l'Étoile flamboyante tome 1

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L'étoile flamboyante ou La société des francs- maçons considérés sous tous les aspects ([Reprod. en fac-sim.]) [Tschoudy] Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

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Page 1: L'Étoile Flamboyante Tome 1

L'étoile flamboyante ouLa société des francs-

maçons considéréssous tous les aspects([Reprod. en fac-sim.])

[Tschoudy]

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Page 2: L'Étoile Flamboyante Tome 1

L'étoile flamboyante ou La société des francs-maçons considérés sous tous les aspects ([Reprod. en fac-sim.]) [Tschoudy]. 1785.

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Page 3: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE,

o u

LA SOCIÉTÉ

DES S

FRANCS-MAÇONS,

Conjîdérée Joustous les

afpecls.

TOME PREMIER.

A L'ORIENT,

CHEZ LE SILENCE-

Page 4: L'Étoile Flamboyante Tome 1
Page 5: L'Étoile Flamboyante Tome 1

T A B L E

DES T I T R E S

Contenus dans le premier Volume.

If ARiÉTÉ des opinions fur l'origine de

la Franche Maçonnerie Page. i

Du cas que méritent ces différents fyf-

ternes \6

Opinion moderne, ij

Époque fixe 31Ordre. Art Royal. Loge 41

Profanes leurs idées fur le but de la

Maçonnerie celles de plujieurs Maçons

cet égard 66

Perles confacrées. Abus des termes. Refpecîdes nombres, 83

Défenfe d'écrire. Serment. Secret. Ban.

quet. Freres, 104

SECONDE PARTIE.

Des grades. L'abfurdité de quelques-uns.L'inutilité de prefque tous, xaii

Page 6: L'Étoile Flamboyante Tome 1

T A B L E.

Morale Jurifdicîion Police, 153Devoirs des Chevaliers de l'Orient, i 9

Règlements, Jurifdicîions 195Statuts pour les Apprentis jç6Statuts pour les Compagnons 100

Statuts pour les Maîtres 104Statuts généraux & anciens, 208

Réforme pojjible. Conclufion, 13ÛTablette calculée de la perfection au

nombre ternaire par les propriétés

arithmétiques de celui de 9 qvi ne

font communes à aucun autre des nom-

bres /impies j 5-8

Fin de la Table du Tome premier.

£!étoile:

Page 7: L'Étoile Flamboyante Tome 1

A

L'ÉTOILEFLAMBOYANTE.

Variété des opinions fur l'origine de la

Franche Maçonnerie.

V^u'uN charlatan faus principe & fans

pudeur ait aflez mauvaife opinion de

ceux à qui il s'adrefle pour leur pro-

pofer des abfurdirésinfoutenables du

ton d'un homme infpiré que dans ces

difcours d'éloges deftinés à la perfuafion

de l'efprit, à la réforme du coeur, il ait

l'effronterie pour donner du poids à

fes amenions de préfenter l'art des

Maçons comme une fcience éternelle

Page 8: L'Étoile Flamboyante Tome 1

2 L'É T O I L E

8c néceffairement telle; qu'en peut-il

réfalter ? Sans doute la fcience eft en

Dieu ellé y efl de tout tems & à tou-

jours une pieufe & faine philofophie

peut raifonner ainfi de toute chofe mais

cette métaphyfique fiiblime des perfec-

tions de l'Etre fuprême n'a point trait

aux vérités hiftoriques prifes dans le

temps & qu'il faut fixer par l'époque

du temps. Je iais bien qu'en quclqti'en-

droit des livres facrés Dieu eft défigné

une truelle ;i la main commandant du

haut des murs de la fainte Sion préfi-

dant aux ouvrages, alTemblant les pierres,

& les liant avec le ciment deftiné à les

unir mais cette métaphore retenue au

furp!us en des cahiers qui n'offrent guère

que des allégories, n'eft-elle pas dans la

catégorie de ces paraboles difficiles, dont

le fens ci! purement moral, & auquel les

raifonnements n'ont aucun droit de s'arrê-

ter? Le fafte & l'étalage font fouvent fi

près du néant que l'on prévoit d'abord

le fort d'une parère hypothefe. Des

hommes moins mal à droits peut-être

plus dangereux parce ou'ils connoiffent

Page 9: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 3

A z

davantage les reffources de la perfuafibn

parce qu'ils furent mieux faifir les foibles

de l'humanité, ont hafurdé des fables

plus fupportables.

La vanité établit pour maxime que

plus on date de loin plus on prouve de

grandeur & de mérite l'aveu public

qui fe prête volontiers aux chimeres a

conacré celle-là comme fi le ruifTeau

qui fi; perd dans l'immenfe Océan s'an-

nobli !Toit à cent lieues de fa fource.

N'importe accordons quelque chofe aux

conventions admifes, le philofophe fair

bien à quoi s'en tenir mais tous les

philofophes n'ont pas acquis leur franc-

parler il faut avoir été chaffé des deux

tiers de l'Europe pour ofer encore

dans le petit coin où l'on végète SC

où la police attentive ne vous Souffrira

pas longtemps dogmatifer & fronder le

genre humain. La bonne & faine logi-

que ordonne d'admettre certaines hypo-

thefes fuppofons donc qu'en effet la

fouche la plus ancienne l'origine la

plus reculée foit la plus gloricufe &

ne foyons plus fûrpris que les corps

Page 10: L'Étoile Flamboyante Tome 1

A L'É TOILE

quelconques te foient efforcés de s'illuf-

trer par un hiRorique analogue à cette

fuperbe prétention.

Je ne parcourrai pas les différentes

fociétés répandues en Europe plufieurs

ont droit à nos refpeérs prefque toutes

font étayées du fuffrage 8c de l'autorité

fouveraine ordres hofpitaliers, religieux

militans, monaftiques même fi l'on veut,

tous annoncent un point de vue utile

honorable tous font avoués reconnus

protégés tous à qui fauroit approfon-

dir le but de leur inftitution primitive

préfentent des objets avantageux Se le

font effectivement. Ecoles de héros

pépinières de grands hommes récom-

penfes aux guerriers afiles pour la

noblefTe indigente hofpices dévoués

aux vertus aux actes de l'humanité,

retraites facrées deftinées à la perfec-

tion de la morale à l'habitude de fes

pratiques à l'application de fes pré-

ceptes il me fuffit d'appercevoir les

réfultats heureux de ces congrégations

je n'ai pas befoin de connoître ce qui leur

donna l'être. Ainfi fommes-nous accon.

Page 11: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 5

A3

tumés à refpe&er, chez un grand cette

jarretière fymbole d'un honneur parti-

culier, fans fonger à la froide plaifanterie,

à la mauvaife équivoque qui en rendit la

décoration fameufe.

Il s'agit ici d'une fociété clandeftine

d'un corps particulier qui s'accroît jour-

nellement, qui fubfifte depuis long-temps,

que l'on foupçonne toujours que l'on

tourmente quelquefois fociété qui dans

le fond a tout pour elle tout contr'elle

dans la forme dans laquelle on trou-

veroit peut-être le germe de toutes les

autres dont les pratiques font excel-

lentes, les vues honnêtes la doârine

jufte, & qui femble deftinée depuis plu-

fieurs fiecles à paffer les hommes au

crible des épreuves pour choifir en-

tr'eux & par-tout les bons citoyens les

plus fideles Sujets, les meilleurs pères

les époux tendres les amis vrais les

hommes vertueux. Franche-Maçonnerie,

voilà fon nom fubflantif groflîer épi-

thete vague nous faurons vous donner

de la valeur mais d'où vient-elle ? Quel

fut le principe de cette afîociation ? Qui

Page 12: L'Étoile Flamboyante Tome 1

6 V Étoile

J'inftitua ? Qui peut la maintenir ? Que(.tions prêtées & preflantes auxquel-

les il faut répondre & d'abord

rêvons un peu, il eft à propos quel-

quefois de fe perdre dans le pays des

idées.

Adam réputé le pere commun des

hommes n'eft il pas lui-même l'être le

plus refpe&able & le plus confidéré ?

Nous fommes tous ùs enfants mais

quelqu'un qui par une filiation bien ré-

digée, prouveroit fa descendance dire4le

& nous préfenteroit des rcnCeignements

fur quoi que ce puiflc erre tranfmis je

ne fais comment de race en race &

<li£iés dans le jardin d'Eden ou ailleurs,

n'auroit il pas le crédit de capter notre

affentiment celui de faire adopter

tous fcs paradoxes ? Sans doute. Eh bien},

voilà le berceau des Francs Maçons fi

l'on s'en rapporte aux premiers auteurs

freres ou profanes qui ont écrit fur ce

fujet. Heureufement aucun d'eux n'avoit

apparemment connoitfance des fyftêmes

des Chaldéens des Egyptiens ni des

calculs Chinois fans quoi leur entou-

Page 13: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 7

A 4

fîafinc d'antiquité les eût fait remonter,

encore plus loin mais il a fallu fe

reftreindre à l'époque de la création du

monde c'eft grand dommage en vérité

que nous n'ayons encore que cinquante-

fept fiecles, j'ai prefduehonte d'une lî

grande jeunefle cependant cette fable

n'a pas pris tout la contredifoit. A quoi

occuper les Maçons dans un temps où

l'art de la banne étoit ignoréoù la

nature (impie dans fes goûts comme dans

fes befoins n'infpiroit à la créature que

les courtes idées des objets néceffaires

à fa confervation une roche un arbre,

une cavité lui fervoit d'abri l'univers

étoit Con palais, lambrifle des plus magni-

fiques productions que la main bienfai-

fante du Créateur avoit formées pourfoin

ufage falloit-il à l'homme d'autres orne-

ments, d'autres commodités d'autre»

habitations ?

Jubal le pere des Payeurs

fut le premier qui fit des tentes,

Où paifible il vivoit des rentes

De fes innocentes fueurs.

Maçons c'eft dans un de vos canti.

Page 14: L'Étoile Flamboyante Tome 1

8 L' Ê I O I L E

ques que je trouve mon texte habilement

employé par une imagination chaude

il prouvera peut être un jouer, que les

Francs-Tijferamh ou les Francs- Charpen-

tiers, font plus vieux que vous puifque

fufage des tentes par conféquent celui

des toiles & des tiffus Fart au moins

d'affembler des branchages de rappro-

cher des bois de les enchevêtrer de

les unir pour former un abri antécede

de beaucoup celui de cuire & de cal-

ciner le roc d'en amalgamer ks parties

émincées avec un volume de fluide

fuffifanr pour compofer ce ciment folide

qui depuis fut le lien des édifices tes plus

durables.

Le déluge qui Submergea tout aura

fans doute noyé vos faites on a fenti

que cela devoit être un auteur plus

réfléchi plus conféquent a détruit le pre-

mier fyftême. Comment un feul homme,

échappé à l'inondation générale occupé

à fauver tant de chofes qui bientôt alloient

lui faire befoin auroit-il pu fonger aux

petits plans de vos petits ouvrages aux

foibles tablettes qui dévoient contenir la

Page 15: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 9

A 5

mécanique & les règles de votre art

confacrés dès-lors à la poftérité par des

moyens dont je ne me doute pas Se

dont vous feriez bien embarrafFés de

nous rendre raifon ? Non Sincèrement

& pour le profit je ne dis pas de la

vérité mais d'un peu de vraifemblance

oublions Adam vous ne tenez à lui

que comme le refte des hommes atta-

chons-nous au patriarche.

Naé, trouvé jufte devant le Seigneur,

demande, obtient, ou mérite d'être ex-

cepté de la profcription univerfelle le

Créateur ne vouloit plus replonger l'uni-

vers dans le chaos il ne vouloit plus

répéter l'œuvre immenfe de la créa-

tion il falloit punir l'efpece & non pas

l'anéantir ce n'eft jamais le défir d'un

être infiniment bon il falloit donc aufft

conferver de quoi la perpétuer.Noé defliné à cette réparation reçoit

de l'Eternel la leçon des moyens quidoivent le garantir de la fubmerfon.

L'arche prefcrite mefurée propor-

tionnée, divifée étagée prend dans

fes mains & par fon travail la forme

Page 16: L'Étoile Flamboyante Tome 1

IO L'ÉTOILE

jk la confiftance que Dieu lui indique;

il y entre avec toute la nombreufe com-

pagnie, qui comme lui eft réservée à

une nouvelle population en tout genre

déjâ je le vois flottant fur ce volume

immenfe d'eau, qui bientôt couvre ÔC

cache les plus hautes montagnes. Jufque-

là, mes chers freres permettez-moi de

ifappercevoir encore que le triomphe de

la charpente pas le plus léger avan-

tage pour la maçonnerie. De là, cette

invention moderne d'un ordre peu connu,

médiocrement répandu fous le nom de

la coignée dont l'attribut eft une petite

hache d'or, fufpendue à un ruban nuancé

des couleurs de l'iris ce .fut en effet

à peu près vers ce temps que Nos

apperçut le figne de l'alliance & les

analogies ne font pas défigurées. J'ai

l'honneur d'être de cet ordre dont il

exifte je crois quatre ou cinq chan-

tiers en France, & un à Saint-Domingue

mais j'avoue, à ma honte, que j'ai pref-

que perdu l'idée de fes pratiques en

gros il me fouvient que le tout confifte

en quatre grades ( car l'on grade tout

Page 17: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. h

A 6

prêtentcette méthode eft la corne

d'abondance. ) Cesgrades font

appren-

ti, compagnon parfait ouprofès Se

jyrien dont le cordon eftrayé de

Soixante-douzecouleurs, mais pour le

peu que je m'enrappelle, j'oferai affurer

quede toutes les

imaginations nouvelles,

celle-ci eft la plus ingénieufe & dont

l'allégorie fe foutient le mieux. Quant

au but de lachofe je n'en dis rien

n'auroit onpas trop à faire s'il fal-

loit toujours rendre raifon des jeux de

l'efprit & montrer unobjet utile ou

raifonnable fous desimages découle?.

Sans doute ces Meneurs n'ont pas ett

l'intention de fauver de la rouille du

temps lesplans & les

proportions du

grand bateau nousappréhendons peu

un nouveaudéluge, l'on connoît

aujour-

d'hui tant de parties duglobe ignorées

alors qu'il refteroit bienquelque petit

coin où feréfugier en tout cas les

reflburces qu'offrent laphyfique & l'ait

de lanavigation tireroient bien

quelqu'un

d'embarras mais la moralegagne à

cettefiâion l'arche eft le fymbole de

Page 18: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Iz L'É TOI LE

l'ame agitée fur la mer des partions

c'eft au déluge des vices qu'il faut échap-

per un maître éloquent vous raconte

tout cela, vous le croyez Sc fauve qui

peut. J'ai lu quelque part que la fortune

d'un ouvrage dépendoit du flyle il eft

du bon ton aujourd'hui de ne s'attacher

qu'à l'écorce on fouffre à l'auteur les

anacronifmes les contre Cens les im-

poftures les plus groiïieres fi elles font

joliment habillées un peu d'habitude du

néologifme des petits maîtres fauve tout,

mais on ne pardonne point une phrafe

îocailleufe c'eft le mot, dût-elle peindre

une vérité importante ÔC j'imagine que

le mérite des furfaces peut également

alTbrer le fuccès d'une fable quand elle

eft débitée d'une façon agréable quand

celui qui la raconte du qui la propofe

joint à beaucoup d'effronterie un peu

d'art & d'élocution il eft bien peu d'au-

diteurs raifonnables.

Adam & Noé ayant eu le guignon de

ne pas réuffir, que devenoient les Francs-

Muçons ? Il leur falloit un pere n'eût il

été que de convention tant de gens

Page 19: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. tt

n'en ont pas d'autres Eh c'eft encore

affez, fouvent trop. Comment faire ? En-

jambons, s'eft dit un cerveau vif, fau-

tons à pieds joints fur tous les fils de

Noé aufli bien où voulez-vous que l'on

fuive ces gens-là ? Ils font à tous les

coins du monde c'eft jouer aux barres

& cela fatigue. ChoififTons un lieu com-

mode, mettons-nous en bon air pre-nons un fol abondant fixons-nous dans

une contrée délicieufe la terre de Cha-

naam par exemple, la terrepromife

où il coule du lait & du miel bon

juilement j'aime les douceurs & j'aila poitrine délicate c'êtoit déjà la ma-

ladie à la mode me voilà bien. Voyonsun peu la gazette de ce pays-là Qu'ydit-on ? Qu'y fait-on ? Qu'efl-ce qu'un

peuple Juif que l'Etre fuprême chérit de

prédileâion ? Pourquoi ? Ce ne font pasmes affaires. Sachons feulement depuis

quand il exifte comment il fe trouve

ici, quelles font fes loix, fon régime, fon

gouvernement, fes fouverains, en a-t-if?

Oui, fort bien. Parcourons leur lihe

cherchons-en un fameux bien conqué-

Page 20: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Z4L'ÉTOILE

rant, bien fage bien magnifique bien

puiflant. Le voici Salomon précifé-

ment l'ami de Dieu l'oint du Seigneur,

le modèle des rois tant qu'il eft jufte j

que fait-il? La guerre Et des conquêtes;

non en tout cas-, tout cela ne me regar-

deroit point. Il rend la juflice & donne

des loix. je n'en ai que faire. Il em-

bellit le fiege de fon empire & bâtit un

temple l'on dit qu'il fera très-beau ah

ceft mon homme, voilà mon époque

on ne bâtit pas fans ouvriers les Maçons

qui ont travaillé à cet édifice célèbre quoi-

que le bel efprit du fiecle aflure & prouve

que c'étoit au plus une chapelle informe,

ces ouvriers ont dû eux-mêmes acquérir

de la célébrité, & la laifier comme héri-

tage à leurs enfants, ceux-ci à d'autres

jufqu'à nous cela eft plaufble for-

mons-en un corps de gens habiles &

fameux donnons-leur des modes des

regles des ufages des habits des

attributs: ouvrons les écrits de ce temps-

là, les dimenfions de l'édifice y font

trés au long, rappellons-les joignons-y

quelques noms de colonne ou d'ouvrage

Page 21: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. ic

on d'ouvrier aidons à lalettre lilppo-

fons quelqu'événement la mort d'un

chef, par exemple claflbns tous ces

gens-là parce qu'ileft

fimple que celui

quiexécute n'en fait pas autant

que celui

qui ordonne fur le tout, un vernis de

piétéun air d'on&ion un ton d'auto-

rité parlons haut, crions fort, citons,

& beaucoup de motsétrangers aidons-

nous de langages inconnus qu'une fur-

face myftérieufe en impofe auxplus rai-

fonnables, étonne les fots Surprenne

embarraffe embrouilledogmatifons Se

dirons hardiment quela fociété des Francs-

Maçons prend fa fource à la conflnicîion

du templede Salomon lors de laquelle

tous les matériaux étoient tcllementpré-

parés, quel'on n'entendit aucun

coup

(Tinjlrumentde

fcr devinequi voudra le

fens de cette réponfe lesénigmes font

les armes des fourbes &l'appât des fim-

ples quels font en moindre nombre ?

Page 22: L'Étoile Flamboyante Tome 1

r6 L'É T O I L E

Du cas que méritent ces différents

fyffémes.

o MES FRERES ô Maçons qui tant

de fois avez eu la patience d'écouter ces

impiétés avec recueillement & de l'air

de la perfuafion, aurez-vous le couragede les lire ? N'auront-elles pas le fort de

cent productions éphémeres de tous

ces petits chef- d'oeuvres dramatiques,

que l'art & l'habileté du jeu fait valoir

mais que l'imprellîon montre fans pref-

tige, & dont la trifte nudité répugnec'eft une demi victoire de vous caufer

cette fenfation, mais je veux un triomphe

complet raisonnons.

D'abord, pas un mot d'Adam, je vous

en prie, ce feroit l'hifloire des plaideursde Racine quand je vois le foleil

quand je vois la lune quand aura-t-il

tout vu ? On ne combat pas les chofes

qui fe détruisent d'elles-mêmes. Pour le

chapitre du patriarche je remarque avec

joie que beaucoup d'entre vous ont déjà

Page 23: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 17

pris le parti de réduire cette froide faillie

au genre de Maçonnerie, qui occupe les

loges de femmes. D'abord une pommedont le pepin eft défendu un vaiffeau

tourmenté dont la vertu eft l'habile

pilote une tour de confufion qui feroit

un chef-d'œuvre, fi en montrant les dan-

gers du babil elle pouvoit diminuer les

caquets, & parmi tout cela, une échelle

de Jacob qui y revient comme la fête

fur mer, dans l'appartement de la reine

de Golconde n'importe, par-tout on fe

rend fupportable avec un peu de déco-

ration, de grandes images, de plus grands

mots un peu de génie point de ré-

flexion, beaucoup d'enthouuafme &

voilà du beau de l'admirable du fu-

blime. Je connois des gens affez fous

pour dire voilà du vrai mais c'eft au

plus la fédu&ion des organes, ce n'cft

pas même celle de l'efprit comment

efpérer celle du cœur ? Ceft lui cepen-

dant qu'il faut perfuader. Seroit-ce une

entreprife difficile à l'égard de Salomonde fon édifice, des combinaifons qu'il

oçcafione ?

Page 24: L'Étoile Flamboyante Tome 1

lg L'ÉTOILE

On tent affez que les annales d'un

ordre qui n'auroient pour bafe que des

allégations aulfi hafardées vuides de

preuves & de renfeignements authenti-

ques, crouleroient infailliblement SC

n'obtiendroient pas la plus légère con-

fiance, fi elles n'étoient d'ailleurs étayées

par une continuité d'analogies, de prati-

ques, d'ufages de fymboles qui tous

font relatifs à la bâtitre du temple de

Jérnfalem 8c reportent toujours les

feftatcurs de cette allégorie aux temps

apocryphes des opérations de cet édifice

dont le récit Se le détail n'a pour garant

qu'une tradition fuppofée caution fri-

vole ou factice plus propre à plonger

dans les erreurs & les conféquences les

plus bizarres qu'à éclairer fur la vérité

du principe, la relation des moyens

la définition de l'œuvre.

Inutilement le philofophe religieux

confulte les livres facrés pour vérifier

la citation des faits que l'on aflure y

être contenus. Avec auflî peu de fuccès

le favant le fimple curieux effaie d'ap-

peller les écrivains profanes les auteurs

Page 25: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. io

contemporains, les complicatctirs natio-

naux au fecours des propofitions énonr

cées pour les légitimer ou les confondre

recherche fuperflue nulle trace nul

vertige aucune lumiere qui puitie éclai-

rer cette maffe obfcure rien qui réfolve

le doute, décide le fuffrage ou détruife

le preftige. Muets far la plupart des faits

allégués, ces hommes, & de tout temps

il en fut qui foigneux d'inftruire la pcf-

térité confacrerent au dépôt d'une rela-

tion fidelle, les événements qu'ils pré-

voyoient devoir intérefîer l'avenir ces

hommes n'ont fait mention d'aucunes des

époques d'où les Maçons de nos jours

partent avec aflurance comme du point

de leur inftitution. Sachez-moi gré, mes

frères de ne pas dire ouvertement que

loin que quelque autorité respectable lé-

gitime les contes dont vous bercez vos

aspirants ou favorife vos alertions tou-

tes au contraire font pofitivement démen-

ties par les vénérables écrits que vous en

offrez pour garants. Si j'excepte les pro-

portions du temple & le nom des deux

principales colonnes dont vous embellilTez

Page 26: L'Étoile Flamboyante Tome 1

10 L'ÉTOILE

Ja lignification tout le furplus eft eon»

trouvé, ne fe lie point. Je me garderai

bien d'en convenir, on ne dépouille pas

impunément un arbre de fon écorce

d'ailleurs.cette petite diflertation trouvera

mieux fa place lorfque nous parcour-

rons les différents tableaux des œuvres

Maçonniques, les diverfes claffes d'ouvriers

dont pour le bien de la chofe je défi-

rerois beaucoup que l'on diminuât le nom-

bre l'art réduit à fes moindres termes

approcheroit plus de la perfection fou.

vent pour réalifer un but il fuffit de fubf

tituer à des idées (aillantes des notions

fimples, mais conféquentes.

Dois-je répéter encore au peuple ma-

çonnique dont je m'honore de faire partie,

que la critique frivole, la fatire amefe

n'entre pour rien dans des réflexions que

je foumets aux regards du profane & de

celui qui ne l'eft pas. Loin de vouloir

répandre un coloris de ridicule fur un

corps qui mérite des égards & des élo-

ges quand il fera bien connu mon étude

principale au contraire eft de dui procu-rer cette confidération qui doit être à

Page 27: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. zi

coup fûr la fomme & le produit de

l'examen le plus fcrupuleux fur ce qui

conftitue fon etfence il faut que l'on

fache fa véritable origine fa morale

les progrès fon état a&uel fon point

de vue, fa fin y parviendra-t-on jamais

fans promener l'oeil fcrutateur de l'homme

défintéreffé fur tous les périodes fabu-

leux, pour le ramener au période rai-

fonnable ? Que la courfe foit légere, c'eft

tout ce que j'ofe promettre mais je ne

puis négliger aucuns des recoins de ce

dédale le fil du raisonnement nous en

découvrira l'entrée & la fortie. Nous

appercevons par exemple que l'au-

teur, peu ingénieux, qui donne pour

Source à la Maçonnerie l'époque de la

bâtiffe du Temple a pu être induit à

cette méprife par la confiante obfervance

de tous les a&es relatifs à cette opéra-

tion, & que les Maçons continuent de

maintenir fcrupuleufement entre eux par

une perpétuité d'emblèmes, qui femblent

avoir feulement fubftitué les fpéculations

théoriques, aux ufages mécaniques, en

changeant, pour ainfi dire, le genre

fans pourtant altérer l'espèce.

Page 28: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Il L'É TOILE

Cette façon de m'expliquer paraîtrai

louche à quelques perfonnes je m'y at-

tends mes freres me remercîront encore,

j'y compte de la gaze que je jette fur

leurs crayons. Mais au moins qu'ils en

conviennent de bonne foi nous devons

trouver une origine plus noble & plus

décidée à une fociété compofée de gens

de tout âge & de tout état. Parte le

premier initant de la furprife qui ne

lai1Te guere d'espace à la méditation y

depuis tant d'anaées chez tant de- na-

tions, fiippofera-ton qu'aucun homme

ti'ait réfléchi n'ait fait part de fes dou-

tes ? Cette communication de penfées

le premier befoin de l'humanité, la pre-

miere preuve que nous fommes nés pour

vivre avec nos femblables qui pourroit

l'avoir interdite interrompue ? Eh

croira-ton jamais que les initiations myf-

térieufes fintrodu&ion fymbolique ce

premier pas qui conduit à nos loges ait

paru à tant de gens d'une importance

allez grande ou d'un agrément afiez.

vif pour captiver fi impérieufement des

génies capables, que l'on ne paie ni de.

Page 29: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. ïj

furfaces ni de bagatelles gravement trai-

tées ? Ils y ont/donc apperçu des vérités

lumincufes, Se comment les ont-ils vues?

& quelles font-elles ? autant de problêmes

dont la folution n'elt pas impoffible.

Adam Noé Salomon vous voilà tous

trois rangés dans la même catégorie

ce n'en: point à vous que je demande

compte de la naiilance de l'ordre dont

je veux éclaircir les fafl;es. Une époque

plus moderne rapproche cette date in-

connue à plufieurs dois-je m'y fier plus

qu'aux trois premières ?

Opinion moderne.

LA fureur d'écrire va fi fouvent avec

celle de citer; l'air de l'érudition eft fi

fort le ton de ceux que la difette de

chofes oblige de courir à l'emprunt j'ai

tant pleuré fur ce ridicule, j'ai tant d'étoffe

devant les mains j'ai fi peu la manie de

paroître datte, que je vais tout bonne-

ment fans rien voler à l'hiftoire des croi-

fades faire de mot à mot celle que l'on

Page 30: L'Étoile Flamboyante Tome 1

14 L'ÉTOILE

débite en loge à ce fujet & qui fert de

pivot à une prodigieufe quantité de roues

qui malheureufement engrainent mal

c'eft le défaut de bien des machines.

» Auteurs des premieres croisades

plusieurs chevaliers s'étant ligués fous

» la conduite du pieux roi qui les con-

duifoit, pour conquérir fur les Sarra-

» zins la Pateline & les lieux faims

» formerent une affociation fous le nom

de Maçons libres, défignant ainfi que

leur vœu principal étoit la reconftruc-

» tion du temple de Salomon Dès-lors

» ils adopterent pour marques carafté-

» riftiques tout ce qui pouvoit fe rap-» porter à ce vafie édifice équerre» niveau compas truelle devinrent

» leurs attributs un tablier leur habit» liberté leur devife fecret leur prin-

cipal devoir. Réfolus de faire un corps» à part dans la foule des croifés &

» de fe garantir particuliérement de toute

o furprife du côté des Sarrazins & de

» leurs ennemis ils imaginèrent .des

mots de ralliement entr'eux, des attou-

» chements pour fe reconnoître des

fignes

Page 31: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. ik

TomeL g

» lignes pour fe di flinguer à une très-

» grande diltance ces fignes ces mots

ces attouchements furent accordés

» comme lamarque caractériftique de

» Maçons croifés, & feulement à ceux

qui auroient courageufement foutenu

» les épreuves du noviciat & de l'initia-

» tion »( empruntant conféquemmenî

des Egyptiens des Grecs, des Romains

même bien plus que dupeuple Juif,

ufage des inaugu rat ions fymboliquesdont la

liturgie & le coftumc fut rédigé

toujours dans l'analogie des ouvrages du

temple & dzs ouvriers ) » notre fociété

»qui n'ajoutoit à l'objet commun de tous

les croifésqu'un point de vue plus

direct à la réparation des ruines dt

Jérufalem un lieu plus étroit pour

» les y dévouer davantage prit dès ce

temps une confftance folide & fra-

ternifa déjà fur le pied d'un ordre avec

M les chevaliers de Saint Jean de Jéru-

falem defquels il eft apparent queaa les

Francs-Maçons empruntèrent l'ufagede regarder flint Jean comme le

patron de tout l'ordre en général. Le

Page 32: L'Étoile Flamboyante Tome 1

>fi L'É T O I L E

fuccés des croifades n'ayant pas ré

ponduau défir des croifés ils fe dif-

»perferent

& chacun d'eux regagna

n fon pays,fous les étendards des chefs,

princesou fouverains auxquels

ils

étoient attachés,mais les Maçons gar-

» derent leurs rits & leurs méthodes

& perpétuerentde cette façon

les

mylleresde l'art royal

en établiflant

d'abord des logesen Ecofle enfitite

en Angleterreoù nos freres ont joui

» de privilegesconfidérables fous plu-

» fleurs regnesainfi qu'en

font foi les

chartres des parlements,& c'eft de là

quela maçonnerie

eft pafféeen France

» & maintenue jufqu'àce jour

dans toute

» fa pureté.

Telle eft en fubftance l'hiftoire que

les maîtres de logeles mieux inftruits

les moins partifansdu merveilleux ra-

content avec emphareau récipiendaire

le jourde (on admiflion ce récit pré-

cede d'ordinaire l'explicationdes em-

blêmes & des defleins détail plusou

moins froid fec & ennuyeuxen raifop

du volume d'efpritdont eft pourvu

l'ia-

Page 33: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 27

3

terîocuteur ou de l'airqu'il fait y mettre.

J'ai beaucoup voyagé cent fois incer-

tain du chemin que je devoisprendre

j'ai fait des queilions & j'ai trouvé

nombres d'hommes peu initruits ou peu

officieux, qui fansm'égarer tout à-fait

m'ont encore plus écarté de ma route

enm'indiquant des fentiers qui fem-

bloient couper au court mais qui fe

croifoient àchaque pas qui me rame-

noicnt en arrière, & finifibienrprévue

toujours par m'anuiter avant d'être au

gîte. Le candidat que vous recevez, mes

freres, eft exa&ement le voyageur il

vous demande le chemin voulcz-vous

être ce laboureur grofüer ou mal inten-

tionné qui ne letromperoit pas tout à-

fait, maisqui l'éloigne prenez-y garde,

cet homme eft dans la bonne foi, il s'en

rapporte à vous la nuits'approche &

vous lui cachez Congîte demain il fera

jour il verra fon erreur votre malice,au moins votre

ignorance que pen-fera-t-il ? fi tous les

Maçons étoient ce

que dans les divifions des claffes de l'ordre

où appelle Ecoffoisd'Ecofre revêtus par

Page 34: L'Étoile Flamboyante Tome 1

*8 L' É T O I L E

conféquentdu grade

de faint André, dont

la texture eft raifonnable appuyéefur

des faits, & foutenue de vérités chrono-

logiques& hiftoriques je

ne trouverois

pas étrange qu'aux yeux d'un nouveau

reçuils étalaffent la légende

des martyrs

de la guerrefainte c'eft pour

eux un

magafin de palmes& de trophées auquel

tout leur permetde recourir puifqu'en

fe prêtantà leur fyilême

il feroit abfo-

lument pofliblede concevoir que

la

fociété des Francs Maçonsait pu être

ce qu'ilsla définirent fubfifler comme

ils t'arrangent, & vouloir ce qu'ilsdé-

lîg -entfans le focours d'aucun antécé-

dent. Les vérités phvfiqius font rares

hors du cercle des chef- d'œuvres natu-

relsles vérités morales font plaufibles

& quelquefois équivalentesmais fi peu

de Maçonsont atteint ce degré de con-

noilTance, ont acquisCe droit que j'ac-

corde aux Ecofrois de faint André de

ftatuer comme principece qui

à cer-

tains égards,n'eft peut-être qu'une

rela-

tion d'acceflbires ou de moyensfubre-

quents, que je ne puism'accoutuma ù

Page 35: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 29

B3

voir ce que l'on nomme un maître bleu

fardé comme un tricolor des livrées de

Ja prétention ou de l'enthoufiafme prê-

cher férieufement une doctrine qu'il n'en-

tend pas & qui néceffairement alors

produit ce qu'en bonne logique on appelle

obfcurum per obfcurius.

J'avouerai fans biaifer qu'en effet an

temps des croifades dont je ne veux ici

faire l'apologie ni la critique plufieurs

chevaliers croifés fe lierent par un enga-

gement particulier, & fe dévouerent fpé-

cialement à la réédification du temple de

Jérufalem en fuppofant que l'événement

de la guerre générale entreprife pour la

conquête de la Pateline les biffât maî-

tres du terrein fur lequel ils deftinoient

d'accomplir cette œuvre vraiment pie

Cette poignée d'hommes que je défigne-

rai plus précifémment dans un infiant

prit le nom de Maçons libres parce que

leur affociation étoit la fuite d'un mouve-

ment fpontané mais dans le vrai ils ne

firent que marquer une exigence, bien

plus ancienne & bien plus noble, fous

des fymboles qui n'ont que le mérite d'être

Page 36: L'Étoile Flamboyante Tome 1

30 L' É T O LE

J'enveloppe d'un corps illustre & célèbre,

Je premier ordre du monde le tronc de

touf les autres qui n'en font que des rami-

fication? le feul dont les écrits facrés &

profanes conftatent invariablement l'ori-

gine fans le fecours de la tradition fans

l'effort d'aucune hypothefe, d'une maniere

li claire & fi pofitive que l'homme le moins

lettré peut aifément vérifier toutes les da-

tes & s'en atrurer. Le précis qu'il ra'efl

permis d'en donner fixera pour jamais

l'origine de la Maçonnerie. Vérité neuve

pour cent mille Maçons enrôlés en aveu.

gles dans un corps dont ils ne connoiffent

ni le principe ni les loix ni les droits,

puisez-vous être l'antidote falutaire de la

fdiifle doctrine qui depuis fi long temps

abufe 8c féduit puifle la prudence arrê-

ter mon pinceau L'amour du bien celui

de l'ordre mon attachement pour mes

freres mon respect pour le public dont

il eft malhonnête de prolonger l'erreur

m'autorifent bien peut-être rifquer une

légère efquifle mes engagements per-

fonnels mes devoirs mes obligationsme défendent d'achever le tableau. C'eft

Page 37: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 31

B4

aux fouverains feuls ou à ceux qui les

repréfentent que l'on doit ces détails re-

ctets fi jamais ils l'exigent. Ah qu'un

patriote feroit flatté de pouvoir déceler

dans fa patrie quelques milliers d'hom-

mes dont le fang eft toujours prêt à à couler

pour le prince pour la religion Se pour

l'état dont le premier vœu fut la gloire

de fon maître la défenfe de fes droits

l'exécution de fes ordres. Il doit fuffire aux

Maçons que je leur indique leurs vrais

auteurs quant aux profanes, n'eft-ce pas

afrez fi je leur apprends à respecter les

Maçons & la Maçonnerie fi je les détrom-

pe, fi je tire un coin du rideau

Époque fixc.

