ÉlÈves perturbateurs et troubles des conduites et du

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ÉLÈVES PERTURBATEURS ET TROUBLES DES CONDUITES ET DU COMPORTEMENT Tentative de définitions et de modalités de prise en charge (mars 2021)

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ÉLÈVES PERTURBATEURS ET

TROUBLES DES CONDUITES ET DU

COMPORTEMENT

Tentative de définitions et de modalités de prise en charge

(mars 2021)

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SOMMAIRE

I- Les Elèves perturbateurs .................................................................................... 3

II- Les troubles des conduites et du comportement : une tentative de définition .. 4

1. Écoles de pensée en psychologie et classifications ............................ 4

A- Des points communs entre définitions .............................................. 4

B- Le DSM-IV : l’école américaine et l’influence de la théorie comportementaliste ............................................................................................. 5

C- la CIM-10 : la classification de référence internationale ................... 6

D- La CFTMEA : l’approche psychanalytique ........................................ 7

E- Un essai de définition globale ......................................................... 11

F- Essai de taxinomie ......................................................................... 13

G- Entre TCC et troubles psychotiques ............................................... 21

2. Des manifestations ayant un impact direct sur les apprentissages ... 21

III- La prise en charge des jeunes atteints de TCC ............................................. 24

1- Dans le milieu spécialisé : Les ITEP .................................................. 24

A- Le thérapeutique ............................................................................ 25

B- L’éducatif ........................................................................................ 25

C- Le pédagogique .............................................................................. 26

3. Dans le milieu ordinaire : l’école, la classe ........................................ 26

D- Dans l’école : un milieu global à adapter ........................................ 26

E- Dans la classe : des adaptations particulières ................................ 30

F- Troubles du comportement et pédagogie au sein des classes de droit commun 33

4. Annexe 1 : Grille d’Observation du comportement (C. S. Marguerite-Bourgeoys) 46

5. Annexe 2 : contrat « être élève » ....................................................... 48

6. Annexe 4 : le cahier de brouillon ....................................................... 50

Sitographie :............................................................................................. 51

Bibliographie : .......................................................................................... 51

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es jeunes atteints du trouble des conduites et du comportement sont sans doute pour les éducateurs ou les pédagogues les plus difficiles à aborder. Ils se présentent à nous comme des jeunes en apparence ordinaire,

capables de réflexions pertinentes, attachants en relation duelle, et pourtant dans un groupe ou face à l’autorité, ils deviennent bien souvent, par leur comportement, la cible de ceux qui sont là pour les faire grandir. Ces jeunes à l’esprit troublé sont ceux qui troublent sans doute le plus les esprits des adultes qui dans les classes, dans les cours d’école ou dans les lieux, les accueillent.

Ce qu’il est essentiel de comprendre pour pouvoir passer outre les attitudes qui semblent de prime abord paradoxales de ces jeunes, c’est que ces derniers souffrent de pathologies psychiques souvent importantes, répertoriées comme telles avec des appellations différentes, par les différents classements des maladies existants. Pour accueillir ce genre d’élève, il est donc nécessaire de connaître ces difficultés spécifiques afin de pouvoir adapter sa pédagogie, adapter ses manières de faire, voire même adapter sa manière d’être. Ainsi, je vais tenter d’exposer quelles sont les différentes définitions de ces troubles, pour ensuite voir les manières dont ces jeunes peuvent être accueillis en institution, et en classe.

I- Les Elèves perturbateurs Les élèves dit « perturbateurs » ne sont pas porteurs de troubles

psychologiques, et donc ne sont en situation de handicap. Selon Moignard et Rubi l’élève perturbateur est « celui qui remet en cause, par

une attitude ou un comportement déviant, l’ordre scolaire établi dans l’établissement. L’élève perturbateur est défini comme tel par les personnels ou une partie des personnels de l’établissement, en fonction des critères normatifs que ces personnels édictent en matière de respect des règles et de reconnaissance de leur autorité1 ».

Ainsi un élève perturbateur peut ne pas être considéré comme tel par un autre enseignant...De plus, l’élève perturbateur aura un comportement perturbant l'environnement scolaire, mais qui peut estomper à la suite d'une intervention ponctuelle. En revanche, l’élève ayant des troubles du comportement perturbera de manière importante l'environnement global du jeune et nécessitant une intervention intensive.

1 Moignard, Benjamin, et Stéphanie Rubi. « Des dispositifs pour les élèves perturbateurs : les collèges à l'heure de la sous-traitance ? », Carrefours de l'éducation, vol. 36, no. 2, 2013, p 43.

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Les troubles des conduites et du comportement

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II- Les troubles des conduites et du comportement : une tentative de définition

Nous évoquons ici, une tentative. En effet, comme nous pourrons le voir tout le

long de ce développement, la définition afférente à ce que sont les Troubles des Conduites et du Comportement revêt de nombreux aspects, complexes et très divers. Une définition monolithique est simplement impossible. Dès lors, dans cette partie nous exposerons dans un premier temps les différentes approches de ces troubles en fonction des écoles de psychologie2 auxquelles ces-dernières seraient rattachées. En effet, la psychologie n’est pas une discipline monolithique. Chaque orientation empruntée entraînant des classifications spécifiques, les différences qui la traversent, donnent aux troubles des conduites et du comportement des définitions et des axes de travail qui sont en conséquence, différents. Dans un deuxième temps, nous tenterons d’expliquer les problématiques de ces jeunes en passant par une définition plus globale. Enfin, dans un dernier temps, nous exposerons quelles peuvent être les différentes manifestations de ces troubles impactant la vie de tous les jours, mais également les apprentissages.

1. Écoles de pensée en psychologie et classifications

A- Des points communs entre définitions En premier lieu, quand on tente d’envisager les pathologies de ces jeunes aux

comportements troublés, toutes les classifications évoquent les « Troubles ». Le concept de « troubles » en santé mentale « renvoie à un ensemble de conditions morbides susceptibles de caractériser l’état de dysfonctionnement comportemental, relationnel et psychologique d’un individu en référence aux normes attendues à son âge3 » ou comme le définit le Petit Robert « une modification pathologique de l’organisme ou du comportement (physique ou mental) de l’être vivant ». Ces deux définitions nous éclairent donc sur le fait que lorsqu’une personne est atteinte de troubles, lorsqu’elle est troublée, elle souffre de dysfonctionnement par rapport à la moyenne, par rapport à quelque chose qui devrait se situer dans la norme attendue. En outre, le mot de « trouble » porte toujours la marque du pluriel : les TCC sont donc une série d’actes qui ne peuvent entrer dans la définition que l’on pourrait faire d’une conduite ou d’un comportement « normal ». Ce sont donc les symptômes qui ont tendance à définir telle ou telle pathologie.

En conséquence, chaque école, replace les actes posés dans un contexte et dans un temps donné. En effet, à titre d’exemple : la période du « non » systématique est normale chez l’enfant de 2 ans ; à 6 ans, cela devient inquiétant ; et si une jeune vole une fois ses parents, c’est une bêtise de jeunesse, si c’est tous les jours, cela peut être attribué à une pathologie.

Enfin, les différentes approches prennent en compte sous des noms parfois différents et de manières éparses les troubles relevant des conduites (« transgressions des règles sociales », donc on parle des actes posés d’où le pluriel) et ceux relevant

2 Cette sous-partie pourra également permettre à ceux qui le voudraient de pousser plus avant leur recherche tout en connaissant les tenants et aboutissants des lectures qu’ils pourraient faire. 3 Rapport ISERN sur les troubles de la conduite, 2005

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du comportement (« réaction émotionnelle inadaptée4 », donc on parle de l’état d’être du jeune d’où le singulier). C’est la classification française des troubles mentaux de l’enfant et de l’adolescent qui, comme nous allons le voir, les groupe dans une même catégorie à partir de son édition de 2000. Les autres classifications, DSM-IV et la CIM-10, qui les avaient pris en compte plus tôt, évoquent ces deux types de troubles dans des chapitres différents.

La présentation qui suit envisage de resituer de futures lectures dans des contextes particuliers, et de porter un regard large sur la manière d’envisager ce type de trouble en psychologie. Toutefois, dans la mesure où les textes officiels citent clairement la classification française, nous nous attarderons plus spécifiquement sur cette dernière.

B- Le DSM 5 : l’école américaine et l’influence de la théorie comportementaliste

Le DSM 5 (Diagnostic and satistical manual of mental disorder) est la

classification publiée par l’association américaine de psychiatrie. Citée dans de nombreux ouvrages, il n’est pourtant pas reconnu comme officiel en France. Son approche se veut a-théorique, même s’il est clairement empreint de théories behaviouristes.

La théorie behaviouriste (ou comportementaliste) initiée par John Broadus Watson, est née dans la première moitié du XXème siècle aux États-Unis. Ce dernier préconisait que les travaux des psychologues devaient être consacrés à « l’étude scientifique du comportement.5 » Ainsi, il envisageait la psychologie comportementaliste comme purement objective, et selon lui, « son but théorique est la prédiction et le contrôle du comportement6 ». Dans cette classification, seront mis en exergue les conséquences, les symptômes des maladies mentales.

Dès lors, les troubles de la conduite s’inscrivent dans le chapitre « Troubles disruptifs, du contrôle des impulsions et des conduites », traitant de huit entités distinctes :

Trouble oppositionnel avec provocation

Trouble explosif intermittent

Trouble des conduites

Personnalité antisociale

Pyromanie

Kleptomani

Autre trouble disruptif, du contrôle des impulsions et desconduites

Trouble disruptif, du contrôle des impulsions et des conduites Ces troubles sont :

«… caractéristiques du fait que ces difficultés se traduisent par des comportements qui nuisent aux droits d’autrui (p. ex. agression, destruction de propriété) et/ou qui

4 Scolariser les enfants présentant des troubles de la conduite et du comportement, eduscol, aout 2012 5 E. Demont, La psychologie, Edition sciences humaines, 2009, p.28. 6 J.B. Watson, “psychology as behaviorist views it”, Psychological Review, vol. XX, 1913, cite in E. Demont, La psychologie, Edition sciences humaines, 2009, p.29.

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exposent le sujet à des conflits significatifs avec les normes sociétales ou les personnes en position d’autorité.7 »

En outre, « il est crucial de considérer la fréquence, la persistance,

l’omniprésence dans les situations et l’altération associée aux comportements indicatifs du diagnostic en relation avec les normes pour l’âge, le genre et la culture pour une personne donnée.8 »

C- la CIM-10 : la classification de référence internationale9 La « Classification statistique internationale des maladies et des problèmes de

santé connexes » publié par l’OMS, en est à sa dixième édition. Elle est officiellement reconnue, et les autres classifications, dans leurs éditions les plus récentes, se réfèrent explicitement à elle. Elle repose également sur une série de conduites répétitives et persistantes dans les 6 derniers mois. On se rapproche là de la nomenclature française, dans la mesure où la CIM-10 parle de « Troubles du comportement et troubles émotionnels apparaissant habituellement durant l'enfance et l'adolescence ». Elle regroupe :

- Les troubles hyperkinésiques : « un manque de persévérance dans les

activités qui exigent une participation cognitive et une tendance à passer d'une activité à l'autre sans en finir aucune, associés à une activité globale désorganisée, incoordonnée et excessive. »

o Ex : syndrome avec hyperactivité, Trouble de l'attention - Les troubles des conduites : « ensemble de conduites dyssociales,

agressives ou provocatrices, répétitives et persistantes, dans lesquelles sont bafouées les règles sociales correspondant à l'âge de l'enfant. »

o Ex : Trouble oppositionnel avec provocation, Trouble agressif, École buissonnière

- Troubles mixtes des conduites et troubles émotionnels : « troubles caractérisés par la présence d'un comportement agressif, dyssocial ou provocateur, associé à des signes patents et marqués de dépression, d'anxiété ou d'autres troubles émotionnels »

o Ex : dépression - Troubles émotionnels apparaissant spécifiquement dans l'enfance : ils

doivent être majorés et constant comme par exemple l’angoisse intense de séparation, une peur exacerbée des situations nouvelles….

o Ex : Rivalité dans la fratrie, peur de la séparation - Troubles du fonctionnement social : spécifiquement durant enfance ou

adolescence comme mutisme sélectif ou généralisé - Les tics - Autres troubles du comportement et troubles émotionnels apparaissant

habituellement durant l'enfance et l'adolescence

7 DSM 5, p.605 8 Ibid., p.606 9 La dernière version du système de la CIM-11 doit rentrer en application à compter du 1er janvier 2022 : https://www.who.int/fr/news/item/18-06-2018-who-releases-new-international-classification-of-diseases-(icd-11)

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o Ex : Énurésie ou encoprésie non organique

Cette classification a le double avantage d’être reconnue en France, mais aussi d’être un pont entre l’approche américaine, dont elle reste quand même proche, et la classification française, à l’orientation clairement psychanalytique.

D- La CFTMEA : l’approche psychanalytique La Classification Française des Troubles Mentaux de l’Enfance et de

l’Adolescence ambitionne de tenir compte des diversités et des particularités de chaque enfant et adolescent présentant des troubles, reprochant donc une vision réductionniste du courant behavioriste en vigueur dans les DSM et CIM. Elle s’inspire de l’approche psychanalytique de la psychologie. La psychanalyse fondée par Sigmund Freud dès 1896, prend son essor à partir de 1910 ; Elle se veut une psychologie dynamique qui « explore la personnalité profonde et les phénomènes inconscients10 ». Dès lors, on peut dire que si le béhaviourisme s’attache aux conséquences, la psychanalyse porte essentiellement son attention sur les causes. La Classification française dans son énoncé sera donc plus attentive aux maladies à proprement parler, qu’à une liste de manifestations qui en découleraient.

Jusqu’à son édition de 2000, concernant les troubles des conduites, la CFTMEA était très éloignée des nomenclatures évoquées plus haut. On retrouvait alors ces pathologies dans différentes entrées du chapitre « pathologie de la personnalité et troubles évolutifs hors névroses et psychoses ». À partir de 2000, apparait le chapitre « troubles des conduites et du comportement », ce qui va changer radicalement, nous le verrons plus tard, la manière dont ces jeunes seront pris en charge. Voici donc, contrairement aux développements précédents, le tableau complet des TCC selon la classification française :

Chapitre 7 : Troubles des conduites et du comportement

7.0 Troubles hyperkinétiques 7.00 Hyperkinésie avec troubles de l’attention, trouble déficit de

l’attention avec hyperactivité (TDAH) Classer ici les troubles décrits en France sous l’expression «

instabilité psychomotrice ». Du point de vue symptomatique, cet ensemble est caractérisé par : – sur le versant psychique : des difficultés à fixer l’attention, un

manque de constance dans les activités qui exigent une participation cognitive, une tendance à une activité désorganisée, incoordonnée et excessive, et un certain degré d’impulsivité ;

– sur le plan moteur : une hyperactivité ou une agitation motrice incessante.

Les relations de ces enfants avec les adultes sont souvent marquées par une absence d’inhibition sociale, de réserve et de retenue.

