l'hémicycle - #407

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2001-2011 Bush l’a voulu, Obama l’a fait. « Nous tuerons Ben Laden » mar- telait le candidat démocrate dès 2008. Promesse tenue. L’explosion de joie des dizaines de milliers de New-yorkais venus fêter à Ground Zero, la disparition du fondateur d’Al Qaïda, montre à quel point les at- tentats du 11 septembre sont une plaie encore béante dans le cœur du peuple américain. Mais la mort d’un symbole, s’il elle l’obscurcit un temps, n’éradique pas la réalité. Celle du terrorisme qui depuis dix ans a recruté ses bras armés dans de multiples réseaux, en Afghanistan, au Pakistan, en Asie du sud-est, au Yémen ou au Maghreb. Les terroristes, un instant aba- sourdis, vont tenter dans les mois qui viennent de mul- tiplier les actions démontrant que la mort du chef, en fait déjà suppléé depuis de nombreuses années, n’a pas diminué leur capacité de nuire. Pour autant la mort de Ben Laden, but initial de la guerre en Afghanistan, reste un évènement majeur. D’abord il montre la capacité des démocraties, en particulier des États-Unis, de marquer des points décisifs sur un terrain que l’on disait définitivement miné et sans issue, celui de la lutte implacable contre le terrorisme. Ensuite, en affaiblissant, même momentanément, l’intégrisme islamiste, il contribue à ternir l’image des extrémistes au profit de tout ceux qui choisissent la libération par le mouvement des peuples et non par l’organisation d’ac- tions terroristes effroyablement meurtrières mais fina- lement peu efficaces. Plus que jamais les démocraties ont le devoir d’accom- pagner ces mouvements de libération en essayant d’atteindre un idéal complexe : trouver le juste équilibre entre les interventions nécessaires et le refus des guerres injustifiées, ou qui n’ont plus guère de raisons d’être, tel le conflit en Afghanistan. Avec la mort de Ben Laden, Obama clôt une décennie de passions déchaînées et de violences aveugles. Certes ne soyons pas naïfs, la pieuvre sans tête peut être plus mortelle encore, y compris pour nos otages. Il reste que le Président des États-Unis vient d’imprimer une trace indélébile dans la mémoire de son peuple. Pour les Américains, il y aura désormais un avant et un après 1 er mai 2011, comme il y eut pendant 10 ans un avant et un après 11 septembre. 2,4 C’est le chiffre de la perte nette pour les finances publiques due à la TVA à 5,5 % accordée aux cafés restaurants. Cette baisse de la TVA s'est accompagnée de la suppression d'aides à l'emploi (environ 600 millions d'euros) accordées depuis 2004 par le ministère de l'Économie. Le chiffre Et aussi L a gauche en 2012 ? Ceux qui le souhaitent, ont de bonnes rai- sons d’espérer. La logique de l’al- ternance d’abord : 10 ans d’une droite qui règne sans partage sur l’Élysée, Mati- gnon et les Assemblées, ça ne c’était pas vu depuis la présidence Giscard d’Es- taing. La plupart des gouvernements européens malmenés par la crise n’ont pas résisté plus longtemps. Le rejet du Président ensuite : certes les sondages ne photographient une situation politique qu’à un instant donné, mais difficile d’imaginer comment cette impopula- rité record à un an de l’élection pourra se transformer en 51 % de votes favo- rables. Enfin, les échecs et les reniements du candidat Sarkozy de 2007 sont si nombreux qu’ils pèseront forcément très lourds dans la campagne, au risque pour le Président sortant de ne pas réus- sir à valoriser les réformes réalisées, pour- tant nombreuses et dont certaines consti- tuent dans leur domaine des avancées majeures. Pour autant les dirigeants socialistes ont raison de garder la tête froide. Des élec- tions de 1978 au lendemain de la rup- ture du programme commun jusqu’à 2007 où l’on annonçait une Ségolène Royal triomphante six mois aupara- vant, en passant par un Lionel Jospin à qui l’Élysée ne devait pas échapper en 2002, l’histoire regorge d’élections où la gauche n’a pas su transformer l’essai, butant sur la dernière marche, déchirée par ses propres divisions. Les futures primaires socialistes permettront-elles d’éviter cet écueil ou vont-elles au contraire l’amplifier ? Dans tous les cas la multitude des candidatures à gauche, l’incertitude au centre et à droite, la puissance du Front National, montrent bien que le pays déboussolé par une classe politique à la recherche de ses propres leaders, attendra encore quelques mois et l’automne pour se faire une idée plus claire de ses propres choix. C’est le pari de Nicolas Sarkozy qui pense que rien n’est joué et que la donne ne sera vraiment d’actualité qu’une fois les candidats connus. Avec cette conviction : on reconnaîtra au Président en place d’avoir protégé la France du chaos des crises. À moins qu’il ne pâtisse de cette même situation de crise qui veut que face à celle-ci, « on sorte les sortants ». R.N. > Lire p. 2, 3 et 4 NUMÉRO 407 — MERCREDI 4 MAI 2011 — 1,30 ¤ Éditorial Robert Namias Directeur de la publication : Bruno Pelletier Directeur : Robert Namias BERTRAND GUAY / AFP PATRICK KOVARIK / AFP 31 ans après l’élection de François Mitterrand Un président socialiste en 2012 ? GERARD MALIE / AFP lhemicycle.com milliards d’euros Tandis qu’au PS on veut y croire, Nicolas Sarkozy n’a pas dit son dernier mot. Il entend bien gagner cette ultime bataille. La France auscultée par Brice Teinturier Le Directeur général délégué d’Ipsos France fera régulièrement pour l’Hémicycle un état de l’opinion. La crise du résultat en constitue l’un des marqueurs essentiels. > Lire p. 5 Un épouvantail ? Un souvenir ? Une référence ? Bruno Lemaire P. 2 Laurent Fabius P. 3 GEORGES GOBET / AFP ERIC PIERMONT / AFP BORIS HORVAT/AFP Le Conseil constitutionnel au mieux de sa forme L’institution a pris une nouvelle dimension avec la QPC. Un petit-déjeuner Mazars-l’Hémicycle avec son président Jean-Louis Debré. > Lire p. 12-13 Au sommaire Initiatives : « Aux arbres, citoyens… » avec Martin Malvy > P. 6 Focale : François Hollande >P. 10 Expertise : José Bové >P. 16 De la CGT au Front national : Fabien Engelmann

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l'Hémicycle numéro 407 du mercredi 4 mai 2011

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Page 1: l'Hémicycle - #407

2001-2011Bush l’a voulu, Obama l’a fait.« Nous tuerons Ben Laden » mar-telait le candidat démocrate dès2008. Promesse tenue. L’explosionde joie des dizaines de milliers deNew-yorkais venus fêter à GroundZero, ladisparitiondufondateurd’AlQaïda, montre à quel point les at-tentats du 11 septembre sont une

plaie encore béante dans le cœur du peuple américain.Mais lamort d’un symbole, s’il elle l’obscurcit un temps,n’éradique pas la réalité. Celle du terrorisme qui depuisdix ans a recruté ses bras armés dans de multiplesréseaux,enAfghanistan,auPakistan,enAsiedusud-est,auYémenouauMaghreb.Les terroristes,un instantaba-sourdis, vont tenter dans lesmois qui viennent demul-tiplier lesactionsdémontrantque lamortduchef,en faitdéjà suppléé depuis de nombreuses années, n’a pasdiminué leur capacité de nuire.Pourautant lamortdeBenLaden,but initialde laguerreen Afghanistan, reste un évènement majeur. D’abord ilmontre la capacité des démocraties, en particulier desÉtats-Unis,demarquerdespointsdécisifs surun terrainque l’on disait définitivement miné et sans issue, celuide la lutte implacable contre le terrorisme. Ensuite, enaffaiblissant, même momentanément, l’intégrismeislamiste, il contribue à ternir l’image des extrémistesau profit de tout ceux qui choisissent la libération par lemouvement des peuples et nonpar l’organisationd’ac-tions terroristes effroyablement meurtrières mais fina-lement peu efficaces.Plusque jamais lesdémocratiesont ledevoir d’accom-pagner ces mouvements de libération en essayantd’atteindreun idéal complexe : trouver le juste équilibreentre les interventions nécessaires et le refus desguerres injustifiées, ou qui n’ont plus guère de raisonsd’être, tel le conflit en Afghanistan.Avec lamort de Ben Laden, Obama clôt une décenniedepassionsdéchaînéesetdeviolencesaveugles.Certesne soyons pas naïfs, la pieuvre sans tête peut être plusmortelle encore, y compris pour nosotages. Il restequele Président des États-Unis vient d’imprimer une traceindélébile dans la mémoire de son peuple. Pour lesAméricains, il y aura désormais un avant et un après1er mai 2011, comme il y eut pendant 10 ansun avant et un après 11 septembre.

2,4C’est le chiffre de la perte nette pour les financespubliques due à la TVA à 5,5 % accordée aux cafésrestaurants. Cette baisse de la TVA s'estaccompagnée de la suppression d'aides à l'emploi(environ 600 millions d'euros) accordées depuis 2004par le ministère de l'Économie.

Le chiffreEt aussi

La gauche en 2012 ? Ceux qui lesouhaitent, ont de bonnes rai-sons d’espérer. La logique de l’al-

ternance d’abord : 10 ans d’une droitequi règne sans partage sur l’Élysée,Mati-gnon et les Assemblées, ça ne c’était pasvu depuis la présidence Giscard d’Es-taing. La plupart des gouvernementseuropéens malmenés par la crise n’ontpas résisté plus longtemps. Le rejet duPrésident ensuite : certes les sondages nephotographient une situation politiquequ’à un instant donné, mais difficiled’imaginer comment cette impopula-rité record à un an de l’élection pourrase transformer en 51 % de votes favo-rables. Enfin, les échecs et les reniementsdu candidat Sarkozy de 2007 sont sinombreux qu’ils pèseront forcémenttrès lourds dans la campagne, au risque

pour le Président sortant de ne pas réus-sir à valoriser les réformes réalisées, pour-tantnombreuses et dont certaines consti-tuent dans leur domaine des avancéesmajeures.Pour autant les dirigeants socialistes ontraison de garder la tête froide. Des élec-tions de 1978 au lendemain de la rup-ture du programme commun jusqu’à2007 où l’on annonçait une SégolèneRoyal triomphante six mois aupara-vant, en passant par un Lionel Jospin àqui l’Élysée ne devait pas échapper en2002, l’histoire regorge d’élections oùla gauche n’a pas su transformer l’essai,butant sur la dernièremarche, déchiréepar ses propres divisions. Les futuresprimaires socialistes permettront-ellesd’éviter cet écueil ou vont-elles aucontraire l’amplifier ? Dans tous les cas

lamultitude des candidatures à gauche,l’incertitude au centre et à droite, lapuissance du Front National, montrentbien que le pays déboussolé par uneclasse politique à la recherche de sespropres leaders, attendra encorequelques mois et l’automne pour sefaire une idée plus claire de ses propreschoix.C’est le pari de Nicolas Sarkozy quipense que rien n’est joué et que ladonne ne sera vraiment d’actualitéqu’une fois les candidats connus. Aveccette conviction : on reconnaîtra auPrésident en place d’avoir protégé laFrance du chaos des crises. À moinsqu’il ne pâtisse de cettemême situationde crise qui veut que face à celle-ci, « onsorte les sortants ». R.N.

>Lire p. 2, 3 et 4

NUMÉRO 407 —MERCREDI 4 MAI 2011 — 1,30 ¤

ÉditorialRobert Namias

Directeur de la publication : Bruno Pelletier Directeur : Robert Namias

BERTRANDGUAY

/AFP

PATRICKKOVARIK/AFP

31 ans après l’élection de François Mitterrand

Un président socialiste en 2012 ?GERARD

MALIE/AFP

lhemicycle.com

milliards d’euros

Tandis qu’auPSon veut y croire, Nicolas Sarkozy n’a pas ditsonderniermot. Il entendbien gagner cette ultimebataille.

La France auscultée par Brice TeinturierLe Directeur général délégué d’Ipsos Francefera régulièrement pour l’Hémicycle un étatde l’opinion. La crise du résultat en constituel’un desmarqueurs essentiels.>Lire p. 5

Unépouvantail ?Un souvenir ?

Une référence ?

BrunoLemaireP. 2

LaurentFabiusP. 3

GEORGESGOBET/AFP

ERICPIERMONT/AFP

BORISHORVAT/AFP

Le Conseil constitutionnelaumieux de sa formeL’institution a pris une nouvelle dimension avec laQPC. Un petit-déjeuner Mazars-l’Hémicycle avecson président Jean-Louis Debré.>Lire p. 12-13

Au sommaire • Initiatives : « Aux arbres, citoyens… » avecMartinMalvy>P. 6 • Focale : François Hollande>P. 10 •Expertise : JoséBové>P. 16 •De la CGT au Front national : Fabien Engelmann

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NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 3

31 ans après, pourquoi serait-il bonque la France ait à nouveau unprésident socialiste à sa tête ?Parce que la France a besoin d’unchangement efficace et juste. Cechangement passe par le redresse-ment économique et financier detout le pays. Il passe par un effortgénéral appuyé sur une meilleureéquité fiscale et sociale et par le ras-semblement des Français, là où lepouvoir actuel pratique souvent ladivision. Redressement, justice, ras-semblement : c’est le chemin qu’atracé François Mitterrand en sontemps et qu’il nous faut reprendredans un contexte différent.

Sur quelle(s) question(s) se joueraselon vous l’élection présidentielle ?L’économique et le social jouerontun rôlemajeur. L’emploi, le pouvoird’achat, les services publics aussi. Lesproblèmes d’environnement et demigrations seront également trèsprésents. La façon d’exercer la pré-sidence sera, elle aussi, décisive :nos concitoyens veulent un(e) pré-sident(e) qui les représente digne-ment. Et puis il y aura l’imprévu...qui arrive toujours.

Quelles devront être les premierschantiers, les premières mesuresd’un nouveau président socialiste ?Martine Aubry m’a chargé de pré-parer la première année de gouver-nement. Àpartir duprojet socialiste,bien accueilli par l’opinion, il s’agitd’examiner à la fois le calendrier, lesprincipales décisions gouverne-mentales, les méthodes de travail,

les structures. Et de remettre ce tra-vail au PS et à la personnalité can-didate. Par exemple, sur le plan inté-rieur, l’équipe gouvernementaledevra lancer rapidement une nou-velle politique de l’emploi en direc-tion des jeunes, des seniors et desPME ainsi que la réforme fiscale.Sur le plan extérieur, nous devronsrenouer un bon dialogue avec nosvoisins, notammentnos partenaires

allemands et, sans attendre, entamerle retrait concerté des troupes fran-çaises d’Afghanistan.

Sur quelles réformes menéespar Nicolas Sarkozy faudra-t-ilrevenir en priorité ?Les changements sont particulière-ment attendus dans les secteurssocial et financier. Mais il y aurafort à faire dans beaucoup dedomaines, par exemple le dialoguesocial, la décentralisation et l’ap-profondissement de la démocratie.

Quelles seront les marges demanœuvre de la gauche, si ellel’emporte, au vu de la situationbudgétaire de la France ?Il ne faut pas raconter debalivernes :la situationdedépart seramauvaise.Le déficit budgétaire – « l’ardoiseSarkozy » – sera important. L’en-dettement accumulé estmassif. Lesmarges de manœuvre financières

seront étroites. Il faudra à la foispousser la croissance, décisive pourl’emploi, réduire l’endettement et lesdéficits.D’où lanécessité d’unepoli-tique sérieuse et juste.

