lucioles n°13 - novembre 2013.pdf

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  • Alors cest sr quentre deux rafles, expulsions locatives, visites des huissiers, passages devant les juges des palais, de la CAF, du planning familial ou de la communaut, crdits rembourser et dcouverts payer, ce nest pas un sentiment de scurit ou de srnit que lon ressent, et il y a plusieurs faons de ragir cette sensation dtouffement : fermer sa gueule, aller voter et se dire que jusquici tout va mal mais que a pourrait tre pire, mais aussi se rvolter, sinsoumettre, se venger, ne pas se laisser marcher dessus et garder la tte haute face aux riches et leurs harkis, face aux institutions, face lEtat, face au pouvoir et aux normes sociales quil impose. Cela fait quelques annes maintenant que nous ditons ce journal dans le seul but dappuyer et de diffuser le choix de la rvolte et de dgueuler sur la soumission. Et si au fond ce que nous voulons vraiment est la rupture et la destruction totale de ce monde, la rvolution, il y a dj de quoi se rjouir des nombreux pisodes de rvolte qui parsment le scnario fissur de la domination capitaliste et tatique.

    Mais linscurit dont nous parlons l nest clairement pas celle quutilisent depuis toujours mdias et politiciens pour faire de laudimat ou gagner des lections sur le dos de limbcillit diffuse, non, puisquils en sont responsables. Mieux vaut donc pour

    eux inventer une inscurit plus vendeuse pour faire oublier la ntre ou la rendre plus tolrable. Il sagit alors dinventer des figures dpouvantail et de dpouiller les humains viss de leur individualit. Le Rrom voleur de poule, le clandestin qui vole le travail des franais, les islamistes tapis dans lombre qui fomentent de nous faire pter le caisson tout instant, lanarcho-autonome saboteur dultra-gauche, les bandes de jeunes capuche qui se lvent le matin pour dpouiller les honntes citoyens (si seulement ctait vrai), les salauds de grvistes qui prennent la population en otage, les petits braqueurs qui mritent bien leur balle de bijoutier niois, les profiteurs du systme de protection sociale et ainsi de suite. Autant de figures imaginaires montes en pingle au 20h pour que le bon franais domestiqu se chie dessus, consomme et vote dans la plus totale indiffrence du sort des autres, et dans lincapacit didentifier lennemi l o il se trouve vraiment, cest--dire pas sur la porte d cot du mme palier, mais au parlement, la tte des entreprises, dans les commissariats, les centres communautaires et les palais de justice. Linscurit des riches et des dominants fait notre bonheur, et vice versa.

    Alors, dans cette guerre sociale, il faut choisir son camp.

    Tu laimes Toi ceTTe vie sous vidosur-

    veillance, o des cerbres arms peuvenT Te courir aprs jusqu ce que Tu crves comme le

    14 ocTobre dernier la porTe de monTreuil (dans le 20e) ? o des conTrleurs Te reniflenT lidenTiT quand Ten as marre de payer pour Te faire TransporTer comme du bTail de la ferme labaTToir ou quand Tu nas pas les bons bouTs de papiers? o on Te juge eT Tenferme chaque fois que Tu Te fais prendre ne plus respecTer leurs lois? o Tu galres chaque jour payer Ton loyer de cage poule avec largenT que les paTrons veulenT bien Te refiler en change de Ta dociliT? o des vigiles Te scruTenT pour sassurer que Tu ne prennes pas ce donT Tu as besoin ? Ten as vraimenT envie, Toi, de ceTTe vie rgle, ajusTe au millimTre par les dominanTs, surveille, lgalise, psychiaTrise, dmocraTique, rgularise, scure eT surTouT, chianTe mourir?!

    Une journe bien charge encore une grosse rafle barbs. Ce Jeudi 17 octobre, vers 13 heures, des groupes de deux trois civils du commissariat de la Goutte-dOr, patrouillent dans le quartier et arrtent au facis plusieurs dizaines de personnes. Elles sont emmenes dans un camion de flic stationn sous le mtro qui une fois plein, se dirige vers le commissariat de la rue de Clignancourt. au moins trois reprises le camion et les civils reviennent faire leur mme sale boulot. Au commissariat quelques personnes sont relches et la plupart emmenes au centre de rtention de Vincennes. Des personnes solidaires ont tent leur petit nombre dempcher des arrestations en prvenant les gens sur place que les flics sont en train de contrler. a dure au moins jusqu 20 heures. Heureusement, une bonne nouvelle vient briser la routine des rafles : une vitre de la porte arrire du camion des flics cde sous les coups ports par les arrts et quatre personnes parviennent schapper.

