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Corrosion sous contraintes des verres d’oxydes
Matteo CiccottiCNRS
Laboratoire de Colloïdes, Verres et NanomatériauxUniversité de Montpellier II
Plan du cours
• La résistance du verre: fatigue et CSC
• Phénoménologie
• Modélisation
• Contribution des étude par AFM
La résistance du verre:fatigue et CSC
Le verre: un matériau incontournable
Habillage de façade d’immeuble
Industrie automobile
Laine de verreFibre optique
Alimentation
Une grosse limite: la fragilité mécanique
A) Dépassement des contraintes Fracture critiquev ~ km/s
B) Propagation très lente de fissures, favorisée par l’interaction avec l’environnement
Contrainte maximale :
Amplification de contraintes :
Inglis (1913), Griffith (1920)
Les causes de la fragilité
Défauts à la surface
40 µm
Coupe Indentation
La résistance mécanique
σ > σmPopulation de défauts
Statistiques des événements extrêmes (le défaut le plus grand)
Distribution de Weibull :
50 75 100 125 150
1
2
5
10
20
40
60
80909598
99.5
WEIBULL DISTRIBUTION
Failu
re P
roba
bilit
y (%
)
STRENGTH (MPa)
La fatigue statique
Même si les contraintes sont inférieures à la résistance (inerte)
0 << σ < σm
la durée de vie d’un composant en verre est limitée par la fatigue statique
Le phénomène est dû à la croissance par corrosion sous contraintes des microfissures à la surface du verre
La fatigue statique
Importance des conditions de travail d’un produit en verre:
Boissons pétillantes
Parois d’aquarium
Rouleau de fibres
Fenêtre inclinée
Quelques solutions…
• Finition des surfaces• Couches protectrices• Relaxation des contraintes
résiduelles (annealing)• Réduction des coefficients de
dilatation• Trempe thermique• Trempe chimique• Modification des compositions
– Augmentation de la résistance– Réduction de la CSC– Seuil de propagation– Guérison des fissures
Une solution pour le stockage à long terme des déchets nucléaires?
Fracturation par choc thermique
Risque de lisciviation des éléments radioactifs
Image CEA
Présent / Futur ?
Écrans flexibles
Écrans tactiles
Présent / Futur ?
Vers un matériau structurel?
Passerelle sur le Grand CanyonNational Glass Center,
Sunderland, UK
Phénoménologie
Deux paradigmes de verre
SiO
Na
Verre SodocalciqueVerre de Silice
« Normal »« Anomale »
Structure ouverte et flexible Mobilité du sodium
Mould and Southwick (1959)
Effet de l’humidité
Courbes de fatigue statique
Effet de l’abrasion
Lois phénoménologiques deMould and Southwick :
Une autre forme empirique :
Sodocalcique
La résistance augmente avec la rapidité du taux d’application des contraintes
La fatigue dynamique
Charles (1958)
Cinétique de propagation d’une fissure individuelle
DCBDouble Cantilever Beam
DCDCDouble Cleavage Drilled Compression
Configurations expérimentales typiques en mode I (ouvrant):
DTDouble Torsion
Cinétique de propagation d’une fissure individuelle
Zone I : corrosion sous contraintes
Zone II : propagation limitée par la diffusion
Zone III : fracture rapide
Zone 0 : seuil de propagation
n entre 10 et 50
Durée de vie
Pour les cas d’une contrainte constante on peut estimer le temps de vie:
Interprétation de la loi de Wiederhorn
Wiederhorn, JACS (1967) Wiederhorn and Bolz, JACS (1970)
Zone I
Sodocalcique
Effet de la température et de l’humidité
Wiederhorn, JACS (1967)
SodocalciqueZone 0 : seuil
Wan et al (1990)Wiederhorn and Bolz (1970)
Le seuil est essentiellement indépendant de la température, mais il baisse avec l’humidité
T = 2-5 °C
T = 25 °C
T = 80-90 °C
Effet de la température et de l’humidité
Zone III & fracture critique
Kc est indépendant de H et varie peu avec T
La zone III est indépendante de H, mais v continue àaugmenter avec T Wiederhorn et al JACS (1974)
SodocalciqueSilice
Effet de la composition du verre
Zone I
Difficile d’établir une relation satisfaisante
En général la vitesse de propagation augmente avec le contenu d’alcalins
Mais en présence de plusieurs oxydes le comportement est complexe
Zone 0
Fort augmentation du seuil de propagation avec le contenu d’alcalins
Seuil non mesurable dans la siliceWiederhorn and Bolz, JACS (1970)
Effet du pH en ambiance liquide
Silice Sodocalcique
Wiederhorn et Johnson, JACS (1973)
Zone I
L’augmentation du pH favorise la corrosion
Augmentation de la vitesse de propagation
Diminution de la pente b
Effet du pH en ambiance liquideSodosilicate
Gehrke et al, Glastech Ber, 1990
Zone 0
Effet du pH sur le seuil de fatigue
Influence sur les échanges ioniques
0.40 0.45 0.50 0.55 0.60 0.65
10-8
10-7
10-6
10-5
10-4
10-3
PH2O (mmHg)
14.4 6.8 0.004
Open = Corning 7980Solid = Fused Quartz
Cra
ck V
eloc
ity (m
/sec
)
KI (MPa*m1/2)
Silice
Effet du contenu d’eau dans le verre (?)