FEUILLETER fans celfe de vieilles chro-

niques, c'eft fouvent le métier du pédan-

tifme, quelquefois l'étude de la curiofité:

en conferver les idées fraîches & préfen-tes pour les reproduire au befoin, c'eü le

lot de la mémoire celui qui s'en tiendroit

Jà auroit acquis bien peu mais combi-

Page 38: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Il L'ÉTO IL E

ner discerner, élaguer c'eft l'ouvrage

de l'elprit juger, apprécier, fe décider

enfin c'eft le triomphe de la raifon.

Les plus anciens militaires les pre-

miers qui aient eu forme de corps difci-

pliné, les chevaliers de I'Aurore & de la

Pcdtjline ancêtres peres auteurs des

Maçons ces hommes illuftres dont je ne

dirai pas la date dont je ne trahirai pas

le fecret, fpe&ateurs aftligés de toutes les

vicifritudes que le royaume de Juda avoit

fuccefllvement éprouvées efpéroient de-

puis long temps qu'un jour Dieu daigne-

Toit jeter un oeil favorable fur des lieux

faints où fa préfence s'étoit manifeftée lors

de la loi premiere ils ignoroient encore

la plupart que fa naiffance myftéricufe &

divine les avoit confacré de nouveau par

les bienfaits de la loi de grace. Difherfés

dans les différentes retraites où le mal-

heur des événements & la deftruâion pref-

que totale de la nation Juive les avoit con-

finés ils attendoient quelque révolution

qui pût les remettre en polTeflion des do-

maines de leurs pères Se leur procurer

les moyens de rétablir une troifîeipe fois le

Page 39: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. ji

BS

temple d'y reprendre leurs frondions &

de rentrer fous un regne paifible dans les

emploits éclatants qu'ils avoient toujours

occupé & qui les rapprochoient de la

perfonnne facrée de leurs fouverains ils

confervoient toujours entr'eux ces préten-

tions légitimes, & gardoient avec foin les

renfeignements de leur état primitif, leurs

règlements, leur particulière liturgie. Ils

crurent enfin toucher au terme de leurs

disgrâces, & voir luire l'aurore d'une pro-chaine délivrance, lorfque vers l'an ioojPierre l'Hermite, ce fanatique obfcur, mais

entreprenant ameuta tous les princeschrétiens au recouvrement de la Terre-

Sainte, Se à la reftauration des lieux

augufies premier théatre des bontés du

Dieu de Moïfe fcene encore fanglantede l'amour de fon divin fils pour le falut des

hommes.

A cette nouvelle que les aîles agilesde la renommée & la vitefle du cri pu-blic, portèrent bientôt aux extrémitésde la terre, les chevaliers de la Paleflinecachés dans les déferts de la T-hébaïdeSortirent de l'anéantifreinent dans lequel

Page 40: L'Étoile Flamboyante Tome 1

54 L'ÉTO IL E

ils végétoient depuis fi long temps Et

quittant la folitude pour reprendre les

livrées de leur véritable état ils joigni-

rent bientôt quelques-uns des leurs qui

étoient refiés à Jérufalem pour épier les

occafions de fe fignaler & s'appliquer

aux recherches de la nature aux médi-

tations les plus profondes fur ces caufes,

ces effets combinés que l'art peut at-

teindre, fuppléer perfectionner quel-

quefois, 8c dont les découvertes pré-

cieufes leur fembloient des moyens pro-

pres à la rendue de leurs vues. Le traité

fublime qu'avoit déjà tracé fur cette ma-

tiere épineufe le profond Morien l'un

des arc-,tiques de la Thébaïde étoit l'ob-

jet de leurs continuelles études de leurs

Spéculations philofophiques jaloux de

tout ce qui pouvoit les rétablir dans l'an-

tique fpéculation ils puifoient dans les

documens des fages & fe conccntroient

uniquement dans ces opérations longues

& profondes dont les réfultats dévoient

leur procurer les refiburces nécefftires

pour étayer leurs vues héroïques, & les

puilïants véhicules fans lefquels tout pro-

Page 41: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLA MBOYANTE. 35

B 6

jet échoue. Je ne défire pas que cette

phrafe foit généralement entendue

l'idée qu'elle préfente ne convient qu'à un

petit nombre d'hommes laborieux & con-

féquents j'aime mieux être énigmati-

que, peut-être même déplaisant que

d'obtenir des fufîrages dont la bannalité

rebute quand on les eftime ce qu'ils val-

lent fonciérement.

Beaucoup d'entre ceux de nos freres

que leur goût pour les fciences occultes

fixoit à Jérufalem avoient déjà abjuré

les principes de la religion juive pour

fuivre les lumières de la foi chrétienne

l'inftruclion de l'exemple décida fans peine

à les imiter ceux des nôtres qui étoient

venus les rejoindre ils délirèrent d'au-

tant plus la restauration du temple non

pour y faire couler le fang des victimesmais pour y célébrer par des marques

folemnelles de leurreconnoiflance les

effets de la miféricorde & la victime fans

tache, dont l'immolation récente & fur-

naturelle avoit aboli le règne des fuperf-

titions groflîeres pour y fubltituer les

adorations délicates, les hommages du

Page 42: L'Étoile Flamboyante Tome 1

36L' É T O I L E

pur amour cependant ils ne renonce-

rent point à la commémoration des rits

anciens dont les veftiges leur étoient

précieux & contenoient en quelque

forte le titre augufte de leur fondation

première réfolus feulement d'en conti-

nuer 1'ufage entr'eux avec de grandes

précautions & fous le fecrec le plus in-

violable ainfi les chrétiens vertueux

tremblants fous les Diodétiens les Domi-

tiens, & tant d'autres, pratiquoient dans

les entrailles de la terre dans l'obscurité

des catacombes les rits facrés de leur

croyance dont la perfécution & les cir-

conftances leur interdifoient l'ufage public

& l'aveu folemnel.

Le rétabliffement du temple pris fous

des afpefts différents fembloit être en

général le vœu de tous les croifés & le

but effentiel de la croifade. Nos freres

nos refpeltables auteurs ayant conçu

combien il étoit intéreffant de ne pas fe

laiffcr démêler fur leurs projets ultérieurs,

jéfultants à coups fûrs à l'aide du temps,de la bonne conduite Si de l'enfemble

s'annoncèrent fimplement comme prenant

Page 43: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.37

part à la caufe commune mais pourtant

avec quelques traits plus diftin&ifs &

qui les fit mieux valoir ils fe dirent iffus

des premiers ouvriers Maçons qui avoient

travaillé à l'édifice de Salomon, & comme

tels dépofitaires de tous les plans me-

fures & décomptes de la premiere bâtit.

fe ils parurent dès ce moment fe con-

sacrer à la nouvelle conilru&ion fe def

tinant d'avance à une architecture fpécu-

lative, qui fervit à déguifer un point de

vue plus glorieux. Dès lors ils prirent le

nom de Maçons livres, fe préfenterent à

ce titre aux armées croifées & fe réu-

nirent fous leurs enfeignes. L'avantage de

pouvoir fe dérober aux regards curieux

& jaloux, aux malins commentaires de

fenvie ne fauvoit pas les chevaliers de la

Palejline de la curiolité que leur particu-liere méthode d'aiîbciation & leur dé-

nomination même devoit naturellement

exciter ils le prévirent. Les Européens

prirent goût à ce genre de fociété qui

paroilîoit vivre ifolée ôc modelle au mi-

lieu d'une foule pétulante & ambitieufëils défirerent d'y être agrégés les che-

Page 44: L'Étoile Flamboyante Tome 1

38L' É t o i l k

valiers préfumant qu'en tout état de came,

il deviendroit utile d'intéreffer différentes

Dations à leur querelles ou à leur deflein

adoptereut une maniere d'inauguration

fixe, qui ramenant toujours au point de

direction fût propre, ou à écarter la foule

par la difficulté des Curfaces, ou à efiayer

la qualité l'ame Se l'efprit des fuiets

mais fans rien innover, ils remirent uni-

quement en vigueur les pratiques ufitées

lors de leurs primitives inftallations. De-

puis, des copiftes infideles ont introduit

ces formulaires bizarres ces analogies

contraintes ces fymboles équivoques

qui étonnent qui fatiguent qui font

fpe&acle dans un camp. Au milieu d'une

armée compofée de plufieurs milliers

d'hommes différents entourés d'enne-

rois tout devoit rendre nos freres timi-

des, & prudents pour éviter la furpri-

fe, ils renouvellerent l'ufage des fignaux

& des mots d'ordre. Delà, par une fuite

de l'efprit d'imitation ces paroles ces

fgnes ces attouchements convenus uni-

verfellemenî & c'eft leur feul mérite

chez le peuple Maçonnique précautions

Page 45: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 39

nécefiaires difent- ils pour fauver leur

fecret des atteintes de la curiofité de la

trahifon ou de la publicité de-là fans

contredit toutes les cérémonies payées

jufqu'à nous, & obfervées fans change-

ment notable dans les trois grades qui

contiennent l'effence & l'efprit de la Ma-

çonnerie. C'eft à cette époque dont le

développement complet eft réfervé aux

feuls chevaliers de la Palejline dont la

feule indication fuffit aux Francs-Maçons

proprement dits qu'il faut inviolable-

ment rapporter l'origine de cet ordre

multiplié fi prodigieufement répandu fi

généralement j'allois prefque dire dé-

figuré fi totalement. Les chevaliers de la

Paleftine font donc les premiers & les

vrais Maçons ceux-ci néanmoins, c'dl-

à-dire, les Etoffais de Saint-André d'Ecof-

fe, peuvent fubfifter indépendamment

des autres la théorie des derniers eft liée

à la taâique de leurs auteurs mais fans

un befoin réciproque fans une chaîne

néceffaire. La Maconnerie eft une belle

dérivation elle offre un fyftême fimple,

ingénieux que l'on peut fuivre qu'il

Page 46: L'Étoile Flamboyante Tome 1

40 L'É T O r t. E

faut fuivre & perfectionner la Palejline

elt un ordre fubfiltant par lui-même qui

peut être rétabli fans rien détruire

fans déplacement fans dommage pour

qui que ce foit, dont le régime en utile

qui mérite à tous égards d'être honoré

& qui rendroit inconteftablement les plus

grands fervices les Maçons perfection-

nés, redrelfés dans leurs modes dirigés

fans relâche leur vrai but ne feroient

pas une fociété moins avantageufe mal-

gré le cri de la calomnie qui les attaque

& les persécute celui là feul eft crimi-

nel, qui fait d'un Franc-Maçon l'ennemi

de l'état. Céfar accufé devant le fénat

rnifa pas d'autre apoftrophe envers fes

délateurs « Rome, le feul crimiel eft

celui qui m'accufe d'être ennemi de

» ma patrie. » ( Lucain dans la Pharfale).

Page 47: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 41

Ordre. Art Royal. Loge.

L A charrue des Camilles la bêche des

Curius (Voyei la Pharfale trad. de

Marmontel) a produit plus de héros, quele fang le plus illuftre n'a fouvent animé

de descendants honnêtes les grands évé-

nements fortent des plus petites caufes

la fomptuofité l'élégance le fade font

fréqnemment le tombeau des vertus la

pauvreté d'ordinaire eft la mere des belles.

avions quelquefois auffi les pauvretés

(eft-il permis de jouer le mot? ) enfan-

tent de prodigieux phantômes les grandsmots ne lignifient pas toujours de grandeschofes. Y a-t-il beaucoup de titres affez

folidement aflîs pour être à l'épreuve des

réflexions ? Monpremier

doute s'arrête

fur le nom que porte vulgairement la Ma-

çonnerie ORDRE DESFRANCS-MAÇONS.

Faifons un dilemme ou le public con.

cede gratuitement à nos freres cette

qualification briliante & qui diroit beau-

coup au détail alors ce feroit un abus

Page 48: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Al L'ÉTOILE

plutôt qu'un ufage ou les Maçons eux-

mêmes fe le font arrogé, poffejjîo valet

dit la loi ils s'en appuyent & l'habitude

prévaut. Au premier cas les freres ont eu

tort au fecond ils n'ont pas raifon.

Qu'eft-ce qu'un ordre ? Notion commu-

ne, réponfe fimple point d'emphafe.

Un ordre eft un corps quelconque dont la

fource eft connue, les pratiques décou-

vert, les réglements fixes le but déci-

dé, furilité prouvée & dont le crédit

tire fa force de la proteaion dire£te du

Souverain des diplômes de confirma-

tion, de la convention explicite entre les

princes d'avouer réciproquement tel ou

tel établirtement particulier fous telle

dénomination, à telles cond itions pour

telle fin & de lui accorder un degré de

confdération, qui foit la mefure de celle

que devra le public. Je ne connois que

cette définition.

Tous les ordres en général, religieux,

militaires, hofpitaliers ont des loix fla-

bles, permanentes réfléchies & feru-

puleufement maintenues. Il m'eft parvenu

en 1764, un mémoire très-bien raifonné,

Page 49: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 4J

fous le titreconfîtlérations fur la Maçon-

nerie, adreflë au V. f. de F. Préfident

à Mortier au parlement de M. C'ëtoit

l'ouvrage d'un Maçon judicieux dont le

cœur & l'efprit font excellents j'ai eu

le plailir de le connaître depuis & je

m'en crois plus heureux. J'aimerois à voler

quelques-unes de fes penfées tant je

leur ai trouvé de Juliette. Point d'ordre

» difoit il qui n'ait reçu immédiatement

l'inftitution de fon fondateur oit n'ait

» obtenu poftérieurement des rois des

» patriarches des papes une regle

» abfolue dont on ne s'eft écarté que

» lorfque la corruption a commencé de

» diminuer la ferveur mais ce n'en a

» pas moins été un crime aux yeux de

» ceux qui connoitfoient la force d'une

» obligation contractée à la face des

autels ou prêtée entre les mains d'un

homme regardé comme fupérieur

» avec vœu de s'y foumettre & de les

» exécuter ». Le premier caractère d'un

ordre eft donc l'émanation d'un pouvoir

légiflatif qui fonde ou qui autorife ainri

que la détermination de loix précises

Page 50: L'Étoile Flamboyante Tome 1

44 L'Éioile

pour la régie & le code des obilgations.

Approfondironsune Seconde qualité me

femble encore effentielle à tout corps

érigé fur le pied d'ordre je n'en vois au-

cun où l'on n'exige des preuves elles

varient d'objet, de forme, & reviennent

cependant au même. Le chevalier de

Malte eft d'abord examiné fur fes ancê-

tres, les caravannes eflaient fon courage

la force du tempéramment je cite

celui-là de préférence parce qu'il eft plus

journellement fous nos yeux. Les déco-

rations militaires font elles-mêmes le prix

de la valeur & du noviciat effuyé dans

les fatigues de plufieurs guerres dans les

occafions de rifque & d'éclat le char-

treux & la carmélite font également

éprouvés avant d'être admis le tableau

des devoirs paÍfe fous leurs yeux ils en

contrastent l'habitude un ou deux ans à

l'avance tous les états de la vie ont un

noviciat particulier & pour tout dire

enfin, il n'eft point d'ordre, fi l'ordre n'y

regne.

Les Maçons qui favoient fi bien à quoi

s'en tenir à cet égard devoient-ils fouf

Page 51: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 45

frir que le public déçu, les appellàt d'un

nom fi peu mérité ? Je ne vétille point

mais pour mon compte l'épithete qui

ne m'eft pas due m'a l'air d'une injure

je ne veux paroître que ce que je fuis. Les

Francs-Maçons fe feroient-ils eux-mêmès

attribué ce titre? Je n'ofe le croire. Le ns

fied fi mal à certains noms ils rapetifle

fi fort ceux qui veulent s'en exhaufler

Oh parmi les Maçons il y a tant de

gens faits pour connoître cette nuance

ils ne fe feront pas expofés à ce ridicule

d'ailleurs tout leur manque pour en légi-

timer la prétention. Apôtres zélés de

l'égalité des conditions de l'état primitif-

de la nature qui confond tout qui met

chacun au pair la hoblelfe n'a chez eux

aucun privilège les ordres épluchent un

peu la qualité des perfonnes. Quelle autre

épreuve citeront donc les Freres qui mar-

quent ce noviciat cette poftulence cet

euai, cette gradation néceffaire pour être

reçus dans leur corps ? Seroit-ce le ban-

deau, le calice les promenades les

enjambées les ? Vous remarquez que

je m'arrête à propos quand Sethos re-

Page 52: L'Étoile Flamboyante Tome 1

4<J L'É T O I L E

vint des pyramides il ne dit pas tout ce

qu'il avoit vu mais de bonne foi ap-

pellerons-nous cela des épreuves ? Au

furplus dans tous les ordres je ne crois

pas que perfonne avant de s'y faire

agréger ignore ni la nature du lien qu'il

va prendre ni l'objet des pratiques qu'il

embralfe, ni l'efpece des loix auxquelles

il va s'aftreindre quelle différence mes

chers freres tout proscrit la chimere

d'un titre qui ne vous eft dévolu par aucun

endroit & qui quadre trés-mal avec la

forte d'humilité & de modeftie que vous

affectez. Confraternité, c'eft le mot j'au-

rois dit confrairie fi depuis quelques années

on n'avoit prononcé une forte d'anathême

fur les affociations de ce genre & je ne

veux rien dire qui puiffe vous nuire. Dans

Paris il en fiibfifte une à laquelle le

nom d'ordre iroit mieux qu'à vous ce

font les confreres de Jérufalem qu'une

plaifanterie nomme communément les

freres de l'aloyau depuis un certain

foupé où tout étoit Roosbif. Ces honnê-

tes gens font des a&es publics, qui prou.

vent la pureté de leur inftitut les réful-

Page 53: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 47

tats en font heureux pour l'humanité à

certains jours folemnels ils délivrent un

nombre de prifonniers ils acquittent leurs

dettes ils ont une caifle obfervez bien

ils ont une cahTe dont les deniers s'em-

ploient effectivement à fotilager les infor-

runés on peut en voir le fonds on en

fait le compte & l'emploi des fyndics

prépofés maintiennent cette adminiftra-

tion leurs règlements font vieux, mais

fuivis on m'a même affuré qu'en certains

cas ils concouroient avec les peres de la

rédemption aux débourfés néceflaires

pour le rachat des captifs de très-grands

feigneurs à ce que l'on dit font mem-

bres de cette fociété noble dans fon ori-

gine fans doute, & dont les procédés con-

tinuent d'être nobles elle eft avouée du

Souverain des lettres-patentes l'autori-

fent, les magiftrats la protègent, les gar-

diens de la fùreté publique, veillent au ref-

pecl: Si aux égards qu'un corps mérite tou-

jours, Se cependant on ne dit nulle part,

l'ordre de Jérufalem. Une croix à la bou-

tonnière des gants blancs un gros bou-

quet, un grand cierge une palme à la

Page 54: L'Étoile Flamboyante Tome 1

48 L' É T O I L E

main, chofes qui valentun triangle de cui-

vre, un tablier de peau un maillet, des

gants blancs un cordon n'importe la

couleur, car vous êtes fur ce fujet, les dé-

pofitaires du grand prifme ne lui ont point

fait donner le nom d'ordre & vous vou-

lez que l'on vous l'accorde vous préten-

dez plus J'anecdote eft trop plaifante

pour l'échapper. Un confrere de Jérufd-

iem mourut il y a quelque temps, il étoit

Franc-Maçon le maître de la confrairie

en exercice cette année, étoit aufli Franc-

Maçon lors de la pompe funebre à la-

quelle tous les confreres agitent, il fut

queftion de nommer ceux qui porteroient

les coins du poële marque d'honneur

dont la petitetre de l'efprit humain amufe

la vanité des vivants fans utilité pour le

mort fur ce grand débat le maître pré-

tendit afligner ces poftes tant brigués à des

Francs- Maçons parce que le cadavre

l'étoit & qu'à tous égards affuroit-il

la Maçonnerie devoit avoir le pas fur la

confrairie de Jérufalem on penfa faire

trente enterrements au lieu d'un, mais les

bourgeois de la cité fainte l'remportèrent

avec

Page 55: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 40

Tome I. C

avec justice fur ceux qui n'avoient fait jadis

qu'ybâtir une églife. De la fottife d'un

particulier, je n'argumente point augé-

néral ce feroit une abfurdité mais je

rapporte un fait vrai que prefque tout

Paris connoît fit j'en conclus que fi les

Maçons étoietn effectivement un ordre ils

n'auraient pas eu le de!fous Re:ranchons

donc ce titres ou travaillons à le mériter;

en attendant fimp!ifions la fociété, à

la bonne heare des amis des freres qui

fe raffemblent feront une très bonne

fociété fi nous ne fortons jamais de ce

double cara&ere dont les obligations

font fi étendues.

Après vous avoir difpttté le nom d'or-

dre, vous m'allez croire mes chers

freres d'humeur à vous barrer fur tout

mal- à-propos. Je ferai volontiers votre

apologifte, toutes les fois que cela fera

praticable, au moins tâcherai je d'établir

la plaufibilité des chofes qui vous intéref-

fent, quand elles feront fufceptibles d'une

tournureavantageufe c'eft le cas pour

le mot art royal.

Les Maçons font envisages, ou comme

Page 56: L'Étoile Flamboyante Tome 1

<;o L' Ê T O I L E

defcendants des ouvriers du temple oa

comme une fociété protégée par diffé-

rentes puiiTances & fous plufieurs regnes

ou comme une pépinière de philofophes

devinés l'étude des fciences & parti-

culiérement à celle de la nature, de l'al-

ehymie de la tranfmutation dont la

vafte carriere a fait le fujet d'up grade

connu fous le nom d'adepte ou fublime

philofophie & fera fuivant toute ap-

parence, l'objet d'un volume à ce petit

ouvrage. Je ne me propofe pas de conf-

tater dans ce moment, fous lequel de

ces afpe&s les Francs-Maçons préfére-

roicnt de fe faire remarquer quoi qu'il

en foit, le mot art royal, leur convient

également. L'édifice du temple ayant été

imaginé & conflruit fous un très-grand

roi qui préfidoit aux travaux les diri-

geoit, & déployoit toute fa magnificence

en cette occafion l'architeâtire dont on

ne cite aucun monument avant cette épo-

que, femble lui devoir fa perfection l'art

de la bâtifle mis dans Con jour par Salo-

mon, au moyen du petit chef-d'œuvre

que l'on lui attribue peut bien avoir de

Page 57: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. si

C 1

ce fait acquis le nom d'art royal. Je dis

petitchef- d'oeuvre parce que les fept

merveilles du mondc, n'étonneroient peut-

être aujourd'hui perfonne & que je n'en-

tends pas que l'on fe récrie fur le pont

du Gard fur le canal du Languedoc, fur

2'obelifqi.ie de Sixte-Quint fur les très-

hautes 5c furprenantes maifons du Pont-

au- Change Se tant d'autres fingularités

qui furpaifsnt de beaucoup le colore de

Rhodes les jardins de Sémiramis ou les

tombeaux des Mumies Egyptiennes cha-

que fecle a fon goût comme fes prodiges

tout roule dans un cercle & fe reproduit

après une révolution d'années. Les urnes,

les vafes les chiffons à la grecque que

j'appellerois à l'Etrufque parce que j'y

retrouve bien plus le goût des ornements

Tofcsns que les modèles Athéniens

toutes ces frivolités, aliments du luxe,

objets d'émulation pour les élégants de

fortune pour les artiaes de ruine pour

les acheteurs, ne font-ils pas une vieille

fauce réchauffée pour ranimer des pa-

lais blafés depuis long-temps fur-tout? Le

temple de Salomon peint aux faints vo-

Page 58: L'Étoile Flamboyante Tome 1

«il L' É TOI I L E

lûmes comme une machine vafie & fomp-

tueufe jugé par le bel efprit du fiecle au

toifé de la géométrie & à celui du rai-

fonnement, deviendra peut-être quelque

jour le modele d'un édifice du méme genre

.a-t-on jamais eu l'idée du vrai beau? N'eft-

ce pas un être de raifon ? Tout n'eft-il pas

relatif? A cela près, un roi fit l'entreprife,

un roi donna les plans un roi folda les

ouvriers un roi voifin envoya un fculp-

teur, un fondeur habile pour contribuer

à rétablUFement Tyr concourut avec Jé-

rufalem fart qui pour lors étoit au ber-

ceau, pour coup d'cirai fit un coup da

maître, les maçons qui y furent employés

eurent des fils ceux ci des neveux, qui

de race en race nous apprirent que ce fut

une chofe vraiment digne d'un founerain

l'art fut appelle royal d'accord fur les

objets qui ne tirent point à conféquence

qui n'impliquent pas contradiction il

fied mal d'épiloguer.

Si les Maçons, oubliant pour un inf

tant Salomon & fon édifice, s'annon-

cent fimplement comme une fociété

d'hommes protégés par différents fouve-

Page 59: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. «îs

C 3

rains& fous plusieurs règnes, leur art-

n'en pourra pas moins être appelle royal

d'aprèsla faveur particulière accordée

par les têtes couronnées, à ceux qui en

obfervoiem lespratiques Se les

allégories

Je ne veux rien vérifier fur cette parcie

c'eft aux hif'toriens auxchronologiftes

pénétrer ces fortes d'obfcurités je n'ai

ni leur talent, ni leur ftyle, ni leurs droits

je raconte voilà mon rôle. Dans les ren-

feignemcMS hifroriques du grade appellé

quatre fois refpeâable maître chevalier

Ecoflois de Saint-André d'Ecofle je

trouve, page 13« les architefr.es réduits

à un petit nombrepar les fatigues de

la guerre & le fort des combats ré-

folurent prévue tous d'aller former de

nouveaux éiablUFements en Europe

» plusieurs palTerent enAngleterre

avec

» le prince Edouard fils d'ilenri III

& peu de temps après ils furentappel-

lés en Ecoffe par le lord Stuard. Leur

» inflallation dans ce royaume date in-

» variablement ( calcul maçonnique que

» je negarantis pas) en 1307 on leur

accorda despofleflions & le

privilège

Page 60: L'Étoile Flamboyante Tome 1

L'É TOI I L E

o Spécial de maintenir les us de leur con-

» fraternité fous la condition naturelle

» de fe conformer aux pratiques com-

munes de la vie civile, aux loix du pays

( Ies amis du bon ordre fe feroient

» bien gardés de l'intervertir ) ils ont ob-

» tenu fucceflîvement la prote&ion des

» rois de Suéde d'Angleterre d'Irlande

» & d'EcoiTe. En Suede fous le roi

» lngo vers l'au 1 15. En Angleterre

» fous Richard coeur de Lion vers l'an

» 11 90 ôc fous Henri lîl vers l'an

» 1270. En Irlande fous Henri II, pere

» de Rich.ird l'an 1180. Essfin, en

» Ecoffe fous Alexandre III contem-

» porain de Saint Louis, vers l'an Il 84-

Vient à la fuite de tout cela l'hiftoire

de Jean fans terre une partie de celle

du confefieur de Guillaume le Conquérant

qui font aflez bien tiflues, & jettent beau-

coup de jour dans la chambre noire de la

maîtrife mais fans anticiper il faut

convenir que fi les Francs-Maçons ont été

étayés auffi authentiquement qu'ils le di-

fent, leurs occupations dévoient être fil'

blimes, avantageufes brillantes, dignes

Page 61: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 55

C 4

de l'attention des fouverains le titre art

royalne leur va pas mal il ne leur con-

viendra pas moins fi nous devons les

confidérer comme un grouppe de fages

appliqués à la découverte du grand œuvre.

A l'art royal pleins d'une noble ardeur

AinC qu'àtes fecrets rendons hommage

Tour bon Maçonles garde dans le coeur

Et de l'ancienne loge ils fonr l'image.

A moi divin Mathanafutt je t'in-

voque toi qui fus apperccvoir tant de

beautés dans le couplet de Collin com-

bien de vérités ne trouverois-tu pas dans

cette ftrophe? Echauffe-moi de ton en-

thoufiafme prête-moi tous tes di&ion-

naires je ne fais par malheur, qu'un

peu delatin, affez mal ma propre langue,

il me faudroit du grec oh du grec à

force 1Il n'y a que cela qui prend n'im-

porte, nous en ferons, Alin fait bien

des vafes de Corinthe Germain des urnes

fuperbes de je ne fais où.

A l'art royal. Il n'appartient guere

qu'aux rois de récqmpenfer les philofo-

phes d'apprécier leur travail d'efti-

Page 62: L'Étoile Flamboyante Tome 1

S6 L' É T O I l E

mer leur fcience & de protéger leurs

recherches: il ne convient peut-être

qu'aux fouverains. ou aux très grands

feigneurs de fe livrer aux effais que l'art

d'Hermes excite à tenter non que la

découverte efientielle foit par elle-même

difpend-iettfe fi l'on en croit Egidiui de

Yadés Avicenne Paracelfe Bernard

Trevifan, Geber l'Arabe George Riplée

Sindivogius Polonois Morien l'Herrnite

Jean Pontanus Phcenix, RaimondLulle

Nicolas Flflmmd & tant d'autres écri-

vains célebres fur cette difficile matière

celle qui bien combinée produiroit l'or

philofophique n'eft nullement chère.

Le germe de tous les métaux devant

être le même le grain fixe de l'or en:

la feule chofe à trouver dans la mina

informe élémentaire, principe principié

de tout ce qui exifte dans le regne mé-

tallique mais cette recherche induit à

tant d'autres opérations qu il faut un

revcnu royal pour y fournir.

Pleins d'une noble ar leur. C'eft le cas

ou jamais, il faut bien de la noblefle

& du définteretfement pour renoncer à

Page 63: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 57

c5

toutes vues d'ambition d'avancement,

prefqu'à foi- même &L s'enfoncer ainfi

dans des méditations abstraites, qu'il faut

fuivre fans relâche avec ardeur, Si j'ima-

gine aufîi près d'un feu bien ardent, bien

continu vive la philofophie pendant

l'hiver

Ainfi qu'à fesfecrets renrlons hommage.

On ne peut trop en rendre à la fubli-

mité de ce fecret qui relie toujours un

problème quoiqu'il ne foit plus une

équivoque. Le changement très facile du

fer en cuivre dont la recette & 1a mé-

thode fe lifent fort au long dans le qua-

trieme tome du théatre chimique eft

un argument invincible contre les incré-

dules, fur la poflibilité de la tranfinuta-

t'ton, & je ne penfe pas qu'aucune efpece

de connoitrance mérite plus d'éloges, ni

plus d'hommages que celle là.

Tout Gon Maçon Ies gardt dans le

cœur. Je le crois bien vraiment & de

toutes façons. D'abord je ne préfume pas

qu'aucun Maçon y foit encore arrivé

leurs idées font trop découfues ils font

trop de monde pour faire de la fi bonne

Page 64: L'Étoile Flamboyante Tome 1

58L' É T o L E

befogne Se d'ordinaire on ne dit pas

ce que l'on ne fait point d'ailleurs fi

les Francs-Maçons dans quelque coin du

monde avoient enfin à force d'étude

de patience & de fatigue obtenu ce fa-

meux fecret je fuis très-convaincu qu'ils

ne s'en vanteroient pas, qu'ils le garde-

roient dans le cœur, qu'ils n'en feroient

pas oftentation qu'ils n'en donneroient

pas le détail c'eft jouer trop gros jeu

l'humanité même ne gagneroit rien à

cette divulgation il eft très probable

qu'un fecret de cette importance ne fe

couche point par écrit auffi clairement

qu'une expérience phyfique on ne fait

pas de l'or comme du phofphore.

Et de l'ancienne loge ils font l'image.

Plût au ciel fi nous travaillions encore

fur les vieux errements, & qu'en effet ils

euflent été ceux-là nous ferions plus

fages plus favants & vraife mblable ment

plus riches. En vérité ce n'eft qu'aux en-

fants que l'on promet des images, il nous

faut mieux donnez de ta réalité dans

vos loges puifqu'enfin c'eft le nom de

vos afiemblées ne pourroit- on favoir

où vous l'avez pris 1

Page 65: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. S9

C 6

Une multitude quelconque érigée en

corps, déhgnation annexée de fait ;1 toute

fociété de perfonnes qui paroinant vivre

colleâivemenc fous les mêmes loix doit

nécefTairement avoir un mot diiVinft &

(ignificatif finon pour indiquer le genre

des opérations & du travail au moins

pour déterminer le lieu de réunion, &

l'atelier dos ouvriers. Les Francs-Maçons

occupés aux repréfentations allégoriques

de leur inftitut dans des féanecs régu-

lièrement dirigées par un chef Se. des

oliiciers adjoints pour les objets de dé-

tail, ont également adopté un nom leurs

aflemblées s'appellent loge, & c'eJt heu-

reufement une convention générale, reçue

dans tous les pays exprimée par toutes

les langues j'en fuis charmé pour eux,

car fi cette habitude n'étoit avouée qu'en

France exclufivement elle occafione-

roit trop de plaifanteries. Le génie de la

nation n'échappe guère les textes qui

peuvent fournir un bon mot ailleurs on

ne faifit pas fi bien le ridicule & les f-

militudes c'eft peut-être J'effet de la vi-

vacité de l'dprit, peut-être un peu celui

Page 66: L'Étoile Flamboyante Tome 1

6o L'Étoile

de la pauvreté de l'idiôme qui marque

à chaque inftant d'expreflîons pour pein-

dre la variété des objets des idées, &

fait jouer à l'équivoque à l'aide d'un fy-

nonyme.

Loge en François, fignifie une foule

de chofes l'empire du dieu des jardins

fc décore au printemps des loges les plus

agréables F'lore paroît continuellement

occupée du foin d'y élever un trône déli-

cat 6c brillant à la mere des amours

Paris eft le centre de ces réduits volup-

tueux, ou le foleil n'ofe éclairer les myf-

teres de la dcefle où Zéphyr rafraîchit

fans cette les foupirs brûlants des amants

heureux l'art fe concerte avec la na-

ture, tous deux d'accord s'empreflent

d'abriter le plaifir. Le laboureur a&if

que l'ardeur du midi attere laffc & def-

feche, n'a d'autres reffiuirces que fa loge

où pendant quelques heures après un

repas frugal, trifte prix de fes peines il

va reprendre dans les bras du fommeil

fes forces ?C fon courage. Que vois je

au coin de cette haie ? Glycere a-t elle

abandonné le foin de fon troupeau ?

Page 67: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 6x

Non l'oeil de la bergere s'étend.au plus

loin dans la plaine fes brebis que leur

toifon n'échauffe plus, bondiffent &. paif-

fent fans trop s'écarter, Glycere les voit

à l'ombre d'un feuillage frais dont les

branches adroitement enlafFées,. forment

une loge délicieufe ce fut le foin d'I-lifas,

il l'avoit préparée dès la veille. Deux

cents pas plus loin en defcendant

vers le taillis là, prefque fur les

bords de cette onde lympide j'apperçcis

Lubin pourquoi cette ferpe ? Que va-

t-il faire ? Une loge pour Annote elle

a promis de l'y joindre il y travaille

vivement les jeunes ormeaux ploient

fous fes efforts leurs fommicés fe tou-

chent, il les unit le dôme s'achève.

eh dans un endroit plus touffu plus

écarté plus Nombre ils feront deux que

voudroient-ils voir au-delà ?

Dans un autre canton un oifcleur

prépare le petit féjour où demain dès

l'aurore ü ira difpofer fes baguettes Se

tendre des pièges aux oifeaux impru--

dents, point de pipée fans une loge je

ne fuivrai pas la comparaifon je vous

Page 68: L'Étoile Flamboyante Tome 1

€l L' É TOI I L E

promets, elle nous meneroit trop loin

& puis pourquoi paner fi vîte ? Atten-

dons ce que fera ce chafleur endormi

dans fa loge où fans doute il fe tiendra

ce foir pour échapper à l'oeil du lievre

qu'il médite d'afîutcr mais quels éclats

de voix Quels cris partent de cette groffe

ferine Approchons, c'eft un gros dogue

enchaîné qui protège le domicile de fon

maître patrons un peu loin de fa loges

il pourroit nous atteindre d'ailleurs il

fe fait tard & je veux être à temps pour

le nouvel opéra. Quel monde Quoi

point de place, pas une première fe-

conde, troifieme loge tout eft retenu

les élégans s'étalent aux premières on

pourroit peut-être vous chercher un coin.

oui, dans cette petite loge. oh c'eft

pour des femmes qui ne veulent point

être vues qui ne viennent pas même

pour voir à une autrefois. J'irai faire

quelque vifite là là à cet hôtel à

droite. fachez fi l'on reçoit. Non

Monfieur. Voyez donc parlez à quel-

qu'un, frappez à la loge du fuifle du

ponier, faites écrire. Suivrons -nous ce

Page 69: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 6z

détail ? L'étendue du mot loge eft im-

mcnfe les bêtes féroces dans une mé-

nagerie font chacune dans une loge aux

petites maifons chaque fou a fa loge

gare le qui pro quo. Mais toutes les na-

tions font d'accord de ce terme pour

ce qui concerne les Francs-Maçons, ainfi

point de quolibets.

