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LUIS GRAÑENA JEAN-MICHEL SICOT LES FRANÇAIS TRAVAILLENT MOINS QUE LES ALLEMANDS? C’EST VITE DIT… PAGE 19 PAGES 2-4 Tunisie, le premier anniversaire de la liberté REPORTAGE Le parallèle est saisissant. Le 14 janvier 2011, devant le ministère de l’Intérieur, une foule en colère criait «dégage !» à Ben Ali. Mercredi, 2000 à 3000 personnes se sont à nouveau réunies devant le sinistre bâtiment. Pour, cette fois, acclamer le nou- veau patron des lieux, Ali Larayedh, qui a passé quinze années en prison. «Le peuple est avec le mi- nistre de l’Intérieur», «le peuple veut la purification du ministère», ont chanté les manifestants, des par- tisans d’Ennahda pour beaucoup. Juché sur une table, mégaphone à la main, le ministre s’est adressé à la foule : «Nous œuvrons pour instaurer une sécurité républicaine qui ne sera au service d’aucune mouvance politique ni de personnes mais plutôt au service de l’intérêt public.» PAGES 6-7 2012, riche en vendredis 13 Jour béni (ou maudit) des superstitieux, le vendredi 13 se représentera en avril et en juillet en plus d’aujourd’hui. Un triplé pas si fréquent. PAGES 26-27 Selon nos informations, le Président s’apprêterait à inscrire le mariage homosexuel dans son programme de campagne. Mariage gay Sarkozy tenté par le oui Freeboxon dans le mobile Bouygues, Orange et SFR tentent de répondre aux offres à bas prix du nouvel opérateur, qui bouleversent tout le secteur. PAGES 16-17 1,50 EURO. PREMIÈRE ÉDITION N O 9540 VENDREDI 13 JANVIER 2012 WWW.LIBERATION.FR IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,20 €, Andorre 1,50 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,60 €, Canada 4,50 $, Danemark 26 Kr, DOM 2,30 €, Espagne 2,20 €, Etats-Unis 5$, Finlande 2,60 €, Grande-Bretagne 1,70 £, Grèce 2,60 €, Irlande 2,35 €, Israël 19 ILS, Italie 2,20 €, Luxembourg 1,60 €, Maroc 16 Dh, Norvège 26 Kr, Pays-Bas 2,20 €, Portugal (cont.) 2,30 €, Slovénie 2,60 €, Suède 23 Kr, Suisse 3 FS, TOM 410 CFP, Tunisie 2,20 DT, Zone CFA 1 900 CFA.

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LUIS

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LES FRANÇAIS TRAVAILLENT MOINSQUE LES ALLEMANDS? C’EST VITE DIT… PAGE 19

PAGES 2­4

Tunisie, le premieranniversaire de la libertéREPORTAGE Le parallèleest saisissant. Le 14 janvier2011, devant le ministèrede l’Intérieur, une foule encolère criait «dégage !» àBen Ali. Mercredi, 2000 à3000 personnes se sont ànouveau réunies devant lesinistre bâtiment. Pour,cette fois, acclamer le nou-

veau patron des lieux, AliLarayedh, qui a passéquinze années en prison.«Le peuple est avec le mi-nistre de l’Intérieur», «lepeuple veut la purificationdu ministère», ont chantéles manifestants, des par-tisans d’Ennahda pourbeaucoup. Juché sur une

table, mégaphone à lamain, le ministre s’estadressé à la foule : «Nousœuvrons pour instaurer unesécurité républicaine qui nesera au service d’aucunemouvance politique ni depersonnes mais plutôt auservice de l’intérêt public.»

PAGES 6­7

2012,riche envendredis 13Jour béni (ou maudit)des superstitieux,le vendredi 13 sereprésentera en avrilet en juillet en plusd’aujourd’hui. Un triplépas si fréquent.

PAGES 26­27

Selon nos informations, le Présidents’apprêterait à inscrire le mariage homosexueldans son programme de campagne.

MariagegaySarkozytentéparleoui

Freeboxondans lemobileBouygues, Orangeet SFR tentent derépondre aux offresà bas prix du nouvelopérateur,qui bouleversenttout le secteur.

PAGES 16­17

• 1,50 EURO. PREMIÈRE ÉDITION NO9540 VENDREDI 13 JANVIER 2012 WWW.LIBERATION.FR

IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 2,20 €, Andorre 1,50 €, Autriche 2,80 €, Belgique 1,60 €, Canada 4,50 $, Danemark 26 Kr, DOM 2,30 €, Espagne 2,20 €, Etats­Unis 5 $, Finlande 2,60 €, Grande­Bretagne 1,70 £, Grèce 2,60 €,Irlande 2,35 €, Israël 19 ILS, Italie 2,20 €, Luxembourg 1,60 €, Maroc 16 Dh, Norvège 26 Kr, Pays­Bas 2,20 €, Portugal (cont.) 2,30 €, Slovénie 2,60 €, Suède 23 Kr, Suisse 3 FS, TOM 410 CFP, Tunisie 2,20 DT, Zone CFA 1 900 CFA.

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Des couples mariés enCalifornie. En Europe,sept pays reconnaissentle mariage entre homosexuels.PHOTOS MARK RALSTON.AFPET JUSTIN SULLIVAN.AFP

Nicolas Sarkozy, qui est en train de définir son programme decampagne, devrait y inclure l’«union civile» pour les homosexuels.

Le mariage gay faitson chemin à l’ElyséeL a décision n’est pas encore

actée. Mais elle va l’êtretrès vite. Selon nos infor-mations, Nicolas Sarkozy

va réunir, dans quelques jours àl’Elysée, les principaux collabo-rateurs qui travaillent à son futurprogramme pour trancher la ques-tion du mariage gay. Or, pour tousceux qui ont évoqué le sujet avec luices dernières semaines, il ne faitguère de doute qu’il va y aller. «Sadécision est prise», confirment plu-sieurs députés du premier cercle.«Rien n’est encore fait. Sur ces sujetsde société, il se décide en fonction deson intime conviction, ajoute un pro-che conseiller du chef de l’Etat.Mais il a été toujours très ouvert surla question». Evidemment, l’Elyséerefuse de confirmer l’information.«Le Président ne peut pas avoir tran-ché quoi que soit puisqu’il n’est pas

encore candidat», sourit un autreconseiller. Il n’empêche que le dos-sier fait bien partie de tous ceux su-pervisés par Jean Castex, le secré-taire général adjoint de l’Elysée,chargé notamment des questionssociales. «Cela fait des semainesqu’il y travaille. Il est maintenant de-venu un vrai spécialiste», s’amuseun député de la majorité.Cette conversion au mariage ho-mosexuel de Nicolas Sarkozy n’en

est pas franchement une. Déjàen 2006, quelques mois avant ledébut de sa campagne officielle, lefutur président avait défendu l’idéed’un «contrat d’union civique» etenvisagé «l’organisation de cérémo-nies spécifiques et éventuellementdans les mairies» (Libération du3 novembre 2006). Mais devant ladivision de son camp, il avait battuen retraite. En charge de la rédac-tion du programme 2012 de l’UMP,

Bruno Le Maire a sciemment mis decôté tous les sujets sociétaux pourne pas raviver les divisions au seinde la majorité. «Le but c’étaitd’abord de nous rassembler, dit-onchez le ministre de l’Agriculture. Etde laisser la porte ouverte au chef del’Etat sur ces questions.»

TACTIQUE. Dans l’entourage de Ni-colas Sarkozy, les avantages et in-convénients du ma-riage homosexuelsont soupesés avecbeaucoup d’atten-tion. D’abord, l’opi-nion publique y estdevenue, en quel-ques années, trèsmajoritairement favorable. Etmême dans les rangs de la majorité,les lignes bougent très vite.«Aujourd’hui, environ 40% des élec-teurs de droite soutiennent la me-sure», assure Gaël Sliman, de l’ins-

titut BVA. Faire un pas sur ce terrainlabouré traditionnellement par lagauche n’est pas pour déplaire àSarkozy. C’est le retour de la fa-meuse triangulation (tactique quiconsiste à piquer un thème, desmots ou un symbole chers à son ad-versaire) qui avait fait une partie dusuccès de 2007. Or tous les élus quiont eu à échanger avec le Présidentsur sa future campagne sont con-vaincus qu’il se prépare à dupliquerla même stratégie. Le projet de fairevoter la taxe sur les transactions fi-nancières avant la fin du mois defévrier participe clairement du dis-positif.L’autre gros avantage du mariagegay, c’est qu’il ne coûte rien. «Enpériode de crise économique et socialeprofonde, nous devons faire des pro-positions assez fortes en matière delibertés publiques», admet un con-seiller de Nicolas Sarkozy. Or,comme en matière de sécurité etd’immigration, le Président sortants’apprête à assumer tout ou partiedu virage droitier de son ministrede l’Intérieur, Claude Guéant, il nereste plus beaucoup d’espace pourhumaniser un peu son image.Restent les inconvénients. Il va sans

dire que la nouvelle fera hurler unegrande partie de la Droite popu-laire, toujours prompte à monter aucréneau. Et donc réactivera la ma-chine à division. Mais, il y a politi-quement beaucoup plus grave. «Ce

Par GRÉGOIRE BISEAUL'ESSENTIEL

LE CONTEXTELe Président n’a pas encore tranché, mais selon nos informations,le mariage gay pourrait figurer dans son programme.

L'ENJEUEn adoptant une telle mesure, Nicolas Sarkozy pourrait braquerune partie de l’électorat traditionnel de la droite.

«En période de crise économiqueet sociale profonde, nous devonsfaire des propositions assez fortesen matière de libertés publiques.»Un conseiller de Nicolas Sarkozy

EN 1999, LE PACSLa première mouture du Pactecivil de solidarité est rejetée enoctobre 1998 par l’Assemblée enraison d’un nombre insuffisant dedéputés PS présent. Un nouveautexte est présenté puis définitive­ment adopté en octobre 1999.

REPÈRES MARIAGE GAY,CE QUE VEUT FAIRE LE PSPour le Parti socialiste, l’objectif est clair : «Pourassurer l’égalité des genres et des familles, nousouvrirons le droit au mariage et à l’adoption pourtous les couples», explique­t­il dans son programmeprésidentiel, sous la rubrique «Rassembler lesFrançais et retrouver la promesse républicaine».

Fin juin 2011, la gay pride étaitorganisée à Paris sur fondde revendication politique etde présidentielle à venir.Le slogan était «Pour l’égalité,en 2011, je marche, en 2012,je vote». A cette occasion,Libération du 25 juin consa­crait sa une au mariage gay

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 20122 • EVENEMENT

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Par VINCENT GIRET

Saugrenue

A l’Elysée, un conseillerdu prince désignepudiquement cette idée-làcomme un «sujet Libé»…On ne saurait bouder sonplaisir à voir ainsi l’esprit denotre quotidien soufflerdans des lieux aussiinattendus, ou mêmehostiles. Qu’importe que cethomme de l’ombre présageun peu vite qu’en matière demariage, vieille institutionbourgeoise, Libé secomporte en propagandistezélé… Mais voilà, la droite etson favori, poussés par unenouvelle génération d’élus,discutent de l’opportunitéde briser un sacré tabou :le mariage homosexuel.Le premier réflexe, aprèsl’effet de surprise, est devoir dans cette révolutionculturelle un nouvelavatar de la fameuse«triangulation», unestratégie politique dontNicolas Sarkozy s’est faitl’expert : reprendre à soncompte une proposition del’adversaire pour tenter decapter une clientèleélectorale. A supposer qu’ilexiste – hypothèse aussisaugrenue que surréaliste –un «vote homosexuel».Mais les promoteurs de cettevraie «rupture» ont sansdoute en tête unepréoccupation plushonorable : lareconnaissance d’unemutation de la société etla volonté de donner enfin lesigne tangible d’unemodernisation idéologiquede la droite. Car en matièrede mœurs, la vérité veut quela droite française figureencore parmi les plusconservatrices. En Espagne,pays catholique s’il en est,où affleure encore unmachisme tenace enpolitique, cette mesure a étéadoptée depuis belle luretteavec un large soutien dela population. A défaut derévolution, il serait plusapproprié de parler,pour la droite française,d’une remise à niveau, quine semble toujours pas allerde soi.

ÉDITORIAL

Depuis le Pacs, l’UMP a compris qu’elle devait changer.

A droite, une évolutionsous pression politiqueP asionaria anti-Pacs, Christine Boutin avait

englouti du miel et des pâtes pour tenir lecoup, dégainé sa Bible dans l’hémicycle, et

prononcé un réquisitoire de cinq heures contre letexte. C’était il y a plus d’une décennie, à l’Assem-blée nationale, lors du débat sur le Pacte civil desolidarité (Pacs) ouvert aux hétéros comme aux ho-mos. Dans les rangs de la droite on entendait :«C’est un retour à la barbarie» (Philippe de Villiers,MPF). «La nation n’a pas à encourager les déviances»(Bernard Accoyer, UMP). «Pourquoi pas avec desanimaux de compagnie ?» (François Vannson,UMP). Aujourd’hui, plus personne ne conteste cetteunion qui a séduit plus d’un million de personnes.Et Christine Boutin n’a pas rangé sa Bible, mais sespropos ont changé. Le ton aussi. «Aujourd’hui, il fautsurtout ne pas avoir l’air homophobe», soulignaitLouis-Georges Tin, président du comité Idaho, quiorganise chaque année la journée contre l’homo-phobie, la veille de la gay pride parisienne.Ringarde. En réponse à l’offensive d’une partie dela gauche – avec la célébration d’un mariage gayà Bègles par Noël Mamère en 2004– et pour ne pasavoir l’air trop ringarde, c’est même la droite quia amélioré certains aspects du Pacs et proposé delégiférer contre les propos homophobes.A Bercy, Nicolas Sarkozy, convaincu que son camps’était caricaturé lors du vote de la loi, aligne le ré-gime fiscal des pacsés sur celui des mariés. Dansla foulée, le Pacs explose. En 2007, candidat à laprésidentielle, Sarkozy dit reconnaître «l’amourhomosexuel» et fait quelques promesses de cam-pagne (comme une union civile réservée aux ho-mos) abandonnées depuis. Mais il continue à aimerse voir en briseur de tabou.

En juin dernier, à l’Assemblée, nouveau débat. Al’initiative du PS, l’ouverture du mariage civil auxcouples de même sexe est examinée en séance.Dans le calme. Les ténors de droite les plus viru-lents se font discrets alors que le gouvernement,par la voix du garde des Sceaux, Michel Mercier,rappelle que le mariage est «une institution», «unsymbole social».«Interpelle». Le texte est repoussé, sans surprise.Mais la proposition de gauche est soutenue par dixmembres de la majorité, dont le président du Partiradical, Jean-Louis Borloo, et ses lieutenants, Lau-rent Hénart et Yves Jégo, ainsi que Jean-ChristopheLagarde (Nouveau Centre). Franck Riester, 37 ans,député UMP de Seine-et-Marne est l’un d’eux: «Lasociété évolue, les députés doivent le percevoir, ça lesinterpelle ; ma position n’est pas majoritaire, mais j’aitoute liberté pour la défendre», confie-t-il le jour duvote. Roselyne Bachelot, ministre de la Cohésionsociale, se montre même convaincue: «Un jour, lemariage entre personnes du même sexe existera dansnotre pays.» Aujourd’hui, Chantal Jouanno, Jean-nette Bougrab ont fait leur coming out en faveurdu mariage gay. Tout comme Nadine Morano,porte-voix gay friendly de Sarkozy. Dominique deVillepin pense aussi que «nous devons évoluer».Le mariage s’est ouvert aux couples de même sexeaux Pays-Bas, en Belgique, en Espagne, en Nor-vège, en Suède, au Portugal, en Islande… A l’ex-ception de la Suède, ces pays étaient alors dirigéspar la gauche. Mais des députés de droite ont euxaussi voté pour le mariage homo. En France, ladroite et Nicolas Sarkozy ne peuvent ignorerqu’une grosse majorité de Français y est favorable.

CHARLOTTE ROTMAN

genre de mesure peut braquer com-plètement une partie de notre électo-rat, glisse un conseiller du Château.Même s’ils sont peu nombreux, onrisque de ne plus les revoir.» Et derejoindre demain le FN. Comme lefutur candidat est tout juste entrain de consolider son socle depremier tour, cette fuite serait pourle moins dangereuse. «Le risqueserait d’en faire un sujet majeur ; lesclasses populaires touchées par lacrise ne le comprendraient pas»,poursuit ce conseiller, qui en parlecomme un sujet typiquement«gauche Libé».

«ÉGALITÉ». Pure coïncidence,Benoist Apparu, le ministre du Lo-gement, et une dizaine de ses amisquarantenaires de la majorité ontrévélé hier un premier recueilnumérique de propositions(Chapitre2012.fr). Députée de laSeine-Maritime et secrétaire natio-nale de l’UMP chargée de l’Ensei-gnement supérieur, Françoise Gué-got y défend justement «l’Unioncivile», qui s’adresserait au couplede même sexe, et qui serait «offi-cialisée en mairie, comme le mariageet entraînerait une égalité fiscale, so-ciale et patrimoniale totale». Exacte-ment ce que proposait Sarkozy en2006. «Mais attention, cela n’engageque moi», dit Guégot, qui ditn’avoir jamais évoqué le sujet avecle chef de l’Etat. Mais à l’Elysée, onest parfaitement au clair sur cetteunion civile. «Elle peut poser unproblème constitutionnel, expliqueun conseiller, puisque cela revien-drait à réserver à certains citoyensune disposition législative précise.»Le signe, en tout cas, que tout estfin prêt pour le passage à l’acte.•

AP

«Un jour, le mariageentre personnesdu même sexe existeradans notre pays.»Roselyne Bachelotministre des Solidarités

AFP

«La société évolue […];ma position n’est pasmajoritaire, maisj’ai toute liberté pourla défendre.»Franck Riester député (UMP)de Seine­et­Marne

AFP

«Je crois que nousdevons reconnaîtreque le mariage […]peut être noué […]entre deux personnesde même sexe.»Dominique de Villepinancien Premier ministre

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 • 3

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Au-delà du mariage,c’est le droit à adopteret à exercer uneautorité parentaleconjointe qui compte.

L’adoption,l’ultimecrispation

J usqu’où iront les élus UMP ? S’ilsévoluent (lentement) sur la questiondu mariage gay, du moins dans sa

version édulcorée d’union civile, ils res-tent dans leur immense majoritéréfractaires à l’idée d’autoriser l’adop-tion par des couples homosexuels. Ouà faciliter la filiation des parents homo-sexuels. Le verrou semble loin de sauter.Parent légal. Et pourtant, il existe uneforte demande en ce sens. En France,l’adoption par des couples de mêmesexe – ou le recours à la procréationmédicalement assistée– reste interdite.Du coup, de 40 000 à 100 000 familleshomoparentales peinent à se faire re-connaître comme «vraies» familles.Adoptés en célibataire, conçus en copa-rentalité, issus d’insémination artifi-cielle ou d’un recours à une mère por-teuse, les enfants n’ont, aux yeux de laloi, qu’un seul parent légal.Un fort courant conservateur, au seinde la droite, va même à contre-courantde l’évolution des mœurs, et voudraitrevenir sur la possibilité pour un céliba-taire (homo ou hétéro) d’adopter un en-fant, un droit pourtant ouvert depuis…1966! C’est le cas de Christine Boutin,présidente du Parti chrétien-démo-crate, qui demande explicitement l’in-terdiction de l’adoption par une per-sonne célibataire. Beaucoup, à l’UMP,ne sont pas loin de penser comme elle.«Avoir deux parents de sexe différent estun bien élémentaire de l’enfant», écriventles députés Hervé Mariton et AnneGrommerch, dans un récent rapportparlementaire sur la famille. Autrementdit, l’adoption par une personne céliba-taire doit rester l’exception. Et, si unenfant peut être adopté par un coupleou par un célibataire, la priorité doitêtre donnée au couple.Monnaie courante. Preuve que les es-prits restent crispés lorsqu’on aborde lesujet, 23 députés de la majorité ont dé-noncé, à la mi-décembre, la récente dé-cision du parquet de Bayonne de recon-naître une autorité parentale conjointeà un couple homosexuel. C’est une «unerégression des droits de l’enfant», ont-ilsestimé. Les signataires ont exigé du mi-nistre de la Justice, Michel Mercier,«qu’il réaffirme clairement l’interdictiond’adopter en France pour les couples demême sexe».Aux Etats-Unis, le débat se déroule àfronts renversés : l’adoption par lescouples homosexuels est monnaie cou-rante et ne choque plus grand monde,tandis que le mariage gay n’est autoriséque dans six Etats et rencontre encoreune forte résistance dans les milieuxconservateurs.

É.L.

Pour Didier Lestrade, fondateur d’Act Up, la droitisation des homosexuelsest le fait d’une génération devenue plus individualiste et moins militante.

Les gays virent-ils à droite?I l y va fort, c’est son tempé-

rament. «Nous connaissonsun changement sans précé-

dent: les années 2000 voientl’instrumentalisation de la causeLGBT [lesbiennes, gays, bi,trans, ndlr] contre d’autres mi-norités. Les gays contre lesArabes et les Noirs. C’est la pre-mière fois que cela arrive dansl’histoire gay.» La charge setrouve page 59 de Pourquoiles gays sont passés à droite (1), lenouveau livre de Didier Les-trade. La démonstration estteintée de colère et de provoca-tion. Du succès de Marine LePen à celui de Caroline Fourest,Didier Lestrade relève les symp-tômes d’une «droitisation du mi-lieu gay». Et raconte l’appari-tion d’un «homonationalisme».«Raciste». Son analyse, «écriteau feeling mais argumentée»,confie-t-il, va déranger. «Alorsque les gays de ma génération ontgrandi avec l’espoir de voir l’ho-mosexualité rassembler leshommes et les femmes de toutesles origines […], le “choc des ci-vilisations”, concept importé desEtats-Unis, et l’idée de la “fin dumulticulturalisme à l’euro-péenne” ont libéré une paroleraciste chez les gays.»Didier Lestrade, 53 ans, est un

moraliste. Chroniqueur musical,fondateur d’Act up, en 1999, sé-ropositif, écrivain, devenu un«guide spirituel» de la «commu-nauté», avant de s’aliéner unepartie des gays en dénonçant lerelapse et la baise sans préser-vatifs, il a l’impression que sondevoir est «d’offriraux autres quelquesrepères historiques».Dans son essai, Di-dier Lestrade retracela montée en puis-sance en Europed’une «nouvelle formed’extrême droite, qui réussit letour de force d’être tout à la foisxénophobe et pro-gay». PimFortuyn aux Pays-Bas, néopo-puliste et homo, puis GeertWilders en ont été l’avant-

garde. A sa manière, Marine LePen joue sur les mêmes cordes.Elle «drague» les gays. Leur«fait de l’œil pour les attirersur le terrain de la critique de l’is-lam». Extrait d’un discours de

la candidate FN (à Lyon, en dé-cembre 2010) : «J’entends deplus en plus de témoignages sur lefait que dans certains quartiers,il ne fait pas bon être femme, nihomosexuel, ni juif, ni mêmefrançais ou blanc.» Tout en res-tant hostile au mariage homo,

elle se modernise.«Le résultat est là,relève Lestrade, leshomosexuels sedécomplexent face auFront national car leFN s’est décomplexéface aux gays.»

Attention, prévient-il, «le nou-veau gay d’extrême droite nes’habille pas forcément d’unemanière paramilitaire», iln’aurait «jamais» rejoint Jean-Marie Le Pen mais sa fille, «no

problemo».Pour Lestrade,«les gays et les-biens farouchementanticléricaux et li-bertaires font frontcommun avec leslaïcs les plus durs

et se mettent à défendre sanscomplexe l’Occident libéral etses valeurs face à l’intégrismemusulman». Ce nouveau front«rassemble une nouvelle généra-tion de gays et lesbiennes qui n’a

jamais été intéressée par la luttecontre le sida» et a abandonné«l’idée politique communau-taire».Consumérisme. En 2007, ausoir de l’élection présidentielle,au Cox, bar couru du Maraisgay, on célèbre la victoire deSarkozy sur «la folle» Ségolène.«C’est le genre d’ambiance quimarque une communauté», écritLestrade.Bien sûr, l’activiste de gauchele reconnaît lui-même, il y atoujours eu et il y aura toujoursdes gays de droite. Mais il dé-nonce une élite gay planquéedans des placards dorés, obsé-dée «par ses privilèges, son pres-tige, son argent». Et symptoma-tique de «l’individualisme etdu consumérisme forcenés quigagnent peu à peu la commu-nauté». De toute façon, regret-te-il avec fracas, «s’engager estdevenu ringard». Pour lui, «laréapparition d’une homosexualitéde droite est très clairementassociée à ce refus catégorique ducoming out». Il le déplore: «Ona cessé de penser que le fait des’affirmer en tant qu’homosexuelétait le moteur du changement etde la pensée gay.»

CHARLOTTE ROTMAN(1) A paraître début février (Seuil).

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Dans le Marais, à Paris, certains homosexuels ne verraient dansun mariage gay version UMP qu’une tentative de séduction électoraliste.

«Sarkozy redorerait son image»A u cœur du très gay Marais, à Paris,

voici l’Open Café: plafond envahi deboules à facettes, musique house en

fond sonore. De grands écrans vantent dessoirées pectoraux. De jeunes serveurs, lescheveux hérissés, tee-shirt près du corps,s’activent. William, 36 ans, doudoune etjeans, connaît au moins cinq personnes deson entourage qui voteront pour Marine LePen. Avant, ils soutenaient la gauche parcequ’elle portait des «revendications contrel’ordre établi». Aujourd’hui, êtregay est plus banal. «En 2007,j’ai voté Nicolas Sarkozy auxdeux tours, mais il nous a bien entubés : pluscomme citoyen qu’en tant qu’homosexuels»explique William. Malik, 20 ans, encarté àl’UMP et «pédé comme un phoque», croitsavoir que «les homos aiment la thune et sontdes fils à papa. D’ailleurs, l’UMP est un partioù il y a plein d’homos».«Bobo». A la table voisine, Emmanuel,50 ans chef d’entreprise marseillais, cabanet cheveux grisonnants, émarge au Modem,après un passage par le PS, où Mitterrand l’a«libéré» : la dépénalisation des relationssexuelles a constitué, à ses yeux, un «signalfort pour la communauté».

Ce patron considère qu’avant, être gay était«très bobo, gauche caviar» alorsqu’aujourd’hui, une partie de la commu-nauté, «très arriviste», veut à tout prixréussir, être dans le business.«Sur le plan électoral, on exagère la cohérencede cette communauté. Il n’y a pas de spécificitédu vote gay, estime David Valence, homo-sexuel, professeur d’histoire à Sciences-Poet responsable vosgien du Parti Radical. SiSarkozy propose le mariage gay, il ne récupé-

rera rien en nombre de voix. En re-vanche, il redorera son image.»Stéphane Dassé fait le même

constat. «On ne vote pas en fonction de sonorientation sexuelle.» Mais pour ce militantUMP, «quand vous vous prenez dans les gen-cives des agressions répétitives de la part dela Droite populaire, vous en prenez acte».Pour Jérôme Beaugé, porte-parole d’un col-lectif luttant contre l’homophobie au tra-vail, les gays sont comme les autres, ni plusni moins: «Il y a très peu d’espoir, à gaucheou à droite de nous faire sortir d’une crise mon-diale. Les gays sont prêts à tout, y compris àse porter sur des votes extrêmes». GuillaumeDefraiteur, 19 ans, étudiant à Sciences-Po,originaire d’une famille de droite «au cou-

rant» de son homosexualité, s’estime «pro-fondément libéral et opposé à l’intervention del’Etat dans la société». Selon lui, l’accepta-tion de la différence dépend «des personnes,pas des convictions politiques». NicolasSarkozy a été «ouvert, progressiste, réforma-teur. Il a compris que l’homosexualité n’étaitni de gauche ni de droite». Pour autant, il nepense pas que cette proposition «rapprochela communauté gay de Nicolas Sarkozy», lagauche proposant aussi le mariage homo-sexuel dans son programme. «Cela va plutôtle couper d’électeurs de droite fondamentale-ment opposés à cette proposition. Il va perdredes voix.» Et puis, pour Guillaume, ça de-vient de plus en plus facile d’être «juste gay,comme tout le monde, libre, sans s’inscriredans un groupe pour se défendre».«Dupes». Emmanuel Blanc, président deGay Lib, mouvement associé à l’UMP, enreste persuadé. «En l’absence de propositionforte à droite, les gens n’accorderont pas leurvote». Pour Frédérique, 59 ans, cadre de lafonction publique, les électeurs ne sont pas«dupes» : ce mariage finira au cimetièredes «promesses non tenues».

DIDIER ARNAUD, MARGAUX LANNUZELet ELSA SABADO

«La réapparition d’unehomosexualité de droite est trèsclairement associée à un refuscatégorique du coming out.»Didier Lestrade

REPORTAGE

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 20124 • EVENEMENT

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Quotient familial : les exemplestrop partiels des ministres

«J’ai pris l’exempled’un couple quigagne 3500 eurospar mois. Il paie1275euros d’impôt.Il a deux enfants. Sil’on suit laproposition du Partisocialiste […], ilpaiera désormais2614 euros d’impôt,soit 1400 euros deplus –100% d’impôtde plus!»Valérie Pécresse mercredi,à l’Assemblée nationale

A près une journée dematraquage contre laréforme du quotient

familial, la majorité a tentémercredi de passer à la phasepédagogie. Et les ministresont donc dégainé leursexemples pour montrer àquel point le projet socialisteest «dangereux». Sur FranceInfo, le matin, c’est NadineMorano, ministre de l’Ap-prentissage, qui a sorti sa fi-che : «Pour une famillede professeurs certifiés ga-gnant chacun 2 240 euros

bruts de salaireet 330 eurosd’heures sup-

plémentaires – parce queFrançois Hollande veut aussisupprimer les heures supplé-mentaires… [Pour] ce coupleavec deux enfants, la perte depouvoir d’achat sera de919 euros par an.»

L’après-midi, à l’Assembléenationale, Valérie Pécresseavait préparé un cas voisin :«La seule question que seposent les familles de France,qui sont évidemment inquiètes,c’est qui va payer combien»,a démarré la ministredu Budget et porte-parole dugouvernement, avant d’en-chaîner : «J’ai fait un petitcalcul. J’ai pris l’exemple d’uncouple qui gagne 3 500 eurospar mois. Actuellement, il paie1 275 euros d’impôt. Il a deuxenfants. Si l’on suit la propo-sition du Parti socialiste tellequ’elle nous a été présentée, ilpaiera désormais 2 614 eurosd’impôts, soit 1 400 euros deplus –100% d’impôts de plus!Et je ne vous dis pas ce qu’ilpaierait s’il faisait trois, qua-tre, cinq enfants… Alors nonau matraquage des classesmoyennes !»