Comment ne pas décevoir lorsquel’on exerce le pouvoir ?D’abord, en disant la vérité avantmême l’exercice du pouvoir. « Tra-vailler plus pour gagner plus », « je

serai le président de l’augmenta-tion du pouvoir d’achat », ce genrede tartarinades, les Français en ontassez. Ils sont conscients des diffi-cultés. Ils veulent un pouvoir hon-nête, intellectuellement et morale-ment, qui dira où il veut aller et quirendra régulièrement des comptes.Mais la période, je le répète, sera dif-ficile car la France – et l’Europe – ontperdu des places.

La droite a jugé que, dans sonprojet, le PS reprenait beaucoupde recettes du passé.Que lui répondez-vous ?Nous avons adopté notre projet àl’unanimité : ce n’est pas si fréquentchez les socialistes... La partie édu-cation-recherche-formation-innovation est, et sera centrale. Sivouspensez aux « emplois d’avenir »destinés aux jeunes, c’est unreproche infondé. Nous avons tiréles leçons positives des « emplois

jeunes » de l’époque Jospin. Nousn’oublions pas que – même si lesmodalités en seront améliorées – ilsont permis de mettre le pied àl’étrier pour plusieurs centaines demilliers de jeunes, dont 80 % ontobtenuunCDI : c’est doncutile. Surun plan général, notre projet tientcompte des grandesmutations éco-nomiques, géographiques, techno-logiques, sociologiques à l’oeuvre.

Le modèle de développement quenous proposons est « social-écolo-gique ».Nous assumonspleinementl’exigence écologique, qui va struc-turer beaucoup de nos choix.

Quelles conditions faut-il réunirpour que le PS l’emporte en 2012 ?Il fallait unprojet sérieuxet convain-cant : c’est le cas.Nous allonsmain-tenant choisir la personnalité quiportera nos couleurs. Un projetmobilisateur, une bonne candida-ture, l’unité : c’est le tiercé gagnant.Notregaucheestunegauchede solu-tions face à unedroite des impasses.

Quel candidat permettrade l’emporter ?Nous avons beaucoup de respon-sables de talents au PS ; c’est unechance ; il faudra qu’ils ou elles fas-sent partie de l’équipe du change-ment. Quant à la présidence elle-même, Dominique Strauss Kahn et

Martine Aubry semblent se déta-cher. Ils ont l’expérience, la légiti-mité, la compétence.

Et si un autre était désigné par lesparticipants à la primaire du PS ?Je penseque la raison et l’unité l’em-porteront. J’insiste en particuliersur l’unité indispensable : beaucoupde forces veulent nous diviser, c’estun piège dans lequel il ne faut pastomber. Surtout, pas de divisions !Je serai undes garants de cette unité.

Faut-il limiter le nombrede candidats à gauche pouréviter un nouveau 21 avril ?Il est normal que les grands courantsde pensée souhaitent être présentsau 1er tour. En même temps, il fautéviter une dispersion excessive. Lemeilleur moyen pour gagner, c’estque notre candidat ait une solideavance dès le premier tour. C’est ànotre portée.

Quel souvenir personnelgardez-vous du 10 mai 1981 ?Commedesmillions de Français, jegarde le souvenir du visage télévisédu vainqueur, progressivementdévoilé à 20 heures. « MitterrandPrésident » : des années de combatet d’espérance trouvaient enfin leuraboutissement. Et leur point dedépart. En y repensant, j’ai encorela chair de poule !

Propos recueillispar Ludovic VigogneChef du service politique

de Paris Match

Pour l’ancienPremierministre, seuls les socialistespeuvent répondreaubesoinde changementsouhaité par les Français. Pour gagner, Laurent Fabius appelle à l’unité du PS au premier tourde la présidentielle et de toute la gauche au second tour.

Agora

LAURENT FABIUS

«NOTREGAUCHE ESTUNEGAUCHEDESOLUTION FACEÀUNEDROITEDES IMPASSES»

«Unprojetmobilisateur,unebonnecandidature,l’unité : c’est le tiercé gagnant »

ERIC

PIER

MONT/A

FP

2 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

Agora

Quesymbolisepour vousle 10mai 1981?Un choc politique pour ceux quicomme moi vivaient au sein d’unefamille gaulliste et croyaient – etcroient toujours d’ailleurs – à cettetradition. Un choc politique aussicar pour la première fois la Ve Répu-blique connaissait l’alternance.

Que reste-t-il pour vousde cettepremière expériencede la gaucheaupouvoir sous laVeRépublique?Il en reste beaucoup de symboles,mais peu de changements concretset profonds. On le voit bien avec lanostalgie Mitterrand actuelle. Oncélèbre l’espoir d’alors, plus que desréalisations concrètes réalisées aubénéfice des Français.

En2012,unprésident socialistepour laFrance, ce serait unebonneouunemauvaise chose?Ce sera aux Français de choisir. Cesera à eux de déterminer quel ave-nir ils souhaitent pour leur pays. Cesera à eux de dire s’ils veulent setourner vers le monde, valoriserleurs atouts et leurs qualités qui sontimmenses, poursuivre la construc-tion européenne ou bien s’ils choi-sissent le repli sur soi. Si on lit leprojet des socialistes pour 2012, c’estce qu’ils proposent : le refus de voirle monde en face et de se donnerune ambition européenne.

Depuis 1995,unprésidentdedroiteest installé à l’Élysée.Vousnepensezpasque lesFrançaisaient soif dechangement?

Il peut toujours y avoir une soif dechangement. Mais je crois que cequi compte d’abord et avant toutdans une élection présidentielle,c’est la vision que vous proposezpour votre pays. On ne choisit pasle changement pour le change-ment. Que le PS ait choisi pour titrede son projet « le changement » enmontre d’ailleurs toute la limite !Les Français sont très lucides dansleurs choix politiques. C’est ungrand peuple politique. Ils se déter-mineront en fonction de la visionde la France qui leur sera proposée,des choix de société qui seront faits.Je crois à la force des idées.

Vousqui rédigez leprojetde l’UMPpour2012, comment jugezvouscelui duPS?C’est un projet étriqué, qui n’est pasau niveau des défis que doit releverla France dans le monde d’au-jourd’hui. Les Français s’interrogentsur le recul européen, sur la mon-dialisation, la crise économique, lanouvelle donne internationale. Ceprojet n’y répond pas. Il est petitbras, davantage adapté aux réalitésdes années 60 qu’à 2020. Économi-quement, il aurait un coût exorbi-tant : 45milliardsd’eurosdedépensessupplémentaires au minimum, fi-nancées de manière irresponsable.Comment justifier la remise en

cause de l’exonération des heuressupplémentaires, qui apporte 150 à200 euros parmois en plus à près de6 millions de Français ? Quant aurétablissement de la taxe profes-sionnelle, cela n’a pas de sens etnuira à l’investissement. La remiseen cause du quotient familial fragi-lisera également un atoutmajeur dela France. Ce projet s’inscrit dansune logique de stricte assistance. LesFrançais n’en veulent plus. Soutenirles jeunes, nous sommes tous d’ac-cord ! Mais pas en leur accordantune allocation supplémentaire et enles enfermant dans une logiqued’assistanat !

Beaucoupd’observateursyontvuuneplusgrandepriseencomptedesréalitésquepar lepassé.Pasvous?Ce n’est pas ce que j’ai constaté.Leurs recettes sont datées, leur pro-gramme de dépenses publiques ir-responsable au vu de la situationdes finances publiques.

Despointsd’accordsedessinentpourtant : l’enjeude laréindustrialisationdu territoirefrançais, lamiseenplaced’uncertainprotectionnismeauxfrontièreseuropéennes…Bien sûr qu’il peut exister desconstats partagés, et tant mieux.Mais les options pour y répondre

ne sont pas les mêmes. Oui, il fautplus d’industries en France, mais sion rétablit la taxe professionnelle,on n’y arrivera pas. Oui, il faut unfonds d’investissement pour lepays, mais il existe déjà : c’est lefond stratégique pour l’investisse-ment. Oui, il faut aider davantageles jeunes : mais en favorisant leurautonomie, pas en les mettant ensituation de dépendance.

Surquelthèmeseferalacampagne?Il est trop tôt pour le dire ; ce seraaux candidats de le déterminer.Mais je vois au moins trois ques-tions essentielles. 1. Qui sera capa-

ble de proposer une vision de laFrance pour demain ? C’est unpoint clé. Il n’y en a ni dans le pro-jet du PS, ni dans celui du FN. Ils selimitent à une accumulation deme-sures. 2. Faisons-nous le choix del’ouverture qui permettra à tous lesFrançais et pas seulement à une par-tie d’entre eux de bénéficier de lamondialisation et de la construc-tion européenne ou bien celui durepli sur soi ? Ce sera une ligne defracture déterminante. Par exemple,plus de dépenses publiques et plusd’impôts, comme le proposentles socialistes, nous éloigneront del’Allemagne. 3. L’État doit-il tou-jours faire plus ? Voulons-nous au

contraire sortir de la logique d’as-sistanat pour entrer dans une lo-gique d’autonomie, qui donnera àchacun la possibilité de déployerplus librement ses talents ?

Que reste-t-il de la rupture?Il reste deux choses essentielles.D’abord les réformes en profondeurqui ont été engagées par le présidentde la République. Cela constitue unbilan très solide sur le plan institu-tionnel, économique et social. En-suite, la gravité des crises que nousavons traversées. Aujourd’hui, onfait comme si elles n’avaient pasexisté. Cela devrait pourtant êtrele point de départ de chaque projetprésidentiel, tant leurs consé-quences sont lourdes pour beau-coup de Français et pour notre pays.

Qu’est cequi peut faireperdreNicolasSarkozyen2012?Je me bats pour qu’il gagne. Cen’est donc pas une question que jeme pose.

DSKest-il selonvous le candidat leplusdangereux?Tous les candidats sont dangereux.Ce sera une élection difficile. MaisNicolas Sarkozy a un atout maître :la très grandemaîtrise dont il a faitpreuve pendant les crises écono-miques et internationales que nousavons traversées.

Propos recueillispar Ludovic VigogneChef du service politique

de Paris Match

«CE SERAUNE ÉLECTIONDIFFICILEMAIS NICOLASSARKOZY AUNATOUTMAJEUR : SA TRÈS GRANDE

MAÎTRISE DEVANT LES CRISES»

BRUNO LEMAIRE

«Leprojet socialisteest étriqué,davantageadaptéauxréalitésdesannées60qu’à2020»

GEORG

ESGO

BET/A

FP

Bruno Lemaire, aujourd’huiministre de l’Agriculture, sera demain l’une des piècesmaîtressedu dispositif de campagne deNicolas Sarkozy. Pour lui, un retour des socialistes au pouvoirconstituerait un véritable recul pour la France.

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La défiance des Français àl’égard des institutions et desautorités est un phénomène

profond et ancien. Son moteurprincipal est la crise du résultat.Or, rarement la crise du résultat enpolitique n’a été aussi profonde :aux 25 ans de chômage de masses’ajoute la perception d’un pou-voir d’achat en berne et une detteet des déficits publics dont tout lemonde a compris la profondeur.Ils nourrissent la peur d’une érosioninéluctable de la protection sociale,d’une hausse probable de la fisca-lité et au final, la projection d’undéclassement inéluctable. Si l’on yajoute un sentiment d’inégalité his-torique, une insécurité non régléeet une immigration qui taraudecertains, tous les ingrédients sontréunis, à un an du scrutin présiden-tiel, pour amplifier la crise du résul-tat, le rejet des sortants et le senti-ment, omniprésent dans la sociétéfrançaise, que les puissants (com-prendre les politiques, les grandspatrons, les médias et depuis peules sondages !) « nous manipulent ».C’est cette situation qui fonde leglissement de pans entiers de lasociété vers des formes de désen-gagement (abstention en haussed’un côté, salariés de moins enmoins motivés de l’autre) ou decontestation active du système :On ne l’a pas assez dit, mais letotal des intentions de vote en fa-veur du FN, de l’extrême gaucheet d’un Front de gauche - dont leleader préconise « qu’ils s’en ail-lent tous »- dépasse les 30 %. C’estun peu plus que le record atteintle 21 avril 2002 par ces mêmesforces anti-système.

Les trois marqueurs

de l’opinion

De fait, trois phénomènes aumoins se sont cristallisés au coursdes derniers mois. Le rapport auxmédias et à l’information. Le tra-vail d’élaboration sur la crise de2008. Enfin, la signification pro-fonde et aujourd’hui renouveléede la crise du résultat en politique.Sur le premier point, nous vivonsl’effondrement accéléré d’unecroyance positive reposant surl’idée d’un lien fort entre informa-

tion, instruction et tolérance ac-crue Le constat est en effet inverse.Il y a toujours plus d’informationdisponible et elle s’échange tou-jours plus vite et auprès de tou-jours plus de gens, via Internet, lesréseaux sociaux et les chaînesd’info en continu. Pourtant, lespulsions xénophobes et de repli

s’amplifient, les thèses les plus ar-chaïques, comme le création-nisme, reprennent de la vigueur etl’émotionnel est de plus en plusvalorisé. Cela signifie que « dansune société où chacun voit tout etsait tout sur tout, les différencesentre les individus deviennentplus visibles et créent non pas unetolérance mais une tension ac-crue »(*). D’où ce nouvel éloge dulocal que nous voyons poindre, etl’hyper valorisation de la proxi-mité mais aussi, ces tentatives deplus en plus nombreuses de re-créer les conditions d’un entre soiplutôt que d’ouverture à l’autre.

La désacralisation des médiasOr, ce phénomène se double d’unprofond sentiment de vacuité. Eneffet, l’information est toujours pluslarge et rapide mais l’impression des

Français est que « cela va trop vite »,que les médias surfent, amplifient,déforment et finalement, ne créentpas ce surcroit de connaissancequ’on aurait pu attendre. D’où de-puis peu un nouvel éloge de la len-teur et de recherche du sens. Il fautralentir, retrouver du sens et de la si-gnification, de « l’authenticité », de la

« vérité ». Finalement, les médias,dont la fonction est précisémentd’être une médiation, conditionabsolue d’élaboration de toutesignification, sont devenus desimmédiats, qui se copient et se ré-pètent. Et la méfiance à leur égard,déjà profonde, aboutit aujourd’huià une véritable désacralisation.C’est un bouleversement majeurpour toute la société.

Un regard contradictoiresur la mondialisationParallèlement, les Français ont to-talement intégré la mondialisa-tion et sa signification profonde.Depuis longtemps, elle les in-quiète et est perçue comme unecause majeure des destructionsd’emploi. Mais après avoir beau-coup espéré en 2008 que d’un malsortirait un bien, ils font un

constat clair et désabusé : il n’y ani « régulation », ni « refonda-tion », le monde d’après ressembletotalement au monde d’avant etl’économie dépend toujours de cequi nous échappe : les grandes en-treprises internationales, les mar-chés financiers, les actionnaires,loin devant les gouvernants.