Comme le temple de Salomon eft tou-

jours la perfpeâive des Maçons de quel-

que point qu'on les regarde il eft à

fuppofer qu'ils ont pris le nom de loge

par une fuite de relations avec ce même

temple autour duquel il régnoit pluneurs

fallcs, plufieurs galleries confiâmes pour

raîTembler les ouvriers les minières

les étrangers avant ou après les fonctions

& qui peut-être leur étoient afïignées pour

logement ces emplacements dans la

langue originaire s'appelloient d'un nom

qui revient à celui de loge dans .la nôtre.

Peut-être suffi les Francs-Maçons auront-

ils emprunté cette expreflîon de la langue

Italique Allogio veut dire logement

parce que les congrégations fe faifoient

fans doute dans le logement du chef qui

Page 70: L'Étoile Flamboyante Tome 1

64 L'Étoile

préfidoit&

quel'on s'étoit choifi. C'eft

ainfi quechez certains chevaliers les lieux

d'ailemblée pour chaquediffère me na*

tion qui compofentces corps, & que

l'on diftingue du nom de leur langue

s'appellent aubergenom qui

n'eft pas

prislittéralement dans le fens mécani.

que queles François y donnent pour un

lieu quelconclueoù l'on boit & mange

mais dans le fens du mot Italien al6ergo

gîte, hofpièe, demeure, logement. La

première loge connue en Europe fut

dit-on inttallée à parle lord

Stuard en fuppofant le fait tel qu'il eft

énoncé par les L'coffoisde Suint-André

ry retrouve une preuvede plus en faveur

de l'opinion quivient d'être établie fur

le mot loge. A' la tenue d'un college

Ecoffois de Saint-André il n'eft pas

que(liondu

pavé mofaïquede fenêtres

de houppe d'étoile de colonnes ni

d'églifel'afTemblée eft cenfée dans une

des falle* dupalais

du Lord, où quel-

ques vertiges anciens fe trouvent plus

comme meubles quecomme fujet

de

méditation c'eft au logement du Lord

Page 71: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. a?

que les freres ferendent, c'eft chez lui

que tout fepaffe ce feroit effeaivemem

à cechef lieu, à

Edimbourg, fil'épo-

que eftfûre, que retiortiroit exclufive-

ment toute la dépendance néceffaire,

directe & abfolue ducorps maçonnique,

quoique depuis, en bien d'autresendroits,

il ait pu &puifle encore

s'érigerdes éta-

bliflementspareils dans les mêmes er-

rements, pour le mêmebut fur les

mêmesprincipes par le feul concours

de plufieurs bons freres qui libres par

eifence en nedérogeant pas au point

de direction n'ont befoin que de leur

volonté propre pour cetarrangement à

moinsqu'ils ne foient convenus d'admet-

tre privativement en telle on telle con-

trée, un fitpérieur, primat, chef, grand-

maître ou tribunalfuprême auxquels

ils feroient fpontanément fournis c'eft

alors une affaire dedifcipline ou de po-

lice particulière il ne leur feroit plus

loifible des'y fouftraire ils ne le pour-

roient fans interversion desregles reçues,

dont le maintien exact importe à la durée

de tous établUTemems & à leur valida-

Page 72: L'Étoile Flamboyante Tome 1

66 L'ÉTOILE

tion. Qui cadit à fillabâ cadit à toto

c'eft un vieil axiôme il faut être minu-

tieufement aftreint aux chofet de con-

vention, quand de leur obfervance rai-

fonnable ou futile dépend le fort d'une

fociété.

Profanes leurs idées fur le but de la

Maçonnerie celtes de plufieurs Maçon¡

cet égard.

L'IVRAIE croît malheureufement dans

les campagees de Jirufalem comme

dans le champ de Samarie ce fut un

jour la phrafe d'un Maçon vertueux def-

tiné par état à éclairer les autres & à

les inftruire cet homme qui joint à un

très-bon coeur un meilleur efprit & le

talent de bien dire peignoit ainfi d'un

feul trait toutes les convullions qu'éprouve

la maçonnerie depuis quelques années

& les profanations qui la dégradent fort

propos m'a frappé j'en faitis l'applica-

tion. Tous les profanes ne font pas ex-

clufivement ceux qui n'ont point été ini-

Page 73: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 67

tiés aux myfteres maçonniques c'eft à

ceux-là cependant que la fociété adreffe

journellement une épithete fi injurieufe.

Odi profanum vulgus & arceo Horace

par hafard n'étoit-il pas Franc-Maçon ?

il hait les profanes il les écarte vulgus

que l'on traduiroit par peuple popu-

lace, public, vulgaire ou quelque chofe

de pis s'il fe rencontroit tout cela ref-

femble au ton avec lequel les Francs-

Maçons parlent en général de tous ceux

qui ne le font pas. Il faut en tout pays

en toute fe&e en toute fociété qui fait

ce qu'on appelle bande à part qui

hait méprife ou craint ce qui ne tient

point à elle une exprefllon décidée

pour noter ceux qui lui font étrangers.

Le Franch Dog des Anglois eft un fo-

briquet commun à tout être qui n'a pas

comme eux, la fureur du punch l'usage

des perruques courtes l'efprit [ombre,

l'humeur & les manières rudes cette

nation d'ailleurs fi refpe£lable tout en

copiant les ridicules & les afféteries de

fa rivale la dételle de fi bonne foi

qu'elle ne fait pas mieux marquer fon

Page 74: L'Étoile Flamboyante Tome 1

68 L' Ê TOI LE

dédain pour tout ce qui n'eft pas né à

Londres ou dans le royaume qu'en ap-

pelianr tout étranger hrenchd François.

Dans les plus Maintes lettres, je vois en

général donner le nom de Gentils à tout

ce qui n'étoit pas Juif, comme fi l'abré-

viation du fexe viril faifoit une qualité de

plus ou un mérite de moins. Quelque

part on nommoir hayens indiftinâement

tous ceux qui ne facrifioient point à une

certaine idole. Aujourd'hui même dans

Rome tout ce qui ne baife point la pan-

toufle du faint pere paffe pour hérétique

il n'y a celendant pas grand myftere à

cela: Ceux d'Ofiris en Egypte d'EUujîne

en Grece de la bonne déeffe à Rome

tant d'autres de cette efpece, dont l'hif-

toire de tous les fiecles & de tous- les

peuples fourmille avoieut l'air un peu

graves. Personne, s'il n'étoit initié, n'ofoit

approcher de l'enceinte procul ejîote

profani on connoît ainfi tous ceux à qui

la participation aux fecretes orgies aux

ténébreufes pratiques étoit interdite.

Maçons auriez-vous pris de là cet ana-

thëme fâcheux- que vous prononcez fi

Page 75: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 60

librement ? vosmyfteres ont-ils

quelque

analogie avec ceux-là ?Pourquoi cette

paritéde

précautions fi lesfymboles fe

reflemblent fipeu ? laiiïez-moi vous in-

terpréter, vousn'y perdrez pas. Tout

hommequi s'applique à des découvertes

utiles ouqu'il croit

telles a befoin de

fe recueillir dans l'ombre le filence &

la paix tout cequi trouble l'attention,

l'étude dufavant, du fage, ou du

phi-

lofophe, fouille profane le Sanctuaire

de la fcience à tout cela je ne voisque

del'enthoufiafine il vous falloit un mot

pour l'exprimer vous avez choifi celui

de profanes foit. Mais ces hommes à

quivous ne permettez pas de vous re-

garder.

Ils ne (aurontpas feulement comment

» boivent les freres.

Leur défendrez- vous peut-être auflî

d'avoir leurs idées fur cequi

vous con-

cerne, vous occupe vous unit fur ce

que vous faites fur ce quevous pro-

jettez de faire ? lahTcz-moi dire ce qu'ils

en pensent, j'efraierai enfuite de rap-

Page 76: L'Étoile Flamboyante Tome 1

70 L' É T O I L

procher ce que vous en croyez vous-

mêmes.

Ce n'eft pas d'après les opinions diver-

fes fur l'origine de la Franc-Maçonnerie

que le gros du vulgaire intitulé profane,

peut ftatuer fur le but des Maçons il eft

cencé que le public ne doit rien favoir des

hiftoires ou des fables, qui fe débitent

dans les toges & que le peu qui en au-

roit transpiré dans quelques mauvais livres

tel que le Franc-Maçon trahi les Maçons

icrafés le fecret de la Maçonnerie di-

vulgué & plufieùrs autres rapfodies aufll

froides, auffi calomnieufes n'eft en effet

que la rêverie de quelque tête folle l'in-

vention de quelqu'auteur famélique ou

tout au plus la vengeance de quelque

mauvais fujet difgracié. Très-peu de gens

raifonnables partent de ces notions fuf-

pe&es prefque tous s'arrêtent aux fur-

faces c'eft peut-être le feul moyen d'ar-

bitrer à peu près fur une chofe que fou

ne connoît point au fond. Mais parmi

les hommes qui s'avifent d'obferver, de

combiner & de s'expliquer, combien

d'examinateurs différents qui ne font at-

Page 77: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 7r

fe£és que relativement à leurs payons

particulieres politiques dévots cu-

rieux, favants ignares oififs grands

feigneurs petit monde magiftrats

artifan cafuitle, hiftorien artilte c'eft

bien le même peuple mais ce n'eir. pas

le même coup d'oeil. Les moins mal in-

tentionnés fe retranchent à croire que

l'unique but eft celui de l'amufement &

que tout le fecret co:ï(ifte à faire foup-

çonner que l'on en a un. Le gourmand

nous apprécie fur la délicatefle de nos

repas & la célébrité du traiteur l'ivrogne

fur les petits excès que malgré la févérité

des regles, l'intempérance ou la longueur

des féances occafione qûelquefois

l'homme charitable fur quelquesaumônes

faites à propos, chacun juge à fa façon.

Le dévot, fur un fervice folennel chanté

avec pompe dans telle ou telle églife

encore depuis peu dans certains diocefes

nous elt-il défendu de prier pour les dé-

funts oh j'ai fur cela un porte-feuille

d'anecdotes uniques bien bonnes bien

fcatida!eureî bien méchantes Le ma-

giftrat fe décide fur le myilere que nous

Page 78: L'Étoile Flamboyante Tome 1

72. L'ÉTOILE

mettons à nos afremblées chofe que la

police a droit d'improuver le grand fei-

gneur fur ce mêlange des conditions le

petit homme J'anifan fur l'honneur

d'être airs près du gentilhomme & d'ofer

choquer avec lui le favant fur la chro-

nologie de notre inftitution j l'ignare fur

l'air dofte que nous affedons j l'homme

oifif, fur la politeiïe de nos œuvres réel-

les l'hiftorien fur nos chroniques l'ar-

tiftefur nos bijoux le politique fur notre

difcrétion qui néceffairement à fon avis

cachequelque projet dangereux pour

l'état le caCuifte ôh celui-là nous

traite au plus grave mais n'ouvrons point

la boëte aux péchés de forte enfin qu'à

raflembler les opinions de toutce monde,

le but des Maçons fei oit tout à la fois

de rire d'autrui d'inquiéter fur leur

compte de fe brouiller avec les magif

trats, d'effrayer les fots ,d'embarrafler les

gens d'efprit, foulager le prochain man-

ger beaucoup boire davantage avilir

le noble illuftrer le roturier faire ga-

gner lesmarguilliers tromper les hifto-

riographes occuper les artifles ma-

chiner

Page 79: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 71

T'ome 1. D

1

chiner la l'édition & fâcher les prêtres

quel contraite

Ce portrait-là n'eft pas fort àvotre avantage

Mais malgré vos défauts, je vous aime à la rage.

Oui mes Frères je vous aime, &

de tout mon cœur & c'eft par cette

raifon que je vais vous gronder pourquoidonner prife fur vous ? Montre mot ta foi

par tes oeuvres, c'eft une fentence qui re-

vient à tout ou laiffez- vous deviner

tout-à-fait, je n'y vois qu'un triomphe

fûr ou ne montrezque des vertus réel-

les, d'inflitut & de pratique. Je fais par-

faitement que c'eft au fond votrerégime,

que votre architecture confifte effective-

ment à bâtir des prifons pour les vices, &

destemples pour la vertu; mais il ne fuf

fifoit pas que la femme de Céfar fût

chafte il falloit aufli qu'elle ne fût pas

foupçonnée. Ce n'efi point ici la place de

dilferter à cet égard nous en traiterons

plus longuement au chapitre de la ré-

forme que je crois polfible & qui en

vérité feroit bien néceffaire. Ii fied à des

hommes honnêtes dans toute l'étendue

Page 80: L'Étoile Flamboyante Tome 1

74L' É TOI I L E

que ce mot peut avoir d'être jaloux de

l'opinion même de ceux qui ne les con-

noiflent pas. Cela s'appelle je crois être

en bon prédicament. Que n'êtes-vous là,

Sancho vous diriez bien aux Maçons,

bonne renommée vaut mieux que ceinture

dorée. Aurefte, je Cens bien que tant que

vous le voudrez chacun fera profane à

votre égard & que perfonne ne péné-

trera votre but cela feroit fupportable

ii tous entre vous faviez précifément à

quoi vous en tenir mais la plus grande

partie des Maçons eft à la gamme éga-

rée fur ce fujet à quoi cela mene-t-il ?

d'où cela vient-il ? Ecoutez.

Si les Francs-Maçons étoient une fois

d'accord fur la vérité de leur origine, ils

le feroient bientôt également fur le but

unique, effentiel, indivifible de leurs tra-

vaux s'ils m'aflbrent n'en avoir qu'un

moral, je m'en tiendrai là & tout fera

dit pour le moment je renverrai les

réflexions à l'endroit où je me propofe

de développer en effet cette morale &

de démontrer victorieusement pour eux,

qu'elle eft faine pure excellente ana-

Page 81: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 75

Dz

logue à tous les grands principes, qu'ellee/l tout à-fait propre à rendre les hom-

mes meilleurs; je n'examinerai pas même

s'il eft poffible que depuis tant de fiecles,tant de :êtes aient prêté une oreille atten-

tive à de fimples prédications car ce ne

feroit que cela: plus habiles que les Ofiri-

tes, que lesMages, les

Gimnofophijles les

Exegetes, les Flamines, les Druïdes, les

Jérémie lesJean.Baptifle les Paul les

Sabbas, lesGrégoire les Bernard les

Bourdaloue lesMaffillon les feuls

Francs-Maçons auront eu le fecret de ne

pas ennuyer & d'inftruire je dis plusde ne rien enfeigner de faux de perni-

cieux, de déteftable d'abfurde d'an-

noncer toujours des vérités dures & cou-

rageufes, de les faire goûter, applau-

dir, Cuivre & de fixer un auditoire auflî

nombreux Quoi l'ingénieux lettré qui

parcourt avec tant d'érudition de fineffe

& de véracité les différentes fociétés exif

tantesdepuis la naiffance du monde, qui

montre fi bien qu'en tous temps, en tous

lieux, des hommes ont prêché les hom-

mes, fans fuccès fans fruit au détri-

Page 82: L'Étoile Flamboyante Tome 1

76L'Étoile

ment même de la raifon & de l'humanité,

aura négligé de favoir qu'une confédéra-

tion fubfiftante peut-être avant les croi-

fades, à coup fur bien plutôt que la guerre

des Albigeois & les fureurs de la ligue

avoit le privilege exclufif de faire d'im-

menfes fermons qui ne finitient plus, qui

néceffairement fe répètent, qui pourtant

ne fanent pas attachent perfuadent

corrigent les hommes épurent le cœur

& font exactement utiles cela fe con-

çoit-il? non. Auffi le but moral n'eu-il

pas le point dire& des Francs- Maçons,

c'eft au plus un acceflbire heureux, dont

la reflburce adroitement ménagée peut

amufer quelquefois t'écrit, peut être ef-

fleurer le cœur & contenter toujours

la paflïon & la vanité du harangueur qui

s'y exerce. Pourquoi d'ailleurs cette va-

riété de harangues ? Vous êtes uniformes,

mes Frères fur le cérémonial à quel-

ques bagatelles près on balotte on

vexe on étourdit, on inquiete on in-

troduitle candidat à Stockholm de même

qu'à Paris on lui diftribue pareille por-

tion de connoifiances il obtient même

Page 83: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 77

D 3

volume de lumières on lui apprend les

mêmes Signes les mêmes geftes les

mêmes mots pourquoi fi l'on convient

des formes ne pas fe concilier fur le

fond ? Je le dirois bien fans la crainte

de vous déplaire trop de gens fe mêlent

du métier car c'en eft un aujourd'hui

trop de gens s'en mêlent, vous dis-je, &

cela le gâte. Sans choix fans dignité

fans génie fans acquis fans mérite

l'homme qui peut payer la taxe acheté

tous les jours le droit arbitraire de trom-

per les autres le voilà colloque il ufe

auffitôt du privilege. Il inftruit ceux qui

fe préfentent ou d'après les notions qu'il

a conçues lui-même elles font prefque

toujours louches fauffes abfurdes 8c

très-gauchement exprimées ou bien c'eft

un maître qui n'aura d'autres infpirations

que celles de fon intérêt perfonnel pour

faire valoir fa marchandife il emploie

le peu de judiciaire dont le ciel l'a

pourvu, à démêler le goût, le genre

l'efprit, le tact de l'afpirant l'effai fini

l'hilioire fe fabrique parce qu'enfin il

faut à quelques égards tâcher de renvoyer

Page 84: L'Étoile Flamboyante Tome 1

78 L'Ê T O I L E

content celui qui vient de payer très- cher

un vocabulaire vuide de Cens une céré-

monie vuide de chofes. De pareils pré-

cepteurs, de tels élevés des Maçons

de cette trempe & c'eft le plus grand

nombre que peuvent ils connoître ef

timer, imaginer? J'ai vu cinq a fix cents

réceptions dans ma vie je n'ai jamais vu

de récipiendaire fatisfait ou convaincu

quelques fanatiques ébahis quelques fots

émerveillés dans les loges les plus polies,

le quart d'heure de Rabelais vient à la

fuite de tout cela, & fi l'on y prenoit

garde on remarqueroit aifément que

c'eft presque toujours la pierre de touche

de l'opinion du fujet. Bien de nouveaux

reçus Ce taifent & demeuren; éblouis

j'en ai démêlé la caufc elle eft phyfi-

que quand d'un air vif, d'un lieu très-

éclairé l'on me traduit tout-à-coup en un

endroit fombre où il ne regne ?.u plus

qu'un demi-jour, je n'y vois rien fi d'un

four on me conduifoit au grand foleil y

verrois- je davantage ? t'étonnement ne

prouve ni la perfuafion ni le plailir:

un candidat peut être Surpris, fans doute,

Page 85: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 79

D4

de l'air férieux dont on l'accueille de

la contenance de ceux qu'il rencontre

quelquefois de la préfence de certaines

gens qu'il n'attendoit pas là il peut être

furpris du ton dogmatique dont on lui

parle fi le maître faitun peu verbiager

il peut l'ètre des promenades qui l'ont

fatigué il peut l'être. mais j'en dirois

trop que tout cela réuni leii faire fuppo-

fer quelque chofe d'ultérieur Si de plus

efienticl je le comprends on aura d'ail-

leurs grand foin de lui promettre un plus

grand développement à mefure qu'il avan-

cera en grades, car il faut filer l'intérêt

foutenir le zele préparer des fonds

mais fomme toute que lui en refte-t-il?

qu'a t il apperçu qu'a t il appris ?

& ceux qui l'initruifoient, que favoient-

ils eux-mêmes? rien, oui, affirmative-

ment, rien. 11 n'y a pas deux cents Ma-

çons qui fachent ce qu'ils font ni à quoi

ils vifent. L'Adamite ne peut rien con-

clure. Le Noachite n'a rien à prévoir

tout au plus & ce (croit le pire en

rapprochant le fouvenir du patriarche

qui dit-on planta la vigne avec l'habi-

Page 86: L'Étoile Flamboyante Tome 1

8o L'Étoile

tude des fréquentes libations atrx ban-

quets, il augureroit que nous aimons à

boire ce point de vue crapuleux ne feroit

pas une conjecture flatteufe. Quantau Sa-

lomonite, à votre avis, Meffieurs que doit-

il croire? à tout prendre qu'a-t il appris?

qu'un roi fage bâtit un beau temple il

le favoit que ce temple fut détruit &

que quand une maifon en: tombée il

faut la rebâtir fi l'on veut y demeure

encore texte pompeux & bien intéref-

fant joignez- y la maladrefle de déplacer

continuellement tous les meubles de ce

temple de culbuter la mer d'airain

cafter les colonnes tranfporter le chan-

delier, découvrir l'arche parfumer

crayonner, éclairer obfcurcir tapifler

de bteu de rouge de noir un édifice

dont les parois étoient revêtus de lames

d'or voilà l'objet. Arrive à la traverfe

un induré de fraîche date qui embou-

che une trompette plus bruyante Conne

l'alarme & tout de fuite la retraite des

enfants d'Ifraël, leur fortie de Babylone,

leur délivrance leur arrivée à Jérufa-

lem, où tout eft fans deflus deffous

Page 87: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANT¡:- 9.

D S

leur ardeur à remuer des décombres

& voilà lamaçonnerie renouvellée voilà

les manœuvresérigés en

chevaliers l'oi-

feau furl'épaule, & la

pique à la main.

Un foleilplus lumineux éclaire

l'Orient

c'elt làqu'il faut ailer tous les ouvriers

ferangent de ce

côté ilsrebâtiront

difentils, l'édifice oui, comme Nem-

broth acheva fa fameufe tour en tout

cas c'efttoujours le même

but il n'a

rien de fâcheux maisgardons au fur-

plus la foijurée. Tout ce

qui déroge au

caractère decitoyen de fujet fidèle

d'hommequi refpefte les

loix répugne

à l'honneur à laprobité, & n'en: point

la thefe desMaçons cependant un am-

bitieux enthoufiafie veutexpliquer l'énig-

me, il ofeprefque arborer l'étendard du

défordre & tenter de relever uncorps,

avili par fesœuvres, détruit

par les loix,

profcrit par les princes. Conquêtes pof-

feflîons honneurs, tréfors, vous êtes

des mots biendangereux le

mensonge

vousemploie quelquefois au profit de

l'intérêt aumépris de la juilice cette

tnaniere d'échaufferles efprits eft terrible:

Page 88: L'Étoile Flamboyante Tome 1

si L' É TOI LE

montrer du pofitif ou du probable à la

cupidité c'eft interdire à la raifon l'exa-

men des conséquence. Quelques Maçons

cependant ont eu la foibletie de carefier

un temps cette chimere. D'autres, par-

tifans des fecrets de la nature la tête

remplie des métaphores du roi prophete,

de quelques-uns de fes emblêmes du

fceau m;rveilleux & de la clavicule de

Salomon n'ont point héfité de fpéculer

d'après cette hypothefe le ftudieux qui

n'eft point ennemi de l'aifarrce & de ce

qui la procure, a cru appercevoir la

fource des biens & la vraie terre pro-

mife, eft-il le moins Cage? C'eft le plus

tranqui!le, j'en répondreis. Mais, ce ca-

hos d'idées qui fc choquent qui n'ont

ni fuite ni liai[on ni principe ni dé-

finition, qui me le débrouillera Cent

mille hommes ont ils pu s'afl"ujettir à des

pratiques fuperficielles & prefque bouf.

fonnes ? ont-ils pu s'en occuper fix à fept

Siècles pour atteindre des objets fi vagues

& fi découfus ? non les Maçons fe

trompent en général, ils ignorent l'ori-

gine, ils méconnoilfent la fin. Quelle eâ-

Page 89: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 8i

D 6

elle? ô vous quime

queftionnez,êtes- vous

digne que je vousla dite ?

quand je pourrois

oublier mes devois manquer à mon

honneur trahir mon fecret & mes fre-

res, ce que je ne ferai jamais méritez-

vous que ce foit en votre faveur ? fi déjà

vous ne m'avez pas devinéfi ce point

mathématique qui n'eftperceptiblequ'aux

yeuxde l'entendement, n'e(1

pas encore

démêlé parle vôtre à travers les voiles

dont mesengagements

m'ont forcé de

le couvrir enfin fi moins habilesque

le coq d'Efope,vous n'avez

pasfu trou-

ver la perle reïtez fur fesentours c'efi:

un fopha digne de l'imbécillité.

Perles confacrées. Abus destermes,

refpecl des nombres.

U N petit terrein près d'Utrecht, fert

d'afile à une fe£re quel'on nomme

Hcrneutter le chef difparutun jour

avec la caiffe de la fociété on rai-

fonnalong temps fur ce qui pouvoit

réunir cettepoignée

de monde fur

Page 90: L'Étoile Flamboyante Tome 1

L'É T O LE

leur do&rine leurs ufages leurs

moeurs leur maniere de vivre leurs

reffources & leurs projets. Mais ces hon-

nêtes gens tranquilles dans leurs retrai-

tes, fuivoient les loix & payoient le

tribut à l'état n'incommodoient per-

fonne, travailloient enfemble vivoient

en commun rêvoient à leur aife on

les oublia ils fubfiftent. Un petit en-

clos dans chaque ville contient à cer-

tains jours une vingtaine de Francs-

Maçon, leur caifle eft quelquefois

idéale fouvent le maître s'en approprie

les fonds. On s'eft occupé long- temps

du lieu qui les unit de leurs ufages

de leurs moyens, de leurs projets de

leurs plaifirs mais ces honnêtes gens,

décemment gais dans leurs petites fêtes,

obéiflent aux loix acquittent les taxes,

adorent le prince chériuent la patrie

& la fervent n'infultent perfonne tra-

vaillent entr'eux mangent enfemble

rêvent à leur aife on les oubliera, ils

fubfideroat. Un voyageur qui par hafard

aurotr pénétré dans l'enceinte des Her-

neutur s'il y avoit apperçu des ridi-

Page 91: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 2<

cales & des vérités de la folie & des

vertus s'il croyoit en leracontant

pouvoir défabufer le public, éclairer

peut-être même réformer ces bonnes

gens fans divulguer abfolument leurs

pratiques auxquelles ils attachent un

myflere qui leur plaît car il n'eft jamais

permis de troubler la joie depersonne

dût-elle nous fembler abfurde ce voya-

geur ne le devroit-il pas ? A titre de

citoyens de l'univers l'homme qui voit

& qui obferve n'cft-il pas comptablede fes remarques ? La premiere des

fociétés c'eft le monde en généralfrere de tous les hommes, on doit à

l'enfemble avant de devoir aux parti-culiers rendons à l'un fans manqueraux autres s'il en réfulte des réflexions

qui aient l'air de la plaifanterie, fera-ce

ma faute ?

L'habitude & la facilité des languesn'eft pas donnée à tout le monde ce

n'eft pas toujours le fruit de l'étude la

nature a organifé certaines têtes de

façon à recevoir aifément l'empreinted'une foule de mots dilfemblables &

Page 92: L'Étoile Flamboyante Tome 1

66 L'ÉTOILE

étranges, que la mémoire retient fans

effort fi c'eft une grande utilité, c'eft

dans le vrai un très petit mérite &

avec lequel on fait bien peu de chemin

dans le pays de la fortune j'ai droit de

l'allurer pocitivement. Entendre l'idiome

de plufieurs pays, eft un agrément fans

contredit pour celui qui le poflede on

n'eft étranger nulle part mais j'en ap-

pelle à ceux qui ont ce joli talent, parce

que l'égoïfme eft un ridicule & qu'il

eft fot de Ce citer au-delà du lan-

gage des nations • n'eft-il pas encore

pour chacune un jargon d'utage dont

le formulaire confifte en certaines paro-

les consacrées defquelles on ne peut

fe départir fans avoir l'air peuple le

ton commun ? Je fais un pays où l'or-

gueil des titres eft l'élément national

au point que les hommes divifés en

première féconde & troifieme clafle

n'ofent, fans s'avüir, communiquer avec

leurs femblables d'un rang inférieur

chez eux le diûionnaire des qualités pour

eux-mêmes qui quelquefois n'en au-

roient pas une bonnes eft plus étendu,

Page 93: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 87

plus riche que le furplus de la langue,

c'eft précifément un jargon de conven-

tion. Peut-être les grands font-ils à plain-

dre d'avoir befoin que fi fouvent on

leur répète les titres de leur naiflance

ou de leurs dignités oublieroient ils

fans cela tout ce que leur élévation &

les jeux du hafard leur impofe plus

qu'aux autres hommes ? Que l'on eft

petit, quand on fe fait ainfi toifer à

tout moment Au refte cela n'eft pas

fait pour exprimer toujours des idées.

Les phrafes miellées des Italiens qui

complimentent, qui trompcnt, ou qui

font l'amour ne tiennent pas à l'effence

de leur grammaire. Le grave Efpagnol

ajoute à la majeflé de fa langue des

mots d'ancien pour tous les objets

qui fait fi les Anglois n'ont pas un lime-

ment particulier en certains cas? Dans

une des plus froides régions du nord,

la bonne compagnie c'eft-àdire, la

cour ou la très-vieille noblelfe, car il

n'y a point de tiers état dans cette con-

trée, n'a-t-elle pas adopté la méthode

d'adoucir d'autant plus une langue, déjà

Page 94: L'Étoile Flamboyante Tome 1

88 L'Étoile

gracieufe par elle-même, en alongeant

plufieurs mors d'un diminutif, par des

fyllabes finales qui marquent la ten-

drefl'e, la civilité la colere ou la haine,

fuivant la confonnance de leurs terminai-

fons. En France plus que par-tout ail-

leurs, combien d'honnêtes gens font dans

le cas d'ètre neufs fur le jargon reçu?

Il en eft un pour la femme de qualité

la fille la grifette ont aufli le leur

le marquis l'homme de finance le

préfident & le capitaine s'expriment tous

différemment, la nuance eft fenfible dans

la même ville l'abbé de la rue Saint-

Louis ne compte pas fiélégamment

qu'un petit collet dufauxbourg Saint-

Germain. Chaque quartier a fes us, cha-

que cercle a fescoutumes les idées

varient comme les chofes les expref-

fions comme les idées. Une petite maî-

treffe abfolue dans fon domaine con-

facre des mots qui ne font entendus que

de ceux qui l'entourent chaque fociété

ufe du privilege dans le petit coin qu'elle

occupe pourquoi lesFrancs-Maçons

qui prétendent refferabler f\ peu au telle

Page 95: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. go

des hommes n'auroient-ils pas auflî le

droit d'avoir un ftyle particulier ? L'ama-

teur intelligent qui juge unchanteur

un violon dira de bonne foi Cet

homme aquelque mérite mais fori

ftyle n'eft point fait il n'eft point à

lui il a Pexpreflîon de tout le mondece n'eft point encore un talent décidé

je prononcerois peut-être de même fi

j'étois riche homme à la mande ou

bon muficien il faut donc une maniere

de dire qui ne foit pas celle des autres,on ne réuffit que par-là. Maçons, feroit-

ce la caufe de vos fuccès ? parlez au

public & très-hautement le langage de

vos loges je garantis qu'il eft à vous

feuls & que perfonne ne l'entendra.

Beaucoup d'hébreu dont vous ne vous

doutez point & que vous eftropiez

comme je ferois l'arabe, voilà votre fort.

Par le choix bizarre des noms propresles plus choquants & qu'il faut épeller,

car qui les pourroit prononcer du pre-

mier coup ? vous accablez vos recrues

d'un poids dediphtongues indéchiffrables

quine

peignent rien, ne fignifient chofe

Page 96: L'Étoile Flamboyante Tome 1

goL' É T O I L E

quelconque &n'expriment que le carac-

tere que vous leur prêrez. Après avoir

épuifé la langue Hébraïque de tout ce

qu'elle offre de plus dilfonnant vous

empruntez encore au Grec quelques mots

difficiles qui héritent la fcience maçon-

nique d'épines fcholaftiques & faftidieu-

fes. Il me vint il y a quelque tems,

un certain grade dont tout le méca-

nifme roule fur la parole Tetragram~

maton ce grade s'appelle Phenix, titre

précieux & qui vaut la peine que l'on

en parle ce n'en eft pas le moment.

Cette foule d'expreflions baroques eft an-

noncée par les Francs-Maçons comme

un recueil de paroles facrées ce feroit

un crime de les prononcer hors de l'en-

ceinte, ce feroit une atrocité de les

confier à un profaru comme toute per-

sonne, mes chers frères qui voudra des

leçons fur cette partie n'auroit pas plus

aifé de s'adreder à un rabbin ou à quel-

que profefleur de la Propagande ( a )

«ju'à vos pitoyables maîtres d'école. Je

(a) L'amrux college à Rome pour les languesanciennes & ocientales.

Page 97: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. qi

n'ai pas grande foi en vos connoiflances

diplomatiques pourquoi d'ailleurs à ces

mots effentiels caraftériitiques fym-

boliques, mystérieux en ajouter qui ue

fervent abfolument que de paire par tout

à la falle du travail ou du festin belle

rufe pour éviter la furprife N'a t on

jamais escroqué le mot de l'ordre ? J'ai

fait fix femaines cour aflidue à un gou-verneur & commandant de ville fron-

tiere qui tous les jours un ¡allant

avant la parade, tiroit Con agenda, où

les mots d'ordre Saint Jacques & Madrid,

par exemple éioient marqués au moins

pour un mois & par chaque jour de la

femaine cette pendule fe remontoir,

douze fois l'année faos varier; & croyez-

vous qu'avec un peu d'attention, en fui-

vant de près cette répétition, quelqu'un

n'eût pas vingt fois furpris le mot des

rondes & introduit les ennemis dans la

place ? Les Francs-Maçons penfent-ils

donc être mieux garantis ? On peut leur

laider cette fatisfadion il faut un joujou

aux enfauts mais au moins qu'ils n'abu-

fent pas des termes.

Page 98: L'Étoile Flamboyante Tome 1

9J. L'ÉT Oï I L E

Dans le petit détail des chofes ordinal-

res de la vie, fi l'on vouloit former quel-

qu'un, ne feroit-il pas indécent de met-

tre toujours Alexandre Scipion Céfar,

Caton Henri IV ou Montefquieu à la

tête de fes leçons? Les noms des héros,

celui des rois & des grands hommes ne

doivent jamais être employés que comme

de grands modeles à de grands objets

c'eft une profanation très-condamnable

de mêler au courant journalier des évé-

nements, des faits majeftueux ou des

perron nages respectables je fuis affligé

d'avoir à faire un reproche de cette ef-

pece aux Francs-Maçons ils abufent des

termes en route occafion les chofes dont

ils amufent leurs profélytes ne font pas

de nature affez férieufe pour les revêtir

d'emblêmes facrés, & pour reproduire à

chaque pas, & prefque à chaque grade ce

nom augufte qui faifoit trembler Ifraël,

& que Moïfe lut le premier au centre

da triangle à la clarté des feux étince-

Jants qui le couronnoient. Mettre le grand

Architecte à la tête de tous fes travaux,

l'invoquer comme premier auteur, com-

Page 99: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. o*

me guide néceilaire c'eft une aâion loua-

ble lui rapporter toutes fes oeuvres at-

tendre de lui toute perfection c'eft un

tribut un hommage légitime mais la

loi des douze tables que les Maçons ma-

nient quelquefois repréfentent & chi-

fonnent Couvent fur un frêle carton fait

un précepte pofitif de ne pas prononcer

vainement le nom de l'Eternel vaine-

ment, c'eft-à-dire, en des circonftances

ou pour des chofes frivoles. A coup fur

les Maçons pris au pied de la lettre Se

felon ce qu'ils font habituellement ne

traitent pas des fujets bien graves 8c

bien conféquents leur méthode à cet

égard eft donc abufive elle ne l'eft pas

moins dans les relations qu'ils prétendent

indiquer par les expreifions qu'ils em-

ploient & les Cens fymboliques qu'ils y

attachent. Je ne puis approfondir cette

matiere fans révéler la plus grande

partie de leurs mots de patTe & fans

violer la régie que je me fuis impofée

de refpeâer leurs fcrupules en certaines

chofes. Une promeffe doit être tenue

fans qu'il foit befoin que ce que l'on a

Page 100: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Ç)4L' É TOI I L E

promis mérite intrinféquement une

vraie confidération je m'arrêterai donc

uniquement h celle de leurs phrafes

dont ils ufent le plus fréquemment

& qui eft connue de prefque tout le

monde.

