livre blanc tourisme & territoires - sports de nature

of 139 /139
Livre Blanc Tourisme & Territoires Pour un tourisme conquérant 20 propositions et 60 mesures concrètes Juin 2003 Comité de pilotage « Tourisme & Territoires » sur l’initiative de la FNCDT et avec la participation des CDT et des acteurs français du tourisme des territoires

Upload: others

Post on 23-Jun-2022

0 views

Category:

Documents


0 download

Embed Size (px)

TRANSCRIPT

Pour un tourisme conquérant 20 propositions et 60 mesures concrètes
Juin 2003
Comité de pilotage « Tourisme & Territoires » sur l’initiative de la FNCDT et avec la participation des CDT
et des acteurs français du tourisme des territoires
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
« L’attractivité de la France, c’est l’attractivité des territoires de France… La France ne valorise pas assez ses territoires »
JP RAFFARIN, (Entretien à La Montagne / 27 décembre 2002)
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
S'interroger, Comprendre, Anticiper. Tels étaient les principes fondateurs de la démarche conduite par la FNCDT
qui trouve sa conclusion dans ce livre blanc. Je me félicite de cette initiative qui va incontestablement permettre aux différents acteurs du tourisme en France de disposer d'un très utile outil pour appréhender les enjeux qui vont être au centre de l'évolution de ce secteur. Ce livre blanc est aussi la parfaite illustration du rôle majeur que joue la FNCDT dans la réflexion sur le tourisme, confirmant sa position d'interlocuteur privilégié du Secrétariat d'Etat au Tourisme.
S'interroger. En choisissant de faire un diagnostic approfondi de l'existant, la FNCDT a su s'appuyer sur un processus réellement démocratique, permettant à chacun de s'exprimer. Le débat qui s'est engagé a mobilisé, outre le comité de pilotage, plus de 30.000 personnes et je ne peux que me féliciter de l'opportunité qui a été donnée à chacun des acteurs du tourisme, partout en France et quelle que soit leur fonction , d'exprimer leurs espoirs, leurs attentes, mais aussi, éventuellement, leurs craintes. Comprendre. En analysant les perspectives du développement du tourisme en France, le travail de la FNCDT intègre parfaitement les changements que la réflexion relative à la décentralisation et à la modernisation de l'Etat ne manquera pas d'induire. Le débat, instauré à cette occasion, a aussi permis de poser les bonnes questions et, en créant cette démarche de proximité participative avec tous les acteurs du tourisme français, de déterminer clairement les axes des actions futures. Anticiper. En repositionnant le client au cœur de l'organisation, en mettant l'accent sur la simplification ou en rappelant les valeurs d'une vraie démarche qualité, pour ne citer que ces trois exemples, ce livre blanc démontre la faculté d'adaptation qui anime tous ceux qui ont contribué à sa rédaction. Ce livre blanc est donc un outil pour chacun d'entre nous et je salue cette initiative. Elle confirme la place déterminante de ses rédacteurs dans la contribution au débat national sur le tourisme. A nouveau, je les en félicite. Léon BERTRAND Secrétaire d'Etat au Tourisme
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
La richesse culturelle et patrimoniale de la France est incarnée dans ses territoires et leur exceptionnelle diversité. C’est l’une des raisons majeures pour lesquelles le tourisme, dont l’importance reste souvent méconnue, est l’un des secteurs d’avenir majeurs de notre Pays. La France est d’ores et déjà la première destination mondiale, elle représente 9 % du marché mondial du tourisme, et le chiffre d’affaires du secteur 6,6 % du PIB national.
Améliorer nos performances et maintenir notre place est possible pourvu qu’on le mette en valeur et que l’on fasse demain plus encore qu’aujourd’hui découvrir au touriste, qu’il soit du bout du monde ou de proximité, nos pays, paysages, monuments, gastronomie ou nos traditions et cultures locales.
Depuis la loi de 1992, le secteur du tourisme est décentralisé et compétence partagée entre les différentes collectivités locales. Elle organise la collaboration entre les partenaires publics (Etat, collectivités locales) et privés, des plus grandes entreprises à l’hôtelier de village ou l’agriculteur.
Dans ce schéma, les comités départementaux du tourisme, bras séculiers des Conseils généraux, n’auraient pu assurer leur rôle sans l’appui constant de ces derniers qui en assurent plus des 4/5ème de leur financement.
C’est pourquoi l’initiative de la FNCDT de mettre à plat les atouts et faiblesses de ce secteur pour proposer de multiples améliorations au système existant ne pouvait qu’être saluée par l’Assemblée des Départements de France.
Le livre Blanc « Tourisme et Territoires », est riche de l’expérience de terrain des comités départementaux du tourisme et des Conseils généraux. Il vient à point nommé, après l’étude réalisée par l’ADF en mars 2000 sur les politiques départementales du tourisme pour rappeler l’importance du tourisme dans l’économie de notre Pays et la part qu’y prennent les Conseils généraux.
Il démontre que les comités départementaux du tourisme savent avec compétence et objectivité analyser les forces et faiblesses de notre paysage institutionnel et qu’ils soient à la hauteur, comme les conseils généraux du rôle que la loi leur a attribué.
Au-delà de l’exhaustivité de l’analyse, il faut souligner la richesse et la pertinence des propositions formulées : mettre le touriste et les territoires au cœur des préoccupations de chacun des acteurs est indispensable. Devant les enjeux de développement, mieux organiser un secteur porteur de centaines de milliers de créations d’emplois, se doter des moyens nécessaires pour que chaque territoire sache mieux faire connaître ses atouts ne peut que contribuer au rayonnement de la France. C’est dans ce domaine aussi que l’avenir se joue dans la proximité.
Conseils généraux et comités départementaux du tourisme, en partenariat avec l’ensemble des acteurs publics, et privés s’attachent quotidiennement à relever ce défi. Je ne doute pas que la contribution du livre Blanc de la FNCDT soit essentielle à cet avenir. Les départements pour leur part sont prêts, demain comme hier et aujourd’hui à y contribuer.
