maurice blanchot à la recherche du chemin dabraham

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Maurice Blanchot, à la recherche du chemin d'Abraham PARK Kyou-Hyun (SungKyunKwan University) 차 례 1. Pourquoi donc Abraham à propos de l’écrit de Blanchot? 2. Ecrire, c'est faire naître le sacré 3. L'angoisse, le secret, la communication 4. Vivre poétiquement 5. Pour conclure Du début à la fin de son travail littéraire, Blanchot s'attache et s’obstine au sujet de l'écriture et plus précisément au sujet du mouvement d'écrire. Il s’intéresse aux écrivains pour lesquels la vie et l’œuvre sont indissociables. Parmi ses textes les plus représentatifs, on peut citer celui sur Hölderlin publié dans son œuvre L'Espace littéraire, son travail sur Nietzsche publié dans L'Entretien infini et ses écrits sur Kafka parus dans De Kafka à Kafka. Blanchot cherchait à mettre en évidence la relation étroite entre la vie et les œuvres des écrivains à travers leur journal intime ou leurs lettres, témoignages qui révèlent le mieux leur vie. De plus, en soumettant avec persistance la question de l’essence de l’acte d’écrire dans les journaux ou les lettres de ces écrivains, 프랑스문화예술연구 제47집(2014) pp.6184

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Maurice Blanchot à La Recherche Du Chemin DAbraham

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  • Maurice Blanchot, la recherche du chemin d'Abraham

    PARK Kyou-Hyun (SungKyunKwan University)

    1. Pourquoi donc Abraham propos de lcrit de Blanchot?

    2. Ecrire, c'est faire natre le sacr3. L'angoisse, le secret, la

    communication

    4. Vivre potiquement5. Pour conclure

    Du dbut la fin de son travail littraire, Blanchot s'attache et sobstine au sujet de l'criture et plus prcisment au sujet du mouvement d'crire. Il sintresse aux crivains pour lesquels la vie et luvre sont indissociables. Parmi ses textes les plus reprsentatifs, on peut citer celui sur Hlderlin publi dans son uvre L'Espace littraire, son travail sur Nietzsche publi dans L'Entretien infini et ses crits sur Kafka parus dans De Kafka Kafka. Blanchot cherchait mettre en vidence la relation troite entre la vie et les uvres des crivains travers leur journal intime ou leurs lettres, tmoignages qui rvlent le mieux leur vie.

    De plus, en soumettant avec persistance la question de lessence de lacte dcrire dans les journaux ou les lettres de ces crivains,

    47(2014) pp.6184

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    il a dcouvert derrire les noms dcrivains comme Kafka, Hlderlin, Proust, Rilke, Kierkegaard, lindividu confront laventure dcrire, c'est--dire un je quotidien absorb dans le mouvement dcrire et qui finit par se transformer en il. Cela ne signifie pas pour autant quil a dcouvert lidentit de lcriture. Car lacte dcrire se rpte linfini. En dautres termes, si lexprience intrieure mise au jour par cet acte se rpte linfini, le contenu de lcriture est toujours diffrent, limage de la vie propre chaque crivain. Pour Blanchot, lexprience dcrire partage par ces crivains, dvoile lorigine essentielle de la littrature. Blanchot poursuit : le cercle, droul sur une droite rigoureusement prolonge, reforme un cercle ternellement priv de centre.1)

    Contrairement aux crivains quil a voqus, Blanchot na presque laiss aucun crit tel que journal ou correspondances pouvant renseigner sur sa vie littraire. Si quelques crits prsentent un aspect autobiographique, nous ne pouvons le prouver avec certitude. Le seul capable den tmoigner, Blanchot lui-mme, ntant plus de ce monde.

    Derrida, qui a ddicac son livre Demeure2) Maurice Blanchot en considrant L'Instant de ma mort comme l'vre autobiographique de son ami, n'a-t-il pas parl, ds le dbut, de l'impossibilit de tmoigner? Cette impossibilit de tmoigner concerne non seulement la vie de Blanchot mais aussi Auschwitz. Blanchot naurait-il jamais laiss aucun journal? Blanchot ne serait-il pas un auteur qui se cache plus encore que Kafka, dans ses uvres? Mme sil na pas laiss de

    1) Maurice Blanchot, Lcriture du dsastre, Gallimard, 1980, p.8. 2) Jacques Derrida, Demeure, Galile, 1998.