10 E. Demont, La psychologie, Edition sciences humaines, 2009, p.24.

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Inclure : – déficit de l’attention avec hyperactivité ; – hyperactivité avec troubles de l’attention. 7.08 Autres troubles hyperkinétiques 7.09 Troubles hyperkinétiques non spécifiés

7.1 Troubles des conduites alimentaires

7.10 Anorexie mentale Trouble caractérisé par une perte de poids intentionnelle, induite et

maintenue par le patient. Il survient habituellement chez une adolescente ou une jeune femme, mais il peut également survenir chez un adolescent ou un jeune homme, tout comme chez un enfant proche de la puberté. Le trouble est associé à la peur de grossir et d’être atteint dans son aspect corporel. Les sujets s’imposent un poids faible. Il existe habituellement une dénutrition de gravité variable s’accompagnant de modifications endocriniennes et métaboliques secondaires et de perturbations des fonctions physiologiques, aménorrhée notamment.

7.101 Anorexie mentale boulimique 7.11 Anorexie mentale atypique Troubles qui comportent certaines caractéristiques de l’anorexie

mentale, mais dont le tableau clinique est incomplet. Par exemple : l’un des symptômes, telle une aménorrhée ou la peur importante de grossir, peut manquer alors qu’il existe une perte de poids nette et un comportement visant à réduire le poids.

7.12 Boulimie Quelle que soit la personnalité sous-jacente, syndrome caractérisé

par des accès répétés d’hyperphagie et une préoccupation excessive du contrôle du poids corporel, conduisant à une alternance d’hyperphagie et de vomissements ou d’utilisation de laxatifs. Ce trouble comporte de nombreuses caractéristiques de l’anorexie mentale, par exemple une préoccupation excessive par les formes corporelles et le poids. Les vomissements répétés peuvent provoquer des perturbations électrolytiques et des complications somatiques.

Dans les antécédents, on peut retrouver un épisode d’anorexie mentale.

7.13 Boulimie atypique Troubles qui comportent certaines caractéristiques de la boulimie,

mais dont le tableau clinique global ne justifie pas ce diagnostic. Exemple : accès hyperphagiques récurrents et utilisation excessive de laxatifs sans changement significatif de poids, ou sans préoccupation excessive des formes ou du poids corporels.

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7.14 Troubles des conduites alimentaires du nourrisson et de l’enfant

Troubles de l’alimentation caractérisés par des manifestations variées habituellement spécifiques de la première et seconde enfance. Ils impliquent en général un refus alimentaire et des caprices alimentaires excessifs, pouvant conduire à un amaigrissement significatif en l’absence de maladie organique et alors que la nourriture est appropriée et l’entourage adéquat.

7.15 Troubles alimentaires du nouveau-né 7.18 Autres troubles des conduites alimentaires 7.19 Troubles des conduites alimentaires non spécifiés

7.2 Conduites suicidaires Si le comportement suicidaire apparaît isolé ou difficilement

rattachable à une organisation psychopathologique précise, il sera classé ici en catégorie principale.

S’il fait partie de tableaux cliniques classables dans les cinq premières catégories, il sera classé ici en catégorie complémentaire.

7.20 Tentatives de suicide, suite immédiate 7.21 Antécédents de tentative de suicide 7.22 Idées suicidaires

7.3 Troubles liés à l’usage de drogues ou d’alcool Ne classer ici comme catégorie principale que les formes où la

conduite toxicomaniaque est au premier plan, quelle que puisse être la pathologie sous-jacente. Les autres formes sont à classer par priorité en 1, 2, 3, 4 d’après la nature de la pathologie dominante, la toxicomanie n’apparaissant que comme catégorie complémentaire.

On enregistrera à la fois le mode d’usage, le produit utilisé et le type de trouble mental en rapport direct avec la toxicomanie. Produit utilisé :

7.3x0 Alcool 7.3x1 Morphiniques d’opiacés 7.3x2 Cannabis et dérivés du cannabis 7.3x3 Hypnotiques et tranquillisants 7.3x4 Cocaïne 7.3x5 Autres psychostimulants et dysleptiques, dont caféine,

amphétamines, ecstasy, LSD 7.3.6 Hallucinogènes 7.3x7 Tabac 7.3x8 Solvants volatils 7.3x9 Polytoxicomanes. Autres substances psycho-actives 7.30x Intoxication aiguë 7.31x Utilisation nocive pour la santé 7.32x Syndrome de dépendance

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7.33 x Syndrome de sevrage 7.34 x Syndrome de sevrage avec delirium 7.35 x Trouble psychotique 7.36 x Syndrome amnésique 7.37 x Trouble résiduel ou psychotique tardif 7.38 x Autres troubles mentaux et du comportement 7.39 x Trouble mental ou du comportement sans précision

7.4 Troubles de l’angoisse de séparation Classer ici les manifestations somatiques et/ou comportementales

qui sont l’expression de l’angoisse de séparation, notamment chez le jeune enfant ou l’anxiété est focalisée sur une crainte concernant la séparation. Survenant pour la première fois au cours des premières années de l’enfance, il se distingue de l’angoisse de séparation normale par son intensité, à l’évidence excessive, ou par sa persistance au-delà de la petite enfance, et par son association syndrome est isolé, il sera placé en catégorie principale. Dans les cas où il se relie à une autre pathologie, il sera classé en catégorie complémentaire.

7.5 Troubles de l’identité et des conduites sexuelles 7.50 Troubles de l’identité sexuelle 7.500 Trouble de l’identité sexuelle de l’enfance Trouble se manifestant dans l’enfance (bien avant la puberté),

caractérisé par une souffrance intense et persistante relative au sexe assigné, accompagné d’un désir d’appartenir à l’autre sexe (ou d’une affirmation d’en faire partie).

Les troubles de l’identité sexuelle chez les individus pubères ou prépubères ne doivent pas être classés ici, mais en 7.501.

7.501 Trouble de l’identité sexuelle chez les adolescents Classer ici : – transsexualisme ; – transvestisme bivalent ; – trouble de l’identité sexuelle chez l’adolescent, type non

transsexuel. 7.51 Troubles de la préférence sexuelle Trouble des conduites sexuelles de caractère permanent et

exclusif. Comprend : les paraphilies, fétichisme, travestisme fétichiste,

exhibitionnisme, voyeurisme, pédophilie, sadomasochisme, troubles multiples de la préférence sexuelle et autres troubles de la préférence sexuelle.

Exclure : – les manifestations transitoires chez des adolescents. 7.52 Manifestations en rapport avec des préoccupations

excessives concernant le développement sexuel et son orientation Le sujet est incertain quant à son identité sexuelle ou son

orientation sexuelle et sa souffrance est responsable d’anxiété ou de

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dépression. La plupart du temps, cela survient chez des adolescents qui ne sont pas certains de leur orientation, homosexuelle, hétérosexuelle ou bisexuelle, ou chez des sujets qui, après une période d’orientation sexuelle apparemment stable, éprouvent un changement dans leur orientation sexuelle.

7.58 Autres troubles des conduites sexuelles 7.59 Trouble des conduites sexuelles, non spécifié

7.7 Autres troubles caractérisés des conduites Classer ici des comportements parfois répétitifs, qui inquiètent et

attirent l’attention de l’entourage. Ils peuvent par eux-mêmes avoir des conséquences graves pour l’individu et/ou son entourage. Tantôt le comportement reste isolé et il sera classé ici en catégorie principale, tantôt il fait partie d’un tableau clinique classable dans les catégories 1 à 5 et on utilisera alors cette rubrique comme catégorie complémentaire.

7.70 Pyromanie Tendance pathologique à allumer des incendies. Ce comportement s’accompagne souvent d’un état de tension

croissante avant l’acte et d’une excitation intense immédiatement après. 7.71 Kleptomanie Tendance pathologique à commettre des vols. Troubles

caractérisés par des impossibilités répétées à résister aux impulsions de vol d’objets. Ce comportement s’accompagne habituellement d’un état de tension croissante avant l’acte et d’un sentiment de satisfaction pendant et immédiatement après la réalisation de celui-ci.

7.72 Trichotillomanie Trouble caractérisé par une perte visible des cheveux, causée par

une impossibilité répétée de résister aux impulsions à s’arracher les cheveux.

7.73 Fugues 7.74 Violence contre les personnes 7.75 Conduites à risques 7.66 Errance 7.78 Autres troubles caractérisés des conduites Autres variétés de comportements inadaptés persistants et répétés,

non secondaires à un syndrome psychiatrique avéré

7.8 Autres troubles des conduites et des comportements

7.9 Troubles des conduites, non spécifiés

E- Un essai de définition globale Ainsi, comme nous l’avons vu au travers de ces différentes classifications, les

troubles des conduites et du comportement se manifestent par toute une série d’actes.

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Mais de manière plus générale, nous pouvons dire que ces jeunes souffrent de difficultés dans leurs relations aux autres, pairs ou adultes. Cette difficulté s’exprime par des actes pouvant être quantitatifs ou qualitatifs :

Quantitatif : comportement en excès ou en défaut (cf inhibition)

Qualitatif : déviation, inadéquation, bizarrerie…. En outre, on a pu également voir, comme l’écrit J.P Visier, professeur de

pédopsychiatrie, que ces actes ont en commun d’être de « l’agir non socialisé [venant] au premier plan comme mode d’expression dans la relation.11 » Pour être identifiés comme TCC, ces troubles doivent être assez fréquents, assez graves ou durer assez longtemps pour constituer un véritable trouble du comportement et sont repérés par plusieurs adultes qui côtoient l’enfant (professionnels, parents, …). Ces troubles affectant la relation aux autres, ils ont, la plupart du temps, de graves répercussions sur le milieu social, sur le milieu scolaire, et donc sur les résultats des jeunes : dans la grande majorité des cas, les jeunes n’ont pas de déficience intellectuelle, mais ce sont leurs troubles qui les empêchent de progresser scolairement.

De plus, ces troubles sont donc bien présents dans toutes les classifications des maladies, des pathologies mentales : même s’il a une part saine qu’il faut sans cesse interroger, l’enfant ou le jeune atteint, ne peut s’empêcher de poser des actes qu’il regrette souvent après coup, et qui peuvent même le mettre à mal, en plus de son entourage (pairs et adultes). Selon la conception psychanalytique, ces troubles manifestent une défaillance du lien entre la pensée et l’agir : les comportements surgissent là ou l’enfant n’arrive pas à s’exprimer.

Enfin, selon Sylvie Canat, trouver la limite est la problématique majeure des élèves ayant des troubles du comportement, y compris des jeunes enfants, c’est-à-dire pouvoir :

contenir leurs affects (amour, passion, haine, colère, déception, dépression...), contenir leurs pensées, limiter l’impact de la demande de l’autre limiter les effets de la présence de l’autre (l’autre est intrusif) : le regard de

l’autre, la pensée de l’autre, les affects et les émotions de l’autre... se contenir dans un cadre donné se contenir dans l’espace (à sa table, sa chaise)

En résumé, la psychopathologie de l’élève troublé et troublant met en avant des

modalités de défense d’une profonde inquiétude humaine qui se traduit par : de l’agir et beaucoup de passages à l’acte ou d’hyperréactivité, des temporalités très éphémères (pris par l’urgence de la pulsion), des processus de défense très instables de type borderline ou sujet-limite, de la rigidité comportementale, de la violence très originaire et peu refoulable (projetée sur l’autre ou son propre

corps, tentative de suicide), des relations très addictives ou abandonniques (toute-puissance de l’autre), de la double contrainte : avoir besoin de l’autre (de par une grande insécurité

intérieure) en qui il ne peut avoir confiance, ressentir d’une façon démesurée la mort (suis-je vivant ou mort?), beaucoup de fatigue et d’usure au contact de l’autre (le jeune qui doit mettre un

casque audio pour travailler), beaucoup de perméabilité à l’environnement12.

11 JP Visier, Troubles du comportement de l’enfant et de l’adolescent, cours à l’Université de Rouen. 12 Sylvie Canat Septembre 2005, sur le site de Daniel Calin

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Ainsi, nous avons pu voir rapidement à travers cette définition à quoi pouvaient

correspondre globalement ces troubles mais également une traduction rapide dans les faits. Dans une dernière partie, nous allons étudier plus profondément quelles sont les manifestations les plus marquantes des TCC dans la vie de tous les jours, mais également dans les situations d’apprentissage.

F- Essai de taxinomie Comme il vient d’être vu, les Difficultés Psychologiques ayant des

répercussions sur les Relations et le Comportement ne peuvent être pris en un bloc monolithique. Elles sont extrêmement diverses, une définition globale est complexe, leur trouver une dénomination générale difficile. Dès lors, tenter de montrer les conséquences de ces difficultés peut paraître là aussi chose impossible. S’inspirant à la fois de la classification de Debarbieux et de notre première définition expliquant que ces jeunes présentent avant tout des difficultés dans leurs relations, le choix a été fait ici de les classer, dans un premier temps, en fonctions des différentes interactions que ces troubles entrainent dans les rapports aux autres, manifestations envisagées dans une gradation plus globale. En outre, pour chacune d’elles nous tenterons d’envisager qu’elle pourrait être les causes de telles expressions. Enfin dans un second temps, nous tenterons d’aller à la frontière entre ces troubles du comportement et troubles psychotiques, pour enfin tenter de voir en quoi ces manifestations peuvent avoir un impact direct sur les apprentissages.

a- L’inhibition

Des définitions Lorsqu’on parle de Troubles des Conduites et du comportement, rarement sont

évoqués les troubles entrainant l’inhibition, c’est-à-dire « un état d’impuissance, de paralysie13 ».

Ce phénomène peut être extrêmement handicapant, car bien souvent, ces jeunes ne faisant pas de bruit, ne gênant pas le bon déroulement de la classe, ne sont repérés que très tardivement par les équipes enseignantes. Ce repli sur soi, entraine un refus instinctif de se livrer à l’autre, de se découvrir et donc un refus d’entrer dans les apprentissages. Ce n’est souvent que par le grand retard scolaire que leur situation handicapante est repérée.

L’inhibition peut être en outre considérée comme une agressivité dirigée contre lui-même : c’est par peur de déclencher des drames que l’enfant s’empêche d’agir. C’est souvent parce qu’il a associé, imaginairement, ses actes ou ses paroles à des événements qu’il a vécu comme douloureux ou dramatiques.

De plus, l’inhibition peut être mise en place pour préserver un sentiment de toute-puissance14. C’est pour rester souverain du mode de relation qu’il a mis en place,

13 Le petit Robert, édition 2004. 14 Sur le sentiment de toute-puissance, voir aussi c- la provocation

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que l’inhibé adopte un « repli défensif15 ». Quand l’autre est vécu comme un intrus, que l’attaque parait impossible, l’enfant se referme sur lui-même évitant les contacts avec l’extérieur, protégeant ce qu’il a eu beaucoup de mal à construire.

Enfin, Elle peut consister dans le blocage que la personne s’impose dans ses actes, son expression, ses désirs. Elle est généralement liée à une peur des conséquences de ses actes (agressivité personnelle ou d'autrui, culpabilité …).