Il pleut eft en général unmot adopté

par les Francs-Maçons pour avertir de

l'approche d'un profane, que dans le fait on

ne devroit jamais craindre fi les loges

étoient aufli foigneufement gardées que

le temple ou le fan&uaire qu'elles repré-

fentent, lorfqu'un corps illuflre deiliné

à fa conCervation veilloit fans relâche

à le préferver des entreprifes du dehors,

& le faire refpefter au- dedans. 11 pleut,

quelle image Peut-on ainfi dégrader

ranalogie des loges au temple où cer-

tainement il n'y eut jamais de gouttie-

res réelles ni figuravites ? c'eft un abus

d'imitation bien mal conçu. Dans quel-

que loge on poutre l'extravagance juf

qu'à dire it neige quand le profane

qui s'avance eft du genre féminin fimi-

litude prife vraifemblablement de la blan-

cheur des cornettes ou de la coeffure

Page 101: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 95

des femmes. 0 combien de loges où

il fait toujours un temps orageux J'en

fais une entr'autres où la pluie la neige& tous les ingrédients pareils font tou-

jours caufés par le fait du maître qui y

préfide où des filles débauchées vien-

nent mêler leurs lafcives attitudes aux

décentes pohures des laborieux Maçon

où les lacs obfcenes de la grofilere vo-

lupté, ofent s'unir à la vertueufe chaîne

qui lie les frères où lorfqu'avant le repas,

le maître à la clôture demande fui-

vant l'ufage quelqu'un a-t-il quelque chofe

à propofer pour le bien de l'ordre ? des

freres répondent, le fouper & des filles,

car cela m'ennuie tandis que d'autres

rougiffent du propos & du fcandale Se

fmiflent en murmurant par payer à titre

de Pique-nique maçonnique, l'écho de tous

les foupirants qui fe penchent fur le fein

de leurs nymphes. Quelle maçonnerie ?

Quelles loges ? Quels maîtres ? Quel.

Ah Petronne Petronne vous êtes mort

trop tôt ce coup d'oeil manque à vos

Saturnales abus de la chofe abus du

lieu, abus du lien, abus des perfonne,

Page 102: L'Étoile Flamboyante Tome 1

ç5L' É T O I L E

abus de l'honneur abus des termes

j'allois en oublier un très-fingulier.

Parmi les mots de patte ufités dans

les maçonneries il en eft qui ne font

pas hébraïques en un certain cas, l'on

ne peut entrer fans dire à l'oreille de

quelqu'un un tel étoit un bon Maçon

quoique dans une circonstance anté-

rieure, l'on ait allure à la même per-

sonne que ce tel étoit un coquin un

perfide. Il y a une dignité éminente dif-

tinguée par des broderies & des rubans,

quand les freres de cette catégorie font

réunis on ne pénètre point dans leur

chambre fans avoir pleuré à la porte

Se raconté douloureurement à celui qui

ouvre que le chat eft mort Je dis le

chat pour marquer davantage l'abus

poflîble car dans le fait c'etl le Scach,

terme oriental qui fignifie feigneur, mais

paffant de bouche en bouche, écrit de

cent façons, l'expreflïon eft traveftie, au

fond cela revient au même, & ne vaut

pas le choix. Quelle abfurdité Quelle

folie Peut-on respecter fi peu la bonne

foi les hommes foi-même ? Les torts

d'un

Page 103: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 07

Tome 1.

d'un Maçon ne font pas ceux detous,

le J'avoue, je lepublie, mais les tarres

répandus fur lamafie les vices inhérents

& qui fortent de lachofe font com-

muns à tous. Avoir des paroles confa-crées, c'eft une

manie il y a excufeabufer des

termes c'eft une fuperche-rie, on ne fauroit la pallier s'attacheraux

nombres, y mettre du fublime du

merveilleux ce ne feroit peut être pasla fottife la plus condamnable fi ce refpedt étoit motivé.

Tout fe fait par trois chez les Francs-

Maçons, trois freres forment réguliére-ment une loge trois principaux officiersla

dirigent trois lumièresl'éclairent

trois bijoux diffinctifs ladécorent

trois meubles effentiels lagarnifient

troiscoups marquent l'ordre du com-

mandement ou le révoquent, trois quef-tions précifes font le caraétere abfoludu

Maçon trois pas font fa marchetrois grades effêdifs contiennent au vraitoute la

Maçonnerie trois ans font l'âgecomplet d'un initié de la premiere clafle.Cette ftriâe obfervance de nombre ter-

Page 104: L'Étoile Flamboyante Tome 1

9SL'ÉTOILE

naire préfage à l'abord une grande ha-

bileté de calcul une profonde Sagacité

dans la fcience numéraire & promet

aux ptiilofophesmoilfon abondante des

fublimes connoiffances qui réfultent tou-

tes de la jufte combinaifon de ce type

myftérieuxle germe & la perfection

de

tous les nombres. In numeris omnia fit

funt,dit l£gidius

de Vadii dans fon dia-

loguefur la nature imô elementa m

r,umeris certis ligantur.Du nombre de

trois bien compris allure Sindivogius,

dépend la découverte de la circulation

des trois principes chimiques, fet fou-

fre, mercure formés eux mêmes par

des principes ou éléments principiés.

Oferai-je ajouter que de leur a&ion ré-

fulte le quarré dans le triangle, & de

ce feptangle la décade ? Le quarréeft

le fymboledes quarré

éléments qui font

contenus dans le triangle des trois prin-

cipes chimiquesce qui réuni forme

funité abfolue dans la matière première

le centre dans la circonférence, n'eft au-

tre chofe que l'écrit univerfel quifait

mouvoir & donne la vie à tout ce qui

Page 105: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 99

E

exi1te dans les trois regnes. La quadra-

ture du cercle eft le circulaire ùes quatre

éléments ce qui rend ce cercle quarré

autant que pénible concevoir, parce

que cette circulation eft le concours des

quatre éléments effentiels car la volupte

que décrit le cercle ne Lignifie que Le

mouvement imprimé par l'archet à l'inf-

miment qui rend des fons hoc unum

in quod redigenda funt elementa ¿fi cir-

culus ille exibuus tentri locum in quadratâ

figurâ obtinens dit un commentateur

À'Htrmts.

Un nombre trois des cercles des

quarrés des triangles tous emblêmes ?

toutes figltres favorites aux Francs Ma-

çons d'après leurs Spéculation!, & leur

maniere fixement attachée à ces objets,

<jui ne croiroit qu'ils cherchent à prépa-

rer d'avance l'efprit de leurs candidats au

développement des vérités fublimes à

l'habitude des myfteres que ce calcul

cette forte de cabale renferme ? La règle

de trois chez eux fi recommandable 8c

qui Celon certaines inftruâions eft la

premiere enfeigne du bon Maçon ne

Page 106: L'Étoile Flamboyante Tome 1

100 L' É T O I L E

femble t elle pas indiquer qu'ils en

lavent, qu'ils en apprécient toute la va-

leur, l'étendue & l'efficace ? Jeu de mots,

qu'un oifeau verd bien éduqué répéteroit

avec autant de précifion & auflï peu

de conféquence que le plus poli & le

mieux appris des maîtres bleux qui

d'ordinaire n'a qu'une routine dont il ne

pourroit rendre raifon. Si j'étois convaincu

que les Maçons fentifFent effectivement

le prix des chofes qu'ils emploient, qu'ils

conçuffent celles qu'ils annoncent, & les

rits qu'ils profeffent s'il étoit question

de plaider leur caufe & celle des nom-

bres qui font entr'eux d'une habitude

confiante & univerfelle fans m'égarer

avec l'auteur du chef-d'œuvre d'un in-

connu, dans les profondes recherches

de toutes les qualités reconnues à ce

calcul myftique de toute la déférence

que les anciens lui ont témoigné dans

tous les temps du rapport qu'il a même

avec le plus auguite objet de notre foi, le

plus grand véhicule de nos efpérances

je trouverois en allant terre à terre mille

raifons pour une, d'expliquer l'efpece de

Page 107: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. lot

E 3

piété des Maçons à cet égard, & de

juflifier leur a/Feétion. Le nombre de trois

a toujours été recommàndable dans un

fiecle d'ignorance, où les myfteres heu-

reux 8c falutaires d'un Dieu en trois per-

fonnes, n'étoientpas connus; les hommes)

déjà guidés par un inftinft religieux ne

croyoient pas pouvoir repréfenter la Divi-

nité fous une plus parfaite image que celle

d'un Delta ou triangle équilatéral ori-

gine du proverbe latin adopté dans des

temps qui fe rapprochent davantage de

nous numero Deus impari gaudet ce

qui pourroit aifément fe regarder comme

la devife des puiffances trinaires réunies,

qu'un auteur moderne, dans Con fyftême

fur la rébellion des anges a finguliére-

ment repréfenté fous la forme d'un cube

dont la vérité occupoit les faces fupérieu-

res, l'efprit de ténébres les faces in-

férieures, de façon que ce dernier dans

fa joute n'auroit eu autre chofe à fpé-

culer, que de faire tourner le cube, pour

fe trouver au-deiîus de celui à qui il de-

voit fexiftence. Ce cube mais d'une ma^

niere religieufe fe. reproduit dans la

Page 108: L'Étoile Flamboyante Tome 1

ICI L'ÉTOILE

maçonnerie mes frères en Tarent le

calcul, ils ignorent peut-être un des mé-

rites cachés du nombre trois lorfqu'une

fois il parvient au triangle neuf: j'en ai

moi même acquis la connoiflance depnis

peu & je la dois à un très- grand fei-

gneur, du cœur, de Pefprir 5c de l'hon-

nêteté duquel je ne ferai d'autre éloge

qu'en difant qu'it a l'ame bourgeoife fur

le chapitre de la vertu. A la fin de ce

volume, les Maçons trouveront une ta-

belle calculée ainfi que je viens de l'an-

noncer peut-être conviendront ils que

mon fecret à cet égard, vaut le leur,

puifqu'il eft impoflible.de rien augurer

de leurs combinaiCons numéraires. Que

peut-on penfer de cette progreflîon sr-

bitraire, indéfinie qu'ils donnent à leur

batterie elle préfente au premier coup

d'oeil, un modele de cabale dans la

fuite on apperçoit que c'efl ):ne forte

de tocfin qui témoigneroit tout au plus

que la veuve d'Hirant va pafler à de Ce-

condes noces. Il faut avoir le genre ner-

veux d'une docilité (înguliere & la mé-

moire bien benne pour faiiïr ce nombre

Page 109: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 103

E 4

prodigieux de coups, ralentis, prefles,

unis ifolés dont la quantité plus oti

moins forte déiigne la Hiprématie du

grade dont on eft revêtu 8c le genre

de travaux qui fe traitent pour le mo-

ment. J'affurerois bien qu'en Angleterre

où la Maçonnerie a confervé fon eflence

primitive ou fes fuccès foutenus con-

tinuent d'être avantageux à ceux qui fe

qualifient Maçons où le goût dépravé

du-neuf n'a point altéré défigure, effacé

le vieux l'ancien où des têtes faines

& fages ont fongé de tout temps v Il

beauté du nœud fraternel au bien da

l'humanité aux moyens de lui être

utiles par les principes de leur affocia-

tion j'aiïlirerois bien que cette fcience )

proprement celle de l'amitié & du bon

coeur, n'y eft pas traitée avec cet air de

parade. Ce n'eft qu'en France que j'ai

vu des boulevards le promeneur s'ar-

rête, le badaud regarde le peuple

écoute l'étranger entre l'un Mine

l'autre rit, plufieurs hauilent les épau-

les, le corps fatigue l'efprit s'ennuie

le cœur a des naufées, puiiTent-ellcs être

Page 110: L'Étoile Flamboyante Tome 1

1O4 L'É TOI I L E

au moins comme celles du Champagneil y auroit un certain plaifir cela feroit-

il fi difficile dans un pays où prefquetout eft moufle ?

Défenfe d'écrire. Serment. Secret.

Banquet. Frères.

vj'est une fatalité dont je voudrois

démêler la .caufe que dans les confi-

dérations auxquelles je me livre à propos

de la Maçonnerie, il ne me vienne jamais

que des axiomes fâcheux & qui tien-

nent trop à la critique nimia precautio

dolus, par exemple, vieille maxime que

la défenfe d'écrire, rigoureufement impo-

fée par les Francs- Marons m'oblige

malgré moi de rajeunir. Ai-je donc de

l'aigreur contre une fociété à laquelle je

me fuis librement attaché ou m'offre-

i-elle en effet des choses à blâmer à

reprendre ? C'eft un compte que je vais

me rendre.

Il eft très-décidé que loin d'avoir le

moindre fiel contre mes freres j'ai à

Page 111: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.105

E 5

me louer en mille manières de leurs

procédés à mon égard ceux de quel-

ques êtres particuliers qui peuvent avoir

eu des torts l'ingratitude, de certains

automates à laquelle j'ai dû m'atten-

dre la mauvaife foi de tels que j'ai fer-

vis, & dont je fuis trompé; l'arrogancede quelques-uns, la rivalité de pluGeurs,le ton la fourberie le défant dédu-

cation, l'opiniâtreté les petits défagré-ments qui par fois en font réfultés tout

cela n'eft au plus que la crife du mo-

ment, & n'influera jamais fur mes fen-

timents pour le corps en général au-

quel je prétends en donner une preuve

authentique dans l'espèce de dinertation

pour & contre que cette bagatelle phi-

lofophique contient. Attendez n'ai-

je pas voulu peut-être me faire une au-

torité fur la façon libre dont j'écris à ce

moment même & dont j'examine l'aeu-

vre & la fcience des Maçons en m'ef-

forçant de prouver qu'ils ont tort de

défendre tous renfeignements écrits

peints tracés ou burinés fur leurs

pratiques? Non, ce n'étoit pas mon in-

Page 112: L'Étoile Flamboyante Tome 1

lotf L'Étoile

tention je crois mon action légitimée

par le motif qui me l'infpirc j'ai voulu

détromper le public éclairer mes fre-

res, les réformer pcut-être montrer

leurs excellentes qualités fans cacher

les ridicules réduire leur fyftême à des

objets fuivis, à des modes fenfés, élaguer

des branches inutiles, toufer l'arbre pour

q,t'il végète plus fructueusement pour

que fa cîme mieux aërée prenne des

fucs nourriciers purs & falutaires Se

que les branches réunies préfet;cent un

jour une furface plane qui fane voûte

& procure une ombre falutaire j ceux

qui fe reposeront fous fon abri. Je n'ai rien

révélé je ne divulguerai rien le vf.!cf-

de-chambre mal-à-droit qui en désha-

billant fon maître arrache un pan du

julle-au corps n'a pas déjà bleflë le pa-

tron c'eft mon cas je mets les Maçons,

à leur toilette c'eft pour les parer de

leurs vraies beautés, voudraient- ils qua

je n'employafle que du fard ou des mou-

ches ? Dans tout ce projet ils n'ont qu<?

des remerciements n me faire je n'ai

donc aucun intérêt à me juûifier d'avance ?

Page 113: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 107

E 6

puisque je neprévarique pas c'ell donc

la faute de la maçonnerie s'il me vient

des réflexions ameres elle me les

fournir.

Le mémoire que j'ai déjà cité s'ex-

plique ainfi « L'interdiction fcrupuleufe

de tout écriture concernant la maçon-

nerie a privé de la connoifTance de

» bien des titres qui établiraient incon.

» teflablement le but de fon inftitution

ils en fixeroient l'époque le filence

des auteurs nous iaine dans une in-

» certitude que nulle conjefture ne dé-

» truit aifément. A ne confidérer la

maçonnerie que comme un ordre éta-

bli fimplement pour épurer les mœurs

n ou fondé fur l'amour de nos devoirs,

» l'on ne peut nier que es ne foit une

» inilitution bien précieufe qui mérite

» d'être confervée dans toute fa pureté

» & dont les renfeignements doivent

être tranfmis d'âge en âge pour ren-

» cire les hommes plus vertueux.

J'ai laifle fubfifler le mot ordre pour

ne point tronquer la phrafe judicieufe du

bon frere qui long-temps avant moi

Page 114: L'Étoile Flamboyante Tome 1

io8 L'ÉTOILE

avoit à peu-près penfé que la détente

d'écrire ne pouvait qu'être préjudiciable.

Je poutre le raifonnement plus loin Se

c'eft le commentaire du texte nimia pic-

cautio. La forte inhibition que l'on fait

aux afpirants doit les induire a croire

qu'on les trompe c'efl-à-dire ouque

les choses que l'on va leur enfeigner font

vicieufes, puiuju'on n'oferoit les publier,

ou qu'elles font frivoles, & qu'il faut que

d'autres s'y attrapent. Un joueur de gobe-

lets, las d'efcamoter dans une foire fans

fpeftateurs & fans profit, fit afficher qu'à

tel jour il montrerait un animal vivant,

femblable en tout point à tous ceux que

l'on voit habituellement, & que perfonne

cependant ne pourroit définir il mit un

prix d'accord à fa rareté, tout le monde

y courut. Chacun devoit voir la merveille

l'un après l'autre. Le premier qui entra

apperçût à l'éclat de beaucoup de lumie-

res, au fond d'une chambre bien déco-

rce fur une table revêtue d'un très beau

tapis un gros animal domestique, eh

c'ci't un chat, s'écria-t-il. Non, Moafieur,

c'eit une chatte répond le maître, 8c

Page 115: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 109il le prouve. Ah coquin Cela eft vraimais je fuis

pauvre n'en dites mot à

perfonne car l'on femoqueroit de

vous. Le curieux avifé rit & file par la

porte dederriere chacun le fuit à fon

tour, entre dans labarraque regarde,

eit duppe fe tait & s'en va. Si le réci-

piendaire va par hafard fe fouvenir de

cetteaventure garre la foire, le chat

& labarraque.

Lorfqu'une chofe eft vraiment bonnene fut-ce que pour peu de gens ce quien poflible on ne fauroit trop accorder

à ceux qu'elle intérefle les moyens de

s'en fouvenir & d'en conferver les prin-

cipes aucun ordre ne peut perdre de

fon luftre ni de fon mérite à la divul-

gation de fesméthodes; quand on fau-

roit mot à mot tout ce qui re paffe àla réception d'un chevalier de Malte

enchapitre, quand on auroit lu tous

les réglements de cecorps refpeaable

feroit-on pour cela chevalier ? l'ordre en

fouftnroit-il ? Que fert au furplus cette

défenfe desFrancs-Maçons ? elle pré-

pare un tort deplus, car c'eft un tort

Page 116: L'Étoile Flamboyante Tome 1

no L'Étoile

quoi qu'il arrive à celui qui promet

d'obéir quand il y manque. II eft des

chofes fur lesquelles il faudroit prêcher

d'exemple celui qui reçoit un candi-

dat, profcrit tout cahier, tandis que lui-

même lit la fentence d'un bout l'autre,

devoit-il l'écrire ? elle entre comme tout

le refte dans l'obligation mais fur

cette partie le ferment eft bien mal

obfervé.

Le ferment pardon mes frères

j'employois une exprefllon profane dont

je me retraâe. Ce nom qui porte avec

lui l'idée d'une promefie. religieufe ou

juridique en: le motif d'un reproche

très grave que le public a fait de tous

temps aux Francs- Maçons c'eft dit-

on, un attentat à l'autorité eccléfiafli-

que & civile. On ne doit jurer que fur

des vérités palpables & reçues on ne

peut jurer qu'entre les mains des dépo-

sitaires de la force légale ou fpirituelle.

Un frere qui, au péril de fa vie, répon-

dit il y a quelques années à la Bulle

d'excommunication fulminée par Benoît

XIV, contre les Francs-Maçons, & qui

Page 117: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. lit

eut la gloire, linon de la fairerévoquer,

au moins d'en faire (ufpendre l'effet &

d'en arrêter les carreaux, a difcuté cette

matière a fond le droit canonique les

loix le raifonnement, rien n'efl oublié

par-tout il a trouvé des armes, dont il

s'eft fervi victorieusement je ne répéte-

rai rien à cet égard. Mais c'eft mal à

propos que l'on qualifie une fimple obli-

gation, terme qui ne choqueroit per-

sonne du nom de ferment qui révolte

bien du monde.

Le premier lien des hommes cft l'hon-

neur, -la promet qu'un candidat fait en

loge n'a pas d'autre garant, comme le

manquement à cette promeffe ne peut

point avoir d'autre peine quant au for-

mulaire que l'on y ajoute, c'eft une fur-

face qui ne corrobore pas l'engagement

mais qui le cara£térife tout aéte volon-

taire eft bon toute perfonne à qui l'on

reconnoît foi même le droit de recevoir

une promette l'acqnierc dans le mo-

ment, c'cft un contrat fynallagmatique,

parfaitement exa£ régulier & folide.

Tous les jours on donne fa parole c'eft

Page 118: L'Étoile Flamboyante Tome 1

m L'ÉTOILE

un gage infaillible pour ceux qui pen-

fent le dépofitaire l'accepte il eft

fondé à s'en prévaloir la comparaifon

eft jufte il ne manque à l'obligation

maçonnique aucune qualité pour la valU

der & la rendre indifpenfable. Jusjurun-

dum fuprà crimen non ligat difent les

décrétâtes c'eft le cas oÙ l'ipfo jure

l'ipfo facio emporte nullité mais les

Francs Maçons ne font prefque que

réitérer ce que leurs parrains & marraines

ont promis pour eux quant au culte

ce que leurs peres & meres leur ont

infpiré quant à l'amour & la fidélité

dûe au fouverain ce que l'humanité leur

impofe envers le prochain ce que YeC-

prit d'ordre & d'harmonie leur prefcrit

à l'égard des loix ils y joignent quel-

ques devoirs particuliers de fecours mu-

tuel, d'union plus intime de charité

réciproque, d'urbanité refpeâive d'ob-

fervance de pratiques la promené eft

bien faite elle eft de riguetir on leur

demande de la discrétion ils y confen-

tent fans {avoirpourquoi ce fecret im-

pénétrable auquel ils s'engagent reignotâ,

Page 119: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE.3

em-u une parue également abtoltte deleurs devoirs ? Tous les autres leur étoient

connus ils ont pu s'afireindre celui-làn'offroit rien de pofitif, rien de déter-

miné, y feront ils tenus comme au

relte ?

Quand mon ami me demande le fecret

fur une chofe qu'il me confie, je fuis un

lâche fi je le publie parce que fon fecret

n'eft qu'un dépôt ce n'eft pas mon bien

je ne puis en difpofer. Si mon ami m'avoit

dit un fait qui le rendît coupable envers

le fouverain je maudiroiî la confidence,mais je me croirois dans le cas de la ré-

vélation mon prince eft mon premier

ami. Si du fecret de mon ami trop fcru-

puleufement gardé fur des objets de purintétêt ou d'affaires perfonnelles, il en

fortoit quelque rifque pour fon bien étrefon honneur, ou fa réputation que je

puilfe en parlant lui fauver tous les trois,

je me croirois dégagé & je parlerois.Les Franca-Maforcs ne font pas dans la

premiere hypothefe atfurément puif

que fi l'efprit de fidélité de foumiflîon

& de patriotifme étoit évaporé j'enver-

Page 120: L'Étoile Flamboyante Tome 1

II4 L'ÊTOILÊ

rois le retrouver chez eux, la fource n'y

tarira jamais. Mais ils font dans le fecond

cas fuppofé leur bien être, leur hon-

neur, leur réputation peut fouffrir d'une

réticence trop étendue. Ils font jaloux des

formes eh bien fur cela que l'on foit

fecret, il n'y a point d'inconvénient, ils

ont de l'affection pour certains fignes

certains mots il ne convient pas de les

révéler c'eft troubler leur joie mais

parmi le nombre des chofcs payables

qui les occupent il y en a une foule

d'absolument futiles qui font raifonnet

à leur préjudice. Oh fur cet article le

vœu eft nul le fecret une chimère il

faut leur rendre le crédit qu'ils méritent,

en forçant le public à les eftimer d'après

le tableau fidele de leurs ouvrages il

faut les contraindre eux-mêmes à borner

leurs pratiques aux objets etfentiels &

convaincre la plupart de la mifere ou au

moins de la fuperfluité d'une quantité de

tiens que le nom de grade colore mal-à-

propos d'un vernis refpeâable il eft bon

de mettre au jour tout ce qui eft faux

pour ramener à ce qui eft vrai. L'examen

Page 121: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE,ne

des prétendus grands grades maçonna

ques, par lequel nous commencerons la

féconde partie, fera tout à la fois le texte

& la .glofe.

Les afïemblées des Maçons font pref

que toujours terminées par des repas, fur

lefquels j'ai vu beaucoup de gens fe ré-

crier je ne fais fi leurs objections val-

lent que l'on y réponde. L 'ufage généraldes meilleures fociétés autorife celui d'une

fociété panicuiiere les Maçons favent

ainfi que tons les autres hommes querien ne lie comme l'agrément de la table

il eft heureux qu'un befoin ait pu devenir

un plaifir le premier humilie toujours

l'autre récrée 8c quand il eft décent

c'efl: le plus honnête &. le plus délicat de

tous c'eft l'inftant où l'efprit le cœur

& l'ame font le plus communicatives, où

les caractères fe développent le mieux

où la gêne celle où la liberté regne

où tous les états fe rapprochent parce

que c'eft une fujétion & une jouiflance

pareille pour tous. Les banquets qui fue-

cedent aux féances maçonniques font

une preuve convaincante de la primitive

Page 122: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Il6 L'ÉTOIL E

inftitution de notre fociété. La commu-

nauté de biens établie entraînoit celle

du domicile, celle-ci 1'ufage d'une feule

table pour tous; c'eft ainfi qu'aux temps

anciens les chevaliers de Jérufalem

du Temple de Rhodes, je ne parle pas

même de ceux de la Table ronde dont

l'origine fe perd dans les nuages qui en-

veloppent le trône du roi Arrur c'cft

ainli que ces chevaliers vivoient enrr'eux

à portion frugale à la même heure au

même fervice au même lieu fi l'on

pénetre dans les cloîrres ces congréga-

tions modernes antées fur les anciens foli-

taires, dont l'affublement eft prefque tout

ce qui leur refte vivent-ils autrement

que dans un réfectoire commun ? Les

banquets ne font donc pas, comme la

malignité le fuppofe le but des Francs-

Maçons, une fociété d'eftomacs feroit

bien méprifable & bien grofliere mais

ils font le fymbole de l'union premiere

du délintéreffement du dépouillement

perfonnel qui n'ayant rien en propre ne

doit fa fubfiftance qu'à la maire commune.

Que l'on me cite un principe qui ne foit

Page 123: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 117

point avili ou qui depuis un laps de

temps n'ait tourné en abus ? je ne fuis pas

l'apologitte de ceux qu'occafionent quel-

quefois nos fréquentes libations, tout y

eft oublié, tempérance frugalité, fo-

briété, modeftie décence le ton du

iîecle a prévalu, eft-ce le tort de la chofe

ou des hommes du temps & des cir-

conhances? Mais quand une joie fage pré-

lide à ces quarts-d'heure de délafiement

quand les faiilies de l'efprit, ftimulées à un

certain point par l'ufage modéré d'une

liqueur restaurante lainent échapper de

ces éclairs d'imagination qui font tableau

& deflinent pour ainfi dire, la fatisfac-

tion & le plaifir en etl-il un plus fen-

fuel ? aux cantiques de précepte qui ont

quelque chofe de rude 8c de monotone

fe mêlent quelquefois des couplets ingé-

nieux, dont la mélodie & les accords

femblent unir davantage les amcs, & faire

mieux fortir l'harmonie de l'enfemble.

L'ordre des famés, celui de la cérémonie,

malgré fon fingulier appareil tout étran-

ger qu'il paroifTe au furplus des ufages ma-

çonniques comme on le démontrera au

Page 124: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Il8 L'É T OI L E

chapitre du cérémonial, forme néanmoins

un coup-d'œil un concert qui a quelque

chofe d'agréable & de féduifant dans le

début. L'air de franchife qui entrelace tous

les rangs le ton cordial que l'on prend

volontiers pour l'interprète d'un Sentiment

véritable met chacun à l'aife les qua-

lités font abfolument fous la table on

n'entend que le nom de frcre il fait écho

de toutes parts tout enfin contribue à

rendre ces petites fêtes délicieufes dans

leur fimplicité. Finitions cette première

partie par élever un trophée à la gloire

des Francs Maçons le nom de

dont je viens de parler eft celui dont ils

ufent entr'eux, tout autre titre eft mé-

connu, toute autre qualification interdire

& même punie.

Enfants d'une mere commune tous

les hommes font freres entr'eux c'eft le

vœu de la nature maiz ce n'eft pas tou-

jours la phrafe tincere d'un cœur pénétré

de tout ce que ce nom renferme. Chez

un peuple que l'on regardoitencore comme

barbare quarante-cinq ans arrière de nous,

& qui doit fou exigence civile au génie

Page 125: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 119

créateur au monarque vraiment grand

dont les faftes hiftoriques ont confacré la

mémoire par cette épithete rarement mé-

ritée chez ce peuple médiocrement ten-

dre au fond le ftyle de la laague n'offre

point d'autre terme d'un homme à l'autre

que celui de frère le feigneur nomme

ainfi fon efclave ( vaiïal eût été trop

doux ) la fouveraine appelle de même le

fujet que fes bontés ont élevé jufyu'à elle

combien de gens pleurent encore celle

qui fut en effet la feeur & la mcre de fes

peuples Les mandants entr'eux ne s'appel-

lent pas autrement que freres reftes pré-

cieux des premiers titres de l'humanité

que n'avez-vous encore la même force

le même attrait les mêmes conféquen-

ces Dans les plus étroits liens de la con-

fanguinité, cette expreflion hélas n'eft

pas toujours le témoignage de l'attache-

ment. Les feuls Francs- Maçons femblent

en bisn connoître les droits la vzleur &

les devoirs je n'examine pas présent

s'ils font exactement fidèles à tout ce que

ce mot leur impofe mais 2u moins clans

leurs principes, il fignifie égalité ami-

Page 126: L'Étoile Flamboyante Tome 1

110 L'É T O LE

rié, union, zele, fecours. Parmi les moi-

nes où l'orgueil des rangs, la prétention

des charges, la distinction des claffes s'eft

fa it un paffage à travers la crafle du froc,

& malgré le renoncement aux vanités,

le nom de frere n'eft prefque qu'un titre

de fervitude de ba!reife & de dépen-

dance mépris repréhenfible des inten-

tions premieres du créateur de la con-

vidVion intime de la créature & de fes

vœux particuliers, quels troubles n'avez-

vous pas excité Chez les Francs- Maçons,au contraire le nom de frere eft le fym-

bole, & la conféquence du jufte niveau

qu'ils ont établis entr'eux c'eft une leçon

continnelle de leurs obligations refpeôi-

ves, heureux ceux qui les conçoivent,

plus heureux ceux qui les rempliflent, ou

qui en recueitlent le fruit Je n'ai pas de

plus forte ambition que d'en honorer tou-

jours le caractère, & d'obtenir de mes

freres la mêmeaffedlionque je leur voue,

& que je tâcherai de leur prouver dans

tous les temps.

SECONDE

Page 127: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. m

Tome L F

SECONDE PARTIE.

Desgrades. L'abfurdité de

quelques-uns.

L'irutilité deprefque tous.

Jr ameuse lettre G dont je vois la fom-

bre empreinte occuper continuellement le

milieu de l'aftre à cirq pointes qui brille

dans le temple des Maçons & dont la

clarté factice éclaire quelquefois leurs

travaux comment êtes.vous l'index de

leurs froids emblèmes? L'alphabet qu'ils

fe font fait tient il la bizarrerie de l'efprit,

& n'exprime aucune vérité c'eft un ca-

raâere myftique femblable au caméléon

qui prend d'un inftant à l'autre les cou-

leurs que l'on lui montre & que l'ou veut

qu'il autorife mais tous les G pollihtes,combinés de cent façons différentes ne

peuvent réalifer des fables légitimer des

affertions affeoir des droits chimériques& des fyftêines erronés. L'étoile lumi-

neufe qui fert de chatton à toutes ces al-

légories, ne fera bientôt qu'une lanterne

Page 128: L'Étoile Flamboyante Tome 1

liï L' É TOI L E

magique dont un Savoyard adroit fait

fortir une foule de représentations grotef-

ques, par leur variété elles attirent les

curieux & lui procurent de quoi vivre.

On dit communément de quelqu'un qui

veut nous tromper. Il vous fera voir des

étoiles en plein midi les Maçons fcm-

blent s'être chargés du foin de juftifier les

plus finguliers proverbes déjà fans qu'ils

en fufTent complices l'orgueil avoit volé

au firmament les fignes dont il fe déco-

re, pour en faire la parure 8c l'enfeigne

du mérite reconnu, quelquefois du néant

favorifé. Les Francs-Maçons ont cru pou-

voir s'arroger le même privilege le défir

de fe diftinguer aux yeux de leurs fembla-

bles, a fécondé l'imagination mais

l'étoile entre leurs mains, (excepté ceux

qu'une étude raifonnable a mis à portée

d'en apprécier les vrais fymboles n'eft

plus aujourd'hui qu'une trifte lampe, dont

la fumée graine la vue dont l'odeur porte

au cerveau, dont le jour faux & vacillant

défigure les objets. Le mécanifme de tous

leurs grades n'a cependant point d'autre

principe d'autre reflbrt d'autre moyen.

Page 129: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 113

F 1

Pourquoi renonçant ainfi à la fimpiicité,

à l'eflcnce de leur inftitution fe font -ils

perdus dans les efpaces imaginaires ? Ha-

billés à la mofaïque chargés de décora-

tiens inutiles qui ne font que les livrées

de la prétention & de la vanité feroit-

elle peut-être le germe de ces mêmes gra-

des qu'ils annoncent avec emphafe & trai-

tent avec gravité remontons à la fource.

Il et! encore équivoque fi la nature eût

mieux fait de lai (Ter les hommes dans

l'état primitif où elle les avoit placé que

de les ranger comme depuis en des claf

fes diftin&es & féparées qui en attri-

buant à chacun une portion plus ou moins

forte de la fubftance commune, a produit

la fousdivifion des rangs & des conditions,

relative au hafard du lot qui leur eft échu

dans le partage de la mafle. Au premier

cas, l'égalité parfaite auroit nui peut-être

au progrès, au développement des fcien-

ces Se des arts en falloit-il ? Les hom-

mes indépendants l'un de l'autre n'euffent

travaillé que pour eux-mêmes n'ayant

point de besoins ils auroient ignoré la

Servitude affligeante & la protection im-

Page 130: L'Étoile Flamboyante Tome 1

3 24 L' É T O LE

porrune laborieux chacun pour fon

compte perfonne n'auroit eu le droit de

leur impofer des tâches, le tien & le

mien n'eût pas altéré le repos nous fe-

Tions reflés ignorants mais nous vivrions

tranquilles le bonheur d'un fot vaut bien

les chagrins de l'homme éclairé. L'orgueil

& l'ambition font les premiers maux for-

tis de la boëte de Pandore 8c cette

fatale caflette n'eft autre chofe que le tré-

for de l'univers inégalement diftribué par

une mere dont l'injure prédiie&ion ou la

mauvaife économie enrichit plufieurs de

fes enfants des dépouilles de leurs freres.

Les vertus & les vices font nés en même-

temps, la même fource les a produirs

Timpulfion des premieres n'eft pas active,

parce qu'elle eit moins fru&ueufe-, l'at-

trait des autres eft puitiant parce qu'ils

mènent à l'abondance à

aux grandeurs. Nés libres nous n'oublie-

rons jamais cette prérogative tout ce

qui la gêne eft un joug, tout ce qui eft

joug paroît odieux pour s'y fouftraire il

n'eft rien que l'on ne tente, que l'on n'ima-

gine. Plus un homme par fa pofitionac-

Page 131: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. n$

F 3

tuelle approche de l'indépendance plus

il s'efforce d'y arriver abfolument les

entreprifes fufpeEtes hardies que ce

défir lui fuggere font colorées d'un

nom de convention qui les mafque & les

excufe l'ambition eft le mot célebre fur

lequel on fe retranche on a même la

témérité d'en faire une vertu des impof-

teurs, ( tous les fiecles en ont produits, )

aflurent effrontément qu'elle eft l'ame des

belles actions qu'elle a fait des héros

de grands hommes des génies fupé-

rieurs dans tous les genres on fe garde

bien d'ajouter qu'elle a fait auffi des ty-

rans, des fous illuftres des méchants

heureux des fourbes habiles. Pourquoi

déguifer toujours la foibleffe & les maux

de l'humanité ? Mais le vrai perce, quel.

ques êtres ifolés l'apperçoivent, ils au-

ront le courage de le dire.

C'eft à l'ambition à ce vice cruel

l'arme du fort l'oppreffeur du foible

qu'il faut attribuer fans balancer tous les

excès qui fe commettent journellement

dans le grand tout de la fociété générale

les défordres des fociétés particulieres, &

Page 132: L'Étoile Flamboyante Tome 1

tl6 L'ÉTOILE

nommément l'abus qui s'eft glifle dans la

Maçonnerie par la multiplicité des gra-

des, dont l'invention moderne ett l'ef-

fet de la prétention & de l'envie de do-

miner.