Jean Puech Président de l'Assemblée des Départements de France
1
Sommaire Page
Sigles et abréviations 3 Avant propos 5 Chapitre 1 : Analyse et diagnostic
Préambule 9 Introduction 11
I - Etat des lieux/réalités et faits saillants 11
1. Le tourisme en France 11 une performance remarquable 12 une puissance économique et sociale 12 une réalité fortement sous estimée un marché d’avenir 14 un modèle atypique 14 un marché très sensible 16 une concurrence exacerbée 17 un modèle à risques pour l’avenir 18
2. Le tourisme des territoires 23
une réalité économique puissante 23 la richesse de la France est dans ses territoires 23 des acteurs publics très diversifiés 25 levier incontournable du développement local 26 une organisation territoriale appliquée différemment 27 des disparités très importantes 29 les CDT, force tranquille 30 des CDT au cœur du système relationnel 35
3. Conclusions du titre I 41
II - Les enjeux de demain 53
1. Les grandes évolutions 53 les évolutions de l’environnement 53 les NTIC 55 les intercommunalités 56 les évolutions du tourisme des 20 prochaines années 57
2. Les conséquences 59
2
Chapitre 2 : Propositions 67
I - Définition d’un cadre général 67 a. Principes et valeurs fondant les actions proposées 67 b. L’état d’esprit 69
II - 20 propositions 71
Pour un nouveau tourisme n° 1 une vision nouvelle et élargie du tourisme 73 n° 2 une reconnaissance et une mobilisation 75 n° 3 une véritable politique d’accompagnement de projets 77 n° 4 le développement du tourisme dans tous les territoires 81
n° 5 un tourisme solidaire 83
Pour une intelligence touristique n° 6 une approche touristique identitaire des territoires 85 n° 7 une véritable politique nationale et européenne de marques
et de labellisation 87 n° 8 une veille élargie et permanente 89 n° 9 la création et la généralisation d’un système normé
et regroupé de l’offre touristique 93 n°10 un "knowledge management" partagé 95 n°11 la généralisation du partenariat privé-public
dans le développement du tourisme 97
Pour une organisation performante n°12 une mise en tourisme de l’offre coordonnée
au plus près du territoire 99 n°13 une promotion des territoires coordonnée autour de
« projets de destination » 101 n°14 une promotion plus large du tourisme français à l’étranger,
mieux dotée et mieux partagée 105 n°15 une implication mieux ciblée de l’État 107 n°16 une répartition "légitime" des missions des acteurs
institutionnels du tourisme 109 n°17 une définition claire des missions des OTSI, CDT et des CRT 111 n°18 une relation conventionnée entre les structures 115 n°19 un nouveau positionnement de l’intervention
en commercialisation des organismes institutionnels 117 n°20 une professionnalisation des acteurs du tourisme
des territoires 119
Conclusions 121 Récapitulatif des propositions et des mesures préconisées 122
Annexes Annexe 1 : Organismes et personnes impliqués ou consultés dans le cadre de l'élaboration du Livre Blanc 125 annexe 2 : l’esprit de la loi du 23 décembre 1992 127 annexe 3 : les missions assurées par les CDT 129 annexe 4 : Le nouveau CDT 133
3
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Signification des sigles et abréviations utilisés Par ordre alphabétique ACFCI Assemblée des Chambres Françaises de Commerce et d’Industrie ADCF Assemblée Des Communautés de communes de France ADF Assemblée des Départements de France AFIT Agence Française d’Ingénierie Touristique ARE Assemblée des Régions d'Europe ARF Assemblée des Régions de France CAUE Conseil en Architecture, Urbanisme et Environnement CCI Chambre de Commerce et d’Industrie CDAT Commission Départementale de l’Action Touristique CDEC Commission Départementale d’Équipement Commercial CDT Comité Départemental du Tourisme CNT Conseil National du Tourisme CPER Contrat de Plan État Régions CPTR Conférence Permanente du Tourisme Rural CRAT Commission Régionale de l’Action Touristique CRCI Chambre Régionale de Commerce et d’Industrie CRT Comité Régional du Tourisme DCT Dotation aux Communes Touristiques DGF Dotation Globale de Fonctionnement DRAC Délégation Régionale des Affaires Culturelles DRAF Direction Régionale de l’Agriculture et de la Forêt DRIRE Direction Régionale de l’Industrie, de la Recherche et de l’Environnement DRE Direction Régionale de l’Équipement DRT Délégation Régionale au Tourisme EPCI Établissement Public de Coopération Intercommunale FACIT Fonds d’Aide au conseil et à l’Innovation Touristique FCIR Fonds pour le Capital Investissement Régional FNCDT Fédération Nationale des CDT FNCRT Fédération Nationale des CRT FNOTSI Fédération Nationale des OTSI FRAC Fonds Régional d’Aide au Conseil GIE Groupement d’Intérêt Économique GIP Groupement d’Intérêt Public MEDEF Mouvement des Entreprises de France NTIC Nouvelles Technologies d’Information et de Communication OTSI Office du Tourisme /Syndicat d’Initiative ONF Office National des Forêts ONT Observatoire National du Tourisme OMT Organisation Mondiale du Tourisme PAT Pays d’Accueil Touristique PDIPR Plans départementaux d'itinéraire de petite randonnée RMA Revenu Minimum d’Activité RMI Revenu Minimum d’Insertion SAN Syndicat d’Agglomération Nouvelle SEML Société d’Économie Mixte Locale SGAR Secrétariat Général aux Affaires Régionales SIVOM Syndicat Intercommunal à Vocation et à Objet Multiples SIVU Syndicat Intercommunal à Vocation Unique SLA Service Loisir Accueil SNAV Syndicat National des Agences de Voyages UMIH Union des métiers de l'Industrie Hôtelière VNF Voies Navigables de France WTTC World Travel and Tourism Council ZRR Zone de revitalisation rurale
5
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Avant propos du Président de la FNCDT Le large débat lancé par le gouvernement pour engager une seconde étape dans la décentralisation de l’Etat et la tenue prochaine d’un comité interministériel sur le tourisme fournissent une opportunité au réseau des Comités Départementaux du Tourisme (CDT) de contribuer aux débats nationaux. Ce livre blanc est l’expression de leur réflexion stratégique pour le tourisme français, enjeu économique mais également enjeu de solidarité, enjeu social, culturel, d’aménagement du territoire.. Ce livre blanc est également la traduction de leur expérience en matière de proximité et de décentralisation, leur action s’inscrivant depuis de longues années dans le cadre d’une politique décentralisée du tourisme. Enfin, il a été conçu pour nourrir le débat national sur le tourisme en espérant que d’autres acteurs apporteront également leur pierre à l’édifice. Couvrant l’ensemble du territoire national, dont la diversité constitue la 1ère force du tourisme français, et connaissant parfaitement tous les acteurs régionaux et locaux, les CDT, bras séculiers des Conseils Généraux, qui représentent une force opérationnelle de 1 900 collaborateurs, vivent le tourisme des territoires au quotidien. Derrière la volonté de participer à la réflexion, il y a aussi la conscience de devoir agir vite. Face à une offre internationale qui explose littéralement, à une concurrence mondiale de plus en plus intense, à des attentes et des comportements en évolution rapide, la France peine à s’adapter et à s’organiser, à l’image des 54 000 offres d’emplois qui n’ont pas été pourvues dans les métiers du tourisme en 2001 ! De plus, on mesure mal que le tourisme reste très fragile et qu’il est condamné, plus que tout autre, à s’adapter très rapidement et à saisir toutes les opportunités nouvelles qui se présentent en se donnant l’organisation et les moyens de l’excellence. C’est la seule garantie pour la France et ses territoires de conserver son leadership du tourisme mondial et, au-delà, de faire du tourisme un véritable moteur de développement local, équitable et durable. Après 10 ans de décentralisation touristique, nous avons aujourd’hui le recul et la maturité nécessaires pour apprécier la loi n° 92-1341 du 23 décembre 1992 portant répartition des compétences dans le domaine du tourisme et sa mise en œuvre. Certaines choses marchent fort bien, d’autres beaucoup moins. De fait, comme pour le tourisme international, l’environnement du tourisme dans les territoires a changé, en termes de concurrence, mais aussi en termes de structures et d’organisation, de nouveaux intervenants, les intercommunalités notamment, étant apparus depuis quelques années. Cette évolution des acteurs du tourisme dans les territoires, du contexte dans lequel ils évoluent ainsi que celle des missions des CDT, incite aujourd’hui à en
6
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
tirer un bilan et faire des propositions concrètes susceptibles d’améliorer l’efficacité du tourisme des territoires et, en conséquence, du tourisme français. Les enjeux pour la France sont considérables. Si l’on sait que le tourisme constitue l’un des secteurs les plus créateurs de richesse et d’emplois, on mesure parfois moins qu’il est essentiel non seulement au développement national mais encore et, surtout, au développement local. Activité transversale, sa contribution économique réelle dépasse largement le profil issu des statistiques sectorielles. Ses retombées, qui sont toujours sous- estimées, se mesurent, certes, en termes financiers, mais aussi en termes culturels et sociaux. Le tourisme est essentiel parce qu’il permet souvent aux habitants des régions de France, surtout les plus reculées, d’exister et de faire vivre leur culture. Mais il est essentiel aussi pour ceux qui viennent les rencontrer et partager avec eux, et je pense bien sûr à nos visiteurs français et étrangers, mais aussi à tous ceux qui, dans notre pays, ne partent pas encore en vacances. Parce qu’on ne dira jamais assez que le tourisme n’est pas uniquement économique ; comme nous le rappelons dans les premiers chapitres, il est aussi social, culturel et facteur d’aménagement, d’embellissement de paysage et de promotion de nos produits. En rapprochant les gens, les pays et les régions, en dissipant les préjugés, en permettant de mieux comprendre autrui, il favorise la compréhension entre les peuples et le partage. Œuvre d’éducation, de formation, de paix et de tolérance, « il ouvre les horizons de ceux qui reçoivent, comme de ceux qui viennent » dit Fernand Chaussebourg. Et pour notre société, cet enjeu humaniste là n’a pas de prix. Je tiens à donner ici quelques précisions sur la démarche qui a été suivie pour élaborer ce livre blanc. Si la FNCDT en est l’instigatrice, c’est un comité de pilotage, constitué de directeurs et de présidents de différents CDT, représentatifs de tous les espaces touristiques, qui l’a diligenté. L’avancement des travaux a été suivi par moi- même, le conseil d’administration et l’équipe de la FNCDT. Quant aux auteurs, ce sont tous les acteurs du tourisme des territoires qui ont accepté d’apporter leur pierre à l’édifice, à l’une ou l’autre des étapes de la démarche. Le présent document est en effet le fruit d’une démarche interactive en 5 étapes, reposant sur une large consultation menée dans tous les départements français. 1) la première étape a consisté à sélectionner les membres du comité de pilotage dont la mission a été de définir la démarche, proposer des pistes de réflexion et superviser l’ensemble du travail d’analyse et de rédaction. 2) Sous sa conduite, la seconde étape a permis de réaliser un diagnostic de l’existant à travers une synthèse des enquêtes et études existantes, mais aussi un questionnaire d’évaluation auto-administré auprès d’un échantillon de 16 CDT
