-ration de plus basse énergie est celle de plus grand S .Donnons un argument physique : lorsqu’ils sont dans l’état singulet, symétrisé spatialement,les deux électrons sont typiquement plus proches l’un de l’autre que lorsqu’ils se trouventdans l’état triplet, anti-symétrisé spatialement. L’énergie coulombienne d’interaction est doncplus élevée dans le premier cas.

4) Les états singulet et triplet diagonalisent l’hamiltonien effectif Heff . Le spectre de ce derniercoïncide avec le spectre des niveaux 1s2s à condition de choisir B = C − J/2 et A = −2J/�2.Le signe de A indique que l’interaction rend l’alignement des spins (état triplet) favorableénergétiquement. C’est une interaction de nature ferromagnétique.

Comparaison avec l’interaction dipolaire magnétique. L’interaction dipolaire magnétiqueest HDM =

μ0

4π r3

[�M1 · �M2−3

( �M1 ·�ur)( �M2 ·�ur

)]où r et �ur sont respectivement la distance et la

direction du vecteur séparant les deux moments �M1,2 = γe�S 1,2 (on rappelle que γe =geqe

2meet

μ0ε0c2 = 1). En écrivant r ∼ a0 = �2/(mee2) on obtient HDM ∼ μ0γ

2e�

2

4πa30∼ α2R où α = e2/(�c).

Finalement l’interaction entre moments magnétiques HDM ∼ α2R � 0.7 meV est beaucoupplus petite que l’interaction effective 2J � 0.796 eV (Coulomb & Pauli) d’un facteur 1000 !

13.3 Problème : Mécanisme de super-échange

1. D’après l’introduction, l’hamiltonien est indépendant du spin, donc [H, �S ] = 0 où �S estle spin total des deux électrons. Nous chercherons des états stationnaires états propres de �S 2

et S z, i.e. tels que les parties orbite et spin ne soient pas intriquées |Ψ 〉 = |ψ 〉orb ⊗ |χ 〉spin.L’état |Ψ 〉 doit être antisymétrique sous l’échange des électrons, ce qui nous laisse deuxpossibilités : |ψ 〉orb symétrique et |χ 〉spin antisymétrique, ou l’inverse. Rappelons que lesétats propres du spin total, |S , M 〉, sont des états symétriques de l’opérateur d’échange (cf.cours). Finalement :

a) États singulet. La partie orbitale doit être symétrique sous l’échange, ce qui laisse troispossibilités :

|Ψa 〉 = |φa 〉 ⊗ |φa 〉 ⊗ |0, 0 〉spin (B.38)

|Ψb 〉 = |φb 〉 ⊗ |φb 〉 ⊗ |0, 0 〉spin (B.39)

|ΨD 〉 =1√

2(|φa 〉 ⊗ |φb 〉 + |φb 〉 ⊗ |φa 〉) ⊗ |0, 0 〉spin (B.40)

|Ψa 〉 (resp. |Ψb 〉) décrit un état où les deux électrons sont localisés sur le site a (resp. b).|ΨD 〉 décrit un état où les électrons sont délocalisés sur les deux sites.©

Dun

od.L

aph

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auto

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tun

délit

.

333

Page 344: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

b) États triplet. La partie orbitale doit être antisymétrique, ce qui ne laisse qu’une possibi-lité :

|ΨT , M 〉 = 1√

2(|φa 〉 ⊗ |φb 〉 − |φb 〉 ⊗ |φa 〉) ⊗ |1, M 〉spin (B.41)

Finalement nous constatons que l’espace de Hilbert des deux électrons est de dimension six.

2. a) L’hamiltonien ne dépend pas du spin. Les états triplet et singulet ne sont donc pascouplés. Les trois états triplet sont donc dégénérés (ET = 0) et ne jouent aucun rôledans la dynamique des électrons. Nous les oublierons dans un premier temps.

b) On vérifie facilement que Hcin n’a pas d’éléments diagonaux. Les seuls états cou-plés par Hcin sont ceux différant par le déplacement d’un électron, i.e. d’unepart |Ψa 〉 et |ΨD 〉 et d’autre part |Ψb 〉 et |ΨD 〉. Par exemple 〈Ψa |Hcin|ΨD 〉 =〈φa | ⊗ 〈φa |

∑i h(i) 1√

2

[|φa 〉 ⊗ |φb 〉 + |φb 〉 ⊗ |φa 〉

]= 1√

2

[〈φa |φa 〉〈φa |h(2)|φb 〉 +

〈φa |h(1)|φb 〉〈φa |φa 〉]= −

√2 t. De même on obtient 〈Ψb |Hcin|ΨD 〉 = −

√2 t.

c) Le terme d’interaction coulombienne entre électrons ne possède donc que deux élé-ments de matrice non nul 〈Ψa |Hint|Ψa 〉 = 〈Ψb |Hint|Ψb 〉 = U. L’hamiltonien completprend finalement la forme

H = Hcin + Hint =

⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝U 0 −

√2 t

0 U −√

2 t−√

2 t −√

2 t 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ (B.42)

dans la base {|Ψa 〉, |Ψb 〉, |ΨD 〉}.3. a) Analyse perturbative. Le terme d’interaction coulombienne est d’ordre U ∼ qq eV,

ce qu’on supposera plus grand que le recouvrement des orbitales, t. Les vecteurs{|Ψa 〉, |Ψb 〉, |ΨD 〉} sont trois états propres de Hint pour les valeurs propres respec-tives E(0)

a,b = U et E(0)D = 0. La perturbation n’a pas de terme diagonaux dans cette

base, donc nous devons pousser le calcul perturbatif à l’ordre 2. Nous avons déjàremarqué que la correction perturbative d’ordre 2 à l’énergie du fondamental est né-cessairement négative. Les transitions virtuelles entre l’état de basse énergie, lorsqueles électrons occupent les deux orbitales, avec les états de haute énergie, lorsqu’ils setrouvent sur la même orbitale, abaissent donc l’énergie de l’état singulet délocalisé.On obtient