D eux exemples voisins,et deux fois, le même«oubli» d’une partie

de la réforme socialiste. Lesdeux ministres parlent de fa-milles semblables –le coupled’enseignants de Nadine Mo-rano gagne un peu moins de3600 euros net. Partons doncde l’exemple de Valérie Pé-cresse. Avec le simulateurd’impôt de Bercy, on obtient

e x a c t e -ment lesc h i f f r e s

annoncés par la ministre: cecouple paie 1275euros; si onenlève le bénéfice du quo-tient familial, il paiera2614euros. Ce «petit calcul»serait donc juste… si la ré-forme consistait à supprimertotalement ce dispositif fiscalsans le remplacer. Or, celan’a jamais été le projet du PS.D’ailleurs, Valérie Pécresse a

de la chance d’avoir assezd’éléments pour «suivre laproposition du Parti socia-liste», et en tirer un chiffrageaussi précis alors qu’aucunemodalité n’est arbitrée.Après deux jours de déclara-tions parfois confuses, Fran-çois Hollande résumait mardisoir à l’AFP: «Je ne veux passupprimer le quotient familial[…]. Ma proposition est de mo-duler le quotient familial pourqu’il puisse être plus juste pourl’ensemble des familles […].Ceux qui ne paient pas d’im-pôts recevront un crédit d’im-pôt.» Ce que les ministresdevaient savoir au momentde leurs déclarations.Une simulation de créditd’impôt est justement faitedans l’étude du Trésor citéepar les Echos lundi et qui arelancé le débat sur le quo-tient familial. A rendement

constant, le crédit d’impôtuniversel serait de 607eurospar enfant (et concerneraitégalement les famillesaujourd’hui non imposables,qui ne bénéficient pas duquotient familial). Du coup,l’exemple des ministres estbeaucoup moins percutant.La perte pour le ménage dé-crit par Valérie Pécressetombe ainsi à environ125 euros, ce qui est moinsimpressionnant. Et contrai-rement à ce que dit la minis-tre, plus ce couple aura d’en-fant, plus il a intérêt à laréforme: à partir de quatre,il est même bénéficiaire. Ets’il y a peut-être de bons ar-guments pour défendre lequotient familial actuel, tor-dre les propositions de réfor-mes adverses n’est sansdoute pas le meilleur.

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LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 • 5

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Ennahdaconstruitsonpouvoiràtâtons

Un an après le départde Ben Ali, les islamistesau pouvoir tententd’asseoir leur légitimité,ferraillant contre lesmédias d’opposition.

Par ÉLODIE AUFFRAYCorrespondante à Tunis

L e parallèle est saisissant. Le 14 jan-vier 2011, devant le ministère de l’In-térieur, une foule en colère criait enchœur «Dégage !» à Ben Ali. Mer-

credi, quasiment un an après, 2 000 à3 000 personnes se sont à nouveau réuniesdevant le sinistre bâtiment. Pour, cettefois, acclamer le nouveau patron deslieux, Ali Larayedh. «Le peuple est avecle ministre de l’Intérieur», «le peuple veut lapurification du ministère», ont chanté les ma-nifestants, essentiellement des partisans dela formation islamiste Ennahda. Le ministres’est avancé vers les barbelés qui empêchenttoujours d’approcher de l’immeuble. Juchésur une table, mégaphone à la main, il s’estadressé à la foule: «Nous œuvrons pour instau-rer une sécurité républicaine qui ne sera au ser-vice d’aucune mouvance politique ni de person-nes, mais plutôt au service de l’intérêt public.»

ÉPURATION. Le nouveau ministre, qui a passéquinze années en prison, a annoncé mardi lamutation de Moncef Laajimi, haut cadre duministère de l’Intérieur. Une décision très at-tendue, en particulier par les familles desmartyrs de Thala et Kasserine: elles accusentMoncef Laajimi d’être l’un des principaux

responsables de la répression dans ces deuxvilles, qui ont payé un lourd tribut à la révolu-tion. Le procès de Laajimi est en cours, maisle mandat d’amener contre lui n’a jamais étéexécuté. Pis, il a été nommé à la tête des Bri-gades d’ordre public (BOP), les CRS tunisiens.Sa mise à l’écart semble relever d’une volontéd’épuration. Pourtant, Ennahda, contraire-ment à son partenaire de la gauche laïque

Moncef Marzouki, n’a pas fait campa-gne sur une rupture radicale. La mobi-lisation devant le ministère a fait avor-

ter celle des BOP, qui avaient prévu un sit-in,au même moment, contre la décision de leurministre.Depuis sa victoire aux élections du 23 octo-bre, et surtout depuis l’entrée en fonction dugouvernement de coalition fin décembre,Ennahda peut compter sur ses sympathisantspour soutenir son action et sa légitimité àgouverner. Mobilisés via Facebook, ils étaientlà en novembre, devant le siège de l’Assem-blée constituante, pour faire contrepoids auxpartisans de l’opposition, venus réclamer desgaranties démocratiques. Ils étaient encorelà lundi, lorsque des journalistes et des ci-toyens se sont élevés contre des nominationsà la tête des médias publics.Car Ennahda a encore inquiété lorsque, enplein week-end et sans consulter personne,le Premier ministre, Hamadi Jebali, a an-

noncé ses décisions, notamment la désigna-tion de thuriféraires de l’ancien régime. De-vant le tollé, il a promis de réviser certainschoix. Ridha Kéfi, journaliste reconnu et pa-tron du site Kapitalis, tacle: «Au mieux, c’estune erreur due à l’inexpérience. Au pire, c’estune tentative de passage en force. Mais mainte-nant, le gouvernement sait que la liberté de lapresse est une ligne rouge.» Le journaliste est

d’autant plus énervé que l’instance pour laréforme de l’information, dont il est mem-bre, avait émis une série de recommanda-tions pour que les nominations à la tête desmédias publics «sortent du cercle des affinitéspolitiques».

CHÔMEUR IMMOLÉ. Ennahda multiplie lesattaques envers les médias, qu’elle accused’être partiaux à son égard, ce qui n’est pasentièrement faux. Mais l’animosité de cer-tains semble s’en être trouvée libérée. Unjournaliste de la chaîne Nessma, honnie desislamistes, a été agressé pendant la manifes-tation de mercredi. L’affaire a aussi fragilisé

les relations avec le parti de gauche Ettakatol,membre de la coalition au pouvoir.Deux semaines après son entrée en fonction,le gouvernement dominé par les islamistescherche pourtant à asseoir sa légitimité. Latâche est ardue. Lors de ses déplacements àKasserine et Sidi Bouzid, le présidentMarzouki a dû couper court à ses interven-tions, face à une foule non pas hostile, mais

impatiente. Le 5 janvier, un chô-meur s’est immolé à Gafsa, le jour dela visite de trois ministres qu’il de-mandait à rencontrer. Le gouverne-ment cherche à calmer le jeu.Marzouki a appelé à une trêve socialede six mois. L’exécutif peut d’ailleurs

mettre à son crédit des négociations réussiesdans des conflits qui étaient dans l’impasse.Mais les islamistes doivent également com-poser avec les agitations des salafistes,comme à Sejnane (lire ci-contre) ou à la fa-culté de la Manouba, bloquée deux mois pourdemander le droit au niqab et une salle deprière. A chaque fois, Ennahda prend des po-sitions qui ménagent la chèvre et le chou. «Ilsse comportent à l’égard des salafistes commes’il s’agissait d’une réserve électorale, et neveulent pas s’en couper complètement», ana-lyse Mohamed-Chérif Ferjani, chercheur dé-taché du CNRS et spécialiste des relations en-tre religion et démocratisation. •

RÉCIT «Maintenant, le gouvernementsait que la liberté de la presse estune ligne rouge.»Ridha Kéfi journaliste et patron du site Kapitalis

Le ministre de l’Intérieur, Ali Larayedh, s’adresse à la foule de manifestants, surtout des partisans d’Ennahda, qui l’acclament mercredi à Tunis. PHOTO ZOUBEIR SOUISSI. REUTERS

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 20126 • MONDE

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Dans cette ville isolée, de jeunes extrémistesont décidé de faire appliquer la charia.

A Sejnane, laissé auxmains des salafistesL a bourgade de 5 000 habitants se

cache dans les belles collines ver-doyantes du nord-ouest de la Tu-

nisie. Il faut rouler deux heures trentepour gagner Sejnane depuis la capitale.Le 4 janvier, émoi à Tunis: «Sejnane, lepremier émirat salafiste en Tunisie»,alarme en une le quotidien arabophonele Maghreb. Le journal relateque la petite ville est auxmains d’un groupe de jeunessalafistes, qui auraient installé un tribu-nal et une prison pour punir les actescontraires à la charia.«Sejnane est à eux», pleure un infir-mier, Ali Malaoui. Samedi, il a racontéà une délégation de la Ligue tunisiennedes droits de l’homme (LTDH) avoir étéprésenté le 31 décembre au «tribunal»en question, installé selon lui dans le lo-cal du club de foot. Il y aurait subi un«interrogatoire musclé» de quatre-vingt-dix minutes. «Ils m’ont relâché enmenaçant de me tuer et de brûler ma mai-son si je continuais à révéler ce qu’ils fai-saient.» Car, poursuit Ali, «j’avais portésecours à deux hommes, blessés à la têteà coups de sabre, parce qu’ils n’empê-chaient pas leurs petits frè-res de boire. J’avais aussiécrit aux autorités pourleur demander d’interve-nir». Les témoignagess’égrainent. Parce qu’il«boit du vin», Chiheb aété roué de coups, samain fracassée. Des habitants disentêtre contraints à la prière. A la mos-quée, les salafistes ont imposé leurimam, âgé d’à peine plus de 20 ans.Coup de pied. Les salafistes en ques-tion seraient une quarantaine, tous jeu-nes, et ont commencé à agir il y a quel-ques mois. Ces dernières semaines, lasituation a empiré. Direction les locauxde l’imada, sorte de mairie de quartierentièrement brûlée pendant la révolu-tion. A l’intérieur, Zied et Karim mi-ment leur mise à l’arrêt, une heure etdemie durant, dans ce qu’ils appellent«la geôle». «Ils nous ont frappés parcequ’on boit de la bière», explique Karim.La présence de la LTDH a rameuté denombreux habitants devant le local.Tout à coup, mouvement de panique.Un groupe de barbus déboule, le tempspour l’un d’eux d’asséner un violentcoup de pied dans la caméra du corres-pondant de France 24, David Thomson.«Ils m’ont dit qu’il était interdit de filmerdans cette ville», témoigne-t-il. A lasuite de l’attaque, des forces de sécuritésont dépêchées par le ministère de l’In-térieur. Quinze salafistes sont convo-qués. «Nul n’est au-dessus de la loi et iln’est pas question de tolérer les abus»,fera valoir le porte-parole du ministère,Hichem Meddeb.Depuis la révolution, pourtant, la villede Sejnane est livrée à elle-même. Lesquatre agents locaux de la garde natio-nale ne font plus peur à personne. Ledélégué (l’équivalent du sous-préfet)

opère depuis Bizerte, la grande ville laplus proche. Son bureau est occupé de-puis fin novembre par des dizaines dechômeurs qui réclament des usines etdes postes dans l’administration. Plusde la moitié des habitants sont sans em-ploi, dont 800 diplômés du supérieur.Les participants au sit-in, parmi les-

quels des salafistes, en sontpersuadés : «Le phénomènesalafiste est utilisé pour faire

diversion par des gens qui ne veulent pasque des investisseurs s’installent ici», ex-plique l’un d’eux, qui voit des partisansde l’ancien régime à la manœuvre.«Assentiment». «On est trop fati-gués», lâche Latifa Malaoui, coiffeusepour dames dont le salon périclite. Con-séquence de la crise économique et «desnouvelles boutiques ouvertes sans autori-sation». Elle raconte «les vols, les problè-mes d’alcool» qui se sont amplifiés cetteannée. «Les salafistes ont nettoyé la villede ceux qui boivent et qui volent», se ré-jouit un habitant. «Ils aident les gens àavoir du gaz», renchérit un autre. «Labouteille de gaz est devenue hors de prix.C’est pour cela qu’on a gardé un camion

de livraison», explique Abderraouf Ma-laoui, 24 ans, salafiste bon teint, le jeanà la mode et la barbe courte, partisand’un «islam strict» depuis 2010. Pourl’alcool, «quand on voit quelqu’un qui boiten pleine rue, on essaie de dire que ce n’estpas bien. Mais nous n’utilisons que la pa-role pour convaincre», défend-t-il. D’ac-cord, quelques-uns se sont un peu em-portés, mais ils avaient été provoqués.«Ce sont des bagarres entre jeunes», ar-gue Abderraouf Malaoui.«Le problème, c’est qu’ici, il n’y a pas degrand cheikh pour encadrer», estime lereprésentant d’Ennahda, Abid Saidani,qui soutient la version des salafistes. Lesvictimes des brutalités, selon lui? Desanciens partisans de Ben Ali, qui cher-cheraient à nuire à Sejnane. Chiheb ?«Un drogué.» La geôle ? Un local de-venu lieu de débauche après la chute durégime, que le nouveau maire a fait fer-mer «à la demande des habitants».Après l’article du Maghreb, une mani-festation a été organisée pour nierl’existence d’un émirat et rappeler leproblème de l’emploi. Des vidéos ontété mises en ligne pour présenter la ver-sion des salafistes. Abdessatarben Moussa, le président de la LTDH,prépare un rapport qu’il remettra augouvernement. Il y écrira qu’«il n’y apas d’émirat à Sejnane. Mais les salafistesy font la loi, tout le monde le reconnaît. Leproblème, c’est que cela se passe avecl’assentiment d’une partie des habitants».

E.Au. (à Sejnane)

«[J’ai] porté secours à deux hommes,blessés à la tête à coups de sabre, parcequ’ils n’empêchaient pas leurs petitsfrères de boire.»Ali Malaoui infirmier présenté au «tribunal» salafiste

Le ministre de l’Intérieur, Ali Larayedh, s’adresse à la foule de manifestants, surtout des partisans d’Ennahda, qui l’acclament mercredi à Tunis. PHOTO ZOUBEIR SOUISSI. REUTERS

REPÈRES

Tunis

ITALIE

SICILE

Mer Méditerranée

100 km

MALTE

TUNISIE

ALG

ÉRIE

Sejnane

Il y a un an, le 14 janvier 2011,face à la révolte populaire, leprésident Zine el­AbidineBen Ali abandonne le pou­voir qu’il occupait depuisvingt­trois ans, et quitte laTunisie. Le 30 janvier, le chefdu parti islamiste Ennahda,Rachid Ghannouchi, revient

après vingt ans d’exil. Légaliséle 1er mars, Ennahda rem­porte le 23 octobre les élec­tions à l’Assembléeconstituante. Le 12 décembre,la nouvelle Chambre choisitle laïc de gauche MoncefMarzouki comme présidentde la République.

REPORTAGE

«La pauvreté, lesous-développement,et l’absence d’autoritéfavorisent lesalafisme.»Abdessatar Ben Moussaprésident de la Liguetunisienne des droits del’homme

90sièges ont été remportéspar la formation islamisteEnnahda avec 41,4% des voixsur les 217 que comptel’Assemblée chargée d’élabo­rer une Constitution en un an.

DE BEN ALI À MONCEF MARZOUKI

L’université de la Manouba,(à l’ouest de la capitale etsymbole de la résistance àl’ancien régime) est ferméedepuis trente­sept jours.La décision a été prisele 6 décembre, à l’issue d’unsit­in des défenseurs duniqab (voile intégral) qui adégénéré en affrontementavec les forces de l’ordre.

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 MONDE • 7

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LeHamascherchesonchemininternationalhorsdeDamasVoulant quitter la Syrie, la direction du parti palestinien pourrait s’établir enJordanie ou en Egypte, où les Frères musulmans ont remporté les élections.

L e chef du bureau politique duHamas, le parti islamiste pa-lestinien, Khaled Mechaal, «a

joué un grand rôle» pour convaincreDamas d’accepter la mission desobservateurs en Syrie. Ce sont lesparoles il y a quelques jours du se-crétaire général de la Ligue arabe,Nabil al-Arabi. Elles confirmentl’aspiration à une reconnaissanceinternationale du Hamas,qui se sent renforcé par lessuccès des Frères musul-mans, dont il est issu. Elles symbo-lisent aussi la volonté du bureaupolitique de trouver un chemin versla sortie d’un pays qui l’abrite de-puis près de quinze ans.Depuis le début du soulèvement enSyrie, le Hamas se trouve dans uneposition délicate. Difficile de criti-

quer trop fermement la répressiond’un régime qui a accordé soutienet protection sans faille au mouve-ment palestinien depuis son expul-sion par la Jordanie, en 1999. Maisdifficile aussi de nier que parmi lesopposants à Bachar al-Assad setrouvent leurs acolytes, les Frèresmusulmans.

SADDAM HUSSEIN. «Nous ne vou-lons pas nous tromper de nouveau enmisant sur le mauvais cheval comme

nos frères l’ont fait pour l’Irakou au Liban», commente unmembre du Hamas. Pendant

la première guerre du Golfe, les Pa-lestiniens avaient pris le parti deSaddam Hussein et leur engage-ment dans la guerre civile libanaisea conduit à leur expulsion du pays.Par ailleurs, 800000 Palestiniensvivent dans des camps de réfugiésà travers la Syrie, une population

que Al-Assad pourrait prendre pourcible en cas de faux pas du Hamas.Pour les protéger de l’insécurité quiprévaut aujourd’hui en Syrie, lesmembres du bureau politique duparti islamiste palestinien ont déjàévacué toutes leurs familles deDamas, notamment en directiond’Amman, en Jordanie, des pays duGolfe, certains sont même rentrésà Gaza. Il ne resterait aujourd’hui

que 20% des membres du Hamasen poste à Damas et leur départ dé-finitif ne serait qu’une question desemaines.Du coup, les conjectures vont bontrain sur le lieu de leur nouvelleinstallation. Cette semaine, le chef

du gouvernement du Hamas, baséà Gaza, Ismaïl Haniyeh, était en Tu-nisie, à l’invitation des nouvellesautorités islamistes du pays. Unevisite lors de laquelle il a pu mesu-rer la popularité de son mouvementparmi les partisans du partiEnnahda (lire pages 6 et 7), grandvainqueur des élections tunisien-nes. Selon Youssef Rezka, conseillerpolitique d’Ismaïl Haniyeh, la ques-

tion de l’ouverture dubureau du Hamas àTunis aurait été «étu-diée» entre Palesti-niens et autorités tuni-siennes, sans apporter

davantage de précisions. Le petitpays maghrébin a une histoire an-cienne avec les mouvements pales-tiniens : c’est lui qui a accueillil’OLP de Yasser Arafat après sonexpulsion du Liban, en 1982. C’estsuite à la signature des accords

d’Oslo qu’Arafat quitte Tunis pourretourner à Gaza en 1994.Mais la Tunisie est loin de la Pales-tine. On prête aux membres du Ha-mas l’envie d’installer leur direc-tion politique en Egypte ou enJordanie. Poser ses valises à Am-man constituerait pour son chef,Khaled Mechaal, un retour en ter-rain connu. C’est là qu’il résidaitquand, en 1997, le Mossad israélienlui envoie ses agents pour l’empoi-sonner. Une tentative d’assassinatqui échoue et se solde par l’arresta-tion des Israéliens impliqués. Le roiHussein, furieux de l’interventiondes services secrets sur son terri-toire, menace l’Etat hébreu de gelerl’accord de paix fraîchement signéet exige qu’un antidote soit remisà Mechaal et que le fondateur duHamas, le cheikh Ahmed Yassine,soit libéré. Mais deux ans plus tard,lorsque Abdallah succède à sonpère, la politique jordanienne sedurcit envers les islamistes palesti-niens, le bureau du parti est fermé,Khaled Mechaal expulsé trouve re-fuge en Syrie. Aujourd’hui, lamême prudence du roi de Jordanieprévaut à l’égard du Hamas. Sonretour pourrait attiser la contesta-tion contre son pouvoir en donnantun coup de fouet aux islamistesjordaniens.

POPULARITÉ. Mais des bruits cou-rent que le Qatar, qui a largementmis les mains dans toutes les révo-lutions arabes et soutenu les mou-vements islamistes, ferait pressionsur Amman pour qu’il accueille leHamas. Les tenants des négocia-tions? L’entrée de la Jordanie dansle Conseil de coopération du Golfe,dont le but est l’unification du sys-tème économique de ses Etatsmembres et un accord de sécuritéintérieure. L’Arabie Saoudite,Oman, le Koweït, Bahreïn, les Emi-rats arabes unis et le Qatar en fontpartie. La Jordanie et le Maroc frap-pent à la porte de l’organisation de-puis peu. Outre les inquiétudes duroi, l’arrivée de l’aile politique duHamas à Amman déplaît fortementau voisin israélien qui craint que laproximité de Mechaal et ses com-pagnons attise la popularité dumouvement en Cisjordanie.C’est sans doute vers Le Caire queva la préférence du mouvement is-lamiste, émanation directe des Frè-res musulmans égyptiens. L’arrivéeau pouvoir de ces derniers au Caireleur permet de nager dans des eauxfamilières. D’ailleurs, dans le cadredes discussions sur la réconciliationpalestinienne avec le présidentMahmoud Abbas, Khaled Mechaalet ses collaborateurs se rendent deplus en plus souvent dans la capi-tale égyptienne. Ils pourraient finirpar ne plus en repartir. •

Par AUDE MARCOVITCHCorrespondante à Tel­Aviv

Les membres du bureau politiquedu parti islamiste ont déjà évacuétoutes leurs familles.RÉCIT

Khaled Mechaal, dirigeantpolitique du Hamas, près deDamas, en août. PHOTOKHALED AL­HARIRI. REUTERS

5millions de Palestiniens viventactuellement dans les pays ara­bes. Parmi eux, 800000 sontréfugiés dans des camps en Syrie

ISRAËL

50 km

MerMéditerranée

MerMorte

Jérusalem

CISJ.

JORDANIE

LIBAN

SYRIE

ÉGYPTE

Gaza

Tel-Aviv

Damas

Amman

Le mouvement islamiste palesti­nien Hamas a remporté la majo­rité aux élections législativesde 2006, puis pris le contrôlede la bande de Gaza. Le particontinue de prôner la résistancearmée contre Israël. Le mouve­ment est classé terroriste parla plupart des pays occidentaux.

REPÈRES «Ce qui est survenu enEgypte, en Tunisie, et enLibye, et qui se produitau Soudan, est favorableà la cause palestinienne.»Mahmoud al­Zahar responsabledu Hamas, le 9 janvier

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 20128 • MONDE

Page 9: Libe vend 13_janv_2012

Par SONIA DELESALLE­STOLPER

Le referendum écossaisdivise le Royaume-Uni

«J e crois passionnémentque nous sommes plusforts ensemble que sépa-

rés», a déclaré hier devant leParlement le Premier minis-tre britannique, David Ca-meron. Il ne parlait absolu-ment pas de l’Europe maisbien de l’Ecosse, tentée parles sirènes de l’indépen-dance. Le sujet est récurrent.Après tout, l’union entrel’Angleterre et l’Ecosse nedate «que» de troiscents ans. Sans parler desmultiples guerres qui ontagrémenté les relations entreles peuples de la Rose et duChardon au cours des huitcents années précédentes.

Or, voici que le Scottish Na-tional Party (SNP), qui oc-cupe la majorité des sièges auParlement semi-autonomeécossais et prône l’indépen-dance, se pique d’organiserun referendum sur la ques-tion à l’automne 2014. Pasquestion, a répliqué Came-ron, toute consultation surl’indépendance de l’Ecossedoit être légalement organi-sée par le Parlement britan-nique à Westminster. AlexSalmond, Premier ministreécossais et fin renard, a quel-que peu ricané en expliquantqu’il était quand même fortde café qu’un Premier mi-nistre anglais et conserva-

teur –deux gros défauts à sesyeux – dicte aux Ecossais laconduite à tenir. Sachantqu’en plus, les conservateursne disposent que d’un dé-puté en Ecosse (sur 59).

Bref, le Royaume est per-plexe. Et les Ecossais encoreplus, puisque selon le derniersondage Ipsos-Mori, plus dela majorité (54%) souhaiterester membres du Royau-me-Uni, alors que seuls29% sont en faveur de l’in-dépendance. Ce qui expli-querait pourquoi David Ca-meron privilégie unreferendum rapide, histoired’obtenir un non et d’éva-cuer la question. Alorsqu’Alex Salmond souhaitegagner du temps, pour rallierdavantage d’électeurs à sacause, mais surtout pour ob-tenir un compromis et untransfert accru de pouvoirs,notamment fiscaux, au Par-lement écossais.

Depuis 1999, l’Ecosse, lepays de Galles et l’Irlande duNord disposent de parle-ments régionaux élus semi-autonomes qui gèrent uncertain nombre de questions,comme l’éducation ou lasanté. Mais la fiscalité, la dé-fense et les affaires étrangè-res restent du ressort du Par-lement britannique. •

VU DE LONDRES

Viktor Orbán, à Bruxelles, à la veille du sommet européen du 9 décembre. GEORGES GOBET. AFP

L’ Europe commence fi-nalement à réagir con-tre les dérives autocra-

tiques du Premier ministreconservateur hongrois, Vik-tor Orbán. «Nous utiliseronstous nos pouvoirs pour nousassurer que la Hongrie res-pecte les règles de l’Unioneuropéenne», a déclaré hier leprésident de la Commissioneuropéenne, José ManuelBarroso, qui se dit en mêmetemps encouragé par des si-gnaux montrant que Buda-pest serait prêt «à négocier».Dans l’immédiat, Bruxelleslance une demande de sanc-tions financières contre undérapage budgétaire jugé ex-cessif: il attein-drait en 20116% du PIB aulieu des 3% re-vendiqués parBudapest, quiserait ainsi lapremière victime de la nou-velle gouvernance budgé-taire en vigueur depuisl’automne.Mais la pression ne se limi-tera pas à cette seule ques-tion. Dès mercredi, la Com-mission était montée aucréneau en se disant «préoc-cupée en tant que gardiennedes traités» par plusieurspoints litigieux de la nouvelleConstitution hongroise, no-tamment sur l’indépendancedes juges, de la Banque cen-trale et de l’autorité de pro-tection des données. Elle seréserve ainsi le droit de «lan-cer des procédures en infrac-tion» qui pourraient à terme

conduire la Hongrie devant laCour de justice de l’UE.Jusqu’ici l’Europe était res-tée quasi silencieuse,d’autant que Viktor Orbánappartient au Parti populaireeuropéen, le principalgroupe du Parlement deBruxelles qui compte parmises membres une majorité departis au pouvoir, dontl’UMP française ou la CDU-CSU allemande. Seuls la Fin-lande, le Luxembourg et laFrance – avec Alain Juppéévoquant sa «préoccupa-tion» – s’étaient jusqu’icipubliquement émus del’autoritarisme croissant del’ex-dissident, déjà respon-

sable il y a un an d’une loi li-berticide sur la presse. «Or-bán est un Chávez de droite»,résume Daniel Cohn-Bendit,des Verts européens. Sonparti, au côté des socialisteset des libéraux, s’apprête àtenter mardi au Parlementun recours à l’article 7 dutraité de Lisbonne, qui per-met de sévir – jusqu’à unesuspension du droit de voteau Conseil – contre un payscoupable «de violations gra-ves et persistantes» des va-leurs européennes.C’est le signal politique quicompte car, dans les faits, laprocédure est difficilementapplicable. Lancée par les

députés, elle nécessite quequatre cinquièmes des paysmembres admettent qu’il y aun risque, puis leur voteunanime (moins l’accusé)pour entériner la réalité desviolations avant de prendre àla majorité qualifiée d’éven-tuelles mesures de rétorsion.

MARC SEMOLire également page 22.

Jusqu’ici, seuls trois Etatsmembres s’étaient émusde l’autoritarisme croissantdu Premier ministre hongrois.

Bruxellesseréveillefaceauxdérivesd’OrbánDIPLOMATIE La Commission a finalement menacéde lancer des procédures à l’encontre de la Hongrie.

CÔTE­D’IVOIRE Le squeletteexhumé le 6 janvier n’est pascelui du journaliste Guy-An-dré Kieffer, selon des pro-ches du disparu, l’expertiseADN s’étant révélée négative.

AFGHANISTAN Une vidéo demilitaires américains uri-nant sur des cadavres detalibans présumés suscitel’indignation. Une enquête aété ouverte.

PAKISTAN Au moins quatreinsurgés islamistes du Mou-vement des talibans pakista-nais ont été abattus par desdrones américains dans larégion du Waziristan.

YÉMEN 20 combattants ontété tués hier dans des affron-tements entre sunnites etchiites dans le nord-ouest dupays. Dans le même temps,trois militaires sont mortsdans le Zinjibar (sud).

KENYA Au moins six person-nes tuées et trois enlevéesdans une attaque des insur-gés islamistes shebab contreun poste de police dans lenord-ouest du pays.

ALGÉRIE Détenu pendant sixans à Guantánamo, MabroukMissaoui a été acquitté par letribunal criminel d’Alger. Ilétait accusé de terrorisme.

Quelques heures aprèsson lancement, le site decampagne de VladimirPoutine connaît un succèsimmense, mais probable­ment pas celui qu’il espé­rait. Lancé hier matin envue de la présidentielle demars, le site offre notam­ment un espace dédié aux«propositions des élec­teurs». Parmi les nombreu­ses suggestions émises parles internautes, la pluspopulaire a été postée parAndreï Antonenko, quiappelle au départ à laretraite de Vladimir Pou­tine. «Demande amicale.Quittez la politique, s’ilvous plaît. On le com­prend, le pouvoir est unedrogue, mais [partir] seraitune action digne», écrit­il.Au pouvoir depuis 2000,Vladimir Poutine avaitquitté son poste auKremlin en 2008 au profitde son ancien Premierministre Dmitri Medvedev.Encore donné favoridu scrutin présidentiel,Poutine voit cependant sapopularité dégringolerdepuis les récentes alléga­tions de fraude qui ontentaché les résultats desélections législatives dedécembre. Depuis, l’ex­of­ficier du KGB est con­fronté à une vague decontestation sans précé­dent.

UN APPELÀ LA RETRAITEDE POUTINE

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«Les membres de Boko Haram, si la justiceestime qu’ils ont commis des attaquescontre la population sur la base de lareligion ou de l’ethnie, pourraient êtredéclarés coupables de crimes contrel’humanité.»Navi Pillay commissaire de l’ONU aux droits de l’homme àpropos des violences au Nigeria commises par des islamistes

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 MONDEXPRESSO • 9

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J-100:l’abécédairedelacampagne

La présidentielle s’annonce desplus violentes. Petit précis lexicaldes mots qui vont faire mouche.