7
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
représentatifs des territoires ainsi que des interviews menées en face à face auprès d’acteurs et experts du tourisme des territoires. 3) Après validation du diagnostic et rassemblement des propositions par le comité de pilotage, la troisième étape s’est traduite par l’élaboration d’un avant- projet. 4) La quatrième étape a débuté par l’instauration d’un débat à l’intérieur de chaque département autour de cet avant-projet. Ce débat s’est engagé avec les 97 présidents et directeurs des CDT auxquels a été envoyé l’avant-projet, puis s’est prolongé à travers l’organisation de 61 tables rondes ou débats locaux réunissant plus de 2 000 acteurs et opérateurs institutionnels et privés locaux. Parallèlement, des contacts et des rencontres ont été organisés avec la plupart des organismes et experts représentatifs du tourisme des territoires et, bien sûr, le projet a été largement débattu avec les représentants de l’Assemblée des Départements de France. 5) Enfin, la dernière et cinquième étape a consisté à retravailler l’avant-projet, puis à finaliser le livre blanc en fonction des remarques et suggestions faites par les acteurs locaux et institutionnels du tourisme. Ce sont les résultats issus de cette démarche de proximité participative et mobilisatrice des acteurs du tourisme français qui ont été rassemblés ici. Il s’agit bien d’un point de vue qui ne prétend pas exprimer la position de tous, mais reflète celle de la majorité des acteurs consultés. Les mesures proposées s’inscrivent dans une stratégie à terme dont il faudra arbitrer les priorités, à l’aune des coûts d’objectifs notamment, sous peine de composer un programme financièrement insupportable. Pour terminer, qu’il me soit permis de remercier les membres du comité de pilotage pour l’implication et la qualité du travail qu’ils ont su fournir, en plus de leurs responsabilités quotidiennes. En leur nom et au nom du conseil d’administration de la FNCDT, je veux aussi remercier tous les élus locaux, les présidents et les directeurs de CDT qui ont bien voulu s’impliquer dans ce travail ainsi que tous les experts, professionnels, techniciens de chaque département qui ont participé aux tables rondes et débats internes (voir la liste des membres du comité de pilotage et les participants aux tables rondes ou débats internes en annexe 1). Je suis également reconnaissant à tous les responsables et représentants des organisations représentatives du tourisme local de nous avoir apporté leur éclairage pertinent sur le sujet. Ils nous ont permis d’élargir la vision au-delà du seul point de vue des CDT. Merci enfin à tous les personnels de la FNCDT et des CDT qui se sont mobilisés avec dévouement autour de ce projet.
Jean Pierre SERRA Président de la FNCDT
9
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Chapitre 1 Analyse et diagnostic Préambule Nous commencerons par donner la signification de quelques termes dans leur acception la plus courante, tels que nous les utiliserons dans ce chapitre. Le tourisme comprend « les activités déployées par les personnes au cours de leurs voyages et de leurs séjours dans les lieux situés en dehors de leur environnement habituel à des fins de loisirs, pour affaires et autres motifs ». (Mémento du tourisme 2002) Le terme de « visiteur », qui désigne tous ces voyageurs, est le concept de base de l’ensemble du système des statistiques du tourisme. Les visiteurs sont soit des touristes, soit des excursionnistes, selon qu’ils passent au moins une nuit, ou pas, dans un moyen d’hébergement (collectif ou privé) dans le lieu visité. Par « produit touristique », on n’entend pas seulement une offre composée d’au moins deux prestations facilement consommables, mais toute offre faite à un touriste, présent ou potentiel, afin que celui-ci puisse satisfaire ses besoins et ses désirs. (selon la définition de G.Toquer et M.Zins) C’est dire qu’en plus des produits « secs » -hébergements touristiques, sites naturels et culturels, restaurants gastronomiques, infrastructures de découverte (voies vertes, sentiers, routes touristiques, historiques et/ou artistiques, etc- il existe six grandes familles de produits : 1) les territoires : villes, départements, régions, pays, espaces géographiques,
etc. 2) les stations : littorales, sports d’hiver, thermales, etc. 3) les complexes intégrés : hôtels de loisirs, hébergement + loisirs (ex.
Center Parcs), parcs de loirs + hébergement (ex. Disneyland Paris, Astérix), villages de vacances.
4) les forfaits : produits clés en main proposés par des voyagistes (ex. Club Med, Fram) ou des stations (ex. semaine aux sports d’hiver).
5) les événements : festival, manifestations culturelles ou sportives, etc. 6) les produits ciblés faisant l’objet de filières spécifiques : séjours sportifs,
congrès et séminaires, cures thermales et thalassothérapie, etc. (in « Le tourisme des années 2010 » la documentation Française)
11
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Introduction L’expression « tourisme et territoire(s) » a été préférée, ici, à celle de « tourisme de proximité », à cause de la confusion à laquelle cette dernière est susceptible de prêter, pouvant désigner soit un tourisme de très courts séjours effectués par des populations situées à 2 heures maximum de voiture, de train ou d’avion, par rapport à la destination soit des produits de week-ends thématiques : culturels, gastronomiques, de shopping, etc. Cependant, les deux expressions se valent, la proximité étant la donnée principale de ce « tourisme des territoires ». Quoi qu’il en soit, tout le tourisme français est tourisme de territoires, y compris Paris, qui constitue néanmoins un territoire à part du fait d’une situation particulière/unique et d’un poids économique considérable. Sur le plan administratif, ce tourisme concerne directement les Collectivités locales (Régions, Départements, Communes) –la compétence leur en a été confiée par les lois du 7 janvier 1987 et du 23 décembre 1992- et leurs satellites (CRT, CDT, OTSI), mais il concerne également l’État, par le biais des services déconcentrés des DRT, d’un organe consultatif auprès du préfet de région -les CRAT-, des services externalisés rattachés au Secrétariat d’État au Tourisme (Maison de la France, AFIT, Observatoire National du Tourisme, etc), et par le biais des enveloppes tourisme des CPER et des DCT intégrées aux DGF.
I - Etat des lieux / réalités et faits saillants du tourisme
1. le tourisme en France
Il s’agit d’un marché énorme, en croissance constante et aux très fortes retombées, mais il s’agit aussi d’un marché sensible, sur lequel le modèle français, bien que très performant, connaît déjà quelques ratés.
a. Une performance remarquable de l’entreprise France
En regard de la petite taille de l’hexagone, les classements parlent d’eux- mêmes : • 1ère destination mondiale avec plus de 76,5 millions de visiteurs, soit 11 % des arrivées mondiales • 3ème place en part de marché avec 34 milliards d’euros de dépenses effectuées par les touristes (source DT) • 2ème rang (après les USA), avec 9 % du marché mondial, en tourisme d’affaires et événementiel. L’explication principale est à rechercher non seulement dans la diversité et la richesse de ses ressources naturelles et culturelles, qui sont sans doute parmi les meilleures du monde, mais également dans sa position centrale en Europe occidentale (avec
12
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
une proximité exceptionnelle de tous les grands bassins de clientèle européenne et un transit très important de 160 millions de personnes dont une partie s’arrête pour une nuit), dans l’importance de sa façade maritime, dans la qualité de son réseau d’infrastructures de transport, dans le niveau d’équipement de ses stations balnéaires et de haute montagne et, enfin, dans une image de marque internationale particulièrement séduisante pour les visiteurs (art de vivre, gastronomie, création, romantisme, pays des droits de l’homme, etc).
b. Une puissance économique et sociale indispensable pour la France
Dans l’économie nationale, le poids du tourisme est considérable, totalisant 97,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel (consommation touristique intérieure), soit 6,6 % du PIB national. (Direction du tourisme). Les dépenses des touristes s’élèvent à 34 milliards d’euros. L’hébergement non marchand (estimé en loyers fictifs correspondant au service d’hébergement marchand qu’auraient payé les touristes séjournant dans leurs résidences secondaires ou chez des parents ou amis) représente 8,3 milliards d’euros (chiffres 2001 Mémento du tourisme). Le produit de la taxe de séjour et de la taxe forfaitaire perçues en 2000 s’élève à 106,5 millions d’euros. Aujourd’hui, le tourisme occupe le 1er rang de la balance extérieure française avec un solde bénéficiaire de plus de 15 milliards d’euros, loin devant l’automobile (+ 9 milliards) et l’agroalimentaire (7 milliards). L’industrie touristique génére plus d’un million d’emplois directs, soit 4% du nombre total des emplois, le nombre de travailleurs saisonniers du tourisme avoisinant les 400 000 chaque année. Au total, ce sont plus de 3 millions d’emplois directs et indirects, soit 12 % du total, que représente l’économie touristique en France (source WTTC, Compte Satellite du Tourisme 2002) !
c. Une réalité économique, sociale, culturelle et humaniste fortement
sous estimée, quantitativement et qualitativement
1) Quantitativement Activité transversale par nature, le poids réel du tourisme en terme économique est plus important encore que celui des statistiques sectorielles de la nomenclature économique. En effet, sont également concernés par le tourisme de nombreuses professions et de nombreux équipements appartenant à d’autres secteurs économiques, comme par exemple : - les transporteurs, les chauffeurs de taxi, les loueurs de voiture, les
stations services, les artisans et artistes, les agriculteurs, les professions
13
de santé, les commerçants (fleuristes, libraires, alimentation, cadeaux, vêtements…), etc.