E(2)D = 0 +

∑n∈{a, b}

∣∣∣〈Ψn |Hcin|ΨD 〉∣∣∣2

E(0)D − E(0)

n

+ · · · = −4 t2

U+ O(t3) (B.43)

Le vecteur est modifié comme |ΨD 〉(1) = |ΨD 〉 + 2tU

1√2

[|Ψa 〉 + |Ψb 〉

]+ O(t2).

b) Le problème est invariant par réflexion R : on peut vérifier explicitement que[R, H] = 0 en utilisant que R |Ψa 〉 = |Ψb 〉, R |Ψb 〉 = |Ψa 〉, R |ΨD 〉 = |ΨD 〉 (etR |ΨT , M 〉 = −|ΨT , M 〉).Notons |ΦS ,A 〉 deux états propres (symétrique/antisymétrique) de la réflexionR |ΦS ,A 〉 = ±|ΦS ,A 〉. Nous voyons donc que [R, H] = 0 ⇒ 〈ΦS |H|ΦA 〉 = 0. Nous

334

Page 345: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

en déduisons que H a une structure diagonale par blocs dans une base d’états propresde la réflexion. Introduisons

|ΦS 〉 =1√

2(|Ψa 〉 + |Ψb 〉) (B.44)

|ΦA 〉 =1√

2(|Ψa 〉 − |Ψb 〉) (B.45)

Dans la base {|ΦA 〉, |ΦS 〉, |ΨD 〉} l’hamiltonien prend la forme⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝1/√

2 −1/√

2 01/√

2 1/√

2 00 0 1

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝

U 0 −√

2 t0 U −

√2 t

−√

2 t −√

2 t 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝

1/√

2 1/√

2 0−1/

√2 1/

√2 0

0 0 1

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ =⎛⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎜⎝U 0 0

0 U −2t0 −2t 0

⎞⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎟⎠ (B.46)

très simple à diagonaliser (une matrice 2×2). Nous obtenons la valeur propre EA = Uassociée à |ΦA 〉 et les valeurs propres

E± =12

[U ±

√U2 + 16 t2

]�

⎧⎪⎪⎨⎪⎪⎩U±U2 ± 4 t2

U pour t � U

±2 t + U2 pour t � U

(B.47)

pour les états

|Ψ+ 〉 = cos(θ/2)|ΦS 〉 − sin(θ/2)|ΨD 〉 (B.48)

|Ψ− 〉 = sin(θ/2)|ΦS 〉 + cos(θ/2)|ΨD 〉 (B.49)

où tan θdef= 4t/U. (Nous avons retrouvé le résultat perturbatif E− � −4 t2/U).

4. Si on oublie les deux états de haute énergie |ΦA 〉 d’énergie EA = U et |Ψ+ 〉 d’énergieE+ � U, le spectre de basse énergie de H est donc E− � −4 t2/U pour l’état singulet etET = 0 pour les états du triplet. L’hamiltonien effectif a donc les mêmes vecteurs propres.Les spectres des énergies coïncident pour A = 4t2/(�2U) et B = 2t2/U. Nous avons doncvu que la physique de basse énergie du problème, rendant compte de l’effet de l’énergiecoulombienne et du principe de Pauli, peut être décrite par l’hamiltonien effectif

Heff =t2

U

(−1 +

4�2

�S 1 · �S 2

)(B.50)

décrivant une interaction antiferromagnétique favorisant l’anti-alignement des spins.

5. Nous comparons la physique du niveau excité de l’hélium (problème précédent) et celledu niveau fondamental de la molécule de di-hydrogène. Les mêmes ingrédients sont présents(Coulomb, Pauli).

Échange Super-échange

Orbitales φa et φb fort recouvrement, mais ⊥ faible couplage, mais non ⊥Ea � Eb Ea = Eb

Interaction coulombienne traitée perturbativement dominante

États quantiques |φaφb; S , M 〉 seuls Parmi les |φaφb; S , M 〉, état singulet

états en jeu couplés aux états |φaφa; 0, 0 〉 et |φbφb; 0, 0 〉Interaction effective Ferro (A = −2J/�2 < 0) AntiFerro (A = 4t2/U�2 > 0)

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Page 346: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

CHAPITRE 15Exercice 15.1 Le champ électrique « vu » par l’électron d’un atome d’hydrogène dansson état fondamental est |qe|Eatome =

e2

a20, i.e. Eatome ∼ 5 10+11 volts/m.

Rappelons que la puissance par unité de surface d’une onde électromagnétique est donnée parle vecteur de Poynting �Π = 1

μ0

�E×�B dont le module estΠ = E2/cμ0 = ε0E2c (dimension EL3

LT =

MT−3, ok). Pour un laser de 1 Watt, avec un faisceau de section de 1 mm2, nous obtenons :Π = 106 Watt/m2 ce qui conduit à Elaser ∼ 2 10+4volts/m. Finalement Elaser/Eatome ∼ 10−7,c’est petit.

Exercice 15.2 Le taux de désexcitation d’état 2p est Γ2p � 0.66 × 109 s−1.On rappelle que la nième orbite de Bohr est caractérisée par un rayon rn = n2a0, une vitessevn =

αcn et une période Tn = n3 2π�3

mee4 . Dans le niveau n = 2 la période de rotation est de T2 �10−15 s. Autrement dit, dans une image semi-classique, s’il se trouve dans l’état 2p l’électrona le temps d’effectuer 1 500 000 révolutions avant de retomber dans l’état fondamental.