Quelle que foit forigtne de ce petit

corps auquel on a fait l'honneur de Cup-

pofer des vues très profondes,très-éten-

dues, & que plufieurs perfonnes ont même

cru capables de vifer au grand projet d'une

république universelle fyftême pitoya-

ble, mais étayé de tout ce que l'efpriï

d'anarchie offre de plus méthodique de

plus féduifant & dont on attribue l'in-

vention à Cromwel, ce fléau de l'humani-

té. Je ne m'arrêterai point à réfuter cette

opinion deftituée de toute probabilité &

qui dans le fait répugne à tous les enga-

gements, à tous les voeux maçonniques

mais pour raifonner conféquemment fur

cette fociété il faut au moins admettre

en apparence l'hypothefe propofée par

ceux qui la compofent comme l'époque

de fa formation. Le géometre fixe un

point ce point déterminé fe prolonge à

l'infini & produit par fon extenfion

Page 133: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. Il?

F

cette multitude de lignes dont il cotnpofe

fes triangles & Tes quarrés au défaut de

vérités mathématiques figurons une

vérité de convenance & travaillons

d'après.

La butine du temple de Jérufalem, fa

ruine, fa reconftru&ion voilà, fi je ne

me trompe, mes chers freres, à quoi fe

réduit votre afiociation votre fcience

votre étude répondez-moi. Une fociété

réunie fous ces aufpices, & pour de tels

objets, a-t-clle pu, dans aucun temps,

mêler à fes pratiques des fujets étrangers,

qui font épifode ?>Crompent à chaque

pas la chaîne des événements, celle des

opérations paffées celle des opérations

à faire ?

Les n'importe quand,

comment, & pourquoi, écoient d'accord

d'une forme fymbolique pour l'initiation

des fujets qu'ils admettroient parmi eux;

les grades d'apprenti & de compaânon,

qui font à peu de chofe près les même

fuffifoient à ce qui me femble pour

jeter un air de myftere fur des débuts

qu'il falloit rendre difficiles crainte

Page 134: L'Étoile Flamboyante Tome 1

1*8 L' Ê T O 1 L E

peut être que l'on n'apperçût trop tôt le

vuide des conféquences au delà de ces

deux premieres c1alfes, que tout homme

fans prévention confondra volontiers en

une feule à quoi reflemble la progreflîon

immenfe des grades qui en font dérivés ?

Il eft des bornes à tout, hors aux caprices

de l'efprit humain, illimité dans fes com-

binaifons comme dans fes defirs chaque

moyen qui lui femblera propre à étendre

fon domaine ou groftîr les tributs qu'il

impofe fur les dupes fera la charpente

d'un nouveau degré de fcience pour

Sauner de plus en plus le trône de la

foîie cette filiere indécente n'aura point

de fin. Qu'eft-ce au fond qu'un grade

nuement confidéré dans la véritable figni-

fication du mot, & relativement à tous

les états de la vie ? N'eft.ce pas la mefure

arbitraire que l'autorité a circonfcrite

pour déterminer le mérite fictif de chaque

individu, fans que la perfuafion du con-

traire ofe réclamer contre les entraves

qu'on lui impofe, ni même manquer aux

déférences que ce tarif despotique exige

8t aflïgae ? Toute condition éprouve

Page 135: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 129

F 5

cette graduation merveilleufe qui diffé-

rencie les hommes même lorfqu'ils Ce

reflemblent, & donne fouvent à l'auto-

mate le droit injure, non pas de mieux

valoir mais d'être plus remarqué que

l'homme fenfé, honnête & vertueux. Le

premier peintre qui deflîna le tableau des

rangs & des dignités, vrai tableau d'idées,

broya certainement fes couleurs fur la

palette de l'opinion la flatterie aifortit

les nuances le pinceau fut hardi, parce

que le peintre étoit ferf nécefllteux

peut-être vil fans contredit. Tirons le

rideau fur ces honteufcs images elles

affligent trop la vérité. Que nos regards

changent d'objets les Maçons en offrent

de bien variés c'efi cependant toujours

le même coup d'oeil leurs grades retom-

bent dans le cercle vicieux dont on vient

de tracer le contour car quand il feroit

poffible de leur accorder au delà de l'ap-

prenti & du compagnon la vraifem-

blance d'une maîtrife parce qu'enfin

dans un corps où l'on fuppofe une école,

il faut néceffairement fuppofer aufll des

maîtres plus inftruits, plus éclairés, ciui

Page 136: L'Étoile Flamboyante Tome 1

ijoL'Étoile

diftribuent les connoiflances j qu'en ré-

fultera-til pour le furplus ? Admettons

encore fi l'on veut pour ne pas chica-

ner, une clafle fupérieure, que je per-

mets aux Maçons d'appeller hs deflïna-

teurs, les architeftes, les entrepreneurs,

tout ce qu'ils voudront enfin pourvu

qu'ils y attachent un fens mais voilà

généreufement tout ce que l'on peut faire

& que deviendront alors toutes ces ma-

gnifiques prétentions ces dignités émi-

nentes, fujet d'émulation pour les zélés,

occafion de frais pour les dupes, reffource

abondante & lucrative pour ceux qui tra-

fiquent lcur profit de prétendues lu-

mieres du foi difant ordre ? Petit éltl,

élu de quinze élu de neuf, élu de l'in-

connu, élu de Pérignan maître parfair,

illuftre maître Symbolique, maître par

curiofité, ( tous doivent avoir ce grade )

maître illuftre Irlandois, prévôt, juge,

maître Anglois, Ecoffois de Montpellier,

Ecoiîbis de Clermont, Ecoffois des petits

appartements apprenti compagnon

maître Ecolîbis Ecoffois des trois J,

Ecoiïbis trinaire, Ecoffois de Jacques Vl>

Page 137: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. ijt

F 6

grade mulâtre & qui annonce bien le

pays d'où il eft parvenu jufqu'en France

ensuite vénérable maître de loge, cheva-

lier d'orient, ( ô celui-là & le grand inC

pe&eur méritent prefque une feâion à

part) chevalier d'occident, chevalier du

foleil, chevalier de la gerbe d'or, che-

valier de l'aigle chevalier. du nord du

pélican de l'étoile, noachite Souverain

Maçon d'Heredon, prince de rote-croix,

royal arche, grand initié aux myfteres

fouverain commandant du temple fu-

blime philofophe phénix, & pour com-

plément, chevalier Kidos ou K. S. grand

élu & tant d'autres dont les noms

m'échappent. D'où nous vient cette mar-

chandife, & par quelle fatalité Une aufli

mauvaife drogue a-t-elle acquis un fi pro-

digieux débit ? Les Francs-Maçons obfer-

veront que dans la lifte de leurs dignités

fa&ices je me fuis bien gardé de com-

promettre deux grades vrais dont un

feul m'eft parfaitement connu & quicontiennent en effet le fecret le but &

l'etTence de la Maçonnerie; l'un eft l'écof-

fifme du faint André d'Ecofïe l'autre, le

Page 138: L'Étoile Flamboyante Tome 1

1^1 L'ÉTOILE

chevalier de la Paleftine dont le pre-

mier n'eft, en quelque forte, que l'anté.

cédent, & qui dépend & émane directe-

ment du fecond quand par moi-même

je ne ferois pas en état de juger en partie

du mérite des vérités que ces deux clafles

propofent, traitent Se renferment, j'en

aurois la plus haute opinion fur l'extrême

réferve avec laquelle je fais que l'on les

confère le peu de perfonnes à qui l'on

les accorde & le choix fcrupuleux

auquel on s'attache. Il faut néceffa;rement

eftimer les chofes que l'on voit décem-

ment traitées & fans profanation toutes

celles que l'on livre, pour ainfi dire, au

bras féculier, au pillage de la curiofité,

Se dont les écrits font dans les mains de

out le monde, n'annoncent que des objets

frivoles, Se n'obtiennent aucune confidé-

ration. Un jufte égard pour des fpécula-

tions raifonnables, & qui font honneur

à l'efprit, m'empêche également de con-

fondre dans la foule des rêveries Ma-

çonnes une partie dé6gnée fous le nom

des lldelrtea. Ce genre de philofophie

qui occupe férieufement beaucoup de

Page 139: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.135

Maçons ftudieux a pu leur paroître en

effet un des buts de leur alTociation. Ce

n'efr. pas le point de vue le moins pro-

bable & qu'il réuflîfle ou non des re.

cherches auxquelles il conduit il réful-

tera toujours quelque bien quelque dé-

couverte avantageufe pour l'humanité. Je

compte en donner une idée complete

par l'expofition du grade tel qu'il eft

conçu & rédigé par ceux qui s'y appli-

quent. Par ce détail, qui fera précifément

un traité d'alchimie je pourrai peut-être

rendre un fervice aux vrais philofophes,

& engager les bons Maçon à le devenir.

Puisent-ils, de concert avec moi, fondre

11n jour toutes leurs équerres & leurs

bijous dans le creufet de la vérité.

Quelle différence entre le falpêtre

» d'une tête Indienne, & les glaces d'une

» tête Laponne, dit l'auteur de la théorie

» des fentiments agréables ? » L'impref-

{¡on du même objet ne doit pas erre le

même fur des fubflances fi différentes.

Oui, fi l'objet en foi n'eft que de pur

amufement, fi ce n'eft qu'un jeu de l'ef

prit, s'il n'offre rien de réel, rien de

Page 140: L'Étoile Flamboyante Tome 1

134L'ÉTOIL E

folide, c'eft le cas pour les grades dont

je viens de rapporter le catalogue. Ils

font méconnus ou méprifés prefque par-

tout, hors l'enceinte des lieux qui leur

ont donné naitfance les vérités ou les

pratiques utiles font une pour tous les

pays la différence d'organifation de

tempéraments, de climats, qui produit

toujours celle des opinions, des fyftêmes,

des façons de croire, n'a point de prife

fur ce qui eft bon, légitime, honnête,

avantageux les hommes, de tous les

temps, de tous les lieux, en font pareille-

ment affeûés l'adoptent s'y confor-

ment c'eft le droit de la vérité, ce fut

celui de la Maçonnerie réduite à fes prin-

cipes fondamentaux & à fes moindres

termes chez toutes les nations elle a

trouvé des feftateurs mais la fous-divi-

fion indécente des courtes idées qu'elle

présente, n'a pris favear en aucun en-

droit fi quelques unes de ces innovations

ont gagné, combien encore n'a-t on pas

défiguré les analogies, & varié le mode ?

Le grain d'orgueil qui fervoit à les faire

valoir, n'eit pas le même pour tous les

Page 141: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 135

individus chacun a cru pouvoir nuancer

un canevas qui ne tenoit à rien qui

n'étoit proprement à perfonne l'envie de

dominer avoir imaginé conçu projeté

l'envie de dominer arrangea varia, mo-

difia fuivant Tes vues particulieres cette

fatale manie s'occupe, fans intervalle, de

tous les moyens qui peuvent affurer Tes

fuccès, & fubjuguer ceux qu'elle effaie

de tromper & de convaincie. L'union

des Maçons étoit belle, pure, fainte dans

fon inftitution l'envie de fe recourir mu-

tuellement, fut le motif des cotisations,

des taxes que l'on impofa fur les candi-

dats le produit de ces émoluments

devoit former des fonds publics pour la

fociété ces fonds devenoient une ref-

fource c'en fut une quelquefois pour des

frères vraiment malheureux & dignes

d'être aidés. D'autres, émus d'un fpec-

tacle qui n'étoit que celui d'une généreufe

fenfibilité, crurent avoir les mêmes droits

aux tréfors communs. Jaloux de t'avan-

tage d'y puifer, ils demanderent; ils ne

méritoient rien, on les refufa. Le fou-

venir amer de cette préteudue injure

Page 142: L'Étoile Flamboyante Tome 1

136 L'É TOILE

infpira le dellein de s'approprier les de.

niers de la marte fans compter avec

perfonne de leur emploi, tel un caiffier

en chef difpoferoit fon gré des fonds

qui lui font commis, fans qu'un fubalterne

ofât lui en demander raifon. Pour arriver

à cette odieufe manipulation il fallut

impofer de nouvelles taxes créer des

objets de tribut, prétexter une autorité,

fuppofer une primatie, ftratagême odieux.

Nous vous marierons avec la baffe ava-

rice, dirent les enthoufiaftes & vous en-

fanterez les grades. Couche ridicule qui

reffemble à celle de la montagne, mais

dont les avortons acquierent malheureu-

fement des forces prefque en venant au

monde L'apôtre des vanités & de toutes

les marques oftenfives du pouvoir arbi-

traire, faux ou fondé, trouve bientôt des

partifans un titre une broderie une

aune de cordon, décore & tranfporte les

nouveaux illuminés on y attache des

honneurs dont le cérémonial ridicule

répond à la chimère de la prérenrion

les fimples font furpris les honnêtes

gens déconcertés, lestages muets, &

Page 143: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE, 131la foule entraînée le torrent fe groflïtde tour ce qu'il rencontre l'inondationeft générale. Mes réflexions à cet égard

prennent peut-être un peu trop la teintede l'humeur que toutes ces extravagancesme donnent elles ne font pas d'un aflez

grand poids pour valider un arrêt de

profcription dont trop de gens inter-

jetteroient appel je penfe que l'on aura

plus de confiance à l'opinion d'un tiers

regardé de Con perfonnel dans le monde

comme un homme eftimable, & dans la

Maçonnerie comme un chef, un frere

inftruit éclairé refpeaable. Le hafard

m'a rendu propriétaire de la copie d'une

lettre que ce digne Maçon écrivoit, au

13 novembre 1764, en Alface à un an-

cien frere, qui, par un très-long écrit,l'avoit confulté fur ce qu'il penfoit de

l'état aâuel de l'ordre & de celui des

grades voici mot pour mot fa réponfe.Ce plagiat eft excufable en faveur de la

franchife avec laquelle je conviens quemes lumieres font de beaucoup inférieu-

res aux fiennes & de l'efpece de gloire

que je mets à publier fes idées de

Page 144: L'Étoile Flamboyante Tome 1

,38L'ÉTOILE

préférence àcelles que je pourrrois

avoir.

« On ne peutêtre mieux fur le che-

min du vrai quevous me le paroiffez,

» mon cher frere, par tous les énoncés

» de votre lettre le zele quevous té-

moignez pourl'art royal

n'eft point

» équivoque permettez-moi d'yaflimiler

» le mien. Eprouvé partoutes les vicifli-

» tudes poflîbles, expofé,en pays

d'in-

u quifition, ( &c'elt un fait connu ) à

n payerde ma vie mon attachement à

» la Maçonnerie,le langage que je

vais

» tenir ne pourravous être fufpett

n cependant,alors j'étois

médiocrement

éclairé fur notre fcience. Nourri dans

» le préjugédes grades que par

état

j'aidoisà diftribuer les torts vous le

favez font fouvent une affaire de

» fituation jen'avois pas

encore ofé

raisonner jen'avois démêlé les vérités

» fimplesmais lumineufes, de la Ma-

» çannerie déjà cependantmon efprit

difficile fur les chofes neuves, répugnoit

à une foule de minutiesde pratiques

» découfues,de loix fans principes,

de

Page 145: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 139» regles fans application de faits con-

» trouvés démentis par les hiftoriens

» facrés & profanes, de traditions hafar-

» deufement refpeâées je ne pouvois» me faire à cette multitude de grades» variés par des couleurs fans analogie,

» faux dans leurs rapports, dangereux

» dans leurs conséquences contraires

» aux faints 8t premiers engagements,

» étrangers au but Se qui ne fervent au

» plus qu'à nourrir le fanatifme enor-

» gueillir les ambitieux, épuifer la bourfe

» des profélytes, enrichir le traiteur &

» le cirier. Voilà, mon cher frere, quelle

» fut mon opinion dans un temps d'igno-

» rauce penfez quelle je dois Favoir à

» préfent. Sans doute l'ordre des Francs-

o Maçons n'eft pas effentiellement une

fable il a commencé d'exifter, au

temps des croifades une fociété

» d'hommes libres dévoués par choix

» à certaines pratiques & qui ont dé-

» guifé leur objet fous les emblemes de

» la reconftruâion du temple des ini-

tiations myftérieufes 8c dont nous

pouvons avoir confervé les formes

Page 146: L'Étoile Flamboyante Tome 1

140 L'ÉTOILE

» éprouvoient les fujets qui vouloient s'y

» enrôler. On compte avoir fur cet ufage

» des renfeignements infaillibles 8C

» dans ce point, la Maçonnerie eft une

» vérité. Mais en la réduifant à une fi

» froide & fi ftérile allégorie, peut-on

la nommer un Secret? N'eft-il pas in-

» décent d'amurer des hommes de bonne

foi par l'appât d'un myftere qui con-

o fille à peu près dans des furfaces

» leur gravité s'annonce tout au plus par

» les volets dont les fenêtres font

» clôfes. Cette précaution par elle-

» même, m'a toujours déplu ce foin

d'éviter le jour cette affectation de

» travailler dans les ténebres rappelle

trop, dans des efprits émus par les

» menfonges d'un appareil bizarre, le

» temps des catacombes &. de la perfé-

» cution. Je n'ai pas plus de foi que

» Voltaire à tout ce qui a l'air d'avoir

» été

» Pieufement célebre en des temps ténébreux.

J'ai befoin ici, mon cher frere, de

toute la force de mes liens pour que

Page 147: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 1.41

» l'extrême f'ranchife que je vous ai

» vouée & que vous méritez à fi jufte

» titre, ne m'emporte pas au delà des

» bornes d'une fimple diflertation. La

n maçonnerie a une origine plus noble

» que celui qu'on lui prête fon but eft

réel fon fecret en eft effectivement

» un je ne puis avancer que des axio-

» mes problèmes en apparence mais

qu'il ne m'eft pas permis de vous dé-

montrer. Mais en ne parlant que des

» ufages communs entre nous, tels qu'ils

s'obfervent affez généralement, je dois

» convenir de fabfurdité de prefque tout

» le furplus. L'art royal ftriflement dit,

» eft renfermé dans les grades d'appren-

» ti compagnon fanâifié dans celui

» de rofe-croix, completé & développé

» dans le feul écoffifme poflible celui

» de St. André d'Écoffe je ne vous

» parle point de la Pateline la feule

» maçonnerie raifonnée effeâive mais

» qui n'eft pas faite pour être apperçue;

» conftamment dans le chapitre de ce

» grade nous n'en reconnoinbns point

» d'autres que ceux que je viens de

Page 148: L'Étoile Flamboyante Tome 1

142 L' É T O L E

i» vous citer, & tout homme que nous

» jugerions digne des premieres initia-

tions recevroit de nous fans difficulté

» la communication de tous les inter-

médiaires fi on lui accordoit l'écof-

firme de S. André attendu que ce

» furplus eft en effet pernicieux ou inu-

» tile fuirons, je vous prie, la lifte des

» chimères Maçonniques.

» Qu'eft ce qu'une maîtrife échafau-

D dée fur la mort d'un homme que l'on

» a le front d'annoncer comme le plus

» habile architecte, tandis qu'aux livres

» faints il n'eft indiqué que comme un

» fimple ouvrier en bronze un fculp-

» teur intelligent. Où trouve 1 on le

» modele de cette diftribution d'ouvriers

» en trois clatTes, & l'anecdote des com-

» pagnons aflaflïns ? Ce roi fi fage, notre

» vrai patriarche fous d'autres afpe&s

» ce monarque pieux que l'on déplace

» fi cruellement fi fréquemment qui

» tantôt préfide dans le parvis du tem-

» ple où l'on renverfe l'ordre de tous les

» meubles qui le garniffent, tantôt dans

» un cabinet où follement on éleve une

Page 149: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 14$

» tombe, dans une chambre de confeil

» où l'on met des encenfoirs des holo-

» causes & des colonnes caffées quel-

» quefois aufri dans une falle voifine ou

» intérieure du fan&naire que l'on ta-

» piffe très-vite d'une étoffe Sanguine

y> en mémoire d'un fang qui ne paroît

» nulle part avoir été répandu ? Qu'eft-

» ce que des obfcques a (fez comiques

» en conféquence de la prétendue mort,

» une recherche de cadavre une bran-

» che d'arbre qui le découvre un mot

» qui fent aufü mauvais que la chofe

» des amis qui vengent la perte de leur

» maître, une tête coupée un triom-

» phe une récompenfe, un vieux jet-

» ton de Burgos qui caraâérife tout

» cela des épées des couteaux des

» maillets des prétentions & tant d'au-

» très fadaifes filles d'une imagination

» hardie échauffée préfentées à des

» hommes raisonnables comme vérités

» confiantes, expliquées par des allé-

gories contraintes & traitées comme

des myfteres vénérables quelle chute

il pour l'efprit humain i

Page 150: L'Étoile Flamboyante Tome 1

144 L'ÉTO IL E

» J'avoue avec vous, mon che frère

» qu'il eft dur de falloir fe prêter à de

» pareilles illufions, qu'il eft phyfique-

» ment impoffible que ce foit là pré-

» cifément la chofe des Maçons. Obfer-

» vez que j'enchéris fur vous je vou-

» drois fapper de plus près le vice radi-

» cal inhérent à nos pratiques à nos

» fuppofitions fi l'hypothefe de la maî-

» trife eft détruite l'ouvrage d'ailleurs

» fera bien avancé car comment fou-

» tenir après la maffe de grades qui

» dérivent de cette fource ? Je fais à

» merveille & c'eft le fens myflique

» que certains illuftres de l'ordre pré-

» tendent y attribuer je fais que la

» maîtrife couverte des draperies lugu-

» bres dont nos loges la parent n'eft

» à leur gré que la commémoration

» d'une tragédie, dont la cataftrophe étei-

» gnit un ordre ancien dans le fang de

» fon chef. Mais concevez-vous qu'ou-

» bliant fi-tôt l'idée du temple & fau-

» tant d'une branche à l'autre, les Francs-

» Maçons vouluffent tirer parti pour leur

gloire d'une époque qui feroit une

tache

Page 151: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 145

Tome L G

» tache honteufe confacreroient-ils par» des modes & des us attentatoires au» bon ordre moral une fociété prof-» crite par les loix viâitne peut-être» de l'envie à certains égards mais

» plus décidément de fbn inconduite &

» de fes manœuvres ? En vain altere-

» t-on des faits hiftoriques pour légiti-mer des prétentions abfurdes jamais

» la probité guidée par une convi&ion

» raifonnée & judicieufe, ne pourra envi-

» fager comme un but de la maçonnerie,» la charpente mal enchevêtrée d'un gra-1) de qui rendra de la confiftance à un

corps méprifé & aboli. J'ai promis d'être

» fujets fidele, honnête homme, religieux,» bon citoyen puis-je admettre des de-

» voirs des procédés des formes quime faffent déroger à ces qualitéscarafteres abfolus d'un vrai Maçon ?

» Ou l'on m'a trompé lors de ma pre-» miere initiation ou l'on me trompe» aujourd'hui les parties de mon en-

» gageraient font toujours fraîches à ma

» mémoire & les combinaifons mo-

dernes d'une ambitieufe témérité ne

Page 152: L'Étoile Flamboyante Tome 1

L'ÉTOCLE

» peuventen effacer les traces. Mais f

je trouve dans les documents lesplus

» authentiquesdans les livres mêmes

nqui

font à la portéed'un chacun

» mais dont un petitnombre a la clef;

» fi jetrouve un hiflorique fuivi étayé

M de faits inconteftablesfilé d'âge

en

» âge parune progrcffion

fuivie dont

» le tempsa refpeâé les veftiges

fi

» jedécouvre les précieux ftigmates

» d'un corps droits dans Ces vues jufte

» dans fes moyensréfléchi dans fes

» préceptes équitabledans fes

projets,

» folide dans fes principesconfiant

» dans fes formes, fcrupuleuxdans fes

» règlesami de l'ordre des loix de

» la patriedu fouverain je dis voilà

» le fecret des Maçonsvoilà le terme

» fixe auquelmes premiers

vœux m'ont

» préparéfur-tout fi j'apperçois que

» cet objet foit propreau bonheur de

» tous parce quela fcience des Maçons

» doit intérefler l'humanité en général,

» 8c non pasexclufivement telle nation,

» tel peupletel pays pour lefquels

feuls fembleroit réfervé le bénéfice de

Page 153: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 147

G z

o remettre en vigueur des droits pref-

» crits dont l'exercice ne peut excéder

» le petit domaine de ceux que l'on

» effaie de repréfenter. D'ailleurs fi j'ac-

cordois pour un intlant la faculté de

» légitimer un abus qu'en réfulteroit-

» il ? Le chef de la hiérarchie eccléfiaC

tique ou un puiffant fouverain con-

» fentiront-ils jamais de rétablir les cho-

» Ses fur l'ancien pied ? Je le fuppofe

encore comment prouvera t-on que

l'on foit ce que l'on veut paroître

H N'eût-on confervé que l'habit & quel-

» ques ufages de ceux dont on Ce dit

ifllis ce feroit au moins des marques

sa extérieures car je ne parle pas des

vœux effentiels comme célibat, vie

H afcétique milice religieufe j quant

à la règle fondamentale rien de plus

facile que de la maintenir elle exifte

» au long dans les écrits de S. Bernard

pourquoi enfin à l'exemple des au-

» teurs dont l'on s'appuie, n'eft-on plus

» délicat fur le choix des Sujets pour-

» quoi la pureté du fang requife eit-elle

» tombée en défuétude ? pourquoi le

Page 154: L'Étoile Flamboyante Tome 1

148 L'É i o 1 -L r.

if cordon noir trifte équivalent de cette

.) marque brillante qui diftinguoit les

» croifés décore-t-elle de nos jours

» mon frere le Savetier, & mon frere

» le comte ? pitoyable mélange dts

conditions Mais je] ne finirois pas,

mon cher frere & j'abufe à coup

•v) fûr de votre temps & de votre pa-

» tience d'ailleurs mes réflexions n'iront

» jamais à faire fchifme & fans les

o pratiquer pour moi-même j'ai l'air

» de refpe&cr à l'extérieur des chofes

admifes quoiqu'aux fond je les défap-

» prouve autant pour ne pas choquer

les zélés de bonne fois que pour ne

» pas trop éclairer des efprits bouil-

lants auxquels il eft dangereux de

» montrer certaines conféquences. Au

» refie mon cher frere vous fentez

bien que m'éloignant fi fort de ce

» qui femble à quelques-uns le ncc plus

ultrà maçonnique j'admets encore

a bien moins tous les grades intermé-

& diaires & fubféquems car j'en fais

encore vingt-cinq au delà le champ

de la fiL9ion eft fans borne ils font

Page 155: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 149

G 3

» tous inventés pour filer l'intérêt, avec

auflî peu de befoin que cinq aaes

» dans une tragédie, dont le dénoue-

» ment fe trouveroit au premier }j« les

livre fans rêferve & fans regret au

» julte tarif auquel vorre lettre les a

eltimés. Je fais cependant un peu plus

de cas du Rofecroix non pas celui

de la lampe inextinguible mais le

w Rofecroix proprement dit, ou Maçon

d'Hérédon quoiqu'à tout prendre ce

» ne foit qu'une Maçonnerie renouvel-

» lée, ou le catholicifme mis en grade,

» je ne le crois pas à beaucoup près

» du calibre des autres. Je tiens, & j'en

« fuis fûr qu'il doit fa naifiance à des

» circonftances géminées épineuses &

» relatives à l'art royal 8c qu'il a fervi

d'enveloppe en certains temps aux

» vraies allégories aux principes de

» la fociété c'eft le jugement qu'en

portent les Ecoffois de S. André

d'Ecofle feule claffe de Maçons» dont la doftrine foit raifonnable, les

v renseignements fuivis & furs. & les

)il méthodes conséquentes le grade qui

Page 156: L'Étoile Flamboyante Tome 1

15° L'É TOILE

» n'eft proprement qu'un titre une déno-

» mination précife & nécenaire ajoutée

» à la qualité effentielle au nom de Maçon,» dont il fixe la fource les progrès Ie

» travail & la fin, eft une maîtrefle bran-

» che adhérente au tronc & qui tire fa

» fubflance de celle qui vivifie le gros de

l'arbre on ne pourroit la retrancher

» fans faire mourir le fujet il eft bon

» quelquefois que la feve filtre par diffé-

rents rameaux, Se porte fes fucs nourri-

» ciers en détail avant de faire produire

» le fruit. Les chevaliers de la paleftine

» ont donc ainfi que vous cher frère

analyfé la Maçounerie ils fe font

réfervés les rels Se dans le creufet

» je ne vois guere de refte pour le gros

» des Maçons que ce que les chimif-

» tes appellent caput mortuum. Je crois

» inutile de faire un examen plus dé-

» taillé le royal arche de l'anneau

» de la voûte, les fous-divifions infinies

» du chevalier d'orient défignées chez

» les titis par L. D. P. chez d'autres

» par Y. H. le commandeur du temple,

» prince de Jérufalem Maçon cou-

Page 157: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 151

G 4

» ronné maître ad vitam Se cinquante

» encore qui enchérifient d'hypothèse,

» 5c femblent Ce difputer l'avantage de

» défigurer le vrai & d'embrouiller le

» fond ne font pas dignes d'une ré-

» futation en règle & vous vous

» êtes dit à cet égard j'en fuis fur,

» tout ce que je ne fërois que répéter ».

Que peut- on ajouter à ces remar-

ques ? l'abus eft manifefte 8c la prati-

que intolérable. Si ia moindre utilité

mes chers freres fauvoit les reproches

que vous n'éviterez jamais à cet égard,

je me rangerois de votre parti, j'enaie-

rois de vous excufer mais qu'allegue-

rez-vous ? les fignes les mots de la

maçonnerie reçus dans tout l'univers

qui quelquefois ont aidé l'infortune loin

de fa patrie dans des conjonctures dé-

licates, & lui ont fait découvrir des

cœurs généreux en quoi confiftent-ils

po(itivement ? dans ceux des premiers

grades, je vous défie de nier cette vérité:

tout au plus ceux de l'écoflîfme de S.

André y ajouteroient quelque mérite en

Suéde en Ecoffe ce feroit peut être

Page 158: L'Étoile Flamboyante Tome 1

151 L' Ê T O 1 L I

un motif de plus un droit plus intime

à la bienveillance des Maçons de la

même catégorie mais en général quand

un Parifien indigent ira dans le fond de

la Norwege implorer des fecours à titre

de Maçon la feule queftion que ceux

à qui il s'adrefiera lui feront eft celle-

ci, êtes'vous Maçon ? s'il y répond dans

les termes prefcrits & avec les indices

fubféquents tout fera dit on ne lui

demandera pas la lifte de fes dignités.

Quand je vois un gros homme plein de

fanté, de vigueur & de joie, promener

oifivement fon onôtieufe perfonne dans

un équipage commode & faire décem-

ment la ronde des promenades 8t des

honnes maifons avec l'air de l'opulence

3c du désoeuvrement, je demande qui

c'eft; on me répond, un chanoine, un

bénéficier tout eft dit mon homme

eft jugé je ne m'informe point s'il cft

prévôt, premier ou doyen de fon cha-

pître, ni quels font les honneurs atta-

chés à fa prébende ou à fa dignité. Tout

ce qui abonde ne vicie pas mais tout

ce qui eft hors-d'œuvre, tout ce qui en-

Page 159: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 15,

u 5

veloppe l'objet fous des accefïoires £a-

perflus, plus propres à l'avilirqu'à le

relever, eft un vice qu'il faut détruire

c'eft la honte de la raifon le tort de

l'efprit & le poifon du cœur.

Morale Jurifdiciion Police.

-L\ 'Est-ce que cela ? me dit avant-hiermon imprimeur en vérité, Monfieurfi je croyois que le fecond tome ne va-lût pas mieux que le premier je ne

rifquerois pas de me charger de cet ou-

vrage quel intérêt voulez-vous que le

public y prenne? il femble d'abord quevous allez mettre tous les fecrets à dé-

couvert au fait, on ne trouve que des

raifonnements c'eft la chofe du mondela plus froide, la plus infipide qu'un rai.

fonnement, rien de fi arbitraire, chacuns'en mêle, tout être penfant a le droitde

bavarder chacun s'en mêle maiscela n'apprend rien de belles fuppofi-tions, eh qui n'en fait pas ? un raifon-neur ett un homme à charge l'on grif

Page 160: L'Étoile Flamboyante Tome 1

L'É TOILE

fonne tous les jours d'aprèsfes propres

idées mais cela n'en fixe aucune pour

ceux quivous lifent J'attendois à cha-

queminute qu'il

m'adreffât l'apoftrophe

de Boileau

Chacun à ce métier

Peut perdre impunément fon encre & fon papier.

Pour moi, je ne veux point hasarder

mes peines & mon temps à l'imprellion

d'une bagatelle, dont le fond me pa-

ioit auffi vague & le débit auflî dou-

teux pa(Te encore pour la partie où vous

promettezdes difcours s'il font bien

faits cela pourra plaire le public en

fera curieux, les Maçons qui font dans

le cas de pérorer y auront recours dans

l'occafion & puis ce grade d'adepte

qui forme une maniere de traité philo-

fophique fur ce grand oeuvre, aura quel-

que mérite pour le refte croyez-moi

il faut circonfcire élaguer & du tout

il ne réfultera qu'un verbiage qui ne figni-

fie rien. Lieux communs d'un homme

qui vous marchande & qui cherche à

tirer parti de la fituation, que vous êtes

Page 161: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 155

G 6

durs à écouter J'avois les pieds fur la

braife mais quel eft le travail fans dé-

goût ? celui d'un auteur eft le pire de

tous les fuffrages du public font les ro-

fes du métier les débats lespourpar-

lers, la premiere critique du libraire,

font des épines terribles on s'y pique,

il faut être affez maître de foi pour ne

pas crier. Je dois pourtant une juftice à

celui auquel j'ai affaire, de l'efprit, de la

littérature de l'honnêteté c'eft fon ca-

ra&ere on peut lui répondre il écoute,

voici ce que je lui dis. La maçonnerie

eft un tableaud'optique qui doit être

vu d'un point fixe pour la vérité du coup

d'cril qui cependant peut être regardéde tout fens n'avez-vous jamais vu dans

un long cloître de chartreufe de ces gran-

des perspectives qui dans le lointain of-

Frent des mantagnes des arbres des

rochers, des troupeaux & qui en fe

rapprochant d'un certain endroit forment

un Saint Bruno bien coloflal, bien pieux,bien recueilli en extafe au fond de fa

grotte ? hé bien nos loges font comme

ce cloître à perte de vue; nos tableaux

Page 162: L'Étoile Flamboyante Tome 1

,j$L' Ê I O I L E

nos décorations, nos furfaces comme

cet amas de montagnes, dont l'enfante-

ment pourrabien être celui de la fable

c'eft un grouppede maffes empâtées

de couleurs qui montrent un payfage

confus, & quien fe rapprochant

forment

un objet bien coloflal bien fain, bien

myftérleux,dont beaucoup de gens s'ex-

tafient & que nous traitons ténébreu-

iement au fond de nos affemblées tous

les yeux ne voient pas de même, les in-

téreffés font les vrais connoiffeurs ils

trouveront le point; le public,vous-même

n'appercevrezd'abord que

les gros coups

de broffe vous n'êtes pas au point du

regard,ce n'eft pas ma faute j'ai tout

dit. Il ya du mérite à Ce faire deviner,

il faut laiffer quelquetravail à l'imagina-

tion du lecteur ces fortes de chofes ne

l'e décrivent pas méthodiquement comme

une bataille ou un fait purementhiftort-

que. C'efi beaucoup, peut-étre déja trop,

d'avoir hafardé une forte de diflertation

con je aura le qui laiffe percer la vérité

le premiertome fera celui des Maçons

le fecond celui des bonnes gens, des pa-

Page 163: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE.157

reffeux 8c des alchimiftes, voilà boutiqueouverte pour tout le monde que voulez.

vous de mieux? Quand très-attentivement

vous fuivez toutes les fonplefies d'un difci-

ple d'Ozanam qui par l'adreffe de tes jeuxvous furprend vous amure & vous ap-

plique, feriez-vous flatté qu'avant chacun

de Ces tours quelqu'un vous di't à l'oreille

le procédé & la maniere de les faire ?

croyez-moi tout joueur de gibecieres

cache fes rufes derriere un tablier, c'eh

un rideau néceffaire les fantoccini, quetout le monde a voulu voir n'auioient

amufé perfonne fans le tablier dont le

maître de polichinelle cache les fils & les

refforts de fa marionette. J'eus beau dire

l'imprimeur s'obftinoit le fiecle eft trop

judicieux, prétend-il, pour fe payer de

combinaifons de Ipéculation* de mé»

taphores il faut du réel des faits, quel-

que chofe de pofitif contentons- le en

voici.

La morale des Francs-Maçons feroit

de cette fociété l'école des plus belles ver-

tus, s'il étoit poflible que l'on réduisît en

leçons publiques, les principes généraux

Page 164: L'Étoile Flamboyante Tome 1

158L' Ê T O I L E

qui font la bafe de leur affociation tout

homme qui aura faifi dans leur pureté les

maximes effentieUes de l'ordre qui vou-

dra en faire la regle conilante de les ac-

tions & de fa conduite pourra fans fa-

natifme afiurer hautement que l'univers

entier fe corrigeroit fi tous les hommes

étoient Maçons & que cette fociété

femble avoir pour but de les rendre meil-

leurs à tous égards. Je fais bien ce que

l'on oppofe à cette thefe les fophifmes

font à la main de tout le monde c'eft

une arme dont le bonze le lettré le

philofophe & le petit-maître fe fervent

indignement mais on eft blafé fur les

fophifmes depuis Emile on croit en voir

par-tout cela tient en garde &

l'on s'eft accoutumé à ravoir les réfou-

dre.