- les musées, les espaces culturels, les équipements sportifs, les spectacles, etc.
- les réseaux routiers et autoroutiers, télécoms, etc. 2) Qualitativement L’aspect tertiaire de l’industrie touristique, qui s’appuie de plus en plus sur les services et l’immatériel, en fait une activité d’avenir ainsi qu’un formidable tremplin pour ceux de ses salariés qui souhaitent rejoindre d’autres secteurs d’activités. De plus, les emplois touristiques créés dans les territoires sont des emplois nets (c’est-à-dire non issus de délocalisation) et non délocalisables (car attachés à une destination ou à un territoire précis). En outre, en faisant connaître et en vendant auprès de 80 millions de visiteurs annuels des produits symboles de notre culture et de notre « french way of life », le tourisme constitue aussi un formidable vecteur de promotion des produits français à l’exportation. Il est, ainsi, l’ambassadeur dans le monde de milliers de produits, de la décoration au vin, en passant par la mode ou la gastronomie. Mais le tourisme est encore plus que cela : par la rencontre avec d’autres cultures, il permet aux Français de progresser et de s’ouvrir sur le monde en favorisant, en même temps que l’ouverture aux autres et la tolérance, leur adaptation au monde et aux marchés internationaux en particulier. Cette œuvre de pacification sociale et d’épanouissement personnel est essentielle dans l’apport du tourisme. D’ailleurs, le tourisme est devenu un symbole et un enjeu politique et culturel très fort. Ce n’est pas par hasard que des attaques terroristes visent des lieux touristiques dans le monde ! D’autant que les populations sont beaucoup plus impliquées dans le processus touristique que l’on ne pense. Elles sont par exemple les 1er hébergeurs touristiques (en 2001 en France, 57% des visiteurs français sont descendus chez des parents ou amis en nombre de nuitées et 63% en nombres de séjours ! ) Celles qui sont associées aux activités touristiques participent bien sûr directement aux bénéfices économiques, sociaux et culturels qu’elles génèrent et en particulier aux créations d’emplois et à la valorisation commerciale des entreprises et des biens. Par exemple, les salariés du tourisme (hôtels, restaurants, etc), les maisons d’hôtes, les gîtes ruraux, etc Celles qui n’y sont pas directement associées bénéficient néanmoins des retombées indirectes permettant de vivre au pays (revenus et consommation d’équipements), d’y perpétuer les modes de vie (repères) et de valoriser leurs biens fonciers/immobiliers.
14
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Interlocuteurs naturels et relais d’opinion, voire parfois prescripteurs pour les visiteurs, les habitants sont tous, peu ou prou, des acteurs quotidiens du tourisme. Ils peuvent même parfois le subir, lorsqu’il entraîne des nuisances (intégration architecturale, sur-fréquentation, insécurité, etc). En outre, ils en sont les financeurs par l’intermédiaire de leurs impôts nationaux et locaux. L’implication des habitants dans le tourisme est donc multiple et plurielle.
d. Un marché d’avenir pour la France, susceptible de créer environ 100/130 000 emplois par an Selon les projections de l’OMT, il y a une forte probabilité d’accueillir 100 millions de visiteurs en France en 2010 ! Cela représente pour la France, sur la base du ratio actuel d’emplois par visiteurs, la création de l’ordre de 900 000 emplois directs et indirects supplémentaires en 7 ans, soit plus de 130 000 par an ! Compte tenu de l’occupation actuelle des hébergements, il est probable qu’une partie de ce flux de nouveaux visiteurs sera absorbé sans embauche supplémentaire. Ainsi on peut estimer que le nombre effectif de création d’emplois devrait se situer en France dans les années à venir entre 100 000 et 130 000 emplois par an ! Ce chiffre est à comparer au 52 000 emplois salariés créés entre 1999 et 2001 dans le secteur touristique. En termes de contribution à la balance des paiements, cela devrait représenter quelques 5 milliards d’euros supplémentaires ! En effet, la croissance du marché du tourisme, presque continue depuis la seconde guerre mondiale, va s’accélérer encore. L’OMT prévoit 1,5 milliard d’arrivées internationales en 2020, les dépenses correspondantes atteignant plus de 2 000 milliards de dollars. Toutefois, cette croissance sera inégale selon les régions du monde. L’Europe et l’Amérique, qui dominent actuellement le tourisme mondial (avec respectivement 57/58% et 16/18% de parts de marché), vont croître moins rapidement que l’Asie et le Moyen Orient. Avec un taux de croissance annuel moyen estimé à 6,5 % entre 1995 et 2020, la zone Asie de l’Est-Pacifique devrait totaliser 25,4% des parts de marché en 2020 (contre 18,3% aujourd’hui) !
En outre, la diffusion des flux dans le monde, qui s’accompagne d’une diversification des destinations, va encore s’élargir et augmenter le nombre de concurrents.
e. Un modèle atypique
Il est fondé sur quatre caractéristiques spécifiques : 1) Une organisation administrative très structurée
15
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
L’organisation territoriale du tourisme en France repose sur 3 niveaux de compétence administrative, région, département et commune / intercommunalité, contrairement aux modèles européens à structure fédérale. Comme évoquée plus haut, cette compétence s’exerce à travers les directions du tourisme de chacun de ces organismes administratifs et leurs satellites respectifs que sont les CRT, CDT et OT mais aussi les différents services ou représentants de l’Etat (Préfecture et DRT essentiellement).
Au national, il existe un organe consultatif, le CNT (Conseil National du Tourisme) rattaché directement au Ministre chargé du tourisme et trois organismes sous tutelle de l’Etat partagent les responsabilités respectives de la promotion, de l’ingénierie et de l’observation du tourisme français en partenariat privé-public.
La promotion est confiée à « Maison de la France », GIE associant l’État, les Régions, les Départements, les collectivités touristiques, les entreprises, les groupements professionnels, le tourisme associatif et les organismes chargés de la promotion du tourisme à l’étranger. Il réunit actuellement 1160 adhérents, dont 30 % sont des acteurs directs du tourisme et 25 % des institutionnels. Son budget de fonctionnement qui a atteint 52,1 millions d’euros en 2001, est subventionné par l’État à plus de 50 % et par les Régions à 12,1% (6,3 millions). Il est présidé par un professionnel privé. Il sert d’office national du tourisme puisque sa mission est celle de la promotion et de l’international en général. Son organisation a été copiée par de nombreux pays dans le monde. L’ingénierie est assurée par l’AFIT (Agence Française de l’Ingénierie Touristique), GIP fédérant près de 300 organismes publics et privés, acteurs de l’économie touristique, qui en sont membres, actifs, affiliés ou correspondants. Il dispose d’un budget de 5,9 millions d’euros en 2002 pour « favoriser l’adaptation de l’offre touristique française aux évolutions de la société et de la consommation pour mieux répondre à la demande, améliorer sa compétitivité et faire face à la concurrence internationale ». L’observation est partiellement confiée à l’ONT (Observatoire National du Tourisme), Association loi 1901 réunissant près de 200 membres, administrations et entreprises publiques, collectivités territoriales, fédérations et professionnels du tourisme, français et étrangers. Son objet est la concertation, l’échange d’informations et la réflexion entre les acteurs en matière d’observation socio-économique du tourisme ainsi que la collecte et le rassemblement des informations en vue d’améliorer la connaissance de l’activité touristique, des
16
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
points de vue économique et social. Il assure la valorisation des travaux qu’il réalise et conduit des actions de partenariat avec les organismes institutionnels et professionnels concernés. En 2002, son budget est d’environ 0,6 million d’euros.