Suratwala, ACS Fall Meeting (2002)
La vitesse de propagation augmente avec les contenu d’OH
Dépolymérisation du réseau
Baisse des modules élastiques et de la viscosité
Le verre étant un matériau hors équilibre ses propriétés ne sont pas uniquement définies à partir des variables thermodynamiques, mais dépendent aussi de l’histoire thermique passée
On peut résumer celle-ci par la notion de la température fictive Tf
Effet de Tf sur les propriétés de rupture/propagation defissures
Effet de la température fictive (?)
Tool (1946)
Koike and Tomozawa, JNCS (2006)
Silice
Modélisation
Critère de Griffith :
Taux de restitution de l’énergie :
Condition d’équilibre/propagation :
Griffith (1920)
Notions de base sur la fracture
Contraintes à la pointe de fissure :
KI : Facteur d’intensité des contraintes en mode I
Équivalence :
Irwin (1958)
Notions de base sur la fracture
Deux approches pour expliquer une dépendance G(v)
Irwin, Orowan, Dugdale, Barenblatt, Maugis
A) Dissipation d’énergie dans une zone de process
B) Cinétique thermiquement activée au niveau atomique
Théorie de Charles et Hilligs (1958)
La réaction de corrosion de la surface du verre est accélérée par la présence de contraintes
L’intensification des contraintesen proximités des défautscomporte une corrosion localement accélérée qui tend à reduire le rayon decourbure à la pointe du défaut
Les contraintes à la pointeaugment progressivement jusqu’à rupture
Il s’agit juste de la première phase de la croissance
Le rayon à la pointe se stabilise au niveau de la maille moléculaire ~ 0.5 nm
Mécanisme de corrosion sous contraintes
dans les verres de silicates
Mécanisme en trois étapes:
(a) Adsorption d’une molécule d’eau sur un pont siloxane(b) Réaction concertée avec échange d’un proton et d’un électron(c) Rupture de la liaison hydrogène et séparation des groupes silanolsMichalske et Bunker, J. Appl. Phys. (1984)
Mécanisme de corrosion sous contraintes
dans les verres de silicates
Molécules réactives:
1)Capables de donner un proton d’un cotéet un électron de l’autre
2)Diamètre inférieur à0.5 nm pour accéder à la pointe de fissure
Eau:H2OAmmoniac: NH3Hydrazine: NH2-NH2Formamide: CH3NOMichalske et Bunker, J. Appl. Phys. (1984)
Réactions de corrosion sous contraintes
dans les verres de silicates
Pour pH acide ou neutre:
Réaction alternative à fort pH:
Dissolution du sodium par hydrolyse:
White et al. J Am Cer Soc (1987)
5
Charles J App Phys (1958)
Interprétation selon la cinétique chimique
Wiederhorn et al. JACS (1974)
Depiégeage thermiquement activé :
Thomson et al. (1971)
Propagation sous-critique
Seuil de propagation dynamique
Barrière uniforme: propagation dynamique pour
Une distribution statistique de barrières conduit à un comportement critique en avalanches quand G approches GC
Effet de l’environnement : corrosion sous contrainte
Charles et Hillig (1962) Wiederhorn and Bolz (1970)
Propagation sous-critique
Charles et Hillig (1962) Wiederhorn and Bolz (1970)
Valeurs de l’énergie de fracture
Guérison des fissures
Propagation, guérison et réouverture des fissures (hystérésis)
Vieillissement d’une fissure dans un verre sodocalcique
Michalske and Fuller, JACS (1985)
Schéma
Staviridis and Holloway, Phys Chem Glass (1983)
Le seuil de refermeture Gg est consistant avec l’énergie d’adhésion par liaisons hydrogènes
Silice
b1
E25.0K volI ν−
ε−=∆
Iapplied,Itotal,I KKK ∆+=
Nature du seuil dans le verre sodocalcique
Quand la vitesse est suffisamment faible la diffusion du sodium devance la propagation et forme une zone d‘écrantage.Les contraintes à la pointe sont relaxées, K* diminue et la vitesse chute
Bunker et Michaslke (1989) Fett et al. Eng Frac Mech (2005).