Plusieurs types d’inhibition : - L’inhibition motrice : souvent présente (mais sans conséquences

graves) en maternelle, mais surtout chez des enfants surprotégés et qui voient un danger partout et donc n’osent rien faire de leur corps, n’osent aucun geste, aucune action qui pourrait provoquer des changements ou des “drames”.

- L’inhibition de la relation à autrui : L’autre n’est pas encore conçu

comme un pair mais plutôt comme un adversaire ou un étranger et l’enfant ne sait par quelle conduite l’aborder.

- L’inhibition intellectuelle: qui se traduit par de la passivité dans le travail

intellectuel, peu de curiosité pour son environnement et/ou peur de rentrer dans les (processus d’) apprentissages car cela représente un danger (souvent fantasmé ou dû à l’accumulation d’expériences négatives). Cette inhibition provoque chez l'enfant un état de tension intérieure permanente, qui peut l'amener parfois à "exploser", pour se "débarrasser" de ces tensions. Et on assiste alors à des moments d'une grande violence, physique (agressions) ou affective (colères, pleurs inconsolables…). C'est qu'en fait l'inhibition peut être considérée comme une forme d'agressivité retournée contre soi-même : elle correspond à un blocage d'énergie, une tentative permanente d'autocontrôle afin de maîtriser affects et pulsions. Tout ce passe comme si il existait un "mécanisme de défense destiné à maintenir un interdit à la pulsion …16" et l'inhibition est en relation avec l'angoisse. L'inhibition est une limitation que le Moi s'impose pour ne pas éveiller l'angoisse 17" devant une situation de danger. Ainsi, ces enfants s'empêchent d'apprendre, d'agir, d'aller au contact des autres et même de penser. Ceci se traduit par des perturbations au niveau de l'attention, de la compréhension, de la mémorisation, de la concentration.

b- L’agitation Le jeune qui est « agité » n’est pas forcément dans l’interaction directe avec

l’autre : il ne « se tient pas tranquille sur sa chaise, se lève, se déplace, n’est pas attentif, se laisse facilement distraire….18 ». Il ne recherche pas forcément l’autre, mais c’est sa manière d’être, la difficile maîtrise d’un corps toujours en mouvement qui va le faire entrer en relation. La volonté n’est pas première.

15 Bruno Egron « Les troubles du comportement » in B. Egron (sous la direction de), Scolariser les élèves handicapés mentaux ou psychiques, CRDP Nord, 2010, p68. 16 GILLIG J.M. ( 1998) : L'aide aux enfants en difficulté à l'école, Dunod, p.36 et 37. 17 FREUD S. : Inhibition, symptôme et angoisse. 18 Aucouturier (2012) : L’enfant terrible et l’école- Propositions éducatives et pédagogiques, Montréal, LIBER.

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Le non –investissement de l’objet

Il semble que ces enfant soient à la recherche d’une place et d’un objet

d’investissement. On relève, par exemple, souvent ces comportements

"d’errance" dans les premières séances de rééducation dans lesquelles l’enfant

passe d’un objet ou d’un lieu à l’autre, l’abandonne après un moment de manipulation

et repart vers d’autres lieux. Comme s’il essayait de trouver quelque part, un objet ou

une activité qui en vaille la peine, mais sans jamais trouver satisfaction et intérêt dans

aucun d’entr’eux : comportement assez fréquent en petite section de maternelle.

On peut penser que ces enfants n’ont pas investi l’objet comme pouvant être

source de plaisir ou d’enrichissement pour eux. Ils n’ont pas saisi ce qui à travers un

objet ou une activité quelconque, peut leur permettre de se dire, de s’exprimer, mais

aussi de confronter aux autres, de s’enrichir de l’autre et de maîtriser son

environnement. On pourrait penser qu’ils n’arrivent pas à se projeter dans cet objet

pour le faire vivre. A l’école, nous trouvons beaucoup d’enfants qui ne comprennent

pas que l’apprentissage demande fondamentalement et en premier lieu, de

s’approprier, de s’investir dans, l’objet d’apprentissage.

L’agitation sensori-motrice :

Certains cas d’inattention ou même d’instabilité ne posent guère de problème

aux enfants : on peut l’observer dans leurs comportements, leurs attitudes, aucun

comportement d’agressivité ou de violence envers les autres ou envers eux-mêmes,

aucune plainte, aucune grimace … aucune souffrance apparente.

Ces enfants-là en sont peut-être resté au stade sensori-moteur, un des premiers

temps du développement, dans lequel le seul plaisir est le plaisir du mouvement, le

plaisir de faire jouer leur corps –peut-être recherchant une auto-érotisation du corps-

même pas encore du "geste" qui pourrait traduire une intention vis-à-vis de l’autre.

L’agitation comme dérivation :

Pour d’autres au contraire pourrait-on dire, l’agitation est là, non pour se faire

remarquer, mais pour se cacher. Pour cacher ou éviter une souffrance ou une

incompréhension particulière.

Plus on fait de bruit, plus on détourne l’attention de questions qui pourraient être

gênantes, sources de souffrance - comme la logorrhée peut cacher la difficulté à parler

de ce qui gêne, ce qui fait souffrir, ce qui dérange. On s’agite pour parler d’autre chose,

pour détourner l’attention ou pour noyer dans un flot de paroles, ce qui est en fait

essentiel , mais qui ne peut être dit directement parce que trop difficile.

C’est par l’agitation psychomotrice que ces enfants, qui n’ont pu ou su exprimer

leurs émotions, les identifier, à essayer de les comprendre, de les contenir et de les

gérer, s’expriment. L’agitation cherche à éviter la confrontation avec le savoir ou

l’autre.

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L’agitation comme fuite de la pensée

C’est la frustration que l’on veut éviter, la frustration de l’effort, de la récompense

différée, cette frustration qui est justement au centre du processus d’apprentissage

c- La perturbation

Contrairement à l’agitateur, l’enfant qui perturbe veut entrer en relation, mais n’y parvient pas dans les meilleures des conditions. « Il bavarde souvent, dérange la classe, ne respecte pas les règles, chahute, attire l’attention de ses camarades…19 ». S’il fait des bruitages, c’est intentionnel alors que le jeune dans l’agitation le fait malgré lui. Cette perturbation peut parfois aller jusqu’aller jusqu’à la provocation et l’agressivité.

a- La perturbation comme communication

Certains enfants, par timidité, manque de confiance en eux, n’ont trouvé que ce

moyen pour communiquer. Enfants un peu immatures parfois, le corps est le seul

moyen de s’exprimer et d’entrer en relation avec l’autre.

On retrouve d’ailleurs cette agressivité chez les garçons dans leur recherche de

relation avec les filles au moment de l’adolescence. C’est peut-être là aussi, la raison

de cet excès de paroles ou, au contraire, ce manque de paroles, qui marquent le

comportement de ces enfants. C’est aussi un excellent moyen de se faire remarquer

par les autres que cette agitation incessante.

La provocation comme quête existentielle et détresse affective

Souvent porteurs d’un lourd passé, marqués par ruptures et rejets, dans un

souci d’autoprotection, ils sont souvent méfiants face à toutes manifestations affectives les amenant ainsi à tester l’adulte dans sa capacité à les aimer. Même s’ils recherchent souvent la présence de figures sécurisantes et structurantes, la dépendance affective les déstabilise et entraine des réactions à première vue paradoxales : fuite, rupture, destruction, provocation.. Un cadre affectif devient donc nécessaire pour les apprentissages pour qu’ils puissent se lancer dans toutes démarches d’un abandon des certitudes nécessaire (comme les apprentissages).

Cela peut se manifester par la destruction de productions (scolaires ou autre) quand l’adulte dit que c’est réussi, la transgression quand une journée se serait bien déroulée, l’insulte ou le passage à l’acte physique contre l’adulte qui aurait été le plus investi…

19 AUCOUTURIER (2012) : L’enfant terrible et l’école- Propositions éducatives et pédagogiques, Montréal, LIBER.

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Défendre son sentiment de toute puissance Outre le « repli défensif20 », pour défendre ce sentiment de toute puissance21,

et continuer à maîtriser les modes de relations mis en place, ils peuvent aussi envisager un « affrontement défensif » : volonté de dominer, réduire, détruire, nier l’autre ; irrespect des adultes et instrumentalisation des plus faibles.

La perturbation pour cause de rapport à la loi difficile et fluctuant

Souvent la famille a des difficultés à faire la part entre désir et besoin, les

demandes sont souvent immodérées et le laisser-faire trop important. Le rapport à la loi, la règle, la norme va donc varier selon envies et circonstances : l’inscription dans un groupe où ces différents cadres sont nécessairement présents en devient donc très difficile.

La perturbation par contrôle difficile des émotions, instabilité extrême

Les sentiments et affects (envie, colère, peur, angoisse…) sont pour eux

difficilement contrôlables dans toutes leurs situations de vie (école, centre aéré, cercle familial…). Ces nombreuses manifestations ont pour but de se substituer à un conflit interne de pulsions non retenues donc excessives. Ces dernières résistent au rappel à l’ordre, au milieu (école, centre aéré, club sportif….), au changement d’approche.

d- Agressivité et violence dans la relation à l’autre Parfois des réactions simplement agressives ou provocatrices, peuvent apparaître à certains comme violente. Or il ne faut pas confondre agressivité et violence :

« La violence peut se définir comme une contrainte volontaire ou

involontaire, physique ou psychique, susceptible d’entrainer la terreur, le déplacement, la souffrance ou la mort d’autrui. Elle peut aussi aller vers la destruction d’objets » (…) La violence n’est donc pas l’agressivité. La violence s’attaque au lien social ou physique : elle est toujours une effraction qui porte atteinte à l’intégrité de l’autre. […] … elle (la violence) tue le symbole, détruit l’organisation des liens et s’attaque aux rituels sociaux »22.

Se manifestant principalement dans la relation de l’enfant aux autres enfants et

à l’adulte, ces comportements violents peuvent s’étendre à toute relation de l’enfant

20 Bruno Egron « Les troubles du comportement » in B. Egron (sous la direction de), Scolariser les élèves handicapés mentaux ou psychiques, CRDP Nord, 2010, p68. 21 Voir Infra a- Inhibition 22 KROTEMBERG A., LAMBERT E. (2012), Scolarité et troubles du comportement. Des solutions pour enseigner, Paris, Champs social Editions, p.41.

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avec son environnement, (les objets, l’apprentissage…). Ils traduisent notamment la mauvaise intégration du rapport à l’autre dans la communication et la relation.

Ce sont souvent de mauvaises expériences – vécues réellement ou fantasmées - dans le domaine de la relation qui en sont à l’origine. Ces traumatismes ont créé des angoisses de pouvoir se retrouver dans des situations similaires créatrices d’angoisses.

L’intégrité – physique et psychique – se trouve menacée. Physique, on le voit bien car ces enfants ne supportent pas d’être "touchés ", ni physiquement, ni affectivement. Psychique, car chaque situation dans laquelle un objet pourrait être "assimilé ", incorporé, (et c’est le cas des apprentissages) provoque des réactions de rejet comme une atteinte à son corps ou son identité. Il y a menace de se confronter à l’autre, au savoir, menace qui est vécue ou ressentie comme une agression à sa propre identité. D’où des réactions de défense, de fuite, d’agression, contre ces "corps étrangers".

Plusieurs approches, différentes mais complémentaires, peuvent être invoquées pour expliquer ces angoisses, notamment des constructions psychiques qui se sont mal élaborés :

La non-constitution d’une contenance

Au cours de son développement, l’enfant se constitue une image, une représentation et un sentiment d’identité, d’existence comme être entier, indivisible : ceci lui donne le sentiment d’une contenance physique et psychique du moi.

Cette contenance s’est construite sur le sentiment de sécurité (de continuité, de permanence, de sécurité affective …) que lui a apporté son entourage ou, de manière plus générale, les premières relations avec son environnement :

« Si les premières relations du début de la vie ont été étayantes et

satisfaisantes, alors le narcissisme sera de bonne qualité et l’identité d’autant plus stable et fiable. A l’inverse, si ces premières relations ont été défaillantes – il est ici question de réalité interne et pas forcément question d’une défaillance parentale- alors le sentiment d’identité sera peu stable.23 »

C’est sur cette permanence, cette sécurité affective et cette continuité que se

construiront la permanence de l’objet, la notion de conservation et donc la capacité d’anticipation Cette contenance touche aussi le corps ce qui entraîne, pour B Aucouturier, une «grande fragilité tonico-émotionnelle » :

« Le corps ne joue pas son rôle de représentation car il n’est pas le

lieu qui actualise l’histoire relationnelle passée de l’enfant. … L’enfant terrible vit une grande fragilité tonico-émotionnelle à cause des rétentions de ses émotions qui entraîne d’intenses tensions corporelles et un excès de mouvements. Il ne peut exprimer ses peurs, ses colères contre "les oppresseurs", et, tant que l’angoisse ne peut s’exprimer par la voie de l’émotion, elle manifestera soit par la voie somatique … soit par la voie gestuelle » … « Il est seul parce que l’autre n’est pas en lui »

23 KROTEMBERG A., LAMBERT E. (2012), Ibid., page 29.

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Ces difficultés dans la gestion de son identité intérieure et son environnement se réactualisent souvent à l’adolescence :

« A l’adolescence, seront mises en place des conduites de rejet,

d’opposition et d’agressivité contre l’autre qui sera considéré comme un danger pour son identité, en raison de ces premières relations qui n’ont pas permis de construire un socle de sentiment de sécurité interne. »24

Si cette contenance n’est pas élaborée, cela crée des angoisses, à la fois dans

la gestion de son propre comportement et dans la relation à l’autre, L’individu se confronte au monde extérieur sous la forme d’agressivité et de violences pour mieux mesurer et repérer les limites de son moi –peau, de son corps, de son identité, pour se protéger de lui-même et des autres.

Didier Anzieu repérait deux types d’angoisses :

« A la carence de cette fonction conteneur du moi-peau, répondent deux formes d’angoisse. L’angoisse d’une excitation pulsionnelle diffuse, permanente, éparse, non localisable, non identifiable, non apaisante, traduit une topographie psychique constituée d’un noyau sans écorce : l’individu cherche une écorce substitutive dans la douleur physique ou dans l’angoisse psychique : il s’enveloppe dans la souffrance.

Dans le second cas, l’enveloppe existe mais sa continuité est interrompue par des trous. C’est le moi-peau passoire : les pensées, les souvenirs sont difficilement conservés ; ils fuient. L’angoisse est considérable d’avoir un intérieur qui se vide, tout particulièrement de l’agressivité nécessaire à toute affirmation de soi25 »

B. Aucouturier rappelle l’importance du corps et des sensations tonico-émotionnelles dans la constitution de l’unité du corps (et donc du moi) à travers ce qu’il appelle « le dialogue tonico-émotionnel ». pour lui, les angoisses archaïques « résultent d’une somme de tensions toniques (un corps en tension)… ».

Quand les contenants ne sont pas présents ou qu’ils sont mis en défaut, les émotions, les pulsions, se répandent et les passages à l’acte apparaissent comme pour se débarrasser d’un malaise général, d’un chaos intérieur.

La non élaboration d’un espace psychique intermédiaire

Cet espace régule et en même temps justifie la relation au monde environnant.

