l’hyperéchogénicité diffuse de la médullaire rénale...

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SIGNIFICATION DE L’HYPERÉCHOGÉNICITÉ DIFFUSE DE LA MÉDULLAIRE RÉNALE CHEZ L’ENFANT L. Sbihi, D. Alami, R. Dafiri Service de Radiologie, Hôpital d’Enfants-Maternité, CHU Rabat - Maroc JFR2010

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SIGNIFICATION DE L’HYPERÉCHOGÉNICITÉ DIFFUSE DE LA MÉDULLAIRE RÉNALE CHEZ L’ENFANT

L. Sbihi, D. Alami, R. Dafiri Service de Radiologie, Hôpital d’Enfants-Maternité, CHU Rabat - Maroc

JFR2010

Introduction

L’hyperéchogénicité diffuse de la médullaire rénale chez l’enfant est le plus souvent liée à une néphrocalcinose médullaire (dont les étiologies sont multiples et variées), et plus rarement à des tubulopathies sans néphrocalcinose.

Sa découverte impose une enquête étiologique comportantSa découverte impose une enquête étiologique comportant Une approche clinique globaleUn bilan biologique appropriéDes explorations radiologiques à la recherche d’associations lésionnelles (foie, rate, parathyroïdes, os, ...)

La connaissance des étiologies des hyperéchogénicitésmédullaires est donc nécessaire afin que l’imagerie puisse s’intégrer dans une démarche diagnostique bien conduite et dans une prise en charge multidisciplinaire adéquate. L’objectif final est de prévenir l’insuffisance rénale.

Objectifs pédagogiques

Savoir intégrer l'imagerie à l'ensemble des données recueillies par l’équipe soignante (cliniques biologiques imagerie)par l équipe soignante (cliniques, biologiques, imagerie).

Savoir rechercher les lésions associées viscérales et osseuses.

Etiologies de l’hyperéchogénicité diffuse médullaire rénale

Néphrocalcinoses médullaires +++Iatrogènes

fortes doses de vit DfurosémideCorticothérapieChimiothérapie

Tubulopathies sans néphrocalcinose

Vasculaires: drépanocytose, HTA rénovasculaireI f ti did

Maladies kystiques de la médullaire

PolykystoserécessiveEctasie tubulaire (Cacchi Ricci)...Chimiothérapie ...

Non iatrogènes HypercalcémiesHypercalciurie liée à X Acidose tubulaire distale OxaloseCystinoseHypothyroidie congénitaleSyndrome de Bartter, ...

Elle peut être transitoire et bénigne chez le nouveau-né (entre 2 jours et 2 semaines de vie)Serait liée à une élévation de la concentration tubulaire de calcium, d’oxalate, d’urate ou de protéines de Tamm-Horsfall. Facteur de risque probable: la déshydratation

Infectieuses: candidose, CMVMétaboliques: dépôts d’urates (Lesh Nyhan), Autres: nécrose papillaire; myoglobinurie; reflux vésico-urétéral

(Cacchi Ricci)...

!

Les néphrocalcinoses médullaires

Néphrocalcinoses médullaires

La néphrocalcinose se définit par la présence de dépôts de calcium dans les tubules rénaux

Les néphrocalcinoses médullaires constituent 90% des néphrocalcinoses

Physiopathologie: déséquilibre entre promoteurs et inhibiteurs de la lithogénèse

Promoteurs InhibiteursCalcium Citrate

Oxalate Magnésium

Acide urique Phosphate

CystineMédicamentsDébris cellulairesNanobactéries

Protéines-Uropontine- Néphrocalcine- Tamm-Horsfall

Volume - pH

Néphrocalcinoses médullaires

Jéquier S et al. EMC 2002

Le diagnostic se fait à l’échographie, motivée par les circonstances cliniques suivantes:

Polyuropolydipsie (parfois oligo-anurie)

La néphrocalcinose médullaire

Retard statural Troubles digestifs (vomissements, nausées, anorexie)Troubles respiratoires (acidose, OAP)Infection Hématurie Anémie, acidose, altération de la fonction rénaleDépistage chez un nouveau-né asymptomatique ayant des antécédents familiaux d’IR ou de néphrocalcinose.Dépistage devant des signes extra-rénaux spécifiques: dysmorphie faciale, surdité, retard mental, anomalies osseuses, ...