Exercice 15.3 On reprend le développement de l’exponentielle : ei�k·�r = 1+i�k·�r− 12 (�k ·�r)2+

· · · . L’approximation dipolaire électrique a consisté à ne retenir que le premier terme (le 1). Sil’approximation conduit à un élément de matrice nul, 〈e |�p ·�ε�k,σ|g 〉 = 0, nous pouvons garder

le terme suivant, ce qui fera apparaître 〈e |(�p · �ε�k,σ)(�k ·�r)|g 〉 qui conduit à de nouvelles règlesde sélection. Cette approximation porte le nom d’approximation « quadrupolaire électrique ».On peut montrer qu’elle conduit aux règles de sélection Δ� = 0,±2 autorisant la transition2s→1s. Afin d’estimer l’ordre de grandeur de Γ2s→1s, nous remarquons que 〈2s |(�p · �ε�k,σ)

(�k · �r)|1s 〉 ∼ (ka0)〈2p |(�p · �ε�k,σ)|1s 〉 où k est le vecteur d’onde correspondant à la transition

(n = 2) → (n = 1) (i.e. �kc = 34

mee4

2�2 ). Il est facile de vérifier que ka0 ∼ α et donc Γ2s→1s ∼α2Γ2p→1s ∼ 3.5 × 104 s−1, soit un temps de l’ordre de la milliseconde.

Exercice 15.4

a) On obtient dPdΩ =

18π

e2

c3ω4a2 sin2 θ : même dépendance angulaire que (15.40).

b) En intégrant dans toutes les directions angulaires on obtient Pray =∫

dΩ dPdΩ =

23c3 e2ω4a2,

i.e. en fonction de l’accélération : Pray =23

e2

c3 �r 2.

c) Atome de Rutherford. On suppose la trajectoire classique quasiment circulaire (exer-cice 1.1), toutefois à cause de l’énergie rayonnée, le rayon diminue. Pendant une périodeT , le rayon varie de δr � T r et la variation d’énergie mécanique est égale à l’énergierayonnée : e2

2r2 δr + PrayT = 0. Nous déduisons r � − 43 c

( e2

mec2r

)2 soit ddt (r

3) � − 4c3

( e2

me

)2=

−8α3a30R/�. Le rayon de l’orbite passe de r = 4a0 à r = a0 en un temps τclass

2p→1s � 8�/(α3R),

presque le résultat donné par la règle d’or de Fermi, éq. (15.41), i.e. 1/Γ2p � 13�/(α3R).Bien entendu ce modèle classique ne saurait être satisfaisant puisque l’atome de Ruther-ford s’éffondre un temps très court : le rayon passe de r(0) = a0 à r(τclass

vie ) = 0 en un tempsτclass

vie � �/(8α3R) � 1.5 10−11 s (cf. chapitre 1).

336

Page 347: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Exercice 15.5 Oscillations de Rabi dans un atome à 2 niveaux

On écrit

W(t) =12

Wab

(0 e−iωt

eiωt 0

)+

12

Wab

(0 eiωt

e−iωt 0

)≡ W+(t) +W−(t) (B.51)

On remarque que H0 + W+(t) est exactement l’hamiltonien étudié dans le problème 15.1,ci-dessous. En supposant ωab > 0, le terme W+(t) est en résonance si ω ∼ ωab (mais leterme W−(t) hors résonance). D’après le problème étudié ci-dessous on a donc Pa→b(t) �(Wab�Ω

)2 sin2(Ωt/2) où Ωdef=

√(ω − ωab)2 +W2

ab/�2 (en négligeant W−(t)). Dans le régime de

fort couplage, à résonance, l’atome oscille entre les deux états (toutefois les oscillations deRabi sont amorties par le couplage aux autres états [10]). Au voisinage de la résonance, maispour ω � ωab, l’expression de Pa→b(t) �

( Wab�(ω−ωab)

)2 sin2[(ω − ωab)t/2] coïncide avec un desdeux termes du résultat perturbatif (15.16).

15.1 Problème : Résonance magnétique

1. Si le champ est uniforme et constant les degrés de liberté orbitaux et de spin sont décou-plés. Le spin décrit un « mouvement » de précession autour de l’axe du champ magnétique àpulsation ωL = γB. Si la particule est chargée électriquement son mouvement est circulaireuniforme : la particule décrit une orbite cyclotron à pulsation ωc =

qBm (chapitre 16). Si la

particule est neutre, son mouvement est indépendant du champ magnétique : elle décrit unmouvement de translation rectiligne uniforme.2. Les composantes du spin 1/2 sont données par les matrices de Pauli. On obtient

i�ddt

(χ+(t)χ−(t)

)= H(t)

(χ+(t)χ−(t)

)avec H(t) = −�γ

2

(B0 B1 e−iωt

B1 eiωt −B0

)(B.52)

3. a) Le changement de variables correspond à une rotation d’un angle θ = −ωt, i.e. à seplacer dans un référentiel tournant dans lequel le champ est statique.

b)

i�ddt

(ϕ+(t)ϕ−(t)

)= H

(ϕ+(t)ϕ−(t)

)avec H =

2

(ω0 − ω ω1

ω1 ω − ω0

)(B.53)

où ω0def= −γB0 et ω1

def= −γB1. L’équation différentielle pour Φ(t)

def= (ϕ+(t),ϕ−(t)) est

la forme prise par l’équation de Schrödinger dans le référentiel tournant à pulsationω. Le champ magnétique est donc statique dans ce référentiel.

4. On utilise la paramétrisation du chapitre 5 : on introduitΩdef=

√(ω − ω0)2 + ω2

1 et l’angle θ

défini par cos θdef=

ω0−ωΩ et sin θ

def= ω1

Ω . On obtient immédiatement les valeurs propres deH : E± = ±�Ω/2 et les vecteurs propres correspondant Ψ+ = (cos(θ/2) , sin(θ/2)) et Ψ− =(− sin(θ/2) , cos(θ/2)).5. a) La solution générale de l’équation différentielle est Φ(t) = c+Ψ+e−iΩt/2 + c−Ψ−eiΩt/2

où les deux constantes sont fixées par les conditions initiales. Si χ+(0) = ϕ+(0) = 1 etχ−(0) = ϕ−(0) = 0 nous obtenons c+ = cos(θ/2) et c− = − sin(θ/2).©

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Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

b) Nous déduisons la probabilité de retournement du spin : P+→−(t) = |〈− |χ(t) 〉|2 =|χ−(t)|2 = |ϕ−(t)|2 :

P+→−(t) =(ω1

Ω

)2sin2(Ωt/2) (B.54)

Ces oscillations de la probabilité de retournement sont appelées « oscillations deRabi ».

c) Hors résonance Ω � |ω − ω0| � ω1 la probabilité de retournement est très faibleP+→−(t) ∼ (ω1/Ω)2 � 1. En revanche à résonance, ω = ω0, la probabilité oscilleentre 0 et 1, quelle que soit l’amplitude de la composante tournante du champ B1

responsable de la transition. Ceci s’explique par le fait que si ω = ω0 l’effet de pré-cession du spin à pulsation ω0 = −γB0 est éliminé dans le référentiel tournant.