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    journal en tant que forme dcrit littraire, naurait-il pas gliss ici et l dans ses textes, le rcit de sa vie et de ses expriences littraires censes trouver place plutt dans un journal? A dfaut de navoir laiss aucun journal, Blanchot naurait-il pas profit des crits sur Kafka et sur Kierkegaard pour parler indirectement de sa propre vie dcrivain clibataire ayant tout abandonn lcriture? Et naurait-il pas ml sa propre exprience du langage potique aux textes consacrs Mallarm et Hrdelin? Par exemple, au moment de la publication en franais du livre de Karl Jaspers, sous le titre Strindberg et Van Gogh, Swedenborg, Hlderlin, Blanchot propose en guise de prface, son texte La Folie par excellence dj publi ailleurs. Il y expose son exprience de la folie d'crire en ajoutant quelques dtails par rapport loriginal. Puis, sans mme modifier une seule ligne son texte, il voque la folie de Hlderlin. En dautres termes, dans lacte dcrire, il a identifi sa propre exprience de la folie celle de Hlderlin. Il convient de prciser quil ne sagit pas du mlange de Blanchot et de Hlderlin, mais de lexprience dcrire propre Blanchot et Hlderlin. Par consquent, la question de fond nest pas celle de lidentification mutuelle de deux crivains. Sans doute, les crivains comme les scientifiques portent-ils Blanchot aux nues en raison des points communs entre leur propre exprience littraire et celle, intrieure, de Blanchot. Ce mlange se produit dans ce que Blanchot nomme le dehors ou lautre nuit. En dfinitive, dans le mlange, les deux ne sunissent pas mais coexistent dans le mme espace. Cela est associ, pour Blanchot, aux concepts de communication et de communaut.

    Si Jean Starobinski a pu confier propos de Blanchot : je crains de n'avoir su parler ni la bonne distance, ni selon la vritable

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    intimit3) en employant dans un commentaire lexpression sortes de paraphrase, ne serait-ce pas cause de ce type de mlange expriment sans doute la lecture des uvres de lauteur? Blanchot expose en effet le lecteur l'exprience du dehors et non pas celle de l'identification. Dans son vre L'Espace litttraire, vre de la premire priode, l'acte de lire y est dcrit comme une question de communication tandis que dans son vre de la priode finale L'criture du dsastre, lire et crire sont prsents comme des actes identiques sans distinction aucune. Ce point de vue provient du partage de lexprience du dehors. La rptition ne sert pas lidentit mais cest lacte mme de rpter qui fait sens, dans son infinit et dans les expriences intrieures qui se ralisent travers cette rptition.

    1. Pourquoi donc Abraham propos de lcrit de Blanchot?

    Abraham est le nom qui apparat de manire rcurrente dans les crits de Blanchot lorsquil parle dHrdelin, de Kierkegaard ou encore de Kafka. Mais ce nest pas tout, chaque fois que lauteur expose son point de vue sur la critique surgit la figure dAbraham. Blanchot a utilis la figure dAbraham pour dcrire et comparer lacte d'crire chez les crivains. Dans la prsente tude, nous tenterons donc dexaminer la biographie de Blanchot lermite dont la vie est plus secrte encore que toute autre personne, travers la

    3) Jean Starobinski, Thomas l'Obscur, chapitre I, Critique, n229, p.513.

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    figure centrale dAbraham. Autrement dit, il sagira de saisir travers les traits dAbraham dcrits dans lAncien Testament de la Bible, les caractristiques de Blanchot en tant quauteur et critique. Lautobiographie de Blanchot lermite, se cache derrire le voile de sa vie ordinaire.

    Notre recherche repousse encore plus loin les limites de la conclusion de Philippe Fries sur lcriture de Blanchot : une autobiographie imaginaire, la narration du devenir-aure4) prsente la fin de l'ouvrage La Thorie fictive de Maurice Blanchot. D'aprs Fries, Blanchot rapporterait ses expriences d'crire non seulement dans ses rcits mais aussi dans ses critiques. C'est ainsi qu'en nous rfrant plusieurs crits de Blanchot, nous dgagerons les caractristiques de l'individu confront l'aventure d'crire, sous l'angle de la figure en mouvement d'Abraham, en nous appuyant sur l'itinraire du presonnage biblique. On peut ainsi mieux saisir la critique de Blanchot et tenter de cerner les lments proprement autobiographiques de l'auteur travers l'exemple d'Abraham frquent dans les textes de Blanchot lorsqu'il choisi de s'intresser certains crivains pour leur vie indissociable de leurs vres.

    2. Ecrire, c'est faire natre le sacr

    Le texte le plus intressant analyser parmi ceux qui citent Abraham est sans doute Le Mystre de la critique paru en Janvier 1944 dans le Journal des dbats. Ce court texte, lun des plus

    4) Philippe Fries. La thorie fictive de Maurice Blanchot, L'Harmattan, 1999, p.273.