La néphrocalcinose médullaireAspects échographiques

Hyperéchogénicité intéressant la totalité ou seulement la périphérie des pyramides

Inversion de la différenciation cortico-médullaire

Reins le plus souvent de taille normale (au début)

Trois stades échographiques :

1. Hyperéchogénicité limitée au sommet des pyramides

2. Hyperéchogénicité pyramidale diffuse et inhomogène

3. Hyperéchogénicité pyramidale diffuse et homogène.

La néphrocalcinose médullaireAspects échographiques

Néphrocalcinose débutante (grade 1)

aspect souligné de toutes les pyramides de Malpighi par une hyperéchogénicité linéaire prédominant au sommet des pyramides

Aspect normal

Pyramides hypoéchogènes par rapport au cortex. Sinus peu échogène

Néphrocalcinose grade 3

hyperéchogénicité diffuse et homogène des pyramides de Malpighi, inversion de la différenciation cortico-médullaire

Néphrocalcinose médullaire grade 3 + lithiases

hyperéchogénicité diffuse et homogène des pyramides de Malpighi, avec quelques cônes d’ombre postérieurs

Néphrocalcinose grade 2

hyperéchogénicité médullaire diffuse et inhomogène

La néphrocalcinose médullaire

Une fois le diagnostic fait

Recherche étiologique

•Clinique: interrogatoire+++, examen complet•Biologie: bilan phospho-calcique, ionogramme, ...•Imagerie•PBR, PBF, FO, ...

Cas clinique 1

F de 3 moisAntécédents:

Consanguinité parentale.deux sœurs décédées par insuffisance rénale à 7 mois et 5 mois (tableau de détresse respiratoire, troubles digestifs, anémie sévère, ...)

Bilan:Bilan: Écho: reins de taille normale, hyperéchogénicité médullaire diffuse bilatérale néphrocalcinoseBiologie:

hémogramme, ionogramme normauxCristallurie: cristaux de Whewellite, hyperoxalurie, hypercitraturie

PBR: dépôts de cristaux oxaliques intratubulairesAnalyse de l’ADN: mut c.731T>C (pIle244Thr) à l’état homozygote chez la patiente et à l’état hétérozygote chez les parents

Diagnostic

Hyperoxalurie primitive de type I

Cas clinique 2

Nourrisson présentant des troubles digestifs en rapport avec une hypercalcémieEchographie: néphrocalcinose médullaire diffuse grade 3.Biologie: hypercalcémie, hypercalciurie, hypophosphorémie, ↗ PAL, ↗ PTHhyperparathyroïdie primaireTDM: adénome parathyroïdien gauche

Cas clinique 3Néphrocalcinose iatrogène chez un nourrisson suivi pour rachitisme sous fortes doses de vit D.Echo: reins de taille normale. Hyperéchogénicité médullaire diffuse inhomogène prédominant sur la périphérie des pyramides.

Autres étiologies d’hyperéchogénicité diffuse de la médullaire chez l’enfant

Fibrose hépatique congénitale

Maladie à transmission AR (cas sporadiques possibles)Prévalence 1/100 000= Fibrose des espaces portes et dilatation microscopique des VBIH

Isolée ou associée à d'autres anomalies :Isolée ou associée à d autres anomalies : dilatation macroscopique des VBIH (syndrome et maladie de Caroli) malformations rénales (PKR, maladie de Cacchi et Ricci)Exceptionnellement, syndrome neurologique avec aplasie cérébelleuse, ataxie et oligophrénie: syndrome de Coach

Conséquence : HTP (enfance ou adolescence) hémorragies digestives abondantes. Parfois cavernome portal

Fibrose hépatique congénitaleCas clinique

Ictère cholestatique et HTP chez un nouveau-né

Dilatation VBIHHyperéchogénicités punctiformes des pyramides de Malpighi

Foie hyperéchogènehétérogène

Maladie de Cacchi Ricci

Synonymes: Ectasies canaliculaires précalicielles, rein en éponge médullaire

= Dilatation isolée de la partie distale des tubes collecteurs au sein d'une ou plusieurs pyramides, de façon uni ou bilatéraleClinique: asymptomatique ou symptomatologie lithiasique (douleurs, hématurie)hématurie).Imagerie:

Au début: la dilatation intramédullaire des tubes de Bellini n'est perceptible qu'à l'UIV, sous la forme d'une striation nette précalicielle. Ensuite, les ectasies kystiques deviennent plus évidentes et s'associent à des déformations papillaires et calicielles. Dans les formes plus évoluées, les calcifications se projettent en regard de chaque papille, visibles sur l’ASP, mieux en échographie et en TDM.