6. a) Les deux appareils de Stern & Gerlach servent de « polariseurs de spin ».

b) La résonance correspond à la valeur de B0 pour laquelle la probabilité de retourne-ment du spin égale 1. Tous les atomes sont alors déviés par le second Stern & Gerlach,d’où le pic.

CHAPITRE 16Exercice 16.1 φ0 = h/|qe| � 41 Gauss.μm2.Pour B = 1 T on obtient �B � 25 nm et �ωc � 1.7 meV. Puisque 1 K correspond à 86 μKcette énergie est �ωc/kB � 19 K. Autrement dit, pour B = 1 T et T � 20 K, les fluctuationsthermiques sont insuffisantes pour exciter les électrons d’un niveau de Landau à un autre.

Exercice 16.2 Dans le cas tridimensionnel, les niveaux d’énergie de H = 12 m(v2

x +

v2y) +

12m p2

z sont En,kz = εn +�2k2

z

2m où nous avons noté εn = �ωc(n + 12 ) le spectre de Lan-

dau bidimensionnel. Les niveaux sont dégénérés dLL fois. Nous obtenons la densité d’étatsρ(3d)(E) =

∑∞n=0

∑k,kz

δ(E − En,kz ) = dLL∑∞

n=0 ρ(1d)(E − εn) où ρ(1d)(E) = Lz

π�

√ m2E est la

densité d’états du problème libre unidimensionnel. Nous obtenons finalement ρ(3d)(E) =B Volπ�φ0

∑∞n=0 θ(E−εn)

√m

2(E−εn ) où Vol = LxLyLz est le volume du système. Contrairement au cas

bidimensionnel qui présente des gaps εn+1−εn = �ωc (figure), la densité d’états ρ(3d)(E) décritun spectre continu. On trace ρ(3d)(E) avec (ligne continue) et sans (tirets) champ magnétique.

0 1 2 3 4 5 60

1

2

3

4

5

E��Ωc

Ρ�2

d��E�

0 1 2 3 4 5 60

2

4

6

8

E��Ωc

Ρ�3

d��E�

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Page 349: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

Exercice 16.3 Problème de Landau dans la jauge symétrique

a) ωc = qB/m.

b) �z = i�(axa†y − a†xay) et H = 1

2�ωc[a†xax + a†yay − i(axa

†y − a†xay) + 1

].

c) L’expression de H suggère la combinaison linéaire afin de découpler les deux oscillateurs(couplés par le terme de moment orbital). On trouve �z = �(b†b − a†a). En remarquantque a†xax + a†yay = a†a + b†b on obtient finalement H = �ωc(a†a + 1

2 ).Si on introduit les états |na, nb 〉 où na ∈ N est la valeur propre de a†a et nb ∈ N celle deb†b nous obtenons que le moment orbital (valeur propre de �z) est � = nb − na. On re-trouve le spectre des niveaux de Landau Ena = �ωc(na +

12 ) infiniment dégénérés (puisque

indépendant de nb). La dégénérescence dans le nombre nb = na + � s’interprète commeune dégénérescence dans le moment orbital ; l’origine physique de la dégénérescence estdonc liée à l’invariance par rotation du problème.

d) Premier niveau de Landau. Nous pouvons vérifier que l’action des opérateurs d’annihila-tion sur les fonction d’onde sont données par les opérateurs différentiels

a →

√2�

mωc

[∂

∂z+

mωc

4�z

]et b →

√2�

mωc

[∂

∂z+

mωc

4�z

](B.55)

où z = x + iy (donc ∂∂z =

12

( ∂∂x − i ∂∂y

)et ∂

∂z =12

( ∂∂x + i ∂∂y

)). Les expressions des opéra-

teurs de création sont obtenues en utilisant que( ∂∂z

)†= − ∂

∂z . On aboutit finalement à lareprésentation du moment orbital

�z → �(z∂

∂z− z

∂z

). (B.56)

Les états du niveau de Landau le plus bas sont définis par a|ψ 〉 = 0. En écrivant ψ(z, z) =f (z, z) exp−mωc

4� zz, l’équation (aψ)(z, z) = 0 devient ∂ f∂z = 0, i.e. f ne dépend que de z, qui

est la définition d’une fonction holomorphe. Les fonctions d’onde des états du premierniveau de Landau ont bien la forme

ψ(z, z) = f (z) e−mωc4� zz. (B.57)

On vérifie sans difficulté que �z(z�) = ��z�, d’où �zψ(z, z) = ��ψ(z, z) si f (z) = z�.

Exercice 16.4

a) La densité de courant associée à l’état stationnaire (16.15) est �uθ · �Jψk,m =�

meIm

[ψ∗k,m

1r

( ∂∂θ−

iα)ψk,m

]= �k

me

m−α2πr J2

|m−α|(kr). L’intégration nous donne Im(k) = q�k4πme

sign(m − α) =1

2φ0

dEdk sign(m − α).

b) La sommation sur m est mal définie. Une manière assez physique de régulariser ce calculconsiste à ajouter un potentiel harmonique 1

2 meωr�r 2, puis à prendre la limiteωr → 0 aprèscalcul du courant (régularisation harmonique). Une autre méthode donnant le même résul-

tat consiste à écrire la somme en terme de la fonction de Hurvitz ζ(s,α)def=

∑∞m=0(m+α)−s :

on obtient∑+∞

m=−∞ sign(m− α) = lims→0[ζ(s, 1− α)− ζ(s,α)

]= 2α− 1 (régularisation ζ).©

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Page 350: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Annexe B • Solutions des exercices et problèmes

