les ustensiles berbères. chekoua (baratte) et les beurrée indigène

Upload: idir-mazigh

Post on 06-Jul-2018

221 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

  • 8/17/2019 Les Ustensiles Berbères. Chekoua (Baratte) Et Les Beurrée Indigène

    1/5

    Capitaine L. Jacquot

    Les Ustensiles berbères. Chekoua (baratte) et les beurrée

    indigènesIn: Bulletin de la Société préhistorique française. 1918, tome 15, N. 1. pp. 61-64.

    Citer ce document / Cite this document :

    Jacquot L. Les Ustensiles berbères. Chekoua (baratte) et les beurrée indigènes. In: Bulletin de la Société préhistoriquefrançaise. 1918, tome 15, N. 1. pp. 61-64.

    doi : 10.3406/bspf.1918.11880

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bspf_0249-7638_1918_num_15_1_11880

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_bspf_672http://dx.doi.org/10.3406/bspf.1918.11880http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bspf_0249-7638_1918_num_15_1_11880http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bspf_0249-7638_1918_num_15_1_11880http://dx.doi.org/10.3406/bspf.1918.11880http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/author/auteur_bspf_672

  • 8/17/2019 Les Ustensiles Berbères. Chekoua (Baratte) Et Les Beurrée Indigène

    2/5

  • 8/17/2019 Les Ustensiles Berbères. Chekoua (Baratte) Et Les Beurrée Indigène

    3/5

    62 SOCIÉTÉ

    PRÉHISTORIQUE FRANÇAISE

    pagnes aux

    mœurs

    de jour en

    jour

    modifiées, que nous pourrons

    trouver les secrets

    qui

    nous échappent encore touchant la

    vie

    de

    nos ancêtres préhistoriques.

    Pour

    nous

    faire

    une

    idée

    tant soit

    peu

    juste

    de

    l'existence

    des

    hommes primitifs, il

    nous

    faut vivre au

    contact de

    populations

    demeurées plus ou moins primitives. Celui-ci étudiera

    les

    Néo-

    Calédoniens

    pour surprendre

    le

    secret de la taille de la pierre,

    celui-là fréquentera

    les

    Malgaches

    pour comprendre les monu

    ments

    mégalithiques

    et

    découvrira les roues

    en pierre, cet

    autre

    retrouvera chez les nègres

    du Centre

    africain la

    survivance

    de

    certaines coutumes et une technique archaïque de la métallurgie

    du fer, les Constantinois nous parlerons des Escargotières, etc.

    Etudions donc les berbères

    pour

    nous

    rapprocher

    d'aussi près

    que possible

    de leurs ancêtres,

    en

    nous

    rappelant

    que

    l Afrique

    du

    Nord

    a été habitée par les Egyptiens, les Carthaginois, les

    Romains, les

    Grecs et

    les Vandales,

    et

    que chacun de ces

    peuples a certainement

    laissé

    des traces de son occupation sous

    forme de coutumes, de légendes, de procédés. techniques, etc.

    Je parlerai aujourd'hui de la

    fabrication des

    outres, ces ustens

    iles amiliers

    que

    nos ancêtres les plus lointains ont

    certaine

    ment

    onnus

    mais

    dont

    il ne

    nous

    est

    resté

    naturellement

    aucune

    trace, étant

    donné

    la fragilité de la matière employée.

    Les

    indigènes utilisent cinq espèces

    d outrés

    : 1° la guerba,

    qui

    est

    une peau

    de chèvre garnie de

    ses

    poils, goudronnée

    int

    érieurement

    et

    servant à conserver ou à transporter l'eau —

    ément

    rarissime

    ; 2° le mezoued, peau de chèvre ou de mouton

    tannée, généralement colorée

    en

    rouge, et servant à transporter

    la farine (moulue

    au

    moulin à bras); 3° le chekoua, ou baratte,

    peau de

    mouton

    sommairement tannée

    et servant

    à faire le

    beurre ;

    le djelt ta

    zit

    (ou zek)y outre à huile; 5° le belháni ou

    sac à

    dattes.

    Les Touareg

    (pi.

    de Targui)

    ont

    une sixième

    catégorie de

    récipient,

    dont j'ignore

    le nom tomacheq, mais

    dont

    je pos

    sède

    un exemplaire dans

    mes

    collections et qui sert

    à renfermer

    leurs

    hardes.

    C'est

    une

    peau

    d'assez

    grande dimension, tannée,

    teinte en jaune, ornée

    de

    dessins en çouge et en noir, et

    souvent

    garnie de

    flots en

    cuir

    découpé

    peints

    en

    vert

    et en noir.

    J ai

    vu,

    sur

    les remblais

    des

    Béni

    Ramassés

    (à Con

    s tan tine), un

    groupe de mouquères

    préparer

    les

    chekoua et

    je

    puis indiquer

  • 8/17/2019 Les Ustensiles Berbères. Chekoua (Baratte) Et Les Beurrée Indigène

    4/5

    SOCIÉTÉ

    PRÉHISTORIQUE

    FRANÇAISE 63

    leurs

    procédés

    de travail. En

    effet,

    j'en ai observé les différentes

    phases à

    plusieurs

    reprises,

    et

    j'ai acquis pour mes

    collections

    un

    chekoua

    dont

    j'ai

    suivi

    toutes les transformations.