Par SERVICES POLITIQUEet MÉDIAS

C ent jours. Dans cent joursexactement, le dimanche22 avril, 44 millions d’élec-teurs auront à choisir parmi les

candidats(e)s les deux qui seront quali-fié(e)s pour le second tour. Quatorzesemaines qui promettent d’être richesen débats. Mais aussi en coups bas et enrebondissements. «C’est pas le pays desbisounours, une campagne présiden-tielle», euphémisait, hier, la mi-nistre des Solidarités, RoselyneBachelot.A l’image du déplacement de NicolasSarkozy, hier à Lille, pour présenter sesvœux aux fonctionnaires. La «traditionrépublicaine» au nom de laquelle lapremière secrétaire du Parti socialiste,Martine Aubry, a serré la main du chefde l’Etat s’est appliquée dans sa versionla plus polaire. «La République impose àl’opposition comme à la majorité de savoirse parler et se respecter», a conclu Nico-las Sarkozy à l’issue de son exerciced’autosatisfaction sur le thème de lafonction publique.La phrase a fait bondir la première se-crétaire du PS, qui, le matin, avait quali-fié de «honte à notre République» les pro-pos du président de l’Assembléenationale sur le «rendez-vous de 2012»qui pourrait avoir «des conséquencescomparables à celles d’une guerre». «Vos

derniers mots, faites-les partager à mon-sieur Accoyer!» a-t-elle lancé au prési-dent de la République. Qui a répliqué,hors micro, mais assez fort pour êtrebien entendu : «Faites-les partager àFrançois Hollande quand il parle de moi.»Avant de concéder : «Je partage votreavis sur Accoyer.» La maire de Lille apourtant ensuite dénoncé «les contrevé-rités tellement grosses», proférées, selonelle, par le chef de l’Etat. S’attirant cecommentaire du député (UMP) Marc-Philippe Daubresse: «On a l’habitude de

sa mauvaise foi, de son intolérance,de son sectarisme.» Ambiance.Le ton est donné. A mesure que

l’on approchera du 22 avril, la donnechangera-t-elle? Entre l’ombre des af-faires judiciaires, les surenchères popu-listes sur fond de crise, les sondages quisèment le doute, le tir croisé des snipersde droite et de gauche, sans oublier latendance à l’emballement suscité parles réseaux sociaux, dont Twitter, lesingrédients semblent réunis pour endouter. Petit abécédaire de ce qui nousattend dans les cent prochains jours.•

RÉCIT

D comme les doigts de la tweeteuse Nadine Morano. JEAN­MICHEL SICOT

udiovisuelCinq minutes de Hollande valent-ellescinq minutes de poutoux, heu, de PhilippePoutou (NPA)? Radios et télés s’apprêtentà devoir gérer des candidatures aussi gri-santes pour l’audience que celle d’HervéMorin (Nouveau Centre), et ce au rythmede l’entrée en vigueur des règles sur letemps de parole fixées par le Conseilsupérieur de l’audiovisuel (CSA). Lespetits candidats, eux, attendentavec impatience une exposition

aussi forte que les gros. Mercile CSA, qui impose «égalité de

temps de parole» et «équité de temps d’antenne» à partir du20 mars –date de la publication au Journal officiel de la listedes candidats. Puis une stricte égalité des temps de paroleet d’antenne avec «conditions de programmation comparables»dès le 9 avril pour le début de la campagne officielle : cinqminutes de Poutou dans le Journal du hard de Canal + (c’estun exemple) devront être compensées par cinq minutes deMorin dans le même Journal du hard (c’est un fantasme).

harlotteBonnet jetable à élastique, dont, pour des raisons d’hygiène,se coiffe le candidat, d’ordinaire peigné par quelque spin-coiffeur, lors de ses visites d’usine. Variantes: le casque surles chantiers, la serviette à carreaux autour du cou pourgoûter la hure au buffet campagnard, les bottes en caout-chouc pour la visite à la ferme, le cheval en Camargue tandisque, derrière, entassé avec ses collègues dans une charrette,le journaliste suiveur, lui, n’est jamais ridicule.

nvers(21 avrilà l’)

Avec l’élimination de Jospin et la qualification deLe Pen au second tour, le 21 avril 2002 avait déjàmis la France sens dessus dessous. Pour cette nou-velle saison présidentielle, les scores élevés de Ma-rine Le Pen et le rejet du Président font craindreun «21 avril à l’envers» avec un duel Hollande-FN.Sauf que, cette fois, la date du premier tour est le22 avril. Dans tous les cas, la démocratie serait en-core cul par-dessus tête. Encore mieux, ou pire,c’est selon, si la prédiction d’oracles –ou piafs demauvais augure–, façon Jacques Attali, ex-con-seiller de Mitterrand, se réalise : un second tourBayrou-Le Pen. Un double 21 avril à l’envers àl’endroit de, feu, la bipolarisation made in France.

Ceux de Nadine Morano, adeptede Twitter, où elle a débuté le25 novembre par une adresse àsa collègue Nathalie Kosciusko-Morizet: «Je te rejoins pour dé-fendre notre filière nucléaire.»848 tweets plus tard, elle mêletoujours invective facile et or-thographe débridée : «Je tapeplus vite que mes doigts, mais jecorrige aussi vite que ma pensée»,tapota-t-elle l’autre semaine surle site de micro-blogging. SurTwitter, de Morano à Eric Bes-son en passant par Cécile Duflot,la campagne a déjà démarré de-puis des lustres et devrait s’in-tensifier sérieux en des joutes(on dit “tweet-clashs”) homéri-ques. Mieux: hystériques.

oigts

A comme audiovisuel. PHOTO VINCENT NGUYEN. RIVA PRESS

L’abécédaire complet, avectoutes les lettres de l’alphabet,est consultable sur le site.

• SUR LIBÉRATION.FR

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201210 • FRANCE

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S comme sniper. A droite comme à gauche, on se prépare à dégainer. LAURENT TROUDE P comme les 500 parrainages d’élus que les candidats doivent réunir. THOMAS SAMSON .AFP

uvriersIls se les arrachent tous… On les annoncechez Le Pen ? Mélenchon réfute et vapoursuivre sa tournée des «luttes» pourles convaincre de voter pour lui. Hollandea gardé dans un tiroir l’attirail de son dé-

placement au Creusot, en Saône-et-Loire(voir Charlotte). Joly s’y est mise en allant à

Petroplus. Sarkozy les adore. Arthaud (LO),plus mieux que plus. On aura peut-être, –en-

fin!– un candidat ouvrier. S’il a les 500 signatu-res: Poutou (NPA), réparateur de machines-outilsà l’usine Ford de Blanquefort (Gironde).

arrainageLe couperet pour Marine Le Pen, Philippe Poutou,Corinne Lepage et les autres candidats qui ramentpour collecter les 500 parrainages tombe le 16 mars.

De l’avis de tous, la pêche aux signatures est, disons,compliquée, entre les consignes des grands partis, les

élus qui redoutent d’être catalogués et leur déficit de zéni-tude. A trois mois de la date limite, les candidats mettent les

bouchées doubles, comme Christine Boutin. Partie sur le chemin deCompostelle pour rallier à son bâton de pèlerin le maximum de maires.

orse-raceTic journalistique où l’on décrit la présidentielle comme unecourse de chevaux. Avec des virages en tête, des challengerset des pelotons, des lignes de départ et d’arrivée. Le toutnourri de sondages balancés sans recul. Et en évitant (sur-tout) de parler du fond. Un papier horse-race se nourrit demétaphores sportives, («dribbler l’adversaire», «marquer con-tre son camp» et «jouer collectif») ou de métaphores guerriè-res («pilonner», «enfoncer les lignes», «monter à l’assaut»).

Ville pakistanaise qui a donné son nom a une désormaiscélèbre affaire de ventes d’armes, qui risque de plom-

ber la campagne de Sarkozy… Des rétrocommissionsont-elles été versées en 1994 pour financer la

campagne présidentielle de Balladur? Sarkozy,alors porte-parole du candidat, avait-il con-

naissance des montages occultes? Autre af-faire boomerang : des billets estampillés

Bettencourt ont-ils été glissés dans la po-che d’Eric Woerth en 2007 pour

soutenir Sarkozy ?

arachi

lluminésParmi les 28 (si, si) candidats déclarés, joli chapelet d’illustres inconnus qui le resteront

toujours (ah, Nicolas Miguet, si tu nous lis…). Qui se moquent du syndrome «taxeTobin» (0,005% dans les sondages). Des candidatures de témoignage (chrétien) à faire passerChristine Boutin pour une théologienne de la libération. Prenons Axel de Boer (Solidarité France),adepte de la «civilisation de l’amour et de la vie», tête de pont des prolife, comme l’atteste cettephrase très peace and love: «Ciqnuante millions de morts par an, un génocide rwandais par semaine,7 millions de morts en France depuis l’adoption de la loi Veil.» Un curé, pardon, un pasteur? LaurentLenne, from le Var (France) passé par Secret Story 2. Son truc:«Paix et amour, tout simplement.»

niperQuand l’homme ou la femme politique s’assoit sur

ses neurones et se met à sulfater l’adversaire… Le bonsniper se doit d’être d’une mauvaise foi crasse, ca-

ricatural à l’excès et ne pas craindre le ridicule.Idéal-type: la ministre de l’Apprentissage, Na-dine Morano, qui a appris très vite. On appellesouvent «cellule riposte» un troupeau (nid) de

snipers. Peut se prononcer «snipeure», à la fran-çaise, mais uniquement… si vous êtes Jospin. Sinon,

vous passerez pour une tanche.

alentineEn voilà une qui va sans doute se faire flatter la croupe par tout

ce que la présidentielle compte de candidats. Cette vache de racegasconne de 7 ans est la mascotte de l’édition 2012 du Salon de

l’agriculture. Passage obligé du prétendant qui souhaite s’attirerle vote agricole et soigner son image de «proche du terrain». Et

comme le président sortant a marqué de son empreinte verbale sonpassage au Salon en 2008, nul doute que ses concurrents essaieront

de montrer qu’ils sont plus à l’aise et plus affables dans la cohue média-tico-agricole de la Porte de Versailles. Showtime: à partir du 25 février.

(série)Alors, finies, les salves dignes de séries Z? Zappées,

les formules assassines? Remballés, les néologismesfumeux? Le «catastophisme rustique» ou «la scorpio-

nite», lancée par Fillon à l’adresse de Hollande? Le désor-mais fameux, si la gauche l’emporte, «les conséquences éco-

nomiques et sociales pourraient être comparables à cellesprovoquées par une guerre» de l’homme du perchoir, Bernard

Accoyer? Ou le «sale mec» d’un Hollande dans la peau deSarkozy? Quand va-t-on enfin rentrer dans le dur de la baston

programmatique? Dans le débat frontal des idées? Dans le face-à-face vision contre vision? Les deux principaux candidats (pour

l’instant) sont encore dans le flou, repoussant le dévoilementpour éviter de prendre des coups trop tôt et tenir jusqu’au

premier tour. Hollande livrera des éléments de son pro-gramme fin janvier, et en égrènera dans les semainessuivantes. Quant à Sarkozy, il devrait rentrer dans la danse

après l’annonce de sa candidature fin février…

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 FRANCE • 11

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La commission d’investiture de l’UMP a choisi ses candi­dats dans les 18 circonscriptions de la capitale. Essentiel­lement des hommes. Les 5 femmes désignées sont dansdes arrondissements de gauche où elles n’ont aucunechance d’être élu aux législatives. «Evincée» au profit deFrançois Fillon, Rachida Dati devrait être ce matin surRTL pour dire tout le mal qu’elle pense de cet arbitrage.Selon une source de l’UMP, elle aurait été reçue le moisdernier par le chef de l’Etat. La maire du VIIe ne confirmepas. A l’évidence, la situation reste bloquée. FrançoisFillon et ses amis estiment, qu’étant déjà eurodéputée,Dati peut difficilement prétendre qu’on veut lui barrer laroute de l’Assemblée. Mais l’ex­ministre n’en démord pas.«Elle veut absolument compléter son ancrage local par unancrage national», explique son entourage. Elle a juréqu’elle serait candidate dans son arrondissement quoiqu’il arrive. Géraldine Poirault­Gauvin, élue UMP du XVe,est de tout cœur avec elle, appelant les femmes de sonparti à des «candidatures représailles» dans toutes les cir­conscriptions de la capitale. PHOTO AFP

RACHIDA DATI ENVICTIME DE FILLON ETDU MACHISME DE L’UMP

LÉGISLATIVES Jack Lang,72 ans, s’est rendu hier àSaint-Dié (Vosges), où il seprésente aux législatives, ense disant «confiant dans savictoire» dans cette circons-cription tenue par l’UMP de-puis dix ans.

LÉGISLATIVES Jean-LouisBianco, député (PS) des Al-pes-de-Haute-Provence de-

puis 1997, a annoncé hier,qu’il ne solliciterait pas denouveau mandat en juin.

ÉCOLOGIE France NatureEnvironnement accueilleralors de son congrès, fin jan-vier, les principaux candi-dats à la présidentielle pourprendre connaissance deleurs propositions environ-nementales.

«C’est quand mêmeextravagant deparler d’hésitationsquand on voit leshésitations dansle camp de l’UMP.»

Ségolène Royal hier,sur Canal+, à proposde la campagne de FrançoisHollande

59%C’est la part des Françaisqui estiment que la politi­que familiale n’est pas«juste». Selon un sondageOpinionway pour le quoti­dien la Croix, ils sont 79%à considérer que cettepolitique familiale «doitdavantage bénéficier auxménages les moins aisés etmoins aux plus aisés». Cesondage a été effectuéaprès que le Parti socialistea annoncé sa volonté deréformer le quotient fami­lial.

A croire qu’elle en faitune marque de fabri-que. Après avoir sou-

haité la disparition du défilémilitaire du 14 juillet (auprofit d’un défilé civil) etavoir été éreintée pour cettesuggestion, Eva Joly a lancéun nouveau sujet polémi-que: l’instauration d’un jourférié pour les juifs et lesmusulmans.Alors que se multiplient dansson camp les appels à unecampagne plus centrée surl’écologie, la candidated’Europe Ecologie-les Vertsà la présidentielle a souhaité,lors de la Nuit de l’égalité,mercredi soir à Paris, que«juifs et musulmans puissentcélébrer Kippour et l’Aïd el-Kebir lors d’un jour férié»pour que «chaque religion aitun égal traitement dans l’es-pace public». Elle se référaitdirectement à une proposi-tion du rapport de BernardStasi –alors médiateur de laRépublique– sur la laïcité re-

mis à Jacques Chiracfin 2003.Hier, sur RTL, José Bové, unde ses porte-parole, a précisésa pensée: il s’agit de «choi-sir à la place de Noël ou de Pâ-ques les jours fériés de sa pro-pre religion. Pas question derajouter des jours fériés sup-plémentaires pour tout lemonde, ça n’aurait pas desens».Aussitôt les critiques ontfusé, à gauche comme àdroite. Le ministre (UMP)Laurent Wauquiez a renvoyél’ex-juge à la laïcité et à«l’histoire et aux racines chré-tiennes» de la France. Au FN,Marine Le Pen a accusé laFranco-Norvégienne de nedéfendre que des «mesuresfrancophobes», le député(UMP) Jacques Myard trai-tant Eva Joly «d’apprentiesorcière». Au PS, Michel Sa-pin, proche de François Hol-lande, l’a appelée à «se sou-venir toujours du principe delaïcité» et même le recteur de

la Grande Mosquée de Paris,Dalil Boubakeur, s’est mon-tré sceptique, jugeant «loua-ble» cette proposition, maisne pensant pas qu’elle«puisse trouver une traductiondans le cadre législatif fran-çais». Quant au Grand Rab-bin de France, Gilles Bern-heim, il a fait savoir qu’il neprendrait position «que lors-que les choses seront claires,ce qui n’est pas le casaujourd’hui».Au sein de son propre camp,Joly n’a pas été épargnée.Pascal Durand, porte-paroledu parti, y a vu, «à titre per-sonnel», une «atteinte auprincipe de laïcité». Cettenouvelle sortie de la candi-date est intervenue au soird’un séminaire stratégiqueautour de celle qui plafonneà 3-4% dans les sondages.Conclusion, selon plusieursparticipants, elle doit mener«une campagne plus lisible»avec «plus de cohérence».

P.V. (avec AFP)

Pourlacampagne,EvaJolyentreenreligion2012 La candidate écologiste souhaite que les juifs etles musulmans puissent bénéficier d’un jour férié.

LES GENS

Eva Joly, lundi à Paris, lors d’une soirée sur le mal­logement. PHOTO JEAN­MICHEL SICOT

Pour démontrer le sérieux de ses pro-positions, Marine Le Pen a présenté,hier, au siège du FN à Nanterre(Hauts-de-Seine), le chiffrage desprincipales mesures de son pro-gramme. Elle a aussi exposé son plande désendettement de la France aprèsla sortie de l’euro et la mise en placed’un protectionnisme national,qu’elle suggère. Elle a profité de cette

occasion pour souligner que ses ad-versaires étaient les «candidats duflou». «Je suis la candidate du projet.Pour le moment, quand je débats avec lesautres grands candidats, c’est projetcontre néant, projet contre incantation»,a-t-elle jugé. Elle a réaffirmé sa vo-lonté d’augmenter de 200 euros nettous les salaires inférieurs à 1,4 fois leSmic grâce à une exonération de char-

ges sociales. Cette mesure serait fi-nancée par une taxe de 3% sur l’en-semble des biens et des servicesimportés en France, qui rapporterait74 milliards d’euros. Si la présidentedu FN veut augmenter les budgetsconsacrés à la sécurité et à la justice,elle estime que certaines mesurespour limiter l’immigration pourraientrapporter près de 41 milliards. C.F.

G À CHAUD LA CANDIDATE FN À L’ÉLYSÉE A EXPOSÉ SA POLITIQUE ÉCONOMIQUE

Marine Le Pen chiffre son programme

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20places à gagner pour la représentation du 17 janvier à 20h30.

Pour recevoir une invitation pour 2 personnes,adressez votre demande à :[email protected]écisez votre adresse postale complète.

INVITATIONLibération et le Théâtre national de Toulouse vous invitent àdécouvrir Paroles Gelées. Jean Bello-rini et la compagnie Air de Lune nous of-frent une aventure théâtrale toute en mu-sique autour de la merveilleuse épopée deRabelais, le Quart Livre.

P a r o l e s g e l é e s

AvecMarc Bollengier

François Deblock Patrick Delattre

Karyll Elgrichi Samuel GlauméBenjamin Guillard Camille

de la Guillonnière Jacques Hadjaje

Gosha KowalinskaClara Mayer Geoffroy Rondeau

Juliette Roudet Hugo Sablic

Création Artiste invité

11 – 21 janvier

D’après François Rabelais

Adaptation Jean Bellorini et

Camille de la Guillonnière

Mise en scène Jean Bellorini

Théâtre national de Toulouse Midi-Pyrénées www.tnt-cite.com

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Production déléguée TNT – Théâtre national de Toulouse Midi-Pyrénées

Coproduction Compagnie Air de lune, TGP-CDN de Saint-Denis, Arc en scènes – La Chaux-de-Fonds

Direction Agathe Mélinand – Laurent Pelly

RABELAIS:Mise en page 1 12/01/12 13:43 Page1

Chronique «La campagne de la peur».Reportage «A la campagne, l’écologie est aussi entréedans les mœurs».Vidéo Hollande et ses nouveaux voisins du VIIe arron­dissement de Paris.La présidentielle sur www.libe2012.fr

• SUR LIBÉRATION.FR

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201212 • FRANCEXPRESSO

Page 13: Libe vend 13_janv_2012

Carlton:l’exd’Eiffagebalancesadirection

«Libération» a eu accès à la dépositionde David Roquet, l’un des mis en examendans le volet lillois de l’affaire DSK.

D avid Roquet est un hommeorganisé. Ce patron d’une fi-liale d’Eiffage dans le Nord,mis en examen mi-octobre

puis écroué dans le dossier du Carltonde Lille, raconte ainsi, le 13 décembre,aux juges d’instructions lillois: «Quandje suis arrivé en 2005, il n’y avaitpas de comptabilité analytique,c’est moi qui l’ai mise en place.J’ai instauré des règles, un fonctionnementtransparent. […] J’avais les félicitationsorales d’Eiffage pour ma rigueur.» Dequoi faire sursauter le numéro 1 du BTPen Europe, qui a licencié son salarié,soupçonné d’avoir organisé et financédes soirées coquines avec Dominique

Strauss-Kahn à Paris et à Washington.Et dont le PDG a évoqué un simple«problème dans le contrôle des notes defrais», réduisant le scandale à l’histoire«d’un cadre qui a perdu pied». Car lesdéclarations de David Roquet ne vontpas dans ce sens. Et comme l’avait déjàaverti son avocat, Me Dupont-Morreti,le patron de l’entreprise Matériaux en-

robés du Nord ne compte pasporter seul le chapeau dans cedossier de proxénétisme. Tout

au long de sa déposition devant les ju-ges, que Libération a pu consulter, DavidRoquet affirme donc que la maison-mère a toujours donné son aval à ses re-lations onéreuses avec DSK. Ellesauront coûté 50 000 euros de notes defrais. «Je n’ai rien caché, se défend lechef d’entreprise âgé d’une quarantained’années déjà mis en examen pourproxénétisme aggravé en bande orga-nisé, et qui a écopé le 13 décembre desnouveaux chefs d’escroquerie et abusde confiance. Je ne me serais pas suicidéen passant dans le circuit des facturesfrauduleuses.» La preuve, explique t-il:les commissaires aux comptes et lesaudits mensuels d’Eiffage n’ont rientrouvé à redire aux notes d’hôtel et derestaurant derrières lesquelles Roquetnotait scrupuleusement «DSK». Mêmeaprès l’épisode du Sofitel, le directeurdes ressources humaines d’Eiffage tra-vaux publics Nord est venu lui parler deces factures. Sans menace ni sanction.

«PAS IDIOT». Alors les juges s’interro-gent. Pourquoi? «Un patron de groupe,qui est un homme de pouvoir, aime avoirdans son cercle des hommes de pouvoir.C’est une relation qui aurait puêtre utile au groupe à terme», sejustifie Roquet. «Dans les affai-res, c’est bien d’être connu etpour un patron d’avoir accès à laprésidence. Eiffage aurait pu pro-poser notamment des projetscomme des PPP (partenariat publicprivé).» Roquet précise que son supé-rieur hiérarchique –licencié aussi aprèsle scandale du Carlton – était au cou-rant. «Il m’a dit que ce n’était pas idiot.»Mais Roquet est formel, même si celasemble peu crédible: Eiffage connais-sait l’existence des factures d’hôtel

mais ignorait les parties fines avec desprostituées. «Elle [sa hiérarchie, ndlr]savait qu’il s’agissait de DSK et c’est surce motif que la facture a été prise encharge et remboursée. Il faut dire qu’avantnos échanges sexuels il y a eu une discus-sion à table durant deux, trois heures oùj’ai pu parler de ce que je faisais chez Eif-fage.» Pourtant, d’après lui, aucun con-trat n’a jamais été signé grâce à ces re-lations privilégiées. Roquet misaitplutôt sur l’avenir. «L’objectif n’était pasde le corrompre» mais «d’obtenir un peude reconnaissance dans ma boîte» quandDSK parviendrait à l’Elysée. Des espoirs

évaporés avec l’arrestation de son men-tor le 14 mai à New York. «Depuis sixmois, j’avais changé mon mode de fonc-tionnement, raconte d’ailleurs Roquet.Je m’étais aperçu que les frais ne servaientpas à grand-chose, en voyant que l’inves-tissement que j’avais pu faire en pensantà M. Strauss-Kahn s’était effondré.

J’avais donc ralenti, vous pourrez voir quesur les derniers mois mes frais avaient étédivisés par deux ou trois au moins.»

«PAS DE BON TON». David Roquet n’estpas rancunier. Tout au long de son audi-tion, il ne cesse de protéger l’homme enqui il avait placé tous ses espoirs d’as-cension professionnelle. Comme pourprotéger ce dernier d’éventuelles accu-sations de proxénétisme. Non, répètet-il aux juges, l’ex-patron du FMI ne sa-vait pas que les filles des soirées étaientdes prostituées. Fabrice Paszkowski,«l’homme des SMS» et cofinancier destrois voyages à Washington et des ren-contres à Paris, a lui aussi protégé sonami lors de son audition le 19 décembre.«Fallait-il cacher à DSK le fait que certai-nes femmes étaient des prostituées?» luidemandent les magistrats. «Oui, car iln’était pas de bon ton dans les soirées li-bertines de dire que les filles étaient rému-nérées.» Paszkowski ajoute même, sansqu’on le lui demande: «Il (DSK) est pin-gre, ce n’est pas le genre à payer pour desrelations sexuelles.» Des questions quidevraient également être posées à DSK,dont la date d’audition par les magis-trats lillois n’a toujours pas été fixée.•

Par VIOLETTE LAZARD

«Il [DSK] est pingre, ce n’est pasle genre à payer pourdes relations sexuelles.»Fabrice Paszkowski autre mis en examen

RÉCIT

L’hôtel Carlton,à Lille,le 16 octobre.PHOTO VINCENTNGUYEN. RIVA PRESS

REPÈRES

«Mon client n’entend pasporter le chapeau toutseul. Il n’a jamais dit qu’ilavait présenté ces jeunesfemmes à DSK commeétant des prostituées.»Eric Dupont­Moretti avocatde David Roquet

David Roquet, directeur d’unefiliale du groupe de BTP Eiffagedans le Pas­de­Calais, Matériauxenrobés du Nord, a été mis enexamen le 14 octobre pour proxé­nétisme aggravé en bande organi­sée et écroué. D’abord mis à pied,il a été licencié au mois de novem­bre par Eiffage.

50000euros. C’est le montant desdépenses sur notes de fraisengagées par David Roquet dansses généreuses relations avecDSK.

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 FRANCE • 13

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CorpsautopsiésdemandentréparationLe procès qu’attendaient des familles, après avoir vu lesdépouilles de leurs proches non recousues, est encore renvoyé.

L es banderoles, les photosimmondes des corps autop-siés, les slogans scandés del’escalier en pierre du palais

de justice de Béthune… pour les par-ties civiles, c’était déjà la deuxièmefois. Depuis septembre, dateà laquelle la présidente avaitdécidé de renvoyer tout lemonde à 2012, ce jeudi 12 janvierétait marqué à la craie comme le jourchoisi par la justice pour enfin sepencher sur leurs problèmes. Encoreraté. Hier, le public venait tout justede prendre place quand l’audience aété renvoyée au 7 juin. «Vous assassi-nez les cadavres !» Lancée du bancdes parties civiles, l’invective vise lajuge, coupable aux yeux des plai-gnants de vouloir leur barrer le pro-cès. «Nous espérions que les prévenusdisent la vérité», lâche Me PhilippeMissamou qui défend la vingtaine de

familles furieuses. «Me Missamou ditque la défense manœuvre pour éviter laprocédure, mais c’est lui qui ne nous apas transmis les pièces. Le renvoi, c’estde sa faute», explique Me Vincent Po-tié, qui défend les prévenus.Ils sont deux, les prévenus. Deux ci-tés à comparaître. Deux médecinslégistes qui devront répondre des ac-tes commis à l’époque où ils autop-

siaient les corps transférés à lamorgue de Lens. Suite à uneinspection de la Ddass du Pas-

de-Calais, l’établissement a fermé le24 décembre 2008. Depuis, les lan-gues se sont déliées. Celle d’HervéLouvrié d’abord.

SCELLÉS. Le 9 avril 2008, HervéLouvrié est à Paris pour le boulot,quand sa femme, Betty, se suicidechez eux, à Lille. Elle a avalé unebouteille de Destop (Libération du10 juin 2008). Hervé est autorisé àvoir le corps avant qu’il ne passe en-tre les mains des légistes. On lui rendle corps de sa femme dans un cercueil

scellé. Il exige qu’on l’ouvre. «Je suisprotestant pratiquant. Le suicide est unacte péché, je voulais briser la malédic-tion en glissant une Bible dans son cer-cueil .» L’agent des pompes funèbreslui déconseille de faire sauter lesscellés. «Il m’a avoué la vérité à 95%.

J’ai regardé à peine deux secondes. Auxpieds, un sachet avec ses organes… J’engarde des flashs.» Il porte plainte. Leprocureur de Béthune est averti quele corps de Betty Louvrié n’a pas étérecousu. Très vite, le commissariat deLens met au jour «de graves négligen-ces professionnelles de la part des mé-decins légistes comme des garçons desalle», rapporte Aude Marland, chefdu bureau de la police judiciaire. Enseptembre de la même année, Hervé

Louvrié alerte les instances médica-les. «Notre enquête montre de gravesdysfonctionnements dans la prise encharge des agents d’amphithéâtre. Lesmédecins légistes sont responsables del’autopsie et auraient dû rester jusqu’àce que soit réalisée la restitution tégu-mentaire», conclut Marc Biencourt,président de l’ordre national des mé-decins du Pas-de-Calais.Hervé Louvrié a entamé son combaten solitaire, désemparé par le cha-grin et intimidé par «la machine judi-ciaire». Puis il a rencontré Marie-Christiane Daugimond, de l’Associa-tion de défense des victimesd’autopsies médico-légales. Elleaussi a connu la vision d’un corpsmutilé. Celui de sa sœur, dont l’ex-humation lui tire encore les larmes.Des témoignages, elle en a des car-tons entiers qui grignotent les mètrescarrés de son appartement de Boulo-gne-Billancourt. Un agent d’amphi-théâtre en poste depuis 1998 lui aécrit qu’à Lens, «les médecins ne vou-laient pas recoudre, ils disaient que cen’était pas leur boulot». ConcernantSabrina Cauquerelle –dont la familleest partie civile au procès – un tha-natopracteur déclare sur l’honneur«avoir assisté en 2003 au dépeçage dela jeune défunte, mise en terre sansavoir été recousue». Il ajoute : «Tousles défunts que j’ai pu voir à Lens ontsubi le même traitement : dépecéscomme des bêtes, les organes dans dessacs poubelle, les habits aux pieds.»Le 5 septembre 2011, un entrepreneurdes pompes funèbres de Houdain at-teste «avoir emmené un cercueil dansle couloir de l’amphithéâtre et là, l’em-ployé de la morgue m’avertit : “Tu nepourras pas l’habiller, c’est impossi-ble.” Je confirme, je n’ai pas pu l’ha-biller car elle était non recousue». Laliste des témoins à charge s’est allon-gée au fil des mois. Pour autant, iln’est pas du tout acquis qu’une con-damnation soit prononcée à l’issuedu procès, puisque les faits n’ont pasde qualification pénale. D’ailleurs,aucune sanction – même discipli-naire– n’a été prononcée à l’encon-tre du duo.

INCISIONS. Me Missamou va s’ap-puyer sur l’article 225-17 du code pé-nal sur les «violations et profanationsde sépulture». Mais les «atteintes àl’intégrité du cadavre» seront diffici-les à plaider, puisque les incisionspratiquées le sont sur réquisition ju-diciaire. «Les plaignants vont devoirnous expliquer le fondement juridique

de tout ça, et pas à coups dedroits de l’homme !, noteVincent Potié, avocat d’undes deux légistes. Quandils auront trouvé une infrac-tion pénale, on avancera,mais je doute que cela soit lecas.»

Michel Sapanet comptait, hier,parmi les déçus de Béthune. Profes-seur au CHU de Poitiers et grandponte de la médecine légale, il avaittenu à se déplacer pour expliquer sonmétier à l’audience: «Ouvrir, recou-dre, nettoyer, maquiller le défunt pourrecouvrir le teint blafard de la mort, leminimum de respect qu’on doit au mortavant de le rendre à la famille.» Luiaussi attend une réponse à la ques-tion qui l’obsède : «Pourquoi ?» •

Par MATHIEU PALAINPhoto OLIVIER TOURON.FEDEPHOTO

«J’ai regardé à peinedeux secondes. Aux pieds,un sachet avec ses organes…J’en garde des flashs.»Hervé Louvrié devant le cercueil de sa femme

RÉCIT

Marie­Christiane Daugimond, de l’association des victimes des autopsies, hier, devant le tribunal de Béthune. PHOTO OLIVIER TOURON. FEDEPHOTO

REPÈRES

BELGIQUE

SOMME

NORD

30 km

Arras

LensPAS-DE-CALAIS

«Les médecinsont le sentimentd’avoir toujoursfait leur métierde la meilleuremanière qui soit.»Me Vincent Potiéavocat d’un des légistes

«Le praticienayant procédéà une autopsiejudiciaire est tenude s’assurerde la meilleurerestaurationpossible du corpsavant sa remise.»Article 230­29 du codede procédure pénale

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201214 • FRANCE

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Bruno Le Roux, un des porte­parole de François Hol­lande, a déclaré, hier, ne pas «vouloir céder à l’intimida­tion», répondant à Claude Guéant qui venait de lemenacer d’une plainte en diffamation à propos del’enquête sur l’IGS (la police des polices à Paris) révéléemercredi par le Monde. Le député PS de Seine­Saint­De­nis avait accusé, avant­hier, le ministre de l’Intérieur d’être«au cœur» de cette affaire où la police des polices estsoupçonnée d’avoir truqué une procédure impliquantdes fonctionnaires, dont un réputé proche de la gauche, àl’époque de la présidentielle de 2007. Dans un droit deréponse au Monde, le préfet de police de Paris, MichelGaudin, entendu en décembre comme témoin assisté, arejeté «plusieurs allégations [le] mettant en cause person­nellement». PHOTO AFP

ENQUÊTE SUR L’IGS : BRUNO LE ROUXPAS INTIMIDÉ PAR CLAUDE GUÉANT

DANY LEPRINCE L’associa-tion Pour la vérité rendueaux victimes du massacre deThorigné-sur-Dué a écrithier au garde des Sceaux,pour lui demander de pré-senter une nouvelle requêteen révision du procès deDany Leprince. En 1994, sonfrère Christian a été tué avecsa femme et ses deux filles.Condamné à perpétuité pource meurtre, Dany Leprince avu sa précédente requête enrévision rejetée en avril 2011.