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    importants pour comprendre la pense critique de Blanchot, dvoile une vision cohrente, notamment pour comprendre ses crits ultrieurs. Blanchot pose la question de savoir pourquoi les critiques sont considrs avec autant dloignement, comme sil sagissait dun mystre ou dune nigme renferms au cur des pomes. Aussi, en citant l'aveuglement de Sainte-Beuve devant la cration en mouvement, lauteur prcise que la critique ne doit pas tre rduite lexplication logique de la raison et des images contenues dans les uvres. Proust parvient aux mmes conclusions gnrales dans Contre Sainte-Beuve. Blanchot pense que la critique logique et analytique de Sainte-Beuve, juge comme la meilleure lpoque, nglige lessentiel de la littrature. Le risque est de prfrer la critique des crivains qui produisent eux-mmes des textes plutt que celle des critiques spcialistes, mais Blanchot rappelle que plus que tout, la critique a un secret plus secret qu'on ne voudrait le croire. Ceci sexplique par le fait que la littrature et plus prcisment la posie apparat comme le sacrifice du langage.5)

    En approuvant la distinction tablie par Mallarm entre langage brut et immdiat que Blanchot requalifie de langage usuel vs langage potique et essentiel comme le langage littraire, on voit que la critique s'oriente sur l'acte d'crire. Ainsi, dans la littrature, c'est le langage qui est victime, et l'espoir de l'crivain, comme la croyance du sacrificateur, s'applique pour qu'au moment o elle sera dtruite, la chose sacrifie - parole ou animal - puisse devenir le sacr. On peut citer par ailleurs d'autres passages de Blanchot, ainsi : De l peut-etre, l'ambigut d'attitude dont on s'tonne chez les crivains.

    5) Maurice Blanchot, Chroniques littraires du Journal des dbats- Avril 1941 - aot 1944, Gallimard, 2007, p.534.

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    Ils mnent la vie dure aux mots qu'ils vouent la destruction, et pourtant, par cet holocauste, ils pensent restituer aux mots une valeur inestimable ; ils ne semblent avoir qu'un dessein : anantir le langage et ils ne paraissent viser qu'un seul rsultat : rendre au langage sa vraie nature, lui donner l'existence. Sur le bucher du sacrifice, la substitution du blier Issac ne dsigne pas seulement le droit de vivre accord l'homme qui a offert sa vie, mais donne aussi la prfiguration de l'agneau qui sera Dieu. Elle annonce que l'acte du sacrifice a transform la victime et, la place de l'individu banal, a fait naitre le sacr.6) Pour Blanchot, la figure d'Abraham passant l'preuve du sacrifice de son fils est examine sous langle de la rflexion sur la littrature mme qui, par le sacrifice du langage, fait natre le sacr.

    En dautres termes, le processus de la naissance du sacr en tant que langage potique, travers lacte dcrire, est prsent de la mme manire que le parcours dAbraham sur le mont Moriah accompagn de son fils Isaac. Lexprience intrieure de lcrivain confront laventure dcrire est comparable ltat desprit dAbraham. Ce cheminement dAbraham est rapport dans la Bible. Quand Isaac, n selon la prophtie de Dieu, atteignit un certain ge, Dieu appela Abraham et lui dit : Prends ton fils Isaac, ton fils unique que tu aimes tant, va dans le pays de Moriah, sur une montagne que je t'indiquerai, et l offre-le-moi en sacrifice. Abraham se leva alors tt le matin, scella son ne et prit avec lui ses deux serviteurs et son fils Isaac. Le lendemain, quand le mont Moriah apparut au loin, il demanda ses serviteurs de rester avec lne et il

    6) Chroniques littraires du Journal des dbats- Avril 1941 - aot 1944, p.535.

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    sachemina vers la destination, en chargeant le bois du sacrifice sur son fils Isaac. Ils arrivrent au lieu que Dieu lui avait indiqu. Abraham construisit alors un autel pour y sacrifier son fils. Mais au moment o il saisit le couteau pour lgorger, l'ange du Seigneur l'appela du ciel : pargne l'enfant, ne lui fais aucun mal. Je sais maintenant que tu respectes mon autorit ; tu ne m'as pas refus ton fils unique.7) Et Abraham sacrifia finalement un blier la place de son fils Isaac. Cest donc le parcours du sacrifice de son fils selon lordre de Dieu qui est apparent la situation identique de lacte dcrire.

    Pour Blanchot qui considre comme similaires lacte dcrire, la posie et la littrature, la figure dAbraham accomplissant la demande de sacrifice symbolise la littrature mme. Si toutes les uvres de Blanchot abordent lexprience dcrire,8) cela signifie en dfinitive quelles se rapportent toutes ce parcours dAbraham. Ce qui importe pour Blanchot nest ni le fils retrouv aprs lavoir offert en sacrifice Dieu ni la bndiction de Dieu pour la descendance dAbraham mais bien ltat intrieur de ce dernier durant le parcours, prouvant le temps de lattente, le silence et le secret, la mort, l'angoisse, la folie, le mourir, lincertitude, lindcision, le non-savoir etc. Cet tat, non dcrit dans la Bible, apparat pourtant entre les lignes. A ce propos, Blanchot voquera labsence de livres dans ses crits ultrieurs.