Toutes nos relations au monde sont, normalement, médiatisées par des valeurs, des normes, des règles, qui nous font réagir, non dans l’impulsion, la réaction brute et directe, mais filtrées par ce que l’on pourrait nommer, à la suite d’Anzieu, Bion et Kaes, un espace intermédiaire, transitionnel, sorte de sas, qui nous permet d’analyser, à la lumière de la culture, comment réagir et interpréter ces évènements, comment nous situer par rapport à eux. Il semble que pour ces enfants, cet espace se soit construit

24 KROTEMBERG A., LAMBERT E. (2012), idem. 25 D. ANZIEU D. (1997) : Le moi-peau, Dunod.

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sous une forme et un fonctionnement inadaptés, voire qu’ils ne « l’utilisent» pas. « Cet enfant est envahissant, sans distance dans sa relation aux personnes »26. Le premier médiateur de l’enfant à son environnement étant le corps - « Le corps ne trouve pas sa dimension transitionnelle : il n’est pas cet espace ludique symbolique de plaisir où l’enfant et l’autre se retrouvent (…) On peut comprendre aussi que le manque de représentation et de ritualisation de la relation est une difficulté supplémentaire à accepter le contact corporel car celui-ci, vécu sans médiation, est perçu comme une agression et certainement associé à des souvenirs d’un dialogue tonico-motionnel déficient, voir douloureux ..» 27-

Dans ces cas, l’enfant est « débordé dans l’un des champs proposés (la pensée, l’affect ou l’agir) » et se produit « une rupture de pensée, d’affect ou d’agir, changement d’état brutal et intense. L’hypothèse de travail est de penser que ce débordement est provoqué par un contexte devenu intolérable pour la personne et que celle-ci ne peut s’approprier. En particulier l’insécurité interne pourrait être un facteur de vulnérabilité.»28

La défaillance du lien entre l’agir et la pensée Selon Jean Marie Forget29, l’enfant est en attente d’être entendu par l’adulte, représentant celui qui sait et qui est responsable. Il est en attente d’une parole issue d’une autorité symbolique, pour mettre des mots sur ce qu’il vit, mais ne peut pas dire ni même penser.

Selon lui, les troubles du comportement témoignent d’une souffrance psychique. Ils traduisent une défaillance du lien entre la pensée et l’agir : les comportements surgissent là ou l’enfant n’arrive pas à s’exprimer ; ce qui se dit par les actes, ne peut pas se dire par les mots. Ces enfants ont souvent vécu des moments difficiles, traumatisants dans le passé, notamment des vécu de rupture de lien, une insécurité affective, une défaillance de l’autorité symbolique.

L’enfant est à la recherche de cadres, de contenances, qui lui permettraient de mieux gérer ses affects et ses relations aux autres. Il essaie de trouver une reconnaissance de soi dans la réaction, le regard des autres. C’est ce qui peut expliquer cette confrontation incessante, cette provocation, avec les pairs, les adultes et même les objets.

Mais simultanément et souvent dans un premier temps, ne trouvant pas d’issue, il évite toutes les situations qui pourraient le mettre en danger, le ramener à des situations angoissantes, déjà vécues de manière traumatique, en "s’échappant "(fuite, repli sur soi, conflit, contestations).

Ces comportements montrent que ce qui médiatise les relations de l’individu aux monde extérieur (les autres, l’environnement …) ne s’est pas construit de manière adaptée. Toutes les règles, les valeurs (le respect, la réciprocité, l’interdit …) qui généralement assurent la gestion de ces relations au monde environnant, ne se sont pas élaborées de manière stable, sont remises en question, peut-être parce qu’elles ont été malmenées, détournées, mise à mal dans le passé.

26 AUCOUTURIER (2012), o p. cité, page 20. 27 Idem, page 19 28 Jacqueline Liégeois, INS HEA, Conférence au CRDP/CDDP de la Marne, Reims le 17 mai 2006 : Faire la classe à des enfants ou adolescents présentant des troubles du comportement. 29 FORGET J.M. (2008ç : Les troubles du comportement : où est l’embrouille ?, ERES.

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Ce sentiment de ne pas exister, parce que l’identité ne s’est pas construite de manière stable, parce que la sécurité du moi n’est pas consolidée, est très angoissant. Si l’enfant recherche dans ces conflits l’assurance qu’il existe en tant qu’unité, individu.

G- Entre TCC et troubles psychotiques De plus en plus au sein des ITEP, se retrouvent des jeunes souffrant de troubles

psychiques plus lourds. Outre les manifestations déjà évoquées, d’autres peuvent se sur ajouter : des angoisses massives, et des thématiques fantasmatiques crues. Ces jeunes sont souvent en rupture avec la réalité, et peuvent afficher de nombreux traits de nature psychotique.

a- Des angoisses massives Ces angoisses peuvent être de plusieurs types : de morcellement ou

d’éclatement, de séparation, de fusion avec autrui… Elles ne sont pas contenues par des processus mentaux de défenses habituels, c’est pourquoi certains tentent de les endiguer par des rituels ou des conduites contraignantes, par l’utilisation de personnages supposés tout-puissants auxquels ils peuvent s’identifier pour ainsi se sentir protégés, par des comportements d’instabilité motrice ou d’hyperactivité permettant de décharger ces angoisses.

b- Thématiques fantasmatiques crues Souvent les jeux et préoccupations imaginaires de ces jeunes surprennent par

la crudité des thèmes qui peut même choquer les adultes. Violences et agressions sont souvent de la partie, le sang de mise. Ceci s’exprime souvent au travers de dessins d’une violence parfois impensable, même pour des adultes.

2. Des manifestations ayant un impact direct sur les apprentissages

c- Une faible estime de soi L’estime de soi est pour ces jeunes extrêmement faible : quand ils réussissent,

c’est de la chance ; face à l’échec, ils sont stupides. Ils ont des difficultés à prendre de la distance, ce qui implique souvent une fuite de toute mentalisation ou élaboration. Ainsi pour ne pas entrer dans l’activité scolaire, souvent ils remettent en cause son utilité, ou le niveau que cela demande (« c’est un truc de CP »).

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d- « L’empêchement de penser30 » entrainant « La peur d’apprendre31 »

L’acte d’apprendre nécessite d’accepter des règles, de se confronter à ses

insuffisances, ses manques, de passer par des incertitudes. Il entraîne également le nécessaire abandon de ses certitudes, de savoirs antérieurs qu’on pouvait croire perpétuels. Ce travail obligatoire de l’élève sur ses propres représentations fait peur à l’élève atteint de TCC. Pour éviter cette tâche, ces jeunes manifestent alors souvent :

une instabilité continuelle

une impression d’inattention

une intolérance à la frustration

un refus de s’identifier à celui qui sait

une fuite devant tout travail intellectuel (répondre n’importe quoi sans réfléchir, refus d’entrer dans l’activité…)

Les jeunes atteints de TCC présentent aussi souvent ce que Serge Boimare

appelle « un empêchement de penser », c'est-à-dire « un fonctionnement intellectuel singulier, aménagé et équilibré sur un évitement de la penser ». Ceci permet ainsi à ces jeunes d’éviter ou de contourner « le doute indispensable au fonctionnement intellectuel. » Or ce retour sur eux-mêmes pour « mobiliser leurs capacités réflexives », déclenche en eux des « sentiments parasites » qui non seulement perturbent leur fonctionnement intellectuel, mais surtout « les inquiètent».

Quatre grandes conséquences de l’empêchement de penser sur les apprentissages :

La concentration impossible : très vite les enseignants sont témoins chez ces jeunes d’un « comportement troublé par le relais trop vite passé au corps », c'est-à-dire utilisation par ces derniers de « pratiquement toutes les possibilités d’évitement que permet le corps32 »

o Exemple : Instabilité, agitation, sensation de froid, régression, besoin d’aller aux toilettes, titillements voire agression des voisins…

Une curiosité marquée par les préoccupations primaires : ayant une grande difficulté à passer par leur monde interne (qui les angoisse), ils manifestent une « curiosité primaire pour satisfaire leur besoin de savoir ». En termes d’apprentissage, cela les empêche « de se dégager des préoccupations personnelles pour aller vers le général et accepter le rôle de la règle et de la loi. 33» La sublimation c'est-à-dire le détournement de pulsions sexuelles vers des activités artistiques ou intellectuelles, leur est donc impossible. Leurs préoccupations ne vont donc tourner qu’autour de préoccupations primaires.

o Exemple : sadisme, voyeurisme, mégalomanie. Dans les textes, leur attention aura tendance à se fixer sur ces thèmes là.

30 S. Boimare, « la psychopédagogie face aux adolescents ascolaires », in S. Boimare, Pratiquer la psychopédagogie, Dunod, 2010 p.11 31 S. Boimare, L’enfant et la peur d’apprendre, 2ème édition, Dunod, Paris, 2004. 32 Ibid, p15. 33 Ibid, p16

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Un langage qui ne permet pas d’argumenter : seul l’échange dans le connu par l’autre est possible. Leur langage ne permet pas de « franchir le seuil de l’argumentaire »

Un fonctionnement intellectuel qui ne connait plus le doute : ces jeunes mettent en place des « stratégies de contournement du temps de la réflexion », limitant ainsi cette dernière en ne s’engageant pas dans l’inconnu ou la recherche. Pour ce faire, trois stratégies principales :

o Conformisme de penser : faire et refaire ce qui est maîtrisé, appliquer des recettes, être très soucieux de la forme. Dans l’apprentissage de la lecture, ces jeunes ont de grandes difficultés avec la méthode syllabique qui les maintient dans ce souci de la forme.

o Association immédiate : aller d’une idée à l’autre, faire des digressions (parfois avec intelligence et humour). Dans l’apprentissage de la lecture, ces jeunes, quant à eux, souffrent de la méthode globale qui les pousse à aller vite, en inventant ou en faisant travailler leur mémoire plus qu’une méthode

o Besoin de certitude : l’apprentissage ne peut se faire que dans maîtrise et contrôle. Le fait de ne pas savoir se transforme en une remise en cause excessive. Pour les plus jeunes, ce besoin s’accompagne «d’idées d’omniscience ou de toute puissance ». Pour les plus âgés, face au doute, affleurent « des idées de persécution et un besoin d’associer la pensée à la faiblesse et à la féminisation. 34»

e- Rapport difficile à la temporalité Leur vécu étant morcelé, leur passé difficile à recomposer, voire leur futur

difficile à envisager, le rapport au temps est souvent compliqué. En conjugaison, les notions de temps sont tardivement acquises et plus globalement, la mise en projet est souvent complexe à moyen terme. L’instant est leur seul espace temporel (d’où parfois des mises en danger).

f- Les plaisirs immédiats Cette difficulté à se projeter dans le temps entraine donc un besoin absolu que

la demande soit satisfaite au moment où elle est émise. Ils ne peuvent différer et veulent que tout travail ait un résultat dans l’instant. Ceci devient problématique quand arrivent les apprentissages, où le temps est souvent l’allié premier de l’élève (et du professeur), comme en lecture et écriture, en production d’écrits…

g- Difficulté d’accès au symbolique Selon l’école psychanalytique, cette difficulté est due, comme nous l’avons vu,

à un déficit de sublimation. Dès lors, ces élèves ont des difficultés avec l’accès au symbolique, à la mentalisation : le second degré, le sens figuré, les métaphores, les situations problèmes, l’implicite, les leçons de grammaire…

34 Ibid., p18

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Ainsi, nous avons pu voir que la définition des troubles de ces jeunes présentant

des difficultés d’ordre comportementales était plus que complexe. Selon les écoles, la classification des pathologies mentales varie. Celle qui a cours en France est la Classification Française des Troubles Mentaux de l’Enfance et de l’Adolescence, s’inspirant de l’école psychanalytique. Par la suite nous avons tenté d’apporter une définition plus globale et bien mieux appréhensible, en nous basant sur des auteurs tels que Sylvie Castaing, et tentant d’identifier au mieux quelques traits généraux et caractéristiques de leurs troubles. Enfin, dans un dernier temps, nous avons exposé les grandes manifestations, les conséquences de cette pathologie dans la vie de tous les jours, ainsi que dans des temps d’apprentissage. Dans cette seconde partie, nous allons présenter les grandes modalités de prise en charge de ces jeunes, que ce soit de manière globale en milieu spécialisé, ou dans une école ordinaire.

III- La prise en charge des jeunes atteints de TCC Face à des problématiques si variées, si complexes et qui entrainent des

perturbations majeures sur l’environnement des jeunes atteints, la prise en charge de ces jeunes atteints de TCC reste quelque chose de difficile, et ce même pour des professionnels formés. Cette prise en charge peut se faire en institution pour les cas les plus lourdement touchés, ou en classe ordinaire pour les autres.

1- Dans le milieu spécialisé : Les ITEP Même si les jeunes lourdement atteints par les TCC peuvent être pris en charge

par des structures relevant du sanitaire (hôpital de jour, CMP, CMPP, CAMPA…), la structure dédiée à ces troubles est un Institut Thérapeutique Educatif et Pédagogique. Institution relativement récente, les ITEP ont été créés en 2007, se substituant aux Institut de Rééducation (IR) et marquant la nouvelle orientation qui voit dans les troubles des conduites et du comportement, une maladie psychique, et non des comportements à redresser : l’axe des soins est affirmé, il faut maintenant soigner, éduquer et enseigner, et pas seulement rééduquer.

« Les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques accueillent les enfants, adolescents ou jeunes adultes qui présentent des difficultés psychologiques dont l’expression, notamment l’intensité des troubles du comportement, perturbe gravement la socialisation et l’accès aux apprentissages. Ces enfants, adolescents et jeunes adultes se trouvent, malgré des potentialités intellectuelles préservées, engagés dans un processus handicapant qui nécessite le recours à des actions conjuguées et à un accompagnement personnalisé35 »

Les jeunes y sont orientés sur décision de la MDPH après demande des familles et pour travailler avec eux, les ITEP disposent d’un plateau technique large.

35 Décret du 14 mai 2007 créant les ITEP

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A- Le thérapeutique36

Le médecin psychiatre : responsable du pôle thérapeutique, il veille notamment à la mise en œuvre, à l’évaluation et à l’adaptation du projet thérapeutique de l’usager.

Le psychologue : il exerce ses fonctions dans l’ITEP et s’inscrit dans les projets des services et dans le projet d’établissement. Il collabore au projet institutionnel interdisciplinaire tant sur le plan institutionnel que sur le plan individuel. Aussi, les missions du psychologue se déclinent suivant deux axes distincts : Une pratique clinique institutionnelle et Une pratique clinique avec l’enfant et/ou la famille

L’orthophoniste : sa prise en charge concerne les troubles de la voix, de l’articulation, de la parole, du langage oral et écrit, ainsi que les difficultés logico-mathématiques.