Dans un cercle de jolies femmes & de

très-petits hommes où chaque foir au

retour d'un fpeôacle national & monoto-

ne, on vient faire de l'efprit & jouer le

mot en attendant un trille wifck & un

Couper fin dans une de ces maifons en-

nuyeufement célèbres où la maîtreffe

Page 165: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 159

du logis préfide au confeil des génies fri-

voles qui l'entourent donne le ton aux

propos le goût aux chofes juge des

arts des talents & prête ou ôte le

mérite à (on gré laconverfation toujours

bondi(!ante comme un ballon gonflé, la

converfation tomba ces jours paffés fur un

fujet dont les honnêtes gens ne parlent

prefque plus un abbé vermeil & pincé

mit la franc-maçonnerie en avant chacun

dit fon mot deux ou trois femmes nous

damnerent de prime abord c'étoit la que-

relle du fexe on ne peut eftimer ni (àu-

ver des hommes qui s'amufent entr'eux

& n'admettent-point les dames à leurs af-

fembléej: une petite machine à talon rou-

ge, paré cependant comme un grade de

maître & qui puoit l'ambre à étouffer

fe récria contre la maufiaderie d'un ordre

qui n'agiflbit ne travailloit ne tablait

qu'aux lumieres dont les confreres de-

voient périr de chaud, entafiés dans leurs

boëtes fuffoqués de la vapeur des bou-

gies, toujours Sérieux toujours con-

traints, toujours guindés d'un coin de la

chambre fortit tout à coup une voix caffée

Page 166: L'Étoile Flamboyante Tome 1

itfo L'Étoile

qui s'échappant fous une très- grofie per-

ruque, entama la vafte critique de notre

impiété déterminée par le ferment & le

mélange de religions le harangueur

s'échauffoit, je m'étois tû jufque-là, j'ofai

répondre & j'auurai que la fociété en

général n'offroit rien de contraire à la reli-

gian, à la fidélité que L'on doit au princc,

â Vétat patrie rien qui répugne au

bon ordre ni aux bonnes moeurs on me l'a

dit quand j'ai été reçu je l'ai répété moi-

même à tous ceux que j'ai admis, & c'eft

le dialogue ordinaire que tout maître de

loge un peu inltruir un peu bien difant,

fait à Colin-maillard lorfqu'il attend au

bas de la chambre le moment de com-

mencer fa ronde j'ajoutai que quoique le

titre de Maçon ne fût pas pour un hon-

nête homme une qualité de plus à coup

fur ce n'étoit pas un mérite de moins 9

que fi leurs règles étoient bien connues

& Suivies à la lettre le coeur de bien des

perfonnes Ce reftifieroit leur conduite

feroit plus fage leur vie en tout plus

exemplaire leurs propos plus ménagés»

Quelle fottife dit impétueufement la mai-

Page 167: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. x6l

trèfle de la maifon Monfieur eft fans

doute de ces gens-là mais en tout cas il

aura peine à perfuader que les mcenr3

puiiTent gagner quelque chofe à la doc-

trine de fa ridicule fefte je ne penfe pas

qu'aucune fociété particuliere ait la pré-

tention de mieux enfeigner la vertu que

la religion elle-même, & les gens habiles

qui nous en expliquent les devoirs. Par-

donnez-moi Madame tous les jours

une poignée d'hommes retirés peuvent

enchérir entr'eux par la pratique habituelle

fur des préceptes communs à totrs quel'on fe contente de favoir par coeur pour

les citer dans l'bccafion ne vous hâtez

pas trop difoit Imlac à Rajfelas d'ac-

corder votre confiance ni votre admira-

tion à ces docteurs moraliftes ils di (Ter-

tent comme des efprits céleftes mais ils

vivent comme des hommes. Je fus pref-

que accablé les injures s'en mêloient

j'ignore comment la chofe finit car je

cours encore cependant j'avois raifon

En effet, fi les congrégations religieufes

téunies fous les différentes bannieres de

leurs fondateurs nuancées des unifor-

Page 168: L'Étoile Flamboyante Tome 1

16z L'ÊTOILÏ

mes qui les distinguent font des afiles

impénétrables au vice des retraites fûres

pour la vertu elles ajoutent donc à la

théorie des devoirs de la religion la pra-

tique dévote & journelle de ces mêmes

devoirs. Il faut avoir payé fon contingent

au public pour acquérir le droit de s'ifo.

ler à deifein de récapituler fa vie & de

purifier fon cœur un homme habile a

décidé que la fociété a de juftes préten-

tions fur le travail de chaque individu

que s'en difpenfer par la retraite c'eft

trahir Con devoirs cependant loin du

bruit du monde & des occanons de

chute ces ames généreufes qui nuifent à

la fociété civile par leur renoncement,

leurabfence, leur célibat, qui s'arrogent

le privilege d'éluder la vœux général de

la nature par des vœux particuliers

qui font hors de l'ordre qui font un état

dans l'état font [en fées vivre d'une ma-

niere plus pure avoir des mœurs plus

douces une mora!e plus fainte plus

orthodoxe plus réguliere. Pourquoi les

Francs- Maçons feroient-ils privés d'un

avantage qui dans le fait eft le précis de

Page 169: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. I63leur union dont l'objet pofitif fera tou-

jours l'exercice détaillé des œuvres de

l'humanité & l'obfervance étroite des

vertus religieufes civiles & patriotiques 1

Il eft déjà reçu dans le monde

qu'unefoible partie

Peut bien fans nuire au tout, en être défunie.

C'eft la définition & l'exception la plus

avantageufe en faveur des couvents & des

êtres célibataires mes freres font bien

plus avancés ils concourent dans le

grand tout, chacun pour leur part, &

favent allier les obligations de l'enfemble

avec leurs devoirs particuliers rien ne

contrafte dans cet arrangement.

Leur ferment fi l'on veut le nommer

ainfi contient explicitement toutes les

chofes auxquelles ils s'aftreignent ce

n'eft à proprement dire qu'une pro-

mefle revêtue de formalités qui ne la

rendent ni plus folide ni plus terrible

mais qui folemnife fa prédation avec

anez d'appareil pour imprimer un fouve-

nir permanent qui empêchede jamais

Page 170: L'Étoile Flamboyante Tome 1

164 L'ÉTOILE

s'en écarter en voici le prononcé fans

aucune altération.

« Je promets devant le grand Archi-

» tette de l'univers & cette refpe&able

» afiemblée d'être fidele à Dieu à la

m religion que je profefle au Souverain

» dont je fuis fujet, à ma patrie à mes

» frères: de les aimer de tout mon cœur,

» de les fecourir de tout mon pouvoir

» aux dépens même de ma propre fub-

» tance fi le partage en eft nécefTaire

» pour leur fontien je promets de ref-

pe&er la femme, la fille Se l'amie de

mon frere d'être fage à tous égards

» dans ma conduite prudent dans mes

actions, modéré dans mes discours,

» fobre dans mes goûts jufte dans mes

» vues équitable dans mes décifons

» honnête dans mes procédés humain

w généreux, charitable envers tous les

» hommes fpécialement pour mes

freres je promets d'obéir à mes fu-

o périeurs en tout ce qui me fera pref-

» crit pour le bien & relativement à

» l'ordre auquel je voue mon attachement

» pour la vie. Je promets d'être difcret

Page 171: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 165

» Se impénétrable fur tout tcut ce qui

» va m'être confié de ne jamais rien

écrire tracer peindre buriner ni

» faire chofe quelconque, qui puiffe en

occacioner la divulgationfi je man-

n que à mon ferment, je confens d'avoir

la langue arrachée la gorge coupée

» &c. » Ces derniers formulaires

paroiflent avoir été fuppléés poltérieure-

ment au vœu ftrift pour en tirer le mo-

dele de différents fignes, geftes & pofi-

tions qui diflinguent les premiers grades,

car dans le.fond c'eft une lifte de pléo-

nafmes il eût été plus court de dire tout

amplement,« je confens de perdre la

» vie fi j'y manque » c'eft afiez le ftyle

de tous les jurements même de ceux

qui font à l'ufage journel & qui affai-

donnent fréquemment la converfation des

mondnins des entoufiafl.es ou des gens

fâchés que Dieu me punijfe f cela n'cft

vrai que je meure que le ciel m'écrafe j

que &c. à mon gré, il y auroit eu

plus de noble(Ce plus de décence à

n'aftreindre les initiés que par le gage de

l'honneur, 8c fous la trille condition de le

Page 172: L'Étoile Flamboyante Tome 1

166 L'ÉTOILE

perdre en cas qu'ils deviennent réfrac-

taires mais auflï falloit-il n'admettre ab-

folument que des perfonnages capables de

bien fentir toute la valeur du terme, &

de connoîue le prix de la réputation. Il

y a bien un grain d'honneur pour tous les

hommes mais celui du favetier ne ref-

femble pas tout à fait à celui du gentil-

homme, la délicateflc de l'ame, la pré-

cifion des idées fur un article de pur fen-

timent, tient beaucoup aux organes 8L

à l'éducation cela devenoit embarrat

fant. Une groffe épouvante l'image ter-

rible de la mort affefte tout le monde

les francs Maçons l'ont préférée fans

prendre garde que fi quelque chofe peut

annuller l'engagement dans le fyftême de

ceux qui réfléchiront, c'eft exactement

cette fentence exhorbitante que les Ma-

çons n'ont pas le droit de porter ni de

faire exécuter. La vie des citoyens eft le

bien de l'état, aucune fociété particuliere

ne peut en difpofer on dévoue fa tête

au prince on la courbe fous le pouvoir

& l'autorité des loix mais elle n'appar-

tient à perfonne privativement ce font

Page 173: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 167

de ces peines comminatoires qui n'ont ja.

mais d'effet on le fait, on s'en moque,

qui cadii à (yllabâ cadit à toto 8C quand

un engagement pêche ainfi dans fa con-

féquence, que peut produire l'antécé-

dent ? L'orateur Romain qui faifoit de

fi belles périodes ne les terminoit pas

par du jargon. Dans quelques pays &

en certaines loges, on fait encore ajouter

au candidat, en pofant la main fur l'évan-

gile« Je promets devant le grand Ar-

chiteâe de l'univers & fur ce livre qui

» contient fa parole &c. mais cette

forme n1eft point de J'effence du cérémo-

nial, elle paroît même tout-à-fait con-

tradi&oire vu l'extrême filence que l'on

prefcrit fur tout ce qui eft matiere de

croyance, ou qui en renferme les objets

& à coup fûr les Francs-Maçons n'ex-

poferoient point à profanation le dépôt

refpeâable des vérités faintes vis-à vis

de gens qui n'auroient pas pour ce tréfor

de la foi, la vénération qu'il mérite il

faut confidérer cet ufage rare comme un

abus que la ferveur & le zele mal dirigé,

auront introduit fans fonger aux confé-

Page 174: L'Étoile Flamboyante Tome 1

168 L'ÉTOILE

quences il eft prefqu'aboli par- tout &

l'on le fupprime tous les jours. Cet aveu

que je me crois obligé de faire foula-

gera beaucoup l'inquiétude & les fcrupu-

les de plufieurs ccprits qui ne fe détermi-

nent que fitr les apparences & qui les

faillirent toujours au tragique lorîqu'il

eft question de juger le prochain mais

il n'eft ici qucilion que de la morale de

la fociété pour la développer fuivons

toutes les parties de l'engagement.

«Je promets devant le grand Architecte

de l'univers n ici le nom de l'Eternel

n'eft point compromis, &. ce n'eft point

le cas des remarques que j'ai faites anté-

rieument à l'article de l'abus des termes

fur le tort que mes frères ont quelquefois,

de tranfgreffer le décalogue en prennant

le nom de Dieu en vain. Perfonne n'échap-

pe aux regards de l'fc;tre fuprême tout

homme doit fe croire fans ceffe fous fes

yeux, alors plus de crimes dans l'univers

le premier hommage des Maçons eft donc

celui que le fini doit à l'infini le créé au

Créateur, dont il croit & atiefte la pré-

fenec ils le prennent pour témoin, pour

garant

Page 175: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.169

Tome 1. H

garant, pour juge de leurs vœux: je trouve

tout à la fois dans cette expreflion l'aveuformel de la croyance, de la

dépendancede la confiance, de l'adoration la phts di-

recte la religion oblige- 1- elle à plus ?Sort-on de tes préceptes, en promettantd'être fidele à Dieu ? L'enfant qui reçoitl'ablution falutaire qui doit le régénérer

& qui lave la tache ntalhcureu fe de fa naiP

fance, n'articule'encore aucuns fans, mais

un homme honnête fe rend fa caution& promet d'avance pour lui cette fidélité

à Dieu le premier caractère du chrétien

on l'éleve en conféquence la fidélité à

Dieu elt un vœu faint abfolu que l'ott

ne peut jamais répéter trop (auvent; fans

ce principe, tout eft vuide lâche & cor-

rompu un autre motif a-t-il conduit les

martyrs fur l'échafaud? La fidélité pour leDieu d'Abraham, dreffe le bûcher d'1 faac,

y affeoit la victime innocente, & fait taire

la voix de la nature pour n'écouter quecelle du devoir. La fidélité pour Dieu fait

renoncer Moyfe à la qualité de fils de la

fille de Pharaon Exod. 11 v. a la fidé-

lité pour le Dieu de Moyfe fait périr une

Page 176: L'Étoile Flamboyante Tome 1

X70L1 É t o LE

mère & fept fils précipite Daniel dans

une fournaife la fidélité pour Dieu n'a-

t-elle pas expofé Yaui aux perfécutions

& livré Urfule & fes onze mille vierges

aux glaives des bourreaux ? Le temps de

ces affreufes exécutions eft heureusement

paffé', eftce le défaut de foi ou de vier-

ges ? Fide'e à Dieu c'eft à coup fur le

type de tous les devoirs la morale la plus

complète les Egyptiens traverfent la mer,

les murs de Jéricho s'écroulent, Gédéon

Barac, Samfon Jephté, David font des

prodigesde valeur, ( Epit. de S. Paul

aux Hébreux ) parce qu'ils font fideles à

Dieu quiconqueobferve ce précepte,

ofe tout peut tout fouffre tout, s'ex-

pofe à tout & cette vertu premiere qui

le foutient féconde dans fon cœur le

germe de toutes les autres c'eft par ce

vœu que les Francs- Maçons débutent

quel heureux préfage Quel préjugé en

leur faveur Le mélange des religions

peut-il y porter préjudice ?

Fidèle à Dieu ùàla religion que je pro-

fejfe. Cette branche qu'il ne faut pas di-

vifer, fouffre plusde difficulté j les cen-

Page 177: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 171

H

futes eccléfiaftiques ne l'épargnent pas

elle eft cependant facile à jufHfier. Je crois

que le même Maçon que j'ai cité quelque

part, celui qui a répondu à la bulle d'ex-

communication, a réfuté viétorieufement

cette obje&ion qui faifoit un des fix pré-

textes de la colère & des foudres du va-

tican jujlificatur mulier infiddii per vi-

rumfidelem, a t il dit, & ce font les pro-

pres paroles de l'apôtre Saint Paul Se

réciproquement on peut attendre cet effet

falutaire de la cohabitation &. de l'intimité

des perfonties qu'une bigarrure d'opinions,

quelquefois une difpute de mots fépare

mais que l'amitié, l'union la confiance,

la fréquentation rapproche perfuade

détermine d'ailleurs feroit-ce une plus

forte indécence d'admettre aux mêmes

pratiques, à la participation du même

banquet des perfonnes de culte diffem-

blable, que d'affocier au partage d'un fa-

crement très -refpeâable & de joindre

par un lien indiflbluble un catholique Se

une proteltante, fur-tout avec l'extraor-

dinaire condition de dévouer fuivant les

fexes une partie de leur génération au

Page 178: L'Étoile Flamboyante Tome 1

171 L' É T O I L E

diable, pour acquérir l'autre à Dieu. Moi,

je n'y entends pas de finette je nomme

tout bonnement un chat, un chat, &

Rolet un fripon voilà fans furfaire la

claufe canonique fous laquelle les maria-

ges de religion différente font permis,

car le mot toléré n'elt qu'une porte de

derrière on ne toléré point ce qui eft ré-

puté faint il faut réfuter ou abfoudre,

c'eft le cas du pofitif ou négatif abfolu.

Les circonstances font bien moins graves

à l'égard des Francs-Maçons & rien ne

prouve tant leur docilité & le peu d'envie

qu'ils ont de faire feôe que le foin exaâ

qu'ils prennent d'écarter & de défendre

entr'eux toute differtatian fur le culte &

la variété de doctrine un feul Dieu une

feule foi un feul amour s'ils étoient

controverfiltes ou converrifieurs, ils exa-

mineroient de plus près la façon de pen-

ser de chacun mais ce feroit entrepren-

dre fur une partie dévolue de droit aux

fages & fayants interpretes des vérités

évangéliques. La tolérance que mes freres

femblent profeffer eft plutôt l'apanage

d'un coeur doux & humain que celui d'un

Page 179: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 17J

H3

efprit incrédule. Si l'honnêteté phyfiqueconh'ftoit dans la forme de croire la pro-bité feroit bien réduite. Les Francs-Ma-

Çons défirent fans doute chacun à part

foi, la conviction & la converfion de fon

frere, peut-être même implorent-ils cette

grace puifiante qui doit &qui peut opérerle prodige, mais ils ne fe chargent pas

d'en diriger l'influence ni d'inquiéter

perfonnes fur fes opinions particulières.

Le prononcé fidèle à la religion que je

profejfe n'a donc d'étendue que jufqu'au

moment d'être mieux éclairé & pour

aftreindre le candidat à ne pas s'écar-

ter des principes dans lefquels il eft né

par des vues purement humaines ce qui

s'appelle mentir à Dieu & aux hommes,

commettre fanion la plus lâche, & quel'on peut regarder comme l'indication de

toutes les manœuvres poflîbles un poëtefameux a dit à peu près

Qui fut trahir fon Dieu, peut bien trahir fon prince.

Je ne m'y fierois pas à la vérité à

moins d'un de cescoups de lumière qui

Page 180: L'Étoile Flamboyante Tome 1

174L' Ê T o L E

tiennent du miracle Se je crois que de-

puis bien des fiecles on n'entend plus

de voix qui crie Saul Saut, pourquoi

me perfécute tu ? L'expreffion des Ma-

çons ne trouble donc point l'ordre moral

& religieux au contraire elle y remet

un chacun.

Au fouvera'.n dont je fuis fujet à ma

patrie à l'avénement au trône, au com-

mencement d'un monarque, toutes les

clartés de l'état, prêtent le ferment de

fidélité, & cependant chaque fois que le

prince honore quelqu'un de fes fujets, de

charges & d'emplois le promu renou-

velle le même ferment: les Francs-Ma-

çons ne pèchent donc pas en le réitérant

lors de leur initiation c'eft un engage-

ment bon à rappelles il cara&érife bien

clairement la foumifïion d'une confrater-

nité, que quelquefois on a voulu taxer

d'avoir des vues ambitieufes &. oppofées

à la politique c'e'l même do cette partie

du ferment que j'ai inféré ci-devant, les

preuves les plus fortes de l'abfurdité de

certains grades dont l'objet vsgue en

lui-même feroit déroger à l'obligation

Page 181: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 175

H4

première ceux qui auroient la folie de

s'y livrer. La puiffance du fouverain & la

fidélité du fujet, font les deux appuis né-

ceflaires pour tous les états après Dieucelui qui fur terre mérite notre hom-

mage, notre zéle & le facrifice de nos

jours, c'eft le maître qui nous gouverne.Si la maçonnerie eut pris fon origine en

France j fi les François feuls étoient

Maçons n09 inftituteurs n'auroient ja-mais penfé d'exprimer ce mot de fidélité

dans l'engagement parce qu'il eft gravédans le cœut de la nation l'amour & la

fidélité pour le prince eft fon fentiment

le plus vif; tout François vient au monde

avec la volonté d'en fortir quand il fau-

dra pour Con roi fans murmure & fans

regret cette façon de penfer précoce

que je placerai dans la claire des idées in-

nées, croît avec l'âge fe développe par

l'éducation fe foutient par l'exemple& ne s'affaiblira jamais mais les Ma-

çons font de tous les pays, il eft bien des

peuples auxquels il faudroit fouvent faire

renouveller cette promette.Fideh à la patrie. Ce terme n'a plus

Page 182: L'Étoile Flamboyante Tome 1

176L'Étoile

la même valeur que par le paffé. Un poëte

latin a donné mie fi mauvaife leçon par

fon ubibene, ibi patria que c'eft pref

qu'aujourd'hui le fyftême général. Le bien

être attache la mauvaife fortune les

contrariétés les angoiiîes de la mifere

étouffent l'amour du pays d'ailleurs on

craint fi fort d'avoir le goût du terroir

qu'il eft prefque du bon ton de dénigrer

fa patrie. Il e(t vrai que certaines gens

ont le malheur de devoir le jour à des

cantons bien ridicules un de mes amis

me le difoit ce matin, il eft dans le cas;

je ne connois rien de fi rebutant de fi

épais que fon air natal ce n'eft pas pré-

cifément la faute du climat le ciel eft

beau le terrein fertile le payfage airez

riant la ville aflez grande mais les

gens qui la peuplent font irtfoutenables

on n'a pas le courage de fe regarder

comme le compatriote d'un tas de mé-

chants, d'envieux, de petits génies de

perfonnages vils rampants faux ja-

loux colporteurs affidus de toutes les

anecdotes qui peuvent ternir la réputation

«'autrui efpions éternels de la manière

Page 183: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 177

H 5

de vivre de leurs voifins exigeants

hauts ignorants cauftiques, grofïiers,des femmes aigres, orgueilleufes & poif

fardes, des meres fans principes des

fHlesfans éducation fans maintien des

fociétés fans goût, des converfations fans

fel de beaux efprits fans connoiflance,des lettrés fans judiciaire, des poëtes fans

rimes des auteurs, ah des auteurs

des académiciens des fpéculareurs des

agriculteurs des hommes à efîais qui font

dupes, des hommes à confeils qui font

fourbes un enchaînement de parentédes alliances une noblefle des phi-

lofophes érigés de leur chef en cenfetirs

publics intriguants dans les famillescraints par les fois encenfés par des cail-

lettes des gens graves ou qui devroient

l'être dont la lorgnette maligne & péné-trante fouille le cœur de chaque partantune tante avare, curreufe, fautie & bien'-

faifante qui récite fans cetTe la lifte de

fes dons un oncle atiomtnant qui mo-

ralife du matin au foir des peres qui

mangent tout, d'autres qui thésaurisent:

& meurent de. faim c'eft encore pis

Page 184: L'Étoile Flamboyante Tome 1

IJ% L'ÉTOILE

une monotonie un jargon despropos,

des médifances mal-adroites des calom-

nies fanglantes, beaucoup degourmands

de gros repas aucuns plaiirs point de

commerce des bourgeois fans induftrie,

une populace fans activité de vieux pré-

jugés, des vices nouveaux de l'infolence

chez les gens de fortune du mépris pour

la médiocrité, l'air de par deflus au cou-

vert d'Apicius la flatterie honteufe du

parafire qui le courtife un penchant pour

Je jeu que rien ne peut vaincre des

fpe&acles pitoyables des promenades

négligées des maifons incommodes

des campagnes dévalées un faux air

d'opulence & de pruderie à travers tout

cela quelques raifonneurs qui argumen-

tent habituellement fur les moyens la

dépravation le patriotifme le mauvais

goût, & dont on applaudit les farcafmes

& les parades d'honnêteté tandis qu'un

pavre diable qui n'a pour lui qu'un fang

pur, un fens droits, presque point de

bien, beaucoup d'honneur, aucune in-

trigue voit tout fans mot dire rit ou

pleure ciars un coin fans fatiguer fans

Page 185: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. j79

r^ fmfc«4 t l *4 "VtfXM*1f^ t^ !L I » ?

H 6

contrarier pertonne fc retire l'écart

fans prétention, & ne peut obtenird'être,

je ne dis pas refpe&é mais oublié une

fois pour tout à quoi fert-il donc d'être

honnête homme ? Un Calabrois à qui

l'on faifoit cette qudtion répondit c'eft

un métier de dupe je ne l'ai été que

vingr quatre heures dans ma vie & je

penfai mourir de faim. Nul n'eft prophète

dans (on pays le proverbe qui fe vérifie

journellement nuit beaucoup à l'efprit

de patriorifme fi chez foi le mérite ob-

tenoit quelqu'eftime s'il étoit connu

apprécié récompenfé le fentiment ne

mourroit pas dans le cœur de la plupart

des gens qui font en droit de penfer qu'ils

ne-ticnnent à perfonne parce que per-

fonne ne paroît tenir à eux. Otez cinq

ou fix êtres auxquels le fang vous lie Se

qui décident votre tendrelfe on peut Ce

regarder comme itolé fi la chaîne fc

rompt une fois que deviendra l'enfem-

ble ? II eft bien vrai que le nom de patrie

ne.s'entend pas exclufîvement du lieu ou

l'on eft né mais de l'état duquel on fait:

partie c'efi dans ce tens quêtes Francs*

Page 186: L'Étoile Flamboyante Tome 1

1 80 L'Éioilb

Maçons impofent l'obligation d'y être

fidele. Faudroit-il en faire une loi fi,

comme dit l'écriture l'homme n'avoit

pas corrompu- Ces voies! Le titre de ci.

toyen eft le plus beau de tous à qui fait

en faire une jufte analyfe mais ilparoît,

qu'aflezdans tous les temps, ceux qui s'en

rendoient dignes & en rempliffoient les

devoirs, obtenoicnt la célébrité, d'où l'on

pourroit prefque conclure que ce fût tou-

jours des hommes rares car on ne re-

marque guere une vertu une aâion

quand elle eft au courant. Si avant l'idée

del'intérêt perfonnel qui vient toujours

trop tôt & toute feule, on imprimoit celle

de l'intérêt général qui vient toujours trop

tard & jamais de foi même auquel ce-

pendant le premier reflbrtit & Cu trouve

lié par des nœuds invisibles l'égoïfine

parleroit moins haut & la patrie s'en

trouveroit mieux le bourgeois de Calais

qui protège fes murs défend fa ville

fa femme fes enfants & ra vie obtient

unmagnifique éloge, le voilà caraftétifé

citoyen généreux l'on n'obferve pas que

la cluerelle qu'il époufe à laquelle il fa-

Page 187: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. igr

crifie, lui eftdireâe ce font

foyersfon patrimoine ÔC fa famille qui décident

Con héroïfme c'eft dans la distributionde la juflice c'eft dans le maintien des

loix dans l'économie desfinances, dans

l'emploi des fondspublics, le

foulage-ment des peuples, l'embelliffement des

villes leur fureté les établiflements

utiles l'ordre, l'harmonie l'admira-

tion de l'autorité que je cherche le ci-

toyen, le patriote j'en trouve heureu-

fement l'exemple fous nos yeux l'intérêt

perfonnel n'eft point alors le mobile du

bien que l'on fait ou que l'on fait faire

c'eft dans le champ de Mars fous le

poids de la giberne & de la cuirafle au

fort des combats que je trouve l'ami de

la patrie fon fang va couler pour ellec'eft là caufe de tous, & non pas la

fienne que fon bras va foutenir.

La noble chofe.

Que d'être chevalierOn prend la caufe

De l'Univcrs entier.

L'opéra feulcroyoit nous donner des

maximes fon rival d'harmonie pour le

Page 188: L'Étoile Flamboyante Tome 1

l8! L'E T O I L E

gracieux& le flatteur le deviendra

peut-être à cet égard le fiecle des palla-

dins eft pa(Té mais ces bonnes & braves

gens éaoient citoyens à leur façon ils

avoient le fyftême du parriotifme univer-

fel c'étoit un fentiment à rectifier, à

réduire on trouveroit encore airez de

cofmopolites; mais il nous faut des gens

fixes 8C dont l'attachement inviolable

pour leur patrie éclate dans toutes les

occafions d'utilité mais il faudroit auffi

que la patrie oh! il faudrait, je

crois, finir cette digreffion qui ne revient

à rien. Il s'agiflbit des Maçons de la pro-

mené qu'ils exigent fur cet objet teur

méthode leur précamion mérite des élo-

ges, tenons-nous-en là.

A mes freres. Les différents discours

de loge définiront beaucoup mieux que

je ne puis le faire, ce nom précieux dont

les Maçons s'honorent réciproquement

la douceur qui y eft attachée porte in-

vinciblement dans les âmes la fenfation

d'une amitié tendre. De ceux à qui nous

appartenons par les liens du fang, aucuns,

après les auteurs de nos jours n'ont de

Page 189: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE.183

droits plus légitimes à notre affectionque

des frères ce termeindique que les

Francs- Maçons cherchent s'unir par tout

cequ'il y a de

plus vif & de plus naturel

lefpeâacle nud de la nature dans fes

premieres opérations n'offre tous les hom-

mesque fous cet afpe&, paitris d'un

même limon rameaux d'une mêmetige,

ils étoient, ils font effectivement freres

la religion depuis les a encore nommes

tels elle s'accorde donc avec la nature

pour établir cetteconfanguinité les

Maçons fécondent l'une & l'autre en l'éta-

blifiant entr'eux; mieux que qui que ce

foit, ils en ontapperçu les rapports Se

le prix l'égalité parfaite eft la bafe de

leur union tout difparoît enioge

l'homme y quitte les livrées de l'orgueil,

les diftinftions du hafard les parures

de la fortune ornés des feules vertusqui

l'embellitfent, il fait les fairerefpe&er,

les faire valoir chérir 6c lespratiquer

journellement. L'hiftoire des effets heu-

reuxqui en réfultent à certains égards

feroitlorgue & les anecdotes intéref-

fàtnes de fecours donnés de feiviees

Page 190: L'Étoile Flamboyante Tome 1

iJ?4 L' É T 0 1 L E

rendus d'inimitiés éteintes au feul nom

de la fraternité peuvent fournir le cane-

vas d'un ouvrage à part; je me réferve le

délicieux plaifir de publier la lifte des

belles avions de mes freres quoique

ce titre trop prodigué, trop avili, tourne

depuis plufieurs années à la confufion de

ceux qui le portent & qui en font le plus

de cas trifte fatalité qui des mêmes

fources fait couler à la fois le lait & le

poifon Cette extrême égalité trop géné-

ralement adoptée comme principe vou-

loit encore certaines précautions fans

applaudir à la perverfité il faut ref-

peeter les convenances d'ufage & lorf-

que le décrotteur m'embr-affe, partage ma

foupe & ma chaire, j'ai peine à oublier

qu'une heure avant il êtoit à mes pieds

que dans une heure il y fera peut être

encore fi la boue m'y force fi ma

bourfe l'y décide ce tableau eft mal à

droit un peintre habile ménage mieux

fes teintes il faut une dégradation infen-

fible, un ton de couleur il faut qu'elle

faient mieux fondues; ceci tranche trop:

la nature rne montre les hommes égaux

Page 191: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 18Smais n'eft ce pas les ames

qu'il faut appa-

reiller ? Peuvent- elles l'êtrequand les

distances d'état font fi fortes ? Telque

je viensd'appeller mon frere dans une

courte enceinte où perfonne n'a dû cri-

tiquer cettefamitiarité me fera rougir

à quatre pas de la loge s'il me falue

d'un air deconnoiirance cela n'eft

pas

proporable & je fuisperfuadé que cet

inconvénient a fait retirer laplus grande

partie desgens d'une certaine étoffe de

ce chaosfrat.ernel où tout le monde

eft abfolument confondu. J'aurai plus d'une

fois occafion de me récrier contre l'indé-

cence de cemélange l'idée du niveau

préfente à l'abord une allégorie flatietife

les petits font comblés de voirdifparoître

l'efpace qui les éloignoit de leursfupé-

rieurs, ceux ci font forcés de renoncer

à leurmarque, à l'inhumaine habitude de

faire fentir Jepoids du crédit & de l'au-

torité mais au détail lesconséquences

fontfâcheufes une ame vile s'apprivoife

trop aifément, &penfe d'autrui

d'après

foneoeur ainfi l'homme refpeâahle

dont lanaiflance l'état & les fentimems

Page 192: L'Étoile Flamboyante Tome 1

i8<S L'Ê T o i l E

garantiffentles vues n'ofe prefque plus

rifquer de faire une belle action fans

être Soupçonné du motif, dont la canaille

qui le juge ferait capable.La maçon-

nerie réduite à la clafre la plus vile d'entre

les citoyens ou devenue au moins la

récréation banale du porte-faixcomme

du gentilhommes'avillit tous les jours

patte pour un pays où tout eft à peu près

peuple où l'on s'honore d'un défi à

coups de poings mais ailleurs com-

ment concevoir que tel quide fa vie n'a

dû bâtir que des barraquesfaire un

ragoût un habit une perruque fonge

reconftruire le temple de Salomon,

& puifle y être propre ?Il faut des

hommes pour porter l'oifeau fans doute;

mais en ce cas, diftinguons donc les vrais

architectes qu'une claffe fupérieure

fidelle à fon institut, relte févere fur le

choix des fujets, que cette analogie plus

fublime plus directe plus conféquente

au vrai but des Maçons, devienne exclu-

fivement le taux des perfonnes honnêtes,

je ne dis pas précifément pourles

mœurs ce point eft abfolu mais hon-

Page 193: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 187nêtes dans toute l'étendue du terme

pour Je genre, la qualité, l'état, & quedans ces fortes. de loges on affortiiFe les

êtres fi l'on veut réellement rapprocherles efprits & lier les coeurs.

Je promets d'obéir à mes fupérieurs dans

tout ce qui me fera prefcrit pour le bien.

Dans une fociété libre par elle même

qui fans fortir de l'enfemble & du corpsdes citoyens en forme cependant un à

part qui hors la dépendance généralene reffortit à aucuns chefs que ceux

qu'elle s'eil elle-même donnés d'aprèsles règles qu'elle-même s'eft faites, il eft

tout fimple que celui que l'on y admet

promette entière obéiffance. L'attribution

de l'autorité qui réfulte d'un nœud libre

eft elle-même un effet libre l'aveu de

cette autorité, l'engagement de s'y fou-

mettre font des actes légitimes. Je ne

difcuterai point ici la force de cette

petite domination que l'on pourroit nom-

mer ariftocratique & qui femble un

peu formée fur le modele républicains'il y avoit moins de mêlange plus de

concert, des perfonnages plus marqués,

Page 194: L'Étoile Flamboyante Tome 1

l88 L'É T O I L E

plus impofants, on éviteroit peut-être

l'anarchie prochaine à laquelle la fo-

ciété vife depuis long- temps au refte,

Je candidat ne prometd'obéir que dans

ce qui lui fera prefcrit pour le bien cette

claufe feule fait. l'apologie de l'engage-

ment & du précepte.Vous fubfifteriez

peut être encore fociétés profctites

& trop juftement condamnées fi vos

vœux de foumiflion à votre chef n'avoient

pas été plus indéfinis que ceux des Francs-

Maçons pour le bien ce mot exprime

tout & remet les contractants dans les

bornes des devoirs relatifs & communs

qui font dans la police génerale comme

dans l'ordre particulier. La promette du

fecret n'eft pas non plus une précaution

vicieufe le plaifir contifte fouvent au

myttere dont on l'affaifonne. Les Maçons

qui fe fentent fans reproche, auxquels

perfonne ne fut jamais fondé d'en faire

d'effentiels s'é1mufent des conjectures aux-

quelles ils excitent la curiofité publique

jaloux de leurs procédés, de leurs ufages,

de leurs formes, ils impofent la loi de ne

pas les révéler; quelle induction fâcheufe

Page 195: L'Étoile Flamboyante Tome 1

A'N T E. 189

peut-on en tirer ? Tous les jours dans la

meilleure fociété on regretteroit que de-

main, l'on fût informé chez le voifin

des bagatelles innocentes qui ont occupé

la veille & rempli le vuide de la foirée.

