loupe #5 mai/juin 2015

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MAI 2015 #5 FOCUS : TRACE - JOËL MIRANDE-NEY JEAN-MARC HUNT - FREEBORD - ULM CARAIBES HÉLÈNE VAINQUEUR-CHRISTOPHE - MAIRE DE TROIS-RIVIÈRES MUSIQUE: L’ART ÉVOLUTION BOOBA - ADMIRAL T LINO - NEG’MARRONS - KEROS-N - K-REEN

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MUSIQUE : L’ART ÉVOLUTION Ce mois-ci un dossier exclusif pour pénétrer l’univers musical de la culture urbaine de Paris à Pointe-A-Pitre. Rencontre avec Booba, le phénomène du rap français en interview exclusive; Admiral T, la figure de proue du Dancehall caribéen ainsi que Lino, Neg’Marrons, Keros-n et K-Reen. FOCUS sur TRACE CARAÏBES avec un passionné de musique, son directeur Joël Mirande-Ney. PANORAMIQUE sur la ville de Trois-Rivières avec son Maire Hélène Vainqueur-Christophe. A LA LOUPE! Jean-Marc Hunt nous ouvre son atelier; Jonathan Deloumeaux nous initie au Freebord; Jean-Claude Antoine nous fait prendre de l’altitude avec ULM Caraïbes.

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MA

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5FOCUS : TRACE - JOËL MIRANDE-NEy

JEAN-MARC HUNT - FREEBORD - ULM CARAIBESHÉLÈNE VAINQUEUR-CHRISTOPHE - MAIRE DE TROIS-RIVIÈRES

MUSIQUE: L’ART ÉVOLUTIONBOOBA - ADMIRAL TLINO - NEG’MARRONS - KEROS-N - K-REEN

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Sans titre-2 1 11/05/15 18:07

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DIRECTRICE DE PUBLICATIONCécile [email protected]

REDACTEUR EN CHEFDavid [email protected]

JOURNALISTESDavid Dancre, Cécile Borghino, 3D-4.0, Mr. Chung, Ceebee

PHOTOGRAPHESKostar (Lino), Sandro Rozas (Keros-n), Patric Owen pour Starcréation (K-Reen) Ivan V (Freebord).

MAQUETTISTESDavid Dancre, Charles Eloidin, Leila Sy

WEBMASTERJuba Lamari

SITE INTERNETwww.loupe-magazine.fr

IMPRESSIONMSPC

REGIE PUBLICITAIRELOUPE REGIE05.90.555.415ré[email protected]

Magazine gratuit - Numéro #05Mai - Juin 2015© LOUPE est édité par David Dancre97 118 Saint-FrançoisN° SIREN : 805 060 878Toute reproduction, adaptation totale ou partielle est interdite.

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EDITO06 Feel the Black Music

BRUITS DE COULOIR08 C’est dans l’air

PANORAMIQUE10 Trois-Rivières avecHélène Vainqueur-Christophe

FOCUS14 TRACE CARAÏBESavec Joël Mirande-Ney

21 MUSIQUE : L’ART ÉVOLUTION

à LA LOUPE54 Culture: Jean-Marc Hunt60 Sport: Freebord64 Société: ULM Caraïbes

CHRONIQUES 46 Cinéma48 Séries50 Jeux Vidéos

P.14

P.21

P.54

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La réserve cousteau

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Aretha Franklin, Marvin Gaye, Tina Turner, James Brown, Barry White, Stevie Wonder, Jimmy Hendrix, Fela Kuti, Bob Marley, Michael Jackson... Tous ces artistes nous ont fait vibrer, danser, grandir, voyager, ont nourri nos sens d’émotions qui ne sont transmissibles que par la musique, les mots ne suffisant pas à les décrire. La “black music” s’est imposée sur plusieurs générations, quelle soit Soul, Funk, Reggae, Blues ou aujourd’hui dans le Rnb, le Rap ou le Dancehall. Mais ce qui est reconnu à ces artistes du passé dénote avec les préjugés toujours présents dans tous les domaines de la société, de Paris à Baltimore. Le changement fait peur et Public Enemy ne s’était pas ainsi nommé par hasard. Chaque génération apporte sa pierre à l’édifice culturel de la société. A nous de vivre avec notre temps.

par David Dancre

FEEL THE BLACK MUSIC

EDITO

R.I.P. BRAM’S - 07.07.1973 - 22.05.2011

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par Ceebee

Le code de déontologie du journalisme considère le détournement des faits, le mensonge, la manipulation comme “les plus graves dérives professionnelles”. Il exhorte à faire preuve d’esprit critique et tient la véracité, l’intégrité et l’impartialité comme les fondements de cette profession. Dans un récent sondage (SOFRES, janvier 2015), 74% des Français affirment suivre avec un grand intérêt les informations diffusées par les médias, la télévision restant l’outil le plus utilisé, malgré la percée d’Internet. Le

métier de journaliste est devenu en quelques décennies une activité qui porte au devant de la scène des hommes et des femmes qui ont une haute estime de leur fonction, mais qui s’en détournent également pour faire de l’information un spectacle. Ainsi en est-il de nombreuses émissions dans lesquelles le présentateur endosse successivement le rôle de l’insurgé, du naïf, de l’inquisiteur, mais ne laisse qu’un temps très succint pour répondre à ses questions. Ses invités sont sélectionnés avec soin afin que le show ne dérape pas.

Sources principales de toute information, les médias occupent une place considérable dans la société moderne. Cette omniprésence leur permet d’exercer un rôle qui s’apparente de plus en plus à de la propagande.

C’EST DANS L’AIR

BRUITS DE COULOIRS

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Une enquête du Courrier International sur les nouveaux médias:http://www.courrierinternational.comDix stratégies de manipulation à travers les médias: https://www.youtube.com/watch?v=w1HJxaQmJVQ

Car s’ils défendent la liberté d’expression, les journalistes ne donnent que très rarement la parole (tout au moins à la télévision) à ceux qui pourraient proposer une véritable alternative à la pensée dominante. Le rythme même de l’information en

continu pose des problèmes particuliers comme la recherche dans la hâte d’images et de témoins, le recours à des experts autoproclamés, la reprise de rumeurs, l’absence de recul et de réflexion... Dans la course à l’audimat, il n’y a pas de place pour l’éducation, il faut permettre aux publicitaires de diffuser leur message au plus grand nombre. C’est le fameux “temps de cerveau disponible” que le directeur de TF1 arguait pour justifier sa grille de programmes (Patrick Le Lay, 2004). Telles sont devenues les missions d’un service qui n’a plus rien de public et tout de commercial. Certes, la multiplication des chaînes privées et des outils d’information étendent le champ des possibles en permettant à chacun de sélectionner ses horaires et ses émissions. Mais ils rendent plus complexe la compréhension globale du monde. La formation de l’opinion demeure un enjeu majeur dans un pays qui se veut pluraliste, égalitaire et démocratique mais qui parvient difficilement à assurer ses idéaux. Il est urgent de redonner à l’information sa véritable place ainsi qu’aux acteurs qui la font, sans complaisance ni parti pris.

SOÇIÉTÉ

“Dans la course à l’audimat, il n’y a pas de place pour l’éducation...”

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Trois Rivières n’est souvent qu’un point de passage pour embarquer vers les Saintes. Pourtant, sur le territoire de cette petite commune se nichent des éléments naturels et patrimoniaux d’exception.

par Cécile Borghino

PANORAMIQUE

HÉLÈNEVAINQUEUR-CHRISTOPHE

Quels sont les atouts de Trois-Rivières en matière économique, sociale ou culturelle? Quels sont les besoins ou les manques actuels? Trois-Rivières est le berceau de la civilisation précolombienne. Elle est le territoire de la Caraïbe avec la plus forte concentration de pétroglyphes. Cette richesse patrimoniale est un atout touristique qui doit aboutir, à moyen terme, au développement économique de la commune. La création du Service Patrimoine et Développement local s’inscrit dans la volonté communale d’apporter un intérêt particulier à la

préservation et au rayonnement de ses atouts et de son patrimoine. La commune dispose également d’un patrimoine naturel formidable qui attire de plus en plus de Guadeloupéens et de touristes. En témoigne la fréquentation du littoral de Grande pointe ou de la plage de Grand’Anse. C’est la raison pour laquelle nous consacrons une part importante de nos investissements à l’aménagement de ces sites. La Région accompagne la commune dans ces projets, mais ceux-ci sont coûteux, alors nous devons faire des choix et étaler la réalisation de ces projets dans le temps.

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TROIS-RIVIÈRES

La ville de Trois-Rivières est fortement associée aux Saintes avec les navettes qui relient ces deux espaces. La commune est-elle impliquée dans cette activité? Dans quelle mesure cela vous permet-il de développer le tourisme à Trois-Rivières? Notre positionnement nous implique indirectement. Puisque, d’une part, le transport maritime est assuré par des entreprises privées et d’autre part, l’embarcadère relève de la compétence du Conseil départemental, même si son transfert à la commune est évoqué. Nous assurons tout de même la gestion du flux de passagers que génèrent ces navettes. En effet, le parking du Bord-De-Mer est géré par la commune, ce qui n’est pas sans difficulté. Nous devons satisfaire les touristes qui y garent leur véhicule, les riverains qui l’empruntent, le stationnement aux abords de celui-ci, etc. A certaines périodes la police municipale est assez débordée par les passagers en transit qui

ne respectent pas toujours la signalisation. Mais pour le moment, on ne peut pas dire que cette manne touristique profite au développement du tourisme à Trois-Rivières qui demeure une commune de passage. Cependant, ce n’est pas une fatalité, nous mettons tout en œuvre pour inciter les touristes à s’attarder dans notre commune.

Trois-Rivières doit son nom aux cours d’eau qui sont présents sur le territoire, sont-ils accessibles et visibles par tous? La commune doit son nom aux trois cours d’eau qui la traversent : la rivière du Trou au Chien (7,4 km), constituant la limite entre Trois-Rivières et Capesterre-Belle-Eau ; la rivière du Petit Carbet (8,3 km), passant au centre de la commune et du bourg de Trois-Rivières ; la rivière Grande Anse (8,4 km), constituant la limite entre Trois-Rivières et Gourbeyre. Elles sont toutes accessibles.

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PANORAMIQUE

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Trois rivières est aussi un site archéologique majeur avec le parc des Roches Gravées. Pensez vous que cette histoire amérindienne est suffisamment mise en avant en Guadeloupe? Y a-t-il de nouveaux chantiers de fouilles sur votre territoire, de nouvelles découvertes? Le parc des Roches gravées est géré par le Conseil départemental. On n’en fera jamais assez. Mais depuis quelques années, il y a une prise de conscience générale qui a permis d’avancer dans ce domaine. S’agissant de l’histoire amérindienne, depuis 2008, Trois-

Rivières a choisi de valoriser cet héritage et de vulgariser les informations scientifiques relatives aux pétroglyphes. Notre manifestation phare se déroule tous les deux ans au mois de novembre. Il s’agit des Rencontres d’art et d’histoire. A cette occasion, pendant une semaine, la population peut découvrir une exposition de peintures, mais également de sculptures sur la thématique amérindienne. Il y a des conférences, des visites guidées, des foires, des ateliers de vannerie, de poterie, de peinture pour enfants, etc. Il y a quelques mois, dans le secteur de la Vallée d’or à l’entrée du Bourg, plus d’une centaine de roches gravées non répertoriées ont été retrouvées. Des archéologues et d’autres éminents chercheurs ont entamé une étude importante que nous envisageons de présenter à la population d’ici la fin de l’année. Mais il faut savoir que sur tout le territoire de Trois-Rivières, il y a un nombre considérable de roches gravées situées sur

des terrains privées. Les propriétaires sont désormais sensibles à leur préservation et essayent à leur manière d’éviter qu’elles ne s’érodent. Enfin, le Mémorial ACTe est un outil de plus pour mettre en lumière ce pan de notre histoire.

Par quels moyens vous informez-vous des attentes des habitants? Internet est devenu un outil privilégié de communication, vous-même vous disposez d’un profil Facebook, cela vous rapproche-t-il de vos administrés? Depuis notre arrivée aux affaires communales en 2008, mon équipe et moi étions soucieuses d’être au plus près des attentes de nos administrés et surtout de les associer pleinement aux décisions que nous prenions, puisqu’elles impacteraient directement leur quotidien. Aussi, nous mettons en œuvre les dispositifs de démocratie participative: les enquêtes publiques, les débats publics, mais également la mise en place de comités de quartiers, ou la tenue de réunions de quartier. Mais bien évidemment, nous faisons la part belle aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. Aussi la commune dispose d’un site internet, l’office du tourisme de Trois-Rivières communique également via son site internet et sa page Facebook. Nous avons un bulletin municipal trimestriel très riche. Et très prochainement, nous lancerons une application mobile qui permettra de découvrir les sites naturels, archéologiques, architecturaux et historiques de Trois-Rivières.

Quels sont les projets que vous défendez? Votre vision de l’avenir de Trois-Rivières?Je défends tout ce qui pourrait être bénéfique à Trois-Rivières. Il y a encore quelques années, cette commune était moribonde, mais depuis 2008, mon équipe, mais également

“Trois-Rivières a choisi de valoriser cet héritage et de vulgariser les informations scientifiques relatives aux pétroglyphes.”

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TROIS-RIVIÈRES

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le personnel communal, travaillent chaque jour à faire de Trois-Rivières une commune dynamique, avec un rayonnement culturel et sportif reconnu par toute la Guadeloupe. Nous développons également un ambitieux programme d’aménagement du territoire, notamment à travers la revitalisation du centre bourg, les rénovations du stade, de la maison des aînés et de la salle polyvalente visant à renforcer l’attractivité du territoire. Nous savons que notre population est vieillissante, c’est pourquoi nous mettons un point d’honneur à maintenir la vie des quartiers et en favorisant les liens intergénérationnels, à travers la construction de maisons de

quartiers et d’animation de ceux-ci par les associations.

Vous faites partie de cette génération de femmes engagées en politique et détenant des fonctions importantes. On entend souvent dire que la femme guadeloupéenne est un pilier social. Qu’en pensez-vous? La femme guadeloupéenne est un pilier important de la société, quelle que soit la forme de son engagement. Il est vrai que nous avons eu des exemples de femmes combattives qui nous ont transmis d’une certaine façon cette fibre.

Population: 8714 habitants (Trois-Riviériens)Superficie: 31 km2Points d’intérêt: le parc archéologique des Roches gravées ; le littoral de Grande Pointe ; l’habitation l’Ermitage ; La source de Tèt Kannal.Site Internet: http://villetroisrivieres.fr

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FOCUS

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Joël Mirande-Ney a fait de sa passion pour la musique et de son envie de la partager son métier. En 25 ans, il est devenu un véritable ambassadeur du son caribéen et confirme son statut en s’accomplissant en tant que directeur de TRACE CARAÏBES.

Qu’est-ce qui t’a donné envie de faire de la radio au départ?La toute première raison et la principale avant que je ne découvre véritablement le métier, c’est tout simplement l’amour de la musique. J’ai toujours été un passionné de musique, je n’en ai pas fait, je ne suis pas musicien, je n’ai jamais joué ni chanté, ce qui est un de mes petits regrets mais j’ai compensé par le fait d’intégrer cet univers, en devenant un des acteurs de l’ombre. Au départ, je suis devenu animateur parce que c’était pour moi la seule façon de jouer les choses que j’aime et de les diffuser aux gens.

Ce que tu entendais à la radio ne te correspondait pas?Non, ce n’est pas ça. Les goûts et les couleurs restent malgré tout quelque chose de relatif, mais lorsque l’on est profondément passionné, on est plutôt enclin à partager.