Tous ces organismes travaillent en liaison à l’international avec l’OMT (Organisation Mondiale du Tourisme), organisation intergouvernementale regroupant 125 Etats et environ 300 organismes touristiques.
2) Une offre atomisée et une faible présence des grands
opérateurs. Les grandes entreprises ne représentent que 20% environ du chiffre d’affaires du tourisme. (MEDEF) Cette caractéristique constitue une force en termes de réponses diversifiées aux besoins des clients, mais nous verrons plus loin qu’elle est aussi une très grande faiblesse en matière de commercialisation, nécessitant plus que partout ailleurs des réponses spécifiques en particulier en termes de regroupement et de mutualisation.
3) Une diversité de territoires sans doute inégalée dans le monde,
surtout pour un pays de cette taille.
4) Un espace campagnard qui est d’ailleurs devenu le 2ème espace touristique.
f. Un marché très sensible
1) Une sensibilité forte aux aléas météorologiques Il faut rappeler que le tourisme est une activité qui reste fortement liée au climat. Malgré le développement et la professionnalisation des équipements et des services, l’impact des aléas météorologiques reste encore considérable sur sa performance.
2) Une extrême sensibilité à l’insécurité et aux événements Monétaire, politique ou physique, toutes les formes d’insécurité liées aux aléas de l’actualité internationale sont actives. Ainsi, les répercussions des attentats, marées noires, inondations, épidémie de vache folle, le virus Ebola, El Nino, mais aussi les grèves de routiers ou des transports ferroviaires ou aériens, sont quasi immédiates : annulations, réductions, voire extinction des flux touristiques. En général, la perturbation reste circonscrite géographiquement et ne dure que jusqu’au dénouement de la crise. Cependant, pour la première fois depuis 1982, suite au drame du 11 septembre 2001 et à ceux de l’île de Djerba et de Bali, où des touristes ont été la cible désignée d’actes terroristes, on a assisté à des effets durables à la suite d’une crise même si, au final, le tourisme mondial a légèrement progressé en 2002.
17
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
C’est pourquoi, le Secrétariat d’État au Tourisme vient de mettre en place une cellule de veille dédiée à laquelle participe la FNCDT.
3) Une dépendance à l’accueil, aux services et aux équipements en général Heureusement pour certains et malheureusement pour d’autres, le tourisme ne repose pas que sur les richesses naturelles et culturelles des territoires. L’accueil, l’hébergement, les équipements de loisirs, les services associés… etc… mais aussi et surtout l’organisation de l’offre, les accès et les transports en général sont autant de critères clés de décision. Ainsi l’aménagement du territoire a un impact essentiel pour le tourisme. C’est pourquoi, le désenclavement autoroutier d’une région, la gare TGV, l’ouverture d’une ligne aérienne "low cost" ou la création d’une offre hôtelière groupes par exemple, modifient périodiquement la donne touristique. Plus généralement, la qualité d’un séjour dépend de tous, car, dans un séjour, tout est tourisme : accueil aux frontières, navette aérogare, accueil du taxi, signalisation, parkings, offre de change, menu enfant, sécurité, propreté, contacts avec les habitants … Or, la qualité finale est jugée souvent à l’aune de celle du maillon le plus faible de la chaîne ! C’est pourquoi, les attitudes et positions « anti-touristiques » comptent tant. Par exemple, des policiers de l’air et des douaniers peu aimables dans les aéroports -est-il possible d’« accueillir en amis plutôt qu’en intrus » ? demande le MEDEF-, du personnel monoglotte et peu souriant, des heures d’ouverture inadaptées, peu ou pas de nocturnes, une fermeture dominicale ou hivernale, un accès et un parking bus inexistant, une absence d’accès handicapés, la scolarisation le samedi, etc.
g. Une concurrence exacerbée qui annonce une véritable guerre du tourisme De nouvelles destinations fleurissent chaque année. En 1950, 15 pays comptabilisaient la totalité des 25 millions de touristes internationaux alors qu’en 1999, déjà, 70 pays et territoires ont reçu plus d’1 million de visiteurs chacun ! Le tourisme est désormais reconnu par tous, pays, régions, villes, comme un levier essentiel de développement. Pour certains d’entre eux, les plus pauvres, c’est même souvent la seule source de devises. C’est pourquoi, en France comme dans le monde, il est difficile, aujourd’hui, de trouver un pays, une région, une ville qui ne communique pas. À la promotion institutionnelle s’ajoute bien entendu celle des opérateurs et de tous les professionnels du tourisme, des hébergeurs aux agences de voyages en passant par les propriétaires et gestionnaires d’espaces de loisirs.
18
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
La concurrence entre les destinations est devenue très rude et nous nous situons probablement sur ce point à une étape charnière car de très nombreux experts internationaux s’accordent sur le fait que l’offre est désormais très supérieure à la demande et que cette situation va encore s’aggraver dans les années à venir. La compétition va donc devenir féroce, car le développement programmé de nouvelles destinations et d’équipements touristiques devrait continuer à un rythme plus rapide que la demande, même si celle-ci devrait croître, comme on l’a vue, à un rythme élevé. Un phénomène renforcé d’une part avec la banalisation des nouvelles technologies qui rend les offres plus facilement accessibles sur le marché, et d’autre part l’entrée des pays de l’Europe orientale dans la zone euro. Les arbitrages des futurs touristes vont donc être de plus en plus difficiles à prendre face à l’abondance du choix. Et la concurrence sera de plus en plus européenne et internationale. Au même prix, on a désormais le choix entre une semaine hivernale en Tunisie en hôtel 3 étoiles ou un week-end gourmand en Périgord ! Par avion, Budapest n’est qu’à 2 h de Paris ! En France comme en Europe (58 % de part de marché en 2001 mais 45 % prévu en 2020), cette concurrence s’est déjà traduite par une perte progressive de part de marché des arrivées internationales (11,4 % en 90, 11% en 2001) au bénéfice de la zone Asie de l’Est-Pacifique, Asie du Sud, Afrique et Amériques (dans l’ordre décroissant). Ce durcissement et cet élargissement de la concurrence entraîneront une élévation du niveau de la qualité et un renforcement du professionnalisme du secteur. Il est clair qu’à terme, avec l’explosion de la concurrence et le nivellement vers le haut de la qualité, la différence se fera de plus en plus, comme cela se passe dans tous les autres secteurs/marchés, sur notre capacité à créer à travers des marques une valeur ajoutée supplémentaire autour des services et d’une « culture », précisément, celle associée à l’identité de nos territoires.
h. L’envers de la médaille : un modèle à risques pour l’avenir
Si la typicité du modèle français fait la force de son tourisme, il contient aussi, en lui, ses faiblesses, qui sont autant de risques potentiels dans le défi de la « guerre » concurrentielle internationale du secteur. 1) Une faiblesse endémique du budget national
En regard de la concurrence internationale et de l’importance économico-sociale du secteur, les moyens financiers sont trop faibles comme le soulignent régulièrement les professionnels.