    Le

    travail

    commence

    dès

    le

    lever du

    soleil.

    Les

    femmes

    apportent à leur atelier

    un

    certain nombre de

    peaux

    de moutons fraîchement écorchés.

    Pendant

    que Tune

    d'elles pile sur

    une grosse

    pierre

    des

    morceaux

    d'écorce

    de

    chêne

    et

    les

    réduit

    en menus fragments rougeâtres, une autre

    prend une peau encore humide

    et

    la racle vigoureusement avec

    un

    caillou légèrement tranchant (une pierre

    dans le

    genre

    des

    Eolithes ) de façon

    à

    la

    débarrasser

    intérieurement de

    toute

    parcelle de matière

    animale adhérente. Le

    cuir

    une fois

    propre,

    elle trempe la

    peau

    dans un

    récipient plein d'eau

    et la racle

    extérieurement

    (côté

    fleur) avec

    un

    vieux couteau ou

    tout

    autre

    morceau

    de

    métal,

    détachant

    ainsi

    la

    laine

    qui

    est

    recueillie

    par une

    troisième ouvrière, lavée

    et mise à

    sécher (1).

    Quand la peau est

    parfaitement nue et

    propre

    des

    deux

    côtés,

    • une quatrième

    mégère

    intervient.

    J'oubliais d'indiquer ce

    détail,

    que ce ne

    sont jamais

    que

    les

    vieilles femmes qui

    se

    livrent à la fabrication des outres,

    les

    jeunes

    ne devant pas

    paraître

    en public et se contentant

    du

    tra

    vail intérieur de la laine : filage et fabrication des

    vêtements.

    Notre

    vieille

    (adjouza)

    prend

    des

    poignées de poussière

    d'écorce

    et en

    frotte

    énergiquement la peau,

    intus

    et foras, travail qui

    a

    pour résultat

    de

    la

    colorer

    d'abord

    en

    rouge,

    puis bientôt en

    brun, et pour but de l'asepsier et de l'assouplir.

    Ce premier travail terminé, une femme s'empare de la

    peau,

    la retourne le côté fleur à

    l extérieur,

    serre

    les

    quatre pattes

    coupées

    ras

    au moyen

    d'une

    ficelle et

    souffle énergiquement par

    l ouverture

    du

    cou

    laissée libre. L'ouverture anale est fermée par

    un

    petit bâton autour

    duquel

    est

    soigneusement

    ficelée la

    peau.

    L'outre commence à

    s enfler,

    se gonfle, acquiert une rotondité

    remarquable, et un tour de corde rapidement fait retient l'air à

    l intérieur. Le chekoua est alors

    laissé au

    soleil

    pour

    sécher,

    après avoir reçu une nouvelle

    frottée

    d'écorce. A la

    fin

    du

    jour,

    l'ustensile

    est

    prêt

    et

    peut

    être

    livré

    à

    l'acheteur.

    Pour faire

    le

    beurre (zebda), les

    mauresques

    entonnent du

    lait

    dans le chekoua, enrayant

    soin de

    ne remplir

    l'appareil

    qu'à

    1) J oubliais d indiquer

    que la peau

    a macéré

    24

    heures préalablement,

    dans

    un bain

    de

    chaux,

    de

    cendre

    ou

    de

    sel.

  • 8/17/2019 Les Ustensiles Berbères. Chekoua (Baratte) Et Les Beurrée Indigène

    5/5

    64 SOCIÉTÉ PRÉHISTORIQUE

    FRANÇAISE

    moitié. Des cordelettes

    en

    alfa ou

    en

    fibre de palmier

    sont

    tt

    achées aux quatre tronçons des pattes et fixées à un trépied

    en

    branchage.

    Une corde sert à

    imprimer

    à cette primitive

    baratte

    un

    mouvement

    oscillatoire

    qui

    suffit

    à

    provoquer

    la

    coagulation.

    Le petit lait

    {leben)

    est

    soigneusement recueilli et sert

    à faire

    une boisson très appréciée, non seulement des indigènes, mais

    aussi de pas mal d'Européens (dont je suis ).

    Absorbé

    en été, le

    leben maintient

    les intestins

    en

    excellent état. Les

    arabes pré

    ten ent

    même

    qu'il

    donne

    des forces

    Quant

    au

    beurre...

    il

    sent toujours plus ou

    moins*

    la peau de

    bouc et demande, pour être

    consommé

    par

    les Européens,

    à

    être battu,

    lavé

    et

    longtemps

    malaxé par les ménagères.

    Chez

    les Touareg,

    le

    beurre se fait en

    mettant le

    lait dans

    une

    sorte

    de

    grosse

    gourde

    en

    bois

    suspendue

    au

    dromadaire,

    dont

    la marche imprime mécaniquement à

    l'appareil

    le balancement

    voulu.

    A Alger,

    les

    citadins

    utilisaient jadis

    un

    récipient cylindrique,

    en terre cuite, arrondi aux

    deux

    extrémités, ouvert au milieu de

    sa

    face supérieure

    pour permettre

    l introduction

    du

    lait et la sor

    tie du beurre, et pourvu en

    haut

    de deux anses où se fixaient les

    cordes nécessaires

    au balancement.

    Cet ustensile tend à dispa

    raître très rapidement.