Tu es titulaire d’un DEUG en Sciences-économiques, mais c’est sur ton expérience à la radio en tant qu’animateur que tu capitalises tes expériences professionnelles.En effet, je n’avais aucune formation liée à cet univers, je faisais des études sans réelle perspective d’avenir sur les débouchés. Pour la petite anecdote, c’est avec un ami qui était un peu bricoleur et qui fabriquait des émetteurs en contrebande que nous avons passé un coup de fil à une radio associative pour leur demander si l’on pouvait diffuser. Il s’avère que cette radio était en panne d’émetteur, nous nous sommes donc retrouvés pendant toute la durée de la panne et des réparations qui ont duré un bon mois à faire de la radio en off. Et cette expérience nous a permis d’être au niveau lorsque la radio a redémarré, car tous les animateurs étaient partis. Nous avons pris leur place.

par 3D-4.0

TRACECARAÏBES

JOËL MIRANDE-NEy A.K.A. DJO

CULTURE

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FOCUS

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Ton cursus scolaire t’est-il utile, encore plus aujourd’hui avec ton poste?Non, franchement pas du tout. Mais quoi que ce soit que nous fassions dans la vie, il y a forcément des expériences qui à un moment donné, forment ou forgent, pour ce que nous sommes amenés à faire au final. Dans l’absolu, je suis tenté de dire que non, mais c’est ce cursus qui m’a emmené là où je suis. Je ne dis pas qu’il ne faut pas faire d’études, mais que dans la vie il faut avoir une passion qui nous donne envie de nous lever tous les matins. J’ai cette chance là car j’exerce un métier qui est aussi ma passion et je n’y vais jamais à reculons. C’est un vrai luxe.

Comment s’est passé ton recrutement chez NRJ, les as-tu démarchés ou sont-ils venus te chercher?Ils sont venus me chercher. Moi j’étais plutôt bien à Sun FM. Je suis rentré dans cette radio en tant qu’animateur et de fil en aiguille, et toujours grâce à ma passion pour la musique, je me suis retrouvé programmateur. A ce poste, j’ai été amené à gérer d’autres facettes de la radio, comme les stratégies marketing etc… En 1998, NRJ m’a fait une proposition que j’ai étudiée et j’ai pris la décision de partir parce que cela faisait déjà sept ans que je travaillais pour la même radio. A cette époque, je pensais avoir fait un peu le tour de la chose et disons que c’est venu par ma curiosité de toucher à autre chose, et surtout de relever un nouveau challenge. Sun FM était la radio leader sur le marché et quand je suis parti pour NRJ qui avait été lancée en 1996, elle l’était encore. Je suis donc parti pour une radio qui était challenger. J’ai intégré NRJ en tant qu’animateur, mais aussi en tant que programmateur et par la suite coordinateur d’antenne.

C’est en 2005 que tu as intégré le groupe Trace.Ce qu’il faut savoir, c’est que Trace FM, c’est l’ancienne Sun FM. A cette époque NRJ était devenue leader sur le marché. Et je crois que la direction de Sun FM s’est posée la question de redorer le blason de cette radio, la solution qui s’est imposée a été un changement de marque et une licence chez Trace. Sun FM est devenue Trace FM et c’est pour cela qu’ils ont fait appel à moi, je connaissais déjà la structure et ils connaissaient aussi mon goût pour les challenges. Je me suis retrouvé exactement dans la même situation en fait, cela faisait six ans que j’étais chez NRJ et le projet était arrivé à terme puisque nous étions passés leader, j’avais rempli mon contrat. La

“...le pôle Antilles sera le point de départ et la maison mère de tout ce qui va être développé en tant que nouvelle radio avec la marque TRACE dans le monde.”

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différence pour moi, sans cracher dans la soupe, c’est que NRJ c’est de l’import. Il y a quand même en terme de programmation et de stratégie musicale la possibilité d’adapter et de faire en sorte que cela sonne un peu caribéen, mais ce n’est pas une radio “Peyi”. Pour Trace FM, il fallait tout créer, c’était une page blanche, à l’inverse de NRJ qui récupère son habillage musical de la “maison mère” à Paris, nous fabriquons tout ici. Cet aspect là m’a vraiment motivé. C’était Olivier Laouchez (PDG de Trace, historiquement fondateur de ATV, et qui a également participé au succès de Secteur A, ndlr) qui m’a contacté à cette époque…

Justement, Trace existait déjà en France.Pour la télévision, mais pas pour la radio. Trace FM aux Antilles (Guadeloupe/Martinique) a été lancée le 18 mars 2006 et c’était la première radio du groupe, nous le sommes toujours d’ailleurs (Guadeloupe / Martinique / Guyane). Même si il y a des projets aujourd’hui en Côte-d’Ivoire ou ailleurs, le pôle Antilles sera le point de départ et la maison mère de tout ce qui va être développé en tant que nouvelle radio avec la marque Trace FM dans le monde.

L’identité de la chaine est principalement basée sur la culture “black” et “urbaine”. Pour la radio c’est exactement pareil. Tout le monde ne s’en rend pas forcément compte mais pour nous c’est une belle fierté. Cela permet de développer un savoir-faire local qualifié.

Comment est-ce que vous débusquez les talents? Le recrutement est-il local?En 2005, il n’était pas encore question de former des gens, il fallait trouver des personnes compétentes sur place. Pour ma part, je n’ai pas eu la volonté au départ de partir à la

débaûche d’animateurs chez la concurrence, même si après cela s’est avéré indispensable. Le dernier animateur recruté sur notre antenne et qui occupe aujourd’hui le créneau 16/19H, Hugo, est le pur produit d’un casting que l’on avait ouvert aux professionnels et aux lambdas. C’est donc un ancien auditeur qui est passé de l’autre coté de la barrière. Il avait une bonne base, nous l’avons formé pendant un mois et aujourd’hui il tient très bien son créneau. Nous sommes vraiment dans cette dynamique de trouver des talents locaux, à la fois sur la partie active de la radio et sur la partie artistique. Notre “biscuit” c’est la musique, et pour cela il faut absolument que l’on aille en permanence à la recherche de nouveaux talents, et pas systématiquement se reposer sur ceux déjà confirmés comme Admiral T ou E.sy Kennenga. Il faut aussi “prendre des risques” en terme de programmation comme avec T-Kimp Gee ou il y a trois ou quatre ans avec Misié Sadik. Ce sont ces choses-là que nous tentons de pérenniser, parce que cela nous permet d’étoffer un peu le paysage musical, nous n’avons pas autre chose à proposer que de la musique. Nous ne sommes pas les numéros un sur l’information, ni sur les avis d’obsèques, ni sur la météo.

Trace, c’est aussi la télévision. Un nouveau challenge pour toi ?Exactement. C’est un nouvel univers. La radio Trace FM qui appartenait jusqu’à l’année dernière à France-Antilles est passée chez le groupe Trace en janvier 2014. Depuis, ma mission s’est élargie à la télévision mais surtout à son développement en terme de rayonnement d’image et de stratégie sur la zone Caraïbe. Ma mission est d’assoir la notoriété de la télévision sur place pour qu’elle puisse performer en terme d’audience mais aussi sur les antennes télévision faire rayonner davantage notre zone Caraïbes.

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La radio était concentrée sur la musique, alors qu’à la télé, il y a Trace Sport & Star…En effet nous sommes sur différents formats. Il y a le format Urban, qui est le Trace TV original mais qui a connu des déclinaisons avec Trace Tropical, diffusée partout dans le monde. Cela signifie qu’un artiste local qui est diffusé sur Trace Tropical est aussi vu en Russie, en Pologne, aux Etats-Unis, en Afrique, en Europe... Il y a Trace Africa qui est destinée au marché africain mais que nous pouvons regarder aussi ici sur le câble. Il y a Trace Sport, qui est tournée sur les coulisses du sport plus que sur l’évènementiel sportif. La dernière née est Trace Toka, une version lusophone destinée à mettre en avant tous les artistes du Cap Vert et d’Angola qui ont cette sonorité urbaine se rapprochant de la sonorité caribéenne et qui s’expriment en portugais.

Avec la licence Trace, avez-vous accès à tous les programmes de la chaine qui sont produits dans le monde entier?C’est aussi cela notre idée. De pouvoir créer des ponts entre nos différents supports et différents programmes. Nous allons lancer Trace FM à Abidjan dans le courant de l’année. L’idée est à la fois d’offrir une caisse de résonnance supplémentaire à nos artistes caribéens, de permettre à un artiste local d’avoir la possibilité de se retrouver sur une scène à Abidjan ou de faire une prestation là-bas parce que nous l’aurons diffusé et mis en lumière sa musique et son répertoire. Et bien entendu à l’inverse également. Nous diffusons des artistes guyanais, guadeloupéens et martiniquais sur nos trois antennes sans distinction de “nationalité”. Si l’on prend Pompis ou Jahyanai King qui sont des artistes guyanais, avant le lancement de la radio en 2009, ils étaient joués spécifiquement et exclusivement en Guyane. Nous les avons ouverts sur la Guadeloupe et la Martinique. C’est un principe que nous reproduirons à chaque fois qu’une nouvelle antenne sera créée dans une nouvelle zone.

N’est-il pas difficile de concilier les aspects artistiques et commerciaux?La chose est très simple. Notre média sera viable commercialement tant qu’il fera de l’audience, donc on ne va pas chercher à imposer un artiste sur notre antenne si l’on sait qu’il va influer de façon négative. Il faut trouver un équilibre entre cette volonté de développement des artistes dans les différentes zones et la nécessité de rester dans un schéma de radio performante car nous sommes un média commercial. Si l’on ne fait pas d’audience, forcément l’annonceur n’a aucune raison de venir.

La prise de risque porte ses fruits finalement puisque c’est l’une des qualités de votre identité.Elle paie, mais elle peut aussi parfois jouer des tours. Il faut savoir quand même que l’on vit dans un monde où il y a une espèce de comportement lié au mimétisme et ou généralement les gens ne prennent pas de risque. Si Rihanna porte un t-shirt rouge aujourd’hui, ce sera plus simple de porter le même t-shirt que d’essayer d’être original et aller en acheter un bleu.

Quelles sont les émissions que vous produisez localement ? Nous avons lancé hier soir (27 Avril 2015, ndlr) une nouvelle émission qui s’appelle 9.7 People sur Trace Urban dont l’invité était Admiral T. Les premières versions sont présentées par Yannick, qui est déjà un animateur de Trace et le concept

“Il faut savoir que l’on vit dans un monde où il y a une espèce de comportement lié au mimétisme...”

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est de recevoir un artiste dans son environnement. Celui où il a grandi, celui qu’il fréquente avec ses amis, son entourage, pour qu’il nous fasse part de ses gouts musicaux avec une playlist de ce qu’il apprécie. Il s’agit de rentrer dans l’intimité des “people” (sportifs, artistes) de la zone.

Comme sur Trace Star et Sport?Sans le coté «bling-bling». Parce que Trace Star et Sport, c’est vraiment ça, l’actualité des “people” qui font rêver. Nous allons dans les coulisses jouer au “voyeur”. La caméra indiscrète, les gens aiment bien ça. Le média people aujourd’hui, c’est aussi Instagram et Twitter en réalité et même les artistes l’utilisent pour rester en permanence dans la partie et créer le “buzz”.

Comment gérez-vous cette situation?Musicalement, cela devient compliqué dans la mesure où il y a encore dix ans, pour pouvoir découvrir un titre ou un artiste il fallait écouter la radio. Maintenant il y a des gens qui peuvent s’en passer aisément. Il faut donc trouver des concepts originaux. Notre parade est, au-delà

du fait de diffuser simplement de la musique, de trouver du contenu original, de mettre en place de l’interactivité que le réseau digital ne peut proposer. La libre antenne le soir donne ainsi la parole aux auditeurs.

Quel est pour toi le rôle de la musique? C’est de divertir. On peut partir dans des débats en se disant que lorsqu’un artiste prend le micro, il est animé d’une certaine mission. Qu’il fait attention à ce qu’il raconte, au message qu’il peut véhiculer. Mais son premier rôle est de divertir.

Un mot de la fin?J’espère qu’avec la radio qui est un média beaucoup plus accessible, nous pourrons permettre à nos artistes de Guadeloupe, Martinique et Guyane d’avoir cette caisse de résonnance dans la Caraïbe. J’étais à Trinidad l’année dernière où j’ai posé la question autour de moi, à des gens qui sont dans le milieu, sur la popularité de nos artistes. Exceptés Kassav’ et Admiral T, ils ne connaissaient personne alors que nous avons ici des gens talentueux.

TRACE CARAÏBEFacebook officiel : TRACE TV / TRACE FM

www.trace.tv www.trace.fm

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FOCUS

L’ART ÉVOLUTIONpar Mr. Chung

MUSIQUELa création est universelle et évolutive, elle s’exprime dans l’art pour retranscrire le mal-être de ses instigateurs. Ces écorchés vifs, doués d’une sensibilité décalée, déstabilisent nos acquis dans une ébullition de diversité et d’émotions. Les artistes sont des esprits libres qui expriment la contrainte de leur temps par des codes souvent incompris de leur vivant ou par très peu. La musique accompagne les époques et ses paroles les déterminent. La langue française est un puits d’inspirations pour tous ceux qui savent la manier avec dexterité, selon une personnalité qui leur est propre. La culture urbaine a toujours fait peur à la société qui la rejette plutôt que d’essayer de la comprendre, alors que sa raison d’être constitue l’un des flambeaux de la liberté d’expression.

Cette liberté d’expression permet d’établir un constat, une fiction, mais n’est pas obligatoirement contestataire dans sa forme, elle peut être de l’ordre de la compétition inter-générationnelle pour définir qui est le plus talentueux, le plus populaire ou le plus adapté. Cet exercice est voué à déterminer l’identité artistique de chacun et son impact sur le public. Mais toute cette approche demeure subjective pour déterminer la maîtrise d’un art qui est en permanente évolution. Nous sommes donc allés à la rencontre de Booba, Admiral T, Lino, Neg’Marrons, Keros-N et K-Reen afin de rendre intelligible leur univers respectif et de mieux appréhender leur art. Le talent est rare et c’est ce qui le rend précieux, le comprendre est une nécessité culturelle. Musique.

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Tu t’exprimes habituellement beaucoup plus dans ta musique que dans les interviews, mais pour cet album tu as eu une grosse couverture médiatique, alors que comme tu le dis toi-même, tu n’en as pas vraiment besoin. Pourquoi ce choix?Comme pour le précédent j’ai envie de te dire, mais c’est vrai que cette fois j’ai fait la couverture des Inrockuptibles et que l’article a fait beaucoup parler. Il y a aussi l’attente à prendre en compte, le buzz et tout mais je ne pense pas en avoir fait plus.

Cela est aussi dû à ta présence sur les réseaux sociaux, souvent repris par les médias qui s’en prennent à tes propos pour se mettre en avant. Comme tu as pu le dire: “Un peu plus tard comme Joeystarr je serais un Boss Of Scandalz”. Est-ce que tu l’imaginais comme cela?Non. J’ai été surpris. Mais maintenant les médias sont tellement en galère que pour alimenter leur contenu, ils se servent des autres, ils piochent. Ils font les poubelles d’Internet. C’est mon média.

C’est entre moi et mes “followers”, ça ne devrait pas être repris, ça devrait peut-être même être interdit. C’est comme si tu faisais une rubrique dans ton magazine, et que le lendemain c’était repris par tout le monde en s’appropriant l’information. Je trouve que ça fait un peu pitié.

C’est en plus de l’information hors contexte et bien souvent déformée.Ils n’ont plus le monopole. Les magazines, tu sais de quoi je parle, s’ils ne t’ont pas en interview et qu’ils voient que tu es actif sur tes réseaux sociaux en donnant des nouvelles, et bien ils les reprennent pour eux.