    7) La Bible, Alliance Biblique universelle, 1997, p.21.8) Citons deux vres comme illustration. Le premier roman de Blanchot Thomas

    l'obscur dcrit le parcours de Thomas vis--vis de la transcendance la recherche de l'origine du monde. Ce qui est considr comme sa dernire vre L'criture du dsastre rsume bien sa pense sur l'ecriture, ou encore sur la forme et le contenu de l'criture auxquels il est parvenu travers l'aventure d'crire.

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    Lacte dcrire plutt que lcrit comme rsultat, entretient un rapport avec ltat psychologique dAbraham au cours de son cheminement de trois jours. Les termes caractrisant ltat intrieur dAbraham deviennent aussi les thmes centraux de la pense de Blanchot. Ces thmes apparaissent systmatiquement dans les uvres de lauteur, du dbut jusqu la fin, tel point quon peut les considrer comme reprsentatifs de lessence de sa pense. Ces memes thmes sont repris dans leur intgralit dans son livre L'criture du dsastre, considr par Blanchot lui-meme comme sa toute dernire vre.

    3. L'angoisse, le secret, la communication

    Lobservation du premier texte intitul De l'angoisse au langage dans le livre Faux pas de Blanchot permet de comprendre ce quest ltat intrieur dAbraham et son rapport avec lacte dcrire.

    Christophe Bident considre ce texte comme de lcrit autobiographique. Selon lui, cet crit est l'un des beaux textes autobiographiques de Blanchot pour langoisse physique, l'angoisse vcue qui y transparat. C'est son autorit qui impose la qualit de la critique, et qui l'impose comme une critique d'crivain.9) Selon Bident, Blanchot a arrang l'ordre de la table des matires de Faux pas en fonction des expriences intrieures des crivains sans tenir compte de l'ordre chronologique de la recherche : les questions du renouvellement du genre romanesque, de la cration et du mythe

    9) Christophe Bident, Partenaire invisible, Vallon, 1998, p.227.

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    s'effacent devant celles que posent la nudit de l'exprience intrieure et son conflit avec le langage.10)

    En observant attentivement la table des matires dresse par Blanchot, on constate qu'aprs avoir achev son histoire d'crivain dans De l'angoisse au langage, il a tout de suite soumis son texte sur Kierkegaard, le Journal de Kierkegaard. Les deux textes traitent dun sujet similaire. Etrangement, on dirait quils sont le fruit dun seul et mme crivain. Et si le premier texte est un texte autobiographique, le second donne limpression dtre un prolongement du premier car lauteur continue parler de lui-mme. Il est impossible de savoir si Blanchot a insr son texte sur Kierkegaard aprs avoir crit De l'angoisse au langage, ou bien s'il a crit le texte autobiographique De l'angoisse au langage dans un souci d'harmonie avec l'crit sur Kierkegaard. Ce qui est certain, c'est qu'il a prouv un sentiment de profonde communion avec Kierkegaard.

    Dans le premier texte, il est en effet question de Kierkegaard travers le thme de langoisse et de la communication alors que dans le texte suivant, ces thmes sont dvelopps plus directement. Aussi les lecteurs ont-ils le sentiment que ces deux textes ont t crits lun aprs lautre. En examinant leur relation travers le contenu de ces deux textes, nous pourrons mieux apprcier la porte de la pense de Blanchot propos de la vie et de lcriture. Ainsi, nous pourrons avancer dans le dbat sur la figure dAbraham prsente ci-dessus.

    Dans son crit, De l'angoisse au langage et dans certains autres

    10) ibid., p.226.

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    crits traitant de la critique, Blanchot parle de la destruction du langage. Mais dans ce texte, en plus du langage, il est aussi question de l'tat paradoxal de l'crivain contraint d'crire dans une situation de privation du langage. Ainsi Blanchot affirme qu'il est comme un hmiplgique qui trouverait dans le meme mal l'obligation et l'interdiction de marcher. Il lui est impos de courir sans cesse pour vrifier chaque mouvement qu'il est priv de mouvement.11)