Crise et scepticismeOr, cette élaboration sur la crise de2008 sonne le glas d’une histoirede plus de 25 ans. Il y avait eu1981 et le tournant de 1983 ; puis« la lutte contre la fracture sociale »suivie de la conférence du 26 octo-bre 1995, qui en signifiait l’enterre-ment ; puis la campagne de 2006 /2007, dernière campagne d’exalta-tion d’une sortie de crise par dessolutions avant tout nationales etreposant sur des valeurs : la réha-bilitation du travail, de l’effort, dumérite, de la responsabilité et la dé-nonciation de l’esprit de mai 68 al-laient permettre de s’en sortir.C’est cette histoire là qui est sansdoute finie. Nos extralucides sa-vent maintenant clairement que leréel ne se plie pas à la seule volontéet ont vu dans la crise grecque lespectre de ce qui pourrait leur arri-ver. La question de l’action et durésultat reste donc entière mais elles’est totalement déplacée : ellepasse par la mondialisation.

Deux France

Les deux France qui émergent etvont s’entrechoquer d’ici 2012sont donc le fruit de la crise mé-

diatique, de la crise de l’actionpolitique et de ce que les Françaisont élaboré à partir de la crise fi-nancière de 2008. Elle opposeplus que jamais ceux qui considè-rent que la mondialisation est lenœud de tout – et donc que la so-lution est d’en sortir, à ceux quiestiment que les solutions ne se

feront que dans le cadre de cettemondialisation.C’est en ce sens qu’il faut lire le suc-cès dans l’opinion de DominiqueStrauss-Kahn : non comme uneprévision inéluctable mais commeun symptôme. On est attiré parquelqu’un ayant une connaissanceavérée de la mondialisation et deses rouages, dont on espère dessolutions. À droite, ChristineLagarde, dont la crédibilité estconstruite sur l’international etl’économie, est numéro 2 chez lessympathisants UMP, juste derrièreAlain Juppé ! Là encore, un symp-tôme. Tout comme l’est, dans unrapport inverse à la mondialisa-tion, la montée en puissance deMarine Le Pen ces derniers mois.Ce que le scrutin de 2012 va nouspermettre, c’est la quantificationexacte de ces deux France, autourde non pas 2 mais 3 grandsclivages : gauche / droite ; haut /bas ; ouvert / fermé, dans un cli-mat historique d’impopularitépour le Président sortant.C’est une élection qui reste doncouverte, mais dans un contextetotalement renouvelé.

*Dominique Wolton

NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 5

La France au scalpelPour le directeur général d’Ipsos France, la défiance des Français à l’égard des politiquesest dûe à la crise du résultat. La désacralisation des médias est également le symptômed’une opinion déboussolée qui ne sait plus qui croire.

Par Brice Teinturier

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«APRÈS AVOIR BEAUCOUPESPÉRÉ EN 2008 QUE D’UN

MAL SORTIRAIT UN BIEN, LESFRANÇAIS FONT UN CONSTATDÉSABUSÉ : IL N’Y A NIRÉGULATION, NI REFONDATION,LE MONDE D’APRÈS RESSEMBLEAU MONDE D’AVANT »Brice Teinturier

Plan large

4 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

Plan large

Le 10 mai 1981, 20 heures

Le 10 mai 1981 à 20h, ÉricRaoult (UMP, Seine Saint-Denis) commençait le

dépouillement des bulletins devote dans sa commune du Raincy,quand la section CGT, raconte-t-il, est venu « l’insulter » en luidisant : « Maintenant, c’est nous quicommandons ». Ça commencemal, s’est dit le futur député RPRpuis UMP de Seine-Saint-Denis.Au Palais des sports de Grenoble

au contraire, le très jeuneChristophe Caresche (PS, Paris),fêtait la victoire de François Mit-terrand tandis que Michel Sapin(PS, Indre) chantait place de laRépublique à Argenton-sur-Creuse,où il allait être élu député. Dansson bureau du quai d’Orsay,Jacques Myard (UMP, Yvelines)s’est dit : « Dont acte »mais il « n’apas paniqué pour autant ». À Lou-viers François Loncle (PS, Eure)s’apprêtait à conquérir l’anciennecirconscription de Pierre Mendès-France alors que la droite localecraignait de voir arriver les chars

soviétiques. Françoise de Panafieu(UMP, Paris) garde moins le sou-venir du 10 mai que celui de l’ar-rivée un mois plus tard de quatreministres communistes au gou-vernement, qui semble la glacerencore. Et Jean Tiberi (UMP,Paris) qui habite place du Pan-théon, n’était pas au balcon le 21mai, jour de l’intronisation théâ-trale du nouveau président, maisdans sa mairie du Ve arrondisse-

ment où Jacques Chirac lui avaitdemander de rester, au cas où...« On souffrait, mais avec sérénité »confie le futur maire de Paris.Si la gauche gagnait en 2012, leschoses seraient-elles différentes ?Pas tant que ça, selon Éric Raoult :« Ici, en Seine-Saint-Denis, noussavons ce qu’est le département PS,ce qui nous donne un avant-goût dureste. On n’est pas sous le joug, maisc’est l’État PS. La gauche est sectaire,elle a l’esprit revanchard. Si elle re-vient au pouvoir elle ne nous fera pasde cadeau ». Françoise de Panafieuest moins pessimiste : « Mitterrand

est celui qui a rendu la gauche cré-dible. Il n’y a plus de procès enillégitimité comme en 1981. La dé-mocratie s’est habituée aux alter-nances » Mais elle remarque quela victoire d’un homme commeMitterrand, ce « prince de l’am-bigüité » ne serait sans doute pluspossible aujourd’hui où règne ladictature de la « transparence ».Le parallèle 1981-2012, JacquesMyard ne le fait pas non plus,

mais pour une autre raison : « En1981, Mitterrand avait un pro-gramme, même s’il n’était pas plusà gauche que je ne suis évêque. Au-jourd’hui, c’est du Vivagel décongelé,de la social-démocratie très molle ».Jean Tiberi doute de la capacité dela gauche à « tenir compte de lacrise mondiale et de la situation in-ternationale » et soupire : « Ils veu-lent toujours dépenser plus… »Ce n’est pas ce que dit MichelSapin, proche de François Hol-lande : « En 1981, il y avait desmarges de manœuvre. On n’avait pasla mondialisation. Là, même les plus

dispendieux disent qu’on ne peut pluscontinuer comme cela. Il faut un re-dressement de la France, financiermais aussi moral » Et alors que lagauche de 1981 promettait deslendemains qui chantent, MichelSapin suggère « un discours sur l’ef-fort, sur la difficulté » en notant :« Mitterrand avait 110 propositions.Aujourd’hui on en a 30, il n’y enaura peut-être plus que trois à l’ar-rivée ». Résultat, selon l’ancienministre des Finances : « La situationne peut pas créer l’enthousiasme ».Peut-être, mais « la gauche ne peutpas ne promettre que des larmes et dusang ! » répondChristopheCaresche(qui soutient Dominique Strauss-Kahn), en espérant qu’elle saura àla fois « remettre en mouvement lepays » et « apporter un supplémentd’âme » car « la réponse ne sera pasdans des promesses non tenues maisdans la mise en perspective d’un hori-zon pour la France ».

Y aurait-il une grande fête, sem-blable à celle du 10 mai à laBastille, si la gauche gagnait ?« Peut-être, mais ce sera une fête antiSarkozy » selon Michel Sapin.Christophe Caresche note qu’ « ily a des éléments pour en faire un mo-ment très fort, une volonté de gagneret de tourner la page Sarkozy ». Ceque François Loncle (qui soutientMartine Aubry) traduit plus bru-talement : « Si on célèbre autant le10 mai, c’est parce que la compara-ison est effroyable pour Sarkozy, unprésident malfaisant dont lesFrançais, même à droite, ont un peuhonte ». Et comme pour se ras-surer, Éric Raoult ironise : « DSK,je l’ai eu comme maître de con-férences à Sciences Po, je serai peut-être épargné… »

Garde à vous !C’est fait, en France maintenant,on va jouer les « EXPERTS » danstous les commissariats : « Jenediraiplus rien, j’appelle mon avocat ».Dans une volte juridique qu’onaurait jugée incompatible avec leurréputation de « ne touchons à riende peur que ça tombe » , les hautsmagistrats de laCour deCassationont allégrement doublé le Par-lement et le Gouvernement enconstatant que la Conventioneuropéennedes droits de l’hommes’appliquait immédiatement, enparticulier s’agissant de la présencede l’avocat tout au longde la gardeà vue. Certains esprits mal inten-tionnés de la presse judiciaire avan-cent l’hypothèse sacrilège qu’ils’agit là d’une réplique de la hautejuridictionauxmauvaisesmanièresdu Président de la République àson égard.Mais,Quai de l’Horloge,on jure le contraire sur la dernièreversion du Code de procédurePénale.D’autres esprits pointilleuxautant que républicains avancentque lesmagistrats, si haut que soitleur siège, ne peuvent détricoterce que les élus du peuple ontmail-lé en matière de loi pénale. C’estoublier que la France a, depuislongtemps, accepté que les pré-ceptes européens s’appliquent« sans attendre que soit modifiéela législationnationale ». Enmatièrede lecture, les conseillers deCassa-tion sont réputés maîtres. Restequ’ils ont surpris toutes les geôlesde France.Dire quepoliciers et gen-darmes aiment voir les avocatspiétiner leurs procédures seraitquelquepeu froisser la réalité. Touscroyaient avoir le temps, jusqu’enjuin, de bien comprendre ce qu’ilsallaient pouvoir refuser à l’avocatqui va venir troubler l’excitanteproximité de ces 24 heures durantlesquelles ils pouvaient extraire duforcément très suspect les aveuxqui confortaient leur convictionpremière. Mais ils sont déjà auxportes, ces empêcheurs de ques-tionner tranquilles, agitant leurdroit d’être avant, pendant, aprèset surtout partout. Vont-ils aiderou freiner cette justice dont ils separent des vertus ? Vont-ils, cesavocats, aider à cacher ou à men-tir ? Vont-ils au contraire convain-cre de révèler ce qu’on cherche àdécouvrir ? Il va falloir calmerbeau-coupde polémiques pour parvenirà la sérénité qui d’ailleurs n’existenulle part . Et se souvenir, surtout,quelesFrançais,quellequesoit l’obé-dience, ont , depuis le jugement deDieu, la religion de l’aveu .

L’opinionde Paul Lefèvre

DR

Dans les couloirs de l’Assemblée, même si on n’en parle pas, on ne pensequ’à ça. Ça, le 10mai 1981 et la possible victoire de la gauche en 2012.Espoir vaguement désabusé à gauche, sinistre souvenir à droite.Choses entendues.ParBéatrice Houchard

«DSK, JE L’AIEU COMME

MAÎTRE DECONFÉRENCESÀ SCIENCES PO,JE SERAI PEUT-ÊTREÉPARGNÉ!»Éric Raoult

BERTRAND

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MEHDIFEDOUACH

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JEAN-PIERREMULLER/AFP

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FRED

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ÀMontpellier, les futurs logementsde Rive gauche bénéficieront ainsid’un éclairage et d’une ventilationnaturels. Ils disposeront égalementde capteurs photovoltaïques. Deséoliennes et une chaufferie au boisassureront les besoins en électricitéet la production d’eau chaude sani-taire. Agrémenté de larges espacesverts, le quartier accessible partramway disposera aussi d’uneplage sur les rives du Lez.

Les rubansdudéveloppementdurableDésignée capitale verte de l’Europepour l’année2013,Nantesété récom-penséepour ses efforts enmatièredepréservationde l’environnement etde rénovation urbaine durable. Desinitiatives également saluées par lesrubans du développement durable.« Dans ce monde agité, court-termisteet dévastateur, les Rubans travaillentdans le temps, tracent une voie plusraisonnable, nous disent que l’avenir etl’action des hommes ont un sens » sou-ligne Denis Cheissoux, présidentdu jury. Les dix nouveaux lauréatsde l’an dernier, dont la région deFranche-Comté, illustrent la réalitédu développement durable à toutesles échelles des territoires.La dimension environnementale,historiquement privilégiée dans lesinitiatives, commence aujourd’huià être complétée par la santé, la cul-ture, le handicap, la jeunesse. Nou-velle étapedans unedémarche équi-table, la déclarationdeParis élaboréeà l’initiative de l’Île-de-France pré-cise le rôle des régions en France etdans lemonde, enmatière de luttecontre le changement climatique,de préservationde l’environnementet d’économie verte. Parce que laterre ne nous appartient pas, nousl’empruntons à nos enfants.

Ludovic Bellanger

NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011 L’HÉMICYCLE7

Alors que Paris lance la construc-tion de son premier éco-quar-

tier doté d’éoliennes urbaines sur lesite de l’ancienne gare demarchan-dises deRungis (dans le 13e arrondis-sement), lanouvelle carte interactiveest disponible sur econovista.comréférence les projets franciliensd’aménagement urbain. Réaliséepar l’Agence régionale de dévelop-pement (ARD) en association avecl’Île-de-France, la cartographie visela valorisation et la promotion del’éco-région francilienne.

«Éco-quartier»et«Éco-Cité»Situés sur ses huit départements,trois types de quartiers durables

sont aujourd’hui référencés. Ils intè-grent à la fois les notions de préser-vation des espaces naturels, d’op-timisation des transports, de densitéurbaine, de concertation et d’at-tractivité. Outre les « Nouveauxquartiers urbains » (« Porte de Saint-Germain » à Argenteuil dans le Vald’Oise, « Quartier fluvial » de l’Île-Saint-Denis en Seine Saint-Denis, etprojet « Confluence Seine amont »à Ivry-sur-Seine dans le Val-de-Marne), les « ÉcoQuartiers » et les« Écocités » font aussi leur appari-tion, à l’image des « SecteurFréquel Fontarabie » à Paris, et du« Bois des Granges » de la Claye-Souilly, en Seine-et-Marne. �

Paris se met au vert

GIRONDEDESINTERNATSPOURLESSAISONNIERS�Utilisées hors du temps scolaire, lesrésidences lycéennes constituent lanouvelle solutionde logementpour lestravailleurs saisonniers. Initiée enAquitaine,laRégiona crééuneaide incitativepermettant àunorganismedegestionlocative sociale deproposer àunproviseuruneprise en location« clé enmain»de soninternat enpériodeestivale.Après unepremière expérience concluante l’andernierauLycéede lamerdeGujan-Mestras,l’initiative sera reconduite cet été.

HÉRAULTETSILAVILLECOMMENÇAITPARLAMOBILITÉ�Montpellier lance autour de sonprojeturbain -« Imaginons notre ville dedemain »- une large concertation.Le programmedes rencontres organiséesau cours des deux prochaines annéesa été ouvert début avril. Culture, écologie,société, habitat etmobilité, les conférencessont animéespar des experts qui apportentleurs éclairages et réagissent aux besoinset aux attentes des citoyens.

ILE-ET-VILAINEWIKI-RENNES,L’ENCYCLOPÉDIEPARTICIPATIVE� Inspiré du célèbreWikipédia, le siteWiki-Rennes est unprojet d’innovation sociale etunoutil de valorisationdeshabitants.Wiki-Rennes vise àdessiner unautoportrait deRennespar lesRennais, ou toutepersonneayant un lienavec la ville.Aux côtésdestémoignages,Wiki-Rennesaégalementnouéunpartenariat avec l’Institut nationalde l’audiovisuel (INA)afind’intégrer enlignedes vidéos surRennes etRennesMétropole.