CORPS CALCINÉ Un «ami»de l’adolescent dont le corpsa été retrouvé partiellementcalciné dans un bois d’Etou-vans, près de Montbéliard(Doubs), a été placé en gardeà vue, hier. Ce crime a pro-fondément choqué les élèveset les responsables du collègeoù il était scolarisé. L’adoles-cent de 14 ans avait quittémardi le domicile familialpour faire un tour de moto.Ses parents, inquiets, avaientprévenu les gendarmes.

79%C’est la part de Françaisqui pensent que la santéest un thème prioritairedans la campagne prési­dentielle, selon un sondageViavoice pour le CISS (Col­lectif interassociatif sur lasanté) publié hier.83% d’entre eux se disentfavorables au principe desolidarité dans le rembour­sement des frais de santé.Pour autant, 40% préfè­rent voir baisser leurs rem­boursements si celapermet de ne pas augmen­ter les cotisations socialeset le tarif des mutuelles.

L a mairie de Grenoble apublié hier un commu-niqué annonçant que la

ville-préfecture de l’Isèrecompte désormais 20,63%de HLM. «Grenoble possède17 592 logements sociaux [etvient] de dépasser le pourcen-tage [de 20%, ndlr] exigé parla loi SRU», souligne le maire(PS), Michel Destot.Ce communiqué montre quela loi Solidarité et renouvelle-ment urbains (SRU), qui afait l’objet de plusieurs ten-tatives de remise en cause–toutes avortées–, devientd’année en année une loi deréférence de la République.Ce texte, voté le 13 décembre2000 sous Jospin, oblige tou-tes les communes de plus de3500 habitants (1500 habi-

tants en Ile-de-France) à at-teindre un quota de 20% delogements sociaux sur leurterritoire, dans un objectif demixité sociale. La loi donneune vingtaine d’années auxcommunes déficitaires enHLM pour surmonter pro-gressivement leur retard. Lerattrapage se fait par pério-des triennales: les villes con-cernées se voient fixer desobjectifs chiffrés de cons-truction de logementssociaux qui devraient lesamener aux 20% à l’hori-zon 2020.Fleurir. Mais au-delà de dif-ficultés objectives (manquede terrains à bâtir en zoneurbaine dense, recours duvoisinage pour faire annulerles permis de construire dé-

posés par les organismes deHLM…), certains élus locauxemboîtent le pas de leursélecteurs et ne font preuved’aucun volontarisme pourcréer le nombre de logementssociaux qui leur sont impar-tis. Dans le XVIe arrondisse-ment de Paris, tous les per-mis de construire pour leslogements locatifs sociauxfont l’objet de recours devantles tribunaux administratifs.Tous les programmes sontensablés par des associationsde riverains, qui bénéficientdu soutien des élus locaux,dont le député-maire (UMP)Claude Goasguen. Dans desvilles très résidentiellescomme Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne) ouLe Cannet (Alpes-Mariti-

mes), on voitquand mêmefleurir des pro-grammes im-mobiliers pri-vés, alors queleurs mairesp r é t e n d e n t

qu’ils n’ont pas de terrainspour faire des HLM.Au fil des années, la loi SRUest devenue un baromètrepermettant de mesurer lavolonté réelle des élus desvilles concernées de faireune place à toutes les catégo-ries sociales dans leur cité.Selon un décompte réalisépar Libération sur les chiffresde la construction de 2009,pas moins de 351 communessur les 931 soumises à la loiSRU n’avaient construitaucun HLM cette année-là.«Cette loi a une portée socié-tale très forte. Elle dit le refusde toute discrimination en ma-tière de politique de l’habitat»,analyse le sénateur (PS)Thierry Repentin, égalementprésident de l’Union sociale

de l’habitat, qui regroupel’ensemble des organismesde HLM de l’Hexagone.Pressants. A l’inverse,beaucoup de communes(souvent les plus importan-tes, où les besoins en loge-ment sont les plus pressants)jouent clairement le jeu durattrapage. Grenoble a doncpassé les 20%. Avant elle,Montpellier (PS) ou Rueil-Malmaison (UMP) avaientatteint ce quota. Le maire(PS) de Paris a promis d’at-teindre les 20% d’ici à 2014.D’autres villes comme Mar-seille (UMP, 19,2%), Aix-en-Provence (UMP, 19,2%), Tou-louse (PS, 18%) ou Lyon (PS,18,7%) s’en approchent.

TONINO SERAFINI

HLM:Grenoblepasselabarredes20%LOGEMENT L’agglomération iséroise montre l’exemplesur la loi SRU quand d’autres villes traînent les pieds.

C’est une brique toutebanale. Une brique commeune arme ou comme unmatériau? Sur elle, estjuste écrit : «Personnes à larue.» Le Secours catholi­que a décidé de l’envoyerà tous les préfets à l’occa­sion des vœux: elles seveulent «porteuses d’espoirpour que l’année 2012construise les fondationsd’une politique audacieusepour le logement», a expli­qué, jeudi, l’ONG. «A tra­vers cette action, noséquipes souhaitent poserla première pierre deslogements à construirepour qu’il n’y ait plus per­sonne à la rue!» affirme leSecours catholique, quirappelle que, malgré la loiDalo (droit au logementopposable), «le droit aulogement n’est toujours pasassuré». Dans l’applicationdu droit au logementopposable, l’Etat reste«hors­la­loi». Le comité desuivi du Dalo a rappeléque 27500 décisions derelogement de ménagesprioritaires prononcéespar la justice n’étaient pasmises en œuvre finjuin 2011.

SDF : UNE BRIQUEPOUR LES VŒUXAUX PRÉFETS

L’HISTOIRE

LES GENS

En 2012, c’est l’autisme qui a été dési-gné grande cause nationale. Et cette«cause» en a bien besoin. En effet, laFrance manque toujours de placesd’accueil pour les personnes atteintesde troubles autistiques, surtout lesadultes, les autorités ayant bien dumal à en créer à un rythme suffisant,relève u n bi la n du pla nAutisme 2008-2010 publié hier et réa-

lisé par Valérie Létard, sénatrice etancienne secrétaire d’Etat à la Solida-rité. Ainsi, le fameux plan program-mait 4100 places (dont 2000 pour lesadultes) sur 2008-2014 : fin 2010,seulement 342 places ont été réelle-ment installées pour les adultes et1330 pour les enfants. 700 places sup-plémentaires pour adultes ont étécertes «autorisées» par l’administra-

tion, mais les crédits nécessaires nesont pas forcément encore débloquéspour la période allant jusqu’en 2013,précise le rapport. «Nous sommes à unpeu plus de la moitié de l’objectif», anoté, bien gentiment, Valérie Létard.En 2008, on estimait que 3 500 en-fants ou adultes devaient aller en Bel-gique, en raison du déficit d’accueilen France. É.F.

G À CHAUD LE RAPPORT ALARMANT DE LA SÉNATRICE VALÉRIE LÉTARD

L’autisme, cause nationale trop en retard

Dans le XVIe arrondissementde Paris, les programmes sontensablés par des associationsde riverains qui bénéficientdu soutien des élus locaux.

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Tout le program

me sur www.lasemaineduson.org

10places à la conférence inaugurale de JacquesAttali, parrain de l’édition, le 16 janvier à 17h à l’Audito-rium de France Télévisions.10places à l’événement « Jouer ensemble : Concertet table ronde » à la Gaîté lyrique le 19 janvier à 19h. 20places au concert de l’Orchestre des universitésde Paris le 24 janvier à l’Université Paris-Descartes.

Pour recevoir une invitation pour 2 personnes.adressez votre demande à :[email protected]écisez votre adresse postale complète.

INVITATIONLibération vous invite à découvrir la 9ème édition de La Semaine du Son,qui propose au public une exploration de notre environnement sonoreà travers différents événements à Paris et dans toute la France.

SEM_SON:Mise en page 1 12/01/12 13:59 Page1

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 FRANCEXPRESSO • 15

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Avec ses offres àprix cassé, la filialed’Iliad chamboule

le secteur dela téléphonie, et

oblige sesconcurrents à revoir

leurs stratégies.

U n «tsunami». C’estle mot utilisé parOrange, en interne,pour qualifier la dé-

flagration créée par les deux of-fres à prix fracassés (2 euros et19,99 euros par mois) de FreeMobile. Mohamed(1), conseiller

en boutique chezSFR, place de laRépublique à Paris,

se laisse aller à la confidenceface à sa cliente: «Revenez la se-maine prochaine. Le 18, on vachanger tous nos tarifs.» Etajoute, presque soulagé: «C’estbien qu’ils arrivent [Free, ndlr].On ne pouvait plus continuercomme cela. Le mobile est beau-coup trop cher. On sera plus àl’aise avec nos clients.»Mais SFR est-il en mesure desuivre une bagarre qui s’an-nonce meurtrière ? «Cela feramoins de primes en haut, reprendMohamed, qui se dit choqué parles 20 millions d’euros de primeset bonus touchés par les patronsde SFR, et dénoncés à la télé.»Hier, Jean-Ludovic Silicani, lerégulateur des télécoms, a pré-senté, dans les Echos, les chosesmoins crûment: «Il est clair que[les opérateurs] vont voir leurmarge baisser sur le mobile. Il leurest d’abord possible de réduire lessommes qu’ils versent aux ac-tionnaires.» Et, ciblant l’Etat,premier actionnaire d’Orange:«Il a clairement un choix à faire[…] Il peut accepter une baisse dedividendes s’il souhaite que l’opé-rateur maintienne ses investisse-ments.»

BATAILLE. La dégringolade destarifs est en route. C’est Virgin,le plus gros des opérateurs mo-biles virtuels (sans réseau), quis’est lancé le premier, dès mer-credi. En s’alignant d’embléesur Free (19,99 euros), mais enlimitant l’offre à ses abonnés, eten excluant les MMS et les ap-pels à l’international. Suivi parSosh, la marque commercialecréée sur le Web à l’automne parOrange, exprès pour contrerFree. Sosh, toutefois, ne s’est

Par CATHERINE MAUSSION

RÉCIT

Free,lejour

d’après

Xavier Niel à Parismardi. PHOTO MARCCHAUMEIL.

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201216 • ECONOMIE

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pas aligné. Il a juste baissé sonforfait illimité à 24,90 euros (aulieu de 39,90 euros). Puis, hier,c’est au tour de Red, l’opérateuren ligne de SFR, d’embrayer. Ilen a profité pour booster uneoffre plutôt faible comparée àcelle de B&You (Bouygues) etSosh.La bataille se déroule en directsur Twitter. Et les méchancetéss’enquillent : «Il y a dix jours,SFR m’a appelé pour me réenga-ger pour vingt-quatre mois surun forfait deux heures plus 1 gi-ga-octet pour 45 euros parmois», cafte MonsieurDream.Le mois dernier, les trois opéra-teurs expliquaient qu’ils allaientse lancer dans la bataille avecleurs seuls chevaux légers(Sosh, Red ou B&You). Cecipour ménager leurs margessur les forfaits classiques,dont les illimités tutoient les100 euros. Or, Orange commeSFR s’apprêtent finalement àmonter à l’assaut, mercredi, enrévisant profondément leur ca-talogue.

GOUROU. Chez Free, les salariésplanent. «Nous devons être auxalentours de 500 000 recrutés»,livre l’un d’eux, qui a fait sous-crire cinq membres de sa fa-mille. Le million d’abonnés seprofilerait pour la fin janvier.Des employés se proposent pourfaire des heures sup. La cote deXavier Niel, déjà très haute, se-rait en train d’exploser. «On estnombreux à lui envoyer des mailset il répond à chacun», s’esbauditun salarié. Préparés à une an-nonce choc, ils étaient, à Paris,Marseille ou Bordeaux, tousdevant leur écran le jour J,mardi, pour écouter leur gou-rou. «Ce qu’il a sorti, c’est pro-prement hallucinant», témoigneun fan. Le site internet etles plateformes d’appels ontcraqué sous la charge. ChezFree, on y voit le signe d’unenouvelle ère : «On était dans laroutine depuis le lancement dela Freebox Révolution…» •(1) Le prénom a été changé.

L’offre téléphonique du fournisseur d’accès dope aussi ses abonnements Internet.

La box Révolution en bénéfice Net

F ree mobile est un fusil àdeux coups : il drague avecson offre les abonnés de ses

concurrents et il recrute à mortde nouveaux adeptes sur son of-fre triple-play. Ses deux offresScuds se révèlent, moins de deuxjours après le lancement de Freemobile, un formidable boosterpour maintenir à bonne altitudela Révolution, dernière-née desFreebox. Mercredi, et hier en-

core, il était impossible de join-dre le service payant géré parFree qui permet d’accélérer àsa procédure d’abonnement autriple-play en fournissant unnuméro de téléphone identifiantson logement. Au lieu du sésame,un disque répète en boucle :«En raison d’un grand nombred’appels…»La carotte de 4 euros de réduc-tion sur l’offre illimitée de Free

mobile (15,99 euros pour le Free-naute au lieu de 19,99 euros pourMonsieur Tout-le-Monde), ainsique la gratuité pour les person-nes déjà abonnées au Net surl’offre à 2 euros par mois, soit24 euros de remise, a réveillél’envie de changer d’opérateurinternet.Lancée en décembre 2010, la boxRévolution était venue presqu’unpeu tard relancer un recrutement

atone : 191 000 nouveaux abon-nés seulement sur sa Freeboxmodèle V5. Un score multipliépar deux, soit 389 000, sur lesneuf premiers mois de 2011,grâce à la Révolution. On savaitque la base d’abonnés internet deFree (4,8 millions) constituaitune belle rampe de lancementpour son mobile. On découvrel’effet aspirateur du mobile pourdévelopper son parc.

Avec ses forfaits sans téléphone, Free relance la vente d’appareils nus.

Appel d’air sur le marché des mobiles

L e site Rueducommerce se frottait hier lesmains. En séparant la souscription à unforfait de l’achat du mobile, Free ouvre

un boulevard aux vendeurs de téléphones«nus»: «On en commercialise plus de 600, duplus simple au plus sophistiqué», répétait lesite. Cdiscount a embrayé, en propulsant à lafaveur des soldes nombre de mobiles dits «àprix cassés». Free va-t-il sonner le glas d’unepratique très franco-française, le mobile atta-ché à un forfait et largement subventionné?Cette (mauvaise) habitude, qui limite la con-

currence, est dans le collimateur du régula-teur des télécoms depuis plusieurs mois.Aujourd’hui, 15% seulement des abonne-ments se vendent sans mobile.Le phénomène a vraiment décollé l’an der-nier, avec Virgin, La Poste Mobile et le lance-ment, cet automne, de B&You (Bouygues Te-lecom), Sosh (Orange) ou Red (SFR). «Et cepourrait être bientôt 25%», estime MatthieuDrida, le patron du site comparatif Meilleur-mobile.com. D’où l’attention toute neuveportée aux tarifs des mobiles nus, et prélude

à une petite bagarre sur les prix. A voir ceuxpratiqués par Free (sept mobiles disponibles),l’opérateur fait le service minimum. SonSamsung Galaxy S2, concurrent de l’iPhone,est proposé à 541 euros, 56 euros plus cher quechez Auchan. Et on peut même se le voir pro-poser à 400 euros seulement dans les petitesboutiques. Même grand écart pour le SamsungGalaxy Ace : 329 euros chez Free, avec unpaiement étalé sur douze mois, et 204 euroschez Cdiscount. Cerise sur le gâteau: ces mo-biles nus n’ont pas besoin d’être déverrouillés.

Dans les boutiques SFR, Bouygues et Orange, les abonnés se plaignent.

La grogne des clients, la morgue des opérateurs

C omment se défaire d’unforfait Orange, SFR ouBouygues, quand il reste

encore dix ou vingt mois d’enga-gement? L’offre à prix canon deFree a créé comme un électro-choc. Elle monte, elle monte, lagrogne des abonnés au mobile,traités de «pigeons» par le patronde Free. Et les opérateurs des cen-tres d’appels s’en prennent pleinles oreilles. «On ne va pas tout demême pas réclamer aux opérateurs

de laisser filer leurs clients chezFree ! réagit vivement EdouardBarreiro, de l’UFC-Que choisir.Cela fait des mois que l’on annonceque Free va casser les prix !» Bref,les consommateurs, en adultesconsentants, ont signé en con-naissance de cause «un contrat quia force de loi», poursuit-il. Enboutique, les vendeurs sont beau-coup moins catégoriques: «Reve-nez un peu plus tard. On va réa-gir», dit ce vendeur d’une

boutique Bouygues Telecom, surles Grands Boulevards, à Paris.Les opérateurs savent qu’ils nepourront pas rester longtemps lesbras croisés: «C’est bien pour celaqu’on a 35000 conseillers, fait-onremarquer chez Orange. Pour cul-tiver une vraie relation commercialeavec nos clients.» En clair, négo-cier des petits arrangements oude menus cadeaux pour conser-ver la confiance de l’abonné. Lesgrands gagnants sont les nou-

veaux clients de Sosh (marqued’Orange), B&You (Bouygues) ouRed (SFR). Sosh a pris soin deprévenir ses abonnés que ses nou-veaux tarifs, revus à la baissemercredi, leur seraient appliquésd’office. Germain, 26 ans, a eu lenez creux en s’abonnant à Noël2010 chez Orange: avec un mo-bile tout neuf, il avait choisidouze mois de contrat. Il a donc«purgé sa peine» et a migré chezFree mercredi.

Des clients font la queue devant la boutique Free de Rouen (Seine­Maritime), mercredi, au lendemain des annonces de l’opérateur. PHOTO KENZO TRIBOUILLARD. AFP

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 ECONOMIE • 17

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18 • ECONOMIE

Enpleinecrise,AirFrance-KLMseposeenaustèreinconnuLe groupe a annoncé hier un plan drastique d’économies. Si des coupes dans les salaires etles investissements sont arrêtées, la question de l’emploi sera tranchée après la présidentielle.

G el des salaires, économiestous azimuts, suppres-sions d’emploi, remise àplat des conditions de

travail : Air France-KLM sort l’ar-tillerie lourde pour tenter de se re-mettre à flot. Le nouveauPDG du groupe, Jean-CyrilSpinetta, et celui de la com-pagnie tricolore, Alexandre de Ju-niac, ont présenté hier leur «plande transformation 2012-2014».Si les principales mesures avaientdéjà fuité, c’est leur ampleur quicrée la surprise : le groupe veutéconomiser plus de 2 milliardsd’euros sur trois ans. C’est trois foisplus que ce que prévoyait l’ancienpatron, Pierre-Henri Gourgeon,débarqué en novembre. L’objectif:endiguer les pertes (attenduesautour de 300 millions d’euros

en 2011) et réduire d’un tiersl’énorme dette (6,5 milliards) quiplombe les comptes. «Nous devonsrestaurer de manière structurelle larentabilité du groupe», a expliquéhier soir Spinetta. L’entreprise n’aplus «les moyens pour assurer […]notre survie», avait auparavant lâ-

ché Alexandre de Juniac auxsyndicats. L’ancien directeurde cabinet de Christine La-

garde est le principal auteur duplan. Et pour cause: alors que KLMgagne de l’argent, Air France, les-tée par les coûts de production lesplus élevés d’Europe, est devenuele boulet financier du groupe. C’estdonc elle qui supportera l’essentielde l’effort.Election présidentielle oblige, leplan a été coupé en deux: 1 milliardde mesures d’urgence pour stopperl’hémorragie financière et 1 mil-liard pour la restructuration en

profondeur, qui sera dévoilée enjuin. Et qui risque de se traduire pardes suppressions d’emplois, au-delà du non-remplacement des dé-parts naturels (environ 1000 cetteannée) déjà en vigueur.

HORS­D’ŒUVRE. Le premier voletest classique : baisse de plus de1 milliard des investissements, re-port de livraisons d’avions, sup-pression des vols les plus déficitai-res. Comme l’a notéSpinetta, la mesure«la plus spectacu-laire» concerne lessalaires : pas d’aug-mentation généraleen 2012 et 2013, et lescoups de pouces in-dividuels varieront en-tre 0,6%…et zéro. Pour montrerl’exemple, les 400 cadres dirigeantsvont perdre 17% de leur rémunéra-

tion, tandis que Juniac va renoncerà la moitié de son bonus. Air Franceva aussi traquer les congés non priset diminuer les indemnités repas.Dernière mesure symbolique qui vafaire grincer des dents: une catégo-rie de billets à prix cassés réservésaux salariés, la plus coûteuse pourla compagnie, sera supprimée.Au comité d’entreprise d’hier soir,«les élus y ont passé une heure»,soupire un syndicaliste. Ces sacrifi-

ces ne sont qu’un hors-d’œuvre. Leplus dur arrivera en juin avec le vraiplan de restructuration. Si tous lesmétiers seront concernés, l’effort

portera en priorité sur les volsmoyen-courriers, la seule activité(très) déficitaire. Histoire de dra-matiser, Spinetta a dévoilé hierpour la première fois l’ampleur dutrou, d’«environ 700 millions»en 2011. Pour rétablir l’équilibred’ici à 2014, de Juniac veut obtenirdes «gains de productivité à deuxchiffres». En clair, le personnel vatravailler plus sans gagner plus.Air France va dénoncer d’ici quel-ques semaines la plupart des ac-cords collectifs en vigueur et lancerune négociation marathon avec lessyndicats pour tenter de trouver unaccord. La tâche s’annonce déli-cate. D’autant plus que les gains deproductivité vont mécaniquementcréer des sureffectifs. Du coup, «ilest possible» qu’il y ait «des mesuressur l’emploi» (en clair, un plan dedéparts), a reconnu Juniac hiersoir. Même s’il assure qu’il ne lefera qu’«en dernier recours».

«HÉMORRAGIE». Dans une entre-prise attachée à ses acquis, cette re-mise à plat est une petite révolution.C’est aussi un vrai revirement pourSpinetta, qui, lors de son premiermandat, avait gravé dans le marbrele généreux «pacte social» maison.Mais, comme il l’a plaidé hier, «iln’y a pas d’alternative». Face à laconcurrence des compagnies low-cost, du Golfe ou de Chine, «recher-cher la meilleure efficacité possible»est le seul moyen d’éviter une «hé-morragie de l’emploi».Les organisations syndicales selaisseront-elles convaincre? «Il mesemble qu’une partie de notre per-sonnel, je l’espère majoritaire, est deplus en plus consciente de ces réali-tés», a-t-il répondu. Un peu son-nés, les syndicats semblaient de faitprêts à se mettre autour de la table:«Face à la situation d’Air France,dont la gravité ne peut être ignorée,et au-delà d’un immense gâchis,l’Unsa aérien conçoit que des mesuress’imposent», a réagi le syndicat, quise dit prêt à négocier en faisant de«la préservation de l’emploi une prio-rité». Même son de cloche à laCFDT. Mais pour l’heure de vérité,il faudra attendre le lendemain desélections. Lorsque la direction s’at-taquera au volet de l’emploi. •

Par YANN PHILIPPIN

«Face à la situation d’Air Franceet au-delà d’un immense gâchis,nous concevons que des mesuress’imposent.»Le syndicat Unsa aérien hier

RÉCIT

700millions d’euros, c’est le mon­tant de la perte de la seule acti­vité moyen­courrier l’an dernierpour Air France­KLM.

2milliards d’euros de réductionde coûts et de dette d’icià 2014: c’est l’objectif «priori­taire» d’Air France­KLM.

REPÈRES «On a beaucoup attendupour prendre à bras-le-corps une situation qui sedégradait. Maintenantil semble que l’entrepriseréagisse.»Béatrice Lestic de la CFDT à l’AFP

A l’aéroport Paris­Charles­de­Gaulle, le 21 décembre. Air France­KLM accuse une dette de 6,5 milliards d’euros. PHOTO MARC CHAUMEIL. FEDEPHOTO

UNE LOURDE PERTEOPÉRATIONNELLEEn 2011, le résultat opérationneldu groupe Air France­KLMdevrait être négatif d’environ300 millions euros, alors qu’ilétait positif de 28 millions surl’année civile 2010.

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012

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Art et arts graphiques :créer avec ses mains

Tous les chemins mènent peut-être à Rome,mais pas à l’art. C’est l’un des domaines oùles parcours sont plutôt bien balisés.Vous visez une carrière dansl’enseignement ?Vous vous destinez aux métiers de l’ensei-gnement ?Vous comptez vous engager dansune préparation aux concours ? Visez doncl’enseignement universitaire.Avec le systèmeLMD, c’est par la licence Arts plastiques quevous devrez passer.Les parcours proposés ?La plupart du temps, vous aurez le choixentre des modules d’enseignements vouspréparant au CAPES ou à la maîtrise d’artsplastiques, et ceux vous préparant à devenirprofesseur des écoles (dans le but d’intégrerun IUFM en fin de licence 3. Vous pouvezcontinuer jusqu’en master (les spécialitésvarient selon les universités : design,sciences de l’art…) ou utiliser votre licencecomme un tremplin pour accéder auxdifférentes écoles d’art.

Vous souhaitez intégrer une école d’art ?! Les Beaux-Arts. Il en existe plus de cin-quante. Qu’elles soient municipales, régio-nales ou nationales, toutes relèvent duministère de la Culture. Elles dispensent uncycle qui dure 3 ans (phase “programme”),sanctionné par le DNAP (diplôme nationald’arts plastiques).Vous pourrez ensuite choi-sir de continuer par 2 années supplémen-taires (phase « projet ») pour préparer leDNSEP (diplôme national supérieur d’ex-pression plastique).LeDNAT (diplôme natio-nal des arts et techniques) sanctionne3 années d’études ; il est d’avantage orientévers l’infographie ou la direction artistique.! Les écoles nationales supérieures d'art.Ces écoles de haut niveau demandent aupréalable 1 année ou 2 de préparation. Ils’agit de l'École nationale supérieure desbeaux-arts (ENSBA), l’École nationale su-périeure des arts décoratifs (ENSADouArtsDéco) et l'École nationale supérieure de

Vivre de sa passion,c’est l’idéal de tout

artiste en herbe.Mais avoir

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LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 ANNONCES • I

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création industrielle (ENSCI, appelée aussiles Ateliers), l’École nationale supérieure dela photographie d’Arles et Le Fresnoy-Studionational des arts contemporains.Les étudesvous demanderont 5 années après le bacavec souvent la réalisation d’un projet de find’études.

! Les écoles supérieures d’arts appli-qués.On en compte cinq : Estienne, Olivier-de-Serres, Boulle et Duperré, situées àParis,et l’École supérieure des arts appliqués et dutextile (ESAAT), à Roubaix. Elles préparentnotamment, en 2 ans après le bac, au DMA(diplôme des métiers d’art). Les titulaires dece diplôme pourront ensuite préparer, tou-jours en 2 ans, le DSAA (diplôme supérieurd’arts appliqués).

Pensez aux écoles privées spécialiséesFormer de véritables professionnels, c’estl’objectif que se fixent les écoles privées spé-cialisées dans le domaine artistique et lemonde de l’image de manière générale. Lesétudiants bénéficient d'un enseignement à lafois artistique et technique ; ils acquièrent dessavoirs tout en développant leur potentiel decréativité et leur sens critique. Mais par-delàle talent et les savoir-faire professionnels, cesétablissements veulent aussi insuffler à leursétudiants d’autres compétences plus trans-versales comme la gestion, le marketing, leslangues, etc…Ensuite, et parce qu’apprendreà quantifier le fruit d’une recherche, d’une

ébauche, prévoir etmesurer le coût de revientd’une création pour un styliste, quantifier undessin d’une réalisation publicitaire, valoriserses qualités artistiques sont tout aussiimportants que de savoir maîtriser les outilsde la création, les écoles vont offrir un par-cours de formation complet. Les enseigne-ments, davantage orientés vers la mise enpratique et la réalisation de projets étudiants,laissent une large place aux stages et aux ex-périences professionnelles. Mieux, de nom-breuses écoles ont désormais recours audispositif de l’alternance.D’ailleurs rien de telpour prétendre décrocher le job, la missionou l’opportunité de sa vie au sortir de l’école.Parce que plus quemontrer un CV, les diplô-més des filières artistiques doivent démontrerleurs talents et leurs compétences.Les projets étudiants et professionnels sontconsignés dans un « book », qui se présentecomme un véritable atout sur le marché dutravail. Et cela, les écoles œuvrent pour qu’ilsoit le plus étoffé et éclectique possible.Mais en ce qui concerne les arts, dites-vousbien que c’est le rapport qu’entretiennent lesécoles avec lemilieu professionnel concernéqui prouve la valeur de votre formation.A vous les études d’artgrâce aux prépas !Avant toute chose, ne confondez pas lesdeux types de formations proposées. Lesclasses préparatoires en arts préparent àl’entrée dans les écoles d’art alors que les

classes de mise à niveau en arts appliqués(MANAA) représentent une année incon-tournable pour tous ceux qui désirent pour-suivre leurs études dans le domaine des artsappliqués, donc intégrer un BTS en artsappliqués, comme le BTS Design de com-munication, espace et volume, par exemple.Seuls les élèves titulaires du baccalauréattechnologique STI, option arts appliqués, ensont dispensés, ces derniers pouvantaccéder directement en première année detechniciens supérieurs. Dans les deux cas,elles permettent aux étudiants motivés etdoués de se préparer à intégrer une filièreartistique.Les classes prépasLes prépas aux écoles d’art, en majorité pri-vées, vous donnent les outils nécessaires à laréussite d’études artistiques. Leur objectif :vous préparer aux concours des écoles d’arttrès sélectifs, des grandes écoles d’artsappliqués et des écoles d’art les plus répu-tées. Ce cursus a pour but de vous apporterles différentes techniques artistiques (dessind’étude, graphisme, croquis, rough, illustra-tion, perspective, modelage, couleur) quivous manquaient pour suivre cette voie. Ilvous apprend à dessiner, à regarder et à or-ganiser les volumes, les textes et les imagesdans l’espace.Le recrutement se fait au niveau bac, quelque soit votre parcours antérieur.L’admission ? Elle se fait en général après

l’examende votre dossier, suivi d’un entretienindividuel. Seules conditions pour avoir unechance d’être accepté : avoir un talent brutdans une discipline artistique (dessin, sculp-ture...) et que votre démarche artistique soitintéressante.Ces classes ne sont pas là seu-lement pour vous donner des cours, ellesvous procurent aussi des réalisations àmon-trer pour votre entrée dans les grandesécoles. Ce sera votre “book”, le dossier devos meilleurs travaux.