Finalement nous obtenons dI(E; φ) = 1φ0

(α − 1

2

)dE pour 0 < α < 1 (rappelons que les

propriétés physiques sont périodiques en α). Si on considère un gaz d’électrons, on doitsommer ce résultat jusqu’au niveau de Fermi : IεF (φ) =

∫ εF

0dI(E; φ) = εF

φ0

(α − 1

2

). Le

résultat est bien impair sous α → 1 − α : le vortex magnétique induit un courant dans lesens opposé à la circulation du potentiel vecteur. C’est un courant de nature diamagné-tique. On peut encore écrire le courant en terme de la densité électronique ne =

me

2π�2 εF :

IεF (φ) = q�me

ne(α − 1

2

).

c) En utilisant que ηm =π2

(|m| − |m − α|), nous voyons que la dérivée par rapport au flux,∂∂φηm =

π2φ0

sign(m− α), coïncide avec le courant permanent : Im(E) = Im(k) dkdE =

1π∂∂φηm.

Puisque les déphasages sont les phases des valeurs propres de la matrice S , nous obtenonsainsi une relation entre cette dernière et le courant permanent : dI(E; φ) = dE

2iπ∂∂φ ln det S ,

de portée assez générale.

Remarque : Aimantation

Mentionnons que le courant permanent n’est pas la seule quantité physique mettanten évidence la présence du courant diamagnétique : l’aimantation du gaz d’électronsdégénéré a été également calculée : MεF (φ) = − q�

6meα(1 − α)

(12 − α

)pour 0 � α � 1.

Remarquons que l’aimantation est indépendante de εF , ce qui indique que seuls lesétats d’énergie E = 0 y contribuent. Ceci est à opposer au cas du courant perma-nent pour lequel la contribution des états est indépendante de leur énergie, d’où laproportionnalité du courant avec εF .

Pour en savoir plus

Sur la régularisation ζ dans ce contexte, on pourra consulter : A. Comtet, A. Moroz & S.Ouvry, Persistent current of free electrons in the plane, Phys. Rev. Lett. 74, 828 (1995).Sur la régularisation harmonique : A. Comtet, S. Mashkevich & S. Ouvry, Magneticmoment and perturbation theory with singular magnetic fields, Phys. Rev. D 52, 2594(1995) et J. Desbois, S. Ouvry & C. Texier, Persistent currents and magnetization in two-dimensional magnetic systems, Nucl. Phys. B 528, 727 (1998). Pour une revue, C. Texier,Quelques aspects du transport quantique dans les systèmes désordonnés de basse dimen-sion, thèse de l’Université Paris 6 (1999). L’analyse du courant permanent ou de l’aiman-tation en présence d’un vortex ont été discutés dans ces deux dernières références.La relation entre matrice S et courant permanent a été proposée dans E. Akkermans, A.Auerbach, J. E. Avron & B. Shapiro, Relation between persistent currents and the scatte-ring matrix, Phys. Rev. Lett. 66, 76 (1991).

16.1 Problème : Conductivité Hall d’un gaz d’électrons bidimensionnel

1. L’hamiltonien HE =p2

x2m +

(py−qeBx)2

2m − qeEx est invariant par translation selon �uy. Nous pou-vons donc chercher des états stationnaires états propres de py (le générateur des translations) :

ψ(x, y) = φ(x)eiky. On obtient l’équation effective[− �2

2me

d2

dx2 +12 meω

2c (x − xc)2 − qeEx

]φ(x) =

E φ(x) avec xcdef= �k

qe B = k�2B où �B =

√�/qeB. C’est encore un problème d’oscillateur harmo-

340

Page 351: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Solutions des exercices et problèmes

nique. Si on écrit⎡⎢⎢⎢⎢⎢⎣− �2

2me

d2

dx2+

12

meω2c

(x − xc −

qeEmeωc

)2

− qeExc −(qeE)2

2meω2c

⎤⎥⎥⎥⎥⎥⎦ φ(x) = E φ(x) (B.58)

on obtient immédiatement le spectre des énergies : εn,k = �ωc

(n + 1

2

)− qeExc − (qeE)2

2meω2c. En

présence du champ électrique, les énergies dépendent des deux nombres quantiques n ∈ Net k (à travers 0 � xc � Ly). Les états propres sont ψn,k(x, y) = ϕn(x − xc − qeE

meωc) 1√

Seiky, où

ϕn(x) sont les états propres de l’oscillateur harmonique et S la surface du plan.

2. a) En utilisant ∂∂k 〈ψn,k |ψn,k 〉 = 0 nous écrivons ∂εn,k

∂k = ∂∂k 〈ψn,k | p2

x2me+

(�k−qeBx)2

2me−

qeEx|ψn,k 〉 = �me〈ψn,k |�k − qeBx|ψn,k 〉 = �〈ψn,k |

py−qeBxme

|ψn,k 〉 = �〈ψn,k |vy|ψn,k 〉.Qed. On déduit la densité de courant selon �uy dans l’état :

j(n,k)y =

1S B

∂εn,k

∂xc= −qeE

S B(B.59)

b) La contribution d’un état quantique à la conductivité Hall σ(n,k)xy = − 1

E j(n,k)y =

qe

S B estindépendante de l’état quantique. Le spectre des énergies (à E = 0) est le spectrede Landau : un spectre d’oscillateur harmonique avec des niveaux dégénérés dLL =qeBS

h fois. La contribution des états d’un niveau de Landau à la conductivité est doncdonnée par le quantum de conductance (en 2D conductance et conductivité ontmême dimension) :

σLLxy

def=

∑k

σ(n,k)xy = dLL σ

(n,k)xy =

q2e

h(B.60)

où q2e

h � 1/(25.8 kΩ). La figure (obtenue à très basse température, T � 8 mK) montreune quantification de la resistivité Hall comme ρyx =

hn q2

e(on identifie bien les pla-

teaux pour n = 3, n = 4 et n = 5) corrélativement à une annulation de la résistivité

longitudinale ρxx = 0 (i.e. σxy = n q2e

h et σxx = 0). Ce phénomène est appelé effet Hallquantique. Remarquons que dans le problème, nous n’avons pas démontré la quan-tification de la conductivité Hall, puisque nous avons obtenu le résultat classique :σxy = Nσ(n,k)

xy = neqe/B où ne = N/S est la densité d’électrons. La quantification s’ex-plique par la présence de désordre : celui-ci localise une partie des états quantiquesqui ne participent plus à la conduction. L’effet remarquable et que, quelle que soit lafraction des états participant au transport, la contribution de tous les états d’un niveaude Landau reste toujours donnée par la valeur universelle q2

e /h.