BOUCHES-DU-RHÔNELEMONDIALDEL’EAUÀMARSEILLE� AprèsKyotoet Istanbul, la citéphocéenneaccueillera l’an prochain le 6e forummondial de l’eau. Le sénateur-maire deMarseillede rappeler«lerôlefondamentaldes collectivités territoriales enmatièrede gestion de l’eau. Je souhaite que le6e forumdonne une large place aux acteursmajeurs de la politique de l’eausur le terrain que sont les villes ».Et d’inviter les grandesmétropoles àparticiper à la préparation de l’événement.

MEUSEVERSUNDÉBATSURL’ÉNERGIE?� Commenous le laissions entendre dèsle 6 avril (L’Hémicycle No405), BertrandPancher a déposé un projet de loi « visantà l’organisation d’un débat public nationalsur l’énergie ». Le députéUMPde laMeusesouhaite aborder tous les points chaudsdu dossier, sans exclusive, du nucléaireaux gaz à effet de serre en passant parles renouvelables et lemix énergétiqueenvisageable. À noter que les cosignatairesforment eux-mêmes un«mixparlementaire » original, deMaximeGremetz àNicolas Dupont-Aignan,en passant par Christophe Caresche.

En bref

AnneHidalgo, Jean-PaulHuchonetBertrandDelanoë.PHOTOBERTRANDLANGLOIS/AFP

Le site Econovista.compermet de visualiser les vingt-neuf quartiers« durables » d’Île-de-France.

PhilippeSaurel.AdjointaumairedeMontpellierchargédel’urbanismeetdel’aménagementdurable.PHOTODR

des actrices indispensables pour inven-ter des réponses pratiques à ces défisdu 21e siècle » explique JacquesAuxiette, président du Conseilrégional des Pays de la Loire. Et depréciser : « L’Agenda 21 régional pré-sente sa participation à la construc-tion d’un nouveau modèle de sociétéà travers des actions concrètes enmatière de développement durable ».

«Desmicroprojetspourdevraischangements»Jardins familiaux à Chancelade(Dordogne), récupération de lachaleur des eaux usées pour chauf-fer les écoles parisiennes et mêmel’Elysée, piscine chauffée aux billesde bois à Carhaix (Finistère), pédi-bus -un système de ramassage sco-laire à pied- et vélobus à Pordic(Côtes-d’Armor), cours d’éco-conduite pour les habitants deChangé (Mayenne)… l’imagina-tion paraît sans limite.Outre des rencontres Café Énergieà Beauvais pour rappeler les objec-

tifs de Kyoto, Besançonmise sur undiagnostic thermique participatif.Afin de diminuer de 20 % laconsommation d’énergie et desémissions de gaz à effet de serre àl’horizon 2020, la ville a mis à ladisposition de ses habitants descaméras thermiques afin de détec-ter les pertes énergétiques de leurlogement.« On n’avance pas de façon fou-droyante en tout » reconnaît Cathe-rine Lafeuille, responsable du pro-jet Agenda 21 à lamairie deMassy,particulièrement impliquée dansla démarche. « Chaque année nousmontons le curseur. Toutes lesconstructions sont désormais évaluéesen performance énergétique, nousn’utilisons plus aucun produit phyto-sanitaire dans les espaces verts, nousavons installé des containers enterréspour remplacer les vide-ordures, etnous soutenons des entreprises d’in-sertion. Ce n’est que le début. Tous cesmicroprojets, mis bout à bout, indui-sent de vrais changements. »

Leséco-quartiersdessinentlesvillesdedemainNouveaumodèle urbain inspiré del’Europe du nord, les éco-quartiersréhabilitent désormais zones indus-trielles et portuaires de l’hexagone,et dessinent les villes de demain.DeGrenoble, dont le quartier de la

Caserne a reçu le Grand Prix Natio-nal Éco-Quartier, au site du GrandLarge à Dunkerque, en passantpar Lyon, Rennes et Chalon-sur-Saône, les quartiers 100 % écolovisent à intégrer des solutions dedéveloppement vert et à réduireleur empreinte écologique.

Signe des temps, les « zonesd’actions prioritaires pourl’air » nées du Grenelle de

l’Environnement et présentéesdébut avril à Paris, traduisent l’en-gagement des villes en matière delutte contre la pollution. L’expéri-mentationmenée à partir de 2012pendant trois ans, concerne huitagglomérations (Paris, Saint-Denis,Lyon, Grenoble, Clermont-Fer-rand, Bordeaux, Aix-en-Provence etNice). Les ZAPA visent à exclure deszone urbaines les véhicules les pluspolluants.

834démarchesd’Agenda21Un engagement en faveur du déve-loppement durable qui se traduitde manière moins médiatique parl’Agenda 21. Créé lors du Sommetde la terre à Rio et rappelé avecforce à Johannesburg en présencede plusieurs régions françaises,(dont Midi-Pyrénées), le pro-gramme qui repose sur trois piliers– l’économie, le social et la préser-vation de l’environnement – inviteà repenser la manière de vivreensemble.Parmi les 834 démarches actuelle-ment recensées, 47 nouveaux pro-jets et agendas locaux dont ceux descommunautés de Dunkerque et deLille ont été reconnus par l’État cethiver. « Le Sommet de la terre à Rioa permis un peu partout dans lemonde, une prise de conscience desurgences écologiques. Il a égalementdésigné les collectivités locales comme

6 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

Initiatives

MARTIN MALVYPRÉSIDENTDELARÉGIONMIDI-PYRÉNÉES

Toulouse accueillera les Assises nationales du développement durableà la rentrée : quel est l’objectif de ce 6e rendez-vous ?Nous sommes partis d’un constat simple. La crise économique et lesenjeux environnementaux croissants posent la question de la pertinencedes échelons international et national pour œuvrer en faveur du déve-loppement durable. À l’occasion de ces Assises, nous souhaitons pro-mouvoir l’implication et la pertinence des expériences des collectivi-tés et de leurs partenaires français et européens autour d’un millierd’actions concrètes en faveur du développement durable. Au-delà decet état des lieux, les assises permettront d’identifier les améliorationsqui pourraient être développées pour généraliser ces « bonnes pra-tiques ». Unmémorandumdes actions des collectivités territoriales, rédigépar l’ARF, sera porté au Sommet de la terre à Rio en 2012.

À l’heure du futur Agenda 21 «2012-2017» en Midi-Pyrénées,quel bilandressez-vous des actions menées en matière de développement durable ?Midi-Pyrénées a été la première Région de France à adopter un Agenda 21

reconnu par le Ministère de l’Écologie dès 2007. À travers son PlanClimat II, la Région s’est engagée dans la réduction des consommationsd’énergies et la lutte contre le changement climatique au niveau local.Nous avons accompagné la mise en place de plus de 16 000 installa-tions solaires chez les particuliers, de 30 réseaux de chaleur-bois et lancéle Plan Rail le plus ambitieux de France.

Midi-Pyrénées regroupe 20 % des actions nationales reconnuesAgenda 21 : comment expliquez-vous ce leadership ?Depuis 2000, la Région a soutenu financièrement 28 collectivitésterritoriales et territoires pour la réalisation d’Agendas 21 locaux dansle cadre du programme PRELUDDE (Programme Régional de Luttecontre l’effet de serre et pour le Développement Durable).Elle les accompagne également techniquement dans l’élaborationde leur Agenda 21. Ce soutien permet de créer une émulation et unevéritable dynamique entre collectivités, afin de faire de Midi-Pyrénéesun territoire exemplaire, innovant et solidaire !

«Un millier d’actions en faveur du développement durable »3 questions à

« Aux arbres, citoyens…»

PHOTOOLIVIERSCHWARTZ

Loin des débats Joly-Hulot, sur le terrain, les Régions sont déjà passées au vert. Entre prisede conscience citoyenne et Agenda 21, villes et collectivitésmultiplient les initiatives écolo.

«TOUS LES MICROPROJETS,MIS BOUT À BOUT,

INDUISENT DE VRAISCHANGEMENTS »

Catherine LafeuillePHOTODR

Page 5: l'Hémicycle - #407

À quoi sert l’ARF ?L’ARF est une force de propositionauprès du gouvernement, du par-lement, et de tous les réseaux dedimension nationale susceptiblesde travailler en partenariat avecles Régions. Elle fait connaitre augouvernement la position desconseils régionaux sur les poli-tiques publiques et les textes quiconcernent les compétences et lesactivités des Régions. Elle les repré-sente et promeut aussi leurs actionsauprès des institutions européennes.

Quelle est la place des Régionsà l’heure de la réformede la territorialité ?Alors qu’il n’en a plus les moyensfinanciers, l’État continue à vou-loir être partout, même dans lesdomaines qui nous ont été transfé-rés. Les Régions estiment que ladernière réforme territoriale n’ap-porte rien sur la question essentiellede la clarification des compétencesentre État et Régions. La réforme estaussi dangereuse car son cœurrepose sur l’existence duConseillerterritorial qui va regrouper leConseiller général et régional. Sapréoccupation se tournera vers soncanton, très naturellement. Maisles compétences régionales qui repo-sent sur l’innovation, la rechercheet la formation ne s’inaugurent pascommeun équipement local. Si lespolitiques d’innovation portées parles Régions disparaissent, c’est laFrance dans l’Europe qui va perdresa compétitivité, ses emplois etcontinuer à délocaliser.

Quel est l’enjeu de l’acte IIIde la décentralisationque vous proposez ?La décentralisation est indispensa-ble à la viemoderne et à la citoyen-neté. Nous sommes le seul Étateuropéen qui ne soit ni petit, nifédéral. Aujourd’hui, nous avonsen France une société complexequi a besoin de proximité sur lesdécisions. Depuis 30 ans, la décen-tralisation a réduit les inégalitésterritoriales. Les départements et lesrégions ont joué leur rôle avec lescollèges et les lycées, les TER, laprise en charge des personnesâgées... Partout, le service public

qui leur a été confié a été renforcé,parfois même réanimé dans le casdes trains régionaux. Demain, cetacte III permettra de relever denouveaux défis : l’avenir se jouerasur le développement économiqueà travers notamment la recherche,porteuse de l’emploi de demainqui fait l’attractivité d’une Région.La France a besoin de ses Régions,de ses départements, des ses collec-tivités. Il faut une vraie forme derupture sur la décentralisation, etune volonté politique pour régio-naliser la France à l’heure où l’UMPreste crispée dans un retour inéditau jacobinisme d’une autre époque.

Précisément,quelle est votreambition pour les Régions ?

L’acte III de la décentralisation pro-posedeconstruiredesRégionsencoreplus fortes pour avoir une Franceplus efficace. Elle suppose pour celaune clarification des compétencesentre l’État et les Régions. Celles-ciseraientnotamment en charge d’ungrand service public de l’orienta-tion, de l’emploi et de la formationprofessionnelle. Elles seraient égale-ment dotées d’une compétenceéquivalente à celle qu’elles assu-ment avec les lycées, pour les uni-versités. Nous soutenons par ail-leurs unegestion régionaledes fondseuropéens. Il n’y pas de révolutiondans ce que nous proposons, maisla simple volonté de voir une évo-lution culturelle enfin reconnue : laFrance est régionalisée. L.B.

8 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

Initiatives

Réforme territoriale : elle est jugéedangereuse et inefficace parle président de l’ARFAlain Rousset, président de l’Association des régions de France depuis 2004, conteste l’utilitéde la future réforme territoriale et propose d’imaginer une nouvelle loi de décentralisation.

Legouvernementaouvertlavoieà l’interdictionde

l’explorationetde l’exploitationdesgazdeschisteendécidantl’examend’unepropositionde loià l’Assemblée le 10maiprochain.DeMarseille àMeaux en passant parDonzère, Lons-le-Saunier et Cahors,la levée de boucliers régionaux esten passe d’avoir raison des ambitionsdes compagnies pétrolières enmatière d’exploration des gaz deschiste. Après unemanifestationqui a rassemblé plusieursmilliersd’opposants à Villeneuve-de-Bergen Ardèche, quatre-vingtsparlementaires ont signé unemotioncontre l’exploitation de ces sourcesd’énergie, initiée par les députés de

Lozère et d’Ardèche.Relayée par Christian Jacob, laproposition prévoit l’abrogation despermis d’exploration pour le gaz etl’huile de schiste, et une interdictionde leur exploitation par lafracturation hydraulique, unetechnique, qui, selon les écologistes,risque de contaminer les nappesphréatiques. « Nous sommes là surun sujet où le principe de précautiondoit s‘appliquer », a expliquéChristian Jacob, le président dugroupeUMPà l’Assemblée nationale.« C’est une bonne chose que legouvernement ait décidé l’urgence ».

«Gasland»enProvenceDes permis d’exploration ont été

accordés au printemps 2010 dansle sud de la France, et pour l’huilede schiste en 2008 et 2009 dansle bassin parisien. En Provence,la problématique du gaz de schistea donné lieu à la projection enavant-première du documentaire« Gasland ». Nominé auxOscars2011, le documentaire apporte unéclairage sur les conséquences deson exploitationmassive aux États-Unis. « À travers la projection de cefilm-documentaire, la fabrique dela démocratie entend apporter deséléments concrets d’informationafin que les habitants s’emparentdes problématiques sociales,environnementales et politiques quesoulève le gaz de schiste », souligne

la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur. Quatre sociétés ont déposédes demandes d’exploration dans lesdépartements du Var, des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse et des AlpesdeHaute-Provence. « Près d’un tiersdu territoire régional est concernépar la recherche du gaz de schiste,sans qu’aucune collectivitéterritoriale n’en ait été consultée,nimême informée».Pour Jean-Paul Bachy, présidentde la région Champagne-Ardenne :« Il ne fait pas de doute quel’exploitation de ces gaz de schisteaboutirait à une catastropheenvironnementale et sanitaire ».

L.B.

En région, le schiste sent le soufre

«NOUS AVONS EN FRANCEUNE SOCIÉTÉ COMPLEXE

QUI A BESOIN DE PROXIMITÉSUR LES DÉCISIONS»

Alain Rousset plaide en faveur d’un pouvoir normatifpermettant d’adapter la législation aux spécificitésdes Régions, comme c’est le cas Outre-Mer.PHOTOHUGUES-MARIEDUCLOS.ARF

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François Hollande a bien l’in-tention de ne pas rater lecoche. L’homme a fait sa

mue. Il ne fait plus rire. Cela doitle réjouir. Candidat à la primairesocialiste, il trace sa route, arpentele terrain sans relâche. Une cam-pagne à la Chirac. « La volontéd’aller au plus près », dit-il pudi-quement. Les Français ne s’y trom-pent pas. Leur regard sur l’ancienpremier secrétaire du PS a changé.«Leprocessus engagé reçoit unécho.Je ne le surestime pas, mais je ne lesous-estime pas non plus…. »« Ses amis » eux, le regardent d’unœil plutôt noir. Il a longtempsagacé. Aujourd’hui il inquiète. Leschevaux légers de DSK montentau front avec, dans leur besace,quelques petites phrases aigredouce ou assassines. Le député deCorrèze n’en a cure. Il avance.Envers et contre tout. Avec la satis-faction de savoir que les Françaisqui l’écoutent sont sans cesse plusnombreux. La presse l’a pris sousson aile, c’est tout dire. Le Hol-lande nouveau n’a pas l’intentionde se laisser dicter sa conduite parquiconque. Sa campagne, il l’a

conduite comme il l’entend. Maî-tre du jeu, il donne le tempo ; etjustement, il a décidé d’accélérer lemouvement ; politiquement d’oc-cuper l’espace.La semaine dernière il a tenuson premier meeting à Clichy-

la-Garenne (Hauts-de-Seine). Ona joué à guichets fermés. Le premierd’une longue série…Le lendemain,à Tulle, sur ses terres, Monsieur leMaire accueillait Nicolas Sarkozyvenu parler de la filière bois enCorrèze, venu surtout passer lamain dans le dos des chiraquiens.À Bruxelles, il doit rencontrer Her-mannVanRompoy, le président duConseil européen. Il est attendu àBerlin. Thèmede la visite : le couplefranco-allemand. Tout un symbole.Il ira aussi en Tunisie et en Grèce…On lui fait grief d’être parti trop tôt.Il fait mine de ne pas entendre,trace sa route à l’aune de sa liberté

retrouvée. « Je ne crains personnesauf l’extrême-droite et la droite. »Autrement dit, protégez-moi demes amis, mes ennemis je m’encharge. Merci Oscar Wilde.Bien calé dans le canapé en cuirnoir de son bureau, il ajoute en

détachant les mots : « je ne suispas là pour gêner. Je suis là pourgagner. » Le message est clair. Ilajoute, taquin : » Je ne suis dansaucun pacte. » et pan sur le bec deDominique et de Martine.L’honnêteté des primaires, il veuty croire. « Le nombre de votantsnous donne une garantie…Si jesuis choisi, je n’écarterai personne.J’ai un devoir d’unité. » Il feramon-ter en première ligne une équiperenouvelée. Un mélange de géné-rations, d’origines et de couleurs.« Cela ne peut pas être le retour dugouvernement Jospin. » conclut-il en souriant.