Zone II : propagation limitée par la diffusion des molécules réactives
Le confinement progressif comporte une diminution progressive du coefficient de diffusion
Lawn, Mat Sci Eng (1974)
Tomozawa, Ann Rev Mat Sci (1996)
Nature de la corrosion sous contraintes?
Ou endommagement du verre causé par la pénétration d’eau en volume?
- La diffusion d’eau augmente exponentiellement avec les contraintes de tension
- Une augmentation du contenu d’OH en volume faiblit le réseau du verre
- et accélère la relaxation structurale (réduction locale de Tf)
Michalske et Bunker, J. Appl. Phys. (1984)
Wiederhorn and Bolz, JACS (1970)
Réaction chimique individuelle à la pointe de fissure?
Anomalie de température
Crichton et al, JACS (1999)
Inversion pour T < 50 C
Condensation capillaire àla pointe de fissure ?
La vitesse de fissure diminue en augmentant la température
L’équilibre de adsorption de l’eau gouvernerait le taux de réaction
Verre de phosphateVerre silice
Suratwala et al, JNCS (1999)
Contributions des études par AFM
« Le subtil rôle de l’eau »
L’opportunité des mesures à l’échelle nanométrique
L’échelle nanométrique est pertinente pour déterminer la nature des mécanismes fondamentaux qui gouvernent les propriétés mécaniques des verres d’oxydes
Les microscopies à sonde locale permettent de mesurer des hétérogénéités dans les propriétés physico-chimiques à l’échelle submicrometrique
Établir un pont entre les mesures en volume des propriétés structurales et les simulations par dynamique moléculaire
Un nouveau comité techniqueTC09 : Glass Nanomechanics
Force gaugeHeadsVeecoDimension 3100Nanoscope IIIa
‘Tapping’ mode
• Atmosphère contrôlée : N2 + H2O• RH : ~1% ⇒ 80% ± 2% T: 22.0 ± 0.5 °C
Étude in-situ de la propagation lente
Propagation de fissure observée par AFM
KI
v
v : 10-8 – 10-12 m/s
S : 50 nm – 50 µm
100 nm
10 nm
Signal de phase
50 nm
Wondraczek et al. J Am Cer Soc (2006)Ciccotti et al. J Non-Crist Solids (2008)
Observation in-situ d’un condensat liquide
Lc ~ 1 µm
HH22OO Hc
• Distance critique : Hc• Profil d’ouverture : 2uy(X)
Lc = f
Condensation capillaire à la pointe
rK
Hc
Equation de Irwin :
• Équilibre mécanique : équation de Laplace
• Équilibre thermodynamique : équation de Kelvin
1. Simulation auxÉléments Finis
Calibration du profil d’ouverture de la fissure
2. Interférométriedu coin d’air
Pallares at al, soumis (2008)
Dans les premiers 30 µml’équation de Irwin est
valable à 1%
L
Hc
L
HH22OO
HH22OO
Hc
KI
Deux hypothèses limites
A ) Évaporation lente : volume constant
B ) Évaporation rapide : distance critique
Équilibre !!
Grimaldi et al. Phys Rev Lett (2008)
Les données supportent l’hypothèse B
La longueur du condensat est déterminée par une condition d’équilibre !
Pas de dépendance de la vitesse !
Pourquoi la distance critique est si grande?