En effet, le budget 2003 du secrétariat d’État au tourisme est de 75 millions d’euros, en crédits de paiement. Cela ne représente
19
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
que 0,03% du budget national, alors que la culture en pèse 1,13 % et l’agriculture 2,22% ! C’est moins d’1/1000ème des dépenses effectuées par les touristes français et étrangers dans notre pays ! C’est 1,2 % du chiffre d’affaires du PMU ! Enfin, c’est moins de la moitié de la TVA versée par Disneyland Paris à l’État ! (JM COUVE, député, rapporteur tourisme de l’avis présenté au nom de la Commission des Affaires Économiques, de l’Environnement et du Territoire sur le projet de loi de finances pour 2003). Il est vrai que, compte tenu de la présence d’enveloppes « tourisme » dans d’autres ministères, il serait souhaitable d’avoir une vision consolidée des budgets pour mesurer avec précision les écarts avec nos concurrents. La réforme de la loi de finances en 2005 favorisera cette consolidation en raisonnant en programme. En se fondant sur les chiffres des Actes des premières rencontres parlementaires sur le Tourisme du 28 janvier 2002, ce total peut être estimé à environ 850 millions d’euros (avec 450 millions d’engagements des autres dépenses ministérielles en faveur du tourisme et 300 millions des Régions et des Départements). Cet effort financier reste cinq fois inférieur à celui de l’Espagne ! (Rapport du MEDEF du 20 novembre 2002). On peut d’ailleurs le vérifier dans la promotion où les comparaisons s’appuient sur des bases comparables. La subvention versée par l’État à Maison de la France est égale à 30 millions d’euros, soit 9 fois moins (en pourcentage du PIB) que les crédits de promotion de l’Espagne, 2,5 fois moins que ceux de la Grande-Bretagne et 1,4 fois moins que ceux de l’Italie (source la Documentation Française in « le tourisme des années 2010 ») ! Ce budget de promotion est modique, plaçant la France au : • 10ème rang mondial des offices nationaux de tourisme avec 58 millions de dollars, derrière l’Espagne (147), le Mexique (103), la Thaïlande (93), le Brésil (92), l’Australie (87), Singapour (86), Porto Rico (78), Chine (68), Corée (63). • 18ème rang, si on retient comme critère le rapport entre les budgets de promotion investis et les recettes touristiques ! • 74ème rang mondial, si l’on compare le budget moyen investi en promotion par touriste (0,86 dollar), loin derrière l’Espagne (1,65), le Portugal (2,69), la Suisse (3,66) ou l’Autriche (3,46) ! Maintes fois dénoncée par tous, publics et privés (il y a plus de 10 ans, le rapport de Mr Chaussebourg sur le tourisme l’évoquait déjà), cette situation est de moins en moins compréhensible et aura des conséquences négatives graves dans les prochaines années si rien n’est fait très rapidement.
20
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
2) Une organisation administrative du territoire national en décalage avec le marché
Si l’organisation territoriale du tourisme, calquée strictement sur le découpage administratif du territoire, joue la proximité, elle ne rime pas toujours avec efficacité dans les domaines de la promotion ou de l’organisation des services aux clients. En effet, le découpage administratif ne correspond pas forcément à des « territoires de tourisme », c'est-à-dire des territoires, quelle qu’en soit la forme (zone, pays, filière), présentant une identité touristique propre, susceptible de les rendre identifiables et séduisants pour les touristes. Ni à des territoires fonctionnels en termes d’organisation de services. Cette situation ne facilite donc pas leur commercialisation et leur promotion. Il s’agit là d’un point clé dans la réflexion sur l’amélioration de l’organisation de la promotion des territoires (voir plus loin). En outre, les différents niveaux de décision et d’intervention, propres à la France, complexifient terriblement l’exercice de recollement et de coopération, entre les différents territoires administratifs. Et ce n’est pas la création des « intercommunalités » qui simplifie cette situation, bien au contraire.
3) Une offre en dehors des circuits de commercialisation
Comme évoqué plus haut, l’atomisation de l’offre apporte souvent l’assurance d’une grande diversité et d’une capacité à répondre à "l'individualisation des besoins", mais elle est aussi le signe d’une grande inégalité et d’une faiblesse endémique et structurelle. Elle rend plus difficile encore le travail de structuration et de professionnalisation qu’il est indispensable d’entreprendre pour mettre l’offre en conformité avec la demande, et offrir ainsi la
qualité et les services attendus par les touristes. .assurer la lisibilité et la mise en marché de l’offre L’un des grands problèmes du tourisme français, aujourd’hui, est que 85% de l’offre française reste encore hors des circuits de commercialisation performants. (In « Le tourisme des années 2010 », la documentation française)
4) Des résultats insuffisants
Aujourd’hui, le tourisme est tombé à 5% du PNB en France, ce qui place la France au 6ème rang des 15 États de l’Union, loin derrière l’Espagne qui occupe le 1er rang avec 8,4% (à noter que les recettes de cette même Espagne et de l’Italie augmentent plus vite que celles de la France : +5,2% par an au lieu de +4%). Un touriste qui visite l’Espagne dépense 40 % de plus qu’un touriste qui vient en France. Cette simple comparaison a le mérite
21
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
d’illustrer concrètement les raisons du décalage existant entre la 1ère place occupée par la France en nombre de visiteurs et sa 3ème place en termes de recettes. En fait cela montre bien qu’il faut relativiser notre place de leader dans le tourisme qui est obtenue en grande partie grâce au nombre de visiteurs qui transite chaque année à l’intérieur de nos frontières (160 millions de voyageurs l’année dernière !) dont une partie consomme une nuitée. En même temps, elle justifie d’entreprendre la recherche de solutions d’autant plus rapidement que la part de marché française ne cesse de s’éroder d’année en année, inexorablement. Si rien n’est fait, le prolongement des tendances actuelles montre que notre pays ne sera, en 2020, que la 3ème destination touristique mondiale avec 7% de part de marché ! (Prévisions OMT)
Au défi posé, on sait que les raisons, et donc les réponses, sont plurielles. La plupart des experts se retrouvent sur la nécessité d’agir au moins dans les 7 directions suivantes : 1. La séduction des touristes en transit (la position géographique
centrale de la France par rapport aux pays émetteurs de l’Europe de l’Ouest en fait un territoire de passage : 21,5% des visiteurs ne séjournent qu’1 seule nuit en France !)
2. Une meilleure structuration et qualité/labellisation de l’offre 3. Une meilleure organisation de la promotion (en particulier en
provenance des territoires) 4. Une recherche de désaisonnalisation vers une clientèle plus
internationale et de plus haut de gamme (il existe un glissement actuel vers des nationalités moins « dépensières »)
5. L’augmentation de la durée du séjour (le touriste qui visite l’Espagne reste en moyenne 13 jours, alors que le touriste visitant la France ne séjourne qu’une semaine)
6. Le renforcement du tourisme d’affaire et du tourisme événementiel (dont les retombées sont considérables en comparaison du tourisme de loisir).
7. Le développement et la valorisation d’un tourisme de plus haut de gamme positionnant la France sur la qualité, dans lequel la diversité des cultures et des identités territoriales va naturellement constituer une carte maîtresse face à la concurrence.
5) Une relation parfois délicate entre tourisme et environnement
De masse, le tourisme peut occasionner des dégâts irréversibles à l’environnement et au patrimoine culturel. Certaines destinations, connaissant un fort succès touristique, pâtissent du surpeuplement, de la pollution et de la surexploitation, victimes de leur propre succès. Cette situation est renforcée en France par une extrême concentration des flux dans l’espace et dans le temps.
22
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Trop de tourisme tue le tourisme et peut amener parfois des réactions de rejet que nous aurions tort de sous-estimer.
Cela oblige les destinations à s’interroger sur la mission et sur le rôle du tourisme, dans le sens du « tourisme durable ». Celui-ci passera par une inversion des critères, de celui du nombre de visiteurs à ceux de viabilité économique et de gestion équilibrée des ressources, dans l’esprit du Code mondial d’éthique du tourisme élaboré par l’OMT. Elle passera parallèlement par une approche plus qualitative et plus citoyenne du tourisme, mettant l’habitant au centre de la politique et des enjeux touristiques.
6) Une industrie quasi lourde Il nous semble utile de rappeler ici, pour terminer cette présentation synthétique du tourisme français, que le tourisme est une industrie quasi lourde parce que l’investissement en équipement directs (hébergements, espaces de loisirs..) et indirects (infrastructures, équipements de transports…) y est important. Elle est d’autant plus lourde, d’ailleurs, qu’il s’agit de tourisme industrialisé (de masse) et qu’il doit fonctionner toute l’année. En dehors des grandes villes et des zones touristiques en grande partie désaisonnalisées, sa rentabilité est faible, longtemps aléatoire même, car ne se dégageant, souvent, qu’au terme de la période de remboursement des emprunts souscrits. Une étude de juin 2002 de la Caisse des Dépôts et Consignations pour la Direction du Tourisme montre que les investissements touristiques dépassent en volume ceux de l’ensemble des industries de consommation. C’est pourquoi le développement de ce secteur sur le territoire, au-delà de son impact transversal diversifié, demande une forte planification dans le temps et dans l’espace et une implication importante des pouvoirs publics. Cela oblige aussi, plus que dans d’autres secteurs, à une proximité très grande entre les privés et le public.
2. Le tourisme des territoires
1) Une réalité économique et financière puissante
Hors Paris, le tourisme des territoires concerne 56,5 millions de visiteurs, qui y dépensent 14 milliards d’euros par an. Les emplois salariés touristiques (chiffres 1999) sont plus de 610 000. Auxquels il faut ajouter les salariés touristiques territoriaux qui sont plus de 12 000. Le produit de la taxe de séjour et de la taxe forfaitaire perçues en 2000 s’élève à 80,3 millions d’euros, hors Île-de-France (26,2 millions).