Rien n’est encore joué. Il le sait. Aucontact des Français, il a pris lamesure de l’impopularité du pré-sident Sarkozy. « Il n’est pas réalistede penser qu’il peut renouer lelien… Est-il déjà battu ? Non !La campagne n’est pas engagée… »

En clair, si Sarkozy rempile à l’Ély-sée, il devra son élection aux que-relles d’égos, aux divisions de lagauche.« Je sens beaucoup de décourage-ment, de défiance envers les poli-tiques. Je vois aussi la lucidité desfrançais. Ils sont conscients de cequ’il est possible d’engager… » Iltraduit ce constat par une formule :« Ne pas faire plus de promessesqu’il est possible de réaliser. » Unnew deal, en quelque sorte…L’ancien conseiller de FrançoisMitterrand a une conception trèsgaullienne de ce que doit être uncandidat à l’Elysée. La rencontre

d’un homme avec le peuple. « C’estaussi – précise-t-il – la rencontreavec un moment… Il a l’intimeconviction que ce moment estvenu. À la question, quelle est laprincipale qualité d’un Président dela République, il répond sans hési-ter : « le sang-froid ». Il ajoute queGiscard avait une bonne formule :« il faut savoir gérer l’imprévisible ».Ceux qui en sont capables sontdes hommes d’État, les autres deshommes politiques. Du sang-froid,François Hollande va en avoirbesoin. On n’est jamais trahi quepar les siens.

Jean-FrançoisCoulomb des Arts

Focale

FRANÇOISHOLLANDEDÉPUTÉ-MAIREDETULLEETPRÉSIDENTDUCONSEILGÉNÉRALDECORRÈZE

«En avant calme et droit ». La formule de François Nourissier semble taillée surmesurepour François Hollande. De lui émanent sérénité et détermination. Il a la force tranquillede ceux qui pensent être au rendez-vous du destin. De leur destin.

Et si 2012 était une fable électorale !

3 dates

1981«Lavictoiredelagauche.J’entre dans la vie

politiqueaucabinetdeFrançoisMitterrand.

1988« Je deviens députépour la première fois. »

1997«Me voilà premiersecrétaire du PS.Un

réel honneur etunevraie responsabilité.»

PHOTO JEAN-PIERREMULLER/AFP

10 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

«JE NE SUIS PAS LÀ POURGÊNER,JE SUIS LÀ POURGAGNER»

Page 7: l'Hémicycle - #407

deconstitutionalité.Celapeut-ilsuffire à constituer uneQPC?Est-cequevotre contrôle impliqueounonune interprétationde la loi ?

Jean-Louis Debré : C’est un pointfondamental. Nous sommes saisisaujourd’hui sur tous les sujets. Ledroit des affaires, le droit de l’envi-ronnement, le droit social font par-tie des thématiques à traiter. Nousfaisons de véritables instructions. Lepoint fondamental qui va condi-tionner l’avenir, c’est l’interpréta-tion de la loi et de la jurisprudence.Il y a pour l’instant trois Coursdont les décisions sont quasi défi-nitives. Mais il y a un moment oùnous serons saisis sur l’interpréta-tion des jurisprudences de la Courde cassation et du Conseil d’état.Est-ce que ces jurisprudences sontconformes aux droits et libertés ?Par notre interprétation nousdeviendrons alors de facto la« Cour suprême ». Et ce jour devraitarriver plus vite qu’on ne le pense.Mais pour répondre à votre ques-tion initiale, la liberté d’entrepren-dre fait partie des questions quenous pouvons traiter.

MAÎTRE XAVIER CAZOTTESAVOCATCABINETPARDO-BOULANGER

Quels sont les leviersdont vousdisposezpourque laCourdecassation transmette lesquestionsqui fâchent?

Jean-Louis Debré : Il n’y a aucunlevier. Sur le fond nous prenons ungrand soin à rédiger les attendus.En un an, aucune décision n’a étécontestée. Il faut que nous soyonsen prise directe avec le droit desaffaires.

MAÎTRE DOMINIQUEDE LA GARANDERIECABINETGARANDERIEETASSOCIÉS

Lacréationde la règlededroitprétorienneapris un tel essorquenousnesavonspascommentnous retourner vers leConseilconstitutionnel !Commentallons-nous faire lorsque l’onconstatela résistanceextrêmede laCourdecassation?

Jean-Louis Debré : Nous sommesdans une partie compliquée avecla Cour de cassation !Il fallait que la première année fûtun succès. C’est une période d’at-tente. La Cour de cassation peutnous saisir mais elle ne le fait pas.C’est un problème de culture et laCour de cassation s’est enferméedans une forme de corporatisme.Il faut arriver à desserrer l’étau.

MONSIEUR IOHANN LE FRAPPERDIRECTEURJURIDIQUEETCONFORMITÉALCATEL-LUCENT

Avez-vousdéjà été saisi deproblématiques liéesauxautoritésadministratives indépendantes?

Jean-Louis Debré :On a un vrai pro-blème en France face à ces autori-tés. On est dans ce pays en pleinefolie. En France, on développe troples organismes indépendants.Le parlement devrait être le seul àcontrôler. Évitons de multipliertoutes ces autorités indépendantes.Et sachez qu’au Conseil constitu-tionnel, nous avons de plus enplus dans le collimateur ces auto-rités indépendantes. Mais, sur cer-tains sujets, nous ne sommes passaisis. La QPC est cependant la cléde voûte de notre architectureconstitutionnelle.

MONSIEUR PATRICKDE CAMBOURGPRÉSIDENTDEMAZARS

Sur le contrôlede laconstitutionnalité commentvoyez-vous l’évolutiondeceréférentiel vouspermettantde rendrevosdécisions?

Jean-Louis Debré :Nous essayons dele faire du mieux possible. Nousavons à appliquer des conceptsabstraits. C’est à nous de dire si laliberté d’entreprendre a été respec-tée ou non. Nous avons pris desdécisions sur la cession gratuite deterrains par exemple.À propos du mariage des homo-sexuels et d’autres sujets sociétaux,nous essayons sur ces grands débatsde tenir compte des évolutions. Ledroit doit évoluer. Mais c’est auparlement et au législateur de direcomment et à quel rythme. C’estl’avis du Conseil qui, pour chaquequestion de société, se demande ànouveau qui a la légitimité finalede faire évoluer le droit.

ROBERT NAMIASDIRECTEURDEL’HÉMICYCLE

LaQPCposeplusdequestionsqu’elle n’apportede réponseconcernant le statutduConseilconstitutionnel.Onavu leConseilévoluer. Est-ceque l’onpeut resterdans la situationactuelle?Entre laCourdecassation,leConseil d’état et leConseilconstitutionnel, qui doit avoirlederniermot?

Jean-Louis Debré : Je ne souhaitepas ce débat. Nous allons nousimposer tranquillement. Ouvrirun débat au Parlement n’est pasnécessaire. Qu’on nous laisse faire.S’il n’y avait pas eu de QPC je neserais pas resté au Conseil consti-tutionnel. Le Conseil constitution-nel n’est plus une maison deretraite, l’institution doit avoir uneplace centrale dans le pays pourprotéger la liberté de chacun dansle respet de la constitution.

Compte-rendupar Joël Genard

avec

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MonsieurMarcdeLapérouse(6)Directeur juridique, HSBCMonsieurPhilippeLuttmann(7)Directeur juridique et fiscal,AG2R LaMondialeMaîtreRémiSermier(8)Avocat, Cabinet Brandford-Griffith&AssociésMaîtreEdouarddeLamaze(9)Avocat, Cabinet Carbonnier, Lamaze,Rasle et AssociésRobertNamias(10)Directeur de l’Hémicycle

PETITDÉJEUNERMAZARS-L’HÉMICYCLEMERCREDI27AVRIL2011

Invité d’honneurJean-LouisDebré,Président du Conseil Constitutionnel

MaîtreDominiquede laGaranderie(1)Cabinet Garanderie &AssociésMonsieur IohannLeFrapper(2)Directeur juridique et conformité,Alcatel-LucentMadameJoëlleSimon(3)Directrice des Affaires juridiques,MedefMaîtrePierre-CharlesRanouil(4)Avocat,CabinetAugust&DebouzyMonsieurPatrickdeCambourg(5)Président deMazars

MonsieurFabriceDemarigny(11)Associé, Directeur des activitésmarchés de capitaux,MazarsMaîtreXavierCazottes(12)Avocat,CabinetPardo-BoulangerMonsieurYannickChalmé(13)Directeur Juridique, L’OréalMonsieurAlainGauvin(14)Directeur juridique, Carrefour

Jean-Louis Debré rappelleavec gourmandise les réservesémises avant le vote sur la

Question prioritaire de constitu-tionnalité. « Certains nous pro-mettaient l’insécurité juridique.D’autres redoutaient de confier undroit nouveau aux justiciables.D’autres encore justifiaient l’im-mobilisme par le contrôle deconventionnalité. » Face à ces réti-cences, cette réforme, engagée parle Président de la République a étévoulue sur tous les bancs du Par-lement. Pour le président duConseil constitutionnel, les chiffresparlent d’eux-mêmes. À la datedu 15 avril 2011, plus de 2300QPCont été posées devant les jugesde première instance et d’appel.Le Conseil d’état et la Cour de cas-sation ont rendu 605 décisions enmatière de QPC. Ils ont décidé durenvoi devant le Conseil Constitu-tionnel de 141 de ces QPC. « Nousvoulions ainsi un contentieuxsélectionné » a indiqué Jean-LouisDebré.

La QPC adoptée partoutet par tousCette QPC a en effet été compriseet tous les juges judiciaires et admi-nistratifs ont su s’approprier cetteréforme qui renforce la protectiondes droits et des libertés. C’est d’ail-leurs le même modèle qui existechez nos voisins européens. Lesecond constat est que les QPCont été traitées selon la procédurerapide voulue par le Parlement.« Ce dispositif a très bien fonc-tionné, conduisant ainsi le Conseild’État à saisir le Conseil constitu-tionnel des deux premières QPC le14 avril 2010, soit six semainesseulement après l’entrée en vigueurdu dispositif. Le Conseil d’état etla Cour de cassation ont toujoursstatué en moins de trois mois. Enun an nous avons jugé 120 des141 questions qui nous ont été

renvoyées. Les 21 affaires en ins-tance sont en cours d’instructionet seront jugées dans le délaimoyen de deux mois qui est lenôtre sur l’année écoulée. »

La QPC a permis des progrèsdans la protection des droitset des libertésLa difficulté essentielle résidaitdans le fait que le législateur (dépu-

tés et sénateurs) risquait de se sen-tir pris en étau entre, d’un côté leConseil d’état, la Cour de cassationet de l’autre le Conseil constitution-nel, a noté Jean-Louis Debré. « Ilfallait éviter de donner l’impressionqu’un gouvernement des jugesétait progressivementmis en place.C’est ce que nous avons fait ensoulignant que nous n’avions pasle pouvoir de faire la loi à la place

des parlementaires. Et pourtantnotre rôle est d’exercer un contrôlede constitutionnalité. Cette QPC aainsi permis de réaliser des pro-grès considérables dans la protec-tion des droits et libertés descitoyens sans mettre en cause lasécurité juridique. Ainsi, le Conseilconstitutionnel a rendu d’impor-tantes décisions abrogeant des dis-positions législatives contraires auxdroits et libertés constitutionnel-lement garantis. De cette façon laQPC renforce le Parlement. Ce futle cas pour la décristallisation despensions où nous avons réussi àfaire tomber la citadelle duMinis-tère des finances. Même situationpour l’hospitalisation sans consen-tement ou encore la garde à vue.Dans ces exemples, nous n’avonspas réécrit la loi. Nous avons ditque c’était au législateur dans undélai imparti demodifier cette loi.C’est ce qui a été fait ou est enpasse de se faire. Nous n’avons pasremis en cause l’ordre juridique.Mais nous avons été à l’origine deces progrès dans la défense desdroits et des libertés. »D’autres décisions d’abrogationont concerné des champs aussi dif-férents que les noms de domainesur Internet, la taxe sur l’électricité,l’octroi d’allocations aux harkis oula loi de validation du contrat deconcession du Grand stade a pré-

cisé Jean-Louis Debré. Toutefois laQPC n’a pas produit l’insécuritéjuridique tant redoutée. Le Conseilconstitutionnel a rendu 58 %de décisions de conformité à laConstitution, 33%de non-confor-mité partielle ou de conformitéavec réserve et 9 % de non-lieux.Seules 24 décisions de non-confor-mité totale ont été rendues.

Jusqu’où irons nous ?Jean-LouisDebré s’est dit convaincuque dans un délai assez rapide,la saisine directe serait souhaitée.« À l’évidence ce droit nouveausera un droit revendiqué pour tous.Mais ce n’est pas mon objectif etje ne souhaite pas une saisinedirecte. Une cour suprême n’estpas une cour qui rend des milliersde décisions. C’est une cour quidoit rendre des décisions sur lesgrands problèmes de société et quifait avancer les débats. C’est pour-quoi j’ai toujours été favorableà ce filtre du Conseil d’état et dela Cour de cassation.

Les questions soulevées par :

MADAME JOËLLE SIMONDIRECTRICEDESAFFAIRESJURIDIQUESMEDEF

La libertéd’entreprendreaétéreléguéeàunsimpleobjectif

12 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

Débat

Conseil constitutionnel :une«Cour suprême»qui nedit pas sonnom

«LA QPC EST LA CLÉDE VOÛTE DE NOTRE

ARCHITECTURECONSTITUTIONNELLE »Jean-Louis Debré27 avril 2011

PHOTOBORISHORVAT/AFP

Pour Jean-Louis Debré, Président du Conseil constitutionnel, la QPC (Question prioritairede constitutionnalité) renforce les pouvoirs de son institution en améliorant la protectiondes droits et des libertés des citoyens. C’est ce qu’il a notamment affirmé à l’occasiond’un petit-déjeuner-débat organisé conjointement par et .