Les MANAA, oumise à niveauen arts appliqués

Cette année de formation a été conçue pouraccueillir des élèves de terminale des filièresgénérales, des étudiants en quête deréorientation après une tentative universitaire,et tout autre profil. Cette formation de 1 an,préparée en écoles privées ou lycées publicsou sous contrat, garde des cours généraux(mathématiques, sciences, histoire de l’art),mais orientés vers le domaine artistique.Son but est d’améliorer vos connaissancesartistiques et techniques. Une fois réussie,vous poursuivrez votre cursus supérieur dansl’école : BTS puis DMA et DSAA.Cette année est un passage obligatoire pourtout bachelier général.Pour vous y présenter vous devrez passerpar le site www.admission-postbac.fr commepour toutes les autres classes préparatoires.

Anciens élèves du Groupe ESRAConsultez l’annuaire des anciens élèves en ligne

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012II • ANNONCES

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Evènement désormais national, le 9e Salon Studyrama des Formations Artistiques et Culturelles aura lieu le 13 et 14 janvierprochain à l’Espace Champerret. Alors si vous vous sentez l’âme d’un artiste et que vous êtes à la recherche de laformation qui vous aidera à toucher votre rêve, ce salon est fait pour vous !Réalisé sous les hauts patronages du Ministère de l'Education Nationale, de la Jeunesse et de la Vie associative et du Ministère del’Enseignement Supérieur et de la Recherche, le Salon des Formations Artistiques et Culturelles s’adresse aux élèves deTerminale etétudiants de Bac à Bac + 5. Il a pour objectif de vous faire découvrir les multiples formations supérieures qui mènent à ces carrièrespassionnantes qui vous intéressent :multimédia, audiovisuel, mode, design, architecture d’intérieur, marché de l’art, cinéma, musique,médiation culturelle...Toutes les filières artistiques représentées !De nombreux établissements publics et privés seront présents : plus de 50 universités, écoles publiques ou privées, BTS, prépasseront donc à votre disponibilité pour vous renseigner, vous conseiller et vous guider vers la filière adaptée à votre profil.Profitez de cette possibilité d’échanger en direct avec des professionnels et des artistes afin de poser toutes les questions qui vous trot-tent en tête !Ne ratez pas les conférences ! Animées par des professionnels de l’orientation et des intervenants d’établissements, les 6 conférencesprévues vous apporteront conseils et informations complémentaires sur des sujets variés : comment préparer son admission en écoled’arts ? Quels débouchés après une formation artistique ou culturelle ? L’art à bac+2 : quel BTS choisir ?Pôle cinémaCaméraman, réalisateur, monteur, scripte, acteur… cette année, c’est les métiers du cinéma que vous découvrirez sur le pôleCinéma.Au programme :rencontres avec les écoles, échanges avec des professionnels reconnus, animations et démonstrations… Desartistes investiront les lieux et réaliseront des performances en direct.Vous retrouverez comme d’habitude des offres de stages dans les secteurs artistique et culturel.Enfin notez que la dernière édition del’Officiel Studyrama des formations artistiques vous sera remis gratuitement à l’entrée du salon.

Venez découvrir les meilleuresformations artistiquesau salon Studyrama desFormations artistiqueset culturelles !

Informations pratiques

9e Salon Studyramades formationsartistiques et culturelles

Le vendredi 13 (14h - 18h) etle samedi 14 janvier 2012(10h -18h)

Espace Champerret - Hall CVoiture : accès direct au parkingpar le périphérique,sortie Porte de ChamperretMétro : ligne 3,arrêt Porte de ChamperretBus : lignes 84, 92, 163, 165RER : ligne c, station Pereire

Plus d’informations sur lesalon,le détail des conférences etpour obtenir des invitationsgratuites :www.studyrama.comrubrique Salons

Prép'art sud (TOULOUSE)Tél. : 05 34 40 60 20

Établissement d’enseignement supérieur privé légalement ouvert auprès du Rectorat.

Prép'art (PARIS) :Tél. : 01 47 00 06 56

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La prépa privée aux écoles d'art publiques

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LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 ANNONCES • III

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LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012IV • ANNONCES

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ECONOMIEXPRESSO • 19

ÉNERGIE Le numéro1 mon-dial des éoliennes, Vestas, aannoncé hier la suppressionde 2 335 postes. Le danois aengagé un plan d’économiesde 150 millions d’euros paran pour faire face à l’effon-drement potentiel du marchéaméricain, les subventionsétant suspendues.

SOLDES La première journéedes soldes d’hiver, lancésmercredi sur la majeure par-tie du territoire, a été «satis-

faisante dans les centres com-merciaux de France», avec16,5 millions de visiteurs, se-lon le Centre national descentres commerciaux(CNCC).

BANQUE La Royal Bank ofScotland (RBS) a annoncé3 500 nouvelles réductionsd’effectifs dans le cadre de larestructuration de sa banqued’investissement, pour limi-ter son exposition aux activi-tés les plus risquées.

«Qu’on fiscaliseles charges sociales,qu’on permetteaux entreprisesde baisser leurs prixet de reporterle paiement descotisations socialessur une fiscalité pluslarge, cela mesemble une bonneidée.»

Michel­Edouard Leclerchier sur BFM Business

2,25%C’est le taux, inchangé,du Livret A. Le ministrede l’Economie, FrançoisBaroin, a décidé, hier, dene pas y toucher. La for­mule de calcul prévue parla loi aurait normalementdû faire passer le taux duproduit d’épargne popu­laire à 2,75% pour suivrel’inflation.

L es Français travaillent-ils vraiment six semai-nes de moins, chaque

année, que les Allemands ?Selon une étude de l’institutCOE-Rexecode (proche dupatronat), basée sur desdonnées harmonisées éta-blies par Eurostat (institutstatistique européen), les sa-lariés à temps complet onttravaillé, en 2010, 225 heuresde moins dans l’Hexagonequ’outre-Rhin (1679 heurescontre 1 904 heures). Pro-blème : en ne prenant encompte que les temps pleins,l’institut ne montre qu’uneimage tronquée de la réalité,les Allemands ayant un tauxde temps partiels supérieurde 7 points à la France(23,3% contre 16,4%). Quiplus est pour des duréesmoyennes annuelles de tra-vail inférieures (883 heurescontre 978 heures). Bref,alors qu’en France la réduc-tion du temps s’est faite defaçon plus homogène, la RTTen Allemagne s’est large-ment construite entre tempspleins et partiels (+6 pointsen dix ans).«Impossible». Ainsi, en in-tégrant les temps partielsdans le calcul du temps detravail moyen par salarié,l’écart entre les deux pays setrouve divisé par presquetrois : 1 550 heures pour lesFrançais contre 1637 côté al-lemand, soit 87 heures dedifférence. Ce qui repré-sente, au final, 5,6% detemps de travail en plus pourles Allemands. Un chiffre qui

montre que «les durées detravail sont très proches entreles deux pays», estime unresponsable de l’Insee.D’autant que si les méthodo-logies ont été harmonisées, ilsubsiste quelques différencesdans le recueil des données,qui sous-estiment le tempsde travail en France.En intégrant les temps par-tiels, la France n’est égale-ment plus l’avant-dernierpays travaillant le moins enEurope. Tous temps de tra-vail confondus, les Français

œuvrent davantage que lesDanois (1 490 heures) et lesHollandais (1 356 heures),autant ou presque que lesSuédois et les Finlandais, etseulement 40 heures demoins que les Britanniqueset les Irlandais.Autre souci : selon COE-Rexecode, la France auraitabaissé, entre 1999 et 2010,de 13,9% le temps de travaildes salariés à temps complet,contre seulement 6,1% pourles Allemands. Sauf que laplus grosse chute du tempsde travail sur cette décennieen France a lieu en 2003…lorsque la droite revient aupouvoir et commence à s’at-taquer aux 35 heures. Enréalité, il s’agit d’un biaisméthodologique, l’Inseeayant modifié son système

de recueil de données. «Dece fait, il est impossible decomparer des données avant etaprès 2003», dit un respon-sable de l’institut français.Besogneux. L’évolution dutemps de travail dépend éga-lement de nombreux autresindicateurs. Comme la po-pulation en âge de travailler,qui ne cesse de croître enFrance (+7,8% sur dix ans),alors qu’elle a baissé de 2,9%en Allemagne. Ce qui expli-que que le temps de travailait moins baissé outre-Rhin,

puisque le nombrede «bras» y a di-minué. Même si–autre indicateurinquiétant pourl’Allemagne – lenombre total

d’heures travaillées a chutéde 4,6% outre-Rhin en-tre 1999 et 2010, contre 1%en France.Enfin, outre que d’autres en-quêtes – certes controver-sées –, comme celles del’OCDE, disent l’inversed’Eurostat (1 309 heures detravail pour les salariés enAllemagne en 2009 contre1469 en France), le temps detravail n’a pas de rapport di-rect avec le taux de chômage.Ainsi, avec la plus basse du-rée du travail salarié en Eu-rope (1356 heures en 2010),les Pays-Bas ont un des tauxde chômage les plus faiblesde l’UE (4,8% fin 2011). Al’inverse, les besogneuxGrecs (1914 heures) culmi-nent à 18,3% de chômage…

LUC PEILLON

France-Allemagne,étudedetempspartialeTRAVAIL Un rapport pointe le faible volume horairepar salarié dans l’Hexagone. Une conclusion biaisée.

A peine arrivé au volant,Frédéric Saint­Geours sla­lome entre les rumeurs: lenouveau directeur desmarques de PSA­PeugeotCitroën s’est dit hier«ouvert» à l’idée d’unealliance avec un autreconstructeur. Mais pas for­cément avec Fiat. «On esttout à fait ouvert à cetteidée, mais il faut trouver lebon partenaire. Pour l’ins­tant, il n’y a pas d’allianceen cours», a dit Saint­Geours. Une manière dedémentir l’hypothèse d’unmariage avec le construc­teur automobile italienavancée par la presse tran­salpine. Et de relancer plu­tôt, en creux, l’idée d’uneunion avec le japonais Mit­subishi Motors qui avaitfailli aboutir en 2010? Laquestion est ouverte, carle numéro 1 français del’automobile n’est pas aumieux: ses ventes ontreculé l’an dernier de 1,5%dans le monde et de 6%en Europe. PHOTO REUTERS

SAINT­GEOURSÉVOQUE UNEALLIANCEPOUR PSA

LES GENS

Dans une fabrique du Nord, en 2007. PHOTO PASCAL ROSSIGNOL. REUTERS

-0,15 % / 3 199,98 PTS2 843 644 175€ +3,01%

PEUGEOTACCORBNP PARIBAS ACT.A

TOTALDANONECAP GEMINI

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L’institut COE-Rexecode n’apas intégré le temps partielà ses calculs, lequel est plusimportant en Allemagne.

Par STÉPHANIE LACAZE

Les «recalculés» au turbincontre les caisses de retraite

I ls se baptisent les «recal-culés» de la retraite. Deshommes et des femmes à

qui on demande de rem-bourser une partie de leurpension. Hier matin à Bor-deaux, une soixantained’entre eux, dont beaucoupd’anciens salariés de Das-sault, ont distribué des tractset fait signer une pétition de-vant la Carsat (Caisse d’assu-rance retraite et de la santéau travail) d’Aquitaine.«C’est une façon de faire con-naître notre mobilisation et dedire que les recalculés ne sontpas des fraudeurs», souligneFrançois Garofalo, l’un despiliers du collectif qui s’estmonté à l’initiative du syndi-cat CGT de Dassault Aviationen Gironde.

Christian Panséra est l’un deces «recalculés». Il est partià la retraite en novem-bre 2004, à 56 ans et demi.«A l’époque, j’ai bénéficié dudispositif de départ anticipépermis par la loi. J’ai rachetédes trimestres en faisant valoirmes années d’apprentissage etles emplois saisonniers que j’aioccupés lorsque j’avais 14 et15 ans. Pour ces petits boulotsdans les années 60, je n’avaispas de fiches de paie. Mais ilsuffisait alors de fournir unedéclaration sur l’honneur de

témoins qui nous avaient vustravailler», raconte le retraité.

Pourtant à la fin de l’annéedernière, il reçoit une lettrede sa caisse de retraite. Onlui explique que sa pension aété révisée et qu’il doit rem-bourser 70000 euros avant lafin du mois! A la suite d’uneenquête de l’Urssaf sur sondossier, les témoins qu’il afournis pour justifier de sesemplois saisonniers n’ontpas été jugés fiables et cesmois de travail sont remis encause dans le calcul de sa re-traite. «C’est scandaleux,quand on sait que j’ai été en-couragé par mon entreprise àpartir plus tôt. Aujourd’hui, sije dois rembourser ces70 000 euros, je vais êtreobligé de vendre ma maison»,s’insurge Christian Panséra.

A ce jour, 1 500 dossiers derecalculés ont été recensésdans toute la France, dont37 en Gironde. Certains sevoient réclamer le rembour-sement de sommes allantjusqu’à 100 000 euros. Tousplaident la bonne foi et affir-ment qu’ils «ne sont pas desfraudeurs». Ils ont d’ailleursreçu, hier, le soutien des sa-lariés de la Carsat, qui dé-noncent «la manière de faire»de leur direction. •

VU DE BORDEAUX

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012

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20 • SPORTS

LePSGtombedanslePatoTRANSFERT Nouveau camouflet pour le club parisien: l’attaquantdu MilanAC annonce ne pas vouloir venir, malgré une offre mirifique.

L e Paris-SG version qa-tarie a beau avoir lespoches pleines, la

question de son attractivitéauprès des joueurs de niveauinternational se pose avec unpeu plus d’acuité de jour enjour. Une semaine aprèsl’officialisation de la non-venue de l’Anglais DavidBeckham et trois jours aprèsque Kaká a fermé la porte, leclub de la capitale s’est prisun vent hier avec l’attaquantbrésilien du Milan AC,Alexandre Rodrigues daSilva (22 ans), dit Pato. Lerefus du joueur est peut-êtreprovisoire.Il faudra cependant se souve-nir que la proposition royaledu PSG (autour de 6 millionsd’euros annuels de salaire) nel’a pas fait sauter au plafond.L’histoire s’est tramée hier.Au moment où le directeursportif du club, Leonardo,officialisait l’arrivée du dé-fenseur brésilien remplaçantde Barcelone Maxwell(30 ans) pour un montantnon communiqué (autour de5 millions d’euros), l’AFPfaisait état d’un accord entrele Milan AC et le PSG pour letransfert de Pato, autour de35 millions d’euros, bonuscompris.«Maison». Leonardo tempé-rait alors les enthousiasmes:«Les choses avancent. Il y ades possibilités, mais il n’y apas d’accord. On va voir, on adu temps, il n’y aura rien ven-

dredi, ça, c’est sûr.» Vers17 heures, Pato et le Milandémentaient sur le site inter-net du club. Le joueur brési-lien s’est exprimé longue-ment: «Milan est ma maison.Je ne veux pas interrompre macarrière en rouge et noir avantd’avoir gagné un ou deux tro-

phées avec mon équipe. Je veuxcontribuer à écrire l’histoire duclub et prendre part à ses suc-cès futurs avec joie et en par-faite harmonie avec le groupe.Cette joie me donne la forced’affronter les succès futursavec un plus grand enthou-siasme, de vaincre et de mar-

quer des buts. Aujourd’hui estun jour spécial pour moi. Je re-mercie le président Berlusconi,le club et les supporteurs, quiont toujours cru en moi.»Identité. Faute d’explica-tion supplémentaire, ce«jour spécial» évoqué par leBrésilien semble la réaffir-mation de son identité mila-naise alors qu’il était à lacroisée des chemins. Le club,lui, a écrit cette phraselourde de sens: «L’attaquanta décidé de continuer sa jeuneet déjà splendide carrière sousle maillot rouge et noir.» Engros : soucieux de faire ren-trer du cash pour faire venirl’Argentin de ManchesterCity Carlos Tévez (27 ans),Milan se serait bien vu ven-dre son attaquant (parailleurs petit ami d’une desfilles de Berlusconi, prési-dent du Milan).Mais Pato, 51 buts en111 matchs de Série A depuisson arrivée en 2008, mais aurégime sec cette saison(9matchs, 1 but), a grimacéquand il a découvert l’iden-tité de sa destination, rava-lant ainsi le Paris-Saint-Ger-main au rang du premierclub turc venu. Hier, Leo-nardo a paru agacé quand lesujet est arrivé : «Il est là,Pato ? Question suivante !»D’accord : le standing duclub de la capitale est-ilaujourd’hui à la hauteur desmoyens dont il dispose ?

G. S.

FORMULE 1 Robert Kubica ànouveau blessé. Gravementtouché à la jambe et au brasdroit il y a un an dans un ac-cident de rallye, le pilote po-lonais s’est à nouveau casséla jambe dans des circons-tances qui n’ont pas été

éclaircies par les médecinsqui suivent sa rééducation.

GYM Thomas Bouhail re-nonce aux Jeux de Londres.L’opération consécutive à sablessure à la jambe a été sui-vie de complications.

Pato, le 2 avril, à Milan. PHOTO OLIVIER MORIN. AFP

Retrouvezle vainqueur duPrix BD 2012dans le libé bddu 26 janvier

TROIS QUESTIONS À THOMAS COVILLECHEF DE QUART DE «GROUPAMA 4» SUR LA VOLVO OCEAN RACE

«Nous sommes l’équipeavec le plus grandpotentiel de progression»

w Groupama 4 a remporté la deuxièmedemi-étape à Abou Dhabi il y a une se-maine et pointe à la 3e place au général.Cela vous donne confiance?Nous avons montré qu’on était capablesde gagner une régate face à des spécia-listes. Mercredi, nous avons aussi rem-porté une manche d’entraînement et on

a vu les autres faire des erreurs. Nous sommes dans la bonnespirale avant la «In-Port Race» de cet après-midi. Dans cesrégates, il faut être réactif sur la phase de départ car, souvent,tout est joué dès la première bouée et il est impossible de re-passer devant. Ce sera la même pour le départ samedi.w C’est une attitude très différente de la course au large…C’est stressant, car il n’y a pas de deuxième chance. 18 pointssont distribués, c’est la moitié de ce qui est attribué pour uneétape entière. Nous n’avons pas cette culture des courses àpoints. Nous subissons donc une tension par rapport au résul-tat final. Mais, depuis notre victoire, les concurrents nousregardent autrement. Nous sommes l’équipe avec le plusgrand potentiel de progression.wLa deuxième partie d’étape vous mènera à Sanya (Chine). Unparcours qui n’a rien d’océanique…C’est un endroit qu’on va découvrir. Aucun d’entre nous n’anavigué par là-bas. Ce sera une course d’observation et destratégie où le choix des voiles va être prépondérant. Maisnous avons reçu de nouvelles voiles et nous avons fait évoluerle bateau au fur et à mesure. Il est mené à rude épreuve etc’est limite dangereux pour nous. Avec sa puissance, la vio-lence des chocs avec les vagues nous fait parfois voler !

Recueilli par DINO DIMEOPHOTO AFP

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CalmePeu agitée

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LLEE MMAATTIINN La faible perturbationprogresse vers le sud avec des pluiesà l'est. Les éclaircies reviennent àl'arrière par le nord avec un air frais.

LL’’AAPPRRÈÈSS--MMIIDDII Éclaircies au nord,surtout près de la Manche. Cielnuageux de l'Atlantique à l'Auvergneet aux Alpes. Mistral en Camargue.

-10°/0° 1°/5° 6°/10° 11°/15° 16°/20° 21°/25° 26°/30° 31°/35° 36°/40°

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FRANCE MIN/MAX

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Beau temps ensoleillé sur la plupartde nos régions avec des tempé-ratures de saison. Temps parfoisnuageux en Méditerranée.

SAMEDISoleil dominant au nord et à l'est. Cielpassagèrement nuageux dans l'ouestet le sud. Assez froid.

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LIBÉRATIONwww.liberation.fr11, rue Béranger 75154 Paris cedex 03 Tél. : 01 42 76 17 89 Edité par la SARL Libération SARL au capital de 8726182 €.11, rue Béranger, 75003 ParisRCS Paris : 382.028.199Durée : 50 ans à compter du 3 juin 1991. CogérantsNicolas DemorandPhilippe Nicolas Associéeunique SA Investissements Presse au capital de 18 098 355 €.Président du directoire Nicolas DemorandPhilippe Nicolas Directeur de la publication et de la rédaction Nicolas Demorand Directeur délégué de la rédaction Vincent GiretDirecteurs adjoints de la rédaction Stéphanie AubertSylvain BourmeauPaul QuinioFrançois SergentDirectrice adjointede la rédaction,chargée du magazineBéatrice VallaeysRédacteurs en chefLudovic Blecher(éd. électronique)Christophe Boulard(technique) Gérard LefortFabrice RousselotFrançoise-Marie Santucci(Next)Directeurs artistiques Alain BlaiseMartin Le ChevallierRédacteurs en chef adjoints Michel Becquembois (édition)Eric Decouty et Pascal Virot(Politique)Jacky Durand (société)Olivier Costemalle et Richard Poirot (éd. électronique)J.Christophe Féraud (éco-terre)Mina Rouabah (photo)Marc Semo (monde)Sibylle Vincendon (spéciaux)Directeur des EditionsElectroniquesLudovic BlecherDirecteur administratif et financierChloé NicolasDirecteur commercial Philippe [email protected] du développementPierre HivernatABONNEMENTSMarie-Pierre Lamotte& 01 76 49 27 [email protected] abonnement 1 an Francemétropolitaine : 324€.PuBLICITÉ Directrice générale de LIBERATION MEDIAS Marie Giraud Libération Medias. 11, rueBéranger, 75003 Paris. Tél. : 01 44 78 30 67Amaury médias25, avenue Michelet93405 Saint-Ouen CedexTél.01 40 10 53 [email protected] annonces.Carnet. IMPRESSIONPOP (La Courneuve), Midi-print (Gallargues)Nancy Print (Nancy)Ouest-Print (Bournezeau),Imprimé en France

Tirage du 12/01/12:151 735 exemplaires. Membre de OJD-Diffusion Contrôle.

CPPP: C 80064. ISSN 0335-1793.

Nous informons nos lecteursque la responsabilité du jour -nal ne saurait être engagée encas de non-restitution dedocuments

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H. I. Un jour comme aujourd’hui, pourquoi n’enauriez vouspasun? - II. Tout à fait d’actualitédepuisprès de quatre semaines. - III. Ancêtre gourmanddes Edomites. A peine quelques âmes du côté deRivière-Pilote. - IV.Compteunpeuplusd’âmesquele précédent. - V.Dit pour le salut de l’âme. Suivitlemouvement. - VI.Article.Pèrede labelleEurope.- VII. Sa racine vient à bout de chinoises fatigues.- VIII. Donna finalement plus d’ampleur. Cousinméridional de l’alouate. - IX. Finirent par se tordre.Déteste le sexe à l’épellation. - X. Un des états del’Ancien Régime. Reste encore d’actualité jusqu’àla fin dumois. - XI. Aux couleurs du clan.V. 1. Peut fournir lemoyend’augmenter ses chancesaujourd’hui. - 2. Peigne agréablement la girafe. Plustrès frais. - 3. Telle unebonne curede sémillon.Mitfin à sa carrière en 1941, deux ans à peine aprèsavoir enfin ri à l’écran. - 4. Parle fulfulde dans lemassif duFouta-Djalon.Ontdesfinsdemois faciles.- 5.Peutdistraireavec lepremierdu8.SauvaOrléansdes hordes hunes. - 6.Vrais casse-têtes. Sa versionsociale risquede nepas l’être du tout. - 7.Grandesamatrices de Krill. En soie. - 8.Cf. le premier du 5.Touchent au timbre. - 9. Pas vif du tout.

IIIIIIIVVVIVIIVIIIIXX

LES MOTS D’OISEAU H EFDD

H:I. Pasminces. II. Receleuse. III. Irène. LSD. IV.Mantas.Eu.V.Oté. Loi.VI. Risbermes.VII.Do.Estima.VIII. INED.Aton. IX. Régnant. X. LCR.Atidé. XI. Etatistes.V:1. Primordiale. 2. Aération. ct. 3. Scènes. Erra. 4.Ment.Bédé. 5. Iléales. Gai. 6. Ne. Sortants. 7. Cul. Imitait. 8.Esse. Emondé. 9. Séduisantes.

XI

w LES MOTS D’OISEAU VVeennddrreeddii 1133......

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a b c d e f g h i j l m n o p q r s t u v w x y z a b c d e f g h i j l m n o p q r s t u v w x y z

Grand Prix FFE, Port-Marly 2011Les Noirs jouent et gagnentB. Zubarev N. Vachier-LagraveLe tournoi de Saint Sébastien (Espagne) ou leséchecs selon Bronstein. Au Jeu des Rois, les blancsont l’avantage du trait : le fait de commencer lapartie leur donne une certaine initiative, qui peutdurer une vingtaine de coups, en adoptant parexemple une formation agressive. De cela décou-le souvent un avantage psychologique, puisquecelui qui commence peut choisir son champ debataille. DDaavviidd BBrroonnsstteeiinn ((11992244 -- 22000066)) , qui fit jeuégal en son temps avec le Champion du mondeBotvinnik en match officiel (1951), rétablissait lastricte égalité entre deux joueurs par un artificeaussi simple que génial: on joue une partie avecles blancs et une autre avec les noirs contre sonadversaire ! En même temps. Il fallait y penser. C’est sur ce modèle et un système coupe par éli-mination directe en parties longues que le tour-noi de San Sebastian s’est déroulée du 28 décem-bre au 6 janvier 2012, avec une forte colonie fran-çaise, entièrement décimée. Seul Étienne Bacrotest parvenu en quarts de finale, mais, après unmatch titanesque face à l’Ukrainien Moiseenko, ildoit s’incliner 3,5 - 4,5 à l’issue des départages enblitz. La finale a consacré un autre Ukrainien, Volo-kitine, qui remporte deux positions « égales » faceau Tchèque Laznicka. La première est gagnée autemps par simple distraction, et la seconde surgaffe de son adversaire, troublé par la première!

Le grand maître Rozentalis ne rate pas l’occasiond’achever sa partie en beauté par 11.. DDee77++!!!! , avecl’idée 1... Rxe7 2.Cxf5+ et 3.Cxh4, qui laisse les noirssans voix et surtout sans pièce. Après le délit defuite 11...... RRgg66, les blancs font barrage par 22..DDgg77++!! 11--00, avec strictement le même schéma de fourcheMeen f5. JJeeaann--PPiieerrrree MMeerrcciieerr

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LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 JEUX­METEO • 21

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La Hongrie démocratique lance un appel,l’Europe institutionnelle fait la nique ou lasourde oreille, patauge dans l’hypocrisie.Mais si les gouvernements européens veu-lent se perdre dans de paralysantes et ir-responsables longueurs procédurales, il estnécessaire que les citoyens européens fas-

sent de la «question hongroise» un de leurs problèmeset une de leurs batailles. Sans délai.Le gouvernement de Viktor Orbán a imposé une nou-velle Constitution qui piétine les droits démocratiquesminimaux dont l’Europe a pourtant exigé qu’ils soientrespectés et protégés par tout pays voulant adhérer

à l’UE. La loiélectorale esttaillée sur me-sure pour facili-ter la victoiredu parti d’Or-bán, même à

l’avenir ; les médias sont bâillonnés; les magistratssont asservis à la volonté de l’exécutif; la Banque cen-trale perd toute marge d’autonomie; chauvinisme etracisme deviennent le ciment «populaire» de ce véri-table fascisme postmoderne.Si la Hongrie d’Orbán demandait aujourd’hui à adhé-rer à l’Europe, sa demande serait rejetée, dans la me-sure où elle ne répond pas aux exigences démocrati-ques. Mais l’article 7 du traité de Lisbonne spécifie quele gouvernement d’un pays déjà membre de l’UE doitperdre son droit de vote si elle viole ces exigences. Il

est donc nécessaire que le Parlement de Strasbourg,la Commission de Bruxelles et les gouvernementseuropéens s’activent sur le champ afin d’appliqueravec la plus grande intransigeance l’article 7. Tout at-tentisme, tout «diplomatisme», toute tentative demise en place de sanctions «graduées», ne feraitqu’encourager le gouvernement Orbán à poursuivrela route qu’il a empruntée de façon si insolente, avecle risque de contagion antidémocratique pour toutela communauté politique continentale.Se plier à l’arrogance des pouvoirs antidémocratiques,au nom du «moindre mal», a toujours été la tentationdes establishments du privilège. En 1938, les tièdesdémocrates Chamberlain et Daladier, qui s’abaissèrentdevant les antidémocrates cohérents Hitler et Musso-lini, furent les tragiques protagonistes de ce syndromede lâcheté (frisant l’omertà). Si l’Europe des Merkel,des Cameron et des Sarkozy cédait aujourd’hui à Or-bán, en faisant semblant de regarder ailleurs ou en secontentant de sanctions de façade, elle répéterait àéchelle réduite l’infamie de 1938. Et, de grâce, qu’onn’aille pas citer Marx qui, à propos de Napoléon III,disait que l’histoire se répète toujours deux fois, unefois comme tragédie et l’autre comme farce. Il en vaainsi parfois, mais cette fois-ci, la nouvelle tragédie,bien qu’en petit format, est pour ceux qui la viventaussi dévastatrice que la précédente. Avec la circons-tance aggravante que Hitler était alors une puissancemilitaire et économique qui à elle seule valait le restede l’Europe, alors qu’Orbán est obligé, chapeau à lamain, de demander de l’aide au FMI. Et, devant un

efficace cordon sanitaire européen, il serait contraintde s’en aller (comme l’ami Berlusconi). Aussi la lâ-cheté de Merkel, Cameron et Sarkozy serait-elle unelâcheté au carré. Serait complicité.Si Orbán a toujours désigné Poutine et Berlusconicomme ses modèles, recevant en retour leur appui leplus chaleureux (il y a dix ans, à Budapest, Berlusconidéclara: «nos programmes et nos politiques sont identi-ques, entre nous il est une extraordinaire syntonie»), cen’est pas tout à fait un hasard. Cela montre que lapeste du fascisme postmoderne, qui n’est soft qu’enapparence, est une force diffuse et une menace crois-sante, dont Marine le Pen et la droite néerlandaise quifait partie de la majorité de gouvernement, sont autantd’autres inquiétants icebergs.Si l’on veut éviter la contagion, il faut que les pestifé-rés soient traités comme des pestiférés. L’Europe a trèsmal agi en n’intervenant pas contre Berlusconi pen-dant presque vingt ans. Si elle n’intervient pas contreOrbán, elle prépare son propre suicide. Parce quesanctionner Orbán, le priver du droit de vote dans lesinstitutions européennes, signifie soutenir la Républi-que hongroise, la citoyenneté démocratique hon-groise, descendue dans la rue en chantant l’Hymne àla joie de Schiller-Beethoven, que l’Europe a adoptécomme son propre hymne. Notre hymne –si nous nevoulons pas que l’Europe reste l’Europe des mar-chands, des banquiers (avec megabonus et titres toxi-ques adjacents) et des gouvernements démocratiquestièdes (avec la lâcheté et l’omertà qui vont avec).Traduit de l’italien par Robert Maggiori.

L’Europe a très mal agi en n’intervenantpas contre Berlusconi pendant vingt ans.Si elle n’intervient pas contre Orbán,elle prépare son propre suicide.