Tu es devenu incontournable et tu as un côté inaccessible. Pas si inaccessible que ça, mais pour certains oui c’est sur. Je suis “bankable”, je fais vendre du papier et j’intéresse. Quand on dit Booba, que tu aimes ou pas, tu cliques.

Finalement, n’est-ce pas normal de subir la critique d’autant plus que les gens qui te dénigrent n’ont pas grand chose à voir avec toi, par leur culture, leur parcours?C’est la France. C’est l’incompréhension totale et ils jugent ce qu’ils ne connaissent pas, ils analysent ce qu’ils ne connaissent pas. En fait le problème c’est que nous, ayant grandi en France, nous comprenons leur monde et leur univers, mais pas eux. Ils pensent comprendre mais en fait ils sont “complètement à l’Ouest”.

Placé au centre des polémiques pour ses propos, Booba est avant tout un artiste. Fidèle à des convictions souvent plus saines que celles de ses détracteurs, il incarne un symbole de réussite pour toute une culture et le miroir qui reflète une société en échec. Un statut qu’il assume avec confiance et une simplicité qui passe par les détails de la complexité d’un précurseur.

“Les médias sont tellement en galère que pour alimenter leur contenu... Ils font les poubelles d’Internet”

BOOBA

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Crois-tu que le regard de la société française sur les questions de couleurs ou de diversité ait progressé?C’est à peu près pareil. Le F.N. est toujours aussi présent et actif. Tu sais, les médias manipulent et parlent de ce qu’ils veulent. Je pense qu’il y a autant de sans-papiers, autant de gens que l’on renvoie dans leur pays, autant de discrimination qu’avant. Après, il y a des nouveautés, il y a les Roms par exemple qui sont “tout frais”. Ce sont de nouvelles cibles, mais je me considère comme un Rom. Je me rends compte que je ne suis plus comme “tout le monde”, je ne subis plus vraiment le racisme avec mon statut, je suis par ailleurs moins souvent en France. Pour le lambda c’est toujours pareil, il galère toujours pour rentrer au VIP sur les Champs Elysées, le regard bizarre quand il rentre chez le concessionnaire ou chez Louis Vuitton, ou tout simplement pour aller chercher du travail. Mais je n’attends pas que cela change. C’est Sarkozy qui disait: “la France aimez-la ou quittez-la”, mais nous on l’a aimée et elle ne nous aime pas, alors on la quitte.

C’est vrai que tu défends régulièrement des valeurs qui sont importantes en France.Bien sûr. J’y ai toute mon équipe, ma famille. Je ne renie pas du tout d’où je viens. J’habite toujours à Boulogne quand je rentre. Mais ils ne font rien pour encourager la jeunesse, que ce soit au niveau du sport, des entreprises, du travail, des impôts. Dès que tu commences une entreprise, on te massacre avec les charges salariales, les impôts. Ce que je veux dire c’est que même quand tu fais preuves de bonne volonté, c’est trop difficile, on t’étouffe.

C’est la première raison de ton départ?Non. C’est un mélange de tout. D’une part aujourd’hui j’ai 38 ans, donc j’ai quand même roulé ma bosse et j’ai toujours aimé voyager. Si à 15 ans, lorsque je suis venu en High School pendant un an, j’avais eu les moyens, je serais resté à Détroit pour poursuivre mes études. Je ne rappais même pas encore. J’ai toujours eu cette attirance pour la culture américaine de par la musique. Parce que ma passion, ce que j’aime le plus, c’est la musique, la “black music”, et c’est de là-bas que ça vient. Si tu me mettais au bar dans un strip-club bien ghetto où je n’entendrais que du gros son, je pourrais rester assis toute la soirée, je serais comme un poisson dans l’eau. Je n’ai pas besoin de beaucoup. En France ce n’est pas possible, tu ne peux pas sortir dans un endroit “chic” qui va jouer du Hip Hop parce que ce n’est pas dans la culture, dès qu’il s’agit d’une grosse boîte, ce n’est pas Hip Hop du tout. A cause de mauvaises associations du genre: Hip Hop/banlieue, banlieue/racaille donc pas

“La maison de disques ne me sert qu’à mettre mes disques dans les bacs et si il n’y a plus de bacs, je n’ai plus besoin de personne.”

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de soirées Hip Hop. Il faut que tu ailles dans une soirée “coupe-gorge” bidon. Aux Etats-Unis, c’est dans les mœurs, tu peux aller dans la plus grosse boîte de la ville et il y a au moins un jour où c’est Hip Hop avec des gens qui savent se tenir.

La “mort” du disque a relancé les concerts et surtout développé le numérique, comment abordes-tu ce passage de relais?Ça va, mais l’industrie du disque est quand même catastrophique. Moi j’ai hâte qu’ils arrêtent complètement de faire des CD et qu’il n’y ait plus que du numérique. Le CD ne sert plus à rien, récemment un beatmaker m’a donné un CD, je ne savais même pas comment l’écouter, sur les nouveaux Mac il n’y plus de lecteurs CD.

Le numérique te convient en tant qu’artiste?C’est au point mais encore une fois cela n’a pas encore vraiment de sens. Quand mon album sort sur ITunes, il se retrouve instantanément sur d’autres plateformes en téléchargement gratuit. C’est comme si tu allais dans un magasin et que pour chaque produit tu avais le choix soit de l’acheter soit de le prendre gratuitement. La musique est devenue un consommable. Ce n’est plus un objet, ni quelque chose qui a de la valeur…

Justement, l’objet était le fruit du pont fait par les maisons de disques entre l’artiste et ses auditeurs pour créer une économie. En fait, avec le numérique, l’artiste n’a plus besoin des maisons de disques?J’ai un deal de distribution. La maison de disques ne me sert qu’à mettre mes disques dans les bacs et si il n’y a plus de bacs, je n’ai plus besoin de personne. Je sors ma musique, elle va sur Itunes et c’est fini. Ce n’est pas plus mal. Tout évolue. Je suis maintenant un artiste confirmé mais par contre un débutant doit s’accrocher pour se faire connaître. Soit il faut être pistonné soit il faut sortir du lot. A l’image de ce que nous avions fait avec Lunatic à l’époque du Crime Paie. Personne ne nous jouait,

on ne passait pas en radio, les maisons de disques ne voulaient pas de nous mais nous avons réussi à placer une chanson et ensuite le bouche à oreille dans la rue a fait le reste.

Tu disais “on n’est pas back dans les bacs puisqu’on est jamais parti”, est-ce que tu penses que c’est l’une des clés de ta longévité d’être resté au contact?J’ai toujours pris cela comme du sport et lorsque tu pratiques, tous les ans tu fais le championnat. On me dit souvent que je suis productif, mais je ne m’en rends pas vraiment compte, je suis surtout régulier.

Tu ne regardes pas derrière toi? Si. Mais je n’ai pas l’impression d’en faire des tonnes et des tonnes. Il y a des artistes qui font des mix-tapes, double mix-tape, double album.

Tu parlais tout à l’heure de cette difficulté pour les artistes “underground” de se faire connaître. Tu soutiens aujourd’hui des artistes comme Lacrim, Jul ou Gradur de la nouvelle génération. Tu restes positif malgré les expériences du passé?Il y a toujours de bonnes choses qui sortent, heureusement. Seulement, il faut les découvrir. On est en France et il n’y a qu’une grosse radio qui est Skyrock. Et pour passer sur Skyrock il faut déjà être en maison de disques. Depuis que j’ai lancé www.oklm.fr, je m’en rends vraiment compte. Il y a un vivier de rappeurs de partout qui ont envie de manger le bitume!

www.oklm.fr avait l’allure d’un zapping du net et se recentre aujourd’hui sur la découverte d’artistes issus de la culture urbaine.Cela a toujours été sur le même format, mais peut-être que tu as cette sensation parce que nous communiquons plus sur les artistes maintenant. Découvrir d’autres talents comme un magicien exceptionnel, ça ne court pas les rues. Il faut un incroyable talent.

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Est-ce toi qui gère ce projet?Oui, mais pas tout seul. On valide tout ensemble, c’est obligé. Il y a une ligne directrice, un état d’esprit, il faut que ça me corresponde. C’est comme cela que les projets durent je pense. Si un artiste fait une marque de vêtement juste pour prendre le chèque et ne s’investit pas dans l’identité des collections par exemple, et bien son empreinte n’est pas imprégnée dans la marque et ça ne marche pas.

Qu’est-ce qui caractérise un artiste, car même si tu ne te considères pas comme tel, tu as conscience d’avoir du talent?C’est quelqu’un qui fait ce qu’il aime, qui n’est pas un suiveur. Quand il fait du son, il ne se demande pas: “à qui je m’adresse” ou “quel thème je vais aborder”? Un artiste, c’est spontané. C’est du caractère. Un boxeur va être dans son coin et écouter son entraîneur, mais il y a des rounds où il aura sa petite folie, son petit truc à lui, il sent qu’il faut faire autrement et ça fonctionne souvent. Ou comme un peintre qui se lève, qui peint direct. Un artiste c’est quelqu’un de créatif et qui a sa propre identité.

C’est amusant car tu dis ne pas être un artiste, mais la manière dont tu définis ce statut est identique à celle avec laquelle tu te décris souvent…Oui, mais quand je dis que je ne suis pas un artiste, c’est plus dans le sens où je ne me prends pas au sérieux et que je n’ai jamais rêvé de cela. Je n’ai jamais rêvé de faire du Rap. J’adorais la musique mais je ne me voyais pas du tout rapper. Et puis je n’en fais pas des tonnes, il y en a qui font des ateliers d’écriture, comme si il y avait une technique. C’est bien, car moi aussi on m’a écrit mes premiers textes, mais certains se prennent vraiment trop au sérieux pour moi.

Quelles sont pour toi les clés de la réussite?Déjà, il faut avoir un cerveau! (Rires) Savoir s’en servir, savoir s’entourer, être persévérant, bosseur. Il y a le talent mais il y a aussi le travail. Il faut croire en soi. Encore une fois il n’y a pas vraiment de formule magique. Mais l’entourage compte beaucoup.

Ce sont eux qui te définissent au quotidien?C’est clair. Puisqu’au final les mecs disent “il est mal entouré”. Mais c’est toi qui fais ton entourage sinon tu es une victime.

Tu critiques souvent NTM, IAM, ou Solaar mais tu as repris des phrases ou fait des clins d’œil à des artistes qui en ont fait beaucoup moins (Disiz/Le Rat Luciano/Fabe…) Est-ce que la rivalité dans l’espace (93/92/13 etc) n’a pas laissé place à une rivalité dans le temps, faute de compétition dans la génération actuelle? Ce qui m’a poussé à écrire “NTM, Solaar, IAM, c’est de l’antiquité”, c’est à cause des médias. Je voyais que dans la rue personne n’écoutait IAM ou NTM, mais à chaque fois qu’ils sortaient quelque chose, c’étaient les grandes éloges, alors qu’ils n’étaient déjà plus des rappeurs actuels. Beaucoup moins maintenant mais à l’époque ou je l’ai écrit c’était le cas. C’est du Rap dormant. Il faut arrêter de parler comme si ils vendaient encore 800 000 albums et qu’ils étaient écoutés par les jeunes et les moins jeunes. Personne

“Il n’y a que moi qui l’ouvre et c’est un peu triste car ils ne se rendent pas compte du pouvoir que l’on a.”

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n’écoute. Ils ne vendent plus de disques. Il reste Rohff, La Fouine, Kaaris. Rohff, même si il est moisi, c’est toujours un artiste qui peut, si il fait de la très bonne musique, rattraper son public et espérer vendre un minimum. Tous ceux dont on parle là, il y a l’avant clash et l’après clash. Comme je disais dans le clash tu laisses des plumes et ces trois là y ont laissé des plumes…Mais avant le clash c’était encore la compétition; Kaaris a eu un disque d’or avec son premier album je crois, La Fouine ça voulait encore dire quelque chose, il vendait encore un peu. Et il y a aussi ceux qui vendent plus que moi, les Black M, Maitre Gim’s, mais ce n’est pas la même division.

Ton leg est l’une des raisons pour laquelle tu as créé www.oklm.fr. Peut-être que ce qui te permet d’avoir du recul sur sa conception est aussi d’avoir appris de leurs erreurs?Je ne pense même pas qu’ils aient fait des erreurs. NTM et IAM ont forcé, c’est comme si Solaar était encore en train d’essayer de rapper… Il faut arrêter au bout d’un moment. Quand je vois que Joeystarr sort un album, arrête! C’est perdu d’avance. C’est comme si un mec de 300 kilos projetait de faire le marathon l’année prochaine. Tu fais 300 kilos, tu n’as pas de Nike Air, arrête tout de suite. Mais je ne pense pas qu’ils aient fait des erreurs, parce qu’ils ont essayé au moins. Joeystarr avait B.O.S.S., Kool Shen avait IV My People, IAM, ils ont quand même lancé la Fonky Family…

Donc tu n’as pas reproduit ce schéma, ces “expériences”.Peut-être, mais en fait ils n’ont rien fait je trouve. Dans mes albums j’invite toujours des gens, quand je fais Autopsie, je mets vraiment des artistes en avant avec de vrais morceaux qui plaisent. Sans dire que c’est moi qui les ait sortis, il y a beaucoup d’artistes qui ont participé à Autopsie qui ont aujourd’hui un certain public et un certain parcours. Alors que si tu regardes les artistes qu’il y avait sur B.O.S.S. ou IV My people, je ne sais même plus qui

il y avait, mais il n’y en a pas un qui est encore là aujourd’hui. Et cela veut dire quelque chose. Je leur reproche aussi d’être trop lisses. Ils auraient pu se rebeller comme moi j’ai essayé de le faire en créant un mouvement alternatif. Eux, ils ont accepté que Skyrock leur coupe leur émission, Joeystarr avait B.O.S.S.! Tu n’acceptes pas normalement, tu ne

te laisses pas détruire comme cela. Il n’y a que moi qui l’ouvre et c’est un peu triste car ils ne se rendent même pas compte du pouvoir que l’on a. C’est nous qui faisons la musique. Si demain ils arrêtaient d’aller dans leurs émissions, de leur donner à manger, ils commenceraient à créer leur propre chaine et leur réseau petit à petit. J’ai essayé avec les concurrents comme Goom Radio ou Génération, mais je n’y vais même plus, c’est pareil, ça n’a aucun sens. C’est devenu Skyrock en moins bien et sans satellite. Dès que tu passes Mantes-La-Jolie, tu ne captes plus. Avant ils faisaient découvrir. Skyrock: une radio de Rap sans DJ. Le but d’une radio est de faire découvrir, tu passes évidemment des artistes confirmés mais tu dois toujours avoir des émissions spécialisées où l’on fait découvrir des titres, des artistes, les coups de cœurs du DJ et cela n’existe plus aujourd’hui. Si tu veux découvrir des nouveautés c’est sur www.oklm.fr. Là, tu vas vraiment voir ceux que nous avons “kiffé”. Sur Skyrock tu ne découvres rien. C’est l’usine.

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Tu es venu faire un show case à l’Agora en Guadeloupe, à quand une vraie date? J’ai déjà essayé, mais on en revient à la France et au fascisme. Ils ne me laissent pas chanter en Guadeloupe. J’ai essayé de faire plusieurs concerts, mais le préfet ne veut pas. Pourtant quand c’est Diam’s ou Stromae, ils font des stades, mettent la sécurité et les gendarmes. Mais pour moi ils ne veulent pas. Lors de mon premier concert en Martinique, il y a eu 64 impacts de balles dans le plafond, donc cela les a un peu refroidis, mais si tu mets les gendarmes, tout se passe bien. Ma musique ne leur parle pas, ils n’ont pas envie de prendre le risque. Finalement, je ne peux pas et j’en suis réduit à faire des shows en boîte et c’est tout.