    le mme jour, des lycen-ne-s sont descendu-e-s dans la rue et ont bloqu une vingtaine de lyces paris. Ils/elles sont des milliers, contre les expulsions, notamment

    celles dun lycen, Khatchik, expuls le 12 octobre et dune collgienne, Lonarda, expulse le 9 octobre. Une manifestation est organise place de la Nation et a part dans tous les sens, en plein de petits cortges qui remontent vers Bastille, Rpublique et les grands boulevards. Sur le

    chemin, a gueule, du mobilier urbain est pt, une ligne de CRS est enfonce, tandis que les syndicats lycens et les (futurs) politiciens appellent rester en ordre. La pression des flics, notamment des civils, se fait de plus en plus forte et la manif finit par se disperser sous les gazs lacrymos

    avec quelques arrestations. Mais dans dautres endroits de Paris des petites manifestations continuent davoir lieu.

    le lendemain, vendredi 18, une nouvelle manifestation est appele. Encore des lyces bloqus et des milliers de lycen-ne-s dans les rues (les profs ntaient quune poigne, bel effort de solidarit pour les autres !). Le cordon de tte tenu par les syndicats lycens et tudiants et par le front de gauche se fait dborder et la tte de la manif pousse la ligne de CRS qui se fait caillasser jusqu larrive.

    On aurait aim que les manifestant-e-s aillent Barbs pour relier ces ralits. Mais pour a, pour linstant, manquent des liens et des solidarits qui restent construire pour mettre bas ce monde de flics et de barbels.

    Lucioles bulletin anarchiste de paris et sa rgion 13numro

    Les lucioles on les voit parce quelles volent la nuit. Les insoumis font de la lumire aux yeux de la normalit parce que la socit est grise comme la pacification. Le problme, ce ne sont pas les lucioles, mais bien la [email protected] luciolesdanslanuit.blogspot.fr

    Nov. 2013

    [Tract trouv dans les rues de Paris, octobre 2013, repris de Sans Papiers Ni Frontires]

    Vive linscurit !

  • Lucioles est un bulletin mensuel, on peut y lire des textes danalyse et dagitation autour de Paris (et sa rgion) et de son quotidien dans une perspective anarchiste. Nous y parlons des diffrentes manifestations dinsoumission et dattaques dans lesquelles nous pouvons nous reconnatre et dceler des potentialits de rupture vis--vis de lEtat,

    du capitalisme et de la domination sous toutes ses formes en essayant de les relier entre elles et au quotidien de chacun. Nous navons pas la volont de reprsenter qui que ce soit, ni de dfendre un quelconque bout de territoire en particulier qui nest quun modle rduit de ce monde de merde.

    BrvesLes combustions afftes

    On apprend sur internet que dans la nuit du 6 au 7 octobre, Avenue du Docteur Gley (Paris XXe), dgote de sa vie de collabo de lenfermement, une camionnette dEiffage sest immole par le feu. Ses derniers mots : Feu aux prisons ! Feu ceux qui les construisent ! . Une vingtaine de jours plus tard, on apprend galement quun utilitaire dEiffage Energie a choisi le mme destin, celui qui lui va le mieux.

    Les combustions acharnesOn apprend galement avec dlectation dans la presse de lennemi que depuis linstallation des Autolib de Bollor et de la mairie il y a deux ans, cest quelques 25 vhicules qui ont t incendis volontairement sur la voie publique. Faut croire que les projets dembourgeoisement du Grand Pourris ne passent pas chez tout le monde.

    Les combustions manquesAutre bonne nouvelle, mercredi 30 novembre, vers 21 h 30, deux engins incendiaires ont t lancs contre les grilles du parking du commissariat dAubervilliers (93). Les bouteilles contenaient bien de lessence et les mches taient en flammes, mais les cocktails Molotov nont pas explos. Alerts par le bruit, les flics sont immdi-atement sortis du btiment. Ils ont aperu un homme cagoul et gant qui prenait la fuite, avec succs. Bonne nouvelle, parce que cest lintention et la dtermination qui comptent, au moins autant que le rsultat.

    Les combustions spontanes? Un feu sest dclar ce lundi 21 octobre au matin dans lenceinte du fort militaire dIvry-sur-Seine (Val-de-Marne). Lincendie a pris vers 7 heures du matin dans un local technique du fort avant de se propager rapidement. Quelques 300m ont ainsi t ravags par les flammes, pratiquement la moiti dun btiment qui devrait tre inutilisable pour les semaines venir. Une enqute est cense dterminer les causes de lincendie, mais on se dit et on espre, navement, quavec larme rien nest vraiment le fruit du hasard.