Par PAOLOFLORESD’ARCAISPhilosophe,directeur de larevue italienneMicromega

Viktor Orbánou le fascisme postmoderne

Khmers rouges sangA

vec l’Elimination publié cesjours-ci chez Grasset, RithyPanh, cinéaste cambodgien,survivant des massacres

khmers rouges des années terribles1975-1979, nous donne, aidé par Chris-tophe Bataille, un livre terriblementpuissant. Un livre ? Un coup de poingdans l’estomac, plutôt! Vous le prenezlà, vous vous pliez en deux et ensuitevous réagissez… ou pas! Mais alors, tantpis pour vous, parce qu’il vous travaille,pénètre les méandres de votre âme ets’assoit là, tout au fond, comme un léo-pard à l’affût. Car il ne s’agit pas seule-ment d’un long hurlement; c’est aussiun livre à l’intelligence décapante, lalente déconstruction d’un système fou.Il suit le cours de centaines d’heuresd’entretien que Rithy Panh eut avecKaing Guek Eav, dit Douch, responsa-ble du centre «S21», dans lequel aumoins 12380 personnes furent torturéeset la plupart ensuite mises à mort. Maispourquoi ? Pour installer un véritablerégime communiste, il fallait se débar-rasser des classes sociales qui résistaientà la révolution, les bourgeois, les intel-lectuels, les propriétaires… Et proprié-taires de quoi ? De quelque chose, den’importe quoi… N’importe qui, aufond… Douch ne connaissait pas RithyPanh, un numéro sans nom, destiné àdisparaître, même pas un être, même

pas un pou. Rithy Panh ne connaissaitque Douch, responsable de tout ce quiétait arrivé, à lui, à sa famille, à sonpays… Livre terrible, d’où l’on ne res-sort pas indemne.La notion de «traumatisme», et surtoutce qu’elle est devenue jusqu’à désignerles petits moments du quotidien, estbroyée. Nous, les psys, nous devrions lereconnaître, nous nous sommes four-voyés. Le traumatisme n’explique rien,et surtout pas les pathologies. Il existeen revanche des violences extrêmes,

délibérément infligées à certains hom-mes par d’autres hommes qui les ontpensées comme éléments d’une straté-gie. D’où l’importance d’identifier cesstratégies en tant que procédures intel-lectuelles, de les mettre à plat. Ce livreest évidemment, de ce point de vue, unélément de psychothérapie.«Je demande s’il cauchemarde la nuitd’avoir fait électrocuter, frapper avec descâbles électriques, planter des aiguillessous les ongles, d’avoir fait manger desexcréments, d’avoir consigné des aveuxqui sont des mensonges, d’avoir fait égor-

ger… Il réfléchit puis me répond, les yeuxbaissés : “Non.” Plus tard, je filme sonrire.» (p. 13) Je l’ai vu éclater de riredans Douch, le maître des forges de l’en-fer, le nouveau film tourné par RithyPanh, qui a été retenu dans la sélectionofficielle du festival de Cannes 2011 –jel’ai entendu, ce rire terrible, qui ré-sonne et traverse les murs et les fron-tières. L’homme utilise cette même in-telligence perverse pour monter denouvelles stratégies, pour tromper lesjuges, jusqu’à narguer les survivants.

Mais, à quoi donc servait latorture? Certainement pasà faire parler, puisque lesaveux extorqués, rédigésde manière stéréotypéedans des rapports gigan-tesques, étaient faux – ce

que tout le monde savait, à tous les ni-veaux de la hiérarchie. La torture neservait pas davantage à faire taire. Lafaim, d’abord, avait anéanti toute résis-tance –le pays entier avait été affamé.Et puis la terreur de tous les instants, ladénonciation permanente, les règle-ments absurdes et impossibles à con-naître dans leurs détails, tout cela avaitgénéré un pays pétrifié, un territoired’ombres. A quoi donc servait-elle,alors? A convaincre que le monde pou-vait être transformé par une idée.La torture est un acte intellectuel. Pour

Par TOBIENATHANProfesseurde psychologieclinique etpathologique,universitéParis­VIII

preuve cette torture incroyable dans sonabsurdité, consistant à vider unefemme de tout son sang – oui ! –, luiplanter un cathéter dans chaque bras etla vider jusqu’à la dernière goutte. Dansle Kampuchea démocratique de Pol Pot,la torture était un acte idéaliste absolu.J’en frémis encore. «Monsieur Rithy, lesKhmers rouges, c’est l’élimination.L’homme n’a droit à rien.» (p. 99)J’ai lu un certain nombre de livres surles terreurs de masse, sous le régimenazi, dans l’empire soviétique, au mo-ment de la révolution culturelle chi-noise, pendant le génocide rwandais…pourquoi lire de tels témoignages, quel-quefois à la limite de l’insupportable?La description de ces violences ex-trêmes nous apprend, non pas seu-lement sur les capacités des humains–et notamment les enfants– à survivreau pire ; non pas sur ce qu’on a appeléavec naïveté «la banalité du mal», maissur les stratégies politiques réelles, tel-les qu’elles viennent s’incarner; tellesqu’elles viennent s’incruster à l’intimede l’être.La psychologie, ce n’est au fond que dela politique incarnée. Ce livre resterainscrit en moi, comme d’autres, incon-tournable, comme Si c’est un homme dePrimo Levi, Auschwitz et après de Char-lotte Delbo, la Nuit de Elie Wiesel oul’Espèce humaine de Robert Antelme.

Il existe des violences extrêmes,infligées à certains hommes pard’autres hommes qui les ont penséescomme éléments d’une stratégie.

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201222 • REBONDS

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Portraitde Sarkozyen joueurde baby-foot

De Nicolas Sarkozy, ses séides et sescourtisans proclament volontiers qu’ilest un «moteur». Si elle ne brille paspar son audace, l’image a ce mérite desouligner le caractère violemment mé-canique de la campagne du candidat-président sortant, où tout se cycle et serecycle comme en une usine de retrai-tement de déchets. S’y imaginent,comme dans les Temps modernes deChaplin ou le Métropolis de Fritz Lang,des tapis roulants s’entrelaçant tels bre-telles autoroutières pour déposer unehétérogène et arbitraire quincaille sousle pilon d’un monstrueux concasseur.L’organisation de la campagne seraitainsi d’un taylorisme à flux très tendus,dans une division exacerbée du travailpropagandiste et sans autre finalitéqu’un productivisme démentiel de pro-messes et de réformes,de projets et de lois, in-satiablement. Las! De ce«moteur» qui fonctionne aux deuxtemps de «la crise» et de la présiden-tielle, Sarkozy est moins le visionnaireingénieur que le contremaître fébrile,sur un chantier en surchauffe ayant ac-cumulé des années de retard. Méta-phore pour métaphore, l’actualité ap-pelle à en filer une autre, égalementsignifiante et symptomatique. A consi-dérer les irruptions successives de Da-vid Beckham et d’Eric Cantona sur leterrain de tous les grands écarts, ellesera footballistique.On sait le barouf et le flop qu’a générésle mois dernier l’hypothèse d’embau-che, par le club Paris-Saint-Germainshooté aux gazo-dollars qataris, del’ex-star de la sélection anglaise, re-convertie, selon les gazettes, en «icônemétrosexuelle». Même en considérantl’âge – quasi canonique, dans ce mé-tier– du joueur de bientôt 37 ans, l’in-formation n’échappait pas tout à fait auchamp sportif : Beckham ferait au PSGvendre des maillots à son numéro et à lagloire du club. Il le ferait, n’en doutonspas, avec plus de succès qu’EdouardBalladur les tee-shirts ayant prétendu-ment financé sa campagne présiden-tielle de 1995 (arnaque plus grossièreque certaine main fameuse de ThierryHenry, mais que Roland Dumas, arbitresocialiste au Conseil constitutionnel,valida). L’investissement ne fit pas plusque cela couiner le supporter, tant lefoot-business est désormais assumé, si-non revendiqué, sans états d’âme parses promoteurs. A peine fronça-t-il lenez, le supporter, à l’énoncé du mon-tant de la transaction, en le comparantmoins à ses propres revenus qu’à ceuxdes actionnaires du CAC 40… Pour les

autorités civiles de tutelle, qui ont de-puis des lustres associé le bleu du dra-peau à celui du maillot aux accents ca-cophoniques de la Marseillaise et de lamorale sportive, elles restèrent muet-tes, à l’instar du ministre Douilletauquel aurait pris le caprice de se con-fronter à une édition de l’Ethique deSpinoza. Rien là que de très naturel, audemeurant, car c’est un signe destemps sarkoziens que cette autre décli-naison de «l’argent décomplexé» quiimprégna si fort le quinquennat.Il est heureux que cette valse à troistemps du football, de la morale et dupognon s’interprète quelquefois sur unair moins aliénant, moins «opium dupeuple»… Lilian Thuram en avait donnéle tempo plus allant lors de la dite «crisedes banlieues» de 2005, en associant le

racisme antisocial dugouvernement à l’en-droit des jeunes des

quartiers à leur qualification de «ra-caille» par le ministre de l’Intérieurd’alors. (Celui-ci, un certain NicolasSarkozy, avait alors élégamment rétor-qué que «Thuram ne vit plus en banlieuedepuis longtemps, mais en Italie, avec unsalaire bien confortable qui ne regarde quelui».) L’ex-défenseur guadeloupéenparla encore assez franc, à propos desans-papiers et de racisme tout court,pour sacrifier sa réputation d’interna-tional. Eric Cantona –notre immarces-cible idole, poète d’Old Trafford avecManchester United et prince des âmesindomptables avec Ken Loach – avaitpris ce relais fin 2010 en invitant le ci-toyen à souffler dans les bronches de sesbanquiers; puis mardi dernier encore,en remettant sur le tapis la question dulogement, qu’il avait déjà soulevée enparticipant naguère à une autre campa-gne promotionnelle au bénéfice de lafondation Abbé-Pierre.La déclaration de Morano selon laquelle«Canto» est trop riche pour être lucidese faisant attendre, on s’est plu à imagi-ner Sarkozy en joueur de baby-foot, as-tiquant en tout sens les poignées et se-couant la table, en priant pour que lesfigurines de métal finissent par percuterune balle de liège – une Scop à Sea-France, une taxe Tobin ou un quotientfamilial – qui, moins par maîtrise dugeste que par accident, finirait par at-terrir dans le but adverse.Contre ces robots de la «roulette», lariposte ne consiste pas à pleurnicherauprès d’un hypothétique arbitre qu’«ily a triche». Elle consiste à lâcher lesmanettes, passer de l’autre côté de latable et à en détacher le tricheur, touten l’invitant fermement à dégager.

NO SMOKING

Par PIERREMARCELLE

La tentation malthusienne

Le projet du candidat socialiste de sup-primer le quotient familial est unefausse bonne idée. Alfred Sauvy, dontje fus le successeur direct, répétait

toujours qu’il ne fallait pas confondre «poli-tique familiale» et «politique sociale» : cen’est pas le rôle de la politique familiale d’ef-

fectuer une redistribution des richesses opé-rée par l’impôt sur le revenu. Pour lui,comme pour les fondateurs de la République,chaque enfant, quel que soit le milieu dont ilest issu, est un enfant de la République et doitêtre encouragé de manière semblable.Cela veut dire que l’Etat doit contribuer àgommer la charge supplémentaire que repré-sente l’enfant pour un couple, par rapport àcelui, de mêmes revenus, qui n’en fait pas.L’idée, c’est que l’enfant ne doit pas peser surle niveau de vie, quel qu’il soit.

Le quotient familial est donc la seule «nichefiscale» qu’il ne faut supprimer sous aucunprétexte. Le signal donné aux classes mo-yennes par sa suppression reviendrait à leurdire : «Ne faites plus d’enfants.»Cette mesure malthusienne n’a que l’appa-rence d’une idée de gauche.En réalité, il s’agit d’un concept libéral favo-risant l’«équité» et la discrimination enfonction des revenus, au détriment del’«égalité» universelle. Au nom de la mêmeéquité, faudrait-il renoncer au principe fon-

dateur d’une école publique gratuitepour tous ?En garantissant des avantages fis-caux aux classes moyennes, cellesqui font le plus d’enfants, notre po-

litique de natalité originale (poursuivie partous les gouvernements depuis 1938) a fait dela France un pays qui remplace ses géné-rations, et dont le dynamisme démogra-phique est unique en Europe. Dans ce do-maine, ce sont plutôt nos voisins (Allemagne,Italie, Espagne), proches du «suicide démo-graphique», qui devraient prendre exemplesur nous.

Vient de publier: «Sans la Nation le chaos:l’aveuglement des élites», éditions du Toucan.

Par JEAN­CLAUDE BARREAU Ancienconseiller de François Mitterrand, présidentde l’Institut national des étudesdémographiques de 1989 à 1999

Le quotient familial est la seule «nichefiscale» qu’il ne faut supprimersous aucun prétexte.

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 REBONDS • 23

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Non à la fusion–destruction de RFI

Radio France Internationale est en pé-ril. Menacée, jusque dans son exis-tence, par la fusion juridique etrédactionnelle avec la chaîne de télé-

vision France 24, voulue par le président dela République française et menée à marcheforcée par les responsables actuels del’Audiovisuel extérieur de la France (AEF).Rapprocher des outils publics d’informationinternationale semble, de prime abord, logi-que. Mais fusionner une radio […] avec unetélévision […] ne l’est assurément pas. Nidans l’organisation technique ni dans lespratiques professionnelles. On se souvientque France 24 n’a pas été conçue au sein del’audiovisuel public extérieur de la France[…] mais qu’elle est la résultante d’uneétrange alchimie, qui a d’abord mêlé des in-térêts privés (groupe TF1) et publics (FranceTélévision), avant d’être abritée par la hol-ding de l’AEF. […]Plus inquiétant: cette fusion exige le départde près de 130 salariés supplémentaires,après 206 suppressions de postes imposéesen 2009. Ces coupes claires fragilisent la ri-chesse de RFI, média d’information et demagazines, en français et dans plus de dixautres langues. Elles mettent en péril sa ca-pacité à demeurer une radio qui nous informedu monde des autres et qui leur dit aussi quinous sommes.Quelle est alors la raison d’être de ce projet,en dehors de tout cadre éclairant sur le rôlefutur de RFI: ni cahier des charges finalisé,ni objectifs et moyens précisés, ni projet édi-torial formulé, à ce jour? S’agit-il de ponc-

tionner des moyens humains, techniques etfinanciers, légitimement affectés à la 3e radiomondiale, pour perfuser une télévision sous-dotée depuis sa création? Nous le redoutons,comme l’écrasante majorité de celles et ceuxqui font quotidiennement RFI […].C’est pourquoi nous prenons position contrecette fusion RFI-France 24 et pour le main-tien de RFI, dans sa dimension multilingue,multiculturelle, en tant que radio internatio-nale publique de la France.

Parmi les premiers signataires:Isabelle Autissier, Jean­Christophe Bailly,Etienne Balibar, Françoise Balibar, PatrickBaudoin, Denis Baupin, Esther Benbassa, PatrickBloche, Pascal Boniface, José Bové, RonyBrauman, Breyten Breytenbach, Marie­GeorgesBuffet, François Burgat, Patrick Chamoiseau,Manu Chao, CharlElie Couture, RégineDesforges, Souleymane Bachir Diagne, ManuDibango, Adolfo Perez Esquivel, Hélène Flautre,Bakary Fofana, Susan George, François Gèze,Claude Girault, Nathalie Goulet, Alain Gresh,Emmanuelle Grundmann, Stéphane Hessel,François Hollande, Eva Joly, Jean Jouzel, JackLang, Corinne Lepage, Jean­Marc Levy­Leblond,Alain Lipietz, Noël Mamère, Roland Marchal,Martine Martinel, Michela Marzano, MoncefMarzouki, Jean­Luc Mélenchon, Aldo Naouri,Toni Negri, Sally Nyolo, Ahmedou Ould Abdallah,Piem, Serge Portelli, Atiq Rahimi, IgnacioRamonet, Sapho, Alioune Sall, Luis Sepulveda,Aminata Sow Fall, Benjamin Stora,Bertrand Tavernier, Jacques Testart,Michel Wieviorka…

Pour lire l’intégralité de la pétition et poursigner: rfiriposte.wordpress.com/petition

Le judaïsmeà la dérive

Les récents heurts avec les ultra-orthodoxes en Israël sont à com-prendre dans une perspectiveplus large de radicalisation, révé-

latrice d’une véritable cassure juive in-terne qui pourrait bien un jour fairebasculer toute la société israélienne. Cestensions font ressortir deux problèmesmajeurs pour le judaïsme contem-porain : le rapport entre la loi juive etl’Etat d’une part, et la question de laplace de la femme dans la tradition juived’autre part.La religion et l’Etat. Le phénomèneest complexe, il existe au sein dumonde orthodoxe des quantités denuances pas toujours faciles à com-prendre de l’extérieur. L’Etat d’Israëlest officiellement laïc mais concède desprérogatives à la religion qui minent lecaractère démocratique de l’Etat. Ilexiste de fortes inégalités de traitementdès lors qu’on touche aux affaires reli-gieuses au gré des coalitions et du poidspolitique d’un groupe ou d’un autre. Laloi de l’Etat a fait du rabbinat orthodoxele référent obligatoire pour tout ce quitouche au cycle de la vie. Le résultat estune série de situations absurdes, no-tamment en matière de divorce. Cerabbinat est aujourd’hui inféodé auxfondamentalistes qui ne cessent demonter en puissance. Les groupesfondamentalistes sont paradoxalementfinancés par l’Etat, que ce soit direc-tement par des subventions ou indi-rectement par divers avantages etexemptions.Le point le plus dangereux touche àl’éducation des enfants ultraortho-doxes, enfermés dans un système sec-taire, indépendant des autres écoles,dans lequel les matières générales (ma-thématiques, langues, histoire…) nesont pas ou très peu enseignées. Lesétudes n’aboutissant pas au bac, les élè-ves sont privés de la possibilité de me-ner des études supérieures, d’acquérirune culture générale et de développerle moindre esprit critique. Le finan-cement public d’un système éducatifaussi rétrograde est non seulement ca-tastrophique pour l’avenir économiquedu pays, mais il prépare la mort lente dela démocratie israélienne.Aucun autre pays occidental ne tolèreun pareil réseau scolaire. Le récent prixNobel israélien de chimie Dan Shecht-man y a fait allusion en affirmant quetout parent qui prive son enfant de lapossibilité d’étudier est un criminel quidevrait être puni pour cela.Le peuple juif et l’Histoire ont pris le ju-daïsme de court, le sionisme et la créa-tion d’un Etat moderne n’étaient pasprévus. Jusqu’ici, les rabbins ont été in-capables de proposer un modèle de

judaïsme compatible avec un Etat dé-mocratique. Un tel projet ne peut passerque par une «réforme» du judaïsme queles orthodoxes ne sauraient accepter. Lasolution pour le moment est celle d’unéquilibre fragile entre des forces anta-gonistes, la religion et la démocratie.Le mouvement massorti israélien (l’undes trois grands courants du judaïsme,qui se situe entre les libéraux et les or-thodoxes) appelle depuis longtemps àla séparation de la religion et de l’Etat;c’était aussi la position du philosopheYeshayahou Leibowitz et de quelquesautres intellectuels orthodoxes. Maisc’est un point de vue minoritaire dansles rangs religieux. La plupart des rab-bins n’ont pas le courage intellectuel dereconnaître que la loi juive a échoué àpenser l’Etat moderne.Les femmes et l’orthodoxie. Dans lejudaïsme orthodoxe, les femmes su-bissent la ségrégation presque natu-rellement : dans les synagogues, dansles cercles d’étude juive, dans qua-siment toutes les formes de vie sociale,y compris les postes politiques. Riend’étonnant dès lors à ce que l’on étendecette ségrégation aux bus et autres lieuxde «promiscuité».Le fait que chaque juif orthodoxe com-mence sa journée en prononçant la bé-nédiction «béni sois-Tu qui ne m’a pasfait femme» n’est pas chose innocente.Il faut se rappeler que le droit de votedes femmes fut imposé par la compo-sante laïque du mouvement sioniste etque les partis orthodoxes n’ont toujourspas d’élus femmes.Les courants modernistes du judaïsme,après un long travail d’exégèse, pro-posent un autre modèle, mais sontrégulièrement traînés dans la boue. EnIsraël, ils sont réduits au silence institu-tionnel.En France, même si c’est plus discret,le judaïsme institutionnel est confrontéà la même montée des extrêmes et à uncommunautarisme galopant. Le ju-daïsme français a depuis des annéeschangé de visage. Il ne suffit pas de blâ-mer les «fous de Dieu» de là-bas, il fautbalayer devant sa porte et dénoncer lesexisme, l’obscurantisme et la bigoteriepartout où ils se trouvent.Certes, la racine du problème se trouvedans certaines sources juives, mais leTalmud étant truffé d’autocritique et dedébats contradictoires, le danger pro-vient avant tout d’une lecture radicalede ces sources, sans réinterprétation. Sil’on veut produire de l’exégèse per-mettant l’amélioration de la conditionféminine, c’est possible dès lors quel’exégète en a la volonté, y comprisdans les rangs orthodoxes.Des milliers de pages ont déjà été écri-tes sur tous ces sujets, montrant que lejudaïsme n’a pas forcément un visageobscurantiste et n’est pas condamné autriste spectacle qu’il offre actuellement.

Par YESHAYA DALSACE Rabbinà Paris, rédacteur du site juif modernemassorti.com

L'ŒIL DE WILLEM

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201224 • REBONDS

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Rendez­vous les 27, 28 et 29 janvier 2012

à la MC2 GrenobleRÉPUBLIQUE!

GRENOBLE

LES ÉTATS

GÉNÉRAUX DU

RENOUVEAUvivreJOURSDE DÉBATS,

D’EXPRESSION

ET D’ÉCHANGES

la

3

Page 30: Libe vend 13_janv_2012

SUPERSTITION Synonyme ou non de chance, le jourfatidique se reproduira trois fois cette année.

En 2012, desvendredis 13à la douzaineE nnemis des chats noirs et des pas-

sages sous échelle, l’an 2012 craintun max: trois vendredis 13 prévuspour cette année – qui est aussi

celle de la fin du monde (le 21 décem-bre 2012, selon plusieurs oracles, dont Nos-tradamus et les Mayas; la bonne nouvelle,c’est qu’on en a fini avec Noël)–, c’est lemaximum pour une année, selon de savantscalculs mathématiques (une science sé-rieuse, elle). Cette année, on a donc ce jourd’aujourd’hui, plus le 13 avril, et le13 juillet. Une triplette rendue possible uni-quement si le premier jour de l’année est unjeudi pour une année non bissextile et undimanche pour une année bissextile. Et

c’est le cas en 2012, la gueule de bois dupremier de l’an s’étant annoncée un di-manche. Appliquées au temps qui passe, lesmathématiques, donc, prouvent que chaqueannée du calendrier grégorien, en vigueurdepuis 1582 et le pape Grégoire XIII (on abien dit XIII, hé! hé!), comporte, au mini-mum, un vendredi 13 et, au maximum, troisvendredis 13.

PARASKEVIDÉKATRIAPHOBIE. J’explique:un cycle grégorien dure 400 ans, et 400 ansce sont aussi 146097 jours (146000 jours etles 97 jours, qui correspondent aux 29 fé-vrier). En 400 ans, on a 4800 mois, et 4800n’étant pas divisible par 7, certains jours dela semaine tomberont plus souvent le 13 queles autres. Clair? Et les calculs sont impla-cables: il s’avère que ce jour est le vendredi,avec 688 vendredis 13 contre 684 pauvresjeudis et samedi 13 ou 685 lundis 13.Les mathématiques, toujours, en l’occur-rence un certain Dean Huffman, de l’Uni-versité du Texas, ont démontré qu’il y avait7 intervalles de jours possibles sans aucunvendredi 13: 27, 90, 181, 244, 272, 335 ouencore 426 jours (à cheval sur deux ans). Ilfaut remonter aux périodes du 13 juillet1990 au 13 septembre 1991 et du 13 août1999 au 13 octobre 2000 pour trouver cesintervalles bénis, sans aucun vendredi 13.Deux mois consécutifs peuvent avoir unvendredi 13 comme en 1998, en février et enmars. Comment ça, on s’en fout? Ajoutonsqu’on aura encore trois vendredis 13 en 2015puis en 2026. En même temps, si c’est la findu monde, on ne sait plus à quel saint del’irrationnel se vouer, là, on n’aura plus devendredi 13 du tout.Mais pourquoi diable le vendredi 13 fait-ilautant flipper, ou dans le cas contraire estconsidéré comme un jour de chance (voirtous les fadas qui jouent au loto ce jour là)?En tout cas pourquoi autant d’effet ? Aucommencement, ça part de la Bible,comme pas mal d’emmerdes : d’après leNouveau Testament, lors de la Cène, lesparticipants étaient treize avec Jésus et sesdouze apôtres. Avec ça qu’il aurait été cru-cifié un vendredi, la conjonction des deux

lui a été fatale à Jésus, et nous, ça nous avalu une religion toute neuve.La mythologie nordique n’est pas en restenon plus, avec un treizième invité à un dî-ner d’Odin au Walhalla, dont nous feronsgrâce du récit au lecteur, sans parler desGrecs et des Romains, pour qui si le 12 estle chiffre parfait (12 dieux olympiens,12 constellations, 12 signes du zodiaque,12 heures du jour et de la nuit) le 13 est unfouteur de merde, détruisant la perfection.Rappelons la réapparition récente d’un13e signe du zodiaque, Ophiuchus, norma-lement 13e constellation du zodiaque, (leSerpentaire est une constellation an-cienne), qui bouleverse les horoscopes,ainsi que le signe auquel on appartient etc.:ainsi l’auteur de ces lignes n’est plus dutout sagittaire mais ophiuchus et c’est unpeu angoissant. Mais on s’égare. Parlonsplutôt de la paraskevidékatriaphobie, puis-que le vendredi 13 a généré sa propre pho-bie, soit la peur irraisonnée du nombre 13(triskaïdekaphobes) appliquée au jour dela semaine.

POISSON. Qui n’a jamais entendu grand-mère dire qu’on sera 13 à table et que çan’est pas bien possible, ça? Et les 13e étagesqui n’existent pas, remplacés par 12 bis ou14 a, et les numéros 13 des maisons qu’onévite d’attribuer, certains hôtels qui n’ontpas de chambre 13? Tiens, un bon truc poursécher le boulot le vendredi 13, aujourd’huidonc, si ça n’est pas trop tard: se déclarerparaskevidékatriaphobe est imparable. Ilparaît même que Stephen King en souffre,et ne peut pas lire la page des livres (arrive-t-il à écrire la page 13 de ses best-sellersd’angoisse?) Qu’on se rassure, le mythe duvendredi 13 n’est pas universel puisque lesEspagnols et les Grecs, pourtant proches denous, redoutent plus le mardi 13, et les Ita-liens le 17, quel que soit le jour. En Asiec’est le 4 qui est même hanté pour les Japo-nais, car il se prononce «shi» qui veut direla mort. Ça n’a rien à voir mais du coupsushi, ça veut bien dire poisson mort? En-fin bon, ça se tient, le vendredi c’est le jourdu poisson mort, aussi. •

Par EMMANUÈLE PEYRETDessin ROCCO

Liées à des métiers (dans le spectacle,ne jamais porter de vert; chez lesmarins, pas de femmes à bord; pour lesprostituées, monter avec un puceau) oupas, les superstitions traversent lessiècles (1). Echantillons:Croiser un chat noir. Jeter le bonnetd’un enfant malade au feu. Casser unmiroir. Faire un vœu sous une étoilefilante. Chercher un trèfle à quatrefeuilles. Passer sous une échelle.Toucher du bois. Poser un chapeau surun lit. Ouvrir un parapluie dans unemaison. Se lever du pied gauche (oumarcher dans la merde avec).Accrocher un fer à cheval au­dessus desa porte. Avoir une patte de lapin avecsoi. Toucher le pompon d’un marin. Separtager la corde d’un pendu. Jeter despièces dans une fontaine. Mettre uneculotte rouge au premier de l’an, etc.

E.P.(1) «Dictionnaire des superstitions»,Jean­Michel Pedrazzani, Albin Michel, 2011.

DES SIÈCLESDE CROYANCESET PAS UNE RIDE

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201226 •

VOUS

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Par OLIVIER BERTRAND

Un languedoc pourle passage à l’hure d’hiver

Ç a ne vous arrive jamaisune envie brutale desanglier, l’hiver? Heu-reusement cette fois,

on avait emporté à la monta-gne un joli gigot de marcas-sin, donné par un ami chas-seur. Une longue marinades’est chargée d’attendrirl’animal, avant la cuis-son douce au four. Laviande était forte, fon-dante. Et parfaitementaccompagnée parcequ’on avait par précau-tion emporté aussi un jolilanguedoc : la cuvéeMaxime, 100% mour-vèdre, de chez Boriede Maurel.

J’avais découvert cedomaine cet été envacances. Le vinétait long et soyeux,épicé, voluptueuxsans écœurement,très minéral. Un ré-gal. J’ai patienté jus-qu’à l’hiver, puispris rendez-vousavec le vigneron,Michel Escande. Lelendemain, il m’at-tendait derrière unlong comptoir – ledomaine fait aussi bar àvins, le soir en fin de se-maine. Il avait de faux airs deBruno Cremer, semblait unpeu méfiant, pas bavard. Ilattendait un journaliste, enparaissait d’avance fatigué.Je lui ai juste dit que je n’yconnaissais pas grand-chose,mais que je voulais compren-dre ce qui m’émouvait dansson vin. Il m’a demandé sij’avais un peu de temps.Nous sommes partis nousbalader dans ses vignes.

Jusqu’en 1989, il était moni-teur de voile. Après une lon-gue traversée, il a accompa-gné un copain pour desvendanges au château Rayas,domaine mythique de Châ-teauneuf-du-Pape. A la finde la récolte, il a voulu êtrepayé en bouteilles, puis le

patron, «Monsieur Rey-naud», a guidé ses premierspas dans le vin. Michel Es-cande a commencé paracheter cinq hectares dans leMinervois, pour arracher,planter. Progressivement, ledomaine s’est étendu sur

deux collines, dont l’unesur l’appellation la Livi-nière, qu’Escande a untemps présidé. Un pay-sage très changeant,bambous en bas, chênesverts et pins ensuite engrimpant, quand les al-luvions de la vallée cè-

dent le sol au grès etaux silex pour lesmourvèdres et lesgrenaches, puis aucalcaire et auschiste où s’épa-nouit la syrah.

Le vigneron est ob-sédé par la notiond’équilibre. Il s’ap-puie sur les élé-ments naturels, lescycles, les préda-teurs, plutôt que surla chimie. Travailleselon des principesbiologiques, mais a

renoncé à l’agré-ment, après s’être battu

sans succès pour que les vinsbio subissent des analysessystématiques afin de garan-tir au consommateur qu’ilsne contiennent aucun pro-duit de synthèse. On auraitdes surprises…

Récolté sur de petits rende-ments, le raisin passe par delongues cuvaisons puis desélevages d’un à deux ans. Levin gagne à vieillir, sinon ilfaut le carafer. C’est ce qu’ona fait ce soir-là sur le san-glier. Et pendant que les ta-nins caressaient la chair sou-ple du marcassin, jerepensais à cet ours, soudainvolubile dans ses vignes. •

Domaine Borie de Maurel:rue de la Sallèle,à Félines­Minervois (34210).Rens.: 0468916858.