Tu as également profité de ta venue pour tourner le clip de Mové Lang avec Gato et Bridjahting?Il arrive bientôt. Dans une semaine (mi-mai, ndlr).

Un clip dans lequel on peut te voir te lâcher comme très rarement. Même sur scène je t’ai senti beaucoup plus à l’aise…C’est le morceau et le rhum! C’est aussi propre au type de son, le fait que l’on danse. Quand tu l’écoutes, tu as envie de danser. Le rap ça évolue. Par contre je ne danserais pas le reggaeton sur scène!

On te parle souvent d’une carrière cinématographique, tu disais que Mathieu Kassovitz te propose tous les ans de faire La Haine 2… Quels sont les rôles dans lequels tu te serais vu?Le rôle de Ryan Gosling dans Drive dont je me suis inspiré dans le clip d’OKLM. C’est le rôle d’un personnage qui me ressemble un peu, introverti, dans l’action sans avoir besoin de trop s’exprimer. Etre un des braqueurs de Heat, genre Val Kilmer. Des rôles dans lesquels il n’y a pas vraiment de jeu d’acteur, mais plus des

situations et une “gueule”, des expressions. Encore une fois, comme pour la musique, je n’ai jamais rêvé d’être acteur. Maintenant on me propose des projets, en me disant tu pourrais faire ceci ou cela, donc j’étudie la question…

C’est surprenant vu comment tu te prêtes au jeu, surtout depuis le clip de Pitbull.Oui, mais pourquoi? Parce que c’est moi le réalisateur et donc je façonne le clip à ma manière, je suis forcément à l’aise. Je sais où je vais, ce que je fais et je n’ai pas à sortir complètement de mon élément. Cela reste des choses simples à faire.

Tu as joué un rôle dans le long métrage de Chris Macari?Non, on ne me voit que cinq secondes… Mais tu sais j’ai essayé, j’ai même fait des castings à Hollywood.

Quelle place occupe l’art dans ta vie en tant que public? A quoi es-tu le plus sensible après la musique? Je dirais l’architecture. Les grosses villas. J’aime beaucoup les buildings. C’est peut-être à force de voyager, de voir beaucoup d’environnements différents. C’est clair que si tu restes à la campagne, l’architecture ne voudra pas te dire

“Ils ne me laissent pas chanter en Guadeloupe. J’ai essayé de faire plusieurs concerts, mais le préfet ne veut pas. ”

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grand chose. J’ai toujours été sensible aux grosses structures. Même sur Instagram je suis abonné à luxuryworldtraveler, ils éditent des photos d’hôtels, de maisons, de châteaux, ça me parle. Je peux bien sûr apprécier beaucoup de choses mais cela ne m’intéresse pas vraiment d’approfondir dans l’art abstrait ou autre. C’est l’architecture, les voitures, parce que quand tu regardes bien une Lamborghini, la coupe, même le moteur, l’intérieur, c’est de l’art, c’est une sculpture ambulante. Le textile aussi pour moi c’est de l’art. La haute couture, ou même les vêtements en général, les découpes, les couleurs, les motifs, le graphisme. C’est ce que j’apprécie le plus. Même le vin par exemple j’ai essayé, il y a des gens qui sont dans les grands vins et qui ont voulu me convaincre avec des produits qu’ils me conseillaient, avec des plats appropriés, je goûte mais je n’arrive pas à apprécier. Pour moi ça reste du pinard!

Le label 92i est désormais composé de 40000 gangs, Shay, Siboy. Quel est le calendrier des sorties? Et ta fonction sur leur projet? 40000 Gangs devrait sortir un album pour la fin de l’année avec une mix-tape avant. Shay prépare un clip mais je ne sais pas encore quand l’album sortira et Siboy prépare une mix-tape et il enchaînera ensuite avec l’album. Ma fonction est simple: en gros, je leur donne plus d’exposition, je leur fait profiter de nos médias, de nos outils. Un accès au studio, au mix. Pour ce qui est de la direction artistique, on les aide quand on participe aux choix, mais c’est vraiment eux qui gèrent. Cela ne m’intéresse pas de devoir superviser un artiste, déjà je n’ai pas le temps. Si je dois être toujours derrière à lui dire ce qu’il doit faire, pour moi ce n’est pas un artiste, c’est un fonctionnaire. On essaie de signer des gens qui ont déjà leur univers et qui n’ont pas vraiment besoin de nous pour faire leur musique. On est la pour apporter le reste, notre expérience, la logistique, nos réseaux.

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En à peine dix ans, Unküt a su s’imposer dans le Street Wear et se décliner sur de nouveaux marchés comme avec le parfum. Quels sont les prochains objectifs? Attaquer le marché américain. Ce que je ne peux pas faire avec la musique car il y a la barrière de la langue. Et avec Unküt il n’y a pas de langue donc pas de barrière!

L’acquisition de la licence DC Comics était déjà pour cette projection d’Unküt aux Etats-Unis?Non, rien à voir, c’était juste une opportunité.

Donc pas de projet d’une ligne sport, pour le foot par exemple?Non, Unküt et le sport c’est plus par affinités, de par les gens que l’on connaît. Parfois les joueurs en demandent, donc on leur donne.

Il n’y a aucun contrat, rien. A la base, Unküt, ce sont des produits que j’apprécie afin que je puisse les mettre, ce sont mes goûts. Nous avons une gamme un peu sport, mais cela reste dans ce que je mettrais ou ce que j’achèterais.

“...je ne me vois pas marcher comme certaines grosses stars, entouré de gardes du corps qui repoussent les gens...”

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Tu vis désormais aux Etats-Unis depuis presque dix ans maintenant, était-ce pour toi aussi la clé pour te permettre un épanouissement personnel loin de la célébrité?C’est clair que c’est agréable de pouvoir être monsieur Tout-le-Monde. Mais attention, il y a des gens connus qui ne supportent pas de ne pas être reconnus, qui veulent toujours briller. Pour moi, c’est une liberté, de mouvement, d’exister tout simplement. On ne te regarde pas, on ne te prend pas en photo. C’est bien.

Pourtant tu es quelqu’un de très disponible, pour les photos par exemple.Oui, c’est normal. Maintenant cela fait longtemps que j’ai commencé ma carrière, parfois je peux me retrouver en face d’une personne qui est venue à dix de mes concerts, a acheté

cinq albums, deux mixtapes, qui a une armoire remplie de Unküt et qui rêve de me rencontrer. Si le jour où elle a enfin la chance de me croiser je la remballe, c’est la déception. Je me mets toujours à la place des gens, je me dis que je n’ai pas le droit de refuser. Cela peut parfois être ingrat, parce que forcément je ne peux pas répondre à toutes les attentes. Il y a beaucoup de gens qui comprennent, qui me voient signer 50 autographes et réalisent qu’à un moment, il faut que je parte. Mais je ne me vois pas marcher comme certaines grosses stars, entouré de gardes du corps qui repoussent les gens pour ne pas qu’ils me demandent de photos. C’est même souvent le contraire, je suis obligé de dire aux gardes du corps de laisser passer. C’est la moindre des choses, surtout quand je suis en déplacement et que cela rentre entièrement dans le cadre de mon travail.

BOOBAwww.oklm.fr

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D’ou vient ton nom?Au début des années 90, les pseudos signifiant un grade comme général, président, lieutenant étaient courants dans le milieu Reggae Dancehall, donc j’ai choisi “Admiral” qui représente en quelque sorte le chef de file, celui qui prend ses responsabilités.

Comment t’est venue l’idée de reprendre le titre Ti Milo – C’est la première fois que tu fais une reprise ? Comment expliques-tu le succès de ce titre?Quand Il m’a été proposé de reprendre le titre Ti Milo et de le mettre à ma sauce pour le projet Léritaj Mona 2, j’ai tout de suite répondu favorablement car selon moi, la notion de transmission culturelle intergénérationnelle est essentielle. Je pense que le succès du titre est dû à la mélodie, à la technique de chant traditionnelle et au mélange des couleurs musicales. Cela parle à toutes les générations.

Tu fais maintenant partie du patrimoine local, on te voit sur les publicités Capès, Sebastiano. Tu es rentré dans les mœurs? Comment définis-tu ton rôle? Si tu penses en avoir un bien sûr...Nous sommes un jeune peuple qui, après cette période longue et douloureuse qu’à été la traite négrière, doit se reconstruire. Et pour se faire, tout un chacun doit porter sa pierre à l’édifice. Nous avons tous un rôle à jouer dans cette société pour bâtir notre avenir. L’artiste est là pour rassembler, donner de l’espoir et de la force.

Sur la campagne Sebastiano, tu poses avec ta femme qui est également ton manager. Est-ce un symbole? Étant l’égérie de la marque, je devais poser pour la campagne de la Saint-Valentin, il nous a paru logique que ce soit aux côtés de ma femme.

Cela fait maintenant 5 ans que Wok Line a été lancé, quels sont les projets? Wok Line est pour le moment en stand-by.

La nuance entre la dimension artistique d’une œuvre et son créateur est aujourd’hui très floue… Qu’en penses-tu?Je pense que par définition la nuance entre une chose et une autre ne peut être claire et franche. L’art naît souvent de sentiments si complexes que même le créateur de l’œuvre a du mal à l’expliquer avec des mots.

Que penses-tu des médias aujourd’hui?Malheureusement les médias suivent mais ne proposent plus. La diversité de légumes et de fruits de qualité se trouve sur le marché et le marché aujourd’hui, c’est Internet.

Figure de proue du Dancehall caribéen, artiste de renommée internationale, Admiral T a fait de la scène son terrain de jeu et d’expression. C’est là qu’il partage avec le public toute sa passion pour la musique, conscient de sa vocation culturelle et identitaire.

ADMIRAL T

“L’art naît souvent de sentiments si complexes que même le créateur de l’oeuvre a du mal à l’expliquer avec des mots.”

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La “mort” du disque a relancé les concerts et surtout développé le numérique, comment abordes-tu ce passage de relais?Vu que je n’ai jamais été un gros vendeur de disques, ça n’a rien changé pour moi. Les supports phonographiques auront beau changer, le spectacle vivant ne mourra jamais.

Tu viens de faire un concert à Paris et tu as fait ton concert avant-hier en Guadeloupe. Quels sont les autres artistes qui intègrent le show?J’ai invité Kalash, Saik, Stony, Clayton Hamilton, huit danseurs, la troupe SaKiTaw, Akiyo. Le DVD du Zénith de Paris sera très bientôt disponible.

Quels sont les projets du Général Crew?Une tournée est en préparation pour cette année.

Ton frère est passé sur le tournage du clip de Booba Mové Lang, une collaboration avec le D.U.C. est-elle en préparation?Non, il n’y a pas de collaboration en préparation.

Mets-tu des limites à ta liberté d’expression?Je ne m’impose pas de limites à ma création. Je fais juste attention à ne pas être maladroit dans ma façon d’exprimer ma pensée.

Comment définis-tu ton identité artistique?Caribéenne.

Quels sont pour toi les critères qui caractérisent un artiste?L’humilité, le respect, l’audace, la prise de risque en proposant des choses nouvelles.

Pratiques-tu une autre forme d’art?Tout est art, quand on le fait avec passion.

Quel est le moment dans ta carrière musicale qui t’a le plus marqué?Je viens d’une famille très modeste, j’ai grandi dans un ghetto, donc tout ce que j’ai pu vivre jusqu’à maintenant grâce à la musique, c’est pour moi du bonus et par conséquent marquant.

Quel est pour toi le rôle de la musique?Donner le sourire, éveiller les consciences, rassembler.

La musique a également une vocation contestataire, que penses-tu des “contestations” actuelles?Les contestations actuelles reflètent tout simplement l’état actuel de notre société. On se sert de la musique pour faire passer nos messages, pour faire bouger les choses, pour dire notre mécontentement.

Penses-tu que ta musique “adoucit les mœurs” ou au contraire “a nourri les peurs”?“Elle rassemble les peuples, rapproche les nations, rassemble les jeunes et toutes les générations, elle adoucit les mœurs, après une journée de dur labeur, tous ces enfants qui ont si froid si peur”. MUSIC IS LOVE.

“On se sert de notre musique pour faire passer nos messages, pour faire bouger les choses...”

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As-tu des projets cinématographiques? Quels sont les rôles qui t’intéresseraient, ou quels types de personnage?J’ai eu effectivement quelques propositions pour des projets cinématographiques. J’aime les personnages charismatiques comme Malcolm X , sensibles comme Will Smith dans A la Recherche Du Bonheur ou des personnages complexes comme DiCaprio dans Arrête moi si tu peux.

Quels sont les artistes (musicien, peintre, sculpteur) de la Caraïbe que tu apprécies?J’écoute un peu de tout. Je connais pas mal de peintres, un peu moins de sculpteurs mais j’avoue être profane en la matière.

Crois-tu que le regard de la société française sur les questions de couleurs ou de diversité ait progressé?Elle avance très lentement mais elle avance malgré elle. Les choses évoluent au niveau international, indirectement cela a un impact sur la société française qui est, rappelons-le, le pays des droits de l’Homme et qui par conséquent devrait donner l’exemple.

Le 10 Mai a eu lieu l’inauguration du Mémorial ACTe à Pointe-A-Pitre. Penses-tu qu’il soit toujours important d’associer l’esclavage à l’identité guadeloupéenne?La question ne devrait même pas se poser, l’esclavage fait partie de notre histoire, on ne peut pas occulter 400 ans d’histoire. Pour aller de l’avant il faut assumer son passé d’où les trois phases essentielles des trois R: “Reconnaissance, Réparation et Réconciliation”.

Tes projets?Le I AM CHRISTY CAMPBELL TOUR continue, Martinique, Miami, Haiti, Canada, Suisse, etc...

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La “mort” du disque a relancé les concerts et surtout développé le numérique, comment abordes-tu ce passage de relais avec la sortie de ton dernier album?Je l’approche comme il faut le faire, je n’ai pas le choix. Tout évolue et on est obligé de faire avec. Ce n’est pas une contrainte mais dans l’absolu, pour ce qui est de la promotion et de la visibilité c’est beaucoup plus intéressant aujourd’hui. Après, si l’on parle de qualité, n’importe qui peut exister et donc cela devient compliqué. Il faudra faire le tri.

Quels sont pour toi les critères qui caractérisent un artiste?L’originalité. Sa personnalité, ce qu’il emmène de lui sur la table, sa performance et pour être plus précis en ce qui concerne le Rap, les lyrics, le flow, le vocabulaire, la voix. Le style avec lequel il diffuse son univers.

La bonne utilisation de la langue française paraît importante à tes yeux. Pourquoi?On est en France, non? Je ne vois pas l’intérêt de parler comme un abruti. Chacun voit midi à sa porte, mais moi j’ai grandi avec IAM, NTM et c’étaient des mecs qui soignaient les textes, ce sont des choses qui m’ont influencé. Quand on voulait challenger ce genre de morceaux, il fallait écrire.

Cela se ressent encore plus aujourd’hui à l’écoute de Requiem, tu as une écriture très mature.J’ai malheureusement 40 ans, donc j’y suis obligé. L’artiste crée en fonction de son âge aussi, je ne peux plus raconter les mêmes choses que lorsque j’avais 20 ans. Pour pouvoir dire certaines choses, il faut du recul pour d’abord les comprendre. Il y a beaucoup de gens, moi y compris, qui font des choses sans savoir pourquoi et le sens de ces choses peut arriver bien plus tard encore.