    Cette situation contradictoire de lcrivain est identique ltat intrieur dAbraham qui sachemine vers le mont Moriah avec son fils Isaac. La responsabilit dAbraham pour garder secret son entretien avec Dieu est de maintenir le temps de l'attente comme son propre temps, et de rester silencieux aux interrogations de son fils concernant leur itinraire vers le mont Moriah. Langoisse dAbraham, situe entre la foi et lthique humaine du pre, sintensifie, se rapprochant de la folie. Le langage humain pour lexprimer nexiste pas. Abraham doit donc surmonter ce conflit intrieur dans le silence et poursuivre sa route. L'crivain non plus n'a rien crire, il n'a aucun moyen d'crire, mais reste contraint par une ncessit extrme de toujours l'crire. Le rien est sa matire de l'criture. L'angoisse se cultive dans une telle condition de solitude, dabsurdit, de contradiction de lcrivain. Selon Blanchot, lcrivain doit comprendre que cette angoisse est en lui-mme, situe chez nulle autre personne que lui-mme. Cette angoisse, il convient mme de la cultiver : Il arrive un moment o le littrateur qui crit par fidlit aux mots crit par fidlit l'angoisse: il est crivain parce que cette anxit fondamentale s'est rvle lui, et

    11) Maurice Blanchot, Faux pas, Gallimard, 1943, p.10.

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    en mme temps elle se rvle lui en tant qu'il est crivain.12) L'angoisse de l'crivain dit l'impossibilit de la communication avec l'autre. Pour l'crivain, le moyen de s'approcher de l'autre est de rester dans sa solitude absolue. Dans ce cas, le seul langage est le silence. Cependant l'angoisse comme intensit extrme ne lui permet pas d'tre seul. L'crivain doit tre rejet hors de lui. Dans cette extermination de l'crivain, l'angoisse, en tant que forme de la communication chez l'crivain, fait de cette communication le sens pris par sa solitude et tirant de cette synonymie une raison nouvelle d'tre angoiss ajoute l'angoisse. Ici, plus langoisse saggrave, plus lacte dcrire en matire du rien continue. Lcrivain lui-mme disparat sans laisser de trace : l'crivain est appel par son angoisse un rel sacrifice du lui-mme.13)

    Dans Le mystre de la critique, il est question du sacrifice du langage, alors que dans le texte De l'angoisse au langage qui dcrit la vie de l'crivain, il s'agit plutot du sacrifice du sujet 'celui qui crit'. En d'autres termes, lorsque l'auteur expose son point de vue sur le sujet dans le texte Le mystre de la critique, il privilgie la disparition du langage usuel au profit de la naissance du langage potique, comme le langage sacr. Mais dans le texte autobiographique qui rvle sa vie d'crivain, il dcrit en dtail l'exprience intrieure ou plutot le combat intrieur que doit mener l'crivain pour faire surgir un tel langage. Cette exprience dcrit la disparition de soi, c'est--dire celle du mourir : ce qui est exig de l'crivain est infiniment plus lourd. Il est ncesssaire qu'il soit dtruit dans un acte qui le mette rellement en jeu. L'exercice de son

    12) ibid., p.11.13) ibid., p.13.

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    pouvoir le force immoler ce pouvoir. Cette ide d'anantissement de son propre pouvoir sera d'ailleurs dveloppe plus tard chez Blanchot travers les notions de don et de passivit. Selon l'auteur, le don ne se rapporte pas au pouvoir d'une libert, ni l'exercice hroque de la vie, mais la passivit du sujet qui laisse son pouvoir au vertige de l'angoisse. La pense de Blanchot sur l'angoisse, le silence, la communication, le sacrifice du sujet dvoile dans De l'angoisse qu langage, apparait plus prcise encore dans le Le Journal de Kierkegaard avec l'emploi des termes perscuteur, perscut, martyr.

    Dans la vie de Kierkegaard, ce qui est le plus souvent voqu, cest le secret du pre assimil un tremblement de terre, le dbat puis lexclusion de ses contemporains. En dfinitive, cela revient poser le problme de communication. Pour Kierkegaard, toute communication directe est impossible : Ce problme prend chez lui une signification particulire. On y trouve une premire expression de ce paradoxe qui fait que ses uvres, sa pense, sont toutes formes de pripties autobiographiques et semblent destines rvler sa vie et qu'en mme temps cette vie, ainsi livre continuellement d'une manire indirecte dans des crits qui la manifestent sous la forme des plus hauts problmes, apparat essentiellement comme ne pouvant tre rvle dans sa vrit et son drame profond.14)

    Pour Kierkegaard, la figure du perscuteur qui dsigne en ralit le monde, inflige des souffrances pouvant conduire la mort, aux perscuts qui ne veulent pas dvoiler le secret. Cette figure traduit

    14) ibid., p.26.

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    la relation de Kierkegaard vis--vis du monde mais aussi sa propre relation envers lui-mme, partage entre le dsir de communiquer avec le monde et de garder le secret jusquau bout. Le perscut finit par mourir : Le martyr lui apparat donc comme un moyen suprme de communication.15) Le martyr est un homme qui garde le silence jusqu' la mort.