Le psychomotricien : il s'intéresse à différentes modalités qui touchent, intéressent le corps :

o le corps à travers le mouvement : identifier et intervenir entre autres au niveau de l'équilibre, la latéralité, les coordinations, le tonus, la posture, l'axe du corps, la proprioception, etc.

o le corps en relation à son environnement : plusieurs dimensions coexistent ; le rapport à l'espace et au temps, la dimension perceptivo-motrice qui influence la posture, le geste, le schéma corporel et la dimension du langage corporel (dialogue tonique, communication non-verbale)

o le rapport à son propre corps : les différents axes sont repérés, l’identité, le schéma corporel, l’image du corps, l’estime de soi et le vécu corporel

L’infirmier : sous l’autorité du médecin, il accompagne l’usager dans les soins courants

B- L’éducatif L’intervention des éducateurs au quotidien va chercher à ouvrir à chaque enfant

ou adolescent considéré dans sa singularité, un espace relationnel qui le sollicite. L’intervention éducative a pour objectif d’inviter chaque jeune à travailler sa

subjectivité, ses représentations personnelles, son rapport au monde, aux autres, à lui-même, sa manière d’aborder les savoirs, les connaissances, grâce à une mise en situation d’expériences nouvelles pour lui.

L’éducateur se propose de développer les compétences sociales de l’enfant en tenant compte de ses besoins, de son potentiel et de son contexte familial. Il s’agit, à terme, de favoriser l’épanouissement des capacités de l’enfant, de développer ses compétences en matière d’autonomie, de créativité, d’adaptabilité, de construire son parcours au sein de l’établissement ; et au-delà, de l’aider à devenir responsable de ses choix dans une démarche citoyenne.

Cet accompagnement s’organise autour de temps collectifs et individuels, amenant l’enfant à quitter son registre défensif dans ses relations aux autres par des actions socialisantes, dans des espaces de médiations, d’expérimentations,

36 Projet d’établissement de l’ITEP les Albarèdes 2012-2017

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contenants, structurants et sécurisants. Le groupe, l’internat thérapeutique, les ateliers éducatifs font partie des moyens pour ce faire.

C- Le pédagogique Le pôle pédagogique, composé d’enseignants, a pour mission première,

en synergie avec les autres professionnels, d’aider l’usager à se reconstruire en tant qu’élève, en vue d’une re-scolarisation dans le milieu scolaire ordinaire. Il assure la continuité du parcours scolaire de l’usager, en permettant ses apprentissages et la poursuite de son parcours de formation.

A cette équipe pluridisciplinaire, il faut ajouter l’assistante sociale qui s’occupe notamment du lien (primordial) avec les familles, les services généraux (chauffeurs, ouvriers d’entretien, secrétaires…) et l’équipe de direction. Chacun peut avoir sa part, plus ou moins large, importante ou régulière dans les prises de décision et les orientations de travail de ces jeunes.

Or si l’ITEP est la structure qui prend en charge globalement les jeunes les plus troublés, de plus en plus nombreux sont ceux, atteints de TCC, qui se trouvent noyés dans des classes au milieu d’autres élèves.

3. Dans le milieu ordinaire : l’école, la classe La prise en charge pédagogique d’un jeune présentant des troubles des

conduites et du comportement au sein d’une institution scolaire ordinaire nécessite une action commune mobilisant l’ensemble des adultes présents autour de ce dernier. En ce sens, il va donc être nécessaire de développer trois grands axes de travail : des attitudes globales au sein de l’école, des attitudes globales au sein de la classe, une pédagogie particulière.

D- Dans l’école : un milieu global à adapter

a- Le travail d’équipe

Accueillir un jeune présentant des TCC n’est pas que l’affaire de l’enseignant, mais bien celle de l’ensemble de l’Institution scolaire (enseignants, directeur, personnel de mairie, animateurs de CLAE, intervenants extérieurs, AVS, assistants d’éducation…). Ainsi, un travail d’équipe global va devoir s’organiser au sein de l’école pour que tous, professionnels, élèves, et jeune accueilli, puissent continuer le plus naturellement possible leur travail. Selon les lieux, cette équipe sera différente, mais la pluralité des regards sera toujours une véritable valeur ajoutée à cette prise en charge dans la mesure où, comme nous avons pu le voir, en fonction des personnes autour de lui, il agira de diverses manières.

En outre, le travail d’équipe devra être d’autant plus prégnant que ces jeunes ont une forte capacité à manipuler les adultes. La cohérence du cadre éducatif devra donc être forte, construite et réfléchie pour que les failles dans lesquels ils tenteront de rentrer soient les plus fines possibles. Dans cette perspective, il devient nécessaire de rédiger un projet commun dans lequel seront définis des objectifs éducatifs tout

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comme les moyens pour tenter de les atteindre. Dès lors, il sera utile de prendre en compte, par exemple :

les difficultés de comportement dans le projet de fonctionnement de tous types de groupes (repas, récréations, sortie…)

le partage de l’information entre professionnels (moment, modalité…)

l’appel à des personnes ressources (enseignants référents, professionnels ITEP…)

plans d’actions en cas de crise…

b- Des attitudes à adopter en toutes circonstances Il est quelques attitudes de base à adopter face à un jeune porteur de TCC :

Engager une communication individualisée

Expliquer en privé ce qu’on attend de lui, et engager un dialogue

Demander si des propos ont pu le blesser

Eviter dans un premier temps l’humour, le second degré : certains peuvent ne pas avoir accès à ce niveau de langage

Souligner tout succès

Encourager tout effort

Rester maitre de soi permet de diminuer l’agressivité : ce n’est pas la personne qui est visée, mais la fonction

Gérer les problèmes de comportements mineurs d’une manière positive et immédiate (ne pas différer la sanction)

Mettre en place des sanctions éducatives, sanction-réparation

Faire réfléchir à la finalité de la sanction

Permettre à l’élève de percevoir le manquement aux règles de fonctionnement du groupe et ses conséquences

Faire réparer le préjudice subi : prise en compte de la victime

Permettre la réinsertion dans le groupe

Définir des rituels d’entrée et de sortie (d’activité, de classe….)

c- L’observation Pour pouvoir travailler avec les jeunes atteints de TCC, il est indispensable de

bien les connaître, ne serait-ce que pour pouvoir anticiper d’éventuelles crises, les prévenir, ou savoir comment réagir. Cette observation est également nécessaire pour apporter des éléments aux équipes extérieures chargées conjointement de la prise en charge de ces enfants, mais aussi pour les collègues de l’école. Pour cela de nombreuses grilles d’observations existent. Celle que l’on peut trouver sur le site de l’ASH 82 semble pertinente, toutefois la grille d’observation construite par Sylvie Castaing37 a été pensée spécifiquement pour la prise en charge de ces élèves troublés, reprenant, à partir d’une trentaine de critères, les notions de constance, fréquence, persistance et intensité.

Dans un premier temps, même s’il est important d’interroger le comportement de ces jeunes de manière globale et constante, l’attention se portera sur des moments particuliers qui sont « principalement affectés par leur psychopathologie » :

37 Voir Annexe 1

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Les liens : le rapport à l’autre différent de soi

Les passages : passage d’une activité à une autre

Les changements : regard, attitudes ou ambiance différents

La socialisation : le rapport à la communauté, à l’institution, à la loi38 Par la suite, pour que cette observation soit la plus pertinente possible, il sera

nécessaire, dans un second temps, d’être également rigoureux sur39 :

La définition du comportement à observer (inattentions, agitations,

insultes, agressivité…) : une observation par comportement, pour ainsi

tenter de s’adapter à chaque difficulté rencontrée sans qu’elle ne soit

entravée par une autre

La durée et le lieu : séance, semaine, période /classe, CLAE, temps de

repas…

Fonctions et nombre des observateurs : impliqué, en retrait, plusieurs,

même fonctions dans l’école

Cadrage de l’observation : moments, lieux, personnes, attitudes du

jeunes, ses paroles ou actions…

Compilation des données pour analyse : graphique, grille…

Interprétation déconnectée de tout jugement : que des faits, seulement

des faits…

d- La mise en réseau des informations Les jeunes atteints de TCC, malgré leurs débordements, connaissent la règle,

mais sont souvent enclins à ne pas la respecter car ils n’ont pas forcément conscience des conséquences de leurs actes. Il faut avoir en tête le mythe de l’anneau de Gygès cité par Platon dans la République40.

Gygès était un berger innocent et simple, qui avait trouvé sur le corps d'un homme mort une mystérieuse bague. Or, un jour qu'il était convoqué par le roi en compagnie de tous les autres bergers, il joua avec sa bague et en tourna machinalement le chaton. Quelle ne fut pas sa surprise de constater que ce simple geste le rendait invisible ! Les autres bergers parlaient de lui comme s'il était absent, et personne ne remarquait sa présence. Il tourna de nouveau le chaton et réapparut aux yeux de tous. Les jours suivants, il renouvela l'expérience et fut alors convaincu du pouvoir magique de sa bague. Aussitôt, de noirs desseins lui vinrent en tête. Il se mit à envier le roi et ses richesses. Il retourna au palais où il fit en sorte de séduire la reine. Enfin, profitant de son invisibilité, il tua le roi et s'empara du trône. Protégé par l’anneau, Gygès s’est découvert l’âme d’un tyran : sûrs de leur impunité, les hommes se livreraient aux pires exactions. Si Platon, à travers cette légende, a voulu montrer que la visibilité est un gage de vertu politique, il est possible de s’en servir dans un cas très particulier, circonscrit dans un temps et dans un espace donné. Ainsi, il est

38 Scolariser les enfants présentant des troubles des conduites et des comportements (TCC), éducsol, aout 2012. 39 L. Champoux, C. Coutrure, E. Royer, L’observation systématique du comportement, Ministère de l’éducation, direction de l’adaptation scolaire et des services complémentaires, 1992, cité in B. Egron (sous la direction de ), Scolariser les élèves handicapés mentaux ou psychiques, CRDP Nord, 2010, p 70. 40 PLATON, La République, Livre II.

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important que les écoles et les enseignants ne restent pas seuls face à ce type de problème.

En premier lieu, les parents sont naturellement les premiers interlocuteurs à informer du comportement de leur enfant. Toutefois, il est important de prendre garde à ne pas cristalliser une situation. S’il est important de notifier les comportements déviants, il l’est tout autant de leur rapporter les attitudes positives du jeune. Pour éviter toute cristallisation, il est donc nécessaire d’instaurer un climat de confiance et d’entre-aide entre école et cellule familiale. Pour ce faire, des rendez-vous institutionnalisés peuvent être mis en place : ceci permet ainsi de ne pas avoir à faire aux familles uniquement quand il y a des crises ou de grosses difficultés. Il est en effet souvent difficile pour les familles de n’être contacté que lorsque leur enfant agit mal.

En outre, ce nécessaire partage de l’information doit également régulièrement se faire auprès des partenaires travaillant autour des jeunes : il est nécessaire que l’information circule entre tous afin pour que le jeune sente que des liens se tissent autour de sa situation. Le maillage entre les différents partenaires est une donnée essentielle dans la prise en charge des jeunes atteints de TCC : la moindre faille devient pour ces derniers une porte dans laquelle ils s’engouffrent, alimentant de fait un sentiment de toute puissance qui les rassure, mais qui est également bien souvent à l’origine de leurs difficultés.

Enfin, il est absolument nécessaire que l’école et les enseignants ne restent pas seuls face à ce genre de difficultés. L’enseignant référent est la personne ressource des diverses circonscriptions en matière de handicap. Il pourra le cas échéant expliquer aux familles et équipes pédagogiques les différentes prises en charge les plus adaptées selon les situations, mais également les possibles dans un avenir plus ou moins proche. Quelles que soient les situations, il est important que les interventions se fassent le plus tôt possible : plus vite ces jeunes sont pris en charge, et plus ils ont de chance de voir leurs difficultés s’apaiser rapidement.

e- Favoriser la collaboration avec les familles

Comme nous l’avons vu, au-delà de l’information aux parents, pour la réussite

de la prise en charge d’un jeune manifestant des TCC, leur implication est indispensable. Ceci peut être parfois extrêmement difficile dans la mesure où ces derniers peuvent être eux-mêmes dans des situations très difficiles envahissant leur quotidien, ou/et dans le déni des passages à l’acte de leur enfant. Toutefois, il faut avoir en tête que sans eux, tout travail peut devenir un combat contre des moulins à vent. En effet, si l’Institution et les parents ne peuvent aller dans le même sens, le jeune sera alors pris dans un conflit de loyauté, où à coup sûr, il prendra le parti de son père et sa mère.

Dans cette perspective, il devient alors nécessaire d’impliquer fortement les parents dans les stratégies éducatives mise en œuvre. Cela doit se faire le plus tôt possible, en s’assurant de leurs possibles et de leurs forces, essayant de ne jamais juger. Les rencontres doivent être régulières, et ne doivent pas se faire uniquement quand cela va mal. Elles ne doivent pas non plus être toujours centrées sur le scolaire. L’école ne doit pas devenir pour eux le lieu où ils vont pour entendre du mal de leur enfant. Ces rendez-vous peuvent être également un temps d’information permettant la compréhension du travail entrepris et ce sur des sujets très vastes comme compositions et fonctionnement des classes, les attentes comportementales classiques, dans le milieu scolaire ou dans les temps informels. Outre les rencontres,

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des modes de liaisons différents peuvent être mis en place comme un cahier de liaison (où seraient notés les comportements déviants comme les comportements positifs), une fiche de comportement avec des objectifs ciblés.

f- Planifier les grandes transitions scolaires

Comme il a été vu, ces jeunes ont de grandes difficultés à gérer quelque

changement que ce soit. Au niveau de l’Ecole, il est possible de les aider à appréhender les changements institutionnels (changement de niveau, de cycle, d’enseignant, classe transplantée….). Pour ce faire, lorsqu’une nouveauté est en vue, il faut :

Définir les raisons et les objectifs de cette transition, en fin d’année en

prévision, et en début pour permettre l’adaptation

Préparer et accompagner les professionnels nouveaux intervenant

autour du jeune (enseignant de la nouvelle classe, personnel de la

nouvelle structure d’accueil…) grâce à des éléments sur l’élève, sur sa

famille, sur ce qui a déjà été mis en place qui fonctionnait ou non…

Préparer et accompagner l’enfant par le biais de visite des lieux,

présentation aux nouvelles personnes et leur fonction, des modes

nouveaux de fonctionnement, par le biais également de rencontres avec

les jeunes sur ses ressentis et ses possibles difficultés d’adaptation.

E- Dans la classe : des adaptations particulières Il sera ensuite nécessaire d’adapter l’environnement de l’élève au sein de la

classe pour qu’il puisse s’apaiser. Ces quelques ajustements nécessaires sont extraites du livre de Bruno Egron, Scolariser les élèves handicapés mentaux ou psychiques41 , elles-mêmes reprises dans le document d’aide à la scolarisation des enfants atteints de TCC publié en aout 2012. Ces recommandations ont été légèrement reclassées, remaniées et parfois modifiées, et a été mis en italique ce que les AVS peuvent appliquer par eux-mêmes42.

a- Organisation de la classe

Structurer et gérer l’environnement temporel

o Instaurer, réaffirmer, exagérer les rituels : la ritualisation permet d’introduire de l’inconnu dans quelque chose de familier et d’attendu,

o Construire des emplois du temps, individualisés, complets et explicités.