On sent également un certain pessimisme sur la scène actuelle: “je leur passe le relais c’est un bâton de dynamite” - extrait de Wolfgang.(Rires) C’est parce qu’il faut bien agacer ce petit monde aussi. Je ne vais pas arriver en m’excusant d’être là. Quand tu fais du Rap, il faut mettre la

Valeur sûre du Rap français, Lino incarne sans superflu l’identité d’une culture urbaine talentueuse, originale et mature. Avec Requiem, il nous délivre une explosion de rimes et de punchlines qui, accompagnées de ses gimmicks, redonne à son art sa fonction originelle.

“...le manque d’originalité dont souffre le Rap aujourd’hui est en train de faire stagner le genre.”

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pression aux autres gars. Le problème, c’est qu’à un moment donné il y a eu un changement et le manque d’originalité dont le rap souffre aujourd’hui est en train de faire stagner le genre.

Et il y a également un côté très pédagogique avec des lyrics tels que “notre histoire ne commence pas par la traite négrière…” - extrait de Requiem (Outrotombe)?Cela s’adresse à la diaspora africaine, entre autre. Il faut qu’ils comprennent, surtout les plus jeunes, que dans les films à Hollywood il y a toujours l’esclavage, mais cela doit s’arrêter. Il y a une vie avant l’esclavage, une histoire, plusieurs histoires. C’est important que des gens montrent cette facette là aussi car sinon, un Noir qui ne connaît pas son histoire et qui ne s’éduque qu’avec l’école et la télévision va avoir l’impression que son peuple est juste bon à prendre des coups de fouet.

Que penses-tu des médias aujourd’hui et “des questions de merde” - extrait de Suicide Commercial?Cela dépend forcément de quels médias on parle. C’est le même problème que dans la musique, Internet a favorisé beaucoup de personnes non professionnelles et dans les médias cela a été un peu la même chose. N’importe qui peut être journaliste parce qu’il a un blog et qu’il pose deux questions

bidons… Cela peut également être valable à la télévision, parce qu’ils n’en ont rien à faire de poser de bonnes questions. J’ai fait cependant quelques interviews dernièrement qui étaient très intéressantes dans des gros médias. Ce sont des magazines de Rap qui doivent mettre un peu de sens à leurs questions et dans la manière de présenter notre culture. Parce que tu entends souvent dire que les rappeurs ne sont pas bons en interview, donc déjà les rappeurs… Qui sont-ils? Et il faut voir les questions qu’ils te posent en face. Si tu arrives et que tu me demandes comment j’ai écrit mon album, ou alors lorsque j’ai fait un featuring alors comment ça s’est fait? C’est aussi à toi avec le contenu que tu donnes dans tes textes et ce que tu peux apporter qui peut permettre aux journalistes d’approfondir certains sujets.

Ta collaboration avec Booba s’imposait vu que vous faites partie des rares issus de la même génération à être encore d’actualité. Conception d’un classique?On a déjà collaboré ensemble, on se connaît. On a fait le taf.

Tu répètes souvent que tu n’as jamais vraiment voulu faire carrière dans la musique, mais quelles sont les sensations qu’elle te procure lorsque tu crées, que tu enregistres? Quand je dis cela, c’est valable pour moi et pour plein d’autres artistes de ma génération en réalité. Quelqu’un qui commence maintenant peut concevoir une carrière parce qu’il a des repères, ce qui n’était pas le cas quand nous avons commencé. Nous n’avons jamais pensé qu’avec ce que l’on faisait on aurait pu aboutir à cela.

Est-ce que tu pratiques une autre forme d’art?Je dessine, mais rien d’officiel.

“C’est la faim qui crée les révolutions, ce n’est pas en chantant.”

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Mets-tu des limites à ta liberté d’expression ou de création?Non, juste de la morale. Je n’irai pas dire des choses amorales ou choquantes juste pour choquer. Je le dis si c’est nécessaire, sinon j’évite. Je ne pense pas que ce soit me restreindre, ce sont juste des choses que je n’ai pas envie de dire. C’est la douane personnelle. L’auto-censure, il ne faut pas le faire, mais choquer pour choquer non plus.

Que penses-tu du Hip Hop aujourd’hui et de son impact sur la société?Sur les cerveaux, il n’y a aucun impact, mais dans la société c’est plutôt sur les codes vestimentaires, le langage. Je ne pense pas que le Rap ait vocation à faire des révolutions, ce sont des foutaises. Tu peux allumer l’étincelle dans le crâne d’un mec ou deux mais c’est tout. C’est la faim qui créé les révolutions, ce n’est pas en chantant. D’ailleurs dans un morceau, je dis que la chanson ne fait

pas la révolution mais l’accompagne. Tu fais la révolution et tu vas te souvenir de la chanson de Bob Marley, Burnin’ & Lootin’, mais ce n’est pas ce qui va mettre le feu aux poudres. Ce n’est pas en écoutant une chanson le matin que tu te dis il faut que je change… Même si cela peut permettre d’avoir des visions différentes, des points de vue.

Crois-tu que le regard de la société française sur les questions de couleurs ou de diversité ait progressé?Non, je ne crois pas. Il suffit d’allumer la télévision pour le constater, cela n’a pas beaucoup bougé. Maintenant il y a beaucoup de repli sur soi. J’ai grandi dans une France plus multicolore, donc c’est peut-être même pire qu’avant.

Un nouvel album d’Arsenik?Oui, ça va arriver… Plus vite qu’il ne faut. Très bientôt.

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Vous êtes un des rares groupe de votre époque à être toujours ensemble, comment l’expliquez-vous?C’est vrai que quand on fait le bilan, Ben-J et moi c’est une histoire qui dure. Avant d’être des partenaires dans la musique, nous sommes des amis, des frères. Ceux qui connaissent l’histoire de Neg’Marrons savent que l’on a grandi dans le même quartier, et cela fera bientôt 30 ans. On se respecte, il sait quels sont mes défauts ainsi que mes qualités, et inversement. C’est une affaire de famille, de fraternité. Avec le temps on peut commencer à penser différemment pour X ou Y raisons, mais jusqu’à maintenant, nous avons toujours plaisir à travailler ensemble, on s’entend sur la plupart des choses et parfois même sans avoir besoin de trop parler.

Tes activités extérieures te permettent peut-être également de t’épanouir personnellement sans que le groupe en pâtisse?Même si la maison-mère reste Neg’Marrons, nous avons toujours eu des activités annexes. Pour ma part, j’ai différentes casquettes, celle de MC (Maitre de Cérémonie), d’animateur à la télévision avec mon émission “Tepok”. J’ai longtemps été sur Skyrock, aujourd’hui j’ai

mon émission sur Trace - “Faut qu’ça Trace”. Cela fait déjà une dizaine d’année que je travaille avec Trace sur différents projets. Dans la branche artistique, j’ai aussi mon travail avec mon collectif Mc Malcriado, Ben-J avec le sien (Bisso Na Bisso), notre travail avec la casquette de producteurs sur Première Classe avec PC1 et PC2 qui sont des compilations classiques dans l’univers du Hip Hop. Donc c’est vrai que

nous avons un parcours bien chargé et même si nous ne sommes pas collés tous les deux H24, chacun aussi a ses activités. Parfois quand on arrive ensemble en soirée, on nous demande si c’est pour un show case ou autre mais non, c’est juste que nous venons nous divertir entre amis. Il faut reconnaître que très peu de groupes ont su entretenir ce type de relation dans le temps.

Issus du collectif Secteur A, les Neg’Marrons ont marqué la communauté antillaise avec leur premier opus Rue Case Nègres. Presque 20 ans ont passé mais leur passion demeure intacte. Mise en perspective avec Jacky Brown de leur nouvel album Valeur Sûre qui sortira cet automne, dont le titre Fast Food Music est le premier extrait.

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“...la scène est la seule manière de pouvoir jauger le potentiel d’un artiste”

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Secteur A et Trace était aussi une histoire de famille au départ.Oui et ça l’est toujours. Effectivement c’est de Secteur A que l’histoire de Trace a commencé.

La “mort” du disque (du support physique) a relancé les concerts et surtout développé le numérique, comment abordez-vous ce passage de relais? Avec ce nouvel album notamment? On s’adapte. Effectivement nous avons traversé les époques. Quand nous sommes arrivés c’était l’époque du vinyle et de la cassette, ensuite il y a eu le CD et maintenant c’est la phase numérique. Comme dans toutes situations il y a les avantages et les inconvénients, l’accès à la musique se fait plus facilement, cela développe les concerts comme tu le disais. C’est quelque chose qui nous va aussi parce que Neg’Marrons est un groupe de scène et pendant toutes ces années, nous n’avons jamais arrêté de tourner, bien au contraire. Nous avons eu la chance d’écumer pas mal de salles et de faire des concerts aux quatre coins du monde. Du coup avec ce nouvel album nous avons plutôt hâte de reprendre la scène pour présenter les nouveaux morceaux, car depuis huit mois, nous avions fait une pause afin de nous concentrer sur l’album. C’est un album assez scénique, les morceaux sont très dynamiques et le public attend cela aussi de nous. Donc tant mieux pour nous si le marché des concerts se développe. Pour moi la scène est la seule manière de pouvoir jauger le potentiel d’un artiste, parce qu’à partir du moment où tu arrives à défendre ton disque sur scène en retranscrivant ton énergie et à faire “kiffer” le public, il adhèrera et aura sûrement envie d’aller acheter ton disque. Surtout avec toutes les machines que tu peux utiliser en studio, ce que tu peux écouter sur un disque peut parfois être trompeur car certains n’arrivent pas à le reproduire sur scène. Cela permet de démasquer les vrais des faux, donc ce n’est pas plus mal.

La nuance entre la dimension artistique d’une œuvre et son créateur est aujourd’hui très floue… Surtout dans le Hip Hop. Qu’en penses-tu?Nous faisons une musique qui est tellement proche de la réalité et basée sur la réalité. Nous laissons très peu de place à la mise en scène, au jeu d’acteur alors que malgré tout dans la musique tu as le droit de créer un personnage. Mais dans l’urbain si tes lyrics sont plus “gangster”, le public veut que tu sois un gangster dans la vie. Alors que c’est comme un médecin, il ne garde pas sa blouse 24h/24h. En musique cela devrait être pareil, mais dans l’urbain ce double emploi est plutôt mal vu. Il y a beaucoup d’artistes qui en ont fait les frais mais malgré tout je pense que quand ta musique est vraiment bonne les gens passent outre. En tant que Neg’Marrons ce n’est pas vraiment notre créneau. On va plus s’inspirer de faits réels, de notre quotidien, des personnes qui vivent à nos côtés. C’est vraiment ce qui nous inspire.

La musique a une vocation contestataire, que penses-tu des “contestations” actuelles? Nous sommes sur les deux tableaux en tant que Neg’Marrons, avec un coté plus léger, festif, dansant, pour s’éclater mais aussi un message à délivrer. C’est notre marque de fabrique avec des morceaux comme La Monnaie ou Lève-toi/Bats-toi qui ont marqué par notre discours. On privilégie le message sans oublier que la musique reste aussi du divertissement.

“On privilégie le message sans oublier que la musique reste aussi un divertissement”

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Avec la maturité, votre regard est-il différent?Bien entendu, les choses changent, évoluent et on ne peut pas nous demander de faire ce que l’on faisait il y a 20 ans, ce serait ennuyeux et ennuyant. Notre premier disque est sorti en 1995, on est en 2015, on sort un nouvel album, heureusement nous n’avons pas reproduit ce que nous avions déjà fait. Lorsque l’on croise notre public ou simplement des gens qui nous connaissent, on nous demande tout le temps “est-ce qu’il y aura un morceau comme Le Bilan?”. Quand je suis en studio, je ne me dis pas que je vais refaire Tout le Monde Debout ou Le Bilan, ce serait quelque part régresser.

Mets-tu des limites à ta liberté d’expression ou de création?Aucune limite! Ma limite est déjà naturelle, parce que dans la vie j’ai ma manière de m’exprimer, ma façon de voir les choses mais artistiquement ma limite est le respect. Du moment que je sais que je ne manque de respect à personne dans mes propos, je n’ai pas de limite artistique.

Comment définissez-vous votre identité artistique?Avec toutes ces années, c’est plus le public qui la définit. Avec le temps Neg’Marrons a réussi a installé une couleur, un style. De part nos mélodies, notre façon d’écrire. Plusieurs fois j’ai croisé des gens qui pouvaient nous dire: “J’ai entendu un truc qui vous ressemblait, c’était vraiment le style Neg’Marrons”. On a une touche, notre manière de faire des refrains, peut-être aussi notre propre langage qui est originaire du 95, Garges - Sarcelles. Toutes ces choses là ont contribué à faire la touche Neg’Marrons. Il y a aussi le timbre vocal, nos gimmicks. On se différencie des autres et à partir du moment où l’on peut t’identifier, c’est que tu as réussi à imposer ton style.

Ce sont pour toi les critères qui caractérisent un artiste?C’est exactement ça. C’est l’originalité, sa voix, ses gimmicks. Comme lorsque j’arrive sur scène en commençant pas “T’entends pas ou quoi ?” on va directement savoir que c’est Jacky Brown. A partir du moment où tu as ta propre touche, ta propre signature, c’est que tu es un artiste identifié et identifiable. Pour certains tu es obligé de regarder les noms pour savoir qui ils sont, cela signifie qu’ils ont encore beaucoup de boulot! (rires)

De quelle manière procèdes-tu dans la conception d’un album?On a mis huit mois pour la finalisation, mais nous avons mis deux ans à le travailler. Les premiers choix pour trouver les instrumentaux, nous en avons reçu beaucoup de la part des producteurs qui étaient proches de l’univers Neg’Marrons mais cela ressemblait justement trop à ce que nous avions déjà fait. On voulait sortir de ce son là et il

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a fallu l’expliquer au compositeur. Le but était de nous permettre d’aller chercher d’autres mélodies, d’autres “vibes” et d’apporter quelque chose qui est dans l’air du temps. On ne voulait pas ramener du Neg’Marrons à l’ancienne, c’était important pour nous de proposer un projet nouveau.

Avez-vous testé des morceaux sur scène?Pas encore mais on va commencer à partir du mois de juin.

C’est aussi un cheminement souvent “oublié” que de proposer de nouveaux titres au public lors des concerts afin de construire un album.Quand un morceau n’est pas encore connu mais qu’il suscite une réaction du public, il y a de grandes chances que ce soit un bon titre.

Quel est le moment de votre carrière musicale qui vous a le plus marqué?Il y en a tellement… Des concerts comme celui donné à Nouméa en Nouvelle-Calédonie en 2002, depuis nous y sommes retournés 4 ou 5 fois. Le Reggae Sunsplash, un grand festival qui se déroulait dans une vallée avec au moins 15000 personnes, nous étions très attendus, lorsque nous sommes montés sur scène on aurait pu croire que la terre se mettait à trembler tellement le public nous a accueilli chaleureusement. Ils reprenaient tous les titres et quand nous avons fait le morceau Fiers d’être Neg’Marrons, c’était un moment incroyable! Il y en a eu d’autres, comme lorsque nous avons fait la première partie de la tournée des Wailers. Au bout de trois dates,

Familyman, le bassiste des Wailers, est venu nous voir alors que nous étions à table et nous a demandé : “Who are you ?” (Qui êtes-vous ?) On lui a répondu que nous étions les Neg’Marrons, un groupe avec notre petite notoriété en France. Mais ils nous a repris directement : “pas petite, quand vous montez sur scène c’est le feu!!!!”. Nous lui avons expliqué notre “univers” et après cela sur le reste de la tournée ils nous invitaient avec eux sur scène alors que Gary Pine reprenait tous les classiques de Bob Marley. De bons moments dans la musique il y en a eu plein et il y en aura encore si Dieu veut.

Quel est pour vous le rôle de la musique?C’est du partage, de l’échange. Cela peut t’apaiser, te donner de l’énergie, te remonter le moral, te faire ressortir des émotions. Comme disait Kassav’ c’est le médicament et c’est le seul que l’on ait. Dans un enterrement par exemple, on va te mettre une musique, il y a une profondeur, c’est magique. Tu l’as partout, tu es constamment avec elle, même dans les ascenseurs tu as de la musique!