    Dans un livre intitul Crainte et Tremblement, Kierkegaard aborde l'tude de la figure du martyr aprs l'avoir personnifie sous les traits d'Abraham. Bien que l'ouvrage Crainte et Tremblement de Kierkegaard expose le cheminement d'Abraham, nous savons pertinement qu'il parle en ralit de lui-meme. Blanchot aussi avait rsolument saisit l'importance de ce point puisqu'il s'est attach ensuite montrer que Kierkegaard avait choisi l'criture comme un moyen unique de communiquer avec le monde et que cet crit possdait les caractristique de l'autobiographie. Selon nous, il existe ainsi un grand nombre de points communs entre kierkegaard et Blanchot. Kierkegaard rvle des aspects autobiographiques travers la figure d'Abraham et Blanchot voque dans le texte Le mystre de la critique l'exprience intrieure de l'crivain travers l'image du cheminement d'Abraham.

    4. Vivre potiquement

    Mais alors, quelle figure de ltre humain Blanchot a-t-il finalement dcouverte en Kierkegaard? Quelle caractristique de

    15) ibid., p.29.

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    lhomme trouve-t-il en Abraham? Quel rapport entretient ce type de figures avec la pense de Blanchot? Blanchot sattache Kierkegaard en tant que figure du pote du religieux. Pour Blanchot, la diffrence entre ses contemporains religieux et philosophes et Kierkegaard se situe dans la manire de penser potique. Le courant de penser de lpoque tait domin par le systme hglien. Mais Kierkegaard dvoile sa propre conception de la foi vritable et du vritable religieux, par analogie avec la foi dAbraham dans Crainte et Tremblement : Ce n'est point un systme que cela. Cela n'a rien voir avec le systme.16) Blanchot poursuit : Il a vivement affirm contre Hegel qu'il y avait dans toute me quelque chose qui ne pouvait devenir public, un mystre qui la constituait dans sa ralit tragique et qui ne pouvait pas se parler soi et que sa vie tait comme un livre sous le squestre divin.17)

    Ce qui importait pour Kierkegaard, ntait pas les merveilles de la terre promise, tre bni par Dieu mais le cheminement de trois jours vers le mont Moriah avec son fils Isaac, en gardant secrte la promesse faite Dieu. En dautres termes, Abraham ntait pas un grand homme pour sa force et sa raison hroques suprmes : Mais de tous, Abraham fut le plus grand : grand pour l'nergie dont la force est faiblesse, grand pour la sagesse dont la forme est dmence, grand par l'amour qui est haine de soi.18) Ce qui importait pour Kierkegaard, ce ntait pas de faire un systme logique de la pense mais rendre compte des frissons de la pense. Derrire sa

    16) Sren Kierkegaard, Crainte et Tremblement, traduit du danois et prsent par Charles le Blanc, PayotRivages, 2000, p.43.

    17) Faux pas, p.30.18) Crainte et Tremblement, p. 55.

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    description dAbraham, se cache en ralit lautoportrait de Kierkegaard qui apparat ainsi : Cet homme, du reste, n'tait pas un penseur. Il n'prouvait nul besoin d'aller au-del de la foi. Le plus beau destin lui paraissait celui d'tre rappel la mmoire des hommes comme le Pre de la foi, et il trouvait un destin enviable de la possder, ft-ce l'insu de tous.19) Abraham, chevalier de la foi, qui possdait les plus hauts secrets, nest pas un penseur mais a accompli le rle du pote. Abraham, modle exemplaire par rapport la question de Kierkegaard sur le devenir chrtien, nest pas un penseur qui accomplit sa foi travers la morale claire de la logique et du systme. Il est plutt celui qui conserve sa foi dans la crainte et les frissons : C'est le rle du pote de s'occuper en imagination de l'idal religieux, au lieu de s'efforcer de le raliser dans son existence.20) Blanchot rappelle, en accordant de lattention la figure correspond lesthtique de Kierkegaard que lon peut peut-tre vivre potiquement dans le religieux. On ne peut pas vivre potiquement dans la morale.21)

    Dans ce cas, peut-on affirmer que Blanchot est aussi un pote? Blanchot pose lui-meme la question et y rpond dans le Le mystre de la critique. Qu'est-ce qu'un critique? Un pote, mais qui s'approche de la posie par le non-etre, en ce sens qu'il ne veut pas etre pote, un romancier qui participe au secret de la cration romanesque et qui pourtant dit non au roman.22) Blanchot parle bien de la critique qui repose sur l'exprience potique dans le

    19) ibid., p.46.20) Faux pas, p.28.21) Chroniques littraires du Journal des dbats, p.430.22) ibid., p.535.