Maladie de Cacchi Riccicas clinique

ASP et échographie montrant des pyramides hyperéchogènes et des lithiases multiples en projection des papilles

Polykystose récessiveIncidence 1/10 000 à 1/40 000. Définition: maladie héréditaire qui affecte à la fois

les reins: dilatation kystique des tubes collecteurs Kystes très petitset le foie (dysgénésie biliaire) fibrose péri portale souvent compliquée d‘HTP

+/- dilatation localisée des voies biliaires.Génétique:

mutations du gène PKHD1 (6p21.1), autresmutations du gène PKHD1 (6p21.1), autresFormes cliniques

formes sévères à révélation précoce caractérisées par une atteinte rénale prédominante. Mort foetale ou néonatale liée à une augmentation considérable du volume des deux reins et un défaut de développement pulmonaire. formes intermédiaires: insuffisance rénale progressive et fibrose hépatique vers 7-8 ans. formes peu sévères se révèlent en général pendant l'enfance ou à l'adolescence; atteinte hépatique prédominante.

Pronostic: 15-30% décès en période néonatale

Polykystose récessivecas cliniques

Forme néonatale Forme juvénile intermédiaire

Nouveau-né, détresse respiratoireTrès gros reins hyperéchogènes avec dédifférenciation cortico-médullaire

Garçon de 4 ans, insuffisance rénaleRein modérèment augmenté de taille, peu différencié, siège d’hyperéchogénicités médullaires diffuses punctiformes + kystes hépatiques multiples

Drépanocytose

Maladie héréditaire AR due à une anomalie de la synthèse de l’hémoglobine (Hb S) déformation des GR qui deviennent falciformes au cours de l’hypoxie

Plus fréquente chez les sujets de race noire

Formes hétérozygotes: souvent asymptomatiques/ homozygotes: anémie hémolytique, crises douloureuses abdominales et osseuses, infections et infarctus multiplesp

L’atteinte rénale est secondaire à la falciformation des GR dans les vasa recta de la médullaire oblitération capillaire et fibrose nécrose papillaire (15-36%)

Clinique: asymptomatique, polyurie, douleur, hématurieBiologie: protéinurie 12%, insuffisance rénale 4-18%, Échographie:

reins augmentés de taille dans 50% des cas (cause: ↗ volume sanguin rénal)

Échogénicité normale (89%), hyperéchogénicité diffuse modérée (5%), hyperéchogénicité médullaire seule (3%), cavité liquidienne en cas d’évacuation de la papille nécrosée

Peuvent s’y associer des infarctus segmentaires plus ou moins étendus

Drépanocytosecas cliniques

Rein de taille normale, peu différenciés, hyperéchogénicité diffuse prédominant sur la médullaire.

Rein de taille normale.Hyperéchogénicité médullaire.

Reins globuleux.Hyperéchogénicité médullaire diffuse modérée.

Points à retenir

L’hyperéchogénicité médullaire diffuse chez l’enfant traduit le plus souvent une néphrocalcinose médullaire liée à des maladies congénitales du transport ionique tubulaire (oxalose, acidose tubulaire distale, hypercalciurie...) ou d’origine iatrogène (vit D, furosémide, ...)

Les étiologies principales sans néphrocalcinose sont les atteintes tubulaires d’origine vasculaire (drépanocytose), certaines infections, les ectasies tubulaires précalicielles (Cacchi Ricci) et les maladies kystiques de la médullaire rénale (PKR, FHC, ...)

La découverte de reins hyperéchogènes doit conduire toujours à une enquête étiologique approfondie afin d’adapter la prise en charge thérapeutique pour éviter l’installation d’une insuffisance rénale.

Bibliographie

Jéquier S et al. Néphrocalcinose et autres calcifications du parenchyme rénal. EMC 2002 34-180-A10

De Bruyn R. Echographie pédiatrique. Indications, technique et résultats. Editions Elsevier Masson 2007

Greenberger M, Skoog SJ. Renal medullary hyperechogenicityof the neonate. Urology 54: 365, 1999

Avni E F et al. Approche diagnostique des néphrocalcinoseschez l'enfant SFIP 2000 online

Lonergan G J et al. Sickle cell anemia. AFIP archives. Radiographics 2001; 21 (4): 971-994

QCM

1. L’hyperéchogénicité pyramidale est présente dans les causes iatrogènes suivantes:

A. FurosémideB. CorticothérapieC. Intoxication à la vitamine DD. Antibiothérapie antituberculeuse

2. La néphrocalcinose médullaire se traduit par:A. Une hyperéchogénicité pyramidaleB. Une hyperéchogénicité en mottesC. Une dédifférenciation cortico-médullaireD. Des reins augmentés de taille

3. Les causes suivantes sont responsables de néphrocalcinose médullaireA. Hypercalciurie liée à l’XB. Acidose tubulaire proximaleC. Acidose tubulaire distaleD. Nécrose papillaireE. La polykystose récessive

Réponses

1. A, B, C2. A3. A, C