41 B. Egron (sous la direction de ), Scolariser les élèves handicapés mentaux ou psychiques, CRDP Nord, 2010, p 70. 42 Scolariser les enfants présentant des troubles des conduites et des comportements (TCC), éducsol, aout 2012. En italique ce qu’un AVS peut mettre en pratique de manière individuelle.

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o Prévoir les différents horaires, et clairement les formuler (emploi du temps personnalisé, préciser les domaines d’enseignement ou de matière, leur forme, fréquence) à partir d’un code couleur par exemple.

o Signaler explicitement le début et la fin des activités habituelles de la classe (outils de visualisation du temps).

o Aider à la compréhension des moments d’attente pendant les temps d’apprentissage, en verbalisant la succession des tâches qui vont être demandées.

o Anticiper et expliquer les changements, dans la mesure du possible. o Envisager pour certains élèves, l’aménagement du cadre temporel : cela peut

passer par des temps de scolarisation partiels (PPS). o Tendre à atténuer les causes susceptibles d’amplifier certains traits du

comportement de l’élève (difficultés à se concentrer, de trop longues périodes d’immobilité, la faim, la fatigue..) en prévoyant des activités variées ; moduler temps courts/temps longs ; temps collectifs/temps individuels ; temps d’apprentissage/temps permettant de récupérer, voire même de ne rien faire si l’élève en a besoin.

o Aménager les temps de récréation lorsque cela est nécessaire (il peut y avoir 2 récréations au lieu d’une seule). Les temps de pause doivent faire l’objet d’une vigilance particulière, car ils peuvent générer des risques de débordements et de mise en danger de soi et d’autrui.

o Prévoir des moments de pause identifiés et dans des lieux particuliers

Structurer et gérer l’environnement spatial

o Adapter la classe et/ou l’espace de travail en fonction des activités (espace d’échanges, de travail individuel, d’activités précises …).

o Aménager les lieux, prévoir un « sas » lorsque la tension est trop vive pour permettre à l’élève de « récupérer » : anticiper la possibilité pour lui de quitter la salle pour se rendre dans un autre lieu, déterminé en amont en équipe et avec l’élève (à l’infirmerie, dans une autre classe pour une activité précise, dans le bureau du CPE…) afin d’éviter une crise et de lui permettre de s’apaiser. Préciser les conditions d’accès (seul, accompagné,…), les modalités et l’objectif donné à l’élève.

o Choisir l’emplacement physique de l’élève avec soin : tenir compte de l’élève assis à côté de lui, des distractions physiques possibles, de la place qu’il a pour bouger et de sa proximité avec l’enseignant. Il est important de ne pas isoler l’élève avec TCC, afin de ne pas entraver les interactions positives avec les autres élèves.

b- Face aux élèves

Structurer et gérer les relations sociales et affectives

o Organiser très tôt dans l’année scolaire des activités pour que tous les élèves apprennent à se connaître (travail de groupe, activités sportives)

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o Penser à l’aménagement du cadre. Il doit être contenant et sécurisant, avec des règles claires et justes (règlement de l’établissement et de la classe) construit et écrit avec les élèves. Définir les droits, les devoirs, les réparations et les éventuelles sanctions positives ou négatives. Être attentif à ce que le règlement soit appliqué, qu’il soit clair, court et cohérent.

o Continuité des règles établies ensemble, tout au long de l’année : la réaction des adultes doit être pérenne.

o Lorsque l’objectif est atteint, ne pas hésiter à faire évoluer ces règles et leur application, cela participe du renforcement positif.

o Verbaliser l’implicite, en particulier sur le plan affectif et relationnel. o Mettre en place un contexte de travail favorisant la coopération et de la

confiance au sein du groupe et avec l’adulte (construire des valeurs)

Soutenir et renforcer les comportements attendus

o Définir avec les élèves les comportements attendus, enseigner les habilités sociales, les comportements permettant des relations sociales : beaucoup n’ont jamais vraiment eu l’occasion de les connaitre en tant que véritable apprentissage

o Valoriser les comportements adaptés autant que sanctionner ceux qui sont inadaptés.

o Valider positivement, régulièrement et fréquemment les acquis cognitifs et comportementaux.

o Avoir des attentes accessibles par l’élève, donc adaptées à sa situation : contrats de comportement par exemple, signés à minima par l’élève et l’enseignant43

o Se rappeler que les adultes jouent le rôle de modèle et renforcent les comportements responsables et respectueux.

o Rester à l’écoute de l’élève, de ses préoccupations, afin qu’il sache que l’enseignant en mesure de discuter avec lui.

o Renseigner les parents en leur transmettant régulièrement un document d’information, comportant les projets actuels, le contenu du programme, les attentes en matière de comportement et de réussites scolaires et organiser des rencontres régulières avec eux.

Prévenir et gérer les débordements

o Cela ne peut se faire qu’à partir d’une observation précise, systématique et rigoureuse.

o Rester maître de soi : permet d’éviter l’effet miroir, donc à la fois amenuise l’agressivité du jeune, et permet aussi à l’adulte de se calmer naturellement s’il y avait lieu de le faire

o Anticiper la gestion des comportements difficiles chroniques : assurer des plans de prévention en équipe. Faire preuve de constance et de fiabilité dans les réponses apportées aux comportements.

43 Voir Annexe 2 : contrat « être élève » rédigé par le conseiller pédagogique de Haute Garonne. Et Annexe 3, fiche de suivi des compétences adaptée de la fiche précédente, pour une classe d’ITEP ou de SEGPA à remplir individuellement avec l’élève ou les élèves.

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o Adopter, au sein de l’équipe pédagogique, une attitude commune dans les modalités de prise en compte des manifestations comportementales afin de permettre à l’élève de construire des repères sociaux stables et structurants.

o Les sanctions doivent être adaptées à la faute, donc graduées, et elles doivent être pensées également en terme de réparation, permettant ainsi le retour dans le groupe.

c- Positionner l’AVS face aux jeunes atteints de TCC La question du positionnement de l’AVS au sein de la classe a pu se poser

quand il s’agit de jeunes présentant, comme nous l’avons vu, des troubles si variés et complexes que sont les TCC. Deux attitudes distinctes semblent se dessiner :

-être au soutien de l’élève : pour certains élèves pour qui la peur de

l’échec, de l’erreur, prédominent, il sera nécessaire de se trouver au plus près de ce dernier, tout en étant capable de garder la juste distance qui n’envahit pas son espace. Une main sur l’épaule peut être le geste qui calme et apaise, alors que pour d’autres une main posée sur la table suffirait.

-être dans un groupe : pour certains pour qui la présence de l’autre peut

être une agression, qui ne supporte pas sa différence et la nécessaire présence d’un autre pour être avec les autres, ou qui veut simplement être « comme les autres », il peut s’avérer indispensable que l’AVS s’adresse au groupe pour s’adresser à un seul. L’AVS se transforme alors en AVS collective déguisée.

Ainsi, après avoir vu un certain nombre de petits principes qui pourront amener

un jeune atteint de TCC à s’apaiser en classe, ou simplement lui permettre de ne pas trop laisser la place à ses manifestations, nous allons tenter d’exposer dans une dernière partie quelques principes pédagogiques qui, tout en permettant d’apprendre à toute une classe, pourront répondre particulièrement à leurs troubles.

F- Troubles du comportement et pédagogie au sein des classes de droit commun

La mise en place d’une pédagogie particulière dans une classe accueillant un

jeune souffrant de Troubles des Conduites et du Comportement doit répondre à une exigence simple, et pourtant complexe : prendre en compte les difficultés d’un seul jeune sans desservir l’ensemble d’un groupe classe. Les différentes modalités de prise en charge pédagogique que nous allons présenter ici entendent à la fois permettre à la classe de travailler normalement, tout en répondant à des problématiques spécifiques aux jeunes atteints de TCC.

a- La faible estime de soi : lutter contre la peur de l’erreur

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Accepter son erreur, ne pas renoncer face à une tâche qui pourrait mener vers un échec, si mince soit-il, voilà sans nul doute la plus grande difficulté des jeunes atteints de TCC en classe.

Dans les programmes de l’école maternelle, on peut retrouver des compétences qui, en négatif, renvoient à cette capacité que doivent avoir les élèves à accepter leurs erreurs. En effet, à la fin du cycle 1, pour « devenir élève », l’enfant doit être capable de « demander de l’aide », donc pouvoir assumer devant l’autre qu’il pense ne pas savoir faire, qu’il peut se tromper et non renverser sa table ou jeter la feuille face au premier obstacle ou au sentiment d’une erreur possible à venir. Il doit également « faire l’expérience […] de la persévérance » et donc continuer malgré ses échecs. Il doit encore être capable « d’identifier des erreurs dans [ses] productions44 », il doit donc avoir la capacité de montrer à l’autre qu’il s’est trompé. Pour ce faire, l’erreur ne doit donc pas être envisagée par les élèves, mais également par les enseignants, comme une faute. Elle doit acquérir aux yeux de tous un caractère positif : ne plus être vue comme un frein à l’apprentissage, mais une aide dans ce processus.

Le statut de l’erreur : un statut lié au concept d’apprentissage.

Pendant longtemps, apprendre c’était acquérir « naturellement » des

connaissances. On entend par « naturellement » que les connaissances s’ancrent dans la mémoire sans difficultés apparentes. Ainsi, on donne des cours magistraux comme si voir et faire entraînaient naturellement des acquisitions ; celles-ci pouvant servir de base pour aller plus loin. Cette théorie part de l’idée que si l’enseignant explique bien, suit un bon rythme, choisit de bons exemples et si les élèves sont attentifs et motivés, il ne devrait survenir aucune erreur. Quand les erreurs apparaissent « malgré elles », elles sont déniées. Dans ce sens, il y a donc deux possibilités : l’erreur en tant que faute et l’erreur en tant que bogue. L’erreur peut être considérée comme une faute dans un modèle d’apprentissage dit transmissif. Cette faute est mise à la charge de l’élève qui ne se serait pas assez investi, qui n’aurait pas mis en œuvre toutes ses compétences. Dans ce contexte, l’erreur doit être sanctionnée lors d’une évaluation finale. L’erreur peut également être considérée comme un bogue dont l’origine serait une mauvaise adaptation de l’enseignant au niveau réel de ses élèves. Dans ce cas, l’erreur induit chez l’enseignant un effort de réécriture de la progression, en décomposant les difficultés en étapes élémentaires beaucoup plus simple, mais sans jamais savoir « ce qui se passe dans la boite noire 45». Il s’agit ici d’un modèle comportementaliste, inspiré de la psychologie behavioriste initié par James Watson et Burrhus Skinner, dans laquelle l’activité de l’élève est guidée pas à pas afin de contourner les erreurs.

Avec les travaux de Piaget, le statut de l’erreur recouvre un autre aspect. En effet, selon l’auteur, apprendre c’est franchir progressivement une série d’obstacles. Dans cette théorie, et dans les modèles constructivistes modernes qui en découleront en partie, l’apprentissage passerait obligatoirement par des moments de difficultés face auxquels les élèves doivent remplacer leurs anciennes conceptions erronées par de nouvelles, correctes. Pour apprendre, l’élève doit prendre conscience de ses erreurs, de son fonctionnement mental. Ainsi, les erreurs (performances) servent

44 Ministère de l’Education Nationale, Programme de l’école maternelle, petite section, moyenne section, grande section, hors-série n°3 du 19 juin 2008. 45 ASTOLFI Jean-Pierre, L’erreur, un outil pour enseigner, Issy-les-Moulineaux, ESF, 2008, p14.

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d’indicateurs de ces processus intellectuels en jeu. Cette nouvelle théorie sur l’apprentissage confère donc à l’erreur un statut beaucoup plus positif : elle devient un « symptôme intéressant d’obstacles auxquels la pensée est confrontée », « un indicateur de processus46 ».

Ainsi dans chaque théorie de l’apprentissage, l’erreur existe. Même si, pour la faire accepter aux élèves, il semble préférable de la considérer soi-même comme « un outil pour enseigner », et non comme une faute du jeune ou du professeur, elle est une péripétie inévitable de l’acte d’apprendre. L’élève devra donc, quel que soit le modèle choisi par son enseignant, accepter de se tromper : l’utilisation du cahier de brouillon peut permettre d’aller dans ce sens.

Le cahier de brouillon : symbole du droit à l’erreur Bien souvent les attitudes du rejet du travail à faire est dû à la peur de se

tromper. Même si une attitude rassurante est nécessaire, elle n’est pas véritablement efficace au vu du temps et de l’énergie que cela peut demander. Il est dès lors possible d’utiliser les cahiers de brouillon mis en place dans toutes les classes d’une autre manière : un lieu identifié de droit à l’erreur.

Le cahier de brouillon est présenté aux élèves comme leur cahier propre. A la différence des autres cahiers de la classe, il n’y aucune règle de tenue, de propreté, de sens, d’ordre. Même si ils doivent l’avoir en classe, ils peuvent s’en servir pour autre chose que le travail scolaire. Il doit devenir un outil familier, qu’ils ont l’habitude de manier, qu’ils connaissent. Il doit surtout et avant tout devenir un cahier dont la sacralité symbolique attachée aux affaires scolaires aurait disparu : comment être libre face à un objet sacré ? Beaucoup d’élèves ont en effet tendance à ne pas entrer dans la tâche, ou à s’arrêter de travailler, de peur que l’objet scolaire ne soit « sali » par les ratures, ou les coups d’effaceur qu’une erreur pourrait produire. Dans la mesure, où ce cahier devient à eux, qu’ils savent qu’ils peuvent y faire ce qu’ils veulent, il n’y a pas de peur des ratures. Il arrive parfois que ce cahier devienne symbole de liberté au moment de la classe47.

Dans les faits, le cahier de brouillon peut être utilisé dans la quasi-totalité des matières enseignées, et ce de manière très variée et dans des objectifs pédagogiques bien différents. On peut le retrouver, comme une évidence, au moment des temps de recherche personnelle en situation problème, ou de recherche collective dans la préparation d’exposé. Il peut servir de support aux exercices d’application, lors de l’apprentissage des techniques opératoires, de la numération ou en leçon de « grandeur et mesure ». Il peut même dans certains cas être le medium qui va permettre à l’enseignant le contrôle des connaissances. Il est toutefois nécessaire d’avoir à l’esprit dans un premier temps, que si dans le cahier de brouillon on peut presque tout faire, dans les autres cahiers, la rigueur est de mise : seul le cahier de brouillon permet cette liberté d’usage. Ensuite, pour l’enseignant, il faut adapter cette pratique en fonction des jeunes qui sont en face de lui. De multiples cas peuvent s’offrir à nous : de celui que le manque de repère peut angoisser, à celui qui va déborder à outrance et en dehors du cahier. Même si généralement, la liberté offerte accompagnée de la règle simple « il n’y a que dans ce cahier que vous pouvez faire ce que vous voulez » peut permettre de tempérer ces écueils, la vigilance doit rester de mise. Enfin, dernière difficulté majeure qui nait nécessairement de cette pratique,

46 Ibid., p.15 47 Voir ANNEXE 4

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le fait, qu’en classe, le cahier serve à autre chose que pour le scolaire : là encore, c’est à l’enseignant de veiller à ce que la règle soit respectée.