Pour en savoir plus

On pourra consulter l’ouvrage introductif de S. Datta [11] ou l’article de la conférenceNobel : Klaus von Klitzing, The quantized Hall effect, Rev. Mod. Phys. 58, 519 (1986).Un ouvrage plus avancé R. Prange & S. Girvin, The quantum Hall effect, Springer-Verlag(1990).

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Mécanique quantique

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344

Page 355: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

INDEX

A

Action d’une trajectoire 30Addition des moments cinétiques 163Aharonov-Bohm (effet) 16, 17, 285Aharonov-Casher (théorème) 282Amplitude de diffusion 186, 192Annihilation (opérateur d’) 117Antiferromagnétisme 252, 335Anyon 218Appareil de mesure du spin 157Approximation

dipolaire électrique 270semiclassique 243

Atome d’hydrogène 223équation de quantification, 229structure fine, 12, 256, 259structure hyperfine, 261

Atome 5, 231de Bohr 12de Rutherford 6, 275, 336Atome lumière (interaction) 269taille, 234

Avogadro (nombre d’) 5

B

Baker-Campbell-Hausdorff (formule de)108

Barrière de potentiel 41Base

continue 62discrète 62

Bell (inégalités de) 17Bessel (fonctions de) 295BKW (méthode) 243Blocage de Pauli 216Bloch (théorème de) 14, 109, 113, 312Bohr

(atome de) 12(rayon de) 225

Bohr-Sommerfeld (règle de quantification de) 12,245

Boîte (particule libre dans une) 27Bose-Einstein

(condensation de) 18, 215(statistique de) 13, 215

Boson 208, 216Bra 65Bragg

(diffraction de) 14(diffusion de) 172

Breit-Wigner 177, 325

Brillouin (zone de) 110

C

Canonique (relation de commutation) 71Champ magnétique (dynamique sous) 153, 279Classification de Mendeleïev 231Clebsch-Gordan (coefficients de) 164, 319Coefficients 3J 319Cohérents (états) 124, 316Collisions (théorie des) 171Commutateur 67Composition des moments cinétiques 163Condensation de Bose-Einstein 18, 215Conditions aux limites généralisées 57,

302Conductivité Hall 288, 340Confinement 27, 29, 38, 48, 117, 243Conjugaison

de charge 105hermitique 67

Conservation (loi de) 102Constante

d’Euler-Mascheroni 292de Planck 10de structure fine 224universelle de gravitation 2fondamentale 297

Continuum 29, 41Convolution (produit de) 52Corps noir (rayonnement du) 9, 11Correction de masse 256Corrélations 212, 214Correspondance (principe de) 12, 33, 64, 72, 123Coulombien (potentiel) 226Couplage spin-orbite 256, 259Courant

de probabilité (densité de) 35permanent 288

Covariante (dérivée) 302CPT (théorème) 105Création (opérateur de) 117Cristal

(masse effective) 111, 287(relation de dispersion d’un) 110unidimensionnel 110, 113, 312

D

δ (potentiel) 113, 175, 198, 204, 322, 325Darwin (terme de) 257Davisson & Germer 14, 24de Broglie (relation de) 24©

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Mécanique quantique

Dégénérescencesaccidentelles, 306, 314dans l’atome H, 229résultants d’une symétrie, 306, 314

Densitéde courant de probabilité 35de probabilité 21, 35d’états 196, 321semiclassique, 246

Déphasage 174, 181, 189, 191, 193, 199, 202, 322Dérivée covariante 302Désintégration α 14Déterminant de Slater 212Deux niveaux (système à) 89Diffraction de Bragg 14Diffusion

(état stationnaire de) 29(matrice de) 95, 160, 179de Bragg 172

Dipolaire électrique (approximation) 270Dirac

(équation de) 14(formalisme de) 61

Dirichlet (condition de) 302Distribution 53

de Dirac δ 53Dualité onde-corpuscule 24, 25, 58, 79Durée de vie d’un niveau d’énergie 274Dyson (équation de) 184

E

Écart-type 47Échange

(mécanisme d’) 250(opérateur d’) 208

ECOC 84Effet

Aharonov-Bohm 16, 17, 285Hall quantique 17, 218, 288, 340photoélectrique 8tunnel 41Zeeman 144, 146

Ehrenfest (théorème d’) 92Électromagnétisme 3Électron (découverte de l’) 5Émission

spontanée 12, 272stimulée 12, 271

Énergie de Fermi 216, 324EPR (paradoxe) 15, 17, 83, 85Équation

d’Euler-Lagrange 31d’onde 33de Dirac 14de Dyson 184

de quantification 28, 38, 40, 113, 175, 176,229

de Schrödinger 22, 34, 87, 109stationnaire, 35

de Maxwell 3du mouvement de Heisenberg 93

Espace de Hilbert 64État

fondamental 29, 48, 117, 243intriqué 73, 83, 217singulet 167stationnaire 28, 35, 88stationnaire de diffusion 29, 174, 179, 181,

183, 184, 186, 192, 198, 305triplet 167cohérent 124, 316

Étoile à neutrons 216Euler-Lagrange (équation d’) 31Évolution temporelle

(opérateur d’) 88, 94, 107, 194(potulat d’) 87

Expérience de Stern et Gerlach 154

F

Facteur de Landé 146, 277atomique, 249, 331de l’électron, 152, 297du neutron, 152, 297du proton, 152, 297

Facteur gyromagnétique 152Facteurs d’occupation 213Fermeture (relation de) 62, 67Fermi