Je ne vois nulle part un commandement

précis qui oblige d'afficher ce que l'on

fait entre amis. Le mauvais argument,

quiconque fait mal fe cache n'eut jamais

à mon gré une forme probante l'au-

teur de l'étrenne au pape y a répondu

par une queltion tous ceux quife cachent

font.ils le mal & alors quelle chaîne

de pitoyables conféquences. Qui mail

agit odit lucem, ofera-t on dire, ergo qui

odit lucem malè agit. Le plus petit logi-

cien rougiroit d'un pareil fillogïfme, peut-

être même nieroit-il absolument la ma-

jeure, car il n'eft que trop fréquent de

voir le vice faire trophée de fa déprava-

tion. En paroît- il queldue marque contre

les Maçons, aux détails que je viens de

faire & qui font ceux des premiers

engagements d'un initié ? Un ordre un

corps une fociété doit être jugé fur

fa morale l'exemple en fait foi, il n'eft

Page 196: L'Étoile Flamboyante Tome 1

19°L'ÉTO ÎLE

pas loin de nous celle des Franes-Ma-

cons eft retenue très-clairement dans le

formulaire de l'obligation j'y ajouterai

fans réflexions ultérieures celle que l'on

donne à titre de devoirs norma morum

regle de mœurs aux Maçons qui par

leur intelligence, leur zèle ou leur ancien-

neté, ( car il faut annoblir la marche de

chaque chofe ) font parvenus à un grade

réputé Supérieur voici les dix articles.

Page 197: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 191

Devoirs des Chevaliers de l'Orient.

1. Aime», adorer & fervir le

vrai Dieu & obéir au fouverain.

z. Avoir en horreur les médifances la

calomnie & le menfonge.

3. Se fecourir mutuellement foulager

chacun dans fes befoins & prévenir même

fon frere.

4. Faire accueil aux êtrangers Se

exercer les vertus de l'hofpitalité.

5. Vifter les malades les consoler

les aider, & enfevelir les morts.

6. Prier pour ceux qui font perfé-

cutés, & s'efforcer toujours de juflifier ÔC

de protéger l'innocence.

7. Aimer tous les hommes en géné-

ral, fuir les vicieux n'avoir foi-même

aucun vice.

8. Ne point fréquenter les lieux de

débauche & les femmes de mauvaife

vie.

9. Etre régulier obfervateur des loix

Page 198: L'Étoile Flamboyante Tome 1

igi L'Étoile

maçonniques inftruire toujours avec

douceur & exa&itude.

to. Reprendre ceux qui manquent à

tout l'ordre en général & les décéler au

chef de la loge, s'ils ne veulent pas Ce

corriger.

Si tous ces objets font remplis votre

caufe en gagnée, mes freres; voyons fi

vos réglements généranx y aflortiflent

& comment vous les faites exécuter.

Règlements

Page 199: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE,19J

Tome 1. 1

Règlements Jurifdictions.

L A juridiction des Maçons eft tout-

à fait gracieufe la puiffance coaEtive

étant toujours une émanation du pou-

voir fouverain elle n'eft pas dans leurs

mains parce qu'ils ne font avoués ni

du prince ni de l'état ils ne peuvent

forcer à l'exécution de leurs ordon-

nances n'ayant pas le droit de faire des

loix pofitives, ils n'ont pas celui d'in-

fliger des peines phyfiques. Leurs règles

leurs obligations font purement morales

le délit ou la contravention en ce cas

ne peut être fujet qu'à des peines mora-

les, encore douterois je fi celle du

déshonneur, de la tache qu'ils peuvent

faire à la réputation du délinquant, foit

par une radiation aux regiftres foit par

l'exdufïon de la loge, & depuis peu,

par la fuppreflîon de titre de maître &

de la patente de maîtrife j 1eft un ?.£te

bien légitime. 11 n'eft pas à nombrer

combien de fois j'ai répété ces vérités

Page 200: L'Étoile Flamboyante Tome 1

ip4 L'ÉTOILE

aux Maçor.s qui m'étoicnt fubordonnés.

Aux accufations aux clameurs, aux

centres, aux plaintes aux. il n'y

a qu'à prendre un parti violent propos

vague Se que chacun tient fans favoir

pourquoi je répondois toujours mais,

mes chers ireres que ferez-vous à ce

prétendu coupable ? uferez-vous de vio-

lence, c'eft fortir de l'efprit de l'ordre

vous le jugerez vous le condamnerez

vous lui lignifierez votre arrêt quel cas

en fora- 1- il ? où font vos tiédeurs & vos

droits? il appellera de toutes ces fuper-

bes décidons au tribunal de la liberté

premier cara&ere de l'homme devise

de notre état il en appellera peut-être

au tribunal de la raifon qui fans doute

cafTera la Sentence Se démontrera l'in-

fuffifance du juge. C'efl: au fentiment feul

à contenir dans des reg!cs qui doiuent

être aiiflî de pur fentiment des hom-

mes qui ne font en effet liés & fubor-

donnés que par le fentiment n'admettez

que des fujets capables d'en refpe&er

l'empire il fera nbfolu & vous éviterez

cette foule de loix arbitraires qui annon-

Page 201: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 195

I i

cent une mauvaife organifation,8t montre

plutôtle caprice de l'efprir humain que

la validité d'un lieu deltirué de tous les

arcs boutants civils qui fuuls peuvent

lui f rvir de point d'appui. De là cette

variété intcoduite dans prefque toutes les

loges qui défigure le code primitif des

loix maçonniques & met chaque Maçjn

dans le cas de pouvoir éluder un pré-

cepte par la citation d'un autre q.)i fur

le même objet contredit expreifëment.

La pureté de la tnorale ne reçoit point

une atteinte notable par ces liiiTcrences

c'efl: tout ce qu'il m'importe de

quant à prêtentil exiile même un for-

mulaire commun de préceptes anciens

qui font à peu de chofe près les mêmes

par-toutcette catégorie Ca divife en

relation de chacun des gradesen les

parcourant, nous compléterons peut-être

l'idée que l'on a déjà prife de ces grades

en eux mêmes.

Page 202: L'Étoile Flamboyante Tome 1

196L'É T O I L E

Statuts pour les Apprentis.

Article PRE .M 1 E R.

I L ne fera permis à aucun frere, de

quelque qualité & condition qu'il foit

de propofer un profane pour être reçu

Franc-Maçon qu'au préalable il ne fe

(oit foigneufement informé de fes mœurs

& conduite defquels il fera comptable

fur fon honneur vis-à-vis de la fociété

& s'il arrivoit contre toute attente qu'un

mauvais fujet fût admis & reçu légére-

ment, le frere parrain fera puni égale-

ment de la faute commife par fon élevé,

car il eft trés-exprefiément recommandé

à tous freres propofants d'être cir-

confpeûs fur les profanes qu'ils préfen-

teront.

AttT. IL D'abord qu'un frere qui

devra tout au moins être maître aura

propofé un récipiendaire le vénérable

renverra la délibération à la loge fui-

Page 203: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.197

13

vante afin que chacun ait le temps de

s'aboucher & de s'informer du comporte-»

ment du profane.

ART. III. A la loge fuivante le frere

propofant demandera la parole pour

obtenir le fcrutin auquel il fera procédé

à l'inftant en la forme fitivante. Le frere

fdcrétaire donnera à chacun des maî-

tres, les apprentis & les compagnons

devant être exclus de tout droit de fufr

frage une balle b!anche & une noire

alors chacun à ton rang mettra celle qu'il

juge à propos dans la bourbe du fcrutin

la-blanche défighe l'acceptation la noire

la réje&ion.

Art. IV. Le vénérable fera avec le

fecrétaire la vifite du fcrutin pour véri*

fier le nombre des balottes & voir s'il

fe rapporte à celui des votants. Si toutes

les balles font blanches il prononce

l'admiflion en cette forme, s'adreffant au

parrain Votre élevé eft agréé vous

» pouvez le préfenter fuivant notre ufage

» le frere terrible vous aidera dans vos

» fonctions. »

Art. V. Plu lieurs balles noires au

Page 204: L'Étoile Flamboyante Tome 1

I98 L'É T O I L E

fcrutin obligent de le recommencer juf

qu'à trois fois, & à la dernière, fi elles

s'y trouvent encore le propose eft

exclu. S'il n'y avoit qu'une feule balle

noire celui qui 1'a mife efi obligé de

annoncer au vénérable qui fe levant

de fon fauteuil écoute les motifs de

l'opposition s'ils lui paroüTent frivoles

ou qu'une inimitié en roit la bafe il

tranche del ni- même la difficulté.

ART. VI. Si les raifons des oppofants

font légitimes & appuyées de preuves,

le vénérable fe replace dans fon fauteuil,

& dir toute la loge Mes freres

j'efpere que perfonne ne s'avifera de pro-

pofer déformais le profane un tel parce

qu'il eft rejeté à jamais.

ART. VII. Après la réfolution de la

loge fur l'acceptation ou le refus le

frere propofant devra en inftruire le pro-

fane admis ou rejeté fans jamais dire le

nom des oppofants, & ce, feus peine

d'expulfion.

ART. VIIf, Les raifons pour rejeter un

fujet doivent être graves telle que la

dépravation de fes moeurs ou que quel-

Page 205: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE, ioo

14

qu'un de fa famille ait été puni par la

juitice les affaires particulières n'ayant

aucune relation à la Société.

Ap. i'. IX. Tout profane qui fera pro-

pofé en loge devra être qualifié par le

frère parrain par (on nom furnom

fimplernent fans aucun titre- ni diitinc-

tio:i pour marquer l'égalité en cette

manière. Le profane tel. demande d'être

reçu Maçon &c.

ART. X. Le parrain nura foin de pré-

venir fon candidat des frais de ré-

ception qui ne feront jamais au de!rois

de cinq guinées pour la première initia-

tion, attendu qce le but des frères étant

la charité & les recours muniels il faut

bien former une caiiHj commune con-

tenant des fonds propres à y fubvenir j

les frais de réception luminaire ban-

quet, étant d'ailleurs confidérables, fans

compter le droit des freres fervanrs qui

eif toujours de trois livres iterling par

chacun grade.

ART. Xt. Le parrain fera tenu de faire

rentrer les droits à la cailfe avant la ré-

ception il en cil garant & principal

Page 206: L'Étoile Flamboyante Tome 1

100 L" É T O I L E

payeur laloge n'ayant rien à demander

au propofé, mais bien au propofant qui

de Con côté avifera fon élevé que au delà

débits droits, Ufournifle encore à chaque

frere une paire de gants d'homme & une

de femme.

Statutspour

lesCompagnons.

Article Premier.

il La loge que l'on tiendra immédia-

tement après avoir balotté fur le compte

d'un profane le frere parrain le pro-

posera derechef, c'eft alors que défini-

tivement l'acceptation ou la réjc&ion Ce

prononte i! en fera de même pour

promouvoir au Compagnon âge & cha-

cun des autres grades parce qu'il fera

toujours permis à chaque frere votant

moyennant que ce foit avec décence &

fans partialité, de faire la réprobation

qu'il trouvera convenir pour J'avantagede la loge moyennant que le refus fort

bien fondé.

Page 207: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. iox1 T T *m

15

ART. Il. Aucun frère fervant ne pourraêtre reçu compagnon s'il n'a été ap-

prouvé à différentes reprifes & fi la

néceflité de la loge ne l'exige pour la

plus grande fureté, telle que pour mettre

nos mylleres à l'abri des profanes, rece-

voir l'hôte d'une maifon où l'on s'affem-

ble, ou quelque Serviteur d'un maître

de loge en ufant des plus grandes pré-

cautions & leur faifant envifager cette

faveur comme la plus fignalée puif-

qu'on les admet parmi leurs bienfai-

teurs.

ART. III. Dans le cas ci-defliis il

faut changer le mot de pafle du frere

fervant, & lui donner celui d'apprenti& de compagnon il ne fera plus

regardé comme les autres Servants, fans

que jamais on puilfe lui rappeller del'avoir été parce qu'il vaudroit mieux

ne pas l'élever que de lui repro-cher.

ART. IV. Si cependant quelque frere

fervant avait rendu des fervices impor-tants à l'ordre & à la loge il pourraêtte promu à la maîtrife & même

Page 208: L'Étoile Flamboyante Tome 1

2.01 L' É T O I L E

i 1 I é m •aux grades ultérieurs mais difficile-

ment parce qu'il en faut être avare

& ne pas les prodiguer à des perfon-

nes qui n'en connoîtroient pas tout le

mérite.

Art. V. Il eft très-expreflement dé-

fendu de recevoir en même jour un

profane de l'apprentiiïage au compa-

gnonage, à moins d'un cas urgent

tel que celui d'un voyage ou autre de

pareille nature & alors le vénéra-

ble fera fentir au récipiendaire toute

l'étendue de la grace que l'on lui

fait.

ART. VI. Avant de recevoir un ap-

prenti au compagnonage il faudra en-

viager fi l'on veut & croit pouvoir le

faire pafrer par après à la maîtrife &

r on l'en juge digne parce que s'il eft

d'un certain rang, il faut ne le laifler

compagnon que le temps nécelTaire pour

l'inftruire '& relever à la maîtrife le

plutôt poffble.

Art. VIL Aucune affemblée ne fe

féparera qu'au préalable celui qui pré-

fide n'ait eu l'attention de rappeller à

Page 209: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.iOj

1 6

tous les frères l'obligation étroite où ils

font de faire l'aumône en conféquencele frere tréforier, affilié d'un furveillant,fait pairer la bourfe ou la boëte, dans

laquelle chacun met à fa volonté Se

rivant fes moyens. Le produit de la

quête ett enfuite dépofé dans une caiffe

particulière qui s'accroît encore des

différentes amendes que l'on prononce

en loge pour fautes commîtes ou ab-

fences, ou manquements invitation

jurements paroles indécentes impié-

tés, difputes politiques ou telle autre

c'iofe qui peut choquer l'ordre & trou.

bler la paix & l'hartnanie entre les

fxeres.

Page 210: L'Étoile Flamboyante Tome 1

204 L' É T O I L E

Statuts pourles Maîircs.

ARTICLE PREMIER.

v-est ici que chacun reprend fon état

naturel, après avoir été felon l'ordre

maçonnique éprouvé dans les deux

grades précédents, lors defyuels il n'eft

pas permis au parrain d'anoncer fon

candidat autrement que fous la qualité

d'un gentilhomme qualification qu'il

acquiert de quelque état qu'il foit par

fa prudence & fa difcrétion un fâge

vertueux étant préférable parmi nous au

fafte de la naiiïance que le feul hafard

a produit.

ART. II. Lorsqu'un- candidat à la mal-

trife aura été balotté & fa réception

unanimement confentie quelquefois

suffi par une .fimple acclamation alors

les fonctions du parrain ceffent & c'eft

au frere terrible à le travailler plus par.

ticuliérement.

ART. IIh Le murmure fourd & le

Page 211: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE.205

battement du tablier doivent être les

feuls interpretes de la lage dans le

moment critique où le compagnon remis

es mains des furveillants, patfe par les

différentes épreuves de ce grade, fous

la voûte d'acier & fur la tombe où il

va être précipité lui-même, & qui juf-

que- là doit toujours être rempli par le

dernier maître reçu.

ART. IV. II ne fe pourra faire aucune

réception de maître qu'il n'y ait un

atelier qui la fuive par une ou plufieurs

réceptions d'apprenti pour éviter la

trop grande dépende. Il y aura de

fixe pour droit de rmûtrife le cin-

quième des premiers droits ainfi en

rivant à chaque grade jufques aux fù-

périeurs, dont les frais font plus con-

fidérables.

Attr. V. Le fecrétaire inferira le nom

& Surnom du nouveau maître fur le

livre fecret, & la date du jour, an 8c

mois de la réception afin que s'il ve-

noient annuellement comme ce fut un

temps l'ufage, des vifiteurs de la grande

loge ils puiffent lever un extrait Sc

Page 212: L'Étoile Flamboyante Tome 1

206 L' É T O I L E

faire enregistrer à la loge du grand

prote&eur.

ART. VI. Nul frere, de quelque con-

dition qu'il foit ne pourra parvenir à

aucune dignité de l'ordre et moins qu'il

ne foit maître.

Art. VII. Tout maître fera éligible

par voie de Scrutin pour toutes les digni-

tés, même pour celle de vénérable

s'il n'y a des frères fupérieurs en grade

qui foient membres de la loge auquel

cas, ceux-ci devront être préférés à caufe

de leur expérience & l'on ne pourroit

voter à leur préjudice qu'après en avoir

donné avis à la grande loge s'il y en

a une 8C que le cas foit airez grave,

pour mériter expullion. Au bas de cet

article eft écrit en gros caraâeres cas

qui ne seft jamais pré/enté. Viennent en-

fuite les réglements des élus grands

élus chevaliers de l'orient de l'épée

de l'aigle noir, blanche couleur de

rofe que fais-je? chevalier de rofe-

croix, élu parfait écofïois qui tous

à certaines modifications près, contien-

nent en fubfiance le mêmeprincipe

Page 213: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE.207

beaucoup de cérémonial & fort peu de

chofes. Ceux des écoffois c'eft-à dire

queceux

que communément on répute

tels dans legros

de la maçonnerie font

fur-touttrès-étendus; cela n'eh pas éton-

nant, ce. grade ayant les propriétés du

polype que 1 oncoupe en mille

pieces

& dontchaque partie reproduit un tout,

il eft fenfible que les règlements ont mul-

tipliés en raiCon de la maffe ce calcul

eH facile; les leurs à tout prendre ne

con tiennentguere qu'un catalogue-

rai-

fonné desprivileges illufoires qu'ils

s'arrogent ens'annonçant pour ce

qu'ils

ne font pas il n'y apoint de mal d'être

de Con pays, mais il y en a beaucoup à

fe dire d'un pays dont on n'eft pas les

EcoiFois d'EcofTe ont feuls des droits à

revendiquer; leurs réglements font fages,

jene les traduit point ici c'eft chofe

étrangere à lamaçonnerie regardée fous

Tafpeâ qu'elle préfente voici quelques-

uns de cespréceptes généraux.

Page 214: L'Étoile Flamboyante Tome 1

io8 L'Étoile

Statuts généraux & anciens.

ARTICLE Premier,

PERSONNE ire pouvant valablement s'en-

gager fur des chofes qu'il ne connoît pas,

aucun profane ne fera admis dans l'ordre,

qu'auparavant il n'ait été prévenu qu'il

n'y a rien de contraire à Dieu à la

religion au prince, à l'état aux bonnes

moeurs la parole d'honneur de l'intro-

dufteur lui en fera donnée pour gage,

qui doit décider fa confiance, avec pro-

mené de le difpenfer de tour engage-

ment, s'il eft trompé fur aucun de ces

articles au moyen de quoi il ne peut

reprocher d'avoir été conduit en aveugle,

fans (avoir ce donr il s'agiflbit.

ART. Il. Si quelqu'un après fon admif

fron eft trouvé fautif fur aucun des arti-

cles ci detfus mentionnés comme ce

font tous des objets & des cas graves, fur

lefquels il n'y a point de palliatifs fuppor-

Page 215: L'Étoile Flamboyante Tome 1

F L A M B O Y A N T E.Il .1

tables, il fera dégradé publiquement en

loge, dépouillé tie fcs habits & distinc-

tions maçonniques s'il en a & châtré

ignominieufement pour toujours.

Art. II L I,'efprit de pa ix d'union 5c

d'intelligence devant être conftamment

le nôtre on ne peut trop faire fentir an

candidat, combien il eft défendu de traiter

en loge aucune matiere fujette à difcuf-

fion & à digues, comme cïo£crine politi-

que, médifance, propos équivoques, Sec.

Si quelqu'un contrevenoit aux préfents

articles les peines décernées contre lui

font porcées aux réglements au titre des

amendes

ART. IV. Rien n'étant plus félon la

nature que de remettre les hommes dans

cette égalité pour laquelle ils font nés

on ne foufFrira en loge aucune préémi-

nence, diflinêlion honneur marqué

égard de rang de naiflance ou d'état,

qui font des prétentions odieufes à tel

point que fi l'on voyoit quelqu'un s'en

prévaloir le vénérable doit afife&er de

l'humilier en lui aflîgnant la dernière

place Se l'occupant aux emplois les

Page 216: L'Étoile Flamboyante Tome 1

2IO L' É T O I L E

plus bas pour le fervice des frères.

Art. V. Ce nom eft le feul reçu en

loge celui de monfieur y eft abfolument

proscrit, ainfi que l'ufage de toute langue

étrangere Se différente de celle que l'on

parle habituellement dans le pays, ou au

moins dans la loge les affertions avec

jurement font également puniflables

étant bon de réprimer tout ce qui tient

trop au flyle des profanes dont nous

cherchons nous réparer.,

ART. VI. L'obligation du fecret eft

rigoureufe à tel degré qu'un frere qui

feroit prouvé y avoir manqué ne peut

obtenir aucune gr?ce attendu qu'i! eft

dans le cas du parjurc faute qui ne

permet plus de lui rendre aucune con-

fiance. C'eft par cette raifon de la né-

ceflité abfohte du fecret, que les femmes

font exclues des loges & ne peuvent

fous aucun prétexte y être admifes.

L'exemple de Samfon & de Dalila fait

loi de telle forte qu'un Maçon qui in-

troduirait des perfonnes du fexe dans le

fan£hiaire de nos travaux même, à l'heure

du banquet [croit, par une julte puni-

Page 217: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLA M BOY AN TE.

tion, déchu de la qualité de vénérabless'i' l'étoit., ou de toute autre fun&ion& privé pour neuf ans de l'entrée des

loges.

Art. VII. La chnrité étant notre prin-

cipal devoirs, toute loge devra fecourir

un frcrc dans le befoin prenant fi c'eft

un frère de la loge on ne devra pas

attendre qu'il demande du recours, il

faut le prévenir; c'eft pourquoi l'atelier

ou banquet doit toujours être médiocre

& frugal pour ne pas épuifer les fonds

Se garder des reffources pour ces fortes

de circoniïances.

Art. VIU. Il feroit indigne d'huilier

un frère & de t'obliger d'avouer fa né-

ceiîité & fon malheur fouvent imprévu

tel qu'une banqueroute des lettres pro-

teftées, un navire péri, la foudre du

ciel un vol un incendie ou une perte

générale ou quelqu'autre affaire à lui

fcul connue & qu'il ne convient d'appro-

fondir, s'il eu: eftimé honnête homme

alors on doit faire un effort extraordi-

naire, éhuifer les fonds de la loge fai-

gner la bourfe des particuliers parce

Page 218: L'Étoile Flamboyante Tome 1

ïii L'Êtoil!

qu'il vaut mieux réparer tout d'un coup

fon malheur que de l'aider foiblement,

fur-tout fi c'efl un frere refpe&able dans

l'ordre & dillingué dans l'état civil.

ART. IX. On fera plus circonspect fur

le compte des freres étrangers auxquels

on donnera néanmoins du fecours mais

fans déranger les fonds & même dans

ce cas les plus pécunieux de la loge

fe cottifent entr'eux pour y fubvenir &

lorsqu'un frere vifiteur s'annoncera, fous

prétexte de demander du recours, comme

il eft poffible fous ces dehors de la pror

bité d'être trompé par un frere expulfé;

la loge examinera fcrupuleufement s'il

eft muni d'un certificat authentique, qui

témoigne de fes bonnes moeurs & de fon

honnêteté.

ART. X. Il ne fera permis à aucun

Franc-Maçon de changer, innover,

expliquer à fon gré les queftions de la

fublime fcience à peine d'être déchu à

perpétuité du droit d'être pourvu aux

grades fupérieurs & en cas de pertina-

cité, de tout fuffrage a&if & paffif»

pendant un an & fi l'opiniâtreté ou

Page 219: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 211

Pinfolence étoit pouffée plus loin d'être

expulfé à toujours de la loge.

ART. XI. Dans l'un de ces cas, le

vénérable de la loge où le délit feroit

arrivé, en donnera avis à toutes les loges

difperfées fur la furface de la terre par

une lettre circulaire contre lignée du

fecrétaire avec injonction de ne point

recevoir dans leurs myfteres le profana-

teur, qui fera défigné par nom, furnom»

& qualité.

ART. XII. La boiflbn & l'ivrefie n'ex-

cufe pas les torts d'un frere dans la loge,

ni fon indiferétion au dehors au con-

traire, elle. aggrave la faute, parce qu'un

Franc Maçon doit toujours être fobre

& de fang froid c'eft alors cependant

un moyen de mitigation à la peine, &

l'on peut incliner à la clémence, hors le

cas de récidive. En général il faut en-

vifager les voies d'expulfion comme

odieufes & il eft bien difgracieux de

chafrer d'une compagnie un membre

que l'on auroit dû examiner plus fcrupu-

leufement avant de l'admettre car d'un

côtés c'eft expofer la fociété à l'indif-

Page 220: L'Étoile Flamboyante Tome 1

xr4 L'Étoile

crétion d'un profanateur banni; de l'autre,

c'eft l'expofer lui même à fe parjurer.

ART. XIII. Chaque loge devra recevoir

gratuitement jusqu'au grade de maître,

un médecin & un chirurgien qui par

ce moyen feront obligés de vifiter &

médicamenter tous les freres malades

leurs cures & foins ne feront pas payés,

& à eux exprelTément défendu de rece-

voir aucun préfent ni [alaire; les remèdes

feront fournis aux dépens de la caifle j

Se chaque frere de quelque qualité qu'il

foit devra fouffrir ces fortes de fe-

cours.

ART. XIV. Dans chaque grade il y

aura toujours trois freres infirmiers pour

affilier de nuit & de jour le malade Se

fe relever alternativement s'ils font trop

peu pour y fournir ils demanderont du

fecours au vénérable qui nommera des

frères d'office à cet effet ils ne per-

dront pas le malade de vue, à moins

qu'il ne l'ordonne & auront foin de ne

fe mêler d'aucune affaire de famille ni

donner aucun confeil qui puiffe être pré-

judiciable.

Page 221: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 115

ART. XV. Si le malade meurt, les

infirmiers en iront faire part au vénéra-

ble, qui ira lui- même ou enverra des

députés complimenter les intéreffés, SC

leur offrir tous les fecours de la loge

& au jour de la pompe funebre il ira

fera trouver tous les freres en gants

blancs & crêpe en écharpe lefquels de

retour de la cérémonie reviendront à

la maifon de la loge écouteront pro-

noncer à l'orateur l'éloge du défunt, dont

la date de mort fera enrégiffrée au livre

fecret ils fe retireront enfuite fans

tenir atelier pour marquer leur dou-

leur.

ART. XVI. En cas de mariage d'un

frere la loge témoignera fa joie pro-

portionnellement à l'état rang maçon-

nique Se civil dudit frere par une dépu-

tation à l'époufée, en lui préfentant de

la part de la loges une paire de gants

& un préfent convenable l'invitant à

nous procurer une fuite de Luftons qui

reffemblent à leur auteur. Le lendemain,

s'il eft poflïble la loge donnera un ban-

quet & fête fomptueufe à toute la noce

Page 222: L'Étoile Flamboyante Tome 1

ti4 L'Étoile

ces circonftances étant toujours à fàftif

pour témoigner combien l'ordre s'inté-

reffe au bonheur particulier de chacun

de Ces membres.

Il feroit ponible, mais en même-temps

je crois très-ennuyeux de produire cent

autres articles de règlements ftatuts

police particulière de loge difcipline de

grades qui Ce répétant, reviennent aflez

au même, & dont en fubftance on n'au-

gureroit pas mieux qu'on petit le faire de

ceux-ci combien la morale des Mafons,

annoncée au candidat lors de fon initia-

tion, eft pure & Soutenue au détail dans

les préceptes & les devoirs qu'on lui im-

pofe. Il eft peu de fociétés dont les maxi-

mes paroi(rent plus exa£tement confor-

mes aux vertus effentielles qui peuvent

décorer l'humanité & faire fnn bonheur.

Cette divulgation que je me fuis cru per-

mife en faveur de mes freres pour dé-

prévenir fur leur compte pour leur ac-

quérir des partifans & des apologiftes

fait bien effectivement l'iloge de la ma-

çonnerie que n'eft ce aufli celui de tous

les Maçoml Je ne conçois pas quel intérêt

ils

Page 223: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.217

'l'orne 1. &

iIs croient avoir à cacher avec tant de

foin des chofes qui ne peuvent que les

honorer ce rafinement myflérieux a l'air

d'un enfantillage & quand à toute cette

difcrétion on ne gagne que des foupçons

injurieux, des combinaisons flétriflantes,

je ne vois point que le fade plaifir d'in-

quiéter les autres vaille la bonne opi-

nion que l'on y perd c'eft une duperie

ou le but des Maçons eft analogue à leur

doctrine en ce cas, ils ont tort de fe te-

nir clos & couverts c'eft nuire au grand

tout, c'eft en féqueftrer des parties uti-

les, dont l'exemple animeroitle refte aux

vertus fociales trop méconnues trop

négligées, & qui n'exigent plus que dans

quelques livres qu'on ne lit guere. Si au

contraire l'objet des Maçons contredit en

la plus petite chofe., la morale & les pré-

ceptes, alors leur doârine devient une

impofture un piège dangereux que

la fourberie tend à la bonne foi des

uns à l'aveugle curiofité des autres

à l'imbécilité de prefque tous alors

j'abjurerois moi même un ordre que

j'étudie depuis vingt ans, & dont j'aurais

Page 224: L'Étoile Flamboyante Tome 1

2i8 L'Étoile

fi mal apperçu les principes & les rap-

ports mais non je connois mes freres,

& j'ai la préfomption de croire que per-

fonne mieux que moi n'a fu les démê-

ler leurs vues font auflidroites, que leurs

réglements & leur morale l'indiquent, les

chefs défirent peut être en procurer l'exé-

cution, le fanatifme du fecret n'eft qu'un

péché d'habitude qui ne (Ignifie rien, Se

dont il ne faut tirer aucune conféquence.

Un méchant diroit que la loi qu'ils impo-

fent à cet égard, eft une précaution fage,

ils prévoient que fi le public favoit, à n'en

pas douter quel eft le genre de leur tra-

va;], la texture de leurs grades& les

lourdifes dont ils s'occupent gravement,

on les prendroit pour des fous ou des im-

bécilles mais je ne les ai jamais regardé

à cet égard que comme des enthoufiaf-

tes, & je fuis fi fort accoutumé à voir les

hommes (e livrer aux furfaces, fans choix,

fans raifon fans examen de la vérité

que je ne m'étonne point, avec le ton em-

phatique de celui qui difpeBfe les foi-

difantes lumières de l'art royal, que quan-

tité de gens s'y laiflent prendre. Au refte,

Page 225: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE.

K

on ne peut pas dire qu'il y ait un mal

réel dans cette filiation de dignités bizar-

res dont l'effet naturel devroit être d'éta-

blir des fupérieurs une claffe d'hommes

qui commandent une claire d'hommes

fubordonnés fi cette fubordination fi né-

ceffaire au foutien d'un corps quelconquefe mouloit une fois chez le peuple ma-

çonnique, les réglements auroientplus de

vigueur & la prétendue jurifdiaion de

ceux qui les ont rédigés, ou qui font pré-

pofés à leuraccompliffement, ne feroit plus

un nom frivole, mais une autorité egicace.

Dès qu'il eft convenu que l'engagement

du candidat eft valide dans toutes fes par-

ties, au moyen des avis préliminaires qu'ila dû recevoir du parrain, du préparateur

& du maître par lefquels on l'a prévenu

que l'ordre n'exige rien de contraire à

Dieu au fouverain, à l'état & aux mceurs,

que feulement il aftreint à l'obéiffance

parfaite, à une difcrétionàtoute épreuvefi celui qui fur la foi d'un tiers, a livré

la fienne eft valablement lié à l'exécution

de fes promettes il l'eft auffi à l'exécu-

tion des réglernents qui n'en font qu'une

Page 226: L'Étoile Flamboyante Tome 1

210 L' É T O LE

fuite & dont on n'aura pas manqué de

lui donner lecture le jour même de fa ré-

ception. Si l'on a dans le cœur, & tout

homme eft dans le cas fi l'on a le germe

des vertus & des bons principes, qui font

l'apanage du citoyen religieux, du fujet

fidele & de l'ami fincere leur déve-

loppement tel qu'il fe trouve dans la ma-

çonnerie, doit être un aiguillon de plus

pour décider à leur pratique Sealors pour

ramener ceux qui s'égarent, pour con-

fondre les tranfgreiTeurs, ne devroit il pas

fufFre de remettre fous leurs yeux, le ta-

bleau de leurs devoirs & de leurs promef-

fes ? Ce droit eft dévolu aux Francs.

Maçons ils feront toujours fondés à faire

de juftes reproches à ceux qui oubliant

la fainteté du lien fraternel, en déshono-

rent le cara&ere par des manœuvres indé-

centes, une conduite irréguliere cu des

aétions vicieufes. Mais votre pouvoir

mes chers freres, ne va pas au-delà, pre-

nez-y garde la repréfentation la répri-

mande, les affronts même que l'on peut

faire dans l'enclos de la loge voilà vos

moyens toute peine qui dépafi'e le feuil

Page 227: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. m

K 3

de vos aiïemblées devient illicite c'eft un

abus répréhenfible un cauftique violent,

qui enflammera toujours la plaie bien

loin de la guérir ceux contre qui vous

exercez les menaces les clameurs diffa-

mantes, & les cenfures publiques s'ai-

grillent,s'obftinent réfléchiiïent, & c'eft

le pire car alors ils fe fouviennent qu'ils

étoient citoyens avant d'être Maçons

cette premiere qualité leur rappelle qu'ils

ont bien affez des loix reçues & de ceux

qui les adminiftrent, fans multiplier leurs

entraves par un tribunal de plus. Ce rai-

fonnement eft (impie tout ce qui fent le:

joug eft déplaifant.

Confidérons au furplus mes chers

freres 8c fans partialité la manière dont

tous vos règlements font conçus, car je

n'ai pas fait vceu d'être toujours un fade

apologifte j'ai montré que dans l'énoncé,

en général ils étoient conféquents &

s'allignoient aflez bien à la pureté de la

morale mais au fond à quoi tendent-

ils ? Quel crédit peuvent-ils avoir, & com-

bien faudroit-il de précautions pour leur

en procurer ? D'où vient en général le ref

Page 228: L'Étoile Flamboyante Tome 1

E

pe£t que l'on a pour les loix ? De leur

ut'lité de leur uniformité dc leur

étendue, de l'autorité du légiflateur, du

concours des puiflances avouées qui fecon-

d:ut la légiflation & de la première dé-

férence, obfequium que rendent à la

loi ceux même qui fontchargés de la main-

tenir, de l'interpréter, & d'en exiger

l'exécution. Il e ft itnpoflible de fe refufer

à l'évidence des définitions de la caufe,

fi l'on veut juger de l'effet qui en réfulte

& que l'on en défire, & dont elle eft tou-

jours l'antécédent nécelTaire. Efforcez-

vous, mes chers freres, je vous enprie,

de me prouver que tout cela vous con-

vienne. D'abord l'utilité de vos régle-

ment, eft à peu près une chimère leur

uniformité un menfonge leur éten-

due, très-courte je n'apperçois aucun

pouvoir légiflatif, & quant au refpeâ: à

la déférence qu'on leur porte vos chefs

font les premiers à y manquer & à

enfreindre la regle. Un peu de dé-

tail.

Je ne fais que parcourir les ftatuts de

l'ordre }ils font fi multipliés, que pouz

Page 229: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE.