Si par la liberté symbolique établie dès le début de son utilisation, le cahier de brouillon permet de mettre fin à la sacralité propre de son caractère scolaire, et donc d’amener le jeune à accepter de se tromper, il peut également permettre d’atteindre ce dernier objectif par une autre voie, celle de l’enseignant lui-même. En effet, exercice auquel on peut se livrer particulièrement avec de nouveaux élèves, mais également prolonger de manière intermittente par la suite, se tromper et raturer, sous leurs yeux quand on écrit dans leur cahier de brouillon. A cela, il est deux vertus. Tout d’abord, le fait que l’enseignant, symbole de l’autorité de la classe, de ses règles, rature de manière grossière prouve qu’effectivement, on a le droit de ne pas tenir ce cahier de manière forcément propre, et donc d’en faire un usage différent de ce qu’on pouvait en faire dans d’autres environnements : « si le maître rature, j’ai bien le droit de raturer ». Cela devient une preuve symbolique de cette autorisation. Ensuite, et c’est bien là l’important, par une ou des erreurs faites devant eux, l’enseignant montre à ses élèves que l’erreur est partagée par tous. Cet acte tend à rompre la sacralité de « l’erreur faute » et donc, dans la mesure où c’est celui qui doit transmettre le savoir qui se trompe, il symbolise naturellement le fait que tout le monde peut se tromper, et par conséquent qu’il a le droit lui aussi à l’erreur.

Exemple : ML, lorsqu’enfin il venait en classe, ne supportait pas de commettre la moindre

erreur. Face à elle, ou face à son incapacité à faire, il préférait arrêter tout travail ou encore partir de la classe. Or, une fois où l’on a pu le sentir encore prêt à fuir face à ses difficultés, lui donnant un exemple de soustraction, « l’enseignant » joua la scène, sur son cahier de brouillon, de celui qui se trompe : le calcul fut fait à deux reprises, raturant outrancièrement le travail, pour finalement y parvenir. Le résultat fut saisissant : il s’engagea alors dans la tâche, lui aussi se trompant, et raturant quand il ne parvenait pas au bon résultat, pour ensuite recommencer. Bien évidemment, la séance suivante, il reprit ses habitudes de fuites, mais petit à petit il put sortir de ce mécanisme de défense grâce à ce mode particulier de fonctionnement.

L’incapacité à accepter l’erreur est sans nul doute le premier trait caractéristique qui frappe l’enseignant en charge de jeunes atteints de TCC. L’utilisation du cahier de brouillon peut permettre de lutter contre cela. Autre difficulté majeure qui empêche souvent ces jeunes à accéder au statut d’élève, leur difficulté à être autonome en classe.

b- Défendre son sentiment de toute puissance : rituel et méthode transmissive

Comme il a été vu plus haut, les jeunes atteints de TCC sont dans une quête

continue de défense de leur sentiment de toute puissance, de leur besoin de maîtrise absolue . Ils veulent avoir le contrôle sur tout, et, encore une fois, l’inconnu les angoisse, les déstabilise et est souvent la cause de manifestations physiques qu’ils ne peuvent pas refreiner. Face à cela, l’enseignant va donc devoir tenter de les rassurer et de leur donner l’impression qu’ils sont dans le déjà vu, qu’ils maîtrisent juste un peu ce à quoi ils assistent.

Dans cette perspective, il peut donc être utile de ritualiser toutes les parties de la journée (entrée et sortie de la classe), les débuts et fins des activités, les

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présentations des leçons, des exercices…. Le rituel, de par sa définition même (« Ensemble des règles et des habitudes fixées par la tradition48 ») induit donc que les actes de l’enseignant, les tâches de l’élève, sont connus de tous, et reviennent régulièrement : pas de mystère, pas de surprise, donc pas de sentiment de perte de maîtrise et d’inquiétude.

De la même manière, la méthode transmissive, bien que rarement préconisée avec l’ensemble des élèves, peut parfois avoir ses vertus avec ces jeunes à l’esprit troublé. En effet, avec cette méthode :

« …l’enseignant maîtrise un contenu structuré et transmet ses connaissances sous forme d’exposé : c’est le cours magistral qui laisse peu de place à l’interactivité avec l’apprenant. Dans le triangle de Jean Houssaye, cela correspond à la relation privilégiée enseignant-savoir où l’enseignant est un expert du contenu, un détenteur de vérité qui transmet l’information de façon univoque49 »

Ainsi, le savoir est donné à l’élève directement. Les élèves connaissant l’objet

de la leçon, la manière de traiter le problème, la part d’angoisse qui peut surgir face à des thèmes abscons au départ pour eux, peut être atténuée. Ils savent où ils vont, ils ont les rails face à eux et sont de fait rassurés. A noter, qu’avec ces jeunes, il est nécessaire de ménager des temps où ils peuvent eux aussi entrer dans une réflexion propre.

c- Donner du sens aux apprentissages

Ces jeunes, comme nous avons pu le voir ont de grandes difficultés à appréhender le moyen et le long terme. Il devient alors pour eux extrêmement complexe d’envisager des savoirs et des compétences, des apprentissages, ayant une utilité qui ne sera pas dans l’immédiat. Il devient donc nécessaire qu’ils éprouvent que les efforts qu’ils fournissent ont rapidement une utilité (qu’ils apprennent), qu’il y a des applications concrètes. En somme, que l’école « ne sert pas à rien » : soit que tout effort est vain parce qu’ils sont incapables d’apprendre, soit que tout apprentissage est inutile, car inutile dans « la vraie vie ». Pour ce faire plusieurs pistes possibles :

o La pédagogie de projet : c’est « un mode de finalisation de l’acte

d’apprentissage. L’élève se mobilise et trouve du sens à ses apprentissages dans une production à portée sociale qui le valorise. Les problèmes rencontrés au cours de cette réalisation vont favoriser la production et la mobilisation de compétences nouvelles, qui deviendront des savoirs d’action après formalisation.50 » . C’est une démarche qui prend en compte la parole des élèves, leurs besoins, leurs souhaits. Ils peuvent ainsi s’impliquer et apprendre car c’est dans un but identifié ayant une utilité claire.

o Activités signifiantes : au-delà de la pédagogie de projet qui peut être longue à mettre en place, et dont il ne faut pas non plus abuser pour ne pas lasser, il est possible de mettre en place des activités dont les élèves éprouveront le sens rapidement. A titre d’exemple, s’entrainer à lire une

48 Dictionnaire Larousse, 2011. 49 http://eduscol.education.fr/bd/competice/superieur/competice/libre/qualification/q3b1.php 50 M. Huber, Apprendre en projet : la pédagogie du projet-élèves, 1999, Chronique Sociale.

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poésie, ou l’apprendre par cœur dans le but de la réciter à une autre classe, ou dans une autre institution (scolaire ou autre).

o Montrer à l’élève qu’il apprend : il ne faut pas hésiter, dans un premier temps, à insister sur des apprentissages dont le résultat est visible très rapidement par l’élève. La lecture est un apprentissage très long qui demande persévérance et dont l’acquisition ne se fera véritablement qu’après plusieurs années. En revanche, certaines activités telles que la numération ou les techniques opératoires permettent d’identifier ostensiblement leurs progrès. Ces progrès peuvent être ensuite capitalisés par le biais de portefeuilles de réussites, d’arbre de connaissances, ou de simples tableaux

o Ne pas sous-alimenter cognitivement ces élèves : il ne faut pas avoir peur de stimuler ces élèves atteints de TCC. Il ne faut pas oublier que ces jeunes, même s’ils peuvent avoir un retard scolaire, ne sont pas déficients. Ces jeunes ne sont « pas dupes, et la reconstruction de leur estime de soi passe par un obstacle surmonté, des acquisitions nouvelles.51 »

d- Des mises en place à risques De par leurs pathologies, certaines mises en place de séances peuvent

permettre un espace où leurs troubles trouveront un lieu et un temps où s’exprimer. C’est le cas par exemple des manipulations en sciences qui, si elles ne sont

pas très bien pensées et extrêmement cadrées peuvent être source de débordement. Dans cette perspective également, les activités de groupe visant à se servir du conflit sociocognitif sont plus souvent source d’angoisse car elles sont nécessairement, une plongée dans l’inconnu.

Il est à noter toutefois, qu’il ne faut pas non plus éliminer totalement ces mises en place des pratiques. En effet, si l’objectif pédagogique en termes de savoir ou de compétences scolaires est difficilement atteignable par ces biais, ces activités peuvent permettre de travailler des attitudes qu’ils ne maîtrisent pas dans les relations aux autres, dans des groupes.

e- L’empêchement de penser : écouter, parler et écrire

Face à la difficulté de penser et ses conséquences que définit Serge Boimare,

prenant pour base des textes fondamentaux, ce dernier a mis en œuvre des séances pédagogiques avec de jeunes collégiens en difficultés visant à lutter contre cet « empêchement de penser ». Ces séances quotidiennes d’une heure, sont construites en trois temps, suivant un rituel clair. En outre, elles permettent de travailler non seulement les difficultés spécifiques des jeunes atteints de TCC, mais également des compétences et connaissances que des élèves ordinaires se doivent également d’acquérir.

51 B. Egron (sous la direction de), Scolariser les élèves handicapés mentaux ou psychiques, CRDP Nord, 2010, p.77.

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Le choix des textes Pour ce faire, Serge Boimare entend s’appuyer sur des textes fondamentaux

appartenant à la culture de l’Humanité tels que les grands mythes grecs, ou les contes52.

Le programme consolidé du cycle 3 de 2020 se donne notamment pour objectif de construire « une première culture littéraire et artistique structurée53 ». Il précise également que :

« pour que les élèves gagnent en autonomie dans leurs capacités de lecteur, l’apprentissage de la compréhension en lecture se poursuit au cycle 3 et accompagne la lecture et l’écoute de textes et de documents dont la complexité et la longueur sont croissantes. De ce point de vue, les œuvres du patrimoine et de littérature de jeunesse, les textes documentaires constituent des supports de lecture privilégiés pour répondre à cette exigence. »

Ainsi, on peut lire dans le corpus des textes permettant de construire cette « Culture littéraire et artistique », que les récits mythologiques permettent de travailler le thème « se confronter au merveilleux, à l’étrange ».

De plus, en ce qui concerne les élèves atteints de TCC, ces textes sont structurants et d’un haut niveau culturel. Ils font écho aux fonctionnements psychiques des jeunes, structurant leur propre fantasme et diminuant leur peur d’apprendre. Ils répondent aux questions fortes qui intéressent les jeunes et notamment ceux qui n’ont pas l’usage de la pensée. Ces textes permettent d’apporter « des images à partir des mots lus », « mettant enfin de la forme et du contenu sur des peurs54 » Cinq thèmes reviennent particulièrement55 :

les origines (Chronos et Zeus, Œdipe…)

le désir confronté à la loi et à l’attente (La boite de Pandore; Hélène et Paris…)

le conflit entre génération (Icare et Dédale, …)

l’organisation du groupe social (Créon et Antigone)

les sentiments éprouvés devant les grandes épreuves de la vie comme la séparation, l’amour, la mort (Eurydice et Orphée, Thésée et Ariane…)

Enfin, il faut être vigilant dans le choix de textes proposés. Ces derniers doivent présenter trois qualités :

Retenir l’intérêt, car ces jeunes ont parfois du mal à entrer dans une histoire, d’autant plus quand qu’ils ont des difficultés à écouter quand on s’adresse à un groupe.

Permettre « de mettre des mots et du scénario sur des émotions et des inquiétudes » pouvant émerger quand la réflexion doit advenir.

« donner du fil pour s’éloigner » : les textes doivent à la fois permettre à ces jeunes de se rapprocher de leurs peurs, tout en leur laissant la possibilité de les fuir tout en même temps.

52 B. Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, Robert Laffon, 1976, réédition Pocket, 1999. 53 Programme consolidé BOEN n° 31 du 30 juillet 2020 54 S. Boimare, « la psychopédagogie face aux adolescents ascolaires », in S. Boimare, Pratiquer la psychopédagogie, Dunod, 2010, p.20. 55 Ibid., p21.

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1er temps : un travail d’écoute (15 à 20 minutes)

Chaque séance débute donc par un temps de lecture offerte de 15 à 20 minutes. Ce travail est réservé au nourrissage culturel des jeunes.

Il a un double objectif :

Apprendre à écouter : cela répond directement aux programmes de l’Éducation Nationale « Écouter lire des œuvres intégrales, notamment de littérature de jeunesse ».

Mettre des mots et du scénario sur des inquiétudes arrivant avec l’activité intellectuelle

La séance peut débuter par une présentation rapide afin de se remémorer les

histoires vues et le monde mythologique. Ci-dessous vous trouverez un exemple s’appuyant sur le livre « Contes Et Légendes de la Mythologie Grecque » de Claude Pouzadoux : https://prezi.com/view/6SBKn58MfmuHf8EQZx7N/

Compétences du socle travaillées56 :

Domaine 1 « Les langages pour penser et communiquer Comprendre, s’exprimer en utilisant la langue française à l’oral et à l’écrit »

o Comprendre des énoncés oraux Compétences travaillées au regard des programmes de cycle 357 :

Écouter pour comprendre un message oral, un propos, un discours, un texte lu.

Attendus de fin de cycle 3 :

Écouter un récit et manifester sa compréhension en répondant à des questions sans se reporter au texte.

2ème temps : un travail d’argumentation (15 à 20 minutes)

En s’appuyant sur ce qui vient d’être lu, et guidé par l’enseignant, le deuxième

temps de la séance est destiné à structurer et fixer le récit, puis faire entrer la classe dans un débat, et donc à inciter les élèves à argumenter.

Le premier temps du passage à l’oral va permettre aux élèves de redire, reformuler avec leurs propres mots ce qui a été raconté. Cette étape permet de marquer les grands temps de l’histoire, d’éviter les éventuelles erreurs de compréhension, les malentendus, puis enfin de dégager une ou plusieurs questions posées par le texte (Pourquoi Prométhée est-il puni pour avoir donné le feu aux Hommes ?) Pour les plus jeunes, ou les plus en difficulté, les supports du dessin ou du jeu de rôle peuvent être d’un grand secours. Cela permet notamment de « rattraper » ceux qui avaient pu se perdre dans la lecture.

56 https://cache.media.eduscol.education.fr/file/College_2016/74/4/RAE_Evaluation_socle_cycle_3_643744.pdf 57 Ministère de l’Education Nationale, Programme pour le cycle 3, novembre 2015.

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Dans un second temps, doit affleurer un échange tentant de répondre à la question qui a pu émerger du récit. Pour que cela puisse se faire correctement, il est nécessaire de prendre garde à ce qu’un seul plus à l’aise ou plus favorisé d’un point de vue culturel, ne garde le temps de parole que pour lui. C’est par cet exercice de débat, basé sur des récits qui leur font écho, que le travail, et l’exercice réflexif peut se mettre en place et se construire.