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    mouvement d'crire et non pas de la critique existante en tant que genre. Il affirme que, dans ce cas, le critique est dj le pote. A cet gard, il faut souligner que Lvinas a intitul Le regard du pote son premier chapitre dans Sur Maurice Blanchot. Selon Lvinas, Blanchot dit que la posie ne fait pas partie du jour ou de la raison mais plutot d' une autre nuit ou du dehors. Et puis le mouvement dcrire erre sans cesse autour de ce critre. Lvinas affirme que Le langage potique qui a cart le monde laisse rapparatre le murmure incessant de cet loignement, comme une nuit se manifestant dans la nuit. Ce n'est pas l'impersonnel de l'ternit, mais l'incessant, l'interminable, recommenant sous la ngation qu'on puisse en tenter. Puis il ajoute que pour Blanchot, crire, cest mourir : L'uvre littraire nous approche de la mort, car la mort est ce bruissement interminable de l'tre que l'uvre fait murmurer. Dans la mort comme dans l'uvre, l'ordre rgulier se retourne puisque le pouvoir y mne ce qui ne peut s'assumer. De sorte que la distance entre la vie et la mort est infinie. Comme est infinie l'uvre du pote devant l'inpuisable langage qui est le droulement ou plus exactement l'interminable roulis ou mme le remue-mnage de l'tre. La mort, ce n'est pas la fin, c'est le n'en pas finir de finir.23)

    Si Abraham fait sens pour Blanchot, c'est parce qu'il reprsente la mort interminable, la situation de poursuivre sans arret le mourir. De meme que Kierkegaard refuse le systme hglien cause de la foi qui a un caractre absurde et paradoxal, de la foi en tant que relation entre l'individu et l'absolu, et de la suspension thologique de l'thique, Blanchot rejette le concept de la mort dialectique de

    23) Emmanuel Lvinas, Sur Maurice Blanchot, Fata Morgana, 1975, p.16.

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    Hegel travers la distinction qu'il tablit entre le mourir et la mort. Alors que Hegel pensait la mort comme une puissance du sujet qui peut dominer et controler le monde de la connaissance, Blanchot a pens que la mort tait impossible et que c'tait un mouvement indcis qui ne conduisait nulle part.

    Pour expliquer ce mouvement indcis, Blanchot utilise le terme mourir. Pour lui, la mort est d'un instant, mais mourir est sans fin.24) Il sagit dune existence qui accomplit sa dissolution, une altration infinie sous forme de souffrance ou de jouissance mais sans faire montre dune existence de lidentit permanente.25) Cette pense sur le mourir qui se dveloppe plus tard comme un concept de passivit du mourir, est un thme qui apparat le plus rgulirement dans les uvres de Blanchot. On peut dire que cest lessence de la pense de Blanchot. Pour lui, Mourir, c'est une sorte de vocation.26)

    5. Pour conclure

    Dans L'criture du dsastre considr comme la dernire vre de Blanchot, tous ses cris de dtresse qui ponctuent partout l'vre, se terminent par une dernire phrase : Libre-moi de la trop longue parole. Cette trop longue parole concerne le langage unique qui existe dans le cheminement d'Abraham, c'est--dire la posie selon Blanchot, et la situation de mourir laquelle l'crivain est sans cesse confront. Peut-etre que l'essence de la posie est quelque chose

    24) LEntretien infini, p.550.25) ibid., p.551.26) A ce sujet Derrida appelle l'crit de Blanchot autobio-thanatographie.

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    d'inexprimable? Si Blanchot a voqu Abraham en mentionnant Hlderlin, c'est sans doute parce qu'il lui reconnassait la vertu d'avoir le plus fidlement su arracher la posie, dans la souffrance, dans le mourir. Et si Blanchot a voqu Abraham au sujet de Kafka, c'est sans doute parce qu'il adhre aux propos suivants : Hsitation devant la naissance. S'il y a une transmigration des ames, la mienne n'a pas encore atteint le degr le plus bas. Ma vie est hsitation devant la naissance.27) Hsitation devant la naissance, donc 'Je ne suis pas encore n' signifie, paradoxalement, que j'ai pas encore accompli la mort et que je dois continuer mourir. En dautres termes, lexistence plonge dans un tat dexil, se trouve dans lerreur. Sur ce point, Lvinas souligne la diffrence entre Heidegger qui voque lart faisant luire la vrit de ltre et Blanchot qui voque lart qui mne lerreur de ltre, c'est--dire lcriture.28)

    Selon Blanchot, lcrivain qui suit le mouvement dcrire, se trouve plong dans le mme tat de vide et dangoisse quAbraham, entre la foi parfaite et la folie, sur le chemin pour sacrifier son fils Dieu. Lexistence nomme 'Abraham' est