    Les aiLes du dsirLide de retourner en prison lui tait probablement insupportable. Elle lui a donn des ailes pour le moins. Un prvenu de 26 ans, en libration conditionnelle, sest fait la belle en plein tribunal, mercredi 30 octobre Versailles (Yvelines). Lhomme originaire des Mureaux avait t interpell avec son cousin lors dun banal contrle routier mardi vers 4 heures Orgeval. Il tait prsent en comparution immdiate devant la 7e chambre correctionnelle pour port darme prohib, en loccurrence un couteau. A la fin de son procs vers 18 heures, son avocat quitte le tribunal, laissant son client dans le box des prvenus, sous la surveillance dau moins deux policiers. Le dlibr tombe peu aprs : un mois de prison ferme avec mandat de dpt. A ce moment-l, le prvenu enjambe le box, prend son courage deux mains et bouscule quelques personnes sur son passage avant de prendre la fuite. Il avait dj purg une peine de 4 ans ferme pour un braquage. Son cousin, qui comparaissait pour dfaut de permis, a t plac en garde vue, pour complicit dvasion, souponn de stre interpos devant les policiers qui tentaient de rattraper le fugitif. Bonne route lun, bravo et bon courage lautre.

    un cur dathLteUn dtenu de la maison darrt dOsny a russi se faire la belle, dbut octobre. Il avait t transfr lhpital de Pontoise, o il a subi une intervention chirurgicale au cur. Le lendemain de lopration, voil que le cur marche toujours bien: le gars a saut dune fentre du deuxime tage et sest enfui. Flics en nombre, hlicos et chiens pisteurs nont pas suffi le rattraper.

    quand on choisit un travaiL dassassin...Elle sest pendue chez elle, le 12 octobre, sans laisser un mot. Chez elle cest un logement de fonction de la matonnerie de Fresnes, et apparemment son travail de bourreau a quelque chose voir avec son suicide. Lui, il sest mis une balle dans la tte. Il tait flic de la Police aux Frontires laroport de Roissy. L aussi, une souffrance au travail, selon sa femme. Comme quoi mme des flics et des matons il peut arriver de faire quelque chose de bien, parfois...

    Jeunesse incendiaire ! Il aurait essay deux reprises de foutre le feu au collge dont il avait t exclu (collge Alain Fournier, dans le XIe). Ce jeune esprit incendiaire a t mis en garde vue ( 13 ans) parce que surpris en train dincendier la devanture dun garage (on lui avait peut-tre refus un apprentissage ?). On attend de savoir sil finira en EPM (prison pour mineurs), pour lui envoyer quelques mots dencouragement... et un briquet !

    but! Dans la nuit du lundi au mardi 26 octobre, un incendie a t joliment orchestr dans lenceinte du stade Duvauchelle de Crteil. Le match de coupe de la ligue prvu quelques jours plus tard se fera donc dans un stade en partie cram. Lincendie a ravag quinze fauteuils des bancs de touche, dtruits par les flammes. La police a trouv des traces dhydrocarbure sur dautres siges (environ une vingtaine) ce qui confirme la piste vandale. Des vandales que nous remercions davoir voulu notre bien tous en tentant de nous pargner une nime kermesse sportive de pognon et de pub.

    A toutes et tous les insolents, exploites, mal duqus, rvoltes, insurgs, rebelles, fous, inadaptes, incroyants, sauvageonnes, barbares, insoumises, indomptables, ingouvernables, antisociaux, sorcires, sans patries et assoiffs de libert.

    Prisons, centres de rtention, commissariats, coles, centres psychiatriques, palais de justice, universits, barres dimmeubles, supermarchs, planning familial, temples, CAF, syndicats, partis, familles, mariages servent nous parquer, nous domestiquer, nous duquer, nous enfermer, nous corriger, nous normer, nous exterminer. Que le feu les emporte tous.

    Les inquisiteurs et leur monde au bucher !les sorcires en libert !

    Que la rvolte sempare de la libert dans un fracas terrible,

    contre toute autoritDes anarchistes.[Affiche trouve sur les murs de Paris, novembre

    La question nest pas de savoir pourquoi il y a des gens qui jettent des pierres sur la police, mais plutt pourquoi il y en a si peu.