Penses-tu que ta musique “adoucit les mœurs” ou au contraire “a nourri les peurs”?La bonne musique adoucit les mœurs, après “nourri les peurs” à cause des gens qui fantasment. Cela dépend comment tu l’écoutes aussi mais personnellement, je vais prendre l’exemple de Booba qui est qualifié comme du Gangsta rap, et bien quand je l’écoute je n’ai pas envie d’aller sortir un calibre. Je l’écoute parce qu’il y a une énergie, certains s’arrêteront sur la vulgarité de quelques lyrics mais moi je sais dans quelles conditions je l’écoute. Il faut aussi relativiser les choses, quand je regarde un film où il y a une fusillade, je ne vais pas sortir pour aller tirer sur des gens. Il y a des musiques qui sont faites pour apaiser, d’autres pour aller à la salle de sport. Pour moi la musique est essentiellement faite pour adoucir les mœurs. Il ne faut pas prendre le public pour des idiots car il sait très bien faire la part des choses.

“Pour moi la musique est essentiellement faite pour adoucir les moeurs.”

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Crois-tu que le regard de la société française sur les questions de couleurs ou de diversité ait progressé?Je ne sais pas si il a progressé mais aujourd’hui, j’ai l’impression que les langues se sont dénouées. Est-ce que cela a toujours été présent ou bien les gens arrivaient-ils plus facilement avant à vivre en communauté? Il y a une succession d’éléments qui ont fait que le racisme est monté en puissance, est-ce parce que Sarkozy, quand il était au pouvoir, a donné une certaine force à des personnes avec la possibilité de pouvoir dire tout et n’importe quoi à tout moment? Pour moi, il est clair que que la France est plus raciste qu’hier. Etant un jeune de quartier ayant grandi avec différentes origines, différentes cultures, différentes nationalités, ce n’est pas quelque chose que je ressentais. Le racisme que l’on peut voir aujourd’hui sous toutes ses formes à la télévision où les gens n’ont aucun mal à dire n’importe quoi comme si c’était naturel et que c’était permis. Quand j’étais plus jeune, je ne le ressentais pas du tout de cette manière. A l’école

tu es un peu protégé, mais ce n’est plus le cas quand tu commences à être confronté au monde du travail, à mener une autre vie, la vraie vie, où il n’y a plus de place pour l’innocence. Cela devient chacun pour soi et à ce jeu là, on voit qui est qui.

Quels sont les artistes de la Caraïbe que tu apprécies?Il y en a beaucoup. Il y a bien entendu Kalash que j’apprécie et avec qui nous devions travailler mais faute de temps, cela n’a pas pu aboutir encore. Et toute la nouvelle scène dancehall, pour les plus anciens, Sael, Admiral T. On essaie de se tenir au courant de tout ce qui se passe.

A quand une date en Guadeloupe?Très bientôt je l’espère. Nous avons eu quelques propositions mais pour l’instant nous ne sommes pas prêts pour présenter le nouvel album. Le premier concert de cette tournée aura lieu le 26 juin prochain et l’album sortira cet automne.

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D’ou vient ton nom?C’est une image un peu spéciale. Il n’y a rien qui puisse faire le tour du monde à part un avion, même les oiseaux migrateurs doivent faire des arrêts. Mais l’avion ne peut pas faire le tour du monde sans Kérosène. Je voulais montrer aux gens que je voulais que ma musique fasse le tour du monde. La deuxième signification est que si tu rapproches trop, ca va t’exploser au visage et ce sera monstrueux.

Comment as-tu découvert la musique?Ma sœur a été membre du Jalawa Sound System, un des premiers sound system de Guadeloupe, depuis tout petit j’ai vu plein de gens défiler à la maison, en répétitions, chez les voisins, chez les autres membres. J’ai commencé à chanter, faire des freestyles, des improvisations vers l’âge de 7 ans. A 9 ans, j’étais capable de faire deux minutes d‘improvisation et jusqu’à 14 ans, je chantais tous les jours. C’est en 2002 que j’ai rencontré Skyso, il est devenu mon ingénieur du son, mon producteur, mon réalisateur, mon manager jusqu’à aujourd’hui. Nous n’avons jamais fait de la musique pour plaire, mais parce que nous étions doué pour cela, pour nous amuser et pour déranger.

La musique a également pour toi une vocation contestataire?Selon la personnalité. Chaque tête, chaque esprit est différent. Les taties, les mamies qui me connaissent en Guadeloupe, les foyers dans lesquels je suis, savent que ma musique peut raconter quelque chose de positif à leurs enfants.

Les textes que j’écris, je veux les inculquer. Je m’adresse à des publics différents. Je voudrais expliquer aux enfants que la rue, c’est chaud, ce n’est pas bien, tu peux mourir dans la rue. Donc va à l’école, fais tes trucs. Ou bien je vais parler à certaines mères de famille et leur conseiller d’élever leurs enfants plutôt que de traîner en boite de nuit et de faire n’importe quoi. Au père de famille pour lui dire que je suis tous les matins au travail. Chaque texte est écrit sincèrement et pas dans un but commercial.

La nuance entre la dimension artistique d’une œuvre et son créateur est aujourd’hui très floue… Qu’en penses-tu?Il y a des interprètes. Je peux écrire un truc qui n’a rien à voir avec moi, comme par exemple, pour Père Fouettard. Pour ma part, mon père, je l’embrasse tous les jours, c’est mon meilleur ami, ce n’est pas Père Fouettard mais j’ai écrit cette chanson car je connais des gens qui sont dans cette situation, mes yeux sont ouverts. Je l’ai écrite avec sincérité même si cela ne me concernait nullement, ce n’est pas ma vie. Mon papa m’a bien élevé, ma maman je l’adore, je l’appelle “Doudou”. Pour Un Dos Tres, c’est exactement pareil, je ne suis pas concerné mais je voulais traiter le sujet de la prostitution en

Baigné dans l’univers de la musique depuis son plus jeune âge, en dix ans Keros-n est devenu un artiste incontournable de la scène guadeloupéenne. Une trajectoire sans conformisme ni compromis.

KEROS-N

“J’ai trouvé une approche originale, sinon cela n’aurait intéressé personne... C’est proche du rôle du conteur.”

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Guadeloupe. J’ai trouvé une approche originale, sinon cela n’aurait intéressé personne. Je suis auteur mais surtout interprète à ce moment-là. C’est proche du rôle du conteur. Par contre, personne n’écrira jamais pour moi ! Ceux qui font des reprises, des sons trop inspirés par d’autres artistes, qui font du plagiat, je les ai “clashés” pendant 10 ans. Et c’est pour cela que je ne passais pas à la télévision.

Mets-tu des limites à ta liberté d’expression?Non, jamais. Bientôt je vais m’adresser à Mr. Bernard De La Villardière, celui qui a traîné mes frères dans la boue avec son reportage incendiaire sur la Guadeloupe. Ce n’est pas ça la Guadeloupe.

Que penses-tu des médias aujourd’hui?Ils font leur travail. Les médias sont très importants pour la vie d’un artiste qui ne vit que de son art. Mais moi, tous les jours, je suis au travail donc je fais de la musique uniquement par passion. C’est vrai qu’avec le temps c’est également devenu un travail, mais pas plus important que mon autre activité. Je suis ouvrier agricole, je travaille le 25 décembre, le 31 décembre. Les bêtes, il faut les nourrir tous les jours, les vacciner, les soigner, leur donner à boire. Même si on sort de soirée à 6h du matin et que l’on est complètement à l’envers, c’est la vraie vie. C’est pour cela que je me permets d’être aussi insolent dans mes sons. Je suis resté dix ans en sachant que j’étais lyriquement plus compétent qu’une grande partie de la scène mais sans passer à la télé ou à la radio pour cette raison. C’est en 2012 que je suis passé à l’antenne pour la première fois et c’est parce que nous avons eu une démarche commerciale en faisant un clip. La musique, ce sont

des échelons à passer, comme dans la vie. Tu ne te lèves pas un jour de ton lit en devenant une star…

Quel est pour toi le rôle de la musique?C’est une passion. Donc pour ma part j’essaie de faire passer le maximum d’émotions, de sensations. Quand j’entends un son, j’entends tout de suite tout ce que je peux faire pour me l’approprier. Un Dos Tres, je l’ai écrit en 45 minutes, comme Père Fouettard que j’ai écrit au boulot également en 45 minutes.

Ce sont pour toi les critères qui caractérisent un artiste?Pas obligatoirement, mais selon mon œil, oui. Comme je le disais tout à l’heure, je n’admets pas que certaines personnes ne soient qu’interprètes sur des morceaux sans en être les auteurs, mais j’ai conscience que c’est une mauvaise vision. Il y a des personnes qui sont douées pour n’être qu’interprètes et peut être même mieux chanter que toi un texte que tu as écrit, mais dans ma tête j’ai un blocage, c’est une philosophie de vie. Ce qui définit un artiste, c’est sa vraie personne. Tu peux ne pas être doué, mais dans ce cas c’est un mauvais choix et arrête...

Crois-tu que le regard de la société française sur les questions de couleurs ou de diversité ait progressé?En grande majorité, je dirais oui. Ce n’est plus une question de racisme mais d’individus et pas forcément de couleurs. Comme depuis toujours d’ailleurs, les différences sont basées sur les classes sociales. Moi je te dis ça, je ne suis pas de la rue, je m’appelle Julien Manuel Lurel Sébastien, mon oncle a été Ministre de la République (c’est le frère de mon père). Je n’ai pas grandi dans la rue, mais la rue m’a accepté, m’a supporté, a fait que je suis là où je suis. Il ne faut pas toujours dramatiser, se victimiser nous-mêmes. Plutôt que de dénoncer la bourgeoisie, le sionisme ou autre, il faut valoriser la méritocratie. Si tu es doué, on te donne, si tu ne

“Plutôt que dénoncer la bourgeoisie ou le sionisme, il faut valoriser la méritocratie.”

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vaux rien, passe ton chemin. Pour moi c’est ça, car nous sommes dans une société ou ça broie! Dans tout ce schéma, l’éducation reste quelque chose de très important, il faut qu’un enfant aille à l’école mais aussi qu’il s’endorme quand il veut s’endormir parce que cela ne l’intéresse pas. Tu es toi, mais ton fils ce n’est pas toi. Si tu es mécanicien et qu’il est fait pour être Président de la République, encourage le. Ne lui dit pas que si il n’a pas de graisse sur les joues il n’est pas un homme. Vois les choses.

Penses-tu qu’il soit toujours important d’associer l’esclavage à l’identité guadeloupéenne? Ce sont des sujets explosifs. Comme je le disais, il faut arrêter de se victimiser. Mon papa n’a pas pris de coups de fouets, mon papi non plus, le père de mon papi non plus… Mais je n’étais pas là. Je

n’ai pas été élevé dans ça. Je ne pardonne pas ni n’oublie, mais je ne me base pas sur cette histoire pour vivre ou pour évoluer. Je ne me réduis pas à cela. Il y a pleins de gars dans le Rap français qui parlent d’esclavage dans leurs chansons mais leurs ancêtres n’ont pas été esclaves. Ils ont peut-être été les vendeurs d’esclaves. Nous sommes des descendants d’Afrique, nous sommes des Africains. Nous restons malheureusement des Africains vendus par des Africains aux Blancs. Je dis cela sans racisme. J’ai des amis blonds aux yeux bleus, je les appelles mes frères, ce ne sont pas eux qui ont frappé mon arrière arrière grand-père. Je vais te parler de la mémoire mais pas en tant qu’esclave. Quel crédit aurais-je? C’est ridicule.

Tes projets ?Faire de la musique, dominer le monde musical, toujours être numéro un.

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FOCUS

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MUSIQUE: L’ART ÉVOLUTION

Tu viens de sortir un nouvel album Racines K’Raïb, qui comme son nom l’indique est un retour à tes sources puisque, même si tu as grandi en région parisienne, tu es née en Guyane. Pourquoi ce choix? Retour aux sources c’est un bien grand mot! C’est juste que j’ai décidé de mettre un maximum d’influences caribéennes (et pas seulement d’ailleurs) dans ma musique. J’avais envie de célébrer notre musique qui est très riche et je savais que ce n’était pas gagné d’avance, mais j’ai toujours besoin de nouveaux défis. J’ai mis le pied à l’étrier avec deux trois morceaux zouk qui ont bien marché et je me suis dis pourquoi pas?

Te rends-tu souvent en Guyane?J’essaie de m’y rendre au moins deux à trois fois par an et ce pour un temps qui est de plus en plus long. C’est plutôt calme et populaire,

je m’y sens bien, isolée. Quand je veux voir du monde, je bouge avec des amis ou la famille en ville. J’adore aller à la crique, l’odeur de la nature qui m’apaise, me balader au marché de Cayenne, prendre des kilos chez mon père Paulo, composer chez ma sœur Nelly à Kourou, passer au village Saramaca ou ne rien faire dans le hamac… C’est un bonheur qui n’a pas de prix pour moi.

De quelle manière procèdes-tu dans la conception d’un album?Je fais appel à des «beat makers», j’essaie des idées de mélodie sur les instrumentaux pour voir si je suis inspirée, si c’est bon. Il y a aussi une phase de composition de mes propres beats. Quand je suis satisfaite de ma musique, le thème et la mélodie viennent sans trop forcer. Si je bloque, je laisse de côté et j’y reviens plus tard, mais parfois jamais! Je peux aussi prendre des chansons toutes faites qu’il me reste à m’approprier, il y a beaucoup de bonnes chansons qui ne trouvent pas de propriétaire. En fait, il n’y a pas de recette précise.

Quelles sont les sensations que la musique te procure lorsque tu crées, que tu enregistres? J’ai un sentiment d’autosatisfaction qui m’est indispensable. Quand je suis sûre d’avoir donné mon maximum et d’apprécier ma chanson, je sais que je pourrais la défendre envers et

“J’aime garder cette impression de liberté pour créer des histoires et partir dans mes délires”

Pionnière du Rn’B, K-Reen est une artiste complète qui arpente depuis plus de vingt ans la scène musicale française en collaborant sous différentes casquettes avec Solaar, Oxmo Puccino ou Stephane Eicher. Elle nous présente aujourd’hui son cinquième album Racines K’Raïb.

K-REEN

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FOCUS

contre tous. J’aime garder cette impression de liberté pour créer des histoires et partir dans mes délires.

La nuance entre la dimension artistique d’une œuvre et son créateur est aujourd’hui très floue. Qu’en penses-tu?Personnellement, je trouve que ma musique me ressemble au-delà des mots. Elle est sensée parler aux gens de mes sentiments, de mon humeur, de mes espoirs, elle me permet de délivrer des messages cachés que moi-même il m’arrive de comprendre que bien après!

La “mort” du disque a relancé les concerts et surtout développé le numérique, comment abordes-tu ce passage de relais?Je suis la vague, c’est juste une question d’adaptation. Je trouve cela plutôt bien car le vrai test se fait sur scène, on s’expose aux oreilles et au regard du public, c’est sans filet.

Que penses-tu de l’industrie musicale aujourd’hui ?C’est une industrie en perpétuelle mutation, il faut rester concentré parce qu’on peut vite se

sentir dépassé. Le plus dur est de garder son rythme alors que tout nous demande d’aller vite mais pour créer, il faut du temps.

Quel est pour toi le rôle de la musique?La musique est faite pour se distraire, elle nous permet de nous évader du quotidien et de partager des émotions.