Modèle de VdW pour les surfaces mouillantes
Hc = 2 rK +3 e
rK (nm) e (nm)
RH (%) RH (%)
Prémouillage des surfaces de fracture
L’épaisseur du film liquide dépend de:
• Densité de charge de surface Séparation des SiOH en fonction du pH
• Interaction double coucheÉchange ionique
• Traces d’impuretés
• Structuration de l’eau
• Recombinaison ionique
Rugosité des surfaces de fracture
RMS : 0.4 nm on 10x10 µm2
• Fluctuations de l’épaisseur du film• Barrières au mouillage• Nucléation de ponts capillaires• Influence sur la taille et sur la cinétique de croissance
280 µm
D
rK
Conséquences
HH22OO
HH22OO
HH22OOHH22OOHH22OO HH22OOHH22OO
HH22OO
HH22OO
ou
1. Cinétique de transport
Accès facile des molécules d’eau à la pointe de fissure
Réduction du plateau de la région II à forte humidité
Wiederhorn, JACS (1967)
2. Mécaniques
∆P~-100 atm à l’intérieur du condensat (Laplace)
Effet ventouse
Altération des réactions chimiques
3. Chimiques
Corrosion + Échange ionique
Changement des concentrations ioniques
pH
Propriétés de mouillage
Conséquences
HH22OO
COCO22
HH22OONaNa++
Postdoc LCVN ANR !
A température ambiante le verres est censé être le prototype de matériau fragile
Zone de process prévue de l’ordre du nm (σy ~ 10 GPa)
Présence de défauts de taille de l’ordre du nm
Les forts contraintes à la pointe peuvent accélérer la relaxation structurale
La pénétration d’eau implique une réduction de la viscosité locale qui pourrait accélérer ultérieurement le phénomène
Nanoductilité à la pointe de fissure ?
La structure amorphe empêche la propagation de dislocations
Observation in-situ de la formation de cavitéesen pointe de fissure
Aluminosilicate RH 45 % v ~ 10-11 m/s
Le phénomène nécessitedes vitesses extrêmement faibles (<1010m/s)
Célarié et al. PRL (2003)
Technique FRASTA
Identification d’une déformation non linéaire à la pointe
Observations contre l’hypothèse de nanoductilité
Guin et Wiederhorn PRL (2004)
Étude post-mortem des surfaces de fracture opposées
Cavités à la pointe de fissure…
…ou rugosité amplifiée par la forte déformation de la surface??
Fett et al, Phys Rev B (2008)
Observation AFM de la diffusion du sodium dans les verres sodocalciques
Étude post-mortem sur une fissure d’indentation vieillie
L’interdiffusionentre H3O+ et Na+
Nghiêm, thèse, Universite Paris-VI, 1998.
Cartographie EDX su sodium
Image AFM
Croissance locale de nodules lors du passage de la fissure.
5 µm30 nm V ≈ 1 nm/s
Étude in-situ sous azote + 45% RH
Verre sodocalcique
La diffusion du sodium est causée par le fort gradient de contraintes induit par la pointe de fissure
Célarié et al., JNCS (2007)
Rôle de l’eau dans la diffusion du sodium
Verre sodosilicate RH 45 %
L’interdiffusion avec les ions H3O+ est le facteur limitant pour la migration du sodium.La migration du sodium comporte une relaxation de contraintes à la pointe de fissure (cause du seuil)
Célarié et al. JNCS (2007)
Synthèse
Rôle de l’eau dans la propagation de fissures dans les verres d’oxydes
1) Réaction concertée à la pointe de fissure
2) Film d’eau aux surfaces de fissure
3) Condensation capillaire à la pointe de fissure
4) Diffusion d’eau dans la matrice du verre
5) Eau préexistante dans la structure du verre
6) Interdiffusion avec les cations alcalins
Microscopie confocale Raman à haute résolution pour mesurer contraintes locales et taux d’OH
Résolution spatiale de 300 nm sur le
silicium
Mesure sur la silice? Information sur les contraintes, mais
aussi sur la densitéd’OH, la température
fictive …
Schmidt et al. Vibr Spectr (2006)
Poste de MdC au LCVNPrintemps 2009 !
Pour approfondir:
B Lawn (1993) Fracture of Brittle Solids, 2nd ed, Cambridge University pressJ Barton and C Guillemet (2005) Le Verre, science et technologie, EDP
SciencesR Gy (2003) Stress corrosion of silicate glass: a review. J Non-Crist Solids,
316, p.1-11M Tomozawa (1996) Fracture of glasses. Annu. Rev. Mater. Sci. 26, p 43-74
Remerciements:
M. George, A. Grimaldi, G. Pallares, C. Marlière, F. Célarié, LCVN, Montpellier
L. Wondraczek, Corning, FranceE. Charlaix, L. Bocquet, LPMCN, LyonC. Frétigny, ESPCI, ParisS. Roux, ENS-CachanM. Ramonda, LAIN, MontpellierE. Bouchaud, D. Bonamy, L. Ponson, CEA-SaclayG. Prevot, JP Fromental, P. Solignac, LCVN, Montpellier
Merci pour votre attention !