23
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
De la part de l’État, les territoires reçoivent 203,8 millions d’euros pour la période 2000-2006, soit 34 millions par an au titre de l’enveloppe tourisme des CPER (Contrats de Plans État-Régions) et 179 millions d’euros au titre de la Dotation aux Communes Touristiques, qui est destinée à compenser les charges résultant de l’afflux saisonnier de populations, et est intégrée à la Dotation Globale de Fonctionnement (DGF). Les budgets cumulés des Conseils Généraux consacrés au tourisme sont de 341,6 millions d’euros (source ADF). Les aides économiques au tourisme accordées par les Collectivités s’élèvent à 212 millions d'euros en 2000, dont 116 millions par les départements, qui sont les plus gros contributeurs. Ce montant représente 9% du total des aides attribuées, en progression de 71,4% par rapport à 1999. Ces chiffres montrent que les territoires hors la ville de Paris sont la principale destination des visiteurs (près de 74 %), que les emplois salariés touristiques y représentent 90 % de ceux de l’ensemble du tourisme français et que l’effort des collectivités y est important, en forte croissance chaque année. A titre de repère, les seuls budgets des CRT et des CDT représentent, ensemble, 231,5 millions d’euros, soit 3 fois le budget national du tourisme !
2) La richesse de la France est dans ses territoires La France est probablement l’un des pays au monde qui offre la plus grande diversité de ressources naturelles et culturelles dans ses territoires. C’est, en réalité, un cas unique : on peut la comparer, sur le plan touristique, à une petite Europe regroupant des pays aux cultures très diverses, mais avec quelques racines communes.
Paris, capitale, y occupe une place de choix, une place essentielle dans la réussite de l’ensemble du tourisme français. À elle seule, la « ville lumière » reçoit en effet 20 millions de touristes par an. Le tourisme y emploie 10 % des salariés de l’ensemble du secteur et génère 50 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Cette attractivité s’explique par un cumul de plusieurs facteurs : • Paris possède 6 des 10 sites les plus visités d’Europe, • Paris dispose de la plus grande capacité d’hébergement d’Europe (près
de 75 000 chambres), • Paris propose une offre culturelle à la fois diversifiée et de grande
qualité. Paris est aussi une des premières destinations mondiales pour l’accueil du tourisme d’affaires. La ville se classe d’ailleurs au 1er rang des villes mondiales de congrès internationaux (critères : + 300 participants, + 3 jours) avec 229 réunions, soit 15,2 % du marché mondial. Enfin, Paris sert souvent de plate-forme et d’escale pour les visiteurs avant de se rendre en province.
24
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Quant aux autres territoires français, ils sont multiples. Au plan touristique, il y a des villes et des agglomérations, des espaces géographiques et des espaces « culturels », dont la délimitation correspond au découpage administratif ou non. Leur identité est plus ou moins forte, plus ou moins vivante, selon le nombre d’attributs qui les portent : langue, musique, gastronomie, architecture, histoire, mémoire, tradition, savoir-faire, mode de vie, environnement, etc… Certains sont de véritables régions (Bretagne, Bourgogne..), d’autres de tout petits pays (comme le comté de Nice avec le « Nissarte »). Il y a aussi ceux qui n’ont ni identité particulière, ni site ou monument remarquable. Ou, peut-être, devrions nous dire « qui n’ont pas encore trouvé le moyen de revendiquer une identité »… tant il est rare de trouver un territoire qui ne possède des atouts « touristiquables », qu’ils soient culturels ou naturels. Certains des territoires français sont connus dans le monde entier, comme les Alpes, la Riviera/Côte d’Azur, la Provence, la Bretagne… mais aussi comme Cannes, Nice, St Tropez, Deauville, Chamonix, St Paul-de-Vence… ou comme le Mont St Michel, St Émilion, le château de Versailles, les châteaux de la Loire, les Hospices de Beaune…. Les autres ne sont connus que des régions voisines et/ou proches. Comme on le voit, l’identité n’est pas toujours constitutive de notoriété, mais elle y contribue, en particulier sur les clientèles françaises. Quant à l’étendue de ces territoires, là encore, la diversité est la règle. Ils peuvent couvrir ou bien une partie d’un département (comme la Côte d’Opale, la petite Camargue), ou bien une partie d’une région, à cheval sur plusieurs départements (Le Berry, le Querçy, le Rouergue ou le Verdon par exemple) ou bien plusieurs départements ou régions (comme le Val-de- Loire), voire de pays (Flandre, Pays Basque, Catalogne). Sans compter les nouveaux territoires d’intérêt et de promotion comme l’Arc Atlantique ou le Grand Ouest, même si ces derniers ne correspondent pas forcément à des territoires identitaires cohérents au plan touristique comme on le verra plus loin.
C’est précisément le nombre et la nature de ces « territoires » qui, pour les clients (et pour les habitants eux-mêmes), constituent la richesse incroyable et la spécificité de l’offre touristique française, et qui la rendent unique au monde. Ils correspondent parfois à un découpage administratif (généralement Département ou Région), mais, le plus souvent, à un regroupement de territoires sans aucun lien administratif entre eux (à l’exception des communes lorsqu’il s’agit de ville ou d’agglomération). On touche là un des problèmes clés de la complexité et de la difficulté de l’organisation de la promotion touristique des territoires.
25
3) Des acteurs publics très diversifiés et de toutes natures
Le tourisme des territoires se caractérise par un très grand nombre d’acteurs publics et institutionnels, élus et techniciens, intervenant à titre principal ou accessoire. a) Les intervenants majeurs
: L’État Délégations Régionales au Tourisme DRT Mais aussi les organismes touristiques AFIT, ONT, Maison de la France, Conseil national villes et villages fleuris…
Les collectivités locales Les Conseils Régionaux, Conseils Généraux et les Communes Leurs services internes de tourisme Leurs organismes conventionnés : CRT, CDT, OT
Les EPCI (Établissements Publics de Coopération Intercommunale)
à compétence tourisme : Les Communautés d’Agglomération, Communautés Urbaines, SAN (Syndicats d’Agglomération Nouvelle), Communautés de Communes, pays (économiques), SIVU, SIVOM et autres syndicats intercommunaux, pôles et pays touristiques (PAT), bassins, etc Leurs chargés de tourisme et/ou de développement Leurs organismes conventionnés : OT
Divers organismes plus ou moins paritaires, entités chargées du
développement et/ou de la promotion des territoires : Agences de développement touristique, Missions, Commissariat de massifs, Maisons du tourisme, etc.. mais aussi les Maisons de Province à Paris, SLA etc.
b) Les intervenants ponctuels
D’autres acteurs publics et para-publics sont concernés par le tourisme même si leurs interventions restent généralement plus limitées : • Espaces de décision relevant du préfet : CRAT, CDAT, • Les SEML (Sociétés d’Économie Mixte Locales) de gestion et/ou
d’aménagement, • Les agences de développement économique des régions,
département ou communes, • Les services déconcentrés de l’État (DRAC, DRIRE, DRE, DRAF,
DIREN….), • Les services territoriaux chargés du Développement Économique, de
la Culture, des Services, des Transports et des Infrastructures, • Diverses structures : PNR (Parcs Naturels Régionaux), VNF (Voies
Navigables de France), ONF, CAUE, Fédérations sportives…. • Les chambres consulaires : commerce et industrie (CCI), artisanat
(Métiers) et agriculture avec leurs services tourisme et/ou services développement,
26
• Les organismes représentant les collectivités (ARF, ADF), les intercommunalités (ADCF) et leurs satellites (FNCRT, FNCDT, FNOTSI).
Cette formidable diversité d’intervenants, qui confirme la place particulière du secteur touristique, s’explique, bien sûr, par le caractère transversal de son activité, mais aussi par les enjeux qu’il soulève dans les territoires.