Que penses-tu des médias?Cela dépend desquels. Les médias subissent les mêmes influences que l’industrie du disque aujourd’hui, on est plus dans la quantité que dans la qualité. A l’époque d’Internet il leur faut un maximum de contenus avec l’histoire qui va avec pour attirer le public. On se retrouve avec des radios qui relatent des «cancans» au lieu de parler de musique...

Quels sont pour toi les critères qui caractérisent un artiste?Je trouve que le grain de folie est déjà un bon critère ainsi que la sensibilité à fleur de peau, c’est ce qui nous lie. Nos coups d’éclat cachent souvent une grande détresse, également la vulnérabilité. Quel est le moment dans ta carrière musicale qui t’a le plus marquée?Mes débuts ont été mes meilleurs moments car il y avait une innocence

“Nos coups d’éclats cachent souvent une grande détresse, également la vulnérabilité”

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MUSIQUE: L’ART ÉVOLUTION

K-REENFacebook officiel : K-Reen Officiel

dans la démarche, on ne pensait qu’à la musique, on avait tous des problèmes à oublier. Mes succès ont davantage marqué mon entourage.

Et dans ta vie?Je n’aime pas parler de ma vie. Amoureuse elle est désastreuse, familiale, pas simple non plus. La musique est mon îlot.

Quels sont les artistes de la Caraïbe que tu apprécies?Les chanteurs comme Gyptian, Demarco, Spyce, Keros-n, Pompis ou Jahyanaï King. Il y en a un grand nombre que j’apprécie et je suis toujours en admiration devant des groupes comme Kassav.

As-tu des dates prévues aux Antilles ?C’est en train de se monter on vous dira cela très vite.

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A LA LOUPE!

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Tu as grandi dans la banlieue de Strasbourg, tu as commencé par le graffiti dans la rue, comment s’est déroulé cet apprentissage?Nous étions une bande d’amis et il fallait faire quelque chose qui nous soit propre, le Hip Hop est arrivé à ce moment-là. C’est arrivé dans la cité comme un boulet de canon et là, nous avons pu nous reconnaître. C’était notre point de départ. Cela nous permettait d’envisager plusieurs branches, la musique, la danse, le graffiti... C’était à nous de développer la chose, cela s’est présenté comme une aubaine. C’est un flux qui n’a rien à voir avec l‘Académie, les supports sont immenses, la vitesse d’exécution très rapide, ce que l’on fait doit être visible et inatteignable. Cela entretenait un certain challenge envers soi même qu’on ne retrouve peut-être pas à l’école. Il y avait une adrénaline sur le moment et sur le lieu. A un moment, j’ai eu envie que cette histoire soit vue et entendue par tout le monde.

C’était l’époque des N.A.P. (New African Poets)?Oui, l’époque de NAP et d’Abd Al Malik. Je les ai vus débuter, on vient du même quartier. Nous étions agglutinés dans les quartiers, on nous fermait en quelque sorte la ville. Les étrangers étaient là pour rebâtir la ville. Les immeubles étaient faits pour nous contenir. Pour nos parents, il y avait un plan social mais pour leur progéniture, rien n’était prévu, les écoles n’étaient pas prêtes. Recevoir un Noir ou un Arabe dans la classe c’était nouveau, alors que la plupart d’entre nous étions nés là! Le Hip Hop a commencé dans la cité, cela n’intéressait personne au départ. C’était une histoire de reconnaissance d’un immeuble à un autre. Nous avons pu parler de nous avec nos propres mots et pas de la façon dont on nous l’imposait. Il y avait de la matière à pétrir, quelque chose à faire sortir de cela, la plupart d’entre nous ont ensuite bifurqué ou réussi. Méhdi Baala par exemple a été champion olympique de 1500 mètres.

propos recueillis par Ceebee

ART

JEAN-MARCHUNT

Intégrité et engagement jalonnent le parcours de cet artiste plasticien. Dans son atelier de Baie-Mahault, il met en images un récit sarcastique de l’histoire et du monde.

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A LA LOUPE!

Comment as-tu évolué vers les arts plastiques? Je n’avais pas d’effort à faire pour créer. C’était un geste naturel qui pour d’autres était surprenant. Vers 1995, j’ai pris de la distance avec le graffiti qui est devenu un consommable, aujourd’hui la politique et les institutions s’en servent, il n’y a plus beaucoup d’intérêt. J’ai voulu me défaire de cette identité de graffeur tout en maintenant une certaine intégrité. Je me suis tourné vers la toile. Elle me permettait d’engager un discours plus soutenu. Je n’étais pas là pour faire de la réinsertion ou être récupéré par un système communal ou de quartier. A ce moment-là, je me suis beaucoup intéressé à l’histoire de l’art, même si je n’ai pas pu faire d’école, car pour mes parents ce n’était pas possible. A force de dessiner et de peindre, on se dit qu’il doit y en avoir d’autres qui ont fait cela avant. A l’époque, il n’y avait pas Internet, pas de musée d’art moderne à Strasbourg, c’était une ville gothique (rires)! Je me suis dirigé vers l’Allemagne, il y avait quelque chose à pêcher là-bas, l’art existait dans les rues, ce n’était pas que du commémoratif comme à Strasbourg. J’ai pu avoir des référents pour ma réflexion. Un jour, j’ai reçu une énième lettre de rappel d’huissier, je croulais sous les dettes, je suis parti avec mes dessins sous les bras, j’ai posé cela dans le centre ville. Je suis rentré une heure après car j’avais tout vendu! Par la suite mon banquier m’a contacté pour savoir d’où venait l’argent que je gagnais, il m’a conseillé de prendre un numéro de siret car j’avais de quoi entretenir une profession.

Certains te comparent à Basquiat pour ton travail, ton parcours. Cela t’ennuie ou le prends-tu plutôt comme une reconnaissance?C’est bien, même si cela manque de références. Il y a dix ans, Basquiat on ne le connaissait pas en Guadeloupe. Il y a beaucoup d’artistes que j’aime, comme Cy Twombly, Rauschenberg... Bien

sûr que Basquiat est un de mes artistes favoris mais il est mort très jeune. J’ai d’ailleurs fait une exposition à Angers sur les artistes morts à 27 ans. Il y en a beaucoup qui ont eu ce génie qui a marqué le monde, dans la peinture, la musique.

Tu travailles beaucoup de matières, quel est ton support privilégié?J’aime me définir comme un peintre plasticien. Il y a une dimension historique et noble avec la peinture, mais plasticien c’est la rencontre entre le design, la peinture, la sculpture et la performance. Le rôle du plasticien est un peu comme celui d’un chercheur scientifique, il va chercher de nouveaux supports, de nouvelles matières... L’art contemporain aujourd’hui n’a plus le même sens, c’est un moyen de spéculer. Il finance des guerres, des massacres, des dictatures. Il est passé au-dessus de la crise et cela a une connotation malsaine. Aujourd’hui, on ne peut plus parler de fulgurance, on prend un artiste, on le fait grimper, on fait de l’argent sur lui et puis il y a tout de suite quelqu’un d’autre derrière. Avec la mondialisation le marché s’est ouvert, les collectionneurs, les foires, les galeries germent de partout. Cela a une incidence dans la production artistique elle-même. On demande à l’artiste quelque chose de précis et de faire toujours la même chose. C’est cela que j’appelle l’art contemporain.

Dans ton travail il y a une réflexion sur la mémoire, est-ce un passage obligé pour tout artiste en Guadeloupe?Cela fait partie de la structuration même de l’artiste, dans ce qu’il veut apporter, il doit se

“Ce qui va me distinguer, c’est l’autodérision que je mets dans mon travail...”

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ART

singulariser par son identité personnelle et par sa vision des choses. Sa réflexion s’appuiera forcément sur son vécu, son histoire, ses valeurs. Ce qui va me distinguer, c’est l’autodérision que je mets dans mon travail, qui s’apparente à de l’humour sarcastique. Je peux parler de tout mais en gardant le sourire. Le racisme fait beaucoup partie de mon travail, j’y mets une intention humoristique pour pouvoir l’aborder car il est dangereux dès qu’il devient une pensée, pas seulement par les actions. Je m’imprègne de la mémoire collective pour me réapproprier des choses qui vont percuter.

Ton travail sur les plaques offset de France-Antilles, tu le décris par exemple comme un symbole de la relation d’un centre avec une périphérie. C’est un positionnement politique?Oui, mais pas seulement. Je suis moi même une résultante de cette politique. Ma mère vient de la Réunion, elle a été envoyée très jeune par le

BUMIDOM dans la Creuse, il fallait alors rebâtir et repeupler la France. Je suis moi-même une périphérie, en Guadeloupe et en France aussi. On quitte son pays pour vivre mieux ou on fait venir des immigrants pour améliorer son cadre de vie. Mais une fois que le cadre de vie a été amélioré, que fait-on de ces étrangers? Tout était rassemblé dans ces plaques.

Et le lustre avec les bananes?C’était au moment où Taubira se faisait traiter de guenon. Cette banane me suit depuis que je suis né, j’ai voulu lui redorer le blason. Joséphine Baker portait une jupe faite de bananes. La banane est une denrée qui a permis aux pays esclavagistes de créer leur fortune, avec la canne, le rhum… Le fait de qualifier une culture, un peuple avec un fruit, ce n’est pas nouveau. Une chanteuse de jazz (Billie Holliday) chantait “strange fruit”, elle parlait des noirs pendus aux arbres par le Ku Klux Klan, cela m’a amené à faire ce lustre.

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A LA LOUPE!

Tu te réfères beaucoup à la mondialisation et toi-même tu empreintes des éléments à différentes cultures, n’est-ce pas aussi cela le monde aujourd’hui?Pour moi, cela a toujours existé. Mais aujourd’hui, on veut assimiler une culture en très peu de temps. Mais une culture ce n’est pas cela, on perd l’essence de la rencontre, celle-ci se fait sous une espèce de dictat: je prends, tu donnes ou je te l’arrache. Cette mondialisation est implacable. Pour ceux qui la subissent vraiment, je ne pense pas qu’elle soit une bonne chose.

Si tu devais associer ta peinture à une musique, ce serait laquelle?Je travaille uniquement avec la musique. Je peins du Booba. C’est quelqu’un qui vit dans le futur.

On t’a décerné le titre de chevalier des Arts et des Lettres, comment as-tu accédé à cette récompense? C’est la DAAC qui a proposé ma candidature. Quand je suis arrivé en Guadeloupe, il n’y avait rien. J’ai créé des événements, j’ai monté des centres d’arts… Beaucoup de choses sont en train de se développer actuellement comme le Mémorial et en toute humilité, je pense y avoir contribué. J’ai tapé sur la table pendant des années, j’ai même été interdit d’exposition en 2005, au moment où Sarkozy avait prononcé

son discours sur les banlieues, j’ai créé la “Sarko-Karcher”. Cette œuvre a été présentée sur RFO et toutes mes dates d’expositions ont été annulées, en Martinique comme en Guadeloupe. Je n’ai pas compris car ces quartiers, cela nous concerne, quand nous sortons de la Guadeloupe nous n’allons pas vivre dans les grandes villas, ce sont ces quartiers qui ont accueilli nos familles. Finalement, je n’étais pas dans la réalité politique guadeloupéenne. Mais cette œuvre s’est retrouvée dans le Limousin pour les Francophonies, cela a été relayé par France O, on m’a reproposé des dates après. Il faut faire le tour par la “métropole” pour revenir chez soi…

As-tu été sélectionné pour exposer au Mémorial ACTe?J’ai travaillé longtemps dessus. Dans la maquette, le Mémorial était entièrement décoré de mes œuvres, sans même que je sois au courant! On m’a alors demandé de concevoir une sculpture avant la destruction de Darbousier pour constituer la mémoire des lieux. Je l’ai réalisée mais elle n’a pas été achetée par la Région. Elle doit faire trois cent kilos, je l’ai réalisée avec 400 bouteilles de rhum vieux livrées par Walker juste avant la fermeture de l’usine. On m’a aussi demandé de réaliser une sculpture centrale que j’ai présentée devant plusieurs comités: je l’ai appelée Echelle 44. J’ai récupéré les échelles que l’on trouve chez les particuliers, qui ont servi à bâtir la Guadeloupe. Ces échelles en bois hautes de cinq six mètres

“J’ai besoin d’être dans ce lieu chargé où l’on ressent des choses qu’on ne trouve pas ailleurs. ”

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ART

ont été construites avec des planches. Elles devaient créer un arbre en forme hélicoïdale et qui partait à son sommet dans toutes les directions. Le nombre 44 faisait référence aux 44 jours de grève, au 44° président des Etats-Unis, aux 44 hectares du Vatican… Ce projet a été avorté, il n’était sans doute pas dans le “politiquement correct”.

Tu réalises aussi des objets du quotidien comme le “Ti ban”.Oui, c’est un objet qui a été délaissé que je retravaille comme un mobilier design. C’est une façon pour moi d’entretenir une indépendance, de ne plus attendre la subvention… Cela me permet de créer ma petite économie et d’être de partout. Pour l’instant on peut le trouver au KWI à Saint-François. Beaucoup de gens connaissent mon atelier et viennent le chercher directement ici. J’aimerai trouver des lieux, des magasins design pour les exposer.

Tu en as offert un récemment à Lilian Thuram?Je n’offre rien (rires)! Il a entendu parler de moi et est passé ici.

Vivre en Guadeloupe correspond-il pour toi à un idéal?Même si j’ai dépassé le discours sur l’esclavage (je me vois comme un fils de roi et non d’esclave car l’histoire ne commence pas par la traite négrière), je suis quand même à la recherche de l’histoire. J’ai besoin d’être dans ce lieu chargé où l’on ressent des choses qu’on ne trouve pas ailleurs. Ici, j’ai le monde, j’interagis beaucoup avec les Etats-Unis, j’expose avec des Caribéens.

JEAN-MARC HUNTwww.jeanmarchunt.fr Contact : 06.90.82.43.26 E-mail : [email protected] LOUPE MAGAzINE

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A LA LOUPE!

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Ce nouveau sport de glisse adapté à la pratique urbaine et aux routes de montagne permet de retrouver les sensations du snowboard sur le bitume. Une occasion d’allier loisir et performance.

propos recueillis par 3D-4.0

SPORT

Présentations?Je suis Jonathan Deloumeaux, j’ai 30 ans. J’ai passé mes 15 premières années à Paris, à Pantin plus précisément, puis je suis venu en Guadeloupe à Capesterre. Je pratique le Free-bord depuis 2012, je faisais du Roller, un peu de skate. J’ai également beaucoup pratiqué les sports de combats avec le Taekwondo, du full contact, de la boxe thaïlandaise et maintenant de la Capoeira. J’ai un BTS assistant de ges-tion, une licence en marketing. Actuellement je travaille dans une société de logistique et de merchandising.

Qu’est-ce-que le Freebord?C’est un skateboard qui permet de retrouver les sensations du snowboard sur le bitume, de glisser et de s’arrêter en dérapage comme en snow. Au niveau mécanique, c’est une planche qui a six roues. Il y a deux roues centrales qui font la spécificité du Freebord, elles sont en dessous du truck traditionnel de skate, tournent à 360 degrés (c’est le même principe que sur

les caddies de supermarché), sont un peu plus basses que le truck ce qui permet la rotation et le dérapage, ainsi que de donner un mou-vement de bascule (que l’on appelle «basculo »). On peut se soulever et prendre appui sur les carres (pointes ou talons, identiques au snow-board). Il y a également des fixations pour les pieds qui permettent un meilleur contrôle.

Comment as-tu découvert le Freebord? D’où vient-il?Je l’ai découvert en 2012, mais le sport a vrai-ment débuté en France en 2005 et aux Etats-Un-is en 2000. C’est un ingénieur qui a eu cette démarche de vouloir recréer les sensations du Snowboard sur le bitume. Il y a eu beaucoup de recherches et de prototypes avant de trouver ce concept nommé désormais «Hanger». En regard-ant des vidéos de skate et de snowboard, je suis tombé dessus. J’ai toujours aimé le snowboard mais en habitant en Guadeloupe ce n’est pas év-ident de pratiquer, j’ai retrouvé dans le Freebord les sensations qui me manquaient.