    27) Franz Kafka, Journal, Livre de Poche, 1994, p.607.28) L'art seul permettrait de dcoller, s'il ne fallait pas dans cette conquete de

    l'extriorit demeurer jamais exclu de cette extriorit, car, si elle devait offrir sjour au pote, elle y aurait perdu son tranget meme. Cet impensable o mne, sans y mener, le pome c'est--dire l'vre - Blanchot l'appelle etre. Dj pour Heidegger l'art, au-del de toute signification esthtique, faisant luire la vrit de l'etre, mais il avait cela en commun avec d'autres formes d'existence. Pour Blanchot la vocation de l'art est hors pair. Mais surtout, crire ne conduit pas la vrit de l'etre - l'etre comme lieu d'errance, l'inhabitable. De sorte qu'avec autant de droit on peut dire que la littrature n'y mne pas, puisqu'il y est impossible d'aborder. Erreur de l'etre - plus extrieure que la vrit. Pour Heidegger, une alternance du nant et de l'etre se joue aussi dans la vrit de l'etre, mais Blanchot, contrairement Heidegger, ne la nomme pas vrit, mais non-verit. Emmanuel Lvinas, Sur Maurice Blanchot, Fata Morgana, 1975, p.19.

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    langoisse elle-mme, remplace par la mort de lautre. Cette angoisse signifie que la mort dIsaac est dj en train de saccomplir lintrieur dAbraham. Abraham ananti peu peu, devient un espace vide pour raliser la mort de lautre. Comme on ne peut pas aborder le thme de lexistence devant un sujet qui va sanantir, lexistence est temporairement suspendue ou bien elle se trouve dans un tat indtermin.

    Finalement, ltat dangoisse aprs la disparition du sujet, son anantissement, laisse place lAnonyme. Cest ce moment quAbraham passe du statut de personne particulire celui de personne universelle : La rvlation a t reue par un seul, mais l'attente a t partage par tous et les a consacrs comme peuple, peuple de prtres.29) Mais ce qui est important ici, selon lexpression de Lvinas, ce nest pas tre autrement mais autrement qutre. Cela signifie quAbraham doit continuellement tendre vers un autre Abraham. Abraham, chevalier de la foi, doit prendre son chemin chaque fois dans l'incertitude et le non-savoir. Dans ce chemin, il n'y aurait pas de foi, mais seulement le mouvement de la foi qui ne cesse de s'accomplir par plusieurs Abraham. Chaque fois, Abraham est un autre Abraham. Il est en passe de devenir un autre Abraham. Pour Blanchot, la rptition de l'preuve d'Abraham dsigne la situation de l'criture et l'preuve d'Abraham dmontre exactement la figure de l'crivain. S'il y a un modle susceptible de rsumer toute sa pense, ce serait la figure d'Abraham : Dur, long chemin de justice. Comme le cheminement d'Abraham parti seul, allant vers tous - de la particularit l'universalit - sous la menace des nuits et

    29) Maurice Blanchot, Paix, paix au lointain et au proche, dans Difficile justice : Dans la trace d''Emmanuel Lvinas, Payot&Rivages, 1999, p.10.

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    l'esprance des jours.30) Blanchot ne parvient-il pas nous faire sentir le cheminement dAbraham comme celui de sa propre vie, nous lecteurs qui lisons ses uvres cet instant?

    30) ibid., p.12.

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    Bibliographie

    Maurice Blanchot, Faux pas, Gallimard, 1943. , L'Entretien infini, Gallimard, 1969. , L'criture du dsastre, Gallimard, 1980. , Chroniques littraires du Journal des dbats- Avril

    1941 - aot 1944, Gallimard, 2007. , Paix, paix au lointain et au proche, dans Difficile

    justice : Dans la trace d'Emmanuel Lvinas, Albin Michel, 1999.

    Christophe Bident, Partenaire invisible, Vallon, 1998.Emmanuel Lvinas, Sur Maurice Blanchot, Fata Morgana, 1975.Franz Kafka, Journal, Livre de Poche, 1994.Jacques Derrida, Demeure, Galile, 1998.Jean Starobinski, Thomas l'Obscur, chapitre I, Critique, n229, Minuit,

    1966. Philippe Fries, La thorie fictive de Maurice Blanchot, L'Harmattan,

    1999.Sren Kierkegaard, Crainte et Tremblement, traduit du danois et

    prsent par Charles le Blanc, PayotRivages, 2000.La Bible, Alliance Biblique universelle, 1997.

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    : Maurice Blanchot, Abraham, critique, criture, sacr

    : 2013. 12. 25. : 2014. 2. 2 : 2014. 2. 6

    Maurice Blanchot, la recherche du chemin d'Abraham1. Pourquoi donc Abraham propos de lcrit de Blanchot?2. Ecrire, c'est faire naitre le sacre3. L'angoisse, le secret, la communication4. Vivre potiquement5. Pour conclureBibliographie