Page 8: l'Hémicycle - #407

Depuis plus d’un siècle, la poli-tique forestière françaises’appuie sur une répartition

équilibrée de diverses fonctions :production, protection et ouvertureau public. Cet équilibre ne tient queparce qu’il est financé par la ventede bois, la fonction de productionassumant la quasi totalité des coûtsde la multifonctionnalité, ce quin’est pas le cas partout en Europe.Mais, depuis une quinzaine d’an-nées, la vocation économique de laforêt française peine à s’exprimer, àcause notamment du poids descontraintes liées à l’environnementet à l’accueil du public. «Notre forêt

ne se donne plus les moyens d’êtreune véritable forêt de production,moderne et responsable » observeLaurentDenormandie, président dela Fédération nationale du bois.

Réagiraujourd’huipourpréparer l’avenirLe feuillu restera le socle de la forêtfrançaise, mais il convient de resterréaliste. Les nouveaux marchéssont tournés vers le résineux, et lesusages de feuillus et de résineux nesont pas interchangeables. Bienqu’elle dispose de l’une des plusgrandes forêts européennes (15,5millions d’ha), la France importedéjà plus de 3 millions de m3 desciages de résineux. Ce déficit pour-rait s’accroître dans les années à

venir, notamment à l’horizon 2030où la ressource résineuse localemanquera à l’industrie. Il devientdonc urgent de réagir aujourd’huipour préparer l’avenir. « Si laFrance veut avoir un matériau re-nouvelable et industrialisable, sielle veut relever son déficit, il luifaut une forêt de production mo-derne et responsable. Si l’économieforestière ne change pas de cap, lafilière forêt-bois ne pourra pas sedévelopper ». La reconquête dumarché des feuillus actuellementdéveloppée doit donc être complé-mentaire à une actionmenée en fa-veur des résineux.

Unmanquede résineuxàpartir de2030Actuellement, les résineux exploi-tés en France sont issus des planta-tions générées par le Fonds forestiernational. Avant sa suppression en2000, cette structure, créée en 1946pour permettre une gestion plusdynamique des forêts françaises etaider la filière bois à se développer,a ainsi permis la plantation dedeux millions d’ha, essentielle-ment en résineux. Seulement, lorsdes quinze dernières années, laconsommation de plants forestiersest passée de 110millions à 28mil-lions par an (hors pin maritime).« En arrêtant de planter, on a inter-rompu une dynamique de déve-loppement de forêt de production

contrairement à nos voisins euro-péens. » regrettent les profession-nels de la filière. Sachant quequarante à cinquante ans (selon lesessences) sont nécessaires pourqu’un résineux arrive à maturité,l’industrie du bois manquera deressources d’ici 2030, un déficitqu’il est encore possible de corrigerpour les années 2050, grâce à unereprise très rapide des plantations.Selon les Pépiniéristes forestiersfrançais, il faudrait revenir, au mi-nimum, au niveau de plantationdes années 90, soit environ 140millions de plants annuels.

Le résineux,unboisdemandépar lemarchéUne politique forestière doit êtrevisionnaire afin de s’adapter aumieux aux besoins de la société, etcela malgré le décalage inévitableentre l’acte de production et la de-mande industrielle. Si le feuillureste nécessaire à certains marchés(meubles, parquet…), il ne consti-tue plus le cœur de la demande del’industrie du bois. Le résineux serévèle ainsi comme l’essence in-contournable pour permettre aumatériau bois de se positionner surle marché de la construction, en ré-pondant à des normes techniquesstrictes tout en restant économi-quement accessible. Bien entendu,il ne s’agit pas de supprimer lesfeuillus de France mais de ‘‘glisser’’vers la plantation de résineux làoù la forêt dispose déjà de ces peu-plements et dans les massifs defeuillus de mauvaise qualité quitrouvent des débouchés peu rému-nérateurs, ainsi que dans les peu-plements inadaptés aux conditionsclimatiques.

Soutenir l’investissementforestierSi le taux de nouveaux boisementset de reboisements en France estfaible, c’est aussi parce que cer-tains propriétaires forestiers sesont écartés de la notion de pro-duction. Rappelons que la forêtfrançaise est très morcelée (3,2 haen moyenne) et que 74 % de sasurface sont entre les mains depropriétaires privés, parfois échau-dés par des contraintes environne-mentales mal comprises mais aussi

par les dégâts dus à un gibier de-venu surabondant et à des tem-pêtes successives. Le propriétaireforestier n’investira dans sa forêtque s’il en tire un revenu convena-ble. Dans bien des cas, le recours àla plantation permet de s’appuyersur des variétés améliorées et do-tées d’une base génétique beau-coup plus importante que celle despeuplements en place, mieuxadaptées aux évolutions clima-tiques, et d’opter immédiatementpour les essences réclamées par lemarché.

S’engageren faveurd’une forêtdeproductionPour développer une filière forêt-bois digne de ses ambitions, laFrance doit ainsi s’engager enfaveur d’une forêt de production.« Ce n’est pas à l’industrie des’adapter à la forêt, sauf si la Francedécide d’avoir une forêt unique-ment dédiée à l’écologie et optepour l’importation plutôt que laproduction nationale. Le finance-ment d’une telle politique resteraità imaginer. Dans ce cas-là, l’indus-trie verra comment elle peut utili-

ser les bois qui seront autorisés àsortir de la forêt. Mais il ne faudrapas se plaindre d’avoir une filièredéficitaire, une surproduction deproduits invendables, ou de man-quer de la bonne essence au bonmoment. »

Enclencher ladynamiquePour répondre à ces enjeux, les pro-fessionnels de la filière forêt-boisproposent donc la mise en placed’un groupe de travail interprofes-sionnel et interministériel dont lamission serait de réfléchir auxmoyens de moderniser notre res-source forestière et de profession-naliser notre sylviculture. Celapasse évidemment par une sensibi-lisation des propriétaires forestiersmais aussi par un exemple donnépar la forêt publique. Une dyna-mique doit s’enclencher et fairebouger les lignes sans tabou (fisca-lité, financement de la multifonc-tionnalité, changement climatique,aménagement du territoire, prix ducrédit carbone de la forêt, assu-rance tempête, gestion des dégâtsde gibier...).

Joël Genard

14 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

Expertise

L’industrie forestière : une filièrequi doit faire feu de tout bois

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Pour rester compétitive, la filière bois doit renforcer ses investissements et s’engageren faveur d’une« forêt deproduction».En visite enCorrèze,NicolasSarkozyapromisauxprofessionnels dubois unaménagementde la fiscalité. Le chef de l’État aqualifiécette filière forestière de« secteur stratégique»pour l’économie française.

Nicolas Sarkozy en Corrèze jeudi 28 avril. PHOTOPHILIPPEWOJAZER /AFP

Page 9: l'Hémicycle - #407

Ingénieur de formation, Jean-Louis Bal a longtemps dirigé lesecteur des Énergies renouve-

lables de l’Ademe. Depuis le débutde l’année, il préside le principal

syndicat des professionnels du sec-teur, le SER (Syndicat des énergiesrenouvelables). À ses yeux le pho-tovoltaïque est promis à un avenirradieux. Dans moins de dix ans,

« le prix du soleil » sera équivalentà celui des autres modes de produc-tion d’électricité.

L’accident de la centrale nucléairede Fukushima favorise-t-il vraimentle photovoltaïque ?Oui, mais ce n’est qu’un élémentparmi d’autres. La hausse durabledu prix du pétrole est une donnéetrès importante. Et n’oublions passurtout que les conséquences duréchauffement climatique, dû auxénergies fossiles, se font sentirbeaucoup plus vite que prévu.

On reproche au photovoltaïque descoûts de production beaucoup tropélevés. Ces coûts peuvent-ilsbaisser ?

Bien sûr ! C’est en cours et cela vas’accélérer. Aujourd’hui, c’est qua-tre fois plus cher mais grâce auxavancées technologiques, ondevrait parvenir à l’équilibre avantla fin de la décennie. À partir de cemoment, personne ne peut pré-dire les limites du marché. Ellessemblent infinies…

Comment jugez-vous l’attitude dugouvernement ? Il mène actuellement un combatd’arrière-garde. Il ne pourra pasbrider le marché mais juste briderle développement d’une filièreindustrielle en France. Le pilotagede l’état est désastreux. Au départ,les tarifs de rachat ont été trop éle-vés ; ensuite, la baisse a été troprapide et enfin le moratoire a ététrop brutal. Ajoutons à cela une« concertation » qui était du théâ-tre, avec beaucoup trop de partici-pants. Résultat nul à l’issue d’undébat inaudible !

Les conséquences sont-ellesvraiment importantes ? Elles sont énormes. L’activité pourles petites installations chez lesparticuliers est en baisse de 60 % !Si le gouvernement maintient sonidée de plafonner les nouvelles ins-tallations à 500 mégawats par an,la moitié des 25 000 emplois dusecteur va disparaître. Enfin, enraison des incertitudes et dumanque de cohérence de l’état, lafilière industrielle, notamment surla fabrication de panneaux, est trèssérieusement compromise.

Que demandez-vous ? Très simplement, reconstruire dura-blement la filière. La France a tous

les moyens scientifiques pour s’im-poser mais la recherche ne sert àrien s’il n’y a pas des industriesderrière !

Propos recueillispar Jean-Louis Caffier

NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 17

En novembre dernier, des députéseuropéens ont demandé à laCommission de mettre fin auxpratiques de spéculation sur le prixdes céréales, la situation a-t-elleévolué depuis ?J’avais préparé un rapport sur laplus-value de la répartition dans lachaîne alimentaire pour les agricul-teurs. Il y avait trois points essen-tiels : l’interdiction de vente en-dessous des coûts de production, latransparence vis-à-vis de la trans-formation et de la grande distribu-tion et le problème de la volatilitédes prix des matières premières.En 1995, la plus-value moyenneen Europe pour les agriculteursétait de 31 % ; elle n’est plus quede 21 % avec seulement 15 % pourla filière porcine du Grand ouestfrançais. Le problème est que lesÉtats membres ne coopèrent pas.On n’a pas été capable de prendredes mesures au niveau des bourseseuropéennes comme cela a été faitaux États-Unis où une loi a permisde bloquer la spéculation sur lemarché des céréales par des acteurséconomiques extérieurs.

Le ministre de l’Agriculture,Bruno Le Maire, va dans votre sens.Il a annoncé que la présidencefrançaise du G20 présenterait enjuin prochain un plan de lutte contrela volatilité des prix. Que pensez-vous de cette initiative ?Je suis prêt à tout entendre. Ce qu’ildit ne me pose pas de problème.Mais il faut de l’efficacité et en pre-mier lieu au niveau européen. Or,nous sommes impuissants sur lesterritoires parce que les outils ontété démantelés par la Commissaireprécédente. On observe par exem-ple que les céréaliers bénéficient desprix élevés et récupèrent aussi lamajorité des aides directes…

Les éleveurs sont aussi en danger ?Oui, c’est dramatique. En l’absencede stock public ou de marchés quipermettent un prix stabilisé descéréales, ces éleveurs n’ont pas degarantie de pouvoir vendre au-dessus du coût de production. Il ya un risque d’assister à une élimi-nation très rapide de l’élevage.

Et pourtant, les grandes surfacesconfortent leurs marges et les prixà la consommation ne cessentd’augmenter ?Oui, ces grandes surfaces ne jouentpas le jeu. Il n’y a aucune transpa-rence sur les questions des marges.

La grande transformation et lagrande distribution profitent d’unsystème totalement opaque.

Y a-t-il un moyen au niveau nationalou européen de les forcer à cettetransparence ?Il faut que cela soit légiféré. C’estl’objet de mon rapport. Il faut sedonner les moyens pour que lesentreprises mettent les chiffressur la table. Mais les opérateurséconomiques ne veulent pas entrerdans cette logique.

Début avril à l’Assemblée nationale,une proposition de loi a été déposéeafin d’exonérer de charges socialesles salariés agricoles pour rétablirune égalité avec nos partenaireseuropéens. Qu’en pensez-vous ?J’ai le sentiment qu’on court en

permanence après des ajustementspour compenser le fait qu’à l’in-térieur de l’Europe, il n’y a pasd’harmonisation. Personne ne serend compte que l’intérêt de lapolitique agricole est qu’il n’y aitpas de distorsion de concurrence.Nous l’avons vu clairement avec lesecteur des fruits et légumes quiconnait de fortes disparités. Aumoment de l’entrée de l’Espagne etdu Portugal, ce secteur ne devaitpas s’harmoniser. D’où les conflitsà répétition, et les dégâts provo-qués, notamment dans le sud de laFrance. Il faut donc harmoniserpour ne pas jouer en permanencesur des ajustements de ce type.C’est complexe…

L’agriculture françaisen’a pas su s’adapter ? Je pense qu’entre le Traité de Romeet les politiques agricoles menéesdepuis, il y a une vraie rupture. Enparticulier, depuis la premièreréforme de la PAC en 1992. Celle-ci s’est organisée par rapport auxrègles de l’OMC. Or, il n’est paspossible de fixer nos politiquesagricoles en fonction du marchéinternational. Voilà pourquoi nousréaffirmons que la politique agri-cole européenne est avant tout des-tinée à nourrir les 500 millionsd’Européens, pour maintenir l’agri-culture sur les territoires avec sadiversité et pour aller vers une agri-culture qui préserve l’environ-nement et qui se prolonge à traversles générations. Il faut rompre avecl’illusion du marché mondial.

Propos recueillispar Antoine Colonna

16 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

Expertise

L’élevage européen… en friche !José Bové tire la sonnette d’alarme. Le député européen dénonce une politiquedes grandes surfaces qui menace l’élevage. Selon le leader syndical, l’Europea tourné le dos au Traité de Rome.

Le photovoltaïque a-t-il un avenir ?Un fonds photovoltaïque de 400 millions d’euros, destiné à encourager laproduction à grande échelle de cette énergie, a été lancé en Languedoc-Roussillon.Pour autant, le photovoltaïque peine à se développer en France.

Alors que les prix du blé,du maïs ou du sucre varient

du simple au double en l’espaced’un an, la Banque mondiale, la FAO,le FMI, l’OCDE et l’OMC se sontpenchés au chevet de l’agricultureet sur le problème posé par la flambéedes matières premières agricoles.Un rapport d’une quarantaine depages propose neuf pistes pourtrouver des solutions. La premièrerecommandation porte sur lanécessité d’obtenir des informations« plus précises sur l’état de laproduction, de la consommation

et des stocks des produits agricoles ».Une première étape évidente maistrès difficile à franchir, certains pays, —l’Inde et la Chine — ne communiquantpas ces données. La deuxième idéedu rapport est de s’en prendre à laspéculation financière. Là aussi,la partie est loin d’être gagnée. Lerapport note qu’ « un désaccord sur lerôle de la spéculation financière dansla volatilité et l’augmentation des prixdes matières premières agricoles »existe, notamment entre Bruxelleset Paris, et plus profondément entreles pays du nord de l’Union

(Royaume-Uni et Allemagne) etceux du sud. Troisième préconisationcensée alimenter les réflexions lors dela prochaine réunion des ministres del’Agriculture du G20, fin juin à Paris :l’application plus rigoureuse desaccords de l’OMC. L’objectif estd’interdire les moratoires sur lesexportations, comme celui observépar la Russie cette année. Le tiersde la production de blé russe avaitété détruit en août 2010 parune sécheresse exceptionnelle,provoquant cette mesure.