(énergie de) 216, 324(règle d’or) 268, 269, 273

Fermi-Dirac (statistique de) 13, 216Fermion 208, 216Feynman-Hellmann (théorème de) 289Fluctuations

de l’impulsion 46de la position 46

Fonction Beta d’Euler 291Fonction d’onde 21, 34, 44, 61Fonction de Green 195

éq. de Schrödinger 1D, 197impureté δ, 198problème libre 1D, 198

Fonction Γ 291Fonctionnelle 30Fonctions de Bessel 295Fondamental (état) 29, 48, 117, 243Formalisme de Dirac 61Formule

de Baker-Campbell-Hausdorff108

346

Page 357: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Index

de Rodrigues 292Fourier

(série de) 50(transformation de) 51

G

Galilée (groupe de) 4, 34, 72, 108, 113, 151, 312Gamow (modèle de) 14Gaz rare (ou noble) 232, 234Générateur infinitésimal 106

du groupe des rotations, 127, 128Gravitation 2Green (fonction de) 195Groupe

(définition) 100C4v 99de Galilée 4, 34, 72, 108, 113, 151, 312de symétrie 99des rotations 108, 127, 130

représentations irréductibles, 137des translations spatiales 106, 130des translations temporelles 107SO(3) 131, 150SU(2) 150U(1,1) 308U(2) 307

Groupes continus de transformations 106Gyromagnétique (facteur) 152

H

Hadron 209Hall (effet) 17, 288, 340Hamiltonien de Pauli 150Harmoniques sphériques 140, 141Heaviside (fonction de) 55Heisenberg

(équations du mouvement de) 93(inégalité de) 47, 49, 72, 77, 247, 266(point de vue de) 94

Hélium 7, 13, 210, 231, 234, 250, 331ortho-hélium, 333para-hélium, 333

Hermite (polynômes d’) 121, 293, 294Hermitique (conjugaison) 67Hilbert (espace de) 64Hund (règle de) 333Hydrogène (atome d’) 223Hydrogénoïdes (ions) 236

I

Impair (opérateur) 103Impulsion

(fluctuations de l’) 46

(opérateur d’) 63, 70(valeur moyenne de l’) 46

Indice de Maslov 246Indiscernabilité (principe d’) 208Indiscernables (particules) 207Inégalité de Heisenberg 47, 72, 77

temporelle, 49, 72, 178, 247, 266Inégalités de Bell 17Interaction atome-lumière 269Interaction faible 15, 16Interféromètre de Mach-Zender 159Interprétation probabiliste 13, 21Intrication 73, 82, 83, 217Intriqué (état) 73, 83, 217Invariante (observable) 102Ions hydrogénoïdes 236Isolant de Mott 252Isotopes 6, 233

J

JWKB (méthode) 243

K

Kepler (loi de) 299Ket 65Krein-Friedel

(règle de somme de) 203(relation de) 181, 191, 288

L

Laguerre(polynômes de) 295

Lamb (déplacement de) 15, 255, 260Lame séparatrice 95Landau

(niveaux de) 280, 281(problème de) 280

Landauer (résistance de) 199, 324Landé (facteur de) 146, 249, 277Largeur intrinsèque d’un niveau d’énergie 274Larmor (précession de) 153Legendre (polynômes d’) 293Lepton 209Levi-Civita (tenseur de) 128Levinson (théorème de) 176Liaison chimique 235Lie (algèbre de) 131Loi

de conservation 102de Planck 9, 11de Rayleigh-Jeans 9de Wien 9©

Dun

od.L

aph

otoc

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tun

délit

.

347

Page 358: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Mécanique quantique

M

Mach-Zender (interféromètre de) 159Maslov (indice de) 246Masse effective (dans un cristal) 111Matrice

de diffusion (matrice S ) 95, 160, 179de transfert 96orthogonale 131T 184, 322

Matrices de Pauli 149Maxwell (équations de) 3Mécanique newtonnienne 2Mécanisme

d’échange 250de super-échange 253

Mendeleïev (classification de) 231Mermin-Wagner (théorème de) 316Mesure

(postulats de) 80du spin 157

Méthodevariationnelle 242WKB (ou JWKB ou BKW) 243

Microscopeà effet tunnel 17, 43électronique 15

Moindre action (principe de) 20, 30Molécule H2 254Moment cinétique 127, 128, 133, 158

de spin 144Moment cinétique orbital 139, 151Moment magnétique 13, 15, 144, 145, 153, 157,

277anormal de l’électron, 15, 153de l’électron, 151

Moments cinétiques (addition des) 163Mott (isolant de) 252

N

Naine blanche 216Neumann (condition de) 302Newtonnienne (mécanique) 2Niveaux de Landau 280, 281Nœther (théorème de) 31, 108Normalisation 21

des ondes planes 45

O

Observable 63(valeur moyenne d’une) 83

Onde (équation d’) 33Onde plane 24Onde-corpuscule (dualité) 24, 25, 58, 79

Ondes planes (normalisation des) 45Opérateurs

scalaires 143tensoriels 169vectoriels 143

Opérateurd’échange 208d’annihilation 117d’évolution temporelle 88, 94, 107, 194d’impulsion 63, 70de création 117de permutation 208de position 63, 70de rotation 129, 131, 132, 137, 142, 150linéaire 63

Orthogonale (matrice) 131Orthonormalisées (bases) 62Oscillateur harmonique 115

(spectre des énergies) 119Oscillations de Rabi 275, 277, 336

P

Pair (opérateur) 103Paquet d’ondes 156, 202, 324

gaussien, 97(réduction du), 22, 23, 80, 81, 83

Paradoxe EPR 15, 17, 83, 85Parité 16, 103, 112

(violation de la) 105Parseval-Plancherel (relation de) 47Particule libre 89, 98

dans une boîte 27Particules

élémentaires 209identiques 207indiscernables 207

Pauli(blocage de) 216(hamiltonien de) 150(matrices de) 149(principe de) 13, 213, 216