FREEBORD

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A LA LOUPE!

C’est un sport qui nécessite un cadre particulier?Non pas du tout, il est possible de faire du Free-bord sur le plat, en “freestyle”. On peut faire des sauts, des grinds, comme en skateboard. A la base, la planche est conçue pour la descente, pour être avec ses amis et aller chercher de belles collines où il n’y a pas trop de circulation.

Existe-t-il différents types de planches selon l’environnement? Les planches restent identiques, mais il y a dif-férents types de roues. Les plus tendres sont faites pour la descente, d’autres plus petites sont plus rapides et mieux adaptées à l’urbain.

Les routes en Guadeloupe sont très dan-gereuses, car très étroites. Comment t’adaptes-tu à ces contraintes pour pra-tiquer?En Guadeloupe et même dans les Antilles, nous habitons sur des iles volcaniques, nous avons le dénivelé, le relief qu’il faut quand on part en montagne. Par exemple en Basse Terre, à partir de Capesterre, Trois-Rivières, Basse-Terre, Baillif, Saint-Claude, nous avons des routes parfaites, presque dédiées à cette pratique. Il n’y a pas beaucoup de circulation mais on sécurise au maximum avec un véhi-cule devant et un derrière. Bien entendu, le port du casque est obligatoire parce qu’en cas de chute, le bitume ne pardonne pas… En dehors de l’environnement “naturel” et urbain, il n’y a pas de “bol” ou skatepark en Guadeloupe pour pratiquer?Il y en a un au Raizet, mais il est plus adapté à la pratique du BMX par rapport à son agence-ment, les modules sont assez espacés. Je sais qu’il y a des projets qui sont en cours pour réaliser de vrais skateparks pour pratiquer le skate et le roller et donc le Freebord.

Existe-t-il des compétitions? Oui, mais c’est un concept original puisqu’elles se font par vidéos. Le Freebord tire son nom de la marque qui l’a créé, c’est elle qui organ-ise ses propres compétitions. Chaque année se déroulent les “Freebord Riders Awards” lors desquels sont décernés les prix du “Rookie of the Year” (débutant de l’année), du “Stand out of the Year” pour les pratiquants ayant déjà participé et qui ont eu la meilleure progres-sion. Enfin, le “Rider of the Year”, récompense une personne qui fait déjà partie de la “Pro Team” Freebord. Cette équipe de riders pro-fessionnels qui est gérée par la marque à San Francisco recrute les meilleurs pratiquants dans le monde entier. Il y a aussi une compéti-tion de vidéos qui s’appelle B.S.V. (Best Sum-

“C’est le même état d’esprit que dans les autres sports de glisse, repousser ses limites et faire le plein d’adrénaline”

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SPORT

FREEBORDFacebook officiel : Freebord GuadeloupeContact : 06.90.37.37.98 - Jonathan DeloumeauxE-Mail : [email protected]

mited Video) et qui est ouverte à tous. Elle con-siste à poster une vidéo de deux minutes et le jugement se fait sur l’aspect technique mais aussi la créativité de présentation. Les “Rep-resent Tour” permettent aux groupes d’une même ville ou d’une même région d’organiser une session pendant un week-end, c’est alors l’esprit de partage plus que la compétition qui est mis en avant.

Comment peut-on se procurer le matériel? Nous avons créé un site Internet qui s’appelle Freebord Caribbean. A force de faire des ap-paritions dans la presse, des vidéos, avec mon petit groupe nous avons réussi à monter ce site sur lequel nous proposons des Freebord en Guadeloupe et sur la Caraïbe (Martinique, Guyane, Cuba etc..). Sinon, il y a www.freebor-dproshop.com qui sont les revendeurs officiels de Freebord en France.

Tu développes aujourd’hui cette activité en Guadeloupe. Quels sont tes objectifs?Déjà de faire connaître le sport au grand public car cela reste encore une activité d’initiés. Le freebord peut se pratiquer même quand il pleut où qu’il n’y a pas de vague ou de vent. C’est le même état d’esprit que dans tous les sports de glisse, re-pousser ses limites et faire le plein d’adrénaline.

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A LA LOUPE!

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SOCIETE

Le vol en ULM offre une vue époustouflante de la région. Un plaisir que Jean-Claude Antoine a décidé de faire partager, depuis l’aérodrome de Saint-François.

propos recueillis par CeeBee

Depuis quand êtes-vous installés à l’aérodrome? Depuis 2002. Nous sommes plusieurs pilotes et formateurs.

Quels types d’appareils détenez-vous?Nous avons six ULM (ultra-léger motorisé, ndlr) et un avion. Les ULM sont des appareils deux places, l’avion à quatre places. Ils n’obéissent pas à la même règlementation.

Et l’autogire? C’est aussi un ULM.

Quelles sont les activités que vous proposez?Il y a trois activités: l’activité touristique, avec des circuits prédéfinis qui vont durer de 18 minutes à deux heures; il y a la formation de pilote qui se fait avec des instructeurs. Ensuite, il y a la location, les élèves qui ont obtenu leur brevet peuvent louer des avions pour se promener.

Comment obtient-on son brevet?Tout pilote doit obtenir un examen appelé tronc commun, organisé par l’avion civile tous les deux mois. C’est un QCM, il y a 40 questions avec dix fautes acceptables. Ensuite, il y a la formation pratique avec deux modules, l’un pour voler seul et l’autre pour pouvoir amener des passagers. La différence entre les deux c’est naturellement que le pilote soit à l’aise et la navigation. Cela est soumis à une navigation vers Fort-de-France, d’abord en double avec un instructeur puis tout seul. La formation dure quatre à six mois, elle coûte pour les plus doués entre 3500 et 6000 euros, cela nécessite au moins une trentaine de vols, parfois plus, selon dépend des personnes.

Avec ce seul brevet peut-on piloter tous les avions touristiques?Tous les ULM. Il y a six classes d’ULM, les plus lourds et les plus légers que l’air (les dirigeables par exemple). Il faut pour pouvoir piloter chaque classe d’ULM qu’elle soit validée par un instructeur.

ULMCARAÏBES

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A LA LOUPE!

Cette activité de pilote exige-t-elle une formation continue, des contrôles réguliers?Il n’y en a qu’en avion, pas en ULM. L’avion est un domaine certifié et l’ULM déclaratif, tout est à la responsabilité du pilote. S’il prend son avion alors qu’il n’est pas capable de voler, c’est un fou, mais généralement cela ne se passe pas. Pour l’avion, le brevet est valable deux ans, soumis à une visite médicale tous les deux ans puis tous les ans quand on est plus âgé. Il faut avoir fait 12 heures de vol dont une heure avec un instructeur lors de chaque contrôle.

Qui s’occupe de vérifier la sécurité des appareils?Pour l’avion, la maintenance est assurée par un atelier agréé, on ne peut pas la faire soi-même, il y a des visites régulières. En ULM, le pilote fait tout seul son entretien. Cela pourrait paraître moins sûr, mais en réalité, quand on étudie la sinistralité au niveau national, elle est la même que pour les avions, voire meilleure. Beaucoup de pilotes en ont un petit peu assez de ces contraintes et passent à l’ULM. EN France, il y a environ 4700 avions et 12 000 ou 13 000 ULM.

L’ULM a-t-il la même autonomie que l’avion? Peut-il voler à la même altitude?Il n’y a pas de différence, ni dans l’autonomie, ni pour la vitesse ou le plafond de pratique, juste dans le nombre de places. En ULM, il n’y aura que deux places car il est limité à 450 kilos de masse au décollage. C’est la seule limite, avec un ULM, certains font le tour du monde...

Et avec ces appareils, y a-t-il une possibilité de faire de la voltige?Normalement pas en ULM. En avion, il faut un instructeur spécialisé, il faut être breveté. Il faut faire attention.

Comment vous informez-vous des prévisions météo, disposez-vous de bulletins spécifiques?Comme dans l’aviation, il y a tous les jours des bulletins météo publiés, auxquels nous avons recours. Je peux aussi me rassurer auprès d’un météorologue qui est sur place avant d’entreprendre un vol.

C’est laissé à la responsabilité du pilote finalement?Tout à fait. Certains ne voudront pas voler par 20km/h de vent, d’autres vont sortir à 50 ou 60 km/h. L’autogire est beaucoup moins sensible au vent que les avions.

Peut-on être malade en vol, comme sur un bateau?Très rarement. Cela arrive peut-être à une ou deux personnes dans l’année.

La piste de l’aérodrome appartient-elle à la commune?La passation s’est faite récemment. La piste a été refaite par le Conseil Général, de même que les voies d’accès. La gestion de l’aérodrome est du fait de la mairie, elle est responsable du terrain et de son entretien.

“Pour moi, la plus belle vue aérienne de la Guadeloupe, c’est Petite-Terre”

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SOCIÉTÉ

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Où vous êtes-vous rendu au plus loin?Ce n’est pas moi qui suis allé le plus loin. J’ai fait bien sûr Saint-Barth, Saint-Martin. Le plus long trajet qui a été fait au départ de Saint-François c’est aux Grenadines en ULM.

Il y a des clients qui demandent ce service?Non, le transport public en ULM est interdit. On ne peut pas prendre quelqu’un à titre payant et l’amener quelque part. On a le droit de faire un circuit, mais pas d’aller d’un point A à un point B.

Selon vous, quels sont les plus beaux sites de Guadeloupe vus du ciel?Pour moi, la plus belle vue aérienne de la Guadeloupe, c’est Petite-Terre. Ce sont les plus beaux fonds visibles de Guadeloupe. Après, il y a la Pointe des Châteaux, la Baie des Saintes bien évidemment, Marie Galante. Tout est beau mais c’est Petite-Terre le plus frappant.

L’implantation sur Saint-François est donc parfaite?C’est une excellente situation. Les aérodromes de la Côte sous le Vent comme Baillif sont risqués, aux Saintes aussi c’est un peu technique, comme à Saint Barth. C’est plus facile sur Saint François.

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Réalisateur: George MillerAvec: Tom Hardy, Charlize Theron, Zoë KravitzGenre: Action / Science-Fiction Date de sortie: 13 Mai 2015

Hanté par un lourd passé, Mad Max estime que le meilleur moyen de survivre est de rester seul. Cependant, il se retrouve embarqué par une bande qui parcourt le désert à bord d’un véhicule militaire piloté par l’Impératrice Furiosa. Ils fuient la Citadelle où sévit le terrible Immortan Joe qui s’est fait voler un objet irremplaçable. Enragé, ce Seigneur de guerre envoie ses hommes pour traquer les rebelles. Très attendu, ce remake du film qui avait fait de Mel Gibson une star internationale devrait surpasser l’original par ses prouesses techniques, mais saura-t-il recréer son ambiance post-apocalyptique? Note : ••••••

CINEMA

MAD MAX:FURy ROAD

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à LA POURSUITE DE DEMAIN / EX MACHINA / GUNMAN

SAN ANDRÉASRéalisateur: Brad PeytonAvec: Dwayne Johnson, Alexandra Daddario, Archie PanjabiGenre: Action / AventureDate de sortie: 27 Mai 2015

Lorsque la célèbre faille de San Andreas finit par s’ouvrir et provoque un séisme de magnitude 9 en Californie, un pilote d’hélicoptère de secours en montagne et la femme dont il s’est séparé quittent Los Angeles pour San Francisco dans l’espoir de sauver leur fille unique. Alors qu’ils s’engagent dans ce dangereux périple vers le nord de l’État, pensant que le pire est bientôt derrière eux, ils ne tardent pas à comprendre que la réalité est bien plus effroyable encore…Note : ••••••

JURASSIC WORLD

Deux spécimens d’une nouvelle espèce de dinosaure créée par l’Homme, l’Indominus Rex, sont présentés au public dans un parc d’attraction. L’un de ces monstres s’échappe et sème la terreur. De nouvelles créatures, un rôle pour Omar Sy et des frissons assurés. Note : ••••••

Réalisateur: Colin TrevorrowAvec: Taylor Lautner, Adam RaynerGenre: ActionDate de sortie: 25 Février 2015

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SÉRIES

Créé par: John McNamara (2015) Avec: David Duchovny, Gethin Anthony, Grey Damon, Emma Dumont, Claire HoltGenre: Drame, Policier

Los Angeles, 1967. Dans une Amérique profondément bouleversée par le mouvement hippie, les Black Panther et la guerre du Vietnam, Sam Hodiak (David Duchovny: the X files, Twin Peaks, Californication...) infiltre la “famille”. Cette communauté est dirigée par Charles Manson (Gethin Anthony: Games of Thrones), un gourou qui associe messianisme chrétien, drogues et liberté sexuelle. Se déroulant deux ans avant les meurtres qui vont faire de ce leader l’un des tueurs les plus tristement célèbres des États-unis (condamné en 1971 à la peine de mort, commuée à la prison à vie), Aquarius s’annonce comme une série prometteuse. Diffusés à partir du 29 mai, les 13 épisodes devraient satisfaire les amateurs de thriller et raviver le souvenir des événements sanglants qui ont choqué l’Amérique. Note : ••••••

AQUARIUS

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GAME OF THRONES - Saison V / WAyWARD PINES / THE MESSENGERS

DIG

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Au coeur de la vielle ville de Jérusalem, Peter Connelly, un agent du FBI, enquête sur le meurtre d’une archéologue. Très vite, il découvre que cette affaire dépasse le simple cadre judiciaire et met à jour une conspiration vieille de 2000 ans. Mêlant histoire et fiction, cette série nous entraîne à travers l’Europe et l’Amérique, dans une quête mystique où s’affrontent aspirations politiques et religieuses. Note : ••••••

Créé par: Tim Kring, Gideon Raff (2015)Avec: Jason Isaacs, Anne Heche, Ori PfefferGenre: Drame / Action

POWERS

Dans un monde où les super-pouvoirs sont relativement communs, et pas particulièrement héroïques, deux inspecteurs de police, Christian Walker et Deena Pilgrim, sont chargés des crimes impliquant des pouvoirs hors normes. Durant ces dix premiers épisodes, les protagonistes découvrent qui ils sont ou ce qu’ils rêvent de devenir. Note : ••••••

Créé par: Charlie Huston (2015)Avec: Sharlto Copley, Susan Heyward, Noah Taylor Genre: Science-Fiction

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JEUX VIDÉOS

BATMANARKHAM KNIGHTEditeur: Warner Bros. Interactive EntertainmentGenre: Jeu de RôleDate de sortie: 23 Juin 2015

Dans ce dernier volet de la trilogie, Batman affronte l’Épouvantail et d’autres diaboliques adversaires. Le jeu permet d’explorer de façon entièrement libre Gotham City. Les joueurs pourront conduire la batmobile avec tout un arsenal de gadgets. L’achat d’un pass donnera accès à du nouveau contenu pendant les 6 mois suivant la sortie avec notamment de nouvelles missions. Disponible sur Playstation 4, Xbox One et PC. Note : ••••••

THE WITCHER III / LEGO JURASSIC WORLD / F1 2015 /PAyDAy 2

Retrouvez les personnages de Dragon Ball, Naruto, One Piece, Dr. Slump, Assassination Classroom et bien d’autres. Faîtes-les s’affronter dans des niveaux en trois dimensions. Jouez à deux en multijoueur local ou à quatre en ligne. Disponible sur PlayStation 3 et 4. Note : ••••••

J-STARS VICTORy VSEditeur: Bandai Namco GamesGenre: CombatDate de sortie: 26 Juin 2015

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