PARLONS CRUS

DR

Toi aussi tu as toujoursrêvé d’être pom­pom girl,hein? Il faut dire que c’estimpossible de résister àces pépettes, ultra gauléeset brushinguées façon SueEllen, se trémoussant pourlancer leur équipe debase­ball. Et qui ont fait ducheerleading sinon unmonument à la gloire duféminisme, au moins unspectacle aussi marrantque le patinage artistique.La bonne nouvelle, c’estque la discipline arriveenfin en France par lagrande porte du sport avecle DVD Cheerobics (renfor­cement musculaire, assou­plissement, le tout entraînépar une experte, JessicaRossi). L’autre bonne nou­velle, ce sont les vraiscours. A la Dancefit Com­pany de Pantin (Seine­Saint­Denis). On y revientaprès vrai test en pom­pom, promis. E.P.

POM­POMPIDOU POU !

L’HISTOIRE

A l’hypermarché, dix­sept minutes d’attente à la caisse(qui se conclut par le fatidique: «c’est fermé»). A la poste,on ne compte plus les quasi­années passées à faire laqueue, pas plus qu’à la Sécu, à l’hosto… Bref, le siteJaimeattendre.com se consacre à réduire les tempsd’attente en recensant à l’aide de tableaux et de statisti­ques les pics de fréquentation des «entreprises, musées,administrations». Rien n’est hélas prévu pour l’attentedevant l’ascenseur.

JAIMEATTENDRE : QUEUES SQUEEZÉES

LE SITE

2%C’est la baisse de laconsommation de bœufattendue cette annéeen France et dans toutel’Europe. En cause, laréduction des cheptelsadultes, mais aussi la crisequi a toujours des effetssur la vente de viande (saufla volaille), assure l’Institutde l’élevage.

Pour faire plus fort que lechat botté, ou doubler lesminots en tennis à roulet­tes, voici une paire de bot­tes motorisées du dernierchic technologique, vuesau salon mondial de l’élec­tronique à Las Vegas. Les«SpnKix» (spin­kicks) s’enfi­lent sur les chaussures.Vitesse max: 16km/h. Ellessont a priori coordonnéesentre elles et la batterietient trois heures. Coût:507 euros. Des roulettesen plus sont prévues pourles moins agiles. PHOTO DR

DES BOTTES ÀMOTEUR POURLES FEIGNANTS

L’OBJET

La reproductionde nos petites annonces

est interdite

Le CarnetChristiane Nouygues

0140105245

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CARNETDécèS

Lamiel, Léna, Samy,ses enfants,

Eliah,Nina,Mendelses petits-enfants,

ainsi que toute sa famille,ont la tristesse de vous faire

part dudécèsde leur bien aimé

Gilles TURLOTditGil

MALCORsurvenu à l'âge de 64 ans.La crémation aura lieu le

Vendredi 13 Janvier à 07h40au crématoriumdes TroisChênes àAngoulême en

Charente (16).Mlle Lamiel TURLOT (fille)

160 rueVictorHugo93110ROSNYSOUSBOISTél. : 06-62-78-40-47

PFL'éco funéraire26Av. duGénéral deGaulle

16800 SOYAUXTéL. : 05-45-92-47-13

Sa fille Charlotte,samèreDanny,

ses frères et sœurs,ont la tristesse de vous faire

part dudécès de

DominiquePERIER

le 10 Janvier à PARIS.La crémation aura lieu

Vendredi 13 Janvier à 13h30,au crématoriumd'ARCUEIL,

8 rueRicardo, 94110.

SouvenirS

FABIEN GEVRAISE

"je t'aime" repéte le vent àtout ce qu'il fait vivre.je t'aime et tu vis enmoi. (RenéChar)

Jean-Pierre, ton papaAurelia, ta sœurCome etValentin,

tes frères.

Tél. 01 40 10 52 45Fax. 01 40 10 52 35

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Le Carnet

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 VOUS • 27

Page 32: Libe vend 13_janv_2012

LYRIQUE L’opéra comique de Massenet est donné à Bastilledans une mise en scène hétéroclite de Coline Serreau.

«Manon»,la secouéeS upposons qu’on soit un marxiste

aliéné, genre vieux jeune (ou l’in-verse), biberonné à Debussy et Ra-meau, ne supportant que Berg et Ber-

lioz. Comment faire pour écouter Massenet,qui est un peu aux noms précités ce que Bar-belivien est à Gainsbourg et le ciron àl’homme? On peut commencer par Werther,opéra plein d’abîmes. Ou Thaïs, gouffre fleuri.On peut aussi visiter l’expo «La Belle Epoquede Massenet» à la Bibliothèque-Musée del’Opéra, au Palais Garnier (lire ci-contre).Côté musique, c’est Manon (1884) qui s’offreà nous en ce moment, à la Bastille, cette fois.Le genre indiqué est : opéra comique. Il y apourtant sujet plus drôle que l’Histoire duChevalier des Grieux et de Manon Lescaut(1731) de l’abbé Prévost. C’est, on se le rap-pelle, l’histoire d’un type qui tombe amou-reux d’une fille dont il ne sait rien, dont il necomprend rien, et en particulier pas le faitqu’elle arrondit leurs fins de mois en se pros-

tituant. A cause de la stupidité de Des Grieux,myope comme tous les mâles face à l’objet dudésir, Manon meurt.

«FRISSONS». L’histoire, racontée entièrementdu point de vue de l’homme, est inadaptable.Dans le roman, Manon ne parle jamais (elleécrit une lettre et demie), n’a pas de couleurde cheveux ni d’yeux. Chez Massenet (le li-

vret est de Pierre Gille et Meilhac, sans Ha-lévy), elle est oiseau de paradis toute frivoleet écervelée d’abord, âme inquiète ensuite.Et forcément bavarde. Incarnée par NatalieDessay (à la voix ténue), elle semble plutôtn’en penser pas moins, un peu intellectuelleet distante.La partition, évidemment, pour un marxistealiéné, est une épouvante... Il faut supprimer

les premier et quatrième actes, scènes defoules caquetantes remplies de «ah-ah-ah»et de «oh-oh-oh» dans des formules en pilo-tage automatique, remplissage de cahier descharges. Et public d’applaudir à chaque con-tre-ut, tels des Américains saluant un atter-rissage. La mélodie lèche les oreilles de façonplus nette, dans tous les moments où lesamoureux sont entre eux. Debussy, qui ne

l’aimait qu’un peu, dit cela beau-coup mieux : «Cette musique estsecouée de frissons, d’élans,d’étreintes qui voudraient s’éterni-ser. Les harmonies y ressemblent àdes bras, les mélodies à des nuques;

on s’y penche sur le front des femmes pour sa-voir à tout prix ce qui se passe derrière.»Comme si, soudain, Massenet se rappelaitqu’il savait composer et, après avoir écono-misé ses forces, laissait la musique s’engen-drer elle-même. Ainsi lorsque Des Grieuxdécouvre Manon: «Il semble qu’une main/ Defer me mène en un autre chemin/ Et malgré moim’entraîne devant elle!» On ne saurait mieux

dire: la musique n’est plus tirée depuis la finmais poussée depuis l’origine. La version deColine Serreau et Evelino Pidò est raccourcie(manque en particulier le savoureux pastiched’opéra baroque de l’acte III), ce qui accentueles contrastes de la partition, qui passe ducoup sans transition du «ploum-ploumtralala» au sentiment éploré. De ce pointde vue, la mise en scène accompagne le gro-tesque propre au genre «opéra comique» parson mélange de costumes rococo et de punksà crête dans le rôle de Lescaut («pauvreFranck Ferrari, se plaindra notre voisin, on di-rait un porc-épic !»).

GLACIALE. De même, l’acte V, transformé icien petite marchande d’allumettes au goulag(et non plus sur la route du Havre ni au dé-sert), culmine dans l’hallucination. Maisc’est à l’image de cette fable frêle où surna-gent en guise de tragique quelques souvenirs,des morceaux comme la «petite table» quirassemblait les tourtereaux au temps de leurbonheur, les «mains», la «voix», signes dela «caresse» disparue : «Et c’est là l’histoirede Manon Lescaut», agonise l’héroïne, repre-nant une phrase prononcée au premier acte.Histoire foutue d’avance, glaciale. Le finalede Serreau, sorte de boule à neige ridicule etsublime, rend Manon à sa nature catastrophi-que: comme si une perruque poudrée avaitexplosé et qu’il n’en restât que quelquespaillettes accrochées au ciel. •

MANON de JULES MASSENETDirection musicale Evelino Pidò,ms Coline Serreau. Avec Natalie Dessay,Giuseppe Filianoti, Franck Ferrari.Jusqu’au 13 février.Rens.: www.operadeparis.frLA BELLE EPOQUE DE MASSENETBibliothèque­musée de l’Opéra.Palais Garnier, 75009. Jusqu’au 13 mai.Rens.: www.operadeparis.frCatalogue aux éditions Gourcuff­Gradenigo, 39 €.

Par ÉRIC LORET

La mélodie lèche les oreilles de façonplus nette, dans tous les momentsoù les amoureux sont entre eux.

Lescaut (Franck Ferrari) et le Chevalier Des Grieux (Giuseppe Filianoti) sentent la fin venir. PHOTO CHARLES DUPRAT. OPÉRA NATIONAL DE PARIS

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201228 •

CULTURE

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Commissaire de l’exposition au Palais Garnier, Christophe Ghristi analyse le côté Belle Epoque du musicien:

«Massenet réinvente le glamour à l’opéra»C hristophe Ghristi, directeur de la dra-

maturgie à l’Opéra de Paris, est égale-ment co-commissaire de l’exposition

«la Belle Epoque de Massenet», produite àl’occasion du centenaire de la mort ducompositeur à succès. Il revient sur le rôle decelui-ci dans l’histoire de l’opéra et de sonindustrialisation.Quelle est la place de Massenet sur la scènefrançaise?Massenet n’est pas du tout traditionnel, maisil n’est pas avant-gardiste non plus. C’est unexplorateur. Il invente quelque chose quin’existait pas avant lui, quelque chose dontpersonne n’avait eu l’idée sur la scène d’unthéâtre. Avec Gounod, c’est le seul composi-teur d’opéra qu’on peut dire, en un sens,«professionnel», dans l’histoire de la musi-que française avant le XXe siècle. Verdi a faitvivre la scène lyrique italienne, Wagner lascène lyrique allemande. C’est Gounod, dansles années 1850, qui est le premier composi-teur professionnel typiquement français. Etaprès, c’est Massenet. Mais lui ne se contentepas de faire des ouvrages à succès. Il fait vrai-

ment penser aux grands réalisateurs à Hol-lywood qui touchent à des genres extrême-ment différents et réussissent en tout, quifont des concessions à certaines obligations– les stars par exemple –, mais qui ne setrahissent malgré tout jamais, et qu’on re-connaît. Comme Minnelli ouMankiewicz, des gens qui peuventà la fois faire des drames, des co-médies, connaissent le système etle dépassent tout le temps. Masse-net invente beaucoup, et il veutavoir du succès, c’est sûr.Et musicalement?Avec Onéguine sans doute, l’Oné-guine de Tchaïkovski, il invente une nouvellesensibilité pour les ténors. Ce n’est ni le ténorverdien, ni wagnérien, un ténor héroï-que, etc. C’est un ténor dépressif. AvecLenski dans Onéguine, et le Werther de Mas-senet, c’est la première fois qu’on entendcela. Thaïs et son jeu sur l’érotisme, le péché,c’est aussi nouveau, dans un opéra duXIXe siècle qui est essentiellement puritain.Cet érotisme à la française, raffiné, n’est ni

un érotisme intellectuel sublimé à la Tristanet Isolde, ni celui, élémentaire, de la Walky-rie. Debussy avait une position très ambiguë:beaucoup de choses lui déplaisaient chezMassenet, mais il lui reconnaissait le génie dela sensualité. Quand on écoute les pièces

pour piano de Massenet, ellesn’ont pas du tout le génie de cellesde Debussy, mais il y a une intui-tion dont Debussy prend la suite.En quoi, selon vous, Massenet est-il«Belle Epoque»?Ce qui en fait un compositeur ty-piquement Belle Epoque, si l’onpense à toute cette ère pseudo-

réaliste de la fin du XIXe siècle (Zola, etc.),c’est que Massenet réinvente –puisqu’il exis-tait avant avec le bel canto, mais d’une autrefaçon – ce que peut être le glamour del’opéra. Ce n’est ni le cas de Wagner ni le casde Verdi, qui sont de grands austères et ontune dimension planétaire. Massenet trouveun chemin, c’est une petite musique par rap-port aux monstres que sont les deux autres,mais une petite musique qui est extrêmement

précieuse. Des gens comme Richard Straussdoivent beaucoup à Massenet, parce qu’il in-vente l’industrie de l’opéra. Chez lui, ontrouve tout ce qu’on retrouvera chez Strauss:d’abord l’importance donnée au livret, et cen’est pas un hasard si Massenet s’inspired’œuvres littéraires, souvent avec beaucoupde clairvoyance. Don Quichotte, Manon Les-caut, Werther, Anatole France pour Thaïs. En-suite, Massenet aime les chanteurs, il lesaime comme un amateur d’opéra. Ce ne sontpas pour lui seulement des instruments. Il aquasiment un comportement de fan à l’égardde ses muses, il aime la beauté féminine, ilveut la mettre en avant comme Strauss vou-dra le faire ensuite. Enfin, il est très soucieuxde la mise en scène, des décors, puisque celafait partie du succès.Sa postérité?Son influence sur Puccini, Strauss, le vérismeitalien et évidemment la musique française,est gigantesque. Même Debussy voyait bienque le fil qui le reliait lui-même à Rameaupassait aussi par Massenet.

Recueilli par É.Lo.

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Jules Massenet (1842­1912) entouré de ses héros et héroïnes, estampe visible dans l’exposition célébrant le centenaire de la mort du compositeur. PHOTO BNF, BIBLIOTHÈQUE­MUSÉE DE L’OPÉRA

CULTURESMONDEFlorian Delorme - 11h/11h50 - du lundi au vendredi

Chaque vendredi en partenariat avec

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 CULTURE • 29

Page 34: Libe vend 13_janv_2012

DANSE La compagnie La Zampa présente en tournée une œuvre qui vacille entre inertie et résistance.

«Requiem», suprême abandonREQUIEMde MAGALI MILIANet ROMUALD LUYDLINScènes croisées, espace des Anges, 13, bdBritexte, Mende (48). Le 31 janvier à 20h30.Et le 2 février au théâtre Aurillac (15).Rens.: 04 66 65 75 75,

E n principe, le requiem suppose lerepos éternel. Pourtant, la com-pagnie La Zampa l’interprète

d’une façon moins définitive. L’histoirecommence sur le bord d’une route enAriège, où La Zampa était résidentejusqu’à son déménagement en cours àNîmes (Gard). En voiture, Magali Milianet Romuald Luydlin, danseurs, choré-graphes et animateurs de la compagnie,aperçoivent un corps à terre, sur le bas-côté. Ils pilent et s’avancent pour venir

en aide à la personne qu’ils supposentblessée. «Là, raconte Romuald Luydlin,on a vu une femme d’un certain âge allon-gée. Elle avait mis un écriteau : “Je dors,prière de ne pas me déranger”.» Ce qu’ilsfirent, tout en prenant soin de repasserplus tard pour s’assurer que tout allaitbien : la dormeuse s’en était allée.Comateux. Cette situation leur estsouvent revenue à l’esprit par la suite,jusqu’à ce qu’elle devienne le sujet deleur Requiem créé en avril au Centre dedéveloppement chorégraphique deToulouse (Haute-Garonne). Pas encoreprogrammée à Paris ou en Ile-de-France, cette pièce a pourtant des qua-lités indéniables, autant sur le plan mu-sical que chorégraphique. L’excellentThéâtre de Nîmes, sur tous les fronts,n’a pas manqué d’inviter le spectacle etil se pourrait bien que La Zampa s’y in-tègre plus avant.Ce Requiem est comme une variation du«je préférerais ne pas» de Bartleby, cé-lèbre antihéros de Herman Melville. La

musique de Marc Sens, à la guitare, undes fondateurs du groupe Zone libre, estun psaume récitatif qui tend autant lescordes de l’instrument que celles, pré-sentes sur le plateau, qui manipulent lecorps, car tout ici se fait en direct. Letexte écrit par l’auteure et chanteuse derap Casey (qui ne chante pas) appelle àla résistance autant par la colère que parl’inertie, l’absence. Son texte est coma-teux et lucide, en état de veille. Lesdeux interprètes chorégraphes sontdans la même position. Magali Milian,qui pourtant ne pèse pas lourd, sembleimpossible à déplacer, à remettre surpied. Elle a perdu sa verticalité, la sta-tion debout lui est devenue une étran-geté. Romuald Luydlin, qui possède en-core le langage (il dit le texte de Casey),tente de l’accompagner dans un pas-sage étroit jusqu’à la délivrance. Mais,même harnachée, soulevée par des câ-bles, elle pend, sans intention, sans vo-lonté. La figure du chien, qui aboie etguide jusqu’au royaume des morts(Cerbère, Anubis, Garm…), les aide àtrouver une forme de repos, pas celle dusommeil mais une autre, autrement.Sculpteur-prothésiste, Anne Leray lesdévisage, les défigure en leur collantdes masques canins.Polar. Il y a beaucoup d’énergie dans cespectacle du repos, et le groupe consti-tué pour l’occasion est très équilibré.Chacun a une forte personnalité maissait aussi défendre une cause com-mune : le désir de faire de la scène unlieu d’invention, d’engagement et derêve. La masse, le poids, l’inertie de-viennent ici des qualités, des forces derésistance. Il paraît que ce noyau decomplices va s’agrandir pour un pro-chain projet du collectif Les HabitsNoirs. L’auteur de polar Jean-BernardPouy rejoint la bande. Quant au Re-quiem, déjà joué dans des lieux insolitescomme celui de la grotte de Niaux, ilpoursuit sa tournée française jusqu’enmars. Prochaines étapes à Mende etAurillac.

Envoyée spéciale à NîmesMARIE-CHRISTINE VERNAYPour ce duo, Magali Milian et Romuald Luydlin sont partis d’une rencontre insolite. PHOTO ERIC DAMIANO

FESTIVAL Jusqu’à la fin du mois, le musée propose des projections de films français réalisés avant 1914.

Le XIXe siècle pointe ses bobines à Orsay

Un documentaire anonyme sur Deauville, en 1912. GAUMONT

CINÉMA ART DU XIXE

SIÈCLE. Musée d’Orsay,75007. Du 14 au 28 janvier.Rens.: www.musee­orsay.fr/

L ongtemps, on a cru quele cinéma muet se ré-sumait à du burlesque

hystérique, filmé par desdaltoniens. Erreur. Dèssamedi et pour trois week-ends, le musée d’Orsay vamontrer que le cinéma fran-çais avant 1914, comparableau Hollywood d’aujourd’huipour son hégémonie, étaitparfois en couleurs (peintes

à la main) et traitait des su-jets aussi sérieux que la pas-sion du Christ ou la guerre,reprenant les grands genresde la peinture, déjà abordéspar la photo. Le festival Ci-néma Art du XIXe siècle pro-pose en huit étapes de dé-couvrir des bobines plus oumoins incunables : un docusur Deauville ou des scènesde la guerre russo-japonaisede 1904-1905 reconstituéesà chaud.Côté comique, on sait lestendances animalières durire hexagonal. Dans la

séance «bestiaire» on re-verra le délirant Monsieur quia mangé du taureau (ano-nyme, 1909) où un type avecdes cornes encorne tout cequi passe. Simple mais effi-cace. Moins attendue, laveine naturaliste de certainsfils de Zecca, filmant la Grèveou le Pays noir.C’est l’occasion aussi de réé-valuer Léonce Perret avec lesChrysanthèmes rouges (avantsa série Léonce) où une belle,pour départager ses deuxprétendants, leur demandede lui rapporter un bouquet

de ses fleurs préférées : ilsdoivent deviner lesquelles.Les gerbes emplissent toutl’écran au fur et à mesurequ’elle les déballe. Mais ce nesont jamais les bonnes. Sé-quence totalement halluci-née. Hélas, quand arriventenfin des chrysanthèmes, safleur chérie, ils ne sont pasrouges. Qu’à cela ne tienne,l’un des deux galants vas’empresser d’inventer lacouleur d’une façon inatten-due, aussi bien dans la fictionqu’à même la pellicule.

É.Lo.

Ce Requiem est comme unevariation du «je préféreraisne pas» du Bartlebyde Herman Melville.

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201230 • CULTURE

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«N ous assurerons ainsiavec la troupe et lepersonnel non gré-

viste notre mission de servicepublic.» Signée de MurielMayette, administratricegénérale de la maison, laphrase figure en conclusiond’un communiqué publié surle site de la Comédie-Fran-çaise, hier. Elle signifie enclair que malgré le mouve-ment de grève, suivi par unebonne partie du personneladministratif et techniquedepuis hier, le théâtre acontinué de jouer.Seul changement, ce n’estpas la Tragédie de la villégia-ture de Goldoni, dans unemise en scène d’Alain Fran-çon, qui est à l’affiche mais leBourgeois gentilhomme deMolière. Le premier specta-cle, qui devait marquerl’ouverture du théâtre éphé-mère – structure en boisinstallée au Palais-Royalpendant que la salle Riche-lieu est en travaux (Libérationde mercredi) – est bien troplourd pour pouvoir se passerdes techniciens en grève.Deux jours de relâche excep-tionnelle sont prévus

aujourd’hui et demain. Ils neseront pas de trop pour rap-procher les points de vue.D’un côté, les trois syndicatsde salariés (CGT, CFDT, Unsa)réclament toujours uneprime de 1 600 euros et unplus juste partage des recet-tes excédentaires. Actuelle-ment, les 37 comédienssociétaires s’en répartis-sent 76,5%, alors que les360 employés et 21 acteurspensionnaires n’en perçoi-

vent que 16,5%, les 7% res-tants allant à un fonds de ré-serve. Ce système du partageexiste depuis la fondationde la Comédie-Française,en 1680. A l’origine unique-ment réservé aux acteurs, iln’a été ouvert de façon limi-tée au reste du personnel quedans les années 90 par Jean-Pierre Miquel, administra-teur à l’époque, avec l’assen-timent de la troupe. «Noussommes héritiers d’un système

plusieurs fois centenaire, quiétait juste et nécessaire à uneépoque où il a permis à unetroupe permanente de vivre deson métier, mais qui, dans lecontexte actuel, n’est sociale-ment plus tenable», déclare laCGT.La direction de la maison aquant à elle proposé l’ouver-ture de négociations sur unenouvelle grille salariale, etl’octroi d’une prime, d’unmontant non précisé. Tout en

adoptant le tonde la fermeté àl’égard des gré-vistes : «Atten-tion à ne pasheurter ces artis-tes qui portent

notre institution, écrit MurielMayette. Attention à ne paslasser la patience de notre pu-blic et la bienveillance de notretutelle, et attention à ne pasdiviser les différentes équipesde cette grande famille.»Pas sûr que la référence à la«famille» apaise les esprits,dans un théâtre où, pour denombreux employés, le lieuprestigieux ne fait pas oublierla modestie des salaires.

RENÉ SOLIS

GRÈVE Relâche à la Comédie-Française pour tenter derapprocher troupe et personnel administratif et technique.

Au Français, esprit defamille à deux vitesses

«Attention à ne pas lasserla bienveillance de notretutelle.»Muriel Mayette administratrice générale

Le président des Etats­Unis, Barack Obama, areçu mercredi l’actriceaméricaine Angelina Jolie,escortée de Brad Pitt, dansle Bureau ovale de la Mai­son Blanche, à propos dela lutte contre les violencesfaites aux femmes. BarackObama, dont le grouperock fétiche est aussi notrechouchou, The National, aparlé avec l’actrice incar­nant Lara Croft «de la luttecontre les atrocités miso­gynes de masse», selon lebureau de presse de laprésidence. L’actrice vienten effet de réaliser In theLand of Blood and Honey,un film retraçant la guerrede Bosnie du point de vuedes femmes systéma­tiquement violentées etmassacrées. 20000 fem­mes auraient été victimesd’abus sexuels lors du con­flit bosnien, sur100000 personnes tuées.Le film quasi cornéliend’Angelina Jolie, son pre­mier en tant que réalisa­trice, s’attache à la relationamoureuse d’une jeunefemme musulmane (ZanaMarjanovic) et d’un Serbe(Goran Kostic), qui seretrouvent évidemmentdans des camps opposésaprès l’éclatement duconflit. La presse n’étaitpas conviée à l’entrevueinformelle à Washington,mais des paparazzi ontsurpris le couple de starspar les fenêtres. AngelinaJolie et Brad Pitt élèventsix enfants, dont trois sontadoptés.

OBAMA ET JOLIEPARLENT CINÉET FÉMINISME

L’HISTOIRE

Enrico Rava Le raffiné trompettiste italien et son quintet transalpinpour la sortie de l’atmosphérique Tribe chez ECM Sunset, 60, rue desLombards, 75001. Ce soir & demain, 20 & 22 heures, dimanche 21 heures.

Fafa Ruffino La chanteuse d’origine béninoise navigue entretradition, soul et afrobeat autour des thèmes de l’immigration,la polygamie ou encore les problèmes du continent africainBellevilloise, 21, rue Boyer, 75020. Ce soir, 21 heures.

MÉMENTO

Fin de «risques majeurs» chez Quinta«La Ficam est en mesure de confirmer que l’ensemble des pro-ductions en cours de traitement ou détenues par le groupe Quinta(LTC, Duran-Dubois, ScanLab, SIS) est désormais sécurisé»,selon communiqué de ladite Ficam, qui avait sonné l’alertele 19 décembre en affirmant que 60 productions du premiersemestre 2012, dont la Vérité si je meurs 3, étaient menacées.

Régine déshabilléeTrois cents robes du soir passant en revue trente ans de mode,des visons et des boas Grande Zoa de la reine de la nuit Régine(les P’tits Papiers), 82 ans, seront dispersés aux enchères parTajan au profit d’Habitat et Soins, l’une des associationsqu’elle a créées pour les plus démunis.

Mouad Lhaqed («l’enragé»), rappeurmarocain célèbre pour ses diatribescontre le potentat local, a étédéclaré libre hier après quatre mois

de prison. Très écoutés sur les réseaux sociaux, les flowsde Lhaqed alignent le monarque grassouillet de droitdivin et sa cour sur fond d’imposture et d’iniquitéétablies. Des centaines de militants du Mouvement du20 février manifestaient devant le tribunal, en soutienà Lhaqed, un des meneurs du mouvement revendiquantla fin de la mascarade monarchique, et sitôt le verdict,ont rallié en masse la prison d’Oukacha où était séques­tré «l’enragé». PHOTO DR

LE RAPPEUR QUI DÉFIELE ROI DU MAROC

LES GENS

Les curieux intérieurs de Maarten BaasOn avait vu sa pendule habitée par un type(qui bouge les aiguilles à la main) à la MaisonRouge. On avait même réussi à faire croire àdeux personnes qu’il y avait quelqu’un de-dans (et non une vidéo, comme on imagine).Né en 1978, le designer Maarten Baas a l’ha-bitude de cramer ses meubles puis de lesfoutre sous résine (série Smoke). D’autresfois, il réalise des modèles miniatures malfoutus d’armoires ou de ventilos (photos)

puis les fait agrandir avec leurs défauts, utili-sant une structure d’acier recouverte d’ar-gile. Aux Arts décoratifs à Paris, il «conçoitun environnement théâtral composé de plusieursintérieurs dans lesquels il mêle des pièces ano-nymes à ses propres œuvres». É.Lo. PHOTOS DR

Maarten Baas, «Les curiosités d’un designer».Musée des Arts décoratifs, 107, rue de Rivoli,75001. Jusqu’au 12 février.Rens. www.lesartsdecoratifs.fr

de Hanokh Levinmise en scène Laurent BrethomePrix du public du meilleur spectacle 2010 du festival Impatience

avec Fabien Albanese, Lise Chevalier, Antoine Herniotte, Pauline Huruguen, François Jaulin, Denis Lejeune, Geoffroy Pouchot-Rouge-Blanc, Anne Rauturier, Yaacov Salah, Philippe Sire

Direction Olivier Py

Odéon-Théâtre de l’Europe01 44 85 40 40 • theatre-odeon.eu

Tarifs de 6€ à 28€

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LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012 CULTURE • 31

Page 36: Libe vend 13_janv_2012

WEB En signant un accord avecl’américain Creative Commons,la société permet une diffusiondésintéressée de la musique.

Sacem:nouvel airnumériqueV éritable pas en avant

pour les échanges numé-riques ou idée inappli-cable ? En début de se-

maine, la Sacem, la société chargéede percevoir et de redistribuer lesdroits des auteurs, compositeurs etéditeurs de musique, annonçait lasignature d’un accord avec CreativeCommons, une organisation amé-ricaine à l’origine d’un droitd’auteur qui permet de faciliter lacirculation des œuvres en ligne. Etce, en permettant l’échange libre,le remix, voire la réappropriationartistique.

«PHILOSOPHIE». On s’explique :jusqu’ici, un artiste ou un éditeurqui choisissait de confier la gestionde ses droits à la Sacem ne pouvaitpas faire la différence entre uneutilisation commerciale ou noncommerciale d’une œuvre. La Sa-cem pouvait prétendre percevoirdes droits sur toute diffusion (radio,espaces publics, Internet, etc.)– même si, en pratique, elle auto-rise par exemple les artistes à met-tre gracieusement leurs créations àdisposition sur leur site personnel.Désormais, et pendant dix-huitmois d’expérimentation, toutechanson déposée à la Sacem peut

donc être placée sous une licenceCreative Commons qui, tout en af-firmant la paternité de la composi-tion, permet sa diffusion désinté-ressée. En retour, une utilisationgénérant des revenus fera automa-tiquement basculer l’œuvre dans lerégime classique de la Sacem. C’estle «gagnant-gagnant» vanté parBernard Miyet, son président (quicédera sa place en juin). «L’objectifest de conjuguer pour les sociétaires

de la Sacem la philosophie de partagedes Creative Commons et l’exigencede protection des auteurs et éditeurs.Offrir plus de souplesse tout en ga-rantissant une rémunération.»De fait, la vieille et peu flexibleSacem fait le pas qu’elle aurait dûfaire il y a plusieurs années face à latransformation des usages entraî-née par Internet, où la musiques’écoute et se découvre sans vrai-ment se préoccuper des barrièreslégales –largement au bénéfice desartistes, qui y trouvent une exposi-tion précieuse. Mais ces échanges,non marchands pour une grandemajorité, restent aujourd’hui illé-gaux au regard du droit d’auteur, etpourchassés par la politique répres-sive choisie par le gouvernementavec l’Hadopi. En se rapprochantde la vision défendue par CreativeCommons, la Sacem prend acte quecette circulation accélérée, nonseulement est une réalité à valori-ser, mais surtout ne nuit pas auxartistes qui souhaitent y prendrepart. «Nous rentrons dans une logi-que de liberté et de responsabilité»,estime ainsi Bernard Miyet.Reste que l’application de cet ac-cord pose encore de nombreusesquestions, parmi lesquelles l’épi-neuse définition d’une «utilisationnon commerciale», qui demeuredans les mains de la Sacem et non

des auteurs et édi-teurs. Aujourd’hui,la Sacem considèreainsi comme com-mercial tout usageimpliquant de l’ar-gent à un momentou un autre, même

si la finalité n’est absolument pasde générer un bénéfice pour l’uneou l’autre partie.Un blog qui affiche une bannièrepublicitaire pour couvrir ses fraisd’hébergement sera de ce faitconsidéré comme commercial et negagnera rien à utiliser des chansonsen Creative Commons plutôt qued’autres soumises au droit d’auteurclassique. L’échange numérique,par peer-to-peer ou une autre

technologie, sera pour sa partthéoriquement autorisé sanscontrepartie si la Sacem considèreque la plateforme utilisée commeintermédiaire n’en tire pas d’ar-gent, ce qui reste très flou… La Sa-cem a, par exemple, d’ores et déjàconfirmé que communiquer un lienpointant vers un MP3 via Facebookserait considéré comme commer-cial, le réseau social américainn’étant pas une petite associationde quartier. Attention, rien nechange pour les œuvres qui ne sontpas sous licence Creative Com-mons : elles restent soumises audroit d’auteur classique.