Permutabilité 22Permutation (opérateur de) 208Perturbations

(méthodes des) 237dépendant du temps 263

Phase stationnaire (méthode de la) 188Photoélectrique (effet) 8Photon (polarisation) 86Photon 272Physique statistique 3Planck

(constante de) 10(loi de) 9, 11

Planck-Einstein (relation de) 24

348

Page 359: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Index

Polarisation du photon 86Polynômes

d’Hermite 121, 293, 294de Laguerre 293, 295de Legendre 293

Position(fluctuations de la) 46(opérateur de) 63, 70(valeur moyenne de la) 46

Postulats 20, 22, 61d’évolution temporelle, 22, 87de mesure, 22, 80de symétrisation, 22, 208

Potentiel coulombien 226Potentiels constants par morceaux 37Poynting (vecteur de) 275Précession de Larmor 153Principe

d’indiscernabilité 208de correspondance 12, 33, 64, 72, 123de moindre action 20, 30de Pauli 13, 213, 216de superposition 25, 26, 27, 33, 73, 82, 208

Probabilité(densité de) 21, 35de réflexion 42de transmission 42tunnel 41

Problème de Landau 280Produit

de convolution 52scalaire 21, 62, 64tensoriel 73

Projecteur 66Projection (théorème de) 144, 248Puits de potentiel 103, 112

Q

Quantification 27, 29, 40(équation de) 28, 38, 40, 113, 175, 176, 229du champ 316

électromagnétique, 13, 272Quantum

d’action 10de conductance 201, 280

R

Rabi (oscillations de) 275, 277, 336Raccordement de la fonction d’onde

(conditions de) 38Radioactivité 7

α, 14β, 15

Rayleigh-Jeans (loi de) 9

Rayon de Bohr 225Rayonnement du corps noir 9, 11Réduction du paquet d’ondes 22, 23, 80, 81, 83Réflexion 103

(probabilité de) 42Règle

d’or de Fermi 268, 269, 273de Hund 333de quantification de Bohr-Sommerfeld 12, 245de somme de Krein-Friedel 181, 191, 203, 288du triangle 165

Règles de sélection 137, 144, 170, 249, 259, 266,330

dipolaires électriques, 271Relation

de Broglie 24de commutation canonique 71de fermeture 62, 67de Krein-Friedel 181, 191de Parseval-Plancherel 47de Planck-Einstein 24

Renormalisation 205, 326Renversement du temps 105Représentation

d’un groupe 130spectrale d’un opérateur 68

Résistance de Landauer 199, 324Résonance 44, 177, 177, 202, 246, 325

magnétique 15, 276magnétique nucléaire 15

Ritz (théorème de) 242Rodrigues (formule de) 292Rotation

(opérateur de) 129, 131, 132, 137, 142, 150des spineurs 150

Rotations (groupe des) 108, 127, 130Rutherford (atome de) 6, 275, 336Rydberg 225

S

Scalaire (produit) 21, 62, 64Schrödinger

(équation de) 22, 34, 87, 109(point de vue de) 93

Sélection (règles de) 137, 144, 170, 249, 259, 266,271, 330

Semiclassique (approximation) 243Séparable (problème) 74Singulet (état) 167Slater (déterminant de) 212Spectrale (représentation) 68Spectre

d’un opérateur 68de l’énergie 7, 29, 36

continuum, 29, 41©D

unod

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phot

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ieno

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tori

sée

estu

ndé

lit.

349

Page 360: Mécanique Quantique - Cours Et Exercices Corrig TEXIER LIBRE

Mécanique quantique

Spectre Zeeman 146, 147, 248Spectroscopie de masse 6Spectroscopiques (notations) 230Spin 13, 144, 150Spin 1/2 148Spin de l’électron 13, 148, 150Spin-orbite (couplage) 256, 259Stationnaire (état) 28, 35, 88Statistique

de Bose-Einstein 13, 215de Fermi-Dirac 13, 216

Stern et Gerlach (expérience de) 154STM (Scanning Tunneling Microscopy) 17, 43Structure fine

(constante de) 224de l’atome d’hydrogène 12, 256, 259

Structure hyperfine de l’atomed’hydrogène 261

Super-échange 253Superposition (principe de) 25, 26, 27, 33, 73, 82,

208Supersymétrie 151, 282Supraconducteurs à haute Tc 18, 218, 252Symétrie (groupe de) 99Symétries 99Symétries et dégénérescences 103Symétrique (état) 102Symétrisation (postulat de) 22, 208Système à deux niveaux 89

T

T (matrice) 184, 322Temps de Wigner 201, 324Tenseur de Levi-Civita 128Tenseurs 169Tensoriel (produit) 73Terme de Weyl de la DoS 247Théorème

Aharonov-Casher 282d’Ehrenfest 92de Bloch 14, 109, 113, 312de Feynman-Hellmann 289de Levinson 176de Mermin-Wagner 316de Nœther 31, 108de projection 144, 248de Ritz 242de Wigner 101de Wigner-Eckart 144, 170optique 187spin-statistique 209

Théorie des collisions 171

Thermodynamique 3Transformation 99

de Fourier 51de Fourier de la fonction d’onde 45des opérateurs (observables) 102de Galilée 4, 34, 72, 108, 113, 312

Translations spatiales (groupe des) 106, 130Translations temporelles (groupe des) 107Transmission (probabilité de) 42Transparence 44Triangle (règle du) 165Triplet (état) 167Tunnel

(effet) 41(probabilité) 41approximation WKB, 247

V

Valeur moyenned’une observable 83de l’impulsion 46de la position 46

Valeur principale (distribution) 56van Hove (singularité de) 312Variance 47Variationnelle (méthode) 242Vecteur de Poynting 275Violation

de la parité 16, 105du renversement du temps 16, 106

W

Weyl (terme de) 247Wien (loi de) 9Wigner

(temps de) 201, 324(théorème de) 101

Wigner-Eckart (théorème de) 144, 170WKB (méthode) 243

Y

Young (expérience des franges d’) 25, 79

Z

Zeeman(effet) 144, 146(spectre) 146, 147, 248

350