Compétences du socle travaillées58 :

Domaine 1 « Les langages pour penser et communiquer, comprendre, s’exprimer en utilisant la langue française à l’oral et à l’écrit »

o S’exprimer à l’oral

Domaine 3 « La formation de la personne et du citoyen » o Maîtriser l’expression de sa sensibilité et de ses opinions,

respecter celles des autres o Exercer son esprit critique, faire preuve de réflexion et de

discernement

Domaine 5 « Les représentations du monde et l’activité humaine » o Raisonner, imaginer, élaborer, produire

Compétences travaillées au regard des programmes de cycle 359 :

Parler en prenant en compte son auditoire.

Participer à des échanges dans des situations diverses.

Adopter une attitude critique par rapport à son propos. Attendus de fin de cycle 3 :

Écouter un récit et manifester sa compréhension en répondant à des questions sans se reporter au texte.

Participer de façon constructive aux échanges avec d’autres élèves dans un groupe pour confronter des réactions ou des points de vue.

3ème temps : un travail d’écriture (15 à 20 minutes) Enfin, après l’écoute, et le parler, Serge Boimare introduit dans un dernier

moment, le temps de l’écriture. Il doit se faire de manière individuelle, répondant à la question émergeante. Un minimum et un maximum de lignes doivent être établis en fonction de l’âge et des capacités des jeunes qui travaillent. Dans une même classe, cela permet donc aux enseignants de personnaliser les consignes.

Même si l’auteur ne l’évoque pas, il est possible que, dans les premiers temps et en fonction des publics, le travail d’écriture ne soit pas forcément une réponse à la question qui a pu émerger, mais une restitution de l’histoire entendue. En effet, une question n’émerge pas forcément des débats : le débat, et la naissance d’une question semblent au final la partie la plus complexe à mettre en œuvre. En outre, raconter avec ses mots le mythe qui vient d’être lu, s’apparente en arts plastiques au faire « à la manière de ». Là encore, pour ceux pour qui la mise en réflexion est d’une grande

58 https://cache.media.eduscol.education.fr/file/College_2016/74/4/RAE_Evaluation_socle_cycle_3_643744.pdf 59 Ministère de l’Education Nationale, Programme pour le cycle 3, novembre 2015.

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complexité, le fait de raconter, avec ses mots, une histoire connue, permet de rassurer celui pour qui la recherche intérieure trouble au plus haut point.

Le travail d’écriture doit donc toutefois se faire individuellement afin que les élèves atteint de TCC puissent « s’initier à cette solitude indissociable de l’effort intellectuel60 », et qui, comme nous avons pu le voir plus haut, est source de grande angoisse. De par les modalités mises en place pour en arriver à cette production, cette angoisse peut s’en trouver amenuisée :

la lecture offerte leur donne des images nouvelles, permettant moins de saut dans l’inconnu.

Le temps du débat leur permet un entrainement à la réflexion, renforçant le lien entre leurs peurs intérieures et les nécessités extérieures.

A la suite de ce travail solitaire, un retour au groupe peut se faire par la lecture

devant celui-ci de sa production. Ce passage n’est pas obligatoire, mais en général peu sont ceux qui s’y refusent.

Compétences du socle travaillées61 :

Domaine 1 « Les langages pour penser et communiquer Comprendre, s’exprimer en utilisant la langue française à l’oral et à l’écrit »

o Écrire o Exploiter les ressources de la langue

Domaine 5 « Les représentations du monde et l’activité humaine » o Raisonner, imaginer, élaborer, produire

Compétences travaillées au regard des programmes cycle 3 62 :

Maîtriser les bases de l’écriture au clavier.

Rédiger des écrits variés.

Réécrire à partir de nouvelles consignes ou faire évoluer son texte.

Prendre en compte les normes de l’écrit pour formuler, transcrire et réviser.

Attendus de fin de cycle 3 :

Écrire un texte d’une à deux pages adapté à son destinataire.

Après révision, obtenir un texte organisé et cohérent, à la graphie lisible et respectant les régularités orthographiques étudiées au cours du cycle.

En rédaction de textes dans des contextes variés, maîtriser les accords dans le groupe nominal (déterminant, nom, adjectif), entre le verbe et son sujet dans des cas simples (sujet placé avant le verbe et proche de lui, sujet composé d'un groupe nominal comportant au plus un adjectif ou un complément du nom ou sujet composé de deux noms, sujet inversé suivant le verbe) ainsi que l'accord de l'attribut avec le sujet.

Ce type de séance d’une heure doit s’inscrire dans une séquence construite et pensée. Elle peut s’inscrire dans une pédagogie de projet. Ainsi l’objectif final de la séquence peut être la réalisation d’un livre rassemblant

Des productions individuelles d’un même mythe

60 Ibid., p. 23. 61 https://cache.media.eduscol.education.fr/file/College_2016/74/4/RAE_Evaluation_socle_cycle_3_643744.pdf 62 Ministère de l’Education Nationale, Programme pour le cycle 3, novembre 2015.

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Des écritures de nouveaux mythes s’inspirant de ce nouveau monde par des productions individuelles ou par un dispositif de « cadavre exquis ».

De nombreux prolongements dans d’autres domaines sont également possibles,

dans la mesure où « les entrées du programme de culture littéraire et artistique permettent des croisements privilégiés avec les programmes d’histoire, d’histoire des arts et d’enseignement moral et civique » :

Histoire des arts : o Donner un avis argumenté sur ce que représente ou exprime une œuvre

d’art : Observer et identifier des personnages mythologiques ou

religieux, des objets, des types d’espaces, des éclairages. Connaissance de mythes antiques et récits fondateurs,

notamment bibliques. o Relier des caractéristiques d’une œuvre d’art à des usages, ainsi qu’au

contexte historique et culturel de sa création : Mettre en relation un texte connu (récit, fable, poésie, texte

religieux ou mythologique) et plusieurs de ses illustrations ou transpositions visuelles, musicales, scéniques, chorégraphiques ou filmiques, issues de diverses époques, en soulignant le propre du langage de chacune.

Enseignement Moral et civique : o Le respect d’autrui

Respecter autrui et accepter les différences (à partir des mythes par exemple) :

Respect des différences (Héphaïstos)

Les préjugés et les stéréotypes.

L’intégrité de la personne (Apollon et Daphné) Respecter les engagements pris envers soi-même et envers les

autres Lors du temps 2, Nuancer son point de vue en tenant compte du

point de vue des autres.

Savoir identifier les points d’accord et les points de désaccord.

Respecter le droit des autres à exprimer leur opinion. o Construire une culture civique

Exercer son jugement, construire l’esprit critique

Prendre part à une discussion, un débat ou un dialogue : prendre la parole devant les autres, écouter autrui, formuler et apprendre à justifier un point de vue.

Développer le discernement éthique.

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Les troubles des conduites et du comportement

Tentatives de définition et modalités de prise en charge Charles Lagard Mars 2021

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Ainsi, comme il a pu être vu, il n’existe pas de recette toute prête pour prendre en charge les jeunes/élèves atteints de Trouble des Conduites et du Comportement. En milieu ordinaire, c’est bien souvent par une série de petits ajustements, de nouvelles mises en place, de minces changements que la prise en charge peut se faire. Il n’y a pas une seule réponse, mais un ensemble de possibles adaptés, adaptables et changeants en fonction des personnalités en face desquelles nous sommes amenés à travailler. Dans un futur très proche (si ce n’est pas déjà le cas), l’évolution rapide de la démographie scolaire des jeunes en situation de handicap va amener les enseignants, spécialisés ou non, en milieu ordinaire ou spécialisé, à réadapter et personnaliser leurs pratiques, et à réinterroger sans cesse non seulement leur manière de faire, mais également leur manière d’être. Ce rapide tour d’horizon, inspiré à la fois des chercheurs en la matière, de pédagogues reconnus, mais également d’expériences personnelles, entend donner quelques premières pistes, afin que celui qui les emprunte puisse par lui-même trouver et tracer son propre chemin

.

Page 45: ÉLÈVES PERTURBATEURS ET TROUBLES DES CONDUITES ET DU

Annexes

Page 46: ÉLÈVES PERTURBATEURS ET TROUBLES DES CONDUITES ET DU

46

4. Annexe 1 : Grille d’Observation du comportement (C. S. Marguerite-Bourgeoys)

Nom de l’élève Réalisé par, fonction École Date

AU CHAPITRE DES INDICATEURS SUIVANTS LE COMPORTEMENT EST JUGÉ… ADÉQUAT

SI « NON ADÉQUAT » IDENTIFIEZ

CONSTANCE* FRÉQUENCE PERSISTANCE INTENSITÉ

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OUI NON POUR LUI-MÊME POUR LES AUTRES

FACE À LA TÂCHE :

est attentif aux consignes

dispose du matériel nécessaire pour réaliser ses travaux

utilise adéquatement son matériel

commence son travail sans l’intervention de l’enseignant

réalise le travail demandé en respectant les consignes

travaille sans se laisser distraire et sans perdre de temps

fournit des efforts face à une difficulté

termine son travail dans le temps alloué

EN CLASSE :

est régulièrement présent en classe

arrive à l’heure à ses cours

garde silence lorsque l’enseignant le demande

lève la main et attend la permission de l’enseignant pour exprimer un commentaire ou faire une demande

se déplace en marchant calmement dans les locaux de classe

accepte la responsabilité et les conséquences de ses gestes

Page 47: ÉLÈVES PERTURBATEURS ET TROUBLES DES CONDUITES ET DU

47

Commentaires :

Fréquence : Combien de fois les comportements inappropriés se manifestent-il ? Persistance: Depuis combien de temps les comportements inappropriés se manifestent-il ? Constance : Dans combien de situations les comportements inappropriés se manifestent-il ? Intensité : Quelles sont les conséquences pour l’élève lui-même et pour les autres ?

AU CHAPITRE DES INDICATEURS SUIVANTS LE COMPORTEMENT EST JUGÉ… ADÉQUAT

SI « NON ADÉQUAT » IDENTIFIEZ

CONSTANCE* FRÉQUENCE PERSISTANCE INTENSITÉ

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OUI NON POUR LUI-MÊME POUR LES AUTRES

LORS DES DÉPLACEMENTS :

se déplace en marchant calmement

respecte les règlements de l’école :

FACE À L’ADULTE :

coopère avec l’adulte

demande l’aide de l’adulte lorsque nécessaire

accepte l’aide et le support de l’adulte

respecte l’adulte en paroles et en gestes

contrôle ses réactions émotives dans les situations difficiles

écoute l’adulte lorsqu’il lui adresse la parole

accepte bien les remarques de l’adulte

répond à l’adulte de façon convenable

participe activement à la résolution des conflits en proposant des solutions

FACE AUX PAIRS :

est reconnu positivement par les autres élèves

prend sa place adéquatement au sein du groupe

participe à la vie de groupe

demande et accepte l’aide des pairs lorsque nécessaire

écoute et respecte les autres lorsqu’ils s’expriment

respecte les autres en paroles et en gestes

contrôle ses réactions émotives dans les situations difficiles

participe activement à la résolution des conflits en proposant des solutions

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5. Annexe 2 : contrat « être élève » Être élève / Contrat Nom : Période du au

Je suis capable de… Déjà

acquis avant

Priorités à travailler

Évaluation de la période

Par rapport à soi-même

1 – Être à l'heure

2 – Rester en classe

3 – Avoir une tenue corporelle adaptée à la situation

4 – Avoir ses outils pour travailler

5 – Respecter son matériel

Par rapport aux autres

6 – Respecter les règles de vie de la classe

7 – Avoir un langage adapté à la situation

8 – Respecter les autres physiquement

9 – Respecter les autres moralement

10 – Respecter le matériel des autres

Par rapport au travail individuel

11 – Commencer mon travail rapidement

12 – Respecter les consignes de travail

13 – Demander de l'aide

14 – Rendre un travail soigné

15 – Finir mon travail

Par rapport au travail collectif

16 – Respecter le travail des autres

17 – Travailler seul au milieu des autres

18 – Travailler à deux

19 – Travailler en groupe

20 – Aider un autre élève

Bilan de la période par rapport au contrat

Nombre de compétences

acquises

Nombre de compétences

travaillées

V

O

R

Signature de l'élève : Signature de l'adulte référent : Signature du membre de direction :

Méthodologie du contrat :

1 - Les réussites de l'élève Déterminer avec l'élève les compétences déjà acquises auparavant

2 – Le contrat avec l'élève Définir avec l'élève les compétences prioritaires qui seront travaillées pour la période

3 – Validation des nouvelles compétences Evaluer avec l'élève l'acquisition des compétences prioritaires choisies, pour la période

Page 49: ÉLÈVES PERTURBATEURS ET TROUBLES DES CONDUITES ET DU

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Annexe 3 : fiche de suivi « être élève »

Maîtrise insuffisante

Maîtrise fragile

Maîtrise satisfaisante

Très bonne maîtrise

Observations

Par rapport à soi-même

1 – Être à l'heure

2 – Rester en classe

3 Avoir une tenue corporelle adaptée à la situation

4 – Avoir ses outils pour travailler

5–Respecter son matériel

Par rapport aux autres 6 – Respecter les règles de vie de la classe

7 – Avoir un langage adapté à la situation

8 – Respecter les autres physiquement

9 – Respecter les autres moralement

10 – Respecter le matériel des autres

Par rapport au travail individuel 11 – Commencer mon travail rapidement

12 – Respecter les consignes de travail

13 – Demander de l'aide

14 – Rendre un travail soigné

15 – Finir mon travail

Par rapport au travail collectif 16 – Respecter le travail des autres

17 – Travailler seul au milieu des autres

18 – Travailler à deux

19 – Travailler en groupe

20 – Aider un autre élève

Bilan période précédente :

Objectifs pour la période à venir :

Signature de l'élève : Signature de l'enseignant :

Page 50: ÉLÈVES PERTURBATEURS ET TROUBLES DES CONDUITES ET DU

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6. Annexe 4 : le cahier de brouillon

Page 51: ÉLÈVES PERTURBATEURS ET TROUBLES DES CONDUITES ET DU

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Quelques Références

Sitographie : http://sylviecastaing.chez.com/comportement.htm http://dcalin.fr/ http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Handicap/85/6/Formation_TCC_222856.pdf http://www.univ-rouen.fr/servlet/com.univ.utils.LectureFichierJoint?CODE=1096555497279&LANGUE=0 http://www.psychiatrie-francaise.com/Data/Documents/files/CFTMEA%20-%20R-2012.pdf

Bibliographie : B. Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, Robert Laffon, 1976, réédition Pocket, 1999. S. Boimare, L’enfant et la peur d’apprendre, 2ème édition, Dunod, Paris, 2004. S. Boimare, « La psychopédagogie face aux adolescents ascolaires », in S. Boimare, Pratiquer la psychopédagogie, Dunod, 2010 E. Demont, La psychologie, Edition sciences humaines, 2009. B. Egron (Sous la dir. de), Scolariser les élèves handicapés mentaux ou psychiques, col. ASH Adapter les pratiques pour scolariser tous les élèves, CRDP Nord-Pas-de-Calais, Lille, 2011 C. Madelin-Mitjaville, G. Wahl, Comprendre et prévenir les échecs scolaires, Odile Jacob, 2007.