K 4

les tranfcrire tous, il falloit excéder le

leâcur & occuper deux preffos un pré-

cis à cet égard étoit plus que fufïïfant. Ou

peut envisager les loixmaçonniques fous

deux afpefts ou dans leur utilité géné-

rale, ou dans leur avantage particulier

au premier cas l'examen en court

prêcher l'honneur la religion la bonne

foi la commifération la modeilie le

patriotifme la fidélité ce n'eft rien ajou-

ter aux notions premieres, que la main de

l'éducation grave dans fame de chaque in.

dividu c'eft une pétition de principes

qui fuppofe ou de l'ignorance & de la ma-

lice dans ceux que l'on exhorte ou de

l'infuftlfance dans la do&rine commune

dans les maximes univerfelles qui font

comme le pivot de l'ordre civil & l'ame

de la fociété foin fuperflu qui n'apprend

rien de neuf, & n'impose que des devoirs

connus au fécond cas ces mêmes loix

n'ont pas plus d'utilité parce qu'elles ne

font pas abfolument fixes parce qtie

pour opérer le bien qu'elles indiquent, il

faudroit un droit clair dans ceux qui les

dirent, la force en main pour l'exécu-

Page 230: L'Étoile Flamboyante Tome 1

114 L'Étoile

tion & que d'ailleurs elles portent la plu-

part fur des objets qui ne font poffibles

qu'autant que l'ordre des Maçons, avoué

à titre de corps dans l'état jouiroit en

conféquence de fes prérogatives, & auroit

le libre exercice de fes fonctions. Toutes

ces loix ainfi que le fecret appuient fur

des hypothèses, & n'ont pas un fondement

plus folide qu'un certain grade nommé

l'élu commandeur, qui remonte l'origine

de la maçonnerie aux conquêtes d'Ale-

xandre, & tire fes autorités de Quinte-

Curce. Le fecours mutuel, premier vœu

de la fraternité; les refiburces où l'on doit

puifer pour cette belle fpéculation font

nulles la taxe preferke pour l'adinifllon

d'un candidat, doit à la longue former les

fonds de cette caiffe publique, le vrai tré-

for de fordre, rame des malheureux

c'eft une belle image un phantôme im-

palpabled'un pôle à l'autre on citeroit

ii peine quatre loges où cette branche oeco-

Domique foit effeftivement greffée fur la

bonne foi & produife des fruits fi géné-

reux. La plupart des maîtres ne s'étaient

des réglements dans le fens rigoureux, que

Page 231: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.2^5

K5

pour autorifer les monopoles particuliers

qui peuvent tourner à leur profit, & lea

faire fubfifter fecretement eux &. quelques

complices, car il en faut toujours pour lesmanœuvres honteufes, aux dépens de la

place dont ils abufent Se du cara&ere cl

Maçons qu'ils déshonorent. Le récipien-daire délivre fes quatre, cinq ou fix louis

plus ou moins car les vanités à cet égardfont encore un vice de règlements j il cro:t

bonnement que la bougie Se les gan$

payés le furplus entre à la maflb ua

frere tréforier qui n'eft ordinairement

qu'un prête-nom, ouvre fon grand livre,

enrégiftre gravement, au folio bien para-

phé, le nom du payeur & la Comme

payée arrive la faint Jean, jour célèbre

auquel les comptes & la geftion doivent

paiïer fous les yeux de chacnn des mem-

bres le maître adroit occupe la féance

par des chants de feHivité, ou la friandife

d'un repas, qui coûte fort chair à tout le

monde, on n'apas le temps de parler d'af-

faires, c'ert partie remife, ou fi les comp-tes paroiOent arrangé; à l'avance par les

întéieffés & lescompnbles, les dépenfes

Page 232: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Xl6 L' t T O I L E

de l'année abcorberont les fonds laba-

lance penchera à coup sûr au détriment

de la loge qui refte toujours redevable à

ceux qui ont été les mauvais ouvriers de fa

régie. Perfonne n'ofe inculper le chef ni les

vénérables officiers, c'eft l'inftant des élec-

tions, on efpere que le fcrutin pourra

tourner en fa faveur, on fe verra peut-

être à portée d'en faire autant avec impu-

nité; c'eftune vengeance fi douce! Ainfi

la malverfation s'excufe par l'efpoir de de-

venir à fon tour un malverfateur. Si quel-

que voix honnête s'élevé & crie à l'ini-

quité, on fait taire l'audacieux clair-

voyant, & peu de jours après la calomnie

qui veut écarrer ce témoin terrible n'ou-

blie pas de faire retomber fur lui tout le

blâme qu'elle méritoit. Les nouveaux re-

çus n'ofent réclamer contre cette odieufe

befogne ils fon encore trop jeunes à la

caufe leur aris ne marqneroit pas ou

b en la manie des grades les retient ils

font curieux, avides de dignirés de dif-

.tin&ions, de cordons, de parures; on les

leur vendra gros avant qu'ils acquièrent

lespriyilége de s'en plaindre, Je fais tel

Page 233: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 22.7

K <p

vénérable qucl nom qui pour lire à un

pauvre diable en chambre tapiiFée 8>C

échauffée de foixante dix bougies, le ché-

tif cahier des rêveries des Lorobabel & tki

paflage d'un pont qui n'exila jamais n'a

pas eu pudeur d'exiger quatre louis d'or

encorefut-ce un viliteur étranger qui

foit les épaules d'une elle exaction que

l'on chargea de cette leâure car le digne

repréfenrant du chef des Juifs délivres, qui

préh'doit à ce ténébreux conciliabule ne

pouvoit déchiffrer l'édit de Cyrus, la

pitoyable hiltoire de la forzie de Babylone.

Réglemcns maçonniques à quoi fervez-

vous donc? fi chacun vous interprète à fa

guife, li les commentaires du fordide in-

rêt peuvent avilir le texte précieux & efti-

mable que votre code renferme. Il eft une

régis générale en maçonnerie & qui

rapproche plus qu'on ne penfe des axiomes

canoniques, il faut que le prêtre vive de

l'autel; les Maçons de ce liccle [avent

merveilleufement appliquer cette maxi-

me habiles à tirer parti de tout leut

commerce eft fans bornes: En vain un

nombre de chefs éclairés &" dévoués au

Page 234: L'Étoile Flamboyante Tome 1

128 L'ÉTOIL E

bien s'appliquent ils journellement à

réformer les abus & déterminer des for-

mes confiantes & ftables qui aflurent l'état

de l'un, tes droits de l'autre, les redevan-

ces de celui-ci l'efpoir de tous travail

en pure perte la vertu même fournit des

armes au vice. J'ai vu les certificats ref-

peaables d'un corps que je révere,.& qui

font le figne invariable & le caractère

fixe de la fraternité devenir l'inflrument

de la cupidité d'un maître qui les acheté

trente fix fous, pour les revendre quinzelivres dans le fecret de fa chambre gar-

nie, où malgré la fievre & le mal de

David qui le ronge, il allume brufque-

ment trois cierges lance par terre une

aune de toile cirée couvre de bleu un gué-

ridon vermoulu, & iuftrumente dans ton

accès fur la bourfe d'une victime qu'on lui

amené qui femble fe faire Maçon tout

exprès pour lui procurer de quoi payer

les drogues 6c le médecin qui le visite,

& qui peut- être tâte plus volontiers le

gouiTet du candidat que le pouls du ma-

lade. Un brave homme indigné de cas

infamies voulut y foufirairc un aflif-

Page 235: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 2*9

tant qui dans peu fous prétexte de

palrer du triangle au carré devoit fub;r

le même fort & lui fuppléa pour cinq

louis d'or dont on pouvoit montrer

l'emploi, trente grade, trente fables

qui lui en auroient coûté cinquante en

pure perte auffi-tôt les ferpents s'agitenr,

l'envie trèfle fes cheveux Mégere lui

prête fon fifflet fans égard pour un nom

refpeébble, un perfonnel fage, un titre

maçonnique de vingt années digne prix

de fes travaux dans l'ordre dont il fut

prefque le martyr dont il eft le plus

ferme appui, dont il feroit volontiers le

réformateur il fort de la fange une voix

glapitiante & hardie qui blafphêir.e

l'honneur, la naiiîance & la vertu celle-

ci peu fenlible pour elle-même, parce

qu'elle eft dans le cas du Juflum & tenacsm

propofîti virum veut réprimer le fcan-

dale alors la voix ifolée vox clamantis

in defirto s'enroue s'étouffe s'éteint

8t finit par difconvenir balfement des in-

jures qu'elle n'avoit qu'efTayées & qui

n'ont pas pris. '.I'rifte reffource des amas

lampantes peut an fauver par un défa-

Page 236: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Z30 L' Étoile

la honte de ce qui nous y oblige ?

ces exemples ne font que trop fréquents-

Dans une province éloignée harricre &£

clef d'un grand royaume un bourgeois

fanatique de bonne foi en matière de ma-

çonnerie, &(. qui renonceroit plutôt à fon

bureau qui le fait vivre, qu'au maillet qui

le rend ridicule & qu'il tient très-gau-

chement, a fait dans fa vie deux cents

fottifes de ce genre il s'eft tellement ha-

bitué au oui & au non que j'ai vu de la

main vingt-cinq écrits qui fe contredirent,

& fur lefquels on ne peut fauver fa pro-

bité, qu'en facrifianr fa judiciaire encore

eft-ca lui faire grâce. 11 eft vrai que ces

débanches de fendillent fur le mêrnc f.iit

font d'ordinaire l'ouvrage del'obfeillon &

du mauvais génie de ceux qui l'entourent,

un neveu tracafïïer, fans principe, mau-

vais Maçon petit efprit impertinent Se

fourbe affilié de quelques freres de fon

calibre, tourne la tête au bon homme.

L'art royal manié par ces mercenaires

n'efl: plus pour eux qu'une fource d'intri-

gues, de lucre honteux & de prétentions

téméraires !e vieil onde qui, hier en'.en*

Page 237: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 231

doit raifon, paire tout-à coup du blanc au

noir, & donne un démenti public aux loix

de l'ordre & â lui-même. Règlements ma-

çonniques à quoi fervez-vous donc? 11 faut

aider fes freres c'elt le grand principe

mais onn'ofe prefcjueplus rifcjuer une bel!e

a&ian fans compromettre fa délica:elîej

un Maçon eftimable qui n'a qu'une très-

petite fortune & qui cependant e/t tou-

jours le bureau d'adrelle des malheureux

parce qu'on lui fait un bon coeur, eiïaya

il y a quelques mois, de rétablir les affai-

res d'un autre Maçon, pere de famille,

en follicitant pour lui une collecte de qua-

tre ou cinq cents livres, qui rétabliffoienî

tout, & dont la répartition fur le peuple

maçonnique d'une très grande ville

venoit au plus à deux fols pour chacun

douze à quinze frondeurs nourris aux ca-

lomnies, firent chorus pour décrier cette

bonne œuvre & en arrêter le cours il

courut de bouche en bouche que le folli-

citeur travailloitpour lui-même fa charité

n'en fut point refroidie parce que l'in-

tention étoit pure mais il eft bien dur de

le voirainti toifé par des gens fans pudeur

Page 238: L'Étoile Flamboyante Tome 1

iji L'ÊToriE

à la mesure des procédés dont ils fonr eux.

mêmes capables trifte 8c dangereux effet

du tnêlange qui paroît aflîmiler les être*

quand il les raflemble cependant ces mê-

mes antagonifles de l'efprit eftentiel de

l'ordre, avoit juré à leur initiation de ten-

dre la main à l'indigent les Itatuts leur en

avoient répété l'obligation précife. Ré>

glements maçonniques à quoi fervez vous

donc ? La clandeftinité que vous profcri-

vez li formellement prend tous les jours

plus de faveur, ÔC profane de plus en plusles vérités maçonniques dont chacun fi

permet la diftribution. Il eft confiant quedans le régime primitif, trois Maçons

compofoient une loge cinq laformoienr,

fept la rendoient jufte & parfaite. Cette

réponfe confacrée à le prouve

fans réplique alors on ignoroit encore

qu'un parchemin fût le titre réel d'un

maître de loge & que l'on pût acheter

le droit d'afreoir des impôts arbitraires fur

la curiofité publique mais alors auflî

peut être plus délicats fur le choix des

fujets n'admettoit on dans le fan£uaire

de la vertu gne des hommes incapable

Page 239: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 133

d'en effacer l'empreinte & d'en ouvrir les

portes avec le même pane partout qui pé

nétra chez Danaé cette prudence valoit

bien des loix pofitives faites depuis qui

ne parent à rien & prévoient peu de

chofe que l'on morcelle que l'on tron-

que, que l'on commente à fon gré fous

le vain prétexte de police particuliere

exigées par les circonstances la pofition

des lieux ou le caractère des perfonnes.

Réglements maçonniques à quoi fervez-

vous donc ? Cette exclamation me devient

familiere le défaut d'uniformité détruit

tout le bien que vous pourriez produire

un fecrétaire ne lit de vos articles que

ceux qui peuvent étayer le fyftême de fa

prétention actuelle qu'il veut faire valoir,

un maître de loge n'emploie votre auto-

rité que quand elle peut corroborer la

fienne dans le cas où l'interprétation

milite pour fa vanité ou fes droits: en-

tre les barils & les canons, que tout in-

génuement un profane nommeroit le

verre & la bouteille, la question s'agite,

le jugement fe prononce la regle s'éta-

blit, & l'on boit le vin du marché. En

Page 240: L'Étoile Flamboyante Tome 1

*?4 L'É T O IL E

vain un chef éclairé, plein de zele & de

talenrs un chef qu'une nation entiere

avoue d'après le choix des maîtres aux-

quels il préiide s'efforcc-t-il à l'orient

d'une longue table qu'un peu de drap verd

couvriroitplus décemment, de faire écou-

ter fes confeils Se la fageffe de fes déci-

fions en vain à fes côtés un grouppe de

Maçons honnêtes & fages tâchent-ils de

le feconder un fecrétaire intègre taille

i.nutilement la plume diligente & fidelle

qui doit tracer fur le grand livre les or-

donnances du bon ordre & les raifon-

nables combinaifons de ceux dont l'étude

eft de le mettre par-tout ce digne dé-

pofmiire des oracles du grand orient

ces honorab!es collègues chacun dans

leur partie furveillants experts tous

attendent en pure perte, le fuccès de leurs

louables foins, c'cil l'hiftoire du grand

prêtre qui dans le fond du temple

rebâti par la volonté du roi de Perfc,

faifoi: paner la facrée parole & le ter-

rible nom de l'Eternel la foule efl pu

hs:s elle fait grand bruit & empêche

l'articulation des lettres d'être étendues,

Page 241: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYA NTE. 235en couvrant le fon par des éclats plus forts.

Une fois la patente obtenue le maître

qui en eft pourvu en plaftrone fon cceur,& de ce moment il devient impénérrable

aux traits de la vérité. N'eft- il aucun moyende remédier à cette calamité, c'elt le vrai

mot, qui femblable aux fléaux d'I'gypte,

frappe d'une plaie générale tous les enfants

d'ifraë! & couvre d'une lepre prefqus

incurable larépublique mnçonne ? L'in-

conféquence & la foibleffe desréglements,la débilité des régifleurs, le mince crédit

de la ne font pas des défauts

irréparables l'ordre ne peut reprendreune certaine confiftance qu'autant qu'ils

feront réparés propofons en le plan,on ne punit point les faifeurs de projets;

je fais des gens qui ne vivent pas d'autre

chofe je ne demande pour prix du mien,

que la douce fatisfa&ion de le voir réuüir

pour le bien de l'ordre & le bonheur de

mes freres.

Page 242: L'Étoile Flamboyante Tome 1

j35L'ÉTOILE

Réforme pofiible. Conclufton.

JE pourroisme borner à tranfcrire ici

mot à mot les réflexions judicieufes qu'un

frere zélé & capable fit à ce fujet, il

y a trois ans & que j'ai très-au long

dans la copie d'un mémoire qu'il adrefla

à cet effet à un ancien maître de pro-

vince, le 17 Septembre 1764. Mais ce

plan raifonné d'une façon très-étendue,

excéderoit de beaucoup les bornes que

je me fuis prefcrites d'ailleurs ce frere

fembloit n'avoir en vue que ceux de fa

nation, & les détails particuliersfur cette

partie pourroientne pas convenir égale-

ment à tous les pays; je ferai ufage de

quelques unes de fes idées mais fans

m'affeôer plutôt pour le midi que pour

le nord ma loge eft tout finalement

celle de Saint Jean, c'eft un carré long,

dont les limites font les quatre points car-

dinaux, dont le dôme eft la voûte azu-

tée comme Maçon je touche à tous

Page 243: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante.237

les points de l'univers le zele & la

penfée d'un cofmopolite doit fe porter

rapidement à toutes les extrémités &

présenter un tableau qui réuniife & qui

grouppe à la fois les habitants de tous

les lieux. Les honnêtes gens font tous

Maçons fans le favoir & comme la

connoiuance de nos myfteres acquiert à

tous les membres, le droit de donner

leur avis pour la propagation de l'art

royal c'elt le nom favori je dirai le

mien s'il eft de peu de valeur on l'ex-

cufera, du moins en faveur du motif.

Tous les abus qui ont difcrédité la

maçonnerie depuis nombre d'années

& empêché plufieurs perfonnes refpec-

tables de s'y faire aflbcier dérivent de

plufieurs caufes tant qu'elles fubfifte-

ront, le zele & les efforts de ceux quiveillent à fon accroiffement feront infruc-

tueux j'ai dit antérieurement & dans

plufieurs ferions, tout ce qu'il eft pof-fble à cet égard les manx font à peu

près connus il faut indiquer les re-

mèdes.

Un corps qui veut avoir l'air d'un

Page 244: L'Étoile Flamboyante Tome 1

t- r

ordre devroit ce me femble adopter

les caraâeres effentiels qui diftinguent les

établiffements de cette efpece je ne vois

qu'un commandeur à Saint-Lazare, qu'un

grand- maître à Malte qu'un prote&eur

au cordon de S. Miche!, ainfi de toutes

les associations il eft de laplus grande

abfurdité qu'il exifte dans la franc-ma-

çonnerie, deux chefs diftin£ts deux

grandes loges ou tribunaux fitpérieurs,

l'un pour la France l'autre pourl'An-

gleterre comme fi la rivalité de ces

deux nations ne devoit pas s'éteindre dans

les doux épanchementsdu lien fraternel,

quimettant à niveau le roturier & le

grand feigneur doit rapprocherà plus

forte raifon parl'unanimité de fentiment

& d'ufagel'habitant de Londres & le

bourgeoisde Paris. Si l'on fuppofe la

néceflité de ce double emploi il eft

encore plus abfurde que chaquenation

n'ait pasle même privilege

& que dans

le Nord l'Allemagne, l'Italie on trouve

prefquedans la même ville une loge

conüimée par le grand-maître Anglois,

une autre par le grand orient de France.

Page 245: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 2j9

Si le regne maçonnique, patrimoine ar-

hitraire & fi£tif, eti une domination par-

tageable il faut une foisque

l'onpofe

lesbornes & que chacun fâche inva-

riablement à qui il lient; ce font deux

lots àfaire comme cadette à cet

égard la France choifira mais le choix

une foisfait il faut

qu'ilrefte fixe &

lamaçonnerie n'y gagnera rien plus

d'uniformité plus de concert, hors les

furfacesqui feront communes chacuu

aura unrégime différent il feroit bien

plus avantageux de n'avoir qu'unfeul

chef lieu un feul maître n'importe de

quel pays fa dignité feroit à vie & va-

quante par (on décès l'éle&ion tombe-

roit fur unMaçon d'une autre narion

pour un bail pareil ainfi alternant de

l'une àl'autre perfonne ne pourroit fe

prévaloir d'une prééminence défagréable,

aucun ne feroit exclus &peut être par

une nobleémulation chaque peuple

s'efforcerait- il alors deproduire

des fujets

dignes avec le temps, de remplir une

place auflî honorable. Ce n'eft point aux

Anglois qu'il fera difficile deprouver

Page 246: L'Étoile Flamboyante Tome 1

a.40 V É t o 1 l b

J • 1 • t Il'utilité de cet arrangement, ce pays des

hommes faifit toujours les objets raison-

nables mais comment perfuader des

efprits vifs des têtes légeres qui ne

s'attachent qu'à l'écorce & ne s'occu-

pent jamais guere du fond? Les procé-

dés néceffaires pour effectuer ce chan-

gement, ne font pas de mon reflbrt

affez de gens capables trouveront les tem-

péraments pofTîble<

Les grands maîtres une fois décidés

les grandes loges qui ne font que le local

de leur autorité le fiege de leur jurif-

diâion le feroient auflî. Dans ce cas il

eft vraifemhlable que ce tribunal juge

fans appel de tout ce qui pourroit intérêt

fer l'ordre & les membtes ne feroit plus

conllruit dans la forme actuelle qu'il ne

fnffiroit plus d'être maître conftitué d'une

loge pour devenir le juge de tous les

Maçons comme s'il fuffifoit d'apporter

de Rheims fes lettres de licence pour

décider du fort des citoyens de Bor-

deaux qu'enfin ce ne feroit plus tous les

maîtres de Londres ou de Paris dont

P^ut-être il faudroit élaguer les deux tiers,

qui

Page 247: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 141

Tome 1. L

qui eompoferoient cet orient lumineux

dont les atlre.s rendent quelquefois une

clarté bien pâle malgré les rayons vifs

du foleilqui les échauflè qu'un choix

unanimement confenti de tous les Maçons

du monde attacheroit ce titre de fupé-

riorité une fois pour toujours à des freres

refpe&ables par leur capacité leur état

civil leur naitfance même en dépit

de la parfaite égalité qui fâche plus

qu'elle n'honore, & que chaque nation

fourniroit de fon fein trois maîtres de

cette catégorie (je dis trois par refpeâ

pour la myfticité du nombre ) qui

tous réunis feroient des loix & les

maintiendroient fauf au grand maître

ou à la grande loge, d'avoir dans tous

les paysun député chargé de la repré-

fenter, lequel, à la tête de neuf freres

qui lui feroient un petit reffort en fous-

ordre, veilleroit à l'exécution des loix

fupérieures. & communes décideroit les

petits cas épargneroit à la grande loge

un détail immenfe & fauveroit les

délais & les longueurs aux conten-

dants.

Page 248: L'Étoile Flamboyante Tome 1

244 ÉTOILE

Ces loix fupérieures feraient unifor-

mes &déterminées celles de France,

en I743 » paroiflbient conformes à celles

de Londres de ijh pourquoi les

a-t-on changées depuis? Ces variétés

pernicieuses' donnent lieu de douter de

l'autenticité des anciens ftatuts qui ont

dû être fixes dèsl'époque de l'admifïion

aux myfteres de l'ordre n'étant pas pro-

bable que ceux qui en ont tranfinis les

premiers renfeignements aient négligé

d'y joindre des réglements formels 8c

que nous devions fuivre fur la foi de nos

engagements. En conféquence, il ne fe-

roit plus libre à chaque loge particu-

liere, de fe bâtir un code arbitraire

la grande loge étant, dans le cas pofé,

fuffifante pour donner à fes fuffragantes

& affiliées un régime & des ftatuts

permanents auxquels elles ne pour-

roient fe difpenfer d'adhérer, fans dé-

cheoir du droit de conftitution réguliere;

& pour rappeller toutes ces continuions

fi mal accordées, fi avilies fi fubrepti-

cement obtenues & les annuller toutes

à la fois le premier aéte de l'autorité

Page 249: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE,

L 2.

du tribunalétabli feroit de

changerles mots de

paffe &parole, pour ne les

conférerqu'à ceux

qui en feroientdignes,

Se la patente nouvelle avec la même'

réferve cemoyen qu'une loge de pro-

vince adéjà imaginé pourroit devenir

l'instrument leplus sûr de la réforme

totale réduire ainfi lepeuple maçonni-

que aucinquantieme de fon dénombre-

menta£hiel que l'on

peut hardiment

évaluer à dix millionsd'hommes, ce

feroit conferver encorecinquante mille

amesvertueufes; on n'en trouveroit petit-

êtrepas tant quand tous les mondes de

Defcartes feroient auffi habitésque le

nôtre.L'objection du fecret

que cette

efpece de cafreexpoferoit à

révélation

ne lignifie rien combien y a t- il de

Maçons qui fâchent vraiment cequ'ils

font & cequ'ils ont envie de faire ? Au

pis aller, ils nommeront les deux colon-

nes dutemple parleront du

pavé mo-

faïque, desfept marches, de l'étoile

flamboyantes petit malheur, la bible en

ditplus qu'eux tous à cet

égard.

La fécondeopération de la

grande

Page 250: L'Étoile Flamboyante Tome 1

146 L'ÉTOILE

loge feroit, fi je ne me trompe la fixa.

tion des connoifrances graduées de l'or-

dre, & par cvnféquent le retranchement

des contes bleus, avec lefquels on en-

dort les afpirants. Fideles à ïhiftoire

aux dates, aux époques chronologiques,

nos chefs ne permettroient plus que des

anecdotes raifonnables & qui condui-

roient au but. La claffe fupérieure &

diftinguée feroit fans contredit les che-

valiers de la Paleftine fi fur cet objet

ils confentoient de fe joindre aux Ma-

çons, comme ils l'ont fait aux croifades

& peut-être s'y décideroient- ils pour le

bien de la chofe quoique leur exigence

foit indépendante de celle des Maçons. Au

moins à leur refus, & après eux, le plus

éminent de tous les grades, feroit fans

contredit le véritable écoflîfme de Saint

André d'Ecofle le feul qui par des vérités

hifioriques & une tradition probable

prenne la maçonnerie dès fon origine

pour la conduire à fon but moral ou

phyfique tous deux également plaufî-

bles & capables d'attacher ceux qui s'y

livrent. Comme un maître de loge eft

Page 251: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 147

L 3

néceffité de connoître à fond la fcience

dont il inftruit les autres aucun Maçon.ne parviendrait à cette place qu'il n'eût

atteint ce qui s'appelle le complément

des connoiflances & il feroit toujours

pris du corps des Ecoffois, lefquels four-

niroient également les fujets comporant

la grande loge & tous ces refpe&ables

freres & tous autres Ecofïois ne fe-

roient pour leur perfonnel jurifdiciables

en aucun cas, que devant leurs pairs.

Cette claure écarteroit du marteau 8c des

fondions diftinguées tous les Maçons

qui n'auroient pas été jugés dignes d'être

admis à la clafie fupérieure de l'ordre

ce qne l'on obtiendroit qu'après avoir

maçonné neuf ans dans les claffes infé.

rieures; defquelles pareillement il fau-

droit déterminer les interflices de l'une

à l'autre après les avoir réduit pour le

tout à trois grades; favoir, l'apprenti,

le compagnon tel qu'on le donne au-

jourd'hui, & le rofe-croix pour maîtrife,

parce que cette hypothefe partant d'une

époque sûre & de laquelle des manuf-

crits précieux de près de trois fiecles

Page 252: L'Étoile Flamboyante Tome 1

»4$ L'ETOILE

légitiment l'autenticité offrirait des allé-

gories, des fujets de méditation infini-

ment plus nobles & plus intéreffantes

que l'hiftoire controuvée d'Hiram, dont

la froide commémoration ne vaut pas la

douleur que l'on arrête, ni les délires

fubféquents auxquels on s'abandonne. Le

tronc ainfi dégagé des branches gour-

mandes qui volent fa feve, & appauvrif

fent l'arbre il pourroit à la fuite pro-

duire de bons fruits. Rubans cordons,

bijous, appareils bizarres de la vanité,

vous difparoîtriez abfolument 8c avec

vous tous les moyens honteux des mono-

poles qui s'exercent & du trafic que

fe permettent les colporteurs des pré-

tendues vérités maçonniques. La grande

loge détourneroit toutes les fources de

la vexation & du lucre indécent que les ré-

ceptions procurent. On mettoit à un taux

pareil & invariable pour tout l'univers,

l'espèce de dot que le fujet devroit payer

en entrant pour fournir fa cotte part

à la malTe commune, qui alors devien-

droit effe&ivement le trécor de l'ordre

&. des infortunés, auxquels une attefta-

Page 253: L'Étoile Flamboyante Tome 1

F LA MBOYANTE.249

L4

tion en bonne forme d'un maître de

loge ou des Ecoflbis en corps de col-

lege, procureroit un fecours certain Se

abondant. Pour que cette maffe ne fût

jamais divertie la grande loge régleroitune forme de régie inaltérable dont la

geflion feroit claire & les comptes fré-

quents. Les dots ou rétributions des

inités entreroient à la caifïe, fans aucune

fbuftraction pour quelque prétexte que ce

puifte être de gants de cire ou de

décorations parce que la grande logeauroit attention de ne permettre jamais

l'éretiion d'une loge particuliere quefur un tableau de neuf membres déjà

gradués du troifieme grade & en état

de commencer les fonds de la caiffe

deftinée à l'entretien par une cottifation

égale pour chacun avec engagementde la nourrir tous les mois par une quo-tité fixe proportionnée aux facultés des

membres. Toutes ces précautions éloi-

gneroient fans comredit beaucoup d'afpi-

rants c'eft une objection prévue mais

ce feroit un avantage de plus pour l'or-

dre, qui ne feroit point alors profliiué

Page 254: L'Étoile Flamboyante Tome 1

250 L'É t o r l B

par un tas de gens de la lie du peuple

qni ne font pas nés pour pcnfer encore

moins pour être jamais les appuis d'une

inftitution utile. L'extrême égalité fi re-

commandée, régneroit dans une efpece

d'hommes, que leur état & leurs moyens

ne rendroient pas fi prodigieufement

étrangers les uns aux autres tout le

monde ne pouvant pas arriver à Corin-

the, il y auroit moins de foule & plus

de choix. Cet article fur-tout feroit fcm-

puleufement obfervé dix ducats ne

feroient plus le mérite d'un candidat

on étudieroit fes moeurs fon caractère

fes talents on auroit quelques égards à

fa conduite à fes qualités civiles &

cependant pourne fermer à perfonne

le

temple de la vertu, pourne pas

abolir

abfolument les lois du niveau on for-

meroit une claffe de freres Maçons fer-

\ants qui feroit l'apanagedes curieux

honnêtes de la très-baffe extraction avec

l'espoir d'en élever un dans chaque loge

tous les trois ans à des diftinâions fupé-

rieures, s'il s'en rendoit digne par un

mérite affez uanfcendant pour fairr

Page 255: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 251

oublier le perfonnel en faveur des qua-

lités excellentes qui font au vrai le

feul moyen propofable pour établir l'éga-

lité parce que, comme je l'ai dit ailleurs,

il eft poffible quelquefois d'appareiller

les ames & que celle d'un roturier

vaut Couvent mieux que celle du gentil-

homme, celui-ci o'auroit plus de dégoût

de s'afTeoir près d'un Maçon qui lui

relTembleroit du côté de l'efprit 8t du

cœur.

Le grand maître ou la grande loge

auroit encore. il faut en rayer fur

l'étendue du projet elle auroit & c'eft

tout ce que je défire l'indulgence d'ap-

précier le zele qui m'anime >Se d'excuCer

la témérité de mes confeils. Si jamais

on avoit beroin de détails plus profonds,

je me chargerois volontiers de les donner,

& même d'indiquer le procédé que je

crois propre à faire réuffir cette réforme.

Si elle fe fait le public revenu de fa

folle prévention avouera fans doute

que la rociété des Francs Maçons n'eff

point une école dangereufe dont les

leçons égarent. l'esprit Se corrompent le

Page 256: L'Étoile Flamboyante Tome 1

tçi L'ÉTOILE

coeur le pere entêté de fes vieux pré-

jugés, ne s'emportera plus contre un fils

jeune & curieux qui s'enrôle fans per-

miflïon fous les étendards de la vertu.

La femmelette aigrie par fa voifine ne

cricroit plus contre le pacifique époux

qui le dimanche va Ce dé!a(ler avec fes

frères des travaux de la femaine. La

couche nuptiale ne retentira plus des cris

perçants du divorce clue le feul nom

de Franc- Maçon a penfé tant de fois

occafioner dans de petits ménages. La

chaire de vérité ne fera plus occupée

par les déclamations hafardees de celui

qui condamne ce qu'il ignore la pifcine

falutaire de la pénitence coulera pour

mes freres comme pour le furplus des

chrétiens, leurs droits à cet égard font

fans doute aufri faints puifquela vertu

la mieux fondée eft celle du chriftia-

nifme, & que la maçonnerienous con-

duit à la perfection évangélique à l'ave-

nir. Une épithete ajoutée au nom propre

d'un homme cetera d'être un péché

mortel. Déjà en jugeant les Maçons par

leurs œuvies Se c'ett Je crois l'efprit du

Page 257: L'Étoile Flamboyante Tome 1

Flamboyante. 253

précepte évangélique dont la lettre feule

tue déjà l'on auroit dû prendre fur leur

compte une opinion moins défavanta-

geufe, des pauvres foulages par la main

même des payeurs des vœux offerts à

l'Eternel dans des circonftsnces de mar-

que, leur tranquillité fur tout ce qui eft

aiFaire publique leur air d'union &

^'intelligence plaidoient en leur faveur,

& je maintiens que quand même la ré-

forme n'auroit pas lieu quand l'ordre

refteroit au point où il eft il faudroit

encore applaudir à fa conftitution a&uelle

honorer ceux qui en font, & fe réjouirde fon accroiffement. Les ploifirs (impies

2uxquels il invite, ne le corfidérer qu'à

cet égard font préférables aux fcanda-

leufes orgies dans lefquelles le pere de

famille abforbe fon patrimoine, tandis

que la jeunelTe s'y débauche. N'eit on

pas d'accord qu'en bonne police les

fpe&acles publics font nécetfaires dans

les grandes villes pour éviter d'autres

excès ? Que l'on laitfe au moins aux

loges le privilege d'une pareille utilité

elles l'auront fans doute & bien fupé-

Page 258: L'Étoile Flamboyante Tome 1

15¢ L'ÉTOILE

tieureencore fi l'on remet en vigueur

Un vieux ftatut qui ordonnoit à chaque

membre deproduire un morceau d'archi-

tecture dans le genre qui plaît le plus à

l'ouvrier c'eft-à-dire de traiter en vers

ou enprofe un fujet d'hiftoire de morale

ou dephyfique relatif aux travaux de

l'ordre car il préfente ce triple point

de vue commehistorique,

fouillons les

plus anciennes chroniquesvérifions les

faits trouvons-en fixons desépoques

marquons un principe déterminons un

but. Comme morale développonsdes

allégories ingénieufes le coloris de la

fiction prête des grâcesà la vérité

éloignons des affemblées cette cruelle

féchereflê quirebute torique

tout le

travail fe borne au cérémonial monotone

de la réceptionà la gêne

cadencée des

repas à la mélodie diflbnante des chan-

fons Se la fatiguanteordonnance des

fantés l'efprit y trouvera fon compte

8c le cœur y gagnerades instructions

avantageufes. Comme phyfique, queles

Maçons ferutateurs zélés des opérations

fecretes de la nature étudient fa mar-

Page 259: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE.155

che qu'une faine philofophie guide leurs

recherches qu'ils fortent enfin de ce

commet) léthargique dans lequel ils font

pour ainfi dire absorbes & qui peut-

être, mes chers frères enfante tous les

rêves que je voudrois voir retrancher.

Que devient l'homme quand il dort

Emporté fut l'aîle des rongesIl vole au pays des menfongesIl touche aux rives de la mort.

Envifageons ce globe immenfe

Image des dieux qui l'ont fait,

La flamme nourrit fa fubftance

Ses feux répandent l'abondance,

Chaque rayon eft un bienfait

Au fein des plus profonds abîmes

Il enfante ces purs métaux

Triftes auteurs de tous les maux

Peres féconds de tous les crimes

Mais qui fagement répandsSur les befoins de la patrie,Forment les liens étendus

Du commerce & ci: l'indullrie

Satisfont à tous ces défirs

.Et tels que des fources fécondes

Vont ranimer dans les deux mondtc

Les arts la gloire & les plaifirs.

Poëme des Saif.ons,

Page 260: L'Étoile Flamboyante Tome 1

6 L'ÉTO IL E

Intelligenti pauca travaillez donc,mes freres pour le bonheur de l'huma-

nité ce n'eft pas vous écartet du but

ou fi toujours attachés à vos emb!êmes

vous voulez en fuivre le fens, rempliffez

donc enfin les conditions qu'ils vous

impofent n'oubliez point la lettre G,

l'initiale de la cinquieme des fciences

elle brille au centre de l'étoile flam-

boyante, parce qu'en eftet, c'eft de la

géométrie que l'on emprunte l'éclat Se

la vérité lumineuse qui fe répand fur toutes

opérations de l'efprit. Souvenez-vous des

fept marches de votre temple elles indi-

quent les fept arts libéraux à l'applica-

tion le célèbre frere Kamfay l'svoit

failï qnand il propofa d'occuper les

Maçons à la formation d'un dictionnaire

général des arts & des fciences qui eût

inftruit le monde & immortalifé fes au-

teurs ce même escalier rappelle auflî

aux Francs- Maçons, les fept vices capi-

taux qu'ils doivent fouler aux pieds. Puif-

fent ils en conféquence pratiquer fans

relâche les vertus eflentieiles qui y font

diamétralement oppofées ce n'eft pas

Page 261: L'Étoile Flamboyante Tome 1

FLAMBOYANTE. 257

afîcz d'en parler fouvent fi vos conver-

fations à cet égardmes chers frères

peuvent fuffire à votrc éloge j'efpere Le

confommer dans le fécond volume par

la collection des discours doue vos ora-

teurs entretiennent la loge chaque chan-

gement de tapi(;crie vous me compre-

nez. J'y joindrai l'efquiire d'un grade

physique qui peut être fera quand

vous le voudrez un but réel, & dont

l'oeuvre feroit bien auiTi noble que le

rétablitïement d'une vieille églife dans un

pays que vous avez quitté, fuivant toute

apparence, «pour n'y revenir jamais ».

Page 262: L'Étoile Flamboyante Tome 1

15S L' É t o i l e &c.

Tablette calculée de la perfection du

nombre ternaire par Ies propriétés

arithmétiques de celui de 9 qui ne

font communes à aucun autre des nom-

bres fimples.

DEUX fois neuf font 18.

Trois fois neuf font 17.

Quatre fois neuf font 3 6.

Cinq fois neuf font 4 5.

Six fois neuf font 5 4.

Sept fois neuf font 63.

Huit fois neuf font 71.

Neuf fois neuf font 81.

De quelque façon que le nombre neuf

le multiplie le réfultat numéraire qui

fe marque en femme au quotient par

J'union des deux chiffres qui fervent à

l'exprimer forme toujours le nombre

jufte de 9, un & huit font neuf, ainfi

des autres jufqu'au complément cubique.

Fin du Tome premier.