A.C.

«IL N’Y A AUCUNE TRANSPARENCESUR LA QUESTION DES MARGES.

LA GRANDE DISTRIBUTION PROFITED’UN SYSTÈME COMPLÈTEMENT OPAQUE »

Flambée du prix des matières premièresagricoles, les difficiles solutions

La polémique sur les tarifs de rachat de l’électricité photovoltaïque aété allumée au moment où Jean-Louis Borloo, alors super ministre de

l’écologie, espérait obtenir Matignon. François Fillon s’est clairement saisi dece dossier pour discréditer son rival avec l’aide appuyée de Bercy.Les arguments du toujours premier ministre portaient sur le coût jugé tropélevé du photovoltaïque. Il s’agissait de faire comprendre que Jean-LouisBorloo était incapable de s’occuper sérieusement des finances de l’État.En plus, il est évident que François Fillon n’a jamais considéré que la filière« environnement » était prioritaire, ni économiquement, ni politiquement.

J.L.C.

La guerre Fillon-Borloo

Contrairement aux idéesreçues, les renouvelables en

France ne sont pas majoritairementliés à l’éolien ou au solaire.L’hydraulique est largementdevant avec 10 % de la productionélectrique et c’est la biomasse(bois, déchets végétaux etagricoles) qui va le plus progresserdans les années qui viennent. L’éolien ne représente que de 1à 2 % de la production électriqueet le solaire photovoltaïque, 0,2 %.Le soleil ne nous fournit donc que0,04% de l’énergie totale que nousconsommons. Mais après tout,le pétrole ou le nucléaire sontégalement passés par la case zéro ! Les rayons du soleil représententau quotidien 10.000 fois laconsommation totale d’énergiesur Terre. Il suffirait de couvrir depanneaux photovoltaïques 1 % duterritoire américain pour satisfairel’ensemble des besoinsénergétiques des Américains. Autre signe fort de la probable prisedu pouvoir par le soleil : toute lastratégie diversification du groupeTotal est centrée sur lephotovoltaïque !

J.L.C.

On partde… 0,04 !

José Bové

PHOTO ERIC CABANIS / AFP

Expertise

«LA FILIÈRE INDUSTRIELLE,NOTAMMENT SUR LA

FABRICATION DE PANNEAUX,EST TRÈS SÉRIEUSEMENTCOMPROMISE » Jean-Louis BalPHOTO JEAN CHISCANO

Page 10: l'Hémicycle - #407

SERVICE

MONDECROISSANCE

FINANCEVISIONDEBATS

ENGAGEMENT

PUBLIC

EXPERTISEMazars est un groupe international d’audit et de conseil qui rassemble les compétences de 13 000 professionnels présents dans 61 pays.

Grâce à ses équipes pluridisciplinaires, Mazars accompagne les grandes sociétés internationales et les PME

dans/à toutes les étapes de leur développement : création, gestion, développement, cotation, transmission,

expansion internationale, fusions…

laquelle elle évolue et a toujours eu la volonté de s’impliquer dans le débat d’idées.

C’est dans cet esprit qu’en 2004 Mazars a créé avec L’Hémicycle des rendez-vous privilégiés, réunissant personnalités politiques et dirigeants d’entreprises

juridiques ou encore l’attractivité du territoire.

vous donner rendez-vous dans ces pages pour de prochaines rencontres autour d’invités passionnants.

Il a fait la une de l’actualité poli-tique il y a un mois après queses camarades de la CGT ont

découvert qu’il était candidat duFront national. Exclu aujourd’huide la CGT, il est un bon exemplede ces centaines demilliers d’élec-teurs d’origine ouvrière qui ontfranchi le pas en passant de lagauche au parti de Marine Le Pen.Explication : il se reconnait dansla plupart des thèmes avancés parla leader du Front national. Surl’Europe, sur la crise, sur l’écono-mie. « La maternité qui m’a vu naî-tre est aujourd’hui un hôpital géria-trique ». Un indice dumarasme quirègne en Moselle et à Algrange oùFabien Engelmann est né il y a 31ans. Fils unique, c’est peut-êtrede sa mère, infirmière, que Fabientient ses premiers engagements.« Je n’ai jamais supporté la souf-france, ni celle des hommes, ni celledes animaux ». Dès huit ans, il bri-cole et fait les courses pour lesvieux du quartier. C’est au mêmeâge qu’un reportage à la télévisionlui fait découvrir le sort des ani-maux d’abattoir. Après ce choc, il“milite” pour la Fondation Brigitte

Bardot et la SPA. Il fait signer despétitions. Dans la cour de récréa-tion, le petit Fabien fourbit sonargumentaire. L’homo politicus estné. À 18 ans, le Mosellan déma-zoute les oiseaux après la catas-trophe de l’Erika. Il dévore la pressepolitique, les oreilles collées à RTL.C’est l’occasion d’un premierchoix. Il n’avale pas le «Ce n’est pas

la fin du monde » de la ministre del’Écologie, Dominique Voynet.Fabien, qui se voyait adhérer auxVerts, fait marche arrière « tropsuperficiels pour moi » tranche-t-ilde sa voix posée. Et la caravanepasse… Celle de Lutte ouvrière.À l’époque, un bac-pro en poche,Fabien entre dans la fonctionpublique où il devient ouvrierterritorial. Un collègue lui recom-mande d’aller voir L.O. « Je trouvaisqu’Arlette Laguiller était sincère ».Un premier contact est pris avec

L.O. « Je me sentais bien chez eux,j’y ai appris plein de choses ». En2004, Fabien Engelmann se pré-sente aux cantonales sous l’éti-quette trotskiste. Un an plus tardil rejoint la CGT. « Je pouvais yemmener mes tracts L.O. sans pro-blème… ». En 2008, nouvelles can-tonales, il décroche le meilleurscore de la Ligue avec 6,5 %. Des

amitiés naissent, mais aujourd’hui« rien n’en reste, ils ne veulent plusme parler. Le passage au Front n’a rienarrangé, mais ce froid a commencé dèsque je suis passé au NPA ». Fabiencritique la stratégie de L.O., inca-pable de participer à l’union de« la gauche de la gauche ». « Jecroyais alors que Besancenot étaitplus ouvert, mais j’ai vite déchanté ».Deuxième de liste aux régionales,il découvre la candidature d’unefemme voilée dans le Vaucluse.«De la pure démagogie… » déplore-

t-il. Un calcul électoral qui ne passepas pour Fabien, « militant laïc etféministe ». C’est à cemoment quele ton monte. Proche de la fonda-tion Bardot, opposé depuis tou-jours à l’abattage rituel, il se fait vitetraiter de raciste. Le divorce estconsommé et le thème de la laïcitétravaille le militant. Il découvreRiposte laïque de Pierre Cassen,

lui aussi un ancien militant d’ex-trême-gauche. « Je commence à écriredes articles pour lui, dont un de sou-tien à Siné ». Ces nouvelles ren-contres mènent Engelmann àrevoir ses classiques. Il revisite l’his-toire du FN. « Avec Marine, ce n’estpas pareil, on est un parti vraimentpopulaire et social ». Il vient assis-ter à un discours de la future pré-sidente du parti, il écoute les mili-tants à la sortie du meeting poursavoir « s’il y a des relents de racismeou d’homophobie », il découvre des

« personnes ouvertes, mais pas la bêteimmonde ». Fabien se réjouit del’exclusion récente du FN d’unnazillon « qui n’a rien à voir avec ceque nous défendons. Arrêtez de croiretout ce qui est dit, allez voir par vous-même. Pour moi Gollnisch, c’estmoyen-moyen ». C’est après ce rap-prochement que le scandale éclate.Un cégétiste candidat Front natio-nal, c’est du jamais vu. À Paris, onorganise un vote de sa section. Lamajorité le maintient à sa tête. LaFédération de Paris le convoquefin mars. Sur place, plusieurs cen-taines de militants de la Centralelui réservent un accueil plus quehouleux. « J’aurais aimé une dis-cussion avec eux ; en dix minutesc’était plié » affirme-t-il. Aujourd’hui,Fabien Engelmann est défendu parMe Collard au nom de la libertéd’expression. De Laguiller à Le Pen,Engelman « s’enthousiasme pour lesdiscours sincères et les prises de posi-tions courageuses ». C’est commecela qu’il se définit d’ailleurs lui-même. En attendant d’autres com-bats politiques.

Antoine Colonna

Témoignage

FABIENENGELMANN

Un sondage Ifop publié par Europe 1 et le JDD révélait la semaine dernière que le voteouvrier allaitmajoritairement au Front national. 36%des intentions de vote pourMarine Le Pen contre 17%pour Dominique Strauss-Kahn et 15%àNicolas Sarkozy.Fabien Engelmann fait partie de ces itinérants de la politique.

De l’extrême-gauche à la droite extrême

PHOTO JACQUESDEMARTHON/AFP

18 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

«AVECMARINE, CE N’EST PAS PAREIL, ON ESTUN PARTI VRAIMENT POPULAIRE ET SOCIAL»

Page 11: l'Hémicycle - #407

Plus de 138 millions de personnestravaillent hors de leur pays de naissance.Bienvenuedans un monde d’opportunités.

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Ce livre est atypiquepourdesjeunesdevotregénération.Leproposest très critique?Bertrand Vincent : Ce livre répondtout d’abord à l’exaspération de lamajorité silencieuse face à deuxphénomènes majeurs de la sociétéfrançaise : le refus de la classe poli-tico-médiatique de voir les échecsde notre société depuis 1968. Etsurtout le règne du politiquementcorrect . Nous avons souhaité écrireun livre sans concession qui tou-

chera davantage ceux qui n’ontpas peur de regarder la vérité enface et d’aller à l’encontre des opi-nions dominantes.

Vousdénoncezune républiquesentimentale, c’est-à-dire?BV : Les Français attendentaujourd’hui des politiques qu’ilsèchent les larmes de chacun etqu’ils répondent aux particula-rismes de tous. Désormais ce n’estplus chacun pour soi, mais « tout

pour moi ». Cet égoïsme rejaillitaussi sur les hommes politiquesplus affairés à leur réélection qu’àla préoccupation du bien public.Bien sûr, il y a des exceptions.

Vousprétendez toutau longde l’ouvragequemai68adéresponsabilisé lesFrançais?BV : Il est clair que l’idéologie desannées 68 a conduit à la dérespon-sabilisation. Les Français ont perdule goût du travail. Ils ne se ren-

dent pas compte que le mondea changé. Or aujourd’hui lescontraintes sont légion : la mon-dialisation, le développement dura-ble, etc.La génération de nos parents s’estautorisée des rêves dont elle n’avaitpas les moyens. L’épanouissementpersonnel passait par une forme dedéresponsabilisation.

Ce livre semble trèspessimiste !BV : Au contraire il faut faireconfiance aux Français. C’est unétat d’esprit à faire évoluer. Il esttemps d’agir. L’ouvrage s’inscritdans cette démarche dynamique.Il est un appel à relever la tête, àlancer la rénovation de la sociétéfrançaise. Les erreurs du passé sontdues à des erreurs de diagnosticqui ont conduit à de mauvaisesthérapies. N’étant pas aveuglés pardes œillères, nous avons vouludresser un constat objectif sansrenier nos valeurs et notre identité.Nous livrons ainsi, sans tomberdans la sinistrose, notre diagnos-tic sur des thématiques telles quel’inadaptation du système d’ensei-gnement au monde actuel ou lesdifficultés inhérentes à l’entréedans la vie active.

Vous insistezbeaucoupsur lapertedesensdansnotre société…BV : C’est un mouvement généra-lisé. Toutes les grandes institutionscomme l’État, les partis politiques,l’Église, ont été touchées par unmouvement généralisé de désacra-lisation et ont perdu leur statut dephare de la société. Les grandesidéologies sont elles aussi touchées.Certaines ont disparu (ou presque)comme le communisme. Aux cer-titudes assénées par les modèlesd’hier a succédé un univers plusflou et les repères qui jalonnaientla vie en société ont été remis encause. La conséquence est simple.Lorsqu’on a perdu la notion desens, on se rabat sur l’individua-lisme matérialiste.

Votre regard sur lespolitiquesest aussi très critique…BV : Dès que l’un des deux grandsbords politiques français proposeune réforme, l’autre la critique, lasabote ou l’obstrue par principe. En

s’opposant quasiment systémati-quement à toute proposition de lamajorité ou du gouvernement,l’opposition estime jouer pleine-ment son rôle. La majorité desFrançais sont las de ce spectaclesans cesse refait où tout sonne faux.Ils ne sont plus dupes de cettehypocrisie. À la place des valeursattendues des politiques telles l’au-thenticité, la droiture, l’abnéga-tion, la justesse, on découvre despolitiques à l’égo démesuré quicherchent à défendre leur « lopinde terre ». Nous pensons que si lapolitique est aujourd’hui discrédi-tée chez nos concitoyens, c’estparce qu’elle a perdu de sa gran-deur ! Rares sont les politiques quiont le courage de prendre desmesures impopulaires quoiquenécessaires. Mais nous n’avons pascherché à faire un livre antipoliti-card ou de mettre tout le mondedans le même panier. Il y a fortheureusement en France un grandnombre d’hommes et de femmespolitiques de grande qualité. L’en-jeu est de souligner ce qui estattendu de la politique dans unsystème démocratique, avant demettre le doigt sur certains abus,d’ailleurs bien souvent plus poli-ticiens que politiques.

Propos recueillispar Joël Genard

L’ouvrage est paru aux éditions Persée.

Il est préfacé par IsabelleDebré,

sénateur des Hauts-de-Seine avec

un avant-propos deClaudeGoasguen

ancien ministre, député-maire

du 16e arrondissement de Paris.

20 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

Culture

Rencontre avec Pol et RonanDatausse et Bertrand et VincentMathieu.Ces quatre jeunes sont les auteurs d’un livre sans concession sur la France.Décomplexés et anti soixante-huitards, ils balancent sec.

Un livre :«LaFrance?!Regardscroisésdequatre jeunessur leurpays»

MIGUE

LRO

SALES

Page 12: l'Hémicycle - #407

NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011 L’HÉMICYCLE 23

Sur son blog, la fondationPolémia met en cause lavéracité des chiffres officiels.

Polémia« L’immigration nette ne dépassepas 100 000 personnes par an :FAUX. Selon les statistiques duministère de l’Intérieur, plus de200 000 titres de séjour ont étédélivrés en 2010. Dans le mêmetemps, 50 000 personnes ontsollicité un titre de « réfugiépolitique », soit 250 000personnes, non compris les entréesclandestines. Il faut savoir que lestrois-quarts des entrées ont vocationà être permanentes puisqu’il s’agitdu regroupement familial, dedélivrance de titres de réfugié oude travail qui ouvrent eux-mêmesdroit au regroupement familial,des étudiants qui entrent au rythmede 50 000 par an dont certainsgrossissent la masse desclandestins. L’arithmétiqueconduit donc à retenir le chiffrede 200 000 entrées net commeun minimum. »>www.polemia.com

Yves Darchicourt revient, lui, surla récente déclaration du Pape.