«L’ART LIBRE». «L’Ascap [la Sacemaméricaine, ndlr] voit les choses dif-féremment, explique Pierre Gérard,cofondateur de Jamendo, l’un desplus gros sites d’échange de musi-

que sous licence libre, en conflitouvert avec la Sacem. Elle permet àses membres de décider point parpoint ce qu’ils considèrent comme unusage non commercial. Par exemplede laisser leurs morceaux être diffu-sés gratuitement sur des radios asso-ciatives, sans perdre leurs droits maissans exiger de rémunération.»Cette semaine, d’autres acteurs deslicences libres en France se sontégalement dits à moitié satisfaits del’accord a minima. «Nous regrettonsl’absence de licences véritablement li-bres dans cette expérience, détaillele Parti pirate. Mais nous prenonsnote d’une évolution des mentalités[…] face à un discours jusque-là ré-pressif et rétrograde. Cette premièreouverture se rapproche de nos propo-sitions de mise à jour du droit desauteurs.» Même distance prudentedu côté de l’association Libre Ac-

cès, qui prône «l’art libre». «Pourla Sacem, c’est une façon de tenter derentrer dans le marché de la musiquesous Creative Commons, dans lequelelle n’était pas partie prenante, es-time Jérémie Nestel, son président.C’est aussi une façon de tenter de ré-cupérer les jeunes groupes qui nes’affilient pas à la Sacem parce qu’ilssont protégés par des licences Crea-tive Commons, et que la vieille maisona une mauvaise image. Mais le droitde regard de la Sacem sur la clause denon-commercialité reste une préoc-cupation.»Un premier bilan d’étape doit êtreprésenté dans six mois. Ou avant,puisque l’expérience lancée par laSacem et Creative Commons de-vrait dans les semaines à venirnourrir le débat politique sur lamutation du droit d’auteur dans lasphère numérique. •

Par SOPHIAN FANEN

La Sacem prend acte que lacirculation accélérée sur le Net, nonseulement est une réalité à valoriser,mais surtout ne nuit pas aux artistesqui souhaitent y participer.

Certains acteurs des licences libres se sont dits à moitié satisfaits de l’accord a minima. PHOTO AUDOIN DESFORGES

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 201232 • ECRANS&MEDIAS

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A LA TELE CE SOIR20h50. Les 30 histoiresles plus mystérieuses.Divertissementprésenté par CaroleRousseau et JacquesLegros.23h10. Confessionsintimes.Magazine présenté parMarion Jollès.1h25. C’est quoi l’amour ?Magazine.3h30. Trafic info.3h33. 50 mn inside.

20h35. Nicolas Le Floch.Téléfilm de NicolasPicard Dreyfuss :Le dîner de GueuxAvec Jérôme Robart.22h10. TirageEuromillions.22h15. Flashpoint.Série américaine :Pour le meilleur et pourle pire, Le facteurhumain.AVec Enrico Colantoni.0h10. Taratata.

20h35. La fête de lachanson française àl’Olympia.Partie 1.Divertissementprésenté par Daniella Lumbroso.0h10. Météo.0h15. Soir 3.0h40. Le match desexperts.Magazine.1h10. Les 60 ans duCrazy Horse.Documentaire.

20h55. Le marquisComédie française deDominique Farrugia,88mn, 2010.Avec Franck Dubosc,Richard Berry.22h20. Le fils à Jo.Comédie française dePhilippe Guillard, 95mn,20010.Avec Gérard Lanvin,Olivier Marchal.23h55. Donnantdonnant.Film.

20h35. Le fil d’Ariane.Téléfilm de MarionLaine.Avec Mélanie Bernier,Arié Elmaleh.22h05. Jeux pervers.Téléfilm de MatteoRovere.Avec Chiara Chiti,Désirée Noferini.23h35. Court-Circuit.Magazine.0h25. Tailleursclandestins.Documentaire.

20h50. NCIS :Enquêtes spécialesSérie américaine :Œdipe et le roi,Rencontre fatale,Le vrai courage,Œil pour œil.Avec Mark Harmon,Michael Weatherly.0h05. Nip / TuckLa vérité est ailleurs,L’esprit de Noël.Série.1h55. ScrubsSérie.

20h35. Dany Boon au Palais des GlacesSpectacle.22h10. Dany Boon enparfait étatSpectacle.0h15. Touche pas à monposte.SpectacleMagazineprésenté par Cyril Hanouna.1h45. Côté match.2h05. Consomag.2h10. Le Printemps deBourges 2010.

20h35. On n’est pasque des cobayes.Magazine.21h30. Claude Rich"J’aime tellement ça la vie".Documentaire.22h25. C dans l’air.Magazine.23h30. Dr CAC.Série.23h35. OlivierRoellinger, le magiciendes épices.Documentaire.

20h40. Les GrossesTêtes.Invités : Clara Morgane,Arthur Jugnot.Divertissementprésenté par Philippe Bouvard.22h45. Zemmour et Naulleau.Magazine présenté par Éric Zemmour et Éric Naulleau.23h50. Rive droite.Magazine.0h50. Paris Dernière.

20h35. Alice Nevers, le juge est une femme.Téléfilm français :Feu le soldat du feu.Avec Marine Delterme.22h25. Alice Nevers, le juge est une femme.Téléfilm français :La loi du marché,Mauvaise rencontre.Avec Marine Delterme.2h00. Poker.3h00. Programme denuit.

20h45. Une femmed’honneur.Téléfilm français :Poids lourds, Perfide Albion.Avec Corinne Touzet,Franck Capillery.0h10. Close to home.Série américaine :Il n’y a pas de fuméesans feu,Obsessions,Responsable ou pas ?Avec Jennifer Finnigan.2h30. Saving Grace.

20h50. Enquêted’action.Maison : commentrefaire sa déco aumeilleur prix ?Magazine présenté parMarie-Ange Casalta.23h25. Enquêted’action.Magazine.2h00. Carrément jeux vidéo.Magazine.2h20. Programmes dela nuit.

20h35. Tim la malice.Téléfilm américain.Avec Michael Madsen,Sean Kyle.22h05. Nic et TristanMega Dega !?Téléfilm américain.Avec Tristan Puehse,Nic Puehse.23h30. Ils sont fous ceshumains.Magazine.23h45. G ciné.23h55. Dr. Quinn,femme médecin.

20h40. La grandesoirée du paranormal.Maisons hantées,fantômes et revenants...Légendes urbaines,mythes ou réalités ?Documentaire.22h40. La grandesoirée du paranormal.Documentaire.23h45. Fin du mondeen 2012 ? Info ou intox ?Documentaire.

20h45. Tous différents.10 enfants : ma familleextraordinaire.Magazine présenté parÉmilie Mazoyer.22h25. Tous différents.Magazine.23h20. Man vs Wild.2 épisodes.Documentaire.1h45. Culture Pub.Magazine.2h45. Le diable dans lapeau.

20h40. Fireball.Téléfilm de KristofferTabori.Avec Aleks Paunovic,Lexa Doig.22h15. Le derniercasse.Téléfilm de KC Bascombe.Avec Tom Sizemore,Sherilyn Fenn.23h50. Star story.Magazine.0h50. Concert.

TF1

ARTE M6 FRANCE 4 FRANCE 5

GULLIW9TMCPARIS 1ERE

NRJ12 DIRECT 8 NT1 DIRECT STAR

FRANCE 2 FRANCE 3 CANAL +

Par téléphoneArte, 20h35Ariane a disparu. Arianefaisait du sex­phone avecun inconnu. Un serial killerrôde. C’est le Fil d’Ariane,fiction kitsch et chorale.

Par la malepesteFrance 2, 20h35Par la malepeste, un télé­film policier en costumes!Nicolas Le Floch est deretour, à la poursuite dubrigand «La Griffe».

Par la battleFrance Ô, 20h35Dans Dance St.! des ban­des de jeunes s’affrontentdans des battles de danse.Et c’est assez original pourêtre mentionné, voilà.

LES CHOIX

Les relations entre Jean­Luc Mélenchon et le PetitJournal de Canal+ ne vontpas s’arranger… Dans uneinterview pour un blogde l’Express.fr, le directeurde la communication ducandidat Front de gaucheà la présidentielle, ArnauldChampremier­Trigano,charge l’émission deYann Barthès qui «n’hésitepas à tordre la réalité pourfaire une bonne blague».En cause, un sujet diffuséla semaine dernière lorsd’un déplacement deMélenchon à Amiensauquel participait aussiEva Joly. Il montrait lesdeux candidats se croisersans jamais se saluer. Or, ilss’étaient dit bonjour avantde monter dans le train.«Ils savaient qu’ils s’étaientsalués et ils montent toutela séquence sur le thème“ils ne se disent pas bon­jour”», proteste Champre­mier­Trigano.Visiblement vexé, YannBarthès s’est embourbéhier soir dans une justifica­tion boiteuse: «Ce qui sepasse en dehors des camé­ras ne concerne pas lePetit Journal.» C’est toutpetit, ça. L.A. PHOTO AFP

MÉLENCHONFÂCHÉ,BARTHÈS VEXÉ

LES GENSFin de l’indépendance de la «NRCO»Le groupe Centre France-La Montagne va prendre 6% de plusdans le capital de la Nouvelle République du Centre-Ouest(NRCO), et ainsi devenir le premier actionnaire du journaltourangeau. La décision doit être entérinée demain par lesactionnaires de la NRCO. Le groupe auvergnat en posséderaainsi 16%, devant l’actionnaire historique, la famille Saint-Cricq (15%).

RFI reprend sa grève contre la fusionavec France 24La grève à RFI, suspendue durant les vacances de Noël, serarelancée à partir de dimanche minuit. Les salariés mobilisés,qui veulent le gel de la fusion avec France 24 et s’opposentà leur déménagement à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), ont demandé, dans une lettre ouverte, à être reçuspar le Premier ministre (lire aussi en Rebonds, page 24). Lundiaprès-midi, la cour d’appel rend un arrêt sur la régularité dela procédure de fusion, qui n’est pas exécutoire. La fusionjuridique effective pourrait être décidée juste après, en as-semblée générale des actionnaires.

600cartes de presse de moinsont été attribuées en 2011par rapport à 2010, selonles statistiques de laCommission de la carted’identité des journalistesprofessionnels. Le nombrede cartes est en baissepour la deuxième annéeconsécutive. Au total,36815 cartes de presse ontété délivrées, dont34961 renouvellements et1854 premières demandes.Parmi ces nouveaux, seuls5% sont directement deve­nus «journalistes mensuali­sés titulaires», et près de lamoitié travaille à la pige.En 2011, 45,3% des cartesde presse ont été attri­buées à des femmes. Maiselles restent très absentesdes postes à responsabili­tés: 18% d’entre elles sonttitulaires de la carte depresse «directeurs».

C’est le Point et Mondadori qui doivent être contents.Les deux éditeurs avaient affirmé leur volonté de quitterle leader de la distribution, Presstalis, pour les tarifs plusattractifs de son concurrent, les Messageries lyonnaisesde presse (MLP). Mais fin décembre, le Conseil supérieurdes messageries de presse (CSMP), chargé d’assurer lebon fonctionnement du système de distribution et d’arbi­trer entre les messageries, avait décidé de geler les trans­ferts de magazines d’une entreprise à une autre pendantneuf mois. Finalement, mercredi, l’Autorité de régulationde la distribution de la presse a jugé ce gel «dispropor­tionné», car il «restreint la libre concurrence». En revanche,l’Autorité de régulation a approuvé le principe d’unepéréquation pour le financement de la distribution de lapresse quotidienne nationale, également souhaitée par leCSMP. Les MLP, qui ne distribuent qu’une partie de lapresse magazine, pourraient ainsi devoir supporter unepartie du coût de la distribution des quotidiens nationaux.

LES ÉDITEURS DE PRESSE PEUVENTQUITTER PRESSTALIS POUR LES MLP

L’HISTOIRE

Wired a compilé des photographies de terres agricolesprises depuis l’espace dans divers pays du monde.Des pixels naturels se dévoilent alors, créés par lesdifférentes techniques utilisées pour cultiver et irriguerles champs. On peut aussi ne pas se poser de questionet se contenter de trouver ça beau. S.Fa.http://www.wired.com

PIXELS AGRICOLES

VU SUR LE WWW

«Je souhaite vous inviter à visionner cetteémission car le contenu de votre lettreprouve que vous ne l’avez pas vue.»Rémy Pflimlin président de France Télévisions, répondantau dircom du FN qui reprochait à Laurent Ruquier d’avoir,samedi, présenté Marine Le Pen sous la forme d’un étronalors qu’il s’agissait d’une affiche de Charlie Hebdo.

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Thierry Henry est vraiment sortide sa préretraite new-yorkaiselundi soir. C’était à la fin du32e de finale de Cup remportépar Arsenal – à qui il est prêtéquelques semaines – face àLeeds (1-0), quand l’ex-trico-lore, qui fut de 1999 à 2007 le

plus éminent gunner, a marqué le but de la vic-toire. Alors que le ballon roulait au fond des filets,Henry tombait un peu par accident dans les brasde son éternel entraîneur, Arsène Wenger,l’homme qui, en l’accueillant cet hiver, a permisà l’attaquant de 34 ans de prolonger son histoireau-delà des rêves du plus mielleux des storytellershollywoodiens. L’accolade fut brève, comme si lesdeux hommes, qui se connaissent par cœur,s’étaient retrouvés emmerdés, du genre «pas deça entre nous» ou, mieux, «on ne va pas se mentirl’un l’autre».Toujours pour la galerie, Henry avait ensuite mer-veilleusement emballé sa soirée. «J’ai rejoint Arse-nal cet hiver non pas comme un joueur, mais comme

un fan. Il y a quinze jours, j’étais en vacances auMexique. J’espère que personne ne va venir me ré-veiller. Je suis là pour aider: dix, vingt ou trente mi-nutes, je ferai de mon mieux. Si le coach n’a pas be-soin de moi sur le terrain, j’aiderais les gars dans levestiaire.» Beau comme l’antique, oucomme l’émotion qui l’a étreint quand ila inauguré, par un matin clair de décem-bre 2011, sa statue en bronze devantl’Emirates Stadium. Là, tout le mondeavait flairé le moment clé : celui qui dittout. Trouble sincère ou calcul? On peuty passer des jours. Impossible à dire.D’un côté, Henry est hautement cons-cient de l’histoire de son sport et de la place qu’ily tient. De l’autre, il est le plus grand baratineurou dissimulateur qu’on ait jamais croisé dans unmilieu du foot où tout le monde – joueurs, diri-geants, agents, entraîneurs– ment sans arrêt, par-fois même pour dire qu’il fait beau ou qu’il pleut.Le plus grand attaquant français de ces cinquantedernières années a toujours survolé l’exercice dela parole, y mettant parfois une subtilité et un artde la semi-vérité qui, sans déconner, suscitait lerespect.

«C’est justement parce que j’étaishors jeu…»

Le fait est qu’il a toujours été dans la construction:la sienne et celle de son mythe. Thierry Henry joueun rôle mais comme c’est celui de Thierry Henry,il y a quelque chose de crédible là-dessous. Lemieux pour s’en convaincre, c’est de faire tomberles anecdotes. La première: pendant un Euro 2004où il s’est un moment vu pousser Zinédine Zidanedans la bordure (!), il est allé à plusieurs reprisesdans le bureau du sélectionneur d’alors, JacquesSantini, pour obtenir la peau de son soi-disant amiDavid Trezeguet, qui lui pompait l’air et les ballonssur le front de l’attaque.La deuxième: une scène extraordinaire durant unentraînement du Mondial 2006, quand il avait ad-ministré une leçon de jongles (avec le pied qui

passe au-dessus du ballon entre deux touches) àFranck Ribéry lors d’un premier quart d’heure quiavait la particularité de se dérouler devant les mé-dias. A la minute où les journalistes ont été invitésà quitter l’enceinte, Henry a complètement laissétomber l’exercice et un Franck Ribéry qui, incapa-ble d’y voir malice et n’ayant pas compris que lesmédias étaient le véritable public du show, a alorspoursuivi Henry avec son ballon sous le bras survingt mètres.La troisième: toujours lors de la Coupe du mondeen Allemagne, une conférence de presse aprèsFrance-Espagne (3-1 en 8e de finale) où il s’était,à la surprise générale, attribué une part de l’égali-sation d’un Ribéry qui, pour tenir à cet instant dufilm tricolore le rôle de la star émergente, était

clairement ciblé par Henry. Un type avait protesté:«Mais putain, pourquoi tu dis que tu y es pour quel-que chose alors que tu es hors jeu de 10 mètres ?»Henry, placide: «C’est justement parce que j’étaishors jeu de 10 mètres et d’ailleurs…» La démonstra-tion qui suivit fut époustouflante, truffée de cras-ses plus ou moins camouflées –«ce qu’il y a de bienavec Franck [Ribéry], c’est que quand il perd neufduels de suite, ça ne l’empêche pas de repartir unedixième fois au combat»– et de considérations surla vitesse comparée du même et du défenseur es-pagnol Carlos Puyol, prétendument neutralisé parla position de hors-jeu de l’artiste. Un détail nousavait frappés: alors que la plupart des journalistesétaient séduits, les vieux routiers de la presseavaient quitté la pièce, dégoûtés. Plus que le fond,c’est la forme qui dérange: le cynisme, la démoné-tisation du langage et la certitude que le foot sejoue ailleurs que sur le terrain, du moins en partie.C’est d’ailleurs l’histoire de sa vie. On s’était lon-guement posé en 2009 avec l’un des meilleursjoueurs du championnat de France de Ligue 1, eton avait entendu ça: «Henry est bon partout et enmême temps, il n’est très fort nulle part. Il va vitemais sans plus, il est technique sans plus, il est cos-taud sans plus… Parfois, je vois Nicolas Anelka fairedes trucs ahurissants, à se demander s’il fait le mêmemétier que les autres. Henry jamais. Mais la carrièred’Anelka, ce n’est pas le quart de la carrière de

De retour à Arsenal pour quelques matchs,l’ex-attaquant star de l’équipe de France posela dernière pierre de son mythe, une constructionplus médiatique que sportive qui lui a pourtantpermis de bâtir une carrière incomparable.

Par GRÉGORY SCHNEIDER

«Parfois, je vois Nicolas Anelka faire destrucs ahurissants, à se demander s’il faitle même métier que les autres. Henryjamais. Mais la carrière d’Anelka, ce n’estpas le quart de la carrière d’Henry…»Un joueur de Ligue 1 en 2009

Henrysoit qui maly pense

Lundi, à Londres, après avoir marqué le but qualificatifd’Arsenal en Cup contre Leeds. PHOTO IAN KINGTON . AFP

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Henry. Il faut chercher là [il montre son cerveau].»Le truc, c’est que Thierry Henry n’a jamais laissépersonne accéder à ses pensées. On a eu beau far-fouiller des mètres cubes d’interviews, on a eul’impression de trouver quelque chose en deux oc-casions seulement. Il y eut d’abord son blues post-France-Irlande (1-1) de novembre 2009, quand soncontrôle de la main avait permis aux Bleus d’accé-der à un Mondial sud-africain où, rétrospective-ment, il eut été préférable qu’ils n’aillent pas. Cefut le grand n’importe quoi: Jacques Attali réclamaune «exclusion à vie» du joueur, Christophe De-chavanne proposa d’envoyer l’Irlande en Coupedu monde et l’impayable Alain Finkielkraut fit del’introduction de la vidéo dans l’arbitrage un «dé-bat capital» et une «question de salut public».Henry, lui, s’est tu. Avant de lâcher : «Je me suissenti seul. Vraiment seul. A un moment donné, j’aicru que j’avais fait quelque chose de grave.» Et desombrer d’un seul coup avec son club de Barce-lone, ce qui suscitera ce mot de l’entraîneur cata-lan Josep Guardiola, hallucinant quand on connaîtl’intensité que le joueur a toujours mis en toutechose depuis le premier matin: «Pour qu’on croitencore en lui, il faudrait déjà qu’il y croit lui-même.»

L’arrière droit des îles FéroéLe second domaine où l’on a flairé une résonanceparticulière, c’est quand il parle de ceux qui fontle même métier que lui: les joueurs. Un journalistede France Football qui était venu le voir à Londress’est vu décortiquer un modeste Amiens-Château-roux de Ligue 2 –quand ils ont fait rentrer untel,Amiens est passé à trois devant et…– par un Henryqui, faut-il le rappeler, a rencontré trois fois parsemaine les meilleurs joueurs du monde pendantdix ans. On l’a aussi entendu disserter sur l’arrièredroit de la sélection des îles Féroé, ce qu’il n’aaucun intérêt (médiatique) à faire sauf à vouloirs’ouvrir à vie les portes du stade Tórsvøllur deTórshavn – qui n’a d’ailleurs pas de porte.Cette connaissance encyclopédique du jeu suggèreune piste: en plus de protéger le joueur lui-même,l’absence de sincérité du meilleur buteur en bleude tous les temps (51) pourrait signifier un soucide protéger un sport ouvert à toutes les prédations–médiatiques, financières, etc. Si Henry doit quel-que chose, c’est à ses pairs. Point barre.Lundi, après Leeds, il a marqué son désabusementquand l’intervieweur lui a dit que les téléspecta-teurs avaient commencé à l’élire «homme dumatch»… alors qu’il n’était pas encore entré enjeu. La vie du champion est parfois ingrate. Il nefaut pas non plus s’illusionner: la sensibilité et lascience que Thierry Henry a du foot lui ont aussisouvent permis de fuir les questions ou de travestirla vérité. On donnerait cher pour savoir ce qu’il araconté à Nicolas Sarkozy quand il est allé débrie-fer (à l’initiative du joueur et dans le dos des co-pains: personne ne lui demandait rien) le bus deKnysna après le fiasco sud-africain.Ça fait une paye que l’escroquerie s’est propagéeau terrain. Ceux qui parlent d’une renaissancen’ont pas vu ses prestations automnales avec lesNew York Red Bulls: le buste comme tenu par uncorset en métal, la vitesse du scaphandrier et laruse quand, sevré de ballon depuis un quartd’heure, il revient en toucher deux ou trois au mi-lieu de terrain avant d’aller reprendre sa sieste auxavant-postes. On a repensé au gamin qui, soucieuxde paraître guerrier, va tacler un bon coup dansla boue pour saloper son maillot. Attention: c’estle sport, le vrai. En marquant contre Leeds lundi,Henry a bouclé son parcours et posé la dernièrepierre de son mythe. Il ne vaudra pourtant jamaisla réalité, celle d’un type qui, pour disposer d’unefaculté extraordinaire à comprendre le foot au senslarge, s’est adapté à tout: la dureté de la PremierLeague anglaise, l’accointance entre un présidentde club et son fils agent de joueurs (!), un sélec-tionneur soupe au lait, le raz-de-marée Zidane,l’équilibre subtil du vestiaire barcelonais où trônaitSamuel Eto’o et même la déchéance physique. Çaméritait bien une statue. Et des larmes dont on nesaura jamais ce qu’elles cachent. •

Thierry Henryvu par l’artiste

britanniqueMarc Quinn

dans le cadre du100e anniversaire

de la Fifa,en 2004.

PHOTO REUTERS

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PORTRAIT DANIELLE BOUSQUET

«qui ne se discutent pas»: la «non-marchandisation du corps»et «l’égalité hommes-femmes». «Cette violence est une violencede genre. Celles de clients qui sont tous des hommes à des prosti-tuées qui sont très majoritairement des femmes.»Elle pensait que la condamnation de «cette violence-là», «tel-lement évidente», ferait autant consensus que le dossier vio-lence conjugale. Ses confrères parlementaires, de droitecomme de gauche, l’ont suivie. Le consensus est moins évi-dent hors du Palais-Bourbon. Et cela la met en colère. Sa voixet son visage se durcissent. «Je ne comprends pas comment desgens qui se disent de gauche peuvent accepter que le corps de lafemme puisse être mis en vente ou en location.» Les travailleursdu sexe qui la traitent sans grands égards de mère-la-morale-coincée-du-sexe, ne la gênent pas vraiment. «Ce sont des per-sonnes extrêmement minoritaires, qui ne représentent en rien laréalité de la prostitution en France.» Elle ne se laisse pas nonplus impressionner par les quelques protestations de clientsmécontents qui encombrent sa boîte mail de leurs «lettresobscènes». «C’est justement pour faire évoluer les mentalités deshommes que nous travaillons. Je crois en l’éducation, sur cesquestions-là en particulier. Cela prendra du temps, mais nous yarriverons.» Elle accepte mal en revanche les voix dissonantess’élevant de ses propres rangs. Elle se dit «atterrée» par les

propos d’une Elisabeth Badinter disant comprendre qu’unefemme préfère choisir faire commerce de ses charmes que detenir la caisse d’un supermarché pour un salaire de misère.«Ce sont les propos d’une milliardaire», raille-t-elle.Ses parents à elle étaient des enseignants, bretons, laïcs etde gauche. Milieu naturel structurant et déterminant dontelle ne s’est éloignée que brièvement, à l’heure de la jeunesse.Diplôme de HEC en poche, Danielle Bousquet fut directricecommerciale dans le privé. Et parisienne. Le temps de con-naître la réalité des cadres dirigeants de l’industrie, d’épouserun enseignant, originaire du sud-ouest de la France, etd’avoir deux enfants. Avant de «réintégrer» son milieu natu-rel en 1972. L’Education nationale. Le militantisme associatifféministe. La gauche socialiste. La Bretagne. Elle ne se voyaitpas habiter ailleurs. La Bretagne est, dit-elle, «exemplaire»sur les sujets qui lui tiennent à cœur. Elle est devenue profes-seure d’économie. Puis chef d’établissement, comme le futson père. Sa terre et ses repères retrouvés, elle s’est investiedans le Planning familial. C’était dans l’air du temps, mais,chez elle, c’était surtout dans la culture initiale. Elle raconteun «père féministe» qui, dans les années 50, dispensait dansles familles populaires des conseils de contraception, limitéeà l’époque à des cours sur l’usage du préservatif. Il était per-suadé qu’un peu moins d’enfants permettrait de favoriserl’activité féminine, clé de l’égalité et de l’émancipation. C’estde ce féminisme-là que Da-nielle Bousquet est née. Unféminisme d’éducation desmasses. Elle répète: «Educa-tion, éducation, éducation.»Elle a appliqué la recette à lamaison. Isabelle, sa filleaînée, ingénieure dans unesociété de promotion immo-bilière, se souvient du soucipermanent de sa mère de nepas faire de différence entre l’éducation de son frère et lasienne. Des discours répétés sur l’ambition, l’indépendance,l’épanouissement. Elle se souvient aussi d’un militantismepermanent. Et note, amusée, que les enfants de ces profs mi-litants sont, comme elle, majoritairement partis faire carrièredans le privé pour mener des «vies tranquilles, individualisteset égoïstes».Danielle Bousquet s’est lancée en politique «pour prolongerle discours et l’action de terrain». En 1983, elle a accepté d’en-trer au conseil municipal de Saint-Brieuc à la condition quele conseil compte 30% de femmes. Le maire n’a pas moufté.Elle a été désignée adjointe aux finances. Elle est devenuedéputée en 1997 lorsque Jospin a introduit un quota de fem-mes à la députation. Mais elle avait hésité. Elle s’était piquéed’un de ces complexes féminins qu’elle a pour réflexe decombattre. «Je pensais ne pas avoir les compétences pour rem-plir cette mission.» Plus tard, en 2007, elle sera un soutienenthousiaste de Ségolène Royal. Expérience qui lui permetde prendre la mesure d’une «misogynie inquiétante» d’unepartie de la société. La partie haute…En 2008, elle a été candidate malheureuse à la mairie deSaint-Brieuc. Bruno Joncour, le maire Modem, la pense plusportée par ses «combats de cœur» et son «attachement viscé-ral au PS» que par les dossiers de politique locale qui deman-dent parfois «de la nuance». En 2011, elle n’a pas pris partilors de la primaire. Mais a rejoint Hollande après sa victoireen novembre.Danielle Bousquet aurait aimé transmettre sa fibre de mili-tante féministe à sa fille. Mais elle constate avec un brin dedéception que «les choses ont changé pour les nouvelles généra-tions». «Entre un travail où l’on exige toujours plus d’elles etleur vie de mère, elles n’ont pas le temps de militer comme on lefaisait nous.» Elle rappelle, statistiques à l’appui, que la ré-partition des tâches entre les sexes dans les foyers n’a pasbasculé durant les dernières décennies. Elle parle aussi dela précarité des femmes seules avec enfants. Elle verrait d’unbon œil le retour d’un ministère aux Droits des femmes. Elledément en viser le fauteuil. Elle est adhérente d’Osez le fémi-nisme!, relais «respectueux» des combats de sa génération.Danielle Bousquet ne se représentera pas à la députation. Elleconsidère qu’à 67 ans, il faut savoir passer la main. Elle parledu nécessaire renouvellement de la classe politique. Elleconstate que les femmes sont plus facilement accessibles àce genre de raisonnement. Et surtout, plus enclines à le met-tre en pratique. •

Par ALICE GÉRAUDPhoto YANN RABANIER

EN 5 DATES

1945 Naissance à Plœuc­sur­Lié (Côtes­d’Armor).1967 Mariage. 1978 Rejointle PS. 1997 Députée.2011 Proposition de loi pourla pénalisation des clientsde prostituées.

L’ univers de la députée socialiste Danielle Bousquetest bien rangé. D’un côté, il y a les victimes (genreféminin). De l’autre, les bourreaux (genre mas-culin). Au-dessus, ceux qui œuvrent à rétablir jus-

tice et égalité. Et au milieu, peu de place pour la nuance, ceszones de gris où les principes se heurtent parfois à d’encom-brantes et mouvantes réalités.Danielle Bousquet, petite dame stricte et discrète, ne transigepas avec les principes. Et supporte mal que d’autres s’avan-cent sur ce terrain, piétinant au passage sans vergogne lesvaleurs sûres d’un féminisme qui aura structuré tout son par-cours. Celui de la militante du Planning familial admiratived’Yvette Roudy, qui a su transformer ses convictions en forcede proposition, devenant parlementaire à la deuxième mi-temps de sa carrière. A son tableau d’honneur: la loi contrela violence faite aux femmes en 2010. Et, encore plus récem-ment, une proposition pour la pénalisation des clients deprostituées. Petite pierre législative à l’avenir incertain, quis’inscrit dans un combat plus large visant à l’abolition de laprostitution en France. Pour elle, il en va de deux principes

Féministe traditionnelle, cette députée PS de Saint-Brieucveut pénaliser et rééduquer les clients de la prostitution.

L’éducatrice

LIBÉRATION VENDREDI 13 JANVIER 2012