4) Le tourisme : levier incontournable du développement local
Même s’il connaît des variations saisonnières de forte amplitude, le tourisme fournit aux territoires un apport non seulement exceptionnel, mais surtout irremplaçable. En effet, il génère un grand nombre d’emplois, en particulier pour les
groupes les plus vulnérables de la société, notamment les jeunes et les personnes peu qualifiées,
il rééquilibre le territoire en permettant la création d’activités dans les régions moins développées et/ou périphériques. Ex. territoires insulaires, régions rurales ou de montagne fragiles…
il maintient des activités et contribue ainsi à fournir une alternative au déclin des activités économiques traditionnelles
il rend possible des milliers de projets culturels, de loisirs et d’animation locale en contribuant d’une façon décisive à leur équilibre financier
il peut participer à l’embellissement de l’environnement paysager et architectural
il améliore l’habitat et la qualité des services de proximité il valorise le patrimoine privé et public il favorise la création de richesse et fait vivre la culture ,Et bien sûr, son rôle social, et éducatif est considérable car
comme évoqué plus haut, il permet aux habitants de tous les territoires de progresser en s’ouvrant sur le monde et les autres.
En conclusion, associé à d’autres activités économiques, il permet donc de :
a) créer des emplois b) préserver le tissu social, en :
contribuant à maintenir une agriculture traditionnelle liée à la conservation du paysage
permettant la survie et l’épanouissement des productions culturelles et artisanales traditionnelles ainsi que du folklore (au lieu de leur standardisation et de leur appauvrissement).
faisant revivre, parfois, des traditions et des savoir-faire locaux
c) dégager des fonds pour la préservation et la restauration du patrimoine architectural, les ressources tirées de la fréquentation des sites et monuments culturels ayant vocation, au moins partiellement, à
27
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
être utilisées pour l’entretien, la sauvegarde, la valorisation et l’enrichissement de ce patrimoine
d) faire progresser les hommes en les aidant à s’ouvrir aux autres et au monde extérieur
5) Une organisation territoriale définie par la loi, mais pas toujours
appliquée de manière identique
En théorie, l’organisation est simple, réglée principalement par la loi; en réalité, elle est complexe et très diversifiée, car chaque territoire constitue un cas d’espèce en termes d’organisation et de priorités. a/ Une organisation théorique simple
Six articles principaux de la loi n° 92-1341 du 23/12/92 en fixent le cadre général (voir annexe 1) La loi fixe 3 niveaux d’intervention (Région, Département et Commune) où chacun « conduit sa propre politique » en cohérence avec les autres, mais est « associé à la mise en œuvre de la politique nationale » (qui, de fait, correspond à un 4ème niveau). De manière simplifiée, ,la Région définit les objectifs à moyen terme de développement
avec un CRT centré sur la promotion internationale, la création de filières et l'observation,
le Département aménage et tient compte des orientations du Conseil Régional, avec un CDT qui met en oeuvre la politique départementale et qui s’occupe de l’élaboration, de la promotion et de la commercialisation de produits touristiques,
la commune confie à l'Office de Tourisme les missions d'accueil et d'information.
En revanche, toutes les structures peuvent promouvoir leur destination, le CRT et le CDT devant se coordonner à l’international. Le tout, organisé autour de conventions qui « fixent les actions et les modalités de mise en œuvre entre collectivités locales ».
b/ Une réalité complexe et différente d’un territoire à l’autre La réalité sur le terrain après 10 ans de décentralisation est à la fois semblable et différente d’un territoire à l’autre. Semblable, parce que la loi a permis de mettre en place et de faire fonctionner les différents niveaux malgré et en fonction de la diversité des situations. Et différente, parce que chaque niveau définit des objectifs à moyen terme, que les répartitions de mission varient d’un territoire à l’autre et que des schémas de développement ont été mis en place par chaque territoire sans que la coopération et la cohérence entre niveaux ne soit toujours au rendez-vous. Une démarche nationale impulsée dès 1994 par la FNCDT a incité chaque Département à élaborer un schéma départemental de développement touristique, de sorte qu’ils en ont tous un aujourd’hui.
28
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
De fait, les Conseils Généraux, plus proches du terrain et plus sensibilisés au tourisme, ont défini très rapidement des schémas de développement touristique, en concertation avec les acteurs, complétés par des plans marketing opérationnels. L’élaboration plus tardive des schémas régionaux, dans bien des cas, a rendu difficile la coordination entre les schémas imaginée par le législateur. Et cela malgré la qualité de la loi. Autrement dit, 1/ Certains aspects de la loi n’ont pas été appliqués. Ainsi, - toutes les Régions n’ont pas encore de schémas de développement
touristique - les schémas régionaux existants ne traitent pas tous des loisirs alors
que c’est inscrit dans la loi - les Départements ont, tous, élaboré des schémas, mais il s’agit plus
souvent de schémas de développement que d’aménagement contrairement à ce qu’indiquait la loi
- la coopération et la coordination entre les niveaux auxquelles incitait la loi ne sont pas toujours organisées sur le terrain.
2/ Si la souplesse de la loi sert, effectivement, la réalité diverse du tourisme des territoires, son manque de précisions, en particulier concernant les relations entre les différents niveaux entre eux, dessert l’efficacité de son organisation. Si bien que nous sommes aujourd’hui face à des situations très diverses selon les territoires, situations dont les deux raisons précédentes ne sont pas les seules responsables. En effet, une autre raison majeure, sur laquelle nous aurons l’occasion de revenir tant elle est essentielle pour l’avenir, tient à l’identité de chaque territoire et à la volonté des responsables –perçue parfois comme une obligation- de promouvoir un territoire « administratif » plutôt que « touristique ». Enfin, une dernière raison est due au fait que les CRT, CDT et OT ont, autour d’eux, d’autres organismes qui interviennent, ponctuellement ou non, dans le tourisme et qui, eux-mêmes, ne sont pas identiques d’un département à l’autre dans leurs missions, leurs organisations ou leurs actions. Pour toutes ces raisons, qui viennent s’ajouter aux différences de ressources touristiques des territoires et de moyens financiers, techniques, logistiques et humains, aux priorités et aux orientations politiques de chaque niveau administratif, au nombre d’intervenants institutionnels mis en place, aux champs d’intervention, aux missions, et aux statuts attribués à chacun d’eux, aucune organisation territoriale n’est aujourd’hui tout à fait la même d’une région à l’autre, ni dans la même région, ni entre deux régions, même à niveau comparable.
29
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Chacune est l’expression de l’environnement et de la stratégie de développement territorial des collectivités, des élus qui les dirigent, mais est aussi, souvent, le reflet de leur mode de recherche de la plus grande efficacité possible. La coopération entre les 3 organismes épouse ainsi toutes les formules possibles (voir plus loin les relations avec les CDT) et, malheureusement, il est assez courant que les différents niveaux doublonnent, en particulier en matière d’information et de promotion en s’intéressant au même territoire, mais sur des supports et sous des identités/marques différentes. Cette complexité d’articulation avec, en particulier, un point d’orgue dans la promotion, non seulement se paie en interne (coûts supplémentaires, déperdition d’énergies), mais encore, souvent, en externe (qualité du service rendu). Ainsi en est-il des porteurs de projets qui doivent parfois effectuer un véritable parcours du combattant pour faire le tour des aides et des enveloppes financières propres à chaque niveau.
6) Des disparités très importantes Les territoires français sont connus pour être parmi les plus inégaux de toute l’Europe. Le déploiement du tourisme sur le territoire ne fait pas exception puisque 20% des territoires accueille 80% du tourisme. Il n’y a égalité ni dans les atouts, ni dans les moyens. Certains sont gâtés, comme la Côte d’Azur, d’autres beaucoup moins. La « french riviera » reçoit, en effet, 10 millions de touristes (dont 1,5 millions de touristes d’affaires par an), qui représentent 72 millions de nuitées hôtelières, un chiffre d’affaires touristique de 5 milliards d’euros et 64 000 emplois directs et indirects. En ce qui concerne les moyens affectés au tourisme, la disparité entre les Régions est très forte également. Sur un total annuel de 94,3 millions d’euros (chiffre 2001), le budget annuel de promotion de chaque CRT, par exemple, va de 1,5 million à 8 millions d’euros.
7) Les CDT, force tranquille et protéiforme
a. Ils disposent d’une grande force de frappe Regroupés au sein de la FNCDT, les CDT représentent une force de 97 membres adhérents, dont 4 départements d’Outre mer, soit 1900 salariés et un budget cumulé de l’ordre de 174 millions d’euros, dont 55 millions environs consacrés à la promotion.
Chaque CDT emploie 15 personnes en moyenne et dispose d’un budget moyen de 1,7 millions d’euros, son budget Promotion représentant environ 1/3 du budget de fonctionnement,
30
Livre Blanc – Tourisme et Territoires - FNCDT
Toutefois, ce calcul par moyenne occulte la forte hétérogénéité de taille entre les CDT. Il existe, en effet, un écart de 1