Synthèsenationale« Dans son message pascal, lepape Benoît XVI semble bien s’êtreégaré sur le terrain politique enconfortant la position desmondialistes qui vont se servir deses paroles de générosité pourjustifier leurs actions en faveurd’une immigration planétaire,laquelle serait rendue nécessairepar les événements dramatiquesqui surgissent ici ou là etprécipitent des afflux de réfugiésréels ou supposés vers l’Europe.On va peut-être en arriver à voirdes laïcards militants auréolerleurs actions immigrationnistesdélétères du message urbi et orbi duSouverain pontife, qu’ils brocardenttant en d’autres circonstances.Si l’on se réfère à l’ancestrale

distinction entre le pouvoir spirituelet le pouvoir temporel, on pourraregretter que Benoît XVI ait crubon de parler globalement depolitique migratoire, intervenantainsi indirectement auprès desresponsables politiques. »> synthesenationale.hautetfort.com

Laurent Pinsolle, qui soutient Nico-las Dupont-Aignan, essaie, lui dese situer dans une position plusbalancée.

Bloggaulliste libre« La France est un pays de relativefaible immigration en Europe,malgré l’évidence des statistiquesbritanniques : il y a un demi-million d’immigrés qui rentrent enGrande-Bretagne par an, contredeux cent mille en France. Maisrefuser la stigmatisation ou lesdéclarations mensongères qui nefont qu’accroître les tensions dansnotre pays ne mène pas forcémentà un angélisme qui peut rapidementcéder au communautarisme. À cetitre, les réactions hystériques de lagauche et du Medef à l’annoncefaite par le gouvernement deréduire de 10 % seulement les fluxmigratoires sont totalementridicules. Le contexte économiqueactuel justifie très largement unetelle mesure. En effet, il est bienévident qu’avec un tel chômageen France, il sera beaucoup plusdifficile pour les immigrés de trouverdu travail, ce qui rendra beaucoupplus difficile leur intégration. »> gaulliste-villepiniste.hautetfort.com

Sur son blog, un militant de gauchereplace le phénomène de l’immigra-tion dans un contexte historique etéconomique.

Bouteille à l’amer« L’immigration serait l’arméede réserve du capital, une manièrecommode de peser à la baissesur les salaires sauf que toutel’Histoire de l’immigration enFrance contredit cette fable reprise

dernièrement par la nouvelledroite, Marianne, le FN, lesarchéo-communistes et une partiedes socialistes, les autres separtageant entre sans-papiéristeset libéraux bon teint. La France futle premier des pays malthusien,de plus saigné à blanc parl’hémorragie de 1914-1918, aussil’immigration eut deux objectifs,fournir la main d’œuvre nécessairedans l’industrie et une partie del’agriculture, repeupler des régionsabandonnées. Les employeursy trouvèrent des ouvriers à lastabilité relative, les travailleursfrançais l’opportunité autre quescolaire de grimper les barreaux del’ascension sociale. L’immigrationd’après-guerre s’explique parla croissance exceptionnellede l’économie française et nonpar une certaine langueurdémographique.C’est le temps du baby-boomet des chantiers. »> bouteillealamer.wordpress.com

Elsa Fayner tâche de démontrerqu’il n’y a pas de corrélation entreimmigration et chômage.

Et voilà leTravail« Après que le ministre del’intérieur, Claude Guéant, a ditvouloir limiter le nombre d’étrangersaccueillis légalement en France,c’est son collègue du gouvernementXavier Betrand qui a annoncé,dimanche 17 avril, vouloir réduirela liste des métiers pour lesquelsle recours à une main d’œuvreétrangère est facilité. C’est uneillusion de mettre face à face lenombre d’immigrés et le nombrede chômeurs en pensant qu’ils sontsubstituables, explique PatrickSimon, démographe à l’Institutnational démographique. Il y a deseffets rémunérations, des effetscompétences et de spécialisationdont il faut tenir compte. Autrementdit, ces emplois sont souvent pluspénibles que la moyenne, moinsbien payés et plus précaires. Ilsintéressent donc peu les chômeursfrançais. Encore moins s’ils y sontmieux formés, comme le proposeXavier Bertrand. »> voila-le-travail.fr

RachelGliese,universitaire, sepenchesur l’immigrationdes jeunesétrangers

qui viennent faire leurs études enFrance et s’inquiète d’une dégrada-tion de leur accès à nos universités.

GaiaUniversitas« la France accueille de nombreuxétudiants étrangers. En 2010,66 000 étudiants étrangers sontvenus étudier en France, ce chiffreétant en augmentation de 28 %par rapport à 2009. Pour ma partje me félicite de ce chiffre enaugmentation, cela montre quenotre enseignement supérieur resteattractif. Mais une réductionprogrammée de l’immigrationne va-t-elle pas freiner ce fluxd’étudiants étrangers ? Dans uncontexte de rigueur budgétaire,une question semble émerger enFrance : faut-il financer les étudesd’étudiants étrangers ? Cettequestion est particulièrementsensible en France du fait queles études sont quasi gratuites,y compris pour les étudiantsétrangers. Cela constitue d’ailleursune forte attractivité (en particulieren master et doctorat). »> rachelgliese.wordpress.com

Déblogage

EIP l’Hémicycle, Sarl au capital de 85 890¤. RCS : Paris 443 984 117.44, rue Blanche - 75009 Paris. Tél. : 01 55 31 94 20. Fax : 01 53 16 24 29. Web : wwww.lhemicycle.com - Twitter : @lhemicycle

GÉRANT-DIRECTEUR DE LA PUBLICATION Bruno Pelletier ([email protected]). DIRECTEUR Robert Namias ([email protected]) RÉDACTEUR EN CHEFJoël Genard ([email protected]). ÉDITORIALISTESGérard Carreyrou, Michèle Cotta, Bruno Jeudy, Paul Lefèvre, Catherine Nay AGORA Ludovic Vigogne ONT COLLABORÉÀCENUMÉROLudovic Bellanger, Jean-Louis Caffier, Antoine Colonna, Jean-François Coulomb des Arts, Béatrice Houchard, Manuel Singeot, Brice Teinturier ÉDITIONEdit (Paris)MAQUETTEDavid Dumand DIRECTRICEDE LACOMMUNICATIONETDELAPUBLICITÉJuliette Boudre ([email protected]) IMPRESSIONRoto Presse Numéris, 36-40, boulevardRobert-Schumann, 93190 Livry-Gargan. Tél. : 01 49 36 26 70. Fax : 01 49 36 26 89. Parution chaque mercredi ABONNEMENTS [email protected] COMMISSIONPARITAIRE0413C79258 ISSN 1620-6479

Thèmemajeurde laToile : leWebs’enflammeàproposde l’immigrationChaque

semaine,le tourde Francedes blogspar Manuel Singeot

Première victoire incontestée du Front national : l’immigration devientl’un des sujets favoris des blogueurs.Mais, si les blogs de la « fachosphère »,appelée ainsi par les internautes de gauche, se font bruyamment entendre,d’autres voix tentent d’émettre une petitemusique différente.Revue d’une diversité d’opinions.

Lampedusa.Ported’entréede l’Europe. PHOTOMAUROSEMINARA/AFP

22 L’HÉMICYCLE NUMÉRO 407, MERCREDI 4 MAI 2011

2.0

Crise franco-italienne :l’Europeenaccusation

Parmi les commentaires lesplus violents, ceux qui visentNicolas Sarkozy et Silvio

Berlusconi, accusés de former unduo peu crédible, comme le ditune internaute sur lemonde.fr :« La grande Italie et l’immense Francevont refaire l’Europe à elles seules.C’est fort ! Sarkozy et Berlusconiignorent-ils qu’il y a d’autres nationsen Europe et qu’elle doit s’élargirprochainement? ». D’autant que leproblème ne semble pas insur-montable, pour certains : « Tout demême un beau scandale que deuxpays fondateurs se montrent inca-pables de se coordonner sérieusementpour gérer – quoi, une attaquemilitairemajeure ? – non une vague de 20 000migrants, bien loin des 400 000annoncés initialement. » (lemonde.fr)Mais au delà de la critique del’action individuelle de tel ou telresponsable politique durementcritiquée par certains mais forte-ment approuvée par d’autres, lesinternautes pointent aussi ladimension européenne de cettesituation. Et leurs réactions mar-quent une impatience grandissantedevant l’inefficacité de l’Europe.Certaines critiques portent sur le

peu de solidarité dont font preuveles états européens sur ce dossierépineux de l’arrivée de Tunisiens« J’ai toujours pensé qu’il était inad-missible que seulement deux pays(éventuels) subissent l’arrivée de cettepopulation émigrée. Et les 25 autres ? »(lepoint.fr).

Les institutions européennes sontelles aussi pointées du doigt, toutparticulièrement la Commission,que les internautes jugent loin desréalités : « “si l’État en position defrontière extérieure de l’UE a failli àses obligations” a dit la Commissaireeuropéenne nordique... Que faut-il quefasse l’État en position de frontière ?Qu’il repousse les bateaux d’émigrantsvers le large ? » (lefigaro.fr). De plus,ses règles sont perçues par certainscomme une ingérence inaccept-able : «C’est incroyable, il faut main-tenant demander à un technocrate de

Bruxelles (Barroso) si nous pouvons« temporairement » surveiller nospropre frontières... On croit rêver !Sommes-nous devenus une province deBruxelles ? » (lepoint.fr).Bref, comme le résume un inter-naute sur lexpress.fr, « C’est unconstat d’échec pour l’Europe ».Cet échec ressenti est une raisonsuffisante pour d’autres qui deman-dent des changements radicaux :cela va de restrictions fortes auxprincipes du traité de Schengen,comme le propose un internautesur liberation.fr : « il faut réserverla libre circulation aux Européens,renforcer les frontières extérieures del’Europe et fixer des quotas stricts d’é-trangers », à son abolition pure etsimple. C’est parfois tout l’édificeeuropéen que certains ont enviede jeter aux orties : « Ce n’est pasSchengen qu’il faut réformer, c’esttoute l’organisation européenne. Maisça va venir plus tôt que certains lepensent car les conflits et les déboiress’accumulent. » (leparisien.fr).Face à ce déluge de critiques, uneminorité d’internautes continuetout de même à croire en l’idéaleuropéen, mais ces soutiens expri-ment surtout le constat d’uneEurope inaboutie qui ne les satis-font pas : « Il est temps de se réveiller !l’Europe a besoin d’une politiqueplus fédéraliste (comme aux US). Pourcontrôler les frontières européennes, ilfaut des douaniers européens » (tf1.fr).D’autres déplorent les carences depolitiques communes : « Comme

d’habitude, la solution ce n’est pasmoins d’Europe mais PLUS d’EU-ROPE ! À quand une diplomatie com-mune et UN SEUL consulat Schengencommun pour les visas ? Un passeportUE ? » (lemonde.fr)À lire ces commentaires, on se ditque six ans après, les résultats duréférendum de 2005 sur la Consti-tution européenne ne seraientguère différents aujourd’hui. Etsans doute plus hostiles encore. Sil’on en croit la Toile, l’Europemarche de plus en plus à reculons.

«C’EST UN CONSTATD’ÉCHEC POUR L’EUROPE »

Un internaute sur lexpress.fr

Le chiffre

350vendues dans le monde,un record pour un systèmed’exploitation. (Source Microsoft)

millionsde licencesWindows 7

Silvio Berlusconi

La citation

«LES PAYS DE LARIVE SUD DE

L’EUROPE NE DOIVENTPAS ÊTRE LAISSÉS SEULSQUAND DES PHÉNO-MÈNES D’IMMIGRA-TION MASSIVE SEPRODUISENT»

LE MARCHÉ DES TICREPART À LA HAUSSEMAIS L’EUROPE RESTEÀ LA PEINE� Après une baisse de 2,1% en 2009,le marché des Technologiesde l’Information et de laCommunication s’est redresséen 2010 avec une hausse de 3,3%au niveaumondial. Mais cettereprise est disparate. En effet, sil’Amérique du Nord connaît unecroissance comprise entre 3 et 4%,l’Europe est à la traîne avec unecroissance inférieure à 1%. Lesopérateurs télécoms sont encorefragiles et France Télécom n’est plusqu’à la 8e placemondiale, les deuxpremières étant trustéespar les opérateurs US.

GOOGLE S’ATTAQUEAU MASTODONTEITUNES D’APPLE� La plateforme de téléchargementet de streaming demusique etde films d’Apple est une véritablemachine de guerre sur leWeb etcontribue largement aux bénéficesrecords de la firme américaine.Google décide de s’y attaquer enlançant un service de vidéo à lademande sur Youtube. Des accordsont été signés avec plusieurs studiosde cinéma, dont Universal. Et unealliance avec le suédois Spotifypourrait venir s’attaquer aumarchéde l’audio. Une stratégie nécessairepour le bon développementd’Android, son systèmed’exploitation dédié auxsmartphones et tablettes ?

ANDROID DE NOUVEAUMENACÉ PAR UN VIRUS� Signe de l’importance dumarchéde l’Internetmobile, les virus ont faitleur apparition dans ce secteur.Android.Spy, conçu pour s’attaqueraux smartphones utilisant lesystème d’exploitation de Google,fait de nouveau parler du lui.Une nouvelle version a été détectéeen Chine et pourrait très rapidementse répandre dans le reste dumonde.Ce charmant virus transforme votresmartphone en zombie envoyantdes spams par SMS et récupèrevos données personnelles, tout enpermettant de localiser le téléphone.

SETI, VICTIME DE LA CRISEBUDGÉTAIRE AMÉRICAINE� Le programme de recherche d’uneintelligence extraterrestre (SETI)doit abandonner pour un temps saquête d’E.T., faute d’argent. En effet,la crise budgétaire frappant l’étataméricain a conduit la NationalScience Foundation à réduiresa contribution de 90%.Une campagne de fonds va êtrelancée pour remettre en route ceprogramme très populaire chezles internautes qui participent viades logiciels gratuits qui utilisentlesmicro-ordinateurs pour traiterles données brutes collectées.

En bref

La tension entre les gouvernements français et italiens à proposde l’arrivée en France desmigrants tunisiens passés par l’Italieprovoque des réactions sans nuance.

Immigration. L’Italie etlaFranceenpremière ligne.PHOTOVINCENZOPINTO/AFP

Page 13: l'Hémicycle - #407

Si nous fournissons une énergie plus propre aux transports en commun de Lille,nous pouvons aussi le faire pour le petit train de Marius.

Pour réduire l’impact sur l’environnement des transports en commun de Lille,

Gaz de France Provalys approvisionne les bus de la ville en Gaz Naturel Véhicules,

un carburant faiblement émetteur d’oxydes d’azote. Et pour que, vous aussi, vous puissiez faire un geste en

faveur de l’environnement, Gaz de France DolceVita vous propose l’offre de marché 2 énergies Nature qui

associe une électricité compensée 100 % hydraulique et un gaz naturel 100 % compensé carbone(1).

Dans votre ville, votre entreprise, comme chez vous, GDF SUEZ vous apporte une énergie plus sûre, plus respectueuse, mieux consommée.

(1) Les conditions de souscription de cette offre de marché DolceVita 2 énergies Nature sont disponibles sur le site www.dolcevita.gazdefrance.fr. Pour 100 % de l’électricité que vous achetez, GDF SUEZ achète son équivalent en électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelable d’origine hydraulique. Les émissions de CO2 issues de la consommation de gaz naturel sont compensées par l’achat par le client de crédits carbone.

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