    A en croire certains torchons journalistiques, il semblerait que certains cols blancs la tte du gouvernement aient nourri quelques craintes suite aux manifestations lycennes qui ont eu lieu avant les vacances Paris et dans dautres villes de France. Conscients que couve une colre qui nattend quune tincelle pour exploser (quelle attente toujours trop longue!), lEtat et ses sbires ont circonscrit ces rassemblements dans le cadre de manifestations lycennes pour le retour de Leonarda et Katchik, prvenant ainsi toute radicalisation du mouvement, cest--dire toute possibilit de passer du refus de lexpulsion de ces deux lycens des refus plus larges et sans concessions. Du refus de toutes les expulsions la remise en cause de lordre existant qui nous touffe, un monde qui repose sur lexploitation et la domination et dont les expulsions ne sont quun des rouages. De la rticence dfiler sagement derrire une sono qui crache des slogans auxquels personne ne croit, labandon de toutes vellits de revendications et de ngoci-ations avec tous les pouvoirs quels quils soient (tatiques, patronaux, syndicaux...), de la pauvre comdie o chacun joue son rle (les sans-papiers qui rclament des papiers, les chmeurs un emploi, les travailleurs des augmentations de salaire, les tudiants et les professeurs plus de moyens pour tudier, le peuple de gauche moins de racisme et de misre, les chats moins de chiens etc.) au draillement du train train quotidien, en dautres termes linterruption du cours normal des choses et lmergence de cette banalit : aucun pouvoir ne peut rgner sans la servitude volontaire de ceux qui le subissent. De la bouche dun ministre, cela donne: Lobjectif est de dsamorcer trs vite le mouvement car historiquement on sait que ces manifestations sont trs vites incontrlables. Bien vu lennemi!

    Dj jeudi 17 et vendredi 18 octobre, plutt que de moisir sur une chaise compter les minutes avant la sonnerie, des lycens ont prfr bloquer les cimetires de leur jeunesse, une vingtaine dans Paris, et certains se sont rendus aux manifestations prvues ces deux jours : en dpit des efforts des professeurs, des journalistes, des parents, des politiciens, et de tous ceux qui lcole comme en dehors imposent aux lves ce quils devraient penser, ce quils devraient faire et comment, beaucoup de ceux qui foulaient le pav ne se sont pas satisfaits de patre dans le pr bien gard de la strile et impuissante contestation citoyenne, y prfrant un savoureux mlange de colre non banalise, de bon sens et de lucidit. Les tracts estampills FIDL et UNL sont pitins, le cordon de tte de la manif tenu par les syndicats lycens et tudiants et par

    la vermine politicienne du Front de gauche se fait dborder et la tte de manif pousse la ligne de CRS qui dguste du caillou jusqu larrive, certains quittent le sacro-saint trajet Bastille-Nation pour arpenter les petites rues, et squipent avec ce quil y a sous la main pour sattaquer en petit groupes aux CRS, de-ci de-l on entend ce slogan Non toutes les expulsions ou encore la jeunesse na pas de frontires, des laquais du pouvoir plus communment appels journalistes se font chahuter et piquer leur matos, et il sen est fallu de peu pour quune partie de la horde ne pntre dans la gare de Lyon.

    Certes cela a de quoi nous rjouir, et pourtant nous en gardons un got amer. Amer parce que la rcration est finie et que celle qui lemporte sans avoir t branle cest la dmocratie, cest--dire la servitude ponctue par des mouvements sociaux. La machine expulser fonctionne sans interruption, et si bien souvent ses hommes de main uvrent avec discrtion, il y a des jours o les rafles sont massives et ne se cachent pas. Rappelons nous de la journe du 6 juin Barbs, ou plus rcemment le jeudi 17 octobre Barbs encore. Lhorreur est quotidienne, mais parfois sous les feux des projecteurs elle se fait plus criante, et ses costumes humanistes trop vite enfils et son parfum de compassion ne suffisent pas dissimuler la puanteur morbide qui suinte de tous ses pores. Rappelons nous de ce premier ministre italien, ce gros btard en costard qui il y a de cela quelques semaines a naturalis titre posthume les 350 migrants morts au large de Lampedusa, alors mme que les rescaps avaient dj t expulss. Ceci nest pas une blague, cest limpudence dun dirigeant dans un monde o la rsignation et lobissance dun grand nombre vont de pair avec les responsabilits concrtes de structures et dindividus avides de pouvoir et dargent. Des structures qui sont la porte de tous. La rvolte face ce monde peut sexprimer partout et tout le temps, cest entre autres ce qui fait sa force. Sans attendre et loin des parades protestataires qui, malgr certains aspects encourageant parfois, sont voues mourir ds que le pouvoir siffle la fin -et lche des miettes ou sort la matraque- ou ds quil commence pleuvoir, et qui nont jamais vritablement fait tomber un seul mur tant quils se sont cantonns la non-violence et au respect de la lgalit, aux ngociations et revendications pour lamnagement de lordre existant.

    Si manifestation il y a, quelles riment avec chasse aux politiciens et chasse aux syndicats, parce quils font leur beurre sur la contestation dun systme quils ne cherchent qu rformer et donc reproduire. Parce quils sont l pour canaliser et rcuprer les rvoltes de ceux qui ne saccommodent pas de le rformer mais veulent le dtruire. Parce quils seront toujours un frein nos lans les plus gnreux. Ni rsignation ni paix face aux ennemis de la libert.